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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 1 novembre 2005




Á 1100
V         Le président (M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.))
V         M. Timothy Page (président, Association des industries de défense du Canada)
V         Le président
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)
V         M. Timothy Page
V         Le président
V         M. Gordon O'Connor (Carleton—Mississippi Mills, PCC)

Á 1105
V         Le président
V         M. Gilles-A. Perron (Rivière-des-Mille-Îles, BQ)
V         Le président
V         M. Timothy Page

Á 1110

Á 1115
V         Le président
V         M. Gordon O'Connor
V         Le président
V         M. Gordon O'Connor
V         Le président
V         M. Peter Boag (président et directeur général, Association des industries aérospatiales du Canada)

Á 1120

Á 1125

Á 1130

Á 1135
V         Le président
V         M. Gordon O'Connor
V         M. Peter Boag
V         M. David Stapley (vice-président directeur, Association des industries de défense du Canada)
V         M. Gordon O'Connor
V         M. Timothy Page

Á 1140
V         M. Peter Boag
V         M. Gordon O'Connor
V         Le président
V         M. David Stapley
V         Le président
V         M. Peter Boag
V         Le président
V         M. Ron Kane (vice-président, Association des industries aérospatiales du Canada)

Á 1145
V         Le président
V         M. Claude Bachand
V         M. Timothy Page
V         M. Peter Boag

Á 1150
V         M. Claude Bachand
V         M. Timothy Page
V         M. Claude Bachand
V         M. Timothy Page
V         M. Claude Bachand
V         M. Peter Boag
V         Le président

Á 1155
V         L'hon. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Lib.)
V         M. Ron Kane
V         L'hon. Keith Martin
V         M. David Stapley
V         Le président
V         M. David Stapley

 1200
V         M. Ron Kane
V         L'hon. Keith Martin
V         M. David Stapley

 1205
V         L'hon. Keith Martin
V         Le président
V         M. Peter Boag
V         Le président
V         M. Rick Casson (Lethbridge, PCC)
V         Le président
V         M. Rick Casson

 1210
V         M. Timothy Page
V         M. Ron Kane
V         Le vice-président (M. Claude Bachand)
V         L'hon. Larry Bagnell (Yukon, Lib.)

 1215
V         M. Peter Boag
V         M. Timothy Page
V         Le vice-président (M. Claude Bachand)
V         L'hon. Larry Bagnell
V         M. Peter Boag

 1220
V         Le vice-président (M. Claude Bachand)
V         M. Gilles-A. Perron
V         M. Peter Boag
V         M. Gilles-A. Perron
V         M. Peter Boag

 1225
V         M. Gilles-A. Perron
V         M. Peter Boag
V         M. Timothy Page
V         Le président
V         M. Gilles-A. Perron
V         M. Timothy Page
V         M. Gilles-A. Perron
V         M. Ron Kane
V         Le président
V         M. Wajid Khan (Mississauga—Streetsville, Lib.)

 1230
V         M. Peter Boag
V         M. Timothy Page

 1235
V         M. David Stapley
V         M. Wajid Khan
V         Le président
V         M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC)
V         Le président
V         M. Timothy Page
V         M. Peter Boag

 1240
V         M. Dave MacKenzie
V         M. Peter Boag
V         M. Timothy Page
V         M. David Stapley
V         Le président
V         M. Anthony Rota (Nipissing—Timiskaming, Lib.)
V         M. David Stapley
V         M. Anthony Rota
V         M. David Stapley

 1245
V         M. Ron Kane
V         Le président
V         M. David Stapley
V         Le président
V         M. Peter Boag
V         Le président

 1250
V         M. Rick Casson
V         Le président
V         M. Rick Casson
V         Le président
V         M. Rick Casson
V         Le président
V         M. Rick Casson
V         Le président
V         L'hon. Keith Martin
V         Le président

 1255
V         M. Rick Casson
V         Le greffier du comité
V         Le président
V         M. Claude Bachand
V         Le président
V         Le greffier
V         Le président
V         M. Rick Casson
V         Le président
V         M. Rick Casson
V         Le président
V         L'hon. Keith Martin
V         M. Gordon O'Connor
V         L'hon. Keith Martin
V         M. Gordon O'Connor
V         Le président
V         Le greffier
V         Le président
V         Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, PCC)
V         Le greffier
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants


NUMÉRO 055 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1 novembre 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

Á  +(1100)  

[Traduction]

+

    Le président (M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le comité le 24 février 2005, le comité reprend son examen des questions touchant la politique de la défense.

    Je souhaite la bienvenue à nos invités qui témoignent aujourd'hui devant le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants. Nous accueillons des représentants de l'Association de l'industrie de la défense du Canada, nommément M. Timothy Page, président, et M. David Stapley, vice-président directeur.

    Nous accueillons aussi des représentants de l'Association des industries aérospatiales du Canada, nommément M. Peter Boag, président et directeur général, et M. Ron Kane, vice-président.

    Vous avez environ dix minutes pour faire votre exposé. Ensuite, les membres du comité vous poseront des questions. Nous ferons trois tours de table. Au premier tour, les interventions dureront sept minutes pour les questions et les réponses. Le deuxième tour sera semblable mais le temps sera limité à cinq minutes, de même qu'au troisième tour.

    Tim, vous avez la parole.

[Français]

+-

    M. Timothy Page (président, Association des industries de défense du Canada): Merci, monsieur le président. Je vous prie de nous excuser, nous n'avons pu soumettre nos documents avant cette réunion. Je vous demande la permission de les distribuer afin que les membres de votre comité puissent les consulter pendant notre présentation. Malheureusement, étant donné que nous les avons terminés en fin de semaine, nous n'avons pas eu le temps de les faire traduire.

[Traduction]

+-

    Le président: Je vais demander aux membres du comité s'ils acceptent ces conditions. Parfois, les circonstances empêchent de faire traduire un document. Nous avons toujours demandé qu'il soit dans les deux langues officielles.

    Je vais demander aux membres du comité de se prononcer là-dessus.

    Monsieur Bachand.

[Français]

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le président, nous sommes ici depuis plusieurs années, et on nous sert chaque fois le même argument. Pour cette raison, nous refusons le dépôt des documents.

+-

    M. Timothy Page: On n'a pas fait mention du fait que c'est un comité devant lequel on doit se présenter dans les deux langues. On nous a invité à ce comité il y a à peine 10 jours. On n'était pas en mesure de produire un document et de le faire traduire à temps. Toutefois, j'accepte la décision du comité, évidemment. À mon avis, il serait préférable que les gens aient accès à notre document écrit, en plus d'entendre ce que j'ai à dire.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    La parole est à M. O'Connor.

+-

    M. Gordon O'Connor (Carleton—Mississippi Mills, PCC): Je ne pense pas que nous ayons besoin du texte écrit. Nous écoutons les exposés et, par la suite, nous pouvons nous reporter à des documents une fois traduits. Mais ce sont les exposés des témoins qui sont importants.

Á  +-(1105)  

+-

    Le président: On vient d'entendre deux points de vue semblables. J'incline à être d'accord avec M. O'Connor et M. Bachand, mais je tiens compte de votre demande.

    Si je me rappelle bien, monsieur Page, vous avez dit que vous seriez disposé à déposer le document après l'exposé. Compte tenu de cette proposition, les membres du comité ont-ils des commentaires à faire sur l'opportunité de permettre au témoin de distribuer le document après la réunion?

    Notre greffier vient de m'informer que le document a été reçu sous forme électronique et qu'on est en train de le traduire.

    Monsieur Perron.

+-

    M. Gilles-A. Perron (Rivière-des-Mille-Îles, BQ): Dans ce cas, il n'y a pas de problème.

[Français]

    Si vous le traduisez en français, il n'y a aucun problème.

[Traduction]

+-

    Le président: Il est en cours de traduction. Je dois seulement obtenir la permission des membres du comité pour accepter la proposition de M. Page de distribuer le document à la fin de la séance, même s'il est en anglais seulement.

    C'est accepté. Y a-t-il d'autres commentaires?

    Monsieur Page, vous avez la parole.

[Français]

+-

    M. Timothy Page: Je vous remercie, monsieur le président. C'est avec plaisir que nous nous trouvons devant vous aujourd'hui. Mon nom est Tim Page. Je suis le nouveau président à temps plein de l'association. Je suis accompagné de David Stapley qui est un membre bénévole de notre conseil d'administration et qui est président de DRS Technologies Canada.

[Traduction]

    L'AIDC comparaît devant vous à un moment dynamique dans l'évolution des Forces canadiennes. La publication de l'énoncé de la politique de défense du gouvernement fédéral; les travaux du Sénat sur les priorités en matière de défense et de sécurité; la création de SPPCC; la plus forte augmentation des dépenses consacrées à la défense et à la sécurité en 40 ans, et peut-être les plus fortes dépenses des 30 prochaines années; et les changements fondamentaux dans l'organisation des Forces canadiennes sont tous d'importants indicateurs d'un changement de perspective au gouvernement fédéral dans le domaine de la défense et de la sécurité.

    Par ailleurs, nous témoignons devant vous au moment où nous nous apprêtons à présenter au gouvernement une demande à hauteur de plusieurs milliards de dollars en vue de répondre aux nouveaux besoins des forces armées, et c'est donc pour nous une période remplie d'attentes et d'espoir.

    L'intérêt manifesté par votre comité envers l'acquisition de matériel de défense et les stratégies et procédures entourant ces acquisitions est donc à la fois opportun et très important. Le processus d'acquisition suscite énormément d'intérêt parmi les membres de l'AIDC. Nous croyons et nous espérons que notre exposé vous encouragera à croire que c'est une affaire d'une grande importance pour notre pays dans son ensemble.

[Français]

    Permettez-moi d'illustrer quelques éléments de notre démarche. Notre association représente plus de 440 membres particuliers parmi lesquels on retrouve des entreprises canadiennes de sécurité et de la défense. Ces membres desservent non seulement les marchés de la défense, mais aussi les marchés commerciaux. Les exportations de l'industrie représentent environ 50 p. 100 de son revenu, et le marché américain représente 80 p. 100 de ces exportations.

[Traduction]

    Parmi nos membres, on trouve des compagnies de défense et de sécurité, depuis des spécialistes de l'intégration de systèmes à grande échelle jusqu'à de petits intervenants occupant des créneaux d'où émergent des innovations et de nouvelles technologies qui sont avantageuses à la fois pour les acheteurs militaires et pour le marché commercial.

    Le Canada est considéré comme un pays qui possède

[Français]

si vous me passez l'expression,

[Traduction]

une capacité mondiale dans un certain nombre de domaines associés à la défense et à la sécurité, notamment l'électronique de défense, les technologies de surveillance, de reconnaissance, de renseignement et de détection, l'habillement protecteur contre les agents chimiques et biologiques, les systèmes de combat naval, et les systèmes et sous-systèmes de munitions et d'avionique, entre autres.

[Français]

    Plus de 70 000 personnes travaillent dans les industries de la défense et de la sécurité. Les revenus générés par nos industries sont d'environ 7 milliards de dollars par année.

[Traduction]

    Nous estimons que les membres de l'association fournissent actuellement environ 70 p. 100 du matériel et des services en matière de défense au Canada.

    Le message clé que nous voulons vous transmettre aujourd'hui, au moment où le comité se penche sur les marchés publics dans le domaine de la défense, est que nous voudrions vous demander de réfléchir à deux questions clés: premièrement, quel est le meilleur moyen de profiter des acquisitions de matériel de défense pour atteindre des objectifs généraux du gouvernement, sans pour autant compromettre la mission opérationnelle énoncée dans le mandat des forces armées; et deuxièmement, quelles améliorations d'ordre pratique pourraient être apportées aux procédures d'acquisition de matériel de défense pour promouvoir la transparence, l'équité, la reddition de comptes, la juste valeur marchande et l'optimisation des dépenses des deniers publics, et un rendement juste pour les fournisseurs.

    Comme nous l'avons dit ci-dessus, nous vous présentons cet exposé à un moment que nous considérons comme un point tournant dans l'histoire de l'acquisition de matériel de défense au Canada. Nous encourageons le comité et le gouvernement à ne pas perdre cette occasion de faire profiter le Canada d'une véritable valeur stratégique dans les domaines les plus divers, depuis les besoins purement militaires jusqu'aux gains commerciaux, industriels et technologiques, en passant par la croissance de la productivité et la création d'emplois.

    Notre exposé s'articule donc autour de deux thèmes principaux.

    Premièrement, vous devez réfléchir et agir de manière stratégique en ayant à l'esprit l'ensemble des objectifs économiques et industriels du gouvernement quand vous prenez des décisions en matière de matériel de défense, sans pour autant compromettre la mission opérationnelle établie des forces armées. Cette stratégie, à notre avis, engloberait des objectifs dans les domaines suivants, mais cette liste n'est pas limitative: commerce, innovation, productivité et industrie.

    Nous croyons que ces objectifs peuvent être atteints sans compromettre les exigences des militaires en matière de défense et de sécurité, ce qui devrait déboucher sur un raccourcissement des délais pour les acquisitions, ce qui serait une bonne nouvelle pour les Forces canadiennes. En bout de ligne, cela avantagera également les contribuables et l'industrie en réduisant les coûts.

    Pour atteindre ces résultats, nous proposons les mesures suivantes.

    Premièrement, veiller à mettre en place une politique et des processus efficaces sur le plan de la mise en oeuvre, de la surveillance et de la vérification, le tout approuvé par le Cabinet. Nous croyons que le cadre politique gouvernemental pour mettre en oeuvre des décisions stratégiques est déjà établi dans les grandes lignes. Les outils sont déjà à la disposition du gouvernement, qu'il s'agisse des exemptions au titre de la sécurité nationale, de la politique des retombées industrielles et régionales, des lignes directrices du Conseil du Trésor, ou d'autres encore. Cependant, nous soutenons que l'interprétation et la mise en oeuvre de cette politique au niveau opérationnel dans le cas d'acquisitions antérieures auraient pu déboucher sur de meilleurs résultats.

    Deuxièmement, établir, de concert avec l'industrie, un processus permettant d'évaluer la capacité industrielle canadienne au début du processus d'acquisition, c'est-à-dire à l'étape du concept.

    Troisièmement, intégrer le rôle d'un conseiller extérieur indépendant, qui s'ajoute aux experts internes du MDN, chargé de donner des conseils en matière d'acquisition et de veiller à l'uniformité dans la direction et la gestion du programme.

    Quatrièmement, lorsqu'il existe une capacité canadienne légitime et que le secteur technologique cadre avec les objectifs généraux du gouvernement, il y aurait lieu de retenir les services de l'industrie canadienne. Nous croyons que cette approche devrait devenir la norme plutôt que l'exception. Lorsque la stratégie impose de s'approvisionner à l'étranger, il faudrait veiller à ce que les retombées ciblent des secteurs cruciaux jugés dans l'intérêt national du Canada.

    Cinquièmement, encourager l'investissement du secteur privé et accroître l'investissement gouvernemental dans la recherche et le développement comme composante nécessaire de la stratégie industrielle globale.

    Sixièmement, créer un fonds séparé consacré aux ministères et organismes fédéraux qui ont un intérêt en matière de défense et de sécurité pour acheter et mettre à l'essai de nouvelles technologies et équipements canadiens en matière de défense et de sécurité.

    Septièmement, identifier et introduire des mesures visant à inciter les innovateurs du secteur commercial à contribuer davantage à l'innovation en matière de défense et de sécurité. Les petites et moyennes entreprises sont le principal moteur de la base industrielle du Canada et la source d'innombrables innovations et nouvelles technologies. Nous croyons que des efforts spéciaux peuvent être déployés pour aider à appuyer ce secteur, notamment en offrant de l'aide tout au moins dans la communauté de la défense et de la sécurité en ce qui a trait à l'assurance du recours des tiers et à l'assurance-responsabilité à l'égard des produits.

    Et étant donné la taille relativement petite du marché canadien de la défense et de la sécurité, les acquisitions de matériel militaire devraient servir de levier pour aider des compagnies canadiennes à avoir accès aux chaînes d'approvisionnement des grands entrepreneurs principaux et, ce faisant, accroître nos efforts pour accélérer le commerce avec notre principal partenaire, les États-Unis.

    Notre deuxième thème, monsieur le président, est de mettre en oeuvre des solutions d'ordre pratique pour améliorer et renforcer le processus d'acquisition de matériel de défense du Canada. Nous avons un certain nombre de recommandations à formuler au comité à ce sujet.

    Premièrement, veiller à ce que le processus d'acquisition soit fondé sur l'équité, la transparence, la reddition de comptes, la juste valeur marchande pour le client, et un juste rendement pour le fournisseur, et veiller à ce que le processus fasse en sorte que le client obtienne ce dont il a besoin pour remplir sa mission.

Á  +-(1110)  

    Deuxièmement, nous croyons que le processus d'acquisition de matériel de défense doit être fondé sur des indicateurs de performance, c'est-à-dire qu'il faut mettre l'accent sur le résultat net correspondant aux besoins opérationnels du client, et non pas sur des besoins prescrits.

    Nous encourageons le gouvernement à envisager dans ce contexte d'ajouter un conseiller extérieur pour compléter l'expertise interne, de manière à garantir l'uniformité des exigences opérationnelles depuis la création du programme jusqu'à la livraison et à l'entretien tout au long du cycle de vie.

    Quatrièmement, dans les cas où le gouvernement décide d'adopter la stratégie du fournisseur unique ou du fournisseur prescrit, nous nous attendons à ce qu'il ait d'abord vérifié qu'il n'existe aucune autre solution de rechange viable d'après les besoins définis et que l'approche choisie permettra d'obtenir le meilleur résultat eu égard aux autres objectifs stratégiques du gouvernement.

    Cinquièmement, les coûts du programme de défense doivent être évalués durant toute la durée du programme d'acquisition. Le coût total du programme doit être pris en compte dans le contexte de l'utilisation optimale de l'argent des contribuables canadiens.

    Nous disons que le gouvernement fédéral devrait disposer de meilleures statistiques sur les industries de défense et de sécurité afin d'aider les décideurs politiques à mieux comprendre la valeur de ces industries et à prévoir et évaluer plus précisément les répercussions potentielles sur la population active et autres enjeux industriels.

    Enfin, et non le moindre, nous favorisons une simplification et une accélération du processus d'acquisition de matériel de défense. L'échéancier actuel pour les principales acquisitions pose un risque pour le fonctionnement efficace des Forces armées canadiennes et pour les hommes et les femmes qui servent leur pays en uniforme. Les délais et les tracasseries administratives pour les acquisitions entraînent des coûts directs pour les contribuables et pour l'industrie et il y aurait moyen de réduire considérablement ces coûts.

    Les retombées industrielles et régionales sont un outil parmi d'autres dont dispose le gouvernement pour favoriser l'atteinte de ses objectifs économiques et industriels. Nous sommes d'avis que le programme des retombées industrielles et régionales devrait être utilisé de manière stratégique et ciblée pour promouvoir des intérêts nationaux généraux. Utilisé efficacement dans le cadre d'une stratégie industrielle globale, ce programme peut appuyer l'introduction de nouvelles capacités novatrices en matière de défense et de sécurité, tout en servant de catalyseur pour la création d'emplois et de richesses, de manière à garantir à notre secteur un brillant avenir qui n'est pas limité à celui de la fabrication métallique et d'ateliers de mécanique.

    Monsieur le président, en conclusion, nous devons nous mettre à la tâche pour acquérir de nouvelles capacités répondant aux besoins de la mission telle qu'elle est définie, et nous devons le faire d'une manière transparente et équitable et en maximisant l'effet de levier du gouvernement à l'appui des intérêts canadiens stratégiques dans le domaine commercial et industriel.

    Je vous remercie pour votre attention. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

    Je vous remercie, monsieur.

Á  +-(1115)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Page.

    Je donne maintenant la parole à M. O'Connor...

+-

    M. Gordon O'Connor: Monsieur le président, les autres ne prendront pas la parole?

+-

    Le président: Non. On m'a dit que M. Page parlerait au nom de l'aviation. Je suis désolé, c'est M. Boag. J'ai vu tout à l'heure quelqu'un pointer...

+-

    M. Gordon O'Connor: M. Page a parlé au nom de l'Association de l'industrie de la défense.

+-

    Le président: Je vous en prie.

+-

    M. Peter Boag (président et directeur général, Association des industries aérospatiales du Canada): Il n'y a pas de quoi.

    Merci.

    Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité.

    Je représente l'Association des industries aérospatiales du Canada. Nous représentons les intérêts collectifs de plus de 400 compagnies du domaine de l'aérospatiale d'un océan à l'autre qui servent un vaste éventail de clients dans les secteurs commerciaux de la défense et de l'espace. Collectivement, ces compagnies emploient directement plus de 75 000 Canadiens et ont un chiffre d'affaires annuel de 21 milliards de dollars.

    Je suis très heureux d'avoir aujourd'hui l'occasion de témoigner pour vous donner le point de vue de l'industrie sur l'acquisition de matériel de défense et vous exposer ce qu'il faut faire pour en améliorer l'efficience et obtenir le bon matériel et les bons services pour les hommes et les femmes des Forces canadiennes, en temps voulu et à un coût abordable, tout en utilisant le potentiel des achats de grande valeur et de haute technologie comme levier pour atteindre toute une série d'autres objectifs du gouvernement, notamment les objectifs de développement industriel.

    Les acquisitions dans le secteur de la défense et le contexte dans lequel elles sont effectuées présentent un contraste frappant par rapport aux autres marchés publics. Il faut en effet tenir compte non seulement de l'efficacité militaire et du coût total sur l'ensemble du cycle de vie du matériel ou des services, mais aussi d'une grande diversité de facteurs économiques, industriels, politiques, mettant même parfois en cause les relations étrangères. C'est un dossier complexe qui entraîne des dépenses considérables à même les deniers publics, qui est très médiatisé et met les politiciens au premier plan, et crée une tension naturelle entre l'acheteur et le vendeur. Le rôle du gouvernement et ses relations avec l'industrie sont également particuliers dans les acquisitions de matériel de défense, car le gouvernement est le seul ou le principal acheteur de solutions dans le domaine de la défense et de la sécurité nationale.

    Depuis deux décennies, les acquisitions de matériel de défense au Canada prennent de plus en plus de temps, coûtent beaucoup plus cher que prévu et laissent le client et les fournisseurs dans un état de frustration et de déception. À notre avis, le système d'acquisition peut et doit fonctionner d'une manière plus optimale de manière à obtenir des résultats qui répondent aux besoins de la Défense nationale et des Forces canadiennes, correspondent aux objectifs politiques généraux du gouvernement du Canada, et aux impératifs commerciaux de l'industrie.

    Je tiens à dire dès le départ que ces résultats ne s'excluent pas mutuellement. Pourvu qu'on mette en place les bonnes politiques et processus et, surtout, que cela se fasse avec vision et leadership, il est possible de concilier ces résultats potentiellement contradictoires de manière à apporter un avantage considérable à tous les Canadiens.

    Je soupçonne que chacun dans cette pièce est d'avis qu'il faut absolument éliminer le dédoublement des efforts et l'inefficience qui existent dans le processus actuel d'acquisition de matériel de défense. Il faut également maximiser les retombées économiques potentielles des acquisitions de grande valeur et de haute technologie faites par la Défense nationale. Tous ceux qui ont un rôle à jouer dans le processus au gouvernement, aussi bien que dans l'industrie canadienne de l'aérospatiale et de la défense, doivent changer leur façon de faire dans le dossier des acquisitions de matériel de défense. Dans le cadre du mécanisme du partenariat canadien de l'aérospatiale, les PDG du secteur, le ministre fédéral de l'Industrie David Emerson, ses collègues de six provinces, des représentants du ministère de la Défense nationale, du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux et du Conseil du Trésor, ainsi que d'autres intervenants poursuivent actuellement un dialogue constructif dans le but d'atteindre ces objectifs.

    Au début de septembre, un groupe de travail du partenariat sur les marchés publics a déposé un rapport dans lequel on formule une série de recommandations pour améliorer le fonctionnement du système d'acquisition du gouvernement fédéral, en particulier dans le domaine de la défense, et les résultats obtenus par ce système.

    Avant d'aborder les recommandations du groupe de travail, je voudrais en établir le contexte. Si l'avenir demeure incertain, une constante est assurée. Des pressions continueront de s'exercer sur la situations financières du Canada à cause des besoins de trésorerie accrus pour les soins de santé, l'éducation, l'environnement, ce qui incitera les gouvernements canadiens successifs à tenter d'optimiser encore davantage leurs dépenses consacrées à la défense.

    Certains analystes dans le domaine de la défense sont allés jusqu'à dire que nous sommes déjà plongés dans une grave crise des capacités de défense, cette crise étant le résultat net de la maigreur des budgets d'immobilisations, et de l'engagement opérationnel soutenu et coûteux des Forces canadiennes dans un certain nombre de missions récentes. Les tenants de cette thèse soutiennent que les dépenses consacrées à la défense n'étaient déjà pas suffisantes avant la Bosnie, l'Afghanistan et la lutte contre le terrorisme. Elles sont certainement loin d'être suffisantes aujourd'hui.

Á  +-(1120)  

    D'autres, habituellement à l'extérieur du domaine de la défense, soutiennent que la défense est déjà suffisamment financée et devrait être en mesure de mener à bien les tâches qu'on lui confie actuellement. Ils fondent leur opinion sur le budget global de la défense en comparaison des dépenses consacrées à d'autres domaines au gouvernement fédéral, et tiennent compte des augmentations budgétaires qui ont déjà été annoncées et de la nécessité de dépenser cet argent de manière plus efficiente avant d'injecter de nouveaux fonds.

    Bref, le gouvernement est confronté à un dilemme posé par la capacité actuelle de défense qui lui impose d'opérer des choix difficiles dans une situation qui est loin d'être claire. Il peut essayer de s'en tirer à coup d'argent, solution qui, d'après certains analystes de la défense, coûterait plusieurs milliards de dollars par année pendant plusieurs années, ou bien il peut essayer de faire preuve d'imagination et tenter de réaliser des économies en diminuant les frais généraux dans le cadre des acquisitions et en consacrant l'argent ainsi économisé à l'achat de nouvel équipement. Cela veut dire qu'il ne suffit pas de bien choisir ce qu'on achète, mais qu'il faut aussi dépenser plus intelligemment, ce qui se traduirait par une meilleure planification des acquisitions et une meilleure exécution dans le cadre d'un processus qui englobe clairement une foule de fonctions et fait l'objet d'influences exercées par un groupe diversifié de parties intéressées à la fois au gouvernement et dans le secteur privé. La solution optimale réside probablement quelque part entre ces deux solutions diamétralement opposées: des augmentations budgétaires plus modérées appuyées par une plus grande efficience.

    Mais, peu importe que l'on augmente ou non les budgets, il est essentiel de réformer le processus d'acquisition. Une réforme efficace exigera un effort énergique de la part des ministres, des hauts fonctionnaires et des intervenants à tous les niveaux dans le processus complexe de l'acquisition de matériel de défense. Ce changement sera difficile et prendra du temps, mais il n'en est pas moins d'une importance vitale pour le gouvernement, la Défense nationale, les Forces canadiennes et notre industrie de la défense et de l'aérospatiale, ainsi que pour le contribuable canadien.

    Je vais vous présenter la problématique telle que je la perçois.

    Premièrement, le ministère de la Défense nationale, le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Industrie Canada et les organismes centraux partagent tous la responsabilité à l'égard du fonctionnement efficace du système d'acquisition de matériel de défense. Pour qu'une réforme, quelle qu'elle soit, soit couronnée de succès, tous doivent reconnaître la légitimité des mandats et des rôles des autres intervenants, et tous doivent être convaincus des avantages pour le système dans son ensemble. Il ne peut y avoir de propositions du genre « nous sommes gagnants, ils sont perdants » dans les efforts visant à réformer le système actuel d'acquisition de matériel de défense.

    Deuxièmement, dissocier les objectifs généraux touchant l'ensemble des activités gouvernementales — au chapitre des retombées industrielles — des acquisitions de la défense n'est pas la solution. En fait, à notre avis, ce serait pure folie. Les dirigeants politiques seront toujours sensibles aux emplois et aux stimulants économiques créés par les dépenses à ce chapitre. En fait, ils le doivent aux contribuables. Bref, si les dépenses consacrées à la défense n'entraînent aucune retombée industrielle au Canada, le budget de la défense diminuera.

    Troisièmement, les besoins en matière de défense doivent être mieux exprimés et doivent être conjugués à des projections budgétaires réalistes. Cela exigera de faire des choix difficiles en ce qui a trait à la politique étrangère et à la politique de défense du Canada et au rôle des Forces canadiennes, compte tenu du matériel dont elles disposent et de leur capacité opérationnelle. Nous devons décider si nous voulons une capacité étendue utilisée chichement ou bien une capacité restreinte utilisée intensivement.

    Quatrièmement, il faut une planification meilleure, plus transparente et à long terme des immobilisations. La Défense nationale doit résister à toute tentation d'essayer de faire cadrer un trop grand nombre de projets dans un budget trop étriqué en ralentissant leur mise en oeuvre ou bien en les scindant en éléments plus restreints. Une telle approche ne permet pas d'économiser, mais retarde simplement la mise en oeuvre et le déploiement des capacités nécessaires. Cela accroît les risques et impose des défis importants et quasi insurmontables à l'industrie qui doit alors maintenir son savoir-faire technologique et sa main-d'oeuvre qualifiée dans un environnement de revenu faible et souvent inférieur à ce qui est nécessaire pour soutenir un modèle d'entreprise viable. De plus, cette approche à la pièce réduit grandement la capacité d'utiliser l'effet de levier pour obtenir des retombées industrielles stratégiques, réduisant d'autant les avantages qui pourraient résulter de dépenses de sommes importantes de l'argent des contribuables.

    Enfin, au sujet des retombées industrielles, de quoi s'agit-il au juste? Eh bien, dans une industrie en voie de mondialisation, ce sont les marchés qui offrent le meilleur rendement qui s'emparent des avantages en termes d'investissements et de retombées économiques. Un climat favorable aux affaires et aux investissements, un environnement réglementaire efficient et des programmes appliqués raisonnablement qui aident les compagnies à créer des activités commerciales et à exploiter leur technologie dans un marché mondial, voilà autant d'éléments clés pour établir un environnement compétitif et favorable aux investissements.

    Dans le cas des compagnies de l'aérospatiale et de la défense, les acquisitions de la défense constituent un élément clé de l'analyse de rentabilisation. Pour certaines entreprises, un seul achat du MDN peut avoir des répercussions d'envergure et à long terme sur leurs revenus et leur rentabilité. Pour d'autres, l'acquisition d'un de leurs produits par le MDN à titre de premier utilisateur peut être un élément crucial leur donnant une crédibilité immédiate et leur permettant de vendre sur le marché d'exportation.

Á  +-(1125)  

    Les exigences minimales ou même nulles relativement à la teneur canadienne dans les récents contrats de défense affaiblissent la motivation des entreprises du secteur canadien de l'aérospatiale pour ce qui est de maintenir leurs activités au Canada. Cette situation est exacerbée par des pressions croissantes qui s'exercent sur ces entreprises qui sont incitées à déménager des usines ou à aller s'installer dans d'autres pays, étape nécessaire pour avoir accès à des possibilités dans ces marchés. À cet égard, il est important de signaler que, étant donné la double utilisation de la plupart des technologies qui sont souvent produites sur une seule et unique chaîne de production, la perte ou l'amoindrissement d'une capacité de défense en faveur d'un autre pays peut également entraîner le déménagement de la capacité de production d'articles commerciaux.

    Quels changements devraient être apportés pour améliorer l'efficience et l'efficacité du système canadien d'acquisition de matériel de défense? Les changements préconisés par le groupe de travail sur les marchés publics du Partenariat canadien de l'aérospatiale comprennent la reconnaissance explicite de l'importance de compter sur une solide base industrielle intérieure. Le Canada doit posséder de solides capacités industrielles intérieures pour appuyer la volonté du Canada de se comporter comme un pays souverain. Les fournisseurs étrangers ne peuvent pas toujours garantir qu'ils pourront répondre aux besoins du Canada en matière de défense et de sécurité nationale en période de conflit.

    Cependant, dans l'énoncé de la politique de défense récemment publiée, on ne trouve aucune orientation concrète à cet égard; en fait, il n'y est même pas fait mention de l'importance de l'assise industrielle canadienne pour ce qui est de répondre aux besoins du Canada en matière de défense. Il n'en est nullement question non plus nulle part dans l'énoncé de politique internationale dont la portée est plus étendue.

    À notre avis, le gouvernement fédéral doit promulguer et ensuite mettre en oeuvre un énoncé de politique et une orientation claire sur la manière dont les acquisitions dans le domaine de la défense et de la sécurité nationale doivent être utilisées efficacement pour atteindre des objectifs qui mettent en cause l'ensemble du gouvernement, notamment la création d'une assise industrielle de la défense et de secteurs industriels clés comme l'aérospatiale.

    La politique du Conseil du Trésor comprend certaines orientations anciennes à cet égard, mais je souscris catégoriquement à ce que Tim a déjà dit. Le problème tient en grande partie à la précision et à la mise en oeuvre de la politique et des lignes directrices.

    Deuxièmement, les ministres doivent participer beaucoup plus précocement à l'élaboration de stratégies d'acquisition. À l'heure actuelle, les stratégies d'acquisition présentant un potentiel important de retombées industrielles sont décidées sans la participation des ministres au début du processus. Aujourd'hui, la norme est que nos stratégies d'acquisition sont élaborées et peaufinées par les fonctionnaires de la Défense nationale avant que les ministres en soient saisis collectivement, et l'on invoque alors l'urgence comme prétexte pour adopter rapidement la stratégie recommandée. Cela entraîne fréquemment des délais, les acquisitions envisagées étant suspendues en attendant que les ministres aient le temps de prendre connaissance de la stratégie, d'obtenir réponse à leurs questions et de faire prendre en considération leurs desiderata. C'est une composante importante des retards et de la lenteur qui caractérisent actuellement le système canadien d'acquisition de matériel de défense.

    Il faut des mécanismes nouveaux et plus solides permettant aux ministres de participer précocement à l'élaboration des stratégies d'acquisition qui régissent les achats nécessitant de fortes sommes pour la défense. Après que les ministres ont établi cette orientation stratégique générale, exigeant notamment de mettre dans la balance l'objectif primordial d'obtenir les biens et services pour le MDN et les Forces canadiennes et les autres objectifs potentiels dans d'autres secteurs d'activités gouvernementales, ils peuvent prendre du recul et laisser le processus d'acquisition se dérouler dans le cadre de la stratégie approuvée.

    À notre avis, cette façon de faire comporterait un grand avantage, à savoir de réduire le lobbying qui s'exerce auprès des ministres et qui dure pendant des mois et des mois, causant souvent en grande partie les retards qui caractérisent notre système actuel d'acquisition de matériel de défense. C'est un élément important expliquant ces retards et nous sommes convaincus que si nous pouvions compter sur une intervention et un leadership au plus haut niveau dès le début du processus plutôt que vers la fin, cela permettrait de renforcer considérablement l'efficience du système d'acquisition.

    Troisièmement, dans le domaine des accords commerciaux, si le Canada est disposé à être partie aux arrangements entre gouvernements dans le cadre de l'OMC et de l'ALENA relativement aux marchés publics, c'est qu'il reconnaît à juste titre que les avantages pour les fournisseurs canadiens découlant d'un accès accru à d'importants marchés étrangers de la défense l'emportent sur les contraintes que cela impose sur sa capacité de mettre en oeuvre des politiques et pratiques visant à favoriser les entreprises nationales dans un marché beaucoup plus restreint. Ce point de vue présuppose toutefois que les règles sont uniformes pour tous et permettent aux entreprises aérospatiales canadiennes d'avoir accès aux débouchés qui s'offrent dans d'autres pays dans le domaine de la défense.

    Aux termes de l'OMC et de l'ALENA, un gouvernement a le droit de prendre toute mesure qu'il juge nécessaire pour assurer la protection de ses intérêts essentiels en matière de sécurité, autrement dit, de retirer de la liste un produit ou service qu'il juge, selon une décision discrétionnaire incontestable, indispensable à la sécurité et à la défense nationale. Les principaux partenaires commerciaux du Canada recourent régulièrement à leurs droits en matière de sécurité nationale pour fixer des conditions relatives à la teneur nationale qui seraient autrement contraires à leurs obligations commerciales. Ce faisant, ils interprètent la sécurité nationale dans le sens le plus étendu du terme, allant au-delà des exigences de la défense proprement dite. Ils reconnaissent que la sécurité nationale a des répercussions sur le plan de la stabilité économique et sociale.

Á  +-(1130)  

    Chez nous, au Canada, le gouvernement du Canada s'est montré réticent à exercer ses droits commerciaux obtenus par voie de négociation aux fins d'utiliser les acquisitions pour maintenir une capacité industrielle nationale en matière de défense. Il faut préciser davantage dans quelles circonstances et selon quels critères le gouvernement canadien exerce ses droits commerciaux obtenus par négociation et le gouvernement canadien doit faire preuve d'un plus grand dynamisme à cet égard.

    Enfin, dans le domaine des approches et processus relativement aux acquisitions, le Canada doit accélérer l'adoption de nouvelles approches et de nouveaux modèles de gestion pour les acquisitions, accordant à l'industrie une plus grande marge de manoeuvre lui permettant de mettre au point et de proposer des produits et solutions novatrices rehaussant la qualité et réduisant les coûts. Des représentants du gouvernement et du secteur doivent se rencontrer dans un cadre ouvert et constructif afin de mieux comprendre leurs besoins et attentes mutuels et de travailler à résoudre des problèmes qui, à l'heure actuelle, augmentent les coûts du processus sans ajouter aucune valeur. Pour ce faire, il faut se pencher sur des questions liées à une utilisation plus intensive de spécifications fonctionnelles et d'énoncés des exigences, au lieu d'avoir recours à des énoncés des exigences qui comportent des centaines de pages de spécifications techniques extrêmement prescriptives ou qui, dans certains cas, peuvent même constituer une canadianisation douteuse; il faut aussi être davantage enclin à partager les risques et les récompenses; des arrangements permettant aux entreprises du secteur de se constituer en équipe; des critères pour l'évaluation des offres en fonction d'une méthodologie axée sur l'optimisation mettant davantage l'accent sur la nécessité d'en avoir le plus possible pour son argent dans une perspective gouvernementale globale; la participation des petites entreprises; et le traitement approprié de la propriété intellectuelle. Voilà autant de questions sur lesquelles il faut se pencher.

    Pour mettre en oeuvre ces pratiques, il faudra apporter des changements à la manière dont Travaux publics et Services gouvernementaux Canada mène ses activités de passation de marchés à l'appui de la Défense nationale. L'excellence d'un service d'affermage doit être mesurée à l'aune de la simplicité et de la rapidité de la conclusion du marché, tout en respectant les impératifs de prudence, de probité et d'optimisation.

    Même quand on achète un produit unique et complexe, il n'est pas nécessaire que le processus d'achat le soit tout autant. Il faudra établir des relations contractuelles fondées sur des incitatifs au rendement, au lieu d'obliger les fournisseurs à rendre compte et de les menacer de conséquences punitives en cas d'échec.

    En terminant, j'insiste sur le fait qu'il est crucial d'agir dès maintenant pour améliorer le processus d'acquisition de matériel de défense. Les décisions et les initiatives de réforme prises aujourd'hui, autant au gouvernement que dans le secteur industriel, vont dicter nos positions et relations stratégiques pour la prochaine décennie.

    Une population canadienne davantage sensibilisée à la protection de notre sécurité nationale au Canada et à l'étranger a peut-être enfin réveillé la défense et l'a fait sortir d'une longue hibernation au Canada. Nous devons saisir cette occasion pour agir et ne pas gaspiller les possibilités qui s'offrent actuellement à très court terme, comme l'acquisition d'une importante capacité d'aérotransport dont on discute actuellement. Nous devons aller de l'avant en nous dotant d'un système d'acquisition de matériel de défense plus efficient et mieux en mesure d'optimiser la valeur obtenue par le contribuable.

    La voie de l'avenir doit être guidée par une vision claire et un plan à long terme. Nous devons éviter de céder à la tentation de nous précipiter sur des solutions rapides, comme de supprimer dans les acquisitions de matériel de défense toute considération de l'effet de levier qui peut servir à renforcer l'assise industrielle dans le secteur de la défense, ou de changer simplement les mandats des ministères. Ce qui est en jeu est trop important.

    Merci, monsieur le président.

Á  +-(1135)  

+-

    Le président: Monsieur Boag, j'ai certainement apprécié votre style et la manière dont vous avez étiré cette dernière minute. Vous avez fait du beau travail.

    La parole est à M. O'Connor.

+-

    M. Gordon O'Connor: Merci, monsieur le président.

    Ma question s'adresse aux deux témoins et porte sur l'attribution de contrats à un fournisseur unique. Dans quelles circonstances, à votre avis, devrait-on faire affaire avec un fournisseur unique, le cas échéant? Quels critères devrait-on appliquer à la pratique du fournisseur unique? Je vous demanderais à tous les deux de répondre à cette question.

+-

    M. Peter Boag: J'ai des commentaires à faire là-dessus.

    La pratique du marché à fournisseur unique n'est que l'une des nombreuses stratégies différentes que le gouvernement peut adopter pour procéder à une acquisition particulière. Nous sommes d'avis que cette pratique en soi n'est pas nécessairement une mauvaise stratégie. La concurrence n'est pas toujours la meilleure stratégie. En fin de compte, il faut examiner dans une optique stratégique les différentes options qui s'offrent pour une acquisition donnée, pour voir ensuite comment diverses stratégies permettraient le mieux d'atteindre l'objectif de base qui est d'acquérir le bien en question, la capacité opérationnelle nécessaire, et comment cette approche face à l'acquisition pourrait également permettre d'atteindre les autres objectifs du gouvernement.

    Je ne vais pas dire que la pratique du fournisseur unique est nécessairement mauvaise et que la concurrence est toujours bonne. Tout dépend vraiment de la manière dont les stratégies en question cadrent avec l'atteinte des objectifs poursuivis dans le cas d'une acquisition donnée.

+-

    M. David Stapley (vice-président directeur, Association des industries de défense du Canada): Je pourrais peut-être répondre à cela au nom de notre association. Mes observations seront d'ailleurs très semblables à celles que nous venons d'entendre de la part du représentant de l'AIAC.

    À mon avis, il n'existe pas en la matière d'approche applicable universellement, à cause du caractère particulier du domaine de l' acquisitions de matériel de défense. Cela dit, en général, nous sommes en faveur de la concurrence, pourvu que ce soit une concurrence légitime et véritable. Nous croyons, et nous souscrivons en cela aux propos qu'on vient d'entendre, qu'un bon moyen de s'y prendre est de procéder par des spécifications fonctionnelles, par opposition à un cahier des charges prescriptif, de manière à établir un élément de justice et de transparence et de tirer plus rapidement des conclusions quant à savoir s'il y a lieu de s'adresser à un fournisseur unique ou de mettre les fournisseurs potentiels en concurrence comme solution idéale pour en obtenir le plus pour son argent.

    À titre d'industriel comparaissant comme témoin, ce que je déteste le plus, c'est la concurrence pour l'amour de la concurrence, par opposition à l'adoption d'une approche plus stratégique et davantage axée sur les objectifs généraux du gouvernement.

    Je vais faire une dernière observation, si vous me le permettez, encore une fois purement du point de vue d'un industriel. Les cahiers des charges qu'on nous présentait dans le passé comportaient un tel degré de précision et étaient tellement prescriptifs que même s'il y avait beaucoup de concours, il n'y avait pas en fait beaucoup de concours, parce qu'il y avait tellement peu d'options en dernière analyse qu'on savait qui allait l'emporter.

    Le temps est une denrée précieuse. L'investissement en ressources humaines et en dollars est une denrée précieuse et, comme Peter l'a dit, nous devons trouver un mécanisme quelconque permettant de mettre cela dans la balance de manière consciencieuse et délibérée afin d'aboutir plus souvent qu'autrement à la solution juste.

    Merci.

+-

    M. Gordon O'Connor: Des idées circulent — le débat existe depuis très longtemps et se poursuit toujours — quant à la meilleure manière de régler le problème du processus d'acquisition. Je ne vais pas me lancer dans une description du processus comme tel, mais on a lancé diverses idées, certains laissant entendre que les Travaux publics devraient peut-être s'occuper des acquisitions, que la Défense devrait peut-être s'occuper des acquisitions de matériel de défense, ou qu'il faudrait peut-être créer un organisme distinct chargé de s'en occuper. Je voudrais entendre votre opinion à tous les deux à ce sujet.

+-

    M. Timothy Page: Dans notre exposé de ce matin, nous préconisons d'adopter un point de vue plus globalement stratégique quant aux objectifs à atteindre dans le cadre de l' acquisition de matériel de défense.

    J'essaie de répondre à votre question, mais je vais le faire en deux parties.

    Je ne pense pas qu'il y ait le moindre doute quant au fait que le processus et les stratégies appliqués au dossier de l'acquisition de matériel de défense depuis un certain nombre d'années ont été sous-optimaux. Que ce soit au moyen d'un comité cadre supervisant la manière dont vous identifiez les possibilités stratégiques au niveau du Cabinet, ou bien par la mise en place, comme le MDN vient de le faire, d'un bureau sous l'égide du SMA(Mat) chargé d'examiner les grandes acquisitions pour garantir la continuité du personnel et l'uniformité de la direction et de la gestion, il y a place pour de l'amélioration autant aux niveaux politique et stratégique qu'au niveau opérationnel au sein du MDN.

Á  +-(1140)  

+-

    M. Peter Boag: Notre position est que ce qui est en jeu, ce n'est pas tellement de savoir qui s'en charge ou dans quel service de l'appareil gouvernemental cette fonction est située, c'est plutôt la manière dont on s'y prend et l'obligation d'adopter ce point de vue stratégique. Je crains que si nous confions cette tâche de manière trop pointue à un service en particulier, nous allons perdre de vue le contexte stratégique et les grands objectifs qui peuvent être atteints au moyen des acquisitions.

    Mais je pense que l'autre élément clé est de nous assurer de pouvoir compter sur des spécialistes, des gens compétents possédant les qualités requises et une expérience considérable dans la gestion d'un processus d'acquisition. Ainsi, on n'a pas besoin de réinventer la roue à chaque fois qu'on entreprend un nouveau dossier d'acquisition puisqu'on peut compter sur un groupe d'administrateurs et de gestionnaires de programme chevronnés capables de diriger et d'orienter le processus.

+-

    M. Gordon O'Connor: Vous êtes tous les deux des lobbyistes pour l'industrie et par conséquent, je m'attends bien sûr à ce que vous soyez en faveur des retombées industrielles. Mais à votre avis, les retombées industrielles coûtent-elles à la fois du temps et de l'argent au budget de la défense et au processus d'acquisition de matériel de défense?

+-

    Le président: Je vous demanderais de donner des réponses brèves, parce que nous venons de franchir le cap des sept minutes. Nous empiétons sur le temps réservé au NPD.

    Monsieur Stapley.

+-

    M. David Stapley: Je voudrais faire quelques observations.

    Je pense qu'on est généralement d'accord, en tout cas parmi les industriels, pour dire qu'il n'est pas économiquement logique de canadianiser, si l'on peut dire, de petites quantités de matériel, à cause du coût de certification, etc.

    Cela dit, il y a moyen d'utiliser les dépenses comme un outil pour créer des emplois, des innovations technologiques, etc., dans le cadre de ce qu'on appelle des retombées industrielles régionales indirectes. Ce dont il faut se méfier, à mon avis, c'est de ne pas trouver le juste équilibre entre les deux. Il n'y a rien de mal à créer des emplois dans le secteur des services. Il faut assurer l'entretien de ce matériel une fois qu'il est adopté.

    Nous achetons les systèmes les plus technologiquement avancés au monde, et comme nous ne les fabriquons pas au Canada, nous les achetons à l'étranger, surtout aux États-Unis. Il me semble que dans le cadre de ce processus de retombées industrielles et régionales, nous devons établir une certaine parité dans les avantages technologiques de manière à pouvoir créer un effet de levier nous permettant d'assurer notre propre position concurrentielle. À mes yeux, c'est la question fondamentale sur laquelle nous devons nous pencher, et il n'est d'ailleurs pas rare parmi les entrepreneurs principaux américains ou européens de devoir composer avec de tels impératifs politiques. Ils le font régulièrement ailleurs dans le monde et nous ne devrions pas éviter à le faire nous aussi.

    Sur le plan du coût, si nous procédons de manière stratégique, c'est une négociation entre l'entrepreneur principal et le fournisseur. Le client n'est jamais ou du moins rarement mis à contribution si l'on procède de manière stratégique, parce que le coût est réparti sur un très vaste espace commercial, un espace commercial mondial, dans lequel nous essayons de faire coïncider des intérêts commerciaux divergents et de créer des usines de toutes pièces. Évidemment, s'il faut investir de l'argent au départ, quelqu'un doit payer et, au bout du compte, c'est un client ou un ensemble de clients qui payent.

    Je répète que cela dépend de la stratégie adoptée au départ dans chaque dossier d'acquisition et nous devons veiller à ne pas procéder de manière à entraîner un coût ou une incidence négative pour le ministère de la Défense.

+-

    Le président: Monsieur Boag, voulez-vous intervenir brièvement?

+-

    M. Peter Boag: Je vais céder la parole à mon collègue Ron Kane.

    Je vous le présente rapidement: Ron est le vice-président de l'association. Il est avec nous depuis un certain nombre d'années, mais auparavant, il a dirigé le programme des retombées industrielles et régionales à Industrie Canada et je pense donc que nous avons un point de vue intéressant sur cette question.

+-

    Le président: Monsieur Kane.

+-

    M. Ron Kane (vice-président, Association des industries aérospatiales du Canada): Je voulais seulement faire observer qu'au cours des 20 dernières années, il y a eu plusieurs tentatives de quantifier le coût additionnel pour les acquisitions de la défense résultant de l'application des retombées industrielles et régionales. Ce facteur a toujours été difficile à isoler, ce coût additionnel.

    À mon avis, il est plus important de se pencher sur la valeur pour le contribuable canadien de l'imposition d'une exigence en matière de retombées industrielles régionales dans le cadre d'une importante acquisition de la défense et il faut mesurer la valeur de cette exigence en termes d'innovation technologique, de transfert technologique dans l'assise industrielle canadienne, des exportations de compagnies canadiennes sur le marché mondial et de facilitation du commerce. Au lieu de mesurer le coût supplémentaire, à supposer qu'il existe, des retombées industrielles régionales, je préférerais de loin qu'on s'interroge sur les avantages économiques potentiels pour l'industrie canadienne et, en dernière analyse, pour le contribuable.

Á  +-(1145)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Kane.

    Nous entendrons maintenant M. Bachand.

    Monsieur Bachand, s'il vous plaît.

[Français]

+-

    M. Claude Bachand: Je talonne le ministre de la Défense depuis quelques mois déjà à propos des produits canadiens. Vos associations respectives doivent sûrement leur faire confiance et y porter un intérêt particulier. Vous l'avez dit vous-mêmes, les Américains ne se gênent pas pour mettre l'ALENA de côté, sous prétexte que cela relève de la sécurité nationale. Je considère que nos contribuables canadiens n'en n'ont pas assez pour leur argent. Quand nous procédons à l'achat de matériel militaire, nous payons avec les impôts des contribuables. Il me semble très important qu'il y ait le plus de retombées possible pour eux. Parfois, on se fait dire qu'on va faire économiser le contribuable en se procurant telle ou telle chose ailleurs. Bien souvent, on ne calcule pas suffisamment les retombées potentielles d'un contrat, même si l'achat aurait peut-être coûté un peu plus cher chez nous.

    À mon avis, si le rendement d'un achat est égal ou supérieur à la moyenne, si le délai de production est à peu près identique, si l'interopérabilité est au rendez-vous et si le coût est compétitif, il faut privilégier un produit canadien. J'aimerais savoir si vous partagez mon avis. Je veux aussi savoir si vous êtes en mesure d'influencer le gouvernement. Je m'explique.

    Monsieur Page, presque 400 industries font partie de votre association. Si vous connaissez la liste des achats de matériel du gouvernement fédéral et qu'une industrie de votre association peut le fournir, votre association peut-elle dire au gouvernement qu'il commettrait une erreur en n'achetant pas ce type de matériel, pour les raisons que je viens d'invoquer?

    Je vous pose la même question, monsieur Kane. Pouvez-vous vous joindre à des gens qui ont à coeur les intérêts des contribuables canadiens, en disant au gouvernement de ne pas acheter tel type d'équipement puisque nous sommes en mesure de le produire à meilleur marché, à un rendement supérieur, chez nous, et que c'est un produit canadien? Êtes-vous en mesure de vous joindre à la défense des contribuables canadiens et de convaincre le gouvernement par des prises de position publiques? Cela fait-il partie de votre mission comme telle?

+-

    M. Timothy Page: Cher monsieur, c'est exactement pour ces raisons que nous nous trouvons devant vous aujourd'hui. Vous avez identifié quelques éléments de base qui sortent directement de notre mémoire. Nous promulguons les intérêts des entreprises canadiennes, quand il s'agit des achats du ministère de la Défense, sans compromettre les besoins exprimés par les militaires.

[Traduction]

+-

    M. Peter Boag: Monsieur Bachand, je vais répondre à vos observations, en commençant par la préférence aux produits canadiens. Je pense que cette question comporte deux volets.

    Le premier est de s'assurer, quand le gouvernement fait l'acquisition d'un système, qu'il applique clairement des mesures permettant d'évaluer l'ensemble de la valeur potentielle et qu'il ne se contente pas, comme on l'a vu très récemment, de choisir le devis le moins cher tout en étant conforme. Nous devons vraiment évaluer quelle sera, pour le gouvernement et le pays, la valeur ultime de l'acquisition d'un système ou d'un service donné d'un fournisseur. Il faut inclure dans cette évaluation tous les aspects de la valeur, pas seulement la valeur du bien ou du service particulier acheté pour le ministère de la Défense nationale, mais aussi, de manière plus générale, la valeur des avantages économiques qui peuvent résulter de l'achat d'un fournisseur non canadien.

    Il faut faire bien attention de ne pas préférer les fournisseurs canadiens à tout prix. Il faut en fait établir un juste équilibre. N'oubliez pas que le Canada est encore un marché relativement restreint. Les possibilités ailleurs dans le monde, que ce soit aux États-Unis, en Europe ou dans d'autres parties du monde, représentent potentiellement un marché beaucoup plus important pour les compagnies canadiennes. Par conséquent, nous ne voulons pas restreindre l'accès au marché canadien exclusivement, si cela se fait au détriment des compagnies canadiennes en limitant leur accès au marché étranger. Nous devons établir un juste équilibre.

    Nous sommes d'avis qu'il ne faut pas recommander d'adopter une politique générale et systématique d'achat au Canada. Il s'agit d'être stratégique et, de manière sélective, d'identifier des secteurs où il peut être dans l'intérêt national du Canada de préférer un fournisseur canadien ou de préciser un niveau donné de contenu canadien, mais pas de manière générale, car cela pourrait nuire à nos intérêts sur le marché mondial. Je répète qu'il faut mettre tous les facteurs dans la balance et établir l'équilibre.

    Un dernier point, au sujet des efforts pour influencer le gouvernement. Je suis assurément d'accord avec M. Page et c'est clairement l'une des raisons de notre présence ici aujourd'hui. Il faut s'assurer que le gouvernement, quand il examine ses dossiers d'acquisition de matériel militaire, comprenne clairement l'impact que cela peut avoir pour l'obtention d'avantages économiques de plus vaste envergure pour le Canada et qu'il en tienne compte, et qu'il applique en conséquence une stratégie appropriée pour obtenir le maximum d'avantages, ce qui peut, le cas échéant, inclure des exigences spécifiques d'achat au Canada ou d'un niveau de contenu canadiendans le contexte d'une acquisition en particulier.

Á  +-(1150)  

[Français]

+-

    M. Claude Bachand: D'accord.

    Êtes-vous au courant de la liste du matériel que le gouvernement envisage acheter au cours des prochaines années? Connaissez-vous tous les projets?

    Plus ou moins? D'accord.

    Si on vous fournissait une liste des principaux projets que le gouvernement caresse pour les prochaines années, pourrait-elle vous être utile? Nous avons parfois accès à certaines informations. Nous connaissons les projets du gouvernement, et il serait peut-être bon que vous soyez au courant de tout. Cela vous permettrait d'intervenir de façon plus adéquate en faveur des membres de votre association.

    J'imagine que vous ne vous objectez pas à cela.

+-

    M. Timothy Page: Pas du tout.

+-

    M. Claude Bachand: D'accord.

    Si on avait besoin de vos services pour convaincre le gouvernement, pourrait-on compter sur votre appui? On pourrait, par exemple, vouloir rendre publique une injustice à l'endroit d'une industrie canadienne.

+-

    M. Timothy Page: À mon avis, le rôle de l'association est de protéger le milieu dans lequel les industries particulières peuvent travailler.

    En tant que représentants de l'association, on ne devrait pas faire de transactions. Cela pourrait causer quelques problèmes, puisque si on se range derrière l'avis de l'un de nos membres, on s'oppose automatiquement aux 429 autres.

    Le travail de l'association, du moins d'après nous, consiste à s'assurer que le cadre général dans lequel les entreprises canadiennes peuvent promouvoir leurs intérêts soit transparent et équitable.

+-

    M. Claude Bachand: J'ai encore une question, monsieur le président. M. Kane pourrait peut-être y répondre.

    Récemment, on a mis fin au programme Technology Partnerships Canada. Aimeriez-vous voir ressusciter, peut-être sous une autre forme, ce type de programme basé sur la recherche et le développement? Les subventions gouvernementales qui aident les compagnies à faire de la recherche et du développement sont-elles importantes pour vous? Aimeriez-vous voir un programme qui soutienne l'industrie militaire?

[Traduction]

+-

    M. Peter Boag: Monsieur Bachand, je crois que vous voulez probablement parler du programme Partenariat technologique Canada.

    PTC est actuellement en période de transition. Le ministre Emerson a annoncé la fin de l'actuel programme PTC, à une exception près. La composante de l'aérospatiale et de la défense de PTC est encore en place, et l'on continue de recevoir et de traiter de nouvelles demandes pendant qu'un nouveau programme est élaboré. Chose certaine, nous considérons que les investissements de ce type de la part du gouvernement fédéral pour partager les risques et les récompenses et assurer le développement technologique sont essentiels pour assurer la compétitivité à long terme et le succès de l'industrie aérospatiale canadienne.

    Par ailleurs, le partenariat canadien de l'aérospatiale se penche plus précisément sur les défis auxquels notre industrie est confrontée au chapitre du développement technologique et de la commercialisation. Il est clair que ce secteur est axé sur la technologie. La pertinence technologique est cruciale pour assurer la compétitivité mondiale. Notre investissement collectif dans la recherche et le développement en aérospatiale au Canada, proportionnellement aux chiffres des ventes, est inférieur à celui de nos principaux concurrents, que ce soit des concurrents solidement établis aux États-Unis ou en Europe ou des nouveauxconcurrents qui apparaissent en Asie et en Amérique latine.

    Donc, oui, c'est un domaine critique où les gouvernements ont un rôle important à jouer, pas seulement le gouvernement fédéral, mais aussi les gouvernements provinciaux, pour aider l'industrie à partager le risque du développement technologique et de la commercialisation et, en bout de ligne, pour partager les récompenses sous forme de retombées industrielles soutenues qui en résultent.

+-

    Le président: Merci, monsieur Boag.

    Comme vous pouvez le voir, nous sommes très souples. Je vais vous dire pourquoi nous faisons preuve de souplesse à la fois pour vos exposés et pour les questions des députés: c'est parce qu'il s'agit d'un dossier qui est très important pour tous les députés. Le vice-président du comité, M. Casson, a déposé une motion portant qu'à mesure que notre examen avancera, nous devrons nous concentrer toujours plus sur les marchés publics. Par conséquent, nous avons tous souhaité que l'on fasse preuve de cette souplesse et nous allons poursuivre sur notre lancée en faisant un tour de table.

    Nous avons une longue liste et le suivant est M. Martin.

    Monsieur Martin.

Á  +-(1155)  

+-

    L'hon. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je remercie tous les témoins d'être présents aujourd'hui.

    Vous savez tous, vous le savez d'ailleurs mieux que nous, que nous achetons en fonction de l'avenir et que c'est tout un défi. Je pense que vous serez tous contents de prendre connaissance de ce qui s'en vient avec l'arrivée du nouveau sous-ministre adjoint (Matériel), M. Ross. Il s'est attaqué précisément au dossier dont vous êtes venus nous parler. Je pense qu'il a fait du très bon travail en déblayant le terrain au niveau des fonctionnaires.

    Je voudrais pour ma part aborder l'aspect politique, qui nous concerne. Monsieur Kane, comme vous avez en fait suivi ce dossier des deux côtés de l'équation, je vais peut-être vous poser la question, mais quelqu'un d'autre pourra répondre aussi.

    De votre point de vue, monsieur, comment pourrions-nous procéder pour nous retirer et simplifier l'aspect politique de l'équation? Quelqu'un a dit tout à l'heure que les ministres devraient participer très tôt au processus et qu'il faudrait réduire les efforts de lobbying par la suite. Avez-vous vu dans un pays quelconque un processus politique dans lequel ce système est simplifié à l'extrême, au point de raccourcir considérablement cet élément de l'équation?

+-

    M. Ron Kane: Je pense qu'il y a moyen de raccourcir considérablement le processus, comme M. Boag l'a dit. Trop souvent, nous voyons des stratégies d'acquisition élaborées à la Défense nationale, dans les officines de cette organisation, et les ministres n'en sont saisis que lorsque le tout a été épuré au point qu'il ne subsiste plus qu'une seule option.

    Nous croyons que les ministères qui travaillent avec l'industrie, notamment Industrie Canada, doivent faire du meilleur travail pour ce qui est de faire valoir dès le début les capacités des compagnies canadiennes de l'aérospatiale et de la défense, et fournir aux ministres dès le départ diverses options, en précisant la portée de chacune de ces options pour le développement industriel et économique, tout en répondant aux besoins en matière de capacité des Forces canadiennes.

    Je pense que ce qu'il faut faire, c'est remettre en vigueur certains processus que le Conseil du Trésor appliquait durant les années 1970 et 1980 qui donnaient à diverses organisations comme Industrie Canada le mandat et le pouvoir de procéder à une telle évaluation initiale permettant de déterminer comment on peut se servir d'un dossier d'acquisition comme levier pour concilier efficacement la capacité militaire et le développement industriel. À l'heure actuelle, ces mécanismes ne sont pas pleinement utilisés dans l'appareil gouvernemental et nous devons donc avoir de nouveaux mécanismes faisant intervenir les ministres dès le début du dossier d'acquisition.

+-

    L'hon. Keith Martin: Quel pays du monde, à votre avis, possède la meilleure stratégie en matière d'acquisitions? Nous revenons tout juste du Royaume-Uni. Pour le meilleur ou pour le pire, les Britanniques nous ont dit que leurs dossiers d'acquisitions durent entre six mois et 16 ans. Voilà qui n'est guère rassurant pour nous qui essayons de résoudre cette question.

    Avez-vous vu un pays qui, de votre point de vue, possède une stratégie d'acquisition beaucoup plus efficace et efficiente, étant entendu que nous voulons, comme vous l'avez dit, la meilleure valeur possible pour le contribuable, l'efficacité pour nos forces armées et une livraison en temps voulu? Pouvez-vous nommer un pays où l'on peut dire que ça va bien?

+-

    M. David Stapley: Puis-je commencer?

+-

    Le président: Voulez-vous que M. Kane réponde?

+-

    M. David Stapley: Si je peux commencer, je voudrais d'abord dire que je ne suis pas sûr qu'il y ait un modèle parfait. Certains fonctionnent mieux que d'autres et l'on pourrait bien soutenir que nous nous débrouillons assez bien au Canada, tout compte fait. Cela dit, il y a toujours place pour de l'amélioration.

    Je connais très bien le modèle britannique que vous avez évoqué. Compte tenu du nombre de retards et de dépassements de coût et de problèmes budgétaires, nous devrions probablement éviter de nous en inspirer, tout au moins à court terme.

    Par contre, l'Australie, essentiellement dans la foulée de crises survenues dans son programme d'acquisition de sous-marins il y a un certain nombre d'années, s'est plongée dans une profonde réflexion sur la manière de s'y prendre pour améliorer la situation. À mon avis, les Australiens ont bien compris les éléments individuels et les liens entre la politique gouvernementale au niveau du Commonwealth — ce que les Australiens essayaient de faire dans le cadre de leur politique des affaires étrangères — et le dossier de la défense. Ils ont mis en place, en l'espace d'un an ou deux, une série de stratégies mûrement réfléchies et objectives en matière de défense, stipulant comment ils allaient exécuter les programmes, quel type de stratégie industrielle il leur fallait, de quel type de stratégie industrielle ils n'avaient pas besoin, ce qu'ils pouvaient réaliser en concluant des alliances avec d'autres pays alliés, etc., après quoi ils ont établi leurs processus d'acquisition dans les paramètres de ces deux contextes. Ils ont maintenant plusieurs programmes en cours d'exécution qui sont d'une très grande ampleur pour un pays comme l'Australie.

    Je ne veux nullement dire que ce sera facile, mais même à titre d'observateurs de l'extérieur habitant un autre hémisphère, nous pouvons suivre de jour en jour la stratégie et les objectifs politiques fixés par le gouvernement australien, à mesure que ces programmes sont réalisés. Du côté de l'offre, c'est absolument crucial que nous connaissions les règles du jeu, que nous sachions où nous investissons notre argent et quelles sont les probabilités de succès ou d'échec et dans quel secteur nous voulons investir nos technologies et l'argent de nos actionnaires. Le meilleur modèle que je puisse recommander au comité de suivre de près, c'est celui de l'Australie.

    Merci.

  +-(1200)  

+-

    M. Ron Kane: Je voudrais seulement souscrire aux propos de M. Stapley.

    Il est certain que l'Australie, à la fin des années 1960 et 1970, avait une approche purement australienne pour l'acquisition de matériel de défense, mais je pense que les Australiens ont constaté que c'était très coûteux et très inefficace. Aujourd'hui, ils ont constitué, dans le cadre de leur stratégie aérospatiale, des équipes composées de représentants du gouvernement et de l'industrie qui examinent la capacité requise et déterminent comment la solution envisagée pourra tirer le maximum de l'acquisition envisagée.

    Dans des programmes comme celui de l'avion d'attaque interarmées, programme dirigé par les États-Unis et le Royaume-Uni et devant coûter des milliards de dollars, l'Australie adopte une approche axée tout à fait sur le partenariat entre l'industrie et le gouvernement, s'efforçant d'intégrer au potentiel industriel de l'Australie certaines technologies de base qui font partie de leur stratégie aérospatiale globale.

    L'Australie est donc passée d'une attitude « tout doit être fabriqué en Australie » à une attitude beaucoup plus internationale et mondialisée, s'efforçant de mettre en relation les compagnies aérospatiales australiennes et le marché mondial.

+-

    L'hon. Keith Martin: Prenons l'exemple du programme conjoint du navire ravitailleur. À vos yeux, la constitution de consortiums parmi les diverses entreprises de votre secteur serait-elle pour vous une manière efficace d'être compétitifs sur la scène internationale? Ou bien affirmez-vous que pour survivre sur le marché intérieur et international et pour être compétitifs, vous devez pouvoir compter sur la préférence nationale ou sur des subventions gouvernementales?

+-

    M. David Stapley: Je pourrais peut-être commencer, pendant que mes collègues s'efforcent de trouver de meilleures réponses.

    Vous avez posé un certain nombre de questions et vous me pardonnerez si j'en ai oublié quelques-unes.

    Vous avez notamment évoqué la préférence nationale pour les acquisitions; c'était l'une de vos observations. Je pense que c'est une question de stratégie à long terme, par opposition aux solutions donnant des résultats immédiats dans un programme donné, que ce soit le navire ravitailleur ou quoi que ce soit d'autre. Cela pose pour nous toute la problématique de la construction navale. Pour diverses raisons, si vous regardez un peu partout dans le monde, il semble que dans la plupart des pays, presque sans exception, la capacité de construire des navires soit considérée comme un secteur stratégique et je pense donc que l'on peut avancer de solides arguments en ce sens.

    Quand il s'agit des systèmes nous fabriquons, comme dans le cas du navire ravitailleur, il est fascinant que l'industrie canadienne commence à entrer en jeu parce que nous sommes passés maîtres dans l'art des sous-systèmes et des composants, que ce soit pour les communications, la navigation, les capteurs, ou les systèmes de régulation de puissance, et tout cela est nécessaire pour ce projet. Nous sommes très compétitifs et tout à fait disponibles, dans l'ensemble du complexe industriel canadien, pour participer à cet effort.

    Je ne crois pas personnellement que nous ayons besoin de subventions. En fait, je suis contre les subventions parce qu'elles nuisent à une saine concurrence au niveau des sous-systèmes. Je pense que ce qu'il faut, c'est un certain soutien dans un cadre de politique générale et je dirais mondiale, internationale. À titre d'exemple, nous allons faire l'acquisition du navire ravitailleur à peu près au même moment où les Australiens achètent un navire équivalent. Il me semble qu'il y a là une occasion de décrocher des contrats dans deux marchés au lieu d'un seul.

    Trois navires, cela peut sembler beaucoup, et c'est certainement beaucoup d'argent pour celui qui tient les cordons de la bourse au gouvernement, mais à long terme, ce n'est pas beaucoup. Il faut créer des capacités et il faut ensuite les entretenir et il faut pour cela un vaste éventail d'entreprises commerciales. C'est là qu'entre en jeu l'idée de consortiums, non seulement pour offrir le meilleur de ce qu'il y a au Canada, mais aussi pour rassembler les intervenants internationaux dans un cadre de politique et une stratégie qui non seulement répond aux besoins canadiens, mais qui nous permet d'être présents sur des marchés d'exportation. C'est là que le marché se fera et doit se faire à mon avis.

  +-(1205)  

+-

    L'hon. Keith Martin: Vous comprenez où je veux en venir: la meilleur valeur pour le contribuable, la capacité d'être compétitif, compte tenu, comme vous le dites, du petit marché intérieur et de la taille qu'il faut avoir pour continuer de créer...

+-

    Le président: Peter?

+-

    M. Peter Boag: Je pense que cette question met en cause la manière dont nous pouvons agir de manière plus stratégique dans nos acquisitions. Nous avons une capacité de défense définie qui doit être réalisée, mais y a-t-il d'autres objectifs gouvernementaux — et on pourrait parler d'objectifs de développement industriel — qui pourraient être atteints au moyen de cette acquisition?

    Si l'on commence à répertorier ces objectifs, s'agit-il de recréer une capacité de construction navale, de bâtir trois navires pour voir ensuite la demande disparaître de nouveau? Pouvons-nous créer une capacité de construction navale qui deviendra en définitive compétitive et capable de soutenir à terme la concurrence mondiale? Ou bien y voyons-nous l'occasion de renforcer davantage nos capacités d'intégration de systèmes dans certains domaines précis où nous avons déjà des points forts et pouvons bâtir à partir de nos atouts pour ensuite développer davantage notre compétitivité et notre présence sur le marché de manière durable?

    Je ne me prononce pas à savoir lequel de ces objectifs est le bon, mais vous devez commencer à réfléchir aux objectifs qui pourraient être atteints dans le cadre de cette acquisition, en allant au-delà de l'achat des trois navires ravitailleurs dont les Forces canadiennes ont besoin. Une fois que vous aurez décidé de la conduite à suivre au niveau le plus élevé, au niveau politique faisant intervenir les ministres, il vous faudra alors décider quelle approche conviendrait le mieux pour atteindre ces objectifs. S'il s'agit plutôt de tabler sur les atouts du Canada et de renforcer la capacité d'intégration de systèmes, peut-être que l'approche du consortium est la meilleure. Mais en fait, fondamentalement, cela revient à demander quels sont vos objectifs, à tenir une discussion rationnelle et transparente au sujet de ces objectifs, pour ensuite voir quelle est la meilleure stratégie d'acquisition pour atteindre les objectifs en question.

+-

    Le président: Bien.

    Nous passons à notre deuxième tour et je voudrais faire un petit rappel. Comme les députés le savent, nous aurons maintenant cinq minutes pour les questions et les réponses. Nous attendons aussi de vous que vous fassiez preuve de souplesse relativement à ces cinq minutes, étant donné l'importance de la question à l'étude aujourd'hui, et je vous demande de garder cela à l'esprit.

    La parole est à M. Casson.

+-

    M. Rick Casson (Lethbridge, PCC): Merci, monsieur le président. Avant de m'adresser aux témoins, je voudrais savoir si nous aurions le temps à la fin de la séance de consacrer quelques minutes à un avis de motion?

+-

    Le président: Bien sûr. Enfin, cela dépend. Tout dépendra des questions que vous poserez. Nous avons quatre autres intervenants, en incluant vous-même. J'aimerais pouvoir le faire, bien sûr.

+-

    M. Rick Casson: Merci, messieurs, pour vos exposés.

    Je pense que si nous prenons du recul et examinons la nouvelle politique de défense, la politique étrangère, la question de la transformation, et les nouvelles réalités auxquelles notre pays est confronté, comme vous l'êtes certainement vous aussi, à titre d'industriels, nous examinons la capacité... On nous a laissé entendre que nous devrions peut-être nous attarder seulement à la capacité finale dont on a besoin et tenter de simplifier le processus pour parvenir aux résultats souhaités. Vous avez dit qu'il fallait le faire, mais vous avez dit également qu'il fallait faire participer davantage les ministres, tenir compte de plus nombreux aspects de l'industrie et de la stabilité de l'industrie au Canada qui entrent également en jeu. C'est une question fort complexe, et puis, en matière d'acquisitions, nous essayons toujours de resserrer les échéanciers.

    Je vous remercie de vos commentaires au sujet de l'optimisation des ressources. Cela nous préoccupe constamment. Nous devons donc prendre cela en compte tout en nous efforçant d'obtenir la capacité que l'on nous demande, de soutenir le rythme élevé de déploiement — tout cela entre en jeu. Je pense que la situation évolue quelque peu. Vous y avez tous les deux fait allusion dans vos déclarations quand vous avez dit que nous sommes au seuil d'une nouvelle ère.

    Je ne suis pas sûr lequel d'entre vous a dit qu'il fallait un organisme externe pour s'occuper des acquisitions ou pour contribuer au processus. On nous a dit durant le processus d'acquisition des sous-marins que l'un des problèmes était l'absence d'une équipe qui serait chargée du dossier du début à la fin. Il n'y avait tout simplement pas assez de personnel. Tout cela a pris tellement de temps qu'il n'y a pas eu de continuité, ce qui a causé certains problèmes.

    De plus, on a évoqué le grand nombre de militaires qui s'occupent du dossier des acquisitions et je pense que c'est M. O'Connor qui y a fait allusion. Où se situe le point d'équilibre? Faut-il réduire le nombre de militaires qui s'en occupent, ou augmenter le nombre de militaires? Comment entrevoyez-vous exactement que cela pourrait se faire pour que nous obtenions le résultat final souhaité, à savoir la capacité que nos militaires nous demandent, tout en optimisant les ressources et en faisant en sorte que les contribuables en aient le plus possible pour leur argent?

  +-(1210)  

+-

    M. Timothy Page: Vous avez raison. Je pense que chacun d'entre nous a soutenu devant vous ce matin que le gouvernement a l'occasion de penser et d'agir de manière stratégique dans le dossier des acquisitions de matériel de défense.

    Vous avez également raison de vous attarder à notre préoccupation au sujet des échéanciers intrinsèques au système actuel d'acquisition. Je vous pose la question: à votre avis, quand il faut 15 ans en moyenne pour effectuer les grandes acquisitions, le contribuable en a-t-il pour son argent? Avons-nous réponse à tout? Je soupçonne que la réforme des acquisitions est à l'ordre du jour dans la plupart des pays industrialisés depuis 20, 30, 50 ans.

    Ce que nous soutenons toutefois dans notre mémoire, c'est que la récente décision du SMA(Mat) de créer un bureau spécial dans son service, dirigé par un directeur général, afin d'assurer l'uniformité depuis l'élaboration du programme jusqu'à sa mise en oeuvre, est une bonne décision permettant de conserver une expertise solide et constante dans un dossier donné. Nous soutenons aussi dans notre mémoire que le gouvernement devrait peut-être envisager de recourir à un conseiller indépendant extérieur, qui viendrait compléter l'expertise interne que possède le MDN, comme les Américains l'ont fait par l'entremise d'un groupe appelé Mitre Group.

    Par conséquent, nous ne prétendons nullement viser toujours dans le mille, si vous me passez l'expression, mais il est clair dans l'esprit de nos membres que 15 ans, cela coûte de l'argent et peut causer un dilemme opérationnel pour les militaires, qui s'efforcent de répondre aux exigences opérationnelles établies par le gouvernement.

+-

    M. Ron Kane: Au sujet de la question des effectifs, je crois qu'il y a probablement deux groupes engagés dans le processus. Il est certain qu'au MDN, parmi l'effectif militaire, se trouvent des gens qui définissent la capacité militaire et je pense que l'un des avantages que l'on pourrait probablement obtenir à cet égard est de faire en sorte que ces personnes aient une meilleure compréhension des impératifs industriels et commerciaux. Que ce soit au moyen de détachements dans des entreprises ou dans le cadre de plus nombreux symposiums réunissant des ingénieurs militaires et des dirigeants du monde des affaires, je pense que nous devons donner aux personnes qui définissent la capacité une meilleure compréhension des impératifs industriels.

    Le deuxième groupe de gens sont ceux qui exécutent la tâche d'acquisition, à savoir les gestionnaires de projets. Je pense que nous devons former un groupe de gestionnaires de projets ayant reçu une formation poussée et qui passeront d'un projet à l'autre, afin de ne pas avoir à créer un groupe pour le démanteler ensuite et le remplacer par un autre groupe.

    Je pense que nous devons peut-être envisager — sans aller jusqu'à adopter intégralement le modèle de l'OSS — de créer une plus grande souplesse dans le système d'acquisition de manière à s'assurer que l'on dispose de l'éventail voulu de personnes au bon moment pour exécuter les projets.

[Français]

+-

    Le vice-président (M. Claude Bachand): Monsieur Bagnell.

[Traduction]

+-

    L'hon. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Merci.

    Je vous remercie d'être venus et je vous remercie de nous avoir fait part de vos observations sur les acquisitions, parce que, comme le président l'a dit, c'est un projet très important pour nous.

    Je veux seulement faire deux ou trois observations. Vous pourrez transmettre la première aux membres de vos associations.

    Vous avez évoqué le contenu national et canadien et tout le reste; or les Affaires indiennes ont lancé il y a quelques années un nouveau programme. C'est un partenariat pour élaborer des stratégies de concert avec les grandes entreprises au Canada pour la participation autochtone, et cela semble fonctionner très bien. Ce serait peut-être une bonne idée d'envoyer une brochure à tous vos membres.

    De plus, c'est une observation personnelle que je fais, quand une compagnie publie, dans le cadre d'un projet d'acquisition, de belles grandes annonces dans les journaux — et c'est peut-être un problème parce que cela prend tellement de temps —, cela m'inciterait vraiment à ne pas acheter de cette compagnie, sachant que ces belles annonces en couleur ajoutent au prix des biens que nous allons acheter.

    Ma question, qui s'adresse à quiconque veut bien y répondre, porte sur les étapes techniques pour l'accélération. Tous les témoins ont dit que nous devons accélérer les acquisitions. Notre comité en est arrivé à cette conclusion il y a longtemps, de même que le ministère. On a énoncé quelques bonnes idées, mais certaines déclarations sont des platitudes. Je sais que quelqu'un a dit qu'il fallait faire participer les ministères plus tôt dans le processus. C'est très intéressant. C'est bon.

    Mais a-t-on d'autres exemples techniques de la manière dont nous pourrions nous y prendre pour accélérer le processus? Enfin, je veux dire, si nous prenons dix ans, ce n'est pas comme s'il ne se passait rien; il se passe des choses pendant toutes ces années. Mais je suis certain que nous pourrions mener d'autres activités parallèlement.

    Certaines compagnies membres de vos associations ont participé au processus et ont probablement découvert des moyens techniques qui nous permettraient d'accélérer le processus. Je cherche à mettre le doigt sur les mesures techniques précises qu'il nous faudrait prendre, des idées que nous pourrions examiner en vue d'accélérer les choses, parce qu'à l'heure actuelle, la technologie évolue tellement rapidement que quand nous obtenons enfin un produit, il est déjà désuet.

  +-(1215)  

+-

    M. Peter Boag: Il y a une question dont nous avons déjà parlé dans notre exposé, et c'est toute la question des spécifications axées sur la performance ou les résultats. L'une des pires pertes de temps dans le processus actuel — et cela revient à ce qu'on disait au sujet des effectifs — c'est la période de quatre ou cinq ans, dans certains cas, que les ingénieurs du MDN prennent pour définir un énoncé des besoins qui revient parfois à dire à un fabricant d'avion comment il faut s'y prendre pour fabriquer un avion.

    Nous sommes d'avis que, en se fondant sur les capacités dont il a besoin, le ministère devrait être en mesure d'énoncer d'une manière assez brève et succincte quels résultats il veut obtenir en termes de performance en faisant l'acquisition d'un nouveau produit ou service. À mon avis, cela devrait raccourcir de plusieurs années le processus d'acquisition. Je pense que c'est un problème qu'a déjà reconnu M. Ross, le nouveau SMA (Matériel), dans son tour d'horizon de l'organisation; il faudrait être en mesure de préciser en un document d'une page quels résultats doivent être obtenus par une acquisition, par opposition à un document d'ingénierie de 400 ou 500 pages qui est extrêmement descriptif et qui, comme je le disais, revient à dire à une compagnie comment elle doit fabriquer son avion.

    Je suppose que je commencerais par là pour réduire notablement la durée du processus.

+-

    M. Timothy Page: Je souscris sans réserve aux commentaires de M. Boag.

    La réalité du système actuel est que les gestionnaires de projets au MDN acquièrent un sentiment de propriété à l'égard de leur travail, ce qui rend encore plus difficile d'apporter des changements une fois que le projet est mis en branle. L'avantage d'un processus axé sur la performance est que très tôt dans le processus, on ouvre la porte à la communauté des affaires, qui peut décider si elle veut tenter de profiter des possibilités d'affaires qu'on lui offre. Cela raccourcirait les délais et réduirait les coûts autant pour l'industrie que pour le gouvernement, à notre avis.

[Français]

+-

    Le vice-président (M. Claude Bachand): Monsieur Bagnell.

[Traduction]

+-

    L'hon. Larry Bagnell: Ma deuxième question porte sur les droits commerciaux. Je me demande s'il est possible de voir comment nous nous comparons aux États-Unis — vous avez brièvement mentionné les États-Unis — et aux pays européens pour ce qui est d'exercer nos droits commerciaux, et peut-être pourriez-vous faire parvenir ultérieurement au comité un tableau montrant les différents pays en précisant si nous avons du retard dans l'exercice de nos droits commerciaux, si nous n'obtenons peut-être pas autant de retombées locales que d'autres pays. Cela serait utile, parce que nous effectuons une étude en profondeur du processus d'acquisition.

+-

    M. Peter Boag: Eh bien, nous adhérons certainement aux mêmes règles. Je veux dire, quand nous traitons avec les Européens... Évidemment, dans le contexte de l'accord sur les marchés publics de l'ALENA, c'est plus détaillé pour ce qui est des relations avec les États-Unis dans le cadre de l'ALENA. La différence se situe dans la manière dont nous exerçons les droits que nous avons négociés dans le cadre de ces ententes.

    Les États-Unis imposent un certain nombre de critères différents. Je pense que pour un grand système de défense, le contenu américain doit être de 50 p. 100 et il y a un certain nombre d'autres dispositions américaines ou protectionnistes portant sur certains biens et services particuliers.

    Je pense que les Européens en font autant. On pourrait probablement en donner un magnifique exemple — enfin, pas pour nous; de notre point de vue, c'était un mauvais exemple — à savoir la mise au point du nouvel avion de transport militaire A400M. Cet appareil conçu par Airbus Militaire était censé être doté d'un moteur choisi selon un système purement commercial d'appel d'offres. Pratt & Whitney Canada, l'un des soumissionnaires, avait à toutes fins pratiques remporté le concours grâce à une proposition supérieure sur les plans technique et financier, mais la décision a été annulée pendant la fin de semaine à la suite de l'intervention du chancelier allemand, du président français et du premier ministre britannique. L'ingérence politique se situe à ce niveau-là et, en fin de compte, un important contrat a été accordé à un consortium de compagnies européennes.

    C'est donc variable. Certains pays ont mis en place des exigences légiférées, notamment les États-Unis. Dans d'autres pays, cela se passe plutôt au niveau des politiques et de la politique.

  +-(1220)  

[Français]

+-

    Le vice-président (M. Claude Bachand): Monsieur Perron.

+-

    M. Gilles-A. Perron: Merci, monsieur le président.

    Messieurs, bonjour.

    J'essaie de comprendre l'industrie militaire, et ce matin, M. Page, pour la première fois on me la fait comprendre un peu. Cependant, les chiffres que vous avez donnés ne me satisfont pas. Par exemple, vous dites que votre association regroupe 440 membres. M. Boag dit que la sienne en compte 400. Avez-vous des membres en commun? Font-ils tous partie des deux industries? Ces membres sont-ils tous canadiens? Y en a-t-il beaucoup de l'extérieur? Combien y en a-t-il du Québec?

    Dans vos présentations respectives, vous dites tous les deux que vous travaillez dans l'industrie privée et dans l'industrie militaire. J'aimerais que vous me donniez les pourcentages des industries privée et militaire. En ce qui concerne les revenus de 7 milliards de dollars et de 21 milliards de dollars, les ratios de l'industrie privée et de l'industrie militaire sont-ils équivalents? Parmi vos 70 000 employés, incluez-vous les 75 000 employés de M. Boag?

    Concernant les 21 milliards de dollars de M. Boag, vous ne faites aucune mention de l'emploi indirect. L'industrie militaire importe-t-elle beaucoup? Quelle est la part de vos compétiteurs étrangers?

    Enfin, je souhaite connaître la masse salariale totale de l'industrie militaire, et la part du Québec.

    Je pose beaucoup de questions auxquelles vous ne pouvez peut-être pas répondre maintenant, mais vous pourrez nous répondre par écrit un peu plus tard.

[Traduction]

+-

    M. Peter Boag: Je vais me faire un plaisir de répondre aux questions.

    Oui, il y a des recoupements entre nos organisations. Un certain nombre de membres de l'AIAC sont également membres de l'AIDC. Notre industrie comprend quelque 400 compagnies qui, comme je l'ai dit, servent les secteurs de l'aviation commerciale, de la défense et de l'espace. Le gros de notre chiffre d'affaires, plus de 80 p. 100, se situe au niveau de notre clientèle commerciale. Moins de 20 p. 100 — environ 15 p. 100, sauf erreur, 18 p. 100 au cours de la dernière année — représentent nos clients de la défense.

    Cela ne veut pas dire que l'Importance des marchés de la défense est de seulement 18 p. 100, parce qu'il y a un effet de levier extraordinaire...

+-

    M. Gilles-A. Perron: C'est ce que je vous ai dit.

+-

    M. Peter Boag: ...entre le volet défense et le volet commercial. Donc, si l'on supprimait cette tranche de 18 p.100 que représente le marché de la défense, cela aurait des répercussions sur le volet commercial du secteur.

    On ne peut donc pas juger de l'importance relative seulement d'après les chiffres. Notre secteur offre des emplois directs à 75 000 Canadiens. Nous exportons 85 p. 100 de notre production. Les États-Unis sont le principal marché pour écouler les produits et services du secteur canadien de l'aérospatiale; 65 p. 100 de la production est écoulée aux États-Unis. Environ 55 p. 100 du secteur, peu importe qu'on le mesure d'après le volume des ventes ou le nombre d'emplois, se situe dans la province de Québec, et 45 p. 100 dans d'autres régions du Canada, principalement en Ontario, mais il y a d'importantes concentrations du secteur aérospatial à Halifax, Winnipeg, Calgary et dans le sud-ouest de la Colombie-Britannique.

    La plupart des gens comprennent l'importance de l'aérospatiale pour le Québec, mais ne se rendent pas compte de ce que révèlent les statistiques, par exemple que proportionnellement, que l'on mesure en pourcentage du nombre total d'emplois dans le secteur manufacturier ou en pourcentage du PIB, l'industrie aérospatiale est aussi importante pour les économies de Winnipeg et du Manitoba qu'elle l'est pour les économies de Montréal et du Québec. Dans des provinces comme l'Île-du-Prince-Édouard, l'aérospatiale est maintenant le quatrième secteur en importance et le deuxième exportateur. À Lunenburg, en Nouvelle-Écosse, le principal employeur de cette petite localité est une entreprise de l'aérospatiale qui conçoit, met au point et exporte des structures composites avancées de haute technologie qui sont vendues à Airbus en Europe et à Boeing aux États-Unis. C'est donc une industrie pancanadienne, mais elle est très solidement implantée au Québec.

    Voilà donc pour les chiffres. Nous pouvons vous en fournir d'autres...

  +-(1225)  

+-

    M. Gilles-A. Perron: Je vous en serais reconnaissant.

+-

    M. Peter Boag: ...mais voilà un résumé de la structure de l'industrie aérospatiale au Canada.

[Français]

+-

    M. Timothy Page: Je suis content que mon collègue M. Boag ait pris les cinq minutes.

    Nous vous ferons parvenir l'information que vous souhaitez par courriel. J'aimerais ajouter un mot au sujet des salaires. Selon les chiffres qui sont devant moi, les emplois dans ce marché relèvent de la haute technologie et sont bien rémunérés. Nous pourrons vous fournir des statistiques.

[Traduction]

+-

    Le président: Nous allons jusqu'au bout dans notre politique de souplesse.

[Français]

+-

    M. Gilles-A. Perron: Monsieur le président, vous n'avez pas le droit de faire de la politique en parlant de flexibilité.

    Loin de moi l'intention de dénigrer un marché ou l'autre. Je veux avoir une idée de l'ampleur du marché militaire. On me disait, au Royaume-Uni, que l'industrie militaire comptait 300 000 emplois très bien rémunérés. Vous pourriez peut-être comparer le Canada et le Royaume-Uni sur le plan industriel. L'équipement militaire a des retombées importantes.

    Vous n'avez pas parlé des emplois indirects, et cela m'intéresse. Dans le cas de General Motors à Boisbriand, qui a malheureusement quitté mon comté, un emploi chez GM en créait six dans le secteur privé. J'aimerais que votre rapport contienne aussi ce ratio.

+-

    M. Timothy Page: Les 70 000 employés de l'industrie de la défense et de la sécurité incluent les emplois directs et indirects. Je vous donnerai ces pourcentages.

    Par ailleurs, vous avez parlé des parts des industries privée et militaire. Une difficulté s'ajoute, car il faut aussi considérer les membres de sécurité à part. Le budget américain de l'an prochain dépassera les 200 milliards de dollars américains. D'ici peu, on devra fournir des statistiques distinctes pour le privé, la sécurité et la défense.

    Cela dit, beaucoup d'entreprises de notre association produisent autant pour le secteur privé que pour le secteur militaire. Selon nous, il y a moyen d'inciter ces compagnies à davantage de recherche et de développement pour les besoins militaires et de sécurité. C'est ce dont on a parlé plus tôt.

+-

    M. Gilles-A. Perron: Monsieur Page, faites-vous plaisir et donnez-moi les statistiques de la sécurité.

[Traduction]

+-

    M. Ron Kane: Je voudrais faire un bref commentaire sur la nature double de notre secteur. Comme on l'a dit, les capacités de défense débouchent généralement sur des applications commerciales. Nous avons des compagnies comme CAE qui conçoit et construit des simulateurs de vols commerciaux et militaires, mais c'est la même technologie de base. Nous avons une petite entreprise ici dans l'est d'Ottawa qui s'appelle GasTOPS et qui conçoit des capteurs diagnostiques utilisés pour contrôler la santé et la performance des systèmes. La compagnie en vend maintenant au secteur nucléaire, au secteur des navires de croisière, et maintenant au programme de l'avion d'attaque interarmées.

    C'est donc la technologie de base qui est ensuite utilisée dans les diverses provinces.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Perron.

    Nous passons maintenant à M. Khan, qui sera suivi de M. MacKenzie et de M. Rota.

+-

    M. Wajid Khan (Mississauga—Streetsville, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Messieurs, je vous ai écoutés très attentivement et l'un de vous a dit que nous avons une capacité mondiale. Par ailleurs, on a laissé entendre qu'il nous faudrait davantage d'argent consacré à la recherche et au développement provenant du secteur privé aussi bien que du gouvernement. Pourtant, le Canada représente moins de 1 p. 100 du marché mondial des armes. Nous avons d'excellentes compagnies qui peuvent ajouter de la valeur, comme M. Bachand l'a dit tout à l'heure, dans le secteur de la remise à neuf, à Calgary et à Toronto, dans l'aviation aussi bien que dans le matériel militaire.

    Voici la première question que je vous pose. Si nous sommes mal placés sur le marché, est-ce parce que nous ne faisons pas du bon travail pour ce qui est de nous positionner sur le marché? Est-ce que nous nous limitons strictement aux pays de l'OTAN et de l'AFCLL, avec 90 p. 100 de nos marchés? Le gouvernement a-t-il fait suffisamment d'efforts pour créer un environnement réglementaire approprié et pour harmoniser les exigences militaires? L'industrie a-t-elle fait sa part en cherchant activement des possibilités d'investissement sur les marchés étrangers?

    Je ferais aussi bien de poser mes deux questions tout de suite, parce que je suis limité par le temps. Je n'ai que cinq minutes.

    Une grande partie de l'industrie de la défense est caractérisée par la longueur des cycles de développement des produits et le niveau élevé des coûts non périodiques, le tout dans le contexte d'une demande relativement peu fréquente provenant d'un petit nombre de clients. La longueur des délais entre la conception et les ventes rend difficile d'attirer des investissements privés, ce qui exige que les gouvernements financent la plus grande partie du travail de développement des produits. Mais un gouvernement comme celui du Canada a rarement le pouvoir d'achat ou la demande militaire nécessaires pour soutenir la production économique du matériel de défense très coûteux.

    L'industrie canadienne de la défense en fait-elle suffisamment pour se tailler une place sur le marché mondial; et l'industrie compte-t-elle trop fortement sur les contrats américains, en particulier au niveau des sous-systèmes et des produits de créneau?

  +-(1230)  

+-

    M. Peter Boag: Je vais tenter de répondre rapidement aux deux questions.

    Premièrement, pour ce qui est de notre petit pourcentage du marché mondial, je pense vraiment que cela reflète la nature particulière des marchés de la défense et des acquisitions dans le domaine de la défense, c'est-à-dire qu'il faut vraiment commencer dans son propre marché national et assurer ensuite la croissance de l'entreprise en se fondant sur une preuve initiale ou une utilisation au sein du marché national. Nous avons au Canada un très petit marché de la défense. Il a été extrêmement limité au cours des 25 dernières années. Cela a certainement eu une incidence sur la capacité du Canada de mettre au point des produits et des services pour pouvoir ensuite se tailler une place sur le marché mondial.

    Cela dit, étant donné le très bas niveau de dépenses consacrées à la défense au Canada, je pense que l'industrie s'est exceptionnellement bien débrouillée pour assurer un effet multiplicateur à partir de la technologie et de la capacité qu'elle a été en mesure de mettre au point chez nous et réussir à pénétrer des marchés très difficiles qui sont souvent protégés. Je pense donc que nous avons fait du très bon travail, à partir d'une base canadienne très minime, alors que c'est en général un facteur crucial dans notre secteur.

    La deuxième question porte en fait sur la question du partenariat, et si le Canada espère assurer la croissance de ces entreprises sur le marché de la défense ou même le marché de l'aviation commerciale, il doit vraiment affronter un univers complètement nouveau où il y a très peu de programmes nationaux. Il y a surtout des programmes internationaux, autant dans le volet commercial que dans le volet de la défense. Le meilleur exemple qu'on puisse en donner est probablement celui de l'avion d'attaque interarmées, programme dirigé par les États-Unis mais réalisé en partenariat avec un certain nombre de compagnies et, de notre point de vue, c'est très positif pour le Canada.

    Je pense donc que l'une des stratégies clés que le Canada devra appliquer sera de profiter de l'occasion de travailler en partenariat avec ses alliés et, en pareil cas, il s'agit presque invariablement au départ d'un partenariat de gouvernement à gouvernement. Le Canada s'est joint au programme de l'avion d'attaque interarmées aux États-Unis en signant à titre de partenaire de niveau III, c'est-à-dire que le gouvernement fédéral a consenti un investissement important en argent et en nature et a travaillé dans le cadre du programme Partenariat technologique Canada pour donner au secteur le coup de pouce nécessaire pour qu'il puisse mettre au point des technologies adaptées à ce programme.

    Je pense donc que les partenariats seront extraordinairement importants pour assurer la future pénétration et le succès sur les marchés, et le gouvernement a un rôle important à jouer pour appuyer les compagnies canadiennes, en particulier dans le cadre de relations de gouvernement à gouvernement, mais aussi en finançant une partie du coût de la recherche et du développement et en éliminant les obstacles pouvant nuire à l'accès aux marchés.

+-

    M. Timothy Page: En réponse à votre question, monsieur, je dirais que le rôle de la technologie et de l'innovation dans les acquisitions de défense doit être un élément intégré de l'argumentation que nous avons présenté ce matin en faveur d'une approche gouvernementale globale utilisant l'effet de levier des acquisitions de matériel de défense. Je dirais aussi, en guise d'éditorial, que pendant un certain temps, ce n'était pas particulièrement à la mode de promouvoir les intérêts ou les industries du Canada dans le secteur de la défense et de la sécurité. Par conséquent, les efforts relatifs du gouvernement canadien par l'entremise de la promotion du commerce international ont été relativement limités. Dans la mesure où le gouvernement est convaincu que le secteur de la défense et de la sécurité est un élément fondamental et important de la stratégie de croissance industrielle du pays, il englobera dans ses efforts des éléments commerciaux.

    Mais je sais que Dave voulait intervenir là-dessus également.

  +-(1235)  

+-

    M. David Stapley: Très brièvement, nous avons abordé les questions qui m'empêchent de dormir la plupart de mes nuits dans le cadre de mon emploi rémunéré. Voilà comment nous envisageons tout cela.

    Je souscris à ce que mes collègues ont dit. Dans l'ensemble, je pense que le gouvernement fait du très bon travail pour ce qui est d'égaliser les chances dans le domaine de la réglementation et de la politique commerciale. Il va au combat lorsque le besoin s'en fait sentir.

    Je voudrais vous faire part de deux réflexions. Premièrement, une portion très importante de notre capacité industrielle est composée de petites et moyennes entreprises. Compte tenu de leur situation financière, il leur est très difficile de participer directement et activement au marché international. Vous avez donc entendu dire plusieurs fois aujourd'hui que nous devons trouver une stratégie permettant de les intégrer au marché. Ce n'est pas nécessairement le rôle du gouvernement seulement, c'est aussi le rôle de l'industrie. Évidemment, il faut que cela tienne debout sur le plan des affaires. C'est donc une question de stratégie pour faire en sorte de mettre à contribution le coeur même de notre industrie, à savoir les petites et moyennes entreprises.

    Il y a par ailleurs le volet international. Comme Peter l'a dit, on voit rarement ou même jamais un dossier d'acquisition de matériel de défense, un achat international ou national qui ne comporte pas une énorme composante internationale. Par conséquent, toute acquisition de matériel de défense est en même temps une opération de commerce dans le secteur de la défense. À titre de professionnel, par opposition à un représentant d'une association, je voudrais dire encore une fois qu'à mon avis, nous ne faisons pas du très bon travail pour ce qui est de conclure des marchés, si je peux m'exprimer ainsi. Nous sommes des nouveau-nés dans le monde international du commerce de défense, et nous avons perdu certaines habiletés que nous avions il y a des années. Il nous faut une plus forte capacité pour ce qui est de conclure des marchés au niveau le plus élevé.

    Vous avez entendu Peter vous en donner un très bon exemple, à savoir ce qui s'est passé dans le dossier de l'Airbus A400, où nous nous sommes faits évincer par l'appareil bureaucratique, industriel et politique des Européens. Nous devons affronter l'adversaire sans complexe.

    Merci.

+-

    M. Wajid Khan: Très brièvement, en 30 secondes...

+-

    Le président: On vous a accordé autant de souplesse qu'à tous les autres. Je suis la situation de près et j'essaie d'être juste. Nous voulons être équitables.

    La parole est à M. MacKenzie, et ensuite à M. Rota.

+-

    M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC): Merci.

    Je m'excuse, monsieur Khan.

    Vos exposés de ce matin étaient très intéressants, en particulier au sujet de la taille du secteur par rapport à la taille du marché et de ce que vous êtes en mesure de faire dans le reste du monde.

    Souvent, parmi les ministériels, nous semblons trouver réconfortant le fait que nous faisons mieux que les Britanniques dans nos achats, mais 12 ans, cela me semble déraisonnable. Si nous faisions intervenir les ministres dès le début, nous pourrions passer trois, quatre ou cinq ministres différents et trois ou quatre gouvernements différents en 12 ans. Il faut absolument un système — sans chercher à imiter d'autres pays, car nous devrions pouvoir créer un système typiquement canadien — qui permette de réduire ce délai.

    Je n'arrive pas à croire que l'industrie n'est pas forcée de faire beaucoup de tâtonnements en 12 ans, depuis le début d'un projet jusqu'à la fin, essayant de déterminer quels sont nos besoins exacts. Pouvez-vous nous dire s'il y a quelque chose que nous pourrions faire pour réduire ce délai à une période raisonnable? Chose certaine, pour moi, une période raisonnable, ce n'est pas 12 ans.

+-

    Le président: Je crois que la question s'adresse à l'ensemble du groupe, à quiconque veut bien y répondre.

    Monsieur Page.

+-

    M. Timothy Page: Quand nous avons dit que le domaine politique avait un rôle à jouer, nous ne voulions pas dire que c'était au niveau de la définition des besoins. C'était plutôt pour créer un cadre stratégique et politique permettant au gouvernement du Canada de déterminer quels sont ses objectifs généraux dans tout dossier d'acquisition. C'est une distinction qui nous apparaît importante.

    Ce matin, nous avons tenté de donner des conseils précis sur la manière dont le processus d'acquisition pourrait être accéléré et simplifié. J'en reviens à la réponse que nous avons donnée, je crois, à M. Bagnell au sujet de l'approche axée sur la performance par opposition aux prescriptions. En fait, dès qu'on invite un système à prescrire de manière trop précise quels sont les besoins, on se trouve du même coup à allonger et compliquer le processus.

+-

    M. Peter Boag: Je voudrais aussi revenir à certaines observations que M. Stapley a faites au sujet de la concurrence. Je pense que, trop souvent, nous avons vu des concours qui étaient lancés dans le seul but de lancer un concours, mais étant donné la manière dont les exigences étaient prescrites, il s'agissait essentiellement d'acquisitions selon la méthode du fournisseur unique.

    Je pense que nous devrions cesser cette pratique... et puis, bien sûr, parce que l'intervention des ministres et d'autres intervenants s'éternise, l'acquisition finit par être suspendue. On le constate en ce moment même dans le cas d'une acquisition qui était censée être mise sur la voie accélérée il y a deux ou trois ans, mais nous n'avons fait aucun progrès justement à cause de ce type de problèmes systémiques.

    Je n'ai pas réponse à tout, mais nous devons certainement réexaminer le système. Je ne dis pas qu'un autre pays quelconque a un modèle dont nous devrions nous inspirer aveuglément, mais par contre, il ne faut pas non plus réinventer la roue. Si nous pouvons trouver dans d'autres pays des pratiques bien adaptées, nous devrions les adopter, plutôt que d'essayer d'inventer une solution totalement faite au Canada. Cela fait partie du problème que nous avons actuellement au chapitre des acquisitions.

  +-(1240)  

+-

    M. Dave MacKenzie: Est-il juste de dire qu'il n'y a pas grand-chose dans le monde militaire qui soit totalement unique au Canada et que nous n'avons pas besoin d'arriver avec toutes ces exigences techniques qui sont particulières et qui nous causent tellement de problèmes?

+-

    M. Peter Boag: Oui, vous avez absolument raison de dire que cela peut être justifié à l'occasion, mais dans la plupart des cas, non, nous nous dirigeons en fait vers une approche davantage harmonisée, à cause des défis de l'interopérabilité de nos jours.

+-

    M. Timothy Page: J'ajouterais une petite réserve en disant qu'il incombe au gouvernement de déterminer ce qu'il considère être dans notre intérêt national, en fonction des besoins des militaires canadiens ou en fonction des objectifs économiques du Canada, et de prendre des décisions en conséquence.

+-

    M. David Stapley: Pourrais-je ajouter un bref commentaire?

    La mise en oeuvre d'exigences particulières au Canada, pratique qui a été fort répandue au fil des années, est probablement la principale raison qui explique la faiblesse des allocations budgétaires.

    C'est comme quand on achète une voiture, qu'on répare une voiture ou qu'on construit une maison. Si l'on veut modifier l'emplacement de la porte, cela va coûter très cher.

    Les exigences particulières au Canada coûtent énormément cher. C'est un domaine immense dont il faut discuter, en vue d'en arriver à un compromis, entre les militaires spécialistes des exigences et ceux qui financent le tout, parce que cela coûte énormément cher en temps et en argent.

+-

    Le président: Merci, monsieur MacKenzie.

    Nous sommes efficaces; il nous reste encore 20 secondes.

    Le prochain intervenant sera le dernier, parce que nous avons des affaires à régler à la fin, chers collègues, et je vous invite donc à rester.

    La parole est à M. Rota.

+-

    M. Anthony Rota (Nipissing—Timiskaming, Lib.): Le problème, quand on est le dernier sur la liste, c'est que toutes les bonnes questions ont déjà été posées. J'ai modifié ma liste au fur et à mesure.

    J'ai eu récemment l'occasion de rencontrer un brigadier-général qui avait combattu en Iraq. C'était un Américain et il vantait les mérites des magnifiques véhicules Stryker qu'il avait là-bas. Il s'agit en fait de notre LAV III. On lui a apporté quelques modifications, mais pas beaucoup. Essentiellement, les Américains l'ont acheté en ajoutant certaines options.

    C'est l'argument que je semble entendre de plus en plus de la part de militaires provenant d'un peu partout dans le monde. Ils envisagent d'acheter des articles disponibles dans le commerce, en leur apportant des modifications minimes. Cela revient à la discussion qu'on a entendue ce matin. Je suppose que nous, au Canada, n'avons pas vraiment le luxe de faire comme les Américains, qui disent: voici ce que nous voulons et nous allons acheter la totalité de la production. Nous, nous allons acheter des articles disponibles dans le commerce et cela va rendre le processus d'acquisition meilleur marché et plus rapide, et le service sera meilleur pour tous.

    Si j'en reviens à deux ou trois observations qui ont été faites, il me semble que j'entends des arguments contradictoires. Il y a des arguments en faveur de la R et D, mais il y a aussi des arguments voulant qu'il y ait de l'ingérence politique.

    Voici ma question. Quelle serait la meilleure manière de procéder? Devons-nous offrir le meilleur produit disponible et rivaliser avec la concurrence mondiale? Devons-nous déployer nos armes politiques ou bureaucratiques pour tenter de conclure des marchés? Je crois qu'on a utilisé l'expression « conclusion de marchés » en faisant allusion au marché qui a torpillé l'avion ou le moteur de Pratt & Whitney. Quelle est la voie à suivre et comment devons-nous procéder?

+-

    M. David Stapley: Je vais faire quelques brèves observations, après quoi je céderai la parole aux autres.

    Premièrement, le Stryker est peut-être un produit standard, mais ce n'est pas une solution entièrement faite au Canada. Si vous examinez le contenu américain de ce produit et la manière dont le Stryker a été choisi, il y avait tout autant de politique dans ce choix que dans toute acquisition canadienne dont j'ai été témoin durant ma vie.

+-

    M. Anthony Rota: C'est bon à savoir, parce que j'ai besoin de ce renseignement. Merci.

+-

    M. David Stapley: Les autres pourront confirmer ou infirmer cela, mais c'est typique de toute acquisition américaine. Toute cette question de l'achat de produits standards est vraiment fonction de la commodité. En l'absence de ce facteur commodité, on veut obtenir les avantages maximums à la fois pour les militaires et pour l'ensemble du gouvernement et c'est ce que chaque pays s'efforce de faire. Tout dépend donc des facteurs, de la situation et des priorités, quand vient le temps de décider s'il vaut mieux acheter un produit disponible sur le marché ou faire plutôt une acquisition plus réfléchie et peut-être moins commode. En fin de compte, cela prend toujours du temps, comme on le constate dans le cadre du débat actuel sur... Même quand on propose d'acheter des produits préexistants, les dossiers d'acquisition ne progressent pas plus rapidement que si l'on procédait de manière différente.

    Je ne pense pas que l'on puisse dire que c'est bon ou que c'est mauvais. On en revient toujours au thème de la discussion d'aujourd'hui: il faut faire ce qui est le mieux pour le pays. Nous discutons d'acquisition de matériel de défense, et les intérêts des militaires passent donc en premier, en dépit du fait que ceux-ci doivent faire attention de ne pas trop insister sur le caractère unique, et ensuite il faut optimiser les avantages en termes de retombées industrielles et économiques, de création d'emplois, et j'ajouterais d'une certaine réciprocité avec nos partenaires commerciaux. Dès qu'on propose de dépenser même de petites sommes, dès qu'on prononce le mot milliard, je peux vous assurer, à titre de représentant de l'industrie, que ce mot a une forte résonance dans tous les conseils d'administration partout dans le monde. Nous devons en profiter.

  +-(1245)  

+-

    M. Ron Kane: En réponse aux commentaires de M. Stapley sur le coût de la canadianisation pour le budget du MDN, il y a aussi un coût immense pour l'industrie canadienne. Quand on se retrouve avec un produit ou un système canadianisé, c'est très difficile de le revendre sur le marché mondial. Nous ne soutenons pas qu'il est impossible d'avoir certaines exigences particulières au Canada, mais pas au point d'en arriver à la situation évoquée par Peter Boag, quand on dit aux fabricants d'avions comment concevoir des avions...

    Nous avons aussi des exemples sur le marché de produits et systèmes canadiens qui ont été achetés par plusieurs forces armées autour du monde et dont on a jugé qu'ils ne pouvaient répondre à des exigences canadiennes semblables. Si c'est assez bon pour six ou sept autres forces armées, c'est parfois très difficile de comprendre pourquoi cela ne répond pas aux exigences des Forces canadiennes.

+-

    Le président: Merci, monsieur Rota.

    Nous allons mettre fin à la discussion, mais je voudrais d'abord faire une observation et je vous demanderai d'y répondre.

    Premièrement, monsieur Boag, je suis content que vous ayez dit durant votre exposé qu'au cours des dix dernières années à peu près, le processus a été très lent. Je suis content que vous ayez dit cela, parce que cela explique en partie la frustration dont les gens nous font part.

    Par contre, vous avez tous les deux évoqué dans vos observations le besoin de créer un nouveau... premièrement, on a proposé un conseiller indépendant. Vous avez évoqué le système australien, le système britannique et les députés ont fait remarquer que nous devrions avoir une solution canadienne. En allant rendre visite à différents pays pour examiner différents modèles, nous choisirons des éléments de chacun et il faut espérer que nous finirons par mettre au point notre modèle à nous.

    Mais cela dit, je veux vous poser la question suivante. Vous ne nous avez pas parlé du modèle australien. Le modèle britannique comporte un service distinct. Je crois que nous avons rencontré M. Peter Spencer, qui était le chef des acquisitions. Maintenant, il s'agit d'un service tout à fait séparé. Le système est-il semblable en Australie, ou bien est-ce différent? Vous avez évoqué la participation des ministres ou l'initiative des militaires. Je crois que ce ne devrait être ni l'un ni l'autre. Il faut qu'il y ait une solution intermédiaire, j'ose l'espérer et je vous lance simplement cette observation.

+-

    M. David Stapley: Je pourrais peut-être apporter des précisions.

    Premièrement, les systèmes australien et britannique sont différents. Dans le système britannique, sir Peter Spencer est l'équivalent de notre sous-ministre adjoint (Matériel) et il est tout à fait intégré au ministère de la Défense. C'est donc très semblable à la situation au Canada. Les Britanniques sont également en train d'opérer des transformations, comme vous l'avez sûrement entendu, et ils vont amalgamer l'élément très coûteux des acquisitions de matériel de défense, qui est une filière de soutien logistique; ils vont amalgamer cela au ministère britannique de la Défense pour réaliser des gains d'efficience.

    En Australie, il y a eu consolidation. On pourrait soutenir que le système que nous avons ici est plutôt fragmenté pour l'acquisitions de matériel de défense. Nous avons le ministère de la Défense, le ministère de l'Industrie, TPSGC, le Conseil du Trésor et d'autres intervenants. Les Australiens ont amalgamé tout cela, essentiellement, sous un même toit, le tout étant chapeauté par trois dirigeants du niveau de ministre. Le sénateur Hill est en quelque sorte le chef et il y en a deux autres. Mais tout se fait stratégiquement, de concert avec la stratégie industrielle et la stratégie des acquisitions, sous l'égide d'un type nommé Steven Gumley, qui se trouve au ministère de la Défense. C'est donc là que tout est coordonné.

+-

    Le président: Monsieur Boag, est-ce la raison pour laquelle vous avez fait observer qu'il nous faut un énoncé séparé sur les marchés publics? Cela fait-il en quelque sorte écho à ce dont parlait M. Stapley, un énoncé séparé sur les marchés publics?

    Je vais terminer là-dessus. J'ai personnellement le sentiment que si nous voulons rester étroitement centrés sur notre tâche, pas nécessairement au-dessus de nos affaires, je crois que nous devons nous attacher étroitement au dossier des acquisitions comme tel. Vous n'avez pas à répondre à cela.

+-

    M. Peter Boag: J'ajouterais toutefois une simple réserve: pourvu que ce domaine d'étude étroitement ciblé corresponde au mandat et qu'on rende des comptes et qu'on examine les objectifs plus généraux que l'on peut atteindre au moyen des acquisitions, pas seulement l'objectif particulier du ministère client.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup d'être présents aujourd'hui. Vous avez certainement ajouté une pierre à l'édifice que nous tentons de bâtir.

    Un petit rappel en terminant: si jamais vous témoignez de nouveau devant le comité à l'avenir, je vous demanderais de voir à ce que tous les documents que vous présentez au comité soient rédigés à l'avance dans nos deux langues officielles, le français et l'anglais.

    Cela dit, je vous remercie pour votre temps.

    Chers collègues, nous avons certaines affaires à régler.

    Rick, vouliez-vous que nous fassions cela à huis clos?

  +-(1250)  

+-

    M. Rick Casson: Non, ce n'est pas nécessaire.

+-

    Le président: Très bien. Nous allons seulement dire rapidement au revoir à nos invités.

    M. Casson a la parole, si je ne me trompe.

+-

    M. Rick Casson: Merci, monsieur le président.

    J'ai rédigé un avis de motion et je l'ai fait parvenir au greffier, par courriel, je crois. Cela a à voir avec notre réunion du sous-comité, quand nous avons convenu d'avoir des séances portant sur d'autres sujets que la politique de défense. La motion sera présentée jeudi, mais nous voudrions proposer que l'on tienne une séance consacrée à la question de l'agent Orange, la semaine après la semaine de relâche.

    Nous voudrions aussi proposer deux, trois ou quatre témoins que nous aimerions entendre. Il n'y a aucune surprise parmi eux, ce sont seulement des gens de Gagetown qui ont été directement touchés. Le seul qui pourrait prêter à la discussion serait quelqu'un des États-Unis, où le même débat a lieu, qui viendrait nous expliquer comment les Américains procèdent dans ce même dossier, comment ils examinent la question et quelles sont les politiques et pratiques qu'ils ont mises en vigueur là-bas.

    Ce matin, quand nous avons proposé cela, le greffier a demandé — il ne s'adressait pas à moi, mais à mes collaborateurs — que nous présentions une estimation du coût d'une telle réunion. Maintenant, je ne sais pas exactement...

+-

    Le président: Keith secoue la tête.

+-

    M. Rick Casson: ...combien il en coûterait pour faire venir les témoins. Mais n'est-ce pas vrai? Eh bien, c'est ce qu'on m'a dit.

+-

    Le président: Je ne parle pas à sa place... Nous allons lui donner l'occasion de répondre.

+-

    M. Rick Casson: Mais, monsieur le président, je pense que cela fait partie de notre mandat. Nous en avons convenu au sous-comité et en avons saisi le comité. Je pense donc que tout budget nécessaire devrait être... vous savez, s'il faut en discuter ici, je pense que nous pouvons le faire.

+-

    Le président: Y a-t-il des commentaires là-dessus? Je voudrais ajouter mes propres observations.

    Monsieur Martin.

+-

    L'hon. Keith Martin: Nous devons prendre connaissance de la motion d'abord. Nous ne l'avons pas lue. Nous ne pouvons pas la mettre aux voix avant de l'avoir lue.

+-

    Le président: Je lance seulement la discussion, ou bien vous pourrez en discuter quand vous aurez lu la motion.

    Si je peux me permettre, je sais qu'on en a discuté et je suis d'accord avec le vice-président au sujet de l'agent Orange. Je n'en dirai pas plus avant d'avoir lu la motion, mais je sais qu'il en a été question au cours de nos précédentes réunions de planification. Je peux le confirmer. Je suis certain que nous pouvons tous le confirmer.

    Maintenant, quant aux détails... Êtes-vous d'accord pour attendre qu'on ait lu la motion, ou bien voulez-vous en discuter maintenant? C'est votre privilège.

  -(1255)  

+-

    M. Rick Casson: La motion a été remise, mais je n'ai pas...

+-

    Le greffier du comité: Elle n'est pas traduite et je ne l'ai donc pas apportée.

+-

    Le président: Elle n'est pas traduite. Nous ne l'avons pas. Et si je comprends bien la procédure, vous l'avez déposée aujourd'hui pour qu'elle soit mise en discussion à la prochaine réunion. Est-ce bien cela?

+-

    M. Claude Bachand: C'est 48 heures.

+-

    Le président: C'est 48 heures. Personnellement, je n'ai pas d'objection, mais je crois que c'est le règlement.

+-

    Le greffier: Le préavis minimum pour une motion de fond au comité, d'après les motions de régie interne, est de 24 heures.

+-

    Le président: C'est donc 24 heures. Vous voulez donc en discuter comme premier point à l'ordre du jour de la prochaine réunion, qui aura lieu jeudi? Je rappelle à tous les membres du comité que la prochaine réunion commencera à 10 heures.

+-

    M. Rick Casson: Mon intervention constitue-t-elle donc un avis de motion, de sorte que nous pourrons en discuter jeudi?

+-

    Le président: Oui.

+-

    M. Rick Casson: Merci.

+-

    Le président: Monsieur Martin.

+-

    L'hon. Keith Martin: Le seul autre point est que... Je pense que c'est une excellente suggestion, bien sûr. C'est une question dont il faut discuter. Faisons donc en sorte de préciser les noms. Nous aurons ainsi une compréhension complète de ce qui se passe.

    Nous pourrons peut-être en discuter plus à fond jeudi...

+-

    M. Gordon O'Connor: Je pense que quand vous en prendrez connaissance, vous verrez que c'est anodin.

+-

    L'hon. Keith Martin: C'est une question importante.

+-

    M. Gordon O'Connor: C'est seulement que, de temps à autre, nous aimerions établir une politique de défense et nous pencher sur certaines questions dont nous devons vraiment nous occuper.

+-

    Le président: Il est indéniable que c'est pertinent: premièrement, parce qu'on en a discuté dans le cadre de notre ordre du jour; deuxièmement, à cause de l'échéancier. Je sais que j'ai mis l'accent sur le volet acquisition, c'est-à-dire que nous avons demandé à notre personnel de le faire, parce que, si je me rappelle bien, c'était important également pour notre ordre du jour — à moins qu'il y ait un changement. Je ne le crois pas.

    Je vais demander au greffier s'il veut ajouter quelque chose, parce que j'ai remarqué qu'il secouait la tête.

+-

    Le greffier: Ce que j'ai demandé, monsieur, c'est le nombre de témoins et l'endroit d'où ils viennent, parce que c'est ce qui me permet d'établir un budget.

+-

    Le président: Excellent.

    C'est tout? Cheryl.

+-

    Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, PCC): Simple précision: lorsqu'une motion est remise directement au greffier, peu importe qu'elle soit en anglais et en français, est-ce que le point de départ des 24 heures se situe au moment où le greffier la reçoit?

+-

    Le greffier: En fait, peu importe dans quelle langue elle est rédigée, il faut qu'il s'écoule une nuit dans l'intervalle. Autrement dit, si je la reçois à 17 heures un jour donné et que nous nous réunissons à 6 heures le lendemain matin, c'est conforme aux règles.

-

    Le président: Y a-t-il d'autres interventions, chers collègues?

    Merci. Excellente réunion.

    La séance est levée.