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CC2 Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité législatif chargé du projet de loi C-2


NUMÉRO 008 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 16 mai 2006

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, bonjour.
    Nous en sommes à la huitième séance du Comité législatif chargé du projet de loi C-2. À l'ordre du jour, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 27 avril 2006, le projet de loi C-2, Loi prévoyant des règles sur les conflits d'intérêts et des restrictions en matière de financement électoral, ainsi que des mesures en matière de transparence administrative, de supervision et de responsabilisation.
    Nous accueillons aujourd'hui, du Bureau du commissaire à l'éthique, M.  Bernard Shapiro, commissaire à l'éthique, M. Robert F. Benson, sous-commissaire, et Mme Lyne Robinson-Dalpé, directrice des affaires coopératives. 
    Bonjour, monsieur Shapiro. Vous pouvez nous présenter vos remarques liminaires. Je suis certain que les membres du comité auront ensuite des questions à vous poser.

[Français]

    Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie de m'avoir invité à témoigner devant votre comité aujourd'hui.
    Permettez-moi tout d'abord de présenter les collègues qui m'accompagnent, soit M. Robert Benson, sous-commissaire à l'éthique, et Mme Lyne Robinson-Dalpé, directrice des Services coopératifs.
    J'ai quelques remarques préalables à formuler au sujet des divers points concernant le projet de loi C-2, puis je répondrai ensuite à vos questions.
    Je dois avant tout souligner que mes propos porteront sur la loi sur les conflits d'intérêts proposée, qui instaure un nouveau régime régissant les conflits d'intérêts pour les titulaires de charge publique au sein du gouvernement fédéral.

[Traduction]

    En général, je suis heureux de constater que le nouveau régime renferme de nombreuses caractéristiques fort satisfaisantes et que le rôle et le mandat du commissaire seront élargis, notamment dans quatre domaines: d'abord, l'administration et l'application du Code régissant les conflits d'intérêts des sénateurs; deuxièmement, le pouvoir d'enquête est plus étendu car il s'applique maintenant à tous les titulaires de charge publique actuels et passés, et non seulement aux ministres, ministres d'État et secrétaires parlementaires; troisièmement, le commissaire peut déclencher lui-même des enquêtes et enfin, quatrièmement, des pouvoirs sont conférés au commissaire pour émettre des avis de violation et imposer des sanctions administratives.
    Je suis très heureux de voir que certaines propositions contenues dans le projet de loi répondent directement à des préoccupations et recommandations que j'avais faites, notamment dans mon document de l'automne dernier intitulé Enjeux et défis 2005 et dans le cadre de mes témoignages devant les comités parlementaires au cours de la dernière législature. J'avais par exemple recommandé: que tous les cas de récusation ministérielle à l'égard des séances du Cabinet soient consignés dans un registre public en temps opportun; qu'on adopte un mécanisme grâce auquel les parlementaires pourraient renvoyer au commissaire des demandes d'enquête venant du public.
    J'ai toutefois quelques observations générales sur l'approche globale de la Loi sur les conflits d'intérêts telle que proposée et sur ses incidences. La plus importante est que cette nouvelle mesure législative représente un virage fondamental du régime fédéral de gestion des conflits d'intérêts pour les titulaires de charge publique, car il ne serait plus axé sur des valeurs fondées sur des principes, mais plutôt axé sur des règles inscrites en droit, ce qui, de certaines façons, renforce le régime.
    En contrepartie, cependant, cette transformation radicale du fondement même du régime régissant les conflits d'intérêts présente un certain nombre de conséquences problématiques, et je n'en citerai que trois.
    D'abord, contrairement à l'actuel Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat, la Loi sur les conflits d'intérêts ne comporte ni préambule ni principes à partir desquels on pourrait mesurer la valeur éthique d'une conduite; par exemple, le texte ne mentionne pas la nécessité de préserver et d'améliorer l'objectivité et l'impartialité du gouvernement, de prendre des décisions dans l'intérêt public et d'éviter d'accorder un traitement préférentiel à qui que ce soit.
    Deuxièmement, le texte de la loi proposée donne, pour la première fois, une définition du concept de conflit d'intérêts, ce qui, en soi, est positif. Cependant, il ne contient pas de description explicite de ce qu'est un conflit d'intérêts apparent ou potentiel. Si l'intention de la loi est que le commissaire ne se limite qu'aux situations de conflits d'intérêts réels et que les situations de conflits d'intérêts apparents ou potentiels relèvent du domaine politique, la terminologie actuelle de la loi est probablement appropriée. Autrement, cela pourrait soulever des ambiguïtés au sujet du rôle précis du commissaire.
    Troisièmement, le nouveau modèle est plutôt axé sur le respect de dispositions précises concernant les conflits d'intérêts et non sur la prévention de situations de conflits d'intérêts potentiels. De plus, la nature législative du nouveau modèle nécessitera des ressources juridiques additionnelles pour interpréter les règles et les faire respecter.
    Cependant, je crois qu'en général, la nouvelle loi comporte de nombreux aspects favorables, mais que nous perdons beaucoup de bons éléments en passant d'un système fondé sur des valeurs à un système fondé sur des règles. Suite à ces observations, j'aimerais donc faire trois propositions pour votre gouverne.
    Premièrement, je crois qu'il serait bon que la loi soit précédée d'un préambule énonçant les principes de déontologie auxquels le commissaire pourrait se reporter pour interpréter le texte de la loi. Évidemment, ces principes n'ont pas besoin d'être les mêmes que les principes actuels. Ils peuvent être complètement différents, tant que l'on fait référence à des normes qui peuvent être interprétées. Ensuite, si un titulaire de charge publique s'engage dans une activité qui peut être perçue comme contraire à l'éthique, mais qui n'est pas précisément traitée dans la loi, le commissaire pourrait le conseiller sur la façon de résoudre la situation.
    Permettez-moi de vous donner un exemple. Supposons qu'un ministre doit décider s'il peut lui-même approuver l'octroi d'une importante subvention, à même les fonds publics, à une entreprise de sa propre circonscription. Même si les intérêts personnels du ministre ne sont pas, par le fait même, favorisés, selon la définition de conflit d'intérêts du projet de loi, dans une telle situation, le public pourrait croire que le ministre ne devrait pas approuver lui-même le financement, à moins que cela ne s'inscrive dans une série de subventions aux entreprises choisies objectivement et accordées à l'échelle du Canada. Cependant, le projet de loi ne renferme aucune disposition précise obligeant un ministre à se récuser dans une telle situation, puisque ce n'est pas considéré comme un conflit d'intérêts. Aux termes du Code actuel, on pourra demander qu'un ministre se récuse en invoquant les principes de l'impartialité, de la nécessité de prendre des décisions dans l'intérêt du public et de l'obligation d'éviter les traitements préférentiels.
(1535)
    Deuxièmement, afin que le commissaire puisse bien exercer ses fonctions et ses responsabilités, il serait utile qu'il possède une discrétion additionnelle lui permettant d'interpréter la loi sur la base de principes qui pourraient être inclus; comme c'est le cas actuellement, un pouvoir d'extension des délais de conformité pourrait être utile, par exemple, pour traiter adéquatement le grand nombre de nouveaux clients qui suit une élection, lorsque nous recevons une quantité phénoménale de documents puisqu'il y a beaucoup de nouvelles nominations.
    Troisièmement, je propose d'ajouter un article exigeant que la loi soit revue dans cinq ans. Je sais que cela commence à devenir une fâcheuse habitude pour les députés d'avoir à revoir constamment les lois qui ont déjà été adoptées. Cependant, je pense que nous aurions ainsi l'occasion de mesurer les résultats obtenus dans le cadre du nouveau régime et d'apporter les changements nécessaires.
    Je crois que ces modifications iraient dans le sens de la loi elle-même, qui vise à souligner l'importance de la reddition de comptes en général, et du respect des règles d'éthique en particulier. Cela fournirait au Parlement, aux titulaires de charge publique et aux Canadiens un cadre concret et solide pour atteindre ces objectifs.
    En plus de ces trois suggestions, je tiens à souligner certaines dispositions du projet de loi qui présenteront des défis d'interprétation et de conformité. Le paragraphe 15(4) concernant les activités politiques semble n'imposer aucune limite au genre ni à l'ampleur des activités politiques permises à un titulaire de charge publique. Cela pourrait créer des problèmes de perception quant à l'impartialité politique d'un titulaire de charge publique dans l'exercice de ses responsabilités officielles. Toutefois, si l'intention est de laisser à l'arène politique le soin de traiter de situations de conflits d'intérêts réels ou apparents, et qu'on demande au commissaire de traiter uniquement les conflits d'intérêts réels, l'objectif serait alors atteint. Autrement, cette section pourrait être problématique.
    Le libellé actuel de l'article 64 concernant les activités exercées pour le compte d'électeurs par les ministres, ministres d'État et secrétaires parlementaires pourrait être une source de confusion. Dans quelles circonstances un ministre devrait-il porter son chapeau de simple député et servir ses électeurs? Cette ambiguïté serait particulièrement évidente lorsque des commettants demandent à un ministre d'intervenir, en leur nom, auprès d'un organisme quasi judiciaire ou d'une société d'État.

[Français]

    Finalement, je dois vous dire qu'il y aura de nombreux défis à relever pour assurer l'application de la nouvelle loi et l'exécution du mandat élargi du commissaire. Il faudra des ressources additionnelles dans l'immédiat et à long terme pour les enquêtes et les avis juridiques, ainsi que pour la mise en oeuvre des changements et l'adaptation au système.
    En plus des questions déjà soulevées, j'ai d'autres commentaires qui portent sur d'autres aspects du projet de loi. Étant donné le temps limité qui m'est alloué cet après-midi, je ne peux les soulever tous. Cependant, il me fera plaisir de les fournir au comité s'il le désire.
    Mes collègues et moi-même répondrons maintenant volontiers à vos questions.
(1540)

[Traduction]

    Merci, monsieur Shapiro.
    M. Owen a des questions à vous poser.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Shapiro, je vous remercie de votre exposé et du travail que vous faites pour les Canadiens depuis que vous avez inauguré le Bureau du commissaire à l'éthique. Cela a été une tâche extrêmement difficile et les Canadiens devraient vous être des plus reconnaissants pour les efforts que vous avez déployés.
    J'ai quelques questions à vous poser.
    À la suite des dernières élections, vous avez eu l'occasion d'examiner le changement d'allégeance politique d'un député qui est ensuite devenu ministre, et je ne me souviens pas exactement des mots que vous avez utilisés, mais ils semblaient traduire la même préoccupation que vous avez exprimée en ce qui a trait à la nécessité d'avoir un préambule à la loi, mais presque à l'inverse, à savoir que le code vous donnait les principes qui pourraient avoir été à la source de certaines préoccupations, mais...
    Monsieur Owen, comme je l'ai dit à M. Martin ce matin, et c'est quelque chose qui me tient à coeur, je ne pense pas que nous devrions parler de cas personnels. Je sais que vous n'avez pas mentionné le nom de qui que ce soit, mais nous savons tous de qui vous voulez parler, et j'aimerais que vous tentiez d'éviter de le faire si vous le pouvez.
    Bien. Merci, monsieur le président. Je vais essayer de généraliser davantage.
    J'ai cru comprendre d'après ce que vous avez dit précédemment que même si quelque chose semblait avoir peut-être été à l'encontre de l'esprit des règles de conduite, cela n'allait en fait pas à l'encontre de la loi et que c'était là le genre de situation à laquelle vous invitiez le Parlement à remédier.
    C'est presque l'inverse ici, c'est-à-dire que nous avons des recours et vous avez parlé de modifier la loi, mais en ajoutant un préambule vous auriez alors une plus grande marge de manoeuvre pour conseiller les gens dont vous avez la responsabilité de surveiller la conduite, car cela ajouterait une valeur d'interprétation.
    Je pense que le mot clé est « conseiller ». Je pense qu'en ayant un tel préambule, en ayant des normes pour nous aider à interpréter la loi — et la loi sera interprétée à maintes reprises si elle est adoptée — cela aiderait énormément à faire la différence entre des situations qui semblent être les mêmes mais dont le contexte les rend en fait différentes. Il est impossible d'imaginer toutes les règles dont on aurait besoin pour administrer un code qui porte soit sur les conflits d'intérêts, soit sur les questions d'éthique dont les systèmes de valeurs sont manifestement différents. Je pense que cela serait utile.
    Comme je l'ai dit, je n'ai pas de préférence particulière pour ceux que nous avons. Ils se sont avérés utiles à certains égards, mais d'autres pourraient facilement être élaborés. Je ne veux pas faire valoir cet argument. Je dis tout simplement que quelque chose serait utile.
    Merci.
    Je n'ai qu'une autre question, ensuite je laisserai la parole à mes collègues.
    En ce qui concerne la responsabilité additionnelle que la loi donnerait au commissaire à l'éthique en ce qui a trait au Sénat également, on a longuement discuté au Sénat et à l'extérieur du Sénat également de la valeur, pour le Sénat, d'avoir son propre conseiller en éthique ou son propre agent d'éthique, car on craint, crainte qui est réelle ou perçue, qu'un agent nommé par l'exécutif n'aurait pas en un sens l'autorité sur cette chambre du Parlement qui est indépendante. Je me demande si cela vous préoccupe ou si vous avez des observations à faire au sujet des complications que cela pourrait représenter pour un seul commissaire à l'éthique.
    Je ne veux certainement pas présumer de ce dont le Sénat va se préoccuper lorsqu'il examinera ce projet de loi. C'était un problème la dernière fois; je n'étais pas présent à l'époque et je ne peux faire d'observations détaillées. Je pense qu'une chose que vous avez dite qui ne serait pas utile si elle était répétée trop facilement, c'est qu'on n'envisage pas que la nomination soit faite par l'exécutif. Dans un cas, le commissaire est nommé par la Chambre des communes et dans l'autre cas, ce pourrait être par le Sénat. Il pourrait y avoir toutes sortes de façons de gérer le système conjointement. Je pense qu'il pourrait être très avantageux d'avoir un seul bureau plutôt que des bureaux multiples, mais c'est aux sénateurs et à la Chambre en fin de compte d'en décider.
(1545)
    Merci.
    M. Murphy a une petite question.
    Rapidement... Quelle différence est-ce que cela peut faire qu'une personne soit adjointe exécutive d'un porte-parole de l'opposition ou du chef de l'opposition et qu'après un changement de gouvernement, elle puisse faire du lobbying auprès des mêmes personnes pour lesquelles elle a travaillé pendant huit ou dix ans — je parle d'une situation hypothétique, naturellement, monsieur le président, étant donné ce que vous avez dit — ou qu'une personne ait été au gouvernement et quitte le gouvernement? Quelle différence est-ce que cela fait?
    C'est certainement l'influence, et non pas la personne pour laquelle elle a travaillé ou le chèque de paie qu'elle a reçu. À votre avis, n'y a-t-il pas autant de possibilités de conflits d'intérêts dans cette situation qu'il y en aurait dans le cas d'une personne qui a été très près de quelqu'un qui est maintenant au pouvoir?
    Encore une fois, tout dépendrait du contexte. Il est toujours facile de penser à des exemples bien précis et de tenter ensuite de généraliser. Je pense que les gens qui sont au pouvoir ont manifestement accès au pouvoir d'une certaine façon et, par conséquent, il faut faire bien attention à leurs associations antérieures et voir comment ils se comportent à cet égard dans le contexte de leur environnement actuel. Je pense que c'est tout aussi important lorsque c'est le cas inverse — c'est-à-dire, quelqu'un qui a antérieurement eu accès au pouvoir et qui se retrouve maintenant dans un autre contexte, car cela peut donner les mêmes résultats et il faut traiter le cas de la même façon.
    Monsieur Sauvageau.

[Français]

    Dans un premier temps, merci d'être présent, monsieur Shapiro.
    Je voudrais nous excuser de l'impolitesse dont nous sommes coupables à votre égard ainsi qu'à l'égard de tous les témoins qui vous ont précédé et qui vous succéderont. Malheureusement, on nous a imposé et on vous a imposé une restriction de temps absolument inqualifiable. C'est probablement pour cette raison que vous avez terminé votre intervention en disant:
En plus des questions déjà soulevées, j'ai d'autres commentaires qui portent sur d'autres aspects du projet de loi. Étant donné le temps limité qui m'est alloué cet après-midi, je ne peux les soulever tous.
     Je souligne votre diplomatie. D'autres personnes ont refusé de venir témoigner. Je trouve cela absolument inexcusable.
    Cela étant dit, comme vous avez affirmé qu'il vous fera plaisir de les fournir au comité s'il les désire, je vous dis que c'est mon cas. Quant au comité, je ne sais pas s'il désire les obtenir. Vous pouvez me les faire parvenir, de même que les autres détails, par l'entremise de la greffière.
    J'apprécie les amendements que vous nous avez proposés. Je n'ai pas de questions à vous poser. Je ferai tout simplement un commentaire, auquel vous pourrez ajouter le vôtre, si vous le désirez.
    Nous avons devant nous un projet de loi comportant 317 articles et 250 pages. Or, pour la première fois en 13 ans, je me vois imposer un délai d'étude, comme vous avez un délai de présentation, d'environ deux semaines et demie, ce que je considère absolument inconcevable de la part des conservateurs. Il y a maintenant d'autres délais, et le NPD a embarqué dans la machine.

[Traduction]

    Je voudrais invoquer le Règlement, monsieur le président. Le député dit que nous lui avons en quelque sorte imposé une limite de temps. En fait, cette position a été adoptée par tout le comité. Nous avons une représentation minoritaire à ce comité, et les autres partis étaient d'accord. Je pense que le compte rendu devrait être corrigé car nous n'avons pas imposé de limite de temps en tant que parti.
    Merci.
    Essayez de faire de votre mieux, monsieur Sauvageau.

[Français]

    Continuez à parler avec votre personnel et laissez-moi travailler, s'il vous plaît. Je vous remercie beaucoup.
    Cela étant dit, il est absolument inconcevable que l'on dispose de si peu de temps pour faire l'étude de ce projet de loi. Tous les témoins qui vous ont précédé ont proposé des amendements, et ceux qui vous succéderont feront de même. Je vous remercie d'avoir proposé l'amendement le plus important, je crois, soit l'obligation de réviser tous les cinq ans cette loi qui sera inévitablement imparfaite parce que lorsqu'on nous force à en faire l'étude à toute vitesse. On aura ensuite ce que ça vaut. Donc, l'amendement le plus important consiste probablement à ajouter l'obligation d'en faire une révision tous cinq ans, comme c'était le cas pour le projet de loi C-11 de la session précédente. Les conservateurs n'ont pas mis cette obligation de révision parce qu'ils pensent que leur projet de loi C-2 est comme les dix commandements de Dieu.
    J'aimerais, si possible, entendre vos commentaires sur la révision tous les cinq ans, sur le délai, sur le préambule manquant et, si vous en avez le temps, sur les autres amendements que vous pensez qu'il serait important d'apporter au projet de loi C-2.
(1550)

[Traduction]

    Lorsque j'ai préparé les trois amendements proposés, j'ai tenté de garder à l'esprit ce qui semble être tout au moins le calendrier législatif ou le calendrier prévu pour l'examen de ce projet de loi. Je n'ai absolument pas tenté d'imaginer en détail article par article ce à quoi pourrait ressembler un projet de loi révisé en tentant de comprendre quelles étaient les intentions du gouvernement. Je n'ai aucunement tenté de faire cela. J'ai tout simplement mis l'accent sur ce que je pensais pouvoir être le plus utile dans le contexte que nous avions.
    Il me semble qu'en ajoutant certains critères — comme je l'ai dit, les principes que nous avions ne sont peut-être pas ceux qui sont requis; il y en a peut-être d'autres qui pourraient être plus utiles — afin de donner aux Canadiens et à ceux qui sont assujettis à la loi — puisque c'est maintenant une loi, non pas seulement des lignes directrices — une idée de ce en quoi consiste l'objectif. Nous serions certainement heureux de travailler avec quiconque voudrait élaborer de tels critères. J'offre la possibilité, mais cela dépend de ce que le comité souhaite faire. J'ai pensé que cela serait utile.
    À une moindre échelle, la question du pouvoir discrétionnaire me semble très utile. Ce pouvoir discrétionnaire doit être limité; il ne peut être trop vaste. Par exemple, dans la situation actuelle, le gouvernement change et il y a une quantité énorme de documents qui arrivent au bureau, et il est sans doute impossible d'examiner tout cela dans les délais prévus. Il me semblerait donc être une bonne idée d'avoir un certain pouvoir discrétionnaire dans certaines circonstances spéciales.
    Je pense qu'une révision de la loi serait une conséquence naturelle du fait que vous avez soulevé précédemment. Il n'y a pas eu beaucoup de temps à certains égards pour examiner ce projet de loi avec autant de soin qu'on aurait pu le faire autrement, mais un projet de loi imparfait vaut mieux que rien du tout. À mon avis, il serait utile de tenter d'examiner le projet de loi après un certain nombre d'années — cela pourrait être après trois, quatre ou cinq ans.
    Une autre chose utile que le comité voudrait peut-être examiner pendant qu'il étudie cette loi en détail est le calendrier de mise en oeuvre. Il y a certaines choses qui pourraient, naturellement, être mises en oeuvre immédiatement, mais il faudrait bien réfléchir à certains articles qui pourraient exiger davantage de travail — non pas pour l'article comme tel, mais pour la mise en oeuvre. Un exemple est tout ce qui exige un règlement comme les amendes. C'est un processus complexe, de sorte qu'il n'est pas possible d'élaborer de tels règlements instantanément. On devrait donc bien réfléchir à un calendrier de mise en oeuvre, et je dirais que même si on y a déjà réfléchi, on devrait y réfléchir encore davantage car cela pourrait être utile.

[Français]

    Vous avez absolument raison de faire les commentaires que vous faites, mais malheureusement, le délai qu'on nous impose ne nous permettra pas d'améliorer le projet de loi. Nous devrons donc devoir faire subir aux fonctionnaires, aux titulaires de charge publique et aux autres personnes touchées par cette loi, une loi imparfaite, compte tenu du fait que l'on veut absolument l'adopter à toute vitesse.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Martin.
    Merci, monsieur le président.
    Il y a un aspect qui m'intéresse, monsieur Shapiro. Le gouvernement envisage de créer un nouveau poste de commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique — un commissaire qui aurait une double fonction. Il a fait valoir que ce nouveau commissaire devrait avoir des antécédents juridiques ou quelque chose à cet effet. Je ne comprends pas exactement ce qu'il cherche ni pourquoi. À votre avis, cela serait-il nécessaire, étant donné ce que vous savez au sujet du nouveau...?
    Il est difficile pour moi de répondre à cette question puisqu'il s'agit en un sens d'une question personnelle. Je trouve très difficile de faire toute observation à ce sujet. En un sens, je pense que ce n'est pas voulu, mais c'est peut-être un peu injuste. Je préférerais ne faire aucune observation, si cela vous convient.
    Je suis désolé. Je comprends. Je vais tenter de comprendre ce que...
    Je comprends. Je sais ce que vous voulez dire.
(1555)
    Encore une fois, vous pouvez peut-être m'aider. Nous prévoyons présenter un amendement à cet article du projet de loi en ce qui concerne le changement d'allégeance politique. Nous considérons qu'il s'agit là d'un irritant qui préoccupe bon nombre de Canadiens. Les décisions que vous avez rendues à la suite des plaintes qui ont été présentées, car vous dites dans ces décisions que si le changement d'allégeance politique est directement lié à un gain personnel ou à un vote à la Chambre des communes, alors non seulement il peut être considéré comme portant atteinte à l'éthique, mais l'on pourrait considérer que la personne puisse avoir été motivée par un gain monétaire ou...
    J'ai deux questions. Pourriez-vous nous en parler davantage? Par ailleurs, à votre avis, est-ce que l'intérêt personnel pourrait être autre chose que le gain monétaire, notamment le statut ou l'avancement professionnel? À votre avis, y a-t-il d'autres façons d'interpréter plus généreusement l'expression  « intérêt personnel »?
    En ce qui concerne la dernière question, il s'agit — tout au moins, c'est ce qu'il me semble — de déterminer si dans ce cas on offre à cette personne quelque chose de spécial qui n'est pas offert à une autre personne qui fait partie du conseil des ministres. Lorsqu'une personne a l'occasion d'être ministre, quelque chose de spécial se produit dans la vie et la carrière de cette personne, mais nous ne considérons pas qu'il s'agit là d'un conflit d'intérêts tout simplement parce que cela fait partie de ce qui est offert à tous et cela ne constitue donc pas une incitation spéciale. Ce n'est que lorsque l'incitatif est inhabituel d'une façon particulièrement flagrante que l'on peut dire qu'on a porté atteinte au code.
    Pour ce qui est de la première partie de cette question, je pense qu'il est important de comprendre que lorsqu'on examine une question d'éthique dont l'un des éléments est le conflit d'intérêts — l'éthique est une question beaucoup plus vaste que le conflit d'intérêts — les valeurs s'entrechoquent presque toujours. Sinon, nous ne parlerions pas de cela année après année. Par conséquent, le contexte devient très important. Cela dépend beaucoup des circonstances particulières d'un cas particulier; il est très difficile de généraliser.
    Je peux comprendre cela.
    Si nous pouvions revenir à une autre question que j'ai posée, c'est-à-dire si le changement d'allégeance politique était lié à un vote spécifique, à votre avis est-ce que cela constituerait un manquement au code? En d'autres termes, recruter une personne dans son camp pour aider à gagner un vote spécifique en lui offrant une récompense...? Je comprends que tous les cas que vous examinez ne sont pas noir sur blanc, mais je considère néanmoins cela comme étant...
    Je ne vais pas parler d'un cas spécifique, ce qui me ramène... parce que c'est le cas qui vient à l'esprit, de sorte que je ne fais pas de commentaire à ce sujet. Je pense que cela rend le cas beaucoup plus problématique que la question du statut, du salaire qui est accordé à un ministre du Cabinet, ou ce genre de chose.
    À votre avis, le fait que ce nouveau commissaire doive faire observer deux ou peut-être même trois codes de conflits d'intérêts différents pourrait-il causer des problèmes ou de la confusion? Il y a le Sénat et la Chambre des communes tout au moins, et je suppose, la loi.
    À l'heure actuelle, à titre de commissaire, j'en administre deux, un pour les titulaires de charge publique et un pour les députés. Je ne vois pas ce qui pourrait être difficile s'il y en avait trois à administrer. Cela veut dire qu'il faut être prudent lorsqu'on nous demande conseil, car il faut faire une distinction par exemple selon qu'il s'agit d'un titulaire de charge publique, d'un député ou d'un sénateur. Ce n'est cependant pas très difficile à faire. C'est l'une des raisons pour lesquelles il a été décidé récemment de tenter de confier chaque dossier que nous recevons au même conseiller, en un sens, à vie, de sorte qu'il puisse établir une relation particulière avec la personne en question, qu'il s'agisse du titulaire de charge publique, d'un député ou d'un sénateur.
    Bien. Merci.
    Je vous en prie.
    Merci.
    Monsieur Lukiwski.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Shapiro, c'est un plaisir de vous revoir. J'ai quelques questions, mais tout d'abord je voudrais parler de votre suggestion lorsque vous dites que les ministres devraient peut-être se récuser des projets lorsque des fonds vont dans leurs circonscriptions, même si le projet ne profite pas au ministre personnellement ou s'il n'est pas dans son intérêt personnel, car vous laissez entendre que cela pourrait poser des problèmes de perception dans la population. Et la perception en politique est la réalité.
    Je suis d'accord avec votre objectif et avec l'esprit de votre objectif, car on ne voudrait pas que la population ait l'impression que le ministre tente de faire son beurre, mais j'ai du mal à comprendre comment vous pourriez administrer cela. Je vais vous donner quelques exemples, car je n'arrive vraiment pas à comprendre comment on pourrait s'y prendre pour faire cela.
    De façon générale, chaque fois qu'un projet est mis en place dans la circonscription d'un ministre, peu importe si le ministre a eu quoi que ce soit à voir avec ce dossier ou avec l'approbation du financement, lorsque l'annonce est faite, le ministre est présent pour les photos et pour faire l'annonce et peut-être même pour remettre le chèque. Donc, même si ce ministre n'a eu absolument rien à voir avec le financement du projet, on pourrait certainement avoir l'impression qu'il a eu de l'influence, et qu'à huis clos au Cabinet il a fait tout son possible pour s'assurer que le projet aille dans sa circonscription.
    Donc, comment proposez-vous qu'un ministre se récuse, ou est-ce que vous dites qu'un ministre devrait se récuser?
    Je vais vous donner un autre exemple, car cela s'est produit en Saskatchewan. Monsieur le président, je ne vais pas donner d'exemples personnels ici, mais dans la province de la Saskatchewan, avant les dernières élections, nous n'avions qu'un député ministériel qui représentait la province et c'était un ministre du Cabinet. Donc, de façon réaliste, chaque fois qu'un projet allait à la Saskatchewan, ce ministre était là pour remettre le chèque. On pourrait faire valoir que toute la province était la circonscription du ministre.
    Donc, dites-vous que chaque fois que des fonds sont accordés ou qu'un projet va dans la circonscription d'un ministre, dans sa province, ce dernier devrait se récuser et ne devrait même pas participer à la cérémonie de remise du chèque? Je n'arrive tout simplement pas à comprendre comment...
(1600)
    Cela n'est certainement pas ce qui se fait à l'heure actuelle. Quoi qu'il en soit, je pense que ce n'est jamais un grave problème lorsqu'il s'agit d'un projet qui découle d'un programme gouvernemental en particulier et qui fait partie d'un grand ensemble de projets. Disons que c'est pour appuyer une petite entreprise et que toute une série de subventions sont accordées selon divers critères, peu importe si l'une de ces subventions est accordée à une entreprise de la circonscription du ministre, il n'est pas nécessaire qu'il se récuse à cet égard. Cependant, s'il s'agit d'un projet spécifique à cette circonscription, quelque chose qui n'est pas offert par exemple ailleurs, il peut y avoir apparence de conflits d'intérêts.
    Je ne pense pas que les Canadiens s'opposent au fait que le ministre soit présent pour remettre le chèque; on comprend que cela fait partie de la vie politique au pays, et je pense que cela est raisonnable. Cela n'est pas déraisonnable. Je pense cependant que le ministre doit être très prudent lorsqu'il s'agit de projets qui ne concernent que sa circonscription plutôt qu'une série de projets dont l'un pourrait aller à sa circonscription.
    Très bien, je vais vous donner un autre exemple dans ma province. Le ministre en question était le ministre des Finances, le seul ministre de la Saskatchewan du gouvernement libéral. Il y a eu un projet qui a été très bien reçu à Regina, projet qui s'appelait le « Big Dig ». Ce projet visait à rendre plus profond le lac Wascana, et c'était un programme d'infrastructure entre le Canada et la province, de sorte qu'il y avait un programme en place.
    Diriez-vous que dans ce cas particulier...
    On invoque le Règlement.

[Français]

    Monsieur le président, je me demande pourquoi dans certains cas on n'a pas le droit de parler de cas précis, alors que dans le cas des conservateurs, on a le droit de parler de cas précis. La Saskatchewan n'est-elle pas une province précise?
    Il semble parfois que nous avons deux présidents. En effet, M. Poilievre joue parfois le rôle du président. Toutefois, mais ma question s'adresse au véritable président du comité.
    Monsieur le président, pouvez-vous m'éclairer, s'il vous plaît?

[Traduction]

    Nous avons pris bonne note de ce que vous avez dit. Nous allons appliquer la règle de façon uniforme; nous ne devrions pas donner d'exemples précis. Vous avez tout à fait raison.
    Monsieur Lukiwski, vous avez la parole.
    Je pourrais peut-être faire une observation générale qui ne porte pas sur un exemple spécifique. De façon générale, lorsque nous tentons d'administrer ces lignes directrices, nous mettons l'accent sur le processus décisionnel; l'important, c'est la personne qui prend la décision, non pas la personne qui remet le chèque ou qui est là pour donner une poignée de main. Donc, si on garde ces deux principes à l'esprit--qui a participé au processus décisionnel et s'il s'agit d'un programme qui s'inscrit dans une grande catégorie d'autres bénéficiaires, ou s'il s'agit d'un projet spécifique--il y a habituellement suffisamment de lignes directrices pour aller de l'avant.
    Ne serait-il pas juste de dire cependant que la décision a été prise par le Conseil des ministres et qu'un ministre en question a participé à cette décision même si ce n'était pas son dossier en particulier?
    Je dirais que dans certains de ces dossiers, dans le cas de certaines décisions prises au Conseil des ministres, le ministre devrait se récuser.
    On aurait donc une situation où les ministres se récuseraient pour toute décision concernant leur propre circonscription, peu importent les circonstances.
    Seulement en ce qui concerne leur propre circonscription. Ça fait une grande différence.
    J'ai deux autres petites questions. Combien me reste-t-il de temps, monsieur le président?
    Il vous reste deux minutes.
    L'une porte sur une observation, une observation qui a été faite par l'un de mes honorables collègues, au sujet du conflit d'intérêts. S'il s'agissait d'un adjoint exécutif de l'opposition ou d'un adjoint exécutif d'un député de l'opposition ou de son chef, ne devrait-il pas respecter les mêmes normes que l'adjoint ministériel? Je pense que c'est une excellente suggestion, franchement, et j'espère certainement que mes honorables collègues d'en face proposeront un amendement à cet effet.
    J'ai une autre question à vous poser, monsieur, en ce qui concerne ce que je considère être une suggestion tout à fait décente. En ce qui a trait au libellé actuel de l'article concernant les activités des ministres et des secrétaires parlementaires, leurs activités en tant que parlementaires par opposition aux activités d'un titulaire de charge publique, vous dites que le libellé pourrait porter à confusion. Dans quelles circonstances un ministre devrait-il porter son chapeau de simple député et servir ses électeurs? Cela peut porter particulièrement à confusion lorsqu'un électeur demande à un ministre d'intervenir en son nom auprès d'un organisme quasi judiciaire ou d'une société d'État.
    Quel libellé pourrait, à votre avis, tirer cette situation au clair?
(1605)
    Je n'ai pas de libellé à vous proposer pour l'instant, mais je serai heureux de vous en fournir un.
    Vous allez fournir certains renseignements, et certains projets d'amendement au comité, et si vous pouviez aussi nous fournir un libellé dans ce cas-là, nous vous en serions gré.
    Je pense que c'est tout, monsieur le président.
    Merci.
    Le même problème reviendra à chaque fois. Il nous reste cinq minutes de cette période de 40 minutes. J'espère qu'à un moment donné, je pourrai faire un partage équitable. Cette fois-ci, je donne les cinq minutes au caucus libéral, en espérant remettre aux autres la part qui leur est due.
    Monsieur Tonks.
    Merci, monsieur le président.
    Sur une note plus légère, monsieur Shapiro, au moment même où on vous présentait, on pouvait entendre la clameur de vos partisans à l'arrière. Étant donné toute la publicité dont vous avez fait l'objet récemment, j'ai immédiatement pensé que c'était tout à fait dans la note, un genre de justice poétique en fait.
    Monsieur Shapiro, vous nous avez parlé de l'abandon d'un régime que vous connaissiez bien, un régime fondé non pas sur la loi mais plutôt sur des valeurs. J'en déduis que cela vous a permis, à l'occasion, de jouer un peu un rôle différent lorsque vous aviez à conseiller certaines personnes sur une éventuelle situation de conflit. D'ailleurs, les parlementaires sont libres de venir vous trouver pour vous demander conseil de façon relativement confidentielle. En adoptant un nouveau régime davantage fondé sur une loi et encadré par des règles, vous nous avez indiqué qu'il faudrait néanmoins que ce régime reste fondé sur ces valeurs, peut-être sous couvert d'un énoncé de mission déontologique — peu importe l'expression qu'on voudra utiliser — et qui vous permettrait toujours de jouer ce genre de rôle consultatif et d'intermédiaire.
    Ce que je crains — et j'imagine que le comité devrait être de cet avis aussi — et peut-être pourriez-vous nous en dire un mot, c'est que dans un régime encadré par des règles, si le fléau de la balance penche trop dans ce sens, il devient possible que la justice naturelle, cette potentialité qui existe avant qu'il y ait trop de battage selon la responsabilité que vous avez de faire rapport, priverait en fait le parlementaire de cette occasion qui lui serait sinon donnée, en quelque sorte, de s'expliquer publiquement.
    Pouvez-nous dire, d'après votre expérience, ce que vous en pensez? Selon vous, comment pourrait-on formuler la loi pour éviter précisément ce genre de chose?
    Il est impossible de formuler une loi qui garantirait de façon absolue que tout le monde sera toujours traité en toute circonstance comme il convient. Il s'agit d'une entreprise humaine, comme l'erreur est humaine elle aussi, l'homme finit toujours par faire quelque chose qu'il regrette plus tard. Nous sommes tous dans ce cas, et nous essayons bien de réduire ces erreurs au minimum, mais la perfection n'existe pas.
    Laissez-moi vous présenter cela sous un autre angle. Un régime encadré par des règles, s'il est bien fait — et partons du principe que ces règles sont toutes raisonnables — a tendance à ressembler à une toute petite boîte, comme c'est le cas ici comparé au régime précédent, mais une petite boîte plus solide aussi. Elle est plus petite, elle est beaucoup mieux circonscrite. À mon avis, cela offre moins de souplesse — pas une absence totale de souplesse, mais moins de souplesse — que ce ne serait le cas autrement. Ce que je suggère, ce n'est pas nécessairement un ensemble de principes, même si c'est une formule possible, mais peut-être l'adjonction d'un préambule. Je le répète, ce n'est pas moi qui rédige la loi, et je ne voudrais donc pas me substituer aux auteurs de celle-ci. Mais je pense à un préambule qui pourrait à tout le moins donner aux gens qui seront assujettis au régime et à ceux qui sont chargés de l'administrer — le nouveau commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique — une façon quelconque de rendre leurs conseils plus utiles en leur donnant la possibilité de s'appuyer sur quelque chose et, par conséquent, de donner l'impression d'être moins arbitraires que ce ne serait sinon le cas.
    Mais aucun de ces régimes n'est parfait, ne nous leurrons pas. Par contre, c'est là la difficulté qui attend ceux et celles qui sont appelés à composer ce texte de loi.
(1610)
    Monsieur Shapiro, si vous vous trouviez face à un conflit d'intérêts patent qui vous obligeait à en saisir quelqu'un ou à intervenir d'une façon ou d'une autre, à qui feriez-vous rapport avec ce nouveau régime? Lorsque vous intervenez, à quel moment bouclez-vous la boucle de cette responsabilité, et comment cela se passe-t-il?
    En ce qui concerne les députés, ce serait la Chambre proprement dite, ce serait le Président de la Chambre des communes auquel je fais d'ailleurs rapport depuis deux ans. À d'autres occasions, cela avait été le premier ministre qui avait la charge d'administrer le code. Dans un cas comme dans l'autre, le régime imposait de rendre la chose publique...[Note de la rédaction: Inaudible]... et ainsi de suite, de sorte que ces cas ont reçu l'attention nécessaire.
    Mais je dois dire que ces dernières années, une des choses qui ont été difficiles pour moi, c'est cette imprécision quant à l'instance à laquelle je dois faire rapport dans tous les cas. Je me suis donc adressé au Président de la Chambre qui est le personnage le plus neutre auquel je puis penser, et il m'a aidé de façon très utile.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Shapiro, et merci aussi à vos collègues, d'avoir accepté de venir cet après-midi. Merci beaucoup.
    Nous allons suspendre nos travaux pendant quelques instants, je vous remercie.
(1612)

(1615)
    Mesdames et messieurs, nous allons reprendre.
    Le deuxième témoin que nous allons entendre cet après-midi est Robert Marleau. Vous êtes nombreux à le connaître. Il est le président du Conseil d'administration du Centre parlementaire et il a été greffier de la Chambre des communes.
    Bonjour, monsieur Marleau.
    Avez-vous quelques mots à nous dire en guise d'introduction?
    Je remercie le comité de se souvenir de mon nom et de mes liens avec cette institution.
    Peu importe où ils sont assis, les membres du comité se souviennent bien de vous.
    Je dois vous dire qu'il ne m'est pas facile de donner une opinion au sujet de la teneur et du fond d'un projet de loi, puisque j'ai passé 32 ans de ma vie professionnelle à tenter justement d'éviter de le faire. J'espère que vous serez bienveillants à mon endroit si vous me voyez hésiter; cela dit, je vais m'efforcer de répondre du mieux possible à vos questions.

[Français]

     Cela dit, mes remarques préliminaires porteront sur deux aspects du projet de loi. Je considère ma première remarque comme étant mineure dans le contexte de l'imputabilité, mais assez importante dans le contexte de la procédure parlementaire.
    Ma deuxième remarque portera sur le processus d'étude des subsides, soit les prévisions budgétaires, et sur la façon dont la portée de ce projet de loi pourrait être élargie, selon moi, afin d'inclure les prévisions budgétaires.

[Traduction]

    Vous aurez peut-être d'emblée l'impression, en m'écoutant parler à ce sujet, que le premier point, la procédure, est relativement mineur, mais à mon sens, il pourrait présenter des difficultés à la Chambre précisément à cause de la procédure. Il s'agit de la question du vote secret. Le projet de loi prévoit que la plupart des agents du Parlement, les mandataires du Parlement, peu importe l'expression que l'on veuille utiliser, doivent être nommés suite à un scrutin secret, hormis toutefois... non, cela vaut également pour le vérificateur général.
    Lorsque j'étais greffier de comité et donc appelé à conseiller les comités sur des projets de loi, et lorsque j'étais greffier au Bureau puis greffier de la Chambre, j'ai toujours conseillé aux parlementaires d'éviter d'intégrer dans un texte de loi quel qu'il soit une procédure à caractère parlementaire. En effet, la procédure parlementaire a pour but de permettre une certaine flexibilité, de manière à ce que la Chambre puisse continuer à travailler dans le contexte de son règlement intérieur. Le règlement de la Chambre, malgré sa permanence relative, peut être facilement modifié au gré ou selon l'humeur de la Chambre. En admettant que, dans cette loi, vous prévoyiez un scrutin secret, cela engagera les deux Chambres et par voie de conséquence aussi le Président. Il n'y aura pas d'alternative, il faudra tenir un scrutin secret, même si le candidat fait l'unanimité. Et même si la Chambre exprime la volonté de procéder rapidement, elle devra néanmoins tenir un scrutin secret.
    Chaque fois qu'une façon de procéder a ainsi été enchâssée dans une loi, que ce soit en exigeant qu'il y ait débat et en fixant pour cela certaines échéances, cela a occasionné des difficultés, et la Chambre n'était pas vraiment outillée pour régler ce genre de problème. Même s'il y avait entente entre les partis pour ne pas procéder de cette façon, la Chambre était néanmoins tenue de le faire.
    Je ne conteste pas pour autant la pertinence du scrutin secret. Ce que je vous recommanderais par contre, si vous tenez vraiment à ce qu'il y ait scrutin secret, c'est de le prévoir plutôt dans le règlement respectif de chaque Chambre, et non pas dans la loi.
    J'ai repéré une petite divergence, mais peut-être n'en est-ce pas une, c'est peut-être une question de politique, mais il ne m'appartient pas d'en juger. Le processus de nomination fait donc l'objet d'un scrutin secret, mais non pas le processus de révocation, du moins c'est ce qui est implicitement prévu. Chaque fois qu'il y a une nomination, il doit y avoir un scrutin secret, mais il semblerait que pour la plupart des titulaires de ces charges, la révocation peut s'effectuer par simple voie de résolution adoptée à la majorité et, j'imagine — à en croire ce qu'on peut lire dans le projet de loi — par un scrutin public. Alors d'une part, la nomination s'effectue au scrutin secret, alors que l'éventuelle révocation se ferait au scrutin public. Il appartient au comité de voir si c'est effectivement cela qu'il veut. Mais pour moi, cela me semble un peu contradictoire, mais peut-être n'en est-il rien.
    Je voudrais également aborder un autre élément, mais ici, monsieur le président, je vous demanderais un peu d'indulgence parce que cette intervention pourrait sembler de prime abord un peu hors sujet, mais je vais m'empresser de la rendre pertinente.
(1620)

[Français]

    Il est regrettable que, depuis 40 ans, l'intérêt des députés et des comités parlementaires pour les prévisions budgétaires du Parlement soit à la baisse. Je ne suis pas le premier à remarquer ou à commenter cet état de choses. Je pense que ceux qui suivent l'évolution du processus des prévisions budgétaires à la Chambre des communes sont d'accord avec moi.

[Traduction]

    Les députés ont peu intérêt à consacrer beaucoup de temps à l'examen des budgets. Ce genre de chose ne fait guère gagner de voix et c'est également une étude qui, à l'occasion, peut se révéler assez monumentale, à en juger par la quantité d'informations fournies par le gouvernement. En général, ces rapports de comité ne sont guère débattus à la Chambre, de sorte qu'on leur accorde peu d'intérêt.
    Vous avez aujourd'hui, dans le rapport de la vérificatrice générale, un exemple patent de violation, en quelque sorte, du pouvoir constitutionnel donné à la Chambre d'octroyer des subsides, du moins c'est ce que prétend la vérificatrice générale, qui aurait pu être décelée si on avait étudié les budgets supplémentaires. Je parle du dossier du registre des armes à feu. Pendant la période à l'étude par la vérificatrice générale, l'exercice 2003-2004, le Comité de la justice étudiait un important texte de loi, celui qui concernait le mariage entre personnes de même sexe. De sorte que le comité n' a pas consacré une seule séance au budget supplémentaire du registre des armes à feu.
    Ne vous y trompez pas, ce n'est pas une critique que je formule à l'endroit du comité.

[Français]

    Toutefois, cela révèle un problème fondamental d'imputabilité qui n'est pas inclus dans le projet de loi.

[Traduction]

    Avec ce projet de loi, le Parlement est en quelque sorte extrait de la boucle de la responsabilité. Et je vous ai dit il y a quelques instants, de grâce n'intégrez pas la procédure au projet de loi, de sorte que je ne vais pas maintenant insister pour que vous intégriez l'examen des crédits dans le projet de loi. L'adéquation que je veux faire ici, c'est avec le service du directeur parlementaire du budget.
    Je vous recommande d'ailleurs un document de recherche de l'enquête Gomery qui a été rédigé par le Centre parlementaire et publié sous le titre Le Parlement et la responsabilité financière dans Études de recherche: Volume 1, ainsi qu'un article signé par Peter Dobell et Bob Miller, le directeur exécutif du Centre parlementaire, sur le même sujet dans l'édition du Hill Times de la semaine dernière.
    Il serait très facile d'élargir le mandat du service parlementaire du budget en lui confiant également les prévisions budgétaires. Je vous exhorte à envisager ce genre de chose dans le cadre du projet de loi et à ajouter ainsi un second mandat à ce service qui relève de la Bibliothèque, afin qu'il puisse suivre le processus budgétaire. Les comités ont besoin, je crois, comme je l'ai dit à la fois en public et en privé, d'un concours considérable de la part d'un service d'analyse financière afin de pouvoir procéder efficacement à l'examen des budgets. Bien sûr, il faudrait en parallèle modifier le Règlement de la Chambre, mais cela sort du cadre de ce dont vous discutez ici. Modifier ainsi le projet de loi pourrait alors faire rentrer le Parlement dans la fameuse boucle de la responsabilité.
    Monsieur le président, je vais en rester là. C'étaient les deux choses principales que j'avais à vous dire, l'une relativement mineure et l'autre plus importante.
    Je vous remercie, monsieur Marleau.
    Je pense que pour les membres d'un comité, ce n'est pas une mince affaire que d'entendre un témoin qui avait coutume de conseiller les Présidents et les greffiers de comité. C'est un plaisir de vous recevoir.
    Monsieur Owen.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue, monsieur Marleau. Vous avez parlé du service parlementaire du budget. Voilà un élément de plus à ajouter à la liste des fonctionnaires parlementaires, qui ne cesse de s'allonger du fait de ce projet de loi. Il y a 30 ans, nous le savons, il n'y avait que le vérificateur général, puis il y a eu le commissaire à l'information et le commissaire à la vie privée, et maintenant il y a tous ces autres commissaires.
    Tout cela pour revenir à la suggestion fort utile que vous nous faites d'élargir le mandat du directeur parlementaire du budget en lui adjoignant les prévisions budgétaires. Il existe déjà une tension entre ces fonctionnaires du Parlement dont le rôle consiste essentiellement — comme on le dit — à « aider » les parlementaires à faire leur travail. Ils donnent en quelque sorte un plus grand rayon d'action aux parlementaires. Le problème, c'est que cela finit par avoir ses propres limites, en ce sens qu'à un moment donné, nous en viendrons à avoir tellement de fonctionnaires parlementaires que nous aurons créé un univers parallèle entre l'exécutif d'une part et les parlementaires de l'autre. Ce que nous voulions à juste titre être un auxiliaire devient ainsi une sorte de mur.
    J'ignore que répondre à cela. J'ai été de ceux-là jadis, et je reconnais facilement le rôle que ces agents du Parlement peuvent jouer en aidant les parlementaires et les citoyens à demander des comptes à l'exécutif, mais ce genre de prolifération m'inquiète un peu. À un moment donné, le citoyen, et peut-être aussi l'administration publique, les médias et tout le monde, ne s'y retrouveront peut-être plus et ne sauront plus très bien qui est responsable de quoi parmi tous ces fonctionnaires indépendants, mais qui ne devraient en réalité pas l'être vraiment puisqu'ils sont censés être subordonnés au Parlement.
    J'aimerais connaître votre avis sur cette relation.
(1625)
    Pour commencer, selon le texte actuel du projet de loi, je ne dis pas que le directeur parlementaire du budget serait l'équivalent d'un fonctionnaire parlementaire à proprement parler. Pour moi, ce serait davantage un auxiliaire, une ressource interne à la disposition des parlementaires, des comités, des députés, des sénateurs, plutôt qu'un nouveau type de structure de responsabilisation.
    En ce qui concerne les autres fonctionnaires du Parlement, j'ai effectivement lu des articles qui parlaient de prolifération de ce genre de charges. Il est vrai, je crois, qu'avec les années, en créant de nouvelles charges de ce genre, le Parlement voulait déléguer une certaine manière de responsabilisation, mais d'un même tenant, cela a également réduit les pouvoirs du Parlement.
    Prenez le cas de la Loi sur l'accès à l'information. Ne prenez pas cela pour une critique de la loi et de ce qu'elle vient utilement ajouter à notre culture politique, mais les questions inscrites au Feuilleton et les avis de motion portant production de documents avaient une véritable utilité, un véritable impact, avant l'avènement de cette loi. Lorsqu'un ministère faisait l'objet d'une question inscrite au Feuilleton, il prenait cela très au sérieux. Ce qui s'est produit depuis, de façon indirecte, c'est que le député qui veut obtenir un document a plutôt intérêt à invoquer la Loi sur l'accès à l'information que de recourir à un avis de motion. Je ne pense pas que ce que le Parlement voulait, c'était d'affaiblir une de ses propres façons de procéder en déléguant la chose à un agent extérieur, mais à mon avis c'est bien cela qui s'est produit.
    Cela ne veut pas dire pour autant que le système ne puisse pas être renforcé et maîtrisé, mais c'est cela que je voulais vous dire dans le droit fil de votre intervention.
    M. Tonks voudrait poser une question.
    Oui, monsieur Tonks.
    Monsieur Marleau, pour revenir à l'idée de boucler la boucle de la responsabilité et de renforcer les pouvoirs de surveillance qui appartiennent aux comités, le Congrès américain s'est lui aussi doté d'une charge semblable. Il y a chez nous la Bibliothèque du Parlement, et vous nous avez déjà dit que ce n'est pas tant une responsabilité qu'une ressource complémentaire qui permet de rendre compte. Je pense que c'est extrêmement important.
    Si nous voulons créer une charge de directeur parlementaire du budget, sachant fort bien que la loi institue également dans chaque ministère une charge de sous-ministre responsable en matière financière, pourquoi notre comité ne voudrait-il pas lui aussi renforcer ses capacités et ses moyens en créant cela et en donnant à la Bibliothèque du Parlement par exemple ce genre de capacité, ce genre de moyen?
    Je pense que c'était ce que je voulais préconiser. Le fait de donner à la Bibliothèque du Parlement ce genre de moyen constitue en fait pour le Parlement une ressource supplémentaire par rapport à une charge indépendante dont le titulaire aurait, dans l'exercice de ses pouvoirs, une certaine autonomie.
    Je suis toujours réticent à ce phénomène insidieux d'imitation de ce qui se fait au Congrès américain. Je ne pense pas que nous puissions trouver toutes nos solutions dans un système aussi différent du nôtre. Je pense donc que le fait de greffer cette fonction à la Bibliothèque du Parlement en la plaçant sous le contrôle de ce dernier, d'en faire une créature du Parlement, serait une façon beaucoup plus efficace de renforcer le rôle de responsabilisation joué par la Chambre.
(1630)
    Je n'avais jamais entendu ce genre de choses, mais cela éclaire ma lanterne. Merci, monsieur Marleau.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Sauvageau.

[Français]

    Merci, monsieur Marleau. Comme je l'ai dit à M. Shapiro dans mes remarques préliminaires, je vous présente toutes mes excuses pour la façon cavalière dont le comité fait preuve en vous recevant comme il le fait. Cela nous est imposé par les conservateurs et le Nouveau Parti démocratique, qui ont limité votre temps de parole et d'intervention. Je suis certain que vous auriez eu plusieurs remarques à faire au sujet du projet de loi C-2.
    Si le projet de loi C-2, qui est perçu par les conservateurs comme étant à l'image des dix commandements, était adopté sans amendement, pensez-vous qu'il y aurait des problèmes relativement à son interprétation et à son application?
    Monsieur Sauvageau, je ne veux pas éviter de répondre à votre question, mais il y a plusieurs dimensions de ce projet de loi qui dépassent ma compétence et mon expérience. Je limiterai mes commentaires à ce que j'ai déjà dit. Je pense qu'un des problèmes concerne le scrutin secret imposé dans une loi. Cela limitera le champs d'action de la Chambre dans le futur et obligera le Président à imposer une certaine procédure dictée par la loi, malgré le fait que la Chambre puisse avoir une volonté différente.
    Le deuxième aspect, c'est que chaque fois qu'un projet de loi contient de la procédure, cela constitue une invitation aux tribunaux à intervenir. On peut imaginer toutes sortes de scénarios concernant le scrutin secret. Prenons par exemple quelqu'un qui n'est pas satisfait du processus, du résultat ou de quelque chose d'autre. Cette personne pourrait peut-être demander l'intervention des tribunaux pour changer le résultat ou pour qu'il soit rejeté. Il y a des chances que les tribunaux respectent les privilèges et l'autonomie de la Chambre, mais on ne sait jamais. Idéalement, il s'agirait d'une question raisonnable portée devant un juge raisonnable dans une situation où tout le monde est raisonnable. Mais s'il y a des problèmes, chaque fois que vous rapprochez le processus parlementaire des tribunaux, vous prenez le risque qu'il y ait des interventions dans le futur.
    J'ose espérer, si vous avez d'autres amendements à proposer, qu'ils seront acceptés par le comité et par la greffière. Si vous avez le temps d'examiner le projet de loi, il nous fera plaisir de recevoir vos commentaires au sujet des autres amendements.
    J'aimerais vous poser une question, mais vous ne pourrez peut-être pas y répondre. On pourrait effectivement élargir le rôle du directeur parlementaire du budget.
    Cependant, dans le projet de loi C-2, il y a une autre sphère dont on ne fait pas mention et au sujet de laquelle il devrait y avoir une précision. Je parle des décisions du Tribunal canadien du commerce extérieur. Dans l'éventualité où deux ministères seraient pris à partie par un plaignant, le projet de loi C-2 ne couvrirait pas toutes les décisions.
    Par exemple, si un citoyen ou un groupe de citoyens déposait une plainte contre le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux parce qu'un appel d'offres a été dirigé de façon à ce qu'un seul soumissionnaire puisse y répondre favorablement et que la décision du Tribunal canadien du commerce international était favorable au plaignant, c'est-à-dire si le tribunal reconnaissait qu'il y a eu malversation, le projet de loi C-2 ne s'appliquerait pas à cette décision. Cette une situation que l'on a déjà vue.
    Pensez-vous que le projet de loi C-2 devrait être amendé afin que les décisions du Tribunal canadien du commerce international soient incluses?
    Dans mon préambule, je disais souhaiter que les députés feraient preuve de générosité à mon endroit. Voilà une question qui dépasse entièrement ma compétence.
    Est-ce qu'on veut que le projet de loi ait cette portée? Je crois qu'il s'agit d'une question de politique gouvernementale. Il s'agit d'une question de portée. Je ne veux pas répondre que cela est souhaitable ou non. Ainsi, je m'en remets plutôt aux députés pour prendre cette décision.
    Je vais partager mon temps de parole avec Mme Lavallée.
    Carole, est-ce que tu as des questions à poser?
    Je ne sais pas si j'ai le temps de poser une question et d'obtenir une réponse.
    Je voudrais vous parler des prévisions budgétaires. Je ne suis pas une vieille députée, et certaines subtilités procédurales m'échappent. Toutefois, je sais que le spécialiste est devant moi.
    D'abord, normalement, il n'y a pas de prévisions budgétaires pour les projets de loi émanant des députés. Par contre, il y a des prévisions budgétaires pour les projets de loi du gouvernement, dont le projet de loi C-2. Si je comprends bien votre idée, on devrait d'ores et déjà se pencher sur les coûts d'application du projet de loi C-2 et s'en remettre à quelqu'un pour nous aider à faire les prévisions budgétaires au comité. Vous suggérez que cette personne soit le directeur parlementaire du budget.
    J'ai besoin de clarifications, et vous comprenez lesquelles.
(1635)
    Selon ce que j'ai compris à la lecture du projet de loi, le directeur du budget parlementaire pourrait faire des analyses des projets de loi émanant des députés. Je n'ai pas vu que son rôle irait jusqu'à faire l'évaluation des coûts ou jusqu'à faire des analyses financières des projets de loi émanant du gouvernement. Après avoir lu cela, je comprends mieux pourquoi on demande une analyse des projets de loi émanant des députés.
    Personnellement, et même en tant que praticien des procédures parlementaires, je me pose des questions sur le bien-fondé d'une telle disposition. Après tout, la décision ultime à savoir si un projet de loi sera adopté ou non et s'il aura des conséquences financières appartient au Président de la Chambre. Il pourrait y avoir une situation où un appareil parlementaire déciderait qu'il n'y a pas de mesure pécuniaire dans un projet de loi, alors que le Président déciderait qu'il y en a. Il pourrait y avoir un conflit interne.
    Selon moi, les ressources consacrées à cela seraient mieux utilisées si elles servaient à appuyer les députés dans l'analyse des prévisions budgétaires.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Martin.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie également, monsieur Marleau. Il faut que je vous dise que nous pensons souvent à vous. Même si vous avez peut-être le sentiment d'être un peu éloigné de nous, nous sommes nombreux ici à considérer votre ouvrage, Marleau et Montpetit, un peu comme une Bible dont nous ne nous séparons pas et que nous utilisons fort bien. Vous êtes donc bien souvent dans nos pensées, même si vous n'êtes pas présent de corps avec nous.
    Je tiens également à vous remercier pour cette recommandation fort utile. Je suis originaire du Manitoba, et depuis mon arrivée ici, j'ai effectivement souvent été interloqué par le peu de temps que nous consacrions aux prévisions budgétaires. Nous leur consacrons bien tout notre temps après coup, au Comité des comptes publics, où nous passons à la loupe le moindre sou dépensé par l'État, souvent en critiquant la façon dont il a été dépensé, mais nous ne passons que très peu de temps au tout début du processus pour étudier les prévisions budgétaires.
    Dans ma province, il n'est pas rare que le ministre soit convoqué devant un comité de l'Assemblée et qu'il y passe toute la nuit. Le budget du ministre de la Santé fait l'objet d'une étude en comité qui dure entre 50 et 60 heures pendant lesquelles tout est examiné poste par poste et les membres mettent le ministre sur la sellette en lui posant des questions sur tout ce qu'il se propose de dépenser pendant l'année suivante. Cela produit deux effets positifs: tout d'abord, c'est le moment le mieux choisi pour procéder à ce genre d'examen minutieux, et en second lieu, le ministre, son sous-ministre ou ses experts doivent connaître sur le bout des doigts le moindre poste de dépenses.
    À mon avis, c'est une excellente chose. Cela illustre parfaitement l'intérêt qu'il y a à consacrer tout ce temps à entendre autant de témoins dans le cadre de cet important projet de loi. Voilà le genre de choses que nous parvenons à obtenir ici. Certes, je formule l'espoir que nous puissions nous entendre pour élargir le rôle du directeur du budget. Peut-être pourrions-nous vous demander de nous dire de façon encore plus détaillée comment selon vous cela pourrait se concrétiser. Mais je ne m'étendrai pas plus longtemps là-dessus.
    J'aurais toutefois une question à vous poser. Le projet de loi C-2 a des ennemis. Il y a des gens qui ne veulent pas qu'il soit adopté. Je ne vous dirai pas si certains d'entre eux sont issus du milieu politique. Je pense qu'il y en a dans l'administration mais tout d'abord, que pensez-vous des projets de loi omnibus? Pensez-vous que certains de ces projets de loi soient tellement épais, tellement massifs, qu'ils finissent par crouler sous leur propre poids? Pensez-vous qu'il soit utile parfois de les amputer de certains de leurs éléments les moins controversés afin de pouvoir les faire adopter séparément?
    Pourriez-vous nous donner un bref commentaire à ce sujet?
    Oui, je pourrais le faire très rapidement, et je vous donnerais essentiellement la même réponse que celle que je donnerais au Président qui me demanderait conseil.
    Sur le plan de la procédure, cela fait très longtemps que les projets de loi omnibus font partie intégrante de notre culture parlementaire. Très souvent, on a pu entendre des députés faire valoir pourquoi ce genre de projet de loi devait être scindé, et il est même arrivé que ces arguments soient soumis au Président de la Chambre. Mais pendant mes dix années comme greffier de la Chambre, à ma souvenance, le Président n'a accepté d'en scinder qu'un seul.
(1640)
    Lequel encore?
    C'était, si je me souviens bien, en 1988, sous la présidence de M. Fraser, avec le projet de loi sur l'immigration.
    Pour commencer, la décision de scinder ou non un projet de loi omnibus appartient exclusivement au gouvernement. La façon dont on va présenter un texte de loi est avant tout une décision politique et qui concerne la politique de l'État, et il en va de même pour la décision de le scinder ou non. La Chambre peut accepter qu'un projet de loi soit scindé ou que deux de ses parties soient envoyées à des comités différents. La chose est possible, mais c'est la Chambre qui doit en décider.
    Je préfère ne pas répondre au volet philosophique de votre question lorsque vous me demandez si cela est souhaitable. Cela peut être une façon de procéder très efficace, mais elle peut aussi présenter des difficultés pour un député qui est appelé à voter une fois pour toutes sur le principe du projet de loi ou au moment de sa troisième lecture.
    Le projet de loi sur la cruauté envers les animaux n'a-t-il pas été scindé? Vous souvenez-vous de ce projet de loi, monsieur Marleau?
    Je me souviens un peu du projet de loi sur la cruauté envers les animaux. Je pense que c'était une décision multilatérale; ce n'était certainement pas une décision prise par le Président.
    En ce qui concerne le scrutin secret pour l'élection des hauts fonctionnaires du Parlement, la vérificatrice générale a indiqué qu'un scrutin public pour leur nomination la rendrait mal à l'aise si elle n'obtenait que 51 p. 100 des voix. Est-ce, à votre avis, une raison valable pour maintenir le scrutin secret?
    Je pense que la décision d'instaurer un scrutin secret est une question de politique, et je peux comprendre les raisons qui motivent un tel scrutin si l'on veut réduire l'influence de la direction du parti et assouplir la discipline du parti pour permettre à un député de faire un choix plus individuel. Ce système a des avantages. J'ai mené quelques scrutins secrets moi-même et je peux attester du bien-fondé du processus lorsqu'il s'agit de faire élire le Président de la Chambre des communes. Je ne sais pas par contre si la tenue d'un scrutin secret donnerait nécessairement l'impression que ce dernier l'a remporté à la quasi-unanimité. Je pense que la première série de consultations sur les candidats déterminera les résultats plus que la tenue d'un scrutin secret. Enfin, je ne sais pas.
    Dans le fond, je me demande ce que la tenue d'un scrutin secret pourrait donner comme valeur ajoutée au processus de sélection? On se prononce en faveur d'un candidat seulement. Ce n'est pas comme si on devait voter pour plusieurs candidats.
    C'est ça, vous avez soulevé un bon point. Mais même un oui ou un non peut être un choix difficile parfois.
    Lorsque le Parti réformiste est arrivé sur la scène politique, ils ont modifié la façon de faire voter les députés sur les projets de loi d'initiative parlementaire. Les députés d'arrière-ban ont dû se prononcer en premier pour qu'ils ne voient pas comment ceux de la première rangée allaient voter. Regarder la direction voter fait toute la différence.
    Le meilleur moyen de choisir un mandataire du Parlement est de ne pas tenir de vote du tout. Je pense que ce qui doit être accompli doit se faire au moyen de consultations, aux termes desquels un appui massif est accordé au mandataire en question, c'est-à-dire une expression de confiance.
    J'ai eu le privilège d'occuper non seulement le poste de greffier à la Chambre mais aussi celui de Commissaire à la vie privée durant une période de crise à la Commission, et ma nomination avait été décidée à l'unanimité par le parti. J'avais dit au gouverneur en conseil à l'époque que si la décision n'était pas unanime, je n'allais pas accepter la nomination.
    Merci, monsieur Marleau.
    Monsieur Petit, et s'il nous reste du temps, monsieur Rob Moore, ou est-ce l'inverse.
    Oui merci, monsieur le président. Je compte partager mon temps de parole avec M. Petit.
    Monsieur Marleau, merci d'être ici aujourd'hui.
    Je pense que le dépôt du rapport de la vérificatrice générale illustre aujourd'hui à quel point les mandataires indépendants peuvent être efficaces, de même que la valeur qu'ils apportent à notre travail de parlementaires, d'autant plus qu'il y a des choses que nous, parlementaires, ne sommes pas en mesure de faire. Quand nous instituons des mandataires indépendants, nous leur confions la tâche de veiller sur les intérêts supérieurs du Parlement et, somme toute, de tous les Canadiens. C'est pourquoi je m'intéresse particulièrement à ce que vous venez de dire quant à la valeur ajoutée possible que pourrait apporter le directeur parlementaire du budget.
    Je veux tirer une chose au clair. Je suis peut-être un peu confus, mais si j'ai compris le projet de loi C-2, le directeur parlementaire du budget sera en réalité un mandataire relevant de la Bibliothèque du Parlement et, par voie de conséquences, exécutera ses fonctions, du point de vue organisationnel, à partir de la Bibliothèque du Parlement. Voilà qui apaisera peut-être quelques-unes des craintes de mes collègues, notamment les craintes de dédoublement.
    Je sais que les nouveaux députés ont beaucoup de choses à faire. Les nouveaux députés peuvent être obnubilés par le Budget des dépenses — et quelqu'un l'a déjà invoqué ici —, quand ils sont bombardés de chiffres. Je vois donc l'importance de ce que vous dites quant à l'élargissement possible du rôle du directeur parlementaire du budget à l'examen du budget des dépenses.
    Pouvez-vous nous expliquer davantage comment ce rôle élargi pourrait nous aider dans notre travail quotidien quand nous devons analyser la façon dont le gouvernement dépense l'argent des contribuables canadiens?
(1645)
    Avec plaisir, monsieur Moore.
    Au-delà du simple élargissement du mandat du directeur parlementaire du budget, il vous faudrait également modifier le Règlement en ce qui concerne les pouvoirs des comités, notamment le Comité des opérations gouvernementales, et j'y reviendrai dans un instant.
    Le directeur parlementaire du budget aurait les mêmes pouvoirs en matière de budget des dépenses que ceux prévus dans le projet de loi en ce qui concerne le budget, c'est-à-dire l'accès aux documents du Conseil du Trésor et la capacité de consulter en tant opportun les documents de planification ministérielle afin de faire une analyse du budget des dépenses proposé et de fournir des conseils à un comité ou à des députés s'intéressant à un programme ou à un dossier en particulier.
    Il s'agit donc de lui assurer ce genre d'accès, si je puis m'exprimer ainsi. À l'heure actuelle, les pauvres attachés de recherche de la Bibliothèque du Parlement, avec lesquels je compatis, doivent se contenter de renseignements publics pour vous fournir des conseils. Ils ne peuvent utiliser que ce qu'ils peuvent trouver sur le Web pour vous fournir des conseils sur des programmes ministériels. Grâce à ce projet de loi, ils auraient un accès privilégié à tous les renseignements touchant le volet budgétaire.
    Si vous me permettez d'ajouter un petit point au sujet du Comité des opérations gouvernementales, je vous signalerai que le mandat de ce comité porte notamment sur le budget des dépenses et que le comité est tout à fait libre d'exercer son mandat. C'est le mandat qui lui a été conféré il y a sept ou huit ans. Je pense que nous devons remonter dans le temps — aux années 70 et au début des années 80 — où il existait encore un comité qu'on appelait autrefois le Comité des prévisions budgétaires générales. Le budget des dépenses supplémentaires qui est généralement dévoilé à l'automne était envoyé dans son ensemble au comité. Il n'était pas réparti entre 23 comités. Le président du Conseil du Trésor et le Secrétariat du Conseil du Trésor comparaissaient devant le comité pour expliquer le contexte supplémentaire dans lequel le gouvernement se trouvait et pourquoi il avait besoin de crédits supplémentaires; cela s'inscrivait dans le cadre plus global d'une analyse ou d'un examen des dépenses.
    Aujourd'hui, les tâches sont réparties ça et là, le crédit 1 étant confié à ce comité-ci et le crédit 5 à ce comité-là. C'est ce qui est arrivé dans le cas du registre des armes à feu. Le Comité de la justice avait cette année-là à étudier le projet de loi sur le mariage entre conjoints de même sexe. Il se déplaçait, subissant des pressions énormes pour faire adopter le projet de loi, et il n'a pas pu examiner le budget des dépenses supplémentaires.
    Si le budget des dépenses supplémentaires était envoyé en bloc au Comité des opérations gouvernementales, puis analysé par un mandataire du Parlement, je pense qu'on aurait alors un meilleur dialogue avec le gouvernement, l'exécutif, quant à la reddition de comptes. C'est ce que je qualifie de dialogue soutenu sur la reddition de comptes, plutôt qu'un dialogue antagoniste. Plus on demande de renseignements, plus on en obtient, et plus on est à même de juger l'efficacité des programmes et de leur exécution.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Marleau, je vous remercie d'être ici.
    Depuis quelque temps, nous savons que les différentes personnes qui seraient nommées, par exemple le vérificateur général, préféreraient être nommées à la faveur de qu'on appelle un scrutin ouvert plutôt qu'à la faveur d'un scrutin secret.
    Vous êtes au courant que le scrutin secret a l'avantage de procurer une liberté aux gens qui votent. À titre d'exemple, dans les syndicats, on a remplacé le scrutin à main élevé par le scrutin secret afin de permettre aux syndiqués de voter librement sur une entente proposée.
    Dans cas-ci, le vote au scrutin secret ne donnerait-il pas une plus grande liberté à l'ensemble des députés?
    Deuxièmement, j'aimerais aussi comprendre la liaison que vous faites avec la destitution. Il est assez rare — en tout cas, je n'ai pas vu cela souvent — qu'il y ait une destitution au scrutin secret. Une destitution se fait habituellement de la façon suivante. Par exemple, on présente un problème aux membres d'un comité, et le conseil d'administration destitue la personne visée après l'avoir entendue, conformément à certaines procédures.
    J'essaie de comprendre comment vous seriez capable de destituer quelqu'un au scrutin secret. Je sais que cela peut se faire, mais c'est une procédure assez rare. Je ne ai pas souvent vu une telle procédure dans les organisations que j'ai fréquentées. Peut-être avez-vous des exemples à nous donner. J'aimerais vous entendre là-dessus.
    Merci.
(1650)
    Merci, monsieur Petit.
    En ce qui concerne votre dernière question, je suis d'accord avec vous en ce qui a trait à la destitution au scrutin secret. Il est presque aussi rare de voir des nominations au scrutin secret. Je dirais qu'il y a deux éléments. D'abord, il est vrai que le scrutin secret confère une certaine liberté d'action à celui qui vote. D'autres diront qu'il faut avoir le courage de voter ouvertement selon ses convictions.
    Je ne me prononce pas en faveur ou contre l'une ou l'autre façon de faire, je vous fais seulement part des deux. Dans le cas d'une destitution, je pense qu'il est surtout important de savoir qui, quelle faction, souhaite la destitution d'une personne. C'est peut-être plus pénible d'être destitué au scrutin secret, sans savoir d'où c'est venu, que d'être nommé au scrutin secret, en présumant que c'est venu de tout le monde. Alors, je dirais que c'est là un manque d'uniformité que j'ai perçu dans le projet de loi.
    Notre régime parlementaire, de manière générale, prône la transparence du vote du député. Vous êtes élus individuellement comme députés, et les citoyens s'attendent à connaître vos positions et à voir comment vous vous acquittez de la tâche qu'ils vous ont confiée.
    Alors, le scrutin secret comporte des points positifs et des points négatifs. Dans certains cas, par exemple pour l'élection de la présidence de la Chambre des communes, je crois que c'est un succès. S'il y a destitution du Président de la Chambre des communes, on procédera à un vote ouvert.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Madame Lavallée, vous avez quatre minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, vous êtes trop bon. Quelle générosité!
    Je voudrais reprendre la conversation où nous l'avions laissée plus tôt. Vous avez quand même un peu parlé des prévisions budgétaires.
    Je reprends ma question afin de bien comprendre la réponse. Cela voudrait-il dire, par exemple dans le cas du projet de loi C-2 que nous examinons actuellement, qu'au moment où le comité siège, ce projet de loi passerait entre les mains d'un agent du gouvernement ou d'un directeur parlementaire du budget qui le décortiquerait et verrait quelles sont les répercussions financières et qui les chiffrerait à l'aide des informations internes du gouvernement?
    Je n'ai pas à interpréter cette dimension du rôle du directeur du budget parlementaire. Il vous est toujours loisible, comme députés, de demander au Service d'information et de recherche parlementaires de la Bibliothèque du Parlement de vous préparer un document qui vous donnerait une évaluation des coûts approximatifs associés à tout projet de loi. Vous disposez déjà de ce service, jusqu'à un certain point.
    Ce projet de loi contient une recommandation royale. Cela confère au gouvernement le pouvoir de présenter un projet de loi qui entraîne des dépenses. Parfois les dépenses associées à un projet de loi sont assez claires: le nombre d'agences qui seront créées, le personnel requis, la rémunération, etc. Parfois, c'est très complexe, et vu les délais inhérents à la façon de procéder du gouvernement, le total des dépenses associées à l'adoption du projet de loi ne sera pas connu avant que le processus soit très avancé. Il arrive même que ces dépenses ne soient pas connues avant que le gouvernement dépose à la Chambre les prévisions budgétaires associées à un projet de loi qui a déjà été adopté.
    Dans ce projet de loi, j'ai constaté que, pour les initiatives des députés, un député ou un comité pourrait demander une évaluation des coûts. Généralement, les députés ne sont pas habilités à présenter des projets de loi qui entraînent des dépenses.
    Voilà.
    Si un projet de loi émanant d'un député entraîne une dépense, on peut procéder à son étude jusqu'à la troisième lecture, mais si, après cette étape, on n'a pas obtenu l'appui d'un ministre pour obtenir une recommandation royale, c'est fini. Le Président rejettera alors le projet de loi parce qu'il contrevient à la Constitution et au Règlement.
    Alors, je me demande pourquoi on dépenserait de l'énergie, de l'argent et du temps pour évaluer les dépenses engendrées par l'adoption d'un projet de loi émanant d'un député alors que la décision finale revient au Président.
    Vous êtes venu ici afin de nous faire quelques recommandations. Dois-je comprendre que votre recommandation inclut que les projets de loi gouvernementaux soient évalués, qu'on fasse des prévisions budgétaires? Ai-je bien compris?
    Non. Je me suis peut-être mal exprimé.
    J'ai peut-être mal compris.
    Je suis certain que vous avez bien compris.
    Ce que je propose, c'est d'élargir le mandat du directeur du budget parlementaire pour y inclure l'analyse systématique à long terme des prévisions budgétaires du gouvernement, qui sont déposées avant le 1er mars de chaque année. Il s'agit de toute l'enveloppe des prévisions de dépenses pour l'année, y compris l'enveloppe supplémentaire qui vient à l'automne. Cela émane de certains projets de loi déjà adoptés, de lois qui appuient des programmes et des initiatives nouvelles que le gouvernement peut avoir annoncés dans le dernier budget.
    Donc, ma suggestion ne vise pas les projets de loi comme tels, mais l'analyse des prévisions budgétaires en soi.
(1655)

[Traduction]

    Je suis désolé, mais le temps est écoulé. Voilà la cloche qui retentit, ce qui tombe à pic.
    Monsieur Marleau, merci infiniment.
    Je vous remercie, monsieur le président, et je souhaite au comité de réussir son entreprise.
    Merci infiniment de votre éclairage.
    On est en train de vous distribuer des documents pour le prochain témoin. Nous avons deux invités pour la dernière partie de notre réunion: il s'agit de Mme Maria Barrados, présidente de la Commission de la fonction publique du Canada, et de M. Gaston Arsenault, avocat général.
    Bonjour.

[Français]

    Monsieur le président, puisqu'il est 17 heures et non 16 h 50, aura-t-on la décence d'offrir au moins 40 minutes à Mme Barrados, ou ira-t-on jusqu'à l'impolitesse suprême de réduire de 10 minutes le temps qui lui est alloué?

[Traduction]

    Je m'en remets au comité, monsieur...

[Français]

    Je proposerais qu'elle dispose au minimum de 40 minutes, à moins que les conservateurs ne soient pas d'accord.

[Traduction]

    --si vous êtes en train de demander le consentement unanime pour accorder 40 minutes à ces témoins.

[Français]

    Je demande le consentement unanime pour que nous fassions preuve de politesse.

[Traduction]

    J'espère aussi qu'on sera poli au sein de ce comité.
    Monsieur Martin.
    Je ne crois pas que cette attaque soit nécessaire. Je commence à me sentir offusqué des insultes à l'endroit du comité qui précède tous vos commentaires. C'est donc vous qui manquez de respect à notre égard en insistant pour nous insulter de la sorte.
    Vous devez vous rappeler que je suis le président de ce comité, et que vos insultes doivent être adressées à moi.
    Monsieur Sauvageau et monsieur Martin, veuillez vous adresser au président.
    Il y a consentement unanime pour qu'on accorde 40 minutes à ces témoins.
    Je m'excuse de cette interruption. Vous pouvez commencer votre déclaration liminaire.
(1700)

[Français]

    Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant le Comité législatif chargé d'examiner le projet de loi C-2.
    Je suis accompagnée de M. Gaston Arseneault, avocat général de la Commission de la fonction publique.
    La CFP est un organisme unique indépendant de tout ministre. Nous rendons compte au Parlement. Nous protégeons l'intégrité du système de dotation de la fonction publique ainsi que la neutralité politique des fonctionnaires, en exerçant une surveillance active et en réalisant des vérifications et des enquêtes. Nous fournissons en outre des services de dotation et d'évaluation aux ministères.
    Vous trouverez plus de détails dans notre trousse d'information qui est à votre disposition.
    La nouvelle loi sur l'emploi dans la fonction publique entrée en vigueur le 31 décembre dernier réitère l'indépendance de la CFP, énonçant dans le préambule que le mérite et l'impartialité sont des valeurs qui doivent être protégées de façon indépendante. Elle consolide également le statut unique de la CFP de plusieurs manières: en mettant l'accent sur les pouvoirs de vérification de la CFP au nom du Parlement; en conférant à la CFP le pouvoir de faire des rapports spéciaux au Parlement; en prévoyant que la nomination de son président ou de sa présidente se fera par le gouverneur en conseil uniquement après approbation par résolution du Sénat et de la Chambre des communes.
    Notre travail, qui consiste à rendre à compte au gouvernement de la dotation et de son impartialité, fait que l'on appuie le projet de loi C-2, qui vise à accroître la responsabilisation du gouvernement.
    Je voudrais aujourd'hui porter à votre attention certains amendements au projet de loi C-2 qui se traduiraient par des améliorations dans deux domaines: d'abord, la manière dont nous faisons notre travail et nos rapports avec le Parlement, et l'étendue de nos responsabilités.

[Traduction]

    Tout d'abord, en ce qui concerne le personnel exonéré des ministres, l'article 103 supprime le droit de priorité qu'ont les membres du personnel exonéré des ministres de faire leur entrée dans la fonction publique, mais l'article 101 permet l'accès à plus de membres du personnel de ministre d'accéder à des processus de nominations internes pour un an. Nous sommes favorables à ce changement, car les nominations ainsi effectuées seraient fondées sur le mérite.
    Ensuite, en ce qui concerne la nomination du président, le projet de loi C-2 propose d'uniformiser la méthode de nomination aux postes offrant un appui au Parlement. Pour rendre le processus de nomination du président ou de la présidente de la CFP semblable à celui des autres postes offrant un appui au Parlement, je recommande que le projet de loi C-2 modifie la LEFP afin d'y inclure les éléments de consultation et de scrutin secret.
    En ce qui concerne la protection des vérificateurs et des enquêteurs, les personnes qui travaillent dans des organisations réalisant des vérifications et des enquêtes dont les résultats sont communiqués au Parlement sont déjà désignées, ou le seront en vertu des articles 2 et 308, comme n'ayant pas qualité pour témoigner ou ne pouvant y être contraintes, et comme bénéficiant de l'immunité en matière civile et pénale pour les mesures prises en toute bonne foi dans l'exercice de leurs fonctions. La CFP effectue elle aussi des enquêtes et des vérifications, dont les résultats sont communiqués au Parlement. Nous déposerons d'ailleurs deux rapports de vérification jeudi. De tels rapports traitent de questions personnelles et souvent litigieuses pouvant donner lieu ultérieurement à des actions en justice. Pour que nous puissions faire notre travail et protéger les personnes qui font les vérifications et les enquêtes, je recommande que le projet de loi C-2 modifie la LEFP, de sorte que les vérificateurs et enquêteurs de la CFP bénéficient de la même protection.
    Dans le même ordre d'idée, les chefs d'un certain nombre d'organisations offrant un appui au Parlement et réalisant des enquêtes et des vérifications, en vertu de l'article 146, devront refuser de divulguer, aux termes de la Loi sur l'accès à l'information, les dossiers obtenus ou créés dans le cadre des enquêtes, des examens ou des vérifications. Même s'il est vrai que les rapports de vérification et d'enquête finaux devraient être accessibles au public, les dossiers obtenus ou créés par les personnes responsables des enquêtes et des vérifications dans l'exercice de leurs fonctions peuvent contenir des observations et des commentaires trompeurs ou non corroborés. La CFP et les personnes qui font l'objet d'une vérification ou d'une enquête doivent avoir l'assurance que seules les constatations corroborées et adéquatement expliquées seront publiées. Comme le disait la vérificatrice générale lorsqu'elle a témoigné devant vous, les vérificateurs ont besoin que leurs documents soient protégés pour bien faire leur travail. Comme la CFP est mandatée par la LEFP pour réaliser des enquêtes et des vérifications, je recommande que l'article 146 du projet de loi C-2 soit amendé afin que la même protection soit accordée à nos dossiers de vérification et d'enquête.
    J'ai remarqué également que le projet de loi C-2 ne prévoit pas de mécanisme permettant au commissaire au lobbying de présenter ses rapports spéciaux au Parlement. La CFP a un problème semblable. Les modifications à la LEFP permettant à la CFP de faire des rapports spéciaux au Parlement laissaient présumer à ce moment-là que nous pouvions transmettre directement ces rapports au président ou à la présidente des deux chambres. Or, comme la loi ne le prévoit pas expressément, on nous a informé que c'était impossible. En prenant pour modèle le mécanisme de dépôt visant le commissaire à l'information, je recommande que le projet de loi C-2 modifie la LEFP afin que la CFP soit habilitée à transmettre ses rapports spéciaux directement au président ou à la présidente des deux chambres pour ce qui est du dépôt. Votre comité pourrait également profiter de l'occasion pour faire en sorte que le commissaire au lobbying soit visé par la même disposition que l'article 78.
    Le prochain amendement proposé porte sur l'article 106 concernant certaines nominations effectuées par le gouverneur en conseil, comme celles des sous-ministres. À l'heure actuelle, la plupart des nominations à ces postes sont visées par une loi ou une autre. Un petit nombre d'entre elles ne le sont cependant pas, par exemple, s'il y a restructuration gouvernementale et qu'aucune loi n'a encore été adoptée. Habituellement, lorsque le gouverneur en conseil souhaite faire une nomination pour laquelle il n'existe pas de disposition législative, il veille à soustraire la personne visée de l'application de la LEFP, exception faite des dispositions relatives aux activités politiques. Le gouverneur en conseil de même que la CFP doivent alors donner leur approbation. Les recours à ce décret d'exemption sont consignés dans le rapport annuel de la CFP. Dans le nouveau régime axé sur le mérite instauré par la LEFP nouvellement promulguée, le fait que la CFP soustrait ces nominations de l'application du mérite m'inquiète, et je favoriserais plutôt une autre proposition.
(1705)
    L'article 106 officialise le processus actuel; or, il englobe un éventail plus grand de postes que ce qui se fait présentement. Le fait de soustraire les nominations à ces nouveaux postes à l'application de la LEFP pourrait constituer une menace pour le principe du mérite sur lequel se fonde la fonction publique. Je recommande que cet article soit amendé, d'abord afin de restreindre le nombre de postes visés en excluant les postes d'administrateur général délégué ou des postes de niveau équivalent et de conseiller spécial d'un administrateur général dans la version anglaise afin que celle-ci concorde avec la version française; et ensuite, que la partie 7 de la LEFP traitant des activités politiques s'applique, protégeant ainsi l'impartialité politique de ces nominations.
    Enfin, l'article 119 établit le poste de directeur parlementaire du budget à la Bibliothèque du Parlement. À l'heure actuelle, le personnel de la Bibliothèque, du Sénat et de la Chambre des communes peuvent prendre part à des processus de nomination interne à la fonction publique, en raison d'un instrument qui est toujours en place en vertu de l'ancienne LEFP. Conformément à la nouvelle LEFP, on nous a informés que nous ne pouvions plus procéder de la sorte si la loi n'est pas modifiée. Après avoir consulté les chefs de ces organisations, je propose que le projet de loi C-2 modifie la LEFP afin que ces personnes, qui ont beaucoup à offrir à la fonction publique, puissent participer à ces processus fondés sur le mérite.

[Français]

    Monsieur le président, la CFP est un élément important du cadre de responsabilisation sur lequel s'appuie notre système de gouvernement responsable. Notre travail, qui consiste à rendre compte au gouvernement de la dotation et de son impartialité, va dans le même sens que l'esprit du projet de loi. Nos recommandations visent à l'améliorer en consolidant notre capacité de réaliser des vérifications et des enquêtes, et en renforçant les liens que nous entretenons avec le Parlement.
    J'aimerais déposer devant le comité les propositions d'amendement à cet effet, ainsi que les autres qui portent sur un petit nombre de nominations par le gouverneur en conseil et sur la mobilité du personnel parlementaire.
    Je vous remercie de votre attention et je répondrai avec plaisir à toutes vos questions.

[Traduction]

    Merci pour cet exposé, madame Barrados. Le comité a quelques questions pour vous.
    Monsieur Murphy

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'ai deux questions à poser. La première concerne le personnel exclu des ministres, dont il est fait mention à la page 2 de votre présentation.
    Je sais que l'article 103 supprime la priorité qu'ont les membres du personnel exclu des ministres d'être embauchés dans la fonction publique. Est-ce que cela signifie que ces gens ne feront pas l'objet de favoritisme? J'ai une question simple à vous poser, car je suis un nouveau député. Est-ce une pratique courante? Cela pose-t-il un problème moral de partisanerie?
(1710)
    Notre objectif est d'avoir une fonction publique non partisane. Nous avons fait une étude afin de connaître le nombre de personnes qui ont utilisé cette priorité de nomination. Le nombre n'est pas très élevé: environ 25 à 40 personnes par année au maximum.
    Les données proviennent des bureaux des ministres. Nous croyons que ces gens possèdent une bonne connaissance de ce que font les ministres. Des gens ont été embauchés lorsqu'il y a eu un changement de gouvernement, par exemple il y a 12 ans, et, plus récemment, lors du changement de leadership au Parti libéral. Il ne s'agit pas d'un grand nombre de personnes. C'est plutôt une question de perception.
    Cette question relève de la CFP, laquelle s'assure que toutes les personnes qui sont embauchées dans la fonction publique possèdent les qualifications requises.
    J'ai une question ou des commentaires à formuler à propos de la protection des documents de travail. Je suis d'accord sur ce sujet. Nous avons reçu non seulement des commentaires de la vérificatrice générale à cet effet, mais aujourd'hui, la Société des comptables en management du Canada nous a fait parvenir une lettre en ce sens.
     Je comprends que les documents de travail des comptables doivent être protégés. Cependant, la loi et votre présentation mentionnent qu'il y aurait non seulement des vérifications, mais aussi à des enquêtes.

[Traduction]

    Nous faisons aussi des enquêtes — qui sont plus que des vérifications, beaucoup plus que de simples recherches faites par des vérificateurs ou des comptables — mais on dirait que ces enquêtes seront menées par des personnes qui ne sont pas des vérificateurs ou des comptables. Je sais que M. Vieweg parle au nom de la CMA et que vous représentez un groupe plus considérable, je pense, qui ne sont pas tous comptables — ou vérificateurs.
    Si ces papiers restent inaccessibles pendant un certain temps, votre groupe, le gouvernement en fait, n'aura pas accès à des opinions préliminaires qui doivent être étoffées. J'imagine que cela s'appliquera alors à vos employés qui ne sont ni vérificateurs ni comptables. Êtes-vous d'accord avec cela?
    Oui. Le libellé que nous proposons est le même que ce que l'on retrouve dans le projet de loi. Lorsque la vérificatrice générale était ici, elle a parlé évidemment des vérifications. Mais les enquêteurs ont le même problème. L'application de cette disposition au commissaire à la vie privée, au commissaire à l'information, au commissaire aux langues officielles... Ils font tous des enquêtes, lesquelles sont menées normalement par des personnes respectueuses des règles admises. Lorsqu'ils réunissent des renseignements, ils sont tous obligés de vérifier les faits.
    Il s'agit cependant de disciplines différentes. Ceux qui font les vérifications sont formés comme vérificateurs. Ceux qui mènent les enquêtes sont formés comme enquêteurs et sont généralement avocats.
    Monsieur Sauvageau.

[Français]

    Madame Barrados, monsieur Arseneault, merci et bienvenue. Je tiens à vous remercier particulièrement pour la liste des amendements que vous nous avez proposés. Je crois que c'est très enrichissant. Il y a des gens qui disent, par l'intermédiaire des journaux, que ce n'est pas important d'entendre des témoins. En effet, il y a quelques députés, qu'ils soient du Nouveau Parti démocratique ou du Parti conservateur, qui disent que la présence de témoins ne nous aidera pas à bonifier le projet de loi C-2. Or, votre présence, ainsi que la liste des amendements que vous nous proposez, démentent cette affirmation.
(1715)

[Traduction]

    Monsieur Sauvageau, vous avez demandé plus tôt aux membres du comité de se montrer courtois et polis. Nous sommes tous bien élevés, et je vous prierais de ne pas provoquer les autres membres du comité.

[Français]

    Je respecte votre décision, monsieur le président. Je ne pensais pas qu'il était impoli de citer des propos des membres de ce comité, propos qui ont paru dans le journal The Hill Times. Je vais faire attention. De toute façon, je l'ai fait.
    Madame Barrados, vous avez été directement impliquée dans l'étude du projet de loi C-11 de la session précédente. À un certain moment donné, vous étiez même censée devenir la fameuse commissaire, en vertu d'une ancienne mouture du projet de loi C-11. On l'a modifié pour créer un commissaire indépendant.
    Puisque vous nous avez accompagnés tout au long du processus et de l'étude du projet de loi C-11, croyez-vous que l'on pourrait le promulguer immédiatement, pour assurer un filet de protection minimum, ou cela serait-il trop compliqué?
    C'est une question difficile pour moi. Il est vrai que j'ai été impliquée dans la préparation du premier projet de loi, mais maintenant, je ne suis pas impliquée du tout. Je pense que c'est une question d'opinion. Il revient aux parlementaires de prendre une décision à cet égard. Je pense qu'il y a une vraie difficulté parce qu'une proposition existe déjà. Or, il y a une autre proposition devant nous et il y aura évidemment des questions de transition et de mise en oeuvre. Nous avions un modèle et nous en aurons un autre. Il s'agit de savoir quels risquent les gens veulent prendre.
    Monsieur Shapiro, le premier témoin que nous avons entendu aujourd'hui, nous a proposé un amendement qui correspond à une disposition incluse dans le projet de loi C-11. En effet, lorsque nous avons fait l'étude du projet de loi C-11, les membres du comité ont eu l'honnêteté de dire que le projet de loi n'était pas parfait et qu'il devrait être révisé tous les cinq ans. Je crois que cet amendement ne fait pas partie de votre liste d'amendements. Cependant, j'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
    Selon vous, est-ce que que c'est un amendement supplémentaire qu'on pourrait ajouter à vos amendements, de sorte qu'on ferait avec le projet de loi C-2 ce que nous avons fait avec le projet de loi C-11, c'est-à-dire une révision tous les cinq ans?
    En ce qui concerne la CFP, cet élément est inclus dans la loi actuelle. À mon avis, c'est une bonne idée parce que cela donne l'occasion aux gens qui font le travail d'avoir une discussion avec les parlementaires et de voir si les choses fonctionnent comme ils le souhaitent.
    Pourriez-vous nous dire quelles seraient les incidences du projet de loi C-2 sur le rôle de la Commission de la fonction publique? Est-ce que votre poste — non pas votre personne, mais votre poste — et l'institution de la Commission de la fonction publique perdraient de leur lustre et de leur importance si on appliquait le projet de loi C-2?
    Non. À mon avis, il y a un changement relativement aux gens venant d'un bureau de ministre, et je suis d'accord. Mes suggestions sont des améliorations. Si on adopte une approche parallèle pour tous ces bureaux qui donnent un soutien au Parlement, cela va dans le sens de mes suggestions.
    Les autres changements sont un peu techniques et peuvent avoir une incidence, mais je ne peux pas dire que ce serait une incidence énorme. C'est une incidence importante pour moi et la CFP.
    Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres questions à poser.

[Traduction]

    Monsieur Martin.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame Barrados. C'est un plaisir de vous revoir. Je tiens à vous remercier de ces recommandations fort utiles.
    Jusqu'à présent, la grande majorité des témoins ont présenté au comité des modifications bien conçues et raisonnées dont un bon nombre seront sans doute intégrées au projet de loi. Je pense que cela a été utile de prévoir suffisamment de temps pour pouvoir entendre un nombre si important de témoins qui tenaient à comparaître devant le comité. Nous en avons vraiment tiré parti.
    J'aimerais que vous m'éclairiez sur certains points précis. Est-ce que vous dites qu'à l'heure actuelle le personnel de la Bibliothèque, du Sénat et de la Chambre des communes ne pourront peut-être pas postuler pour le poste de directeur parlementaire du budget de la Bibliothèque du Parlement si la modification que vous proposez n'est pas retenue?
(1720)
    C'est lié à la façon de travailler du personnel et de sa capacité de déménager. C'est-à-dire, la capacité des fonctionnaires de déménager à ces bureaux et d'avoir la possibilité de réintégrer la fonction publique. Nous avons dû recourir à certaines dispositions en vertu de l'ancienne Loi sur l'emploi dans la fonction publique. On m'avait avisée qu'une telle modification, que nous tenions à apporter au nouveau régime, ne serait pas possible sans modifier la Loi. Puisqu'on parle de cette question — qui touche le bureau du budget — j'ai cru bon de soulever cet élément, car il aurait des conséquences sur ce bureau du budget également.
    Je suis content que vous en ayez parlé. C'est une conséquence imprévue. Je suis content que vous êtes tombée là-dessus ou que quelqu'un vous en a avisée. C'est très utile.
    En ce qui concerne l'élaboration et la protection des documents de travail et des propositions de vérification, etc., je ne comprends pas tout à fait les arguments soulevés par vous et la vérificatrice générale, à savoir que ces documents ne devraient pas être disponibles, surtout après la publication de la vérification finale. Pourquoi ne devrait-on pas avoir accès à l'ébauche ou au processus qui les aura permis de rédiger la vérification finale? Si ça ressemble un peu à une équation mathématique, eh bien, on devrait obtenir un point pour la bonne réponse et un autre pour l'équation, c'est-à-dire les étapes que vous avez dues suivre en cours de route. Pourquoi ne pas vouloir divulguer de tels renseignements?
    Lorsqu'on fait une vérification ou une enquête, ce n'est pas du tout comme un procès judiciaire où il existe des règles de preuve et un processus ouvert qui vous permet d'avoir accès à ces éléments de preuve.
    Dans le cadre d'une vérification ou d'une enquête, on essaie de recueillir autant de renseignements que possible. Nous nous entretenons avec beaucoup de gens. Certains renseignements sont exacts, d'autres inexacts ou trompeurs et d'autres encore tout à fait ce qu'il faut. Dans un processus de vérification, il faut savoir gérer ces renseignements et s'en tenir à l'essentiel. Alors, il s'agit de se dire qu'on a entendu un tas de choses mais qu'elles ne sont pas toutes vraiment pertinentes pour les fins de l'enquête. Alors, vous faites le tri, et ensuite vous procédez à la confirmation des données.
    Si vous publiez tous ces documents et toutes les étapes suivies, vous finissez en fait par diffuser beaucoup de renseignements qui ne sont pas nécessairement tous exacts et n'assurent aucune protection aux gens, aux systèmes ou aux organismes qui ont peut -être été nommés. Ils n'auraient aucun recours; les renseignements seraient disponibles. Les vérificateurs et les enquêteurs auraient, par conséquent, de la difficulté à continuer de faire leur travail, puisque les gens deviendraient très prudents — ils vont s'imaginer que tout ce qu'ils disent à un vérificateur risque d'être diffusé à grande échelle. Cela n'aura pas l'effet escompté, qui est de favoriser la divulgation complète et la transparence auprès des vérificateurs. Moi, j'aurais alors des ennuis comme chef d'un organisme, car j'aurai à répondre de tous ces documents, alors qu'en réalité le processus est conçu pour me permettre de ne répondre que des résultats finaux.
    C'est très bien soutenu. Je comprends de toute façon ce que vous voulez dire.
    La troisième chose concerne le personnel exonéré des ministres. Je suis heureux de voir que le projet de loi C-2 prévoit des mesures pour traiter de la question. Je sais que beaucoup de fonctionnaires sont probablement très déçus d'avoir travaillé pendant toute leur carrière pour se rendre au niveau EX et de voir qu'un poste est comblé par une mutation latérale d'un bureau de ministre. Donc je suis heureux de voir la fin de cette pratique.
    Pouvez-vous nous donner une idée, pour commencer, de l'origine de cette pratique? Quand a-t-elle a été mise en vigueur, et à peu près combien de personnes en poste actuellement seraient passées par ce processus? Est-ce possible de le savoir?
    Ils ne sont pas si nombreux. Nous avons effectué une étude qui se penchait sur les 11 dernières années, et environ 243 personnes ont été mutées de cette façon sur cette période.
(1725)
    Je ne pensais pas que vous seriez en mesure de me répondre avec telle précision. Oh là là!
    En fait, nous sommes en train de renforcer notre capacité statistique.
    Il y aussi le fait qu'il y a un très petit nombre qui deviennent EX. Ils ont tendance à commencer au niveau de cadre supérieur, de professionnel de haut niveau. En général, ils restent; la moitié ont tendance à rester dans les mêmes ministères.
    Nous pouvons nous assurer qu'ils sont qualifiés, mais il existe une perception que cela compromet l'impartialité. C'est une perception, mais je crois qu'il s'agit d'une perception importante. Je n'ai aucune difficulté avec la proposition de rechange.
    C'est-à-dire?
    De permettre au personnel des ministres de participer à des concours internes.
    D'accord, donc ce serait fondé sur le mérite et ils pourraient participer à des concours ouverts...
    Des concours fondés sur le mérite.
    Et quel est le processus pour un an?
    Ils auraient droit de se présenter à des concours internes pendant un an.
    Après avoir quitté le bureau du ministre.
    C'est exact.
    Maintenant, l'autre question que vous avez posée portait sur l'origine de cette pratique. J'ai demandé aux avocats de faire des recherches, et ça remonte d'assez loin.
    Monsieur Arseneault, peut-être que vous pouvez expliquer. Cela remonte aux années 20.
    Sans blague? J'espérais qu'on aurait pu mettre ça sur le dos des anciens conservateurs. Étaient-ils des conservateurs pendant les années 20?
    Cela remonte aux années 20, quand on accordait un genre de privilège à ceux qui entraient dans la fonction publique. Je ne suis pas certaine du parti qui formait le gouvernement à ce moment, mais le libellé actuel sur les droits de priorité est entré en vigueur pendant les années 60.
    Le temps s'est écoulé, voilà le timbre.
    Monsieur Petit.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, madame Barrados. J'ai trois questions très simples à vous poser.
     Premièrement, vous demandez qu'on adopte un amendement afin que l'article 146 du projet de loi précise que le président de la Commission de la fonction publique soit au même niveau que le vérificateur général du Canada, le commissaire aux langues officielles, etc. Vous demandez qu'on ajoute à la liste le président de la Commission de la fonction publique. Je veux suivre votre raisonnement, alors je vous demande pourquoi.
     Deuxièmement, d'entrée de jeu, vous avez mentionné que vous tentiez de faire en sorte que la fonction publique soit non partisane. À ce que je sache, peu importe de quelle fonction publique on parle, plusieurs fonctionnaires sont membres de partis politiques et de syndicats. Or, je ne pense pas qu'ils se départissent de leur partisanerie en entrant travailler le matin. Ils vivent avec elle; cela fait partie de leur réalité. J'essaie donc de comprendre comment vous pouvez être en mesure de dire que le système doit être non partisan. Je comprends que vous ne parlez que du travail, puisque bien des gens, dans le cours d'une journée, sont à la fois membres d'un syndicat et d'un parti politique, travaillent le soir ou le jour, selon les cas, et sont peut-être plus partisans que les partisans politiques eux-mêmes.
     Comment conciliez-vous votre travail avec ce que propose le projet de loi C-2? Comment ce projet de loi pourrait-il régler ce problème? À la lumière de ce que vous avez vu dans ce projet de loi, êtes-vous capable de démontrer qu'il serait assez fort pour enlever la partisanerie que l'on traîne avec soi tous les matins lorsqu'on rentre au travail parce que l'on est membre d'un syndicat ou d'un parti politique, etc., et que l'on travaille huit heures au gouvernement, mais que plusieurs heures ne nous appartiennent pas?
    Merci de la question.
    L'amendement demandé relativement au processus de nomination ne correspond pas à une demande d'occuper la même position que d'autres. Présentement, en vertu de la LEFP, la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, et les lois qui régissent mon organisation, il faut l'approbation des deux Chambres pour procéder à la nomination du président. Il y a deux éléments différents dans le processus proposé dans le projet de loi C-2 et dans la LEFP et les propositions: les consultations, qui ont été faites dans mon cas, et la manière de voter.
    Je propose que le processus soit le même. Cela ne vise pas à mettre la CFP au même niveau que les autres, mais plutôt à faire en sorte que le processus de nomination soit le même.
    Deuxièmement, en ce qui concerne la partisanerie, c'est inclus dans la LEFP. C'est une de nos responsabilités. Vous avez raison de dire que ce n'est pas absolu. Évidemment, les gens peuvent avoir des idées partisanes, mais ils doivent faire leur travail de manière non partisane. En vertu de la LEFP, nous avons l'obligation de gérer ce système.
    Peut-être M. Arseneault veut-il ajouter un mot à propos du système en place.
(1730)
    On pourrait peut-être seulement ajouter que la nouvelle Loi sur l'emploi dans la fonction publique, qui est entrée en vigueur au mois de décembre 2005, comporte de nouvelles dispositions portant sur les activités politiques. Il y a donc tout un système en place dont la commission est responsable et qui vient d'être mis sur pied en vertu de cette nouvelle loi. C'est la raison pour laquelle il n'est probablement pas nécessaire de traiter de cet aspect dans le projet de loi C-2.
    D'accord. Merci.

[Traduction]

    Monsieur Martin, vous pouvez poser des questions à nouveau. Vous avez cinq minutes.
    Quel luxe!
    Je n'utiliserai peut-être pas tout mon temps, mais je m'intéresse à la Loi sur l'accès à l'information et à votre recommandation à l'article 146. Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles les autres officiers du Parlement et commissaires sont exclus de cette obligation de divulguer.
    Vous voyez-vous en train de jouer exactement le même rôle, ou est-ce que vous utilisez les mêmes arguments, par exemple, que la vérificatrice générale? S'il s'agit de renseignements que vous avez obtenus pendant le déroulement d'une enquête, est-ce la même sensibilité qui vous pousse à chercher cet amendement?
    C'est la même sensibilité, mais je le demande uniquement pour les vérifications et les enquêtes. L'accès à l'information s'applique pour le reste de mon organisme, et je n'ai aucune difficulté avec cela. C'est vraiment uniquement pour les volets de l'organisme qui s'occupent de vérifications et d'enquêtes.
    La proposition rédigée laisse la Commission de la fonction publique dans une position anormale, et c'est pourquoi nous le demandons. Il existe une protection pour la vérification interne avec un régime. On identifie la protection pour les vérificateurs externes. Il n'y a rien pour la Commission de la fonction publique, parce que nous ne sommes pas des vérificateurs externes non plus. C'est pourquoi je crois qu'il est important pour nous d'avoir cette protection, parce que nous ne sommes pas couverts, même s'il semble y avoir une intention de nous fournir cette protection dans le projet de loi.
    Ce sont toutes mes questions, monsieur le président. Si vous voulez, je pourrais partager un peu de mon temps.
    Non.
    Y a-t-il des commentaires?
    Monsieur Sauvageau.

[Français]

    Madame Barrados, vous avez parlé brièvement tout à l'heure des nominations des ex-titulaires de charge publique. J'aimerais bien comprendre. Au paragraphe 35(1), il est écrit:
    35.(1) Il est interdit à tout ex-titulaire de charge publique principal de conclure un contrat de travail ou d’accepter une nomination au conseil d’administration d’une entité avec laquelle il a eu des rapports officiels directs et importants au cours de l’année ayant précédé la fin de son mandat, ou d’accepter un emploi au sein d’une telle entité.
    Selon ce libellé, cela veut-il dire qu'un ministre de la Justice du gouvernement fédéral, une fois élu, n'a le droit de plaider devant aucun tribunal pendant un an?
(1735)
    Je n'ai pas examiné cet article Je ne sais pas si M. Arseneault pourrait vous donner une clarification. Je n'ai pas beaucoup porté attention à cette partie de la loi.
    En fait, on dit qu'un titulaire de charge publique ne peut accepter un emploi d'une entité avec laquelle il a eu des rapports officiels. Or, le ministre de la Justice a des rapports officiels ou indirects avec les tribunaux lorsqu'il fait des lois. S'il est défait lors d'une élection, comme il est un avocat, il peut aller plaider des causes devant un tribunal. Mais puisqu'il a déjà eu des rapports officiels avec les tribunaux, il ne pourrait pas le faire.
    Mon interprétation du paragraphe en question est-elle la bonne, ou suis-je dans l'erreur?
    Premièrement, monsieur Sauvageau, je n'ai pas eu la chance d'analyser la chose à fond.
    C'est très bien. Je vous remercie. J'avais entendu parler des nominations pour des titulaires de charge publique et je croyais que... C'est très bien, nous allons tenter d'obtenir une clarification. Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Voilà qui semble conclure notre période de questions. Vous avez été très méticuleux.
    Madame Barrados, monsieur Arsenault, je vous remercie beaucoup d'être venus.
    Merci beaucoup, mesdames et messieurs.
    La prochaine réunion aura lieu à 15 h 30 dans cette même salle demain, la salle 253-D. La séance est levée.