Passer au contenu
;

FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain







CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 042 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 février 2007

[Enregistrement électronique]

(0905)

[Français]

    Bonjour, mes collègues.

[Traduction]

    La séance est ouverte. Il s'agit de la 42e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international, et nous sommes le mardi 28 février 2007.
    Au cours de la première heure, ce matin, nous aurons droit à un compte rendu de la situation en Afghanistan. Nous sommes très heureux d'accueillir deux témoins.
    D'abord, James Appathurai, qui sera ce matin le porte-parole de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, l'OTAN. Bienvenue à vous.
    Nous accueillons également Christopher Alexander, de l'ONU, représentant spécial adjoint du Secrétaire général pour l'Afghanistan. Bienvenue au Comité des affaires étrangères.
    Notre comité a entrepris un certain nombre d'études dont certaines ont porté plutôt sur le développement international et d'autres sur des éléments plus précis des affaires étrangères. Je n'aime pas vraiment faire de distinction entre les deux. Nous avons étudié le développement démocratique et la façon dont le Canada y participe. Et maintenant, nous entreprenons un travail d'information et une étude sur l'Afghanistan, le rôle que le Canada y joue, les progrès qu'on y enregistre et la situation qui y règne. C'est dans cette optique que nous entendrons votre témoignage.
    Comme vous le savez, les témoins font des déclarations liminaires d'une dizaine de minutes chacun. Nous passons ensuite à la première série de questions, et chaque parti a 10 minutes. Si le temps le permet, il y a une deuxième série de questions. Nous accueillons un autre invité à la deuxième heure. Nous devrons donc conclure environ 5 minutes avant 10 heures.
    Encore une fois, je vous souhaite la bienvenue. Nous avons hâte de vous entendre.
    Monsieur Alexander, voulez-vous commencer?
    Avec plaisir. Merci beaucoup, monsieur le président. Et merci à tous les membres du comité de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui.
    La mission menée en Afghanistan attire beaucoup d'attention au Canada, et elle est chère aux Canadiens, car ils y ont engagé beaucoup de ressources et de nombreux principes sont en jeu. Mais c'est aussi une mission dans laquelle les intérêts et capacités de certaines des plus grandes organisations internationales du monde sont fortement engagés.
    C'est un vrai plaisir de comparaître avec mon collègue James Appathurai, autre Canadien qui représente pour sa part l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, et en ma qualité de représentant de l'ONU, qui a une longue et fière histoire en Afghanistan. Cette histoire remonte à la fin des années 1940, à l'époque où les tout premiers programmes de l'ONU, et surtout de ses agences spécialisées, y ont été déployés.
    Je reviendrai tout à l'heure sur le rôle de l'ONU dans ce pays, mais je soutiens que le rôle et l'efficacité de l'ONU dans le monde comme agent de changement, comme réseau qui appuie l'édification de l'Afghanistan, sont vraiment mis à l'épreuve et que, dans bien des cas, je le soutiens au nom de mes collègues de l'ONU, l'organisation s'en tire honorablement.
    Bien entendu, l'ONU ne vaut que ce que valent ses États membres. Même chose pour l'OTAN. Le Canada, qui est depuis longtemps engagé profondément dans la définition des mandats de l'ONU et aide l'organisation à obtenir des résultats, a un rôle central à jouer. Les investissements que le gouvernement a annoncés hier dans la reconstruction, le développement et le renforcement des capacités, voilà exactement ce dont l'ONU a besoin de la part des principaux États membres si elle veut soutenir les Afghans et donner des résultats à la communauté internationale en Afghanistan.
    Je commence donc par féliciter le Canada — non seulement son gouvernement, mais aussi sa société — de son engagement important et croissant à l'égard d'une des grandes causes internationales de notre temps: le développement et la reconstruction de l'Afghanistan après un quart de siècle de conflits.
    Je parle du Canada comme société, car sa présence là-bas prend tous les visages. Les organismes du gouvernement chargés de la politique internationale sont très présents, bien sûr, mais il y a aussi des ONG canadiennes, des experts canadiens, des entreprises privées canadiennes, des familles canadiennes. Il ne faut pas oublier la société civile qui a évidemment des liens solides avec l'Afghanistan, rebâtissant des vies brisées, aidant à reconstruire des localités, à relancer le développement, à consolider la paix, à renouveler les institutions de l'Afghanistan d'aujourd'hui.
    Je suis très fier, comme Canadien, de pouvoir vous dire que ce rôle du Canada et des Canadiens au sein de la famille des Nations Unies demeure très en vue et fort apprécié à tous les niveaux de la société afghane.
    La mission ne s'est jamais résumée à détruire des bases terroristes. Elle est devenue un terrain d'essai essentiel pour le défi de l'édification d'un pays, un moyen de savoir si la communauté internationale veut vraiment appuyer la lutte contre la pauvreté et soutenir l'émergence de nouvelles institutions dans un pays qui, bien honnêtement le mérite largement, après 25 ans de graves conflits.
    Il importe de signaler au départ que nos réalisations en Afghanistan, à ce jour, sont déjà appréciables. En 2001, l'accès aux soins de santé était négligeable, voir inexistant dans certaines régions. Aujourd'hui, 85 p. 100 de la population a accès à des services de santé de base.
    En 2002, l'économie afghane valait environ 3,4 milliards de dollars américains. Telle est l'estimation que faisaient les institutions financières internationales de la taille de l'économie légale, en dehors de l'économie du pavot, en 2002. En 2006, on l'estimait à 7,9 milliards de dollars américains. Autrement dit, la taille de l'économie légale a plus que doublé en seulement cinq ans. Cette croissance a été plus vigoureuse que celle de l'économie illégale, qui demeure tout de même très inquiétante, et c'est une question sur laquelle il faudrait revenir dans nos échanges.
(0910)
    En 2002, le revenu par habitant en Afghanistan n'était que de 150 $US. C'est la meilleure estimation. Il dépasse aujourd'hui les 300 $US. Le commerce avec l'Iran et le Pakistan voisins est en plein essor.
    Prenons le seul cas du Pakistan. Sous les Talibans, le commerce bilatéral entre le Pakistan et l'Afghanistan, dans la dernière année où il y a des données, était de 25 millions de dollars, ce qui est dérisoire pour des pays qui ont une frontière de plus de 2 000 kilomètres. En 2006, ces échanges ont dépassé le milliard et demi de dollars et il est probable que, en 2007, on dépassera les 2 milliards et atteindra peut-être les 2,5 milliards de dollars.
    La devise afghane a été réformée et reste stable. L'inflation est faible. Le budget afghan est équilibré et les revenus augmentent de plus de 30 p. 100 par année depuis trois ans. Des milliers d'écoles ont été construites ou rouvertes, ce qui permet à 5,4 millions d'enfants d'étudier, un record national. Et il y a surtout un nombre record de filles qui vont aujourd'hui à l'école en Afghanistan, ce qui est important sur le plan international.
    L'Afghanistan a connu la période la plus active de son histoire en construction de routes. De nouvelles lignes de transmission sont en construction. Elles donneront un approvisionnement en électricité suffisant à Kaboul d'ici 2008 et aux grandes villes du Sud, dont Kandahar, d'ici 2009.
    La pauvreté qui demeure un obstacle abject au progrès de tant d'Afghans fait souvent oublier l'importance de ces progrès. Pour nous, c'est l'un des petits drames de l'histoire afghane jusqu'à maintenant: cette évolution, ces belles réalisations et les améliorations dans la vie des Afghans ne sont pas assez reconnues à l'étranger et, à dire vrai, dans les populations qui méritent le plus de savoir que leur intervention a porté fruit.
    Cela comprend, bien sûr, le Canada et son opinion publique. On ne fait pas état de ces résultats. Les rapports de votre comité, du gouvernement, ont aidé à faire connaître ce qui se passe. À dire vrai, les médias ne nous ont pas aidés autant que nous le voudrions. C'est là une difficulté persistante dont nous pourrions peut-être discuter au cours de la séance d'aujourd'hui.
    Tous ne font pas le choix de se réjouir d'avoir maintenant 30 $ par mois pour vivre au lieu de 10 $. Mais telle est la réalité des Afghans. Ils sont pauvres, mais ils ont deux ou trois fois plus d'argent, dans bien des cas, qu'il y a quatre ou cinq ans. Pour eux, il y a de quoi se réjouir. Ce progrès, cette amélioration, après 25 ans de dégradation, est le signe que les choses changent.
    Personne n'est satisfait. Il n'y a personne en Afghanistan qui vous dira que les Afghans ont reçu assez. Personne ne vous dira que toute l'assistance — ni même la majorité de l'assistance — a été efficace. Nous continuons à apprendre, mais notre action a des effets, et des résultats concrets en témoignent.

[Français]

    Pour les Afghanes et les Afghans, ces chiffres comptent. Ils ont généré et soutenu un niveau d'espoir au sein de la population afghane, qui reste un des ingrédients essentiels de notre engagement. Ils démontrent que la paix et une vie améliorée sont des possibilités réelles pour les Afghans, et on a bon espoir de pouvoir améliorer davantage leur sort, de concert avec la communauté internationale.
    Néanmoins, il y a des groupes qui tentent encore de démontrer que le conflit ne tire pas à sa fin. En 2001, le régime des Talibans n'a pas été démantelé; il a tout simplement été repoussé au-delà des frontières de l'Afghanistan et oublié en quelque sorte jusqu'en 2002-2003.
(0915)

[Traduction]

    Depuis cinq ans, les Talibans ont récupéré et, jusqu'à un certain point, se sont réorganisés. Ils ont trouvé de nouvelles sources de financement et renoué avec d'anciens alliés.
    L'an dernier, dans le sud du pays, alors que s'opérait la transition entre la direction américaine et l'OTAN, les Talibans ont entrepris de contester l'autorité de l'État à Kandahar, de montrer que l'Afghanistan revenait en arrière, en 1999 et même en 1994, première année où le phénomène des Talibans a commencé à être vraiment connu en Afghanistan, à l'époque où les filles ne pouvaient aller à l'école, où une justice sommaire sévissait dans tout le pays au plus flagrant mépris des procédures et des droits de la personne, où des terroristes se sont emparés de ce pays très important et ont étendu leur influence dans le sud de l'Asie et le monde entier.
    En septembre 2006, la réponse de la communauté internationale a été l'opération Médusa, réaction militaire traditionnelle à un ennemi obstiné de la paix. Ce fut le premier combat au niveau de la brigade dans l'histoire de l'OTAN. La bataille a été livrée et gagnée surtout par les Canadiens, avec le solide soutien des alliés et l'aval du Conseil de sécurité de l'ONU.
    L'opération a changé le climat d'insurrection dans le sud de l'Afghanistan. Elle a redonné espoir, rallié les tribus, démoralisé les Talibans. Elle a fini par donner des routes, des emplois et des projets de développement rural aux districts de Panjwai et de Zherai qui, à cette époque l'an dernier, commençaient à devenir des refuges pour les Talibans, des bases pour mener des opérations dans d'autres régions. Bref, l'opération Médusa a permis au gouvernement afghan de reprendre l'avantage dans ce mortel affrontement des volontés avec des Talibans qui renaissaient.
    En décembre, le président Karzai a passé cinq jours dans la province de Kandahar, la période la plus longue depuis son arrivée au pouvoir. Son ministre du Développement rural a visité les collectivités touchées par les affrontements. Dans les semaines écoulées entre les deux, le directeur national afghan de la sécurité a réalisé des avancées contre les réseaux qui facilitaient les attentats suicides à Kandahar, à Khowst et à Kaboul. Toujours en décembre, le mollah Akhtar Usmani, numéro trois des Talibans, a été tué au cours d'une opération de l'OTAN.
    Médusa a donc été un tournant dans l'histoire récente de la sécurité en Afghanistan et dans le sud du pays. Ceux qui, dans ces opérations, ont appuyé l'Afghanistan, les soldats de l'armée nationale afghane et le gouvernement afghan méritent qu'on leur reconnaisse un énorme crédit, car ils ont montré à un ennemi tenace que l'OTAN prend les choses au sérieux, que la sécurité régnera dans le sud de l'Afghanistan coûte que coûte et que notre engagement général, depuis l'ONU jusqu'à l'OTAN et aux États membres, demeure extrêmement ferme.
    La sécurité n'est pas tout. La réussite d'opérations comme Médusa a ouvert la voie à un processus de développement bien engagé. Le Pacte pour l'Afghanistan, conclu à Londres en janvier et au début de février 2006, est un cadre unique pour structurer les efforts de 60 pays, de toutes les principales institutions financières internationales et de toutes les grandes organisations à l'appui de la construction du pays. On a constaté au cours de l'année écoulée que les repères et les objectifs exposés dans le Pacte étaient les bons, qu'il valait la peine de s'y tenir, qu'ils sont emblématiques du projet de construction nationale que tous veulent réaliser en Afghanistan.
    Ce n'est pas un hasard si nombre de ceux qui interviennent après des conflits dans d'autres régions du monde ont cherché à reproduire le Pacte de l'Afghanistan pour rassembler et orchestrer les efforts internationaux — à Haïti, en Iraq et dans d'autres régions du monde —selon des principes semblables à ceux que nous essayons de respecter et d'appliquer en Afghanistan.
    L'ONU reste au coeur de cet effort. Elle a des effectifs de plus de 5 000 personnes sur place. Ce fait est mal connu au Canada et à l'extérieur de l'Afghanistan, car on tend à mettre l'accent sur l'OTAN, sur la mission militaire. Mais ces effectifs sont des civils, et ils font partie de la mission politique la plus importante de l'ONU. C'est également une mission intégrée, conjuguant les compétences de plus de 20 organismes, programmes et fonds de l'ONU pour relever les défis aux côtés des Afghans, notamment dans les localités rurales où vivent la majorité des Afghans au jour le jour.
    Ces cinq dernières années, l'ONU a dispensé jusqu'au tiers de l'assistance destinée à l'Afghanistan. Elle a surveillé la tenue des élections, réalisé des projets de développement rural, appliqué, même au cours des insurrections de la dernière année et même dans le Sud touché par la guerre, des programmes d'inoculation pour lutter contre les maladies les plus terribles qui ont affecté les enfants afghans.
    Ces réalisations ont eu leur prix. Comme tous ceux qui travaillent en Afghanistan aujourd'hui, le personnel de l'ONU est exposé à des risques. Mais nous estimons tous que ces risques en valent la peine, compte tenu des résultats que nous pouvons obtenir, de la présence que l'ONU et d'autres organismes civils peuvent maintenir et même renforcer dans tout le pays, y compris à Kandahar et dans les provinces voisines, au début de 2007, grâce aux succès militaires de 2006, dont nous nous sommes tous réjouis.
(0920)
    Il reste d'énormes défis à relever en Afghanistan. La sécurité est le premier, et nous devrions prendre le temps voulu au cours des échanges pour définir la nature de ce défi et nous interroger sur les solutions possibles aujourd'hui.
    Le défi du développement reste très lourd. Même si son PIB a doublé, l'Afghanistan demeure l'un des pays les plus pauvres de la planète. La pauvreté n'est plus grave que dans quelques rares pays d'Afrique.
    C'est toutefois la gouvernance qui, au-delà des défis de la sécurité et du développement, sera la clé du succès. Des institutions ont été mises en place à Kaboul. Les ministères fonctionnent bien au niveau central, dans au moins une institution gouvernementale sur trois, d'après une estimation approximative, mais ils ne fonctionnent pas toujours au niveau infranational, au niveau de la province ou du district. Il faut que ce soit là un point essentiel de l'intervention internationale si nous voulons que ce grand projet aboutisse.
    La primauté du droit est une autre grande priorité en 2007. Ce principe est au coeur de la réforme en cours au ministère de l'Intérieur, mais il faut aussi un appui beaucoup plus grand et substantiel pour le bureau du procureur général et le système judiciaire. Nous espérons que le Canada et d'autres pays, grâce à des engagements semblables à ceux qui ont été annoncés hier, participeront à la définition de ce programme, qui est forcément lié au défi de la lutte contre les stupéfiants. Le secteur des drogues est la meilleure preuve qu'il existe toujours aujourd'hui une faiblesse, une vulnérabilité dans l'État afghan, que le fait qu'il n'a pu par le passé se maintenir comme État a des conséquences, que nos réalisations demeurent encore incomplètes.
    Monsieur le président, je vais m'arrêter là et céder la parole à mon collègue, mais j'ai hâte de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Alexander.
    Monsieur Appathurai, vous avez une dizaine de minutes. Je vous en prie.
    Je vais essayer de respecter la limite de temps. À l'OTAN, nous sommes plus disciplinés qu'on ne l'est à l'ONU.
    Des voix: Oh, oh!

[Français]

    Permettez-moi aussi de vous remercier de nous accueillir ce matin. C'est un grand plaisir pour moi. C'est la première fois que je rends visite à ce comité.
    Comme l'a dit Christopher, mon ami et collègue, c'est une question primordiale pour le Canada. C'est aussi primordial pour l'OTAN: c'est notre priorité ultime. Cela démontre — je le dis entre parenthèses — combien l'OTAN a changé.
    Mes notes, dans une proportion de 50 p. 100, contiennent les mêmes statistiques que Christopher a données au sujet de l'éducation, des infrastructures qui ont été construites. Chaque semaine, nous recevons au conseil deux pages portant sur les progrès du développement. J'ai dans mon bureau des plans, des cartes. Il y a cinq ans, je n'avais que les Balkans. Tout d'un coup, j'ai toute l'Asie du Sud.
    Nous entretenons une profonde relation avec l'ONU. C'est la sécurité du XXIe siècle.

[Traduction]

    Je vais souligner rapidement quatre points. Il sera plus agréable de discuter ensemble que de m'entendre parler.
    Il faut répondre à trois ou quatre questions. Notre présence là-bas sert-elle toujours un intérêt national? Cet intérêt est-il aussi fort qu'au moment où nous nous sommes engagés? Il est très clair que c'est le cas.
    Il y a cinq ans, avant l'éviction des Talibans, j'ai fait quelques recherches. L'Afghanistan était devenu le refuge de groupes extrémistes d'au moins 24 pays, qui s'entraînaient tous dans des camps bien financés et dotés du personnel voulu. Nous ne pouvons en faire abstraction. Il y avait Al-Qaïda, bien sûr, et ses 3 000 combattants de 13 pays arabes, des groupes extrémistes de Russie, du Pakistan, de la Chine, de la Birmanie, de l'Iran, de l'Asie centrale et de plusieurs pays d'Extrême-Orient. Tous combattaient pour les Talibans tout en appliquant leur propre programme politique chez eux. L'Afghanistan était la grande gare du terrorisme, des extrémistes arrivant tous les jours et repartant mieux entraînés et plus extrémistes que jamais.
    Ce sont ceux que nous combattons aujourd'hui, et nous ne pouvons l'oublier. Ils voudraient reprendre le pouvoir. Avec le recul, on le voit à la perfection, et seulement cinq années ont passé. Je le répète sans cesse, en tout cas comme porte-parole de l'OTAN. Il est facile d'oublier, mais nous ne pouvons pas nous le permettre. L'OTAN a accepté comme mandat de l'ONU de prévenir ce retour au pouvoir, et elle s'acquitte de ce mandat.
    Deuxièmement, pouvons-nous gagner et sommes-nous en train de le faire? Voilà une question essentielle pour la population des 37 pays qui fournissent des troupes. Je peux parler pour eux, car c'est la question que le public pose. Pouvons-nous y arriver? Chris a montré clairement que, en fonction des indicateurs importants, nous progressons. La vie des Afghans s'améliore. Ils ont plus d'argent. L'accès aux soins de santé est meilleur que dans tous les pays africains sauf l'Afrique du Sud, et c'est beaucoup, compte tenu de la situation où était le pays, il y a cinq ans. On en est à 83 p. 100. Ma femme dirige une ONG. Elle me dit que c'est inouï. L'ONU a réalisé des progrès phénoménaux sur ce plan-là.
    Vous avez entendu d'autres chiffres. Pour bien faire le point, disons que, d'après nos renseignements, 17 000 projets de reconstruction et de développement sont actuellement en cours, dont 1 000 sont réalisés par l'OTAN. Les dépenses se chiffrent par milliards.
    Sur le plan de la sécurité, nous avons créé l'armée nationale afghane, qui n'existait pas il y a cinq ans et qui compte aujourd'hui 30 000 soldats, déployés et engagés dans tout le pays. C'est essentiel pour nous, car les forces nationales de sécurité sont notre stratégie de retrait. La lutte sera longue. Les Talibans ne seront pas réduits à néant en trois ans. Il y aura des insurrections pendant longtemps à cause de toutes les raisons que nous avons données, comme les drogues et la frontière avec le Pakistan. Mais il faut que les Afghans mènent leur propre combat. Quand ils pourront le faire, nous pourrons nous retirer, pas avant. Voilà la réalité.
    La contribution des pays de l'OTAN compte jusqu'à maintenant des dizaines de milliers d'armes légères, des millions de munitions, 110 transports de troupes blindés et une douzaine d'hélicoptères. Nous avons engagé de petites équipes dans des bataillons afghans qui ont été déployés pour les aider à faire leur travail. Comme vous le savez, les États-Unis se sont engagés à verser 8,6 milliards de dollars pour aider à constituer les forces nationales de sécurité afghanes. C'est notre stratégie de retrait. Nous avons comme objectif une armée nationale afghane de 70 000 soldats.
    La police nationale afghane est un élément très faible. Ce qui attire les Talibans, c'est qu'ils peuvent s'implanter dans des régions non gouvernées, sans structure, sans ordre public, sans police efficace. Même si la population dit ne pas beaucoup aimer les Talibans, elle préfère la structure à l'anarchie. Elle se rabat sur les Talibans faute de mieux.
    Nous devons donc établir une présence gouvernementale locale, et cela, c'est la police. L'armée intervient pour combattre, mais n'assure pas le service de police local. L'UE et l'ONU travaillent sur la question, mais pas l'OTAN, qui est indéniablement touchée, tout de même.
    Première conclusion: nos efforts visant à aider les Afghans à construire un pays et un avenir meilleurs rapportent, mais il faudra sûrement un effort soutenu et bien coordonné à long terme. C'est ce que Chris fait.
    Les attentes sont grandes, parmi les Afghans, qui veulent voir des résultats concrets. Ils ont entendu parler des milliards de dollars promis, et ils veulent des résultats. Nous devons faire de notre mieux pour les leur donner.
    Deuxième question: nos forces suffisent-elles, et les autres alliés font-ils leur part? Voilà une question fort délicate au Canada. À l'OTAN, nous répondons oui aux deux questions, en général. Si on tient compte de la réalité des 37 pays, la réponse est oui aux deux questions.
(0925)
    Avons-nous tout ce que nous voulons? Non. Vous n'entendrez jamais un officier de l'OTAN satisfait. Mais cette année, nous avons énormément renforcé la puissance de combat à la disposition du commandant de l'ISAF.
    Depuis le sommet de Riga, il y a trois mois, nous avons ajouté plus 7 000 soldats à la mission globale de l'ISAF. Et à peu près toutes ces troupes peuvent être utilisées un peu partout. Il n'y a pas de restrictions d'ordre géographique. La plupart sont affectées dans le Sud.
    Bien sûr, ce sont les États-Unis qui ont fait la plus grande contribution, avec la 10e division Mountain, suivie par la 183e aéroportée.
    Le Royaume-Uni vient d'annoncer l'envoi d'effectifs de 1 500 soldats, en plus des 500 qu'il avait déjà ajoutés.
    Ce sont les grands participants. Il y a aussi les forces spéciales norvégiennes et les forces spéciales d'autres pays qui n'ont pas rendu la chose publique. Je dois donc me taire. Les Danois ajouteront d'autres troupes. Les Allemands approuveront probablement le déploiement de six Tornado, avec les 500 personnes qui vont avec. Nous avons aussi d'autres UAV qui arrivent, et d'autres aéronefs de transport provenant de divers pays. Les Australiens vont doubler leur contribution, la faisant passer à 1 000 soldats, avec 250 autres personnes pour les forces spéciales et le transport.
    Je fais cette énumération pour montrer que, ces trois derniers mois, les repères ont beaucoup changé. En coulisse, le gouvernement du Canada a réclamé avec beaucoup d'insistance que les alliés fassent plus, et ils ont répondu à l'appel. Le Canada a acquis beaucoup de crédit à l'OTAN à cause de ce qu'il fait sur le terrain. Il a une voix qui se fait mieux entendre que lorsque je suis entré au service de l'alliance. On écoute le Canada parce qu'il a payé là où cela comptait. Nous utilisons ce crédit très intelligemment pour obtenir ce que nous voulons pour progresser.
    Quant au financement de la reconstruction et du développement, comme Chris l'a dit, l'annonce que le gouvernement a faite hier est exactement ce dont nous avons besoin. Faut-il davantage? Oui. Plus d'hélicoptères, plus d'avions de transport. Nous devons continuer d'insister. Mais le ministre O'Connor et le général Hillier ont dit hier qu'ils étaient généralement satisfaits de ce qu'il y a maintenant sur le terrain. Ils ont beaucoup insisté. S'ils expriment cet avis, c'est que cela veut dire quelque chose.
    Je parle de la suppression des restrictions. Nous avons obtenu un engagement au sommet de Riga. Les 26 alliés, et même les 37 ont accepté un principe: si un autre allié est en danger, où que ce soit dans le pays, ils s'y rendront si le commandant de l'ISAF le demande. C'est une manifestation essentielle de solidarité. Il y a quelques semaines, les Français ont déployé des Mirages pour assurer un soutien aérien rapproché aux troupes canadiennes. Ils sont intervenus en dehors de leur propre territoire et ont tué beaucoup de Talibans pour sauver la vie de nos soldats. Ils ont prouvé qu'ils étaient disposés à le faire. C'est bien.
    Je saute tous les éléments dont Chris a déjà parlé pour m'attarder à trois domaines sur lesquels la communauté internationale va renforcer ses efforts ou doit le faire.
    Il y a d'abord la gouvernance. Chris l'a dit, c'est absolument essentiel.
    Deuxièmement, le Pakistan. Tant que nous ne nous attaquerons pas au problème des renforts qui franchissent la frontière, notre action ne sera pas assez efficace. Les gouvernements du Canada, des États-Unis et de bien d'autres pays entretiennent une étroite collaboration avec les Pakistanais. Ils doivent être un élément de la solution.
    Je crois que le ministre MacKay leur a proposé les compétences du Canada pour la défense d'une frontière longue et dangereuse.
    Des voix: Oh, oh!
    M. James Appathurai: Enfin, il y a les stupéfiants, le cancer de ce pays. Ils financent les Talibans, car les Talibans, tout comme la mafia, protègent ce secteur et prélèvent leur part des profits, Le problème touche directement la sécurité et nous avons donc intérêt à nous y attaquer. C'est faisable. Voici des chiffres.
    Dans les années 1980, le Pakistan était le plus grand producteur d'héroïne au monde; 70 p. 100 de l'héroïne venaient de ce pays, qui produisait 900 tonnes de pavot par année. En 1997, le pays en produisait 24 tonnes, et en 1999, deux tonnes. C'est le pays voisin. C'est donc faisable.
    Vous ne devez donc certainement pas conclure qu'il faut renoncer, les laisser cultiver le pavot et l'acheter parce que vous ne croyez pas qu'on peut s'attaquer au problème. C'est faisable, et cela s'est fait en Turquie et en Thaïlande.
    Autre point: l'approche globale, comme on dit à l'OTAN, ou les trois D. Autrement dit, le problème des stupéfiants montre bien qu'on ne peut se contenter de détruire les cultures et compter réussir de cette façon. Il faut un système de justice, un réseau policier et de nouveaux moyens de subsistance.
    Agencer tous les éléments, comme l'OTAN et l'ONU — tout cela est nouveau pour nous — c'est comme légiférer pour dire qu'il faut s'aimer: c'est une bonne idée, mais il ne suffit pas de le dire. C'est un bel objectif, mais c'est un travail difficile.
    L'approche canadienne, qui consiste à équilibrer tous les éléments et à les intégrer, est absolument essentielle. À l'OTAN, nous apprenons petit à petit. Je crois que l'ONU est un peu plus avancée que nous sur le plan, mais nous y arriverons.
(0930)
    Dernier point: les sondages. Dans la presse, on a l'impression — comme je suis porte-parole, je sais que la presse est capable de fausses interprétations — que les Afghans ne veulent pas de nous, qu'ils aiment bien les Talibans ou que le gouvernement perd des appuis. Ces cinq dernières années, il y a eu trois grands sondages, seulement trois, ceux d'Altai Consulting, de la Fondation pour l'Asie et de la BBC. Si on établit la moyenne, on constate qu'environ 75 p. 100 de la population est toujours fermement en faveur des forces étrangères. Chris peut certainement en témoigner. L'appui au gouvernement élu atteint environ 80 p. 100, ce qui est très élevé. Les Afghans, après seulement cinq ans, acceptent que le régime démocratique est la seule solution. Et 3 p. 100 d'entre eux souhaitent le retour des Talibans: 3 p. 100. Autant dire que c'est statistiquement négligeable. Personne ne veut que les Talibans reviennent en Afghanistan. La plupart des gens ont l'impression que leur vie s'améliore.
    Ces chiffres sont réconfortants. Nous progressons, nous faisons en sorte que ça marche.
    J'ai d'autres points à aborder, notamment sur ce que cela signifie pour l'OTAN, mais passons plutôt aux questions, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Nous allons donc entamer le premier tour. Nous allons nous en tenir à des périodes de six minutes et surveiller l'heure de près.
    Ce sera d'abord M. Patry.

[Français]

     Merci beaucoup. I will share my time...

[Traduction]

    Six minutes pour la question et la réponse.
    Oh! J'espère pouvoir utiliser six minutes. Mais ils ont pris dix minutes. Ce sera la même...
(0935)
    Je dois ajouter que les témoins comparaissent devant le Comité de la défense à 10 heures. Il faut donc surveiller les choses de près.

[Français]

    Merci beaucoup d'être ici présents ce matin.

[Traduction]

    Vous parlez de développement. Je veux vous parler de diplomatie. Vous nous donnez votre point de vue, mais nous entendons un autre son de cloche dans d'autres pays, comme l'Allemagne. Il y a deux semaines, le premier ministre Prodi, d'Italie, a admis qu'il avait des réserves à propos de la situation en Afghanistan.
    Je voudrais parler de la durabilité des effets. Il y a une ou deux semaines, nous avons rencontré Barnett Rubin à Washington. Selon lui, si les Talibans trouvent un refuge au Pakistan et en reçoivent de l'aide, cela tient en partie à l'hostilité qui a toujours caractérisé les relations entre le Pakistan et l'Afghanistan depuis que ces pays existent. Cette hostilité découle en partie d'un grief séculaire en Afghanistan, du commerce que le Pakistan reçoit de l'Inde et de la précarité de l'unité nationale du Pakistan, surtout à cause de la dissidence des Pachtounes et du Baloutchistan, qui ont souvent reçu des appuis de l'Afghanistan. Je veux parler de cela, je veux parler de démocratie.
    Si nous remontons à 1937, il y a 60 ans, avant même l'existence du Pakistan, il existait un traité de non-agression entre l'Afghanistan, l'Iraq, l'Iran et la Turquie. Selon moi, nous sommes actuellement en présence d'un problème de non-agression avec tous les pays voisins, dont l'Afghanistan, le Pakistan, l'Inde, l'Iran, la Chine, la Russie et, en un sens, l'UE. Les Nations Unies et l'OTAN ont-elles jamais... Je suis sûr que vous y pensez. Allez-vous essayer de réunir une conférence de tous ces pays pour tenter de trouver une solution viable et durable aux problèmes qui se posent actuellement en Afghanistan?
    Voilà ma question. Peut-être M. Ignatieff voudrait-il poser sa question maintenant, car il ne nous restera pas de temps si nous laissons ce type...
    Monsieur Ignatieff.
    J'ai une question à poser au porte-parole de l'OTAN. Il y a des idées divergentes qui viennent de l'OTAN au sujet de la probabilité d'une offensive au printemps. En ce moment, que pense l'OTAN de cette possibilité? Quels sont ses plans pour combattre une offensive?
    Je demande aussi à M. Alexander ce que le gouvernement Karzai peut faire pour renforcer sa légitimité et son soutien dans la province de Kandahar, puisque cela est essentiel à la réussite de la mission canadienne dans cette région.
    Merci.
    Monsieur Alexander.
    Merci beaucoup des deux questions.
    Nous avons signalé tous les deux que le Pakistan demeure le partenaire de l'Afghanistan avec lequel nous devons tous collaborer le plus possible pour régler certains des problèmes clés qui subsistent. L'élément de solution principal est la reconnaissance que les Talibans sont une menace à l'ordre établi, à l'ordre constitutionnel dans les deux pays. Je crois qu'on commence à s'en apercevoir au Pakistan même. Depuis deux mois, les attentats suicides y sont presque aussi nombreux qu'en Afghanistan. Il y a donc une menace transfrontalière, mais cette menace vise aussi l'ordre constitutionnel dans les deux pays.
    Vous citez Barnett Rubin, qui a été longtemps associé à l'UNAMA. Il a été l'un des architectes de l'Accord de Bonn et il demeure un observateur très franc et compétent des relations pakistano-afghanes. Toutefois, il n'est pas exact de dire que ces pays ont été à couteaux tirés tout au long de leur histoire. Le problème de la Ligne Durand subsiste. Il intéresse certaines clientèles de la population pachtoune de l'Afghanistan, mais, bien franchement, ce n'est pas une question à laquelle l'ensemble des Afghans s'intéressent, et encore moins leur gouvernement, dans les relations avec le Pakistan de nos jours.
    Les Afghans réclament la sécurité. Ils reconnaissent que les Talibans n'ont pas été abattus, mais seulement repoussés. Ils ont trouvé un refuge sûr et des alliés, en partie au Pakistan, mais leur réseau d'appui est vraiment international. Il n'y a pas eu assez de progrès dans la lutte pour faire disparaître ces refuges, détruire ces structures de leadership, du moins pas assez pour instaurer la stabilité en Afghanistan.
    Il vous reste une minute.
    Tous s'efforcent d'accomplir ces progrès. J'avoue que, pendant les quatre ou cinq premières années de la transition, aucun des acteurs n'a su reconnaître l'importance de cette question. J'aime à penser que, comme ses comptes rendus en témoignent, l'ONU a été parmi les premiers à tirer la sonnette d'alarme, mais il nous faut aller plus loin, et ce n'est que maintenant que nous parvenons à la masse critique dans le dialogue qui est nécessaire avec le Pakistan sur ces enjeux.
(0940)
    Monsieur Appathurai, vous avez quelque chose à ajouter? Une quarantaine de secondes pour répondre aux deux questions.
    La bonne gouvernance à Kandahar est indispensable à la réussite de la campagne en cours. Une observation importante à ce propos: ceux qui ont assuré la gouvernance jusqu'à maintenant, ces quatre ou cinq dernières années, ne sont pas nécessairement ceux qui seront les meilleurs représentants du gouvernement en temps de paix, lorsque des institutions légales commenceront à s'implanter à Kandahar. Il faudra des changements. Il y en a eu à Kandahar et à Helmand, mais il en faut davantage. Des personnalités associées à des stratégies passées, dont certaines ont échoué, pourraient devoir s'éclipser avant que soient en place tous les bons éléments nécessaires au succès.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer au deuxième intervenant, Mme Lalonde.

[Français]

    Comme nous sommes pressés, je vais droit au but.
    Un rapport Senlis — que vous connaissez certainement bien —, publié en février, dit qu'il y a un déséquilibre dans les instruments utilisés par la contre-insurrection. C'est-à-dire qu'on a trop focalisé sur la sécurité militaire, même s'il fallait le faire, et que ce qui manque, c'est l'aspect humanitaire, le développement économique et tout ce qui va dans l'autre volet.
    On sait que 350 $ par habitant ont été dépensés en Bosnie; en Afghanistan, c'est autour de 60 $. En faites-vous assez? Ça ne peut pas reposer seulement sur le Canada, 200 millions de dollars de plus. Cependant, il s'agit d'un cas d'une ampleur beaucoup plus grande.
    Malgré l'ampleur des moyens octroyés à l'Afghanistan pour appuyer les démarches dans le domaine du développement et de la reconstruction, ces moyens ont été insuffisants jusqu'à présent.
    Largement.
     C'est clair pour tout le monde.
    Il ne faut pas trop comparer les expériences de l'Afghanistan et celles de la Bosnie. La situation est différente. La communauté internationale a pris sur ses propres épaules l'administration de la Bosnie, ce qui a imposé des coûts qui vont bien au-delà de ceux qui nous ont été imposés par nos responsabilités en Afghanistan.
    À mon avis, on est en train d'assister à une accélération du processus d'identification de nouvelles ressources pour l'Afghanistan. Les États-Unis ont plus ou moins doublé leurs ressources pour l'Afghanistan il y a quelques mois. Le Canada, en respectant ses propres principes, en est à doubler ou à tripler l'effort dans le domaine civil pour appuyer le développement et l'élaboration de nouvelles institutions. Tout cela va exercer beaucoup de pression sur les partenaires européens, asiatiques et autres afin de renforcer leur engagement en Afghanistan.
    Ne peut-on cependant pas dire qu'il y a urgence? Ce que vous nous annoncez, c'est un processus qui a l'air lent.
    Prenons la question du pavot. Vous avez dit qu'il fallait la régler, puis vous avez cité les derniers chiffres de 1999. Toutefois, selon toutes nos indications, la culture du pavot ne ralentit pas. Au contraire, elle alimente les Talibans d'un côté, mais aussi toute la corruption qu'il y a partout, sans parler de l'effet sur tous les pays en « istan » tout autour.
    Au lieu d'essayer de détruire les cultures et de ne pas y parvenir, comme mon parti l'a plutôt proposé en s'inspirant d'autres personnes, pourquoi ne pas acheter ces cultures et en produire des médicaments?
    Nous avons déjà essayé cette stratégie en 2002. Les fermiers nous ont retourné, bras ouverts, une culture qui était le double de celle de l'année précédente, en demandant le double du prix de l'année précédente. Donc, acheter les cultures ne fonctionne pas.
    Ce qu'il faut faire, c'est mettre en oeuvre la stratégie existante pour l'élimination de la drogue des terres afghanes. Il y a huit piliers inhérents à cette stratégie. Il ne s'agit pas seulement de l'éradication. Dans les provinces où l'on procède à une éradication sans mettre en oeuvre les sept autres piliers, notre projet est voué à l'échec.
    Que voit-on cette année en Afghanistan? On voit une concentration de la culture dans deux ou trois provinces du Sud, soit les provinces qui sont le plus dans l'insécurité.
    En revanche, on a eu un franc succès dans plusieurs provinces de l'Afghanistan. Le Nangahar qui, comme le Pakistan, avait été le foyer de la culture du pavot en Afghanistan n'en cultive plus. Le Nord de l'Afghanistan et l'Ouest, où la gouvernance et l'État de droit sont plus ou moins établis, en produisent de moins en moins.
(0945)
    Mais c'est dans le Sud que sont les Talibans.
    Dans le Sud, où les Talibans sont présents, ça continue. Il faut donc régler le problème de l'insécurité avant de pouvoir mettre en oeuvre notre stratégie des huit piliers.

[Traduction]

    Merci, monsieur Alexander.
    Monsieur Appathurai, très très rapidement.

[Français]

    Je veux seulement dire une chose. Le gouvernement élu de l'Afghanistan n'en veut absolument pas. C'est son pays, et le président dit clairement que c'est contre l'islam...
    Mais tout le monde sait qu'ils en profitent, eux aussi. Excusez-moi, mais...
    Oui, mais on doit suivre évidemment aussi les...
    Ils en profitent tous.
    C'est un gouvernement élu, et il faut respecter son droit de décider de la façon dont il veut l'éradiquer.
    Monsieur le président, puis-je répondre brièvement à M. Ignatieff?
    N'empiétez pas sur mon temps de parole.

[Traduction]

    Oui, continuez. Nous entendrons la réponse.
    Il me faudra 30 secondes.
    Je suis rentré d'Afghanistan il y a quatre jours. Nous avons eu une longue séance d'information du commandant de l'ISAF au sujet de l'offensive du printemps. Cette expression n'est sans doute pas très juste, car ce sera plutôt l'été. Chaque année, nous avons vu une recrudescence d'activité.
    Cela dit, il est notoire qu'on ne peut se fier aux porte-parole des Talibans. Je prendrais donc avec un grain de sel toutes leurs données sur le nombre de kamikazes, etc. Elles sont peut-être vraies, mais peut-être pas. Personne ne sait. Voilà l'essentiel. Mais les Talibans semblent avoir une réserve inépuisable de candidats et d'argent, et il est difficile d'en bloquer l'arrivée.
    L'OTAN sera sur un pied d'alerte, et il n'y aura pas que l'OTAN. Nous avons un plan opérationnel très clair, l'opération New Year ou Nowruz. Chris est très au courant, car le plan est élaboré, il va sans dire avec l'étroite collaboration non seulement des Afghans — qui sont des participants à part entière et assument souvent la direction — mais aussi de la communauté internationale. L'approche sera double. Il y aura des opérations militaires actives mais ciblées dans tout le pays, surtout pour protéger et élargir les zones de développement où se font des investissements. Elles porteront par exemple sur des régions du Sud, comme le nord de Helmand, dont nous avons parlé et où il y a beaucoup à faire. Mais tout cela fera partie d'une approche globale et intégrée.
    Ce sera donc une offensive printanière, mais elle ne sera pas strictement militaire. Le développement et la reconstruction feront pleinement partie d'une approche intégrée, et elle sera la nôtre — une offensive à la fois civile et militaire.
    Merci beaucoup. Il est bon d'apprendre qu'on adopte une approche équilibrée.
    Monsieur Menzies.
    Merci, monsieur le président. J'allais revenir sur l'approche équilibrée, mais vous avez enchaîné là-dessus.
    Merci aux témoins d'être là aujourd'hui.
    D'abord, je prends note de ce que vous dites tous les deux sur les succès du développement. Et merci de votre appui. Les partis d'opposition nous critiquent beaucoup. Selon eux, nous ne devrions pas consacrer d'argent au développement. Nous devrions nous retirer.
    Des voix: Quoi? Non.
    M. Ted Menzies: Ce sont des observations que j'ai entendues. Et il est important de nous acquitter de cette mission.
    Certes, la sécurité est importante, mais pourriez-vous nous faire part de vos réflexions sur l'équilibre dans nos efforts? On nous a reproché de ne pas bien équilibrer développement et défense. Qu'en pensez-vous?
    Je veux aussi laisser à mon collègue Wajid Khan la possibilité de poser une question.
    Je vais poser une question très rapide et elle va dans le même sens que celle de mon collègue M. Ignatieff, qui pourrait probablement la poser mieux que moi.
    J'ai l'impression que les acteurs non étatiques étrangers qui ont utilisé le territoire pakistanais et afghan pour mener des incursions ailleurs attaquent aussi à l'intérieur du Pakistan. Il y a eu récemment les attentats contre le Marriott et l'aéroport d'Islamabad. Le gouvernement, les militaires et les Américains ont aussi mis beaucoup de pression sur les Pachtounes et des éléments locaux chez les Talibans. Ils se sont dispersés et se sont joints à d'autres organisations. Il y a aussi des indications en Iraq donnant à penser qu'il y a réinvestissement en Afghanistan parce que les sunnites et chiites non extrémistes, les Américains et les autres mettent beaucoup de pression sur ces types-là. Ils ne sont pas tellement bienvenus. Ils ne peuvent agir impunément en Iraq.
    Y a-t-il des indications selon lesquelles un lien s'établit entre Al-Qaïda et les Talibans, qui formeraient un seul groupe?
    De plus, comme l'attentat en Inde le montre, ces groupes se seraient dispersés et se seraient joints à d'autres. Cette menace est-elle grave? Prévoit-on une riposte?
    Très rapidement. Les Américains ont une frontière de 2 400 kilomètres et ne peuvent empêcher l'immigration illégale en provenance du Mexique. L'Inde a 600 000 soldats au Cachemire et elle ne peut stopper les militants locaux. Raisonnablement que peut faire le Pakistan, croyez-vous? Comment pouvons-nous l'aider à atteindre son objectif?
    Merci.
(0950)
    Merci, monsieur Khan.
    Il y a deux questions, monsieur Appathurai.
    Oui, en deux phrases. L'OTAN est fermement convaincue qu'il n'y a pas de développement sans sécurité, c'est vrai, mais aussi qu'il n'y a pas de sécurité durable sans développement. Pour nous, c'est absolument primordial. Notre mission ne sera pas réussie tant que les civils ne réussiront pas à faire ce qu'ils doivent faire. Et c'est pourquoi nous travaillons en équipe comme nous ne l'avons jamais fait auparavant.
    Le principe est clair. La difficulté consiste à s'y prendre correctement. La communauté internationale n'a jamais rien fait de semblable. Les équipes provinciales de reconstruction sont un exemple. C'est une formule unique de collaboration entre les civils et les militaires. Il faut trouver des moyens de travailler avec les ONG, qui ont une profonde méfiance à l'égard de notre travail et de nous-mêmes, dans le domaine de la sécurité. Nous apprenons petit à petit, mais nous sommes bien plus avancés que par le passé.
    Nous devons veiller à faire les trois choses: garantir la sécurité, assurer la reconstruction immédiate... Si on casse quelque chose, il faut réparer, sans quoi on se fait des ennemis. C'est une question très délicate que celle de savoir combien d'argent donner aux militaires. Certains pays accordent des fonds qui peuvent avoir un effet rapide. Nous avons un fonds d'aide humanitaire immédiate après les opérations qui a été créé par l'OTAN et auquel les pays ont contribué, si bien que le commandant de l'ISAF a l'argent voulu pour intervenir et réparer les dégâts. Puis, il y a le développement à long terme. Je le dis parce qu'il vaut la peine de le dire. Je rentre de là-bas, comme je viens de le dire, et de nombreux organismes de développement — pas des organismes canadiens — m'ont dit que l'ACDI était un modèle en matière de développement à long terme. S'il y a des représentants de l'ACDI ici présents, je leur signale qu'ils reçoivent une foule de compliments de la communauté internationale. Mais le travail est très dur.
    Quant à la frontière, vous avez raison de dire que c'est un peu une diversion. C'est une question de structure de commandement et de contrôle. Il y a des camps de réfugiés. Il faut trouver des solutions outre frontière pour aider à faire de la prévention et... Un dernier point: l'OTAN aide les Pakistanais et les Afghans à contrôler la frontière de façon technique, par l'observation et des patrouilles communes.
    Merci.
    Monsieur Alexander, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Très rapidement. L'approche équilibrée, la formule trois D pour le développement associé à la sécurité, ne fait pas vraiment l'enjeu de débats en ce qui concerne l'Afghanistan. C'est le consensus dont nous avons besoin tous les deux. Après 2006 et le début de 2007, période où il y a eu une progression impressionnante de l'engagement militaire, tout le monde a conclu qu'il fallait aussi renforcer le développement et la reconstruction, et des partenaires clés ont commencé à le faire.
    Il importe de comprendre toute l'importance de l'engagement que le Canada a pris hier. Il fera passer le Canada aux tout premiers rangs des pays qui font des dons pour la reconstruction et le développement. Le Canada fait encore preuve de leadership, donne un exemple que d'autres partenaires seront appelés à imiter s'ils veulent être perçus comme les membres crédibles de l'équipe comme ils l'ont été jusqu'à maintenant.
    Sommes-nous dans la bonne voie? Oui. Que devons-nous faire pour garantir le succès de cette aide au développement? Il faut continuer à « afghaniser » le processus. Il faut le confier de plus en plus aux civils, comme James l'a dit. Nos devons aussi gérer la dimension régionale, car la sécurité n'est pas un défi qui se limite à l'intérieur des frontières afghanes. Il concerne toute la région.
    Nous devons encore améliorer les mécanismes de prestation. La contrainte, en Afghanistan, n'a pas été nécessairement l'argent qui est injecté dans le système. C'est peut-être plutôt l'efficacité et le nombre de mécanismes de prestation disponibles. J'ai dit tout à l'heure que peut-être six ou sept des 25 ministères du gouvernement étaient efficaces et vous et moi compterions sur eux pour acheminer une aide de 50 millions de dollars. C'est dire que les deux tiers des ministères sont inefficaces. De la même façon, dans la société civile, il nous faut plus d'ONG qui ont ce qu'il faut pour appliquer des programmes nationaux. Or, c'est dans les programmes nationaux que, depuis des années, le Canada exerce un leadership. De la même façon, le secteur privé en Afghanistan a un rôle extrêmement important à jouer, et nous devons l'aider à se développer et à s'affirmer comme un acteur efficace dans le pays grâce aux marchés d'approvisionnement locaux.
    Merci, monsieur Alexander.
    Nous passons à Mme McDonough. Je vous en prie.
    Merci beaucoup.
    Il y a tellement de questions à poser. Merci d'être là. Je vais essayer de poser trois questions dans le temps que j'ai.
    Nous sommes nombreux à avoir des problèmes avec cette idée d'équilibre, car même si on tient compte des annonces d'hier, le Canada, qui devait faire pour le militaire des dépenses neuf ou dix fois plus importantes que pour la diplomatie et le développement, doit maintenant en faire huit ou neuf fois plus. Je m'interroge sur cette idée d'équilibre dans le cas de la contribution du Canada.
    Deuxièmement, même s'il est vrai qu'environ 12 000 soldats américains relèvent maintenant de l'ISAF, il en reste à peu près autant, soit 12 000 ou 13 000 soldats américains qui sont toujours rattachés à l'opération Enduring Freedom. Il n'y a à cet égard aucun accord avec le gouvernement afghan — et vous avez souligné l'importance du gouvernement afghan dans tout cela — ni avec l'autorisation de l'ONU. Qu'en pensez-vous?
    Deuxièmement, on ne cesse de nous dire que nous sommes en train de gagner. Je voudrais attirer l'attention sur des chiffres de l'International Crisis Group. Au cours des neufs premiers mois de 2006, il y a eu plus de 3 700 décès, ce qui comprend les militants, le personnel de sécurité et les civils: quatre fois plus. D'après les estimations de l'armée américaine, il y a eu 139 attentats suicides en 2006, contre 27 l'année précédente. Le nombre de bombes qui ont explosé en bordure de la route a doublé, et le nombre d'attaques des insurgés, au moyen d'armes légères, de grenades et d'autres armes, a augmenté et atteint 4 542. Là encore, le chiffre a été multiplié par quatre.
    Il est donc difficile de voir comment on peut dire que nous sommes en train de gagner. Vu ces statistiques et ces rapports, il ne nous semble pas évident que la stratégie militaire à laquelle le Canada participe est vraiment gagnante. Qu'en pensez-vous?
    Troisièmement, je m'étonne beaucoup qu'aucun d'entre vous n'ait soufflé mot d'une corruption très répandue. Il n'a pas été question des seigneurs de guerre. C'est là une grande préoccupation pour les civils avec qui nous avons communiqué et pour les ONG qui ont été témoins de ces horreurs.
    Quant à l'élimination du pavot...
(0955)
    Il faut laisser aux témoins un peu de temps pour répondre, madame McDonough.
    Oui.
    Je crois que c'est Rubin qui nous a dit que, pour l'instant, l'approche de l'éradication du pavot ne fait qu'enrichir les seigneurs de guerre et appauvrir les agriculteurs, les familles et les villages.
    Merci, madame McDonough.
    Allez-y, monsieur Alexander.
    Une ligne pour chaque question, monsieur le président.
    Pour ce qui est de l'équilibre, vous avez tout à fait raison, ce sont bien les proportions. Tous sont conscients du paradoxe, mais je dois souligner que l'engagement que le Canada a pris et que d'autres pays commencent à prendre pour le développement et la reconstruction nous place à la limite de la capacité afghane d'absorption de l'aide et de l'effort de reconstruction. On ne peut pas dépenser un milliard de dollars sur un caprice. Il faut qu'il passe par une institution, une institution qui doit rendre des comptes. Il doit y avoir un contrôle et une évaluation. Je crois que nous poussons le système à la limite de son potentiel.
    L'opération Enduring Freedom n'existe plus. Elle a été abandonnée pour l'essentiel lorsque l'OTAN a assumé la responsabilité de toute la mission. La plupart de ceux qui ne relèvent pas du commandement de l'OTAN dispensent de la formation dans la police et l'armée. Seul un petit groupe s'occupe d'activités de contre-terrorisme sous commandement exclusivement américain, mais c'est avec l'appui du gouvernement afghan, et ces activités sont régies par des arrangements très précis avec les autorités afghanes. C'est également en vertu d'un mandat de l'ONU que les États-Unis agissent toujours au nom de leur droit à l'autodéfense, reconnu par tous les membres du Conseil de sécurité en septembre 2001.
    Sommes-nous en train de gagner? Nous remportons des succès militaires, et il se fait du développement, mais non, nous n'avons pas instauré les conditions propices à la paix et à la sécurité en Afghanistan. Comme James l'a dit, pour que nous puissions prétendre à la victoire, si on peut parler de victoire, il faudra chasser les structures de leadership des Talibans — le groupe Hekmatyar, le groupe Jalaluddin Haqqani — qui ont une certaine présence au Pakistan. Les commandants militaires américains et bien d'autres personnes l'ont dit.
    Quant à la corruption et aux seigneurs de guerre, c'est au fond ce dont il est question lorsque nous parlons de gouvernance. Ce sont de gros problèmes, et il faut faire davantage. L'ONU se fait le champion d'un programme innovateur de désarmement, le Démantèlement de groupes armés illégaux, qui visera à recueillir beaucoup plus d'armes et de munitions en Afghanistan. Je suis très fier que le Canada appuie cette initiative. Nous sommes fermement engagés à l'égard du plan d'action pour la paix, la justice et la réconciliation, qui visera à amener les seigneurs de guerre et d'autres personnes à répondre de leurs crimes du passé. C'est très controversé en Afghanistan et très populaire dans la société même.
(1000)
    Monsieur Appathurai.
    Chris a dit l'essentiel. J'ajouterais une chose. Le rapport de neuf à un entre les dépenses militaires et le développement est un faux problème, car le militaire coûte très cher. Cela ne veut pas dire qu'il y a forcément une disproportion. Autrement dit, pour faire voler un Apache qui utilise des munitions pour protéger nos troupes, il faut compter des dizaines de milliers de dollars. C'est ainsi.
    Je me méfie un peu de cette comparaison qui montre qu'on dépense beaucoup pour le dispositif militaire et moins pour le développement. Les deux ne sont pas comparables. À dire vrai, je ne crois pas que la comparaison soit pertinente.
    Quant à la mission antiterroriste que mènent les États-Unis, les opérations guidées par le renseignement contre les dirigeants terroristes — comme Chris l'a dit, il ne s'agit pas de l'opération Enduring Freedom —, elle s'impose. Quelqu'un doit s'en charger, et le gouvernement afghan appuie cette mission sans réserves. Il veut que ce travail se fasse, et l'ONU le veut aussi. Il ne faut pas reculer devant le travail important que les États-Unis accomplissent. Il est important.
    Je m'en tiens là. Chris a dit le reste.
    Merci, monsieur Appathurai. Nous n'avons plus de temps, mais j'ai une question rapide à vous poser.
    Vous avez parlé d'indicateurs: sommes-nous en train de gagner, pouvons-nous gagner? Les indicateurs révèlent que, sur le plan social, la situation des Afghans est meilleure que par le passé. Il y a des soins de santé. On lutte contre la pauvreté et 17 000 projets de reconstruction sont en cours.
    Pouvez-vous me dire avec une grande précision combien de soldats de l'OTAN sont engagés dans la mission? On nous parle toujours de 30 000 ou de 35 000. Vous avez dit que certains pays ont renforcé leur participation, en grande partie parce que le Canada a incité d'autres pays à faire leur effort.
    Quels sont les chiffres?
    En ce moment, ce doit être environ 37 000. Je peux vous dire que, dans le Sud, là où le Canada se trouve, le nombre de soldats en passé de 1 000 à 12 500 au cours des 18 derniers mois. Le nombre a donc été multiplié par 12 en 18 mois dans le Sud, là où les troupes canadiennes sont déployées. Tous s'entraident. Il n'est pas vrai que nous sommes seuls sur ce terrain. Il y a neuf pays sur place, 12 500 soldats sur un total d'environ 37 000 — il ne s'agit que de l'ISAF de l'OTAN — et quelque 8 000 américains qui s'occupent surtout de formation, comme Chris l'a dit. Et cela ne tient pas compte des 30 000 soldats de l'armée nationale afghane, dont l'effectif devrait progressivement atteindre les 70 000.
    Merci beaucoup de votre présence. Nous sommes heureux d'avoir pu accueillir aujourd'hui des représentants de l'OTAN et de l'ONU.
    Nous allons suspendre la séance une ou deux minutes pour que nos invités puissent partir. Je crois qu'ils doivent aller comparaître devant un autre comité.
    Nous invitons les représentants de la FCM à prendre place à table. Je vous en prie.

(1005)
    Nous reprenons la séance pour la deuxième heure.
    Nous aurons l'honneur d'entendre des témoins dans le cadre de notre étude sur le développement démocratique. Cette étude tire à sa fin, et il ne nous reste que très peu de témoignages à recevoir. Nous avons hâte d'entendre les représentants de la Fédération canadienne des municipalités, Gord Steeves, premier vice-président, et Brock Carlton, directeur du Centre international pour le développement municipal.
    Merci d'être parmi nous aujourd'hui. Nous avons hâte de vous entendre.
    Nous allons écouter vos exposés, puis nous passerons à la première série de questions. J'ai remarqué que vous étiez déjà là pour les dernières questions posées aux témoins précédents. Vous savez comment nous procédons. Aujourd'hui, je suis assez strict parce que le comité doit discuter d'un certain nombre de choses.
    Vous êtes les bienvenus, et nous vous écoutons.
    On m'a déjà présenté. Je m'appelle Gord Steeves et, par le hasard des choses, je suis président intérimaire de la Fédération canadienne des municipalités.
    Je suis en compagnie de Brock Carlton, directeur de la politique internationale et du développement. Sont également présents le chef de direction intérimaire, Jean-François Trépanier, et le directeur des politiques, Richard Smith.
    Les membres du comité ne le savent pas forcément, mais la Fédération canadienne des municipalités regroupe quelque 1 500 administrations municipales des quatre coins du Canada. Nos membres représentent environ 90 p. 100 de la population canadienne. Par sa structure, notre organisation a pour principale vocation de préconiser au nom municipalités canadiennes des politiques et des mesures de développement. Elle a également deux autres composantes qui s'occupent de développement durable et, évidemment, du développement international. C'est du reste ce qui explique notre présence aujourd'hui.
    Ce que je voudrais faire aujourd'hui, monsieur le président, c'est formuler quelques observations, après quoi je passerai le relais à Brock Carlton pour le reste, si cela vous convient.

[Français]

    Je voudrais vous remercier de me donner l'occasion de faire une présentation devant ce comité.
    La question du développement démocratique est un thème important qui exige réflexion et compréhension. Le développement de la démocratie dans les pays étrangers exige une diligence et un engagement, ainsi qu'une concentration sur les questions pratiques qui amélioreront la vie des gens afin qu'ils puissent voir, en termes concrets, pourquoi la démocratie apporte une meilleure qualité de vie.

[Traduction]

    À titre de président intérimaire de la Fédération canadienne des municipalités et de conseiller de Winnipeg, je suis, comme nous le sommes tous, une expression de l'expérience démocratique canadienne. Dans les instants qui vont suivre, nous voudrions donner notre opinion sur le développement démocratique et surtout expliquer que nous sommes convaincus que ce développement ne peut se réaliser si on ne s'intéresse pas à l'administration et à la gouvernance locales.
    Dans ces quelques minutes, nous parlerons de ce que fait l'administration locale, des tendances qui influencent notre conception du monde, de la façon dont le Canada, par l'entremise de la FCM, a répondu et pourrait mieux répondre à cette nécessité de mettre l'accent sur l'administration locale comme facteur clé du développement démocratique à l'étranger.
    Avant de passer à notre exposé, je voudrais vous livrer une réflexion. Comme vous le savez peut-être, les municipalités ont été les premières manifestations de la démocratie chez nous. Saint John, au Nouveau-Brunswick, première ville constituée au Canada, a été fondée en 1785, et Montréal a tenu ses premières élections en 1833. Expression canadienne de la démocratie, nos valeurs et principes sont le fruit des expériences des villes et localités de tout le pays et de toute notre histoire, et, comme vous le verrez, mettre l'accent sur la gouvernance et les administrations locales est un moyen pratique et fécond de faire rayonner nos valeurs démocratiques et nos principes dans le monde entier.
    En développement international, il faut parler d'abord d'administrations locales, de gouvernance locale sous l'angle du développement démocratique. L'UNESCO définit la gouvernance comme l'ensemble des règles, processus et comportements par lesquels la société sert ses intérêts, utilise ses ressources et exerce son pouvoir. Nous croyons que les administrations locales ont plusieurs caractéristiques qui sont essentielles dans toute démocratie. Comme vous le savez peut-être, ces administrations — je suis sûr que certains membres du comité ont fait partie d'administrations municipales — ouvrent un espace public permettant aux administrés de participer aux décisions qui touchent leur collectivité.
    À la base, ces administrations favorisent très bien la participation des femmes, des minorités ethniques et d'autres groupes sous-représentés dans le processus démocratique. À cause de la proximité, elles aident à bâtir la confiance envers les institutions locales, à garantir que ces institutions sont viables et servent les administrés au quotidien, et à créer un contexte propice au développement. Elles sont aussi un partenaire local plus fort et favorisent le dialogue, la coordination et la coopération entre les gouvernements.
    Nous croyons aussi que des administrations locales efficaces ne sont pas possibles sans une gouvernance locale forte, transparente, responsable pour aider à créer les règles et processus locaux et pour jouer le rôle d'animateur auprès des groupes locaux afin de canaliser les ressources et l'énergie pour les administrations locales.
    La gouvernance locale, à la différence des autres ordres de gouvernement, peut mobiliser les pouvoirs locaux, les décideurs, les praticiens, les groupes communautaires et les administrations locales. Elle est plus enracinée dans la réalité sociale, politique et économique des collectivités, grandes et petites. Selon nous, elle est un peu plus responsable, transparente et représentative des collectivités locales, aide à mobiliser leurs ressources et leurs actifs, fournit des services et produit des résultats concrets sur le terrain, dans les secteurs qui ont l'impact le plus direct sur la vie des gens. Elle peut aussi reproduire les réussites pour le bien de toute la collectivité et créer des réseaux municipaux de mise en commun des connaissances pour que d'autres régions et pays imitent ces réussites.
    Maintenant qu'il est établi que l'administration locale a un rôle clé à jouer dans la gouvernance locale et donc le développement démocratique, tournons-nous vers ces enjeux dans le contexte international. Nous constatons que l'urbanisation rapide exerce une énorme pression sur les administrations locales, qui doivent offrir toutes sortes de services. La capacité des institutions locales d'assurer des services est essentielle à la réalisation de nombre des objectifs de développement du millénaire définis par l'ONU et que les cités et villes sont des actifs précieux et des facteurs clés de la prospérité nationale et internationale. Les cités et villes sont toutefois conscientes que les plus grands défis sociaux sont locaux. Une gouvernance locale efficace est essentielle à une solide interdépendance sociale et économique entre les zones rurales et urbaines.
    L'empreinte des villes sur l'environnement est de plus en plus importante. Environ 78 p. 100 des GES viennent des petites zones urbaines qui ne représentent que 2 p. 100 de la masse terrestre.
    Quelques enjeux clés caractérisent la réaction de l'administration municipale dans ce contexte. Il est très important que le comité soit au courant de certaines des tendances que nous avons observées.
    D'abord la coordination des politiques et programmes. Des réseaux municipaux surgissent pour faciliter une action mondiale. Les Cités et gouvernements locaux unis, le Forum du Commonwealth sur les administrations locales et l'Association internationale des maires francophones ne sont que quelques exemples de ces organisations qui naissent pour améliorer les réseaux entre les administrations locales.
    Il existe un meilleur appui pour la gouvernance au niveau infranational. Les donateurs — Banque mondiale, Banque interaméricaine de développement, PNUD, DflD — appuient de plus en plus les ordres infranationaux de gouvernement. Nous en avons vu un exemple saisissant et convaincant dans les régions touchées par le tsunami.
    Les administrations municipales se révèlent être acteurs internationaux. Dans le monde entier, des villes prennent l'initiative et donnent une dimension mondiale à leurs efforts visant à promouvoir le commerce, à attirer des investissements, sans oublier l'immigration, l'innovation, les échanges culturels et politiques et la coopération internationale. Des villes comme Londres deviennent chefs de file mondiaux en matière de transports; des villes comme New York ont pris des mesures sur le plan de la sécurité sans attendre l'aide de l'État ou du gouvernement fédéral. Même au Canada, Toronto, Montréal et Vancouver sont en train de devenir des entités distinctes.
(1010)
    Dans ce contexte international, la réponse du Canada a consisté à travailler avec les municipalités par l'entremise de la FCM au cours des 20 dernières années. Nous gérons actuellement dix programmes en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Le budget annuel des programmes s'établit actuellement à 12 millions de dollars, et 35 employés sont affectés à ce travail. En 20 ans, nous avons travaillé dans 44 pays d'Afrique, d'Asie, d'Amérique latine et des Antilles, et nous travaillons actuellement avec 18 pays. Nous collaborons avec plus de 2 500 bénévoles municipaux et, actuellement, il y a 15 praticiens municipaux bénévoles pour chaque jour civil.
    Le fait est anecdotique, mais en ce moment, nos projets font intervenir non seulement des bénévoles municipaux, mais aussi des ressources communautaires. Par exemple, Drayton Valley, en Alberta, travaille avec la Tanzanie. En plus du renforcement de la capacité de l'administration municipale, des groupes locaux de Drayton Valley soutiennent un établissement pour orphelins du sida et aident à établir une fondation pour que d'autres puissent verser de l'argent à la collectivité en ayant l'assurance qu'il sera géré de façon transparente et responsable.
    Monsieur le président, ce modèle a été reproduit dans une foule de villes et de localités de tout le Canada. Le gouvernement fédéral s'appuie sur les ressources municipales pour mobiliser toute la capacité que les municipalités peuvent offrir, des collectivités s'allient avec les clubs Rotary locaux, les Jaycees et les Chevaliers de Colomb et offrent ce genre de ressources à des régions en développement d'une manière ciblée, responsable et très concrète.
    Là-dessus, je cède la place à Brock, qui a également quelques mots à vous dire.
(1015)
    Merci, monsieur Steeves.
    Monsieur Carlton.
    Merci. Je vais parler pendant quelques minutes de notre façon de travailler et faire quelques observations sur des leçons tirées de l'expérience. Puis, comme on nous y a invités, je vais présenter des recommandations que, selon nous, le comité devrait étudier.
    Gord a parlé des relations entre collectivités, mais je souligne que notre travail va au-delà de la collaboration entre collectivités et municipalités. Nous abordons un pays et travaillons avec lui au niveau national sur une stratégie qui encadre ensuite les initiatives entreprises auprès des collectivités et municipalités.
    Si je peux me permettre, je vais présenter un portrait du Ghana, exemple de pays où nous concentrons nos efforts. La FCM a travaillé avec l'association nationale ghanéenne. Ensemble, nous avons élaboré une stratégie de développement local au Ghana. Ce n'est pas la stratégie de la FCM, mais celle de l'association nationale au Ghana. Puis, dans le cadre de la stratégie, nous travaillons avec nos membres et les Ghanéens avec les leurs pour choisir des municipalités susceptibles de collaborer au sein des partenariats dont Gord a parlé il y a quelques minutes. Dans le contexte de la stratégie nationale, les municipalités établissent des relations officielles selon un cycle de deux ans. Elles travaillent sur des questions très pratiques comme la gestion financière, la gestion des déchets solides et toutes les autres questions clés dont les municipalités s'occupent chez elles.
    Ce qui importe vraiment ici, c'est que nous ne bâtissons rien, pas de routes, pas de ponts, que nous n'aménageons pas des décharges de déchets solides. Nous travaillons en fait sur des éléments de gouvernance. Nous essayons de voir avec l'administration, avec le conseil, comment gérer les services municipaux plus efficacement, comment mobiliser la collectivité dans une démocratie, dans une gouvernance locale plus efficace, de sorte que l'action de la municipalité concorde avec les objectifs et les intérêts de la société dans son ensemble. C'est aussi un élément important pour assurer une certaine équité et faire participer les groupes pauvres et marginalisés aux discussions sur la façon dont l'administration municipale sert les intérêts collectifs.
    Tout cela se fait dans le cadre national. Si un pays, par exemple le Ghana, a une stratégie de réduction de la pauvreté ou de développement national, notre travail s'intègre à ce contexte national également. Comme Gord l'a dit plus tôt, il est inévitable, lorsque des municipalités aident des partenaires à l'étranger, que les collectivités canadiennes mettent la main à la pâte et travaillent avec les collectivités du Ghana ou d'autres pays.
    Gord a signalé que nous étions engagés dans ce travail depuis 20 ans. Nous avons tiré beaucoup de leçons de cette expérience, et nous voudrions en signaler quelques-unes au comité.
    D'abord, un développement démocratique efficace, une gouvernance efficace suppose qu'on travaille à l'intérieur du système existant. Comme je l'expliquais à l'instant, nous allons sur place travailler avec des partenaires nationaux et locaux, dans le contexte des programmes et stratégies du gouvernement national, à l'intérieur du système. Il s'agit aussi de travailler avec les institutions existantes et non d'en créer de nouvelles de notre cru. Nous appuyons le renforcement des institutions existantes et leur capacité de répondre aux besoins de la collectivité.
    Ce type de travail n'est pas rapide. Il faut du temps. Il faut établir des relations, ce qui exige des engagements durables. Les municipalités qui s'engagent dans le travail de développement le font, comme je l'ai dit, selon des cycles de deux ans, mais le plus souvent, ces cycles recommencent plusieurs fois. Au bout de deux ans, il y a une évaluation, un rajustement du partenariat entre les deux parties, et le travail se poursuit. Dans certains cas, cela dure depuis 10 ou 15 ans. Le développement est tout à fait abordé dans une optique à long terme.
    L'élément fondamental, c'est que ce sont des partenariats entre praticiens, entre secteurs. Dans le jargon du développement, on pourrait parler de communauté de pratiques en administration municipale. Nous amenons le secteur municipal canadien à travailler avec le secteur municipal du Ghana, du Guyana ou de quelque autre pays. Il ne s'agit pas simplement de l'assistance technique d'un consultant ayant une compétence particulière qui vient faire un travail, mais d'une municipalité et de sa collectivité qui travaillent avec une autre municipalité et ses administrés. Ces relations vont bien au-delà des échanges techniques. Ce sont vraiment des partenariats entre les praticiens canadiens et leurs homologues de l'étranger, et ces partenariats visent à résoudre les problèmes qu'ils ont désignés entre eux comme des priorités.
(1020)
    Autre élément: c'est un travail entre pairs. Lorsque nous allons à l'étranger, nous n'amenons pas des spécialistes du développement qui passent deux semaines en Ouganda, produisent un beau rapport et reprennent l'avion pour aller ailleurs faire un autre rapport. Nous amenons ceux qui font le travail au Canada. Ils travaillent comme bénévoles et discutent avec ceux qui font le même travail à Kampala, à Nairobi ou ailleurs. Ce sont ceux qui font concrètement le travail. Ils amènent une expérience canadienne concrète. Ils ne disent pas: nous faisons ceci au Canada, c'est comme cela qu'il faut faire, faites comme nous, mais plutôt: nous avons une certaine expérience, grâce à laquelle nous sommes parvenus à un certain développement au Canada; comme c'est très pratique, nous pouvons travailler et vous aider à résoudre vos problèmes dans votre contexte, d'une manière qui est sensée pour votre collectivité. L'approche repose donc sur le travail concret des praticiens.
    Cette formule stimule aussi beaucoup une expérience d'apprentissage en collaboration. Les réseaux dont Gord a parlé, comme les Cités et gouvernements locaux unis, le Forum du Commonwealth sur les administrations locales, etc., offrent beaucoup d'occasions de mettre en commun les acquis et d'avoir les échanges qui donnent les avantages mutuels si importants dans ce type de partenariat.
    Pour conclure, monsieur le président, nous soumettons quatre recommandations à l'étude du comité.
    D'abord, il faut reconnaître que les groupes infranationaux, les municipalités dans notre cas, sont très importants pour le développement démocratique, qui n'est pas le fief exclusif des parlements et des cadres législatifs nationaux. Il y a aussi une place pour l'ensemble du système et la gouvernance locale, et pour les administrations municipales qui font partie de ce système.
    Deuxième recommandation: il nous semble important que les programmes appliqués par le gouvernement du Canada par l'entremise de l'ACDI permettent aux Canadiens de participer à ce travail, pour que les municipalités canadiennes ou leurs praticiens de la démocratie puissent travailler avec leurs homologues étrangers très concrètement. C'est très important.
    Troisième point important: il ne suffit pas de faire participer des organisations canadiennes à ce qui se passe à l'étranger; il faut que l'ACDI et les ministères fédéraux à vocation internationale soient prêts à faire participer des organisations canadiennes comme la FCM à leur réflexion, à leurs stratégies, à leur travail d'élaboration de politiques sur les positions du Canada à l'égard des enjeux relatifs au développement à l'étranger et à d'autres intérêts du Canada. La FCM et d'autres organisations peuvent contribuer au débat sur les positions du Canada dans ces dossiers.
    Ma dernière recommandation porte sur un document qui a été distribué aux membres du comité. Il s'agit du Programme mondial de gouvernance locale. Selon nous, cette approche permettrait à la FCM et au gouvernement du Canada de collaborer de façon beaucoup plus cohérente pour mettre en commun l'expérience municipale canadienne, la gouvernance et la démocratie locale au niveau international. Dans l'état actuel des choses, nous collaborons avec l'ACDI à divers projets, mais il n'y a aucune continuité durable. Les projets vont et viennent, mais il n'y a aucune stratégie, aucune perspective à long terme pour faire contribuer le secteur municipal au service des intérêts du Canada à l'étranger. Selon nous, appuyer ce programme mondial serait un moyen de favoriser une approche cohérente de la participation des administrations municipales canadiennes et de la prise en compte des intérêts internationaux canadiens à l'étranger.
(1025)
    Merci d'être là, messieurs Carlton et Steeves.
    L'exposé a été fascinant, et il faut féliciter la FCM du travail qu'elle accomplit. Nous savions que vous aviez des activités, mais nous venons d'apprendre comment vous collaborez avec d'autres organisations et avec des municipalités au niveau mondial dans certains pays. Nous vous applaudissons.
    Votre documentation dit que la FCM et ses partenaires, représentant un réseau mondial d'administrations municipales et d'associations, proposent un nouveau programme original, le Programme mondial de gouvernance locale. La part canadienne correspond-elle aux 12 millions de dollars que vous avez déjà reçus? C'est la part du Canada? Très bien, merci.
    Madame Sgro.
    Merci beaucoup. Comme nous avons si peu de temps ce matin, je partage mon temps de parole avec mon collègue.
    Je dois dire d'abord que vos recommandations sont excellentes. Il arrive trop souvent que les différents ordres de gouvernement agissent chacun de leur côté sans beaucoup de coordination. Je suis d'accord avec vous sur tout ce que vous dites de la façon de mieux réussir avec les ressources que nous avons.
    À propos des défis à relever, que vous décrivez ici, quel vous semble être le plus gros obstacle à la conclusion d'arrangements durables avec le gouvernement?
    Mon collègue à une autre question à poser, et vous pourrez répondre aux deux questions dans les cinq minutes que nous avons.
    Merci aux témoins d'être là. Je ne savais pas que des municipalités jouaient un si grand rôle dans d'autres pays. Excellente nouvelle.
    Une ou deux questions rapides. On a parlé de 12 millions de dollars. Peut-être pourriez-vous donner quelques détails. D'où vient cet argent?
    Comment choisissez-vous vos projets? C'est ma deuxième question.
    D'autres pays ont-ils des municipalités qui s'engagent comme vous le faites?
    Ma dernière question porte sur les jeunes. Y a-t-il assez de jeunes Canadiens qui participent aux projets?
    Je vais essayer de donner quelques réponses. Je vais parler du choix des projets et laisser Brock parler de l'argent et des aspects techniques — d'où tout vient-il?
    Comme hommes et femmes politiques, nous pouvons tous comprendre que l'idée d'une municipalité et d'un gouvernement fédéral travaillant à l'étranger présente en soi une difficulté. Les ressources des municipalités sont très sollicitées, et les vôtres aussi. Dans le choix des projets, il arrive souvent qu'on se laisse guider par les intérêts qui s'expriment dans la collectivité, que les idées viennent de la base.
    À Winnipeg, par exemple, notre jumelage et notre partenariat avec Kampala, en Ouganda, ont fait intervenir une collectivité ougandaise particulière, qui n'était peut-être pas aussi bien en prise avec les administrations locales qu'elle aurait dû l'être, et cela a aidé à faire avancer les choses. Il y avait aussi la question du laboratoire de Winnipeg qui s'occupe du VIH. Je suis sûr que vous êtes tous au courant. On peut sans doute dire que deux facteurs de synergie ont servi de fondement à Winnipeg pour justifier la collaboration avec le gouvernement fédéral, par l'entremise de la FCM et de l'ACDI, pour faire financer la coopération avec Kampala. Voilà un exemple de la façon dont naissent certains de ces projets.
    Je cède la parole à Brock pour qu'il traite du financement.
    D'accord.
    Pour revenir sur la même question, je dirai que, si nous prenons du recul par rapport au niveau local et considérons les projets que nous réalisons ou les pays avec qui nous finissions par travailler, beaucoup de décisions se prennent à partir de l'analyse du contexte des divers pays. Quelle est la structure démocratique? Les municipalités ont-elles un mandat suffisant pour agir, de façon que, si nous travaillons avec elles, elles pourront profiter de cette capacité et offrir des services efficaces? Nous faisons une analyse. Ce n'est guère différent de l'analyse que l'ACDI réalise pour choisir les pays où elle travaille.
    Quant au plus grand obstacle pour le Programme mondial de gouvernance locale, je dirai brièvement que c'est l'ACDI, mais je dois faire une mise en garde. Une explication s'impose. C'est que l'ACDI n'a pas une organisation qui facilite la réalisation de ce genre d'idée. Nous proposons de réunir en un seul ensemble cohérent tous les travaux que nous accomplissons dans différents pays. C'est très difficile pour l'ACDI, parce qu'elle est très divisée entre différents bureaux régionaux et programmes-pays. Déjà maintenant, nous essayons de nous entendre avec l'ACDI pour intégrer une partie du travail en Afrique dans un cadre plus large, et les entretiens avec l'Agence sont très difficiles.
    La deuxième partie de la réponse, c'est que l'ACDI n'a pas, à la Direction générale des partenariats, l'argent nécessaire pour les administrations locales. L'ACDI est toujours très axée sur les zones rurales. Elle essaie de se réorienter, mais c'est très lent.
    À propos des 12 millions de dollars, le Programme mondial de gouvernance locale est un effort de rationalisation d'une partie de notre travail pour en faire un programme cohérent, comme je l'ai dit. Nous sommes arrivés au chiffre de 12 millions de dollars à partir d'une analyse des budgets existants, en évaluant l'activité nécessaire pour les déplacements, etc., mais sans tenir compte du temps des bénévoles. Nous y sommes arrivés à partir de notre expérience: comment établir un réseau mondial, travailler au niveau local avec les municipalités, travailler au niveau national avec les associations nationales dans des pays choisis sur chaque continent et rassembler ces joueurs au niveau mondial pour favoriser la mise en commun des acquis.
    Nous allons en Europe dans une semaine et demie pour rencontrer des organisations semblables à la FCM: des Néerlandais, des Britanniques, quelques Belges, les Norvégiens, les Scandinaves et quelques Français. Mais il n'y a en réalité que deux pays au monde qui font ce travail de façon importante: le Canada, avec la FCM, et les Pays-Bas, avec l'équivalent de la FCM, la VNG. Où que nous nous rencontrions, il est entendu et reconnu par tous nos pairs, la Banque mondiale et d'autres que le Canada et les Pays-Bas sont en-tête pour ce qui est de la participation des administrations municipales à la coopération internationale.
    Dernière question: les jeunes. Un certain travail se fait avec les jeunes, surtout dans le cadre des programmes de lutte contre le VIH/sida en Afrique. Nous travaillons avec des programmes locaux qui font participer les jeunes à des ligues de football ou à d'autres activités sportives qui se prêtent à la diffusion d'information sur le VIH/sida, dans un cas donné, mais il se fait aussi du travail sur d'autres modes d'intégration à la collectivité. Dans la mesure du possible, nous offrons un programme de stages dans lequel, avec des fonds de l'ACDI, nous pouvons recruter des jeunes du milieu de la vingtaine qui veulent faire une carrière liée à notre travail — urbanisme, architecture, par exemple — et leur proposer des stages de six mois à l'étranger, dans les pays où nous travaillons.
(1030)
    Merci, monsieur Carlton.
    Nous allons passer à Mmes Lalonde et Deschamps.

[Français]

    Bonjour et merci d'être parmi nous.
    C'est la première fois que j'entends des explications sur ce que vous faites. J'aimerais savoir comment vous répartissez entre les municipalités cet argent rendu disponible par l'ACDI en vue de participer à ce programme. J'imagine que les municipalités de langue française interviennent davantage dans les pays francophones et que les autres interviennent dans les pays de langue anglaise.
    Ma deuxième question est suscitée par la curiosité. Dans une section intitulée « Leçons retenues en développement démocratique », vous dites ceci:

Pour le développement de la capacité, mettre l'accent sur les institutions et les processus, et non sur les individus;
     Que voulez-vous dire exactement?
     Ma troisième question est d'un autre type. J'ai remarqué que vous parliez plus des avantages que le Canada pourrait retirer de votre programme que des éventuels inconvénients. Est-ce que ça pourrait être dans le but de bien vendre votre implication dans les pays sous-développés?

[Traduction]

    Merci, madame Lalonde.
    Monsieur Steeves.

[Français]

    Si je le peux, je vais répondre en anglais. Je m'excuse, mais mon français n'est pas parfait.
    On est habitués. Au moins, vous comprenez.
     Je vais répondre à la première question.

[Traduction]

Comment nous répartissons l'argent?
    Je vais demander à Brock de m'aider, mais avant tout, le programme est offert et l'information est diffusée par la FCM, qui attend que l'initiative vienne de la municipalité même, à cause de raisons particulières, de propositions, de synergies qui existent dans une collectivité donnée, comme dans l'exemple de Winnipeg que j'ai donné tout à l'heure. Il était logique que Winnipeg travaille à Kampala sur un projet relatif au sida, étant donné qu'elle avait un laboratoire d'analyses sanguines. Voilà notre expérience.
    Brock doit avoir une expérience plus vaste à ce sujet.
    Quant à l'accent qui est mis sur le processus et non sur les personnes, cela veut dire...
(1035)

[Français]

    Y a-t-il des exemples de municipalités du Québec qui ont participé à des programmes?
    Oui, il y en a beaucoup. Dans les villes de Montréal et de Québec, en particulier, il y a des programmes internationaux. C'est vraiment une grande partie de leur culture.

[Traduction]

    Pour en revenir au processus, à l'accent qui est mis sur le processus et non sur les personnes, lorsque nous allons sur les lieux, nous nous intéressons à élaborer des processus, des cadres de gouvernement, à rédiger des règlements. Les hommes et femmes politiques comme nous vont et viennent, mais les processus sont là, la capacité est là pour que le travail continue; les réseaux ont déjà été établis.

[Français]

    Dans le cadre de notre programme, nous travaillons dans des pays francophones d'Afrique comme le Mali et le Burkina Faso. Nous espérons travailler au Niger éventuellement. Gord a mentionné les villes de Montréal et de Québec. Il y a aussi la Municipalité de Sainte-Élisabeth. Les gens de la Ville de Saguenay travaillent très bien et font des choses vraiment très intéressantes au Vietnam.
    Nous avons des programmes assez importants qui mettent à contribution des villes du Québec et des pays francophones en voie de développement. De plus, certaines villes du Québec participent à des programmes en Amérique latine. En effet, certains Québécois parlent très bien l'espagnol.
    Oui, il y en a beaucoup. On aime l'espagnol.
    Vous avez posé une question sur la section intitulée « Leçons retenues en développement démocratique », dans laquelle on parle de mettre l'accent sur les institutions et les processus, et non sur les individus.
    Évidemment, on travaille auprès des individus, mais il est essentiel que ce soit dans le contexte d'une institution. Autrement, l'individu pourrait bénéficier de la formation mais vouloir par la suite trouver un emploi ailleurs.
    Il est important de mettre l'accent sur la capacité d'appliquer des techniques, mais il faut aussi renforcer les processus à l'intérieur des institutions. Par exemple, si on travaille au recouvrement des impôts locaux, il est important de former les individus, mais il faut aussi s'assurer que le processus de perception des impôts est efficace et approprié pour la ville. Voilà pourquoi nous disons qu'il est important de mettre l'accent sur les institutions plutôt que sur les individus.
    Les avantages pour le Canada sont-ils aussi nombreux qu'on le voudrait?
    Oui, les avantages pour le Canada...

[Traduction]

    Voulez-vous que je poursuive?
    Très rapidement.

[Français]

    Il y a des avantages pour le Canada, particulièrement dans les villes. C'est pour nous une façon d'établir des ponts entre le gouvernement local, par exemple à Winnipeg, et la communauté qui soutient notre campagne, nos idées et nos enjeux.
    Ça nous donne la chance d'établir des contacts avec d'autres groupes de notre société. Je veux également mentionner que plusieurs de nos administrateurs sont allés travailler à Kampala quelques mois et qu'ils sont revenus avec des idées et des façons de travailler qui ont amélioré notre administration à Winnipeg.
    Monsieur le président, je voudrais simplement dire...
    Le président: Non, non.
    Mme Francine Lalonde: Je disais que vous parliez plus des avantages que cela représentait pour le Canada que de ceux dont pouvaient profiter l'Afrique ou l'Amérique du Sud.
(1040)

[Traduction]

    Passons à M. Goldring.
    Merci beaucoup de votre présence.
    Il est largement reconnu qu'on a grand besoin d'améliorer la gouvernance dans bien des pays aux niveaux local et municipal. Le travail que vous faites au niveau local se comprend, mais il a aussi été remarqué qu'on avait grand besoin d'interaction avec les administrations régionales et nationales. Il arrive souvent — je crois que c'est même le cas pour certains d'entre nous — que des hommes et femmes politiques passent progressivement d'un échelon de gouvernement à l'autre. Il y a là pour eux une évolution naturelle.
    Quels efforts consacrez-vous à faire en sorte qu'il y ait une liaison entre les besoins locaux et ceux du gouvernement fédéral? Première question.
    Voici la deuxième, et il s'agit davantage d'obtenir de l'information. Quel pourcentage des 12 millions de dollars reçus de l'ACDI est consacré expressément aux projets relatifs au sida?
    Je vais partager mon temps de parole avec Bill.
    Monsieur Steeves.
    Je vais essayer de répondre à la première partie, sur la liaison avec les administrations régionales. C'est une excellente observation. La FCM agit à quelques niveaux différents. Comme nous l'avons dit, la Fédération participe à tous ces projets, mais à un niveau différent, et les municipalités participent également.
    Nous avons un rôle de chef de file dans les 18 pays où nous sommes actifs. Comme nous sommes une organisation nationale qui a évidemment des liens solides avec le gouvernement fédéral, nous possédons certaines compétences. Nous passons beaucoup de temps à travailler aux conférences nationales et internationales afin de renforcer ces capacités pour les organisations régionales. Et tous en ont. Dans les pays en développement où nous travaillons, il y a souvent un pendant de la FCM avec qui nous pouvons travailler pour renforcer les capacités et donner des exemples de du travail avec leurs autorités fédérales. En même temps, nous avons des villes, des petites localités, des collectivités qui travaillent sur le terrain avec des villes, des petites localités et des collectivités de ces autres pays pour renforcer les capacités au niveau local. Voilà ce qui se passe.
    Quant aux détails du financement, je vais demander à Brock de répondre.
    Votre question porte expressément sur le sida?
    Oui, je constate que tous les autres renseignements détaillés présentés ici semblent porter sur la gouvernance, mais qu'il n'y a pas de précisions sur le volet consacré au VIH/sida.
    Oui. Dans le volet du sida, d'abord, l'accent est mis sur les éléments de gouvernance du sida au niveau local. Il ne s'agit pas de s'occuper des questions médicales ou de santé personnelle, mais de voir comment une municipalité pense l'urbanisme et le travail avec une collectivité qui, soudainement, compte une foule d'orphelins, de parents seuls et de grands-parents qui reprennent le rôle de parents. Nous nous intéressons à cet aspect du problème.
    Dans nos programmes, le budget affecté au sida est minime. Nous n'avons pu convaincre l'ACDI que l'administration locale avait un rôle important à jouer dans la lutte contre le VIH/sida. Gord a parlé de Kampala, et Toronto travaille au Botswana au moyen de budgets que, avec une certaine latitude, nous pouvons consacrer aux thèmes que nous choisissons, mais ces budgets sont infimes.
    Voici un exemple. Fin-mars, j'irai assister à une réunion à Vancouver. Plus d'une centaine d'administrateurs municipaux ont accepté de donner bénévolement leur temps pour travailler sur des projets d'administration municipale et de gouvernance locale dans des régions d'Afrique touchées par le sida. Nous allons travailler avec eux, mais nous n'avons pas de ressources permettant de mobiliser cette capacité. Nous essayons de voir comment faire une place à cette initiative dans nos programmes existants.
    Il n'y a cependant aucun projet portant sur le sida, aucun programme spécialement conçu à ce sujet. Nous avons seulement réussi à amener certains partenaires locaux à mettre l'accent sur ce problème précis.
    Merci, monsieur Carlton.
    Monsieur Casey, vous avez quelque chose à dire ou une question à poser?
    Vous avez une minute et demie pour les poser, et cela comprend la réponse.
    Je vais essayer de faire vite.
    Il est dit dans nos notes que vous avez un projet bilatéral avec le programme palestinien de gestion municipale. En quoi consiste ce projet? Qui est le partenaire palestinien?
    Voici mon autre question. M. Carlton a dit que l'ACDI était un obstacle qui vous empêchait de faire un travail plus important. Vous savez qu'il y a une longue liste de gens qui veulent déterminer la façon dont l'ACDI dépense son argent. Pourriez-vous dire, juste pour le secrétaire parlementaire, quelles choses simples et pratiques l'ACDI pourrait faire pour faciliter votre travail?
    Des voix: Oh, oh!
(1045)
    Combien l'avez-vous payé?
    Le projet palestinien existe depuis 1997. Nous avons commencé à Raffa, et c'est là que nous avons travaillé. La ville est située à la frontière entre la bande de Gaza et l'Égypte. Le Canada est présent à Raffa depuis 1948, année où il a ouvert un camp de réfugiés qu'on appelle toujours le Camp du Canada.
    Nos partenaires ont été et demeurent l'administration locale de Raffa, l'administration locale voisine de Khan Yunis et l'Association des autorités locales palestiniennes. Avant les dernières élections, nous collaborions aussi avec le ministère des Affaires municipales et l'Autorité palestinienne.
    Si vous en discutez avec les gens de l'ACDI, ils vous diront que c'est probablement le seul projet durable qui a été une réussite au fil des ans à cause de ce que nous avons pu faire sur le terrain, mais, pour des raisons de sécurité, aucun Canadien n'est allé là-bas depuis plusieurs années. En réalité, le projet se termine fin-juin parce que nous ne pouvons trouver un moyen de poursuivre notre travail d'une façon satisfaisante, compte tenu des problèmes que pose la présence du Hamas dans la politique étrangère, etc.
    Nous avons toujours des entretiens avec l'ACDI, car nous essayons de trouver un moyen de perpétuer cette présence sans aller à l'encontre des lois du pays et de la politique du gouvernement. En ce moment, nous ne faisons rien d'autre que de réduire progressivement les opérations.
    Tout le Camp du Canada va fermer à la fin de juin?
    Non, c'est seulement notre projet qui se termine.
    C'est probablement un bon moment pour le terminer.
    Des voix: Oh, oh!
    Le président: Madame McDonough.
    Cela nous entraînerait vers une autre série de questions très intéressantes.
    J'ai une question très précise à poser pour conclure là-dessus. De quelle allégeance politique était l'administration municipale de Raffa?
    Voulez-vous que je réponde tout de suite?
    Toujours le Fatah. Aux dernières élections locales, le Hamas a remporté la victoire, mais les résultats ont été rejetés. Pour l'instant, un administrateur nommé par le gouvernement du Fatah dirige la ville de Raffa.
    Merci.
    Je pense toujours que le programme de développement international de la FCM est l'un des secrets les mieux gardés. Je suis donc très heureuse que vous soyez là.
    Vous avez parlé d'un budget de 12 millions de dollars. Je ne suis pas sûre qu'on ait vraiment répondu à ma question sur l'origine de ces 12 millions. Et j'ajoute une question au sujet des 2 500 bénévoles municipaux. Pouvez-vous préciser? Je crois qu'il y a eu un malentendu à ce sujet. Il s'agit d'employés municipaux qui sont des praticiens...
    Ou des représentants élus.
    En moyenne, quel pourcentage de leur temps, mesuré en années ou en mois de travail, peu importe, est consacré au travail à l'étranger? Ou ce chiffre correspond-il à 2 500 années de travail d'employés municipaux? C'est ma deuxième question.
    Il y en a une troisième qui est plutôt une réflexion. J'aurais voulu que vous comparaissiez avant notre séance consacrée à l'Afghanistan, car vous avez aidé à montrer qu'il est indispensable de travailler au niveau local et qu'il est difficile de partir du niveau national pour aller au niveau local. Vos exposés renforcent ce point de vue.
    Enfin, certains d'entre nous rentrent d'une semaine au Kenya, et j'ai pu passer une semaine en Ouganda. L'une des choses qui nous ont renversés, c'est l'ampleur du défi à relever pour implanter les infrastructures les plus rudimentaires pour l'hygiène, l'approvisionnement en énergie et même pour le simple transport des patients vers les cliniques, dans le contexte de la lutte contre le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme.
    Enfin, vous avez plusieurs fois parlé du VIH/sida, mais jamais de la tuberculose ni du paludisme. Une grande révélation pour nous a été de constater sur le terrain que 50 p. 100 des malades atteints du sida meurent en fait de tuberculose. Je me demande si vous vous occupez de la triple pandémie de VIH/sida, de tuberculose et de paludisme, car l'ensemble du défi n'en est que plus complexe.
(1050)
    Je vais essayer de répondre à la première partie, sur le bénévolat et les heures de travail. Pour la municipalité, généralement et si je simplifie, un premier groupe va sur place pour un période plutôt brève. Ensuite, sur une certaine période qui peut durer des années, des membres de l'administration municipale sont détachés. Ils vont sur place et travaillent avec les gens. C'est ainsi qu'on en arrive à la question des bénévoles et des heures de travail. Nous obtenons cette collaboration dans la collectivité, les universités, des organisations privées et auprès de donateurs, des particuliers qui veulent participer et aller à l'étranger.
    Ce qu'il y a de bien et de commode dans cette formule, c'est que dans les municipalités, vous le comprenez probablement, il est souvent politiquement difficile de faire accepter une action à l'étranger, mais je crois que les gens tolèrent mieux ce type d'aide si le financement vient des autorités fédérales et est appuyé par les municipalités par une participation en nature, c'est-à-dire lorsque les gens vont travailler sur place. C'est mieux perçu. Tout le monde y gagne.
    Quelqu'un a parlé d'esprit de parti. Encore une fois, ce qu'il y a de bien, dans l'administration municipale, c'est la capacité d'agir sans esprit de parti. Vous pouvez comprendre que l'esprit de parti veut dire une chose au Canada, et il faut s'y faire, sans doute, mais hélas, cela veut dire bien autre chose ailleurs, par exemple en Palestine.
    Brock peut peut-être continuer à répondre.
    Je peux dire encore un mot du bénévolat. Le plus souvent, les bénévoles qui vont à l'étranger y passent environ deux semaines, et ils accueillent parfois des gens chez nous. Cela ne représente pas un gros pourcentage de leur temps de travail, mais c'est un élément appréciable. Quand nous parlons d'environ 2 500 bénévoles, il s'agit des gens qui ont participé à ce genre de projet depuis que nous faisons ce travail. Quant aux 12 millions de dollars, je me suis aperçu, lorsque vous avez posé la question, que je n'avais pas répondu à la question précédente telle qu'elle avait été posée, je pense.
    Le budget actuel de 12 millions de dollars regroupe toute une série de projets. Nous avons deux projets de rétablissement après le tsunami, un projet qui porte sur les droits des travailleurs migrants en Chine, et nous avons des projets en Afrique. Tous sont de durées différentes et se réalisent à des moments différents. Cette année, le montant est de 12 millions de dollars. L'an prochain, trois projets importants pourraient se terminer, si bien que notre budget pourrait être ramené à 8 ou 9 millions. L'année d'après, il pourrait augmenter. Il est très instable et difficile à prévoir.
    Les 12 millions de dollars viennent uniquement de l'ACDI?
    Oui, de l'ACDI. Les 12 millions de dollars sont la contribution de l'ACDI. La valeur réelle du travail que nous faisons au moyen de ces 12 millions est d'environ 20 millions de dollars.
    Voilà ce que je me demandais.
    Merci.
    Nous tenons compte de la contribution.
    Avez-vous des participants du programme de stages des Affaires étrangères?
    L'ACDI a un programme de stages, et je crois que nous prévoyons accueillir peut-être six stagiaires au cours du prochain exercice. Nous voudrions en avoir beaucoup plus, parce qu'ils font de l'excellent travail.
    Nos partenaires africains, surtout, ont soulevé la question du VIH/sida, de la tuberculose et du paludisme. Au moment d'aborder la planification du prochain cycle de trois ans, la question prendra plus de place.
    Je rappelle que nous ne nous occupons pas de l'aspect médical. Nous travaillons sur les enjeux communautaires, l'urbanisme et la gouvernance.
    Merci.
    Nous tenons à vous remercier de votre présence, de vos observations, de votre mémoire et de vos recommandations. Et à vous remercier de nous avoir renseignés sur le travail de la FCM.
    Vous avez parlé de Drayton Valley, en Alberta. Des membres du comité viennent de cette province, dont moi. Drayton Valley n'est pas une grande ville. Elle est plutôt petite et dépend beaucoup de l'industrie pétrolière et gazière. Travaille-t-elle seulement par l'entremise de la FCM? Assume-t-elle elle-même un projet? Appuie-t-elle financièrement la FCM de façon plus générale pour réaliser le projet? Comment cela fonctionne-t-il?
    De façon générale, il s'agit d'un projet de la FCM appuyé par l'ACDI. Les fonds nécessaires pour les déplacements et les autres choses à financer viennent de la Fédération canadienne des municipalités. Drayton Valley est un excellent exemple. Je ne connais pas très bien la ville, mais, d'après votre description, c'est sans doute une petite ville qui, normalement, ne pourrait pas espérer participer à un projet semblable, mais ce sont de bonnes gens qui ont quelque chose à offrir à la Tanzanie. Cela devient possible grâce au programme et à ses modalités d'administration. Il y a dans la collectivité assez de synergie, assez d'énergie que le programme permet de mobiliser pour obtenir des résultats.
(1055)
    Pourriez-vous me dire au pied levé quels sont les coûts pour la municipalité? Quelles sont les ressources qu'elle investit dans ce travail?
    Si la municipalité s'en tient au modèle normal, les dépenses directes sont probablement minimes. Ses dépenses, c'est plutôt le temps de ceux qui vont sur place essayer de renforcer les capacités. Elle peut aussi obtenir de l'argent de la collectivité.
    Avez-vous d'autres détails précis?
    Pour donner un ordre de grandeur, le partenariat type, comme celui de Drayton Valley en Tanzanie, peut coûter de 30 000 $ à 40 000 $ par année, et l'argent vient de l'ACDI. Nous calculons que, généralement, la contribution est d'environ 50 p. 100 des fonds de l'ACDI.
    Donc, le travail phénoménal que Drayton Valley accomplit en Tanzanie — renforcement des capacités de l'administration locale, établissements pour les orphelins du sida, construction et organisation des assises collectives, dont Gord a parlé tout à l'heure —, tout cela se fait avec trois fois rien. Pour le gouvernement du Canada, 30 000 $ ou 40 000 $, ce n'est pas grand-chose.
    La municipalité n'utilise pas ses propres fonds. Elle ne paie ni les billets d'avion, ni les hôtels. Elle reçoit peut-être les Tanzaniens à dîner, par exemple, lorsqu'ils viennent au Canada, mais sa contribution se limite au temps de travail de ses employés.
    Très bien.
    Merci. Nous félicitons Drayton Valley et les autres collectivités qui participent à ce travail avec la FCM. Et bien sûr, nous félicitons la FCM de son bon travail à l'étranger.
    Nous allons suspendre la séance un instant et discuter ensuite des travaux du comité.

    Pour ce qui est des travaux du comité, essayons de faire vite. Je ne crois pas qu'il soit utile de siéger à huis clos.
    Vous avez sous les yeux le rapport du Sous-comité du programme et de la procédure du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Si vous avez pu jeter un coup d'oeil au rapport, je suis prêt à accepter une motion d'adoption.
    Monsieur Patry.
    D'accord.
    M. Patry présente la motion.
    Dans ce rapport, nous prévoyons un budget pour les autres groupes. Il est prévu que le ministre des Affaires étrangères comparaîtra devant le comité le 20, et il y a toute une série de décisions que nous présentons, notamment une invitation à M. Rubin pour qu'il comparaisse devant le comité. Il y a consensus?
    Des voix: D'accord.
(1100)
    Vous pouvez également voir dans le rapport le budget que nous voulons faire adopter. Il vaut pour le sous-comité également et il s'élève à 22 900 $. Y a-t-il consensus?
    Des voix: D'accord.
    Merci.
    La séance est levée.