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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 005 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 novembre 2007

[Enregistrement électronique]

  (0900)  

[Français]

    Bonjour et bienvenue à cette cinquième séance du Comité permanent des langues officielles. Aujourd'hui, il nous fait extrêmement plaisir d'accueillir le commissaire aux langues officielles, M. Graham Fraser.
    Au nom des membres du comité et en mon nom personnel, je me permets de vous souhaiter la bienvenue, monsieur Fraser, à votre deuxième comparution devant notre comité.
    Sans plus tarder, je vais laisser la parole au commissaire. Par la suite, nous pourrons entreprendre les tours de questions.
    Monsieur le commissaire, vous avez la parole.
    Messieurs les députés,

[Traduction]

Je suis heureux de vous rencontrer aujourd'hui. Ma première année en tant que commissaire aux langues officielles a été pour moi une expérience intense d'apprentissage. C'était l'occasion d'approfondir mes connaissances sur la vitalité des communautés sur les langues officielles de partout au pays et de constater de plus près leur dynamisme et leur détermination à faire connaître de plus près leurs besoins criants aux divers paliers de gouvernement. D'ailleurs, j'ai rendu visite à nombre de ces communautés à travers le pays afin de pouvoir en témoigner personnellement.
    Depuis mon arrivée, je me suis présenté devant divers comités parlementaires pour émettre les constats de mon premier rapport annuel et exposer ma vision, entre autres choses sur les Jeux olympiques de 2010, le déménagement des administrations centrales, les règlements de la Loi sur les langues officielles, la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada, l'examen du mandat de Radio-Canada, l'approche fonctionnelle élaborée par les Forces canadiennes, et les modifications suggérées au Code criminel afin de garantir les droits linguistiques des accusés. D'autre part, j'ai eu l'occasion de partager ma vision de la dualité linguistique, entre autres, par le biais des nombreuses entrevues et allocutions que j'ai données au cours de l'année.
    Au cours de la dernière année, j'ai pu constater l'importance des activités des comités parlementaires sur les langues officielles. Je pense notamment aux travaux du Comité des langues officielles de la Chambre des communes sur la vitalité des communautés, qui offrent de précieux renseignements et orientations au gouvernement du Canada.
    Par ailleurs, ce dernier pourra aussi s'appuyer sur l'étude réalisée par le commissariat sur la vitalité des communautés pour l'élaboration de la deuxième phase du plan d'action pour les langues officielles.
    Immédiatement après mon entrée en fonction, j'ai dû m'attaquer à un défi considérable, et une première tâche d'envergure, c'est-à-dire l'examen de nombreuses plaintes déposées à la suite des réductions budgétaires effectuées par le gouvernement fédéral en septembre 2006. Il s'agissait pour le commissariat d'un premier examen reposant sur une analyse de l'application de la partie VII de la Loi sur les langues officielles, depuis sa modification en novembre 2005.
    Comme vous le savez, j'ai complété mon rapport final sur cette question le 9 octobre dernier. Prenant en compte les commentaires du gouvernement et des plaignants au sujet de mon rapport préliminaire, j'ai conclu que l'examen des dépenses de 2006 n'était pas conforme à l'engagement du gouvernement du Canada, tel qu'il est exprimé dans la partie VII de la Loi des langues officielles, ni aux obligations des institutions fédérales en cause, lesquelles doivent prendre des mesures positives afin de mettre en oeuvre cet engagement.

[Français]

    La semaine dernière, j'ai pris la décision d'intervenir dans le recours judiciaire de la Fédération des communautés francophones et acadienne pour s'opposer à la décision du gouvernement d'abolir le Programme de contestation judiciaire. J'ai décidé en effet de demander le statut d'intervenant parce que les questions portées devant la cour ont un intérêt national. Ce recours permettra aux tribunaux de clarifier, pour la première fois, la portée des obligations linguistiques stipulées dans la partie VII de la Loi sur les langues officielles, modifiée en 2005. Le recours et ses suites auront d'importantes répercussions sur toutes les institutions fédérales et les communautés de langue officielle.
    Pour donner suite à la demande exprimée dans votre rapport d'octobre 2003, j'ai effectué une vérification des services de santé offerts à divers groupes tels que les anciens combattants, les Autochtones, les détenus et les cadets de la GRC. Certes, la pénurie générale de travailleurs de la santé rend difficile la tâche d'embaucher du personnel bilingue, mais il demeure que tous ces groupes ont le droit de recevoir des services dans la langue officielle de leur choix. Je recommande donc que le gouvernement agisse dans les plus brefs délais pour assurer le plein respect de la loi.
    Le commissariat a également réalisé plusieurs travaux de recherche. Nous avons notamment publié trois études sur la vitalité des communautés de Halifax, Sudbury et Winnipeg, une étude de suivi sur les relations internationales et une étude sur les perceptions du public de la Saskatchewan à l'égard de la culture française et de l'apprentissage du français langue seconde.
    L'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire dépend de plus en plus des mesures prises par les provinces et les territoires à la fois dans le domaine de l'éducation, de la santé et de l'immigration. J'étais heureux d'entendre la déclaration des ministres des Affaires francophones, en septembre dernier, selon laquelle ils appuient fermement le renouvellement du Plan d'action pour les langues officielles. Les représentants des gouvernements provinciaux attendent la suite avec impatience.
    Tout récemment, dans son discours du Trône, le gouvernement du Canada a informé la population qu'il établirait une deuxième phase pour la suite du plan d'action, qui viendra à échéance en mars 2008. Il s'agit d'une initiative très attendue qui témoigne du leadership du gouvernement à l'égard de la dualité linguistique.
    Je suivrai l'évolution du dossier.

  (0905)  

[Traduction]

    Après un an au poste de commissaire, je comprends beaucoup mieux les rouages des politiques sur les langues officielles au sein du gouvernement fédéral. Je peux aujourd'hui affirmer que les langues officielles ne peuvent s'épanouir dans la fonction publique canadienne sans un leadership solide de la part des dirigeants. En effet, sans un tel leadership, les valeurs associées à la dualité linguistique se transforment en fardeau pour les fonctionnaires fédéraux.
    J'en suis d'ailleurs venu à la conclusion que la dualité linguistique, en ce qui concerne les cadres de la fonction publique fédérale, est en fait une compétence de leadership essentielle. Comment peut-on exercer un leadership si l'on ne comprend pas les personnes que l'on dirige? Comment peut-on respecter les membres du public si l'on ignore leurs droits linguistiques et leur culture? Comment peut-on vraiment comprendre un pays comme le Canada si l'on ne parle pas ses deux grandes langues de communication?

[Français]

    Plus que jamais, je suis convaincu que le français et l'anglais sont des langues canadiennes qui appartiennent à tous les citoyens et citoyennes de notre pays. C'est dans cette optique que le dossier de l'enseignement prend toute son importance, et je poursuivrai mes efforts afin que les établissements d'enseignement postsecondaire reconnaissent la valeur de la formation d'étudiants bilingues. À l'échelle nationale, dans de nombreux secteurs d'activité, le bilinguisme est primordial pour ceux qui doivent exercer un leadership. Et ces secteurs incluent, entre autres, la fonction publique, le plus important employeur du pays. Pour mener à bien mon projet, je compte entreprendre, en collaboration avec l'Association des universités et collèges du Canada, une étude sur les possibilités d'apprentissage de la langue seconde dans les universités canadiennes.
    Comme vous le savez, mon mandat repose sur deux sphères d'intervention distinctes mais complémentaires: la promotion et la protection.

[Traduction]

    Les événements qui ont marqué la première année de mon mandat m'ont incité à me pencher sur mon rôle d'ombudsman par rapport au besoin fondamental de faire évoluer la culture des institutions fédérales et de faire valoir la valeur ajoutée que constitue, pour le gouvernement fédéral, une politique linguistique forte.
    Les enquêtes, les vérifications et les bulletins de rendement des institutions demeurent des outils importants; nous voulons cependant élargir notre champ d'action en examinant d'autres options.
    Mon rôle d'ombudsman linguistique consiste à veiller à ce que le gouvernement et la fonction publique fédérale se conforment de façon proactive à la Loi sur les langues officielles. Soucieux d'appuyer les institutions fédérales dans la mise en oeuvre de leurs obligations et afin que les droits linguistiques du public, des employés et des communautés soient pleinement respectés, j'examine d'autres façons de faire qui pourraient s'ajouter aux enquêtes, aux bulletins de vérification et de rendement déjà existants.
    J'envisage d'étoffer ce rôle aux moyens de mécanismes d'intervention axés sur une résolution plus efficace des différents et la prévention des problèmes qui suscitent ces différents.

[Français]

    C'est dans cet esprit de collaboration et de prévention que je surveille de près l'évolution du dossier des Jeux Olympiques de 2010. Il s'agira d'une période excitante pour le Canada, pendant laquelle l'attention du monde entier sera tournée vers lui. Nous sommes fiers de vivre dans un pays qui reconnaît l'importance de sa dualité linguistique. C'est pourquoi l'image du Canada bilingue doit être sans équivoque, que ce soit aux points d'entrée internationaux, comme les aéroports de Vancouver ou de Toronto, sur les voies de Via Rail ou encore aux postes frontaliers que nous partageons avec nos voisins américains. Il reste encore du temps pour se préparer à la rencontre et, de concert avec les différents intervenants, y compris le milieu communautaire francophone, nous devons nous mettre à l'oeuvre. C'est pourquoi nous nous apprêtons à étudier les préparatifs établis par le Comité organisateur des Jeux Olympiques de 2010 sous l'angle de la dualité linguistique. Un rapport sera publié dès l'automne 2008, ce qui donnera le temps d'apporter les correctifs nécessaires, s'il y a lieu. Je ne voudrais pas devoir critiquer, après coup, ce qui devrait être un grand événement canadien et une source de fierté nationale.
    Également au cours de l'année 2008, le commissariat effectuera la vérification de l'ensemble de la formation offerte au personnel des Forces canadiennes, afin de déterminer dans quelle mesure les possibilités d'apprentissage sont fournies dans les deux langues officielles. Il va de soi que nous travaillons de près avec l'ombudsman de la Défense nationale, Me Yves Côté, pour assurer la complémentarité de nos démarches.
    Nous poursuivrons l'examen de la vitalité des communautés de langue officielle afin de suggérer des outils qui leur permettront de mieux canaliser leurs efforts auprès des institutions fédérales en vue d'une application optimale de la partie VII de la loi. Dans ce contexte, c'est l'occasion de réaffirmer le rôle que doivent jouer les institutions fédérales dans la mise en oeuvre de la partie VII.
    Je continuerai également de communiquer, au sein de la fonction publique, ma vision du leadership pour ce qui a trait aux langues officielles. Je constate à l'heure actuelle une application moins rigoureuse, voire minimaliste, de la Loi sur les langues officielles dans la fonction publique fédérale. Sans un leadership soutenu de la part des dirigeants, nous assisterons à un recul imminent. Le greffier du Conseil privé a lancé une initiative de renouvellement de la fonction publique, et il va sans dire que la dualité linguistique doit trouver sa place dans toutes les facettes de cette réforme. Voilà un autre dossier que je suis de près.

  (0910)  

[Traduction]

    Par ailleurs, à ce sujet, les données sur le service au public et la langue de travail que j'ai présentées dans mon rapport annuel continuent de m'inquiéter. Je crains une accélération du relâchement constaté si la fonction publique doute du gouvernement à l'égard des langues officielles. S'il est vrai que la société canadienne se compose de nombreuses identités culturelles, le français et l'anglais demeurent les deux langues officielles de communication. Nos politiques de langues officielles et de multiculturalisme devraient fonctionner en symbiose de manière à promouvoir le respect et l'égalité des chances.
    J'ai commencé à explorer les liens qui existent entre la dualité linguistique et la diversité culturelle, notamment par la tenue d'un forum à Toronto, le mois dernier. J'entends poursuivre ce travail afin de mieux comprendre comment les Canadiens et les Canadiennes d'origines diverses vivent leur relation avec les deux langues officielles et de pouvoir en tenir compte dans nos démarches et dans nos recommandations au gouvernement.

[Français]

    Je vous ai fait part de certaines de mes priorités pour la deuxième année de mon mandat. Évidemment, au-delà de mon travail à titre de commissaire, le gouvernement a aussi un rôle important à jouer dans le cadre de la dualité linguistique canadienne. Ainsi, au cours de la prochaine année, je m'attends à voir des résultats de la part du gouvernement dans trois enjeux spécifiques.
    Premièrement, le gouvernement doit absolument passer aux actes en ce qui concerne le développement et la mise en oeuvre de la prochaine phase du Plan d'action pour les langues officielles. Deuxièmement, il doit exercer un leadership ferme pour améliorer l'offre de services au public canadien. Finalement, il doit tenir compte des langues officielles en tant que compétence de leadership à l'intérieur du processus de renouvellement de la fonction publique.

[Traduction]

    J'espère que vous aussi, Mesdames et Messieurs les députés, jugerez bon de vous penchez sur ces questions que je considère les plus pressantes.
    Merci de votre attention. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le commissaire.
    Nous allons maintenant commencer notre premier tour de questions et commentaires avec M. Pablo Rodriguez.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le commissaire, c'est toujours un plaisir de vous accueillir parmi nous. Bienvenue à vous et aux membres de votre équipe.
    Vous avez souvent parlé dans votre rapport des nouvelles dispositions de la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Vous avez dit notamment que:
La plupart des institutions fédérales en sont encore à se demander comment donner forme à ces obligations dans leur sphère d’intervention respective.
    On parle d'un changement qui a pris forme il y a deux ans. Or, il s'est écoulé deux ans depuis l'adoption du projet de loi S-3.
    Comment expliquez-vous ce retard?

  (0915)  

    Tout changement apporté à une loi prend du temps. La Loi sur les langues officielles a d'abord été présentée en 1969 et a ensuite été amendée en 1988. En grande partie, il s'agit d'un appel aux institutions à changer leur attitude, et cela prend du temps. Certains pensent qu'on devrait commencer par adopter un règlement. Je n'en suis pas certain. Le but premier de la partie VII est d'inciter les institutions du gouvernement à adopter une nouvelle approche de collaboration à l'égard des communautés minoritaires.
    Certaines institutions ont fait des progrès considérables, en partie à la base, lorsque des directeurs ont fait des démarches auprès des communautés pour ouvrir des portes et établir un nouveau dialogue avec elles. J'espère que les rapports des institutions sur leur application des nouvelles obligations en vertu de la partie VII démontrent qu'elles ont fait plus que simplement tenir des réunions et préparer tous les employés. Il faut qu'elles aient pris des mesures concrètes.
    Les gens sur le terrain ont souvent dit avoir l'impression que les communautés ne savaient pas trop vers où se diriger et qu'elles ne se sentaient pas consultées.
    Consulte-t-on suffisamment les communautés?
    Cela dépend de l'institution ou du ministère. Certaines institutions et certains ministères ont consulté les communautés afin de connaître les mesures pouvant avoir un impact réel sur elles, alors que d'autres ont une approche différente.
    Faudrait-il uniformiser cela un peu plus?
    Il faut aussi faire en sorte que ce soit un réflexe, ce qu'on pourrait appeler le réflexe de la partie VII. Je donne souvent deux exemples montrant comment ce réflexe peut être interprété. Un directeur de Parcs Canada à Jasper a consulté la communauté et lui a offert des locaux gratuits si, en échange, elle fournissait des cours de conversation française à ses employés. Par ailleurs, lorsque le PDG de VIA Rail a eu connaissance de cette obligation, il n'a pas établi de contact avec une communauté en particulier. Il est venu à la FCFA et, après consultations, est devenu un commanditaire du sommet.
    Si vous me le permettez, comme on n'a pas beaucoup de temps, je vais changer de sujet rapidement.
    Vous semblez dire que les deux rôles de la ministre sont inconciliables. Vous dites:
    
Pour bien jouer son rôle de coordinatrice de l’ensemble des activités des institutions fédérales en matière de langues officielles, elle doit poser un regard critique sur ces institutions. Or, comme elle est responsable des programmes touchant les langues officielles d’une de ces institutions, comment peut-elle faire preuve d’objectivité?
    Elle doit donc se surveiller elle-même. Est-ce bien cela?
    Oui. À partir de cette observation dans le rapport annuel, on a commandé une recherche au professeur Donald Savoie, à la demande du comité de l'autre chambre, afin d'étudier en profondeur la question de la gouvernance, après la décision de transférer cette responsabilité de coordination du Bureau du Conseil privé au ministère du Patrimoine canadien.
     À notre avis, le Programme de contestation judiciaire est la grande priorité des communautés. Lorsque nous avons voyagé et que nous avons discuté avec elles, ce sujet revenait tout le temps. Vous avez conclu que la décision d'abolir ce programme n'était pas conforme à l'engagement pris par le gouvernement du Canada dans la partie VII de la Loi sur les langues officielles, et vous avez récemment décidé d'intervenir à la cour.
    J'aimerais que vous nous résumiez les grandes lignes de votre position sur l'abolition du Programme de contestation judiciaire.

  (0920)  

    Effectivement, j'ai présenté un affidavit devant la cour pour demander la permission d'intervenir. Notre intervention touchera des points très spécifiques: la portée de l'obligation qui incombe aux institutions en vertu du paragraphe 41(2); ce que signifient les « mesures positives »; quelles sont la nature et la portée de l'obligation de consulter, ce que vous avez soulevé; le type d'examen que doivent effectuer les tribunaux pour évaluer la conformité d'une institution fédérale à la partie VII; dans quelle mesure Patrimoine canadien en a respecté les obligations, ce qui a été étudié aussi profondément que possible dans l'enquête que l'on a menée; et la nature et la partie du droit de recours qui est prévu dans la partie X de la loi.
    Effectivement, c'est la première fois que les tribunaux vont tester et examiner la portée de cet amendement. On veut que la portée de la loi soit établie.
    Merci.
    Merci, monsieur Fraser.
    C'est votre tour, monsieur Nadeau.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Tremblay, monsieur Finn, monsieur Dussault et monsieur Fraser, bonjour.
    La question des langues officielles me touche beaucoup. Il y a un terme que le Commissariat aux langues officielles n'utilise pas, et c'est le terme « assimilation ». Pourtant, lorsqu'on parle des communautés, et même du fait français au Québec, on constate des transferts linguistiques et la perte de l'usage du français dans la langue parlée au profit de l'anglais.
    La lutte contre l'assimilation est importante. Je me souviens que l'Association culturelle franco-canadienne de la Saskatchewan, qui est aujourd'hui l'Assemblée communautaire fransaskoise, avait adopté une résolution qui visait une assimilation de 0 p. 100 et une francisation de 100 p. 100.
    Quels efforts le commissariat peut-il faire pour que cesse le fléau de l'assimilation? Elle se produit surtout dans les milieux où les francophones sont le plus minoritaires, bien qu'il y en ait dans le Pontiac, pas loin d'ici. Des Bilodeau, des Lalonde et des Morand ne parlent plus français. L'archevêché catholique de Pembroke avait des écoles anglaises dans le Pontiac, et à l'époque, la religion primait sur la langue.
    Que fait le commissaire? Et que peut-il faire de plus, à votre avis? Que doit faire Patrimoine canadien pour qu'on en arrive à éradiquer l'assimilation?
    Monsieur le président, je pense que la vitalité est, par rapport à l'assimilation, l'envers de la médaille. On a très souvent soulevé, entre autres dans le cadre de ce comité, la question de la vitalité des communautés en situation minoritaire. Une communauté qui a des ressources socioculturelles et économiques est vitale. On peut la traiter comme une société civile forte, qui a la capacité de grandir. On dépasse la question de survivance pour parler d'épanouissement. Dans une telle situation, la communauté peut devenir un pôle d'attraction.
    On fait des démarches au moyen d'études très spécifiques et pointues sur la vitalité, en très étroite collaboration avec les institutions communautaires. Sans qu'on parle d'assimilation, ces outils contribuent de façon très importante à la croissance des communautés, pas seulement sur le plan démographique mais aussi en termes de culture et de confiance. Une société confiante a beaucoup moins peur de l'assimilation.

  (0925)  

    Monsieur Fraser, des études ont été faites en ce sens, notamment par l'Université de Moncton. On y présente le concept de la famille, de l'école, de la communauté, de l'environnement, de la qualité de vie, et on y traite de situations du quotidien. Or, on sait que l'éducation, les services de santé, les services sociaux et l'accès à un revenu décent relèvent des provinces. Donc, bien des aspects sont du ressort de celles-ci.
    Selon ma vision des choses et l'analyse que mon vécu m'a permis de faire, je dirai que le gouvernement fédéral a souvent fermé les yeux quand les provinces ne respectaient pas la question scolaire. On a tenu des débats, et certains gains ont été faits, mais il reste encore des choses à accomplir dans certains domaines.
    Comment pourrait-on amener les provinces dites majoritairement anglophones à comprendre davantage que le travail des communautés ne doit plus être entravé et que le tissu social se doit d'être francophone pour permettre à la vitalité de s'épanouir?
    Monsieur le président, j'aimerais à cet égard souligner l'importance du Plan d'action pour les langues officielles et de son renouvellement. C'était un de mes messages, cette année. J'ai été très heureux d'entendre, lors du discours du Trône, que le gouvernement s'engageait à faire en sorte que ce plan soit renouvelé.
    Dans le cadre de l'un des volets du plan d'action, qui traite d'éducation, on a parlé de doubler le pourcentage de finissants du secondaire maîtrisant les deux langues officielles. On a aussi parlé de faire en sorte qu'il y ait une augmentation substantielle d'ayants droit pouvant exercer leur droit d'accès à une école de langue française, dans le cas des communautés francophones, et de langue anglaise, dans celui de la minorité anglophone du Québec.
    Le droit défini à l'article 23 de la Charte est fragile en ce sens que son existence se limite à une génération seulement. L'écart entre le nombre d'étudiants fréquentant l'école de la minorité et le nombre d'ayants droit constitue un indice de perte pour la communauté, puisque ce droit n'inclut pas de dispositions sur les grands-parents.
    J'ai en tête un exemple très précis, c'est-à-dire celui d'un employeur, en l'occurrence Via Rail à Montréal, qui oblige un employé à parler en anglais pendant son service, alors que le train roule.
    Est-ce une situation acceptable?
    Ce n'est pas du tout acceptable. Le superviseur dirige des personnes qui ont le droit, en vertu de la loi, de travailler en français ou en anglais. La gestion et le superviseur ont la responsabilité de respecter cette obligation.
    Merci.
    Monsieur Yvon Godin.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue. Je n'aime pas beaucoup utiliser le mot « ombudsman », étant donné que vous êtes notre commissaire ainsi qu'un agent du Parlement. En passant, j'aimerais féliciter l'ombudsman M. Yves Côté pour le travail qu'il a fait à la Défense nationale. Je pense qu'il a mis en lumière des choses à la fois très importantes et insultantes. Il a parlé par exemple de gens de la Défense nationale inscrits à des cours à la base militaire de Borden qui n'avaient pas pu recevoir cette formation dans leur langue maternelle. Pourtant, il y a au pays deux peuples reconnus, des francophones et des anglophones, donc deux langues officielles.
    Le gouvernement se plaint du fait que la guerre en Afghanistan coûte cher, que les libéraux n'ont pas fait leur travail et ont appliqué des réductions budgétaires. Tout ça s'est dit ici, dans le cadre du comité. D'un autre côté, on voit que même à la réception, les gens ne peuvent pas être servis dans les deux langues. Ce qu'on demande n'est pas énorme. Je pense que vous serez d'accord pour dire, monsieur Fraser, qu'il faut du leadership. Par contre, si ce leadership ne vient pas d'en haut, on ne peut pas blâmer seulement les gens de la base.
    J'aimerais vous donner un exemple supplémentaire de manque de respect envers l'autre langue. Je vais remettre une copie de ce document à tous les membres du comité.
    Le président: Monsieur Godin, que voulez-vous distribuer?
     M. Yvon Godin: Ce n'est pas une bombe; ça ne sautera pas.

  (0930)  

    C'est que normalement, on distribue des documents bilingues au comité.
    Monsieur le président, je ne veux pas perdre du temps en invoquant le Règlement, mais je peux vous dire que les témoins ne peuvent en effet pas distribuer de documents s'ils ne sont pas rédigés dans les deux langues. Or, c'est une preuve que je présente, et nulle part dans le Règlement on dit que le comité ne peut pas présenter de preuve... Je ne peux pas traduire une preuve, monsieur le président.
    Est-ce un article de journal?
    Ça provient du site de la Défense nationale. Dans le document en français que vous avez en main, on utilise le mot « and  ». C'est à la page...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
     Présentement, on ne peut même pas suivre. Vous dites des choses, mais on est complètement perdus. Il est normal qu'on se pose des questions, monsieur Godin.
    Monsieur Godin, je vous demanderais d'attendre que le document soit distribué avant de continuer.
    Mon temps est suspendu?
    On demande normalement au comité de fournir des documents bilingues, et je pense que c'est une pratique souhaitable. J'accepte le point que M. Godin fait valoir ce matin, par exemple dans le cas d'un article de journal, mais j'en appelle à la bonne volonté des parlementaires pour qu'ils soumettent de préférence leurs documents dans les deux langues officielles, de façon à donner l'exemple à nos témoins.
    Monsieur le président, c'est une preuve, et je ne peux pas la traduire sans la détruire. Au lieu du mot « and », on retrouverait le mot « et ». J'aimerais aussi préciser que j'ai demandé au greffier si mon document était acceptable, et qu'il m'a répondu oui. J'ai donc suivi les règles du comité.
    Sur une page écrite en français, on peut lire les mots « Canadian Forces image gallery ». Pour moi, ce n'est pas du français, monsieur le commissaire. On trouve aussi les mots « Click image to download ». Ce n'est pas du français non plus.
     Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que l'exemple doit venir d'en haut? Des choses comme celles-ci sont une insulte à la communauté. Encore une fois, la Défense nationale viole la Loi sur les langues officielles. On ne parle pas de grosses sommes comme celles impliquées dans la guerre en Afghanistan, mais de petites choses. Dans mon petit français acadien, je vous dirais qu'il s'agit du « petit stuff sur le terrain ».
    Monsieur le président, je remercie le député pour l'information qu'il m'a donnée et dont je n'avais pas pris connaissance. J'aimerais faire les mêmes commentaires que le député en ce qui concerne le rôle d'ombudsman que joue M. Yves Côté. J'ai lu le témoignage qu'il a fait devant vous la semaine passée. On s'est parlés hier et je l'ai félicité. J'aimerais également souligner le fait que nous travaillons ensemble pour nous assurer qu'il n'y ait pas de chevauchement, mais plutôt du renforcement. C'est d'ailleurs ce qu'il a dit au comité.
    La semaine dernière, j'ai rencontré le général Semianiw et je lui souligné l'importance du leadership dans ce domaine. Loin de miner l'importance du respect des langues officielles, l'engagement du Canada en Afghanistan vient la renforcer. Le général Hillier a déjà dit que les Forces canadiennes étaient dans l'ombre depuis 10 ans. Maintenant, tout le monde regarde le travail des Forces canadiennes, et cela en augmente l'importance.
     De plus, la présence du Royal 22e Régiment en Afghanistan place la question de la dualité linguistique, la formation, au coeur de... Nous avons commencé une vérification de la formation offerte aux soldats des Forces canadiennes.

  (0935)  

    Monsieur Godin, il vous reste deux minutes.
    Sur un autre sujet, dans le journal L'Acadie nouvelle d'hier, on pouvait lire la citation suivante de la Presse canadienne:
Des francophones à bout de souffle; Le commissaire aux langues officielles a été invité à examiner la situation qui sévit en Colombie-Britannique
     D'après vos commentaires, ce ne serait pas seulement le cas en Colombie-Britannique, mais partout au pays. Dans ma province, la Société des Acadiens et Acadiennes dit que l'argent n'arrive pas. Les communautés disent que l'argent n'arrive pas et qu'elles ne peuvent pas travailler quatre mois sans argent et en devant demander des marges de crédit.
    Votre présentation ne mentionne rien de positif sur la situation actuelle. La communauté francophone est-elle en danger au Canada? On ne fait aucun commentaire sur le fait que cela va mal pour les anglophones. Il n'y a pas de pages de sites Web en anglais qui sont mal traduites en français. En tout respect, je dois dire qu'il n'y a pas de plaintes à ce propos.
    Pensez-vous que le gouvernement actuel prend une mauvaise voie, surtout que la ministre est responsable de se surveiller, puisque c'est elle qui prendra les décisions?
    Monsieur le président, j'ai constaté une chose quand j'ai visité des communautés et des institutions des communautés minoritaires dans tout le pays. Les mêmes plaintes venaient tant des institutions francophones que des institutions anglophones au Québec. Elles ont le même problème. Souvent, quand elles demandent du financement au ministère du Patrimoine canadien, le chèque arrive au mois de janvier ou février et il faut qu'il soit dépensé avant la fin de l'exercice financier. Cela pose un problème considérable de gestion. Ce problème n'est pas particulier à la Colombie-Britannique. J'ai entendu la même chose au Québec et en Saskatchewan. Je suis sûr que vous-mêmes avez entendu la même chose lors de votre tournée dans tout le pays.
    Merci, monsieur Fraser.
    Nous allons maintenant continuer avec M. Michael Chong.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Fraser, pour votre témoignage.

[Traduction]

    Tout d'abord, je voudrais faire deux remarques d'ordre général.
    Je représente une circonscription de la région de Toronto et je voudrais faire part au commissaire de mon point de vue sur la rencontre entre la dualité linguistique et la diversité culturelle. Je suis ravi d'apprendre que vous vous penchez sur la question car, croyez-moi, l'agglomération de la plus grosse ville du pays change rapidement, plus rapidement que ce que pensent la plupart des gens ici à Ottawa. Un universitaire a classifié cela d'hétérogénéité galopante du nouveau Canada.
    La région, comme vous le savez, a une population de 5,5 millions de personnes. Dans un peu plus de 20 ans, sa population atteindra 9 millions d'habitants. À mon avis, la plupart des Canadiens ne se rendent pas compte de la rapidité de la croissance de cette région. Ce n'est pas dans l'Ouest, ce n'est pas en Alberta, que les municipalités connaissent la croissance la plus rapide. C'est effectivement dans la région de Toronto.
    Toute cette croissance viendra de l'immigration. À supposer que la région soit représentée adéquatement à la Chambre des communes, ce que la province appelle actuellement la RGT, ou le Croissant d'or, enverra plus de représentants à Ottawa que toute autre province, voire plus que le reste de l'Ontario.
    Voilà pourquoi, un des plus gros défis à relever pour le gouvernement du Canada dans les années qui viennent sera de trouver un équilibre entre cette diversité et certains de nos idéaux nationaux les plus précieux. Autrement dit, comment cette diversité pourra-t-elle trouver sa place sans menacer ou entraver certains des éléments fondamentaux qui constituent l'assise de notre pays? Je pense que votre étude à cet égard sera très importante et je suis ravi que vous l'entrepreniez. Permettez-moi de vous donner mon opinion sur le sujet.
    Je suis fils d'immigrants... Je pense que la plupart des nouveaux Canadiens adhèrent de tout coeur aux idéaux de bilinguisme et ce, d'une façon qui dépasse celle des Canadiens nés ici parce que les nouveaux Canadiens comprennent la nécessité de parler une autre langue que la leur. La plupart d'entre eux viennent de pays où l'anglais n'est pas la langue maternelle de la population et ils sont tout à fait disposés à apprendre une deuxième ou une troisième langue. Voila pourquoi je pense qu'ils vont adhérer à l'idéal de bilinguisme de tout coeur, mais seulement si le bilinguisme n'est pas associé à l'ethnicité. Dès que bilinguisme ou la dualité linguistique sera associée d'une façon quelconque à l'ethnicité, les nouveaux Canadiens lui tourneront le dos. Ils ne joueront plus. Selon moi, si nous évitons cet écueil, nous servirons la cause du bilinguisme et de la dualité linguistique à l'échelle du pays.
    La deuxième remarque que je voudrais faire porte sur l'étude que vous entreprenez avec l'Association des universités et collèges du Canada. J'ai fait ma scolarité dans les écoles publiques de l'Ontario et je pense avoir fait de bonnes études à une exception près: on ne m'a jamais bien encouragé à apprendre le français. J'ai étudié le français à l'école secondaire mais jamais l'apprentissage de cette langue n'a reçu dans le système d'éducation publique l'attention qu'il mérite. Quand l'employeur le plus important du pays et ses institutions publiques sont bilingues, quand on débarque dans une ville comme celle-ci, on prend soudain conscience de la disparité entre le système d'éducation publique et la nécessité de parler français dans les institutions fédérales...
    C'est un aspect qui mérite qu'on y réfléchisse davantage. Une façon serait d'encourager les universités à ajouter à leurs exigences d'admission la connaissance du français. L'autre façon serait de voir comment les provinces pourraient imposer la connaissance du français pour l'obtention d'un diplôme.
    J'habite près de Waterloo. Si l'université de Waterloo ou Microsoft n'obtenait pas les diplômés d'écoles secondaires pour combler les postes d'ingénieurs à Microsoft ou à Research and Motion, il y aurait un tollé, mais par contre, quand le plus gros employeur du pays n'obtient pas les diplômés dont il a besoin, il ne semble pas qu'on fasse quoi que ce soit auprès des universités, des écoles secondaires ou des autres établissements présecondaires.

  (0940)  

    Je vous encourage à vous penchez là-dessus, car cela semble être une lacune importante des orientations politiques de notre pays.
    Ma mère était européenne, et en Europe, après la Deuxième Guerre mondiale, personne ne savait parler une langue autre que sa langue maternelle. Or, 15 ou 20 ans plus tard, la plupart des pays de l'Europe de l'Ouest s'étaient dotés d'une politique de trilinguisme. De nos jours, il est presque impossible de parler la langue de ces pays car, dès qu'on entend votre accent quand vous parlez cette langue, on se met à parler français ou anglais. Je ne vois pourquoi nous ne pourrions pas adopter une politique semblable ici.
    Peut-être avez-vous des observations à faire sur ce que je viens de dire?

  (0945)  

    Soyez bref, je vous prie.
    Monsieur le président, je dirais simplement que je remercie le député de ses observations et de sa contribution à la discussion que nous entreprenons sur les défis de la diversité et de la dualité.
    Je partage entièrement son avis sur l'importance de l'éducation. C'est un thème que... partout où j'allais au Canada, j'ai fait un effort particulier pour parler de l'importance de l'éducation quand je me trouve à l'université où une école secondaire, et je le remercie de ses remarques.
    Merci, monsieur Fraser.
    Notre comité voudra peut-être aussi examiner cette question un jour.
    Nous commençons maintenant la deuxième série de questions par M. Jean-Claude D'Amours.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur le commissaire, ainsi que vos acolytes, de votre présence ce matin.
    Vous avez parlé du Programme de contestation judiciaire en disant que vous aviez l'intention de vous présenter devant la Cour suprême à titre d'intervenant, car c'est une question d'intérêt national. Je ne voudrais pas vous mettre des mots dans la bouche, mais les mots « intérêt national » signifient que cette réalité doit être considérée de la même façon dans tout le pays, étant donné qu'on y retrouve des francophones partout et qu'ils doivent être respectés autant que les anglophones. Je sais que la portée du Programme de contestation judiciaire allait au-delà des droits linguistiques.
    Vous avez aussi mentionné dans votre conclusion que vous vouliez voir des résultats et passer à l'action. Je trouve un peu aberrant que le gouvernement conservateur dise qu'il veut faire telle ou telle chose et qu'il semble prendre une éternité pour la réaliser en posant des gestes concrets. De plus, ces gestes ont souvent des conséquences négatives sur les communautés, comme l'abolition du Programme de contestation judiciaire.
    Voulez-vous que les conservateurs cessent de se contenter de le dire et qu'ils poser des gestes concrets et positifs, comme le rétablissement du Programme de contestation judiciaire?
    Monsieur le président, j'aimerais revenir sur l'engagement du gouvernement de renouveler le Plan d'action pour les langues officielles qui a été annoncé dans le discours du Trône.
    J'ai été très heureux de cet engagement et je l'ai dit publiquement à l'époque. Par ailleurs, j'ai dit également quelque chose qui s'applique un peu aux propos du député: un discours du Trône est un menu, et non un repas. Donc, on a annoncé un menu et on attend le repas.
    Et on a faim!
    Monsieur le commissaire, je suis d'accord avec vous: les francophones et les minorités de tout le pays ont faim. J'aime bien votre façon de voir les choses, c'est très bien exprimé.
    Nous allons poursuivre sur la question du Programme de contestation judiciaire. On a entendu des commentaires à l'effet que le Programme de contestation judiciaire ne servait à rien et qu'il avait fait son temps, jusqu'à un certain point.
    Serions-nous d'accord pour dire que le Programme de contestation judiciaire pourrait être utile tant et aussi longtemps qu'il y aura de l'injustice et que les minorités devront faire valoir leurs droits?

  (0950)  

    Monsieur le président, notre rapport d'enquête sur les 117 plaintes reçues au sujet des coupes budgétaires de septembre 2006 contenait une étude juridique sur l'impact possible de ces coupes. Une bonne part des progrès réalisés est attribuable aux décisions que la Cour suprême a rendues à la suite d'un recours au Programme de contestation judiciaire.
    Un réseau de commissions scolaires a pu être créé parce qu'on est allé devant les tribunaux pour leur demander que l'article 23 englobe le droit des communautés de contrôler leurs écoles. Les implications des articles 16 et 23 sont-elles coulées dans le ciment? Non, bien sûr. Il y a des zones grises. C'est la raison pour laquelle nous demandons aux tribunaux de clarifier les droits qui ont été inscrits dans la Charte.
    Il y a un dialogue entre les parlementaires, la population et les tribunaux canadiens. Souvent, la population est représentée par le commissaire aux langues officielles en ce qui touche la question des droits linguistiques.
    Merci, Monsieur Fraser.
    Monsieur le président, je fais rapidement un rappel au Règlement.
    M. Fraser a fait référence à une étude ou à une analyse juridique. Est-il possible d'en avoir une copie?
    Elle fait partie de notre rapport.
    Aimeriez-vous que le document soit distribué aux membres du comité? Ce document est-il accessible au public?
    C'est maintenant le cas.
    Est-il possible d'en faire parvenir une copie à l'analyste ou au greffier, qui le distribuera aux membres du comité?
    Avec plaisir.
    Merci.
    Nous continuons avec M. Pierre Lemieux.
    Merci beaucoup de votre présence aujourd'hui.
    J'aimerais parler du concept des mesures positives. Dans votre dernier rapport, vous avez dit que pour qu'une mesure soit positive, il faut poser un geste concret.

[Traduction]

C'est une mesure conçue pour donner des résultats positifs. C'est une bonne définition que je comprends.
    Certains voudront peut-être l'interpréter différemment. Je vous donne un exemple. Dans le cadre d'un programme, on accorde des fonds à une organisation pour qu'elle donne des résultats donnés, mais ces résultats ne sont pas à la hauteur des attentes. Elle ne donne pas son plein potentiel ni les résultats attendus. En dernière analyse, c'est une question d'argent. Le gouvernement voudrait obtenir un rendement de 10 $ sur l'argent sur un investissement des contribuables, mais il n'en obtient que deux. Les organisations qui reçoivent ces fonds se plaindront d'avoir perdu leurs subventions, et vous diront qu'elles ont obtenu des résultats. Elles oublient toutefois que leurs résultats n'étaient pas à la hauteur des attentes.
    On peut avoir une vue limitée des résultats ou une vue d'ensemble. Selon la vue limitée, l'organisation se plaindra d'avoir perdu son financement et de ne plus pouvoir donner les résultats limités qu'elle obtenait auparavant parce qu'elle n'a plus d'argent. Toutefois, selon la vue d'ensemble, si le programme est mal géré, est déficient et ne donne pas tous les résultats escomptés, l'argent qu'on lui a versé pourrait être utilisé à meilleur escient, par exemple, dans des collectivités de langues officielles qui dispenseront des programmes donnant les résultats escomptés et répondant aux attentes.
    Comme commissaire des langues officielles, comment intégrez-vous à votre compréhension des mesures positives cette vision limitée et d'ensemble des résultats? Que pouvez-vous me répondre?

  (0955)  

    Monsieur le président, quand nous avons entrepris notre étude, nous voulions tout particulièrement savoir si on avait fait ce genre d'analyse et nous n'avons trouvé aucune information nous prouvant que tel était le cas.
    Selon notre interprétation des obligations du gouvernement, celui-ci doit prendre des mesures positives et tenir compte de l'incidence de ces décisions... Cette analyse est essentielle, car elle permet de déterminer si, dans les faits, une mesure a...

[Français]

    À l'ordre, s'il vous plaît.
    Si vous voulez tenir des conversations, je vous inviterais à les poursuivre à l'extérieur de la salle, de façon à ce que tout le monde puisse entendre le témoin.
    Monsieur le commissaire, poursuivez, je vous prie

[Traduction]

    Je ne remets pas en question le droit du gouvernement de gouverner et de prendre des décisions sur les programmes, comme je le souligne dans mon rapport. Toutefois, le gouvernement est tenu de respecter la loi et rien ne nous prouve que cela a été fait. Il n'a pas été prouvé que l'analyse à laquelle le député fait allusion a été faite.
    Dans la même veine, comment abordez-vous la période de transition? J'entends par période de transition, la période pendant laquelle, quand on réduit les fonds consacrés à un programme en particulier, le programme doit prendre une nouvelle orientation après quoi les fonds réapparaissent sous une forme plus différente et sont utilisés à meilleur escient. Il y a certainement une période de transition.
    Cela a été le cas, par exemple, pour l'alphabétisation. En vertu du plan, personne n'avait accès au financement pour les collectivités de langues officielles...

[Français]

l'alphabétisation. En alphabétisation, de façon générale,

[Traduction]

Il y a eu des compressions, mais le programme est maintenant beaucoup mieux ciblé et donne de meilleurs résultats. Il y a toutefois eu une période de transition. Il faut de six à neuf mois aux organisations pour se réorienter et au gouvernement pour préciser ses attentes.
    Que fait le commissaire de cette période de six, neuf ou 12 mois, quelle que soit sa durée, cette période dont les organisations ont besoin pour faire la transition? On peut critiquer le gouvernement après trois mois ou aux premières étapes de la transition, mais le processus est loin d'être terminé. Je me demande donc comment vous voyez ce processus et comment vous en traitez.

[Français]

    Je m'excuse, monsieur Lemieux, mais votre temps est écoulé. On va devoir demander au commissaire de retenir sa réponse.
    Monsieur Gravel.
    Merci, monsieur Fraser, d'être parmi nous.
    Je suis nouveau au Comité des langues officielles, mais je sais que les membres du comité ont fait une tournée au Québec et ailleurs au Canada pour visiter les communautés linguistiques en situation minoritaire. Je pense qu'au Québec, la communauté anglophone se porte bien. Elle ne risque pas d'être assimilée. C'est exact?
    Le problème qui existe au Québec, c'est qu'il y a des situations assez particulières en ce qui concerne les services, par exemple les services médicaux. Il y a aussi un problème de survivance des écoles. La situation des écoles est partiellement paradoxale, surtout en région. À Montréal, la concentration de la population anglophone rend ces problèmes moins aigus. Quand vous parlez des écoles qui existent en Estrie, à Québec et à Trois-Rivières, il y a le paradoxe suivant. Des parents anglophones envoient souvent leurs enfants à l'école française pour s'assurer qu'ils seront tout à fait bilingues et compétents en français. Cela mine la vitalité de l'institution anglaise très importante qu'est l'école.
    En même temps, beaucoup de familles exogames parlant français à la maison ont le droit d'envoyer leurs enfants à l'école anglaise, et elles utilisent ce droit. Dans des communautés comme Granby, Sherbrooke et Trois-Rivières, beaucoup d'écoles anglaises manquent d'enfants anglophones parlant anglais à la maison parce que les parents de ceux-ci veulent que leurs enfants soient tout à fait à l'aise en français; mais ces écoles ont aussi le fardeau de fournir une aide additionnelle aux enfants qui arrivent à l'école en ne parlant pas anglais mais qui ont le droit d'aller à l'école anglaise. C'est un peu le pendant de ce qui existe dans des écoles minoritaires françaises hors Québec.
    Il y a aussi un problème de services de santé. J'aimerais souligner l'importance du fait que le gouvernement du Québec a signé un accord pour participer au Plan d'action pour les langues officielles. Cela fait en sorte que 4 000 employés du système de santé au Québec ont suivi un cours spécialisé en anglais pour pouvoir donner des services de santé aux anglophones au Québec.
    Cependant, un anglophone d'une petite ville de l'Estrie m'a expliqué que la formation en anglais pour traiter un enfant qui arrive avec une fracture au bras, c'est une chose, mais quand il y des problèmes comme les premiers symptômes de la maladie d'Alzheimer, pour une communauté vieillissante, cela exige un autre niveau de capacité linguistique.
    La communauté anglophone en général est maintenant beaucoup plus bilingue que la majorité francophone, c'est clair. La capacité linguistique de la communauté anglophone au Québec s'est transformée, mais une tranche démographique de la population — les gens qui ont plus de 65 ans — a vécu au Québec au cours d'une période où il n'était pas nécessaire d'apprendre le français pour y faire carrière. Ces gens sont maintenant à la retraite. Ils ont besoin de services sociaux et de services de santé, et c'est beaucoup plus difficile pour eux de fonctionner dans le Québec actuel que ce l'était il y 20 ans ou 30 ans.
    La communauté anglophone au Québec a de vraies difficultés à faire valoir son droit de recevoir des services de santé. Le système de l'éducation est également fragile. Tout n'est pas sombre. Il y a une importante collaboration du gouvernement du Québec, mais les problèmes sont réels.

  (1000)  

    Il vous reste moins d'une minute, monsieur Gravel.
     Vous avez récemment décidé d'intervenir en faveur du Programme de contestation judiciaire. Pourriez-vous nous résumer les grandes lignes de votre position sur ce programme?
    Je pense que ce programme a joué un rôle extrêmement important. Nous avons mené une enquête sérieuse sur les décisions qui ont été prises, non seulement pour l'abolition du Programme de contestation judiciaire, mais pour d'autres programmes qui affectent les minorités linguistiques au pays. Dans notre rapport, nous n'avons pas vu de preuves que le gouvernement avait respecté la loi. Nous avons publié notre rapport final le 9 octobre, et nous faisions face à quatre choix. Nous aurions pu faire rapport au gouverneur en conseil, nous aurions pu faire rapport...
    Merci, monsieur Fraser. J'aime bien votre façon de soulever les sujets. J'avais l'impression d'être dans une tentacule...
    Merci, monsieur le président. Je peux y revenir, si vous voulez.
    Nous continuons avec M. Godin.
    Avez-vous un document à présenter cette fois-ci, monsieur Godin?

  (1005)  

    En voulez-vous un autre? La suite commence...
    Des voix: Ah, ah!
    M. Yvon Godin: Merci, monsieur le président.
    Monsieur Fraser, j'aimerais que vous nous expliquiez un peu plus ce que vous avez voulu dire un peu plus tôt. Vous avez dit, en réponse aux conservateurs, je crois, que les sommes d'argent sont versées, mais que c'est au cours d'une période fiscale. Par exemple, le financement arrive au mois de janvier ou au mois de février, mais ils ont une courte période de temps pour le dépenser. Vous pouvez me corriger, mais je pense que c'est le contraire. La Presse canadienne a écrit, et je cite:
En plus du sous-financement, plusieurs organisations se plaindraient que le financement de Patrimoine canadien arrive souvent trois ou quatre mois en retard.
    Cela veut dire que le problème n'est pas que le financement arrive au mois de janvier et qu'ils doivent le dépenser avant le mois de janvier suivant.
    Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.
    C'est ce que j'avais compris.
    Non, j'ai dit que, pour une année fiscale se terminant à la fin mars, le financement arrive au mois de janvier ou février, et il faut que ce soit dépensé avant le 31 mars. Ils ont donc un mois pour dépenser l'argent.
    Je suis d'accord avec vous, mais ce n'est pas ce que j'avais compris.
    Si je me suis mal exprimé, je m'en excuse.
    Il est possible que vous vous soyez bien exprimé et que j'aie mal interprété vos paroles. Oui, je reconnais mes erreurs parfois.
    Des voix: Ah, ah!
    M. Yvon Godin: Ils doivent souvent financer leurs activités en ayant recours à des marges de crédit. Le gouvernement prétend qu'il n'y a pas de résultats. Comment les en blâmer? C'est la formule idéale pour faire faillite.
    J'aimerais donc qu'on fasse une étude sur ce sujet. Quelle est cette formule qui fait en sorte que le gouvernement remet de l'argent en retard et peut ensuite dire qu'il a la preuve qu'ils n'ont pas réussi?
    Il y a un autre élément que je peux ajouter pour approfondir votre analyse. Des représentants d'un organisme issu d'une minorité linguistique m'ont dit que le fait d'avoir un temps très limité pour dépenser l'argent entraînait d'autres effets négatifs. Ainsi, cet organisme avait prévu d'embaucher un organisme de la communauté ou une PME de la communauté comme consultant. Malheureusement, lorsqu'il y a très peu de temps, ces petites organisations n'ont pas les ressources suffisantes pour respecter les obligations contractuelles. Elles sont donc obligées de s'adresser aux grandes compagnies. C'est un élément de plus qui favorise les grandes compagnies et désavantage les PME de la communauté.
    En ce qui a trait à la question du sous-financement, la vérificatrice générale a déjà produit un rapport sur ce problème, et elle a recommandé qu'il y ait un financement pluriannuel. On évite donc ce genre de crise annuelle.
    J'essaie de faire ressortir le fait que le gouvernement prétend que les programmes ne fonctionnent pas et que c'est la raison pour laquelle il préfère donner de l'argent directement aux bénéficiaires. Les programmes ne fonctionnent pas parce qu'il ne donne pas l'argent aux organismes. Croyez-vous, comme moi, que ce pourrait en être la raison?
    Je pense aussi à la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Des amendements ont été apportés en 2005, mais il n'y a eu aucune consultation. Il n'y a pas eu de consultation sur l'alphabétisation. Au cours de la seule consultation qui a eu lieu, le monde s'est toujours fâché. Ils ont redonné l'argent aux associations et en ont même donné plus, pour les faire taire. Ce n'est pas la réalité. Il y a deux questions: le financement et le fait que le financement arrive à temps.
    En effet, la vérificatrice générale a fait une étude plus vaste et qui va au-delà de mes capacités en matière d'analyse financière du fonctionnement. Je vous réfère aux trois études du Bureau du vérificateur général du Canada.
    En ce qui a trait à la question de la consultation, c'est l'argument qu'on a découvert lors de l'enquête qu'on a faite sur les compressions budgétaires. On n'a vu aucune preuve qu'il y ait eu consultation et on n'a trouvé aucune preuve du respect des obligations contenues dans la partie VII de la Loi sur les langues officielles. C'est pourquoi nous avons décidé de demander le statut d'intervenant.
    Merci.
    Nous allons maintenant entreprendre notre troisième tour. Du côté du Parti libéral, M. Murphy est parti.

  (1010)  

    Je vais débuter et partager mon temps avec M. D'Amours.
    Monsieur Fraser, vous avez dit ce qui suit, et je vous cite:
Je constate, à l'heure actuelle, une application moins rigoureuse, voire minimaliste, de la Loi sur les langues officielles dans la fonction publique fédérale [...]
     C'est un constat très dur et inquiétant pour ce qui est de l'application de la Loi sur les langues officielles.
    Je voudrais revenir sur le Programme de contestation judiciaire. Vous avez sans doute suivi toute la saga à ce sujet. Les gens du gouvernement ont essayé de bloquer tout débat sur cette question, et le président du Comité permanent des langues officielles a même refusé d'en parler. Il a dû démissionner, et on est passé à autre chose.
    Lorsque nous avons repris nos travaux il y a quelques semaines et qu'on a demandé au comité de s'intéresser encore une fois à la question, il y a évidemment eu beaucoup de résistance de la part des gens du gouvernement. Ils voulaient absolument bloquer les discussions sur le Programme de contestation judiciaire.
    J'invoque le Règlement.
    On siégeait à huis clos quand on a abordé cette question, et on en parle maintenant en public.
    Il s'agit simplement d'un rappel au Règlement.
    On a comparé le retrait du Programme de contestation judiciaire à celui du Programme d'aide juridique, qui a eu lieu dans d'autres provinces. Pouvez-vous faire un parallèle entre ces deux programmes pour ce qui est du rôle qu'ils jouent au pays?
    Je vais consulter ma conseillère juridique, mais il est important de rappeler que le Programme de contestation judiciaire a été créé pour que les droits définis dans la Charte soient protégés. Ce programme touchait en effet uniquement les causes qui faisaient appel aux droits définis dans la Charte. On peut dire que les droits en jeu étaient des droits constitutionnels.
    J'ajouterais que les programmes d'aide juridique poursuivent une fin bien précise. Bien entendu, ils permettent à des personnes qui n'en ont pas les moyens d'avoir accès à la justice, que ce soit dans le domaine familial, criminel ou autre.
    Ici, on parle d'un programme visant à offrir un accès raisonnable aux Canadiens voulant voir au respect de leurs droits constitutionnels. Le Programme d'aide juridique n'aurait pas permis à des communautés de s'adresser à la cour pour revendiquer des écoles en vertu de l'article 23. Les fins poursuivies sont vraiment très différentes, dans le cas de ces deux programmes.
    Monsieur le commissaire, avez-vous déjà entendu dire que le Commissariat aux langues officielles pouvait aider certains groupes à assumer, en tout ou en partie, des coûts reliés à leur défense dans le cadre de certains dossiers?
    Monsieur le président, notre loi ne nous permet pas d'accorder de l'aide financière ou de faire des octrois en ce sens.
    Je voudrais profiter de l'occasion pour apporter une clarification: dans le cadre d'un recours fondé sur la revendication de droits constitutionnels, le commissaire peut intervenir, mais ne peut pas déclencher de recours judiciaire.
    D'accord.
    Vous êtes à la tête du Commissariat aux langues officielles depuis un an maintenant. En matière de langues officielles, il y a eu plusieurs soubresauts du côté du gouvernement conservateur au cours de la dernière année.
    J'aimerais savoir si le gouvernement conservateur vous consulte souvent pour vérifier si sa position à l'égard des langues officielles est la bonne ou si, au contraire, il vous demande très peu de commentaires sur le sujet.
    Disons qu'à l'occasion du rapport annuel, je rencontre des ministres et des sous-ministres pour parler des ministères.

  (1015)  

    Excusez-moi, monsieur le commissaire, le gouvernement vous demande-t-il précisément...
    Votre temps est écoulé, monsieur D'Amours.
    Nous passons maintenant au Bloc québécois. Nous entendrons M. Nadeau.
    Voulez-vous finir de répondre à M. D'Amours? Je trouvais cela très intéressant.
    J'ai certaines conversations avec des ministres sur des sujets spécifiques, mais le Programme de contestation judiciaire comprend des processus de plaintes, d'enquêtes et de rapports préliminaires, où les ministères réagissent, font des rapports ou de telles choses. Dans un processus aussi formel, je ne m'attends pas à ce qu'il y ait des coups de téléphone proposant de faire ceci ou cela. Je pense que ce ne serait pas approprié.
    Par contre, on me demande souvent de venir parler des programmes aux comités de gestion des ministères. Nous travaillons avec les institutions. Dans ma présentation, j'ai parlé de développer d'autres instruments d'intervention. il s'agit en partie d'établir de nouveaux rapports avec les institutions pour qu'on puisse aller plus loin. Il ne suffit pas de faire un rapport qui réponde aux plaintes. Il ne suffit pas d'établir un processus formel de plainte-enquête-rapport sans jamais aller au fond des choses. Nous collaborons avec des institutions, nous sommes en train d'amorcer un dialogue avec elles. On voit qu'il y a un problème systémique et on veut une discussion de fond pour trouver comment aborder ces problèmes fondamentaux.
    Je trouve heureux qu'on commence à voir des progrès. La Loi sur les langues officielles date de 1969, et le gouvernement fédéral commence à réaliser ces choses. Il n'est jamais trop tard pour bien faire.
    On retrouve 47 p. 100 de la population du Québec à Montréal. Au Québec, la loi 101 a été un grand succès pour l'apprentissage du français aux enfants de la nation québécoise. On voit à Montréal un écart entre les immigrants allophones qui n'apprennent que l'anglais et les immigrants allophones qui n'apprennent que le français. Dans les données que l'on trouve, dans les études de Charles Castonguay par exemple, l'anglais l'emporte. Il y a un problème. J'ai parlé plus tôt de transfert linguistique. Il faut plutôt parler de « substitution linguistique ». Il y a de l'assimilation à Montréal, qui est le coeur du Québec et qui fait la spécificité de la nation québécoise dans l'ensemble de l'Amérique du Nord.
    Je voulais vous parler de cet aspect. Je suis convaincu que vous connaissez les substitutions linguistiques et leur danger. Nous avons besoin de l'appui du Commissariat aux langues officielles. La promotion du français est très importante dans l'ensemble du Québec pour maintenir cette réalité française que représente le Québec et qui compose moins de 2 p. 100 de l'Amérique du Nord.
    Je vais vous poser une question directe, et vous me direz si vous pouvez y répondre ou non. Selon vous, le fait de pouvoir parler le français et l'anglais devrait-il être une condition d'admissibilité pour devenir ambassadeur du Canada, ce pays dit bilingue?
    Monsieur le président, la réponse est oui.
    C'est une excellente réponse. J'arrive justement d'une rencontre ministérielle de la Francophonie au Laos. Comment peut-on comprendre que le Canada fasse partie de cette Francophonie alors que ses représentants de premier plan à l'étranger que sont les ambassadeurs ne peuvent pas parler la langue française, même dans une telle situation? C'est assez désolant.
    Merci beaucoup.

  (1020)  

    Merci, monsieur Nadeau.
    D'ailleurs, le commissaire a envoyé récemment un rapport à ce sujet.
    On va maintenant passer du côté du gouvernement avec M. Luc Harvey.
    Monsieur Fraser, premièrement, merci de revenir ici pour fêter pratiquement le premier anniversaire de votre mandat.
    Je suis marié à une Anglaise de l'Ontario. Nous vivons au Québec et mes enfants parlent les deux langues, l'anglais et le français, parfaitement et couramment. Mon aînée arrive même du Mexique où elle est allée apprendre une troisième langue, l'espagnol.
    Sont-ils assimilés, oui ou non?
    Selon la façon dont vous en parlez, si on apprend une deuxième langue, c'est comme si on va vers l'assimilation. Personnellement, je crois que plus le Canada sera un pays bilingue, plus tout le monde sera en mesure de parler deux langues ou même trois, comme cela se passe dans plusieurs pays en Europe où les gens parlent deux langues plus une autre. Alors, les gens sont bilingues et ils connaissent une troisième langue. Ici, si on apprend une deuxième langue, c'est un pas vers l'assimilation, et il ne le faudrait surtout pas.
    Suis-je en train de me faire assimiler?
    Monsieur le président, si j'ai dit quelque chose qui pourrait donner l'impression que je pense que l'acquisition d'une deuxième langue est un pas vers l'assimilation, je m'en excuse. Je vais lire les témoignages pour voir si, par erreur, j'ai donné cette impression. C'est tout à fait le contraire de ma pensée. Je pense que l'apprentissage d'une deuxième langue est un atout et que c'est un pont vers d'autres langues. J'ai répété dans tout le pays, aux anglophones et aux francophones, que le bilinguisme n'est pas une barrière, c'est une porte vers le reste du monde.
    Je pense que M. le député est en train de témoigner du fait qu'apprendre une troisième langue est plus facile que d'en apprendre une deuxième. Voici une des constatations que j'ai faites; c'est anecdotique mais quand même. De jeunes Canadiens ont vécu une expérience ailleurs dans le monde. Certains sont allés en Amérique du Sud, où ils ont appris l'espagnol. D'autres sont allés au Japon, où ils ont appris le japonais, ou en Chine, où ils ont appris le chinois, en Inde, où ils ont appris l'hindi. Mais combien de ces jeunes ont d'abord appris l'autre langue officielle d'abord? Pour moi, il est fascinant de voir à quel point cette nouvelle génération voit la question linguistique comme un outil naturel pour apprendre à connaître d'autres cultures et devenir vraiment des citoyens du monde.
    Par l'intermédiaire du président, je félicite la fille du député.
    J'ai quatre filles.
    Des députés: Ah, ah.
    M. Luc Harvey: Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Vous avez une minute et demie.
    Suite à ma question, vous savez qu'on a fait un rapport sur la vitalité linguistique des communautés qui contenait 38 recommandations. J'imagine que vous avez pris connaissance de ce rapport.
    M. Graham Fraser: Oui.
    M. Luc Harvey: Vous avez pris connaissance des 38 recommandations?
    M. Graham Fraser: Oui.
    M. Luc Harvey: De quelles recommandations ce comité devrait-il s'occuper le plus rapidement possible pour faire avancer le dossier des communautés linguistiques?
    C'est une très bonne question. J'aurais dû relire le rapport avant de venir.
    Une chose que j'ai lue, par exemple, monsieur le président, c'est la réponse du gouvernement aux recommandations. Ce qui m'a étonné, c'est que les 38 recommandations traitaient de choses que le gouvernement devrait faire, et la réponse du gouvernement était plutôt un répertoire de ce qu'il a déjà fait, à une exception près, que j'ai remarquée, soit le programme des défis de l'accès au travail. Dans sa réponse du 6 octobre, le gouvernement a dit qu'il était en train de développer ce programme. Cela m'a fait penser qu'il y avait au moins un élément où on a fait suite à vos recommandations, au lieu de seulement donner un répertoire des choses existantes.
    Mais peut-être pourrais-je référer la question à M. Finn.

  (1025)  

    Vous êtes « sauvé par la cloche ».
    Je m'excuse, j'allais oublier que le dernier intervenant de ce troisième tour sera M. Godin.
    Comment avez-vous pu faire cela?
    Des voix: Ah, ah!
    Je suis le président du comité, est-il nécessaire de le préciser?
    Vous disiez que les ambassadeurs devraient absolument parler les deux langues. J'aimerais connaître votre position en ce qui a trait aux sous-ministres.
    Évidemment...
    J'accepte votre réponse et je passe à ma prochaine question.
    Des voix: Ah, ah!
    Un des thèmes que je souligne ces temps-ci est celui du leadership. Or, si j'ai raison de dire que la maîtrise des deux langues officielles est une composante essentielle du leadership, les sous-ministres sont, par définition, des leaders dans le secteur public, et je pense que c'est encore plus important qu'ils puissent maîtriser les deux langues officielles.
    Revenons à M. Harvey et aux 38 recommandations dont il a parlé. Je vous en lis une 39e, parce qu'il y en a 39. Elle se lit comme suit et elle est très importante:
Que le gouvernement du Canada adopte une approche globale dans son renouvellement du Plan d’action pour les langues officielles, comprenant notamment :

· l’implication active des communautés, des provinces et territoires, et du gouvernement fédéral dans les phases d’élaboration, de mise en œuvre et d’évaluation;

· l’identification souple de secteurs clés d’intervention pour lesquels l’importance du financement pourrait être modulée en fonction des priorités établies par les communautés.
    C'est peut-être une recommandation que vous pourriez vraiment étudier, approfondir et intégrer dans l'une de vos recommandations.
    J'en prends note et je remercie le député de m'avoir rappelé cette 39e recommandation, qui est tout à fait cohérente avec la position que nous avons exprimée dans notre rapport et avec l'intervention que nous espérons pouvoir faire devant les tribunaux visant l'élaboration de la portée de la partie VII.
    Il vous reste deux minutes et demie.
    Pouvez-vous nous expliquer votre point de vue sur les contestations judiciaires. M. Chong dit souvent que les contestations judiciaires touchent plutôt l'aide juridique. Or, il y a une différence entre l'aide juridique et le Programme de contestation judiciaire. C'est de notoriété publique. M. Baird, qui était alors le ministre responsable, disait que le gouvernement ne donnerait pas d'argent aux Canadiens pour qu'ils se battent contre le gouvernement et ses lois.
    À partir de là, n'est-ce pas plutôt la position du gouvernement, qui dit qu'il y a des lois mais qu'il ne donnera pas à la communauté... Le danger ici est qu'un simple citoyen ne pourra jamais se payer un jugement de la Cour suprême. Par contre, le Programme de contestation judiciaire a donné l'occasion à Mme Paulin de Tracadie-Sheila, par exemple, de gagner une cause impliquant la GRC au Nouveau-Brunswick. Le fédéral va peut-être dire que finalement, c'est la province qui a réglé la question, mais c'est par l'intermédiaire du Programme de contestation judiciaire que la cause a été rendue publique. Alors, le danger d'enlever le Programme de contestation judiciaire, c'est qu'on enlève des outils aux communautés qui désirent être respectées en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés.

  (1030)  

    Il y a une différence — que Mme Tremblay a soulignée — entre l'aide juridique et le Programme de contestation judiciaire, soit l'importance des droits des Canadiens établis dans la Charte.
    Je pense que par définition, un droit défini dans la Charte est non seulement un droit de l'individu qui est le porteur de la cause, mais quand on redéfinit un droit, quand on définit la portée d'un droit devant la Cour suprême et que cette dernière est portée à définir ce que veut dire la Charte, il y a une implication nationale et collective, ce qui n'était pas nécessairement le cas pour un cas civil ou une demande de protection portée devant les cours de justice par un individu. C'est très important.
    Si on considère les causes qui ont été portées devant la Cour suprême grâce au Programme de contestation judiciaire — je pense, par exemple, au cas Arsenault-Cameron et au cas Mahé —, on constate qu'il y a des exemples très spécifiques où le droit des citoyens d'avoir accès à l'éducation et le droit des communautés d'avoir le contrôle de leurs écoles étaient établis. Il y a des commissions scolaires francophones dans l'ensemble du pays grâce à une décision de la Cour suprême qui, elle, a été rendue grâce au Programme de contestation judiciaire.
    Merci beaucoup, monsieur le commissaire.
    On a complété le troisième tour.
    Nous entamons le quatrième tour avec Mme Maria Minna, du Parti libéral.
    Merci, monsieur le président.
    Vous avez tenu un forum à Toronto pour voir le lien entre la dualité et la diversité. Je voudrais connaître votre impression de ce forum. C'est très intéressant parce que je trouve que les enfants dans mon comté, évidemment, parlent la langue de leurs parents, mais ils sont aussi souvent très intéressés à apprendre la langue française parce qu'ils ne se sentent pas comme des citoyens du pays s'ils ne connaissent pas les deux langues. Je voudrais connaître votre impression de ce forum, premièrement.

[Traduction]

    Deuxièmement, il y a des immigrants à Toronto qui viennent d'un pays francophone comme le Congo. Ces familles qui vivent dans ma circonscription me disent qu'elles ont du mal à trouver une bonne école française pour leurs enfants. Une de ces familles a d'ailleurs retiré ses enfants de l'école française qu'ils fréquentaient à Toronto car le niveau de français de l'enseignant n'était pas à la hauteur de leurs attentes.
    C'est malheureux, car si nous accueillons des immigrants qui parlent déjà français, il faut les encourager à maintenir et à améliorer leur français plutôt...
    Peut-être avez-vous des informations à nous donner à ce sujet?
    Ce sont là mes deux questions.
    Monsieur le président, nous avons eu une journée fascinante à Toronto où nous avons rencontré des représentants de toute une gamme d'ethnies culturelles francophones et anglophones. Cela nous a donné une bonne idée de leurs préoccupations.
    Nous avons été aussi impressionnés, et cela confirme ce que vient de dire le député, par le grand intérêt et le grand appui dont ces immigrants font montre pour la dualité linguistique au Canada. Les statistiques prouvent d'ailleurs que le niveau de bilinguisme dans les deux langues officielles est plus élevé chez ceux qui viennent de l'étranger que chez les Canadiens qui sont ici depuis plusieurs générations. Cela témoigne de l'attrait qu'exerce la dualité linguiste sur les immigrants. Le bilinguisme n'est pas un obstacle, mais plutôt — j'hésite à parler d'une marque de commerce — une façon pour nous d'identifier notre pays dans le monde.
    Au sujet des écoles françaises en Ontario et dans les autres provinces, une étude menée sur les écoles françaises à Toronto a révélé des tensions sociales entre les franco-ontariens qui s'attendent à certaines choses de leurs écoles en matière de langue et d'instruction - les franco-ontariens sont les enfants de québécois qui se sont installés en Ontario - et les immigrants africains provenant d'une tradition coloniale française plus rigoureuse en matière d'éducation.

  (1035)  

    M. Fraser, excusez-moi, mais mon collègue voudrait poser une autre question, mais peut-être pourrez-vous alors poursuivre votre réponse.
    C'est un phénomène dont nous sommes conscients et que je considère un défi particulier, pour les communautés minoritaires, que de devoir accueillir des immigrants francophones dans leurs écoles et dans les autres groupes de la collectivité.

[Français]

    Je rencontre régulièrement des membres des communautés et des groupes anglophones du Québec. Il existe un problème criant. J'ai reçu une note très spécifique et très détaillée, en fin de semaine, provenant de la directrice générale de l'Association des Townshippers, dans laquelle elle m'explique que leur association vit actuellement une crise budgétaire. Il n'y a plus d'argent dans leur compte et les sommes pour les payes doivent être déposées cette semaine. Ils ne reçoivent pas l'argent de Patrimoine Canadien. On m'explique aussi que c'est le cas de plusieurs organismes anglophones au Québec. Il semble que cette semaine, les porte-parole de Patrimoine Canadien aient fait savoir qu'on leur émettrait un chèque d'urgence, mais qu'il est possible qu'on ne puisse le faire, parce que Patrimoine canadien ne peut qu'émettre six chèques d'urgence et qu'il faut le faire pour plusieurs organismes.
    La suggestion des gens de Patrimoine canadien est de changer les modalités et d'émettre plus de chèques d'urgence. On devrait simplement verser les sommes promises au lieu d'étouffer les organismes anglophones du Québec!
    Je me demandais si vous étiez au courant de cette situation et si le bureau du commissaire aux langues officielles pouvait faire quelque chose à ce sujet.
    Je n'étais pas au courant de ces situations particulières que vous décrivez. Le problème systémique, que j'ai décrit en réponse à d'autres questions, est quelque chose qui se répète. J'ai entendu des témoignages semblables concernant des institutions québécoises, tout comme d'autres parties du pays. J'en prends note. De toute évidence, il y a un problème systémique.
    Merci beaucoup, monsieur Fraser.
    Je cède la parole à M. Daniel Petit.
    Merci beaucoup. Bonjour, monsieur Fraser. Je suis heureux de vous revoir.
    J'aimerais que vous me parliez d'un point qui est peut-être délicat. Je voudrais savoir une chose, parce que vous avez déposé un rapport. Je suis un membre récent de ce comité. J'ai un peu plus d'ancienneté que M. Gravel, mais pas plus d'un an, au maximum.
     Quand je suis arrivé au Comité permanent des langues officielles, la première chose que m'a apprise M. Godin — qui est, à toutes fins utiles, une institution en matière de langues officielles — était que c'était la première fois qu'on faisait un voyage pour rencontrer les communautés francophones hors Québec. Depuis 1969, c'était la première fois. Nous étions tous étonnés, même M. Godin. Je n'étais pas étonné, puisque c'était ma première fois, mais il est tombé des nues, il en a parlé à trois ou quatre reprises.
    On a visité toutes les provinces et leurs communautés francophones, pour savoir comment ça se passait sur le terrain. Naturellement, nous avons déposé un rapport intitulé La parole aux communautés : nous sommes là! — La vitalité des communautés de langues officielles en situation minoritaire. Je vous dis que j'en ai appris des choses, et rapidement!. J'étais avec M. D'Amours, et nous avons visité un centre au Nouveau-Brunswick où des médecins québécois vont travailler parce qu'ils sont payés plus cher. Ils parlent français avec les infirmières qui sont formées là. C'est un très beau centre. Tout cela semble s'être développé depuis quatre ou cinq ans. C'est ça, la vitalité.
    J'ai aussi visité la province de Terre-Neuve. Il y a un très petit groupe, composé de 3 800 francophones, qui est très puissant. C'est une communauté extrêmement riche, extrêmement structurée. Je ne parle pas nécessairement des pêcheurs de Port aux Basques, je parle de ceux qu'on m'a permis de rencontrer.
     Je vous dis tout de suite que je n'ai pas lu votre rapport au complet. Vous avez deux rapports, le rapport annuel de 2005 sur les langues officielles et, surtout, celui dont j'ai pris bonne note, le deuxième volume.

  (1040)  

    C'est le rapport de Patrimoine canadien.
    Dans le rapport de Patrimoine canadien, il est question des réalisations des institutions fédérales désignées en ce qui a trait aux langues officielles. Cela fait référence aux fameux articles 41 et 42. Est-ce uniquement pour me faire plaisir qu'on fait cela? Lorsque je regarde à plusieurs endroits, il y a effectivement des avancées qui font que non seulement de l'argent a été donné, mais qu'en plus, cet argent est devenu plus productif. On sent qu'il y a quelque chose de bon là-dedans.
    Vous vous êtes prononcé. Je vais essayer de répéter ce que vous avez dit exactement, sans sortir du contexte. Dans votre dernier rapport annuel, vous avez recommandé, et je cite:
Le commissaire recommande que la ministre des Langues officielles veille à ce que Patrimoine canadien revoie ses mécanismes de reddition de comptes pour la mise en œuvre des articles 41 et 42 de la Loi afin de mettre davantage l’accent sur les résultats.
    Il semble y en avoir, mais quand je lis cela, je suis un peu dans une zone grise. Je voudrais que vous m'expliquiez ce qui manque. Quel est le problème? Est-ce seulement un document que les fonctionnaires ont l'habitude de produire depuis 30 ans? En réalité, y a-t-il quelque chose dedans? Vous avez détecté quelque chose, c'est ce que je veux savoir.
    Il vous reste une bonne minute, voire une minute et demie.
    J'aurais voulu vous en laisser un peu plus.
    Une des recommandations que j'ai faites concernant Patrimoine canadien était que l'on revoie le système de reddition, en partie à causes de changements apportés au système de gouvernance. Une responsabilité de coordination et de surveillance qui était autrefois de la compétence du Conseil privé a été transférée à Patrimoine canadien. Il s'agit de deux fonctions, soit d'appliquer les programmes et d'assumer une surveillance.
    Nous pensons qu'il est difficile pour le même ministère d'assumer pleinement ces deux rôles. Nous avons donc demandé au professeur Donald Savoie de faire une étude sur la gouvernance des langues officielles au sein de Patrimoine canadien et de retracer brièvement l'effet du transfert de responsabilités du Conseil privé à Patrimoine canadien. C'est en quelque sorte notre façon de poursuivre la préoccupation que nous avons exprimée dans cette argumentation.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Nadeau.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Fraser, j'aimerais aborder la question du rayonnement du fait français à l'échelle internationale. En ordre d'importance, TV5 est le troisième réseau de télévision au monde. Le Canada et le Québec soulignent le peu de présence de ce réseau dans la grille horaire, compte tenu de l'importance qu'ils accordent à sa programmation.
    Or, il ne faudrait peut-être pas s'étonner du fait que 85 p. 100 de cette programmation est payée par la France. Il faut dire aussi que TV5 rayonne dans 203 pays. Il s'agit presque de l'ensemble de la planète.
    Quelle est votre position face à la question touchant TV5 et à la participation de l'entité canadienne francophone à la promotion du Québec et du Canada sur le plan mondial?
    Je pense que la participation canadienne est très importante. Par contre, j'ai remarqué que ces jours-ci, la situation de TV5 était fragile en ce qui a trait à l'engagement du gouvernement de la France. Si je ne m'abuse, le gouvernement du Canada et celui du Québec sont intervenus conjointement pour essayer de faire en sorte que la France continue d'appuyer TV5.
    J'ai eu un peu l'impression d'être chez moi quand j'ai vu à l'étranger des émissions canadiennes diffusées par TV5. Donc, en tant qu'auditeur canadien et que personne ayant voyagé à l'étranger, j'ai saisi l'importance de ce réseau et de cette fenêtre sur le monde qu'il représente pour le Canada et le Québec.

  (1045)  

    Plus tôt aujourd'hui et à l'occasion d'autres rencontres de ce comité, on a abordé un sujet dont vous traitez dans votre livre Sorry, I Don't Speak French, c'est-à-dire la connaissance du français en tant que critère d'admission à l'université.
    Pour avoir vécu plus longtemps à l'extérieur qu'à l'intérieur du Québec, je constate qu'au niveau secondaire, depuis le milieu des années 1990, les commissions scolaires majoritairement anglaises laissent tomber les cours de français langue seconde. Je ne parle pas ici des écoles qui offrent officiellement un programme d'immersion, donc le core French, comme on le nomme communément dans le domaine de l'éducation.
    Le fait qu'on supprime ces cours ne constitue-t-il pas une sonnette d'alarme? Je pense ici à la reconnaissance du fait français par l'ensemble des Canadiens et Canadiennes, et non pas seulement par les parents qui sont intéressés à voir leur enfant apprendre le français.
    Pour ce qui est de l'importance qu'on devrait accorder aux cours de français de base, je suis tout à fait d'accord. C'est ce qu'on appelle en anglais le core French.
    Pour souligner la chose, je vous rappelle que 1,1 million d'étudiants apprennent le français au Canada anglais, et que seuls 300 000 d'entre eux le font dans le cadre d'un programme d'immersion. La grande majorité de ces étudiants apprend donc le français au moyen de cours de core French. C'est un phénomène très important. Dans certains cas, on dévalorise l'enseignement du core French, ce qui a comme effet de me faire dresser les cheveux sur la tête.
    Par contre, j'aimerais vous faire part d'un exemple positif. Mes amis doivent être à la veille de me trouver ennuyant à force de m'entendre en parler. Il s'agit du conseil scolaire Edmonton Public Schools, qui a fait une étude sur la situation observée en 2000-2001. Du côté français, le montant d'inscriptions avait décru de 12 p. 100. Dans un rapport, ces gens ont déterminé 14 critères visant à fournir une formation en français de qualité. En plus d'appliquer ces 14 critères, ils ont obtenu un financement sérieux. Au total, le nombre d'inscriptions a augmenté de 25 p. 100, et le genre de chute qu'on observe normalement au niveau des inscriptions en 9e ou 10e année a presque été éliminée.
    On observe comme résultat que 63 p. 100 des étudiants faisant aujourd'hui leurs études en français au campus Saint-Jean de l'Université de l'Alberta sont issus des programmes d'immersion. Pour moi, il s'agit d'une expérience réussie. Elle m'inspire un certain optimisme. Pour d'autres conseils scolaires, ça représente aussi un modèle à suivre.

  (1050)  

    Merci, monsieur Fraser, pour cette anecdote.
    Nous allons maintenant passer à M. Godin.
    Merci, monsieur le président.
     Le fait que la formation linguistique ne soit plus la responsabilité de l'École de la fonction publique vous inquiète. La fonction publique avait auparavant sa propre école et on y offrait ce genre de formation. Le nouveau gouvernement, si on peut le qualifier ainsi, a décidé de changer de cap. Vous semblez inquiet de la situation. J'aimerais connaître votre position.
    Monsieur le président, j'ai pris l'habitude de viser les résultats plutôt que de me préoccuper des moyens. J'ai entendu des arguments qui soulignaient les avantages de cette décision et d'autres qui en exposaient les inconvénients. Ce sont maintenant les ministères qui doivent s'assurer que les gens occupant des postes assortis d'une exigence de bilinguisme sont bel et bien bilingues.
    Certains disent que le centre perd le contrôle si cette responsabilité n'est pas assumée par l'école, alors que d'autres disent que c'est là une façon de responsabiliser les ministères de même que les fonctionnaires eux-mêmes. Pour ma part, je ne porterai pas de jugement prématuré sur l'effet de cette décision.
     Faut-il considérer les effets que ça pourrait avoir dans les régions rurales, où il n'existe aucune institution en mesure d'offrir de la formation linguistique? On parle de la fonction publique, de ses responsabilités, de l'argent du gouvernement et de la possibilité de déplacer des personnes vivant dans les régions rurales. Pour ce qui est des communautés, il existe peut-être au Canada des endroits où aucune institution ne peut offrir cette formation. On ne sait pas quelle va être la portée de ce changement. Dans des centres urbains comme Ottawa, Toronto, Montréal, et même Moncton ou Fredericton, ça peut fonctionner, mais est-ce qu'on a considéré les effets néfastes que ça pourrait avoir dans les petites régions?
    Je prends note du point soulevé par le député. Je m'en souviendrai quand viendra le temps d'étudier les effets de cette décision.
    Merci.
     C'est tout.
    Nous avons complété notre quatrième tour. M. Chong a exprimé le souhait de poser une question additionnelle. On pourrait lui donner trois minutes, si le comité accepte.
    Monsieur Chong, vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Nous sommes toujours préoccupés par les symptômes des problèmes des langues officielles. Ce serait peut-être une bonne idée d'étudier le fond des problèmes.
    Ce serait peut-être également une bonne idée d'étudier la politique d'une troisième langue. J'en avais parlé l'an dernier, lors d'un comité où vous vous étiez présenté.

[Traduction]

    Si nous envisageons une politique de trilinguisme, nous pourrions aborder certains des enjeux dont vous avez traités dans votre témoignage. Selon cette politique, il faudrait parler deux des trois langues officielles pour pouvoir obtenir son diplôme d'études secondaires et la troisième langue serait au choix de l'élève. Si vous êtes membres d'une première nation, ce pourrait être une langue autochtone. Si vous vivez à Vancouver, cela pourrait être le japonais ou le chinois. Si vous vivez à Montréal, ce serait peut-être l'espagnol.
    Une telle politique serait grandement avantageuse pour l'unité nationale. Elle réglerait certains problèmes fondamentaux d'accès aux soins de santé dans les deux langues officielles. Si vous êtes dans les forces armées ou la GRC, cela réglerait bien d'autres problèmes aussi. Ce serait bon pour le commerce international. Ce serait bon pour la diversité culturelle.
    Vous voudrez peut-être réfléchir à cette idée au cours des six prochaines années.

  (1055)  

[Français]

    Monsieur Chong, vous devriez laisser répondre M. Fraser. Il ne lui reste qu'une minute.

[Traduction]

    J'encourage le commissaire aux langues officielles à étudier cette possibilité. Bon nombre de questions dont nous parlons sont des symptômes de problèmes plus graves qui relèvent du système d'éducation au pays. Une politique qui encouragerait l'usage plus fréquent du français et de l'anglais, une politique qui exigerait des élèves qu'ils connaissent deux langues officielles et une troisième... Comme l'a dit Luc Harvey, l'ajout d'une troisième langue à nos deux langues officielles permettrait peut-être de ralentir l'hétérogénéité galopante qui existe dans les plus grandes villes et de solutionner certains problèmes symptomatiques dont vous traitez dans vos rapports annuels.

[Français]

    Vous avez le temps de donner une réponse très brève, monsieur Fraser. Il vous reste 30 secondes.

[Traduction]

    Monsieur le président, je remercie sincèrement le député de son intérêt. Je le répète, j'estime qu'il est beaucoup plus facile d'apprendre une troisième qu'une deuxième langue. De plus, nous avons déjà entrepris une étude interrelation entre la dualité linguistique et la diversité culturelle. Je ne manquerai pas de prendre en considérations les observations très intéressantes du député.

[Français]

    Merci, monsieur le commissaire.
    M. Godin veut aborder un dernier point. Ensuite, je concluerai, car j'aimerais poser une question au commissaire.
    Cela me fait réagir. Le Comité permanent des langues officielles a presque un syndrome, ou plutôt un cancer. Je suis obligé de dire quelques mots à ce sujet.
     Pensez-vous que ce soit un syndrome d'avoir à demander au gouvernement de respecter les deux langues officielles avant d'en adopter une troisième? Avant de se précipiter sur la troisième, ne serait-on pas mieux avisés de régler notre problème, et que la loi canadienne, les deux langues officielles et les deux peuples fondateurs soient respectés? Veut-on garder notre pays intact, de l'Ouest à l'Atlantique? Est-ce un syndrome, monsieur le commissaire? Vous-même, en tant commissaire, souffrez-vous d'un syndrome?
    Une troisième langue n'est pas votre responsabilité. Excusez-moi, mais vous êtes le commissaire aux langues officielles, et votre responsabilité, c'est la loi qui a été votée par ce Parlement qui doit respecter les deux langues officielles de notre pays, qui sont le français et l'anglais.
    Monsieur le président, je suis très conscient de mon mandat, de mes obligations, de mes responsabilités et de mes aspirations.
    J'ai cru comprendre que le député ne parlait pas d'un syndrome, mais d'un symptôme. Le symptôme que j'ai vu, c'est que le gouvernement, après presque 40 ans, ne réussit toujours pas à remplir ses obligations. C'est comme cela que j'ai compris...
    Monsieur le président, si on commence à mettre l'accent sur une troisième langue, n'y a-t-il pas un danger qu'à Vancouver, l'anglais et le chinois prennent le dessus?
    À l'ordre, s'il vous plaît. Nous allons compléter.
    Monsieur Godin, il vous reste une minute.
    Monsieur le président, n'y a-t-il pas un danger, si on commence à délaisser le problème des langues officielles et à entendre ceux d'une troisième langue?
    Je souhaite la bienvenue à la troisième langue, mais votre responsabilité, aussi bien que la nôtre au Comité permanent des langues officielles, est d'essayer de faire respecter les deux peuples fondateurs et les deux langues officielles dans les services fédéraux au Canada.
    Je suis d'accord avec le député: mon mandat est très clair.
    Merci beaucoup, monsieur le commissaire.
    Après des éclaircissements sur l'intendance domestique, vous nous avez maintenant apporté des éclaircissements linguistiques. Monsieur le commissaire, je voudrais vous remercier. Ce matin, vous êtes arrivé très bien préparé. Vous nous avez remis des documents, votre allocution et un communiqué. Je voudrais vous remercier au nom des membres du comité. Je veux également souligner la synergie fructueuse que vous développez avec l'ombudsman des Forces armées canadiennes, qui est venu au comité et qui a contribué à la progression de nos travaux, comme vous l'avez fait ce matin.
    Je vous laisse le mot de la fin. Nous aurons une rencontre du comité directeur dès demain, et le comité se penchera sur les sujets qu'il étudiera. Nous avons déjà une grille horaire, mais si vous aviez un ou deux sujets d'étude à recommander au comité, quels seraient-ils?

  (1100)  

    Comme je l'ai dit à la fin de ma présentation, le gouvernement doit absolument présenter le nouveau plan d'action, et le comité doit surveiller de près sa préparation. Ce qui est importe, c'est que l'approche soit globale et stratégique.
    L'un des thèmes que je continue à privilégier est l'importance du leadership. La maîtrise des deux langues officielles est une composante essentielle du leadership. Cet aspect du leadership doit également être mis en évidence dans le contexte de renouvellement de la fonction publique. Un pourcentage énorme des employés de la fonction publique prendra sa retraite; il y a un processus démographique de renouvellement. Dans ce contexte, il ne faut pas oublier l'importance de la dualité linguistique et du bilinguisme.
    Monsieur le commissaire, je vous remercie, ainsi que votre équipe, de vous être déplacés pour venir nous rencontrer ce matin.
    À la prochaine.
    La séance est levée.