Passer au contenu
Début du contenu

TRAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain







CANADA

Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités


NUMÉRO 044 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 18 avril 2007

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Bonjour tout le monde et bienvenue à cette 44e réunion du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités.
    Conformément au paragraphe 108(2), nous avons à l'ordre du jour une étude sur la sécurité ferroviaire. Nous recevons aujourd'hui M. Jean-Guy Desrosiers, qui est maire de Montmagny, et que je tiens à remercier pour son aide, M. Donald Anderson, le substitut du directeur canadien à la législation des Travailleurs unis des transports, et M. John Holliday, président suppléant du même syndicat des Travailleurs unis des transports.
    Selon notre façon de travailler habituelle, nous donnons à chaque témoin la possibilité de nous faire un exposé d'environ sept minutes. Après les exposés des témoins, nous passons aux questions des membres du comité. Je ne sais pas si vous vous êtes concertés pour voir qui allait commencer.
    Monsieur Anderson, vous avez la parole.
    Les objectifs de la Loi sur la sécurité ferroviaire sont les suivants:
pourvoir à la sécurité du public et du personnel dans le cadre de l'exploitation des chemins de fer et à la protection des biens et de l'environnement, et en faire la promotion;
encourager la collaboration et la participation des parties intéressées à l'amélioration de la sécurité ferroviaire;
reconnaître la responsabilité des compagnies de chemin de fer en ce qui a trait à la sécurité de leurs activités; et
favoriser la mise en place d'outils de réglementation modernes, flexibles et efficaces dans le but d'assurer l'amélioration continue de la sécurité ferroviaire.
    Le rapport Foisy disait ceci:
La sécurité du public est une responsabilité qui incombe au gouvernement. Il ne saurait laisser des questions aussi importantes entre les mains des parties prenantes.
    Les négociations entre les dites parties sont par conséquent axées pour l'essentiel sur des objectifs économiques. Même si certains éléments concernant la sécurité sont abordés à la table de négociation, il n'en demeure pas moins que ces questions peuvent, pour des raisons économiques, être mises de côté à n'importe quel moment. Notre syndicat part du principe que le gouvernement ne peut se permettre de se dessaisir du dossier de la sécurité des travailleurs et du public. En effet, il abrogerait ainsi toute responsabilité en matière de sécurité du public. Les représentants des syndicats de cheminots sont parties prenantes à un processus réglementaire en matière de sécurité, mais à un niveau moindre, et la direction des chemins de fer n'accorde guère de poids à leur participation. La Loi sur la sécurité ferroviaire ne prévoit en effet qu'une simple consultation.
    La fréquence des inspections, visuelles et techniques, aurait dû être intégrée aux négociations afin de pouvoir renforcer un mécanisme infaillible. Les inspections visuelles sont moins nombreuses en raison des réductions apportées par la réglementation en ce qui concerne les heures de travail, l'effectif, l'endroit où s'effectue l'inspection des wagons, le nombre d'inspecteurs accrédités, ainsi qu'en raison de l'augmentation de la longueur des convois. À l'heure actuelle, les convois ont en moyenne déjà près de trois kilomètres de long, et on peut même raisonnablement affirmer qu'il y en a qui ont entre trois, quatre et cinq kilomètres de long.
    Plusieurs enquêtes et autres commissions ont déjà produit à ce sujet de copieux rapports. La déréglementation a nui aux travailleurs, au grand public et à l'environnement, étant donné que nous n'avons jamais tiré la leçon de nos erreurs en donnant suite aux recommandations.
    Si l'état des voies est à l'origine de graves problèmes de sécurité, c'est semble-t-il en grande partie une conséquence directe de la situation financière des compagnies de chemin de fer, de la durée de vie utile des rails, des dépenses consacrées aux voies par rapport à celles qui vont au matériel roulant, des différences qui existent entre les mécanismes comptables, de la structure fiscale canadienne, de la dépréciation du matériel ferroviaire, du capital disponible et de l'utilisation de locomotives diesel à six essieux.
    La loi canadienne semble s'appuyer à la fois sur les inspections et sur la sensibilisation des compagnies à la sécurité par le recours aux comités sur la santé et la sécurité, mais ce n'est pas le cas. Il faudrait plutôt que la loi soit axée sur la recherche de solutions au niveau de la compagnie par le biais d'une participation paritaire du syndicat et de la compagnie, en conférant toutefois au gouvernement des pouvoirs d'exécution résiduels suffisamment contraignants. À l'heure actuelle, la structure est davantage antagoniste, en ce sens qu'elle oppose l'employeur au gouvernement ainsi qu'aux travailleurs.
    Si on se demande pourquoi il y a tellement de déraillements et tellement d'accidents, il faut songer à un certain nombre de facteurs: la configuration géographique particulière du Canada, les intervalles d'entretien et de maintenance plus longs et tout ce que cela implique, les changements technologiques, l'utilisation de certaines technologies, les changements apportés aux méthodes et aux procédures en matière d'entretien et de maintenance, la réduction des effectifs, ainsi que les principes de gestion de l'entreprise. Travail Canada ainsi que la Direction de la santé et de la sécurité au travail ont la responsabilité des employés qui ne sont pas des cheminots. Il s'agit en l'occurrence de tous les employés qui s'occupent de l'entretien des voies, qui travaillent dans les ateliers, et qui sont, entre autres, chargés de l'entretien des tunnels et des ponts.
     Il faut que l'employeur prenne les mesures nécessaires pour que les incidents ne se reproduisent pas. Travail Canada intervient par ses enquêtes, par ses règlements en ce qui concerne les rapports d'accidents, par la responsabilité qu'il impose aux employeurs qui sont obligés de faire enquête et de faire rapport en cas d'accident. Les compagnies de chemin de fer semblent avoir leurs propres systèmes d'enquête et de rapport en cas d'accident.
    Il y a d'autres facteurs également qui doivent être pris en compte: la négligence des employés, les défaillances mécaniques, le bris des coussinets d'essieux, les bris de rails, les affaissements de ballast, les défectuosités d'aiguillage, les accidents qui se produisent lorsqu'un travailleur tombe d'un convoi, ce qui est associé aux accidents, les blessures aux mains et aux pieds, les chutes de toutes sortes ainsi que les frais d'indemnisation divers.

  (1540)  

    Il faut revoir toutes les règles d'exploitation ferroviaire au Canada. À tout le moins, c'est là le désir qui semble se manifester.
    Je voudrais également dire que Transports Canada n'impose pas d'amendes pour faire respecter ses règlements. Nous aimerions que les infractions soient sanctionnées par des amendes qui soient justes.
    L'effet néfaste de la déréglementation des processus d'inspection est dû au fait qu'il s'agit davantage d'un contrôle que d'une véritable application de la réglementation. En ce qui concerne la crédibilité des procédures d'inspection, je pense que pour améliorer la situation, il faudrait que Transports Canada ait davantage d'inspecteurs qui, sur le terrain, iraient inspecter l'état des voies, évalueraient, contrôleraient et étalonneraient la qualité des voies. À l'heure actuelle, les compagnies ferroviaires semblent créer leurs propres normes pour ce qui est de l'intégrité des voies et de leur surveillance. Nous aimerions que les voies soient inspectées à fond et que la voie principale soit photographiée à intervalles plus réguliers.
    S'agissant des procédures d'inspection des wagons, il faudrait contrôler, évaluer et étalonner les critères d'efficacité, les déficiences et les facteurs de risque. Il faudrait également procéder à des inspections au niveau des faisceaux de réception, sur des sites d'inspection accrédités.
    Il existe actuellement un comité consultatif pour la sécurité ferroviaire. Il s'agit d'un comité tripartite comprenant des représentants de toutes les parties prenantes — les compagnies de chemin de fer canadiennes — les syndicats intéressés ainsi que l'Association des chemins de fer du Canada. À l'origine, ce comité était constitué en groupes de travail qui étaient chacun chargés d'un dossier comme la divulgation des renseignements concernant les accidents, les critères en matière d'inspection des voies, l'entretien des dispositifs de signalisation, la détection des glissements de terrain et l'élaboration de normes pour les emprises ferroviaires. Comme je l'ai déjà dit, on ne demande la position du syndicat qu'à titre consultatif, et sans lui accorder guère de poids.
    En matière de sécurité ferroviaire, ce sont les travailleurs qui sont notre second souci. Les comités pour la sécurité doivent bien connaître les programmes de réadaptation et de formation. En outre, les niveaux de formation de nos équipages sont moins élevés qu'auparavant, et nous aimerions qu'on fasse diligence. C'est probablement dû à la réduction des effectifs, mais il faut absolument les remettre au travail.
    Je vais maintenant céder le micro à John.
    Bonjour et merci de m'avoir invité.
    Je m'appelle John Holliday et je travaille aux chemins de fer à mi-temps depuis l'âge de 15 ans et à plein temps depuis l'âge de 18 ans. Cela fait 26 ans que je travaille aux chemins de fer. Mon père a travaillé pour la Pacific Great Eastern et la BCR pendant 32 ans et, avant cela, il avait été pendant deux ans machiniste de locomotive à vapeur au Canadien Pacifique. Il est mort d'une insuffisance cardiaque à l'âge de 53 ans.
    Lorsqu'on travaille sur un convoi de marchandises en commun ou lorsqu'on est sur la liste de réserve, cela ne ressemble pas du tout à un boulot de type 9 à 5 du lundi au vendredi. On travaille la nuit, le jour, en fin d'après-midi ou tôt le matin, et tout le rythme circadien est perturbé. Lorsqu'on travaille en relève interrompue, on mange et on dort à des heures irrégulières. C'est un peu comme si on passe au mélangeur un ensemble de périodes de repos et de travail et qu'on met toute la bouillie sur une assiette. Tout cela finit par vous jouer dans la tête — vous m'excuserez si je parle comme un travailleur — et on a des sautes d'humeur, on devient agressif. Le système digestif en souffre, l'estomac et l'intestin. Souvent, les travailleurs du rail ont des problèmes d'estomac. Moi-même, j'ai une petite hernie hiatale et je fais de l'hyperacidité gastrique, ce qui m'oblige à prendre des médicaments. Mais c'est surtout le coeur qui est affecté. On a des palpitations. On ne compte plus le nombre de travailleurs du rail qui sont morts d'une insuffisance cardiaque — non pas d'une crise cardiaque mais simplement d'une insuffisance cardiaque.
    Il arrive que, lorsque midi sonne, je ne sais plus s'il est l'heure de manger, de dormir, de couler un bronze ou de remonter ma montre. Je sais que vous travaillez à Ottawa et un certain nombre d'entre vous souffrent du décalage horaire, mais multipliez cela par dix et divisez par trois, ajoutez un préavis de deux heures seulement et puis vous allez travailler. Cela vous donnera une petite idée de ce qu'est notre vie aux chemins de fer.
    Le problème que pose la réglementation fédérale sur les heures de travail et de repos, c'est qu'elle n'est pas suffisamment complète. À l'heure actuelle, le CN voudrait que nous acceptions des postes de 12 heures de travail, six jours par semaine. Voilà le genre de contraintes avec lesquelles nous devons composer aujourd'hui.

  (1545)  

    Un rappel au Règlement, monsieur le président: comme vous le savez, le comité est convenu de ne pas aborder de questions directement liées aux négociations syndicales-patronales qui ont lieu actuellement.
    Je voulais vous mettre en garde à ce sujet puisque, en raison du caractère délicat de la chose, nous sommes en effet convenus de ne pas parler des questions qui entourent ce conflit de travail.
    Fort bien, j'ai compris et je vous remercie.
    Un autre problème associé aux chemins de fer est le syndrome du stress post-traumatique. Je peux vous en donner des exemples, mais nous y viendrons peut-être plus tard.
    Il faut que je vous dise que je travaillais auparavant pour BC Rail. Depuis que le CN a repris BC Rail, les normes de sécurité, les normes d'exploitation et les normes de maintenance sur la voie, tout comme celles qui concernent le matériel, ont grandement diminué. Lorsque nous sommes sur les voies, nous avons le droit — et d'ailleurs, la loi l'exige — d'être adéquatement supervisés. Ce n'est pas le cas avec le CN. On a beau téléphoner à un superviseur, lui laisser un message dans l'espoir qu'il nous rappelle, neuf fois sur dix il ne nous rappelle pas.
    À mon avis, les nouveaux employés sont insuffisamment formés. Les compagnies de chemin de fer ont, depuis toujours, tué beaucoup de gens, et cela souvent pour engraisser leurs bénéfices. Ce que je dis là n'est ni diffamatoire, ni scandaleux. C'est une réalité qui remonte à l'époque de la construction du chemin de fer. On peut lire dans les manuels que le chemin de fer du Canadian Pacifique a assassiné des groupes de travailleurs chinois dans le canyon du Fraser. On dit même qu'il y a un corps d'enterré à chaque mille de voie ferrée du CP. Le budget de tout grand projet de construction a son lot de victimes. Je puis vous dire que lorsque BC Rail a construit la ligne secondaire de Tumbler Ridge, il avait prévu trois morts à son budget. Mais fort heureusement, il n'y a pas eu de victimes cette fois-là.
    Plus récemment encore, le 14 mai 2003, deux hommes sont morts dans l'effondrement d'un pont à McBride. L'affaire s'est retrouvée devant les tribunaux, le CN a plaidé coupable et il a payé l'amende. C'est le prix à payer pour faire des affaires.
    Deux autres encore sont morts le 29 juin 2006 près de Lillooet, lorsqu'un train s'était emballé. Un troisième a été grièvement blessé. C'étaient tous les trois des amis à moi. La locomotive en cause aurait dû être envoyée à la casse au lieu d'être conservée en service, et pire encore être mise en service sur une grande ligne à forte pente.
    C'est le cas des cheminots qui m'intéresse. Par contre, depuis la déréglementation des chemins de fer, du transport aérien et du transport routier, un certain nombre de dénominateurs communs ont surgi. Ainsi, Air Canada se prépare à faire assurer l'entretien et la réparation de ses appareils au Guatemala. Je ne sais pas par contre si les normes sont les mêmes en Amérique du Sud qu'au Canada.
    Je n'ai rien à reprocher au CN. Je ne lui en veux pas de faire des bénéfices. Mais je voudrais néanmoins répéter que BC Rail utilisait des normes plus rigoureuses en matière de sécurité. Ses normes étaient plus rigoureuses à la fois pour le matériel et pour les voies. BC Rail faisait de la prévention au lieu de se contenter de réagir. Nous avions un conseiller syndical en matière de sécurité qui était là à plein temps. Nous avions un comité spécial pour les déraillements. Nous avions un comité des équipages de locomotives qui étudiait des questions comme la fatigue en milieu de travail. La NASA et Boeing ont conduit d'excellentes études à ce sujet, et ces comités d'équipage ont fait beaucoup de recherche.
    Nous avions à cette époque des essuie-glaces fonctionnels. Maintenant, on dit à la blague, qu'avec le CN, la seule raison pour laquelle la compagnie amène ses locomotives à Vancouver, c'est pour en laver les vitres. Je ne plaisante pas. Les vitres sont crasseuses. Lorsqu'il y a du soleil, on ne peut pas voir au travers. Or, il est important de voir de l'autre côté de la vitre, il est important que les essuie-glaces de la locomotive fonctionnent. Je pourrais m'étendre bien plus longtemps là-dessus, mais je vais m'arrêter là.
    Du temps de BC Rail, nous avions également des écouteurs avec micros intégrés, ce qui nous permettait de communiquer avec le chef de train ou le mécanicien.
    Il y avait toutes sortes de choses, et j'ai ici des lettres. Vous voudrez bien m'excuser si elles ne sont pas en français, mais je ne savais pas. J'espère que nous pourrons les faire traduire.
    Autre chose encore, les locomotives étaient dotées de feux latéraux. Ils avaient été installés suite à l'enquête du coroner qui avait eu lieu en 1981, lorsqu'un convoi avait percuté une coulée de roches juste au sud de Lillooet et que la locomotive s'était abîmée dans le lac Seton. Le corps du serre-freins n'avait jamais été retrouvé.
    Depuis l'acquisition par le CN, nous avons constaté une multiplication de problèmes avec le matériel, par exemple des échelles instables ou mal fixées sur les côtés des wagons. C'est ce qu'on appelle les poignées, et le premier échelon s'appelle un étrier. Il n'est pas rare que les poignées et les étriers soient branlants. Or, il s'agit d'éléments importants pour la sécurité. Lorsqu'on doit grimper sur un wagon en mouvement, je ne tiens pas à ce qu'une poignée ou un étrier cède. Personne ne veut tomber sous les roues d'un wagon en marche.
    À l'ancien BC Rail, nous avons le sentiment qu'il faut des lois et des règlements adéquats pour les chemins de fer, les avions et les camions afin de protéger les salariés et le grand public, mais également l'environnement.
    Merci.

  (1550)  

    Je vous remercie.
    Monsieur Desrosiers.

[Français]

    Bonjour, monsieur le président, madame, messieurs.
    Je suis ici à titre de témoin d'événements, de catastrophes, d'accidents ou d'incidents. Je vous laisse le soin de décider quel vocabulaire il faut utiliser dans chacun des cas.
    Pour la deuxième fois en trois ans, le 7 janvier 2007, 24 wagons de marchandises, dont quatre contenaient de l'acide sulfurique, ont quitté leurs rails près de la gare à Montmagny. Bien qu'il n'y ait pas eu de déversement de matières dangereuses, quelques wagons ont terminé leur course tout près des résidences.
    Vous verrez sur la photo de la couverture qu'un des wagons, qui a été enlevé durant la nuit, était sur la galerie de la maison blanche près de l'ancienne gare, là où ont lieu de nombreuses activités d'animation, de services, de loisirs, de la culture, de la vie communautaire de Montmagny.
    Malgré le fait que le pire ait été évité une fois de plus et qu'il n'y ait eu aucun blessé, les résidants du secteur sont sérieusement inquiets. Même si les causes du déraillement sont toujours inconnues, la vitesse des trains est montrée du doigt et pour cause, puisque plusieurs catastrophes ont marqué l'histoire du chemin de fer de Montmagny au fil des ans.
    Je vais vous faire l'historique. Étant donné les multiples incidents survenus, il n'est pas étonnant que les citoyens de Montmagny soient inquiets et qu'ils s'attendent à ce que la requête de la ville pour obtenir une réduction de la vitesse des convois à 64 km/h de façon permanente soit acceptée par le CN ou imposée au CN. Ce sera plus difficile de la faire accepter.
    Le 6 juillet 1943, deux trains sont entrés en collision sur le pont du bras Saint-Nicolas. Il faut dire que la voie ferrée passe au-dessus de deux rivières qui traversent la ville de Montmagny. Un mécanicien du train de marchandises a perdu la vie lors de cet accident et trois employés du CN ont été sérieusement blessés. Une dizaine d'autres employés ont subi quelques contusions qui n'ont toutefois pas nécessité leur transport à l'hôpital.
    Le 6 avril 1954, un train de passagers s'engage à pleine vitesse sur une voie mal aiguillée, déraille et démolit l'entrepôt de marchandises. L'accident s'est produit tout près de la gare — encore une fois, c'est toujours là — et a fait quatre morts, soit deux conducteurs et deux passagers clandestins. Vingt caisses de dynamite étaient à bord, mais elles n'ont pas explosé. On a été chanceux. Décrit par les employés comme l'un des accidents les plus graves survenus au Canada et aux États-Unis, le désastre aurait été causé par l'aiguillage, la voie d'évitement étant restée ouverte.
    À l'automne 1961, un train est entré en collision avec une voiture, causant la mort de Lionel Paquet. Cet incident est survenu au passage à niveau situé sur la rue Saint-Pierre.
    Le 3 janvier 1963, Gaston Cloutier décède à la suite d'un accident de voiture au passage à niveau de l'avenue Saint-David.
    Le 1er novembre 1966, un accident de voiture au passage à niveau près de la manufacture Gérard Collin a causé la mort de quatre personnes, dont trois fillettes âgées de moins de 13 ans. Dans cet accident, l'absence de feux de signalisation est mise en cause, tout comme le fait que plusieurs trains étaient stationnés sur la voie d'évitement, ce qui a semé la confusion dans l'esprit du conducteur.
    Le 9 janvier 1969, un train quitte la voie principale pour s'engager sur une voie d'évitement et emboutit la quincaillerie d'Edouard Gendreau, causant des blessures à six personnes.
    Le 30 mars 1972, un employé du CN est blessé mortellement alors qu'il travaillait sur un wagon à quelques pas de la gare ou de la station.
    Le 13 mars 1983, les essieux et les roues d'un wagon se brisent près de la gare. Comme le train circulait à basse vitesse, cela n'a occasionné aucun déraillement.
    En février 1986, une roue défectueuse sur la septième voiture force l'arrêt de la circulation ferroviaire, mais n'occasionne pas de déraillement.
    En février 1995, à Saint-François, tout près de Montmagny, le wagon-lit à la queue du train déraille.
    Le 5 décembre 1996, en raison de problèmes de roue, un wagon déraille en face de la gare de Montmagny.
    En 1997, Gino Anctil meurt à la traverse de la rue Saint-Pierre à Montmagny.

  (1555)  

    Le 7 février 2004, un train de marchandises, parti d'Halifax pour se rendre à Charny, déraille sur le pont de fer de la rivière du Sud. C'est la deuxième rivière qu'on traverse lorsque l'on vient de l'est. L'accident est causé par une défectuosité d'un bogie, et 28 des 94 wagons du train ont déraillé et sont tombés sur la rivière gelée. Le convoi transportait deux wagons-citernes sous pression contenant du chlore. Heureusement, il n'y a pas eu de fuite de substances toxiques ni aucune perte de vie ou blessé. Outre l'interruption de la circulation ferroviaire, la passerelle le long du pont, construite en 1938 par la Ville de Montmagny, a été complètement détruite. Cela a été une catastrophe assez percutante.
    C'est le deuxième déraillement à Montmagny en moins de trois ans. La population ne se sent plus en sécurité face à des vitesses supérieures à 64 km/h. Outre de nombreux incidents survenus précédemment, les deux derniers déraillements majeurs survenus à Montmagny en trois ans, qui se sont produits sur un tronçon de 800 mètres, toujours le même, sur la même surface de terrain, ont grandement insécurisé les citoyens de la ville. D'ailleurs, ils ont formé un comité et ils ont pris l'initiative de faire signer une pétition, que vous trouverez en annexe, visant à faire réduire la vitesse des convois de façon permanente. Bien que le CN ne croie pas que la vitesse soit en cause, les citoyens de la Ville de Montmagny souhaitent, pour sécuriser ce secteur résidentiel, que la vitesse des convois soit réduite de façon permanente à 64 km/h, puisqu'il semble évident qu'un train qui circule à basse vitesse cause moins de dégâts en cas de déraillement.
    Je vais vous exposer des faits. Dans le rapport d'enquête ferroviaire numéro R04Q0006, rédigé par le Bureau de la sécurité des transports, le BST, à la suite du déraillement de 2004, on avance que les simulations NUCARS ont démontré que les wagons sont affectés par des mouvements de galop du bogie à des vitesses allant de 80 à 93 km/h. En 2004, le train roulait à 93 km/h, presque à la limite de la vitesse permise. Il aurait dû rouler à moins de 80 km/h. On a d'ailleurs révélé que tous les éléments susceptibles d'occasionner un mouvement de galop du bogie à haute vitesse étaient présents. C'est d'ailleurs un bogie défectueux qui a causé le déraillement.
    Lors du déraillement de 2007, le train de marchandises circulait à 82 km/h, alors que la vitesse maximale permise à Montmagny, selon le règlement sur la sécurité de la voie de Transports Canada, est de 96 km/h. Il roulait à une vitesse un peu inférieure, mais pour un service de marchandises, c'est excessivement rapide dans une zone urbaine.
    D'ailleurs, le train du CN circule déjà à basse vitesse dans certaines villes pour des raisons de sécurité, vu la proximité des résidences. Par exemple, le train roule à 56 km/h entre Charny et Saint-Apollinaire; il roule à 48 km/h dans la ville de Drummondville et à 56 km/h entre Beloeil et Montréal. Enfin, au moins trois passages à niveau où circulent plusieurs personnes, en auto, en moto, à vélo ou à pied, sont situés dans le secteur à risque.
    Je vais vous parler des mesures qui ont été prises. Le 30 décembre 2001, les résidants du quartier Saint-Mathieu, qui vivent en bordure de la voie ferrée, ont fait parvenir une lettre aux autorités municipales à la suite de démarches infructueuses auprès du CN. Dans leur lettre, ils déplorent la vitesse de plus en plus élevée des trains, la longueur des convois qui augmente, comme le disait monsieur tout à l'heure, le chargement de plus en plus lourd des wagons et les contenus, souvent, de plus en plus toxiques. Tout cela les fait craindre pour leur sécurité.
    En 2004 et 2005, à la suite du déraillement du 7 février 2004, des dizaines de lettres ont été acheminées au CN, lui demandant de réduire la vitesse des trains qui traversent la municipalité. Aucune réponse n'a été reçue dans ce dossier.
    En 2007, de nombreuses organisations donnent leur appui à la Ville de Montmagny sous forme de résolutions pour faire en sorte que la vitesse soit réduite de façon permanente. Parmi celles-ci, citons la Conférence régionale des élus de Chaudière-Appalaches, la MRC de Montmagny, la Conférence des préfets des MRC de la Chaudière-Appalaches, la Ville de Pohénégamook, la Municipalité de Rivière-Bleue, l'Union des municipalités du Québec, ainsi que le député fédéral de Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup.

  (1600)  

    En résumé, les citoyens sont inquiets à l'intérieur du périmètre d'environ 800 mètres où sont survenus les deux derniers incidents. La Ville de Montmagny agit à titre de porte-parole de ces citoyens qui, cette fois-ci, n'ont pas l'intention de baisser les bras. Trop d'accidents ou d'incidents majeurs y sont survenus au fil des ans pour que la population oublie le bilan des dernières années: 13 morts, 10 personnes blessées gravement, une dizaine de personnes ayant subi des contusions et 5 déraillements. Heureusement, ces 5 déraillements n'ont pas été accompagnés de déversements, de tragédies, de blessés ou de morts. Nous avons eu de la chance, mais nous ne voudrions pas qu'il y en ait un sixième ou un septième: ça pourrait en effet être le dernier.
    Par exemple, en 2007, le wagon s'est immobilisé à environ trois pieds de la fenêtre d'une maison. S'il avait contenu du chlore ou un autre produit toxique, ça aurait pu être une vraie catastrophe. Nous avons eu la chance de ne jamais subir de déversement. En effet, il aurait alors fallu évacuer l'ensemble du périmètre parce que c'est en plein centre-ville. La dernière fois, l'incident s'est produit en pleine nuit, un moment où il est très difficile d'évacuer les gens. On ne sait pas dans quelle situation ou état sont les résidants. Certains prennent des médicaments pour dormir, et on a de difficulté à les réveiller, d'autres ne veulent pas sortir de chez eux. On préfère ne pas penser à l'éventualité d'avoir à gérer une catastrophe de ce genre.
    C'est pourquoi la Ville de Montmagny réitère sa demande de réduire à 64 km/h la vitesse des convois qui circulent à l'intérieur de la ville. Dans l'entente portant sur la modification de la loi, elle recommande que des pénalités sévères telles que la réduction de la vitesse soient imposées au CN dans des cas d'accidents à répétition ayant lieu dans une même municipalité. C'est la deuxième fois en trois ans que ces incidents surviennent. C'est assez catastrophique. Il y en a eu 5 en 50 ans à peine, sans compter les autres accidents. Si un comité émettait un jugement sur les événements et imposait des pénalités au CN, ça obligerait ce dernier à être un peu plus prudent et vigilant en matière d'entretien.
    Je suis persuadé que les gens du CN préféreraient que ces accidents ne se produisent pas, mais ceux-ci sont parfois directement reliés à des travaux qui ne sont pas nécessairement faits de façon adéquate au niveau des tronçons. Auparavant, le CN pouvait épandre des herbicides, des pesticides et d'autres produits toxiques aux abords de la voie ferrée, mais il ne peut plus le faire. Par conséquent, la végétation s'accumule, le niveau d'eau augmente et cette eau s'infiltre dans le ballast sous la voie ferrée. Lorsqu'il y a à répétition des écarts de température, par exemple en janvier et en février, la géométrie de la voie ferrée subit des variations. Je ne suis pas un spécialiste, mais j'essaie d'analyser les choses. Ça finit par causer des accidents comme celui qui s'est produit dernièrement.
    Les gens du CN nous disent que le dernier accident était attribuable à l'aiguillage. Une pièce n'aurait pas été détectée par le système à ultrason, aurait été soulevée, puis arrachée par le convoi. Ils nous disent aussi qu'ils ont l'obligation de faire une vérification par ultrason chaque année, mais qu'ils en font huit pour le moment et qu'ils ont l'intention d'en faire dix. Or, même s'ils en ont fait une en décembre, il y a eu un déraillement en février. Ça n'a rien pour nous rassurer.
    Je passe maintenant à ma deuxième recommandation. Étant donné qu'aujourd'hui, le transport de marchandises se fait d'un grand centre à un autre, parce qu'il n'y a plus de distribution locale, nous recommandons que la possibilité de construire des voies de contournement pour ce type de convoi soit évaluée. Cette façon de procéder s'inscrirait dans la continuité de ce qui a été fait pour le transport routier avec l'arrivée des autoroutes. On n'utilise plus la route 132 ou la 138 — je parle ici du Québec — parce que le volume de transport ayant augmenté, on a maintenant des autoroutes.

  (1605)  

    Il me restait une page à lire, mais elle portait surtout sur l'histoire de l'arrivée du train et de la voie ferrée à Montmagny ainsi que du grand tronc. Vous pourrez la lire quand vous aurez le document en main. Vous trouverez à l'intérieur des annexes un plan des habitations situées en bordure de la voie ferrée. Vous pourrez en constater le nombre. Vous trouverez également les lettres d'appui et la pétition des citoyens. Ça représente l'ensemble de mon dossier. Si vous avez des questions à me poser, je suis prêt à vous répondre.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Bell.
    Messieurs, je vous remercie d'être venus.
    Je voudrais poser ma question au maire Desrosiers.
    J'ai moi aussi été maire d'une localité traversée par une voie ferrée, et je comprends donc parfaitement bon nombre de vos préoccupations. Nous avions également là-bas une industrie chimique qui présentait des dangers. La sécurité de la collectivité passe avant tout, mais je vais laisser à mes autres collègues le soin de vous poser des questions.
    Je voudrais surtout axer mon attention sur notre invité de la Colombie-Britannique et son collègue de l'Ontario.
    L'un des problèmes évoqués dans les deux rapports dont nous sommes saisis semble porter à penser que le CN — surtout dans ce cas-ci, et nous parlons de sécurité ferroviaire pour toutes les compagnies de chemin de fer — semble, depuis quelques années, et à tout le moins en 2005, avoir enregistré un nombre élevé d'accidents. Le rapport du vérificateur ainsi que l'évaluation de la gestion de la sécurité m'inquiètent en ce sens que les inspections de wagons ont révélé un pourcentage général de défectuosités en matière de sécurité qui atteint 20,6 p. 100, soit entre 20 et 21 p. 100.
    Cela veut dire en d'autres termes qu'un wagon sur cinq présente une défectuosité quelconque qui a une incidence sur la sécurité. Je sais bien que cela peut aller d'un étrier mal fixé à un triangle de frein défectueux, et que le niveau de gravité des défectuosités est variable, mais cela me semble néanmoins être un pourcentage élevé. Apparemment, d'une semaine à l'autre, le pourcentage de défectuosités peut passer de 13 à 27 p. 100. Près de 54 p. 100 des 232 locomotives qui ont été inspectées avaient fait l'objet d'un rapport de défectuosités concernant la sécurité, et le pourcentage hebdomadaire de défectuosités pour les locomotives est de 32 à 69 ou 70 p. 100, ce qui semble très élevé.
    Il y a d'autres recommandations également qui m'inquiètent, notamment celles qui semblent dire que dans certains cas, pour le matériel roulant — les wagons plutôt que les locomotives, dirais-je — ce sont les normes américaines qui sont en usage pour déterminer si ces wagons doivent être mis hors service pour réparation. Cela a également une incidence sur le pourcentage d'incidents rapportés dès lors qu'on utilise dans certains cas les normes américaines. Je ne sais pas si cela est dû au fait que la plus grande partie des cadres du CN viennent des États-Unis et sont donc enclins à utiliser les normes américaines pour les activités conduites au Canada, et plus encore en Colombie-Britannique, là où on trouve les pentes parmi les plus raides et les courbes parmi les plus difficiles de toute l'Amérique du Nord. J'aimerais beaucoup savoir si vous, les cheminots, l'avez remarqué.
    J'aimerais également rappeler le rapport de la commission Foisy qui a été constituée après la catastrophe de Hinton, et qui avait signalé que l'efficacité et la rigueur des interventions de la CCT et de Transports Canada sitôt un problème identifié étaient insuffisantes. J'imagine que cela a peut-être quelque chose à voir avec les niveaux d'effectifs, à moins que ce soit leurs normes qui soient insuffisantes.
    L'un de vous deux pourrait peut-être répondre à cela...
    Pour commencer, oui, les normes sont un peu moins rigoureuses qu'elles ne semblent l'être. Le type qui inspecte un wagon couvert s'appelle le mécanicien ou le wagonnier autorisé, et l'IWA est l'inspection des wagons autorisée.
    Pendant un petit bout de temps à BC Rail, il y avait des wagons qui faisaient la navette entre la mine Gibraltar et North Vancouver. Ces wagons ne faisaient jamais l'objet d'une inspection autorisée. Les roues n'étaient pas inspectées, ni les freins, par un mécanicien qualifié.
    Je ne suis pas certain de la différence qui existe à l'Association of American Railroads, l'AAR, pour ce qui est des normes. Je ne me souviens pas comment on les appelle au Canada, mais je suis certain qu'au Canada, on suit les normes américaines.
    Ce qui est également mauvais... J'ai entendu une histoire. J'ai essayé d'en obtenir confirmation avant de venir ici, mais je crois que cette histoire est vraie. Il y avait des wagonniers qui faisaient l'inspection d'un convoi qui allait quitter Prince George. Ils apposaient des étiquettes rouges sur certains wagons pour signaler les avaries, ces étiquettes étaient agrafées sur la paroi du wagon. À ce moment-là, un équipage ou des aiguilleurs venaient mettre les wagons ainsi étiquetés sur une voie de garage afin qu'ils puissent être réparés avant le départ du convoi. Les wagonniers inspectent le convoi de la tête à la queue d'un côté puis reviennent de l'autre côté et de temps en temps, ils agrafent une étiquette rouge, une étiquette d'avarie, sur la paroi d'un wagon. Une demi-heure plus tard, un contremaître passe derrière eux et arrache les étiquettes rouges.
    Je crois que cette histoire est véridique. Je n'en ai pas eu confirmation, mais ce n'est qu'un exemple. Je ne sais pas pourquoi ils font cela ou pourquoi ils feraient cela.
    Dans mon dossier, j'ai également quelques lettres et de l'information sur les différences entre les normes d'inspection et de maintenance chez BC Rail, actuellement le CN. En fait, il s'agit maintenant du CN.

  (1610)  

    Monsieur Anderson, voulez-vous répondre à cette question?
    Je dirais que la diminution du nombre de sites d'inspection et la réduction de l'effectif ont quelque chose à voir. Ils ont quelque chose à voir dans l'augmentation du nombre de défectuosités en général.
    Aux États-Unis, je pense que les compagnies de chemin de fer se conforment à une directive de la FRA. Chaque wagon est localisé et inspecté tous les 1000 milles. Au Canada, il n'existe rien de pareil.
    Dans ces deux rapports que nous avons ici, on semble retrouver deux ou trois thèmes.
    Le premier est l'entretien des voies et celui du matériel roulant. Les méthodes utilisées pour faire rapport semblent manquer de cohérence, et le suivi pose problème.
    Un autre problème est celui des relations entre les salariés et la direction lorsqu'il s'agit du suivi à donner. On peut lire dans ces rapports qu'il y a un genre d'hiatus entre la haute direction et les salariés quant au suivi des initiatives prises en matière de sécurité ou encore lorsqu'il s'agit de comprendre de quoi il s'agit. Il y a des recommandations qui parlent des lacunes dans la formation, des compétences et de l'information, de la faiblesse du processus de règlement des plaintes interne et de l'insuffisance du suivi après un accident.
    On peut par exemple lire ceci:
L’équipe de vérification a pu s’assurer que les processus de signalement et d’analyse des incidents et des accidents avaient été mis en oeuvre, mais elle n’a pas pu trouver de détails sur leur mise en oeuvre ou de données de suivi sur l’efficacité des mesures correctives (mesures de sécurité) dans tous les cas.
    En d'autres termes, l'absence de rapport est un problème. Mais il semble y avoir un autre problème, en l'occurrence lorsqu'un rapport est soumis mais qu'il n'y a pas de suivi permettant de vérifier si ce qui a été recommandé a effectivement été fait.
    Et voici le corollaire de cela. À votre avis, Transports Canada ou le Bureau de la sécurité des transports ont-ils suffisamment de moyens d'action pour assurer la conformité et le suivi, ou doivent-ils se limiter à faire des recommandations?
    Absolument pas.
    Je suis d'accord avec John.
    L'absence de rapport, je dirais que, faute d'un meilleur qualificatif, serait... Maintenant, il y a deux choses, du point de vue des salariés. Une partie de l'attitude en question est la résultante des hommes et des femmes qui y travaillent. Ils sont simplement tannés de voir que rien ne se fait, qu'aucune mesure corrective n'est prise même s'ils font des rapports. Au bout du compte, l'état d'esprit des salariés, c'est qu'ils s'en fichent. La situation devient telle que peu importe ce qu'ils essayent de faire, cela leur retombe encore plus sur le dos. Tout le monde est là à attendre, à compter les jours, encore cinq ans, encore trois ans, encore un an, encore dix voyages, peu importe. Cela a peut-être quelque chose à voir avec ça, cette augmentation des contraintes liées au travail, du stress.
    Pour en revenir à ce que vous disiez, encore une fois, j'en reviens aux rapports. Si vous faites un rapport, si vous commencez à signaler des choses trop souvent, il y a la peur des représailles. Transports Canada est virtuellement en état de sous-effectif, de sous-financement peut-être aussi — du moins c'est ce que je pense. J'aimerais que le Bureau de la sécurité des transports — j'ai lu ses rapports d'enquête, j'ai vu les enquêtes — dispose de pouvoirs beaucoup plus étendus pour que ses recommandations soient prises en compte et mises en oeuvre. Il semblerait que, lorsque Transports Canada ou le Bureau de la sécurité des transports fait des recommandations ou prend des décisions en matière de sécurité, comme les organismes de réglementation accordent des exemptions, c'est simplement une question de temps, six mois ou un an, avant que cela disparaisse.
    Un bon exemple est la catastrophe de Hinton, lorsque les wagons d'un convoi avaient quitté les rails sur une voie en pente. Immédiatement après, ils ont dit que dans les gares de triage ainsi que sur les pentes à partir d'un certain pourcentage, il fallait des sabots de déraillement, c'est un mécanisme qu'on installe sur le rail qui, si un wagon se met à rouler tout seul, par exemple à cause du vent ou s'il est heurté par un autre wagon, le fait automatiquement dérailler afin qu'il ne se retrouve pas sur la voie principale. Quoi qu'il en soit, on a donc installé des sabots de déraillement un peu partout. Je dirais qu'ils sont passés d'un extrême à l'autre, et cela a entraîné une diminution de la productivité: il faut en effet du temps pour arrêter le wagon et neutraliser le sabot manuellement. En l'espace d'un an, tous ces sabots, ou la plupart d'entre eux, ont été enlevés. Or, il s'agissait de dispositifs de sécurité qui avaient été installés pour protéger les lignes principales.

  (1615)  

    Monsieur Laframboise.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à vous, monsieur Desrosiers. Je vous remercie beaucoup de votre présence. Je vais faire une petite introduction. On a tenu à ce que vous soyez ici présent à titre de maire de Montmagny parce que vous avez vécu certaines situations au cours des dernières années. Tout d'abord, je dois vous dire que l'étude que le comité entreprend est une étude non partisane. Tous les partis estiment qu'il y a un problème quant à la sécurité ferroviaire, et il faut comprendre. Transports Canada, surtout dans le domaine du transport par rail, particulièrement au cours des cinq dernières années, a mis en oeuvre un système de gestion de la sécurité. On est en train de le faire dans le cas du transport aérien, et le comité en a discuté lors d'autres débats. Dans le cadre de ces systèmes de gestion de la sécurité, l'entreprise se prend en main. On a changé la façon de faire les choses. Il y a moins d'inspecteurs visuels de Transports Canada, et c'est la compagnie qui est responsable de la sécurité de ses équipements et de ses rails. Elle doit établir un système de gestion, et Transports Canada fait l'audit. Il fait la vérification de ce système plutôt que de faire, comme auparavant, des inspections visuelles sur le terrain.
    J'écoutais M. Anderson. C'est tout à fait exact qu'il y a moins d'inspections. On voudrait qu'il y ait plus d'inspections visuelles. Partout ailleurs dans le monde, quand on installe un système de gestion de la sécurité, il ne faut pas mettre de côté l'inspection visuelle, qui permet de détecter des problèmes si on la fait systématiquement.
    Je tiens à ce que vous disiez à mes collègues ce que cela peut causer. Au cours des cinq dernières années, vous avez vécu deux déraillements. Donc, le système de gestion de la sécurité...J'ai posé une question à ce sujet au directeur par intérim du Bureau de la sécurité des transports, et il ne peut affirmer que ces fameux systèmes de gestion ont réduit le nombre d'accidents. Il y a eu une certaine réduction du nombre d'accidents, mais il n'y a pas eu de réduction chez vous. Il y en a plus. J'aimerais que vous me donniez un aperçu de ce que ressent votre population et des relations que vous avez avec l'exploitant qui, d'après moi, ne semble pas toujours écouter vos recommandations.

  (1620)  

    Les gens de la municipalité exercent beaucoup de pressions sur le conseil municipal, parce que c'est leur représentant. Par exemple, on donnait des cours dans la gare située près de la voie ferrée, mais tout le monde a annulé son inscription au mois de janvier. Après le déraillement, plus personne ne voulait suivre de cours à cet endroit. Il a fallu déménager tout cela dans un autre édifice.
    Ceux qui habitent très près de la voie ferrée exercent souvent des pressions. Ce sont ces personnes qui ont organisé et fait signer la pétition. Les gens sont très inquiets. Lorsque les trains passaient à basse vitesse, les gens dormaient en toute tranquillité car ils se sentaient en sécurité. Lorsqu'il arrive une catastrophe de ce genre, il faut gérer la catastrophe, les équipes d'incendie et ainsi de suite. Il y a des secteurs de la municipalité qui sont complètement isolés. Les gens se retrouvent devant rien et sont inquiets, et ils se fient à nous.
    Étant donné que cela est arrivé deux fois en trois ans, les gens ne croient plus que c'est la dernière fois. La dernière fois, le CN a dit aux gens de ne pas s'inquiéter parce qu'il faisait des réparations importantes et qu'ils pourraient par la suite vivre en toute quiétude. Moins de trois mois plus tard, un autre déraillement se produisait à environ 500 mètres du précédent, mais cette fois sur la voie allant de l'ouest vers l'est. Nous avons eu de la chance parce que cela ne s'est pas produit à un moment où les travailleurs sortaient de l'usine: il était 1 h 15 le matin. Si l'événement s'était produit au moment où les gens sortaient de l'usine, il y a aurait eu énormément de morts, parce que c'est la voie de circulation de ces gens. À côté, il y a une coopérative et des résidences. Ces gens ont pris des photos. Le monsieur qui habite dans la maison blanche a mis sa maison en vente parce qu'il ne veut plus rester là. La valeur des résidences dans ce secteur a baissé à cause de ces événements.
    La population veut que la vitesse soit réduite. Il est sûr et certain qu'on ne peut pas exiger que le CN construise un rail à l'extérieur de la ville, mais il faut dire qu'il y a 10 ou 15 ans, au sud de Montmagny, il y avait ce qu'on appelait le tronçon Monk. Le rail passait par un endroit presque désert où il y avait très peu de résidences. Le rail a été démantelé et transféré en bas. C'est l'inverse qu'on aurait dû faire. On aurait dû garder le rail d'en bas pour les trains touristiques, ou faire à cet endroit une piste cyclable au lieu d'en faire une à 20 kilomètres de la ville.
    Dans la population, c'est la psychose du chemin de fer. Les gens sont déprimés et me demandent de régler le problème. On intervient régulièrement auprès des gens du CN. J'ai parlé avec eux la semaine dernière. Les trains roulent à 40 milles à l'heure présentement. Ils roulaient à 30 milles à l'heure et ils viennent de commencer à rouler à 40 milles à l'heure. Quand je leur parle de demeurer à 40 miles à l'heure, ils me disent qu'ils le feraient peut-être si personne d'autre ne le savait au Canada. Malheureusement, je ne serai pas capable...
    Vous nous avez dit qu'à Drummondville, on avait réduit la vitesse des trains dans la ville. Avec qui avez-vous discuté? Est-ce avec Transports Canada, qui doit établir la réglementation? Je sais que Transports Canada a accepté la réduction pour un certain temps, mais qu'en est-il maintenant?
    Je ne peux pas vous le dire. On nous dit que la voie est tortueuse, que les convois sont plus longs et qu'il serait difficile d'augmenter ensuite la vitesse. Dans un autre cas, on nous donne d'autres raisons. Honnêtement, je ne connais pas la raison pour laquelle la vitesse est réduite à Drummondville. Sur le tronçon de Beloeil à Montréal, la vitesse est réduite et on surveille. Je pense que les policiers municipaux surveillent pour s'assurer que le CN ne soit pas fautif. Entre Charny et Saint-Apollinaire, il y a la rivière Chaudière. C'est probablement à cause de la géographie que le CN a décidé de réduire la vitesse. Le CN a dû faire face à plusieurs catastrophes, et il a peut-être décidé de réduire la vitesse là où c'est plus difficile.

  (1625)  

    Vous avez l'impression qu'ils vont continuer à vous demander d'augmenter la vitesse.
    Oui. J'ai parlé au vice-président qui s'occupe du secteur Winnipeg-Halifax, et il n'est pas question qu'il accepte de réduire la vitesse de façon permanente.

[Traduction]

    Monsieur Julian.
    Je remercie tous les témoins d'être venus aujourd'hui, et je vais commencer en interrogeant MM. Anderson et Holliday.
    Dans vos exposés, vous avez parlé de la déréglementation et de la privatisation en disant qu'elles étaient au nombre des éléments à l'origine de cette augmentation du nombre de déraillements et du nombre d'accidents.
    Nous avons également entendu cette semaine le témoignage de M. Gordon Rose. J'imagine que vous le connaissez. Il a évoqué le fait que, lorsqu'il était au CN, lorsque le CN était une compagnie à capitaux canadiens, et lorsqu'il avait travaillé pour BC Rail, qui était également une compagnie canadienne, il avait pu constater une grosse différence lorsque le CN avait été repris par des intérêts américains et lorsque BC Rail était passé sous le contrôle du CN.
    Il nous a également dit que lorsqu'on ouvrait le livre des règlements, lorsqu'on ouvrait le registre de présences, c'était la sécurité qui venait en premier lieu lorsque ces compagnies appartenaient à des intérêts canadiens. Mais ce n'est plus le cas. Actuellement, la sécurité vient en quatrième place.
    Je me demande dans quelle mesure tous ces facteurs — la déréglementation, la privatisation et l'acquisition par des intérêts américains — sont à l'origine de cette différence, selon vous, du point de vue de la dégradation généralisée des normes relatives à la sécurité. Je me demande également dans quelle mesure vous avez le sentiment que Transports Canada est là pour dépister les violations lorsqu'il y a des problèmes, des problèmes de sécurité latents. Voyez-vous vraiment des gens de Transports Canada sur le terrain ou sont-ils purement et simplement absents?
    Nous voyons Transports Canada après le fait. C'est exactement comme l'a expliqué Don plus tôt, c'est-à-dire que Transports Canada ne semble avoir aucun pouvoir.
    S'agissant de la question de la propriété américaine, nous estimons que les propriétaires ont très peu de respect pour la loi, la culture et les conventions collectives canadiennes. En fait, le nombre de griefs déposés auprès du Bureau d'arbitrage et de médiation des chemins de fer du Canada a tellement augmenté qu'il se situe autour de 2 000. À CP Rail, ce nombre est inférieur à 10. À notre avis, cela témoigne d'un manque de respect pour certaines questions.
    La déréglementation est le résultat d'orientations économiques au Canada. Avant la déréglementation, le cadre était restrictif et ne permettait pas aux entreprises d'acheminer leurs produits de façon efficiente. Mais la détente graduelle de certains règlements a permis aux transporteurs d'expédier leurs produits de façon plus efficiente. Par conséquent, étant donné le libellé de la Loi sur la sécurité ferroviaire, les transporteurs, y compris les compagnies ferroviaires, peuvent déterminer leurs propres règles tant qu'elles demeurent en conformité avec la Loi sur la sécurité ferroviaire.
    Les compagnies de chemin de fer déterminent donc leurs propres règles. En effet, ce sont elles qui établissent leurs règles, et si elles considèrent que quelque chose risque d'entraver leurs activités, elles n'ont alors qu'à écrire au ministre pour demander une exemption. Si le ministre estime que la sûreté publique n'est pas compromise... et il se peut qu'il y ait d'autres variables qui entrent en ligne de compte, il autorise alors l'exemption.
    D'après vous, et je pose la question aux deux témoins, comment se sentent les cheminots de nos jours, notamment les mécaniciens de locomotives? Comment se sentaient-ils il y a 10 ou 15 ans quand ils allaient travailler et comment se sentent-ils aujourd'hui? Est-ce qu'ils se rendent au travail en pensant « J'espère rester encore en vie à la fin de la journée »? Ou est-ce qu'ils vont au travail en se disant « J'espère qu'il ne se passera rien de grave aujourd'hui. Je sais que l'entretien n'a pas été fait, mais j'espère néanmoins que nous réussirons à nous en sortir aujourd'hui »? Ou encore ont-ils confiance dans le système?
    Non, il faut dire que la confiance fait défaut actuellement, à cause de tout l'environnement de travail dans les chemins de fer. Notre travail consiste à conduire des trains.
    Je vous parle uniquement de mon milieu de travail à moi. Je conduis un train dans un territoire où la limite de vitesse varie entre 60 et 65 milles à l'heure. Nous connaissons donc les sections de la voie ferrée qui sont défectueuses. Nous voyons ce qui se passe.
    Avant que mes collègues ou moi ne conduisions le train, la première chose dont nous devons nous assurer en arrivant au travail est la fiabilité de l'équipement que nous allons utiliser. La voie ferrée que je vais emprunter doit être fiable. Le système de signalisation que j'utiliserai au travail doit également être irréprochable et nous devons avoir des règles en place qui nous permettent de conduire les trains en toute sécurité.

  (1630)  

    Ce n'est pas le cas actuellement?
    Non, surtout en ce qui concerne l'équipement, sans oublier le nombre de déraillements et les inspections moins fréquentes. Nous voyons ce qui se passe. Nous savons exactement quelle est la situation. Il y a un manque d'application des normes. Transports Canada effectue peut-être des visites ça et là... Parfois, les visites ont lieu tous les deux ans. Le processus d'inspection de Transports Canada a été réduit considérablement, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, probablement à cause du nombre d'inspections effectuées. C'est mon opinion personnelle, mais j'ai l'impression qu'il fait davantage de vérifications administratives que des inspections de matériel.
    Comme disait Don, le niveau de stress a augmenté considérablement au cours des 10 dernières années. J'ai mentionné en passant le syndrome du stress post-traumatique. Nous passons tellement souvent à deux cheveux d'un accident ferroviaire que parfois il suffit d'un incident mineur pour que ce soit la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Puis, comme chacun le sait, on devient très surmené.
    En tant que représentant syndical, je suis en rapport avec d'anciens employés de la compagnie E & N, et je peux vous raconter des histoires: un jour, alors qu'un de ces employés travaillait à bord d'un train de passagers, un passager a sauté du train à 40 milles à l'heure. On a alors arrêté le train, fait marche arrière pour aller récupérer cet homme. Un mois plus tard, le train a happé quelqu'un et l'a décapité. Un mois plus tard, un autre incident mineur s'est produit, et l'employé en question était arrivé au bout du rouleau. Il est allé voir un médecin qui lui a prescrit du repos. L'employé est allé au Mexique avec sa famille pendant un mois, mais à son retour, il a été mis à la porte, car on ne lui avait pas accordé un congé en bonne et due forme.
    Nous sommes allés en arbitrage, mais nous avons perdu. J'en suis resté bouche bée. Il s'agissait d'un employé de longue date, un mécanicien qui conduisait un train de passagers le long de l'ancien corridor Esquimalt-Nanaimo sur l'île de Vancouver.
    Je peux vous citer de nombreux exemples d'employés qui ont été à deux doigts d'une tragédie, puis il suffit qu'ils aient un simple épisode, et la compagnie leur mène la vie dure avant de leur accorder une seule journée de repos. Ces employés finissent par quitter leur emploi, car le niveau de frustration est tellement élevé. Ils ne peuvent même pas obtenir d'indemnités du WCB. On les fait tourner en rond.
    C'est frustrant. Le niveau de stress est très élevé, et les choses ne semblent pas s'améliorer.
    M. Blaney a la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je veux profiter de l'occasion pour vous saluer ainsi que les membres du comité. Je suis heureux de siéger à ce comité. J'aimerais aussi remercier les témoins, plus particulièrement le maire de Montmagny, qui démontre qu'il a à coeur l'intérêt de ses citoyens. Vous avez réussi à recueillir un consensus assez large concernant la sécurité ferroviaire, préoccupation qui est partagée par les membres du comité.
    Lorsque je siégeais au comité, on avait notamment étudié un projet de loi pour encadrer le bruit autour des gares de triage. On a hâte qu'il obtienne la sanction royale, lorsqu'il reviendra du Sénat.
    Ma première question s'adresse à M. le maire. Dès que l'accident est survenu, M. Paul Boisvenue, un inspecteur de Transports Canada, a été mandaté pour tenir le ministre informé du déroulement de l'enquête.On sait que la vitesse avait d'abord été réduite.
    Pouvez-vous nous parler des mesures qui ont été prises depuis le mois de janvier?
    Depuis le mois de janvier, des conditions particulières ont obligé le CN à réduire la vitesse des trains. À cause des dégâts dans le périmètre en question, durant les trois premières semaines, le train roulait à 10 milles à l'heure et traversait la ville à cette vitesse. Les deux semaines suivantes, la vitesse est passée à 20 puis à 30 milles à l'heure parce qu'il y a toujours eu des travaux. Ils ont été obligés de rebâtir une partie des dormants sur le pont; ils les ont tous remplacés. Pendant cette période, les trains ont toujours roulé à des vitesses réduites. Le CN s'était engagé à me téléphoner une semaine à l'avance pour m'aviser si la vitesse allait être augmentée la semaine suivante.
    De notre côté, pendant ce temps, on a fait des pressions auprès des politiciens et des différentes organisations. Tout à l'heure, j'écoutais un témoin qui disait que les gens étaient stressés, traumatisés. Que fait la loi quand des citoyens sont stressés et traumatisés par les effets des déraillements dans leur secteur? Que faisons-nous pour régler ça? Y a-t-il des dispositions dans la loi qui permettent au ministère des Transports de dire qu'à la suite de ces événements, pour une période indéterminée, les trains du CN vont traverser la ville à une vitesse donnée pendant qu'on enquête? C'est que l'enquête du BST peut durer un an et que les résultats finals peuvent être dévoilés seulement dans deux ans.
    Pourquoi le ministère des Transports ne constate-t-il pas que tel événement s'est produit à Montmagny, que des dégâts ont été causés? S'il s'agit de réparer, de payer, de refaire le pavage, de remplacer la pelouse, de réparer des bâtiments, il n'y a pas de problèmes. Mais il y a les autres problèmes qu'on connaîtra par la suite, soit le traumatisme des gens, la frustration des citoyens. Des dizaines de lettres ont été envoyées, et on n'a reçu aucune réponse de la part du CN. Présentement, j'ai une assez bonne relation avec le responsable au CN: tant que je n'exigerai pas que les trains circulent à 40 milles à l'heure alors que lui veut qu'ils le fassent à 60, on va bien s'entendre. À l'heure actuelle, le train circule à 40 milles à l'heure. Peut-être le CN va-t-il tolérer encore un certain temps la limite de 40 milles à l'heure pour que les gens retrouvent un sentiment de sécurité et va-t-il augmenter la vitesse graduellement par la suite, mais ça ne réglera pas le problème.
    On a posé des gestes. On a été obligés de déplacer des gens, de faire des choses durant cette période, mais on reste pris avec des problèmes majeurs. Quand le CN aura réparé ses installations... À ce sujet, je dois vous dire qu'ils sont réellement des professionnels parce que pour rétablir les lieux d'un déraillement,   ils sont difficiles à battre. Réussir à faire passer le train de nouveau deux ou trois jours plus tard quand le pont d'une rivière a été détruit, c'est quelque chose. Je leur lève mon chapeau. Disons que les équipes sont formidables. Elles devraient l'être autant en ce qui concerne l'entretien et d'autres aspects. Nous, à la ville, on reste pris avec ces effets secondaires.

  (1635)  

    D'après vous, la vitesse actuelle de 40 milles à l'heure satisfait-elle la population?
    Oui, tout à fait.
    Son sentiment de sécurité serait renforcé?
    Oui, il serait renforcé. Le bruit est beaucoup moins agressif, donc c'est plus sécurisant. C'est une question de bruit aussi, parce que le train passe la nuit. Quand le sol est gelé et que le train passe à des vitesses supérieures, ça a des effets dans les résidences aussi. Si on baisse trop la vitesse, on a un autre phénomène: les gens ne sont pas contents parce qu'ils attendent trop longtemps aux passages à niveau. Il faut essayer de trouver l'équilibre. Je pense que 60 ou 64 km ou 30 milles à l'heure à l'intérieur de la municipalité, c'est logique. Les automobilistes, à Montmagny, doivent circuler à 50 km/h. Je ne comprends pas que le train ait le droit de traverser la ville à 100 km/h.
    Avez-vous fait part de ces préoccupations à M. Boisvenue, le représentant?
    Je n'ai pas parlé à M. Boisvenue parce qu'il assiste le BST dans son enquête; il y est comme observateur. J'ai eu à parler aux gens du BST, mais pas directement à M. Boisvenue.
    Pour l'instant, vous avez trouvé un compromis avec le CN au sujet des 40 milles à l'heure. On va espérer que les projets de loi qu'on met en place pourront...
    Le CN s'est engagé à maintenir cette vitesse durant trois mois. Peut-être savaient-ils qu'ils auraient du travail durant trois mois. Je ne sais pas si c'est un cadeau ou si c'est l'obligation des travaux qui faisait que... .
    Me reste t-il un peu de temps?
    Ma question s'adresse à M. Anderson.
    Dans un document qu'on nous a remis, on dit que les accidents ont augmenté au Canada depuis la déréglementation. Pourtant, il y a trois fois moins d'accidents aux États-Unis. Y a-t-il une raison à cela, selon vous? J'aimerais connaître votre point de vue à ce sujet.

  (1640)  

[Traduction]

    Trois fois...?
    Il y a trois fois moins d'accidents aux États-Unis qu'au Canada?
    Les normes relatives à l'inspection des wagons ont probablement beaucoup à voir avec cela.
    Je ne sais vraiment pas quoi ajouter d'autre, mais c'est probablement l'entretien des wagons...
    Des wagons — et des voies ferrées aussi, je présume, non?
    Ils ont probablement le même nombre de voies ferrées et le même volume de trafic.
    Merci.
    Monsieur Volpe.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à tous les témoins.
    Monsieur le maire Desrosiers, j'aimerais vous poser une très brève question. Selon vous, est-ce que les accidents qui se produisent dans votre ville seraient réduits à zéro si le CN diminuait la vitesse à 40 milles à l'heure?
    Pouvez-vous répéter la question? J'en ai perdu un petit bout au début.
    Selon vous, est-ce que tous les problèmes qui existent avec les trains du CN seraient réduits à zéro si les trains roulaient à 40 milles à l'heure ou moins?
    Non, je ne dis pas cela.
    Ce que je dis par ailleurs...
    Écoutez un moment, monsieur le maire.
    Les problèmes sont-ils simplement causés par la gestion du CN, ou est-ce qu'il y a d'autres problèmes pour lesquels la ville, la province ou d'autres autorités peuvent avoir une influence?
    Influencer le CN?
    L'hon. Joseph Volpe: Oui.
    M. Jean-Guy Desrosiers: On parlait de 40 milles à l'heure parce que les effets dévastateurs d'un déraillement sont beaucoup moindres à cette vitesse. Personne ne peut affirmer qu'il n'y aurait jamais plus d'accidents si les trains roulaient à cette vitesse. Ce n'est pas nécessairement le fait de rouler à 40 milles à l'heure qui éliminera tous les accidents, mais ça va sécuriser les gens et ça causera moins de dommages lorsqu'un événement comme ceux qu'on a connus se reproduira, j'en suis persuadé. Si l'équation E=mc² est encore vraie, quand on double la vitesse, on quadruple les effets.
    D'accord, merci.

[Traduction]

    Monsieur Anderson, je vois que M. Holliday prend une petite pause, c'est donc à vous qu'il reviendra de répondre à toutes les questions qui restent.
    Je voudrais revenir à quelque chose qui a été dit il y a un instant, car en regardant les notes d'information, il me semble que les accidents par million de trains-milles sont considérablement plus nombreux au Canada qu'aux États-Unis.
    Est-ce en raison de la définition des accidents qui doivent être déclarés? Est-ce en raison des conditions des voies ferrées, des trains, de l'équipement, en somme de l'infrastructure, qui se détériorent au Canada que ces accidents sont pratiquement inévitables?
    L'accident...
    Désolé, monsieur Anderson, peut-être est-ce injuste envers vous, mais nous avons un document. Voyez-vous, tous les membres du comité ont reçu un cahier d'Information de la Bibliothèque du Parlement. Je vous donnerai un exemple pour que vous sachiez à quoi je fais allusion.
    En 2006, par exemple, sur les 95,6 millions de trains-milles parcourus au Canada, il y a eu un total de 1 141 accidents, soit 11,9 accidents par million de train-mille. Aux États-Unis, où on a parcouru 810 millions de trains-milles, il y a eu 2 864 accidents, soit 3,5 accidents par million de trains-milles. C'est donc 3,5 contre 11,9. La situation est pratiquement la même depuis 1989, bien qu'il y ait eu évidemment quelques variations, le nombre étant une année plus élevé, et l'autre plus faible.
    Les voies ferrées et l'équipement au Canada sont si détériorés que les accidents sont inévitables? Est-ce que la définition des accidents qu'on doit déclarer est tellement plus stricte au Canada que le nombre d'accidents effectivement déclarés atteste d'une norme plus rigoureuse? Est-ce là la raison?

  (1645)  

    Pour ce qui est du ratio, je ne suis pas en mesure de vous répondre. C'est une grande différence effectivement.
    Ce que je peux vous dire, en revanche, c'est que c'est probablement attribuable aux normes de sécurité qui s'appliquent, aux normes d'entretien, à la détérioration des voies ferrées... Je ne suis pas le seul à le penser, car c'est le point de vue de mes collègues aussi. Je crois que le talus est en train de se détériorer. Bien qu'on semble dépenser de l'argent sur l'infrastructure au titre de programmes ferroviaires, j'ignore si ces problèmes sont liés aux normes en vigueur actuellement, car à l'heure actuelle, on semble appliquer une norme minimale. Mais il se peut que cette norme change demain. En effet, il se peut qu'on opte pour une norme inférieure, alors qu'il fut un temps où les normes étaient très élevées au Canada.
    C'est vraiment injuste, car la densité du trafic a probablement augmenté de 15 p. 100...
    Elle a augmenté d'environ 25 p. 100 depuis 1989.
    D'accord, depuis 1989.
    Monsieur Crête.
    Désolé, monsieur Anderson. Je reviendrai probablement à vous plus tard.
    Une voix: J'aimerais répondre à cette question.
    Son temps est écoulé.
    Une voix: Dommage.
    Vous pourrez le faire plus tard, au prochain tour.

[Français]

    Monsieur Desrosiers, je pense que le CN a accepté de réduire temporairement la vitesse à cause de votre réaction rapide et de l'appui de la communauté. D'ailleurs, j'ai assisté à une première rencontre où cela a été dit très clairement et je pense que c'est à ce moment-là qu'ils ont accepté de bouger, en dépit de toute réglementation.
    Vous avez dit qu'ils réparent les choses très rapidement, pour pouvoir reprendre la vitesse. Votre recommandation d'imposer des amendes lorsqu'il y a des accidents à répétition est-elle une façon de vous donner un outil pour que le CN se sente obligé de faire plus de prévention?
    Vous avez aussi recommandé qu'on limite la vitesse à 64 kilomètres à l'heure de façon permanente. Est-ce que ce serait utile que le comité appuie cette position jusqu'à ce qu'il y ait une solution permanente, jusqu'à ce qu'on conclue qu'il n'y a plus de danger?
    Un de mes objectifs en comparaissant ici aujourd'hui était de connaître la position du comité.
    Je pense que si on veut faire bouger les choses, il faut que l'entreprise sente qu'il y a une certaine pression, qu'elle peut perdre certaines choses ou certaines qualités. Dans le cas du CN, s'il y a deux, trois ou quatre accidents dans le périmètre de Montmagny, ce serait bien que les membres d'un comité acceptent les recommandations de la ville de réduire la vitesse à 40 milles à l'heure pour le moment de façon à sécuriser les gens et à les mettre à l'aise.
    Je me sers de l'exemple de la Ville de Montmagny, mais ce ne sont pas toutes les villes au Canada qui ont connu cinq déraillements, sept ou huit accidents et une dizaine de mortalités. En fait, la Ville de Montmagny est probablement celle qui en a connu le plus, malgré sa petite taille de 12 000 habitants. Donc, pour sécuriser ces gens-là, il serait intéressant qu'on ait l'appui du comité.
    À l'avenir, il devrait y avoir quelque chose dans la loi pour condamner les accidents ferroviaires provoqués par le CN. Cela pourrait peut-être les inciter à avoir une vision un peu plus pointue, à entretenir leurs équipements un peu plus efficacement et à être plus attentifs à certains éléments. Je pense que cela pourrait les aider à cheminer. Je suis d'accord avec le fait qu'on fasse des vérifications, mais il devrait y avoir certaines pénalités. On sait que le CN a toujours contesté le rapport du Bureau de la sécurité des transports du Canada, le BST, et il continue de le faire. On n'a aucun point d'ancrage pour discuter avec eux. Alors, il pourrait peut-être y en avoir un dans la loi.
    On pourra éventuellement se servir de la bourse du carbone. Lorsqu'il y aura un déversement causé par un déraillement, le CN aura des points négatifs à la bourse. Normalement, le transport ferroviaire devrait protéger l'environnement, mais il perturbe l'environnement et la quiétude des citoyens. On devrait lui imposer une pénalité dans le cadre de la bourse du carbone quand elle existera. Présentement, comme cela n'existe pas, il devrait y avoir un comité qui dise que la Ville de Montmagny a été pénalisée plus que les autres villes au Canada.
    Présentement, le comité recommande que la vitesse soit réduite à 40 milles à l'heure pour sécuriser les citoyens. Il s'agit d'un tronçon est-ouest. Si on coupe le pont à Montmagny, on n'ira plus à Halifax. Il n'existe aucun autre chemin. Pour aller à Halifax, il faut passer dans la ville de Montmagny. Il y a quand même deux rivières, deux ponts, des citoyens qui vivent en bordure de la voie ferrée. Il y a des gens qui m'ont demandé pourquoi on avait permis à des citoyens de s'y installer. J'ai répondu qu'on n'allait pas refaire l'histoire du Canada. Les gens ont construit des maisons en bordure des rivières et de la voie ferrée, parce que c'étaient les moyens de transport de l'époque. On ne peut pas refaire l'histoire. C'est comme ça et on va rester comme ça.
    Je crois sincèrement que si les entreprises n'offrent pas les services qu'elles se sont engagées à donner, c'est normal qu'elles soient pénalisées. Cette situation existe dans les communications et dans d'autres types d'entreprises. Je ne vois pas pourquoi cela n'existerait pas au CN. C'est comme s'il était à l'abri de toutes ces choses-là, parce qu'il n'y a rien dans la loi.

  (1650)  

    Dans votre deuxième recommandation, vous dites qu'il faut  « envisager la possibilité de construire des voies de contournement ». En fait, c'est comme pour les routes principales qui passaient dans les villages. Plus tard, on a construit les autoroutes.
    Dans le cas de Montmagny, est-ce que cela vous apparaît comme étant la principale solution à envisager ou êtes-vous ouvert à d'autres types de solutions, notamment à ce que l'on diminue la vitesse en permanence et peut-être d'autres éléments?
    À cause de la géographie et la configuration, je crois que l'idée de faire une route de contournement à Montmagny, où la rivière s'élargit quand on se dirige un peu plus au sud, ne serait peut-être pas la solution la plus économique. Dans un cas comme celui de Montmagny, la solution pourrait être la réduction de la vitesse, en plus de l'engagement du CN de faire plus de vérifications et d'analyses. Ils ont enlevé l'aiguillage qu'il y avait à la gare et des choses comme celle-là. Normalement, cela devrait nous sécuriser, mais l'avenir nous le dira.
    Si la géographie était plus accommodante, il pourrait y avoir une voie de contournement. À mon avis, le transport ferroviaire devrait se développer encore plus. Étant donné qu'il n'y a pas de voie alternative, on doit souvent attendre pour laisser passer les convois. La façon dont cela a été conçu n'est pas efficace. Si on veut bâtir efficacement, il faudra qu'il y ait des voies doubles dans certains secteurs pour permettre plus de transport au Canada.

[Traduction]

    Monsieur Fast.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux trois témoins également d'être venus aujourd'hui. Votre témoignage nous sera d'une grande utilité au fur et à mesure que nous étudierons certaines de ces questions touchant la sécurité.
    Mais tout d'abord, je voudrais aborder une question qui semble être un peu l'éléphant dans la salle, et je vais donc faire une affirmation. Les trois témoins sont ici pour échanger avec nous sur des questions de sécurité ferroviaire en général. Or, vos commentaires ont pour l'essentiel été axés sur une compagnie, nommément le CN.

[Français]

    Celle qu'on connaît.

[Traduction]

    Ai-je raison de dire que si vous deviez mettre l'accent sur une question en particulier, ou peut-être une compagnie en particulier, au sein du réseau ferroviaire canadien, ce serait le CN?
    En guise de question complémentaire, que je poserai à M. Anderson, pensez-vous que la culture au CN en matière de sécurité est nettement différente de celle d'autres compagnies de chemin de fer?
    Premièrement, je ne peux vous parler que du CN, puisque c'est mon employeur. Cela dit, j'ai été membre du comité de la santé et sécurité au CN, comité qui compte également des cadres des différents syndicats membres des deux comités, soit celui du CP et du CN. Ces cadres nous disent qu'il existe effectivement une philosophie nettement différente au CN. C'est un défi monumental que de faire bouger les choses au CN.
    En ce qui concerne les transporteurs régionaux, je ne peux vraiment rien vous dire à ce sujet.

  (1655)  

    Votre affirmation va dans le sens des propos tenus par M. Rhodes, qui a comparu devant nous lundi et qui a travaillé pour BC Rail avant de travailler pour le CN.
    Je trouve inquiétant que nous ayons autant de différence de culture en matière de sécurité au sein des différentes compagnies ferroviaires du pays.
    J'ai une deuxième question à vous poser, monsieur Anderson. Tout à l'heure M. Julian a dit que la privatisation avait été à l'origine du déclin de la sécurité ferroviaire, et j'ai eu l'impression que vous vouliez le corriger en disant que la privatisation n'était pas le problème, car la privatisation permet manifestement des économies — je pense que nous serions tous d'accord pour dire que l'efficacité est quelque chose de souhaitable. C'est davantage le manque de réglementation adéquate et de surveillance de l'industrie ferroviaire qui est à l'origine de ces problèmes. Ai-je raison?
    Absolument.
    Très bien.
    Question complémentaire alors: j'ai trouvé inquiétant d'entendre M. Holliday dire que peut-être des personnes qui travaillent pour la compagnie enlevaient les autocollants qui portaient la mention « défectueux » de certains wagons.
    Vous avez indiqué que vous n'en étiez pas certain. Je vous demanderais de fournir peut-être au comité une confirmation de cela, car à un moment donné, cela devient des ouï-dire. Nous voulons par contre avoir de vrais éléments de preuve, dans la mesure où ils existent.
    Bien sûr.
    Enfin, et encore une fois, monsieur Anderson, vous avez également évoqué divers rapports produits au fil des ans et auxquels on n'a pas donné suite. Je présume que vous faites allusion à des rapports comme ceux du BST et de la commission Foisy, et il semble en fait y avoir un manque de suivi quant à la mise en oeuvre des recommandations contenues dans ces rapports. Est-ce que c'est bien ce que vous avez dit?
    Que ces recommandations soient encore en vigueur.
    Je crois également qu'après des accidents ou des blessures, parfois la réaction est machinale. Ces recommandations doivent donc être évaluées, communiquées à toutes les parties prenantes, puis communiquées de nouveau afin de déterminer lesquelles d'entre elles sont logiques, illogiques, ainsi que les coûts qui s'y rattachent, j'imagine.
    Monsieur Holliday, vous avez déjà indiqué — je crois que vous l'avez même établi — que vous êtes issu d'une famille de cheminots et que vous avez passé l'essentiel de votre vie dans le réseau ferroviaire.
    C'est exact. Les chemins de fer ont toujours été notre gagne-pain, je suis un cheminot de la deuxième génération.
    Durant toutes ces années, est-ce que vous vous souvenez que le gouvernement ait entrepris un examen complet et indépendant du réseau ferroviaire au Canada et de la sécurité de ce réseau? Vous en rappelez-vous?
    La première chose qui me vient à l'esprit est l'étude CANALERT réalisée en 1995 et rendue publique en 1996. Au départ, l'étude s'intitulait CANALERT 95, et elle a été entreprise à la suite du désastre de Hinton.
    C'est la seule qui me vient à l'esprit.
    Donc vous n'êtes pas au courant d'autres examens de la sécurité ferroviaire entrepris depuis 1995 à l'échelon national, examens assortis de recommandations générales!
    Le Conseil national de recherches a entrepris une étude en 2003, étude qui faisait fond sur celle de 1995, si je ne m'abuse, et dans laquelle on comparait l'ancienne compagnie ferroviaire BC Rail au CN.
    Encore une fois, il s'agit d'une étude portant sur une compagnie en particulier, et non d'un examen national.
    Oui, c'est vrai. Je vois ce que vous voulez dire.
    Donc, à votre connaissance, il n'y en a pas eu d'autres?
    Non, aucune qui me vient à l'esprit.
    De mémoire, savez-vous si notre comité a déjà entrepris un examen formel de la sécurité ferroviaire, disons, au cours des dix dernières années?
    Non.
    Non.
    Vous n'ignorez pas que le comité est actuellement saisi de cet examen mais que le gouvernement a également mis sur pied un groupe d'experts indépendant pour examiner la sécurité ferroviaire au Canada?
    Vous me demandez si nous sommes au courant?
    Oui.
    Oui, nous en sommes au courant.
    D'accord.
    Merci infiniment.
    Merci, monsieur Fast.
    Monsieur Bélanger, vous avez environ deux minutes et demie.

  (1700)  

[Français]

    Bienvenue à Ottawa, monsieur Desrosiers.
    J'ai quelques brèves questions. La question des passages à niveau est-elle maintenant réglée?
    Voulez-vous parler des accidents qui sont survenus au passage à niveau?
    Vous a-t-on accordé des subventions pour éliminer les passages à niveau?
    Non. Les passages à niveau sont encore tous là. Il y en a trois sur le périmètre dont je parle, plus un ou deux autres non officiels, qui sont des traverses.
    Y a-t-il déjà eu des pourparlers en vue de les éliminer?
    Non.
    En avez-vous fait la demande en tant que municipalité?
    Comme municipalité, non.
    La prochaine question ne s'adresse pas à vous mais aux attachés de recherche. Elle se rapporte à votre première recommandation. Pourrait-on nous fournir une petite note nous disant quelle autorité établit les vitesses limites et dans quelles circonstances? Il serait fort utile de le savoir.
    J'ai une autre question sur les voies de contournement. S'il y avait une voie de contournement, voudriez-vous quand même qu'il y ait une sorte de ligne d'embranchement à la gare présente?
    À l'heure actuelle, il n'y a aucune prise de marchandises à partir de la gare. La gare appartient maintenant à la ville; elle n'appartient plus à la compagnie ferroviaire. Le train de passagers s'arrête à Montmagny quand quelqu'un achète son billet sur Internet ou par téléphone. Autrement, il ne s'y arrête pas. On ne peut pas prendre de billets à Montmagny. S'il y avait un autre tronçon à l'extérieur, avec un point de débarquement, cela ferait quand même du travail.
    Êtes-vous au courant du nombre de passagers qui utilisent la voie?
    À partir de Montmagny? Très peu.
    Seriez-vous d'accord pour qu'on interrompe le service à cet endroit?
    Le service ferroviaire ne sert pas...
    Je parle des passagers.
    S'il y avait une voie de contournement qui n'est pas...
    Si on contournait Montmagny et que la gare n'était plus reliée, il n'y aurait plus de service passagers. Êtes-vous d'accord pour laisser tomber ce service?
    Non, on aimerait que le service passagers puisse évoluer, mais actuellement, il est très peu utilisé à cause des autobus et d'autres services. On pourrait conserver le tronçon pour aller prendre la voie de contournement. Je pense que je conserverais le service passagers.
    La ville serait-elle prête à y contribuer?
    Vous posez beaucoup de questions auxquelles je ne peux pas répondre. Il faut considérer les coûts, le volume, etc.
    Je comprends, mais avez-vous déjà considéré cela?
    Non, pas du tout, parce que ce qui nous inquiète actuellement, c'est le 40 kilomètres à l'heure.
    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    J'aimerais remercier nos invités d'avoir été des nôtres aujourd'hui et de nous avoir fourni des renseignements.
    Nous devons discuter des travaux du comité. J'aimerais suspendre la séance pendant quelques minutes, le temps que nos invités quittent la salle. Nous reprendrons alors notre discussion des deux motions.
    Monsieur Bell.
    J'aimerais soulever une question pendant que nos invités s'apprêtent à quitter la salle. M. Fast a demandé à avoir une confirmation concernant l'incident impliquant des superviseurs qui auraient enlevé des autocollants portant la mention « défectueux ». J'ai déjà envoyé la confirmation. Elle se trouve dans le rapport sur la phase deux, dans lequel on a indiqué qu'il n'était pas inhabituel que le superviseur retire un tel autocollant d'un wagon défectueux et qu'il en autorise l'utilisation.
    Silence, s'il vous plaît.
    Monsieur Holliday, je sais que vous avez des documents à remettre au comité. Je vais m'assurer que les documents soient traduits et distribués. Est-ce que vous aviez un dernier mot à ajouter, très brièvement?
    Oui. Je tiens à remercier les membres du comité. Je vous invite à faire une visite de reconnaissance à la subdivision de Squamish et Lillooet de l'ex-BC Rail pour comprendre les conditions géographiques et de relief. Sachez que l'ex-BC Rail avait prévu un programme exhaustif de décapage des rochers. Le CN n'a pas fait de décapage des rochers pendant deux ans. Quant à BC Rail, cinq ans après avoir procédé au décapage des rochers dans une zone donnée, la compagnie répétait l'opération dans la même zone.
    S'agissant des déraillements et de la situation en général, de la nécessité d'adopter des normes pour les voies et le matériel à l'avenir, le piètre entretien de la voie constaté depuis quelques années me porte à croire que nous n'avons encore rien vu dans ce pays. Je pense qu'il y aura une escalade très rapide. Ce que nous avons constaté récemment n'est qu'un petit exemple de ce qui nous attend.

  (1705)  

    Merci beaucoup. Nous vous remercions d'être venus aujourd'hui.
    Nous allons suspendre la séance pour trois minutes.

    


    

  (1710)  

    Merci et bienvenue de nouveau.
    Je dois signaler aux membres du comité, pour qu'ils en prennent note, qu'on me dit que le lundi 23 avril, le ministre et les fonctionnaires du ministères seront disponibles pour notre discussion sur le projet de loi C-6. Je sais qu'il nous faut entendre d'autres témoins mais ce lundi-là, le ministre est disponible et je voudrais pouvoir confirmer sa présence. C'est lundi, pour le projet de loi C-6.
    M. Preuss viendra-t-il également?
    S'il est sur place, il viendra.
    Allez-y, monsieur Julian.
    Monsieur le président, cela signifie que nous allons suspendre nos délibérations sur les chemins de fer pour la durée de cette séance...
    C'est cela.
    ...mais nous avons encore des témoins à entendre. Cela me convient dans la mesure où M. Preuss sera là également.
    Nous prévoyons d'accueillir le ministre et les fonctionnaires du ministère et je présume que M. Preuss sera de la partie. Le ministre sera présent pendant la première heure de notre séance et les fonctionnaires pendant toute la séance.
    Allez-y, monsieur Volpe.
    À quoi le ministre s'attend-il? Est-il ici pour discuter du budget des dépenses ou du projet de loi C-6?
    Pour discuter du projet de loi C-6,
    Nous discuterons du budget des dépenses plus tard. J'ai une date en tête pour que nous puissions entendre le ministre là-dessus.
    Étant donné que nous sommes mercredi, je souhaite confirmer la séance de lundi avec vous tous. Je tiens à ce que chacun comprenne que la séance portera sur le projet de loi C-6. Il s'agit de la comparution du ministre et des fonctionnaires du ministère à l'occasion de ce projet de loi. Je vous en reparlerai plus tard. Je voulais tout simplement vous prévenir que la séance est prévue pour lundi, et savoir si cela vous convient.
    Combien de temps durera l'exposé liminaire du ministre?
    Je n'en sais rien. Je n'ai aucune prise là-dessus.
    Le savez-vous, Brian?
    Moins de trois heures.
    Pourrions-nous demander que ce soit cinq minutes au maximum? Vous, y voyez-vous un inconvénient?
    Je ne pense pas que nous puissions faire cela. Nous pourrions dire sept minutes car c'est le temps que nous fixons aux autres témoins.
    Il ne restera qu'une heure. Les sept membres de l'opposition voudront sans doute recueillir son avis sur le projet de loi et les cinq membres du parti ministériel qui le rencontrent probablement au moins quatre heures par jour chaque jour de la semaine, ne verront pas la nécessité de lui demander...
    Des voix: Oh, oh!
    Faites biffer cela du compte rendu, monsieur le président.
    Je disais cela à la blague.
    Si nous disposons chacun de cinq minutes, cela ne fait que 35 minutes.
    Je vous le répète, je ne veux pas me prononcer à la place du ministre. Tout ce que je sais, c'est qu'il est disponible ce jour-là pour l'étude du projet de loi C-6. Je pense qu'il veut ni plus ni moins confirmer que cela nous convient.
    Je ne sais pas si Brian souhaite — car la cordialité règne ici, du moins pour quelques minutes...
    Monsieur le président, demandez-vous une suggestion, une motion? S'agit-il de nous entendre sur ce que nous souhaitons obtenir du ministre? Il pourrait très bien se présenter et dire: « Vous avez lu le projet de loi. Mon ministère l'a rédigé. Posez-moi les questions que vous voulez. » Ou bien souhaitons-nous...? Est-ce ce que vous attendez de nous?
    Non, pas vraiment. Je signale tout simplement aux membres du comité que le ministre comparaîtra. La réunion durera deux heures, les fonctionnaires du ministère demeurant ici pendant toute la durée et le ministre, pendant une heure.
    Monsieur Jean.
    Je tiens tout d'abord à dire que M. Watson et moi-même sommes exclus de la cordialité générale qui règne ici.
    Nous sommes saisis de deux motions.
    Je peux m'enquérir auprès du ministre. Je peux lui faire part de votre suggestion, à savoir qu'il fasse un bref exposé de cinq à sept minutes pour que l'on puisse poser quantité de questions. Qu'en pensez-vous?
    Une voix: Ne vous attendez pas à un cadeau de ma part à Noël.
    Monsieur Bélanger.
    Monsieur le président, il y a deux questions en l'occurrence. Pouvons-nous faire plus que seulement présumer que M. Preuss viendra?
    On me dit qu'il viendra.
    Merci. Vous vous rappelez que la dernière fois je voulais lui poser des questions mais je m'en suis abstenu, m'inclinant devant votre décision.
    Deuxièmement, savez-vous si ce nouveau gouvernement a imposé une consigne à ses ministres, à savoir qu'ils ne peuvent être présents à une réunion que pendant une heure? Chaque fois que j'ai assisté à une réunion en présence d'un ministre, j'ai constaté qu'il partait au bout d'une heure. Y aurait-il une consigne que j'ignorerais et qui aurait été donnée par le Cabinet pour limiter la présence des ministres à une heure?
    Je vous répondrai que le ministre m'a prévenu qu'il serait disponible pendant deux heures pour l'étude du budget des dépenses. Ainsi, je ne pense pas qu'il s'agisse d'une consigne. Je crois que c'est dicté par l'emploi du temps du ministre.
    Merci beaucoup.
    Dans ces conditions, lundi, nous étudierons le projet de loi C-6 avec le ministre et les fonctionnaires du ministère qui demeureront présents pendant toute la durée de la séance.
    Cela veut-il dire que nous reprendrons la question du CN et de Transports Canada lors des deux séances suivantes?
    Je souhaite organiser la séance de lundi pour qu'il n'y ait de surprise pour personne. Quand nous en aurons terminé avec les motions, je proposerai une réunion du sous-comité tôt, lundi, ou à un autre moment pendant la journée.
    Mais nous reviendrons à la question de la sécurité ferroviaire.

  (1715)  

    Il serait peut-être sage de prévenir les représentants du CN dans les plus brefs délais pour qu'ils puissent venir mercredi et...
    Oui. Nous avons confirmé la présence des représentants du CN, mercredi. Nous attendons encore une réponse du CP. Je peux vous en dire autant mais je ne voulais pas anticiper le résultat de la réunion du sous-comité.
    Et lors de la séance suivante, nous entendrons les représentants de Transports Canada et nous pourrons poser toutes nos questions, forts de tous les renseignements recueillis, n'est-ce pas?
    Encore une fois, à mon avis, je pense qu'il appartient au sous-comité de prendre ce genre de décisions.
    Nous traiterons maintenant de la motion de M. Fast. Je pense que vous l'avez tous sous les yeux, dans les deux langues officielles. Pour gagner du temps, je ne vais pas la lire à moins que ce soit nécessaire. Nous avons des votes à 17 h 30.
    Monsieur Fast.
    Merci, monsieur le président.
    Nous avons entendu un certain nombre de témoins sur la question du repostage. Mme Greene est venue témoigner. Malheureusement, elle n'avait pas toute la liberté de nous parler, ce qu'elle aurait sans doute pu faire s'il n'y avait pas eu des négociations en cours avec le syndicat. À mes yeux, et certainement aux yeux des membres du comité de ce côté-ci de la table, il est nécessaire d'appuyer les entreprises de réexpédition établies au Canada.
    Je voudrais rappeler certains faits qui sont frappants et qu'il faut prendre en considération.
    Depuis plus de 20 ans, les entreprises de réexpédition sont autorisées à offrir leurs services au Canada. Soudainement, il y a environ trois ans, la Société canadienne des postes a contesté cette autorisation accordée à une industrie qui avait prospéré, convaincue que ses activités étaient légales. Jusque-là, la Société canadienne des postes considérait ces activités comme légales mais quelqu'un lui a signalé, sans doute un avocat futé, que le libellé de la version française et celui de la version anglaise de la Loi sur la Société canadienne des postes comportait une différence à l'article 14. La version anglaise traite du relevage et de la transmission des lettres et de leur distribution aux destinataires au Canada. L'expression « au Canada » ne figure pas dans la version française.
    Même si ma compréhension du français est limitée, je vois clairement qu'il y a une différence entre les deux versions. Étant donné cette nuance, l'affaire a été portée jusqu'à la Cour suprême et bien entendu les entreprises de réexpédition ont perdu leur cause. Finalement, il appartient au Parlement de trancher la question.
    J'ajouterai quelques faits supplémentaires. On évalue la contribution du repostage à l'économie canadienne à quelque 300 millions de dollars de bénéfices annuellement. L'industrie s'occupe notamment de la préparation, de la conception, de la traduction, du tri, de l'impression et de la distribution de courrier de moins de 500 grammes, vers des destinations à l'extérieur du Canada. Il y a sept ou huit grandes compagnies au Canada qui s'occupent tout simplement de distribuer le courrier international.
    Après plus de 20 ans, soudainement la règle du jeu a changé pour ces compagnies qui donnaient à la situation une interprétation qui était même acceptée par la Société canadienne des postes. Il s'agit d'un secteur de grande importance au Canada. Il s'agit de milliers d'emplois. En tant que parlementaires, en tant que membres de ce comité, il nous faut intervenir.
    Ma motion est très simple. Elle porte que le gouvernement modifie la Loi sur la Société canadienne des postes pour préciser cet article dans les versions française et anglaise afin de retirer à la Société canadienne des postes le privilège exclusif de distribuer les envois format lettre à des destinataires à l'extérieur du Canada.
    Monsieur Bélanger.
    Je m'abstiendrai. Cette motion est vraiment hâtive et je ne l'appuierai pas. J'encourage certainement mes collègues à en reporter l'examen à plus tard, ce qui serait bien préférable, afin que le comité puisse l'étudier adéquatement. Si le gouvernement me presse de l'adopter, il n'aura pas mon appui.
    Je suis toujours prêt à étudier quelque chose avant de prendre une décision. Nous avons eu une séance où des témoins n'arrivaient pas à se parler les uns aux autres. J'ai encore des tonnes de questions sur l'opportunité de cet examen. Je suis prêt à écouter, mais j'ai des questions sur la portée de tout cela, et je ne peux pas me fier seulement à un document. Je ne sais pas ce que M. Fast a lu, ni où il l'a trouvé, mais je voudrais entendre des témoins et nous devrions procéder à une étude approfondie, notamment des conséquences de l'abolition du privilège exclusif de Postes Canada. Nous n'avons même pas effleuré ce sujet.
    Je ne participerai pas à l'abolition du privilège exclusif si cela compromet la livraison du courrier de première classe partout au pays et particulièrement dans les régions rurales. C'est ce qu'on a affirmé au comité, sans réfutation. Nous devons entendre Postes Canada. Nous devons aussi recevoir les réexpéditeurs. Nous devons demander à nos attachés de recherche ce que dit vraiment la loi. Nous devons avoir une idée de comment les choses se passent ailleurs dans le monde.
    On a discuté de sujets très variés pendant notre séance d'une heure avec ces témoins et je n'ai pas obtenu toutes les réponses dont j'avais besoin. Je pense qu'on précipite les choses. Peut-être que nous en viendrons à cette conclusion. J'en doute, mais je ne peux certainement pas en décider aujourd'hui.

  (1720)  

    Monsieur Laframboise, vous avez la parole.

[Français]

    Vous savez, monsieur le président, je suis un peu déçu de la façon dont on discute de ce dossier aujourd'hui. J'étais celui qui avait déposé la motion pour parler du repostage. J'ai accepté de bonne foi qu'on ne questionne pas les témoins sur ce qui pourrait nuire aux relations de travail. Malheureusement, j'ai un problème, car je n'ai pas pu poser les questions que je voulais. Je me demande si le fait d'adopter cette motion influencera les négociations. La Société canadienne des postes perdra-t-elle des sous une fois cette motion adoptée? Comme le dit M. Bélanger, d'autres modifications seront-elles apportées qui auront pour effet de réduire le service ailleurs parce qu'elle aura à économiser quelque part?
    J'ai un problème. Collègues, vous nous avez demandé de ne pas questionner les témoins la dernière fois. On n'a pas fait asseoir Mme Greene à la même table car on ne voulait pas discuter des relations de travail. Je suggère qu'on suspende jusqu'après les négociations à Postes Canada, ou qu'on refasse comparaître les témoins et qu'on abolisse la condition de ne pas discuter des dossiers de relations de travail. Je suggère que l'on refasse comparaître les témoins au cours d'une réunion, qu'on puisse leur parler des incidences de cette décision sur les relations de travail et qu'on retire le cadre que nous nous étions donné. Aujourd'hui, je serai obligé de voter contre la motion, à moins que M. Fast n'accepte de la reporter. Je préférerais qu'on laisse les négociations se terminer à Postes Canada et qu'on en discute immédiatement après, ou qu'on refasse comparaître les témoins et qu'on puisse parler des problèmes de relations de travail, parce que j'ai peur que cette décision ait une influence sur les négociations sur les relations de travail en cours présentement à Postes Canada. Si tel était le cas, je remettrais cela en question. Je ne voudrais pas que d'autres services soient pénalisés parce que nous avons pris une décision aujourd'hui. À ce chapitre, je rejoins M. Bélanger. Dans les circonstances, notre collègue doit accepter de reporter la motion, sinon je me verrai dans l'obligation de voter contre elle.

[Traduction]

    Monsieur Julian, c'est à vous.
    Je suis aussi un peu perplexe, monsieur le président. Je me suis laissé dire que le ministre avait déclaré vouloir mener une étude en décembre. Je présume qu'il a fait son travail. Le cas échéant, où en est cette étude, où est l'information? On ne l'a pas encore présentée au comité. Je présume que le gouvernement a l'intention de le faire.
    Comme mes collègues, je redoute les incidences de cette mesure. Il y aura une incidence sur les emplois des réexpéditeurs internationaux, mais aussi, peut-on présumer, sur la livraison du courrier rural.
    Je représente la circonscription urbaine de Burnaby—New Westminster, et nous n'avons pas de service postal rural. Mais si nous étions dans une circonscription comme Abbotsford ou Fort McMurray-Athabasca, des collectivités rurales, je voudrais aller au fond des choses pour savoir quelle serait l'incidence possible sur le service postal rural.
    Je pense qu'il est encore trop tôt. Cette motion me prend au dépourvu et je ne l'appuierai certainement pas.
    Monsieur Jean.
    Tout d'abord, précisons qu'il ne s'agit pas d'une motion du gouvernement, même si elle a été présentée par un député du gouvernement. Nous croyons certainement en la démocratie et chacun de nos députés peut exercer son droit de présenter une motion.
    Au sujet de ce qu'a dit M. Bélanger, je crois que nous avons reçu une lettre des réexpéditeurs internationaux. C'est la lettre dont on a parlé. Tous les membres du comité l'ont reçue, reste à savoir s'ils l'ont lue.
    Enfin, pour répondre aux propos de  M. Julian, de M. Laframboise et d'autres députés libéraux, quel effet cela aura-t-il sur le service postal rural, alors que cette pratique existe depuis 25 ans? Les réexpéditeurs internationaux existent depuis 25 ans sans que cela n'ait jamais nui au service postal rural, du moins, rien que l'on puisse prouver. Si cette motion était adoptée, quel effet cela pourrait-il avoir?
    Bien franchement, je pense que la principale préoccupation se rapporte aux mesures à prendre contre les réexpéditeurs internationaux et c'est là-dessus que devrait travailler le comité.
    Je me demande si M. Fast a d'autres commentaires à formuler sur l'urgence de cette question.

  (1725)  

     J'ai sur ma liste le nom de M. Fast et je vais lui demander de ronger son frein encore quelques minutes.
    Monsieur Volpe, vous avez la parole.
    J'espère ne pas trop m'étendre sur le sujet et je vous remercie beaucoup.
    Si je me souviens bien de nos débats, quand nous avons rencontré ces témoins, la question se rapportait au fait que Postes Canada avait demandé une décision judiciaire sur la définition du « privilège exclusif », dans l'une des langues officielles, ou dans les deux langues. Nous voulions nous assurer que cette clarté existait.
    Les tribunaux se sont prononcés sur une définition, mais les tribunaux ne sont pas ceux qui appliquent la loi. Le Parlement du Canada, le gouvernement du Canada, peut déterminer ce qui doit être fait.
    Monsieur Jean, je suis d'avis que si une pratique existe depuis 20 ans, elle n'a sans doute causé de tort à personne. Plutôt que de créer un problème, je préférerais en régler un qui est survenu. Reste à savoir si ce problème est survenu à cause de l'activité elle-même ou parce que Postes Canada a obtenu une définition, après le fait.
    Au bout du compte, il incombera au gouvernement de fixer cette définition. Il doit modifier la loi pour y inscrire sa définition. Que nous le fassions ici ou que cela se fasse à la Chambre, c'est la Chambre qui en décidera, au bout du compte.
    D'un point de vue politique ou tactique, je comprends que le gouvernement veuille savoir si un comité, compte tenu de la dynamique à la Chambre, serait pour cette mesure. Eh bien, franchement, mon collègue M. Bélanger a tout à fait raison. Sans savoir ce que sera cette définition, il nous sera bien difficile de nous prononcer sur le principe dans son ensemble.
    Pour le deuxième point, soit l'incidence sur le service postal rural, je suis de ceux qui croient que Postes Canada est tenu par la loi de livrer le courrier de première classe. Cela signifie que tant qu'il s'agira d'une entité gouvernementale, c'est le gouvernement du Canada qui en assume les coûts. Nous ne devrions pas chercher d'arguments commerciaux du secteur privé sur la façon de le faire.
    J'étais ici à l'époque où Postes Canada et le secteur privé étaient diamétralement opposés. Les choses ont depuis radicalement changé. S'il s'agit d'obtenir un avantage commercial, je comprends. Mais je ne voudrais pas faire le jeu de ceux qui veulent obtenir un avantage commercial par un obscurcissement terminologique. Assurons-nous donc que les termes soient clairs.
    Je comprends ce qu'essaie de faire M. Fast. Un peu plus tôt, en parlant avec mes collègues, nous disions avoir l'impression qu'une motion serait présentée pour laquelle nous voudrions obtenir des précisions. Le gouvernement peut encore choisir de quelle façon il agira.
    Monsieur Fast, je voudrais bien appuyer votre motion, dans son libellé actuel, mais ce sera très difficile, puisqu'il n'y a pas de possibilité de mise en oeuvre, même si je l'appuie. Une fois déposé le rapport du président du comité, le gouvernement devra se présenter à la Chambre, dire voici ce que le comité a déclaré et voici le libellé. Je pourrais alors ne pas vouloir appuyer le libellé proposé cette fois-là par le gouvernement, et on ne sera pas plus avancé.
    Voici ce que je propose, monsieur Fast: parlez-en au ministre, dites-lui la confusion qui règne ici en raison de l'interprétation donnée à ces termes par les tribunaux. Demandez des précisions, puisque nous voulons faire pour le mieux, et nous ne voulons certainement pas que des entreprises ferment leurs portes.
    Allez-y, monsieur Bell.
    Merci.
    Je suis en faveur de certaines choses qu'a dites mon collègue M. Volpe. Je n'ai pas d'objection à ce que les choses continuent comme par le passé. Je parle de la réexpédition de courrier du Canada, à l'extérieur du pays, par des entreprises indépendantes. Il est certain, à mon avis, que Postes Canada doit avoir le privilège exclusif au Canada. Le fait que le système ait fonctionné par le passé...
    Je comprends certainement l'intérêt de la société d'État d'avoir d'autres sources de revenu, qui pourraient peut-être compenser pour des secteurs d'activités moins rentables. Il y a un risque: ces témoins sont venus, nous ne pouvions pas dire tout ce que nous voulions, et quand ils sont repartis, ils présumaient peut-être que la question était réglée, dans notre esprit. Je vois que ce n'est pas le cas. Les points de vue sont divergents, même entre nous, du même parti.
    Je pense qu'une discussion est tout indiquée. Je n'appuierai pas la motion sans que cette discussion ait eu lieu. Mais je dois dire que je suis plutôt enclin à adopter la position présentée par M. Fast.

  (1730)  

    Monsieur Fast, vous avez la parole.
    Le comité peut avoir l'impression, à tort, que j'ai présenté cette motion avec des desseins cachés. Ce n'est pas le cas. Mon objectif était de réagir aux préoccupations soulevées par les réexpéditeurs. En fait, c'est une question de choix du moment. Les réexpéditeurs s'agitent parce qu'il semblerait que Postes Canada a déjà le droit, ou aurait ce droit imminent de demander à ce que les règles soient appliquées, et ils seraient alors forcés de fermer leurs portes. Étant donné que cette pratique existe depuis 20 ans ou plus, nous voulons préserver le statu quo.
    S'il y avait moyen pour le comité de demander aux tribunaux, à Postes Canada ou au ministre de s'abstenir de tout recours judiciaire avant que notre comité ait étudié la question, c'est ce que je souhaiterais faire. On me dit toutefois qu'il y a certains aspects juridiques à prendre en considération. S'il existe une ordonnance d'un tribunal, il serait imprudent pour le ministre ou pour le gouvernement de ne pas appliquer l'ordonnance immédiatement. Cela me préoccupe. S'il y a une autre solution, je serai ravi de l'envisager.
    Je suis préoccupé parce que M. Bélanger a déclaré qu'il n'appuierait pas les réexpéditeurs. Nous parlons d'un secteur important au Canada, qui coexistent avec Postes Canada depuis plus de deux décennies. C'est simplement parce que quelqu'un a constaté l'existence d'une échappatoire, et d'un écart entre les versions anglaise et française que nous nous retrouvons à avoir à demander à la Cour suprême une ordonnance accordant ce privilège exclusif à Postes Canada.
    Voilà ce qui me tracasse. Si quelqu'un peut proposer une meilleure solution pour protéger les intérêts des réexpéditeurs, du moins en attendant que ce problème soit réglé, j'aimerais bien l'entendre.
    Je signale au comité qu'à moins d'une motion visant le report de la motion de M. Fast, ou à moins que M. Fast la reporte, nous devons rester ici et poursuivre cette discussion jusqu'à ce que...
    Je propose de reporter la motion, monsieur le président.
    J'ai une liste d'intervenants, et je la suivrai.
    Monsieur Laframboise.

[Français]

    Je voudrais simplement qu'on se comprenne bien. Tout à l'heure, M. Jean nous a dit que personne ne perdait de revenus. Malheureusement, je n'ai pas pu questionner la présidente, qui nous disait estimer ses revenus à 75 millions de dollars. S'agit-il de pertes escomptées ou de revenus supérieurs?
    Je ne veux pas que Postes Canada s'enrichisse sur le dos des reposteurs. Cependant, je ne voudrais pas que les 75 millions de dollars viennent nuire aux discussions et aux négociations de la présente convention collective. Je ne voudrais pas qu'à cause de notre motion elle dise qu'il lui manque 75 millions de dollars, qu'elle est obligée de couper dans les services ruraux, etc. C'est ce dont je veux m'assurer. Je n'ai pas les réponses à cela aujourd'hui. Je veux qu'on se penche là-dessus. Je ne veux pas que cela nuise aux négociations actuelles, comme vous l'avez suggéré vous-même.

[Traduction]

    Monsieur le président, je reporterai volontiers cette question à la prochaine séance du comité.
    Bien.
    Cette question est suffisamment grave pour que nous en fassions une étude sérieuse.
    L'ordre du jour de lundi est déjà chargé, et je propose le report à une autre séance.
    Mercredi, il ne sera pas trop tard.
    Je ne sais pas s'il serait prudent d'aviser Postes Canada, par l'intermédiaire du cabinet du ministre, du fait que notre comité est saisi de cette question et voudra en traiter avant que Postes Canada fasse quoi que ce soit.
    Bien.
    Nous avons aussi la motion de M. Julian.
    Monsieur le président, elle est redondante. M. Preuss vient lundi. Vous avez déjà permis qu'on pose des questions relatives à la sécurité aérienne dans le cadre de l'étude du projet de loi C-6, et nous pourrons donc poser à M. Preuss des questions sur la sécurité aérienne.

  (1735)  

    À notre prochaine séance, lundi, nous parlerons au ministre et aux fonctionnaires du projet de loi C-6...
    Monsieur le président, la motion est-elle retirée?
    Désolé, en effet, je retire ma motion.
    M. Julian a gentiment retiré sa motion.
    La séance est levée.