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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 032 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 16 juin 2008

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Aujourd'hui, nous nous réunissons conformément à l'ordre de renvoi du lundi 16 juin 2008 pour étudier le projet de loi C-60, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale (cour martiale) et une autre loi en conséquence.
    Comparaîtront à titre de témoins au cours de la première heure, le général Kenneth Watkin, juge-avocat général; le colonel Patrick Gleeson; et le colonel Michael Gibson.
    Monsieur, je vous laisse la parole et ensuite, il y aura une période de questions. Je suis certain que vous connaissez le fonctionnement du Comité et espérons que vous serez en mesure de répondre à toutes les questions que les membres du Comité pourront vous poser.
    Je voudrais tout d'abord vous remercier de m'avoir donné aujourd'hui l'occasion de comparaître devant le Comité. À titre de juge-avocat général, j'exerce mes responsabilités législatives sur tout ce qui touche à l'administration de la justice militaire. Ma comparution me donne aussi l'occasion d'expliquer le contenu du projet de loi C-60 et son fonctionnement prévu.
    À titre de juge-avocat général, je ne suis pas uniquement préoccupé par la bonne organisation et l'efficacité du système de justice militaire; ma responsabilité est également de veiller à l'équité du système. Cette responsabilité s'étend aux impacts que les affaires en particulier ont sur le système de justice militaire dans son entier. Comme le regretté juge en chef Lamer l'a noté dans son rapport d'examen de 2003 portant sur la justice militaire: « Le Canada s'est doté d'un système très solide et équitable de justice militaire dans lequel les Canadiens peuvent avoir confiance ». Ce projet de loi est conçu pour renforcer le cadre législatif de la justice militaire.

[Français]

    Monsieur le président, la nature distincte du système de justice militaire a été reconnue par la Cour suprême du Canada, et l'existence d'un système de tribunaux militaires ayant compétence sur des affaires qui sont régies par le droit militaire a été reconnue constitutionnellement par la Charte canadienne des droits et libertés.
    La Loi sur la défense nationale a établi le code de discipline militaire qui prévoit un système de tribunaux militaires à deux niveaux: les procès sommaires et les cours martiales. Les procès sommaires sont présidés par des officiers de la chaîne de commandement, et leur compétence de juger du type d'infraction et leur pouvoir d'infliger des peines sont limités. Les procès sommaires, comme leur nom l'indique, sont de nature sommaire. Les avocats ne sont normalement pas présents aux procès, et ceux-ci traitent d'incidents disciplinaires moins sérieux. Ces incidents se rapportent le plus souvent à la formation militaire, à la tenue et au maintien, mais peuvent aussi inclure des voies de fait, des infractions impliquant les drogues et d'autres infractions reliées à la discipline au niveau de l'unité.

[Traduction]

    Alors que la plupart des infractions d'ordre militaire sont jugées sommairement, il est clair que quelques infractions doivent être jugées par le système plus formel de cour martiale. Les infractions d'ordre militaire de nature grave peuvent être renvoyées directement à une cour martiale, qui est semblable à un procès criminel civil.
    Il existe présentement quatre types de cour martiale. Cependant, le projet de loi C-60 simplifiera la structure des cours martiales et réduira leur nombre à deux. Les juges militaires président dans les causes présentées en cour martiale. Une cour martiale peut être constituée d'un juge militaire siégeant seul, d'un juge militaire siégeant avec un comité de membres similaire au procès devant jury civil. Au cours de tels procès, il y a un procureur de la poursuite indépendant et l'accusé est représenté par un avocat de la défense, lequel peut être militaire ou civil.
    La cour martiale remplit une autre fonction indispensable dans notre système de justice. Pour la plupart des infractions d'ordre militaire, on doit offrir à l'accusé le choix d'être jugé devant la cour martiale. Cette mesure de protection cruciale permet à un militaire de choisir un procès devant un juge militaire et d'être représenté par des avocats entièrement qualifiés. En même temps, si un commandant débute un procès sommaire et détermine ultérieurement que l'affaire devrait être renvoyée en cour martiale, il peut le faire. Le choix de procéder par cour martiale fournit donc un mécanisme essentiel qui vise à garantir que l'accusé est traité avec équité et à protéger les intérêts plus étendus des militaires et de la société canadienne.
    Les décision des cours martiales peuvent faire l'objet d'un appel devant la Cour d'appel de la cour martiale, laquelle est composée de juges civils de la Cour fédérale et de juges de cours supérieures ayant compétence en matière criminelle. On peut interjeter appel des décisions de la Cour d'appel de la cour martiale devant la Cour suprême du Canada.
    Un attribut essentiel du système de justice militaire est l'équité. Encore une fois, citant le regretté juge en chef Lamer, nous devrions nous efforcer « d'offrir un meilleur système et non simplement un système dont la constitutionnalité ne peut être contestée. »
    Afin de veiller à ce que les membres des Forces canadiennes puissent continuer d'être traités avec équité, il est nécessaire d'apporter de temps à autre des ajustements au système de justice militaire pour répondre aux jugements rendus par les cours d'appel.
(1535)

[Français]

    Monsieur le président, le 24 avril 2008, dans l'affaire R. c. Trépanier, la Cour d'appel de la cour martiale du Canada a déclaré que le pouvoir exclusif du directeur des poursuites militaires de déterminer le type de cour martiale viole les droits constitutionnels de l'accusé prévus à la Charte. La cour a aussi déclaré inopérante la disposition qui permet à l'administrateur de la cour martiale de convoquer les cours martiales. La convocation d'une cour martiale est une étape indispensable en vue de mener une affaire à un procès. De façon plus significative, la cour a déclaré ces dispositions de la Loi sur la défense nationale inopérantes. La cour n'était pas disposée à suspendre les effets de sa décision.
    Par conséquent, ce projet de loi est présenté de façon prioritaire et il a été conçu pour répondre à l'urgence de la situation créée par l'annulation des effets de ces dispositions de la Loi sur la défense nationale.

[Traduction]

    Bien que des efforts aient été faits pour continuer en cour martiale les affaires qui ont déjà été convoquées, aucune nouvelle cour n'a été convoquée au cours des sept dernières semaines. L'absence de réponse à l'incapacité de pouvoir mener des procès en cour martiale aura pour effet de nuire à l'administration du système de justice militaire et au maintien de la discipline, de la bonne organisation et du moral, éléments sur lesquels dépend l'efficacité opérationnelle des Forces canadiennes.
    De plus, des intérêts sociétaux importants sont en jeu puisque les accusés ne bénéficieront pas du droit d'être jugés dans un délai raisonnable, droit qui leur est reconnu par la Constitution. Par conséquent, des infractions de nature grave pourraient ne pas être punies et dans ces cas, les victimes et la société ne pourront pas constater que justice a été rendue.
    Une demande d'autorisation pour porter en appel l'affaire Trépanier a été présentée à la Cour suprême du Canada, de même qu'une requête en sursis d'exécution de la décision. Les cours sont les instances par lesquelles on peut répondre aux questions constitutionnelles importantes. Cependant, il faut noter qu'il est improbable qu'un appel apporte une réponse en temps opportun à plusieurs questions soulevées par l'affaire Trépanier. La réponse législative donnera la certitude requise dans les meilleurs délais.

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais répondre directement à la question qui peut préoccuper les membres du comité. C'est la raison pour laquelle la demande d'adoption du projet de loi C-60 est présentée de façon prioritaire au Parlement alors qu'en même temps, une demande d'autorisation d'en appeler a été faite devant la Cour suprême du Canada. Il est important de comprendre que même si le projet de loi et l'appel proviennent du même jugement, ils demeurent deux questions séparées et distinctes. Si la Cour suprême du Canada accueille la demande de permission d'en appeler, elle traitera des questions constitutionnelles soulevées par l'affaire Trépanier.
    D'un autre côté, le projet de loi fait en sorte que le système de justice militaire puisse fonctionner le plus tôt possible et pour l'avenir. Il veille à ce qu'on réponde aux effets de la décision et aux questions de politique reliées et plus larges. En deux mots, le projet de loi C-60 ajoutera clarté, certitude et stabilité au processus de convocation des cours martiales.
(1540)

[Traduction]

    Je voudrais vous donner un bref aperçu du contenu et des effets de ce projet de loi.
    Ce projet de loi simplifie la structure de la cour martiale, établit un cadre détaillé pour le choix du type de cour martiale devant juger un accusé et renforce l'efficacité et la fiabilité du processus de décision. De façon plus particulière, le projet de loi, comme on l'a signalé, réduira le nombre des types de cour martiale de quatre à deux; il élargira la compétence de la cour martiale permanente pour inclure toutes les personnes qui sont justiciables du code de discipline militaire; il augmentera les pouvoirs de la cour martiale permanente d'infliger des peines allant de l'emprisonnement de moins de deux ans à l'emprisonnement à perpétuité; et limitera les pouvoirs de punition d'une cour martiale qui juge un civil à l'emprisonnement et à l'amende, ou à l'une de ces deux peines.

[Français]

    En ce qui a trait au type de cour martiale devant juger un accusé, le projet de loi prévoira les infractions de nature grave qui doivent être jugées par la cour martiale générale et prescrira les cas où les infractions relativement mineures doivent être jugées par la cour martiale permanente. Dans tous les autres cas, il permettra à l'accusé de choisir entre un procès devant juge seul ou devant un comité de la cour martiale.
    En ce qui concerne le processus décisionnel de la cour martiale, le projet de loi accordera aux juges militaires le pouvoir de décider des questions préliminaires au procès à un stade qui survient plus tôt que le processus et renforcera la sûreté des verdicts en exigeant du comité de la cour martiale générale l'unanimité des verdicts tels que ceux de culpabilité et d'acquittement.

[Traduction]

    Monsieur le président, les modifications proposées ont pour but de répondre clairement et de façon décisive aux préoccupations de la Cour d'appel de la cour martiale. Le projet de loi C-60 répond directement aux questions soulevées dans la décision Trépanier, mais il n'est pas limité aux questions plus étroites qui découlent des faits de cette affaire.
    Par exemple, la décision dans l'affaire Trépanier porte sur une infraction d'ordre militaire prévue à l'article 130 de la Loi sur la défense nationale, lequel incorpore des infractions criminelles civiles. La capacité de juger les infractions d'ordre militaire prévues à l'article 130, comme le trafic de drogue, est indispensable au maintien de la discipline. Cependant, le droit militaire ne fait pas de distinction entre les infractions qui sont incorporées et celles qui sont spécifiquement énumérées, comme la désobéissance à un ordre légitimement donné, qui peut donner lieu à une peine d'emprisonnement à perpétuité. Ce projet de loi ne se limite pas, par conséquent, aux infractions incorporées, mais assure plutôt les mêmes droits élargis à tous les accusés, qu'ils soient accusés d'infractions incorporées ou d'infractions spécifiquement énumérées dans la Loi sur la défense nationale.
    Conformément à l'objectif de clarifier le système, le projet de loi donne également l'occasion de clarifier certains dispositions de la Loi sur la défense nationale par suite du jugement rendu par la Cour d'appel de la cour martiale dans l'affaire R. c. Grant. Contrairement à la décision rendue dans l'affaire Trépanier, la cour n'a pas conclu à une violation des droits prévus par la Charte, mais elle a déclaré qu'en raison du temps écoulé, la question qui devait être jugée par une cour martiale conformément à la loi devait être jugée à nouveau par voie sommaire. La cour a noté qu'elle offrait une solution qui répondait aux faits et aux circonstances de cette affaire.
    À titre de responsable du système de justice militaire, je me dois non seulement de considérer les résultats de procès spécifiques, mais aussi de me préoccuper de leurs effets sur le système de justice militaire plus vaste. Par exemple, la décision dans l'affaire Grant qui forçait la tenue d'un procès sommaire au lieu d'une cour martiale a créé beaucoup d'incertitude concernant le droit des accusés de choisir le type de procès qu'ils veulent subir et concernant la capacité du commandant de renvoyer une affaire devant la cour martiale avant ou durant le procès sommaire. L'importance de ces mécanismes pour assurer l'équité envers l'accusé et protéger les intérêts plus vastes des forces militaires et de la société canadienne a été soulignée plus tôt dans mon exposé.
    Le projet de loi C-60 indiquera clairement que le pouvoir de la Cour d'appel de la cour martiale est d'ordonner la tenue d'un nouveau procès devant une cour martiale; que le devoir d'agir avec célérité sous le régime du code de discipline militaire s'applique dès que l'accusation est portée et que la période de prescription d'un an est une disposition juridictionnelle qui renforce la nature sommaire de ces procédures.
    Monsieur le président, le processus de la cour martiale au sein du système de justice militaire constitue un outil indispensable par lequel les objectifs fondamentaux du système peuvent être accomplis. À titre de juge-avocat général, j'estime que modifier la Loi sur la défense nationale de façon prioritaire est nécessaire pour apporter la clarté, la certitude et la stabilité nécessaires à cette question. Ce projet de loi augmentera l'équité au sein du système de justice militaire, tant du point de vue des accusés que du public canadien. En prévoyant une disposition législative qui permet la convocation d'une cour martiale, il garantira que justice puisse continuer d'être rendue aussi bien pour les accusés que pour les victimes.
    Monsieur le président, afin laisser suffisamment de temps pour répondre à vos préoccupations, je mets fin à mon exposé. Deux membres de mon personnel, le colonel Pat Gleeson et le lieutenant-colonel Michael Gibson, m'accompagnent aujourd'hui pour vous aider dans l'étude du projet de loi C-60.
(1545)

[Français]

    Je vous remercie. Je serai heureux de répondre à toutes vos questions.

[Traduction]

    Il me fera plaisir de répondre à toutes vos questions
    Merci beaucoup, général.
    Nous allons commencer un tour de sept minutes par M. Wilfert.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, général, et à vos collègues, de votre présence ici aujourd'hui.
    Comme vous le savez, nous sommes également saisis du projet de loi C-45 qui a été présenté à la Chambre en octobre 2007. Dans la décision qui a été rendue dans l'affaire Trépanier, la cour a fait remarquer que cette question — qui existe depuis un certain temps et qui a certainement refait surface dans l'affaire Nystrom concernant l'équité en vertu de l'article165.14 — aurait pu avoir été réglée à ce moment-là.
    Pouvez-vous nous dire pourquoi nous n'avons pas tout simplement réglé cette question à ce moment-là, si l'on considère qu'il y a maintenant une certaine urgence à faire adopter ce projet de loi?
    Je serai heureux de le faire, et je vous remercie de l'occasion de clarifier cette question.
    Je fais référence à l'examen indépendant du juge en chef Lamer réalisé en 2003 et qui était exigé par la loi, suite au projet de loi C-25 adopté en 1999.
    Premièrement, je pense qu'il est important de souligner que le système de justice militaire a fait l'objet d'un examen très poussé au cours de la dernière décennie. Dans l'après-Somalie, nous avons eu l'enquête sur la Somalie et ses recommandations. Nous avons fait l'objet de deux rapports par le juge en chef Dickson. Ces rapports ont donné lieu à un certain nombre de recommandations, dont la grande majorité ont été acceptées par le gouvernement. Le projet de loi C-25 a été adopté et est entré en vigueur en 1999.
    Fait intéressant, une des recommandations du second rapport Dickson portait sur la définition du rôle de la nouvelle convocation des cours et du rôle du DPM. Elle laissait entendre que le DPM recommande... à l'époque le rapport parlait du juge militaire en chef, mais lorsque le projet de loi a été rédigé, c'est devenu l'administrateur de la cour martiale, le type de procès. Évidemment, c'est un des articles qui ont été supprimés.
    En 2003, nous avons eu l'examen par le regretté juge en chef Lamer. Pour mettre cet examen en contexte — évidemment, un examen complet et détaillé —, il a conclu, comme je l'ai dit dans mon exposé, que « le Canada s'est doté d'un système très solide et équitable de justice militaire dans lequel les Canadiens peuvent avoir confiance ». Il a noté qu'il y avait quelques domaines qui pourraient être améliorés et a parlé de « quelques changements ».
    Il n'y avait rien dans son rapport qui indiquait que ces recommandations étaient de nature constitutionnelle — en d'autres mots, des progrès touchant le système de justice et des recommandations. Les recommandations présentées dans le rapport Lamer ont fait l'objet d'un examen poussé. Il y avait 57 recommandations qui traitaient de la cour martiale et du système de discipline en soi, et 52 d'entre elles ont été acceptées en totalité ou en partie. Deux des recommandations qui n'ont pas été acceptées étaient les recommandations 23 et 25, qui ont été incorporées dans le présent projet de loi C-60.
    La raison pour laquelle elles n'ont pas été acceptées, c'est qu'on croyait que le système fondé sur quatre types de cour fonctionnait bien. Il assurait la souplesse qui permettait de mieux répondre aux besoins de discipline des différents types de cour et de pouvoirs d'infliger des peines — le nombre de membres du Comité, par exemple. Une cour martiale disciplinaire comptait trois membres alors qu'il y en avait cinq dans le cas d'une cour martiale générale.
    La décision Nystrom rendue en 2005 par la Cour d'appel de la cour martiale était une décision non exécutoire. Elle n'a pas réglé la question dans son examen de certains des défis que posait le fait d'offrir à l'accusé le type de cour qu'il voulait. Plus spécifiquement, la cour a indiqué qu'elle ne traitait pas du caractère constitutionnel, mais elle a exprimé une vive préoccupation à l'égard de cette question et de la disposition en cause, et elle a indiqué sa préférence dans sa décision pour ce type de processus, qui est semblable à ce que l'on retrouve dans le rapport Lamer. Toutefois, à ce moment-là, il y avait une décision antérieure unanime et exécutoire de la Cour d'appel de la cour martiale. Elle a confirmé, au milieu des années 1990, que la chaîne de commandement — en d'autres mots, quelqu'un qui n'était pas aussi indépendant que le directeur des poursuites militaires — pouvait choisir le type de cour, et que cela ne violait pas la Charte. Alors, nous avions une décision non exécutoire dans l'affaire Nystrom et une cause antérieure exécutoire.
    De plus, peu de temps après cette affaire, il y a eu une autre affaire dans laquelle la Cour d'appel de la cour martiale a indiqué qu'il y avait de bonnes raisons, du point de vue administratif, qui expliquent pourquoi il pourrait y avoir un problème d'avoir une cour martiale générale comptant cinq membres dans une région éloignée. Lorsque cette question a été débattue pendant le procès — lorsque l'affaire Trépanier est arrivée et que le juge qui présidait le procès a accepté l'affaire exécutoire des années 1990 et non la décision non exécutoire rendue dans l'affaire Nystrom —, cette décision a fait l'objet d'un appel devant la Cour d'appel de la cour martiale, et c'est là que nous avons eu la décision.
(1550)
    Par votre intermédiaire, monsieur le président, le gouvernement propose ces modifications législatives. Il cherche également à obtenir l'autorisation d'interjeter appel devant la Cour suprême du Canada. De toute évidence, nous appuyons l'objectif du projet de loi. Nous allons proposer un examen parlementaire obligatoire au bout, disons, de deux ans — et encore une fois, vous pourrez faire des observations à cet égard. Cela a été fait dans d'autres cas. En fait, selon la situation de l'appel qui doit être entendu, il serait obligatoire pour la Chambre, ou le Sénat, ou les deux, d'examiner la loi plutôt que d'avoir recours à une disposition de temporarisation, parce que nous pensons qu'il est important que, si l'appel n'a pas été entendu, nous donnions au moins au Parlement l'occasion d'exercer son droit de procéder à un examen.
    Avez-vous des observations à ce sujet?
    Le système de justice militaire fonctionne déjà sous l'empire d'un système d'examen. Dans le projet de loi C-25, il y avait évidemment une exigence relative à un examen quinquennal et cela a donné lieu aux recommandations du juge en chef Lamer. Je fais également un examen chaque année du système de justice militaire et je présente un rapport au ministre qui le dépose au Parlement. Alors, pour ce qui est d'avoir un système d'examen,...
    Ce n'est rien de nouveau.
(1555)
    ... ce n'est pas quelque chose d'unique ou de problématique dans l'ensemble, selon la façon...
    De toute évidence, notre inquiétude, c'est que s'il y avait une disposition de temporarisation et que la loi expirait, nous nous retrouverions à la case départ. Alors, c'est pourquoi nous voulons faire l'examen.
    Et si le gouvernement obtenait l'autorisation d'interjeter appel, est-ce que cela aurait des effets quelconques sur la situation de ce projet de loi ou de ces réformes? Je suppose que oui. Le gouvernement irait tout de même de l'avant avec son appel. La loi serait là. Et alors, je suppose que tout dépendrait de la décision de la cour.
    Eh bien, je ne peux commenter l'appel et ce que la cour pourrait dire.
    Oui.
    Je pense que la façon de l'exprimer, c'est que les modifications ne sont pas conçues comme une mesure temporaire.
    Et, évidemment, nous sommes confrontés avec le fait que dans l'affaire Trépanier, la Cour d'appel de la cour martiale a dit clairement que les dispositions constitutionnelles étaient inopérantes.
    Dans une perspective de politique, il est clair que parmi les options disponibles, ce n'était pas le choix de prédilection en 2003. Toutefois, nous avons devant nous le rapport Lamer de 2003. Nous avons une indication claire provenant de la décision Trépanier elle-même — d'abord de la décision Nystrom et maintenant de la décision Trépanier — pour ce qui est d'une préférence.
    Nous avons également eu une expérience plus contemporaine avec les cours devant comité et je pense que c'est une des choses qu'il faut clarifier pour le compte rendu: la décision Trépanier a indiqué qu'il n'y a pas eu de cours devant comité et elle se fondait sur l'information contenue dans le rapport Lamer. Mais il y en a eu. En 2006 et 2007, 9 p. 100 de toutes les cours martiales étaient des cours devant comité. Et l'an dernier, 20 p. 100 de toutes les cours martiales étaient, dans les faits, des procès de type jury.
    J'ai essayé d'établir des données statistiques semblables pour le système de justice civil. Le plus proche que je suis arrivé, c'est autour de 2 p. 100, mais les données sont difficiles à établir. Je pense ne pas me tromper en disant que c'est nettement inférieur à 20 p. 100 des procès.
    Merci de cette information.
    Merci, monsieur.
    Monsieur Bachand.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à toute l'équipe juridique des Forces canadiennes. Je veux dire au colonel et au général que la menace que j'ai proférée plus tôt, soit de ne m'exprimer qu'en présence de mon avocat, n'était pas sérieuse.

[Traduction]

    Je dois répéter cela en anglais. La menace que j'ai proférée que je ne voudrais pas...
    Des voix: Oh, oh!

[Français]

    M. Claude Bachand: Mon général, plus tôt, vous avez longuement expliqué la différence entre votre appel en Cour suprême et le projet de loi devant nous aujourd'hui. Celui-ci traite d'une question urgente. On nous l'a d'ailleurs rapidement démontré. Nous sommes d'accord sur le fait qu'il existe divers degrés d'urgence et que la décision Trépanier exige des applications plus spécifiques de la Loi sur la défense nationale. Je suis aussi d'accord pour dire que vous avez apporté plus de clarté, de certitude et de stabilité.
    En ce qui a trait à la Cour suprême, je ne comprenais pas qu'on dépose un projet de loi et qu'on poursuive ces démarches auprès de la Cour suprême. Vous avez dit que la décision Trépanier soulevait des questions constitutionnelles.
    Quelles questions constitutionnelles la décision Trépanier a-t-elle soulevées?

[Traduction]

    Les difficultés portaient principalement sur la question du droit de l'accusé de présenter une défense pleine et entière. Le système de justice militaire est reconnu au plan constitutionnel par le paragraphe 11f) de la Charte. Cette disposition établit le droit pour l'accusé à un procès devant jury dans le système de justice civil lorsque la peine maximale prévue pour l'infraction dont il est accusé est un emprisonnement de cinq ans ou une peine plus grave. Il y a une exception pour les infractions relevant de la justice militaire en ce sens qu'elles sont jugées par des tribunaux militaires.
    Lorsque la Cour d'appel de la cour martiale a examiné la question de la différence entre les cours militaires devant comité — si je peux utiliser cette expression — et les procès devant jury civils, elle a dit que le droit de présenter une défense pleine et entière dépendait de l'article 7 de la Charte et, plus spécifiquement, du paragraphe 11d), « défense pleine et entière ». La cour a déterminé que le fait de donner à l'accusé la capacité de choisir le type de procès était lié à sa capacité d'assurer pleinement sa défense.
    Alors, l'accent a porté sur cet argument plus vaste d'un droit à un procès devant jury en vertu d'un système militaire plutôt que sur l'exception prévue dans le paragraphe 11f). Voilà le coeur de la décision. Dans l'analyse, il s'agit d'un parallèle avec le droit de choisir son procès dans le système de justice civil où, dans certaines circonstances, un accusé peut choisir entre un procès devant jury ou un procès présidé par un juge seul.

[Français]

    Une décision de la Cour suprême peut-elle entraîner une résiliation partielle du projet de loi à l'étude? La Cour suprême pourrait-elle aller jusqu'à décider qu'un article donné du projet de loi C-60 ne s'applique pas? Autrement dit, les décisions qu'on prendra aujourd'hui peuvent-elles être amendées par la Cour suprême?
(1600)

[Traduction]

    Je réponds à une question hypothétique; c'est un des problèmes. Dans une question qui est renvoyée devant la Cour suprême, cette dernière peut examiner la législation existante ainsi que la législation antérieure. Mais c'est à la cour d'en décider, et les gens débattent de la question devant la cour en ce qui a trait à la façon de...

[Français]

    Par contre, vous êtes le plaignant. Si vous retiriez votre appel devant la Cour suprême, on aurait l'assurance que le projet de loi reste intact. Mais lorsque vous allez devant cette cour, elle peut étendre ses réflexions à d'autres projets de loi ou activités. Je ne suis pas encore convaincu que vous ayez fait une bonne affaire en portant votre cause en appel devant la Cour suprême.
    Je ne veux pas en faire un débat d'avocat parce que je n'en suis pas un et j'ai parfois un peu de difficulté à comprendre. Je vais passer à autre chose et vous poser une autre question.
    Vous avez semblé très favorable à la proposition de mon collègue M. Wilfert au sujet d'une révision obligatoire. C'est une surprise pour moi parce que je pensais que tous les députés de l'opposition adhéraient à la clause crépusculaire. Une clause crépusculaire a beaucoup plus d'impact. Si on ne fait pas la révision telle que décrite à la clause crépusculaire, le projet de loi devient inopérant et caduc. Je ne pense pas qu'une révision obligatoire oblige les gens à modifier le projet de loi. On peut bien faire une révision obligatoire, mais que fera-t-on si ça ne fonctionne pas?
    Je pense toujours à l'exemple de la Charte des anciens combattants, qu'on a adoptée à toute vitesse. Quelques mois après, on s'est rendu compte qu'on avait d'énormes problèmes. Je tiens à la clause crépusculaire. Selon vous, une telle clause est-elle incompatible avec une révision obligatoire? Il peut y avoir une révision obligatoire, mais on peut ajouter ensuite une clause crépusculaire comme garantie supplémentaire. Légalement, cela a-t-il du sens?

[Traduction]

    Une de mes préoccupations, en tant que responsable du système de justice militaire, concernant la disposition de temporarisation, c'est que l'objectif précis de ce projet de loi est de permettre au système de fonctionner avec clarté, certitude et stabilité. Le problème posé par la disposition de temporarisation, c'est que cela pourrait nous ramener dans la même situation où la capacité d'entendre les affaires dans les cours est paralysée pour un certain nombre de raisons, pour ce qui est de l'extinction automatique de la loi à un certain moment. Ma préoccupation, c'est que je reviendrai ici dans un an ou deux avec le même problème, essayer de faire fonctionner le système.
    Pour ce qui est d'être en mesure de convoquer des cours, de garantir à l'accusé qu'il n'y aura pas de retard dans le procès de sorte que ses droits seront respectés, et de faire en sorte que les victimes voient que justice est rendue, le présent projet de loi vise à ajouter des droits pour les accusés. Il a un objectif positif et c'est là ma préoccupation.
     Monsieur Bachand, vous avez droit à une dernière question brève.

[Français]

    Que nous suggérez-vous de faire si nous, les législateurs, nous nous trompons aujourd'hui? Si nous nous trompons à cause de la rapidité avec laquelle nous aurons adopté le projet de loi, quel recours aurons-nous pour essayer de corriger nos erreurs? Ce ne sera pas mieux si nous nous trompons et que nous découvrons certains aspects ingérables dans quelques mois. Que ferons-nous alors?

[Traduction]

    Il est certain que le projet de loi est conçu pour fournir la stabilité nécessaire pour faire en sorte que le système fonctionne. Toute loi qui est adoptée pourra être contestée devant la cour martiale. Cela arrive tous les jours dans nos cours martiales. Notre avocat de la défense soulève des objections s'il en voit, les soumet à la cour, et, évidemment, c'est de cette façon que nous nous sommes retrouvés ici avec l'affaire Trépanier. Tout cela fait partie du processus.
    Merci, monsieur.
    C'est au tour du NPD pour sept minutes.
(1605)
    J'ai deux questions à poser et mon collègue, M. Comartin, en a également. J'espère que nous pourrons toutes les poser dans les sept minutes que nous avons.
    Général Watkin, dans la décision Trépanier, la Cour d'appel de la cour martiale a dit qu'elle ne voyait pas la nécessité d'une solution législative. Je cite le paragraphe 117:
... il y a également une solution pratique disponible dans l'intervalle qui peut être facilement appliquée à toutes les accusations. En vertu de l'article 130 de la LDN, l'accusé peut se voir offrir le choix de son juge des faits. Il n'y aura pas d'empêchements légaux à cette façon de procéder puisque l'article 165.14 qui donne le droit à la poursuite sera inopérant en ce qui a trait à ces infractions.
    Dans une séance d'information technique antérieure, on a dit à mon personnel que cette partie du jugement était contradictoire et qu'il était impossible de convoquer la cour martiale à l'heure actuelle sans modifier la Loi sur la défense nationale. Pouvez-vous réagir à cette partie du jugement — la partie que j'ai lue — et nous dire pourquoi la solution intérimaire proposée par la cour est jugée insatisfaisante?
    Je m'intéresse aux effets évidents des décisions. En particulier, il est clair que le jugement précise que la disposition qui permet la convocation des cours est inopérante, alors il a invalidé cet article. Le problème que cela a créé, c'est qu'il n'y a pas d'autre article ou disposition habilitante dans la Loi sur la défense nationale qui permette de le faire.
    J'ai dit dans mon exposé que les cours qui avaient déjà été convoquées ont poursuivi leurs travaux. Je vais vous donner un exemple de certains des défis que cela a créés.
    Dans un cas, la question du choix du procès a été soulevée par l'accusé et, après avoir entendu l'affaire, le juge militaire a tout simplement continué sans donner le choix à l'accusé.
    Dans un autre cas, le juge militaire a jugé dans une cour martiale disciplinaire qu'il devait accorder à l'accusé le droit de choisir la forme de procès qu'il voulait subir et a mis fin à l'instance. Il s'agissait d'une cour martiale disciplinaire, une de nos cours devant comité. Alors, quand l'accusé a choisi une cour martiale permanente, il a mis fin à la procédure et l'a renvoyée.
    Dans un autre cas, le juge militaire a décidé d'ordonner une suspension conditionnelle de l'instance et a renvoyé l'affaire.
    Êtes-vous en quête de certitude?
    Je suis en quête de certitude. Ce qui m'inquiète dans tout cela, c'est qu'il n'y a pas de disposition habilitante claire pour le directeur des poursuites militaires pour qu'il puisse offrir le choix. Je crains que ce que nous faisons manque de cohérence, manque de clarté. Nos cours se débattent avec ce problème et cela finira pas ouvrir la porte à des appels.
    Merci beaucoup.
    Il y a une autre chose que j'aimerais que vous fassiez. On nous a dit initialement qu'à la présente étape de modification, nous ne traiterions que de la décision Trépanier et maintenant nous traitons également de la décision Grant. Pourriez-vous nous expliquer de manière plus complète pourquoi vous avez décidé d'inclure également la décision Grant?
    La décision Grant était une décision défavorable. Une demande d'autorisation de porter cette décision en appel a été présentée à la Cour suprême qui a refusé. Toutefois, comme il ne s'agissait pas d'une question constitutionnelle, ce n'était pas une question d'invalider des articles. Et dans ce cas, la cour a noté qu'elle fournissait une solution adaptée spécifiquement à ce cas. Le défi auquel je suis confronté, à titre de responsable du système de justice militaire, c'est que je dois regarder l'application plus large d'une décision, comme la décision Grant, en ce qui concerne tout l'ensemble législatif.
    Alors, comme je l'ai dit dans mon exposé, une des caractéristiques de notre système de justice à deux volets, c'est que l'accusé dans un procès sommaire peut demander à être représenté par un avocat et que sa cause soit entendue par un juge indépendant ou par un comité. Ou, pendant le procès sommaire, l'officier habilité à juger qui entend la preuve peut décider que c'est une question qui relève véritablement de la cour martiale, qu'il faut une audience complète. Ordonner la tenue d'un procès sommaire ne tient pas compte des questions plus vastes qui pourraient être soulevées une fois que le procès sommaire débute.
    Alors, le but des modifications, comme cela s'est toujours fait — et c'est le premier cas à ma connaissance où la décision a été d'ordonner un procès sommaire — , c'est que la Cour d'appel de la cour martiale ordonnera, en fait, la tenue d'une nouvelle cour martiale. Alors, la solution de rechange, c'est que vous obtiendriez un procès complet avec tous les droits et privilèges que vous devez offrir.
    Et les autres modifications viennent clarifier différentes parties de la loi. Par exemple, une modification porte sur l'expression  « après qu'une accusation » a été déposée, mais, en fait, vous ne pouvez pas avoir une accusation à moins qu'elle ait été déposée. Voilà jusqu'où va la clarté
(1610)
    Merci beaucoup.
    Mon collègue, M. Comartin.
    Monsieur Comartin.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux revenir à une question soulevée par M. Bachand. Avez-vous obtenu l'autorisation de la Cour suprême d'interjeter appel de la décision Trépanier?
    Non, pas encore.
    La demande a-t-elle été faite?
    Elle a été faite.
    Alors, supposons qu'elle est accordée et que l'appel va de l'avant, est-il exact qu'il n'y a aucune façon que le projet de loi C-60 s'applique au cas Trépanier? Son application n'est pas rétroactive; nous ne pouvons pas utiliser le projet de loi C-60 pour essayer de mettre à jour l'affaire Trépanier.
    La cour pourrait ordonner un nouveau procès, par exemple. Cela pourrait être le résultat.
    Mais, encore là, le projet de loi C-60 sera entré en vigueur...
    ... après les faits qui sont survenus ou qui ont mené aux accusations dans l'affaire Trépanier. Pouvez-vous lui donner une valeur rétroactive? Le projet de loi C-60, dans sa forme actuelle, n'est pas rétroactif.
    Oui, il nous faudrait examiner la situation pour voir si les accusés seraient jugés en vertu des lois en vigueur au moment des faits. Mais pour être honnête avec vous, il me faudra examiner cette question en fonction du résultat.
    Si l'appel est accueilli, la Cour suprême devra décider qu'effectivement, le projet de loi C-60 n'est pas nécessaire.
    Non, pas nécessairement. En fait, pas du tout. Je ne crois pas du tout qu'elle devrait faire cela. Elle examinerait la question et déterminerait...
    Mais, général, elle devra décider que la Charte ne s'applique pas au point où l'accusé a le droit de choisir.
    Elle chercherait d'abord et avant tout à voir s'il y a un problème constitutionnel. Et alors, la réponse pourrait être qu'en fait, la question ne se pose même pas. Alors, le procès se poursuivrait en vertu des dispositions antérieures.
    Mais il y a des dispositions transitoires dans la loi qui portent sur les procès en cours. Et la raison pour laquelle j'hésite un peu, c'est que certaines de ces dispositions transitoires permettraient des choses comme des décisions prises à la majorité et certaines autres mesures de protection. Alors, c'est...
    Très bien, la Cour suprême pourrait dire à l'organe législatif, vous avez le temps de corriger cela; vous l'avez fait, alors, nous allons permettre qu'elle s'applique. Alors, c'est possible.
    Je ne fais que répondre à ma propre question, monsieur le président.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Joe Comartin: Le processus n'est pas clair pour moi. Vous dites que nous aurions pu contourner la préoccupation qui a été exprimée dans l'affaire Trépanier au palier de l'appel en reconnaissant à l'accusé le droit de choisir, mais nous ne pouvions pas faire cela en ce qui a trait à l'établissement de la cour de la cour martiale.
    Je suis désolé, pourriez-vous répéter?
    Le lieutenant-colonel Gibson est d'accord avec moi.
    Il y avait deux parties dans la contestation constitutionnelle. La première était d'établir une cour de la cour martiale en premier lieu. Alors, cette disposition a été invalidée. Mais, il semblerait que la cour aurait permis à la poursuite de bâtir le système — un système pratique, je suppose — pour permettre à l'accusé d'avoir un choix, n'est-ce pas?
    Très brièvement. Nous n'avons plus de temps.
    Il est clair que la Cour d'appel de la cour martiale avait prévu les questions qui allaient se poser. Je vais vous donner l'exemple pratique qui a été créé.
    Étant donné que les pouvoirs d'infliger des peines sont différents selon les différentes cours, si une personne est accusée d'une infraction entraînant une peine d'emprisonnement supérieure à deux ans moins un jour  — disons un homicide involontaire commis à l'extérieur du Canada —, si le procureur offrait ce choix à l'accusé, ce dernier pourrait limiter lui-même la peine qu'il pourrait recevoir en choisissant une cour martiale permanente, ce qui, de toute évidence, pose un problème du point de vue des intérêts plus vastes de la société et du point de vue des préoccupations des victimes à l'égard du processus. Cela vous amène alors à chercher à créer une égalité entre une cour martiale permanente et une cour martiale générale en termes de peines infligées et de juridiction, ce qui vous amène à...
    Parce que nous avons eu certains antécédents pour ce qui est d'accepter les observations des accusés pour les cours, une des choses que le directeur des poursuites militaires a faites dans le sillage de la décision Nystrom a été d'émettre une politique qui dit qu'on accepterait les observations des accusés concernant le type de cour qu'ils veulent. Cela est arrivé dans le cas du directeur adjoint sept fois et chaque fois, on a accordé à l'accusé le type de cour qu'il souhaitait.
(1615)
    Merci. Désolé, nous devons poursuivre.
    Monsieur Hawn.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, général, ainsi qu'aux autres témoins de votre présence.
    Je veux simplement corriger une chose que mon honorable collègue, M. Wilfert, a dite. Le projet de loi C-45 a, en fait, été présenté en mars 2008 et non en octobre 2007 — uniquement à des fins de compte rendu.
    Le projet de loi C-60 n'est pas conçu comme une mesure temporaire. Il est conçu comme une mesure permanente. N'est-ce pas exact?
    C'est certainement le cas.
    Y a-t-il une raison particulière pour laquelle nous n'irions pas de l'avant avec une loi nécessaire à cause de l'incapacité de prévoir la décision de la Cour suprême? Si nous essayons d'adopter une mesure qui est permanente et que nous croyons bonne, pourquoi devrions-nous nous inquiéter de ce qu'une quelconque Cour suprême pourrait faire dans l'avenir?
    Exactement, monsieur Hawn. Nous ne pouvons pas prévoir cela.
    Nous ne pouvons pas prévoir cela, de toute évidence. Les lois sont des documents vivants et seront toujours sujettes à la discussion, à l'examen et à la contestation, qu'il s'agisse de la Charte, par le truchement de la Cour suprême, ou de quoi que ce soit d'autre. La charte des anciens combattants pourrait être un exemple où quelque chose est adopté avec toutes les bonnes intentions et qui est un bon texte législatif, mais qui fait toujours l'objet d'un examen, et cela est simplement un fait de la vie juridique au Canada.
    Est-ce raisonnable de dire cela?
    Comme je l'ai dit dans mon exposé, cette loi dépasse l'affaire Trépanier. L'affaire Trépanier se limitait à un seul type d'infraction. Cette loi étendrait les mêmes droits aux personnes accusées d'infractions graves punissables d'un emprisonnement à perpétuité, par exemple, et d'autres infractions ne figurant pas parmi les infractions énumérées dans l'article 130 de la Loi sur la défense nationale: la capacité de choisir le type de cour martiale.
    Deuxièmement, mon objectif est d'avoir un système aussi équitable que possible. Comme je l'ai dit aux gens dans mon bureau, j'ai été assujetti au code de discipline militaire pendant 31 ans et mon objectif en tant que membre des Forces, c'est que les membres des Forces canadiennes puissent être jugés par un système de justice équitable.
    Et je dois dire qu'il a toujours été équitable, même lorsque je ne l'ai pas mérité.
    En ce qui concerne un examen obligatoire ou une disposition de temporarisation, et tout le reste, pourriez-vous nous dire quelles seraient les répercussions d'une disposition de temporarisation pour ce qui est des conséquences non voulues, conséquences pour le libellé d'autres lois ou pour les renvois à d'autres lois? Quel est le danger d'une disposition de temporarisation?
    Cela risque de paralyser le système.
    Un des effets du projet de loi C-60, bien entendu, c'est qu'il modifie radicalement le système. Si les effets du projet de loi C-60 sont annulés, on n'aura pas la capacité de convoquer la cour martiale. En fait, ces dispositions disparaîtront. Le projet de loi prévoit des dispositions sur l'étendue de la compétence, le type de peines selon les divers procès et la capacité d'un accusé de choisir le type de procès. Nous nous retrouverions donc dans une situation où nous aurions une plus grande incertitude quant à la capacité de fonctionner avec une cour.
    Nous avons parlé du projet de loi C-45 et du fait qu'il n'est peut-être pas passé à la prochaine étape à cause de certaines difficultés procédurales, etc. Quel sera le lien entre le projet de loi C-60 et le projet de loi C-45 maintenant que nous tentons d'adopter le projet de loi C-60 et dans l'éventualité que le projet de loi C-45 soit mené à bien et probablement adopté?
    Le projet de loi C-45 aborde clairement les parties du rapport Lamer qui ont été acceptées et proposées comme mesure législative. Le projet de loi C-60, pour sa part, porte sur les dispositions soulevées à la suite de la décision Trépanier. Certaines dispositions qui se recoupent, dont deux en particulier: l'exigence d'un vote majoritaire par les membres du Comité et la capacité d'un juge de traiter de questions préalables au procès. En vertu du processus prévu par la législation, le projet de loi qui sera adopté en premier traitera des questions qui se recoupent.
    Plus particulièrement, le vote unanime tire son importance du fait qu'il est lié à la question des procès devant jury. Notre système actuel est basé sur un vote majoritaire. Le juge en chef Lamer a recommandé l'adoption du vote unanime, et cette recommandation a été acceptée. Grâce au projet de loi C-60, il se peut qu'on ait encore plus de procès devant le Comité afin d'assurer la protection fondamentale des accusés. Les deux se rejoignent beaucoup.
(1620)
    Au cours de l'automne, nous irons de l'avant avec le projet de loi C-45. À supposer que nous adoptions le projet de loi C-60, les parlementaires auront-ils plus de facilité à comprendre comment fonctionne le système? Pourront-ils adopter plus facilement le projet de loi C-45 juste parce qu'ils le comprendront mieux? Je sais que ma question suppose une opinion très subjective.
    Il m'est difficile de répondre à cette question; tout ce que je peux dire, c'est que nous aurons un système de justice et des procédures judiciaires entièrement fonctionnels. Votre comité y aura contribué.
    Pour ce qui est d'apprendre le fonctionnement du système prévu par le projet de loi C-60, nous fournirons le type d'influence indirecte qui aura un effet sur toute mesure législative.
    Simplement pour souligner sur ce que je retiens de tout le processus, le but — que ce soit celui du projet de loi C-60, du projet de loi C-45 ou de tout autre projet de loi —, c'est de rendre le système de justice militaire plus compatible avec le système de justice civile et d'assurer une justice égale pour tous. Toutefois, nous comprenons que le système de justice militaire sera toujours un peu différent pour des raisons de discipline, etc.
    En ce qui concerne le processus d'examen et la fréquence des examens réguliers, le rapport Lamer de 2003 indique clairement le besoin d'établir un système parallèle au système de justice civile, tout en conservant les parties qui sont des exigences propres au système de justice militaire. Le système de justice militaire est entièrement assujetti à un examen fondé sur la Charte; c'est donc une autre mesure de protection pour s'assurer que le système suit le rythme des changements et des valeurs dans la société canadienne.
    Si nous ne faisions qu'adopter le projet de loi C-60 dans sa forme actuelle en exigeant un examen obligatoire tous les deux ans ou peu importe — l'une ou l'autre de ces solutions —, de votre point de vue, en tant que responsable du dossier de la justice militaire, est-ce que ce serait satisfaisant? Sentez-vous à l'aise de ne pas être d'accord.
    De mon point de vue en tant que surintendant, il est essentiel que nous obtenions des précisions, que nous adoptions le projet de loi C-60, que nous ayons un système de cour martiale fonctionnel, que nous offrions ces droits supplémentaires aux accusés et que nous établissions un processus par lequel on répond aux besoins des victimes, de même qu'aux besoins sociétaux plus larges sur le plan militaire.
    Pour ce qui est de l'examen, le système de justice militaire est déjà assujetti à diverses formes d'examen.
    Serait-il dangereux de l'adopter avec la disposition de temporarisation?
    Oui. Le problème, c'est que nous nous retrouverions dans une situation semblable à celle où nous sommes maintenant.
    Merci, monsieur Hawn.
    Il ne nous reste que quelques minutes. Nous allons commencer le deuxième tour, avec seulement une ou deux interventions.
    Monsieur Tonks, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, brigadier-général.
    Lorsque vous utilisez les expressions « questions préalables au procès » et « procès sommaire », parlez-vous de la même chose?
    Un procès sommaire, c'est un type de procès. Dans notre structure de tribunaux à deux niveaux, nous avons des cours martiales et des procès sommaires. On peut considérer les procès sommaires comme des procès tenus à l'échelle d'une unité devant le commandant, par exemple. La cour martiale, bien entendu, ressemble à une cour criminelle.
    Lorsque je parle de « questions préalables au procès », je parle du temps, c'est-à-dire des événements qui se sont déroulés avant la convocation de la cour martiale. C'est par opposition aux événements postérieurs au procès qui pourraient inclure un appel.
    Je vous prie de m'excuser. Comme je ne siège pas au comité, je ne suis pas au courant du contexte, et je ne suis certes pas avocat.
    Est-ce que le projet de loi modifie le procès sommaire pour une personne qui est présumée avoir commis un crime, ou peu importe, sous les ordres? Est-ce qu'il prive cette personne de certains de ses droits par rapport aux critères de procès sommaire?
    Non, le procès sommaire reste intact. Le projet de loi se concentre sur le système de cour martiale et, lorsqu'une cour est convoquée, sur la capacité d'un accusé de choisir ensuite le type de procès selon les diverses conditions établies dans le projet de loi.
(1625)
    J'ai été intrigué par la question de mon collègue, M. Hawn, au sujet des principes de la justice naturelle inscrits dans notre Code criminel et dans notre Code civil. Les mêmes principes s'appliquent-ils aux procès sommaires?
    Vous avez dit que les avocats ne participent pas aux procès sommaires. Il est vrai que ces procès portent sur des questions moins graves, mais avez-vous jamais songé au fait que le projet de loi C-60 tente d'harmoniser ces principes juridiques? Je suppose que ce n'était pas implicite dans la décision Trépanier, mais le ministère s'y est-il déjà intéressé du point de vue de la justice?
    L'élément central du projet de loi C-60 découle de l'urgence de la situation. C'est pourquoi sa portée est si étroite quant aux mesures à prendre.
    Pour ce qui est de la question générale de la représentation, mon mémoire de maîtrise en 1989 a porté sur la constitutionnalité du système des procès sommaires. Le système a fait l'objet d'un examen en 1994, par le juge en chef Dickson après les incidents en Somalie. Il a produit deux rapports, dont le premier étudiait de façon assez détaillée le système des procès sommaires.
    Le but, c'est d'être sommaire. Rien n'empêche les avocats d'être présents; toutefois, cela arrive rarement. Pour ce qui est d'être représenté par un conseiller juridique, le système militaire compte un régime d'aide juridique entièrement financé; ainsi, un accusé devant une cour martiale aura droit à un avocat de la défense. Il peut être défendu par un avocat militaire, mais une disposition permet aussi de recourir à un avocat civil pour que ses droits soient protégés.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Il ne nous reste que quelques minutes. Nous allons maintenant du côté du gouvernement, avec Mme Gallant.
    J'ai une petite question. Si le projet de loi C-60 n'est pas adopté, qu'arrivera-t-il aux cas en attente d'une cour martiale? Les dispositions de la Charte concernant le droit d'être jugé dans un délai raisonnable seront-elles invoquées?
    Je suis désolé, les dispositions de la Charte...?
    Les dispositions de la Charte concernant le droit d'être jugé dans un délai raisonnable seront-elles invoquées? Qu'arrivera-t-il aux personnes qui attendent la convocation de leur cour martiale?
    C'est ce qui nous préoccupe à l'heure actuelle. Le temps presse. La question a été soulevée dans le jugement lui-même, à savoir qu'il y a peut-être une autre façon de s'y prendre; le hic, c'est que le jugement indique précisément que la capacité de convoquer une cour sans ces dispositions est nulle.
    J'ai expliqué les difficultés que cela pose sur le plan du fonctionnement même dans les cas où des cours sont convoquées. Dans le cadre du système, même si l'on procède à la tenue de cours martiales parce qu'elles ont été convoquées au préalable, des questions de procédures se posent lorsqu'on essaie de faire avancer les choses. Le temps presse donc, en effet.
    Les gens seront donc libérés?
    Eh bien, dans le cadre de notre système, à l'instar du système de justice civile, le procureur évaluera la situation dans chaque cas. L'avantage du projet de loi C-60 et de son adoption rapide, c'est qu'il limitera ce problème. À notre avis, si nous agissons avec empressement, nous rétablirons des règles du jeu équitables où les accusés auront l'occasion de se faire entendre et où, du point de vue des intérêts des victimes et de la société en général, on s'assurera que les personnes ayant enfreint le Code de discipline militaire...
    D'accord, donc d'après ce que je crois comprendre, si le projet de loi C-60 n'est pas adopté, les accusés qui attendent une cour martiale risquent d'être libérés et d'échapper à la loi.
    Merci.
    Merci, Cheryl.
    Il reste une minute pour conclure.

[Français]

    Je ne suis pas d'accord sur ce que vous dites concernant le projet de loi C-60. Au fond, vous court-circuitez la cause qui est devant la Cour suprême en essayant d'adopter un projet de loi avant que la décision ne soit prise. Ça m'apparaît clair.

[Traduction]

    Bien sûr, monsieur, la Cour suprême s'occupe de questions juridiques constitutionnelles. Les tribunaux se concentrent forcément sur les questions juridiques.
    Le projet de loi permet de traiter des effets de la décision, c'est-à-dire des questions relatives à la préférence d'établir un système qui permettrait aux membres des Forces canadiennes accusés d'avoir commis certaines infractions militaires relevant d'une cour martiale d'avoir l'occasion de choisir le type de procès; et pour les infractions plus graves, de tenir un procès devant le comité, puis d'établir un processus permettant à l'individu de faire un autre choix.
    Par conséquent, on traite de la question du fonctionnement du système, tout en acceptant que l'élément central, c'est de fournir ce droit supplémentaire — et, comme je l'ai mentionné dans mes observations concernant le juge en chef Lamer, tous les droits ne sont pas obligatoirement limités par la Charte. Nous ne devrions pas être guidés uniquement par les dispositions de la Charte; nous devrions viser à faire ce qui s'impose. Tel est le but du projet de loi.
(1630)
    Merci. Voilà qui met fin à notre première heure.
    Merci beaucoup, monsieur, d'avoir été des nôtres, et de votre témoignage.
    Nous allons suspendre la séance pour une minute, le temps de changer de groupe de témoins. Merci.
(1630)

(1635)
    D'accord, nous allons commencer avec notre deuxième groupe de témoins pour ce soir. Nous accueillons M. Drapeau et Mme Guzina, qui comparaissent à titre personnel.
    Allez-vous faire une déclaration tous les deux, ou seulement un de vous?
    D'accord, monsieur Drapeau, la parole est à vous. Une fois que vous aurez terminé votre déclaration, il y aura un tour de questions de la part des députés.
    Permettez-moi de remercier les membres du Comité de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui pour présenter mon analyse du projet de loi C-60.

[Français]

    Permettez-moi aussi de vous présenter Zorica Guzina qui, comme moi, s'intéresse au droit militaire canadien tant dans sa pratique journalière que dans le cadre de son enseignement à l'Université d'Ottawa.

[Traduction]

    En raison du très court préavis pour réaliser cette analyse et du peu de temps de parole dont je dispose aujourd'hui, j'ai cru bon de présenter les résultats de mon analyse sous la forme d'un livret, que vous avez sous les yeux.

[Français]

    À la page 1 de ce livret se trouve un tableau sommaire qui décrit la structure et l'organisation actuelles des cours martiales. Il y a quatre sortes de cours martiales. Je vous donne une description de leurs pouvoirs et des droits de l'accusé, entre autres choses.
    À la page 2, je vous dresse un sommaire très bref de la décision par la Cour d'appel de la cour martiale dans Trépanier c. Sa Majesté la Reine rendue le 24 avril 2008 et qui a donné vie au projet de loi C-60.
    J'attire votre attention sur le fait que dans sa décision, la Cour d'appel de la cour martiale a aussi fait allusion aux recommandations faites par feu le juge en chef Antonio Lamer à la suite de son examen de la Loi sur la défense nationale, en 2003. Ces recommandations, pressantes à l'époque, visaient à simplifier la structure des cours martiales de façon à créer une cour militaire permanente et font écho, du moins en partie, aux modifications proposées dans le projet de loi C-60.
    À la page 3, je vous présente un tableau sur l'essence du projet de loi C-60.

[Traduction]

    Le projet de loi C-60 donne suite à la récente décision de la CACM qui a déclaré inconstitutionnelle une disposition autorisant le directeur des poursuites militaires, et non l'accusé, à choisir le type de procès — devant un juge militaire siégeant avec un comité ou devant un juge militaire siégeant seul. En plus d'abroger cette disposition, le projet de loi C-60 simplifie le système actuel en réduisant le nombre de types de cour martiale — une cour martiale générale, une cour martiale disciplinaire, une cour martiale permanente et une cour martiale spéciale — de quatre à deux. C'est l'une des recommandations qu'avait faites le regretté juge en chef Lamer dans son rapport de 2003 au terme de son examen de la Loi sur la défense nationale de l'époque.
    Le projet de loi C-60 apporte ensuite un assez bon nombre d'autres modifications mineures, dont la plupart sont déjà incluses dans le projet de loi C-45 qui, je suppose, fera l'objet d'une discussion plus détaillée en temps voulu parce que cela n'a pas encore eu lieu.
    Pour ce qui est de mon évaluation générale, je n'ai aucun problème majeur avec le projet de loi C-60. Outre le fait qu'il accorde à un accusé le droit de choisir le type de procès, il simplifie également la structure de la cour martiale, comme l'avait d'abord recommandé le regretté juge en chef Lamer, et c'est une bonne chose. Les autres modifications mineures visent, elles aussi, à améliorer le système de justice militaire et, dans l'ensemble, elles arrivent à point nommé.
    Il y a deux aspects de cette question qui me préoccupent — et c'est indiqué dans les documents que vous avez sous les yeux. On en a parlé, du moins en partie, durant la première heure de la réunion lorsque le général Watkin a témoigné.
    Mon premier sujet de préoccupation, c'est le fait que le dépôt de ce projet de loi coïncide avec une demande de permission d'en appeler de la décision Trépanier devant la Cour suprême du Canada. Dans un des documents de la Cour suprême du Canada que je vous ai remis, il est indiqué qu'en fait une requête en sursis d'exécution de la décision Trépanier a été présentée devant la Cour, de même qu'une demande d'autorisation d'appel. Aucun de ces appels n'a été entendu pour l'instant.
    Ma deuxième préoccupation concerne la disposition transitoire à l'article 28 du projet de loi. En vertu de cet article, tout procès devant une cour martiale commencé mais non achevé avant la date d'entrée en vigueur du projet de loi C-60 se poursuivra aux termes de l'ancienne loi. J'ai entendu certaines des explications à cet égard, mais il reste un peu de doute dans mon esprit quant à l'impact réel de l'application de cet article particulier. Que voulez-vous dire? Vous avez peut-être la réponse, mais pas moi.
    Voilà, c'est tout ce que j'avais à dire dans ma déclaration préliminaire. Je serai heureux de répondre à vos questions.
(1640)
    Merci, monsieur.
    Monsieur Wilfert, voulez-vous commencer — ou monsieur Rota, ou quelqu'un d'autre? C'est un tour de sept minutes.
    Allez-y.
    Très bien, monsieur le président.
    Merci beaucoup pour le tableau. C'est très utile, et c'est bien de voir l'information sous la forme d'un graphique. Vos explications ont été fort utiles.
    Concernant l'article 28, vous avez mentionné que c'est l'un des aspects qui vous préoccupent, à savoir la disposition suivant laquelle un procès déjà en cours doit se poursuivre selon l'ancien système. Le système ne fonctionne-t-il pas déjà ainsi?
    Oui, mais il y a deux facteurs qui entrent en jeu ici.
    Tout d'abord, le ministère de la Justice s'est adressé à la Cour suprême pour demander une autorisation d'appel. Nous ignorons ce que la Cour suprême fera dans l'un ou l'autre cas.
    D'après cette recommandation, cette loi pourrait, en fait, être édictée en un rien de temps.
    Quant au nombre de procès de ce genre et à quelle étape ils se trouvent, je n'en sais rien. Ce que nous savons de la décision Trépanier, c'est que, tout au plus, si nous regardons les quatre ou cinq dernières années, il y a eu un total de 200 procès. Nous ne parlons pas d'un grand nombre; 200 procès, c'est, en moyenne, 60 procès par année.
    Pour ce qui est du nombre de procès en suspens à l'heure actuelle, c'est-à-dire les procès qui ont commencé et que nous mènerons à bien, je ne sais même pas de quel type de procès il s'agit. Est-ce une cour martiale générale, une cour martiale spéciale? Je ne dispose pas de ce genre de détails. Mais dire qu'ils se poursuivront en vertu de l'ancienne loi alors que la Cour d'appel de la cour martiale a déclaré — sauf si la décision est renversée — que l'ancienne loi, ou du moins cette disposition particulière, n'est pas constitutionnelle, il y a bien lieu de se poser des questions sur le fait de continuer quelque chose qui est non seulement injuste, mais inconstitutionnel à ce stade-ci.
    C'est ainsi que je l'interprète.
    Comme vous, je regarde l'article 28 et je me demande pourquoi on l'inclurait si cela fait déjà partie du système ou si cela fonctionne déjà ainsi. L'ajout d'une telle disposition pourrait-il faire échouer un procès à un moment donné ou entraîner un appel de nullité de procès?
    Je pensais que le jugement Trépanier était clair là-dessus. C'est une décision exhaustive, mais qui est quand même rédigée par la cour. Il me semble que, dans ce jugement, ce genre d'éventualité a été abordé; si la cour a déclaré cette disposition comme étant inconstitutionnelle, il ne sera donc pas constitutionnel  — désolé pour ce jeu de mots — de poursuivre un procès qui est en cours.
    Maintenant, il se peut qu'on soit obligé de revenir à la case départ, c'est-à-dire d'arrêter le procès et de le recommencer. Je ne sais pas, mais comme je l'ai dit, j'ignore quel procès serait assujetti à cet article particulier et ce qui est en cause. Mais cela me semble étrange.
    Par conséquent, les procès qui sont actuellement en instance ou qui sont simplement en attente ou suspendus, seraient assujettis au projet de loi C-60, et non à l'ancienne loi. Est-ce exact?
    C'est ainsi que je vois les choses, en effet.
(1645)
    D'accord, et les procès que nous avons déjà commencés doivent être terminés, comme vous le dites, dans...
    J'aurais besoin d'une explication. Qu'entendez-vous par « commencé »? La Charte a-t-elle été invoquée, ou peu importe? N'est-il pas possible de revenir en arrière et d'accorder à l'accusé le droit de choisir? Je ne connais pas par coeur toute la décision Trépanier, mais c'est l'un des aspects traités. Il se peut fort bien que, dans certains cas, l'accusé choisisse le même type de procès que celui dont il fait l'objet maintenant. Cela ne signifie pas nécessairement qu'on va revenir en arrière dans chaque cas, mais je pose quand même la question.
    Vraiment, je n'ai pas tous les détails. Peut-être que vous les avez. On ne me les a pas fournis.
    Lorsque j'ai examiné le projet de loi C-60 pour la première fois, il m'a semblé assez explicite, et j'ose croire que c'est toujours le cas en majeure partie.
    Une des principales questions qui ont attiré l'attention du Comité, c'est que nous avons essentiellement trois choix ou trois décisions. Est-ce qu'on l'accepte dans sa forme actuelle tout en espérant que les choses s'arrangeront pour le mieux et en permettant au Parlement de l'examiner éventuellement? Est-ce qu'on ajoute une disposition de temporarisation, qui est l'une des propositions soulevées? Peut-être qu'une des craintes liées à une telle mesure, c'est que si la loi créée en vertu du projet de loi C-60 vient à expiration, alors nous nous retrouverons à la case départ, je suppose. L'autre option, c'est d'examiner la loi dans deux ans. Le Comité établirait donc un groupe de travail chargé d'examiner la loi.
    Laquelle de ces options préférez-vous ou, à votre avis, laquelle est la meilleure façon de s'y prendre?
    Je ne dirais pas tous ces choix, mais quelque chose au milieu. La décision Trépanier est parfaitement claire. Il a été dit, avec beaucoup de soin, que cette décision n'a pas été rendue du jour au lendemain; c'était une décision unanime de la cour. Dans plusieurs cas antérieurs, la cour a signalé son malaise devant la différence considérable entre le système pénal civil et le système pénal militaire. La cour a donné une notification en bonne et due forme dans une décision antérieure, et a maintenant déclaré cette disposition inconstitutionnelle.
    Le projet de loi C-60 inscrit dans la Loi sur la défense nationale le concept qu'un accusé aura ce droit, rendant ainsi le système pénal militaire égal au système pénal civil. La seule zone grise, ce sont les affaires qui sont dans le système actuel et qui sont postérieures à la décision Trépanier. Il y en a peut-être trois ou quatre, mais certainement pas une centaine puisqu'on en compte un maximum de 60 par an.
    Donc, ce sont des cas d'exception que vous pourriez examiner. Mais je ne pense pas que vous ayez besoin d'une disposition de temporarisation si nous limitons notre discussion au fait d'ajouter une disposition dans la Loi sur la défense nationale en vertu de laquelle un accusé aurait dorénavant un droit semblable à celui dont jouit un accusé dans le système pénal civil. Cette disposition restera pour une longue période.
    Par conséquent, à mon avis, il n'est pas nécessaire d'avoir une mesure de temporarisation. Je ne peux pas deviner ce que la Cour suprême fera et si elle annulera la décision en appel. Même si la décision est infirmée par la Cour suprême, il est quand même utile de donner à nos militaires hommes et femmes qui subissent un procès criminel, en vertu des codes de discipline, un droit qui soit au moins égal à celui des civils. Donc, même si vous, en tant que législateurs, n'avez pas été frappés par le manque de constitutionnalité de cette disposition, il faudrait, en toute justice, une certaine forme d'équité entre les deux.
    Merci.
    Merci, monsieur Rota.
    Monsieur Roy.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais revenir à l'article 28 parce qu'à mon avis, la discussion à ce sujet n'est pas allée assez loin.
    En fin de compte, si l'article 28 est maintenu, les procès ayant déjà débuté devront continuer. Si un jugement concernant ces procès est rendu après l'entrée en vigueur du projet de loi que nous étudions, tout accusé ayant été jugé selon l'ancienne loi pourra contester la décision.
    Absolument. Il va pouvoir la contester en vertu de la cause Trépanier, dans un premier temps, de même qu'en vertu de la nouvelle loi, qui encadre ce principe. Je ne suis pas versé dans les paris, mais je pense que l'accusé aura de très bonnes chances d'y arriver.
    Dans le cadre de l'affaire Trépanier, on mentionne à l'article 117 — vous m'excuserez de n'avoir que la version anglaise — ce qui suit:
(1650)

[Traduction]

    Quoi qu'il en soit, on dispose également d'une solution pratique provisoire qui peut être facilement mise en oeuvre pour toute accusation en vertu de l'article 130, ce qui est vraiment la question qui nous occupe. L'accusé peut choisir son juge des faits. Il n'y aura aucune entrave d'ordre juridique à cette conduite, puisque l'article 165.14 accorde le droit au procureur; ce droit a une faible force exécutaire par rapport aux infractions.

[Français]

    J'admets être surpris par ces dispositions. Après une longue période de réflexion — de 48 heures, en fait —, j'essaie toujours de comprendre, mais je n'y parviens pas.
    En ce qui a trait à la clause crépusculaire, elle indique que les gens craignent que la révision n'ait pas lieu à temps et que le Parlement n'ait pas le temps de revenir pour adopter des amendements, si amendement il y a. En fin de compte, la proposition qui est devant nous équivaut à la clause crépusculaire. Pour ce qui est des procès futurs, si la nouvelle loi entre en vigueur mais que tous les procès en cours n'y sont pas assujettis, ça va me causer un problème. En revanche, la clause crépusculaire aurait uniquement comme conséquence de faire en sorte qu'on revienne à l'ancien système si la nouvelle loi n'entrait pas en vigueur à temps.
    Dans mes commentaires d'ouverture, j'ai aussi mentionné que le ministère avait déposé devant la Cour suprême une requête en sursis d'exécution. Ce que cela veut dire en réalité, c'est qu'on donne à la Cour suprême tout le temps qu'elle veut pour en arriver à une décision sur la demande d'appel, mais dans l'intervalle, on lui demande la permission de prendre un sursis à l'application de l'arrêt Trépanier. Il y a trois choses. Si l'application de l'arrêt Trépanier cause tant de difficultés parce que des accusés seraient... Il faut comprendre que seuls quelques accusés auraient eu le choix au départ. Il y en a 60 dans une année, alors supposons qu'il y en a cinq par mois qui sont dans le système et qui sont directement touchés pour cela. On demande maintenant un sursis d'exécution. On peut l'obtenir ou non. Si on l'obtient, cette discussion est futile. Si on ne l'obtient pas, on attend la décision d'appel ou on change la loi.
    En fait, l'adoption du projet de loi C-60 serait en contradiction avec la demande de sursis. À la limite, c'est une contradiction.
    Je ne voulais pas le dire, mais ma collègue l'a dit. S'il y a une contradiction, il est difficile d'harmoniser les deux éléments, parce qu'on va de l'avant et on recule en même temps.
    J'ai dit plus tôt — vous étiez dans la salle — qu'on a l'impression que le ministère de la Défense nationale est en train de court-circuiter la décision de la Cour suprême en déposant ce projet de loi et en demandant un sursis.
    Je ne pense pas qu'il veuille court-circuiter la décision de la cour, mais il va devant la Cour suprême dans le but de défier l'arrêt Trépanier, et non pas son application très large, universelle et constitutionnelle. C'est très pointu. Je n'aurais pas privilégié cette tactique, mais il faut vraiment se concentrer là-dessus. Ce qui me cause un souci, ce sont ces deux demandes ensemble: demande d'appel et demande de sursis d'exécution simultanément. Maintenant, on est ici et on veut changer la loi.
    Je veux poursuivre dans cette veine. Depuis le début, je dis que je ne vois pas l'utilité, si le Parlement se saisit d'un projet de loi et qu'il l'adopte, d'aller devant la Cour suprême du Canada pour contester une partie de la décision de la cour martiale. J'ajouterai à cela — et le brigadier-général me l'a confirmé tout à l'heure — que la Cour suprême pourrait examiner le projet de loi C-60 et dire qu'elle considère mauvaises des choses qu'on a votées dans cela. Elle pourrait retirer une partie du projet de loi.
    Cela me surprendrait, monsieur Bachand. Ce n'est pas le rôle de la Cour suprême. Ce que la Cour suprême peut faire, c'est ne pas recevoir la demande d'appel. C'est une demande. Si vous me demandez mon avis, je vous dirai que j'ai lu et relu l'arrêt Trépanier et que cette décision est très forte et très bien cousue. C'est une décision de la cour, et non celle d'un juge ou deux en particulier. C'est une décision très réfléchie. C'est une décision qui fait avancer le droit de façon substantielle, non pas seulement à propos de cela, mais à propos de plusieurs autres choses. La Cour d'appel de la cour martiale du Canada est la cour d'expertise au Canada.
    Avant que la Cour suprême ne renverse quelque chose et, en se prononçant, ne décide de dire qu'il va y avoir une justice à deux vitesses, deux systèmes de justice, l'un militaire et l'autre civil... J'aurais tendance à croire que ce n'est pas ce qui va se produire, mais on va voir. Cependant, la première décision que prendra la Cour suprême sera d'accepter ou non la demande d'appel.
(1655)
    Que pensez-vous de notre crainte, compte tenu de l'empressement d'adopter ce projet de loi, de commettre des erreurs? C'est pour cette raison qu'on veut une disposition de temporarisation. Vous vous souviendrez que la Charte des anciens combattants a été adoptée à toute vitesse et qu'on a eu des problèmes par la suite. C'est pourquoi on insiste pour avoir une disposition de temporarisation.
    Monsieur Bachand, je vais me répéter. Le projet de loi C-60 tel qu'il est écrit ne me pose pas de problème. Il enchâsse un principe qui devrait être là et qu'une cour a recommandé de façon unanime. Ce n'est pas le projet de loi C-60 qui me pose problème, c'est le projet de loi C-60 avec la décision d'en appeler de cette décision.
    Ça ne fonctionne pas.
    C'est un jeu de souque à la corde.

[Traduction]

    Merci, monsieur.
    Merci, Claude.
    Monsieur Comartin, pour sept minutes.
    Monsieur Drapeau, j'essaie de comprendre si l'article 28 du projet de loi C-60 est un endossement de la position du gouvernement dans son appel. Est-ce que cela ouvre la porte? Devrions-nous peut-être supprimer le paragraphe 28(1) et, comme M. Rota l'a proposé, nous en remettre à la loi ou à la pratique actuelle? Qu'en pensez-vous?
    J'hésite à vous fournir un commentaire, parce qu'il y a un vide. Je ne comprends tout simplement pas la logique.
    Il faut une logique; ce n'est pas que je sois injuste, mais c'est tout simplement parce que je ne comprends pas. Peut-être que le libellé n'est pas aussi rigoureux qu'il devrait l'être ou peut-être que je l'interprète différemment de vous. Mais pour moi, le projet de loi C-60 , jusqu'à ce que j'ai lu ce...
    Il y a certaines choses que je préfère ne pas aborder parce que nous introduisons des dispositions qui dépassent largement le jugement Trépanier, mais à bien y penser, qu'est-ce que ça signifie? C'est presque un jeu de bingo où je dois constamment anticiper ce qui va se passer. Je n'obtiens pas de réponse satisfaisante. En fait, on embrouille la question plus qu'on ne la clarifie. Le but d'une disposition transitoire, c'est de clarifier la situation pour que vous sachiez où vous en êtes pendant la transition d'un régime à l'autre.
    Maintenant, ce qui est dit dans cet article, c'est que lorsque nous passerons d'un régime à l'autre, vous serez assujettis à l'ancien régime. Oui, mais nous avons déclaré l'ancien régime inconstitutionnel. Que voulez-vous dire?
    Mais ce n'est pas tout. Je sais que vous êtes en train de contester la décision en cour, mais la cour pourrait fort bien l'accepter. Le cas échéant, c'est-à-dire si la cour rejette l'appel, alors si vous adoptez ce projet de loi, cela signifie — si je comprends bien — que l'ancienne loi s'appliquera.
    Je suis désolé, mais je ne suis pas d'accord.
    Donc, en adoptant ce projet de loi, nous pourrions donner un certain pouvoir à la pratique actuelle, légitimer en quelque sorte la pratique actuelle.
    Dans le nombre très limité de cas, que ce soit trois, quatre, cinq ou six, — et selon moi, c'est tout au plus cinq —, pourquoi est-ce qu'on fait cela?
    Monsieur Drapeau, si je peux vous interrompre, je crois qu'en fait le chiffre est plus élevé que cela, ou sera plus élevé, parce que nous avons déjà une liste de quatre cas qui ont été suspendus ou terminés depuis avril, peu importe la date à laquelle a été rendue la décision Trépanier.
    Mais je vous dirai que si ces procès sont terminés, ils ne sont plus « commencés ».
    D'accord, c'est un bon point. Mais il y en a une cinquantaine d'autres, d'après ce qu'on nous a dit.
    Et le problème n'est pas là. Ce que le jugement Trépanier dit — en des termes simples parce que c'est la seule façon de le considérer —, c'est: « D'accord, vous n'avez pas besoin d'attendre le projet de loi C-60 . On est au courant du projet de loi C-60. Vous n'avez pas besoin d'attendre jusqu'à ce qu'une décision soit prise pour changer cela; vous pouvez faire l'offre maintenant. Vous pouvez chercher à obtenir le consentement. »
(1700)
    Mais cela fait alors obstacle aux affaires qui ont commencé. Si nous adoptons le projet de loi cette semaine, puis qu'il est adopté au Sénat la semaine prochaine et qu'il reçoit la sanction royale quelques jours plus tard, d'ici la fin du mois de juin, toutes les affaires qui auront commencé entre-temps ne seront pas assujetties au projet de loi C-60 . Et ensuite, on pourra les contester en vertu des dispositions constitutionnelles.
    Justement, et qu'est-ce qu'on en fait? Nous jouons sur les deux tableaux. Nous disons oui, c'est inconstitutionnel, mais en passant, certains d'entre vous devront attendre le jugement...
    La Cour d'appel fédérale?
    C'est tout ce que j'avais comme questions.
    Merci.
    Nous allons maintenant du côté ministériel, avec M. Blaney.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Monsieur Drapeau et madame Guzina, je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
     Monsieur Drapeau, votre feuille de route est impressionnante et vos connaissances en droit militaire sont très poussées. Je vous ai écouté émettre vos commentaires sur le projet de loi. En tant que législateur, on est toujours intéressé à entendre l'opinion d'un expert tel que vous. Je vous ai entendu dire que le projet de loi enchâssait certains éléments qui faisaient référence à la Charte canadienne des droits et libertés et que vous ne voyiez pas de problème comme tel dans ce projet de loi. C'est toujours réconfortant d'entendre des choses comme celles-là. On se dit que quelqu'un qui connaît cela a préparé un document bien étoffé, avec une bonne synthèse.
    Si je comprends bien, l'arrêt Trépanier est l'un des éléments ayant mené à la préparation du projet de loi. En effet, l'accusé ne pouvait pas avoir une défense pleine et entière étant donné qu'il ne pouvait pas choisir la manière dont il allait être jugé.
    Aimeriez-vous ajouter des commentaires sur l'arrêt Trépanier par rapport au projet de loi? D'après vous, comment se déroulerait cette situation en vertu de la nouvelle loi?
    Vous avez fait une bonne synthèse de ma position. Le projet de loi C-60 ne me pose pas de difficulté majeure. Il aborde timidement quelques autres aspects qui font partie de l'arrêt Trépanier, où on fait allusion à feu M. le juge Lamer, qui avait suggéré de simplifier les cours martiales. Voici qu'on retrouve cette suggestion, et je pense que c'est une bonne chose. Le juge avait aussi recommandé, il y a quand même cinq ans, qu'il y ait une cour militaire permanente. Au moment où on se parle, il n'y a pas de cour. Ici, à Ottawa, il n'y a de cour militaire nulle part.
    Si on crée une cour martiale aujourd'hui pour juger un accusé, un juge est alors nommé et la cour est constituée, mais elle se dissout aussitôt que le procès est terminé. Avant la tenue d'un procès, avant que le juge soit assermenté, avant que l'accusé comparaisse devant la cour, il n'y a pas de cour. Il y a quand même cinq ans que M. le juge Lamer a dit qu'il devrait y avoir une cour militaire permanente.
    Il faut aussi une cour d'archives. Qu'est-ce que cela implique? Cela implique certainement certaines petites dépenses ici et là, mais le mot est là.
    Avec ce projet de loi, on met trois orteils dans l'eau et on dit qu'on va donner à un juge militaire, ou à plusieurs, le pouvoir de recevoir des applications avant le procès. C'est un pas dans la bonne direction. M. le juge Lamer l'avait proposé, mais il allait plus loin que ça. M. le juge Lamer avait également proposé de constituer un groupe de travail pour étudier ce que ça impliquerait, ce que ça coûterait et quelles seraient les difficultés. Je ne peux pas parler pour M. le juge Lamer, mais je peux certainement entériner, avec toute la vigueur que je peux y apporter, la sagesse de sa recommandation. Pourquoi ne la trouvons-nous pas ici ni dans le projet de loi C-45?
    Par contre, comme vous venez de l'indiquer, il y a trois orteils dans la piscine, car un juge peut recevoir des instructions.
    Ça, c'est bien.
    C'est un bon pas. Très bien. Je suis content de connaître votre point de vue. C'est un point de vue externe qui semble indiquer que le Parlement et les parlementaires sont sur la bonne...
(1705)
    Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de lire l'arrêt Trépanier.
    Je ne suis pas juriste.
    C'est vraiment un coup de masse. La cour s'est prononcée avec beaucoup de rigueur. Je pense qu'elle a démontré, en faisant sa lecture, une certaine impatience en disant de faire attention avec forces détails. Elle a parlé du processus de détention, du processus de punition, des différences entre les cours, soit une cour civile, une cour criminelle, une cour militaire et tout le reste. Elle a aussi rappelé — et c'est là que je vois de l'impatience — qu'elle l'avait mentionné dans quelques jugements préalables. Ce jour-là, l'occasion lui était donnée — et elle devait le faire — de déclarer cette disposition inconstitutionnelle.
    Je pense que la cour, à certains égards, vous parle aussi. Elle veut que vous connaissiez son point de vue, pour pouvoir apporter d'autres changements à la loi.
    Ce jugement a été rendu le 24 avril 2008.
    Le 24 avril.
    C'est quand même assez récent.
    C'est très récent, en effet.
    Si je comprends bien, ça amènerait éventuellement le projet de loi C-60... Le comité va étudier le projet de loi article par article, et il est certain qu'il pourra y avoir quelques changements. Mais dans l'ensemble, finalement, vous recommandez au comité d'aller de l'avant assez rapidement.
    À l'exception de l'article 28, lequel m'apparaît opaque ou obscur.
    Cet article traite de la date d'entrée en vigueur de la loi pour les causes existantes.
    Si, par exemple, on allait de l'avant et si le projet de loi C-60 entrait en vigueur, comment la pratique du droit militaire au Canada évoluerait-elle, selon vous?
    Je pense qu'elle va évoluer dans le bon sens. Je pense qu'on s'est fait tirer l'oreille. Par « on », j'entends ceux qui pratiquent le droit militaire. Ils se sont fait tirer l'oreille par la cour d'appel et sa décision en coup de masse qui nous amène à apporter ce changement. C'est bon. Je crois qu'il est aussi très bon d'appliquer enfin certaines autres recommandations suspendues du juge Lamer. Le fait de réduire le nombre de cours martiales de quatre à deux est une très bonne chose. Les différentes juridictions, les différents pouvoirs de punition et les différences entre ces cours, pour la majorité des militaires, tout ça c'est du grec. Je pense que cela aborde l'apport du système de justice militaire au XXIe siècle. Je pense que c'est très bien.
    Les parlementaires trahiraient-ils votre pensée, monsieur Drapeau, s'ils disaient que vous recommandez d'adopter ce projet de loi sans tarder?
    Ce ne serait pas trahir ma pensée, mais n'oubliez pas que j'ai émis quelques réserves. Je ne comprends pas l'article 28 et je comprends encore moins pourquoi on va frapper en même temps à la porte de la Cour suprême pour qu'elle déclare inconstitutionnel ce qu'on veut faire maintenant.
    Ne serait-ce pas parce que, dans l'arrêt Trépanier, il y a des aspects juridiques et des aspects constitutionnels distincts du projet de loi?
    Je pense que l'aspect constitutionnel, dans l'arrêt Trépanier, est celui dont on parle tous ici. De plus, il est facile de s'y rallier.
    Je crois aussi que le coeur de l'affaire Trépanier, bien que je ne connaisse pas les arguments présentés par le ministère devant la cour, c'est d'avoir déclaré inconstitutionnel ce point-là. C'est ce qu'étudiait la cour à ce moment-là.

[Traduction]

    Merci, monsieur Blaney.
    Voilà qui met fin à notre tour initial. Nous allons commencer par un tour de cinq minutes avec l'opposition officielle, après quoi nous reviendrons au gouvernement, puis au Bloc.
    Monsieur Rota, voulez-vous commencer?

[Français]

    Je serai très bref. J'ai encore une question à poser sur l'article 28, qui m'intrigue beaucoup.
    Si on retirait l'article 28, quels problèmes cela causerait-il au projet de loi? Pourrait-on facilement retirer cet article et procéder quand même? J'imagine que n'importe quel projet de loi adopté par le Parlement peut être amené devant la Cour suprême. Cela ne fait aucun doute. Si on retirait l'article 28, serait-ce assez clair? Serait-ce bon? Pourrait-on continuer?
    Jusqu'à ce que je le lise, ce projet de loi ne me posait aucun problème. Sa lecture m'a tout simplement fait sursauter. Comme je vous le dis, peut-être que quelque chose m'échappe ou que je ne comprends pas la logique qui sous-entend ce point. Peut-être, mais je ne la comprends pas. Sans l'article 28, le projet de loi C-60 ne me poserait pas de problème et il aurait mon plein aval.
     Quels problèmes cela peut-il créer, hypothétiquement, dans les quatre ou cinq cas possibles, s'il y en a quatre ou cinq? Cela porterait-il un coup mortel à la justice militaire? Je ne le pense pas. Je serais surpris que cela ait pour conséquence qu'un accusé ne fasse pas face à la rigueur de la discipline militaire, dans ces circonstances. J'en serais encore plus surpris à la suite de la lecture de l'arrêt Trépanier, qui prévoit ce problème.
(1710)
    Cet article est-il un précédent? Retrouve-t-on son contenu dans d'autres projets de loi ou d'autres lois?
    Je n'ai pas étudié de projet de loi qui pourrait contenir une telle disposition, non.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons revenir au parti ministériel. Y a-t-il des questions?
    Allez-y, monsieur Lunney.
    Pendant que nous examinons les exigences, une des questions que j'aimerais vous poser concerne également la période de transition. Une des exigences, c'est que le projet de loi intégrerait le critère requis dans les tribunaux civils, à savoir le principe du vote unanime au lieu du vote majoritaire pour les juges. Dans cette période de transition, cette deuxième disposition ajoute-t-elle une certaine mesure de confort? On doit avoir, il me semble, une série de règles qui s'appliquent durant un procès; ainsi, durant la période de transition, pour que les poursuites avancent, il faut appliquer une série de règles. La disposition du vote unanime est-elle utile durant la période de transition?
    Permettez-moi de revenir en arrière.
    Je n'ai pas les chiffres, mais dans l'affaire Trépanier, on indique combien de procès ont eu lieu ces cinq ou six dernières années et combien se sont déroulés devant un comité — c'est-à-dire, devant un juge militaire et un comité. Je crois qu'il n'y en a eu que deux. Le nombre de procès devant comité lors de cette transition, d'après moi, ne serait pas un chiffre très élevé. Bien sûr, ce chiffre risque d'augmenter au cours des prochains mois ou des prochaines années, mais à l'heure actuelle, il est très petit. Les dispositions concernant le vote unanime s'appliqueraient aux procès devant comité, et non pas aux procès devant un juge seul.
    Merci, monsieur le président. C'est tout ce que j'avais en tête pour l'instant.
    Allez-y, monsieur Bachand...
    Dans le jugement Trépanier, au paragraphe 82, il est indiqué qu'entre 1999 et 2003 — c'est-à-dire sur une période de quatre ans —, il y a eu une seule cour martiale générale devant un juge et un comité, trois cours martiales disciplinaires, 216 cours martiales permanentes devant un juge siégeant seul et aucune cour martiale générale spéciale, pour un total de 220. C'est une sur 220. Voilà l'élément central du jugement Trépanier: un accusé devant une cour martiale devrait avoir le droit de choisir le type de procès, que ce soit devant un juge seul ou devant un comité. Si l'accusé a ce droit, les chiffres pourraient changer et, ils changeront probablement, mais nous n'avons eu qu'un cas au cours des quatre dernières années.
    En vertu d'une disposition du projet de loi C-60, une cour martiale générale sera dissoute si le juge militaire est convaincu que le comité ne peut arriver à une conclusion unanime. Je me demande si vous pourriez nous dire comment cela toucherait les instances judiciaires. Est-ce que ce serait un avantage? Est-ce que cela permettrait d'accélérer les procédures dans les cas où il est évident que le comité ne peut parvenir à une conclusion unanime?
    J'ai lu le libellé de cette disposition, et je n'y vois pas de difficulté.
    Merci.
    C'est tout, monsieur Lunney?
    Oui, merci.
    Merci.
    Monsieur Bachand.

[Français]

    Je veux revenir aux mesures de protection par rapport aux modifications qui peuvent nous échapper. Personnellement, je n'avais pas noté l'article 28. Alors, si vous n'étiez pas venu nous en parler, cela nous aurait peut-être échappé. Par contre, j'avais noté que la question relative à la Cour suprême constituait un problème assez important. Vous mentionnez également que vous aimeriez voir la création d'une cour militaire permanente. Tout cela me fait dire qu'il nous faut des mesures de protection dans cette loi, pour la revoir.
    Je ne sais pas si vous êtes un spécialiste des termes parlementaires, mais il y a deux écoles qui proposent des termes. Il y en a une qui parle de révision obligatoire, et l'autre propose le terme « clause crépusculaire ».
    Dans un premier temps, connaissez-vous la nuance entre ces deux termes?
(1715)
    Non.
    Je vais vous donner mon opinion sur ces deux termes. Il y en a un qui consiste en une revue obligatoire, ce qui ne veut pas dire que cela va se faire, mais cela ne veut pas dire non plus que si on faisait une révision, on procéderait à des changements.
    Par ailleurs, la clause crépusculaire oblige à revoir la loi, sinon la loi devient caduque. Présentement, je suis en train de me demander si les deux concepts sont incompatibles. Selon moi, non. Je pense qu'il pourrait y avoir une révision de la loi, dans un premier temps, mais qu'il devrait toujours y avoir une clause crépusculaire en guise d'assurance. Autrement dit, je parle de la ceinture et des bretelles. Je trouve qu'il y a un dangereux précédent devant nous. En effet, comme je vous le mentionnais tout à l'heure, la Charte des anciens combattants a été adoptée rapidement, et on a constaté par la suite qu'il y avait des problèmes. Or, il est difficile par la suite de les corriger.
    Croyez-vous que mon approche de la ceinture et des bretelles est une bonne approche, compte tenu du fait que nous pourrions faire erreur et qu'il vaut mieux que nous prenions plus de précautions que pas assez?
    J'abonde dans le même sens que vous à l'effet qu'il faut avoir plus de protection et certainement plus de connaissances concernant non seulement les rouages mais aussi les implications, les tenants et aboutissants de la chose. C'est le travail de votre comité de poser ces questions, et je vous sais gré de le faire. Plus souvent qu'autrement, on tenait pour acquis que les sages, lorsqu'ils présentaient un projet de loi, y avaient bien pensé d'abord.
    Que se passe-t-il si le législateur ne comprend pas les articles de loi auxquels il donne son aval? On a un problème. Alors, non seulement il vous appartient de le faire, mais je pense qu'il est de votre devoir de poser des questions et d'être satisfaits des réponses. Je pense que les militaires et leurs parents se fient à vous pour adopter une loi après avoir obtenu un maximum de conseils et d'opinions sur le sujet. Il faut se rappeler que, surtout dans un contexte militaire, la loi suit les militaires outre-mer, que ce soit dans le cadre d'un procès par voie sommaire ou d'un procès devant la cour martiale tenu à des milliers de milles d'ici sans pour autant que le militaire puisse avoir accès à des avocats ou à toute une pléiade d'autres droits qu'on tient pour acquis dans la société canadienne.
    Alors, il faut que cette loi réponde aux besoins opérationnels des forces armées et qu'elle nous offre un outil pour nous assurer d'une bonne discipline. Mais en même temps, on ne doit pas pénaliser nos soldats qui, eux, font face à toutes sortes de risques. Or, la justice militaire ne devrait pas être l'un de ces risques. Cette justice devrait être posée et avoir été articulée après un examen préalable critique. C'est ce que vous faites, et je vous en félicite.
    Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que la rédaction du projet de loi par la Défense nationale, avec l'assistance des rédacteurs législatifs, n'a pas pris beaucoup de temps non plus? La décision est sortie le 24 avril et s'est retrouvée devant le comité un mois et demi plus tard. On n'est pas habitué à cela. D'habitude, les gens prennent leur temps pour examiner certaines choses. Dans le cas présent, j'ai l'impression qu'ils ont rapidement constaté un problème imminent: les cours martiales pourraient devenir presque caduques et inopérantes. Ils ont donc réagi rapidement. Ils peuvent faire une erreur, et nous aussi. C'est pour ça que j'insiste sur des mesures de protection. Je trouve qu'il serait sage d'en avoir.
    La rédaction s'est faite avec beaucoup de célérité et de professionnalisme. Le projet de loi est très bien construit. Les juristes qui rédigent ce genre de texte sont des professionnels. Je n'ai aucune crainte à cet égard. Si on le compare à d'autres projets de loi, celui-ci n'est pas tellement étoffé. Il faut le considérer dans le contexte d'octobre 2001, après les événements du 11 septembre, où vous et vos prédécesseurs avez été mis en face d'un nombre incroyable de bouleversements législatifs.
    Le projet de loi est bien rédigé, à part quelques petits aspects sur lesquels il faudra poser des questions. La décision d'aller en appel ne relève pas de la compétence du juriste qui a rédigé le document. C'est une décision politique. Les ministères impliqués voulaient à la fois pouvoir apporter des changements législatifs et aller devant la Cour suprême. Je ne sais pas si les responsables de ces décisions pourront répondre à vos questions.
(1720)
    D'accord, merci.

[Traduction]

    Merci.
    Pour l'opposition officielle, M. Rota a-t-il quelque chose à dire? Très bien.
    Madame Gallant.
    Merci, monsieur le président.
    Maître Drapeau, si je comprends bien, à la fin de la période visée par la disposition de temporisation, quelle qu'en soit la date, le projet de loi C-60 cesserait d'exister et ses dispositions ne seraient plus valides. Le projet de loi C-25 modifiait la Loi sur la défense nationale en 1998 et rendait obligatoires un examen et le dépôt d'un rapport cinq ans au plus après la sanction royale du projet de loi. C'est ce qui a donné naissance au projet de loi C-45. Il y a donc un trou entre le moment de l'examen et le dépôt du projet de loi.
    Comme une disposition de temporisation et la fin des dispositions du projet de loi C-60 pourraient créer un vide pendant un moment, qu'il n'y aurait pas de loi qui s'appliquerait de la fin de la période temporaire à la promulgation de la prochaine loi, pouvez-vous nous décrire quel en serait l'impact?
    Avant de pouvoir vous en décrire l'impact, si possible, j'aimerais remettre en question l'utilité ou la sagesse même d'inclure une disposition de temporisation dans le projet de loi C-60. Je dois me poser la question, pourquoi voudrions-nous en ajouter une? Ce projet de loi n'est pas une disposition transitoire; ce n'est pas une mesure que nous allons essayer pendant un certain temps pour voir comment elle fonctionne. C'est le résultat d'une contestation judiciaire fondée sur la Constitution, dans laquelle le tribunal a statué à l'unanimité que c'était nécessaire.
    Je ne mettrais donc certainement pas de disposition de temporisation dans le projet de loi C-60, qui est d'une portée assez restreinte, mais qui revêtira une grande importance si une personne est accusée ou se retrouve devant une cour martiale. Le juge en chef Lamer a déjà proposé ces modifications et elles auraient dû prendre forme dans le projet de loi C-45.
    La dernière chose que je voudrais serait donc de recommander l'adoption d'une disposition de temporisation. Plutôt que d'inclure une telle disposition dans le projet de loi C-60, je vous recommanderais de relire le projet de loi C-45, parce que la Loi sur la défense nationale prévoit un mécanisme pour retarder un peu le processus, afin que le projet de loi soit révisé de A à Z. Nous parlons ici du Code de discipline militaire prescrit par la Loi sur la défense nationale. Ce n'est pas tout le projet de loi, mais c'en est une bonne partie. Il faut tenir compte des modifications apportées au système de droit pénal et des leçons que nous en tirons, puisque nous sommes en déploiement pour la première fois depuis la Deuxième Guerre mondiale, du moins de cette envergure. Nous tirons sûrement des leçons de l'application de notre Code de discipline militaire dans un théâtre d'opération à l'étranger. N'y aura-t-il donc pas de changements qui en résulteront?
    Ce mécanisme doit être enchâssé dans la loi. Qu'il y ait une révision tous les trois ans ou tous les cinq ans, quelle soit faite par un organisme indépendant du MDN ou non, ce mécanisme doit être étudié, et il faut proposer des modifications au Parlement. Nous ne pouvons pas nous contenter de rafistoler la loi en y ajoutant par exemple la création d'une cour permanente. Pourrait-on en créer une? Peut-être, et certainement par le projet de loi C-45, parce que je connais bien certains aspects...
    J'aimerais peut-être dire ceci pour terminer, j'aimerais que nous tenions compte des changements que tous nos alliés apportent à leurs systèmes de justice militaires. Par exemple, quand il y a un procès militaire sommaire, comme nous l'avons entendu récemment, on n'a pas le droit à un avocat; on n'a pas le droit d'accéder aux dossiers; on n'a pas le droit de faire appel. Pourtant, l'accusé peut être mis en détention pendant longtemps, et le jugement Trépanier nous montre à quel point la détention peut être difficile et inconfortable. Dans d'autres pays, dont certains qui sont nos proches alliés, comme la Grande-Bretagne, les codes prévoient un mécanisme de révision de ces décisions, et les tribunaux administratifs peuvent...
    Je pense qu'un tel mécanisme dans notre loi nous permettrait de réviser avantageusement et en profondeur la loi et de proposer non seulement ce que l'armée veut, mais aussi ce que nous, en tant que société, et vous, en tant que législateurs, voulons absolument pour rester au diapason — non pas en arrière, mais au diapason — du système civil de droit pénal et de la société, parce qu'en ce moment, je pense que nous sommes en train de nous rattraper.
(1725)
    Bon. Vous n'avez plus de temps.
    C'est terminé de ce côté-ci, donc nous revenons à M. Blaney.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    D'après ce que je peux voir, monsieur Drapeau, vous estimez que le projet de loi est bien ficelé. J'ai deux questions à vous poser.
    Il y a, bien sûr, l'affaire Trépanier dont on a largement discuté. Cependant, on a aussi mentionné une décision relative à l'affaire Grant, qui comportait certaines incongruités, mais que le projet de loi clarifierait. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
    Par ailleurs, on dit parfois que quand on se compare, on se console. J'aimerais savoir, dans l'éventualité où le projet de loi C-60 serait mis en oeuvre, comment nous nous positionnerions, en termes de droit militaire, par rapport nos alliés, notamment les Américains et les Européens.
    Je ne pense pas que dans cette optique, l'adoption du projet de loi C-60 tel qu'il est maintenant change beaucoup de choses. Ça va permettre certains ajustements, mais le pamplemousse va demeurer un pamplemousse: il ne deviendra pas une orange. Il n'y a pas vraiment de comparaison possible entre le système de droit militaire canadien et celui des Américains. Je ne pense pas qu'on doive s'attendre à ce qu'il y en ait. Il existe certains points communs, mais il y a aussi beaucoup de différences dues à la taille des effectifs américains et au fait que la marine, l'armée et l'aviation ont chacun leur propre système.
    On peut établir une comparaison avec les forces britanniques, australiennes, françaises ou néo-zélandaises. Pour ce qui est du procès par voie sommaire — et c'est l'arrêt Trépanier qui en parle —, ceux qui sont soumis au code, en France, du fait qu'ils ont commis des infractions dans leur pays sont assujettis à des tribunaux non pas militaires mais civils. C'est la façon dont ça fonctionne en France. En Angleterre et en Australie, le juge-avocat général n'est pas un officier des forces armées, mais un officier provenant des plus hautes chambres de justice. Il demeure complètement à l'extérieur du ministère de la Justice. En Angleterre, le directeur du côté de la poursuite est un avocat du barreau et non un officier militaire.
    Il semble que les systèmes britannique et australien aient pris une autre tangente que, à tort ou à raison, nous n'avons pas suivie. C'est peut-être dû à l'absence d'examen critique de la part d'un comité comme le vôtre. Quoi qu'il en soit, il y a de plus en plus de différences marquées.
    Par contre, si je comprends bien, sans aller vers une forme d'internationalisation, on se dirigerait vers une amélioration certaine.
    Certainement. Le projet de loi C-60 représente une amélioration, il n'y a aucun doute là-dessus.
    Il y avait aussi à l'arrêt Grant. Avez-vous des commentaires à faire là-dessus?
    Je ne me suis pas préparé en conséquence.
    C'est très bien, d'accord. Merci.
    Les heures de lecture me font défaut.
    On m'a dit que cela corrigeait certaines lacunes de ce côté-là aussi.
    Merci, monsieur Drapeau.
    Merci.

[Traduction]

    Si personne d'autre ne veut poser de question, c'est la fin du second tour. Nous finissons assez pile, il est 17 h 30 exactement.
    Maître, vouliez-vous ajouter quelque chose avant que nous ne levions la séance?
     Je veux seulement vous remercier encore une fois, monsieur le président.
    Nous n'ajournerons pas. Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 18 heures, puis nous étudierons le projet de loi article par article.
    La séance est suspendue pour une demi-heure. Merci.
(1725)

(1810)
    Reprenons nos travaux.
    Nous allons maintenant entreprendre l'étude article par article du projet de loi C-60.
    Nous recevons quelques témoins experts. C'est ainsi que nous allons les qualifier. Nous accueillons le colonel Gibson et le colonel Gleeson.
    Nous avons aussi un greffier législatif, que beaucoup d'entre vous connaissez bien. Il est sur la Colline depuis plus longtemps que la plupart d'entre nous, j'en suis sûr, sauf peut-être M. McGuire.
    Nous devrions arriver à naviguer à travers ces articles à bon rythme. Monsieur Hawn, vouliez-vous mentionner quelque chose avant que nous ne commencions?
    Monsieur le président, j'aimerais simplement préciser notre intention, comme nous terminerons probablement cette étude ce soir. Le gouvernement a l'intention et l'espoir d'obtenir le consentement unanime demain afin de passer à l'étape du rapport et de la troisième lecture demain matin, pour renvoyer le projet de loi au Sénat demain après-midi.
    Ce sera plus compliqué si nous n'y arrivons pas. Nous pourrions toujours arriver à adopter le projet de loi, mais il ne passerait pas à l'étape de la troisième lecture avant jeudi, puis la gouverneure générale sera partie, et la Cour suprême préfère ne pas donner d'approbation verbale à un projet de loi sur une question de justice.
    Nous avons donc l'intention d'obtenir le consentement unanime pour passer à l'étape du rapport jeudi et renvoyer le projet de loi au Sénat demain après-midi. C'est notre intention.
    Merci.
    Sur ce, nous allons commencer.
    La parole est à vous, madame Black.
    Serait-il possible de l'adopter avec dissidence?
    Je ne sais pas.
(1815)
    Pourrions-nous d'abord donner notre consentement unanime, puis exprimer une dissidence?
    Vous parlez de demain et non...
    Oui, le greffier hoche la tête.
    Vous devrez composer avec cela.
    (Les articles 1 à 26 inclusivement sont adoptés.)
    Allez-y, monsieur Wilfert.
    Monsieur le président, j'ai un amendement qui a été soumis, je crois, le L-27.1.
    Juste une seconde. Je pense que l'amendement dont vous parlez concerne l'article 27.1, qui suit l'article 27. Pourrions-nous d'abord adopter l'article 27, puis vous pourrez défendre votre point de vue?
    Oh! je m'excuse. Très bien. Allons-y.
    (L'article 27 est adopté.)
    Allez-y, monsieur Wilfert.
    Monsieur le président, cet amendement s'apparente à l'un des amendements apportés à la Loi antiterroriste. Voulez-vous que je le lise pour le compte rendu?
    Certainement.
    C'est le nouvel article 27.1:
(1) Dans les deux ans qui suivent la sanction de la présente loi, un examen approfondi des dispositions et de l'application de la présente loi doit être fait par le comité soit du Sénat, soit de la Chambre des communes, soit mixte, que le Parlement ou la chambre en question, selon le cas, désigne ou constitue à cette fin.
(2) Dans l'année qui suit le début de son examen ou dans le délai supérieur que le Parlement ou la Chambre en question, selon le cas, lui accorde, le comité visé au paragraphe (1) remet son rapport au Parlement, accompagné des modifications qu'il recommande.
    Comme je l'ai dit, il s'apparente à la disposition que nous avons incluse à la loi antiterroriste afin de prévoir un examen obligatoire. Je pense que cela s'inscrit dans la lignée des observations qu'a exprimées le JAG aujourd'hui.
    Voulez-vous en débattre?
    Je vois M. Bachand et M. Hawn se manifester.

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais que mon collègue m'explique ce que vient faire le Sénat dans ce dossier. J'ai souvent qualifié M. Kenny de ministre non élu de la Défense. On pourrait donc demander à un comité de non-élus de décider d'une loi ayant été adoptée par la Chambre des communes. Selon moi, ça n'a aucun sens.
    Pour ma part, j'enlèverais « [...] par le comité soit du Sénat, soit de la Chambre des communes, soit mixte [...] » Je pense que l'adoption des projets de loi est une responsabilité des élus du Parlement. S'il était question de faire une réévaluation, je ne me satisferais pas de rester assis pendant que les sénateurs font le travail à notre place.
    J'aimerais entendre les arguments de mon collègue à ce sujet.

[Traduction]

    Très bien. Je vous remercie.
    Monsieur Hawn, vous êtes le prochain.
    Merci, monsieur le président.
    Pour commencer, nous sommes favorables à cet amendement.
    Le projet de loi va être renvoyé au Sénat, donc pour qu'il suive son cours, comme les sénateurs voudront... Peu importe ce que nous pouvons penser du Sénat et de son rôle, moi y compris, les sénateurs ont un rôle à jouer dans la structure actuelle. Si nous nous n'en tenons pas compte, les sénateurs nous renverront fort probablement la balle pour nous dire que ce doit être un comité soit de la Chambre des communes, soit du Sénat ou des deux. Je pense qu'il faut inclure les deux chambres ici. C'est ainsi que les choses ont toujours fonctionné jusqu'ici, et c'est la formule classique.
    Monsieur Wilfert.
    C'est la réalité, qu'elle nous plaise ou non. J'aurais facilement pu laisser tomber cette partie, mais le fait est que le Sénat devra y donner son accord.
    Cet examen se faisait en présence des deux chambres avant. Cela ne signifie pas qu'ils vont y participer, mais par courtoisie et en raison de la structure actuelle, il me semblait approprié de l'ajouter. Je vais donc laisser ma disposition telle quelle.
(1820)
    Voulez-vous ajouter quelque chose?
    La parole va à Mme Black, puis à M. Bachand.
    Pour diverses raisons, je n'appuierai pas cette motion. L'examen pourrait être confié à un organisme non élu, et nous sommes contre. Il y a déjà une disposition dans la loi selon laquelle la Loi sur la défense nationale sera révisée tous les cinq ans, donc je ne vois pas la nécessité de mener un examen au bout de deux ans.
    Merci.
    Monsieur Bachand.

[Français]

    J'ai un problème de procédure. Je veux déposer ma disposition de temporisation et je suis prêt à inscrire une durée de deux ans au lieu d'un an après l'entrée en vigueur, comme c'est actuellement indiqué. Je me demande si ma disposition et cet article sont compatibles. Je veux attirer l'attention du comité sur le fait qu'un examen approfondi n'est pas aussi menaçant qu'une disposition de temporisation. J'aimerais que le comité sache que l'article que je veux introduire dit qu'après un an — et je suis prêt à aller jusqu'à deux ans —, les modifications apportées cessent d'avoir effet. C'est très fort.
    Cette disposition de temporisation ne signifie pas qu'il n'y a plus de loi après un an ou deux. On peut voir venir et tenir des discussions avant la fin de la période temporisation, et à ce moment-là, on peut déposer de nouveaux amendements et modifier la loi.
    Il faudrait peut-être un expert en procédure pour me dire ce qu'il en est de mon amendement, de ma disposition de temporisation. Si on adopte cet article, vais-je me faire dire plus tard que je ne peux pas proposer la disposition de temporisation? C'est ce qui me préoccupe.

[Traduction]

    À mon avis, le fait de demander un examen et celui de demander une période tampon sont deux choses totalement différentes. Les ramifications de chacune sont très différentes. Nous allons voter sur votre amendement.
    Très bien.
    Voulez-vous ajouter autre chose sur le nouvel article 27.1?

[Français]

    Puis-je l'amender?

[Traduction]

    Oui, mais vous devrez le faire par écrit.
    Si je l'écris à la main, vous n'en comprendrez pas un mot.
    Il y a quelqu'un qui va arriver à le déchiffrer.

[Français]

    Je viens de le recevoir. Je ne peux donc pas déposer un amendement écrit. Quelqu'un peut peut-être le prendre en note pendant que je le dicte. En fait, j'en ai contre le fait qu'on implique le Sénat et un comité mixte. Il faudrait qu'on parle la Chambre des communes. Il me semble que ce n'est pas compliqué à comprendre.

[Traduction]

    Monsieur Bachand, le greffier législatif vient de m'indiquer que si vous avez le texte et que vous pouvez nous le présenter tout de suite oralement, il va le mettre par écrit et le présenter au Comité.

[Français]

    Je vais lui dicter mon texte. Je voudrais biffer « par le comité soit du Sénat », « soit » et « soit mixte ». Cela se lirait maintenant ainsi:
    27.1(1) Dans les deux ans qui suivent la sanction de la présente loi, un examen approfondi des dispositions et de l'application de la présente loi doit être fait par la Chambre des communes, que le Parlement ou la Chambre, selon le cas, désigne ou constitue à cette fin.
    Je pense que ce que j'ai dit n'est pas clair. Puis-je recommencer, monsieur le président?
(1825)

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Je suggère plutôt le libellé suivant: « [...] doit être fait par un comité de la Chambre des communes désigné à cette fin [...] »
    Je ne gagerais pas 100 $ que je peux gagner mon pari, monsieur le président.

[Traduction]

    Le greffier va y jeter un coup d'oeil pour s'assurer qu'il dit bien ce que vous voulez dire.
    Faites-nous une proposition.
    Nous allons la relire et nous assurer qu'elle est bien acceptable.

[Français]

    Le texte, monsieur Bachand, serait le suivant:
    27.1 (1) Dans les deux ans qui suivent la sanction de la présente loi, un examen approfondi des dispositions et de I'application de la présente loi doit être fait par un comité de la Chambre des communes désigné à cette fin.
     Le paragraphe 2 ne serait pas modifié.
    Sauf que vous dites, dans le paragraphe 2: « [...] le Parlement ou la chambre en question [...] ». N'y aurait-il pas lieu d'apporter ici une modification? Oui. Pourrait-on l'adopter paragraphe par paragraphe?

[Traduction]

    Non. Nous devons y inclure les deux amendements.
    D'accord.

[Français]

    On pourrait dire: « [...] ou dans le délai supérieur que la Chambre des communes [...] »
    Est-ce que je peux suggérer ceci, monsieur le rédacteur législatif?
    Au deuxième paragraphe, on lirait:
    (2) Dans I'année qui suit Ie début de son examen ou dans Ie délai supérieur que la Chambre lui accorde, Ie comité visé au paragraphe (1) remet son rapport, accompagné des modifications qu'il recommande à la Chambre des communes.
    M'avez-vous suivi?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Oui.

[Traduction]

    Avez-vous un commentaire à faire? J'aimerais relire la totalité de l'article modifié.
    Relisez-le d'abord.

[Français]

    Il se lirait ainsi:
    27.1 (1) Dans les deux ans qui suivent la sanction de la présente loi, un examen approfondi des dispositions et de I'application de la présente loi doit être fait par un comité que la Chambre des communes désigne à cette fin.

    (2) Dans I'année qui suit Ie début de son examen ou dans Ie délai supérieur que la Chambre lui accorde, Ie comité visé au paragraphe (1) remet son rapport, accompagné des modifications qu'il recommande à la Chambre des communes.
    C'est cela.

[Traduction]

    Voulez-vous encore en débattre?
    (Le sous-amendement est rejeté.)
    (L'amendement est adopté.)
    (Article 28 — Dispositions transitoires)
    Monsieur Bachand.

[Français]

    Les arguments de M. Drapeau m'ont quand même marqué. J'ai certaines réserves quant au fait que les procès qui ont commencé avant la date d'entrée en vigueur de l'article puissent continuer comme si de rien n'était.
    J'aurais aimé savoir si on a un conseiller juridique ici, en plus du conseiller législatif. Il y en ici, c'est vrai. Je demanderais leur avis sur l'article 28.
    Vous étiez dans la salle au moment où M. Drapeau a soulevé la problématique. J'aimerais connaître votre avis sur l'article 28. M. Drapeau suggère de l'enlever, mais avant de dire que je veux l'enlever, j'aimerais quand même obtenir votre avis.
(1830)

[Traduction]

    Je pense que nous en avons besoin, parce que Me Drapeau a beaucoup insisté sur le fait qu'il n'en avait pas de justification; il ne comprenait pas la réflexion ou le raisonnement derrière. Du coup, y a-t-il quelqu'un ici qui aimerait nous expliquer pourquoi l'article 28 est là?
    Monsieur Gleeson.
    Monsieur le président, c'est avec plaisir que je vais m'exprimer sur l'article 28 et bien sûr, mon collègue pourra intervenir s'il sent le besoin d'ajouter quelque chose.
    L'article 28 porte sur les procès déjà commencés. Selon les notes annexées à notre Règlement, les procès en cour martiale commencent quand l'accusé plaide coupable ou qu'il plaide sa cause. Essentiellement, il se trouve alors en danger.
    C'est le commencement dont il s'agit ici. Cet article vise à ce que si le projet de loi est adopté, les procès qui sont déjà commencés, qui sont en cours, puissent se poursuivre jusqu'au bout. C'est l'objectif. Il ne s'applique pas aux affaires où l'accusé est cité devant un tribunal, mais où le tribunal n'a pas encore commencé à l'entendre. Il ne s'applique pas aux affaires qui sont dans le système, mais qui ne sont pas encore devant les tribunaux. Il ne s'applique qu'au petit nombre d'affaires qui seront en cours au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.
    Nous révoquons deux types de cours martiales. Par exemple, la cour martiale disciplinaire est révoquée. Cet article prescrit qu'une cour martiale disciplinaire, si elle est en train de mener un procès au moment de l'entrée en vigueur de la loi, pourra mener ses activités à bien, sans avoir à s'arrêter et à tout recommencer. Le fait de recommencer un procès quand une personne est en danger soulève divers problèmes juridiques, dont la question de savoir si l'on peut la juger de nouveau. Pour reprendre les termes du JAG, il offre la certitude que le projet de loi dans son ensemble vise à créer. Cet article est une tentative pour conférer une certaine certitude que les procès en cours pourront se poursuivre.
    Sur le plan de la procédure, l'accusé qui comparaît devant une cour martiale doit, avant de plaider, dire s'il s'oppose à la cour qui le juge. Depuis le jugement Trépanier, il y a des accusés qui affirment ne pas vouloir être jugés par telle cour. D'où les quatre ou cinq affaires qu'a mentionnées le JAG et qui ont recommencé de zéro.
    Dans les circonstances qui nous occupent, si le tribunal a déjà commencé à siéger, la personne a déjà, selon toute probabilité, indiqué au juge qu'elle était satisfaite d'être jugée par la cour qui l'a sommée à comparaître, et cet article laissera la cour terminer son travail. C'est tout.
    J'ajouterais une chose qu'il me semble important que les membres du comité comprennent.
    Bien sûr, même si l'accusé a déjà donné son accord, s'il est trouvé coupable et qu'il considère après coup qu'il a été traité inéquitablement, il a toujours la possibilité d'interjeter appel devant la Cour d'appel de la Cour martiale. Il ne se trouve pas sans recours ni dans un vide juridique. Je voulais seulement le rappeler.
    Monsieur Comartin.
    Je suis toujours d'accord avec Me Drapeau, malgré votre explication. Il est vrai qu'il n'y aura peut-être que quelques cas isolés, aussi peu que quatre, mais le nombre de cas va augmenter au fur et à mesure que ce projet de loi suit son cours, à supposer qu'il soit adopté rapidement au Sénat, mais s'il ne l'est pas, ce sera encore pire.
    Dans les faits, on nie les droits d'un groupe de personnes, une toute petite liste qui pourrait peut-être s'allonger quand les gens prendront connaissance de l'affaire Trépanier et qu'ils diront: « Oui, je veux exercer mes droits; je ne pensais pas les avoir avant, » parce que la jurisprudence allait dans les deux sens. En fait, selon le dernier jugement faisant jurisprudence avant le jugement Trépanier, ils n'en avaient pas le droit. Trépanier le leur a donné. De plus, la loi du pays, qui s'en vient sous la forme du projet de loi C-60, va donner ce droit à toutes les autres personnes, sauf à elles. Ce n'est pas logique. Ce n'est pas ainsi que les lois devraient être écrites.
    Ensuite, je m'inquiète beaucoup de la façon dont la Cour suprême interprétera le message qui se dégagera de cette loi si l'on y laisse l'article 28. Je ne sais pas si vous pouvez comprendre, mais voici la situation.
    Il y a la décision Trépanier, qui dicte que tel est le modèle à suivre pour déterminer la procédure d'une cour martiale et que l'accusé a un droit de regard. Nous venons ensuite dire au Parlement que nous reconnaissons ce droit et que nous sommes d'accord avec la Cour d'appel fédérale, mais si un juge de la Cour suprême examinait l'article 28, il pourrait nous dire: « Très bien, vous avez fait tout cela, vous avez reconnu la décision de la Cour d'appel, vous vous êtes acquittés de votre responsabilité de prendre des mesures concrètes par le projet de loi C-60, mais vous refusez ce droit à ce petit groupe de gens. »
    Je ne voudrais pas être l'avocat qui va plaider devant la Cour suprême, pour essayer de justifier cet article en notre nom, au nom de la législature du pays.
(1835)
    Un certain nombre de personnes aimeraient intervenir. Devrais-je permettre à toutes de le faire, puis vous pourrez répondre? Êtes-vous prêt à attendre, ou voudriez-vous réagir à cette question en particulier?
    Je suis à votre disposition.
    Voyons qui vient ensuite. Les suivants seront MM. Bachand, Murphy et Hawn.

[Français]

    Je voulais soulever l'argument que M. Comartin vient de soulever à l'effet que l'accusé, à l'époque, était placé devant un autre régime. Je vais vous avouer bien franchement que si je défendais un accusé en vertu de l'ancien régime et qu'on me disait qu'on va poursuivre en vertu de l'ancien régime et non du nouveau, comme procureur de la défense, je m'objecterais à cela et j'intenterais certainement une poursuite pour faire en sorte de corriger la situation.
     Une autre chose peut envenimer le dossier, selon moi. Sous l'ancien régime, il y avait quatre cours martiales. Il pourrait y avoir des accusés poursuivis devant une cour martiale qui, en vertu de la nouvelle loi C-60, n'existe plus. Si j'étais procureur de la défense, je dirais certainement que la loi C-60 vient d'annuler deux cours martiales parce qu'on trouvait que était trop et qu'on veut juger mon client dans le cadre d'une ancienne cour martiale qui n'existe plus en vertu de la nouvelle loi C-60. C'est un autre argument qui milite en faveur du retrait de l'article 28. Il faut que les gens soient tous régis par la même loi. Sinon, je pense que vous aurez des problèmes. Vous avez voulu régler un problème, mais vous allez peut-être en créer un plus gros, selon moi. Alors, jusqu'à maintenant, je milite en faveur du retrait de l'article 28.

[Traduction]

    Monsieur Murphy.
    J'ai seulement une question. Toutes mes excuses de n'avoir pas été là pour entendre la totalité du témoignage.
    Colonel Gleeson, vous avez dit que dans le petit nombre de cas où un procès en cour martiale était en cours, l'accusé avait déjà choisi le type de procès. Donc, j'imagine que vous tentiez de nous amener à croire que cela ne posait pas de problème. Mais bien sûr, ce que la décision Trépanier établit, selon moi, c'est que la discrétion ou le choix revenait entièrement au procureur de la poursuite, à défaut de trouver un meilleur mot; donc, il ne se serait pas prononcé contre s'il avait su, à l'époque, que le procureur de la poursuite avait ce pouvoir. Cela ne me convainc pas que l'effet de l'article 28 est bon, franchement.
    Peut-être n'avez-vous pas eu suffisamment de temps pour l'expliquer, ou peut-être cette question est-elle un peu trop nouvelle pour moi, ou autre chose, mais pourriez-vous m'aider à y voir un peu plus clair?
    Allez-y, avant que nous ne poursuivions.
    Oui, je serai heureux d'apporter des éclaircissements là-dessus.
    Je précise que la décision Trépanier a été rendue le 24 avril. Les individus accusés en cour martiale sont représentés par un avocat et sont certainement au courant, par l'intermédiaire de ce dernier, de leurs droits et du sens que la décision Trépanier revêt pour leurs droits depuis le 24 avril.
    Ce dont il est question ici, ou ce qui a été annulé dans la décision Trépanier, c'est le droit du procureur de choisir le type de cour. Ce droit a été annulé. Lorsque cela a eu lieu, un certain nombre de cours avaient déjà été convoquées, de sorte que le procureur avait déjà déterminé quel type de cour jugerait l'accusé. Dans certains cas, ces cours avaient déjà été convoquées et les procédures avaient commencé.
    Dans ces cas où les procédures sont déjà ouvertes, les accusés connaissent leurs droits et se font offrir la possibilité de s'opposer à subir un procès selon le type de cour choisie par le procureur. Dans les cas où ils se sont objectés, les procédures se sont arrêtées et les accusés n'ont pas subi de procès. Mais dans ces cas où ils n'ont pas opposé d'objection — autrement dit, ils ont expressément ou implicitement renoncé à leurs droits constitutionnels, tout comme on peut le faire lorsqu'on comparaît devant la police pour un interrogatoire, et se sont trouvés satisfaits du type de cour convoquée — le procès s'est poursuivi. Ainsi, l'accusé a affirmé qu'il était satisfait d'être jugé par ce tribunal, et qu'il voulait qu'on en finisse. Ces procédures ont suivi leur cours pour aboutir à une décision.
    Alors, en ce qui a trait à cette disposition — qui est là pour empêcher que nous nous retrouvions dans une position où il y a de l'incertitude ou un manque de clarté —, lorsque le projet de loi entrera en vigueur, il pourrait bien y avoir des affaires en cours où les accusés se sont essentiellement déclarés satisfaits du type de cour qui les jugerait. Cette cour pourrait alors mener le procès jusqu'au bout, plutôt que de devoir s'arrêter et créer davantage d'incertitude quant à savoir s'il est possible de le reprendre. Faute d'une reprise du procès, il est évident que l'accusé pourrait ne pas être tenu responsable, ni avoir l'occasion de faire valoir sa position relativement aux accusations. Le tribunal pourrait ne jamais être en mesure de reprendre les procédures à nouveau. Si la cour était reconvoquée, et pouvait légalement le faire — et je crois que ce serait discutable — on retarderait l'aboutissement du procès d'un accusé qui souhaite en voir la conclusion en empêchant ce procès de suivre son cours.
    Voilà donc les choses qui se produisent si on empêche le procès de se poursuivre. Mais si on le laisse aller de l'avant, l'accusé, comme je l'ai dit, a la possibilité, par l'entremise de son conseil, de s'opposer à la cour. Jusqu'à maintenant, les juges qui entendent ces objections arrêtent les procédures; elles cessent
(1840)
    Si je puis ajouter quelque chose là-dessus, l'article 28 stipule que le procès doit se poursuivre.
    Les procédures doivent être poursuivies, si elles ont commencé. Mais le mot « commencé » suppose qu'on a déjà donné à l'intéressé la possibilité de faire son objection. Cette objection a lieu avant qu'on inscrive un plaidoyer à une accusation.
    Je croyais que vous veniez de répondre qu'à n'importe quel moment durant leur procès, les accusés pouvaient faire objection, et les juges leur permettaient de ne plus être soumis à ce procès.
    Non, je n'ai pas dit cela.
    D'accord, seulement au moment qui précède...
    À l'ouverture du procès, on donne aux accusés l'occasion de s'objecter. S'ils s'objectent à mi-chemin des procédures, je n'ai aucune idée de ce que le juge ferait. Il pourrait bien arrêter les procédures. Encore une fois, c'est une décision judiciaire.
    Si je pouvais brièvement résumer votre position quant à la signification du paragraphe 28(1), si un procès a commencé, il doit se poursuivre.
    Si un procès a commencé, il se poursuivra en vertu de...
    Il « doit » se poursuivre.
    Oui, aux termes des paragraphes 28(2), 28(3) et 28(4), dispositions qui portent sur l'unanimité.
    Il s'agit donc d'un comité de la cour martiale. Toutes ces protections garanties par l'unanimité sont intégrées au procès.
    Comme je l'ai dit, l'objectif est simplement de conférer une certaine certitude à ces situations.
    MM. Hawn, Rota et Blaney, puis Mme Black.
    Pour poursuivre dans cette veine, j'ajoute que j'ai déjà entendu dire — et je crois que c'est juste — que dans les faits, on avait accordé aux accusés ces droits qui reviendront aux gens en vertu du projet de loi C-60, par le seul processus que vous avez mentionné. L'autre aspect, dont nous n'avons pas parlé, c'est que la nouvelle exigence relative aux conclusions unanimes des membres s'appliqueront dans tous les cas. On obtiendra la protection supplémentaire de cette disposition.
    C'est exact.
    Essentiellement, on leur a déjà accordé les droits prévus dans le projet de loi C-60 par le seul processus transitoire que vous avez mentionné.
    En vertu du processus qui avait toujours été en place, il était possible de s'objecter. Maintenant, l'un des motifs d'objection est: « Je n'ai pas pu choisir mon type de cour; je ne veux pas de celle-là ». C'est quelque chose qui se produit maintenant en cours de procès.
    Monsieur Rota.
    J'aimerais seulement clarifier cette dernière remarque. Dites-vous qu'on a cette option en vertu de l'article 28, ou pas?
    On a cette option actuellement. Donc, en vertu de la procédure en vigueur...
    Non, je parle des procès en cours, de ceux qui ont commencé. C'est de cela qu'il est question.
    Dans le cas des procès qui sont ouverts, on ne bénéficie pas de cette option à ce stade.
    Ils auraient déjà exercé cette option. Je le répète, en ce qui a trait à n'importe quel procès ouvert depuis l'arrêt Trépanier, l'accusé, avant de déposer un plaidoyer relativement aux accusations, aura eu la possibilité de s'objecter en s'appuyant sur la décision Trépanier en répondant à la question « Vous objectez-vous à être jugé par cette cour? ». C'est ce qui s'est produit depuis l'affaire Trépanier, et il en sera ainsi jusqu'à ce que cette dernière soit réglementée.
    Évidemment, si la loi entre en vigueur, il n'y aura plus aucune justification légale pour faire cette objection. On continuera à leur poser la question, mais les accusés ne pourront formuler une objection en se fondant sur la décision Trépanier. Néanmoins, en attendant qu'un tel scénario se réalise, quiconque a subi un procès en fonction d'un choix du directeur des poursuites militaires aura la capacité de présenter une telle objection en réponse à cette question. C'est le cas maintenant, et ce le sera pour toutes les personnes dans cette situation.
    Merci.
    M. Blaney, Mme Black et M. Wilfert.

[Français]

    Monsieur le président, les derniers échanges m'ont permis de mieux comprendre la portée de l'article 28. Je dirais presque qu'au fond, il protège l'accusé. En effet, on voit que le système militaire s'est adapté depuis l'arrêt Trépanier et que l'occasion a été donnée à l'accusé d'accepter ou de refuser la cour qui lui était proposée. Le libellé permet de préserver cela, mais une fois que c'est commencé, comme on dit, il faut s'y conformer. Je trouve cela très bien dans sa forme actuelle.

[Traduction]

     Je vous remercie beaucoup.
    Madame Black.
(1845)
    Je trouve difficile de comprendre comment on pourrait donner ces choix à chacun des accusés, y compris de l'information sur le projet de loi C-60, alors que celui-ci vient tout juste d'être rédigé et que la décision Trépanier a été rendue le 24 avril. Il me semble qu'il y a là un intervalle. Je suis très préoccupée par le fait que certains accusés puissent franchir les étapes du processus d'un système déjà considéré défectueux par la Cour d'appel, celle-ci demandant qu'on apporte des changements.
    À mesure que j'écoute la discussion, j'ai la conviction de plus en plus forte que nous devrions éliminer cette disposition.
    Allez-y, colonel Gleeson.
    Si je puis me permettre, monsieur le président, la Cour d'appel de la Cour martiale elle-même, comme M. Drapeau l'a indiqué, était d'avis que le système pourrait et devrait continuer de fonctionner malgré sa décision. Ce qui l'en empêche, c'est l'idée que nous ne pourrons convoquer de nouvelles cours, mais celles qui ont déjà été convoquées — les cours formées à un moment où la décision Trépanier avait été rendue —, comme l'a souligné le juge-avocat général, se sont poursuivies. Elles sont allées de l'avant. Et ce, dans un contexte de grande incertitude, à cause de la capacité de l'accusé, conformément à cette étape procédurale en cour martiale, de s'objecter au type de cour choisi. En cas d'objection, les juges réagissent de différentes manières, mais dans tous les cas, pour des raisons et des motifs légaux variés, le procès a été arrêté ou suspendu.
    C'est pourquoi les accusés peuvent faire ce choix. Ce sont seulement les accusés dont le procès a été ouvert avant l'arrêt Trépanier et qui ont, depuis, commencé à utiliser cette condition, au sens qu'elle revêt ici — ceux qui ont été en position de déposer un plaidoyer relativement aux accusations —, à qui l'on offre ces choix dans le cadre de cette procédure standard du chapitre 112.
    Pour être plus clair là-dessus, je...
    Si n'importe quel accusé a déclaré de ne pas souhaiter être jugé par une cour, s'il s'est objecté, le procès ne s'est pas poursuivi, en attendant une adoption ou une modification de la législation.
    Cela vaut pour quiconque comparaît devant un juge et s'oppose à subir un procès devant cette cour. Je ne peux prédire ce que feront les juges dans l'avenir, mais dans tous les cas, jusqu'ici, ils ont arrêté ou suspendu les procédures.
    Si je puis ajouter un point, monsieur le président, je crois qu'il est important pour les membres du comité de comprendre que la Cour d'appel de la Cour martiale n'a pas affirmé que quoi que ce soit clochait avec les types de cours en soi. Si la personne est satisfaite d'être jugée, par exemple, par une cour martiale disciplinaire, il n'y a rien de mal avec ce type de tribunal, de l'avis de la Cour d'appel de la Cour martiale, et c'est l'objet de cette disposition transitoire. Si l'accusé est devant une cour, et qu'il en est satisfait, il n'y a pas de problème avec ce type de cour même si, ultimement, elle serait abolie par le projet de loi C-60. On devrait permettre à cette cour particulière de mener les procédures à terme.
    J'ajouterais que le procès de l'accusé devrait être à mi-chemin.
    Avant de céder la parole à M. Wilfert, j'aimerais savoir si vous voulez dire que sans l'article 28, nous placerions ce petit groupe d'individus en position de désavantage?
    Oui; ils seraient dans une impasse.
    Cela répond à la première partie de ma question. Ils seraient dans une impasse.
    La deuxième partie de ma question est d'ordre hypothétique. Si nous devions simplement retirer l'article 28, cela aurait-il des incidences pour d'autres parties du projet de loi?
    Eh bien, cela crée une impasse et sans doute de la confusion également, car encore une fois, nous aurons des juges qui tenteront de déterminer quoi faire dans ces cas-là, si des gens se retrouvent dans une telle situation. Cela entraînera de l'incertitude relativement aux procédures.
    Si les juges croyaient pouvoir continuer, les accusés pourraient ne pas bénéficier des dispositions sur l'unanimité. Il y aurait beaucoup d'incertitude quant à ce qui se produirait avec le comité de la cour martiale, par exemple, quant à la manière dont le tribunal trancherait la question. Le juge mettrait-il simplement fin au procès? Tenterait-il de poursuivre? Le cas échéant, quelles règles utiliserait-il en instruisant les membres du comité relativement à leur décision?
    L'objectif de cette disposition transitoire est simplement de conférer une certaine certitude à ces procédures, advenant une telle situation après l'entrée en vigueur du projet de loi. C'est là tout ce qu'elle vise. Donc, les effets seraient les suivants: incertitude, manque de clarté et appels potentiels. C'est ce à quoi nous aboutirions. Avec un grand nombre de cas? Non, mais...
    Monsieur Hawn, je suis navré; vous êtes sur la liste.
    J'aimerais seulement souligner quelque chose. À mes yeux, il est clair qu'ultimement, il s'agit d'accorder davantage de protection à l'individu. Il s'agit de le protéger, et non de le mettre en péril.
    Allez-y, monsieur Bachand, puis nous allons conclure.

[Français]

    Je reviens à ma question. Je ne suis pas certain d'avoir entendu de réponse dans ce que vous avez dit. Y a-t-il des accusés qui ont été traduits devant des cours martiales que le projet de loi C-60 abolit, au moment où on se parle?
(1850)

[Traduction]

    Allez-y.
    Je ne suis pas certain d'avoir tout saisi. M'avez-vous demandé s'il y aura des gens qui feront face à une cour martiale disciplinaire lorsque ce projet de loi entrera en vigueur?
    Non. J'ai demandé si en ce moment, des accusés étaient traduits devant des cours martiales, que le projet de loi C-60 abolit.
    Voulez-vous dire actuellement, aujourd'hui?
    Oui.
    Je crois qu'il me faudrait confirmer ce fait, mais je suis certain que le DPM a probablement, avant l'arrêt Trépanier, ordonné que des accusés soient jugés en vertu de procédures à la cour martiale disciplinaire, lesquelles pourraient ne pas être encore complétées, oui. J'ignore la quantité de cas; il n'y en a probablement pas beaucoup, mais certainement quelques-uns, oui.

[Français]

    Ne croyez-vous pas qu'un avocat de la défense pourrait demander de mettre fin à la procédure juridique parce que la cour devant laquelle il se trouve disparaît avec le projet de loi C-60?
    À mon avis, il y a là un risque fondamental.

[Traduction]

    Il y a sûrement une possibilité qu'un individu agisse en ce sens, mais vous noterez que ce projet de loi prévoit une disposition relative à un délai de 30 jours avant l'entrée en vigueur, alors je m'attends à ce que la plupart des accusés dont le procès a commencé avant l'application de cette disposition soient au courant de l'entrée en vigueur de ce projet de loi. Ils auraient la possibilité, au cours de cette période — s'ils sont traduits devant la cour martiale disciplinaire, par exemple, et s'ils passent par ces étapes procédurales — de dire qu'ils ne veulent pas être jugés par cette cour. Encore une fois, cela enclenche le processus que nous avons déjà pu voir quatre ou cinq fois.
    Si une affaire a déjà commencé en dehors de ce délai de 30 jours, il est possible qu'un accusé demande à ne pas être jugé par cette cour. Il pourrait présenter cette proposition au juge, qui la traiterait.
    Je me permets d'ajouter, monsieur le président, que j'ai déjà été avocat de la défense militaire, et que l'une des leçons que j'ai apprises, c'est qu'en tant qu'avocat, on n'établit pas soi-même ses directives. L'accusé a une autonomie. C'est à lui qu'il revient de décider comment il veut poursuivre dans ce cas, et de donner des directives à son avocat en conséquence. En toute déférence, il ne revient pas aux membres du Comité, ni à moi, ni à personne d'autre que l'accusé de prendre cette décision pour lui dans ces circonstances.
    Attendez un peu. Une seule conversation à la fois, s'il vous plaît.
    Aviez-vous un commentaire officiel à lui transmettre, madame Black?
    Non.
    Quelqu'un d'autre veut intervenir? D'accord. Je vais mettre aux voix l'article...
    Nous vous écoutons, monsieur Bachand.

[Français]

    J'aimerais poser une question de procédure. Si on voulait abolir l'article 28, est-ce qu'on n'aurait qu'à voter contre? J'imagine que oui.

[Traduction]

    C'est exact.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    (L'article 28 est rejeté.)
    (Les articles 29 et 30 sont adoptés.)
    Monsieur Bachand, votre motion traite de ce qui deviendrait l'article 31.1. Si vous nous permettez de régler la question de l'article 31, nous pourrons ensuite examiner votre motion.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    (L'article 31 est adopté.)
    Allez-y, monsieur Bachand.

[Français]

    En ce qui a trait à l'article 31.1, j'invite mes collègues à lire l'amendement que je propose.
    Avant que je ne le dépose, monsieur le président, j'aimerais savoir si le fait que le comité ait retenu la révision obligatoire sur deux ans aura une incidence. Je me sens mal à l'aise d'introduire une disposition de temporisation sur un an. En fait, si on adopte ma disposition, je pense que celle de M. Wilfert deviendra caduque.
    Qu'en pense le rédacteur législatif?
(1855)

[Traduction]

    Vous pouvez en faire la proposition. Nous en avons une copie en main.
    Si vous voulez proposer la motion en précisant « deux ans », vous pouvez très bien le faire. Il ne s'agit pas d'un amendement. Cela s'inscrit simplement dans la nouvelle motion.
    D'accord, mais je dois inclure les termes « deux ans » dans la motion.
    C'est comme vous voulez; c'est à vous de décider.

[Français]

    Monsieur le président, je veux vous rappeler votre promesse. Vous m'avez dit que je pouvais déposer ma disposition, mais je me suis dit que si je la déposais, les membres du comité pourraient la rejeter parce qu'ils ne l'accepteraient pas telle quelle.
    Je ne voulais pas que cela se règle de cette façon. En fait, je voudrais illustrer ce que je veux dire quand je parle de la ceinture et des bretelles. M. Wilfert a mis la ceinture, et moi, je veux mettre les bretelles. Je pense que c'est faisable à la condition qu'on ne me dise pas que c'est impossible. Je suis un peu embêté, et c'est la raison pour laquelle j'ai tâté le terrain de votre côté. Vous m'avez seulement dit que je pouvais déposer ma disposition, mais je me fais dire qu'elle n'est pas acceptable parce qu'il y a une révision.
    Je vais la déposer, mais en indiquant deux ans. D'accord?

[Traduction]

    D'accord.

[Français]

    Qu'en pensez-vous?

[Traduction]

    La motion sera rejetée de toute façon.

[Français]

    C'est deux ans. L'amendement se lit ainsi:
Les modifications apportées par la présente loi cessent d'avoir effet deux ans après son entrée en vigueur ou, si le Parlement n'est pas alors en session, quatre-vingt-dix jours après le début de la session suivante.
    Certaines personnes ont dit qu'en cas d'élections, on devra tout recommencer. Or, ce n'est pas le cas. La disposition prévoit que s'il y a une autre législature, ce sera 90 jours à partir de la session suivante.

[Traduction]

    J'aimerais seulement lire à nouveau l'amendement. Attendez, ce n'est pas un amendement. Oui, c'est bien un amendement, et il est proposé par M. Bachand relativement à l'article 31.1.
    Veuillez nous en faire lecture.

[Français]

    L'amendement se lirait comme suit:
Les modifications apportées par la présente loi cessent d'avoir effet deux ans après son entrée en vigueur ou, si le Parlement n'est pas alors en session, quatre-vingt-dix jours après le début de la session suivante.
    C'est cela.

[Traduction]

    Est-ce que cela vous convient, monsieur Bachand?
    Merci.
    Madame Black.
    J'attends juste pour voir si l'amendement est recevable.
    Il est recevable. Quelqu'un veut en débattre?
    J'ai seulement un peu de difficulté à comprendre la raison pour laquelle une loi prévoirait un examen obligatoire au bout de deux ans en plus d'une disposition de temporisation pour la même période.
    Nous avons déjà approuvé l'examen après deux ans. Si nous devons y ajouter cette disposition, ne serait-il pas préférable que la temporisation se fasse sur une période de trois ans? Comment pouvons-nous enclencher un processus d'examen et voir la mesure de temporisation s'appliquer avant même que nous ayons reçu les résultats de cet examen.
    Merci.
    On pourrait aller jusqu'à trois ans...
    Je me demandais si le Bloc serait prêt à accepter un amendement portant cette période à trois ans, si j'en faisais la proposition.
    Vous voulez présenter un sous-amendement à l'amendement pour que la mention « deux ans » soit remplacée par « trois ans ».
    Cela porterait la période de temporisation à trois ans. C'est effectivement ce que je voudrais faire.
    D'accord. Est-ce que tout le monde comprend bien?
    Quelqu'un veut en débattre?
    Je vais mettre le sous-amendement aux voix.
    Suis-je la seule qui est pour?
    Le sous-amendement est rejeté.
    Je mets maintenant l'amendement aux voix.
    Allez-vous laisser la période à deux ans?
    C'est bien cela.
    S'agit-il de deux ans ou de trois ans?
    C'est deux ans. Le sous-amendement prévoyant trois ans a été rejeté.
    Vous l'avez rejeté pendant que je parlais avec la gentille dame qui est ici. Je ne vous ai pas entendu le mettre aux voix.

[Français]

    On dit: « intelligente ».
    Des voix: Ah, ah!

[Traduction]

    D'accord, je vais mettre à nouveau le sous-amendement aux voix. Il vise à faire passer de deux à trois ans la période de temporisation.
    (Le sous-amendement est rejeté.)
    Nous allons maintenant voter au sujet de l'amendement.
    (L'amendement est rejeté.)
    D'accord. Il y avait un amendement proposé par M. Wilfert concernant le nouvel article 31.1. Il a été retiré.
    (L'article 32 est adopté.)
(1900)
    Le titre est-il adopté?
    Des voix: D'accord.
    Le projet de loi modifié est-il adopté?
    Des voix: D'accord.
    Une voix: Avec dissidence.
    Le président doit-il faire rapport à la Chambre du projet de loi modifié?
    Des voix: D'accord.
    Le Comité ordonne-t-il la réimpression du projet de loi modifié pour l'usage de la Chambre à l'étape du rapport?
    Des voix: D'accord.
    La séance est levée.