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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 069 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 13 juin 2007

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, je vous présente mes excuses d'avoir une minute de retard pour ouvrir cette 69e réunion du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie.
    Madame Brunelle.

[Français]

    Monsieur le président, j'ai déposé hier une motion. J'aimerais savoir si j'aurai le consentement unanime des membres du comité pour en discuter, étant donné que je n'ai pas respecté le délai de 48 heures, ou si je devrai attendre lundi?

[Traduction]

    Les membres ont-ils une copie du texte de la motion?

[Français]

    La motion est la suivante:
Conformément à l'article 108(2) du Règlement de la Chambre des communes, que le Comité de l'industrie entende le ministre responsable du développement économique pour les régions du Québec afin d'éclairer le comité sur la légalité et la conformité au Manuel des allocations et services aux députés du traitement salarial dévolu à M. Daniel Giguère, adjoint politique au ministre Jean-Pierre Blackburn, avec mandat de faire rapport à la Chambre de ses conclusions.

[Traduction]

    On vient de m'informer que cette motion n'a pas fait l'objet du préavis de 48 heures qui est normalement exigé. Mme Brunelle demande donc le consentement unanime des membres pour examiner la notion dès aujourd'hui.

[Français]

    Est-il possible d'en discuter, monsieur le président?

[Traduction]

    Monsieur Byrne.
    Vu la situation, pourriez-vous prendre une décision sur la recevabilité de cette motion, à supposer que la condition du préavis soit remplie, étant donné que cette question semble correspondre davantage au mandat du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre?
    Je suis d'accord avec vous, monsieur Byrne. J'ai reçu le texte de la motion aujourd'hui seulement. Cette motion correspond davantage, me semble-t-il, au mandat du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre ou encore du Commissaire à l'éthique. Je trouve curieux que l'on dépose une telle motion devant le Comité de l'industrie.
    Je vais évidemment demander conseil à la greffière à ce sujet — à condition, bien entendu, que les membres acceptent à l'unanimité d'examiner la motion aujourd'hui même.
    Monsieur Masse.
    C'est une hypothèse de ma part, mais je ne pense pas que le gouvernement va accepter cela. Pourrions-nous demander l'avis du secrétaire parlementaire à ce sujet? Nous avons des témoins à qui nous faisons perdre du temps, et cela vaudrait donc la peine, selon moi, de déterminer si les membres sont unanimes à vouloir examiner cette motion.
    D'accord. Vous avez raison. Je vais donc leur poser directement la question.
    Mme Brunelle a-t-elle le consentement unanime des membres pour examiner cette motion dès aujourd'hui?

  (1535)  

    Très bien. Merci.
    Nous reprenons donc notre ordre du jour. Il est prévu que la réunion dure deux heures, et nous accueillons cinq témoins qui discuteront avec nous des prix du pétrole et des marges de raffinage. Nous menons cette étude conformément au paragraphe 108(2) du Règlement.
    Comme je viens de le dire, nous accueillons aujourd'hui cinq témoins. Premièrement, de l'Association québécoise des indépendants du pétrole, nous accueillons Mme Sonia Marcotte, présidente-directrice générale; M. René Blouin, conseiller principal, et M. Pierre Crevier, président de Les Pétroles Crevier, et membre du comité des affaires économiques de l'AQUIP. Et, de la Canadian Independent Petroleum Marketers Association, nous accueillons Mme Jane Savage, président et chef de la direction. Enfin, de l'organisme L'essence à juste prix, nous accueillons M. Frédéric Quintal, qui en est le porte-parole.
    Je crois qu'il est prévu que les représentants de chaque groupe fasse un exposé liminaire de cinq à sept minutes. C'est ce que j'ai cru comprendre. Peut-être pourrais-je demander à Mme Marcotte de commencer.
    Comptez-vous faire l'exposé au nom de votre association? Très bien; je vous cède tout de suite la parole.

[Français]

    Monsieur le président, membres du comité, permettez-moi d'abord de vous présenter les personnes qui m'accompagnent. M. Pierre Crevier est président du conseil d'administration de l'AQUIP et président des Pétroles Crevier. M. René Blouin est conseiller principal de l'AQUIP. Je m'appelle Sonia Marcotte et je suis présidente-directrice générale de l'Association québécoise des indépendants du pétrole.
    Nous tenons à remercier les membres du comité qui nous ont invités à présenter notre position sur ces importantes questions. Nous le faisons au nom des membres de l'AQUIP, qui regroupe les entreprises pétrolières à intérêt québécois.
     Leur champ d'activité est lié à l'importation, la distribution et la vente au détail de carburant, de mazout et de lubrifiant. Les ventes au détail des entreprises pétrolières québécoises totalisent annuellement plus d'un milliard de dollars.
    Nous ne nous attarderons pas aujourd'hui longuement à l'importance stratégique de la présence des indépendants du pétrole, puisqu'il a été démontré que leur présence et l'apport concurrentiel qu'ils insufflent à l'industrie pétrolière du Québec, notamment grâce à l'importation de produits finis par cargo, permet aux consommateurs du Québec de profiter d'un avantage financier que l'on peut évaluer à 361 millions de dollars par année.
    Aujourd'hui, nous voulons aborder principalement la question des hausses de prix des carburants tant décriées par les consommateurs. Au mois de janvier 1999, le consommateur montréalais déboursait autour de 50 ¢ pour se procurer un litre d'essence. À cette époque, les raffineries de Montréal devaient débourser 11,1 ¢ le litre pour acquérir un litre de pétrole brut. Elles exigeaient un marge de raffinage de 4,4 ¢ avant d'offrir leur essence en vente aux rampes de chargement. Toujours en janvier 1999, la marge du détaillant s'établissait à Montréal à 3,6 ¢ le litre. Cette marge ne permettait même pas de couvrir l'ensemble des coûts d'exploitation d'une essencerie efficace.
    Voyons maintenant comment la situation a évolué. Les plus récentes données disponibles révèlent que, pour le mois de mai dernier, les raffineries de Montréal déboursaient 44,8 ¢ pour obtenir un litre de pétrole brut. Elles exigeaient alors une marge de raffinage de 25,7 ¢ par litre, soit une augmentation de 484 p. 100 par rapport à la situation de janvier 1999.
    Madame Marcotte, je m'excuse.

[Traduction]

    L'interprète demande que vous ralentissiez un peu.

[Français]

    Toujours en mai, la marge du détaillant s'établissait à 4,9 ¢. Depuis, le prix à la pompe continue d'atteindre des sommets. Comme on le constate, les augmentations spectaculaires originent de la progression conjuguée du prix du brut et des marges de raffinage. Les importantes augmentations de profits dans le secteur du raffinage ne sont pas apparues par hasard. Elles sont le fruit d'une stratégie qui a simplement consisté à affaiblir graduellement la concurrence et à créer une rareté artificielle qui fait bondir les prix des carburants.
    Au cours des dernières années, les ruptures sporadiques d'approvisionnement ont touché des distributeurs indépendants et même des camionneurs qui ont connu des problèmes à alimenter correctement leur flotte de camions. Ces signes avant-coureurs nous indiquent que le problème d'approvisionnement est réel. Il est même exacerbé en raison de la fermeture récente de la raffinerie de Petro-Canada à Oakville, qui prive l'Ontario de plus de 100 000 barils par jour de produits pétroliers. Or, ce sont les raffineries du Québec qui déplacent une partie significative de leur production pour combler ce vide. Lorsque l'on sait qu'une grande partie de la production des raffineries du Québec se déplace hors de notre territoire au point où on peut évaluer le déficit québécois à environ 150 000 barils par jour, il y a de quoi être préoccupé.
    Le Canada peut contribuer à initier un mouvement qui permettrait de créer de nouvelles raffineries et, le cas échéant, d'augmenter le nombre d'entreprises engagées dans le raffinage. En plus de constituer un investissement rentable, la perspective de l'installation de nouvelles raffineries au Québec comme ailleurs au Canada fournirait des garanties d'approvisionnement continu aux consommateurs autant qu'aux pétrolières indépendantes, et maintiendrait une pression à la baisse sur les prix. Il s'agit, à n'en pas douter, de considérations qui répondent aux préoccupations de sécurité énergétique du Canada.
     Enfin, l'idée de percevoir une ponction fiscale relative aux profits excessifs des raffineurs nous paraît intéressante. Nous proposons que les recettes de cette mesure fiscale soient remises aux consommateurs moins fortunés. Le Québec a récemment pris des mesures de cette nature sans soulever de tollé.
     Je vous remercie de votre attention.

  (1540)  

[Traduction]

    Merci.
    Madame Savage, est-ce vous qui allez faire l'exposé?
    Très bien.
    Vous avez la parole, madame Savage.
    Permettez-moi, tout d'abord, de vous remercier de votre invitation à présenter les vues de l'Association sur les prix du pétrole et les marges de raffinage.
    Je représente les négociants indépendants en carburant. Ces derniers achètent du carburant de gros. Les négociants indépendants n'effectuent pas le raffinage du pétrole brut et ne fabriquent pas non plus de l'essence; ils achètent de l'essence, surtout à des raffineurs, et la vendent ensuite soit à un détaillant, soit directement au consommateur par l'entremise de leurs stations-service.
    Les hausses du prix de l'essence sont presque toujours directement attribuables à l'augmentation des prix de gros, plutôt que des marges de détail. En fait, la plus récente augmentation des prix de gros est le résultat de marges records du raffineur. Les données indiquent que les marges de détail sont restées relativement constantes au cours des dernières années, mais aussi que les marges du raffineur se sont accrues, en règle générale, au fur et à mesure que la capacité de raffinage diminuait et que la demande de carburant augmentait.
    Par exemple, si l'on compare la situation qui prévalait en mai 2006 à celle de mai 2007, les prix du pétrole au Canada sont passés à 1,12 $, soit une augmentation de 6,5 ¢. Il s'agit là du prix moyen au Canada. Au cours de cette période, le cours du pétrole brut a diminué de 6 ¢ le litre, alors que les marges du raffineur sont passées à 28,8 ¢ — un niveau record — ce qui représente une hausse de 13 ¢ le litre. Il convient de faire remarquer à ce sujet que ces marges du raffineur sont plus importantes que celles qui se pratiquaient en septembre 2005, à l'époque de l'ouragan Katrina.
    On me demande souvent pourquoi le prix de l'essence augmente de nouveau. Eh bien, la réponse simpliste consiste à dire que le prix mondial de l'essence brute est plus élevé, et à rappeler que le Canada fait partie intégrante de l'économie mondiale. Tout cela est vrai. Puisque nous sommes un acteur mondial dans un secteur d'activité non réglementé, il faut bien que nos prix correspondent aux cours mondiaux; autrement, nous risquons de connaître une pénurie d'approvisionnement. Mais, ce qui n'est pas évident dans cette explication, c'est que le prix de gros de l'essence au Canada est non seulement plus élevé qu'il ne devrait l'être, mais nous sommes exposés à des pénuries de carburant et à des hausses importantes de prix au Canada, comme nous l'avons vu l'hiver dernier.
    Comment donc se fait-il que les prix de gros de l'essence soient parmi les plus élevés du continent au Canada, alors que nous sommes plus exposés à une pénurie du carburant? Si vous me permettez, je voudrais expliquer ce phénomène avant de soumettre à l'examen du comité un certain nombre de recommandations bien claires.
    Premièrement, comment se fait-il que les prix de gros de l'essence soient parmi les plus élevés du continent? D'abord, l'offre est insuffisante. Dans plusieurs régions différentes, et notamment en Ontario et dans les Prairies, nous importons de l'essence de l'extérieur du Canada. À la fois l'Ontario et la région des Prairies n'ont aucun accès à la mer pendant les mois d'hiver, ce qui empêche les gros cargos de venir régler les problèmes d'approvisionnement.
    Deuxièmement, nous avons trop peu de fournisseurs. Au Canada, il n'y a qu'une poignée de raffineurs — contrairement aux États-Unis, où il y en a beaucoup plus — qui contrôlent les marchés de gros, si bien qu'il y a peu de concurrence dans les prix au niveau de gros. C'est un marché de fournisseurs. On peut comparer cela aux marchés de détail, où de nombreux concurrents se font la lutte pour fidéliser les Canadiens et de nombreuses stations-service sont sur le point de fermer, étant donné que les marges de détail sont maigres.
    Troisièmement, l'infrastructure des pipelines et des terminaux est contrôlée presque exclusivement par cette poignée de raffineurs. Contrairement aux États-Unis, où les pipelines et terminaux publics sont plus courants, au Canada les négociants, grossistes et indépendants n'ont guère d'accès aux marchés de gros du carburant.
    Pris ensemble, ces trois facteurs — soit l'insuffisance de la capacité de raffinage, le faible nombre d'acteurs et le fait que ces derniers contrôlent entièrement l'infrastructure, à l'exception d'un terminal indépendant à Montréal — ont donné lieu à des prix de gros élevés, une pénurie de carburant et la possibilité de nouvelles pénuries de carburant, pas seulement en Ontario et dans les Prairies, mais là où il n'existe pas de ports en eau profonde, et dans toutes les régions du pays.

  (1545)  

    Le quatrième facteur concerne le fait que, contrairement aux États-Unis, il n'est pas obligatoire au Canada de rendre compte devant le public canadien de ses inventaires. On pourrait soutenir que les produits du pétrole fabriqués par les raffineries constituent des produits essentiels pour la population du Canada. Même si nous travaillons fort afin de réduire cette dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles, le fait est que les Canadiens dépendent encore beaucoup des produits du pétrole. Nous avons besoin de mazout pour chauffer nos maisons, de gazole pour transporter nos produits d'alimentation et des biens de tous types, et d'essence pour emmener nos enfants à l'école, pour faire le trajet entre notre domicile et notre lieu de travail et pour diriger nos entreprises.
    Aux États-Unis, les raffineurs et les exploitants de terminaux font état chaque semaine de leurs stocks au ministère de l'Énergie. Il s'agit d'une mesure de responsabilisation et d'un système de préalerte au sujet de pénuries potentielles, qu'il est ensuite possible d'atténuer. Un tel système de responsabilisation n'existe pas au Canada.
    Le cinquième facteur ou réalité, et dont nous avons eu des preuves manifestes pendant la pénurie de carburant, concerne le manque d'uniformité des spécifications de l'essence par rapport aux États avoisinant le Canada et l'incapacité du ministre, en raison des exigences de la loi actuelle, de renoncer à certaines spécifications clés afin de permettre l'importation d'essence d'États avoisinants.
    Sur papier, le Canada et les États-Unis ont la même norme en ce qui concerne la teneur en soufre de l'essence. C'est la bonne spécification et la teneur est très faible. Par contre, ce que nous avons découvert pendant la période de pénurie d'essence, c'est que même si les réservoirs étaient pratiquement vides en Ontario, aux États-Unis, l'essence coulait à flots, pour ainsi dire, alors qu'il nous était impossible d'en importer en raison des infimes différences entre la façon d'administrer la spécification dans les deux pays.
    Je passe maintenant à nos recommandations, qui sont au nombre de cinq. Je vais vous les présenter rapidement.
    Premièrement, le gouvernement fédéral doit imposer l'harmonisation de nos spécifications avec celles qu'appliquent les États américains avoisinants, afin de s'assurer de la libre circulation des stocks sur les marchés, de sorte que, lors de la prochaine pénurie de carburant, on pourra facilement importer de l'essence et atténuer ainsi les pressions qui s'exercent sur les prix et sur l'offre. À tout le moins, le ministre devrait détenir le pouvoir d'intervenir dans l'éventualité d'une pénurie.
    Deuxièmement, il faut explorer la possibilité de solutions de rechange par rapport à la structure, la propriété et l'utilisation des pipelines et des terminaux, et encourager la participation aux marchés et une offre accrue de produits du pétrole. Au Canada, les pipelines relèvent de la responsabilité du gouvernement fédéral.
    Troisièmement, nous souhaitons que le gouvernement fédéral crée un système permettant de garantir la responsabilité à l'égard du public, système en vertu duquel il serait possible de surveiller sur une base hebdomadaire les stocks de produits essentiels du pétrole. Ceci permettrait non seulement de rehausser la responsabilisation, mais de créer un système d'alerte rapide, afin que les grossistes, les importateurs et les négociateurs indépendants fassent le nécessaire pour renflouer les stocks; ainsi, dans l'éventualité d'une interruption de production dans les raffineries à un moment où les stocks sont bas — et c'est justement cela qui s'est produit en février 2007 en Ontario — nous serions en mesure d'atténuer les effets d'une telle interruption.
    Quatrièmement, nous recommandons que les coûts-bénéfices des échanges de produits entre les raffineries soient réexaminés. Ces derniers ont été approuvés et justifiés pour des raisons d'efficacité, mais il en est résulté une baisse des stocks et une vulnérabilité accrue à des ruptures de stocks. Un autre résultat a été une diminution du nombre d'acteurs, ce qui réduit la concurrence.
    Cinquièmement — et c'est notre dernière recommandation — nous tenons à répéter que, afin de favoriser et de renforcer la concurrence dans la vente de l'essence au détail, nous demandons aux parlementaires d'entreprendre quelque chose qui s'impose à présent, soit la modernisation de la Loi sur la concurrence. En l'absence de mesures visant à moderniser celle-ci, très peu d'efforts sont déployés afin de préserver la concurrence dans le secteur de la vente au détail de l'essence. Nous insistons de nouveau sur le fait que, à la fois sur les marchés de vente au détail et de gros de l'essence, il n'y a pas de meilleur moyen de modérer les prix que la concurrence.
    Je vous remercie.

  (1550)  

    Merci beaucoup, madame Savage.
    La parole est maintenant au représentant de L'essence à juste prix, M. Frédéric Quintal.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Merci, chers membres du comité de permettre cette présentation aujourd'hui.
    C'est ma quatrième expérience depuis quatre ans dans le processus parlementaire. J'ai déjà vu la plupart d'entre vous.
    Je suis observateur et intervenant du secteur du pétrole depuis l'an 2000. Il y a deux ans, j'ai publié un livre sur le sujet, qui est un survol des années 2000 à 2005 sur l'actualité pétrolière au Canada.
    Le but de la rencontre d'aujourd'hui est d'expliquer les récentes fluctuations au raffinage, principalement en avril et mai 2007. Je vais faire un rappel rapide de la situation de la marge de raffinage.
    Au cours des années 1980 et 1990, il y a eu une baisse de la capacité de raffinage, une augmentation de la demande et un système de prix communs sur les produits raffinés. À partir de 1999, la demande a augmenté. La capacité s'est croisée avec la demande, et depuis ce temps, un effet spéculatif s'exerce sur la demande. C'est ce qu'on appelle la fluctuation sur la marge de raffinage.
    Le système de marge de raffinage est en vigueur depuis le 1er juin 1985. Au Québec, Esso en a fait la publication dans les médias le vendredi 21 juin 1985, et la même annonce a été faite à Toronto le 2 juillet 1985. Je présente l'explication dans un documentaire qui sortira à l'automne et auquel je travaille depuis quelques mois.
    Aujourd'hui, on associe beaucoup le prix du pétrole au prix de l'essence. Personne dans l'industrie pétrolière ne s'est empressé d'expliquer aux médias la différence entre le pétrole coté en bourse et les produits des raffineries, qui sont aussi cotés en bourse. Pour la population, c'est encore flou, ambigu et confus, alors que c'est assez simple en réalité. Je vais donner un exemple de matière première sur un autre marché, qui est peut-être plus concret. L'orange est cotée en bourse, mais les jus d'orange ne le sont pas. Il y a une concurrence.
    Je parle de l'annonce importante faite en juin 1985, parce qu'elle a été dénoncée dans le rapport O'Farrell. Monsieur McTeague, je m'en rappelle, vous aviez travaillé à ce rapport. Ce dernier présentait des recommandations au gouvernement conservateur en décembre 1985 afin d'empêcher la mise en place d'un nouveau système de prix publiés des produits raffinés et de faire en sorte que Petro-Canada, qui était alors une société d'État, ne suive pas le reste de l'industrie.
    Mais malheureusement, ces recommandations ont simplement été ignorées. On en subit les pleines conséquences, qui sont associées à l'accord de libre-échange. Les prix des produits raffinés au Canada doivent suivre les prix américains sur la bourse Nymex.
    Depuis avril et mai 2007, sur quoi la valeur spéculative est-elle uniquement fondée? Tous les mercredis, le département de l'énergie américain publie le niveau des inventaires de produits du pétrole brut et de produits raffinés. Si le niveau des inventaires ne répond pas aux attentes des analystes, il en résulte une spéculation à la hausse ou à la baisse. Les inventaires ne sont pas en péril; ils passent simplement de 37 à 36 jours, et non de 2 à 3 jours. Cela ne met rien en péril, mais cela suffit à attribuer une valeur spéculative à un produit qui n'a aucune valeur ajoutée pour le consommateur.
    Le 30 avril, sur le Nymex, c'est le gallon d'essence qui sert de référence au litre d'essence au Canada. Il était à 2,44 $, soit au même prix que le 30 août 2005, en pleine période de forte consommation d'essence pour le déplacement des vacanciers et après le passage de l'ouragan Katrina sur quelque 16 raffineries en Nouvelle-Orléans. Les mois de mai et d'août 2007 sont une période d'accalmie. C'est entre deux saisons. Les raffineries ne produisent pas d'huile à chauffage et la période de forte demande pour les vacances d'été n'est pas encore commencée. Or, on a atteint le même prix record de 2,44 $US le gallon.
    Vers où se dirige-t-on? Si ce n'est pas là la démonstration qu'une crise se prépare, rien ne le démontrera. Le mot crise, comparativement aux années 1980, ne semble pas faire partie du discours des chefs d'État, et c'est malheureux. C'est sans doute attribuable à la mondialisation ou au développement du merveilleux monde des communications et des relations publiques.
    Il serait peut-être bon de faire des interventions politiques musclées. Certains politiciens ici présents m'ont déjà reproché de sortir le spectre de cette expression. En effet, de telles interventions ont eu lieu dans le passé, et elles ont coûté cher. Je vais vous donner un exemple. Le document du vérificateur général a établi clairement que le coût du programme de subvention du pétrole importé de 1974 à 1985 avait coûté 5,8 milliards de dollars.

  (1555)  

    On a dit que ça avait eu comme effet de gonfler la dette canadienne, et on me l'a reproché. Le 1er juin 1985, la dette canadienne était de 190 milliards de dollars, et je ne crois pas que ce soit ça qui l'ait fait gonfler à ce moment-là. Par contre, on a peut-être oublié de mentionner que la politique pétrolière nationale avait permis aux producteurs de pétrole de l'Alberta de faire en sorte que tous les gens situés à l'ouest de l'Outaouais achètent leur pétrole à un prix supérieur au prix mondial pendant 13 ans, soit de 1960 à 1973.
    L'analyse du rapport Bertrand, au sujet de laquelle les pro-pétroliers oublient de mentionner qu'ils n'ont pas passé le test, indique que les raffineurs ont facturé, en dollars constants de 1980, 5,3 milliards de dollars en trop aux consommateurs canadiens. Pourtant, on n'en parle pas. À ce sujet, je parlais plus tôt d'intervention musclée. La dernière grande invention du Parti conservateur a été, l'année dernière, de réduire la TPS de 1 p. 100. Il semble que ce soit le plus loin qu'on se soit rendu en termes d'efforts pour soulager le consommateur. Pourtant, le prix du même produit, avant taxes, au cours de la seule année 2005, soit de janvier à août, a fluctué de 114 p. 100. Entre 1999 et 2007, il a connu des fluctuations de l'ordre de 234 p. 100.
    Si ces pourcentages n'indiquent pas qu'il commence à y avoir une crise pour le consommateur... Voici un autre exemple. L'industrie a connu une crise quand, en mars 1986, le prix du pétrole a beaucoup baissé. Le gouvernement conservateur avait alors décidé d'éliminer ou de réduire plus rapidement un impôt sur le pétrole et le gaz, d'une valeur de deux milliards de dollars, et d'imposer aux consommateurs une taxe additionnelle de 3 ¢ sur l'essence.
    En 1986, on a aidé l'industrie, qui était en crise, mais tout ce qu'on a fait depuis a été de réduire la TPS de 1 p. 100. En février 2003, le budget de M. Manley a permis à l'industrie pétrolière de bénéficier d'une réduction fiscale assez massive. Il s'agissait de permettre que les redevances provinciales soient de nouveau inscrites dans les dépenses, et de faire passer le taux d'imposition de 28 p. 100 à 21 p. 100. J'ai fait le calcul pour un poste seulement, et j'ai constaté que les redevances pétrolières de l'Alberta en 2003, 2004 et 2005, à un taux d'imposition de 21 p. 100, ont permis aux pétrolières de bénéficier d'une diminution d'impôt de 6,5 milliards de dollars. Or, le document de présentation du ministre des Finances parle de 165 millions de dollars pour ces trois années.
    Si vous avez de la difficulté à trouver des façons d'intervenir pour aider les consommateurs, comment se fait-il qu'il soit si facile d'octroyer d'immenses réductions à cette industrie, qui semble multiplier ses profits de façon incroyable, d'année en année?
    Merci d'avoir écouté mon exposé, monsieur le président.
    Merci beaucoup de votre présentation.

[Traduction]

    Nous allons ouvrir la période des questions. Le premier tour sera de six minutes, et le deuxième, de cinq minutes. Comme les membres du comité ne disposent que de très peu de temps, je demande aux témoins de faire de brèves réponses; ce serait grandement apprécié.
    Nous allons commencer par M. McTeague.
    Monsieur le président, je voudrais simplement m'assurer que nous avons reçu les renseignements que j'ai demandés antérieurement concernant la relation entre Esso et le marketing des stations-service de Canadian Tire, de même que les copies pour les députés avant que nous ne mettions la dernière main aux recommandations du comité consistant à proposer la modification de la Loi sur la concurrence de 2002, et ce avec l'appui du Bureau de la concurrence, tel qu'il existait à cette époque-là.
    On vient de m'informer que nous n'avons pas pu trouver de renseignements publics à ce sujet.

  (1600)  

    Avez-vous réussi à trouver des renseignements tout court?
    Nous avons demandé à une de nos bibliothécaires de faire une recherche dans les récentes coupures de journaux, et elle n'a trouvé aucun renseignement public à ce sujet.
    Je suis à peu près certain que c'est dans le Globe and Mail qu'il a été question de cette relation il y a quelque temps, et ce renseignement était donc tout à fait public. En tout cas, je vous remercie.
    Monsieur le président, peut-être pourriez-vous vous charger de l'autre élément, étant donné que je n'ai plus de copie des recommandations que nous avons faites en 2002, aussi étrange que cela puisse paraître.
    Celles de 2003?
    Celles de 2002 et de 2003, de même que la réponse faite par le gouvernement de l'époque, monsieur le président — renseignements que nous pourrions prendre en délibéré.
    Je vous remercie.

[Français]

    Je remercie les témoins d'avoir comparu devant notre comité. M. Quintal a soulevé un point à plusieurs reprises.

[Traduction]

    Je voudrais tout de même mentionner que la dynamique continue à évoluer. Par contre, le fait que vous mettiez l'accent sur les raffineries me semble tout à fait opportun et important. Nous avons souvent parlé du pétrole brut, et les médias continuent à en parler, mais nous savons tous très bien que ce n'est pas du pétrole brut que nous mettons dans les réservoirs de nos voitures.
    Il a beaucoup été question du coût de l'essence dans les stations-service. Les gens s'énervent beaucoup en se disant qu'il y a collusion, mais je pense qu'on pourrait sans doute remplir le SkyDome, ou ce qu'on appelle maintenant le Centre Rogers de Toronto, avec les dizaines de milliers de propriétaires de stations-service qui existent. Personne ne semble parler les quatre raffineries qui contrôlent la production d'une région à l'autre du Canada.
    Étant donné que le Bureau de la concurrence a déclaré qu'il n'y a pas de preuve d'activités anticoncurrentielles, et que ce dernier n'a pas pris le temps d'examiner l'incidence globale des fusions, qui sont antérieures aux préoccupations que nous avons exprimées dernièrement, je me demande…
    Madame Savage, vous avez parlé des recommandations qu'il conviendrait d'examiner et qui permettraient non seulement de rétablir la concurrence et des prix appropriés, mais aussi de s'assurer que la population ontarienne, entre autres… Je constate que dans l'ouest du Canada, mon collègue, le président du comité, supporte des prix qui sont encore plus élevés que ceux pratiqués en Ontario. Donc, quelles mesures pouvons-nous prendre afin de nous assurer que les Canadiens pourront toujours s'approvisionner, ce qui constitue à mon avis une préoccupation plus importante pour les consommateurs — peut-être même la préoccupation la plus importante? On peut toujours contester le prix; il est trop élevé. D'ailleurs, je vous remercie d'avoir fait état dans votre exposé des grosses marges qui sont pratiquées, et je dois dire que je suis très préoccupé, comme devraient l'être tous les Canadiens, au sujet de la suffisance de nos stocks, notamment en hiver.
    Pourriez-vous donc nous parler un peu de votre recommandation au sujet du suivi des stocks et en quoi cela pourrait nous aider?
    Comme je l'ai déjà dit, selon les membres de notre association, le suivi des stocks comporte deux avantages.
    Premièrement, cela permettrait de renforcer la responsabilisation. Il ne s'agit pas là d'une mesure interventionniste; il y a en d'autres qui le sont davantage. Ceci permettrait au moins de connaître l'état des stocks — encore une fois, à condition que les parlementaires soient convaincus que les produits du pétrole constituent en quelque sorte des produits essentiels pour les consommateurs.
    Le deuxième serait la création d'un système d'alerte rapide. Sachez qu'on m'a déjà mise au défi d'expliquer en quoi cela pourrait être bénéfique. Mais je ne saurais trop insister sur la nécessité de se doter d'un système de ce genre afin de pouvoir importer la quantité de produits dont nous avons besoin. Quand il y a eu une interruption de production à la raffinerie de Nanticoke en février 2007, il est évident que les stocks ont atteint leur plus bas niveau. Donc, l'incidence de cette interruption de la production à la raffinerie en question a été très considérable. Si les stocks avaient été plus importants et si nous avions été au courant, l'incidence aurait certainement été moindre.
    Du côté de l'infrastructure, nous savons que l'Ontario est avantagée en quelque sorte, étant donné la présence d'une toute petite compagnie indépendante dans la région de Montréal et de Québec. Je pense qu'il s'agit de Norcan. Si elle n'était pas présente, les prix auraient été plus élevés, à mon avis.
    Êtes-vous en mesure de nous expliquer pour quelles raisons, malgré des marges du raffineur de 25,7 ¢ le litre, ce qui correspond à 10 milliards de dollars par année — et là je me fonde sur les statistiques de Ressources naturelles Canada, qui nous dit que 41 milliards de litres d'essence sont vendus chaque année — la concurrence n'est pas plus vive dans ce secteur, ce qui permettrait de faire diminuer ces grosses marges bénéficiaires? Comment se fait-il qu'il n'y en ait pas davantage dans ce secteur d'activité? Pourquoi n'y a-t-il pas de nouveaux concurrents qui entrent sur le marché, ce qui remettrait en question ces marges bénéficiaires, de telle sorte que ce sont les consommateurs qui en profiteraient?
    Il y a essentiellement deux raisons à cela.
    À court terme, il devrait y avoir une abondance de stocks en Ontario et dans les Prairies en ce moment, et cela aurait certainement dû être le cas pendant la pénurie de carburant. Mais, le fait est qu'il y a un certain nombre de restrictions qui influencent la capacité d'acheminer le produit vers les zones qui en ont besoin — pas seulement parce que ces régions n'ont pas accès à la mer et qu'il n'est donc pas possible d'y envoyer les gros bateaux d'approvisionnement; l'autre raison est le fait que les pipelines au Canada sont totalement contrôlées par les raffineries, contrairement aux États-Unis.
    À plus long terme, et voici la deuxième raison — d'ailleurs, il faudrait certainement en discuter avec les raffineries — qui concerne les aspects économiques liés à la construction d'une nouvelle raffinerie. Il s'agit là d'une question à plus long terme. Il ne fait aucun doute que cela coûte cher. En même temps, j'ai l'impression qu'ils s'appuient sur une analyse économique très, très conservatrice, selon laquelle il faut qu'il y ait de gros bénéfices pendant très longtemps avant que cela ne vaille la peine d'en investir dans une telle entreprise.

  (1605)  

    Elle est passée de 6 ¢ à 10 ¢ et, comme le dit M. Quintal, à 25 ¢, et elle pourrait très bien atteindre 1 $; malgré tout, on ferait encore face au problème fondamental, à savoir que les raffineries sont contrôlées par un tout petit nombre de compagnies. En fait, si je vous ai bien compris, personne n'acceptera de prendre de tels risques.
    Entre-temps, Ressources naturelles Canada et le Bureau de la concurrence semblent vouloir se reposer sur leurs lauriers et se contenter des comparaisons qu'ils établissent — comparaisons qui sont également employées par le gouvernement de l'Ontario, d'après ce que j'ai pu voir — entre Toronto et Buffalo; Montréal et Burlington, Bangor, au Maine, et l'ensemble de la production des provinces maritimes, etc. — et ce dans l'ensemble du pays. Êtes-vous convaincue qu'il s'agit-là d'une comparaison juste et honnête, ou cherche-t-on simplement à fourvoyer le consommateur, comme cela a été le cas par le passé?
    Selon moi, ce n'est pas une comparaison juste. Par exemple, en raison du problème des spécifications et du fait que nous n'avons pas pu importer de l'essence en Ontario pendant la période de pénurie, il y avait un écart de 12 ¢ le litre — ce qui est énorme dans notre industrie — entre le prix de gros à Toronto et celui pratiqué à Detroit. Or l'écart devrait être d'environ 1 ¢ le litre, alors que ce n'est jamais de 1 ¢ le litre.
    Il y a donc des problèmes structurels. Encore une fois, c'est un marché fournisseur — un marché fournisseur. Le prix de gros est essentiellement fixé en fonction du niveau le plus élevé que le marché est prêt à accepter. Or ce dernier est beaucoup plus élevé que celui pratiqué dans les États américains avoisinants.
    Merci, monsieur McTeague.
    Nous passons maintenant à Mme Brunelle.

[Français]

    Mesdames et messieurs, bonjour. Je vous remercie de votre présence.
    Nous sommes réunis ici aujourd'hui parce que les consommateurs s'inquiètent. On essaie de comprendre, tous ensemble, comment on pourrait intervenir. Il s'agit d'un marché où la concurrence s'exerce plutôt mal puisqu'on arrive à des fluctuations de prix vraiment importantes.
    Madame Marcotte, l'augmentation découle de la hausse du prix du brut et des marges de raffinage. J'aimerais qu'on parle surtout des marges de raffinage. Il semble que le raffinage coûterait entre 2,5 ¢ à 4 ¢ le litre. Votre association avait déjà mentionné qu'une marge de raffinage suffisante, pour faire de bonnes affaires, se situait entre 4 ¢ et 6 ¢ le litre. En 2007, elle a atteint 28 ¢ le litre, c'est-à-dire 5 à 7 fois trop.
    Quelles solutions pourrait-on envisager? La diminution des capacités de raffinage a-t-elle une influence? On a constaté que le nombre de raffineries avait beaucoup diminué. Est-ce la véritable problématique? De quelle façon pourrait-on régler ce problème?
    Il faut comprendre la dynamique des prix, comment les prix sont fixés. Premièrement, en ce qui a trait aux prix à la pompe, on sait très bien que le secteur du brut est important. On sait que le prix du pétrole brut n'a pas cessé d'augmenter depuis plusieurs mois, voire plusieurs années. Il en est de même pour les marges de raffinage.
    Cependant, les marges du secteur du détail à Montréal, par exemple, sont demeurées assez constantes, variant entre 4 ¢ et 6 ¢. D'ailleurs, nous avons ici un document que vous pourrez consulter, éventuellement. On constate donc que le prix du pétrole brut a augmenté, que la marge de raffinage a augmenté et que la marge de détail est demeurée stable.
    Pourquoi la marge de raffinage a-t-elle augmenté de la sorte? Il faut voir ce qui se passe aux États-Unis. Les prix qui sont fixés à Montréal, par exemple, sont le reflet de ce qui se passe aux États-Unis. Les prix sont établis par rapport à ce qui s'y passe. Par exemple, en 1981 aux États-Unis, 189 compagnies faisaient fonctionner 324 raffineries et, en 2005, il ne restait que 55 compagnies et 148 raffineries.
    On peut donc constater qu'il y a eu une concentration du marché. Si on allait voir un peu plus loin, on découvrirait que les 15 compagnies les plus importantes aux États-Unis contrôlent 85,3 p. 100 de la capacité de raffinage. Cette concentration a une influence directe sur les marges de raffinage.
    En fait, il se crée une rareté artificielle parce que les stocks de produits pétroliers sont maintenus à des niveaux très bas, suffisants pour répondre à la demande, mais vraiment très serrés sur le plan de l'offre. Dès qu'un événement se produit, on voit les marges bondir.

  (1610)  

    On nous a dit cette semaine, pas plus tard que lundi dernier, qu'il y avait moins de raffineries, mais qu'elles étaient plus efficaces. J'ai de la difficulté à croire qu'elles soient plus efficaces étant donné que nous vivons une telle situation.
    En effet, si elles étaient plus efficaces, les prix devraient diminuer et non pas bondir. C'est vraiment l'effet du petit nombre de joueurs dans ce secteur, de la concentration et du fait qu'ils sont en mesure de maintenir les stocks de produits pétroliers assez bas, juste assez pour répondre à la demande, mais insuffisants pour répondre aux imprévus qui pourraient se produire.
    Monsieur Crevier, vous suggérez dans votre document qu'une des solutions pourrait être l'ajout de raffineries, ce qui pourrait garantir l'approvisionnement — qui constitue toujours une inquiétude — et provoquer une diminution des prix.
    Comment, selon vous, le gouvernement pourrait-il intervenir à cet égard?
    Le gouvernement peut certainement poser des gestes pour assurer aux investisseurs que les majeures, celles qui sont déjà là, ne pourront pas mettre de pression sur le nouveau joueur qui ferait une installation. Il pourrait également garantir à un pays producteur qu'il pourra assurer l'approvisionnement en brut et que le gouvernement local pourra aider l'investisseur à installer une nouvelle raffinerie.
    Monsieur Quintal, vous nous parlez d'interventions politiques plus musclées. Avez-vous des suggestions quant à nos muscles?
    Le premier choc pétrolier s'est produit en 1973, à une époque où le gouvernement avait peut-être plus le courage de poser des gestes autoritaires, notamment en gelant le prix du pétrole. En 2007, compte tenu de la mondialisation et de la force des compagnies, il serait probablement exagéré de penser ainsi, mais certains pays producteurs le font.
    À un extrême se trouve le Venezuela. M. Chavez vend l'essence peut-être trop en deçà du prix du marché, à 12 ¢US le gallon avec les données de 2005, ce qui équivaut à 3 ou 4 ¢ le litre. Cependant, il y a également d'autres pays producteurs, où des sociétés d'État vendent de l'essence à la population sous les prix du marché, et elles font tout de même de bonnes affaires.
     Si ce que fait Hydro-Québec avec le kilowattheure offre une certaine rentabilité, pourquoi cela ne fonctionnerait-il pas avec les produits pétroliers? Le kilowattheure aux États-Unis est coté à la bourse Nymex et il fluctue quotidiennement, alors que chez nous, il est réglementé et permet quand même à l'entreprise de faire de bonnes affaires.
    Il suffirait de trouver un milieu raisonnable entre les deux et peut-être de reconsidérer l'Accord de libre-échange, que les Américains n'ont pas hésité à ne pas reconnaître pour ce qui est du bois d'oeuvre. Ils ont fait traîner ce dossier pendant trois ans et demi. Pourquoi le Canada ne ferait-il pas la même chose pour les produits pétroliers en reconsidérant également cette fameuse clause?

[Traduction]

    Merci.
    C'est maintenant à M. Van Kesteren.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais remercier tous nos témoins pour leur présence parmi nous aujourd'hui.
    Cette étude est un peu frustrante, en réalité. Je vous dis qu'elle est frustrante, et la dernière fois, j'ai dit que — et là, je voudrais en profiter pour tirer au clair mes propos — que c'est un peu comme les OVNI: c'est-à-dire que tout le monde croit qu'ils existent, mais les gouvernements continuent à nous dire qu'ils n'existent pas. Il en va de même pour le prix de l'essence.
    Plus nous approfondissons la question, plus nous obtenons des explications assez sensées qui concernent les prix actuels de l'essence. Quand je regarde l'activité à la Bourse de Toronto, je constate que les actions de Shell et Imperial — et, si je ne m'abuse, ces deux dernières compagnies appartiennent à Exxon et à toutes les autres — continuent de se négocier; donc, on peut encore acheter des actions, et ces compagnies continuent à faire rapport à leurs actionnaires. Je ne dis pas que cela correspond nécessairement à mon optique, mais je commence maintenant à me faire une opinion. J'ai l'impression que ces gens-là ont enfin compris et ont donc décidé de cesser de se tuer pour que leurs raffineries continuent à tourner à plein régime. Ils préfèrent que les stocks soient justes et, par conséquent, ils n'ont pas trop besoin de se préoccuper d'une surabondance et de la possibilité de dumping sur le marché.
    Ne seriez-vous pas d'accord pour dire qu'il s'agit là tout simplement d'une bonne stratégie commerciale? Y a-t-il dans cela quelque chose d'illégal?
    Je vois que vous dites oui de la tête. M. Quintal voudrait peut-être se prononcer sur la question.
    Y a-t-il quelque chose d'illégal dans tout cela?

  (1615)  

[Français]

    Non, le système actuel respecte très bien les règles du marché. Il n'y a aucun problème à cet égard. Par contre, l'avertissement du rapport O'Farrell, qui prévenait le gouvernement, à l'automne 2005, que le système d'Esso consistant à publier le prix de ses produits raffinés risquait de diminuer, voire de faire disparaître la concurrence au raffinage, était sérieux. Les recommandations n'ont pas été reconnues à ce moment-là. On en vit les pleines conséquences.
    Même à cette époque, dans les journaux, la ministre des Ressources naturelles d'alors, Mme Pat Carney, parlait encore de prix de l'essence/prix du pétrole. Comme je l'ai déjà expliqué, l'arrivée du nouveau système des prix publiés sur les produits raffinés faisait entrer en jeu une nouvelle donne: la marge de raffinage. Cette marge n'a pas fluctué à cette époque, mais elle a commencé à le faire sérieusement en 1999, quand la demande a crû et qu'elle a croisé la capacité.
    La capacité de raffinage fait l'objet d'une certaine concurrence. Comment se fait-il alors qu'à une commission parlementaire à Québec, il y a trois ans, M. Perez, de l'Institut canadien des produits pétroliers, et M. Montreuil représentant le Québec, avaient dit qu'en deçà d'une production de 85 p. 100, une raffinerie n'était pas rentable, et qu'un minimum de profits nécessitait une production de 93 p. 100? Subitement, en avril 2007, il y a environ six semaines, on constate que la capacité de raffinage est à 88 p. 100. Elle n'est même plus de 93 p. 100 et on fait encore de très bonnes affaires.

[Traduction]

    Oui, je comprends, et je suis d'accord, mais n'êtes-vous pas prêt à reconnaître qu'il s'agit là d'une bonne stratégie commerciale? Je suppose que vous avez répondu à ma question, mais finalement, qu'est-ce qui empêcherait un groupe de personnes — d'investisseurs, disons — de collaborer afin de construire une raffinerie et, donc, de rehausser la concurrence? C'est ça qui compte ici — le libre marché, et la libre entreprise. L'enjeu est évidemment considérable; nous constatons que les marges bénéficiaires sont importantes.
    Pourquoi n'observons-nous pas ce genre de phénomène?
    Vous posez une bonne question, et les membres de notre association voudraient certainement se pencher sur cette situation, comme d'autres en Ontario, pour ne citer que cet exemple-là. Il serait possible d'acheminer plus de produits pétroliers vers l'Ontario, par exemple. Nous avons doublé le pipeline, construit un nouveau terminal à Toronto, et pris d'autres mesures du même genre. Tout cela suppose un investissement d'argent faramineux. Par exemple, le prix de gros à Toronto est plus élevé que le prix de gros aux États-Unis, mais on pourrait soutenir qu'il n'est pas assez élevé pour attirer plus de fournisseurs vers… Et, encore une fois, comme vous le dites, c'est ça les affaires.
    Par contre, il importe que vous et d'autres parlementaires comprennent que le marché libre fonctionne très bien quand il y a un grand nombre de concurrents. Ce qui soutient la concurrence, c'est le nombre de concurrents.
    Voilà justement l'un des aspects du problème: nous n'en avons pas assez. Et ils ont assez bien réussi à diminuer la concurrence, ce qui est bon pour les affaires, et bon pour leurs investisseurs; vous et moi pouvons tous les deux investir dans ce domaine.
    J'ai une dernière question à poser. Il me semble bien avoir suffisamment de temps pour en poser encore une.
    Certains ont laissé entendre, et la Commissaire de la concurrence, Mme Scott, nous a même dit à notre réunion de lundi que les prix dans certains marchés réglementés sont en réalité légèrement plus élevés que sur les marchés non réglementés. Êtes-vous d'accord avec ce que nous a dit la commissaire et, dans la négative, avez-vous des preuves à l'appui d'une opinion contraire?
    Madame Savage, vous avez 30 secondes. Je pense que Mme Marcotte voudrait également intervenir.
    Je vous remercie.
    Si nous nous appuyons sur les données de Michael J. Ervin, qui sont les données généralement employées sur le site Web de Ressources naturelles, sur le plan de la statistique, il n'y a pas de différence entre les marchés réglementés et les marchés non réglementés. Ceux qui sont en faveur de la réglementation vont présenter les données de façon à favoriser la conclusion selon laquelle il est préférable d'avoir un marché réglementé. Ceux qui sont contre les marchés réglementés vont présenter les données différemment. Mais si vous examinez la situation sur une longue période, en utilisant les données de M. Ervin, vous allez voir qu'il n'y a pas une différence de prix importante, et je dois dire que je suis donc en désaccord avec Mme Scott à ce sujet.
    Madame Marcotte.

[Français]

    Les prix au Québec sont réglementés; il y a un prix minimum. Si vous prenez les données de M. Irvine et les données brutes, si vous prenez le prix de l'essence à la pompe et que vous enlevez les taxes, car elles varient d'une province à une autre, si vous comparez les prix du Québec à ceux de l'Atlantique, de l'Ontario et de l'Ouest canadien, vous constaterez que c'est au Québec qu'on a les prix les plus bas avant taxes. Je pense que Mme Savage est d'accord avec moi sur cela.
    Plusieurs facteurs expliquent cet état de choses. Tout d'abord, au Québec, il y a une diversité d'entreprises de détail grâce aux indépendants, qui sont nombreux. On a également un importateur indépendant qui agit comme une sorte de chien de garde par rapport aux raffineurs.
    Le Québec a une réglementation et des prix qui sont parmi les meilleurs au Canada.

  (1620)  

[Traduction]

    Merci.
    Merci, monsieur Van Kesteren.
    C'est maintenant à M. Masse.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais commencer par examiner le concept d'un marché mondial, et il s'agit là en réalité d'un modèle commercial qui s'appuie sur un marché capitaliste libre. Nous venons d'entendre les commentaires de M. Van Kesteren à ce sujet. Vous avez, sur notre marché, un certain nombre de sociétés d'État qui fixent les politiques gouvernementales touchant l'extraction. De plus, vous avez l'OPEP, qui est essentiellement un organe politique, et auprès duquel plusieurs présidents américains ont fait des demandes explicites ou proféré des menaces, en quelque sorte, pour que ce dernier commercialise un volume plus important ou, parfois, un volume moins important. De plus, les États-Unis possèdent une réserve de pétrole stratégique, à laquelle ils ont déjà eu recours à deux reprises, si je ne m'abuse, afin de faire baisser le prix de l'essence. Les avis sont partagés sur le degré de succès d'une telle stratégie, mais le fait est qu'ils ont également augmenté leur capacité de raffinage, qui atteint à présent un milliard de barils.
    Ma première question est donc celle-ci: étant donné tous ces différents facteurs, à qui les consommateurs peuvent-ils demander des comptes s'il n'existe pas de politique gouvernementale à ce sujet? À mon avis, les divers gouvernements ont la possibilité d'établir des zones cibles. Est-ce que cela se fait dans d'autres pays et les politiques gouvernementales liées à l'extraction et au raffinage ont-elles une incidence sur le marché mondial dans son ensemble?
    Je ne peux pas vous parler du secteur du raffinage; je ne représente que les négociants indépendants. Je suis entièrement d'accord avec vous pour dire qu'il n'y a aucune responsabilisation au Canada et qu'il n'y en a guère — mais davantage, tout de même — chez nos voisins du Sud, aux États-Unis. Je suis également d'accord avec vous pour dire qu'à l'échelle mondiale, il y a une certaine intervention sur le marché libre, notamment de la part de l'OPEP — la réserve stratégique du pétrole constitue probablement un moyen d'intervention moindre, mais l'OPEP en est certainement un. Donc, le marché mondial n'est pas entièrement libre mais, en règle générale, le prix que nous adoptons au Canada pour le carburant — par exemple, le prix au port de New York — s'applique à un produit circulant librement.
    Oui, mais le fait est que différents pays ont établi des politiques afin de protéger les consommateurs, ou peut-être se contentent-ils de fixer certains objectifs, que ce soit des prix stables, des prix inférieurs, etc.
    Je prends bonne note de votre recommandation, madame Savage — d'ailleurs, cette question s'adresse aux autres témoins également. Le Canada aurait-il avantage à prévoir un minimum de capacité de raffinage au Canada, de façon à assurer une certaine stabilité au niveau de la capacité sur laquelle on peut compter tout le temps? Les États-Unis ont dépensé des milliards de dollars afin de créer des réserves. Il va sans dire que ce serait très coûteux et que cela risquerait de créer des problèmes environnementaux. Pour n'importe quel pays, c'est une décision importante que d'adopter une telle politique. Pourquoi ne pas prévoir un pourcentage minimum de raffinage de nos propres ressources naturelles de façon à créer des emplois à valeur ajoutée et à garantir un approvisionnement minimum, avant que nos stocks ne soient vendus à un autre pays qui fera ce que nous aurions dû faire au Canada?
    Plutôt que de fixer une certaine capacité de raffinage de notre propre pétrole brut, il serait préférable, en ce qui nous concerne, de s'attaquer à la question de la responsabilité. Nous pourrions toujours aller plus loin, s'il le faut, mais à mon sens, il faudrait au moins connaître l'état de nos stocks, car c'est justement à ce niveau-là qu'il peut y avoir un problème. Si les consommateurs et leurs représentants n'ont aucune connaissance du mode de fonctionnement de l'industrie, il est évident qu'ils ne pourront savoir ce qui se passe au sein de l'industrie ni à quel moment nous risquons de subir une hausse des prix ou une pénurie. Donc, cela me semble être le strict minimum.
    Mais, on peut toujours aller plus loin. On peut imposer des stocks minimums. On peut prévoir que les stocks ne peuvent pas être inférieurs à tel niveau, et si cela se produit, il faut prendre des mesures. Ce serait, évidemment, une mesure plus interventionniste.
    On pourrait même aller plus loin. L'ajout aux étapes fait qu'on en arrive à un degré d'intervention supérieur, mais je dirais que nous devons à tout le moins connaître le niveau des stocks, et cela nous semble être une approche relativement simple.

  (1625)  

    Y a-t-il d'autres observations à ce sujet?

[Français]

    Il est certain que le contrôle des inventaires est très important. Comme elle l'a dit plus tôt, les inventaires étaient vraiment bas au mois de février, quand la raffinerie de Nanticoke a fermé ses portes. La même chose s'est produite au Québec en 2004, quand la raffinerie de Petro-Canada a fait défaut en plein mois de janvier. Les raffineurs attendent à la dernière minute avant d'aviser les gens que leur raffinerie a des problèmes depuis déjà une, deux ou trois semaines. En conséquence, les inventaires diminuent. Il serait très important de contrôler régulièrement les inventaires et d'imposer un inventaire minimum à chaque raffineur.

[Traduction]

    Serait-il avantageux pour les Canadiens qu'il existe des normes en matière d'essence semblables à celles qui sont prévues aux États-Unis? Par exemple, dans l'industrie automobile, nous avons des normes en matière de sécurité qui cadrent parfaitement avec celles des États-Unis, et ces normes harmonisées facilitent le transport dans ce secteur. Serait-il donc possible d'établir des normes du même genre pour les produits du pétrole, afin que nous et les États-Unis ayons les mêmes attentes? Cela rejoint la question que vous avez soulevée au sujet des marchés d'autres États.
    Oui, absolument. J'irais même jusqu'à dire que, jusqu'à un certain point, il est irresponsable de ne pas les avoir. À mon avis, il est tout à fait inadmissible que les spécifications canadiennes ne cadrent pas avec celles des États américains avoisinants, ou que nous n'ayons pas au moins la capacité d'établir des spécifications uniformes.
    Est-ce que notre essence est généralement plus sale et pire que…
    Non, pas du tout. La norme est la même pour ce qui est de la teneur en soufre, qui est une exigence tout à fait critique pour l'essence. La spécification est la même. La seule différence se situe au niveau de l'administration, si bien que pendant la pénurie de carburant, nous avons constaté, au moment d'aller chercher du carburant ailleurs, qu'il était d'une qualité différente de celle qu'il nous fallait au Canada. Il reste que ce carburant ne nuirait aucunement à l'environnement, si jamais nous avions la capacité de déroger à notre spécification pour permettre des importations.
    Très bien; merci.
    Merci, monsieur Masse.
    La parole est maintenant à M. Byrne.
    Merci infiniment pour votre exposé.
    Pour ce qui est de l'étude de cas — c'est-à-dire, les exemples de réglementation des prix de l'essence au niveau provincial — si l'on voulait réduire les prix de l'essence, on dirait que les faits ne permettent pas de conclure à une telle réduction; mais, en ce qui vous concerne, la réglementation par les provinces du prix de l'essence comporte-t-elle des avantages pour le consommateur?
    J'ai récemment mené une étude des prix dans les quatre provinces de l'Atlantique qui réglementent les prix, et chaque province, y compris le Québec, a une réglementation différente dont les objectifs sont différents. D'après les résultats de ma recherche, aucune des provinces qui a opté pour la réglementation n'avait l'intention de réduire ainsi les prix de l'essence. En général, cette réglementation avait pour objet de rehausser la concurrence sur les marchés de détail en garantissant une certaine marge au niveau de la vente au détail. On pourrait à cet égard citer l'exemple du Québec. Dans ce contexte, il s'agit de stabiliser les prix en les ramenant à un certain niveau, plutôt que de voir le genre de phénomène qu'on a observé il y a six mois à Toronto, où les prix de l'essence changeaient 12 fois par jour. Donc, les cinq provinces qui ont opté pour la réglementation visaient la stabilisation des prix.
    Il y a aussi la question de la transparence — autrement dit, lorsque les consommateurs font le plein — du moins, certains consommateurs — ils auront la certitude que le prix a été établi par l'entremise d'un mécanisme transparent, plutôt que par des raffineurs ou des pétrolières. Dans certaines provinces, c'est la transparence dans les régions qui est jugée avantageuse. Car il peut y avoir des différences de prix radicales d'une région à l'autre. Par exemple, sur un marché urbain, les prix peuvent être bien inférieurs que sur un marché rural ou un marché éloigné. Les citoyens qui se trouvent sur un marché éloigné trouvent enrageant de constater de grandes différences de prix.
    Voilà donc le genre de problèmes que la réglementation tend à régler.

  (1630)  

    Les marges au niveau du détail sont relativement faibles, comparativement à celles s'appliquant aux deux autres procédés — c'est-à-dire le cours du pétrole brut et la marge du raffineur. Certains craignent que la réglementation des prix de l'essence ait pour résultat de faire baisser les prix et, ce faisant, de réduire de façon importante la concurrence qui s'exerce sur le marché de détail. Si nous envisageons de réglementer les prix de l'essence, serait-il justifié, dans certaines conditions, de réglementer le prix du raffinage?
    Vous parlez essentiellement de la réglementation du prix de gros de l'essence. Une certaine intervention serait possible, à mon avis. Le véritable danger qui se présente lorsqu'on réglemente le prix d'un produit au niveau de gros… peut-être vous souvenez-vous de la réglementation des prix de l'électricité en Californie? Il faut faire très attention quand on intervient sur le marché pour réglementer le prix d'un produit; sinon, on risque d'interrompre l'approvisionnement. Par exemple, si le prix de gros de l'essence au Canada était limité à un niveau correspondant à 10 ¢ le litre de moins qu'à New York ou ailleurs, les raffineurs au Canada, étant donné que nous sommes dans un marché libre, exporteraient la totalité de leur produit, à moins d'être obligés — et il s'agirait d'un autre degré d'intervention — de vendre leur carburant au Canada.
    Autrement dit, il faut frapper tout le monde en même temps si vous décidez d'intervenir dans un secteur du marché.
    Madame Savage, si j'ai bien compris, ce que vous nous dites essentiellement, c'est que la solution consisterait peut-être à avoir davantage de raffineries indépendantes qui pourraient approvisionner les négociants indépendants.
    Qu'ils soient indépendants ou non, il faut qu'on puisse les approvisionner. Ce serait certainement utile d'avoir plus de fournisseurs, parce que cela suppose une plus vive concurrence. Donc, plus de stocks, plus de concurrence, plus de capacité, et plus d'infrastructure. Si tout cela peut se faire, il sera possible d'améliorer l'approvisionnement.
    Si l'approvisionnement n'est pas meilleur, c'est surtout en raison du régime de propriété des pipelines, qui est basé sur l'infrastructure, et c'est quelque chose qui pose vraiment problème.
    Mme Jane Savage: Effectivement.
    L'hon. Gerry Byrne: Et c'est peut-être lié à nos politiques.
    Je laisserai le soin à l'Office national de l'énergie, par exemple, de faire des recherches à ce sujet. Mais, il me semble bien qu'il serait possible d'offrir une proportion de la capacité des pipelines à de nombreux propriétaires du pipeline, par exemple, sans perturber le marché. En fait, je dirais même que cela aiderait le marché.
    Monsieur Byrne, monsieur Blouin voudrait faire un commentaire en réponse à votre question.

[Français]

    J'aimerais compléter la réponse pour vous expliquer que ce qui protège le mieux les consommateurs, c'est la présence de la concurrence. Si le Québec est intervenu dans le secteur de la vente au détail des produits pétroliers, c'est parce qu'il y a eu une crise majeure en 1996, de sorte que l'essence se vendait 35 ¢ à la pompe et 56 ¢ à la raffinerie pour celui qui voulait aller chercher un litre d'essence avec son camion.
    Cela n'avait aucun sens. Dans de pareilles conditions, on allait assister, dans les mois suivants, à la disparition complète de l'ensemble du secteur indépendant. Pourquoi le gouvernement est-il intervenu? Pour s'assurer qu'on allait maintenir un nombre d'entreprises raisonnablement important dans le secteur du détail pour que la concurrence continue à s'y exercer.
    Quand on examine la situation 10 ans plus tard, on s'aperçoit que cela a donné de bons résultats, d'abord parce que le secteur indépendant est demeuré fort, ensuite parce qu'on a encore un importateur indépendant qui permet de maintenir les prix des raffineries à un niveau semblable à celui de New York. Aussi, tout compte fait, au Québec, les prix hors taxes, comme l'a dit Mme Marcotte, sont moins élevés que dans toutes les autres régions canadiennes. Nous estimons que l'intervention réglementaire modérée du Québec a donné de bons résultats. Elle est perfectible, bien sûr, mais elle a donné de bons résultats.

[Traduction]

    Merci, monsieur Byrne.
    Nous passons maintenant à M. Carrie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai une question pour Mme Savage, si elle veut bien me répondre.
    Vous dites que si nous avions une plus grande capacité de raffinage, plus de raffineurs et plus de compagnies, les marges du raffineur baisseraient. Nous aurions une plus vive concurrence, ce qui donnerait lieu à une baisse du prix de l'essence. C'est ça que vous essayez de dire?

  (1635)  

    En effet.
    Aux États-Unis, ils ont un plus grand nombre de raffineries et la concurrence est plus vive. Avez-vous constaté que leurs marges du raffineur et leurs prix sont généralement inférieurs?
    Le coût du pétrole brut plus la marge du raffineur donne le prix de gros. Les prix de gros au Canada sont supérieurs à ceux pratiqués aux États-Unis.
    Le sont-ils de beaucoup? Je regarde les statistiques, et j'aimerais bien que vous nous fournissiez celles que vous avez utilisées. Vous avez mentionné Ervin. J'ai des statistiques indiquant que la marge actuelle du raffineur au Canada est de 22,1 ¢, par rapport à 25,4 ¢ aux États-Unis, ce qui veut dire que la marge au Canada est un peu inférieure. Depuis le début de l'exercice, c'est 16,2 ¢ par rapport à 15,6 ¢ aux États-Unis, si bien que c'est légèrement supérieur ici. Mais cela n'explique aucunement la différence importante dont nous parlons ici.
    Avez-vous des statistiques différentes qui indiqueraient une différence considérable au niveau des prix de gros? Pourriez-vous nous les fournir?
    Oui, certainement. Je ne peux pas me prononcer sur vos chiffres, étant donné qu'ils ne cadrent pas avec les miens.
    Mais, ils varient tout le temps, n'est-ce pas?
    Tout à fait.
    Je peux certainement vous fournir les données relatives aux prix du gros occasionnels.
    Nous avons reçu les représentants de Ressources naturelles, et ils ont remis un tableau à tous les parlementaires. Ils nous ont indiqué les prix, incluant les taxes, pratiqués dans différents pays du monde. Ce tableau faisait état d'une différence de 0,4 ¢ entre le Canada et les États-Unis, le prix étant inférieur de 0,4 ¢ aux États-Unis.
    Comment peut-on expliquer cela?
    Il s'agit de prix de détail?
    D'après ce qu'on dit sur le tableau, il s'agit des prix internationaux de l'essence.
    Donc, il s'agit sans doute des prix de détail en général.
    Il s'agit des prix excluant les taxes et les prix à la pompe — excusez-moi. Le prix à la pompe varie, mais le prix excluant les taxes — comprenant le prix du pétrole brut, du raffinage, et de tout le reste — est assez uniforme, d'après ce qu'on voit ici.
    Votre tableau indique une courbe plate pour l'ensemble de ces différents pays.
    Oui. Il s'agit du Canada, des États-Unis, de l'Italie, de la France, du Royaume-Uni, de l'Espagne et de l'Allemagne.
    Quand je parle des différences entre le Canada et les États-Unis en ce qui concerne le prix de gros, je parle d'une différence de quelques cents le litre. Nous ne sommes pas en train de vous dire que les prix de gros pratiqués au Canada sont supérieurs de 30 ¢ le litre à ceux qu'on retrouve aux États-Unis. Ce n'est pas du tout le cas; il y a une marge de 6 ¢ à 8 ¢ le litre entre les prix au Canada et ceux pratiqués aux États-Unis.
    Mais voilà la question que je vous pose en tant que parlementaire: une différence de 6 ¢, de 7 ¢ ou de 8 ¢ est-elle importante? Quand il s'agit d'en parler avec les consommateurs, selon moi, elle compte. Mais ça, c'est mon opinion personnelle.
    Je pense que si vous posiez la question à n'importe qui, on serait d'accord avec vous — et il en va de même pour la majorité des parlementaires. Il reste que je serais curieux de connaître la différence. Je voudrais voir vos statistiques pour que nous tirions au clair toutes ces données.
    Pas de problème.
    Je voudrais poser la question que voici à nos témoins. Qu'est-ce qui constitue un niveau de bénéfices excessifs? Comment peut-on calculer cela? Dans quelles conditions estimez-vous qu'une loi sera appropriée?
    Madame Savage.
    Parlez-vous d'un niveau de bénéfices excessifs pour les raffineries?
    Comment peut-on évaluer cela?
    Je trouve intéressant que vous ayez utilisé le mot « excessif ». Sonia pourra peut-être répondre à votre question. Je ne pense pas que ce soit mal de vouloir gagner de l'argent, mais il y a un niveau de bénéfices qui…
    Il faut surtout que les consommateurs comprennent qui réalisent les bénéfices. Nos membres, c'est-à-dire les détaillants, se font souvent reprocher cela, alors que ce ne sont pas les détaillants qui réalisent les bénéfices; ce sont les raffineurs.
    Je vais céder la parole à Sonia pour vous répondre.
    Vous avez 30 secondes.
    Madame Marcotte.

[Français]

    Examinons, par exemple, les rapports financiers des grandes pétrolières: en 1999, les marges de profit des entreprises de raffinage étaient d'environ 5 ou 6 ¢. Elles faisaient déjà de l'argent à cette époque avec ce montant. Alors on peut penser que de 5 à 6 ¢ représentent des profits raisonnables. Mais quand cela augmente, c'est là que ça commence à être des profits excessifs et actuellement, la marge de profit, au mois de mai, se situait aux environs de 25,7 ¢. Je pense qu'on peut vraiment qualifier ça d'excessif.

  (1640)  

[Traduction]

    Si le gouvernement adopte des règlements qui donnent lieu à une augmentation de la capacité de raffinage…
    Votre temps de parole est écoulé, monsieur Carrie. Désolé.
    D'accord.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant le tour de M. Vincent.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame Marcotte, un peu plus tôt, vous avez cité des données mondiales indiquant qu'il y avait 189 firmes possédant 324 raffineries. En 2005, il y avait 55 firmes et 148 raffineries. Avez-vous les données pour le Canada?
    Au Canada, je crois que c'est passé de 44 à 17 raffineries. C'est très semblable, en termes de proportions, à ce qu'il y a aux États-Unis, car les données que vous avez mentionnées sont les données américaines.
    Croyez-vous que ces 17 raffineries restantes sont plus performantes, en termes de capacité de raffinage?
    Je n'ai pas évalué cette question. Il est certain qu'il se peut qu'elles produisent davantage par raffinerie mais justement, si elles disent être plus efficaces, normalement ça devrait coûter moins cher et non pas plus cher. C'est vraiment parce qu'il y a une concentration du marché, parce qu'il n'y a pas assez de concurrence dans ce marché-là qu'on se retrouve avec des prix très élevés. C'est la même chose aux États-Unis et ça se reflète ici au Canada.
    Monsieur Quintal, je vous pose la même question. Vous avez mentionné que les raffineries fonctionnaient à 88 p. 100 de leur capacité et non à 93 p. 100. Pensez-vous que c'est une pression artificielle exercée sur le consommateur, c'est-à-dire qu'en diminuant le volume de raffinage, on crée une demande, et dès qu'il y a un imprévu, l'essence devient plus rare et le prix monte?
    Il est certain qu'un propriétaire de raffinerie, qui produit par exemple 100 000 barils de pétrole par jour et qui s'aperçoit qu'il fait de plus en plus de profits en maintenant une production stable... Il faut se demander pourquoi cette entreprise n'a vraiment pas peur de perdre ses parts de marché alors qu'elle maintient une production égale et que les profits augmentent, ce qui ne se passe pas dans d'autres secteurs.
    On parlait de la diminution du nombre de raffineries. C'est sûr qu'un exemple, au Québec, est celui d'Ultramar à Saint-Romuald, dont la capacité de production est passée, au fil des années, de 160 000 à 200 000 barils par jour, puis à 216 000 barils par jour en 2003, pour ensuite s'accroître encore de 20 000 barils. Le nombre de raffineries a diminué, certaines ont accru leur capacité, peut-être en raison d'améliorations d'ordre technologique. D'autre part, le 3 septembre 2003, Petro-Canada a annoncé la fermeture de sa raffinerie à Oakville pour éviter de se conformer à la règle sur le nouveau taux de soufre au Canada. Elle a renoncé à une production de 85 000 barils par jour pour, en échange, accroître de 15 000 à 20 000 barils par jour sa production à la raffinerie de Montréal. Cela représente un déficit de 65 000 barils par jour. Je tiens à rappeler cet événement-là. Petro-Canada avait indiqué que pour se conformer à la nouvelle règle sur le taux de soufre, il lui en coûterait environ 250 millions de dollars en frais de conversion alors que le démantèlement de la raffinerie d'Oakville et l'accroissement de la production à la raffinerie de Petro-Canada à Montréal ont coûté le même montant.
    Que pensez-vous, tous et chacun, des recommandations du Bloc québécois? La première est d'imposer une surtaxe de 500 millions de dollars sur les profits des pétrolières. La deuxième touche l'abrogation de l'amortissement accéléré pour les investissements dans les sables bitumineux lorsque le prix du brut excède un seuil se situant entre 40 $ et 50 $. Le gouvernement a annoncé cette mesure dans son dernier budget, mais elle s'appliquera seulement dans trois ans. La troisième recommandation concerne l'abrogation des changements apportés au régime fiscal applicables aux ressources naturelles en 2003, qui permettent aux pétrolières de diminuer leurs impôts de 250 millions de dollars supplémentaires par an. La quatrième est de faire payer les pétrolières pour les dommages environnementaux qu'elles causent par l'établissement d'un plafond d'émission, doublé d'une taxe sur le carbone et d'un mécanisme d'échange de permis. Que pensez-vous de ces recommandations faites au gouvernement au sujet des pétrolières?
    Je vous dirais que la preuve n'est pas à faire que les compagnies pétrolières ont certainement les moyens de verser davantage sur le plan fiscal. On constate cela dans leurs rapports annuels qui font état de profits record année après année. D'autre part, vous parlez de certaines ponctions qui pourraient être faites auprès des raffineurs. Je vous rappellerai simplement qu'au Québec, il y a eu une « crise budgétaire » la semaine dernière. On a assisté à une partie de bras de fer et le gouvernement a décidé d'ajouter 150 millions de dollars à son budget pour satisfaire aux demandes du Parti québécois, ce qui a permis de faire adopter le budget.
    Pour financer ce montant, le gouvernement a décidé d'augmenter l'impôt des compagnies pétrolières et des banques de 9,9 à 11,9 p. 100. À ce que je sache, ça n'a pas créé de tollé au Québec et je ne pense pas que, si le gouvernement veut aller chercher un peu plus d'argent chez ceux qui en ont beaucoup plus, ce soit une injustice qui sera dénoncée par beaucoup de gens.

  (1645)  

    En ce qui a trait à la fiscalité et aux pétrolières, si on observe ce qui se passe un peu partout dans le monde, Hugo Chavez, dans le cadre de sa révolution pétrolière, au Venezuela, a fait passer la redevance pétrolière de 1 à 16 p. 100. C'est ce qu'on disait dans un documentaire présenté hier soir à RDI. Également, au Canada, au cours des dernières années, comme le dit le Giving away the Alberta Advantage, un rapport de l'institut Parkland, de 1992 à 1997, pendant que des pays maintenaient des redevances élevées sur le pétrole, l'administration Klein aurait tellement négocié à rabais les redevances pétrolières qu'elle s'est privée de tout près de 3,5 milliards de revenus par année. Un autre exemple est l'annonce, le 3 septembre 2003, de la fermeture de la raffinerie de Petro-Canada à Oakville. Cette décision a peut-être constitué une riposte — malheureusement ça demeure du domaine de l'hypothèse —, mais cette même année, le gouvernement Ontarien de M. Ernie Eves avait augmenté le taux d'imposition des compagnies de transformation. Pourquoi a-t-il pu s'agir d'une riposte? Parce que l'annonce de la fermeture à Oakville a été faite le jour même du lancement de la campagne électorale des conservateurs provinciaux de l'Ontario, le 3 septembre 2003.
    M. Vincent a pris plus de temps que prévu. C'est maintenant à M. Bev Shipley.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue, et merci d'avoir bien voulu participer à cette discussion fort intéressante sur les prix de l'essence.
    En 2003, le Bureau de la concurrence et le président à l'époque, c'est-à-dire le Commissaire à la concurrence, a déclaré ceci: « Nous n'avons jamais trouvé de preuve de quelque type de collusion que ce soit, sauf très localement, lorsque quelques stations se regroupent pour garder les prix à un certain niveau. » À votre avis, y a-t-il collusion, et pouvez-vous me dire si, selon vous, il y a collusion aux fixations de prix abusifs dans ce secteur d'activité?
    Selon moi, ce n'est pas le cas.

[Français]

    Je ne crois pas non plus qu'il y en ait. Ils n'ont pas besoin de se parler. Ils sont un petit nombre de joueurs. Il y a peu de joueurs sur le marché et ils savent donc très bien qu'en maintenant les stocks à un niveau assez bas, il réussiront à créer une pression sur les prix. Ils n'ont pas besoin de se parler, car c'est à leur avantage de limiter le volume de pétrole sur le marché.

[Traduction]

    À votre avis, le Bureau de la concurrence devrait-il faire enquête de nouveau sur cette question, et est-ce que le gouvernement devrait aller de l'avant et demander une autre enquête sur les prix de l'essence?

[Français]

    Non, je ne le crois pas. Ce n'est pas là qu'est le problème.

[Traduction]

    Madame Savage, vous avez abordé brièvement la question d'un système d'alerte rapide, et je disais que vos commentaires à ce sujet étaient fort intéressants. Pourquoi n'avons-nous pas mis sur pied un tel système?
    Aux États-Unis, un tel système a été créé au départ pour des raisons de défense. Je m'érige un peu en juge en vous disant cela, mais je pense que, s'agissant des produits du pétrole, les États-Unis prennent très au sérieux la question de la sécurité de l'approvisionnement. Au Canada, étant donné que nous sommes un producteur de pétrole brut net, par le passé, nous avons toujours été relativement décontractés sur ce plan-là, comparativement aux États-Unis, bien que la pénurie de carburant nous ait permis de comprendre que la disponibilité du pétrole brut n'a rien à voir; le véritable enjeu est la capacité de raffinage.
    Pensez-vous que les changements qui se sont opérés ces dernières années devraient nous amener à changer notre philosophie?
    Est-ce que le Canada devrait changer sa philosophie? C'est-à-dire que nous devrions nous intéresser de plus près à la question de la sécurité de l'approvisionnement en produits du pétrole, oui.
    Voulez-vous intervenir, Sonia?

[Français]

    Je n'ai rien à ajouter.

[Traduction]

    Vous avez parlé de l'absence de responsabilité en ce qui concerne les stocks. Je pense bien que vous avez présenté le problème dans ces termes-là. Comment donc devrions-nous nous attaquer à ce problème? Je sais que vous en avez un peu parlé tout à l'heure, mais si nous voulons faire quelque chose, comment devrions-nous nous y prendre, d'après vous?

  (1650)  

    Je pense que, dans un premier temps, nous devrions nous appuyer sur le modèle américain. Ce modèle est axé sur les régions, par exemple. Il est évident qu'un ministère doit assumer la responsabilité de ce projet, et j'imagine que Ressources naturelles Canada est le mieux placé pour le faire mais, c'est mon opinion personnelle. Nous devons examiner la situation des régions, en essayant de voir lesquelles sont les plus vulnérables, et peut-être commencer dans une seule région. On pourrait commencer par instaurer un tel système dans les régions qui n'ont pas accès à la mer, les Prairies et l'Ontario, par exemple, mais on pourrait également inclure des régions comme le Québec. Même si ce dernier a un terminal indépendant, il arrive parfois pendant l'hiver que la rivière soit complètement gelée et que les bateaux ne puissent pas passer, si bien que le Québec est également vulnérable, même si on pourrait dire qu'il est moins vulnérable que d'autres régions. On pourrait donc adopter une approche de ce genre.
    Si les autres ont une opinion à ce sujet, je les invite à la partager avec nous. Je pose mes questions en bloc, parce que je n'aurai qu'une possibilité de le faire.
    Il vous reste un peu plus d'une minute, monsieur Shipley.
    Très bien. Il y a un élément qui m'intéresse, parce qu'on me dit qu'il faut faire de gros investissements pour accroître notre capacité de raffinage, mais quand je regarde les chiffres de M. Quintal, et notamment les profits réalisés par Esso — c'est-à-dire les marges du raffineur — je constate qu'ils sont à un niveau record. Leurs bénéfices ont augmenté de plus de 100 p. 100 en six ans. Donc, je me demande ce qui les empêche de le faire. Que ce soit 100 millions ou 50 milliards de dollars, peu importe, puisque les marges sont faramineuses. Et, si les marges sont faramineuses, c'est quoi l'obstacle, à votre avis?

[Français]

    Il y a plusieurs éléments dont il faut disposer pour pouvoir procéder à la réalisation d'un tel projet. D'abord, il faut avoir la capacité financière. Ce n'est pas rien. Construire une raffinerie peut coûter deux, trois ou quatre milliards de dollars. C'est un premier élément.
     Le deuxième élément est qu'il faut avoir non seulement la capacité de la construire, mais aussi la capacité de la faire fonctionner par la suite face à des géants pétroliers, dont les ressources financières sont pratiquement illimitées.
    C'est la raison pour laquelle, lorsque nous avons proposé la construction éventuelle, au Québec, d'une nouvelle raffinerie, nous avons toujours suggéré que les gouvernements utilisent leurs relations internationales pour s'associer à des pays producteurs de pétrole qui, eux, ont les reins assez solides pour s'embarquer dans un projet comme celui-là.
    Si de pareils partenaires viennent mettre l'épaule à la roue, cela devient un projet possible et qui fonctionnera. Si nous n'avons pas des partenaires financiers aussi solides que ceux-là, nous craignons qu'une fois la raffinerie construite, elle doive affronter soudainement une grande concurrence et que les marges de profit dans ce secteur s'affaissent systématiquement durant un certain nombre d'années. Avec des ressources financières qui ne seraient pas inébranlables, cette entreprise pourrait faire faillite assez rapidement.

[Traduction]

    Je suis désolé de vous interrompre, monsieur Shipley, mais votre temps est écoulé depuis un moment. Désolé.
    Nous passons maintenant à M. Masse.
    Merci, monsieur le président.
    Il y a une chose dont on n'a pas beaucoup parlé jusqu'ici, et c'est la modernisation des pompes elles-mêmes dans les stations-service, et ce qui devra être fait à l'avenir, étant donné l'introduction de nouveaux biocarburants.
    Aux États-Unis, il y a un programme visant à mettre l'E85 sur le marché. Au Canada, il n'y a que deux stations qui l'offrent, me semble-t-il, et donc, quelle politique gouvernementale s'impose à cet égard? Avez-vous des suggestions à faire concernant les mesures à prendre pour mettre de tels produits sur le marché. Si nous maintenons l'approche actuelle, étant donné que nous n'arrivons même pas à accroître notre capacité de raffinage, il me semble improbable que l'on réussisse à investir dans les stations services elles-mêmes. À mon avis, les producteurs ont une responsabilité à ce chapitre. Avez-vous des idées sur les éléments à incorporer dans une éventuelle politique gouvernementale dans ce domaine? Les États-Unis ont un programme de copaiement dont General Motors fait aussi la promotion.
    Avez-vous des idées sur ce qu'on peut faire pour créer ce genre d'infrastructure au Canada?
    Non, pas vraiment.
    Ah, bon.
    Il reste que c'est quelque chose de très important. Nous voulons que les automobilistes aient accès à ces technologies plus propres. Les profits à la pompe, les salaires versés aux PDG et même les dividendes de payés aux actionnaires atteignent tous des niveaux records. Et, dans l'un des documents très intéressants qu'on nous a donnés — mais que je n'ai pas sous les yeux maintenant — on indique que le cours du pétrole brut a doublé entre 1996 et 2007. Les taxes sont restées relativement inchangées, mais les pourcentages attribuables au raffinage et au marketing ont triplé.
    Nous n'avons pour le moment aucun plan visant à créer l'infrastructure qui permettrait de mettre sur le marché, par le biais des stations-service, ces nouvelles technologies plus propres. Comme l'industrie elle-même n'a pas de plan précis à ce chapitre, est-ce quelque chose qu'il faut imposer et devrions-nous l'imposer?

  (1655)  

[Français]

    En fait, pour ce qui est des nouveaux produits comme les biodiésels et les biocarburants, les distributeurs indépendants ont commencé à les mettre sur le marché bien avant que ce soit demandé par les gouvernements. Cela fait 15 ans que l'éthanol est vendu au Québec, et probablement en Ontario. Ce sont les distributeurs indépendants qui l'ont d'abord offert. Aujourd'hui, au Québec, certains distributeurs indépendants commencent à offrir du biodiésel, dans le cadre de projets-pilotes. Ils n'attendent pas, ils sont des instigateurs dans ce domaine. Il s'agirait peut-être de soutenir leurs actions.

[Traduction]

    Si vous me permettez d'ajouter quelque chose, je dirais que je suis parfaitement d'accord. Par exemple, le seul site où l'on vend l'E85 en Ontario est une station d'UPI, qui est un distributeur indépendant. Ce dernier prend de gros risques en offrant ce carburant étant donné le prix actuel de l'éthanol — qui est élevé par rapport à l'essence — il est bien obligé de faire payer son E85 beaucoup plus cher que son essence conventionnelle. Donc, cela suppose un risque commercial, mais les négociants indépendants attachent beaucoup d'importance à la diversification et à la planification en matière de marketing. C'est pour cela que nous sommes toujours à l'avant-garde pour ce qui est des biocarburants.
    En réalité, vous devriez poser cette question aux raffineurs.

[Français]

    Je vais vous donner un exemple dans un autre domaine. Avec la croissance des profits faramineux sur le marché, il y a eu certains essais scientifiques afin d'élaborer des produits comme l'hydrogène liquide.
    En Californie, il y a quelques années, Shell a crée des stations-service ou a ajouté à des stations-service les structures possibles pour pouvoir approvisionner les véhicules en hydrogène. Personnellement, je pense que cela a constitué un bon travail de relations publiques afin de dire aux gens que des tentatives étaient faites pour offrir l'hydrogène sur le marché. Le réseau se limite à quelques stations-service. Les gens qui veulent abandonner l'essence pour l'hydrogène sont malheureusement condamnés à demeurer dans le secteur où se trouvent ces stations-service. C'est comme si la compagnie indiquait sa bonne volonté par le biais d'un exercice de relations publiques mais que, dans le fond, elle n'avait pas l'intention d'en faire plus.
    D'autre part, lorsque les essences et les produits bio vont faire leur entrée sur le marché, il faudrait peut-être éviter l'erreur de la multiplication des recettes de raffinage. La Californie a sa recette pour le CARB gasoline, le MidWest américain, l'Illinois ont leur recette pour produire l'éthanol. Des recettes pour doser le taux de soufre dans l'essence ont été élaborées en 1999. Lorsque la règle sur la teneur en soufre a été établie, en 2005, on ne possédait pas le même échéancier que les Américains. Il y avait un décalage de six mois. Il faudrait faire attention, avec l'arrivée de nouveaux carburants plus environnementaux, et essayer d'éviter une dispersion. Il faudrait se tourner davantage vers des produits standard et uniformes.

[Traduction]

    Vous avez mentionné la Californie.
    Il ne vous reste que quelques secondes, monsieur Masse. Soyez bref, je vous prie.
    Quelle sera l'incidence sur le marché de cette proposition visant à lier la production de produits du pétrole et d'essence aux émissions de gaz à effet de serre? A-t-on cherché à analyser les éventuels effets d'un tel projet? Je sais qu'il s'agit d'une simple proposition pour le moment, mais quelle est la position des représentants de l'industrie à ce sujet? Il est évident que certains produits disparaîtront si cette proposition est retenue.
    Madame Savage.
    Oui, vous avez raison. Nous n'avons pas vraiment analysé les effets potentiels, mais il va sans dire que c'est un progrès du point de vue de la protection environnementale.
    Merci, monsieur Masse.
    C'est maintenant à M. McTeague.
    Merci.
    Je voudrais en revenir à la question soulevée par M. Carrie au sujet de l'affirmation selon laquelle — et je l'ai entendue à maintes reprises — l'essence au Canada coûte moins cher que l'ex-impôt aux États-Unis. Je crois que l'harmonisation des spécifications de l'essence canadienne, qui sont à peu près les mêmes d'un bout à l'autre du Canada, avec celles des États-Unis pourrait coûter assez cher au gouvernement du Canada, étant donné qu'il existe tant de qualités différentes et que les spécifications sont aussi nombreuses. Êtes-vous de cet avis, madame Savage?
    Les spécifications sont différentes d'un État à l'autre aux États-Unis. Je vous parlais de celles qui touchent la teneur en soufre, qui est la même dans les deux pays.
    Donc, il ne serait pas normal de demander au ministère des Ressources naturelles de comparer les prix au Canada et aux États-Unis sans tenir compte de cet élément important, à savoir l'existence de douzaines de spécifications aux États-Unis.
    Oui, je comprends ce que vous voulez dire. Vous avez raison. Nous les appelons des carburants de boutique.
    Je vous demande donc si vous estimez que les carburants de boutique devraient donner lieu à une augmentation des prix, ce qui explique pourquoi les prix au Canada devraient être bien inférieurs.
    Mais, toujours certaines inquiétudes en ce qui concerne la collecte de données. J'étais surpris de vous entendre dire que MJ Ervin continue à afficher des données au nom du gouvernement canadien. Ce comité a répété à plusieurs reprises qu'il faudrait créer un organe plus transparent, par opposition à une organisation dont le financement provient en grande partie des plus grosses raffineries et pétrolières du Canada. Ne craignez-vous pas que les données qui sont fournies ne soient pas aussi justes ou aussi transparentes qu'elles devraient l'être? Ne pensez-vous pas que le gouvernement canadien, plutôt que l'industrie elle-même — c'est-à-dire ceux qui sont les yeux et les oreilles de l'industrie canadienne — devrait établir ses propres repères?

  (1700)  

    Oui, absolument. À mon avis, c'est important. La transparence est extrêmement importante. MJ Ervin est vraiment la seule source d'information à l'heure actuelle, et je n'ai aucun moyen de savoir si son information est juste ou non. Mais, d'un point de vue purement philosophique, je dirais que vous avez raison.
    Cela me semble normal. Je ne voudrais pas qu'il soit autrement dans d'autres secteurs d'activité.
    L'autre jour, M. Carrie a posé une question sur les raisons pour lesquelles il existe des pénuries de certains types d'essence. J'ai constaté la même chose en venant ici depuis Pickering. À plusieurs stations-service Esso, il n'y avait plus d'essence, ni super ni intermédiaire. À votre avis, pourquoi cela s'est-il produit? Est-ce à cause des spécifications? Est-ce en raison d'une interruption de production que nous ignorons? Est-ce un problème de stocks? Est-ce le résultat de l'application des nouveaux règlements en Ontario en ce qui concerne l'éthanol?
    Le mise en oeuvre en Ontario de la spécification relative à l'éthanol pose effectivement un certain nombre de problèmes. C'est à cause d'une spécification qu'on appelle la pression de vapeur Reid, ou RVP, qui constitue une mesure de la volatilité de l'essence. L'essence intermédiaire ne peut être mélangée sur place avec l'essence non éthanolisée sans dépasser la RVP. Que ce soit ou non la raison de la pénurie, je ne saurais vous dire.

[Français]

    Ma question s'adresse à Mme Marcotte et à M. Blouin.
    J'ai entendu dire aujourd'hui que le prix des compagnies de pétrole majeures sera de 64,6 ¢ à Montréal demain matin. M. Quintal aimerait peut-être faire des commentaires aussi, mais le taux de la Bourse aux États-Unis était de 2 15,53 $. Avec un taux de change de 1  06,61, j'arrive à environ 60,7 ¢ le litre aux États-Unis, tandis qu'il sera supérieur de 3,9 ¢ à Montréal et de 5,2 ¢ à Toronto.
    Comment peut-on expliquer aux consommateurs que le prix des produits fournis ici, qui est déterminé par le marché, est plus élevé au Canada et qu'il est le même dans toutes les régions, sans exception? Pourquoi le prix des raffineurs sera-t-il le même à Montréal, Toronto et Ottawa demain matin? Pourquoi n'y a-t-il pas de concurrence entre ces villes?
    Monsieur Crevier, pouvez-vous répondre à cette question?
    C'est tout simplement que l'établissement des prix à la rampe de chargement...
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Je m'excuse.
    Un rappel au Règlement, monsieur Vincent.
    Monsieur le président, il est 17 h 05 et il nous reste à aborder un deuxième point à l'ordre du jour. Comme nous devons aller voter à 17 h 30, j'aimerais qu'on passe dès maintenant au deuxième point à l'ordre du jour, parce qu'il nous reste à peine une demi-heure pour discuter des deux sujets, à savoir le piratage et la propriété intellectuelle. Sinon, on ne pourra jamais passer au travers. En outre, si on veut rédiger notre rapport comme on l'a dit, il faudra prendre les 25 minutes qu'il nous reste pour finaliser le tout, parce qu'il nous reste deux ou trois petites parties à faire.
    Donc, c'est ce que je propose. C'était le rappel au Règlement que je voulais faire, monsieur le président. On verra ce que les autres membres du comité veulent faire.

[Traduction]

    Monsieur McTeague a encore une minute.
    M. Arthur a demandé la parole. Moi, aussi, j'ai des questions à poser. Il n'est pas nécessaire que je pose des questions, si tel est le voeu du comité, mais j'aimerais tout de même permettre à M. McTeague et à M. Arthur de le faire. Est-ce le désir du comité de passer à la question de la contrefaçon après les questions de M. Arthur?

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais soumettre mon rappel au Règlement à un vote. J'ai demandé de changer l'ordre du jour pour passer tout de suite à la deuxième partie.
    Je comprends votre rôle, mais le comité est souverain. Il a donc le droit de prendre position sur ma proposition. Je peux en faire une motion et la déposer; je peux faire une recommandation. Je peux le faire de n'importe quelle façon.
    Mais si on se limite à cela et qu'on finit demain ou jeudi, ce sera terminé.

[Traduction]

    Monsieur Vincent, vous ne pouvez pas proposer une motion au sujet d'un rappel au Règlement. Vous avez fait un rappel au Règlement, qui consistait à demander si les membres du comité sont d'accord pour passer à la question de la contrefaçon quand M. McTeague aura terminé, que les témoins auront eu l'occasion de lui répondre, et que M. Arthur aura eu ses cinq minutes pour poser des questions. Donc, vous ne pouvez pas proposer une motion à propos d'un rappel au Règlement.
     Vous avez fait un rappel au Règlement et, en ma qualité de président, j'essayais de répondre à votre rappel au Règlement, puisque je vous disais qu'après le tour de M. Arthur, nous nous attaquerions tout de suite à la question de la contrefaçon. En tant que président, il me semble que c'est la meilleure solution.
    Les membres du comité sont-ils d'accord?
    Monsieur Carrie.

  (1705)  

    Je pense qu'il nous reste suffisamment de temps, s'il y a encore des membres qui n'ont pas pu poser des questions et qui voudraient le faire — par exemple, M. Arthur et vous-même, monsieur le président; il nous reste cinq ou dix minutes, étant donné qu'il est seulement cinq heures et quart.
    Si je ne m'abuse, les votes sont prévus pour 18 heures, plutôt que 17 h 30, n'est-ce pas?
    Je crois comprendre qu'ils sont prévus pour 17 h 45.
    Dans ce cas, nous devrions avoir suffisamment de temps.
    Très bien. Je vais donc permettre à M. McTeague de terminer son tour. Il a déjà posé une question. Je vais donc permettre aux témoins de répondre. Ensuite, ce sera à M. Arthur. Je vais renoncer à mes questions, et après le tour de M. Arthur, nous allons nous attaquer tout de suite à la question de la contrefaçon.

[Français]

    Monsieur le président, je pense que c'est au tour de M. Crevier et de M. Blouin.
    Si les prix à la rampe de chargement ne sont pas identiques d'une ville à l'autre au Canada, c'est simplement que leur établissement n'a rien à voir avec les coûts de production d'une raffinerie. C'est basé sur le coût de remplacement, à savoir quel est le prix le plus élevé que peut avoir un raffineur d'une région, pour vendre le produit aux indépendants.
    À Montréal, le prix est plus bas qu'à Toronto, parce que le produit entre à Montréal par cargo. À Toronto, le produit doit être importé par camion des États-Unis ou de Montréal. Les prix aux rampes de chargement de l'Ouest canadien sont probablement plus élevés encore que ceux de Toronto, parce qu'il en coûte plus cher aux indépendants d'amener le produit là-bas. Cela n'a donc aucun rapport avec le coût de production qui devrait être, comme vous le dites, égal partout au Canada.
    J'ai terminé, monsieur le président.
    Merci, monsieur McTeague.
    Monsieur Arthur.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Si vous le souhaitez, je veux bien partager mon temps de parole avec vous. Je sais que vous avez une question très intéressante à poser, monsieur le président, et je ne vais donc utiliser que deux minutes et demie.

[Français]

    Madame Marcotte, actuellement, quelle quantité de produit raffiné est importée sur le marché québécois par vos membres?
    C'est l'équivalent de près de un milliard de litres annuellement.
    Quel pourcentage du volume vendu au Québec est-ce que cela représente, monsieur Crevier?
    Environ 7 p. 100.
    A-t-on raison de croire que le fait d'être capable d'importer du produit raffiné et de l'ajouter aux produits vendus par les compagnies canadiennes exerce une pression à la baisse sur les prix?
    Oui.
    Donc, pour les fins de l'argument, si on réussissait à ajouter 10 p. 100 de produits raffinés à l'ensemble de la consommation canadienne, il y aurait donc une énorme pression à la baisse sur les prix à la sortie des raffineries?
    Il faut pouvoir le redistribuer à partir du point d'entrée du produit. Comme Mme Savage le disait plus tôt, la distribution du produit entre également en ligne de compte.
    D'accord.
    On sait qu'il y a actuellement des barrières à l'entrée au Canada de l'éthanol brésilien. Si on éliminait ces barrières, ne provoquerait-on pas une immense pression à la baisse sur le prix des raffineries?
    Les chances sont bonnes. Vous avez raison.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Arthur.
    Monsieur McTeague.

[Traduction]

    Étant donné que nous gérons bien notre temps, je ne vois pas pourquoi le président ne pourrait pas poser une question. Nous avons parlé de diverses choses. J'encourage donc le président à poser sa question. Il l'a mérité, selon moi.
    Merci, monsieur McTeague, Le problème, c'est que j'en ai à peu près 20.
    Premièrement, je tiens à vous remercier tous de votre présence aujourd'hui. Et je vous remercie également d'avoir mis l'accent sur la marge du raffineur, étant donné que la grande majorité des questions portaient là-dessus.
    Je voudrais adresser quelques questions à Mme Savage. J'ai beaucoup aimé votre exposé, parce qu'il était très précis et très direct. Donc, je vais vous poser mes questions et si vous pouvez y répondre rapidement, je vous serais très reconnaissant.
    S'agissant de l'insuffisance de l'actuelle capacité de raffinage, je crois savoir que nous avons actuellement 19 raffineries qui utilisent 95 p. 100 de leur capacité de production. Ma première question est donc celle-ci: de combien de raffineries aurions-nous besoin environ, afin de régler ce problème?
    En ce qui concerne ma deuxième question, vous avez parlé du fait que le nombre de fournisseurs sur le marché de gros est insuffisant. Encore une fois, pourriez-vous nous donner une estimation du nombre de fournisseurs de plus qu'il faudrait avoir, selon vous?
    Ensuite, vous avez parlé du petit nombre de raffineurs. S'agit-il des fournisseurs, ou faites-vous une distinction entre les deux?
    Ensuite, en ce qui concerne les stocks, dans quelle mesure serait-il difficile de créer un système de suivi des stocks, afin que nous sachions exactement où nous en sommes?
    J'ai beaucoup d'autres questions, mais peut-être pourriez-vous répondre à celles-ci. S'il était possible d'obtenir ces renseignements-là, je pense qu'il faudrait les faire traduire… Mais si vous voulez bien nous faire des recommandations, nous allons les faire traduire dans les deux langues officielles et les faire parvenir aux membres.
    Pourriez-vous donc répondre à ces trois questions?

  (1710)  

    Pour ce qui est de votre première question — j'ai une bonne mémoire, mais elle est courte — vous parliez du nombre de raffineries en vous demandant combien de plus il nous en faudrait. Malheureusement, je n'ai pas ces données sous la main pour ce qui est de savoir quel nombre serait nécessaire pour équilibrer l'offre et la demande; en d'autres termes, pour éliminer…
    D'ailleurs, il y a beaucoup de variations régionales. Il y a la question de savoir combien il en faudrait dans l'ensemble du Canada, et combien il en faudrait en Ontario ou dans les Prairies, par exemple, parce que la réponse serait différente. Mais, en ce qui concerne l'orientation générale à prendre dans ce domaine, il est clair qu'une capacité de raffinage accrue s'impose.
    En ce qui concerne les fournisseurs, parce que vous faites une distinction, me semble-t-il, entre les fournisseurs et les raffineries…
    C'est exact.
    … quel serait le nombre optimal?
    Si nous parlons des fournisseurs, encore une fois, ce sont ces derniers qui assurent une vive concurrence. Un marché parfait est un marché où il y a un nombre infini de concurrents. Donc, l'idéal serait d'avoir un très grand nombre de fournisseurs, mais si nous souhaitons doubler ou tripler le nombre de raffineurs… et quand je dis « fournisseurs », j'utilise ce terme dans le sens le plus large — c'est-à-dire, non seulement les raffineurs, mais les grossistes, les négociants, les fournisseurs indépendants, etc.
    Il y a aussi la question des stocks. Est-il vraiment difficile de suivre et de documenter l'utilisation des stocks?
    C'est du travail, voilà qui est clair. Ce n'est pas quelque chose de simple que peut faire une seule personne. Par contre, cela ne suppose pas non plus une immense bureaucratie. À mon avis, cela pourrait se faire assez facilement.
    Merci beaucoup.
    Si vous avez d'autres observations à communiquer au comité, sentez-vous libre de les faire parvenir à moi-même ou à la greffière, et nous allons nous assurer de communiquer cette information à tous les membres.
    Merci infiniment pour votre présence parmi nous aujourd'hui. Je m'excuse d'avoir eu à écourter la réunion, mais nous avons un certain nombre de votes dans environ une demi-heure.
    Nous allons donc suspendre nos travaux pendant deux ou trois minutes. Nous allons permettre à nos invités de partir, et nous siégerons ensuite à huis clos pour discuter du rapport sur la contrefaçon et le piratage.
    Merci de votre présence.
    [La réunion se poursuit à huis clos.]