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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources humaines, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 024 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 15 avril 2008

[Enregistrement électronique]

  (0905)  

[Français]

    Je déclare la séance ouverte.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous reprenons notre étude sur la contribution fédérale à la diminution de la pauvreté au Canada.
    Ce matin, je tiens à remercier les témoins qui sont ici et à leur souhaiter la bienvenue, bien sûr. Il s'agit du Conseil canadien de développement social, de l'Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux et d'Informetrica.
    Je vous demanderais de vous présenter. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes chacun pour faire votre présentation. Par la suite, on procédera à la période des questions.
    On peut commencer par M. Shillington. On ira dans cet ordre, pour votre présentation. Après, on entendra Mme Scott.

[Traduction]

    Merci de m'offrir l'occasion de vous parler, une fois de plus, de la pauvreté au Canada.
    Je sais que le comité désire parler des définitions de la pauvreté, mais je vais seulement dire quelques mots à ce sujet, car j'estime que c'est une diversion.

[Français]

    Je voudrais simplement que vous vous présentiez et que vous présentiez votre organisme. On peut commencer par Mme Scott.

[Traduction]

    Désolé. Je pensais que vous vouliez que je prenne la parole en premier.

[Français]

    Il n'y a pas d'interprétation? D'accord, je vais vous présenter.
    Mme Katherine Scott est vice-présidente à la recherche au Conseil canadien de développement social. M. Glenn Drover est travailleur social et consultant en politique sociale. M. Drummond White est travailleur social et membre du conseil d'administration de l'Ontario de l'Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux. Finalement, M. Richard Shillington est associé principal chez Informetrica.
    Nous allons commencer par vous, madame Scott.

[Traduction]

    Je voudrais profiter de l'occasion pour vous remercier de nous avoir invités à prendre la parole devant le comité aujourd'hui. C'est certainement un sujet qui nous tient beaucoup à coeur.
    Je représente le Conseil canadien de développement social. Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas le Conseil, je nous décris toujours comme la vieille dame de la politique sociale au Canada. Nous existons depuis 80 ans. Notre premier mandat date des années 20 et portait sur les enfants pauvres de l'après-guerre. Depuis, notre mandat s'est élargi et nous sommes devenus un important organisme de recherche national non sectaire qui se penche sur les questions de politique sociale et qui a fait des recherches dans le domaine de la pauvreté et de la mesure de la pauvreté.
    Comme l'a dit Richard, je crois que vous vous intéressez aux mesures de la pauvreté. On m'a demandé de vous parler un peu d'une étude que nous avons réalisée sur la pauvreté urbaine et je vais donc commencer par décrire le cadre de nos travaux sur le sujet de la pauvreté dans les villes. Ensuite, je me ferai un plaisir de répondre à vos questions concernant la mesure de la pauvreté et les autres aspects du problème. Nous sommes en train de faire une étude pour un comité fédéral-provincial sur la mesure de la pauvreté et je me ferai donc un plaisir de répondre aux questions que vous voudrez poser à ce sujet et sur la façon dont nous mesurons ou nous ne mesurons pas la pauvreté au Canada, selon le cas.
    Comme je l'ai dit, on m'a demandé de venir vous parler du travail que nous avons réalisé pendant de nombreuses années sur la pauvreté urbaine au Canada. C'était un processus intéressant, parce que, pendant longtemps, nous n'avions aucun moyen de comprendre la pauvreté au niveau des collectivités. Nous n'avions pas les données voulues. Il y a une dizaine d'années, le Conseil s'est associé à un certain nombre de municipalités et d'organisations communautaires pour acheter des données nécessaires pour commencer à comprendre ce qui se passait au niveau des collectivités. L'étude que nous avons publiée récemment se fonde sur le recensement de 2001 et vous avez de la chance, car les données sur les revenus provenant du recensement de 2006 doivent être publiées en mai, dans quelques semaines.
    Le travail que nous avons réalisé à partir du recensement de 2001 commence à révéler la complexité du phénomène de la pauvreté au niveau local. Il était important de le faire il y a 10 ans, car on pensait qu'avec l'évolution de la dynamique et de la composition de la pauvreté, le phénomène de la pauvreté commençait à devenir un énorme problème dans les grandes villes du pays. Le travail que nous avons réalisé ces dernières années à partir du recensement de 2001 le confirme.
    Cela ne veut pas dire que la pauvreté n'est pas un problème bien réel et pressant dans les régions rurales du Canada, mais compte tenu de son incidence et de sa gravité, c'est surtout dans les villes que la pauvreté pose un problème au Canada. Il y a de nombreux facteurs, si cela vous intéresse, et nous pouvons parler des raisons du phénomène, mais il est certain que les grandes villes du pays sont celles où les taux de pauvreté sont les plus élevés. Les travaux que nous avons réalisés nous ont permis d'en faire la constatation.
    Vous avez sans doute remarqué que, dans de nombreuses villes dans lesquelles on effectue une étude de la pauvreté locale, on peut constater certaines différences. Ce qu'il y a d'intéressant, c'est que, même si la pauvreté est la plus forte dans les régions urbaines, sa répartition dans les villes est très localisée. Vous avez des villes comme Toronto, par exemple, où la pauvreté commence à s'installer dans les zones suburbaines. La pauvreté est maintenant concentrée dans les banlieues de Toronto. Vous avez également des villes comme Saint John, au Nouveau-Brunswick, par exemple, où les quartiers du centre-ville sont très marqués par la pauvreté. À Vancouver, la dynamique de la pauvreté a nettement changé pendant les années 90 et on commence à voir certaines enclaves de pauvreté; par exemple, les villes de Richmond et Coquitlam où le taux de pauvreté était assez faible ont maintenant un taux de pauvreté beaucoup plus élevé à cause de la concentration de nouveaux immigrants.
    Par conséquent, lorsque nous parlons de la pauvreté urbaine au Canada, je crois important de bien comprendre que c'est toujours un phénomène très local qui dépend de la composition des collectivités et des populations particulièrement vulnérables qui vivent dans ces collectivités.
    Je voudrais revenir brièvement sur ce que j'ai dit quant au fait que la pauvreté a gagné les banlieues. Nous sommes parfois très influencés par ce que nous entendons dire au sujet des États-Unis où il y a eu, certainement, un évidement des grandes villes et une concentration de la pauvreté dans les villes du Midwest, par exemple. Cette tendance n'a pas été aussi importante au Canada même si nous commençons à la constater dans des endroits comme Toronto et Montréal où l'embourgeoisement des quartiers du centre-ville a chassé les pauvres vers la proche banlieue, ou encore à Richmond et Vancouver où ils s'en vont vers d'autres collectivités.

  (0910)  

    En fait, cela reflète la composition de la population des collectivités. Notre étude montre en détail — et j'espère que vous pourrez examiner certains des profils que nous avons établis pour certaines villes — les différents taux de pauvreté chez les enfants, chez les aînés, chez les nouveaux immigrants et, dans l'Ouest, la concentration de la pauvreté dans les populations autochtones. C'est très important. Dans les villes comme Calgary et Edmonton où il y a eu une diminution de la pauvreté depuis les années 90, on constate l'apparition de poches de grande pauvreté. C'est certainement le cas chez les Autochtones des villes de l'ouest du pays. J'ai apporté le texte complet du rapport et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Lorsque je pense à certaines des principales conclusions de cette étude, en fait, le Canada n'est absolument pas un pays uniforme. La pauvreté urbaine reflète largement notre diversité et c'est une réalité dont il faut tenir compte pour chercher des solutions. Nous pouvons certainement en parler et il est essentiel de créer des assises et des appuis institutionnels solides, mais les initiatives visant à réduire la pauvreté locale sont vraiment importantes dans ce contexte parce que la nature et le caractère de la pauvreté au niveau des villes et des collectivités varient énormément. Telle était certainement la principale conclusion du rapport sur la pauvreté urbaine.
    Je sais que le temps passe, mais je voudrais parler un peu de certaines des constatations concernant les enfants, les immigrants et la pauvreté urbaine.
    La situation des enfants est intéressante. Notre rapport — et ces données se fondent sur le dernier recensement — indique qu'en 2001, environ une personne sur cinq était pauvre dans les grandes régions urbaines comme Ottawa, Gatineau, Toronto et Vancouver, mais qu'à peu près un enfant sur quatre était pauvre. Ces statistiques n'ont rien d'étonnant, je pense, car le taux de pauvreté chez les enfants est généralement plus élevé que le taux de pauvreté moyen. Quand nous avons examiné la situation dans les villes de tout le pays, le taux de pauvreté infantile le plus élevé était à Montréal et le plus bas, à Vaughan. Il y a d'énormes variations d'un endroit a l'autre, mais il y a des villes où le taux de pauvreté infantile est beaucoup plus bas que le taux moyen ne le laisserait croire, et ces villes se trouvent au Québec.
    Ce qu'il y a là d'intéressant — et c'est la raison pour laquelle je vous en parle — c'est que la politique publique peut contribuer à abaisser le taux de pauvreté infantile. Au Québec, bien sûr, des politiques ont été adoptées pour réduire la pauvreté infantile et nous commençons à en voir les résultats.
    Par contre, si nous prenons les immigrants, chez qui le taux de pauvreté est généralement plus élevé, ce sont seulement les collectivités où il y a une population importante d'immigrants récents que le taux de pauvreté est très élevé. L'écart entre le taux de pauvreté des citoyens nés au Canada et celui des immigrants, surtout des immigrants récents, peut atteindre 40 p. 100. Là encore, ce sont des villes comme Vancouver, Montréal et Toronto et cela nous ramène à la question de la diversité et des instruments politiques qu'il faudra utiliser pour s'attaquer à ces problèmes très graves.
    J'ai été frappée par les écrits sur le sujet lorsque nous avons examiné où… Même chez les partisans de solutions très locales pour lutter contre la pauvreté, nous constatons une véritable explosion de l'intérêt que les groupes communautaires manifestent pour la réduction de la pauvreté un peu partout dans le pays en mobilisant l'opinion publique et en se faisant les champions de cette cause. Je félicite le comité de s'attaquer à ce problème. Tous ces groupes s'entendent pour souligner la nécessité absolue d'une intervention fédérale énergique pour réduire la pauvreté à partir d'assises solides sur lesquelles reposeront des solutions locales.

  (0915)  

    Nous avons besoin, d'une part, de politiques universelles ou générales visant tous les citoyens et, d'autre part, d'initiatives ciblées comme celles que vous voyez apparaître. Je pense que le comité va devoir en tenir compte dans son examen du rôle que doit jouer le gouvernement fédéral pour s'attaquer à des problèmes comme la pauvreté urbaine au Canada. Sans programmes énergiques comme la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti, sans un régime d'allocations familiales solide, sans un régime fiscal progressif, sans un solide soutien sur le plan de la santé et de l'éducation, toute initiative locale est vouée à l'échec. Il est important de ne pas l'oublier.
    Même lorsque vous examinez certaines études expérimentales sur les pratiques exemplaires des autres pays — et nous pouvons en parler — comme les États-Unis, par exemple, qui ont des programmes exemplaires de lutte contre la pauvreté, l'absence d'infrastructure essentielle sur le plan de la santé publique, par exemple, est toujours un signe d'échec. Les États-Unis n'ont pas pu résoudre le problème de la pauvreté en l'absence de fondements essentiels tels qu'un régime public d'assurance-santé, l'accès à un enseignement de haute qualité, la santé publique et le logement. En fait, le logement est un élément essentiel de la pauvreté urbaine et on constate que sur le plan du transport…

[Français]

    Je dois vous interrompre, madame Scott, car votre temps est écoulé. Vous aurez l'occasion tantôt de répondre à des questions. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre MM. Drover et White, de l'Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux.

[Traduction]

    Bonjour et nous vous remercions infiniment de nous avoir invités à nous joindre à vous ce matin.
    Je m'appelle Drummond White. Je représente l'Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux. C'est un organisme fédéral regroupant neuf provinces et le Nord. Notre profession est guidée par la poursuite de la justice sociale, le renforcement de notre profession, bien entendu, et l'amélioration de l'excellence de la réglementation. Néanmoins, la priorité première de notre association professionnelle est la poursuite de la justice sociale. C'est dans cet esprit que nous avons consacré beaucoup de temps, d'effort et de ressources à nous attaquer au problème de la pauvreté.
    Aujourd'hui, nous mettons l'accent sur la pauvreté chez les femmes, comme nous l'avons fait ces dernières années. Nous avons publié un certain nombre de documents: La détérioration de l'état de santé et du mieux-être des femmes à faible revenu au Canada: une tragédie évitable , il y a deux ans; La sécurité financière des femmes âgées au Canada, en novembre dernier; et Le revenu et la pauvreté chez les femmes au Canada: revue de la situation, de 2004.
    Glenn Drover, qui est notre consultant en politique sociale, va faire la majeure partie de notre exposé et je serai certainement à votre disposition, ainsi que Glenn, pour répondre à vos questions.
    Je cède la parole à Glenn.
    Merci.

  (0920)  

    Si j'ai bien compris, on nous a demandé de parler davantage des stratégies et des solutions concernant la pauvreté chez les femmes que des faits et des problèmes. Nous vous avons remis un mémoire écrit qui traite de certains des problèmes reliés à la pauvreté chez les femmes ainsi que des défis à relever sur le plan politique.
    Nous allons essayer aujourd'hui de mettre en lumière quelques-unes des stratégies ou des solutions possibles pour s'attaquer à la pauvreté chez les femmes, mais avant cela, j'aurais juste deux petites remarques à faire en ce qui concerne la situation.
    Premièrement, l'écart entre le revenu des hommes et des femmes et le niveau de pauvreté relativement plus élevé des femmes au Canada sont un phénomène persistant. Il dure depuis longtemps. Cet écart n'a pas vraiment diminué. Les femmes ont plus tendance à être pauvres que les hommes, les enfants sont pauvres dans une très large mesure parce que leurs mères sont pauvres et les femmes célibataires âgées sont particulièrement pauvres en raison de leur situation marginale sur le marché du travail.
    D'autres pays industrialisés, notamment en Europe septentrionale, on réussit à réduire dans une large mesure l'écart entre le revenu des hommes et celui des femmes ainsi que le niveau de pauvreté chez les femmes. Ils ont mieux réussi que nous. Nous pensons que les pays européens vous fournissent des bons repères à cet égard. D'après ce que nous avons compris, votre étude portera sur certains d'entre eux.
    Nous avons quatre principes fondamentaux, parce que nous pensons que les principes sont importants lorsqu'on se penche sur le problème de la pauvreté.
    En ce qui concerne la pauvreté chez les femmes, un taux d'emploi élevé est très important pour que les femmes à faible revenu puissent avoir des emplois durables. C'est essentiel pour réduire la pauvreté. Nous pouvons voir que le bien-être repose sur le travail.
    Deuxièmement, la politique sociale doit tenir compte de la famille et assurer l'égalité entre les sexes. Ce sont des facteurs fondamentaux pour promouvoir la sécurité et le bien-être des femmes.
    Troisièmement, l'inclusion sociale et l'égalité des chances requièrent, tant pour les femmes que pour les hommes, une protection sociale adéquate, accessible, financière et durable. Je pense que cela rejoint ce que Katherine vient de dire.
    Quatrièmement, les femmes devraient participer à la conception, à la mise en oeuvre et à la supervision des programmes sociaux qui touchent leur vie et leurs moyens de subsistance. Comme vous le savez bien, ces programmes sont très souvent conçus par des hommes.
    Compte tenu de ces quatre principes, il y a cinq propositions multidimensionnelles qui pourraient, selon nous, contribuer à réduire la pauvreté des femmes.
    La première consiste à réviser le seuil de pauvreté ou le seuil de bas revenu afin qu'il reflète mieux les réalités de la vie des femmes. Comme Richard l'a mentionné plus tôt, ainsi que Katherine, nous avons une publication à ce sujet, particulièrement en ce qui concerne les femmes. Je pense qu'elle a été remise au comité. Nous pensons qu'il est important d'établir un seuil de pauvreté composite pour établir les objectifs de réduction du taux de pauvreté.
    La deuxième proposition est une réforme de l'aide sociale et de l'assurance-emploi. Elle se fonde sur le modèle du Caledon Institute. Nous supposons que vous l'avez. Nous voulons simplement nous en faire l'écho et vous dire pourquoi nous pensons que c'est un modèle utile.
    La troisième proposition consiste à promouvoir les politiques visant à accroître la participation des femmes au marché du travail, en se fondant particulièrement sur l'expérience européenne et les recherches européennes.
    La quatrième proposition vise à améliorer les prestations de retraite telles que la Sécurité de la vieillesse, le Supplément de revenu garanti et le RPC. Ces régimes constituent la principale source de revenu de retraite des femmes, ce qui n'est pas le cas pour un bon nombre d'hommes.
    La cinquième proposition consiste à modifier l'aide au logement et les subventions. Nous croyons possible de les modifier pour améliorer le logement des femmes âgées et des femmes en général.
    Je vais aborder certaines de ces questions, pour vous les expliquer un peu et nous pourrons ensuite en discuter ensemble.
    Pour ce qui est du seuil de pauvreté composite, nous pensons que c'est possible. Vous connaissez certainement l'indice des Nations Unies. D'autres pays européens ont établi un indice composite de la pauvreté. L'avantage de ce type d'indice est qu'il ne tient pas compte uniquement du revenu. Les recherches qui ont été faites sur le sujet en Angleterre montrent que lorsque vous utilisez d'autres indices, vous obtenez des résultats différents. Un indice composite vous permet probablement d'obtenir un portait plus fidèle de la pauvreté. Dans le cas des femmes, il est certain que la question du revenu laisse de côté un grand nombre d'autres problèmes, car cela se base très souvent sur les données du ménage ou de la famille et pas seulement sur les données individuelles. Cela n'indique pas comment les ressources sont utilisées au sein de la famille. Il arrive très souvent que les femmes soient défavorisées à ce niveau-là.
    Par conséquent, un indice composite est important comme nous le soulignons dans notre rapport. Nous précisons comment nous pensons qu'il faudrait l'établir.
    La réforme de l'aide sociale et de l'assurance-emploi est un modèle qui a été proposé par le Caledon Institute. C'est un système à trois niveaux, comme vous le savez sans doute. Le premier niveau est un soutien du revenu de base pour toute personne à la recherche d'un emploi. Le deuxième niveau est davantage axé sur les services administrés par les provinces. Le troisième niveau est destiné aux personnes handicapées qui vous en diront certainement plus long à ce sujet le moment venu.
    Nous pensons que c'est un bon système pour deux raisons. La première est que cela confère au gouvernement fédéral la principale responsabilité des transferts de revenu et du soutien du revenu. Ce niveau de gouvernement est beaucoup mieux en mesure que les provinces d'assumer cette responsabilité, surtout en ce qui concerne l'aide sociale. D'autres pays l'ont fait.
    Deuxièmement, nous pensons que cela répartit clairement les pouvoirs et les responsabilités des différents niveaux de gouvernement. C'est une distinction que le gouvernement actuel a soulignée et que nous appuyons.

  (0925)  

    En troisième lieu, il y a les politiques visant à favoriser la participation au marché du travail. Selon des études européennes récentes portant sur les politiques qui favorisent cette participation, que ce soit au niveau des normes, ou de la discrimination, de l'équité, etc., ainsi que sur les divers types de mesures de soutien, les femmes sont largement plus nombreuses que les hommes à se prévaloir de ces programmes en Europe et elles finissent par avoir un taux d'emploi nettement plus élevé que les hommes. Nous pensons donc qu'il faudrait développer davantage ce genre de programmes au Canada.
    Nous pensons aussi que les services de garde d'enfants sont un élément important, car sinon les mères monoparentales ne peuvent pas vraiment aller sur le marché du travail. Il ne faut pas oublier non plus à ce propos — car on présente souvent des arguments présentant les avantages que cela apporte aux enfants — que c'est aussi un avantage sur le plan de la productivité de la main-d'oeuvre. Il ne faut donc pas l'oublier.
    En quatrième lieu, il y a les améliorations à la Sécurité de la vieillesse, au Supplément de revenu garanti et au RPC. Je n'entrerai pas dans les détails, mais si vous le désirez, nous pourrons le faire pendant la discussion. Nous pensons qu'il y a plusieurs façons d'améliorer ces programmes pour aider les femmes afin de rendre la SV et le SRG plus accessibles à certaines femmes qui n'y ont pas droit actuellement, de même que pour élargir un peu plus l'accès au RPC. Un des inconvénients est que, pour les femmes qui quittent le marché du travail pour s'occuper de quelqu'un d'autre qu'un enfant, par exemple, pour prendre soin d'un parent âgé, le RPC ne prévoit pas les mêmes dispositions que pour les mères qui doivent s'occuper d'un enfant.
    Enfin, en ce qui concerne le logement, nous n'entrerons pas dans les détails là non plus, mais nous pensons qu'il y a deux aspects importants à considérer. L'un est qu'il faut aller plus loin sur le plan des allocations logement. Pour le moment, presque toutes les subventions au logement sont reliées aux logements sociaux. Elles ne sont pas accordées à leurs occupants. Il faudrait également essayer de permettre aux femmes à faible revenu d'avoir davantage accès aux prêts hypothécaires.
    Je vais m'arrêter là. Merci, monsieur le président.

[Français]

    Il vous reste une minute, monsieur White.

[Traduction]

    Ça va. Merci.

[Français]

    Monsieur Shillington.

[Traduction]

    Je sais que le comité désire parler de la définition de la pauvreté, mais je vais seulement dire quelques mots à ce sujet, car je pense que c'est une diversion.
    Je vais vous donner un exemple pour vous expliquer pourquoi j'attache peu d'importance à la définition de la pauvreté. Au Canada, une personne âgée qui n'a pas une pension de son employeur dispose d'un revenu d'environ 15 000 $: environ 6 000 $ de la Sécurité de la vieillesse, en moyenne 5 000 $ du Régime de pensions du Canada, plus 3 000 $ ou 4 000 $ du SRG. Ce n'est pas beaucoup. À peu près la moitié des Canadiens prennent leur retraite sans régime de pension. Ces chiffres représentent la moyenne: la moitié des gens se situent en dessous et la moitié au-dessus. De plus, 82 p. 100 des célibataires qui prennent leur retraite sans pension ont un revenu inférieur à 20 000 $. Sommes-nous tous d'accord pour dire que ces personnes se trouvent dans une situation difficile? Sont-elles pauvres? Cela dépend de votre définition.
    Prenons le cas d'une célibataire âgée du Québec disposant d'un revenu moyen d'environ 17 000 $. Certaines de ces personnes ont des pensions, d'autres n'en ont pas. Je prends les chiffres de la dernière année pour laquelle je peux obtenir des données comparables, c'est-à-dire 2000. Le taux de pauvreté chez les femmes célibataires au Québec est de 65 p. 100 avec un revenu de 17 000 $ si l'on prend le seuil de faible revenu avant impôt. Si j'avais comparu devant le comité il y a 15 ans, nous aurions dit que le taux de pauvreté était de 65 p. 100. Mais nous avons fait certains progrès. Le SFR après impôt donne un taux de pauvreté de 38 p. 100 pour les mêmes personnes. Le revenu n'a pas changé. Si l'on se sert de la mesure du faible revenu après impôt, on obtient un taux de pauvreté de 21 p. 100. Si on utilise la MPC, qui a été créée par les fonctionnaires du gouvernement fédéral, le taux de pauvreté est de 5 p. 100.
    Par conséquent, nous avons réalisé d'importants progrès. Le taux de pauvreté est tombé de 64 p. 100 à 5 p. 100 sans que nous ayons dépensé un seul sou. Bien entendu, ces changements dans le taux de pauvreté n'ont aucune répercussion sur le bien-être ou sur le niveau de vie de ces femmes. Ce qui influe sur le niveau de vie des aînés pauvres, ce ne sont pas les discussions sur les mesures de la pauvreté, mais les programmes mis en oeuvre.
    Par conséquent, au cours des 25 dernières années, qu'avons-nous fait qui ait pu exercer une influence sur le revenu de ces femmes? La Sécurité de la vieillesse a été indexée aux prix uniquement depuis 1984 et ce changement a été le seul. Pour ce qui est du SRG, j'aurais dit la même chose il y a trois ans, mais il a été augmenté de 36 $ par mois il y a deux ans. C'est la seule augmentation qui ait été apportée au SRG, le principal programme pour les personnes âgées à faible revenu, depuis 25 ans.
    Les prestations du RPC ont un peu augmenté en raison du taux de participation accrue des femmes et de l'augmentation du taux de participation en général. Néanmoins, le montant maximum que verse le RPC est de 10 000 $ et la moyenne est de 7 000 $. Pour les femmes, elle est de 5 000 $ par année et non pas par mois.
    Nous avons apporté quelques changements du côté de l'impôt. Nous avons augmenté le crédit en raison de l'âge et le crédit pour revenu de pension et nous avons mis en place le partage des revenus de pension. Aucune de ces mesures n'a la moindre influence sur le sort des femmes dont nous parlons. Nous reconnaissons tous, je pense, que ces personnes ne sont pas des contribuables.
    Nous avons relevé le plafond des REER — nous avons trouvé de l'argent pour le faire — de 5 000 $ à 20 000 $ par année au cours des 25 dernières années. Je suppose que cela n'aura pas beaucoup d'influence sur ces statistiques.
    Je vais parler des programmes, mais avant cela, j'ai remis au comité un poème intitulé « La pauvreté, c'est… » écrit par des enfants de North Bay. Ce ne sont pas des économistes. Ils ne parlent pas du revenu avant impôt ou après impôt. Ils parlent de ce qu'est vivre dans la pauvreté pour un enfant. Vous remarquerez qu'ils ne parlent pas de malnutrition ou de logement, mais d'exclusion sociale. C'est ce qu'ils voient. Si le comité désire se pencher sur la pauvreté, il devrait se pencher sur le problème de l'exclusion sociale.
    À mon avis, les mesures anti-pauvreté que le gouvernement a prises ne donnent pas de résultats parce qu'elles ciblent les pauvres. Elles sont conçues, mises en oeuvre et administrées par une élite qui n'a aucun contact avec la pauvreté et qui ne comprend pas comment vivent les gens pauvres. Je fais moi-même partie de cette élite et je sais qu'il y a beaucoup de choses que j'ignore.
    Nous encombrons nos efforts anti-pauvreté de règlements et de tracasseries administratives parce que notre paranoïa nous incite à croire qu'ils sont peut-être trop généreux ou que les pauvres en abusent. Nos efforts pour cibler ces personnes conduisent seulement à un resserrement des critères d'admissibilité, à des mesures dissuasives qui aident les gens tout en les empêchant d'avancer. Pratiquement tous nos programmes de soutien qui s'adressent aux personnes à faible revenu imposent un lourd tribu à leurs bénéficiaires.

  (0930)  

    La portée de ces programmes est limitée de façon à réduire leur coût. Cette limitation, qui se fonde sur la méfiance et les soupçons, crée des inégalités, des critères d'admissibilité complexes fondés sur le revenu et des règles que personne ici présent ne connaît en détail, ce qui crée des taux d'impôt marginal qui dépassent souvent 100 p. 100.
    La plupart des programmes dont je parle ont des équivalents pour les Canadiens qui, comme nous, sont à l'aise, des programmes moins exigeants, auxquels nous consacrons plus d'argent et qui sont plus généreux.
    Si j'ai quelques minutes, je voudrais passer rapidement en revue une série de programmes grâce auxquels nous pourrions améliorer le bien-être des aînés qui ont un faible revenu. Je ne vois pas l'intérêt de discuter quant à savoir si cela leur permettrait ou non de dépasser le seuil imaginaire de la pauvreté.
    La Sécurité de la vieillesse. Très rapidement, tout le monde ici présent sait-il que le montant des prestations de Sécurité de la vieillesse que vous touchez si vous êtes un immigrant dépend du pays d'où vous venez? En général, vous obtenez plus d'argent si vous venez d'un pays industrialisé que d'un pays d'Asie du Sud ou d'Asie de l'Est.
    Le RPC. Si vous avez un faible revenu, vous touchez le RPC. Il est récupéré sur votre SRG. La récupération et la rétroactivité du RPC posent des problèmes. Cela fait huit ans que j'en parle. Ce sont surtout les femmes qui sont admissibles au RPC. Le gouvernement sait qui elles sont et où elles vivent. Elles ont droit au RPC, mais elles ne le touchent pas. Lorsqu'elles font une demande tardive, elles ne touchent pas leurs prestations rétroactivement même s'il s'agit d'un programme contributoire.
    Le SRG. La récupération est de 50 p. 100. La nouvelle exclusion de 3 500 $ est une mesure positive. Mais pourquoi est-ce seulement pour le salaire? Pourquoi n'est-ce pas pour les gains? Pourquoi peut-on exclure 3 500 $ de salaire, mais pas les revenus d'un travail autonome? Là encore, c'est limitatif. On essaie d'imposer des restrictions.
    L'allocation de veuve. Si vous êtes une célibataire âgée de 60 à 64 ans, ayant un faible revenu, vous pouvez obtenir une allocation relativement très généreuse par rapport à la SV ou au SRG si vous êtes veuve, mais pas si vous êtes célibataire, séparée ou divorcée. À quoi cela rime-t-il? Sil le conjoint décède le jour qui précède votre divorce, vous y avez droit. S'il meurt le lendemain, vous n'y avez pas droit.
    Vingt-quatre pour cent des travailleurs du secteur privé ont un régime de pension offert par l'employeur. Dans le secteur privé, 18 p. 100 des travailleurs ont un régime de pension intéressant. La population canadienne va augmenter et nous savons que le nombre de gens qui bénéficient d'un régime de pension va en diminuant. Il y aura beaucoup plus de gens. La Sécurité de la vieillesse s'élève à 6 000 $. Le RPC à 10 000 $, mais la moyenne est de 7 000 $ et de 5 000 $ pour les femmes. Le SRG représente 3 000 $ à 4 000 $. Plus votre revenu d'autres sources est élevé, plus le SRG diminue.
    Quatre-vingt-deux pour cent des gens qui prennent leur retraite sans pension ont un revenu inférieur à 20 000 $.
    Me reste-t-il deux minutes? Je vais être très rapide.
    L'assurance médicaments. La franchise et la quote-part sont beaucoup plus élevées pour les régimes publics que pour les régimes de l'employeur. Les régimes publics, c'est-à-dire ceux qui sont administrés par les gouvernements, ont des formulaires, des listes des médicaments couverts. Les régimes offerts par l'employeur qui couvrent la plupart d'entre nous n'ont pas cette liste. Si un médecin vous prescrit un médicament, vous êtes couvert.
    L'assurance-emploi. Les prestations ont été réduites du tiers au cours des 15 ou 20 dernières années et de moitié pour les pauvres. Plus vous êtes pauvre, moins vous avez de chance d'être admissible aux prestations.
    Les prestations de maternité. L'assurance-emploi, que touchent environ la moitié des nouvelles mamans, remplace 55 p. 100 du salaire jusqu'à concurrence de 400 $ par semaine avec un délai de carence de deux semaines. Les régimes offerts par l'employeur remplacent 93 p. 100 du salaire, il n'y a pas de délai de carence de deux semaines et aucun plafond. Voyez ce que fait le Québec avec son programme d'assurance parentale. C'est un excellent programme. Il n'est pas parfait, mais c'est un énorme pas dans la bonne direction. Le programme de prestations à la disposition des personnes à faible revenu est, encore une fois, beaucoup plus limitatif, ciblé et moins généreux que le programme pour les Canadiens qui sont « appréciés ».
    Le Bon d'études canadien. C'est une merveilleuse idée. Cela doit permettre aux Canadiens à faible revenu d'investir dans un REEE. La dernière fois que j'ai vérifié les statistiques, le taux de participation était de moins de 10 p. 100. C'est de l'argent mis gratuitement à la disposition des personnes à faible revenu.
    Prêts d'études et Bourses du millénaire. Nous allons donner de l'argent aux gens. Rendons ces subventions imposables et certaines provinces les récupéreront sur leurs prêts aux étudiants.
    Savoir en banque. C'est un projet pilote pour inciter les Canadiens à faible revenu à épargner. Le ministère des Finances a décidé, après coup, qu'il ne pouvait pas vivre sans que cet agent soit imposable, ce qui veut dire qu'il est récupéré sur la prestation pour enfants et le SRG.
    La prestation fiscale pour enfants. C'est un merveilleux programme et une merveilleuse initiative si vous êtes un travailleur pauvre. Mais vous savez sans doute ce que les assistés sociaux en pensent, quel effet cela a eu sur eux et comment on s'est servi d'eux pour envoyer de l'argent aux provinces.
    La prestation fiscale pour le revenu gagné. Ce n'est pas une mauvaise idée. Vous pouvez la toucher si vous-même ou votre conjoint avait été étudiant pendant trois mois au cours de l'année écoulée. Pourquoi faisons-nous cela? Je ne comprends pas.

  (0935)  

    La garde d'enfants. Il y aurait beaucoup à faire en ce qui concerne la garde d'enfants.
    Le logement social… En ce qui concerne l'aide sociale, qui n'est pas une responsabilité fédérale, nous pourrions faire mieux.
    Merci pour votre attention.

[Français]

    Merci beaucoup d'avoir respecté votre temps. Je sais que c'est court, mais vous allez avoir l'occasion de compléter votre prestation pendant la période des questions.
    Maintenant, c'est la période où les parlementaires vont vous poser des questions. Je rappelle qu'ils ont sept minutes. C'est Mme Sgro, du Parti libéral, qui va commencer.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Je dois malheureusement me rendre à la Chambre. Je vais donc seulement poser une question et céder ensuite la parole à ma collègue.
    Il est difficile de dire quelle est la question à poser avant toute autre. Je voudrais d'abord vous remercier d'avoir parlé des solutions, car c'est sur quoi nous avons essayé de centrer notre attention au cours de notre étude.
    Monsieur Shillington, nous pourrions discuter indéfiniment avec vous aussi, et je ne sais pas par où commencer.
    Je voudrais revenir à M. Drover.
    Nous avons parlé de l'indice composite. Étant donné que nous essayons d'examiner le SFR et la MPC, quel est le chiffre que nous allons devoir choisir… ce chiffre est-il satisfaisant pour tout le monde? Pourriez-vous nous parler un peu plus de l'indice composite que vous avez mentionné? Plus particulièrement, vous avez dit que l'écart entre les hommes et les femmes va subsister pendant quelques années avant que nous ne puissions vraiment le rétrécir. Vous en avez surtout parlé pour les femmes.
    Nous avons examiné les initiatives prises par les autres pays afin d'avoir une idée de ce qu'ils faisaient. En fait, ils n'ont pas vraiment mis l'accent sur les femmes, mais ils ont établi des indices composites. Nous avons ensuite examiné les recherches faites sur le revenu des femmes, au niveau familial et individuel. À partir de cela, nous avons établi quatre indicateurs que nous avons jugés importants, du moins d'après nos recherches, car cela fournit…
    L'intérêt des indices composites qui ont été établis, particulièrement en Europe, est que certains d'entre eux montrent que la pauvreté touche des gens différents selon l'indicateur utilisé. Cela confirme, je crois, ce que Richard a dit quant au fait que cela dépend de ce que vous incluez dans votre définition.
    Nous avons estimé que pour les femmes, en particulier, il y avait quatre sortes d'indicateurs: l'éducation, car leur niveau d'éducation est souvent influencé de façon très différente que dans le cas des hommes; les indicateurs de santé, car l'espérance de vie, la mortalité maternelle, la violence, etc., influent sur la capacité de travailler des femmes; la qualité du logement et ce genre de mesures a déjà été établi, surtout pour ce qui est des normes de logement; les indicateurs d'emploi, la participation au marché du travail, la durée de l'emploi et ce genre de facteurs ainsi que le soutien familial.
    Une chose étonnante qui persiste encore est la suivante. Je n'ai malheureusement pas vu les études réalisées au Canada, mais des études ont été faites dans la plupart des pays européens et plusieurs autres pays du monde au sujet de l'écart dans les revenus au sein d'une même famille. Pour diverses raisons, les femmes à faible revenu sont particulièrement désavantagées à cet égard. Il nous semble donc important d'avoir des indicateurs reliés à ce qui se passe au sein de la famille, au genre de soutien que les femmes reçoivent, à l'indépendance dont elles jouissent pour ce qui est de leurs sources de revenu, etc.
    Voilà le genre d'indicateurs qu'il nous a semblé possible de réunir. Ces divers indicateurs ont déjà été testés dans une certaine mesure pour d'autres groupes dans d'autres pays. C'est donc une possibilité.

  (0940)  

    Pourrais-je ajouter brièvement quelque chose?
    Ce que je trouve intéressant en Europe, c'est qu'un certain nombre de pays ont adopté une série d'indicateurs pour déceler la pauvreté et la privation matérielle. En fait, je pense qu'une des difficultés ou qu'un des obstacles que nous avons au Canada… parce que, bien sûr, cela fait des années que nous n'arrivons pas à nous mettre d'accord sur le fait que le SFR, par exemple, n'est pas vraiment un seuil de faible revenu. Je dois dire comme Richard que c'est, en fait, une diversion. Toute mesure est limitée par ce qu'elle cherche à mesurer. Les mesures visent à révéler certaines choses et il n'y aura jamais une mesure parfaite de la pauvreté. Il faut bien comprendre que nous avons peut-être besoin de mesures différentes pour repérer différentes choses importantes.
    Le SFR dont on dit beaucoup de mal est, en fait, une mesure historique très importante. Il a été, pendant de nombreuses années, un moyen très crédible et très rigoureux de repérer les faibles revenus et les inégalités de revenu au Canada. Nous n'avons pas de mesures de la privation matérielle, par exemple, et c'est ce dont Glenn a parlé.
    En Europe, les seuils de pauvreté relative ont été complétés par une série d'indices de privation et on tient compte des deux. L'Irlande a opté pour cette solution et a créé une mesure combinée. Si vous prenez l'Angleterre, quand elle a annoncé qu'elle allait largement réduire la pauvreté infantile d'ici 2020, elle a mis en place trois mesures de revenu différentes pour suivre les progrès réalisés. Certaines de ces mesures étaient davantage ciblées vers les résultats des programmes tandis que d'autres visaient les revenus et les inégalités dans les revenus, deux éléments importants.
    On a tort de croire, je pense, que nous avons besoin d'une mesure unique et le comité pourrait peut-être réfléchir de façon constructive à une série de mesures pour que nous puissions avancer sur ce plan très important.
    Je pourrais peut-être en parler également.
    Je dirais simplement que si nous cherchons une mesure très simple, nous nous retrouverons peut-être avec une solution très simple. La lutte contre la pauvreté devrait être d'une grande portée et inclure l'accès à l'emploi, ce qui comprend tout un éventail de services comme les services de garde d'enfants. Nous avons parlé de la famille. Qui, dans la famille, a accès aux ressources de cette famille? Si deux personnes travaillent, mais une seule a accès aux finances, est-ce une famille égalitaire? Voilà le genre de questions que nous devons examiner dans une optique très large. Par conséquent, si nous prenons une définition étroite de la pauvreté, je ne pense pas que nous réglerons cette question. Je ne pense pas que cela nous apportera les solutions nécessaires pour créer une société plus équitable.
    Merci.
    Merci beaucoup à vous tous. Vos exposés étaient excellents et certainement intéressants.
    Comme l'a dit ma collègue, Mme Sgro, cela soulève beaucoup de questions. Je vais adresser la mienne à M. Shillington compte tenu du fait que notre président me dit qu'il me reste deux minutes.
    Premièrement, que pensez-vous du seuil de pauvreté composite que proposent M. Drover et M. White? Je crois qu'il est centré sur les quatre facteurs que sont l'éducation, la santé, l'emploi et le soutien familial. Pensez-vous que nous avons besoin d'un ensemble de mesures?
    Deuxièmement, vous alliez aborder certaines options davantage tournées vers les solutions pour les services de garde d'enfants et le logement de façon à réduire la pauvreté. Pourriez-vous nous en dire plus, s'il vous plaît?

  (0945)  

    Je ne vais pas répondre à votre question concernant la pauvreté, car je ne pense pas qu'il y ait un consensus au Canada quant à nos obligations à l'égard des personnes à faible revenu. Je considère qu'un seuil de pauvreté reflète la reconnaissance d'une obligation politique ou culturelle. Avons-nous l'obligation de garder en vie les Canadiens les plus pauvres du lundi au mardi? Si vous pensez que telle est notre obligation, que l'aide sociale suffira à les garder en vie pendant un jour de plus, c'est ce que reflétera votre seuil de pauvreté. Combien de gens ont suffisamment d'argent pour survivre?
    Si vous croyez que votre obligation est de donner plus d'argent, un montant d'argent suffisant pour que les membres de la famille puissent participer à la vie de la société avec une certaine dignité, vous aurez alors un seuil de pauvreté plus large.
    Si vous croyez que les enfants de la famille devraient pouvoir participer aux sorties scolaires — lisez le poème La pauvreté, c'est — vous aurez un seuil de pauvreté différent que si vous croyez qu'étant donné que cet enfant est pauvre, il est normal qu'il ne puisse pas suivre, à l'école, des cours de musique et de peinture qui exigent des frais supplémentaires; l'enfant ne les suivra pas et nous n'y voyons pas de problème.
    Avant que vous ne décidiez où se situe votre seuil de pauvreté et s'il est absolu ou relatif, s'il change ou non avec les conditions sociales, vous aurez décidé si nos obligations envers les personnes à faible revenu se limitent à un ensemble de services leur permettant de subsister d'un jour à l'autre ou s'il faut leur donner des ressources suffisantes pour participer à la vie de la société.
    Je ne vous ai pas répondu au sujet des services de garde d'enfants et du logement parce que j'aurais besoin de plus de temps.

[Français]

    Merci, monsieur Shillington et madame Dhalla.
    Nous allons poursuivre avec M. Ménard, du Bloc québécois.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Scott, dans les documents que notre service de recherche nous a fait parvenir, on prête à votre organisme la paternité d'une idée voulant que l'on scinde en deux le Transfert canadien en matière de programmes sociaux: un concernerait un transfert dédié aux programmes sociaux et l'autre, l'éducation postsecondaire.
    Vous réclamez-vous toujours de cette idée? Pourriez-vous nous en faire valoir les avantages et les inconvénients?
    Je poserai ensuite deux questions aux autres témoins, mais commençons par vous.

[Traduction]

    Oui. Il y a un certain nombre d'années, nous avons recommandé de diviser le Transfert social canadien entre la santé, d'une part et les programmes sociaux et l'éducation, d'autre part. Bien entendu, cela a été fait il y a trois ans et nous avons, ensuite, recommandé de séparer le transfert pour les programmes sociaux du transfert pour l'éducation. Cela a été supposément fait dans le budget 2007. Étant donné l'origine du financement des services sociaux et plus particulièrement des programmes anti-pauvreté qui remontaient aux programmes de transfert d'après la Seconde Guerre mondiale et, plus récemment, au Régime d'assistance publique du Canada, nous étions convaincus qu'il était nettement préférable, sur le plan de la reddition de comptes, de séparer les transferts pour permettre de voir s'ils suffisaient à répondre aux besoins dans les provinces et aux programmes dans ces domaines.
    Ces fonds ont supposément été divisés. Je ne pense pas qu'ils l'ont été… [Note de la rédaction: Inaudible] … dans le budget 2007. D'après l'analyse que nous avons faite à ce moment-là, le niveau de financement des programmes sociaux—y compris la formule pour appliquer la même norme à toutes les provinces, une formule unique par habitant qui sera mise en place en 2009 — est toujours inférieur à ce qu'il était lorsque le Régime d'assistance publique du Canada est devenu le Transfert social canadien au milieu des années 90. Nous avons certainement des inquiétudes au sujet du niveau de financement des programmes anti-pauvreté. Nous pensons que la division du Transfert social a été importante à cet égard, pour nous aider à suivre la situation de près et à la comprendre.

[Français]

    Je suis très heureux de participer à cette étude du comité. En même temps, plus nous progressons dans l'audition des témoins — nous sommes évidemment au début de l'étude —, plus il m'apparaît évident qu'un piège guette ce comité. Ce piège réside dans le fait que le gouvernement fédéral n'offre pas de services directement à nos concitoyens, sauf peut-être pour les personnes handicapées sur des plateaux de travail. Le gouvernement fédéral intervient davantage sur le plan de la fiscalité. On parlait de la Prestation fiscale canadienne pour enfants et du Supplément de revenu garanti. Il reste que ces mesures passent directement par la fiscalité. Le gouvernement n'intervient pas directement dans les domaines de la santé et de l'éducation.
    Pourtant, il est deux choses que le gouvernement fédéral pourrait faire directement, et j'aimerais connaître votre opinion à ce sujet. Tout d'abord, il y a toute la question de la discrimination. Ne serait-il pas temps — et le comité pourrait le recommander — que l'on inclue le motif interdit de condition sociale dans la Loi canadienne sur les droits de la personne? Vous savez que huit provinces ont déjà inclus dans leur législation ce motif interdit. Certaines personnes pensent que cela permettrait de contester, par exemple, la loi sur les réserves ou encore la loi déposée par les libéraux pour augmenter le nombre d'heures de travail requis pour être admissible à l'assurance-emploi.
    J'aimerais donc vous entendre parler de la question de la discrimination. Voulez-vous vous joindre à moi pour presser ce gouvernement d'inclure dans la Loi canadienne sur les droits de la personne le motif interdit de discrimination sur la base de la condition sociale?

  (0950)  

[Traduction]

    Il y a environ sept ou huit ans, un comité a été chargé d'examiner la Loi canadienne sur les droits de la personne. J'ai écrit un document d'une cinquantaine de pages sur ce sujet, quant à savoir si l'interdiction de l'exploitation basée sur la condition sociale était possible dans le cadre de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
    Ce n'est pas simple. Si vous ne pouvez pas décider qui est pauvre et qui ne l'est pas, il est difficile de décider si les gens sont victimes d'une discrimination fondée sur la pauvreté. Je pense que c'est possible. Il y a toute une étude qui parle de… Il est certain que certaines personnes sont exploitées en raison de leur vulnérabilité financière. Si vous y réfléchissez de cette façon, est-il possible d'adopter une loi interdisant d'exploiter les personnes vulnérables à cause de leur situation financière? Il est évident que vous pouvez le faire.

[Français]

    Ai-je encore un peu de temps, monsieur le président?
    Vous avez une minute et demie.
    D'accord. Alors le...
    Allez-y, monsieur Drummond.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Je suis en train de lire nos principes de politique sociale. L'un d'eux est l'égalité. Un autre est l'équité. Je vais lire en entier la déclaration concernant l'équité: « Les personnes et les familles qui se trouvent aux prises avec des circonstances semblables doivent être traitées de la même façon; il ne sera tenu compte des inégalités sociales que dans le but d'octroyer des avantages compensatoires aux plus défavorisés de la société. »
    Cela signifie pour nous non pas que certaines personnes sont traitées particulièrement bien, mais qu'il faut traiter les gens afin qu'ils puissent parvenir au même niveau d'équité que les autres.

[Français]

    D'accord.
    Je vais poser une deuxième question rapidement parce que je ne veux pas dépasser mon temps.
    Quel effort le gouvernement fédéral devrait-il consentir au logement? On s'entend que c'est fondamental pour lutter contre la pauvreté.

[Traduction]

    Je peux en parler dans le contexte de nos propositions. Il y a deux choses que nous avons jugées importantes.
    La première est une allocation logement. C'est un transfert direct ou un crédit d'impôt qui serait accordé aux femmes à faible revenu. Un grand nombre d'autres pays l'ont fait et ce n'est donc pas nouveau. Nous avons aussi expérimenté ce genre de mesure au Canada. Elle existe à petite échelle en Ontario, par exemple, mais ce n'est pas encore bien établi. Cela équilibrerait le système actuel de subventions, étant donné qu'actuellement, tout est lié aux unités de logement alors que cette allocation serait liée à l'intéressé. C'est une formule très différente qui donne à l'intéressé beaucoup plus de choix sur le marché du logement.
    L'autre concerne les prêts hypothécaires. C'est un domaine très délicat compte tenu de ce qui s'est passé depuis six mois aux États-Unis et ailleurs, mais il est quand même possible de créer des prêts hypothécaires pour les personnes à faible revenu. Là encore, l'Ontario et le Québec aussi, je crois, ont des programmes limités dans ce domaine. Mais pour prendre l'exemple de l'Ontario, pour le moment, le niveau dit « abordable » est ce qu'on appelle le cinquième quintil. Si vous prenez par exemple la ville d'Ottawa, cela veut dire qu'il vous faudrait un revenu de 71 000 $. De toute évidence, le programme de l'Ontario ne s'adresse pas aux personnes à faible revenu. Même en Ontario, il s'agit de 23 millions de dollars; c'est moins de 3 p. 100 de l'ensemble du programme de logement abordable de la province.
    Le programme de logement abordable est, comme vous le savez, très maigre, au Canada. Chacun de ces exemples est possible, que ce soit l'allocation ou le soutien hypothécaire pour les personnes à faible revenu, mais pour le moment, cela n'existe qu'à très petite échelle au Canada.

  (0955)  

[Français]

    Vous aurez probablement l'occasion, monsieur White, de compléter cette réponse quand M. Martin, du NPD, vous posera des questions.
    Vous avez sept minutes, monsieur Martin.

[Traduction]

    Merci beaucoup d'avoir pris le temps de nous faire vos exposés ce matin.
    Comme vous le savez, nous nous attaquons aux responsabilités du gouvernement fédéral concernant la pauvreté au Canada. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de se demander vraiment s'il y a de la pauvreté et à quoi elle ressemble; je pense que nous en avons une assez bonne idée. Comme l'a dit M. Shillington, nous avons passé des années à essayer de définir la pauvreté sans vraiment commencer à nous y attaquer. En fait, il a très bien fait valoir qu'on a plutôt cherché à définir la pauvreté de façon à nier son existence plutôt qu'à chercher vraiment à y remédier.
    Katherine, vous avez parlé des solutions locales aux problèmes particuliers des différentes régions du pays.
    Glenn et Drummond, de l'Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux ont parlé du fait que les enfants pauvres, que nous avons laissé tomber complètement, je pense, font toujours partie de familles pauvres et que, dans la plupart des cas, ce sont des mères pauvres qui essaient de prendre soin de ces enfants.
    Richard, vous avez parlé de l'exclusion sociale. Vous avez vécu une expérience, à St. Christopher House, à Toronto, où vous avez été directement en contact avec des gens qui vivent dans la pauvreté. Je pense que vous avez écrit un merveilleux article dans le Toronto Star, à un moment donné.
    Vous avez également mentionné un poème, qui a d'abord été publié par ISARC, en Ontario, intitulé La pauvreté, c'est…. En fait, je l'ai dans mon site Web, si vous voulez vérifier. C'est une merveilleuse description des défis quotidiens des enfants qui sont confrontés au problème de la pauvreté.
    Pourriez-vous nous dire le plus rapidement possible quel devrait être le rôle du gouvernement fédéral, à votre avis?
    Nous pouvons commencer par Katherine et faire un tour de table.
    J'en reviens à l'argument que j'ai fait valoir dans mon bref exposé. Je pense que les initiatives locales de réduction de la pauvreté qui jaillissent un peu partout dans le pays sont essentielles pour tenir compte des caractéristiques particulières des différentes collectivités, car je pense que la pauvreté n'a pas du tout le même visage d'une collectivité à l'autre. Il est essentiel d'avoir des assises solides. Le gouvernement fédéral a une contribution très importante à apporter en créant des programmes équitables de sécurité du revenu pour tous les Canadiens, quel que soit l'endroit où ils vivent. Il a un rôle de premier plan à jouer en créant des programmes de sécurité du revenu qui s'adressent à différentes populations de façon à assurer un niveau de soutien adéquat et équitable. Il doit jouer aussi, bien entendu, un rôle important dans les transferts sociaux pour les services directs aux niveaux local et municipal. Je crois qu'il a également un rôle majeur à jouer sur le plan de l'immigration et du logement.
    Le gouvernement fédéral s'est retiré du logement et je ne pense pas que ce soit par hasard si, dans les années 90, nous avons commencé à voir augmenter la pauvreté et l'inégalité sur le plan des revenus. En même temps, nous avons assisté à une réduction importante des fonds consacrés par le gouvernement fédéral et les provinces au logement social et aux programmes de logement, et cela au moment où le marché privé du logement prenait son envol. Le logement abordable demeure un problème crucial au Canada et, dans les grands centres urbains, c'est un important facteur qui contribue à la persistance de hauts niveaux de pauvreté.
    Certains de mes collègues de Calgary — et cela pourrait être un autre domaine à examiner — m'ont dit qu'ils font une étude… Il y a différents types de pauvreté. En Angleterre, par exemple, on mesure le taux de pauvreté en fonction de la pauvreté du logement. On parle également de la pauvreté sur le plan du chauffage. Dans un grand nombre de villes des États-Unis ainsi qu'à Calgary, on commence à examiner la pauvreté sur le plan du transport, quand les gens n'ont plus les moyens de vivre à côté de leur lieu d'emploi et dépensent jusqu'à 30 p. 100 de leur revenu pour se rendre au travail. C'est un nouveau phénomène qui est relié de très près à la banlieusardisation et au développement économique.
    Je pense donc que l'émergence de la pauvreté sur le plan du transport, en tout cas chez les travailleurs pauvres, est un phénomène important qui témoigne du rôle que doit jouer le gouvernement fédéral en investissant dans l'infrastructure de transport en commun de façon à favoriser des collectivités plus équitables. Je crois important d'y réfléchir. Le gouvernement fédéral aurait certainement un rôle à jouer également dans ce domaine.

  (1000)  

    Je ne vais pas répéter ce qu'a dit Katherine, mais je voudrais souligner brièvement quelques distinctions que je crois important de faire.
    La première est qu'il faut respecter la division des responsabilités entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux. Cela veut dire, du moins pour moi, mais aussi pour nous, en général, que divers types de transferts du revenu sont largement sous la responsabilité du gouvernement fédéral. Il a les moyens de le faire d'un bout à l'autre du pays. Il peut créer l'équité dans les différentes régions alors que les provinces ne le peuvent pas. C'est un principe qui a été accepté jusqu'ici dans une certaine mesure.
    Les services et les programmes devraient être sous la responsabilité des gouvernements provinciaux et territoriaux. Voilà pourquoi, par exemple, en ce qui concerne nos propositions au sujet du logement, nous disons que l'allocation et les prestations hypothécaires sont des transferts de revenu et donc sous la responsabilité du gouvernement fédéral et non pas des provinces. Il y a de nombreuses initiatives dans le secteur du logement. La plupart des initiatives concernant le logement sont du ressort des provinces, mais il peut y avoir des transferts de revenu qui relèvent clairement du gouvernement fédéral.
    L'autre chose que j'aurais à dire au sujet des mesures anti-pauvreté est que le gouvernement fédéral a intérêt à établir une mesure composite de la pauvreté. Je dirais que c'est un avantage sur le plan politique, parce que l'un des résultats de l'expérience européenne est que ces mesures composites suscitent de plus en plus la participation du public. Lorsqu'on s'intéresse uniquement au revenu, les gens ont tendance à bâiller ou à dire simplement: « J'ai tel niveau de revenu et j'arrive à joindre les deux bouts, mais celui qui n'a que 10 000 $ ou 7 000 $ ne peut pas y arriver ». Néanmoins, quand vous commencez à faire participer les gens à la définition de ces mesures, cela commence à modifier leur attitude à l'égard de la pauvreté. C'est là un effet secondaire important de l'établissement des mesures de la pauvreté, en Europe. Je pense que nous verrions la même chose ici. Et je crois que c'est une responsabilité fédérale étant donné que c'est de portée nationale.
    La dernière chose dont je voudrais parler concerne les projets expérimentaux. Il y a toujours un grand nombre de pratiques exemplaires qui ont été appliquées dans d'autres pays et que le gouvernement pourrait prendre l'initiative d'adopter.
    Je pense qu'en plus des exemples dont mon collègue a parlé, il est important que le gouvernement fédéral et le Parlement fédéral jouent le rôle de chefs de file en faisant participer les Canadiens à la discussion sur ce que les différents aspects des programmes sociaux et du bien-être social représentent pour eux. Ce genre de débat et de dialogue est essentiel. D'autre part, comme dans bien d'autres domaines où il y a un chevauchement des responsabilités, je dirais que le gouvernement fédéral a aussi la responsabilité de prendre l'initiative d'élaborer les programmes, de lancer le dialogue et de faire des recherches.
    Merci.

[Français]

    Nous allons maintenant permettre à M. Lake, du Parti conservateur, de poser ses questions.

[Traduction]

    Je voudrais d'abord vous remercier tous pour votre présence ici aujourd'hui.
    Bien entendu, c'est une étude vraiment importante pour nous. Je dis souvent que quelle que soit notre affiliation politique, nous voulons tous voir la pauvreté diminuer au Canada. Nous n'avons peut-être pas toujours la même idée des moyens d'y parvenir, mais nous espérons que nous pourrons obtenir de vous quelques idées nouvelles.
    Je voudrais quelques éclaircissements. Katherine, quand vous avez répondu à une question de M. Martin, vous avez dit, je crois, que la pauvreté avait augmenté dans les années 90. D'après tout ce que je lis maintenant, la pauvreté est en diminution, et cela depuis un certain temps, au Canada.
    Pourriez-vous clarifier les mesures dont vous avez parlé?
    La pauvreté a augmenté au début des années 90 et, selon la mesure que vous utilisez, elle a commencé à diminuer vers 1997. Néanmoins, l'augmentation qui a eu lieu au début ou au milieu des années 90 était non seulement reliée directement au cycle des affaires, mais également reliée à la hausse du coût du logement et des autres dépenses.
    La pauvreté a eu tendance à diminuer à compter de 1997. Elle est restée à peu près stable. Si nous utilisons le seuil après impôt, elle est restée autour de 11 p. 100 depuis environ quatre ans.
    L'inégalité des revenus a continué de s'accroître, si bien que l'écart entre riches et pauvres s'est élargi. C'est une tendance évidente dans un grand nombre de pays industrialisés d'Europe et c'est encore plus marqué aux États-Unis. Le revenu se concentre entre les mains des Canadiens qui se situent en haut de l'échelle des revenus.

  (1005)  

    Cela m'amène directement à ma question suivante.
    Jeudi dernier, un témoin nous a parlé du pouvoir d'achat. On a fait beaucoup de comparaisons avec ce qui se passe en Europe et aux États-Unis. Le témoin que nous avons entendu jeudi dernier — je pense que c'était quelqu'un de Statistique Canada ou peut-être de RHDSC — nous a parlé du pouvoir d'achat.
    Lorsqu'on mesure le pouvoir d'achat aux États-Unis ou au Canada par opposition aux pays européens, bien des gens mentionnent particulièrement les pays nordiques. Si vous prenez le dixième percentile, c'est à dire celui où vous avez 10 p. 100 de pauvres et 90 p. 100 de riches, soit le percentile de gens qui ont un revenu relativement faible, notre pouvoir d'achat est en fait plus élevé au Canada qu'en Europe. Aux États-Unis, le pouvoir d'achat est plus élevé que celui des pays nordiques que tant de gens citent en exemple.
    Pouvez-vous nous dire quelles recherches vous avez fait à ce sujet et quels en sont les résultats?
    Des études internationales se sont penchées sur le bien-être relatif des personnes à faible revenu aux États-Unis, au Canada et en Europe. Néanmoins, souvent, ce n'est pas seulement une question de pouvoir d'achat, mais aussi d'accès aux biens publics, c'est-à-dire aux services et aux prestations qui ne sont pas incluses dans les statistiques du revenu. D'après les études que je connais concernant les États-Unis et le Canada, les Canadiens à faible revenu sont dans une situation relativement meilleure que les Américains à faible revenu étant donné notre État providence et l'accès aux biens publics, surtout aux soins de santé publique. Je pense que c'est exact.
    La façon dont on en tient compte devient une question de méthodologie. Il faut voir comment vous tenez compte de l'accès aux biens publics et aux ressources dans votre calcul de la mesure de la pauvreté. Un grand nombre de méthodologies ont été mises au point pour cela.
    D'accord, et je pense que cela fait partie du problème. Lorsque j'examine certains des mots clés, en ce qui concerne mes responsabilités en tant que député, je dois certainement assurer une bonne gestion et un juste équilibre et aussi tenir compte des conséquences qui sont parfois inattendues.
    J'ai examiné l'étude de John Richards, un ancien député néo-démocrate de la Saskatchewan, qui s'est penché sur la pauvreté…
    Il y a bien des années, en effet.
    Oui, il y a bien des années. Vous avez raison.
    Il a réalisé une étude de la pauvreté. J'ai mentionné certaines des choses dont il a parlé, les changements au programme d'assurance-emploi et certains changements apportés par les provinces à l'aide sociale qui ont, dit-il, contribué à accroître l'emploi et à diminuer la pauvreté.
    Néanmoins, il fait valoir aussi que certaines personnes ne sont pas « employables » et, sans lui faire dire ce qu'il n'a pas dit, lorsque nous cherchons trop à aider les gens qui sont employables, il ne nous reste pas toujours les ressources voulues pour aider ceux qui ne sont vraiment pas employables, ceux qui ont besoin le plus de notre aide.
    Tous les témoins ont largement mentionné aujourd'hui que certains groupes de gens ont besoin d'une aide particulière. Je voudrais savoir ce que vous pensez de l'équilibre à assurer et de la façon de gérer les deniers publics.
    Je vais laisser Richard faire la critique de l'étude de John Richards.
    Ce que vous dites à propos des pauvres méritants et non méritants est certainement un thème ressassé depuis longtemps au Canada et dans les autres pays anglo-saxons. C'est une longue tradition qui remonte au XVIe siècle.
    Je suis d'accord avec vous, et c'est ce qu'a dit Richard, quant au fait que nous abordons les programmes anti-pauvreté avec un certain sens des valeurs. On a certainement assisté sur la participation au marché du travail au Canada et ailleurs depuis la fin des années 80 et je dirais que c'est ce qui a conduit, par exemple, à la mise en place de la Prestation fiscale canadienne pour enfants. Un de ses objectifs explicites était de mobiliser la participation des parents au marché du travail. C'est directement énoncé dans la loi. En conséquence, les personnes qui ne peuvent pas participer au marché du travail… Je reconnais que cela peut avoir des conséquences. Ce groupe de gens risque d'être oublié ou dénigré
    Je dirais que l'idée selon laquelle vous êtes ou vous n'êtes pas sur le marché du travail, vous participez ou vous ne participez pas à l'économie du pays, vous êtes un contribuable ou un moins que rien, ne nous avance vraiment pas. Par exemple, une personne handicapée vous dira qu'elle est heureuse et qu'elle désire travailler ou participer activement à la vie communautaire. Elle ne pourra peut-être pas participer à plein temps au marché du travail étant donné le caractère chronique de son handicap, mais nous avons des programmes de sécurité du revenu rigides qui imposent des contraintes inutiles. Vous devez vous y plier ou tant pis pour vous. Un grand nombre de programmes d'assistance sociale imposent aux gens ces contraintes inutiles.
    Quant à la question de savoir si nous avons une certaine enveloppe d'argent et si, plus nous cherchons à rendre les gens employables, moins nous nous intéressons à ceux qui n'ont pas la même possibilité de participer au marché du travail, je vois les choses de façon un peu différente. Je pense que les divers groupes ont leurs propres besoins et que nous devons voir cela autrement qu'une situation gagnant-perdant. Nous avons besoin d'un éventail de programmes de soutien pour répondre à ces besoins.

  (1010)  

    Je vais vous donner un exemple de situation dont tout le monde sort perdant. J'ai plusieurs frères de familles d'accueil. J'en ai deux en Alberta — je ne vais pas les nommer par leur nom — qui bénéficient du programme AISH, un programme de revenu garanti pour les personnes gravement handicapées. À mon avis, ces deux frères de familles d'accueil sont employables. J'ai eu plusieurs conversations avec eux. Ils ont traversé des moments difficiles pour lesquels ils ont peut-être besoin d'aide, mais ils ne sont certainement pas handicapés au point de ne pas pouvoir travailler.
    Ils vivent tous les deux dans des appartements en sous-sol ou ils consacrent la majeure partie de leur temps à surfer sur Internet, à jouer des jeux vidéo et à des activités de ce genre. Ils sont dans la vingtaine. Je dirais que dans les deux cas, leur vie pourrait être bien meilleure. Quand j'en ai discuté avec eux, ils m'ont dit que s'ils trouvaient un emploi, ils perdraient leurs prestations AISH, ce qui les préoccupe.
    Sans trop entrer dans la politique provinciale, je dirais aussi que le montant d'argent qu'ils reçoivent n'est peut-être pas très important — en fait ils pourraient gagner beaucoup plus s'ils travaillaient, surtout étant donné la situation économique actuelle en Alberta — mais qu'il pourrait sans doute être dépensé plus utilement pour des gens qui en ont vraiment besoin. Je considère donc que tout le monde y perd.
    Il y a donc des conséquences inattendues lorsqu'on cherche à aider ces deux jeunes hommes, car l'aide qu'ils reçoivent leur fait du tort, selon moi et en même temps cet argent n'est pas dépensé là où il pourrait peut-être aider des gens qui n'ont vraiment pas la possibilité de s'en sortir seuls. Voilà ce qui me préoccupe.
    Certainement. Je pense qu'il serait intéressant d'entendre ce que Richard a à dire à ce sujet.
    Désolée. Pardonnez-moi.

[Français]

    Veuillez me permettre de vous interrompre, madame Scott.
    Monsieur Lake, vous avez largement dépassé votre temps.

[Traduction]

    Mais nous pouvons recevoir une réponse, n'est-ce pas?

[Français]

    Lors de leurs prochaines interventions, nos témoins pourront peut-être répondre en même temps aux questions que vous avez posées.
    Pour le prochain tour, chaque parti dispose de cinq minutes.
    C'est à vous, monsieur Murphy.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins pour leurs exposés.
    C'est un sujet très important et très vaste et notre comité va rechercher des instruments politiques. Mais il faut également respecter les autres champs de compétence. Certains instruments ont fonctionné dans une certaine mesure, je crois, même s'ils ne sont pas parfaits, par exemple le crédit d'impôt pour enfants et le Supplément de revenu garanti. Je me rends compte qu'il y a un certain nombre de cohortes différentes, que ce soit les Autochtones, les handicapés, etc. Je pense, par exemple, aux célibataires âgés de 55 à 65 ans, sans doute surtout du sexe féminin. Les gens ont des problèmes de santé, surtout au niveau de l'estime de soi ou quel que soit le nom que vous lui donnez. Ces personnes sont actuellement bénéficiaires de l'assistance sociale provinciale, ce qui est tout à fait insuffisant pour pouvoir vivre dignement. C'est une très petite allocation qui n'est tout simplement pas acceptable de nos jours au Canada. Là encore, c'est du ressort des provinces.
    A-t-on fait des recherches empiriques dans le but de prendre le Supplément de revenu garanti pour couvrir le groupe des 55 à 65 ans? Quels seraient les coûts, les avantages et les obstacles?

  (1015)  

    J'aurais deux choses à dire.
    Je sais qu'il y a au Canada environ 150 000 assistés sociaux qui sont âgés de 55 à 64 ans. J'ai simplement l'habitude de me souvenir des chiffres. Nous savons que la majorité de ces personnes ne vont probablement pas retrouver un emploi. Les règles de l'aide sociale leur enlèvent toute possession et tout espoir d'améliorer leur sort, si bien que cela n'aurait probablement aucune utilité.
    J'ai mentionné dans mon exposé — et je vais y revenir — qu'il y a un programme d'allocation de veuve pour les personnes âgées de 60 à 64 ans qui répondent au critère de revenu et que cela leur donne environ 13 000 $ par année. Ce n'est pas beaucoup d'argent, mais c'est peut-être deux fois plus que ce que l'aide sociale leur accorderait.
    Il y a environ 20 000 personnes qui touchent l'allocation de veuve. Il y a à peu près 120 000 personnes, des célibataires vivant seuls, qui répondent au critère de revenu pour l'allocation de veuve, mais qui ne sont pas veuves. L'allocation de veuve a été contestée devant la Cour suprême en raison de la discrimination fondée sur la situation matrimoniale. C'est un parfait exemple de ce dont vous parlez. Le gouvernement fédéral verse déjà une allocation aux veuves, mais pas aux personnes célibataires, divorcées ou séparées. Si ces personnes bénéficient de l'aide sociale en Ontario, elles ont droit à 6 000 $ par année, ce qui n'est guère utile.
    Je sais que le Caledon Institute a récemment publié une étude sur le coût d'élargissement de l'allocation de veuve. Il y a donc certaines publications qui circulent sur le sujet et l'allocation de veuve fournit un précédent.
    Cela m'amène à ma deuxième question. A-t-on fait des études sur…? Nous savons tous que le niveau de revenu est un des facteurs déterminants du coût des soins de santé. Lorsque vous entrez dans le groupe d'âge de 55 à 65 ans, vos coûts de santé augmentent. A-t-on déjà fait une analyse de la diminution possible du coût de la santé au niveau provincial étant donné que cela représente près de 50 p. 100 du budget de certaines provinces?
    Je voudrais faire une brève observation. Il y a peut-être des données que je ne connais pas, mais je ne voudrais surtout pas croire que nous serions prêts à fournir des soins de santé uniquement si une analyse coûts-avantages nous disait que c'est rentable.
    Non, mais il faudrait en tenir compte étant donné que c'est un facteur déterminant…
    Je comprends votre point de vue, mais je pense que vous comprenez également le mien.
    Pour que nous puissions avancer, y a-t-il des exemples internationaux sur lesquels le comité devrait se pencher? Je sais que le Canada est un pays unique. Y a-t-il d'autres pays que nous devrions prendre en exemple, qui se sont attaqués à ce problème et qui ont pris des mesures constructives?
    Pour les cinquante-cinq ans à soixante-quatre ans…?
    Non, de façon générale.
    Je peux lancer la discussion sur le sujet.
    Je pense qu'il y a plusieurs pays d'Europe… Le comité n'ignore pas que les pays scandinaves en général sont très en avance sur nous à cet égard tout en ayant une forte croissance économique. Ils servent de modèles tant au niveau économique qu'au niveau de la politique sociale. Également, l'Angleterre, en tout cas sous le gouvernement Blair, a pris des mesures très énergiques pour s'attaquer à un grand nombre de ces problèmes, avec plus ou moins de succès, mais elle a quand même expérimenté et obtenu un certain succès.
    Wendy Thomson, une des personnes qui a dirigé cette initiative en Angleterre, vit maintenant à Montréal où elle travaille à l'Université McGill. Il serait peut-être utile de lui parler pour avoir une meilleure idée de ce qui s'est passé là-bas. Je suis certain qu'elle est au courant de ce qui se passe actuellement et cela vous permettrait de vous en faire une meilleure idée.
    D'autres initiatives de ce genre ont été prises en France et aux Pays-Bas. La France a connu beaucoup de difficulté à cause de ses programmes de sécurité du revenu qui sont très généreux et elle essaie donc de réintégrer les gens dans le marché du travail. Un des programmes qui ont eu un succès relatif là-bas porte sur l'emploi des femmes, surtout les femmes d'âge mûr.
    Un des problèmes dont vous avez parlé est qu'il n'y a non seulement les personnes âgées de 55 à 64 ans, mais les femmes plus jeunes qui peuvent toujours apporter une contribution importante à l'économie, ce qui évite un transfert de revenu. C'est peut-être nécessaire pour les 60 à 64 ans et je suis d'accord avec ce que Richard a dit tout à l'heure et si l'allocation était élargie aux femmes célibataires, etc., cela réglerait sans doute le problème pour cette cohorte.
    En général, je dirais que la plupart des pays du nord de l'Europe ont des régimes d'aide sociale qui, dans l'ensemble, ne sont pas tellement meilleurs que le nôtre, mais dont la clientèle est beaucoup moins nombreuse que chez nous. C'est grâce à d'autres genres d'initiatives, surtout les initiatives visant le marché de l'emploi et les autres types de transferts de revenu pour la famille et la garde des enfants grâce auxquels les gens n'ont pas besoin de l'aide sociale, y compris les gens dont vous parlez.

  (1020)  

[Français]

    Merci, monsieur Drover.
    Nous allons passer maintenant à M. Gourde.
    J'aimerais profiter de cette occasion pour remercier nos témoins de leur présence et les féliciter pour leurs commentaires.
    J'aimerais donner l'occasion à chacun de vous de nous dire de quelle façon on pourrait mesurer le seuil de pauvreté. Doit-on avoir une vision globale ou par province? Faut-il tenir compte des différents secteurs pour ce qui est des jeunes, des personnes âgées? Aussi, il y a des gens qui travaillent mais qui sont pauvres parce que leur emploi ne leur permet pas de gagner un salaire suffisant.
    Pourriez-vous nous donner une formule magique ou nous recommander une façon de calculer ce seuil?

[Traduction]

    Je n'ai pas de solution miracle. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je ne pense pas que nous ayons une solution unique pour mesurer la pauvreté. Une mesure ne suffira pas à la tâche. Quant à la question de savoir si nous avons besoin d'une mesure nationale, je dirais qu'il est très important d'avoir une série de mesures nationales qui pourront servir à évaluer le bien-être des gens qui vivent à Corner Brook ou à Prince George. Dans un pays comme le Canada, je crois important d'avoir des normes et des mesures, comme le taux de chômage, le PIB, etc., qui soient applicables d'un bout à l'autre du pays.
    Je pense que nous avons besoin de mesures du revenu relatives comme le SFR et nous pourrons débattre du pour et du contre de la méthodologie choisie, mais c'est important. Cela permet de repérer les faibles revenus et les inégalités de revenus. Je dirais toutefois que nous devons continuer à mettre au point une série de mesures de la privation, qu'il s'agisse de la MPC ou d'une liste de… Par exemple, la Nouvelle-Zélande a mis au point, au cours de la dernière décennie, un indice très intéressant du niveau de vie dans le cadre de son rapport social. Il permet de faire une évaluation plus directe de l'accès aux biens et services de base, un peu comme certaines des mesures que nous avons pour le logement.
    Pour faire suite à ce qu'a dit Glenn, cela permet d'évaluer plus directement la situation réelle des gens. Je pense que ce serait extrêmement utile, en tout cas dans le contexte d'une politique ou d'un programme, et qu'il serait possible d'établir ce genre de mesures au niveau provincial ou communautaire.
    J'ai parlé tout à l'heure du Royaume-Uni. Ce pays a fait un investissement important dans la compilation et l'évaluation des données au niveau local. Il a un site Web extraordinaire, son site Web sur les statistiques des quartiers dont je peux donner l'adresse au greffier. On y fournit, pour 32 000 collectivités du Royaume-Uni, ce qui est extraordinaire, des renseignements détaillés sur les conditions de vie locales et les privations matérielles en les comparant — en indiquant leur situation ou leur classement — avec d'autres collectivités du Royaume-Uni. C'est ce que les Britanniques appellent un « swingometer » ce que je trouve amusant. Une personne peut trouver une quantité incroyable de renseignements dans ce site Web. Il a toutefois fallu que le gouvernement national prenne cette décision au sujet de la pauvreté, en fasse une priorité et investisse dans la collecte et l'évaluation des données pour obtenir, 10 ans plus tard, ces données extrêmement utiles.
    Je recommanderais une série de mesures. Le Canada doit envisager de créer un indice de privation ou un indice du niveau de vie, ce qui serait extrêmement utile.
    J'ajouterais seulement deux choses.
    Premièrement, une mesure composite a l'avantage de permettre de tenir compte des différences d'une région à l'autre ainsi que de la diversité, que ce soit au Québec ou ailleurs. Deuxièmement, je dirais qu'en fin de compte, toutes les mesures de la pauvreté sont relatives. Elles ne feront jamais l'unanimité.
    L'avantage d'une mesure composite est qu'elle tient compte d'un plus grand nombre de choses et qu'elle permet de mieux tenir compte des perceptions et des attitudes des gens. C'est ce qu'ont gagné, je pense, les pays qui sont allés dans cette direction. Leurs niveaux de pauvreté n'ont pas tellement baissé. Dans notre étude dont nous vous avons remis le rapport, nous avons comparé plusieurs pays avec le Canada en ce qui concerne les transferts de revenu et les niveaux de revenu jugés acceptable en fonction du SFR et d'autres types de mesures. Il y a des variations d'un pays à l'autre, mais aussi certains points communs.
    En ce qui concerne les mesures de la privation dont Katherine a parlé, c'est surtout en Angleterre qu'il y a eu des recherches à ce sujet. Un type de mesure avait tendance à refléter certaines différences, mais il y avait aussi certaines similarités avec les mesures du revenu.
    Par conséquent, nous ne parlons pas de différences très importantes. Il faut tenir compte de la diversité pour mieux comprendre le phénomène de la pauvreté au Canada et pour permettre à la classe politique et aux autres personnes qui doivent mettre en oeuvre certaines mesures de s'attaquer à ces questions.

  (1025)  

[Français]

    Merci, monsieur Drover et monsieur Gourde. Ce sera tout.
    Nous allons maintenant passer à M. Cuzner. Je m'excuse: en fait, nous allons entendre M. Ménard.
    Monsieur le président, vous connaissez ma nature accommodante. En revanche, je ne suis pas bonasse.
    Je voudrais traiter d'un sujet qui m'apparaît important mais qu'on n'a pas encore abordé dans le cadre du débat sur la lutte contre la pauvreté, soit toute la question des services financiers. Le Conseil national du bien-être social en a traité dans des rapports antérieurs.
    J'aimerais que vous nous parliez de l'accès au microcrédit. Je viens d'une circonscription de Montréal où sévit une certaine défavorisation. Dans mon milieu, si quelqu'un veut avoir accès à 300 $ ou 400 $ pour acheter ou faire réparer un appareil électroménager, c'est extrêmement compliqué. Les banques ne sont pratiquement plus présentes dans mon quartier, et quand elles le sont, elles ne veulent pas s'occuper du microcrédit. Pour leur part, les caisses populaires le font avec beaucoup de réticence. Les ACEF ont réalisé des projets en ce sens pour aider ce segment de la population.
    Il y a quelques années, je suis allé aux États-Unis étudier la Community Reinvestment Act. J'ai été très surpris d'apprendre que dans une société comme les États-Unis, les institutions financières devaient depuis 1977 faire rapport à une institution comparable à notre Bureau du surintendant des institutions financières. En effet, elles doivent lui faire part de la manière qu'elles vont desservir, en matière de microcrédit, des groupes défavorisés comme les communautés noire et hispanique.
    Il m'apparaît qu'on ne pourrait pas réaliser un rapport sérieux sans y inclure des recommandations sur le microcrédit, sur le rôle des institutions financières à cet égard. Si l'un d'entre vous désire émettre des idées ou faire des recommandations à ce sujet, je serai très heureux de l'écouter.

[Traduction]

    Comme je ne sais rien à ce sujet, je préfère ne rien dire.
    Moi non plus, malheureusement.
    J'ai siégé au conseil d'administration d'une coopérative de crédit et je sais que dans le nord de l'Ontario et au Québec il y a un grand nombre de caisses populaires et de coopératives de crédit qui sont très actives dans ces domaines. Il me semblerait très logique que l'accès au microcrédit devienne une obligation fédérale.
    C'est ma propre opinion et non pas celle de notre association.
    Merci.
    Nous n'avons fait aucune recherche dans ce domaine particulier. Nous savons que depuis le milieu des années 90, l'Organisation nationale anti-pauvreté a demandé au gouvernement fédéral, en tant que responsable de la réglementation des institutions financières, d'élargir l'accès des pauvres aux services financiers. Quelques progrès ont été faits, mais cela reste très problématique. Certaines provinces prennent seulement maintenant des mesures pour réglementer les prêteurs sur gages, les prêteurs qui pratiquent des taux usuraires et les services d'encaissement de chèques. Les États-Unis sont beaucoup plus avancés que nous et, comme vous l'avez souligné, cela fait longtemps qu'ils exigent que les institutions financières apportent ce soutien.
    Au Canada, il y a un certain nombre de fondations, par exemple, qui travaillent dans les réserves des premières nations et les pays en développement. Elles possèdent une grande expertise dans le domaine du microcrédit. Elles s'en sont servies comme outil de développement économique. C'est un important domaine sur lequel nous devons nous pencher, surtout en ce qui concerne l'éducation financière et l'exploitation.

[Français]

    Mon temps est-il écoulé, monsieur le président?
    Il vous reste une minute et demie.
    Le Bon Dieu est bon, monsieur le président.
    Quand on retire de l'argent, certains guichets automatiques imposent des frais de 1,50 $ ou de 2 $. Or, le ministre des Finances du gouvernement s'est lui-même inquiété de la tarification. En tant que législateur fédéral, on pourrait intervenir au moins en ce qui concerne les institutions financières. On sait, et c'est une réalité, que certains guichets ne sont pas reliés à une grande banque.
    Par ailleurs, on pourrait amender la Loi sur les banques pour obliger ces dernières à faire rapport sur la façon dont elles répondent aux besoins, en matière de microcrédit, des plus défavorisés. Il me semble que ces questions sont clairement de la compétence du gouvernement fédéral. Ça pourrait se faire assez facilement. Au Bloc québécois, on a déposé dès 1995 des projets de loi qui allaient dans ce sens. En outre, on a fait valoir ces préoccupations en toutes circonstances dans les rapports du Comité permanent des finances. Voilà qui termine mon intervention.

  (1030)  

    Merci, monsieur Ménard.
    Nous allons maintenant passer à M. Cuzner.

[Traduction]

    Merci. Je vais essayer de poser trois questions.
    Je tiens également à remercier les témoins. Nous avons eu un excellent échange d'information.
    Pour ce qui est des mesures de la privation matérielle, je voudrais avoir une certaine idée… Mon collègue Shawn Murphy et moi-même avons discuté du fait que lorsque nous étions jeunes, nous vivions tous les deux dans des quartiers où les gens n'étaient pas très riches. Tout le monde était pauvre et certains étaient extrêmement pauvres. Bien entendu, la société a changé énormément depuis un certain nombre d'années, mais quels sont les besoins fondamentaux auxquels des gens ne peuvent pas encore satisfaire dans la société d'aujourd'hui? Quels sont les besoins fondamentaux auxquels les pauvres ne peuvent pas satisfaire?
    Demandez-vous quelles sont les choses dont une mesure de la privation doit tenir compte?
    Vous avez dit que nous n'avions pas d'enfants mal nourris. Il n'y a pas de malnutrition; la pauvreté n'est pas aussi profonde, mais il y a des exclusions sociales. Alors quels sont certains des besoins humains fondamentaux? Peut-être pourriez-vous nous en parler.
    Je regrette d'avoir dit cela. Je faisais allusion à ce poème. Je n'ai pas dit qu'il y avait de la malnutrition.
    Voici quelques exemples auxquels vous pourriez réfléchir. Nous savons, d'après les sondages, que le revenu a très peu d'effets sur l'accès aux médecins, mais qu'il a un effet énorme sur l'accès aux dentistes. Si vous êtes un Canadien à faible revenu sans régime d'assurance santé offert par votre employeur, vos chances d'avoir accès à un dentiste sont extrêmement minces et vous pouvez en constater les effets lorsque les gens atteignent l'âge de 20 ans.
    Les médicaments vendus sur ordonnance. Dans le Globe and Mail d'hier, il y avait une histoire horrible au sujet d'un enfant. Si les parents de cet enfant avaient été à l'emploi du gouvernement provincial ou fédéral, ce médicament aurait certainement été couvert. Je n'en suis pas vraiment certain.
    Les prestations de santé. Quelles sont les choses que nous valorisons, nous qui avons de bons emplois avec des avantages sociaux? Nous valorisons les prestations de maternité, les régimes d'assurance médicaments, les régimes d'assurance dentaire, toutes ces prestations de santé qui sont subventionnées par le Trésor par l'entremise de la fiscalité. Ces avantages ne sont généralement pas à la disposition des travailleurs pauvres. Ce sont les domaines où vous pourriez intervenir. Si les employeurs ne fournissent pas ces services, faites-le.
    Je pense que nous nous dirigeons vers des inégalités extraordinaires sur le plan du revenu des aînés, de la disparité entre le revenu de retraite des personnes qui ont bénéficié d'une bonne pension toute leur vie contrairement à la moitié de la population qui prend sa retraite sans régime de pension et qui a un revenu moyen de 15 000 $.
    D'accord. Je vais vous renvoyer la balle, dans ce cas.
    Je suis certain que tous les témoins verraient un avantage à avoir un programme national, même si je sais que nous voulons rester prudents en ce qui concerne les champs de compétence. Des gens viennent me voir dans mon bureau de circonscription pour me dire qu'ils doivent choisir entre acheter leurs médicaments ou acheter de la nourriture.
    Pourriez-vous me dire ce que vous pensez d'un régime national d'assurance médicaments ou d'un programme couvrant les médicaments onéreux? Peut-être pourriez-vous dire ce que vous en pensez.
    Je vais répondre, car j'ai fait quelques recherches pour le sénateur Kirby et dans le cadre de mon emploi salarié, j'ai beaucoup travaillé sur la question de l'assurance médicaments.
    En général, l'assurance médicaments pose un problème dans les Maritimes. Les gens des Maritimes qui sont en âge de travailler n'ont aucune assurance médicaments. En fait, certaines provinces sont heureusement en train d'y remédier. Je crois que c'est le cas de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve. Un grand nombre des autres provinces ont un régime d'assurance. Les provinces des Prairies ont un régime raisonnable, mais la franchise est extrêmement élevée. Un régime public prévoit une franchise de 800 000 $ alors que la vôtre est, je crois, de 60 $ ou peut-être même moins.
    Par conséquent, nous avons un programme qui est beaucoup moins généreux pour les pauvres et c'est la norme. C'est ce que nous faisons pour les prestations de maternité, la garde d'enfants et tout le reste. Les programmes pour les pauvres sont moins généreux.
    Le gouvernement fédéral a lancé une initiative pour la couverture des médicaments onéreux, mais c'est uniquement pour cette catégorie de médicaments. C'est pour les médicaments qui coûtent 4 000 $ à 5 000 $ et, comme vous le savez, c'est une question de vie ou de mort.
    Par conséquent, nous avançons sur ce plan-là. Voici ce que je ferais, et j'ignore si c'est dans votre champ de compétence. Des formulaires sont rattachés à tous ces régimes d'assurance médicaments et je dirais que, dans chaque province, le formulaire pour le régime d'assurance administré par le gouvernement devrait être le même que pour les régimes offerts par l'employeur. J'ai toujours aimé m'en prendre à ce genre de choses et les Canadiens peuvent comprendre pourquoi nous ne voulons pas d'une médecine à deux vitesses. Nous n'en voulons pas afin que nous partagions tous le même programme. Mais nous ne le faisons pas pour les soins dentaires.
    J'ai une dernière brève remarque à faire. Le poème au sujet des enfants porte sur la participation aux journées du hot dog ou aux sorties scolaires. À partir de quel âge un enfant canadien à faible revenu se rend-il compte qu'il a un faible revenu? Je suppose qu'il s'en rend compte très rapidement. S'il ne le sait pas encore lorsqu'il est à la maternelle ou en 1ère année, c'est là qu'il l'apprend quand il s'aperçoit qu'il ne peut pas participer aux sorties de sa classe ou qu'il ne peut pas suivre des cours de peinture.
    Ai-je utilisé son temps? Je suis désolé.

  (1035)  

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Shillington.
    Nous allons maintenant passer à M. Brown.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier nos témoins pour leur présence ici aujourd'hui. Je pense que de nombreux Canadiens sont trop occupés pour vraiment réfléchir à la plupart de ces questions et je me réjouis que le comité fasse cette étude. Un bon nombre d'entre vous ont d'excellentes idées qui peuvent nous aider.
    Je vais d'abord m'adresser à Mme Scott et revenir sur la question que M. Lake a posée au sujet des personnes qui sont employables et le fait qu'une partie des ressources qui leur sont consacrées pourrait être utilisée pour celles qui ne sont pas employables. Je sais que vous n'avez pas fini de répondre à cette question. Peut-être pourriez-vous le faire pour nous.
    J'allais parler de cet exemple et j'ai répondu que nous avions tendance à croire qu'il y avait un gagnant et un perdant. En fait, comme vous l'avez dit, monsieur Lake, cet exemple m'a fait penser au nombre énorme de facteurs de dissuasion qui sont associés à nos programmes de sécurité du revenu et qui incitent les mères nourricières à penser qu'il est dans leur intérêt de continuer, en supposant qu'elles font des choix rationnels.
    Je pense que c'est vrai pour l'ensemble des programmes de sécurité du revenu du pays. Par exemple, une mère célibataire est confrontée à la décision très difficile de renoncer à l'assurance dentaire ou à une allocation pour acheter des vêtements d'hiver. Nous parlons des choses dont les pauvres doivent se passer. Il s'agit de vêtements chauds pour les enfants, de vraies bottes pour aller à l'école et de la participation à diverses activités. Nous forçons les personnes à faible revenu qui dépendent des systèmes de soutien du revenu à faire constamment ces terribles choix.
    Voilà ce que j'allais répondre quand vous avez donné l'exemple des mères nourricières.
    Quant à la question de savoir si nous dépensons de façon disproportionnée, si nous consacrons trop d'argent aux programmes visant à favoriser la participation au marché du travail ou à la formation des personnes à faible revenu, en fait, ce n'est pas le cas au Canada. Les programmes d'assistance à la formation et d'apprentissage sont peu développés au Canada, surtout pour les personnes à faible revenu.
    Je crois qu'il y a beaucoup à faire, non seulement pour permettre aux bénéficiaires des programmes de soutien du revenu de participer au marché du travail, mais aussi pour leur permettre de participer à d'autres aspects de la vie communautaire. Comme j'ai un frère qui a un handicap lié au développement, je sais de quoi je parle quand je dis qu'il faut fournir aux gens la possibilité de participer à la vie de leur collectivité. Nous n'avons vraiment pas fait grand-chose sur ce plan, jusqu'ici, au Canada.

  (1040)  

    Je voudrais mentionner un autre groupe qui est très important: les mères célibataires dont un grand nombre sont sans emploi et voudraient sans doute travailler. Le problème n'est pas tant leur désir de travailler que les facteurs qui les en dissuadent.
    D'autre part, si vous comparez nos programmes de formation avec certains programmes européens, ces derniers sont beaucoup plus complets et d'une plus longue durée. Les programmes européens s'étendent sur des plus longues périodes. Dans le cas des mères célibataires et des assistés sociaux, nous avons eu tendance à chercher rapidement à leur trouver un emploi qui n'est pas toujours durable. Ces personnes passent donc leur temps à alterner entre le marché du travail et l'aide sociale alors que les Européens ont opté pour le long terme et visent, autant que possible, des emplois au milieu ou en haut de l'échelle.
    Une des réalités est qu'un grand nombre de ces mères célibataires ont un assez bon niveau d'éducation. Le problème est qu'elles ont besoin de services de garderie et du soutien familial nécessaire pour aller sur le marché du travail. Il y a donc là un groupe important de personnes que les programmes actuels ne touchent pas de façon réaliste.
    Merci.
    J'ai seulement une brève question de plus pour Mme Scott. Vous avez déclaré qu'à certains endroits des États-Unis, il y avait des programmes anti-pauvreté exemplaires. Peut-être pourriez-vous nous fournir rapidement quelques précisions à ce sujet.
    La littérature concernant les programmes anti-pauvreté décrit des programmes expérimentaux extraordinaires qui ont été lancés aux États-Unis. Leurs programmes Head Start, par exemple, ont permis d'établir quels sont les types de mesures de soutien qui conviennent aux enfants pauvres, pour l'intégration des décrocheurs, les zones de certains quartiers du centre-ville où l'on vise vraiment les décrocheurs. Néanmoins, vous avez ces merveilleux programmes expérimentaux, des programmes ponctuels, mais qui ne peuvent jamais être généralisés, en partie à cause de leur taille et en partie à cause de l'absence du reste de l'infrastructure publique nécessaire pour soutenir ce genre d'initiatives.
    Où y a-t-il un programme de ce genre afin que nous puissions faire un peu plus de recherches à ce sujet?
    Cela dépend de ce qui vous intéresse particulièrement. Je pourrais vous fournir ces renseignements plus tard, selon que vous vous intéressez aux programmes pour les décrocheurs, aux programmes de formation pour les travailleurs à faible revenu ou ce genre de choses. Il est intéressant de voir que les États-Unis lancent certaines des meilleures idées, mais que leurs systèmes publics ont tendance à ne pas les soutenir et c'est pourquoi la pauvreté continue de poser des problèmes persistants.
    Je pourrais vous donner plus tard un exemple précis, si vous voulez.
    Très bien, merci.

[Français]

    C'est maintenant à M. Martin de prendre la parole.

[Traduction]

    Cela m'intéresse aussi, alors veillez à ce que tout le monde obtienne ces renseignements.
    Je voudrais revenir sur la question de la définition, le rôle du gouvernement fédéral et les mesures à prendre pour mettre en place, chez nous, une stratégie quelconque qui permettrait à tout le monde de participer et aussi, de mesurer les effets de ce que nous faisons afin de savoir si c'est efficace. Je voulais m'adresser à M. Shillington, car je n'ai pas pu le faire la dernière fois. M. Shillington a tenu des propos négatifs à propos de la définition ou de la recherche d'une définition et du temps que nous consacrons à essayer de trouver une définition.
    Ce matin, nous avons entendu les témoins parler d'une mesure composite de la pauvreté ou d'une série d'indicateurs… Nous sommes allés un peu dans cette voie, mais je pense que nous n'avons pas vraiment pris la bonne direction en ce sens que nous sommes passés du concept du seuil de faible revenu à celui de la mesure du panier de consommation dont M. Sarlo a fait la promotion. Il va venir la semaine prochaine ou très bientôt et nous entendrons ce qu'il a à dire.
    Je voudrais toutefois que M. Shillington nous dise quelle serait, à son avis, la définition qui conviendrait, et quel devrait être le rôle du gouvernement fédéral.
    Merci.
    Quelqu'un ici a déclaré que toutes les mesures de la pauvreté sont relatives en ce sens que le panier de consommation que nous avons aujourd'hui est différent du panier de consommation au Pakistan, et différent du panier de consommation que nous avions il y a 20 ans. En fait, le plus important à mes yeux, et personne n'en a parlé, est l'ajustement du marché de consommation, si vous acceptez ce principe, pour refléter le niveau de vie des Canadiens en général. Si notre niveau de vie augmente de 20 p. 100, le seuil de pauvreté est-il relevé ou cela n'a-t-il aucune influence? Certains diront que cela ne devrait avoir aucun effet. D'autres diront qu'au contraire, comme nous sommes plus riches, nos obligations envers les enfants sont plus importantes.
    Une question cruciale, étant donné que c'est une question politique, est celle de savoir si cet ajustement doit être automatique ou ponctuel. Les seuils de faible revenu sont dits « relatifs » parce qu'ils sont révisés de temps en temps. C'est ce qui les rend relatifs. S'ils ne sont pas révisés, ils ne sont pas relatifs. Ils deviennent une mesure absolue de la pauvreté si le niveau de vie ne change pas avec le temps.
    Les seuils de faible revenu sont entrés en vigueur vers 1968. Ils sont révisés tous les sept ou huit ans. Comme vous le savez bien, ils ne l'ont pas été depuis 1992 et c'est une des raisons pour lesquelles la pauvreté est en diminution si nous nous servons du SFR pour mesurer la pauvreté, même si on nous dit qu'il ne faudrait pas le faire. C'est parce que ces seuils n'ont pas été révisés. Si vous le faisiez, je vous garanti que le taux de pauvreté grimperait.
    Statistique Canada a décidé de son propre chef, du moins à ma connaissance, de ne pas réévaluer ce seuil. Il a décidé de transformer une mesure relative de la pauvreté en une mesure absolue de la pauvreté.
    RHDSC a créé la mesure du panier de consommation pour mesurer la pauvreté, à la demande des ministres des Services sociaux des provinces, parce que ces derniers estimaient que les SFR étaient trop généreux. Je peux vous montrer les documents où c'est écrit. Cela visait à tenir compte du niveau de vie des personnes à faible revenu et non pas du niveau de vie général. Cela fait partie du contrôle exercé. Ce n'est donc pas une mesure relative de la pauvreté, mais une mesure de la pauvreté pour les pauvres. Tout changement à ce panier doit être approuvé par les ministres des Services sociaux des provinces qui établissent les barèmes de l'aide sociale. C'est un merveilleux système pour eux. Ils peuvent contrôler les barèmes de l'aide sociale ainsi que le seuil de pauvreté avec lequel ces barèmes sont comparés.
    La question est de savoir qui doit procéder aux ajustements? Personne n'a vraiment beaucoup parlé de la mesure de faible revenu — la moitié de la médiane — qui constitue la norme internationale pour un pays industrialisé. La semaine dernière, on vous a dit qu'il n'y avait pas de norme internationale. Je ne suis pas d'accord; il s'agit de la mesure de faible revenu. Le problème est que cette mesure ne fait l'objet d'aucun ajustement géographique.
    Par conséquent, si je devais établir une mesure de la pauvreté, je recommanderais d'adopter la moitié de la médiane en faisant quelques ajustements raisonnables pour tenir compte des différences géographiques dans le coût du logement, comme pour la mesure du panier de consommation. Je recommanderais que les ajustements ne soient pas ponctuels, n'aient pas à être approuvés par les ministres des Services sociaux, mais qu'ils soient apportés annuellement. C'est ce que je préférerais.

  (1045)  

    Merci.

[Français]

    Nous pourrions terminer là-dessus, mais d'abord, si mes collègues le permettent, j'aimerais aborder une question dont on n'a pas traité...

[Traduction]

    Monsieur le président, j'invoque le Règlement, car vous dites que nous allons terminer là-dessus, mais il nous reste certainement du temps pour un tour de plus pour les libéraux et les conservateurs, comme le prévoient nos motions pour affaire courante. Nous pourrions aussi bien utiliser tout le temps à notre disposition. Pouvons-nous le faire?

[Français]

    Monsieur Lake, il nous reste sept ou huit minutes, et il faut libérer la salle un peu à l'avance parce qu'un autre comité va se réunir ici à 11 heures. Nous pouvons faire un autre tour, mais nous risquons d'être un peu coincés.
    Avez-vous une question, monsieur Lake?

[Traduction]

    Oui, j'en ai une. Je peux la poser?
    Ma question s'adresse à M. Shillington, car nous avons beaucoup parlé aujourd'hui du fait qu'il n'est pas nécessaire d'avoir des mesures ou que la nécessité des mesures est peut-être exagérée. Monsieur Shillington, dans votre déclaration préliminaire, vous avez mentionné l'exemple d'une femme du Québec qui, selon la mesure de la pauvreté qui est utilisée, entrerait dans différentes catégories. Vous avez parlé, je crois d'une variation de 65 p. 100, à 5 p. 100 en donnant une série d'exemples différents.
    Comme je l'ai déjà expliqué, en tant que députés, on nous demande de veiller sur l'argent des contribuables canadiens et, bien sûr, il n'y a pas d'argent qui appartienne vraiment au gouvernement fédéral. Ce dernier n'a pas un montant d'argent qui lui appartienne en propre. Tout cet argent appartient aux Canadiens. En tant que gardiens de cet argent, lorsque nous justifions les décisions que nous prenons auprès de nos concitoyens, nous devons pouvoir leur expliquer pourquoi nous prenons de l'argent à un contribuable, un de nos électeurs, pour le donner à un autre citoyen canadien qui n'est peut-être pas un contribuable. Il faut pouvoir fournir une justification raisonnable. Voilà pourquoi il est important que nous ayons des mesures. Si nous n'en avons pas ou si les mesures ne sont pas importantes, comment prendre ces décisions politiques?
    Cette question s'adresse à tout le monde, car je pense que vous avez tous mentionné que la nécessité des mesures était un peu exagérée. Je voudrais savoir comment vous prendriez ce genre de décisions à notre place?

  (1050)  

    Si j'ai dit que le débat sur les seuils de pauvreté est une diversion, c'est parce que je comparais devant des comités comme celui-ci depuis plus de 20 ans et que je constate que l'on discute beaucoup plus de ce qu'est la pauvreté que des programmes qui pourraient être mis en place pour améliorer le bien-être des personnes âgées.
    Pour les femmes âgées célibataires du Québec, il y a la Sécurité de la vieillesse et le SRG qui sont des programmes fédéraux. Vous avez raison, vous avez des comptes à rendre. Néanmoins, si je faisais valoir la nécessité d'augmenter le SRG pour aider cette femme, je suis sûr qu'on me demanderait combien cela va coûter et qu'on me dirait que nous n'en avons pas les moyens.
    Le SRG coûte 5 ou 6 milliards de dollars au total. Ce qu'il faut débourser pour subventionner les revenus de pension et les REER des gens qui ne seront jamais dans le besoin se chiffre à environ 20 milliards de dollars. Pour chaque dollar que nous donnons à une personne âgée pauvre — et je peux le prouver — nous dépensons 4 $ ou 5 $, dans le cadre de la fiscalité, pour subventionner le revenu de personnes qui ne seront jamais nécessiteuses. Je ne comprends pas pourquoi chaque fois que je parle d'améliorer le bien-être des personnes à faible revenu qui sont dans le besoin, on me demande quel en sera le coût alors que nous trouvons si facile d'accepter le partage des pensions, l'augmentation du crédit en raison de l'âge et l'augmentation du crédit pour revenu de pension en faveur de gens qui ne sont pas dans le besoin et qui ne le seront jamais.

[Français]

    Merci, monsieur Shillington.
    Je vais permettre à Mme Dhalla de poser une brève question, mais je voudrais qu'on s'arrête ensuite parce que la réunion suivante va être télévisée et diffusée sur Internet. Il faut permettre à l'autre équipe de s'installer.

[Traduction]

    Monsieur Shillington, je vais simplement reprendre ma question, à laquelle vous n'avez jamais eu le temps de répondre, au sujet de l'impact sur la pauvreté de l'apprentissage précoce et des services de garde d'enfants. Vous avez parlé avec beaucoup d'éloquence de l'amélioration de l'accès aux programmes que nous avons pour les aînés, tels que le RPC, le SRG et certains autres programmes. Que pensez-vous des solutions touchant les enfants qui sont nécessaires pour s'attaquer à la pauvreté?
    Bien entendu, je voudrais un programme efficace pour la garde d'enfants. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de chercher bien loin. Il suffit de regarder de l'autre côté de la rivière. Le Québec a un système qui n'est peut-être pas parfait, mais qui est un pas dans la bonne direction, tant pour la garde des enfants que pour les prestations de maternité.
    Vous avez mentionné l'apprentissage précoce. Plus je fais des recherches sur les REEE et les programmes de prêts aux étudiants, plus je vois des problèmes et plus je vois que ces programmes ne fonctionnent pas bien. C'est en partie parce qu'ils ne sont pas conçus pour nos enfants. Dans l'ensemble, nos enfants ne sont pas admissibles à ces programmes et ils sont donc trop restrictifs.
    En ce qui concerne la garde des enfants, j'aimerais être mieux informé sur les formules qui donnent des résultats. Je vois que le système québécois semble mieux fonctionner que ce que nous faisons.

[Français]

    Au nom de mes collègues et en mon propre nom, je tiens à vous remercier très sincèrement de votre contribution à la réunion de ce matin. Je suis convaincu qu'elle nous sera fort utile pour la conclusion de nos travaux.
    La séance est levée.