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CC20 Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité législatif chargé du projet de loi C-20


NUMÉRO 008 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 14 mai 2008

[Enregistrement électronique]

  (1540)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Constatant que nous avons le quorum, j'aimerais souhaiter la bienvenue à tout le monde ici pour cette dernière réunion avant que le Parlement n'interrompe ses travaux pour célébrer le début de l'été le jour de la fête de la Reine. Je sais que notre invité d'aujourd'hui nous donnera beaucoup d'éléments de réflexion pour la fin de semaine.
    Nous avons donc le privilège d'accueillir parmi nous aujourd'hui M. Roger Gibbins. M. Gibbins est PDG de la Foundation et ancien professeur et auteur, et qu'il a la distinction de s'être vu décerner par le lieutenant-gouverneur de l'Alberta le prix d'excellence en administration publique. Après tout, l'excellence est une chose que vise le comité.
    Sans plus tarder, monsieur Gibbins, la parole est à vous.
    Je tiens à vous présenter les excuses de mon collègue, Robert Roach, qui devait être ici. Il est tombé malade par suite de certains déplacements pendant la fin de semaine à Winnipeg, et je comparais donc ici tout seul.
    Je suis heureux de l'occasion qui m'est ici donnée de m'entretenir avec vous. La réforme du Sénat m'intéresse depuis environ 1973. La question intéresse également depuis longtemps la Canada West Foundation, pour laquelle j'oeuvre à l'heure actuelle. Je tiens à souligner que ce que je vais vous soumettre n'est pas une position adoptée par la Canada West Foundation. En tant qu'organisation, nous n'avons pas de position formelle, ni sur le projet de loi, ni sur la réforme du Sénat en soi.
    Je tiens également à souligner en guise de préambule que je suis politicologue de formation, et non pas avocat de droit constitutionnel. Cela ne veut pas dire que je n'ai pas d'opinions relativement à la Constitution, mais celles-ci sont davantage le fait d'instincts politiques que de formation juridique.
    Mes notes seront mises à la disposition du comité dès que la traduction sera prête, peut-être d'ici la fin de la semaine. Je vais en traiter assez brièvement ici, et je me ferai bien sûr un plaisir de répondre à toutes vos questions.
    Permettez-moi de commencer mes remarques en soulignant l'importance du contexte dans lequel s'inscrit le projet de loi C-20. Le contexte qui est important pour moi est l'engagement pris par le gouvernement du Canada de poursuivre une réforme exhaustive du Sénat. Ce n'est que dans ce contexte que le projet de loi C-20 a un sens, et j'y reviendrai plus loin, dans le coeur de mes remarques.
    Dans l'ébauche écrite, j'établis de manière générale le bien-fondé de la réforme du Sénat. Je ne vais pas en répéter le détail ici, car le comité connaît bien ces arguments. Je mentionnerai simplement les trois points les plus saillants. Le premier est la nécessité d'une représentation régionale plus efficace. Deuxièmement, il importe qu'il y ait un contrepoids face au gouvernement majoritaire à la Chambre des communes. Les gouvernements parlementaires tendent à concentrer le pouvoir, et le Sénat offre au moins la possibilité de faire contrepoids, en un sens.
    Le troisième argument est réellement un argument démocratique. J'emploierais le vocabulaire de l'environnementalisme: le Sénat canadien n'est pas durable à long terme. Je soulignerais que, bien que mon intérêt original pour cette question soit né des échecs en matière de représentation régionale, aujourd'hui l'argument le plus convaincant en faveur de la réforme du Sénat est à mon sens le renouveau démocratique. J'estime que les arguments en faveur de la représentation régionale demeurent importants, mais ils sont pour moi moins probants que la nécessité d'un renouveau démocratique.
    Bien que la puissance des arguments en faveur de la réforme du Séant ait augmenté au fil du temps, nous n'avons fait aucun progrès en matière de réforme d'une institution du XIXe siècle afin de lui permettre de mieux relever les défis du XXIe siècle. Nous sommes en train de faire du sur place tandis que le monde change autour de nous.
    En réfléchissant à cette situation, il me semble que nous nous trouvons confrontés à deux possibilités. Nous pouvons attendre que le Sénat s'effondre à la suite d'une crise de légitimité démocratique, d'un grave conflit à la Chambre des communes, ou bien tenter de le restructurer de manière à le rendre plus conforme aux valeurs démocratiques libérales. À mon sens en tout cas, ne rien faire ne fait que retarder l'inévitable, et transmettre le statu quo à nos enfants et petits-enfants serait des plus irresponsables. L'image du Sénat qui me vient à l'esprit est celle d'une institution improvisée il y a de cela 141 ans et maintenant figée dans le temps tel un insecte pris au piège dans l'ambre jaune.
    Et maintenant, quel lien cela a-t-il avec le projet de loi C-20? Mes observations en la matière seront plutôt directes. Je considère que le projet de loi C-20 est un pas en avant raisonnable. Il cadre avec ce qui existe dans des États fédérés comme l'Australie et les États-Unis. Il est même conforme à la notion la plus rudimentaire d'un gouvernement démocratique. Il correspond aux résultats obtenus dans le cadre des récents sondages d'opinion publique, ainsi qu'aux valeurs canadiennes.
    Je conviens que le projet de loi C-20 ne nous mène pas très loin sur le chemin vers une réforme exhaustive du Sénat, et vous savez quels aspects n'y sont pas abordés. Il ne traite pas de tout un tas d'aspects du Sénat. Il ne constitue donc pas une destination finale et n'est qu'un tout petit premier pas, mais il est malgré tout un pas en avant et montre qu'une réforme progressive est possible.

  (1545)  

    Pendant des années, les Canadiens se sont fait dire que la réforme du Sénat est peut-être souhaitable, mais qu'elle doit être abordée de manière exhaustive plutôt que de façon progressive. On nous a également dit qu'une réforme exhaustive exigerait des modifications à la Constitution, et qu'une telle révision de la Constitution est impossible et que la réforme du Sénat est de ce fait impossible.
    Nous avons donc ainsi un argument bien net et circulaire selon lequel la perfection devient l'ennemi du bien. On nous dit que toute réforme progressive, même la plus petite intervention qui soit, doit être évitée s'il y a risque de dérapage vers une réforme constitutionnelle. Ce raisonnement a à mon sens favorisé un débat public quelque peu déloyal, car si tout le monde s'aligne en faveur de la réforme du Sénat, cela ne fait que diviser ceux et celles qui pensent que la chose est vraiment souhaitable mais non réalisable de ceux qui prônent une réforme progressive, et je suis certainement de ce deuxième groupe.
    D'aucuns avancent que le projet de loi C-20 pourrait très bien finir par être la destination finale, être non seulement le premier pas mais également le dernier, auquel cas l'élection ou la sélection de sénateurs pourrait ainsi geler l'actuelle distribution régionale des sièges au Sénat et les pouvoirs législatifs de ce dernier. Je pense que cette préoccupation est fondée sur l'hypothèse que les sénateurs nouvellement élus risqueraient d'être encore plus hostiles au changement que les sénateurs déjà en place. Je n'accepte pas cet argument. Je pense que les sénateurs en place ont déjà fixé très haut la barre en matière de résistance, et je ne peux imaginer aucune combinaison de sénateurs élus ou nommés qui serait plus résistante que les membres actuels de cette chambre.
    Je conviens, et je pense que la chose est extrêmement importante, que les changements proposés par le projet de loi C-20 nous placeraient dans une situation quelque peu chaotique en ce qui concerne le Sénat. Mais j'y vois une vertu du projet de loi plutôt qu'un défaut fatal. Le projet de loi déstabiliserait le statu quo et obligerait ainsi les Canadiens à prendre en main la conception d'une chambre haute modernisée et démocratique. Le processus doit débuter quelque part, et le projet de loi C-20 établit un point de départ raisonnable. Je crois que le fait d'apporter des changements modestes aujourd'hui améliorera nos chances d'instiller la volonté politique de faire face à des changements plus importants demain. Si nous commençons par entamer petit à petit le statu quo, nous pourrons mettre en branle la dynamique politique qui nous permettra de faire avancer le processus.
    Je reconnais que le projet de loi C-20 repousse les limites de la constitutionnalité, bien que les contraintes constitutionnelles soient, au mieux, inconnues, dans le contexte d'une constitution évolutive. Nous savons que la Constitution évolue dans le temps. Nous savons que les tribunaux ne sont pas liés par une application littérale de la loi. Nous avons pu le constater dans la manière dont les tribunaux ont progressivement élargi la Charte des droits et libertés. De toute façon, je tiens à souligner que je ne suis pas un avocat de droit constitutionnel, ce qui explique peut-être pourquoi je ne suis pas prêt à remettre toute la question de la réforme du Sénat entre les mains des tribunaux qui ne sont à mon avis pas suffisamment outillés pour traiter de ce qui est, en fin de compte, une question politique. La démocratisation des institutions parlementaires et l'établissement d'une représentation régionale efficace ne sont pas, à la base, des questions de droit; elles sont des questions politiques.
    De la même manière, d'aucuns prétendent que nous ne devrions rien entamer sans avoir obtenu au préalable l'appui des provinces. Cependant, j'hésite à concéder que la conception des institutions parlementaires nationales doive revenir aux gouvernements provinciaux. Je ne crois pas que la fédération devrait être décentralisée au point de permettre aux gouvernements provinciaux d'empêcher, dans leur propre intérêt, la réforme démocratique d'institutions parlementaires nationales. Je ne crois pas non plus que leur opposition potentielle à la réforme du Sénat reflète nécessairement le désir des habitants des provinces, et ce sont ces citoyens que nous voulons représenter.
    J'aimerais simplement porter à votre attention une analogie utile avec la Charte des droits et libertés. Nombre des gouvernements provinciaux étaient au départ opposés à la Charte des droits et libertés. Le gouvernement du Canada a maintenu le cap et il s'est avéré que les habitants des provinces étaient majoritairement en faveur, et les gouvernements provinciaux ont dû se plier à leur volonté.

  (1550)  

    Si le projet de loi C-20 ouvre le bal relativement à la réforme du Sénat, quelles pourraient être les étapes suivantes?
    Je vais conclure avec les points que voici. Nous sommes confrontés à un problème d'envergure. Nous n'avons pas de modèle acceptable de ce à quoi pourrait ressembler un Sénat entièrement réformé. Nous n'avons tout simplement pas quelque chose que nous puissions ramasser sur l'étagère.
    Mon organisation s'est beaucoup intéressée au modèle « triple E ». Je trouve que le modèle triple E commence à fatiguer et qu'il manque aujourd'hui de pertinence dans le pays que nous sommes en train de devenir.
    Il n'est guère étonnant pour moi que nous n'ayons pas de modèle acceptable ou consensuel de ce à quoi pourrait ressembler un Sénat réformé. Nous avons consacré une si grosse part de notre énergie intellectuelle à empêcher la réforme du Sénat qu'il ne nous en est resté que très peu pour réfléchir à ce à quoi pourrait ressembler un Sénat réformé.
    S'il nous est possible d'avancer, alors il nous faut déterminer un mode d'élection approprié. Si nous ne trouvons pas la bonne formule électorale, nous pourrions nous retrouver en très sérieuse difficulté. Il nous faut une formule de représentation régionale qui cerne la complexité de ce pays et qui réponde à la distribution très inégale de la population entre les différentes provinces. Il nous faut trouver le moyen d'inscrire dans un Sénat réformé les territoires du Nord à la population très clairsemée.
    Il nous faut établir une représentation non territoriale dans le Sénat — comment faire pour avoir un système électoral qui veille, par exemple, à ce que la population autochtone de la Saskatchewan, les Acadiens du Nouveau-Brunswick ou les libéraux de l'Alberta soient d'une manière ou d'une autre représentés au sein du Sénat.
    Nous n'avons pas déterminé quelle incidence un Sénat réformé pourrait avoir sur la Chambre des communes. Je pense qu'une réforme du Sénat déclencherait un certain nombre de réformes plutôt fondamentales au sein de la Chambre des communes, dont, peut-être enfin, une pleine représentation selon la population à la Chambre des communes.
    Je serais heureux de discuter longuement avec vous de toutes ces questions, car vous êtes le seul groupe avec lequel je puisse le faire. Je pense que si notre tir est bon, nous pourrons créer un Sénat qui sera véritablement une assemblée législative nationale, reflétant non seulement la diversité régionale, mais également la diversité à l'intérieur des communautés provinciales. Cependant, si nous nous trompons dans le détail de la conception, nous ne ferons qu'aggraver une situation qui est déjà mauvaise.
    D'aucuns disent que nous devrions tout arrêter en attendant d'avoir trouvé toutes les solutions, mais l'expérience passée montre que les Canadiens ne commenceront même pas à s'attaquer à ces questions importantes de conception tant que le train de la réforme du Sénat n'aura pas quitté la gare. Si nous ne profitons pas de la dynamique qu'amènera le projet de loi C-20, alors il ne se passera rien. Il faut stimuler la pensée créatrice, et c'est ce que fera le projet de loi C-20.
    En conclusion, certains feraient également valoir qu'il nous faut être prudents, qu'il nous faut attendre que les premiers ministres des provinces entrent dans le rang ou que les tribunaux tracent la voie à suivre. Or, nous avons été prudents, excessivement prudents, pendant des générations, et il ne s'est rien passé. Il ne s'est rien passé pendant 141 ans.
    Pour citer maintenant le projet de loi, je dirais que le Parlement du Canada a pour responsabilité première de veiller à ce que « les institutions représentatives du pays, notamment le Sénat, continuent d'évoluer dans le respect des principes d'une démocratie moderne et des attentes des Canadiens ». L'abdication de cette responsabilité par le Parlement infligerait de sérieux dommages au tissu même de la vie politique démocratique au Canada.
    Merci. Je me ferai un plaisir de répondre à toutes les questions que vous voudrez me poser.

  (1555)  

    Merci, monsieur Gibbins.
    Je tiens à faire savoir aux membres du comité que vous avez eu la bonté de réorganiser votre emploi du temps pour vous mettre à notre disposition ici aujourd'hui.
    Madame Folco.

[Français]

    Merci, madame la présidente et merci, monsieur Gibbins.
    Il y a plusieurs éléments dans le projet de loi C-20 qui non seulement me dérangent, mais pour lesquels je n'ai pas de réponse. Il y a aussi des éléments qui ne semblent pas avoir été abordés dans le projet de loi.
    Tout d'abord, je me suis rendue compte que dans le projet de loi tel que présenté, il ne semble pas y avoir un article ou un élément pour protéger les groupes minoritaires, par exemple des francophones au Canada ou des anglophones au Québec ou d'autres groupes minoritaires tels que les Autochtones. Il n'y a rien qui les touche. Il me semble qu'aujourd'hui, au XXIe siècle au Canada, la protection constitutionnelle — bien que ceci ne soit pas lié à la Constitution —, la protection législative, dans la structure de ces groupes, devrait être prise en ligne de compte de façon importante, sinon fondamentale. Donc, j'aimerais bien vous entendre à ce sujet par rapport à la consultation des électeurs.
    Deuxièmement, il s'agit d'une question que j'ai déjà posée, mais pour laquelle je n'ai pas encore obtenu de réponse. Je me mets à la place d'une personne qui se présenterait à des élections — je ne prendrai pas le Québec comme exemple parce que c'est un peu différent — en Ontario, par exemple, où il y a une base urbaine importante, mais également une base rurale importante. Il me semble que si je me présentais dans une région rurale, mes chances d'être élue seraient plutôt minces parce qu'il faudrait que je me promène sur un territoire extrêmement étendu pour recevoir le même nombre de votes que je pourrais recevoir dans un milieu urbain de quelques kilomètres de longueur. Donc, il me semble que cette structure de vote pour les sénateurs, telle qu'elle est proposée dans le projet de loi C-20, donnerait un avantage très précis aux personnes venant de milieux urbains et que, donc, les personnes venant de milieux ruraux seraient un peu comme les minorités que je viens de mentionner.
    Pourriez-vous répondre à ces questions? Ce n'est pas tout à fait la même question, mais presque.

[Traduction]

    Ce sont, comme vous l'avez indiqué, des questions très semblables ou en tout cas interreliées. À mon sens, la réponse réside dans la manière dont nous concevons un système électoral efficace pour le Sénat.
    Permettez que je commence par le cas de l'Ontario, qui est intéressant.
    La proposition recommande un bulletin unique avec vote transférable. Si l'on considère l'Ontario comme étant une seule circonscription avec 24 sénateurs candidats en même temps, figurant tous sur le même bulletin de vote, il me semble que nous perdons l'occasion de prévoir des possibilités pour différentes formes de représentation minoritaire.
    Permettez que je prenne ici un tout petit peu de recul.
    Le Sénat australien utilise un bulletin de vote semblable. L'un des aspects intéressants en Australie est que vous pouvez remporter un siège au Sénat avec environ 6 à 7 p. 100 du vote populaire si vous êtes candidat dans un État particulier. Cela a en fait ouvert la voie à une variété de représentations de groupes minoritaires au sein du Sénat, ce qui n'est pas possible dans la chambre basse en Australie, qui fonctionne, en gros, comme notre Chambre des communes — un bulletin de vote légèrement différent.
    Comme les Autochtones dans les Territoires du Nord-Ouest, par exemple?
    Oui.
    Vous pouvez donc en réalité avoir une représentation de groupes minoritaires au sein du Sénat grâce à un régime électoral bien conçu.
    Je m'excuse, je contourne en quelque sorte votre question, mais ma crainte est que nous nous retrouvions avec un système électoral reproduisant les problèmes de représentation de la Chambre des communes. Vous voyez?
    Prenez ma propre province, par exemple. Nous avons environ 29 sièges, tous occupés à l'heure actuelle par des conservateurs. Il y a eu beaucoup de diversité au sein de la province, mais elle ne se trouve pas reflétée à la Chambre des communes. La diversité propre à la ville de Toronto ne se trouve pas elle non plus reflétée à la Chambre des communes.
    Nous savons comment mal concevoir des régimes. Nous en avons un assez bon exemple avec la Chambre des communes pour ce qui est, en tout cas, d'exacerber certaines des tensions régionales qui existent au pays. Cette situation nous monte beaucoup plus les uns contre les autres que nous ne le souhaiterions. Je pense que nous pourrions faire mieux avec le Sénat. Il nous est possible d'élaborer des systèmes électoraux qui fonctionnent.

  (1600)  

    Si j'en ai le temps, j'aimerais vous demander ce que vous proposeriez. Avez-vous quelque chose à proposer qui éviterait ce genre de problème?
    Car ce que nous avons jusqu'ici entendu le premier ministre dire c'est « Je pense qu'il nous faut davantage de femmes », ou « Je pense qu'il nous faut davantage de personnes du troisième âge », ou bien qu'il nous faut plus de représentants de ce groupe-ci ou de ce groupe-là, puis il se lance et nomme ces personnes. Et, bien sûr, ce n'est pas vers cela que nous nous dirigeons avec le projet de loi C-20.
    Votre question va au coeur même du problème en ce qui concerne la représentation des minorités. L'y inscrit-on par le biais d'un mécanisme de nomination, ou bien par le biais d'un régime électoral qui augmente la possibilité d'une représentation des minorités sans pour autant la garantir? En d'autres termes, se dote-t-on d'un système électoral en disant que nous espérons que cela fonctionne, par opposition à un système de nomination qui, soit dit en passant, ne fonctionnera pas forcément? N'est-ce pas? Tout dépend du premier ministre du jour et de ce que le premier ministre juge important.
    Ma propre idée là-dessus — et je ne fais que m'exprimer dans le contexte de ma position minoritaire en tant qu'Albertain, ce qui n'est pas vraiment une très bonne position minoritaire — est qu'à long terme, un régime démocratique robuste offrant de solides possibilités de représentation des groupes minoritaires est supérieur à un régime fondé sur une représentation par voie de nomination selon le bon vouloir du gouvernement du jour. Mais, encore une fois, je ne suis pas vraiment bien placé pour faire une telle évaluation.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Paquette.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Vous mentionnez, avec raison, qu'il y a eu plusieurs tentatives de réforme du Sénat dans l'histoire canadienne et qu'à chaque fois, ces tentatives ont échoué parce qu'on n'arrivait pas à s'entendre sur un modèle.
    Selon moi, ce qui serait le plus sain à cet égard, ce serait d'entreprendre une tournée de négociations entre les provinces et le gouvernement fédéral pour arriver à s'entendre plutôt que d'essayer de le faire, comme le propose le gouvernement, par une loi, une modification qui n'est pas substantielle mais qui veut — vous l'avez mentionné, et j'ai bien aimé votre expression — déstabiliser la structure actuelle, le statu quo.
    Vous qui vous êtes prononcé dès le départ pour une réforme du Sénat sur la base de la nécessité de démocratiser cette institution, n'êtes-vous pas mal à l'aise de voir que le gouvernement conservateur, en déposant le projet de loi C-20, cherche à déstabiliser les provinces, donc de faire fi des provinces et de faire indirectement ce qu'il ne peut pas faire directement? C'est vrai aussi en ce qui concerne le projet de loi C-19; vous savez que l'Assemblée nationale du Québec a adopté à l'unanimité une motion contre ce projet de loi.
    Considérez-vous cela sain sur le plan démocratique?

[Traduction]

    J'aurai une ou deux réponses, et elles vont peut-être paraître quelque peu sévères, mais là n'est pas mon intention.
    Le premier point est que démocratie et intergouvernementalisme ne sont pour moi pas synonymes. Je ne pense pas que l'établissement d'ententes entre gouvernements soit la seule façon de procéder dans une société démocratique.
    Deuxièmement, je crois que de temps à autre les gouvernements ont la possibilité, voire même l'obligation, de déstabiliser le statu quo. Je songe un petit peu ici à la campagne de Barack Obama aux États-Unis, campagne qui est axée sur le changement. Personne dans les élections primaires américaines n'est en train de dire « Mon message est que rien ne va changer, à moins que nous puissions peut-être rallier les gouvernements de tous les États et qu'ils puissent s'entendre, auquel cas je ferai quelque chose ». Vous auriez perdu d'avance si c'était là votre plate-forme aux États-Unis.
    À mon avis, donc, à long terme, le consentement des provinces sera nécessaire, compte tenu de la nécessité tôt ou tard de changements constitutionnels. À mon avis, cela est inévitable. Mais comment faire pour ne serait-ce que lancer la conversation? Comment faire pour ne serait-ce qu'obtenir des gens qu'ils viennent s'asseoir à la table?
    Eh bien, il vous faut un déclencheur. Si ce gouvernement ou n'importe quel autre gouvernement disait simplement nous avons une chambre de personnes nommées et elle ne fonctionne pas très bien, elle est de plus en plus partisane, mais si les gens parvenaient à se réunir et en discuter, alors nous pourrions nous asseoir à la table avec le reste d'entre vous, je pense que... Encore une fois, je ne voudrais pas paraître trop sévère ici, mais je vois là une abdication par le gouvernement du Canada de ses responsabilités.
    Je ne vois pas ici de tentative de contourner les provinces. C'est une manière d'engager la conversation, car vous ne pouvez contourner les provinces que dans une mesure très limitée, après quoi vous vous trouvez confrontés à cette nécessité ultérieure d'obtenir le consentement des provinces. Il s'agit là d'une nécessité constitutionnelle incontournable. C'est ainsi que le pays a été structuré. Cela se comprend. Mais il faut commencer par lancer la conversation.
    Peut-être que cela tombera en panne à long terme, mais je demeure convaincu qu'il vous faut commencer par enclencher cette conversation.
    C'est tout.

  (1605)  

[Français]

    Il faut se rappeler que, justement, cette volonté de faire indirectement des choses qu'on ne peut pas faire directement a mené, entres autres, au rapatriement de la Constitution en 1982, ce qui a provoqué une crise constitutionnelle dont on n'est toujours pas sortis: le Québec n'a toujours pas signé la Constitution de 1982. À mon avis, il aurait été préférable, à cette époque, que le gouvernement de M. Trudeau prenne le temps d'écouter les revendications du Québec plutôt que de faire le coup de force qu'il a fait.
    J'ai l'impression qu'on est en train d'assister au même type d'opération, à une échelle qui est moindre, on doit le reconnaître. On ne va pas récolter de fruits positifs de la démarche actuelle.
    Je vais peut-être vous poser une question plus pointue. Beaucoup de constitutionnalistes sont venus nous dire que la discussion autour de la constitutionnalité du projet de loi C-20 est préoccupante. Certains pensent que ça demande une réouverture de la Constitution.
    Ne pensez-vous pas que le gouvernement fédéral, par sagesse, devrait soumettre le projet de loi à la Cour suprême avant que les parlementaires ne soient invités à voter?

[Traduction]

    Ma propre opinion est que je préférerais que les tribunaux réagissent aux actions du Parlement plutôt que de voir la situation livrée aux tribunaux dès le départ.
    À mon avis, il s'agit peut-être d'une situation pour laquelle un renvoi devant la cour aurait un sens, mais c'est une occasion de retarder les choses, une occasion de décharger la responsabilité, si vous voulez, sur les tribunaux. Je ne suis pas avocat de droit constitutionnel, mais peut-être que c'est à cause de cela que je ne suis pas particulièrement séduit par l'idée de n'agir que par l'intermédiaire des tribunaux alors que je pense que nous sommes ici saisis d'une question plus fondamentalement politique; c'est en tout cas ce que je vois, dans mon entendement limité.

[Français]

    J'ai une autre question très précise. Quand je me suis joint au comité, je n'avais aucune prétention sur le plan constitutionnel et je n'ai aucune information particulière à cet égard. Quelle est la position actuelle des gouvernements des provinces de l'Ouest sur le projet de loi C-20? Quelle est la position de la Colombie-Britannique, du Manitoba, de la Saskatchewan, de l'Alberta?

[Traduction]

    D'après ce que je comprends — et je ne parle pas ici d'autorité —, les gouvernements des provinces de l'Ouest ne se sont pas encore mis de la partie.
    Si vous voulez avoir une idée générale du paysage politique dans l'Ouest du Canada, je vous le décrirais comme suit: un engagement par les gouvernements provinciaux d'aller de l'avant avec la réforme du Sénat, mais pas avec grand enthousiasme. Au niveau du public, il y a un appui massif, mais ce n'est pas une question qui occupe beaucoup l'esprit des gens, ce n'est pas une question qui les ferait descendre dans la rue. Ce n'est pas une question brûlante. Si vous sondiez les gens, leur posiez la question, vous constateriez un très solide appui, mais ce n'est pas quelque chose dont les gens discutent dans les bars la fin de semaine. La question n'est en ce moment pas très saillante.
    Mon impression du paysage politique est que ce projet de loi, le projet de loi C-20, n'a pas encore pénétré jusque dans la discussion régionale dans l'Ouest du pays. C'est en tout cas là mon impression.

  (1610)  

    Merci, monsieur Gibbins.
    Monsieur Angus.
    Merci, madame la présidente.
    J'ai trouvé votre exposé fascinant. Je conviens que le renouveau démocratique est une question fondamentale à laquelle doit s'attaquer le Parlement du Canada. Nous avons certainement ici des intérêts très enracinés qui demanderont « Pourquoi maintenant? Nous avons d'autres questions plus importantes à examiner. Pourquoi perdons-nous notre temps avec la réforme démocratique? » Or, depuis que je siège à la Chambre des communes, nous avons discuté de chiens de traîneau dans l'Arctique, de verres de contact et de quantité d'autres choses — mais pas de la réforme démocratique.
    La question est celle de savoir comment y parvenir. Pour paraphraser Chesterton, la seule chose qui soit pire que d'être dirigé par de grands seigneurs est de l'être par de petits copains. Nous avons une institution qui est un anachronisme. Il est très embarrassant qu'en ce XXIe siècle nous ne puissions pas trouver le moyen de traiter d'une chose qui était cassée il y a 141 ans. D'aucuns ont demandé si ces tentatives de transformer cette institution résistante au changement — progressivement ou, comme certains le diraient, de manière furtive — ne déboucheront pas simplement sur encore un autre échec à ajouter à la pile que nous avons déjà.
    Le Nouveau Parti démocratique est d'avis que cette institution n'a plus d'utilité. Nous croyons que la question devrait être soumise à la population canadienne. Que l'on laisse les Canadiens dire s'ils pensent qu'il y a ou non un rôle pour le Sénat.
    Cela nous soucie de nous en remettre en la matière aux premiers ministres des provinces. Ceux-ci s'expriment-ils pour chacun d'entre nous pris individuellement, ou bien s'expriment-ils dans le contexte de leurs propres intérêts? Si la question est posée aux Canadiens et que la majorité dit juger qu'il s'agit d'une institution anachronique, alors il serait difficile pour les premiers ministres des provinces de dire qu'ils ne s'engageraient pas dans une discussion sur le renouveau démocratique. Que le Sénat soit ou non fondamentalement modifié ou aboli, le fait de donner voix au chapitre aux Canadiens produirait l'énergie nécessaire pour trancher ce noeud gordien d'intérêts en place.
    J'aimerais savoir si vous pensez que ce serait une façon de procéder appropriée.
    Je suis fondamentalement un démocrate, et j'aime l'idée de faire intervenir la population dans les grosses décisions en matière de réforme constitutionnelle. C'est ce qui a été fait avec l'Accord de Charlottetown. À mon sens, c'était une bonne chose. Cela n'a pas été fait dans le cas de la Charte des droits et libertés, mais les résultats des sondages d'opinion publique ont convaincu certains des premiers ministres de l'Ouest qui étaient opposés à la Charte de plier.
    Mais comment faire intervenir les gens? Où intégrer le vote populaire? Je dirais que cela serait prématuré. Mon interprétation des sondages d'opinion publique est que les gens diraient deux choses: premièrement, la réforme démocratique serait une chose logique à faire; et, deuxièmement, vous nous demandez d'acheter un chat en poche, car nous ne savons pas où nous allons. Une réponse probable de la part du public canadien serait qu'il aime l'idée en général mais qu'il souhaiterait voir les détails. Nous n'en sommes pas encore là. Nous n'avons pas fait le travail de conception.
    À mon avis, l'avantage du gradualisme est que cela permet de mettre les choses en branle. Le désavantage du gradualisme est que l'on ne sait pas trop bien où l'on va. À mon sens, demander aux Canadiens de voter sans leur présenter un certain nombre de choix clairs serait à ce stade-ci une erreur.
    Du point de vue des néo-démocrates, il s'agit d'une question claire et juste: pensez-vous avoir besoin du Sénat ou non? Les provinces jouent un rôle qui n'avait jamais même été envisagé auparavant. La plupart des interactions au jour le jour avec le public canadien sont le fait des assemblées législatives provinciales. Avec la Charte des droits et libertés, les tribunaux sont en train d'interpréter nombre de nos lois. Le Sénat, assis là avec des lignes directrices en matière de conflits d'intérêts par lesquelles vous pourriez faire passer un camion de transport, suscite parfois la question de savoir s'il y a vraiment quelqu'un à la maison.
    C'est une question tout à fait juste à poser aux Canadiens, compte tenu du fait que nous ayons déjà ce qui revient à quatre paliers de gouvernement. Ne pensez-vous pas qu'il s'agit d'une conversation dans laquelle les Canadiens sont déjà engagés?

  (1615)  

    Permettez que je vous livre une réponse en l'inscrivant dans une perspective albertaine très étroite, mais qui rejoint, je pense, ce que vous dites.
    Il y a deux faits concrets dans la politique en Alberta. Premièrement, nous avons une énorme concentration du pouvoir car le gouvernement majoritaire du jour n'est assujetti à aucun frein. Et nous avons un gouvernement majoritaire du jour depuis 1971, toujours le même parti, alors il n'y a aucun frein. Je m'inquiète donc pour la Chambre des communes, en situation analogue. Il est difficile de se rappeler de ce qu'était la situation avec un gouvernement majoritaire, mais cela pourrait revenir. Notre système politique ne crée pas de freins très efficaces à l'égard de gouvernements majoritaires. Nous avons les tribunaux, nous avons les gouvernements provinciaux, et je ne les exclus pas. Mais au sein du Parlement, ces freins ne sont pas très efficaces.
    Mais pour moi, la raison la plus convaincante fournie par l'expérience albertaine est que nous avons des systèmes électoraux aux niveaux fédéral et provincial qui ne réussissent pas du tout à saisir la diversité de la population. Nous avons un seul parti, aux échelles fédérale et provinciale, avec différents partis remportant une majorité écrasante des sièges, bien que la population soit beaucoup plus diverse — dans un sens partisan, dans un sens urbain-rural, ou autre. Le système électoral que nous avons pour la Chambre des communes a tendance à exagérer l'homogénéité. Il projette une personnalité albertaine unique sur la scène politique, alors que la province est beaucoup plus complexe.
    L'une des raisons pour lesquelles j'appuie la réforme du Sénat, si le tir est le bon, est que nous pourrons avoir un système électoral qui reflète, grâce à ses représentants élus au Sénat, la diversité de la province. Si nous avons un système électoral pour le Sénat qui livre, mettons, dix sénateurs, et que les dix sont toujours des conservateurs, alors nous aurons simplement reproduit les failles sur le plan de la représentation qui existent au sein de la Chambre des communes.
    Voilà pourquoi je ne cesse de me dire qu'il nous faut nous doter du bon système électoral, sans quoi nous ne ferons que nous creuser un trou.
    J'aurai une dernière question, si vous m'accordiez, dans votre grande indulgence, une petite seconde.
    Certainement.
    J'ai été fasciné par votre commentaire selon lequel vous trouvez que l'idée du Sénat triple E soit devenue un petit peu trop éculée. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous pensez cela?
    Le premier des trois E du Sénat triple E est la première lettre du mot élu, ce que j'appuie, mais le modèle triple E n'a jamais en fait comporté le détail de la façon dont se déroulerait l'élection, et c'est pourquoi cela est incomplet. Il s'agit d'un Sénat efficace, ce qui, encore une fois, n'est pas très bien défini, mais c'est aussi un Sénat égal. Je ne suis pas convaincu qu'une représentation provinciale égale soit appropriée compte tenu des énormes différences démographiques entre les provinces canadiennes. Vous ne voulez pas d'un Sénat qui reproduise la représentation selon la population de la Chambre des communes, mais, pour moi, s'éloigner aussi loin de cela que ce qui est prévu avec le modèle triple E n'est pas acceptable.
    Je pense que ce que nous recherchons est un genre de modèle mixte. Cela est très bien. Cela est approprié. Et cela pourra être vendu à l'Ouest.
    Merci.
    Monsieur Reid.
    Merci, monsieur Gibbins, d'être des nôtres ici aujourd'hui.
    J'aimerais examiner une ou deux choses. Je voulais vous interroger plus particulièrement au sujet du système électoral à bulletin unique avec vote transférable, mais j'aimerais au préalable faire un commentaire, et libre à vous d'y réagir ensuite.
    Je m'inspire un petit peu de l'observation de M. Angus au sujet de la tenue d'un référendum sur l'abolition du Sénat. Cela remonte à des discussions qui ont eu lieu ailleurs, au sujet de l'idée de s'engager dans... Je ne pense pas qu'il nous faille nous engager dans ce genre de processus constitutionnel avec les provinces, car au Canada, nous n'avons pas l'option de traiter d'amendements constitutionnels par voie de référendum.
    Nous pouvons ajouter cela à notre système formel de modification constitutionnelle, mais notre mécanisme de modification de notre Constitution est très différent de celui des Australiens ou des Suisses. En Australie, par exemple, il faut la majorité des électeurs dans une majorité d'États votant en faveur d'une modification constitutionnelle, mais la modification est proposée au Parlement, fait l'objet d'un vote au Parlement, et les premiers ministres des différents États n'ont aucun rôle à jouer.
    La situation est très semblable en Suisse, ainsi qu'aux États-Unis, où il ne s'agit pas de faire du troc: nous vous donnerons vos changements au Sénat si vous nous donnez la société distincte. Dès lors que l'on se lance dans ce genre de chose, l'on se trouve confronté à une collection toujours croissante de propositions différentes émanant de groupes différents exigeant d'avoir leur mot à dire, jusqu'à ce que cela amène la création d'une énorme boule cancéreuse comme l'Accord de Charlottetown, qui englobait absolument tout et qui en bout de ligne n'avait pas été peaufiné avant d'être soumis aux électeurs et qui, fort heureusement, a été rejeté dans ce référendum informel que nous avons eu. Voilà la grosse crainte: que vous commenciez avec la réforme du Sénat et que vous vous retrouviez en fin de compte avec un processus de type lac Meech, de type Charlottetown.
    Mon argument est que c'est là une très bonne raison d'essayer d'éviter à tout prix d'utiliser la formule sept et cinquante. En tout cas, voilà l'observation que je voulais faire.
    En ce qui concerne le système électoral, la proposition ici vise un système de vote unique transférable. Cela ressemble de beaucoup au système australien. Il est un petit peu différent. Il n'y a pas d'option de vote pour la liste de parti; il vous faut voter pour des candidats individuels. Mais il me semble que ceci — et je suppose que je suis en train de vous demander si vous êtes d'accord avec moi — réalise l'objectif de permettre une représentation des minorités, ce qui manque à notre système uninominal majoritaire à un tour.
    Ayant moi-même été élu en Ontario en tant que candidat de l'Alliance canadienne en 2000, j'ai vécu l'expérience d'être un de deux membres de mon parti à avoir été élus dans le cadre de notre système uninominal majoritaire à un tour sur les 103 sièges de l'Ontario. Mon parti a remporté 25 p. 100 des voix. Les libéraux ont quant à eux remporté 50 p. 100 des suffrages, soit seulement le double, mais ont été récompensés avec 100 sièges. Cela va au coeur du problème du système uninominal majoritaire à un tour.
    Il a beaucoup été dit au sujet de la nécessité d'une réforme électorale dans la Chambre basse. Il me semble que ce système atteint jusqu'à un certain point l'objectif dans la Chambre haute, tout particulièrement pour les grosses provinces comme l'Ontario et le Québec, mais moins pour les petites provinces, comme l'Île-du-Prince-Édouard, avec seulement quatre sénateurs. Il me semble néanmoins qu'il s'agit d'un pas concret en vue d'avoir une variété de représentants de différents éléments du spectre politique, de différents segments de la société, pour ces plus grosses provinces.
    La question qui me vient dans cette veine, du fait que nous discutions au comité d'amendements potentiels au projet de loi, est la suivante: devrions-nous faire quelque effort pour essayer de veiller à ce que lors de la tenue d'élections un nombre maximal de sénateurs soient élus en même temps, ou bien faudrait-il faire en sorte que les mandats soient décalés, comme c'est le cas aux États-Unis et en Australie, par exemple?

  (1620)  

    Le système de bulletin unique avec vote transférable, et en fait la plupart des régimes de représentation proportionnelle, si c'est que nous choisissions d'adopter, fonctionnent le moins bien... Excusez-moi. Plus la circonscription est petite, moins bien cela fonctionne. Si vous avez un bulletin unique avec votre transférable et que vous n'élisez qu'une seule personne, vous obtenez en gros le même résultat — pas exactement, mais cela est très proche.
    L'une des choses qui n'est pas claire dans le projet de loi C-20, en tout cas d'après la lecture que j'en fais, est qu'il ne définit pas quel serait le regroupement approprié des circonscriptions aux fins de l'élection de sénateurs. Il ne définit pas, car nous ne le pouvons pas à ce stade-ci, quel devrait être le nombre de sénateurs élus ni selon quel échéancier ils devraient être élus. Nous allons vivre une période d'instauration progressive au cours de laquelle rien de tout cela ne fonctionnera terriblement bien.
    L'important est que si vous voulez assurer la diversité de représentation au Sénat et veiller à ne pas reproduire les genres de blocs régionaux que l'on retrouve à la Chambre des communes, alors il vous faudra un nombre raisonnable de personnes élues en même temps dans la même circonscription. Parvenir à cela de manière progressive ne sera pas simple. Je ne pense pas que le régime électoral proposé dans le projet de loi C-20 fonctionne sans accroc dès le départ. Ce ne sera pas le cas. Mais je pense qu'il créera la possibilité de commencer à travailler à un bon résultat.
    Je tiens également à souligner — et ceci revient en fait à la question de la tenue d'un référendum — que notre Constitution n'exige pas que des changements constitutionnels d'envergure soient soumis à la population. Elle exige simplement le consentement des provinces — toutes les provinces ou bien sept d'entre elles. Cependant, je devine que le référendum au sujet de l'Accord de Charlottetown a établi davantage un précédent constitutionnel que nous le pensions. De fait, ayant invité la population à se prononcer sur une proposition constitutionnelle d'envergure, je devine qu'à l'avenir, peu importe le changement constitutionnel envisagé, s'il est important et significatif, les gouvernements seront obligés de recourir à un mécanisme ou un autre de consentement populaire. Je pense que nous avons, dans le cas du référendum sur l'Accord de Charlottetown, pris une décision sur laquelle nous ne reviendrons pas; je ne pense même pas que nous le puissions.

  (1625)  

    Eh bien, il m'est certainement venu à l'idée qu'au lieu de s'adresser aux premiers ministres des provinces pour commencer, en vue d'essayer de négocier une entente, pour ensuite soumettre la chose à la population, comme cela a été fait dans le cas de Charlottetown, nous pourrions procéder de manière inverse. Que l'on conçoive tout simplement quelque chose, que l'on porte cela devant les électeurs, et si cela est populaire et est appuyé par l'électorat d'une province, alors il devient très difficile pour un premier ministre provincial de dire qu'il compte malgré tout s'y opposer.
    Vous pouvez certainement faire campagne contre, lors d'un référendum, mais une fois que la population s'est prononcée, il devient très difficile d'aller à l'encontre de sa volonté. Je devine que si cela se faisait, cela reviendrait en définitive à l'adoption d'une convention semblable à celle des Australiens, auquel cas le vote de la majorité dans une province — ou dans un État dans le cas de l'Australie — serait ce qui compte réellement.
    J'hésite à utiliser l'exemple de la Charte des droits car, comme cela a déjà été souligné, ceci n'est pas nécessairement... Ce que je veux dire par là est que la manière dont nous en sommes arrivés à la Constitution en 1982 n'est pas uniformément perçue comme étant une bonne façon de procéder. Mais il est intéressant qu'un ou deux premiers ministres de provinces de l'Ouest — je ne sais pas ce qu'il en est pour les autres — n'aient pas voulu voir une Charte des droits inscrite dans la Constitution, craignant que cela n'entame la suprématie parlementaire. C'était un argument raisonnable, et ils n'étaient pas en faveur.
    Le gouvernement fédéral a mené un vaste exercice de sondage de l'opinion publique, faisant ressortir que les Canadiens, selon une marge d'environ 90 pour un, ou peut-être aujourd'hui de 90 pour cinq, étaient en faveur d'une Charte des droits inscrite dans la Constitution. Puis le gouvernement fédéral s'est adressé aux gouvernements provinciaux leur disant « Très bien, nous pouvons soumettre la question à la population, d'une manière ou d'une autre. Si vous voulez vous en prendre à nous dans la cour de l'opinion publique, nous disposons de preuves selon lesquelles vous essuieriez une sérieuse défaite. Alors assoyons-nous et discutons ».
    L'opinion du public est importante. Mais je reviendrai à un point que j'ai souligné plus tôt. Si vous voulez faire intervenir le public, plus les choix ou les modèles que vous lui soumettez sont clairement tranchés, plus éloquente sera sa voix. Si vous posez une question floue, vous obtenez du public une réponse floue. Voilà pourquoi je ne bousculerais pas les choses.
    Cela s'appelle la Loi sur la clarté.
    Oui, à certains égards.
    Merci, monsieur Gibbins.
    Nous allons maintenant entendre Mme Fry.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Gibbins, je me dis parfois que certaines des choses dont nous discutons ici ne sont peut-être pas toujours appropriées. J'ignore si vous savez que la seule manière dont le premier ministre pourrait tenir ces élections sans en fait violer la Constitution serait de faire ce qu'il a fait, c'est-à-dire suggérer qu'après les élections il utiliserait la liste, à partir de laquelle il choisirait les personnes à nommer. En d'autres termes, il pourrait ou ne pourrait pas accepter le résultat, et ne l'accepterait pas nécessairement. En fait, il ne pourrait pas être lié par les élections, car il violerait ainsi immédiatement la Constitution.
    En bout de ligne, donc, nous parlons ici de sémantique ou d'une chose qui n'a aucun sens, car si vous allez tenir des élections — que vous allez ensuite ignorer et qui vont au départ coûter énormément d'argent — pour ensuite décider si vous allez ou non tenir compte du résultat, alors il s'agit là, premièrement, d'une trahison de la démocratie. Deuxièmement, vous aurez créé un système de manière furtive, comme le disait, je pense, mon collègue néo-démocrate, système dans le cadre duquel vous essayez d'obtenir une réponse à quelque chose. Vous faites intervenir Élections Canada. Vous faites toutes ces choses, mais vous n'allez pas écouter ce que disent les gens.
    Voilà donc quelle est ma première question, car cela est, pour moi, au coeur de ce qui m'ennuie avec ce projet de loi. Il s'agit d'une initiative furtive. Il s'agit d'une initiative qui, comme l'a dit un des témoins que nous avons entendus, ne peut pas être prise de manière légale, alors vous tentez d'obtenir la même chose en passant par la porte arrière. Voilà pour ce qui est de la première chose.
    Deuxièmement, en faisant cela, le premier ministre a en fait ignoré les provinces et manqué de respect envers elles dans la mesure où il n'a pas jugé utile de s'asseoir et de discuter tout d'abord avec elles de certaines des choses qui revêtent une importance fondamentale, alors que les provinces sont déjà intervenues et ont déjà exprimé leurs vues. Là encore, cela ne cadre pas très bien avec l'idée d'essayer d'obtenir de bonnes contributions, d'essayer d'élaborer quelque chose qui fonctionnera, de veiller à ce que même si tout le monde n'est pas d'accord, au moins on a fait preuve de respect envers les autres intéressés en ayant discuté avec eux.
    L'idée, donc, que vous puissiez assurer la diversité par le biais d'un système électoral, alors qu'en vérité vous ne tenez pas vraiment à une élection, est sans intérêt pratique.
    Mais tout cela étant dit, j'aimerais revenir à la question de la diversité. Vous avez déclaré qu'une élection est un meilleur moyen d'assurer la diversité que des nominations, et vous avez dit que cela dépend du premier ministre. Ne serait-il pas plus sage de proposer en fait de modifier de quelque manière le mode d'élection du Sénat, non pas en changeant la Constitution, mais en proposant que le premier ministre établisse une liste de personnes qui reflète la diversité du Canada — linguistique, régionale ou autre — et qu'il soit tenu par cela, auquel cas c'est à ce genre de formule qu'il faudrait réfléchir? Puis, au fur et à mesure qu'évoluerait le Canada, la formule évoluerait elle aussi, et il s'agirait de veiller à ce que les nominations soient bel et bien faites.
    Je sais que M. Chrétien, dans le cadre de ses nominations, a fait quelque chose que nous n'avons jamais pu faire par le biais d'élections: il a réussi à faire en sorte que près de 50 p. 100 des sénateurs soient des femmes. Et il a également nommé des Autochtones, ce qui n'avait jamais été fait auparavant dans le cas du Sénat. Et il a également nommé au Sénat des représentants de minorités visibles et de groupes linguistiques, ce que l'on n'avait jamais vu auparavant.
    Je pense qu'il y aurait moyen de le faire par voie de nominations, si cela vous tenait vraiment à coeur. Voilà donc ce que je voulais vous soumettre.
    Premièrement, il y a la question de savoir quand une élection est une élection lorsqu'elle n'en est pas une. Et, deuxièmement, il y a la question du manque de respect pour les provinces. Et le troisième point concerne l'établissement de la diversité par le biais de nominations.

  (1630)  

    Ce sont là de bonnes questions.
    À l'heure actuelle, le premier ministre cherche conseil auprès de je ne sais qui lorsqu'il fait des nominations. Nous n'avons pas la moindre idée quant aux personnes qui le conseillent. Nous ne savons pas s'il accepte ou s'il rejette les conseils qu'on lui donne. Il s'agit d'un processus tout à fait hermétique qui s'opère dans la tête du premier ministre. Nous voyons les résultats. Nous applaudissons à certains et condamnons d'autres, et nous n'avons aucune idée du processus qui est suivi.
    Je pense qu'il est inconcevable — et je ne saurais trop insister là-dessus — qu'un premier ministre tienne ou déclenche des élections, pour ensuite rejeter les conclusions. En tant que convention, cela s'inscrit si vite dans le jeu canadien d'attentes auquel serait lié le premier ministre. L'un des arguments constitutionnels avancés au sujet de toute cette question est que le premier ministre serait lié. Il ne peut pas jouer sur les deux tableaux. Ou il est lié par un processus électoral, ou il ne l'est pas. Je pense que, pour le meilleur et pour le pire, le premier ministre serait ainsi lié.
    La perspective, donc, de la tenue d'élections — et j'utilise ce terme en connaissance de cause — pour que le premier ministre en ignore ensuite le résultat est fort peu probable au départ, et deviendrait vite inconcevable en regard de la convention. Cela ne me préoccupe pas.
    L'argument concernant l'entrée par la porte arrière est certainement plus troublant — l'idée de ne pas faire intervenir dès le départ les provinces. Je suppose qu'il y a deux réponses que je pourrais offrir.
    Si le Sénat fonctionnait bien et si nous ne courrions pas ce que je considère comme un risque très réel de confrontation entre une chambre élue et un Sénat nommé, du fait des grands déséquilibres partisans qui existent entre les deux, alors je recommanderais que l'on bouge aussi lentement en la matière qu'on le veuille.
    Je ne pense pas que le système fonctionne bien à l'heure actuelle. La façon de faire venir à la table les provinces est d'enclencher de quelque manière le processus. C'est ici encore que je pense que le projet de loi C-20 accroche l'intérêt. Si vous dites aux gouvernements provinciaux « Nous n'allons rien faire de notre propre initiative » et attendez qu'ils se rallient tous et pondent quelque chose, alors il ne va rien se passer.

  (1635)  

    Mais il s'agit d'un projet de loi et non pas d'une idée de politique. Les idées de politique, je les jette.
    Madame Fry, le temps dont vous disposiez est expiré, mais j'aimerais donner à M. Gibbins l'occasion de répondre à vos questions.
    La troisième question concernait la représentation des minorités au Sénat. Je ne suis de toute façon pas un très bon représentant de minorités, sauf pour ce qui est de cette étrange sorte de perspective albertaine des choses.
    Avoir une représentation des minorités dans une chambre nommée, discréditée et à bien des égards dysfonctionnelle n'est pas une très grosse victoire. Je pense que la plus grosse victoire serait d'avoir une chambre efficace qui soit démocratiquement élue et conçue de manière à pouvoir y inclure le genre de représentation des minorités que nous jugeons importante à refléter au Canada. Incluez-y une représentation des minorités — c'est pourquoi j'aime le mécanisme électoral — qui reconnaisse que notre définition des groupes et intérêts qui devraient être représentés fluctuera. Ces groupes et intérêts changeront quelque peu dans le temps, mais nous voulons avoir une institution qui puisse s'y adapter.
    Je ne pense pas qu'une nomination au Sénat soit l'étoile dorée. Nous pouvons faire mieux que cela.
    Merci, monsieur Gibbins.
    Monsieur Preston.
    Premièrement, monsieur Gibbins, je tiens à vous remercier d'être ici. J'ai assisté à une ou deux réunions avec des experts constitutionnels, et c'est une vraie bouffée d'air frais que d'entendre quelqu'un aborder la question depuis une autre perspective, une perspective plus populaire.
    Je suis d'accord avec vous sur certaines de vos déclarations, et je vais essayer de tout tisser à l'intérieur d'une question. Vous avez en tout cas dit qu'il y a un vaste appui public pour ce que vise le projet de loi C-20. Si vous permettez que je vous cite, vous avez peut-être eu tort de dire que les gens n'en parlent pas dans les bars pendant la fin de semaine. Peut-être que nous fréquentons des bars différents.
    Absolument.
    D'un bout à l'autre du pays, si vous soulevez la question de la réforme du Sénat, vous pouvez avoir la certitude qu'on vous livrera une opinion. Qu'il s'agisse d'un bar, d'un sous-sol d'église ou de quelque autre endroit, vous allez entendre des opinions très tranchées. Je n'ai jamais, depuis que je siège en cet endroit, entendu d'opinion du genre « Eh bien, j'aime ce que nous avons ». Je pense pouvoir affirmer cela sans grand risque.
    Vous avez déjà déclaré qu'il importe qu'il y ait des changements, que le projet de loi est un premier pas sur le chemin vers le changement, que c'est ce que réclame le public et que les gens sont certainement en train de dire que ce que nous avons n'est pas bien.
    On vient tout juste de vous poser des questions au sujet des nominations et de la possibilité que ce soit peut-être la méthode pour obtenir la meilleure représentation dans cet endroit. Eh bien, je peux vous dire, monsieur, que la plus grosse plainte que j'entends concerne le fait que les sénateurs soient nommés. C'est peut-être réellement là ce qu'apporte le projet de loi C-20 — l'un des meilleurs éléments pour essayer de corriger cela.
    La demande du public est là. Vous avez dit qu'il nous faut enclencher le changement, ne serait-ce qu'un tout petit peu. Nous allons nous lancer, et peut-être que les provinces se lèveront alors, prendront note du changement qui s'opère et souhaiteront y participer. J'aime bien cette logique.
    Je ne suis pas certain que la demande du public soit le fait des premiers ministres. Ce n'est pas ce que j'entends. J'entends la demande du public exprimée dans la rue. Je conviens donc avec vous qu'entamer le changement est peut-être la meilleure chose à faire.
    Je vais peut-être m'arrêter là et vous demandez où vous en êtes, mais j'ai beaucoup aimé votre théorie voulant que nos deux choix sont d'attendre l'écroulement inévitable de ce que nous avons ou d'emprunter le chemin menant au changement et de nous lancer, car le changement lui-même apportera d'autres changements.
    Je vais m'arrêter là et vous laissez réagir à ce que je viens de dire.
    J'aurai deux réponses rapides.
    Je m'occupe depuis toujours, il me semble, de sondages d'opinion publique sur des questions relatives au Sénat, et une chose est éminemment clair: le statu quo ne jouit de presque aucun appui de la part du public. Les partisans du statu quo sont aussi rares que les personnes qui croient qu'Elvis est toujours vivant, ou qu'elles se sont entretenues avec des martiens le mois dernier, ou autre. On est passé en dessous des 10 p. 100, et cela doit friser les 7 ou 8 p. 100.
    Très bien. Nous ne pouvons pas laisser les choses comme elles sont.
    Il n'y a aucun appui pour cela.
    Ce qui est également clair est que si les gens se voient obligés à ce stade-ci de choisir entre réforme et abolition, il y aura d'importantes différences selon la région du pays et d'importantes différences partisanes. Les néo-démocrates ont tendance à appuyer l'abolition, les Québécois ont tendance à appuyer l'abolition davantage que la réforme, et les Canadiens de l'Ouest sont davantage en faveur de la réforme. Il y a donc des différences, et l'on ne peut pas trancher net quant à la façon dont voteraient les Canadiens. Je pense qu'une partie de la raison pour laquelle l'on ne peut pas trancher net est que les gens ne comprennent pas bien les options elles-mêmes.
    Le deuxième point en la matière a à voir avec le rôle des premiers ministres des provinces. L'une des difficultés en ce qui concerne la réforme du Sénat est que tous ceux qui comptent, tous ceux qui doivent s'entendre, perdent. Un Sénat élu aurait une certaine incidence sur le statut des députés, n'est-ce pas? Vous ne seriez pas la seule Chambre élue. Il y aurait des sénateurs, et ceux-ci représenteraient à certains égards des circonscriptions plus importantes; ils seraient moins nombreux; ils sembleraient peut-être plus puissants. Les députés seraient donc perdants. Les sénateurs existants seraient perdants. Les premiers ministres des provinces seraient perdants du fait qu'il y ait tout d'un coup des concurrents s'exprimant au nom de l'Alberta, au nom de la Saskatchewan. Et le premier ministre serait perdant parce que...

  (1640)  

    Mais qui serait gagnant?
    La population.
    Certes. Et c'est dans son intérêt que ce serait fait, n'est-ce pas?
    J'ai le sentiment de vous avoir monté un coup, comme si vous étiez ici mon faire-valoir.
    Merci beaucoup.
    Pour notre prochain numéro nous... Non, excusez-moi.
    Mais cela est tel que le processus lui-même est difficile à faire bouger à moins de le secouer quelque peu, car les personnes qui ont les leviers ne sont pas si enthousiastes que cela. Même si — même si — elles pensent, au fond de leur coeur, que c'est la bonne chose à faire, il est difficile d'être très enthousiaste pour quelque chose qui va empiéter sur votre propre pouvoir et votre propre influence en bout de ligne. C'est de bonne guerre, vous savez.
    Merci.
    La parole est maintenant à Mme Picard.

[Français]

    Vous avez la parole.
    Bonjour, monsieur Gibbins.
    Je suis en faveur de l'abolition du Sénat. Je ne crois pas à une deuxième chambre. Je pense que la Chambre des communes est capable d'assumer ses propres responsabilités.
    Vous avez dit tout à l'heure que le projet de loi C-20 était un petit pas dans la bonne direction. Cependant, vous y trouvez quand même des choses qui, pour vous, sont inconcevables. Vous avez dit qu'après l'élection des sénateurs, le premier ministre pourrait, lui, faire fi de cette démocratie et nommer quelqu'un d'autre. Pour vous, c'est inconcevable. Vous dites qu'on est en train de faire quelque chose par la porte d'en arrière. La plupart des avocats spécialisés en droit constitutionnel nous ont dit exactement la même chose. Vous avez aussi souligné qu'on ne consultait pas les provinces. En fin de compte, dans le projet de loi C-20, on ne consulte personne; on impose une loi qui a été conçue on ne sait pourquoi. De plus, il sera très difficile de la mettre en application.
    Quel est le petit pas que constituerait le projet de loi C-20 sur le chemin de la réforme, dont vous avez parlé tout à l'heure?

[Traduction]

    Le petit pas est qu'avec le projet de loi C-20, le premier ministre accepterait les conseils des gens des provinces au lieu d'écouter sa propre conscience, ses conseillers, ou d'autres. Il s'agit là à mon sens d'un changement tout à fait fondamental.
    La difficulté, et je pense que c'est un domaine dans lequel le comité pourrait fort bien avoir un important rôle à jouer, réside dans la période de transition. Comme je l'ai mentionné, je peux penser à différents régimes électoraux qui fonctionneraient très bien relativement à quantité des préoccupations qui ont été exprimées dans cette salle, mais à court terme, ce serait incomplet et embrouillé.
    Soit dit en passant, le Québec pose un problème particulier, mais sans doute pas néfaste, du fait que les circonscriptions pour le Sénat soient définies dans la Constitution, alors que ce n'est pas le cas pour les autres provinces. Il pourrait y avoir, en Alberta, une seule élection pour combler en même temps les postes des six sénateurs, mais je ne vois pas très bien comment cela se déroulerait au Québec, avec des districts sénatoriaux définis dans la Constitution. Pour le Québec, donc, il y a un difficile travail à faire.
    Le projet de loi C-20 représente par ailleurs un important rameau d'olivier pour les provinces en ce qu'il propose, si je l'interprète bien, que les élections soient tenues ou en même temps qu'une élection fédérale ou en même temps qu'une élection provinciale. Il y a dans ma province des partisans du mouvement pour un Sénat triple E qui tiennent mordicus à ce que les élections aient lieu en même temps que les élections provinciales. Personnellement, j'estime que ce serait là la mauvaise façon de procéder, mais je nous verrais bien avancer en conservant une partie de cette distinction, certaines des élections ayant lieu à l'échelle nationale et certaines ayant lieu à l'échelle provinciale.
    Tout en oeuvrant à faire en sorte que la formule soit logique et vendable au Québec, il y a tout un tas d'éléments dans la conception qui offrent selon moi une certaine flexibilité.
    Le dernier point... J'hésite tellement à employer des expressions comme « porte arrière » ou « changement furtif », et ainsi de suite, car cela donne l'impression que la chose est de quelque façon illégitime. Or, je regarde la paralysie qu'il y a eu en matière de réforme du Sénat, sans mouvement aucun, et je pense qu'il y a ici une certaine possibilité de créativité, d'imagination, d'engagement dans une discussion.
    Je parle, en ma qualité d'universitaire, de réformer le Sénat depuis 35 ans, et je me plais à croire que certains changements modestes seront possibles avant ma mort. Je me plais à croire qu'il y aura certains changements modestes pendant la durée de vie de mes enfants, mais je n'en suis pas convaincu. Si le Sénat fonctionnait bien, cela me serait égal, mais je ne crois pas qu'il fonctionne bien, et c'est pourquoi cela compte pour moi.
    Excusez-moi, cela a été une longue réponse à votre question.

  (1645)  

[Français]

    Thank you, Mr. Gibbins.
    Avez-vous terminé?
    La reconnaissance de la nation québécoise par la Chambre des communes pourrait-elle changer quelque chose? Cela pourrait-il donner un droit de veto au Québec?

[Traduction]

    À un certain moment dans le processus, les mécanismes formels de réforme constitutionnelle devront être enclenchés. La question, dans mon esprit, donc, est celle de savoir si les dispositions en matière de veto qui seraient importantes pour le Québec devraient intervenir au début du processus, ou un peu plus tard.
    Ici, mon sentiment — et il n'est pas fondé sur quelque principe constitutionnel — est que le fait de prévoir ce veto au tout début du processus resserrerait le mécanisme d'une manière qui ne serait pas avantageuse pour le pays dans son entier. En bout de ligne, si le Québec n'adhère pas à l'entente constitutionnelle, qu'elle qu'elle soit, qui sera négociée, alors nous n'aurons pas d'entente. Cela fait partie de la réalité du pays. Mais il me semble qu'il ne serait pas approprié d'étouffer le débat trop tôt, et cela pourrait même faire naître de la mauvaise volonté dans d'autres parties du pays qui y attachent une plus grande importance.
    Mon propre sentiment, donc, serait qu'il vaudrait mieux laisser la conversation se dérouler, laisser les provinces exposer leur position, en sachant fort bien qu'il faudra à un moment donné que le coût d'une pleine et complète constitutionnalité intervienne, ce qui selon moi offrira une très solide protection pour les intérêts du Québec à l'avenir.

  (1650)  

    Merci, monsieur Gibbins.
    Monsieur Moore.
    Merci, madame la présidente, et merci à vous, monsieur Gibbins.
    Vous suivez depuis longtemps ce débat. En disant qu'un changement graduel ne va pas suffisamment loin, n'est pas suffisamment parfait, est de quelque manière déficient, et qu'il nous faut attendre de pouvoir créer le système parfait sur lequel tout le monde s'entendra, et qu'il nous faudra à un moment donné à l'avenir élaborer ce modèle parfait — n'est-ce pas là tout simplement une autre façon de dire que nous n'allons rien pouvoir accomplir compte tenu de la complexité du pays, de la façon dont fonctionnent le Parlement et le Sénat, et des relations intergouvernementales? L'argument voulant que nous ne devrions pas aller de l'avant avec ce projet de loi, du fait que d'aucuns estiment qu'il ne va pas suffisamment loin ou qu'il n'est pas parfait, n'est-il pas tout simplement une façon de dire « Ne faisons rien », pour les critiques du projet de loi dont vous entendez parler?
    Je ne peux bien sûr pas me prononcer sur les motifs de ces critiques, mais c'est bien là l'effet.
    Comme vous l'avez indiqué, ce débat dure depuis longtemps, et nous avons tendance à entendre les mêmes arguments. Je ne vous demande pas de vous prononcer forcément sur leurs motifs, mais quel en est l'effet? Si nous allons attendre d'avoir quelque système parfait, l'effet ne sera-t-il pas en bout de ligne le même que si nous nous opposions tout simplement carrément à tout changement quel qu'il soit?
    L'effet d'attendre de voir le concept dans son entier avant d'aller plus loin serait de stopper net le processus. Quant à savoir si c'est là le résultat souhaité ou pas, ou si la chose est délibérée, je ne peux pas me prononcer, mais c'est là l'effet.
    Je suis donc partisan d'une réforme graduelle. Cela nous offre certaines possibilités.
    Vous avez mentionné, et je suis d'accord à 100 p. 100, qu'il serait hautement inconcevable qu'un premier ministre, après avoir entrepris toute cette procédure de consultation, en ignore les résultats. Je pense que ce serait également inconcevable politiquement. Mais il importe d'avoir cette consultation. Je sais que vous en avez probablement par-dessus la tête des experts en droit constitutionnel, mais le fait d'avoir une consultation plutôt qu'une élection directe, comme vous le savez... Le professeur Hogg pense que la constitutionnalité du projet de loi dépend de cela. Il conclut que ce projet de loi est constitutionnel en tous points, ligne par ligne.
    Auriez-vous un avis sur la difficulté de cette tâche, soit d'injecter un peu de démocratie dans ce qui est actuellement une institution non démocratique, sachant qu'il faut traverser ce champ de mines constitutionnel? Dans quelle mesure est-il important que le plus grand expert canadien en droit constitutionnel juge cette méthode constitutionnelle?
    Je ne pense pas que les obstacles constitutionnels soient insurmontables. Je peux me tromper; les tribunaux ne sont pas entièrement prévisibles à cet égard.
    Je reviendrai à ce que j'ai dit précédemment, à savoir que les tribunaux seront quelque peu limités dans leur appréciation par la nature de la question qui leur est posée. La conception des institutions représentatives n'est pas réellement un terrain sur lequel les tribunaux se sentent à l'aise.
    Si les tribunaux étaient saisis d'une contestation qui les forcerait soit à s'en tenir à la lettre d'une loi écrite il y a quelque 141 ans et de bloquer la démocratisation du Sénat, soit d'accorder une certaine latitude, je pense qu'ils opteraient pour la latitude. Mais je ne sais pas. Cependant, il me semble que ce n'est pas une témérité excessive que d'emprunter ce chemin. Cela forcera la décision, cela ne fait aucun doute.

  (1655)  

    Nous avons un peu parlé de cette méthode de consulter les Canadiens, et je conviens que ce n'est pas toujours la préoccupation première du public. Mais lorsqu'on demande aux gens, chacun semble avoir une opinion sur l'opportunité de démocratiser le Sénat, mais ils trouvent souvent le modèle de la consultation comme une solution imparfaite.
    Vous avez dit que le Sénat, à l'heure actuelle, ne fonctionne pas bien. Je pense que vous êtes là en bonne compagnie. Je dirais que la plupart des Canadiens, en tout cas mes électeurs, sont d'accord avec vous mais certains membres sont réservés au sujet de la consultation, l'idée de consulter démocratiquement le peuple lorsqu'il se produit une vacance pour leur demander qui ils aimeraient voir siéger au Sénat.
    Avez-vous un commentaire, pour ceux qui ne le savent pas, sur la manière dont les sénateurs sont choisis en ce moment?
    Nous n'avons pas la moindre idée, bien évidemment. Nous ne savons pas quels facteurs sont pris en compte. Nous savons que différents premiers ministres ont employé différentes stratégies.
    Le premier ministre Chrétien avait une stratégie intéressante, qu'il n'employait pas exclusivement, consistant à nommer au Sénat des personnes relativement âgées, si bien qu'il avait un taux de roulement assez important au Sénat. C'est une façon intéressante de faire les choses.
    Vous pourriez nommer de jeunes sénateurs pour assurer que votre parti ait une voix au Sénat quoi qu'il advienne ultérieurement à la Chambre de communes. Il y a différentes façons de s'y prendre. Il n'existe aucune règle à l'heure actuelle. Nous ne savons pas quelles considérations animent le premier ministre.
    Pour revenir rapidement sur un point, j'ai affirmé avec autant de force que possible qu'il est inconcevable qu'un premier ministre n'accepte pas l'avis de l'électorat. Je retire cela. Je peux concevoir une situation. Disons qu'une province élise quelqu'un qui est ouvertement raciste et qui a exprimé ouvertement des opinions racistes inacceptables au Canada, de l'avis du premier ministre du jour. Je peux imaginer alors qu'un premier ministre dise: « Je ne vais pas accepter cet avis. Je vais risquer ma carrière politique là-dessus. Je n'accepte pas cette valeur et je vais choisir quelqu'un placé plus bas sur la liste des élus ». Je pense que c'est possible, mais très peu probable. À mon avis, c'est une probabilité très ténue, mais qu'il faut peut-être garder à l'esprit.
    Merci, monsieur Gibbins.
    Nous passons à M. Angus.
    Merci beaucoup.
    Comme je l'ai dit, je trouve cette discussion fascinante. Ce que j'aime bien dans ce projet de loi, c'est qu'il représente un excellent ballon d'essai, à mon avis, et permet d'amorcer un débat. Ce qui m'inquiète à son sujet, c'est qu'il représente une loi véritable. Elle souffre d'un manque de réflexion sur un grand nombre d'aspects qui fait que cette réforme pourrait bien éclater à la figure du gouvernement.
    Élections Canada a émis des réserves sérieuses. Ses responsables ont parlé d'un risque d'échec extrême. Je crois que ce sont là leurs paroles exactes. Il y a un manque de planification en ce qui concerne les limites financières; il n'y a pas de limite relativement aux sujets de campagne. Il y a le problème de la participation de tierces parties à une élection, avec la possibilité que des partis politiques s'érigent en tierces parties, et peut-être même des candidats fédéraux. Il y a aussi la question de savoir s'il serait possible ou non, si cette consultation se fait en conjoncture avec une élection fédérale — ils ne pensaient même pas que ce serait possible de le faire en conjonction avec une élection provinciale du fait d'un grand nombre de complications — , et si certains candidats ont des capacités illimitées de lever des fonds qu'ils puissent s'ingérer dans des campagnes électorales légitimes. Par « légitimes » j'entends les campagnes pour la Chambre des communes, car il s'agit ici d'un mécanisme de consultation et non d'une élection, et cela va être très difficile à définir.
    Je crains donc qu'il y ait tellement d'inconnues dans ce projet de loi que lorsqu'on va vraiment l'appliquer sur le terrain, cela se transforme en désastre.
    J'aimerais connaître votre opinion, car vous avez rappelé que cela pourrait être problématique au Québec, lequel a des circonscriptions pour les sièges sénatoriaux.
    Les districts sénatoriaux.

  (1700)  

    Ce serait peut-être l'une des provinces où il serait le plus facile d'introduire le système. Comment feriez-vous cela en Ontario, avec 13 millions d'habitants répartis sur un si vaste territoire? Nous n'avons pas défini quelles seraient ces régions. Le projet de loi n'indique pas comment l'on procéderait. Je crains beaucoup que l'on se retrouve avec une chienlit en Ontario. Alors qu'au Québec, il existe au moins des circonscriptions sénatoriales et on pourrait tenir ces élections dans ces circonscriptions. C'est gérable.
    Pensez-vous que ce projet de loi présente des vices techniques, du point de vue de son application concrète?
    Si je comprends bien le processus parlementaire, l'étude en comité donne l'occasion d'améliorer le projet de loi. Je pense qu'il y a place pour des améliorations dans celui-ci, particulièrement sur le plan de son application, et surtout sur le plan de la transition, lorsque nous aurons une combinaison de sénateurs nommés et de sénateurs élus. Comment cela fonctionnerait-il en Ontario? Vaudrait-il mieux avoir trois ou quatre districts sénatoriaux plutôt qu'un seul? Une seule circonscription pour 24 sièges me paraît problématique.
    Je ne prétends nullement que ce projet de loi est parfait. Personnellement je serais ravi si le travail de ce comité aboutissait à une meilleure loi. Je serais amèrement déçu si le résultat était que le comité baisse simplement les bras et dise qu'il ne va rien faire parce que la tâche est trop difficile. Je ne pense pas qu'elle soit trop difficile.
    Mais je ne pense pas que le texte actuel du projet de loi réponde à toutes les questions que vous pouvez très légitimement poser.
    L'une des pierres d'achoppement pour le Nouveau Parti démocratique à ce sujet, laissant de côté pour le moment notre position sur l'opportunité de consulter le peuple canadien, est le terme « peut ». Le premier ministre « peut » ordonner ces consultations et il « peut » accepter les résultats. La différence entre une oligarchie et une démocratie, c'est le mot « doit ». Il doit accepter. D'accord, vous dites qu'il serait presque inconcevable qu'il ne s'estime pas lié, mais il n'est pas nécessairement tenu de tenir la consultation. Ce n'est qu'un instrument parmi d'autres.
    Si nous voulons assurer la légitimité dorénavant, nous devons assurer ce caractère impératif, même si nous devons affronter une contestation constitutionnelle. Il me semble que c'est prêter le flanc — vous n'aimiez pas le mot — à l'accusation d'agir furtivement, c'est-à-dire par un moyen détourné. À moins que l'on soit prêt à dire que la consultation sera contraignante pour le premier ministre, la légitimité globale d'un mécanisme de consultation qui peut avoir lieu ou non et dont le résultat oeut être accepté ou non ne sera pas crédible au XXIe siècle, dans une démocratie occidentale.
    Ma réponse est que l'emploi du terme « peut » par opposition à « doit » reflète l'impasse dans laquelle nous nous trouvons en ce moment. Lorsque nous aurons finalement un modèle complet à soumettre aux Canadiens, j'espère que les « peut » deviendront des « doit ».
    Je parle du stade où nous modifierons la Constitution. C'est à ce stade que nous pourrons avoir les bons termes. Nous ne pouvons les inscrire en ce moment parce que nous sommes englués dans ce marécage. Je vous dis, à vous et à votre parti, que nous aurons l'occasion d'inscrire les bons termes. Nous ne pouvons pas le faire entièrement à ce stade, parce que nous sommes à une étape délicate.
    J'allais vous demander si le premier ministre serait ou non tenu d'accepter un candidat. J'ai été frappé, en lisant le projet de loi, par le fait qu'en l'absence de limites de financement — les modalités et le rôle des tierces parties — il serait facile à un groupe militant de lancer une campagne de vote en faveur d'une personne. Greenpeace ou Right to Life pourraient décider cela. Ils pourraient demander à tous leurs membres de contribuer des fonds. Ils pourraient demander aux membres de leur vaste organisation de verser 100 $ ou 500 $ pour faire élire cette personne qui aurait des vues politiques similaires aux leurs.
    Il serait relativement facile de lever assez de fonds pour se faire entendre dans une vaste région. Vous pourriez vous retrouver ainsi avec l'élection de candidats pro-vie ou opposés à la chasse aux phoques. Techniquement, c'est démocratique. Mais il faudrait établir un système avec des limites de financement afin que les gens d'une région donnée, ou d'un groupe donné, aient une chance équitable d'être élus. Pensez-vous qu'il y a là un problème de faire entrer quelqu'un par la porte arrière, du fait de l'intervention de tierces parties et la possibilité de lever des fonds illimités?

  (1705)  

    À mes yeux, la direction dans laquelle il faut s'engager est assez claire. Nous voulons que les mêmes normes et conventions que celles applicables au financement électoral pour la Chambre des communes s'appliquent aussi au Sénat. Cela ne devrait pas être trop difficile à faire.
    L'écueil est que, puisque le projet de loi C-20 autoriserait l'élection de sénateurs en conjonction avec des élections provinciales, il n'est pas clair si les règles de financement fédérales s'appliqueraient. Les provinces ne sont pas très éloignées de la législation fédérale à cet égard, mais c'est l'une des incertitudes. Si nous nous raccrochons aux élections provinciales, le Parlement ne pourra plus imposer les règles de financement électorales. C'est pourquoi je pense qu'à long terme c'est une mauvaise solution que de se raccrocher aux élections provinciales.
    Mais votre comité aurait intérêt à fermer les échappatoires financiers dans le projet de loi. S'ils n'existent plus, ce sera tant mieux.
    Monsieur Gourde.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
     Je remercie également le témoin du beau travail qu'il nous présente.
    J'ai deux questions brèves à vous poser. Vous disiez que dans le processus, il faudrait le consentement des provinces pour réformer du Sénat. À quelle étape du processus devrions-nous consulter les provinces?

[Traduction]

    Nous pouvons aller loin sur le chemin d'un Sénat élu sans le consentement formel des provinces. Nous pouvons aller assez loin, et c'est ce que fait le projet de loi C-20. Cependant, pour changer la distribution des sièges sénatoriaux, nous avons besoin du consentement des provinces. Il y a des limites constitutionnelles strictes quant à ce que l'on peut faire sans le consentement des provinces.
    C'est la carte maîtresse que jouent les provinces. Pour reprendre l'analogie avec le baseball, vous pouvez allez jusqu'au premier but tout seul, mais vous ne pouvez atteindre le deuxième sans l'aide des provinces. La question est donc de savoir quand faire intervenir les provinces. Je pense qu'il faut les faire intervenir une fois que le processus est lancé. D'autres peuvent être d'un avis différent.

[Français]

    Selon vous, pourrait-on s'inspirer de modèles de sénat existant ailleurs dans le monde? Existe-t-il un modèle quelque part qui vous semble davantage intéressant? Avez-vous des suggestions à nous faire?

[Traduction]

    À mon sens, le Sénat australien est un assez bon modèle, du point de vue électoral.
    À mon avis, le modèle américain est moins bon, ne serait-ce que parce qu'il adhère très rigidement au principe de la représentation égale de chaque État. Je ne pense pas que cela fonctionne au Canada. Et deuxièmement, du fait que les Américains n'élisent qu'un sénateur à la fois, il n'y a pas la possibilité d'avoir un mode de scrutin plus créatif.
    Je pense donc que l'exemple australien est assez convaincant, du point de vue du mode de scrutin et de la création d'un Sénat qui est dynamique mais sans drainer la vigueur du gouvernement national.
    La différence — et elle est importante — c'est que les États ont un rôle beaucoup moindre dans la vie australienne que les provinces au Canada, et nous devons nous adapter à la réalité de la situation canadienne.
    Il n'existe donc pas de modèle parfait, mais nous pouvons tirer quelques leçons.

  (1710)  

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Hubbard.
    J'ai écouté avec intérêt, mais juste pour récapituler, vous êtes fortement partisan d'un Sénat élu. Et vous ne pensez pas qu'il devrait y avoir des circonscriptions dans les provinces, pour vous chaque sénateur d'une province représenterait toute la province et non une certaine partie de la province.
    Vous semblez dire que les élections sénatoriales pourraient devenir un problème pour les députés, du fait que le sénateur pourrait devenir plus important que le député.
    Vous semblez penser que nous pouvons réformer le Sénat graduellement. Les Américains ont deux sénateurs pour chaque État, qu'il s'agisse de la Californie ou de l'Alaska, et cela fait une grande différence du point de vue du processus démocratique. Chaque État a deux membres au Sénat des États-Unis, et pourtant je n'entends guère de plaintes aux États-Unis du fait de ce type de représentation. Un sénateur aux États-Unis est un personnage très important.
    Pour ce qui est des candidats de votre propre province de l'Alberta — disons qu'il nous faut trois sénateurs albertains — les candidats devraient-ils être approuvés par leur parti politique? Faudrait-il avoir trois candidats du Parti conservateur et trois candidats de chacun des autres partis, ou bien tous devraient-ils simplement se présenter comme simples citoyens? Est-il nécessaire de définir qui sont les candidats? Est-ce que le premier ministre ou le chef de l'opposition devraient indiquer lesquels sont leurs candidats sur le bulletin de vote en Alberta?
    Avez-vous un avis à ce sujet?
    C'est une question difficile. Permettez-moi de commencer avec celle que je trouve la plus importante — je ne dis pas que les autres ne le sont pas — à savoir la taille appropriée des districts sénatoriaux.
    Ma crainte avec les districts représentés par un seul sénateur est que cela ne permet guère au système électoral de rompre l'hégémonie des grands blocs.
    Par exemple, si l'Alberta avait six districts sénatoriaux, chacun choisissant un sénateur, nous aurions cette représentation partisane uniforme de l'Alberta que nous voyons à la Chambre des communes.
    Si nous avions trois districts ou trois sénateurs par district, selon le système électoral proposé ici, vous auriez la garantie que ces trois sénateurs élus n'appartiendraient pas tous au même parti, à moins que l'un ait une majorité totalement écrasante, ce qui n'est pas le cas en Alberta.
    Ainsi donc, la taille de la circonscription est très importante, et c'est ce qui n'a pas été déterminé, selon ma lecture, par le projet de loi C-20.
    Est-ce que les candidats devraient avoir l'aval d'un parti? Lorsque les citoyens de l'Alberta vont voter, devraient-ils savoir que le candidat X représente le Parti conservateur et a l'aval du premier ministre?
    Il est quasiment impossible d'exclure les partis d'une élection. Nous le savons. Lors des élections a la Chambre des communes, avant les années 60, si je ne m'abuse, les étiquettes partisanes ne figuraient pas sur les bulletins de vote. Nous avons fini par indiquer l'étiquette sur les bulletins de vote parce que nous reconnaissions que l'appartenance partisane constitue un indice primordial pour les électeurs.
    Je ne vous demande pas ce qui existait, mais ce que vous préconisez. Vous êtes ici pour nous faire des propositions. Préférez-vous que le candidat se présente comme indépendant ou plutôt comme membre d'un parti?
    Je me satisferais très bien d'un bulletin de vote indiquant uniquement le nom et, si nécessaire, la profession, mais sans étiquette partisane.

  (1715)  

    S'il y avait trois sièges vacants en Alberta et, disons, une douzaine de très bons candidats dans certaines petites agglomérations, comme celles évoquées par M. Angus — mettons qu'il y en ait de Calgary, d'Edmonton, et de Cold Lake ou d'Innisfail — quelle possibilité d'être élus auraient ceux des petites localités? Est-ce que le candidat Joe d'Innisfail pourrait lever 1 million de dollars pour mener campagne dans tout l'Alberta afin de devenir sénateur et représenter tous les bons citoyens d'Innisfail ou de Cold Lake?
    Il ne fait aucun doute que lors d'élections à grande échelle, comme ce serait la cas pour le Sénat, il est relativement difficile pour les personnes venant de petites collectivités de se faire élire. Je pense que c'est vrai. Je ne suis pas sûr que l'habitant de Cold Lake soit nécessairement mieux placé aujourd'hui pour être nommé au Sénat que d'autres personnes de Calgary ou d'Edmonton, aux yeux du premier ministre. Il n'y a aucune garantie de cela. Nous ne savons simplement pas.
    Ce sera votre dernière question.
    Cela a été le cas dans le passé. Nous avons des gens du Nord, des représentants des premières nations, des femmes. Les femmes ont généralement grande difficulté à se faire élire dans ce pays.
    Je connais votre position, vous l'avez bien indiquée. Mais je pense que d'une façon ou d'une autre nous allons devoir trouver quelque chose d'intermédiaire, afin que les citoyens du pays soient représentés à ce titre, que chaque personne de ce pays et chaque groupe de ce pays — les premières nations, par exemple... Dans votre provinces de l'Alberta, les Blood, par exemple, comptent 10 000 habitants dans certaines de leurs collectivités. Comment pourraient-ils se faire élire en Alberta? Je ne pense pas que nous ayons jamais eu en Saskatchewan un changement démographique dans un groupe.
    Cependant, quel que soit l'aboutissement de ce projet de loi, madame la présidente, j'espère que le système reflétera ce qui est le mieux pour tous les habitants du pays, sans que certains dominent à cause du groupe démographique particulier qu'ils représentent.
    Merci.
    Je serai très bref. Je réalise que le temps nous est compté.
    Il ne faut pas perdre de vue que la représentation au Sénat est complémentaire de la représentation à la Chambre des communes, et il faut donc considérer ce qui se passe au niveau des deux chambres. Ce serait une erreur que de considérer le Sénat isolément, sans le mettre en parallèle avec le fonctionnement de la Chambre des communes, les atouts et les faiblesses du système de la Chambre des communes.
    Merci, monsieur Gibbins.
    Je reviens à M. Reid.
    Monsieur Gibbins, un sujet qui a été évoqué plus tôt dans la discussion et qui m'a surpris, est celui de la taille des districts. J'avais tout simplement tenu pour acquis que la province est le district. Je me fondais sur le paragraphe 12.(1) du projet de loi qui dit :
Lors de la prise de la proclamation visée à l'article 57 de la Loi électorale du Canada pour déclencher une élection fédérale, le gouverneur en conseil peut prendre un décret en vue de la consultation des électeurs d'une ou de plusieurs provinces relativement à la nomination de sénateurs représentant celles-ci.
    Ce n'est peut-être pas aussi clair que je pensais. Serait-il préférable, à votre avis de spécifier dans une autre disposition que les districts sénatoriaux coïncident avec le territoire des provinces?
    Je pense que c'est un point qu'il faudra régler, et peut-être régler plus explicitement. Il faut se demander si la province est le contenant approprié. Le cas le plus difficile est celui de l'Ontario. Il faut se demander s'il ne vaudrait pas mieux découper cette province d'une manière ou d'une autre.
    Je pense que c'est un débat qu'il faudra tenir.
    Je suis député ontarien moi-même et dans la toute première question qui vous a été posée aujourd'hui, Mme Folco a exprimé avec beaucoup d'éloquence sa crainte que l'Ontario rural ne reste à l'écart, étant donné le poids démographique de Toronto.
    Je ferais valoir l'évidence, à savoir que si vous voulez donner une valeur égale à chaque vote, un poids égal à tous les votes, vous ne pouvez découper l'Ontario en districts — que ce soit deux, trois, quatre ou cinq — sans pénaliser les régions rurales car leur population est moindre. Je dis cela comme représentant d'une municipalité rurale de l'Ontario. La plus grande localité de ma circonscription compte moins de 10 000 habitants, et nous sommes disséminés sur une superficie de la taille de l'État du Connecticut. Donc, tout en étant très conscient des préoccupations des ruraux, croyez-moi, je ne vois pas comment on pourrait surmonter cette réalité élémentaire.
    Ce qui me frappe, c'est que plus les districts deviennent petits — si vous avez quatre districts en Ontario au lieu d'un seul grand — vous commencez à perdre la valeur de la proportionnalité. Autrement dit, un sénateur pourrait se voir élu pour la seule raison qu'il plaît aux électeurs d'une localité particulière. Dans certains cas il pourra s'agir d'un candidat qui attire les électeurs ruraux. Dans d'autres cas, il pourra s'agir de quelqu'un qui ne représente qu'une autre minorité, mettons les franco-ontariens, les Autochtones, tout ce que vous voudrez. Comme c'est le cas en Australie, il pourrait s'agir d'un représentant du mouvement écologiste. Le Parti vert a pas mal d'élus au Sénat australien, alors qu'il est entièrement exclu de la Chambre basse.
    Ce que j'ai dit est davantage un commentaire qu'une question, mais je vous laissez réagir quand même.

  (1720)  

    Mon interprétation du fonctionnement de ce système électoral est que si vous aviez un scrutin préférentiel et que tous les 24 sénateurs étaient élus à la fois, un candidat serait assuré d'être élu en ne recevant qu'un peu plus de 3 p. 100 des voix. C'est un seuil très bas, et cela n'évincerait pas les petites collectivités.
    Les petites collectivités auraient plus de difficulté si vous augmentiez ce seuil en faisant élire un plus petit nombre de sénateurs. C'est comme le problème des systèmes de représentation proportionnelle. À combien allez-vous fixer le seuil? Voulez-vous le fixer de manière à ce que l'on puisse être élu à un siège ontarien au Sénat avec 3 p. 100 des voix? Ou bien souhaitez-vous un seuil un peu plus élevé?
    Tout dépend de votre définition de la démocratie. Voulez-vous que ces seuils soient radicalement différents à travers le pays, de façon à ce que l'on puisse être élu comme candidat autochtone en Ontario avec 3 p. 100 des voix, alors qu'en Saskatchewan il faudra de 12 à 14 p. 100 des voix?
    Ce sont là les détails de conception auxquels le projet de loi C-20 fait allusion mais sans les expliquer pleinement. À mon avis, ce sont des décisions importantes à prendre. Elles ne sont pas secondaires.
    Merci, monsieur Gibbins.
    Madame Folco, vous avez droit au dernier tour de cinq minutes.
    Deux choses, monsieur Gibbins. Premièrement, vous avez dit tout à l'heure qu'il fallait lancer le processus et que nous pourrons l'améliorer au fur et à mesure. Je suis d'accord avec cela, mais si je regarde ce que fait ici notre comité législatif, nous lançons précisément le processus. De fait, le projet de loi que nous examinons est le premier pas dans ce processus de réforme. Mais notre tâche en tant que députés est d'examiner le projet de loi et d'améliorer le processus déjà à notre niveau. C'est pourquoi nous nous penchons sur les détails du projet de loi. Je vois bien que ce que nous faisons correspond au genre de réflexion que vous nous avez exposé, du moins pour ce qui est des grandes lignes, en quelque sorte. Lors de notre réflexion, nous devons prendre en considération toutes les questions qui ont été posées aujourd'hui et les jours précédents.
    On a beaucoup parlé de la façon de devenir sénateur. Mais une fois que vous êtes sénateur, une fois que le nouveau Sénat est élu, ou quelle que soit la méthode de sélection, et que tous les sénateurs sont assemblés dans cette nouvelle chambre rouge, quelle est leur relation avec la Chambre des communes? Comment éviter d'avoir deux groupes, investis des mêmes pouvoirs, qui rivalisent entre eux? Quels pouvoirs donnez-vous aux uns que vous ne donnez pas aux autres? L'un doit nécessairement avoir préséance sur l'autre, me semble-t-il. L'un doit avoir préséance sur l'autre, sinon on a une impasse. C'est l'un des problèmes que les États-Unis rencontrent dans leur système législatif.
    Constatant qu'il n'y a rien dans le projet de loi C-20 qui nous donne une indication de ce que le gouvernement conservateur veut faire à cet égard, avez-vous quelques idées sur la relation entre ce nouveau Sénat et la Chambre des communes?

  (1725)  

    À l'heure actuelle, le Sénat du Canada jouit d'un veto absolu sur toutes les formes de législation, à l'exception des modifications à la Constitution visant à modifier le Sénat.
    Mais à cause du respect pour la Chambre des communes, il ne l'a jamais exercé — du moins pas de mon vivant, disons les choses ainsi.
    Il s'en est rapproché.
    Oui.
    Il s'en est approché de près concernant le libre-échange, la TPS et d'autres lois.
    J'ai en tête le danger de sombrer dans une telle confrontation avec le Sénat actuel, en raison de la distribution partisane très différente dans les deux chambres. Je pense donc qu'il y a quelques risques réels.
    Si je pouvais dicter ma volonté, j'aimerais que la Chambre des communes soit élue sur la base de la représentation selon la population, afin de se débarrasser des distorsions que nous avons actuellement du fait que nous voulons assurer à la Chambre une représentation régionale. J'aimerais un mécanisme de départage donnant la prépondérance à la Chambre des communes, car je pense que celle-ci reflète l'expression la plus claire de la volonté démocratique du peuple. Cela doit être assuré.
    Cela suppose une modification du statu quo. On croit aujourd'hui que le Sénat n'a pas de pouvoir et pas de légitimité. Il n'a pas de légitimité, mais il possède le pouvoir. J'aimerais renforcer la légitimité du Sénat mais limiter son pouvoir. Je pense que c'est possible. Il existe des mécanismes pour cela. Je ne veux pas exclure toute possibilité d'impasse, de confrontation et ainsi de suite, car le gouvernement démocratique n'est pas toujours libre de confusion. Les choses ne sont pas toujours simples, mais il faut parvenir à s'y retrouver.
    J'en reviens aux responsabilités de votre comité, telles que je les conçois. Les questions qui m'ont été posées aujourd'hui me paraissent extraordinairement importantes et réfléchies. Ce ne sont pas des questions triviales que les gens soulèvent. Je n'aimerais pas que le comité arrête la discussion à ce stade, plutôt que de nous pousser, nous, les Canadiens, le gouvernement du jour, qui vous voudrez — à commencer à réfléchir sérieusement à ces questions.
    Je ne sais pas comment vous pouvez le faire dans le cadre de la procédure parlementaire. Mais plutôt que d'appliquer les freins, je préférerais que ces questions difficiles soient mises sur le tapis et que l'on réfléchisse à un mécanisme permettant d'y répondre. Vu que ce sont des questions importantes, les Canadiens jugeraient que vous avez négligé vos responsabilités si vous fonciez tête baissée, sans poser toutes ces questions et sans réfléchir à un mécanisme permettant d'y répondre. Toutes ces réponses ne se trouvent pas dans le projet de loi C-20 lui-même.
    Ce sera le mot de conclusion.
    Je veux remercier M. Gibbins de nous avoir fait part de ses idées. Je sais que les membres du comité vont passer à la vitesse supérieure pour digérer votre apport. Merci infiniment d'être venu.
    Nous nous revoyons dans deux semaines. Merci.
    La séance est levée.