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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent des langues officielles


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 21 octobre 2003




¿ 0910
V         Le président (M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.))
V         M. Edmond LaBossière (coordonnateur national, Affaires francophones intergouvernementales (Provinces et Territoires du Canada))

¿ 0915

¿ 0920

¿ 0925
V         Le président
V         M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ)

¿ 0930
V         M. Edmond LaBossière

¿ 0935
V         M. Benoît Sauvageau
V         M. Edmond LaBossière
V         M. Benoît Sauvageau
V         Le président
V         M. Edmond LaBossière
V         Le président
V         M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.)

¿ 0940
V         M. Edmond LaBossière
V         M. Raymond Simard
V         M. Edmond LaBossière

¿ 0945
V         M. Raymond Simard
V         M. Edmond LaBossière
V         M. Raymond Simard
V         Le président
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)
V         M. Edmond LaBossière
V         M. Yvon Godin
V         M. Edmond LaBossière

¿ 0950
V         M. Yvon Godin
V         M. Edmond LaBossière

¿ 0955
V         M. Yvon Godin
V         M. Edmond LaBossière
V         Le président
V         M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.)
V         M. Edmond LaBossière

À 1000
V         M. Eugène Bellemare
V         M. Edmond LaBossière
V         M. Eugène Bellemare
V         M. Edmond LaBossière

À 1005
V         Le président
V         M. Eugène Bellemare
V         M. Edmond LaBossière
V         Le président
V         M. Benoît Sauvageau
V         M. Eugène Bellemare
V         M. Benoît Sauvageau

À 1010
V         M. Edmond LaBossière
V         Le président
V         M. Raymond Simard
V         M. Edmond LaBossière
V         Le président

À 1015
V         M. Edmond LaBossière
V         Le président
V         M. Edmond LaBossière
V         Le président
V         M. Edmond LaBossière
V         Le président

À 1020
V         Mme Kim Harrison (directrice exécutive, Committee for Anglophone Social Action)
V         Mme Stella Kennedy (directrice du conseil d'administration, Health and Social Services, Committee for Anglophone Social Action; Social Worker, Centre Jeunesse Gaspésie-Les Îles)

À 1025
V         Le président
V         M. Benoît Sauvageau

À 1030
V         M. Benoît Sauvageau
V         Mme Kim Harrison
V         M. Benoît Sauvageau
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Benoît Sauvageau
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Benoît Sauvageau
V         Mme Kim Harrison
V         M. Benoît Sauvageau
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Benoît Sauvageau

À 1035
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Benoît Sauvageau
V         Le président
V         M. Raymond Simard
V         Mme Kim Harrison
V         M. Raymond Simard
V         Mme Kim Harrison
V         M. Raymond Simard
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Raymond Simard
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Raymond Simard
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Raymond Simard
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Raymond Simard
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Raymond Simard
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Raymond Simard
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Raymond Simard
V         Le président
V         M. Eugène Bellemare

À 1040
V         Mme Kim Harrison
V         M. Eugène Bellemare
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Eugène Bellemare
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Eugène Bellemare
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Eugène Bellemare
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Eugène Bellemare
V         Mme Stella Kennedy
V         M. Eugène Bellemare
V         Mme Stella Kennedy
V         Le président
V         M. Eugène Bellemare

À 1045
V         Mme Kim Harrison
V         Le président
V         Mme Stella Kennedy
V         Le président
V         Mme Stella Kennedy
V         Le président
V         Mme Stella Kennedy
V         Le président
V         Mme Stella Kennedy
V         Le président

À 1050
V         Mme Stella Kennedy
V         Le président
V         Mme Kim Harrison
V         Le président
V         Mme Stella Kennedy
V         Le président
V         Mme Stella Kennedy
V         Le président
V         Mme Stella Kennedy
V         Le président
V         Mme Kim Harrison
V         Le président
V         M. Benoît Sauvageau
V         Le président
V         M. Raymond Simard

À 1055
V         Le président










CANADA

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 038 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 21 octobre 2003

[Enregistrement électronique]

¿  +(0910)  

[Français]

+

    Le président (M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.)): Nous entreprenons ce matin notre dernière séance avec témoins sur l'étude de l'objet du projet de loi C-202, c'est-à-dire l'ajout d'un sixième principe à la Loi canadienne sur la santé, celui du respect de la dualité linguistique. La Chambre nous ayant renvoyé ce sujet pour étude et rapport à la fin octobre, nous procéderons, à compter de demain, à l'étude d'un rapport.

    Nous recevrons deux témoins ce matin. Le premier est M. Edmond LaBossière, coordonnateur national des Affaires francophones intergouvernementales pour les provinces et les territoires du Canada. Par la suite, nous recevrons des représentantes du Committee for Anglophone Social Action (CASA), Mme Kim Harrison et Mme Stella Kennedy, toutes deux de la péninsule gaspésienne.

    Monsieur LaBossière, je comprends que vous ne pouvez pas parler au nom des provinces, et ce n'est pas du tout ce que nous attendons de vous ce matin. Si les questions vont dans un sens qui fait en sorte que vous ne pouvez pas y répondre, nous comprendrons. Nous cherchons plutôt à connaître la situation des services de santé en français hors Québec pour les communautés linguistiques vivant en situation minoritaire, et surtout l'état d'esprit des gouvernements, du moins autant qu'il peut être saisi et décrit. Nous vous demanderons de faire une présentation, puis nous passerons aux questions et réponses, comme d'habitude.

    Vous avez la parole, monsieur LaBossière.

+-

    M. Edmond LaBossière (coordonnateur national, Affaires francophones intergouvernementales (Provinces et Territoires du Canada)): Merci beaucoup, monsieur Bélanger.

    Premièrement, comme vous l'avez indiqué, je ne peux pas parler au nom des provinces et des territoires même si je travaille pour eux.

J'occupe un poste qui a été créé il y a deux ans et qui permet de coordonner et de planifier des rencontres et des démarches de coopération intergouvernementale.

    Je peux, par contre, parler à partir d'expériences, de constats et de choses pratiques de la question qui vous préoccupe, c'est-à-dire l'accès aux soins et aux services de santé en français. Je poserai aussi une question: de quoi a-t-on besoin pour assurer des soins et des services de santé en français?

    Le rapport du Comité consultatif des communautés francophones en situation minoritaire faisait allusion à trois éléments importants. C'était peut-être dit en d'autres mots, mais il s'agissait essentiellement de l'engagement gouvernemental ou de la volonté politique, et de l'engagement ou de la participation communautaire. Il faut que la communauté soit partie prenante de toute cette démarche et des structures nécessaires. Je ne vous parlerai pas directement de ces trois points, mais je veux y faire allusion dans ce que j'ai à vous présenter.

    L'engagement gouvernemental s'exprime, à mon avis, par certaines choses importantes, certains encadrements. En parlant de ces encadrements--il y en a quatre--, je vais aussi toucher à des points qui vous intéressent particulièrement, à savoir les mécanismes qui sont en place actuellement à travers le pays pour assurer les soins et les services de santé en français.

    Il faut un encadrement politique pour assurer les services en question. L'encadrement politique peut être une loi, des obligations constitutionnelles, une politique bien étoffée, un énoncé et une position clairement exprimés. Quoi qu'il en soit, il faut un encadrement politique quelconque. On sait que, dans bien des gouvernements, il y a un tel encadrement, mais ce n'est pas le cas partout dans le pays.

    On sait qu'il y a des réalités très différentes au pays. Quand on regarde la situation au Nouveau-Brunswick, on voit que des positions fortes ont été prises pour assurer des services à la minorité, mais en réalité, les services ont deux groupes linguistiques dans cette province. Dans d'autres provinces, comme l'Ontario, il y a une loi sur les services en français. Il y a donc une loi qui permet et qui facilite les services de santé en français. Il y a aussi une loi qui a été adoptée à l'Île-du-Prince-Édouard, mais qui n'est pas entièrement proclamée à l'heure actuelle. La loi est proclamée lorsqu'on est prêt à assurer que tel ou tel aspect de la loi sera mis en vigueur.

    Il y a aussi des obligations pour assurer des services en français dans les territoires du Nord, le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut, parce que ce sont des territoires fédéraux.

    Quand on parle des services de santé en français, les autres provinces--j'exclus le Québec, évidemment--n'ont pas nécessairement adopté des mesures législatives aussi fortes. Le Manitoba a une politique sur les services en français qui est en vigueur depuis maintenant 14 ans, et les choses ont quand même progressé avec cette politique. Il y a d'autres provinces qui ont certaines choses en place, mais qui n'ont pas des lois bien étoffées. La Saskatchewan a adopté une politique linguistique il y a quelques semaines. Donc, il y a des choses qui se développent de ce côté-là.

    Il faut un encadrement politique si on veut faciliter la livraison, la prestation et la planification des services en français, mais il faut aussi un encadrement rationnel ou philosophique. J'utilise ce mot parce qu'on peut bien avoir de beaux mots sur papier, mais qu'il faut aussi avoir une notion de ce que signifient les services à la communauté francophone. Il y a des éléments importants dans cet encadrement. Il faut parler d'offre active. L'offre active veut dire qu'on rend les services très accessibles à la communauté.

¿  +-(0915)  

    Nous savons où sont les communautés francophones dans ce pays. Regardons où sont les écoles de langue française, les écoles de la minorité, les écoles de la francophonie canadienne. Cela nous donne déjà une très bonne idée des endroits où il faut assurer les services de santé en français. L'offre active n'est pas une question de mesurer la demande. Il s'agit plutôt de voir qu'il y a des communautés de langue française regroupées dans bien des coins de ce pays et d'offrir activement les services là où vivent ces communautés. Je pourrai aborder cette question beaucoup plus en détail si vous le voulez. L'offre de services là où se trouve la communauté est un élément très important. Il faut avoir des entités entièrement bilingues ou francophones, là où c'est possible, pour assurer les services en français de façon efficace et en tout temps.

    L'encadrement philosophique est aussi important que l'encadrement administratif. Il faut mettre des choses en place pour s'assurer qu'on soit en mesure d'examiner toute la question. Les gouvernements au pays ont tous maintenant ce qu'on peut appeler un bureau des affaires francophones. Ils l'appellent l'Office des affaires francophones en Ontario, ou le Secrétariat des services en langue française au Manitoba, ou le Secrétariat francophone de l'Alberta, etc. Il y a donc un bureau quelconque qui peut s'occuper de la question administrative, mais il faut plus que ça. Il faut des coordonnateurs des services en français dans les ministères concernés. Dans ce cas-ci, on parle de santé, mais il y a aussi les services sociaux qui sont souvent rattachés à la santé. Il y a aussi l'éducation, la petite enfance et ainsi de suite. Il faut donc des coordonnateurs des services en français dans des ministères et des agences. Il en faut aussi lorsque la responsabilité des soins de santé appartient à des autorités régionales, à des régies régionales. Il faut aussi qu'il y ait, à l'intérieur de ces organismes, une structure quelconque qui puisse s'occuper de l'administration et de la planification des services en français. C'est l'aspect administratif.

    Il y a un quatrième encadrement, qui est l'aspect structurel, ce qui rejoint un peu l'idée de structures facilitantes énoncée dans le rapport du Comité consultatif des communautés francophones en situation minoritaire. Les structures facilitantes peuvent varier énormément d'une région à l'autre, mais on parle ici de mécanismes pratiques pour assurer les services en français.

    Donc, il faut un plan. Le plan peut être tel qu'on parle de centres hospitaliers qui sont désignés pour les services en français, de cliniques, d'autres points de livraison, de postes quelconques, d'infirmières publiques par exemple, de foyers ou de centres pour des soins de longue durée, etc. On doit avoir un plan pour tout cela.C'est là qu'il faut travailler avec la communauté afin de mieux planifier ce qui est prioritaire et essentiel pour assurer des services pratiques et des services qui répondent aux besoins de la communauté. Dans bien des cas, il s'agirait de se concentrer sur les services primaires, dans un premier temps. Dans d'autres régions, où il y a des populations francophones beaucoup plus importantes, il est plus facile d'assurer des services secondaires et des services de très haut niveau pour la communauté en situation minoritaire. On peut aussi planifier de façon globale des services en français à ces niveaux. Mais si on comprend bien la communauté, il faut commencer par voir aux soins primaires et à la santé communautaire. C'est très critique.

    Est-ce que les éléments dont on a besoin sur les plans politique, philosophique, administratif et opérationnel sont déjà en place? Est-ce qu'il existe suffisamment d'éléments, à l'heure actuelle, pour nous permettre d'avancer dans la mise en place de ces quatre encadrements? La réponse est oui et non. 

¿  +-(0920)  

    Comme je vous l'ai dit, certaines provinces ont déjà bien des choses en place et font beaucoup pour assurer les services en français dans le domaine de la santé et dans bien d'autres domaines. Parfois, ce n'est qu'une question de peaufiner, de renforcer et d'améliorer ce qui est en place. Dans d'autres régions du pays, par contre, il manque beaucoup de ces éléments. Dans certains cas, il n'y a pas d'encadrement politique de la part du gouvernement provincial. Comme on ne sait pas trop bien ce que la province est prête à faire, la tâche des gens qui doivent planifier et examiner la façon d'offrir les services de santé en français n'est pas simple. Quand on ne connaît pas tout à fait la position de son gouvernement, ce n'est pas facile. Ce n'est pas facile non plus pour la communauté d'avancer avec le gouvernement lorsque l'encadrement politique n'est ni clair ni suffisant.

    L'encadrement philosophique dépend un peu de l'encadrement politique, parce que les deux sont étroitement rattachés. Donc, je répète qu'il s'agit d'offrir activement les services, d'offrir les services là où sont les consommateurs de ces services-là et de créer des entités entièrement bilingues dans la mesure du possible, ou francophones dans d'autres cas, pour assurer les services en question. Du point de vue administratif, il y a des choses en place dans toutes les provinces. Par contre, il y en a d'autres à ajouter pour ce qui est des coordinateurs, des gens qui vont s'occuper de façon très intense de ces questions. Du point de vue opérationnel, il y a de gros manques dans bien des régions du pays; il n'y a pas de plan de services en français bien étoffé dans bien des coins du pays.

    Qu'est-ce qu'on fait pour remédier à cette situation? Il faut des engagements, des incitatifs, des mesures qui vont en encourager plusieurs à aller de l'avant un peu plus vite et d'une façon plus évidente. C'est peut-être là que la collaboration intergouvernementale entre en jeu. La collaboration intergouvernementale peut contribuer à combler certaines lacunes et à faciliter la mise en place d'éléments qui manquent présentement. On sait qu'il existe une quantité d'ententes à l'heure actuelle, des ententes très générales qui parlent de santé dans le sens très large, sans parler de la communauté francophone. Il y a aussi des ententes spécifiques, dont celles qui traitent de l'éducation pour la minorité ou encore de la promotion des langues officielles. Certaines choses peuvent être utilisées, mais d'autres doivent être ajoutées à plusieurs de ces ententes.

    Les ententes qui ont un caractère très général, comme celles qui parlent de santé dans le sens large mais sans préciser les besoins de la communauté, pourraient comporter des éléments qui traiteraient de la question de la communauté minoritaire, de la communauté de langue française. À l'heure actuelle, il y a très peu de ces éléments dans ces ententes. Les autres ententes plus spécifiques, comme celle qui porte sur l'éducation, peuvent être utiles pour faciliter la formation de professionnels dans le domaine de la santé, mais à l'heure actuelle, ces ententes visent surtout les écoles primaires et secondaires et, en partie, les collèges et universités de langue française. Toutefois, je ne suis pas certain qu'il y ait suffisamment d'éléments en place pour s'assurer que le dossier de la santé en français avance réellement. Quant aux ententes de promotion des langues officielles, il en existe maintenant pour toutes les provinces et territoires du pays, la dernière ayant été signée avec la Colombie-Britannique il y a un an et demi ou deux ans. Cependant, les montants d'argent en question ne sont pas énormes; ils varient d'à peu près 1,4 million de dollars à 350 000 $.

¿  +-(0925)  

Avec ce genre de somme, on ne peut pas réaliser de grandes choses. Il est vrai que dans le Plan d'action fédéral, on parle d'augmenter l'enveloppe reliée à l'entente appelée PLO, ou Promotion des langues officielles, mais il ne s'agit pas d'une grosse augmentation. On parle, je crois, de faire passer le montant de 12 à 15 millions de dollars par année.

    Or, certaines provinces--je pense entre autres à la Saskatchewan, qui vient d'adopter une politique linguistique--veulent accroître les services en français. Elles sont par le fait même grandement intéressées à élargir l'entente et à multiplier les démarches pour promouvoir les services en français. Malgré tout, et cela est à mon avis encourageant, il semble se développer au pays une certaine culture favorisant la collaboration entre les gouvernements.

    On peut citer, à titre d'exemple, la Conférence ministérielle sur les affaires francophones, qui a vu le jour en 1994 et qui a, si j'ose dire, pris de l'ampleur à compter de l'an 2000. On semble avoir abordé des questions plus substantielles lors des conférences de 2000, 2001, 2002 et 2003. En outre, en 2002, à St. John's, les ministres et députés présents ont signé une déclaration de principes gouvernementaux concernant la francophonie canadienne; on parle ici de leadership gouvernemental. Le fait que toutes les provinces aient signé une entente et publié des principes visant à développer la francophonie canadienne et à permettre aux francophones, individuellement et collectivement, de vivre et de s'épanouir en français partout au pays constitue vraiment une chose intéressante.

    Cette année, à Winnipeg, l'adoption d'un premier plan d'action intergouvernemental a donné à la conférence ministérielle une orientation un peu différente. Il s'agit d'un premier plan, et certains n'y verront peut-être rien de grandiose. En fait, ce qui constitue ce plan n'est pas extraordinaire en soi, mais il reste qu'on a commencé par un plan d'action intergouvernemental qui permet de prendre connaissance des démarches entreprises collectivement. Dans bien des cas, on tient à procéder ainsi en collaboration avec le gouvernement fédéral.

    Je vous parle de cela parce qu'il me semble encourageant de voir que les gouvernements semblent plus qu'auparavant disposés à collaborer entre eux pour faire progresser des dossiers importants pour la francophonie canadienne.

    Je pourrais aborder d'autres questions, mais je vais plutôt m'arrêter et vous inviter à me demander des précisions sur des points précis que vous aimeriez clarifier.

+-

    Le président: Merci, monsieur LaBossière.

    Monsieur Sauvageau.

+-

    M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Bonjour, monsieur LaBossière, et bienvenue parmi nous. Vous êtes le dernier témoin à s'exprimer sur le sujet. J'aimerais vous poser quelques questions.

    Vous êtes très fortement engagé à l'égard des dossiers, qui sont surtout provinciaux mais qui ont un lien direct avec le fédéral. Or, quand le fédéral signe une entente avec les provinces, est-ce que quelqu'un à l'intérieur de l'organisation s'assure que la question des langues officielles y est respectée? Je vous donne quelques exemples.

    En janvier 2003, à Toronto, les premiers ministres des provinces ont signé une entente portant sur le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Selon vous, dans ce contexte, est-ce que le gouvernement fédéral a pris en considération le respect de la Loi sur les langues officielles ou la promotion des langues officielles à laquelle l'oblige la Loi sur les langues officielles? Sinon, qu'ont fait votre organisation ou les gens qui se préoccupent de la francophonie pour sonner l'alarme et faire savoir au gouvernement fédéral qu'il avait manqué à ses obligations?

    Savez-vous si, dans le cadre de la récente mise sur pied du Conseil national de la santé, on a fait mention du respect de la Loi sur les langues officielles et des obligations du gouvernement fédéral en vertu de cette dernière?

    En outre, est-ce que vous savez si, là où le gouvernement fédéral est le seul intervenant en matière de soins de santé en français--auprès des autochtones et des anciens combattants, par exemple--la Loi sur les langues officielles est respectée?

    Autrement dit, il va sans dire que je serais favorable à une plus grande collaboration entre le fédéral et les provinces au chapitre des soins de santé et du respect du français. Toutefois, j'aimerais d'abord savoir si le fédéral, là où il est le seul responsable, a mis de l'avant les principes qu'il veut proposer aux autres paliers de gouvernement.

¿  +-(0930)  

+-

    M. Edmond LaBossière: N'ayant pas été présent aux discussions, je ne peux pas dire si quelqu'un a abordé le sujet. Cependant, si on regarde ce qui se trouve dans ces textes et ententes, on voit bien que la question des communautés francophones a fait l'objet de très peu de discussions.

    Par contre, avant de répondre en détail à certaines des questions, je veux vous indiquer que lors de la conclusion de certaines ententes, dans certaines régions du pays, des bureaux, des autorités, des responsables quelconques se sont préoccupés de s'assurer qu'il y ait des clauses pour la communauté francophone dans certaines ententes. Je pense entre autres aux ententes sur l'immigration. Dans les ententes fédérales-provinciales sur l'immigration signées par plusieurs provinces, on trouve des articles qui font allusion à la nécessité de prendre en considération la communauté francophone. Donc, oui, il y a parfois des gens, des gouvernements ou des bureaux qui s'en occupent, que ce soit du côté fédéral ou du côté provincial. Dans d'autres cas, c'est peut-être moins évident.

    Quand il s'agit de conclure une entente fédérale-provinciale plus spécifique à une province et que la province a déjà adopté une position assez claire sur la question de sa communauté francophone, il se peut que la province ait plus automatiquement le réflexe de se préoccuper de sa communauté francophone. Quand une entente est négociée entre les deux niveaux de gouvernement et que la province n'a pas encore mis en place l'encadrement politique auquel je faisais allusion tout à l'heure, la province n'a pas nécessairement le réflexe d'y penser. Je ne blâme pas particulièrement les gens; je dis simplement que dans ces provinces, on n'a pas encore une culture qui fait qu'on y pense automatiquement. Maintenant, est-ce qu'il appartient au gouvernement fédéral de soulever cette question? Je pense que dans certains cas, il ne serait pas mauvais que le partenaire fédéral examine plus spécifiquement cette question.

    Quand il s'agit d'une entente un peu plus globale, dans laquelle il y a quelque chose pour toutes les provinces et tous le territoires, il y a encore du chemin à faire quant à cette question de la communauté francophone. Par contre, même s'il s'agit d'une entente globale, il y a des choses qui peuvent se faire quand les gouvernements provincial et fédéral veulent assurer des services en français à la communauté de langue française. Cela arrive aussi.

    Vous avez parlé de l'Entente sur le Conseil national de santé. Jusqu'à maintenant, on n'a rien entendu au sujet de la nécessité de tenir compte des services en français.

¿  +-(0935)  

+-

    M. Benoît Sauvageau: Je m'excuse de vous interrompre, mais nous sommes limités dans le temps. Je trouve que c'est un bel exemple du fait qu'on écrit une chose et qu'on fait son contraire.

    Dans le discours du Trône, le gouvernement nous a dit que les communautés de langue officielle seraient importantes pour lui. Parallèlement, on a formé un énième comité pour écrire le Plan Dion, qui est sorti en mars 2003. En janvier 2003, on avait assez bien défini les orientations, et les consultations des communautés francophones avaient été faites. Parallèlement à cela, on a signé des ententes comme le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. On a fait fi de ce qu'on avait écrit dans le discours du Trône et on a négligé de tenir compte des communautés de langue officielle et de la Loi sur les langues officielles. Plus récemment, on a créé le Conseil national de santé tout en ignorant ce qu'on avait écrit dans le discours du Trône et dans le Plan Dion. On écrit une chose et on fait son contraire.

    Vous n'avez pas répondu à ma question. Là où il est le seul responsable, c'est-à-dire au niveau des hôpitaux et des soins de santé pour les autochtones et les anciens combattants, le fédéral respecte-t-il ses obligations linguistiques? C'est ma première question.

    Voici ma deuxième. Le Plan Dion, dont on va fêter bientôt le premier anniversaire, prévoyait des sommes pour les services de santé. J'ai parlé avec des gens du Manitoba la semaine dernière et ils m'ont dit qu'ils n'avaient pas encore vu le début du commencement de la mise en oeuvre du Plan d'action Dion sur le terrain, entre autres au niveau de la santé. Est-ce que quelque chose a été fait à ce niveau, selon vous?

    Nous aurons un deuxième tour et j'aurai alors une question à poser à notre recherchiste.

+-

    M. Edmond LaBossière: Premièrement, en ce qui concerne la question des anciens combattants et des autochtones, je ne me sens pas vraiment en mesure d'en parler, parce que mon travail porte plutôt sur les affaires francophones.

+-

    M. Benoît Sauvageau: Oui, mais...

+-

    Le président: Monsieur Sauvageau, nous allons laisser M. LaBossière répondre, s'il vous plaît.

    Monsieur LaBossière, continuez.

+-

    M. Edmond LaBossière: J'aimerais simplement dire que je ne me sens pas vraiment en mesure de répondre à cette question sur les anciens combattants et les autochtones.

    Vous avez aussi demandé si on avait commencé à faire quelque chose avec les sommes d'argent qui ont été identifiées. Je crois qu'on parle de 119 millions de dollars dans le plan d'action fédéral pour la santé et 75 millions de dollars pour la formation. Il y a du travail qui est fait, à l'heure actuelle, par un consortium des universités et des collèges de langue française. Donc, il y a du travail qui a commencé dans ce sens-là. Je ne pense pas qu'on puisse dire qu'il y ait déjà un grand résultat, mais c'est encourageant de voir que cette démarche se fait de façon beaucoup plus concertée entre les collèges et universités.

    Le consortium est venu faire une présentation aux ministres à Winnipeg, il y a un mois, et les ministres ont été encouragés de voir que cette collaboration se développait au niveau des collèges et des universités. Il faut donc prévoir que des résultats assez intéressants pourraient découler de cette démarche. Les collèges et universités ont donc reçu un premier appui dans le plan d'action fédéral.

    Sur le plan du réseautage, il y a aussi des montants, mais j'ignore les chiffres exacts. Les premiers montants ont servi à aider les communautés francophones à travers le pays à se structurer et à se concerter en discutant non seulement avec des membres de leurs communautés, mais aussi avec des décideurs politiques et d'autres personnes très impliquées dans les dossiers de la santé.

+-

    Le président: Monsieur LaBossière, nous reviendrons à vous.

    Monsieur Simard, allez-y.

+-

    M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Bienvenue, monsieur LaBossière. Vous avez dit tout à l'heure que le Manitoba avait une politique linguistique depuis 14 ans, et la Saskatchewan, depuis quelques semaines. Cela présente des défis intéressants. Mais où se situe la santé dans tout cela? Évidemment, on parle aussi d'éducation, de programmes sociaux, etc. La santé est-elle prioritaire?

¿  +-(0940)  

+-

    M. Edmond LaBossière: Il semble que dans les discussions qu'on a eues lors des conférences ministérielles sur les affaires francophones depuis 2000, on a abordé surtout les dossiers de la petite enfance, de la santé et du développement économique. On a aussi parlé d'immigration francophone et, plus récemment, de développement culturel francophone et d'accès à la justice en français. Alors, il y a quand même de grands dossiers importants pour la communauté francophone qui sont sur la table à l'heure actuelle.

    Dans ces conférences, on a aussi discuté de dossiers dont chaque province et territoire doit s'occuper individuellement. C'est plus récemment qu'on a commencé à parler de démarches collectives, ce qui n'empêche pas qu'il y ait encore des démarches individuelles. Alors, il y a un intérêt à voir avancer ces dossiers.

    Par contre, on reconnaît que cela ira à différents rythmes selon le contexte, politique ou autre, des diverses régions. À Winnipeg, par exemple, on a parlé d'étudier sérieusement la possibilité d'avoir une ligne d'information sur la santé en français à un niveau régional ou même national. Je pense que ce sera plutôt à un niveau régional, dans l'Ouest canadien.

    On voit qu'on commence à établir une telle ligne au Manitoba. Est-ce que cette ligne pourrait aussi servir aux francophones de la Saskatchewan? C'est une question à explorer. Est-ce que cette ligne pourrait aussi servir aux francophones des Territoires du Nord-Ouest? C'est à étudier.

    Même si on dit qu'on veut étudier cela, il y a des choses à considérer sérieusement, à savoir quelles sont les implications du point de vue juridique et mille et une autres questions. Au moins, nous avons intérêt à voir si nous pouvons utiliser des ressources pour assurer des services de ce genre, en nous méfiant un peu des frontières.

    Est-ce que d'autres coins du pays pourront faire la même chose, comme la région atlantique? C'est possible, mais ça reste à voir. Mais la santé est bel et bien une priorité. À quelle vitesse cela va-t-il aller dans chaque région? Je ne peux pas vous le dire à l'heure actuelle.

+-

    M. Raymond Simard: Vous avez parlé de nos communautés. On sait où se trouvent nos communautés en milieu minoritaire. Si j'ai bien compris, vous voulez dire qu'on devrait offrir des services là où le nombre le justifie. Je ne veux pas vous mettre les mots dans la bouche, évidemment, mais certains témoins qui sont venus ici ne trouvent pas cela acceptable. En effet, nous avons des lois qui protègent les gens en milieu minoritaire telles que la Loi canadienne sur la santé et la Loi sur les langues officielles. Trouvez-vous acceptable qu'on desserve seulement les communautés là où se retrouvent les gens? Comme comité, nous avons le mandat d'étudier cette question pour voir s'il est acceptable d'offrir le minimum en santé seulement là où le nombre le justifie.

+-

    M. Edmond LaBossière: Je n'ai pas utilisé l'expression «là où le nombre le justifie». J'ai simplement dit qu'on savait où sont les francophones. Quand on voit où se trouvent les écoles de langue française au pays, on a déjà une très bonne idée des endroits où il faut envisager d'offrir des services en français dans le sens large. Cela n'exclut pas que des gens disséminés dans une région puissent avoir accès à des services en français. Dans certains cas, ils peuvent y accéder à distance, par téléphone, par Internet et ainsi de suite. D'autres devront peut-être se déplacer un peu. Il peut aussi y avoir des équipes volantes qui font le tour de certaines régions.

    Quand on voit où se trouvent les écoles françaises, on a déjà une bonne indication pour planifier des services de base et voir à les offrir dans ces régions. Je veux simplement dire qu'on n'a pas besoin d'essayer de mesurer la demande. On reconnaît qu'il existe des francophones qui souhaitent obtenir des services en français là où il y a une école de langue française.

¿  +-(0945)  

+-

    M. Raymond Simard: Merci. Des témoins ont indiqué au comité qu'on avait différentes options pour assurer l'offre active de services en français dans le domaine de la santé. Par exemple, on peut le faire en vertu de la Loi canadienne sur la santé et de la Loi sur les langues officielles. D'autres témoins ont indiqué que, même si cela est de compétence provinciale, le fédéral investit des sommes importantes dans le domaine et qu'on pourrait utiliser des bonis ou des pénalités. On est même allé jusqu'à dire cela. J'aimerais savoir quelle est votre perspective à cet égard.

+-

    M. Edmond LaBossière: On peut faire certaines choses qui ne coûtent pas très cher pour assurer des services en français. En disant cela, je ne veux pas donner à penser qu'on n'a pas besoin d'investir des grosses sommes d'argent. Parfois, quand on a un plan de services en français, on désigne des postes, ce qui implique qu'il y ait des gens pour combler ces postes. Si des personnes bilingues occupent ces postes, souvent, cela ne coûte pas plus cher. Ce n'est qu'une question de conceptualiser et de décider des endroits où on doit offrir les services. Il y a cependant des coûts qui sont rattachés à la planification et à la conceptualisation. Il faut peut-être aussi restructurer certains services, et là il peut y avoir des coûts.

    Je dis donc qu'il faut voir à mettre des sommes suffisantes selon le contexte et selon les réalités un peu différentes de chacune des régions du pays. Il est bien possible qu'il faille des montants différents pour assurer les services en français dans une région de l'Atlantique et dans une région de l'Ouest ou en Ontario. Dans l'est de l'Ontario, où il y a près d'un quart de million de francophones qui vivent dans une région quelconque, on peut désigner des établissements entiers pour assurer des services bilingues ou des services en français. Dans un centre hospitalier dans une ville de l'Ouest canadien, ce n'est pas du tout la même chose. Qu'est-ce qu'il va falloir, dans ce contexte, pour assurer les services en français? Il faut bien étudier la situation avec la communauté de la province pour en arriver à un plan.

    Les coûts rattachés aux postes désignés bilingues sont bien moins élevés qu'on aurait pu le penser. Entre autres, avec le rapport Gauthier et le rapport Chartier au Manitoba, on a fait des choses qui ne coûtaient pas énormément cher après qu'on se soit engagé à planifier et à conceptualiser les services en français. Il va falloir de l'argent, bien sûr. On pourra parfois se servir des montants existants, mais dans d'autres cas, il faudra ajouter de l'argent à des enveloppes ou créer de nouvelles enveloppes. On devra peut-être mettre sur pied un programme sur la santé en français, semblable à celui qui existe en éducation ou dans d'autres domaines. Il ne faut pas négliger la possibilité de créer un programme de santé en français.

+-

    M. Raymond Simard: J'y reviendrai au deuxième tour.

+-

    Le président: Merci, monsieur Simard.

    Monsieur Godin.

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Merci, monsieur le président.

    Bienvenue, monsieur LaBossière. Vous parliez des responsabilités provinciales, et M. Sauvageau disait que le fédéral devait inciter ou même forcer les provinces à s'acquitter de leurs responsabilités en matière de langues officielles. Il serait important que le fédéral respecte lui-même les langues officielles dans ses propres institutions. Êtes-vous d'accord avec moi pour dire qu'il serait très utile qu'on commence par cela?

+-

    M. Edmond LaBossière: Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, c'est l'engagement gouvernemental qui est important. Cet engagement gouvernemental s'exprime de toutes sortes de façons. Je pense qu'on constate un certain engagement au palier fédéral, comme c'est le cas dans plusieurs provinces et territoires. Toutefois, j'admets qu'il y a des manques des deux côtés dans plusieurs cas.

+-

    M. Yvon Godin: Pouvez-vous nous expliquer ce qu'est pour vous l'engagement du fédéral? On ne semble pas voir les résultats. L'engagement du fédéral, est-ce seulement des beaux mots à la Chambre des communes? Quels sont les engagements que vous voyez? L'engagement et le produit sont deux choses.

+-

    M. Edmond LaBossière: Je pourrais dire qu'il y a énormément de lacunes ici, mais je peux aussi parler de choses que je considère positives. D'après moi, la Loi sur les langues officielles a été quand même une expression d'engagement du gouvernement canadien il y a longtemps. Le renforcement de cette loi est aussi un témoignage d'engagement. Le plan d'action fédéral ne permet pas nécessairement de tout faire et n'est peut-être pas suffisant sous bien des aspects, mais c'est un plan avec lequel on peut travailler pour améliorer certaines choses. Mais il faut aussi d'autres démarches et d'autres ententes. Si on développe un programme ou si on conclut des ententes plus particulières dans le domaine de la santé entre le gouvernement fédéral et le gouvernement d'une province, les deux ordres de gouvernement vont s'engager quant à certaines questions. Par exemple, si on conclut une entente Canada-Manitoba sur les services de santé en français, je pense que les deux gouvernements auront la volonté de s'asseoir et de regarder sérieusement ce que cela peut vouloir dire, tout comme on l'a fait en éducation et dans d'autres domaines. Cela exige beaucoup de ressources et bien d'autres choses, mais il faut commencer quelque part. Nous devons bâtir sur les acquis et améliorer ce qui est en place, ou bien trouver de nouvelles façons de faire, parce que les manques sont assez flagrants dans certains cas.

¿  +-(0950)  

+-

    M. Yvon Godin: Mais comment peut-on bâtir et établir des choses nouvelles quand la volonté politique n'est pas là? Je ne veux pas changer de sujet, monsieur le président, mais prenons l'exemple des inspecteurs de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Les municipalités francophones de la péninsule acadienne, au Nouveau-Brunswick, sont allées en cour parce que l'agence avait transféré les services de Shippagan, au Nouveau-Brunswick, à Shediac. Elles ont gagné leur cause et le gouvernement fédéral a fait appel. Comment peut-on avancer en tant que minorité si, à chaque fois qu'on gagne quelque chose en cour, le fédéral fait appel? Le fédéral dit qu'il s'engage. Il fait le Plan Dion et consacre des millions de dollars à la promotion du français, mais il nous combat en cour. Je ne veux pas changer de sujet, mais c'est une question de volonté politique. Est-ce que la volonté politique existe ou non?

    Je vous donne un deuxième exemple, celui de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales. La Loi électorale dit clairement que la commission peut tenir compte de la communauté d'intérêts. Présentement, au Nouveau-Brunswick, l'Association francophone des municipalités se bat en cour contre le gouvernement fédéral parce que la commission n'a pas tenu compte de la communauté d'intérêts pour donner aux francophones la possibilité de rester dans les régions francophones. Encore là, le gouvernement fédéral va intervenir et dire que cela ne devrait pas s'appliquer. Comment peut-on, d'une part, dire qu'on veut que le bilinguisme existe au Canada et que les deux langues soient respectées et, de l'autre, aller se battre en cour contre les communautés qui exigent que cela soit respecté?

    Trouvez-vous que le gouvernement devrait donner l'exemple dans des occasions comme celles-là pour montrer qu'il fait vraiment la promotion des deux langues officielles? Ne trouvez-vous pas que cela démontre qu'il fait le contraire de ce qui est sur papier ou des beaux mots qu'on trouve dans le discours du Trône?

+-

    M. Edmond LaBossière: Je pense que l'histoire est parsemée d'exemples de démarches gouvernementales qui n'ont pas toujours été favorables à la communauté francophone. Dans des provinces ou des régions, il y a bien des démarches gouvernementales qui n'ont pas été tellement glorieuses.

    Pour ma part, je suis un optimiste en ce sens que j'aime bien regarder le côté positif et travailler pour améliorer les choses. Bien sûr, il faut tenir compte des défauts des gouvernements. Vous soulevez quelques pistes qui méritent peut-être d'être explorées davantage. Je ne connais pas suffisamment ces cas pour être en mesure de vous dire que c'est terrible ou que ce n'est pas acceptable. Ce ne l'est probablement pas dans bien des sens. Mais comment fait-on pour aller de l'avant? C'est vraiment la question qui m'intéresse.

¿  +-(0955)  

+-

    M. Yvon Godin: Alors, vous allez de l'avant.

    Tout à l'heure, vous disiez qu'à certains endroits, il fallait offrir de la formation, c'est-à-dire ouvrir une nouvelle institution ou faire quelque chose. Par exemple, on reconnaît qu'à certains endroits, il pourrait y avoir des écoles francophones et des écoles anglophones, comme il pourrait y avoir des hôpitaux francophones et des hôpitaux anglophones, ou des hôpitaux bilingues, où le personnel serait bilingue. On ne veut pas faire de tous les francophones des anglophones, et on ne veut pas faire de tous les anglophones des francophones. Ici, on parle d'un service que les gouvernements vont donner à la population au Canada, où deux peuples, les francophones et les anglophones, sont reconnus officiellement. Il faut que ces gens puissent avoir un service.

    Maintenant, il faut que les gouvernements en arrivent à une entente selon laquelle on prendrait cela en considération dans les sommes d'argent versées. Il y a une loi. Il ne s'agit pas seulement d'être optimiste ou positif et de travailler de cette manière. Si je roule sur la route à 120 km/h dans une zone où la limite est de 100 km/h, je me ferai arrêter, parce que c'est la loi. La loi n'est pas seulement optimiste; elle ne dit pas qu'il faut me donner une chance, que ça prend du temps et qu'il faut m'éduquer. C'est la loi. Si la police m'arrête, ça va me coûter tant et je vais perdre des points.

    Vous dites que nous devons prendre notre temps, être optimistes et travailler ensemble. Je pense qu'il y a un peu trop de cela dans votre discours. Il s'agit plutôt de rappeler à nos gouvernements qu'on a une Loi sur les langues officielles. Quel est le vrai programme? Comment allons-nous arriver à notre but?

+-

    M. Edmond LaBossière: Je suis d'accord avec vous sur bien des points, monsieur Godin. Je suis d'avis que dans certains cas, il faut y aller d'une façon beaucoup plus déterminée pour faire avancer les dossiers, mais dans d'autres cas, la réalité est qu'il va falloir établir des bases beaucoup plus solides. Je vais être très honnête avec vous: on n'est peut-être pas en mesure de faire avancer les choses très rapidement dans certains coins du pays, mais dans d'autres cas, la volonté et les encadrements dont je vous parlais tout à l'heure sont là.

    Est-ce qu'il y a des choses qui pourraient être faites du côté fédéral? Probablement. Il faudrait des mesures d'ampleur nationale pour faire avancer certaines questions. Il faudrait que la question de la communauté francophone soit mise sur la table automatiquement dans bien des circonstances. Ce n'est peut-être pas suffisant, à l'heure actuelle, de poser cette question dans bien des discussions avec les autres partenaires. Il faut regarder cela.

+-

    Le président: Merci, monsieur LaBossière et monsieur Godin.

    Monsieur Bellemare, allez-y.

+-

    M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Monsieur LaBossière, cela fait chaud au coeur de savoir qu'on a ici le responsable des affaires francophones intergouvernementales. En ce qui a trait aux services de santé aux minorités linguistiques, si un programme de coopération intergouvernementale en santé voyait le jour, selon vous, quels seraient les secteurs où un partage des coûts serait possible? Je vais en nommer quelques-uns pour vous aider. Est-ce que ce seraient les soins primaires, les soins à domicile et les soins communautaires, les ressources humaines et la formation, les lieux d'accueil, la formation, le réseautage, la télémédecine ou la recherche?

+-

    M. Edmond LaBossière: Il y a probablement un peu de tout cela. Quand on regarde un plan de services en français pour une région, les responsables de ces questions et le groupe visé, qui est la communauté francophone, sont souvent en mesure de dire ce qui est prioritaire et essentiel dans un premier temps.

    Dans certains cas, on peut en faire un peu dans tous ces domaines, et dans d'autres cas, cela peut être axé sur la santé communautaire et les soins primaires. Si on part à zéro dans une région ou dans une province, il y a des communautés et des gens qui vont vous dire que les soins primaires sont importants ou même primordiaux. Dans une région où il y a déjà beaucoup de choses en place, les gens vous diront qu'il est nécessaire d'améliorer certaines choses à un niveau plus élevé que celui des soins primaires.

    Je ne peux pas vous dire que sur le plan national, il faut mettre l'accent sur telle ou telle chose. On sait que la santé communautaire et les soins primaires sont les éléments de base, mais laissons les communautés et leurs gouvernements, provinciaux ou territoriaux, se réunir avec le gouvernement fédéral afin de voir sérieusement ce qu'il est possible de faire dans une région pendant une période quelconque. On se donne un plan de cinq ans. Par exemple, on établit un plan de cinq ans en Saskatchewan. Ce plan pour dispenser les services de santé en français ne sera pas le même qu'un plan quinquennal établi au Nouveau-Brunswick ou en Ontario. Ces plans seront différents. Laissons chacun établir le plan qui a du sens chez lui. Les gouvernements provinciaux et territoriaux disent au gouvernement fédéral de leur donner de la flexibilité parce que la réalité n'est pas la même partout et que tous ne sont pas au même niveau quand il s'agit des services en français et des affaires francophones. 

    Oui, il pourrait y avoir une entente ou un programme national quelconque, mais il devrait comporter beaucoup de flexibilité pour permettre aux choses d'évoluer à un rythme qui ait du sens et qui soit réaliste pour la région.

À  +-(1000)  

+-

    M. Eugène Bellemare: Je crois que votre réponse sur la question de la flexibilité est très raisonnable, mais ayant eu des expériences à différents niveaux de gouvernement, nous savons tous que c'est toujours une question d'argent. Le fédéral parle toujours de partenariats, mais il arrive souvent que les partenaires ne peuvent pas se permettre d'être des partenaires sur le plan financier étant donné qu'on leur fait une multitude de demandes de fonds.

    Est-ce qu'on devrait cibler les choses les plus nécessaires? Devrait-on commencer par les soins communautaires ou les soins primaires? Ne devrait-on pas cibler l'un de ces éléments ou les deux selon les besoins de chaque région? Est-ce que le fédéral ne devrait pas dire qu'il est prêt à payer au complet la note d'un projet-pilote d'un an, deux ans ou même trois ans et que, par la suite, il établira un partenariat avec la province si le besoin a été prouvé? Que pensez-vous de cela?

+-

    M. Edmond LaBossière: Encore là, je dois dire que je ne suis pas d'accord sur l'idée de réserver de l'argent pour une certaine tranche de services, car les réalités sont trop différentes d'un endroit à l'autre du pays. Mes collègues des provinces et des territoires me disent carrément qu'on ne peut pas avoir un programme national dont l'application sera la même partout parce que la réalité...

+-

    M. Eugène Bellemare: Je vais reprendre ma question.

    Si le gouvernement fédéral allait dans les communautés pour rencontrer les médecins, les usagers et ceux qui sont un peu politisés ou bien versés dans les questions francophones, ou anglophones au Québec, et que ces gens disaient que dans leur communauté, il faudrait faire telle chose si on veut faire un premier pas dans la bonne direction pour ce qui est des services de santé dispensés aux francophones ou aux anglophones en situation minoritaire, le fédéral pourrait dire que tel projet nécessite tant d'argent, qu'il est prêt à mettre ce projet en oeuvre si le provincial le lui permet, qu'il est prêt à le financer pendant toute sa durée, qu'elle soit de un an, deux ans ou trois ans, à la condition qu'au bout de ce temps, la province décide si elle veut poursuivre le programme. À ce moment-là, sachant que la province a toujours des problèmes financiers, le fédéral serait prêt à conclure une entente de partenariat, qui serait en somme une entente financière.

    Que pensez-vous de cela?

+-

    M. Edmond LaBossière: Je suis d'accord que c'est une façon de faire. On a déjà accordé de l'argent aux communautés pour les aider à faire du réseautage. Si les réseaux fonctionnent très bien, ils vont arriver à définir des priorités et des besoins. S'ils ont fonctionné d'une façon efficace avec les partenaires qui s'occupent de la santé et les partenaires gouvernementaux, il devrait déjà y avoir un consensus au niveau d'une province ou d'un territoire entre les décideurs politiques, la communauté et les gens responsables des services de santé sur un plan quelconque.

    Le gouvernement fédéral devrait être disposé à appuyer un plan qui a été élaboré. Dans certains plans, on va peut-être demander la lune et le ciel, en ce sens qu'on va demander des sommes fantastiques, mais dans d'autres plans, on va reconnaître qu'il faut commencer avec une somme d'argent quelconque pour faire évoluer les dossiers.

    Le partenariat est très possible. Le partenariat est déjà en train de se développer, mais il faut qu'on permette de la flexibilité, parce que le partenariat peut être très différent d'une région à l'autre. C'est pour cela que je dis qu'il faut travailler à l'encadrement structurel dont je parlais tout à l'heure et élaborer des plans, mais il faut le faire en impliquant la communauté et les gouvernements concernés pour s'assurer que les choses vont se réaliser.

À  +-(1005)  

+-

    Le président: Vous pouvez poser une dernière question, monsieur Bellemare.

+-

    M. Eugène Bellemare: On sait que les gouvernements provinciaux manquent souvent d'argent. Un manque d'argent équivaut à un manque de stimulus. Pour garantir que ces services seront offerts, est-ce que le gouvernement fédéral ne devrait pas prendre l'initiative de tout faire pour que cela se réalise? Il s'agit de son argent et il offre à une province un cadeau qu'elle ne peut pas refuser. Il faut commencer quelque part, mais les provinces ne commencent jamais. Elles se disent qu'elles n'ont pas assez d'argent, qu'elles vont faire cela l'année prochaine, qu'elles vont étudier la situation et ainsi de suite.

+-

    M. Edmond LaBossière: En effet, si le gouvernement fédéral laissait entendre qu'il est vraiment prêt à travailler à des partenariats et à des plans quelconques, cette initiative serait probablement bien accueillie, à moins qu'on comprenne que cela peut être de très courte durée. Le message que j'entends des provinces et des territoires est que les mesures et les incitatifs du gouvernement canadien ne sont pas durables. On accorde des sommes d'argent pour un certain temps, on crée des attentes, on démarre des choses, puis on se retire. Si le gouvernement fédéral leur offre quelque chose, les provinces et territoires vont lui demander s'il est là pour le long terme. Si le gouvernement fédéral prévoit de participer pendant seulement trois ans ou cinq ans, les provinces et territoires hésiteront beaucoup à démarrer une chose dont ils devront payer toute la note quand elle aura été mise en place. Une fois qu'une chose est mise en place, il arrive souvent qu'elle s'amplifie et nécessite plus de ressources. 

    J'entends ce message et je vous transmets. Si les provinces et territoires établissent un programme et que le gouvernement fédéral veut vraiment faire avancer les choses, il doit faire quelque chose pour les encourager, les aider et leur faciliter les choses au départ, mais il doit être là pour toute la durée du programme. Il faut que le fédéral soit là pour le long terme.

+-

    Le président: Merci, monsieur LaBossière et monsieur Bellemare.

    Monsieur Sauvageau, je vous donne le temps de poser une courte question et je donnerai ensuite la parole à M. Simard. Je poserai ensuite une ou deux questions, puis nous terminerons.

    Monsieur Sauvageau.

+-

    M. Benoît Sauvageau: Me permettez-vous d'adresser un commentaire à M. Bellemare avant de poser ma question?

    On dirait que chaque fois que quelque chose ne va pas bien, il faut que le fédéral se mette le nez dedans, même si la santé est de compétence provinciale. Si l'inverse était vrai, les provinces viendraient nous voir pour ce qui est du Programme des commandites, de la GRC et de la Défense nationale. Mais c'est unidirectionnel. Seul le fédéral se met le nez dans les affaires des provinces quand il juge que les choses ne vont pas bien.

+-

    M. Eugène Bellemare: En politique provinciale... [Note de la rédaction: inaudible]

+-

    M. Benoît Sauvageau: Monsieur LaBossière, voici ma question, à laquelle je ne veux pas de réponse. Je pensais que pouviez me parler du non-respect des droits des anciens combattants francophones vivant en situation minoritaire, au Manitoba ou ailleurs, même si les soins de santé sont de compétence fédérale dans ce cadre. Même si la santé d'un ancien combattant au Manitoba est de compétence fédérale, cet ancien combattant est avant toute autre chose un francophone. Vous n'avez pas pu m'en parler, mais c'est correct. Je vais donc passer à autre chose.

    Deux commissions importantes, Kirby et Romanow, ont déposé des recommandations sur la santé. Notre comité doit aussi déposer un rapport. Est-ce que certaines des recommandations de ces commissions portant sur les communautés francophones vivant en situation minoritaire doivent être étudiées de façon prioritaire par notre comité?

À  +-(1010)  

+-

    M. Edmond LaBossière: En effet, j'ai comparu devant le comité Kirby, ou du moins devant le sous-comité présidé par le sénateur Morin, et j'y ai abordé plusieurs des points dont je vous parle aujourd'hui. Entre autres, j'ai mentionné qu'en faisant un parallèle entre l'éducation et la santé, on découvrait que les mesures mises en application au niveau pancanadien contribuaient grandement à faire progresser le dossier de l'éducation en français. Pensons entre autres à la Charte des droits et libertés ou au Programme des langues officielles dans le domaine de l'éducation qui, à cet égard, ont donné lieu à d'importants progrès.

    Si on parle d'un parallèle entre l'éducation et la santé, il faut aussi regarder du côté de la santé. À ce sujet, je dirai encore une fois que des mesures et des programmes d'envergure nationale seront nécessaires pour que le dossier de la santé en français progresse beaucoup plus rapidement qu'il ne le fait à l'heure actuelle.

    Il reste que les provinces manifestent une certaine ouverture à cet égard. Certaines d'entre elles ont même fait savoir à la ministre fédérale de la Santé qu'elles étaient prêtes à envisager sérieusement l'idée d'une entente spéciale portant sur la santé en français. À ce jour, peu de choses ont été accomplies, mais une certaine ouverture commence à se manifester du côté des provinces et territoires. C'est peut-être pour le gouvernement fédéral l'occasion de promouvoir cette question de façon un peu plus agressive, si je peux me permettre l'expression.

+-

    Le président: On vient de m'informer qu'un autre comité se réunit ici à 11 heures. Je vais être obligé d'accélérer la cadence. Je m'en excuse. Monsieur Simard, rapidement.

+-

    M. Raymond Simard: Monsieur LaBossière, vous avez mentionné que les provinces évoluaient dans des réalités différentes les unes des autres et que nous devions ajuster en conséquence le rythme auquel nous progressons. Quant à moi, il s'agit vraiment de la question centrale du débat d'aujourd'hui.

    On pourrait arguer que les francophones et les anglophones en milieu minoritaire ont le droit de recevoir dans leur milieu des soins de santé dans leur propre langue. Est-ce qu'il est raisonnable que nous demandions aux francophones de la Saskatchewan d'attendre cinq ou dix ans avant de recevoir les mêmes services que ceux fournis aux francophones du Manitoba et du Nouveau-Brunswick?

    Selon moi, c'est vraiment la base de la discussion. Est-ce que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer à cet égard? La réalité d'aujourd'hui fait peut-être en sorte que les provinces avancent à des rythmes différents, mais je ne suis pas sûr qu'en tant que membres du Comité des langues officielles, nous devions accepter cela comme un fait définitif. Il faudrait voir si le fédéral peut contribuer à rétablir une forme d'équilibre.

+-

    M. Edmond LaBossière: Je voulais dire que, partout au pays, on doit faire quelque chose en matière de services de santé en français.Toutefois, ce qui sera fait au Nouveau-Brunswick ne sera pas identique à ce qui sera fait dans certaines provinces de l'Ouest, par exemple. Il pourrait s'agir là de services de base en français, tandis que dans d'autres régions, on parlerait plutôt d'améliorer les services de santé en français à d'autres niveaux.

    Dans chacune des communautés, les services en français seront établis en fonction des priorités qui ont cours. Cela ne sera peut-être pas considéré comme étant aussi avancé que dans d'autres régions; ainsi, dans un tel contexte, le rythme semblera différent. Cela ne change pas le fait que les services en français devront être intégrés partout, d'une façon appropriée pour la région, et que cela ne devra pas prendre plus de temps dans une région que dans une autre. Néanmoins, le plan va être différent d'une région à l'autre.

+-

    Le président: Merci. Monsieur LaBossière, je retiens de vos propos que les gouvernements des provinces sont désormais plus favorables à l'idée d'offrir des services de santé aux communautés linguistiques minoritaires. En outre, une ouverture à des partenariats avec le gouvernement du Canada se manifeste, mais uniquement s'il s'agit de financement à long terme. On ne veut pas de mesures temporaires ou de projets-pilotes.

    Enfin, vous avez parlé de la nécessité d'utiliser des incitatifs. J'imagine que vous entendiez par là des transferts d'argent. Est-ce qu'il existe selon vous d'autres formes d'incitatifs et, le cas échéant, quels sont-ils?

À  +-(1015)  

+-

    M. Edmond LaBossière: Je n'ai pas les réponses définitives, mais je crois qu'il faut commencer à se pencher plus sérieusement sur certaines de ces questions. Bien souvent, on en parle d'une façon ad hoc, mais si on veut développer des partenariats provinciaux-territoriaux avec le gouvernement fédéral, il faut s'asseoir et regarder sérieusement ce qu'on entend par partenariat. Y a-t-il de nouvelles façons de faire qu'on n'a pas encore explorées suffisamment? Donc, il y aurait peut-être des choses à examiner plus sérieusement de ce côté-là. Est-ce qu'on devrait le faire avec le Conseil privé, avec Patrimoine canadien, avec Santé Canada? Je n'en suis pas sûr, mais il faut commencer à étudier cette question.

    Je sais que lors la conférence ministérielle à Winnipeg, on a indiqué qu'on voulait

développer des stratégies de collaboration interministérielle et intergouvernementale qui permettront notamment d'assurer des partenariats avec les provinces et territoires pour la pleine mise en oeuvre du plan d'action fédéral sur les langues officielles.
 

    On reconnaît donc qu'il y a un plan d'action fédéral sur les langues officielles, mais que beaucoup des dossiers concernés relèvent aussi des provinces et des territoires, comme la santé, la petite enfance et ainsi de suite. Il faut donc regarder comment développer sérieusement de vrais partenariats qui vont faire avancer le dossier. C'est une question qu'on veut étudier, et c'est un des messages qui ont été lancés à la conférence de Winnipeg.

+-

    Le président: D'accord.

    J'aurais eu deux questions à poser, mais je vais devoir laisser tomber. Peut-être pourriez-vous partager les réponses avec notre recherchiste.

    D'abord, on parle beaucoup de collaboration intergouvernementale. Est-ce qu'on peut envisager une collaboration intergouvernementale à l'horizontale, c'est-à-dire entre les provinces, et non strictement à la verticale, à savoir une collaboration fédérale-provinciale? Par exemple, pour la question de la ligne téléphonique d'information, s'agirait-il d'une collaboration interprovinciale dans l'Ouest? C'était ma première question, mais on n'aura pas le temps d'y répondre.

    Deuxièmement, j'ai écouté attentivement quand vous avez parlé des genres d'ententes qui existent. Si j'ai bien compris, selon vous, il y aurait lieu d'examiner toute la question des transferts en santé et d'y rattacher éventuellement des questions d'ordre linguistique.

+-

    M. Edmond LaBossière: Vous comprenez que je ne parle pas de façon officielle au nom des provinces et des territoires, mais sur un plan pratique, si on veut faire avancer les dossiers qui concernent la communauté, il faut considérer des questions de base quand on parle d'ententes fédérales-provinciales dans bien des domaines.

+-

    Le président: Merci infiniment, monsieur LaBossière, et merci de vous être déplacé.

    Membres du comité,

[Traduction]

    nos deux autres témoins sont présentes, alors nous allons prendre 30 secondes pour leur permettre de s'installer à la table et nous poursuivrons.

[Français]

    Monsieur LaBossière, bon retour. Merci beaucoup. Si vous avez d'autres choses à partager avec nous, ne vous gênez pas pour les faire parvenir au greffier.

+-

    M. Edmond LaBossière: C'est bien, merci beaucoup.

+-

    Le président: Merci.

[Traduction]

    Veuillez m'excuse parce que j'ai dépassé un peu la limite de temps pour la première partie de la réunion.

    Bienvenue madame Kennedy et madame Harrison. Vous représentez le CASA.

    Vous avez vu comment les choses se passent; nous allons vous donner la parole et ensuite nous allons vous poser des questions, que vous pourrez répondre du mieux que vous le pouvez.

    Nous vous remercions toutes les deux de vous joindre à nous ici aujourd'hui. Veuillez commencer.

À  +-(1020)  

+-

    Mme Kim Harrison (directrice exécutive, Committee for Anglophone Social Action): Nous vous remercions de donner au CASA l'occasion de présenter un tableau de la situation des services de santé et des services sociaux dans la région de Gaspé.

    Le CASA représente la population anglophone de Gaspé. Un de nos mandats principaux est de veiller à ce que les personnes aient accès à des services de santé dans la langue anglaise.

+-

    Mme Stella Kennedy (directrice du conseil d'administration, Health and Social Services, Committee for Anglophone Social Action; Social Worker, Centre Jeunesse Gaspésie-Les Îles): Bonjour. J'aimerais vous parler de l'accès aux services en anglais au Québec.

    Le projet de loi C-142, qui a été adopté en 1986, accordait le droit aux anglophones du Québec de recevoir des services sociaux et des services de santé dans leur langue. En 1989, le gouvernement a adopté 11 plans d'accès régionaux dans le cadre desquels les établissements de chacune des régions ont indiqué les services qu'ils offraient en anglais. Chacune des régies régionales a été tenue responsable de s'assurer que ces établissements respectent les plans. De plus, en 1991, le législateur a créé un comité pour conseiller le gouvernement sur la prestation de services sociaux et de services de santé par l'intermédiaire des plans d'accès.

    En 2001, ce comité, dont je faisais partie, a remis sa démission en bloc. Le comité a jugé que le climat politique à ce moment-là ne lui permettait pas de représenter efficacement la communauté anglophone ou ne lui permettait pas d'exprimer les préoccupations de la communauté au niveau ministériel. Au cours des dernières années, le gouvernement a grandement modifié la prestation des services de santé et des services sociaux. Les Gaspésiens reçoivent maintenant des services au niveau régional et interrégional.

    Nous avons ressenti les répercussions de ces décisions politiques. On nous adresse à des établissements désignés pour desservir notre région, mais qui ne sont pas nécessairement désignés pour fournir des services en anglais. On nous adresse à des établissements à Rimouski ou de la ville de Québec. Souvent, ces établissements sont exclusivement francophones. Ces villes ne font pas partie de la culture des Gaspésiens anglophones. Nous avons tendance à nous identifier davantage à Montréal; il s'agit, historiquement, de notre destination naturelle.

    Le projet de loi 142 est essentiellement une garantie juridique solide pour les minorités anglophones vivant au Québec qu'elles recevront des services sociaux et des services de santé dans leur langue officielle. Toutefois, le projet de loi a été difficile à mettre en oeuvre d'une manière stable et continue. Par exemple, le transfert des fonds entre différents paliers de gouvernement et la dispute concernant la gestion de ces fonds ont eu pour effet que de nombreuses régions, dont la nôtre, sont maintenant privées de comités des plans d'accès ou de coordonnateurs régionaux responsables pour la mise en oeuvre de ces plans. Il est difficile de renouveler ces plans tous les trois ans comme la loi le prévoit. Des services nouveaux et novateurs ne sont pas inclus dans ces plans. Des établissements gouvernementaux ont fusionné, certains ayant cessé d'exister et d'autres desservant de nouveaux territoires.

    Ces facteurs ne sont pas pris en considération dans le projet de loi 142. Il faut trouver une solution à ces problèmes si nous voulons que les anglophones du Québec continuent de recevoir des services de santé et des services sociaux dans leur langue comme le prévoit la loi.

    J'aimerais maintenant vous faire connaître certaines des recommandations du CASA.

    Nous croyons que ces changements touchant le système de santé doivent faire intervenir le niveau local, mais nous croyons également que la législation doit garantir les droits et nous recommandons que Santé Canada, probablement par l'intermédiaire du projet de loi C-202, garantisse les services existants ainsi que les nouveaux services novateurs aux groupes minoritaires.

    Nous recommandons que les services sociaux soient inclus dans le projet de loi au même titre que les services de santé.

    Nous recommandons qu'un système de réseautage efficace soit mis en place pour encourager le partage d'information et de services de manière que les établissements et les organismes à tous les niveaux soient sensibilisés aux besoins des communautés anglophones par le biais des consultations communautaires.

    Nous recommandons que la population anglophone soit informée de la gamme des services de santé et des services sociaux auxquels elle a droit et de l'endroit où elle peut recevoir ces services.

    Nous recommandons que la population anglophone soit autorisée et encouragée à prendre part à la gestion des établissements de santé et de services sociaux.

    Nous recommandons que des fonds soient accordés pour des programmes de recherche, de promotion et de prévention destinés à la minorité anglophone, surtout dans les petites régions comme la nôtre.

    Merci.

À  +-(1025)  

+-

    Le président: Merci, madame Kennedy.

    Monsieur Sauvageau.

[Français]

+-

    M. Benoît Sauvageau: J'ai un problème. J'ai deux tableaux de la même année qui donnent deux statistiques différentes. Si je me trompe, vous me corrigerez.

    Mesdames, bonjour et merci. J'ai écouté avec attention votre présentation et j'aimerais, pour le bénéfice du comité et de la communauté anglophone de la région que vous représentez, ainsi que pour les communautés francophones, poser des questions pour faire des comparaisons. Est-ce que je me trompe quand je dis que la population anglophone de la Gaspésie, votre région, est d'environ 10 000 personnes? La population était-elle de 10 000 en 1996 plutôt?

    Une voix: ... [Note de la rédaction: inaudible]...

À  +-(1030)  

+-

    M. Benoît Sauvageau: C'était cela.

    Avez-vous fait des études comparatives des services disponibles dans votre communauté et dans les communautés francophones semblables sur le plan démographique? Par exemple, je parle des services offerts à une communauté francophone de 10 000 personnes dans le nord de l'Ontario ou au Manitoba et des services offerts à 10 000 anglophones d'une région du Québec. J'aimerais avoir une comparaison à cet égard.

    Si je ne m'abuse, madame Kennedy, vous avez dit que le CASA était sous-financé. Je ne veux pas contester le financement. Cependant, le 29 septembre 2003, le ministère du Patrimoine canadien vous accordait un appui financier de 162 750 $ pour permettre au CASA de poursuivre son programme d'action communautaire. Je ne critique pas et ne conteste pas ce financement, mais encore là, est-ce que des études comparatives ont été faites sur les montants qui ont été donnés à des groupes francophones vivant en situation minoritaire d'environ 10 000 personnes pour voir si votre groupe est sous-financé ou surfinancé comparativement à ces groupes? C'est une question intéressante.

    C'est là que mes deux tableaux se contredisent un peu. Je vais utiliser le premier qu'on m'a remis. Vous parlez des anglophones qui se disent insatisfaits en raison de la loi 142 au Québec, mais un sondage a été fait par CROP et l'Institut Missisquoi en juin 2000. Vous êtes sûrement au courant de cela et vous me direz ce que vous pensez de ces pourcentages. On disait que dans le territoire 11, c'est-à-dire Gaspésie--Îles-de-la-Madeleine, 86 p. 100 des anglophones affirmaient pouvoir rencontrer un médecin qui parlait leur langue, que 84 p. 100 affirmaient avoir des services dans leur langue à un CLSC et que 100 p. 100 disaient avoir accès à Info-santé dans leur langue; c'était aussi le cas de 73 p. 100 de ces gens dans les salles d'urgence, de 87 p. 100 d'entre eux au niveau des soins de nuit dans un hôpital et de 100 p. 100 d'entre eux au niveau des services de nursing privés. Dans le territoire Gaspésie--Îles-de-la-Madeleine, il y a une communauté anglophone de 10 000 personnes. Avez-vous fait des études comparatives sur des communautés francophones similaires?

+-

    Mme Kim Harrison: Vous parlez de la région 11?

+-

    M. Benoît Sauvageau: Votre région est celle de Gaspésie--Îles-de-la-Madeleine, n'est-ce pas?

+-

    Mme Stella Kennedy: Oui. Et quel tableau avez-vous?

+-

    M. Benoît Sauvageau: Il y en a deux. On m'en a remis deux. Celui que vous avez indique que c'est 83 p. 100 pour les médecins, 70 p. 100 pour les CLSC, 60 p. 100 pour Info-santé, 58 p. 100 pour les salles d'urgence et 82 p. 100 pour les services privés de nursing.

    Il y a deux tableaux et donc deux interprétations, mais les deux indiquent quand même des pourcentages assez importants de gens qui affirment recevoir des services dans leur langue. Est-ce qu'on a fait une étude comparative des communautés francophones ayant la même réalité démographique pour voir si le taux de satisfaction y est supérieur ou inférieur à celui qu'on constate dans la région de la Gaspésie, au Québec?

+-

    Mme Stella Kennedy: Monsieur Sauvageau, je ne suis pas au courant d'études qui auraient été faites dans le cas des francophones des autres provinces.

+-

    M. Benoît Sauvageau: D'accord. Vous dites que vous êtes sous-financés. Savez-vous quel est le financement offert aux groupes francophones?

[Traduction]

+-

    Mme Kim Harrison: Nous ne savons pas si nous sommes sous-financés comparativement aux groupes francophones. Le message que nous voulons transmettre, c'est que nous sommes sous-financés en termes de prestation de services sociaux et de services de santé appropriés aux anglophones.

    Nous avons quatre mandats différents et les services de santé et les services sociaux ne représentent qu'une petite partie du travail que notre groupe doit accomplir. Nous ne pouvons consacrer 100 p. 100 de notre temps et 100 p. 100 de ces 162 000 $ uniquement aux services de santé.

[Français]

+-

    M. Benoît Sauvageau: À mon avis, il est difficile d'affirmer qu'on est sous-financé alors qu'on n'a pas effectué cette vérification. Vous êtes peut-être sous-financés, mais vous êtes peut-être aussi surfinancés comparativement à des groupes semblables au vôtre sur le plan démographique. Est-ce que vous contestez ou acceptez le sondage fait par l'Institut Missisquoi sur le pourcentage de satisfaction des communautés anglophones de la région Gaspésie--Îles-de-la-Madeleine quant aux services offerts? Est-ce que ce sondage est véridique?

+-

    Mme Stella Kennedy: Ce sondage est véridique. Par contre, en Gaspésie, on a sondé un très petit nombre de personnes. Le sondage respectait tout juste les normes de validité. C'est pour cela que nous aimerions qu'une recherche exhaustive soit faite sur notre territoire. Si je ne me trompe pas, l'Institut Missisquoi a appelé des personnes de la région de Matapédia, où il y a beaucoup d'anglophones; ces anglophones reçoivent aussi des services au Nouveau-Brunswick. Je ne veux pas dire que ce sondage n'est pas valide, mais il serait bien intéressant d'avoir une étude plus exhaustive de toute la Gaspésie.

+-

    M. Benoît Sauvageau: Seriez-vous d'accord pour qu'on applique la réciprocité? En d'autres termes, est-ce que, pour chaque dollar investi pour une étude, un sondage ou de l'aide à votre communauté anglophone, on devrait donner le même montant aux communautés francophones? Est-ce que cela pourrait être une des recommandations de votre institution? Si vous êtes sous-financés ou financés correctement, ça va, mais si vous êtes surfinancés, avant que vous ne receviez un dollar de plus, est-ce que les communautés francophones vivant en situation minoritaire ne devraient pas recevoir l'équivalent du montant que vous recevez?

À  +-(1035)  

+-

    Mme Stella Kennedy: Je pense que tout le monde doit avoir les mêmes droits.

+-

    M. Benoît Sauvageau: C'est très bien. Je n'ai pas d'autres questions.

+-

    Le président: Monsieur Simard.

[Traduction]

+-

    M. Raymond Simard: Merci, monsieur le président.

    J'aimerais mieux comprendre les données démographiques de la région. Je sais comment les choses se passent dans ma région du Manitoba, mais j'aimerais savoir si au Québec, par exemple, vous trouvez la communauté anglophone concentrée dans certaines collectivités spécifiques ou si elle est répartie dans toute la région?

+-

    Mme Kim Harrison: Elle est très éparpillée. Il y a probablement cinq poches d'anglophones, mais on peut dire qu'elles sont éparpillées.

+-

    M. Raymond Simard: Cinq «poches». Dans cinq villes ou sont-elles partout, même dans les régions rurales?

+-

    Mme Kim Harrison: Toute la région est une région rurale, mais il y a des communautés anglophones dans chacune des villes.

+-

    M. Raymond Simard: Et au sein de ces communautés anglophones, est-ce que les services de santé ne sont pas appropriés? On pourrait croire que si vous avez un groupe d'anglophones dans une région, vous êtes en mesure de produire des médecins et des infirmières bilingues. Cela n'est-il pas le cas?

+-

    Mme Stella Kennedy: Non ce n'est pas le cas. Notre population est peu nombreuse. La côte de Gaspé est longue de 500 kilomètres. Je suis de la ville de Gaspé, et je demeure à 200 kilomètres de Kim qui, elle, vit à New Carlisle. Ensuite, il y a la région de la Matapédia, qui est située à 150 kilomètres plus loin. La partie nord de la côte ne compte aucun anglophone. Alors, les chiffres sont très petits. Mais de toute façon, sur la côte gaspésienne, les chiffres sont en général petits. Même les francophones doivent se rendre à l'extérieur pour obtenir des services spécialisés. Nous ne sommes pas uniques à cet égard.

    Le projet de loi 142 ne précise pas « là où le nombre le justifie ». Lorsque les premiers plans d'accès ont été élaborés, les chiffres étaient plus élevés. Alors, nous ne pouvons pas vraiment nous plaindre beaucoup au sujet des services qui sont là et qui sont garantis—et du fait que les établissements font un effort louable pour respecter ces plans. Mais la dotation en personnel bilingue devient un très grand problème. Comme nous l'avons dit dans notre mémoire également, les Gaspésiens deviennent de plus en plus bilingues. Parfois, le choix se résume à la question suivante : est-ce que je veux des soins de qualité peu importe dans quelle langue ils sont donnés ou est-ce que je veux mes soins en anglais? J'ai moi-même eu à faire ce choix il y a une semaine.

+-

    M. Raymond Simard: Je comprends ce que vous dites. Nous le faisons tout le temps.

    Je lisais simplement les notes ici. J'ai probablement répondu à ma propre question. Est-ce que la population anglophone vieillit également dans cette région?

+-

    Mme Stella Kennedy: Oui, c'est le cas.

+-

    M. Raymond Simard: Et les jeunes quittent la région et c'est probablement une des raisons pour lesquelles nous avons, par exemple, moins d'infirmières et de médecins bilingues.

+-

    Mme Stella Kennedy: Oui.

+-

    M. Raymond Simard: De toute évidence, vous devez parler à d'autres groupes au Québec qui font des choses semblables à ce que vous faites. Pouvez-vous me dire s'ils font face à la même situation dans d'autres régions ou est-ce que votre situation est, disons, pire que la normale?

+-

    Mme Stella Kennedy: Je dirais que la situation de la Basse-Côte-Nord est pire que la nôtre.

+-

    M. Raymond Simard: Sa situation est pire que la vôtre?

+-

    Mme Stella Kennedy: Oui, ils sont encore plus isolés, leur population est encore moins nombreuse et ils ne sont pas exposés à l'autre langue officielle comme nous le sommes. Alors, non seulement ils font face à des problèmes différents, mais ces problèmes sont pires.

+-

    M. Raymond Simard: Mais, règle générale, dans une ville comme Montréal ou Québec, les anglophones seraient probablement en mesure de trouver le service qu'ils recherchent dans leur langue.

+-

    Mme Stella Kennedy: Oui, mais à la maison.

+-

    M. Raymond Simard: Alors, il s'agit d'une question ou d'un problème qui est propre aux régions rurales?

+-

    Mme Stella Kennedy: Oui, effectivement.

+-

    M. Raymond Simard: Merci beaucoup. Merci.

[Français]

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Bellemare.

[Traduction]

+-

    M. Eugène Bellemare: J'ai un mélange de questions précises. J'ai certainement beaucoup de compassion pour un Franco-Ontarien qui est dans votre situation. Je crois dans la compassion, je crois dans la justice et je crois dans l'équité. Je me demande parfois ce qui arrive aux citoyens de la région de Chandler-Gaspé, tout comme je me demande parfois ce qui arrive en Ontario. C'est toujours une question d'argent et de l'endroit où le gouvernement place ses priorités.

    S'il y avait un premier pas spécifique... Souvent, vous devez faire des petits pas pour arriver quelque part. Vous avez un objectif à long terme, mais vous devez vous y rendre. Et y arriver est parfois une véritable impossibilité à cause des batailles que vous devez livrer en cours de route.

    J'ai remarqué une bataille lorsque quelqu'un a soulevé la question d'un sondage. Un sondage est bon aujourd'hui; un sondage est bon demain; un sondage n'est plus bon après-demain. Un sondage est valable le jour où vous le faites, s'il n'est pas contesté. Vous avez signalé certaines faiblesses dans ce sondage. Dans tous les sondages, c'est toujours la même chose. Les gens qui fonctionnent à coup de sondages insistent pour dire qu'il s'agit de l'opinion de certaines personnes—un petit pourcentage de personnes—et ils extrapolent pour obtenir des chiffres. Je ne pense pas que l'on devrait établir des politiques uniquement à partir des sondages, mais plutôt en fonction des besoins humains et du service que vous pouvez et que vous devriez offrir.

    Si vous pouviez obtenir quelque chose, si petite soit-elle, en ce qui a trait aux services en anglais, pour ceux qui ont besoin de services en anglais dans le domaine de la santé dans la région de Chandler-Gaspé, quelle serait cette chose?

À  +-(1040)  

+-

    Mme Kim Harrison: Peut-être que ces établissements gouvernementaux—les CLSC et les hôpitaux—pourraient tenir des consultations communautaires et parler avec la population anglophone pour connaître ses désirs.

+-

    M. Eugène Bellemare: Pouvez-vous me dire ce qu'est un CLSC?

[Français]

+-

    Mme Stella Kennedy: C'est un centre local de services communautaires.

[Traduction]

    Il s'agit d'une clinique de santé locale.

+-

    M. Eugène Bellemare: Qui la dirige?

+-

    Mme Stella Kennedy: Il s'agit d'établissements gouvernementaux.

+-

    M. Eugène Bellemare: Oui, à l'échelle provinciale, mais au niveau local, y a-t-il un comité élu?

+-

    Mme Stella Kennedy: Il y a un conseil de direction.

+-

    M. Eugène Bellemare: Est-ce que le conseil de direction est élu parmi la population en général ou s'agit-il de nominations?

+-

    Mme Stella Kennedy: Il est élu. La loi a changé il n'y a pas très longtemps. Les membres du conseil sont élus et peuvent également être cooptés ou nommés .

+-

    M. Eugène Bellemare: Est-ce que des garanties ont été données à la communauté anglophone de la région de Chandler-Gaspé? Je dirais la «communauté anglophile», parce que j'utilise toujours «communauté francophile»—et, soit dit en passant, les chiffres augmentent. Si vous utilisez «anglophile» plutôt qu'«anglophone», vous augmentez les chiffres automatiquement.

    J'ai perdu le fil de ma pensée; je suis désolé.

+-

    Mme Stella Kennedy: Si les membres de ces conseils estiment qu'un certain secteur de la population est sous-représenté, ils peuvent «coopter» un candidat. Ils peuvent inviter un représentant de cet organisme...

+-

    M. Eugène Bellemare: Alors vous dites «peuvent». L'a-t-on fait? A-t-on eu à le faire?

+-

    Mme Stella Kennedy: Oui. On a demandé au CASA de recommander des gens pour siéger à ces conseils. Nous disons dans notre mémoire que pour être membre de ces conseils—les réunions ont toutes lieu en français—vous devez être bilingue. Vous devez être intéressé; vous devez consacrer du temps et vous devez avoir le temps de le consacrer. Nous avons de la difficulté à recruter des gens, vraiment. Ce n'est pas nécessairement parce qu'on ne veut pas de leur présence dans les conseils, mais il y a également un problème de mobilisation.

[Français]

+-

    Le président: Merci. Avez-vous une dernière question, monsieur Bellemare?

[Traduction]

+-

    M. Eugène Bellemare: Que peut-on faire de très pratique à votre avis? Vous êtes sur place, vous le savez mieux que quiconque. Nous sommes ici et d'ici, tout paraît parfait pour tout le monde, et coûteux. Mais vous êtes sur le terrain là-bas. Que nous recommanderiez-vous de recommander dans le rapport que nous sommes sur le point de rédiger sur la façon d'améliorer les services de santé dans la région de Chandler-Gaspé, en raison de la pénurie de services que vous éprouvez maintenant et du problème lié aux chiffres? «Là où le nombre le justifie», à mes yeux, il s'agit d'une phrase qui dénote un esprit mesquin. Que pourriez-vous mettre sur papier?

À  +-(1045)  

+-

    Mme Kim Harrison: Comme je l'ai dit auparavant, nous devons commencer par une meilleure communication entre les établissements gouvernementaux et la population. Il y a 50 groupes de services sociaux là-bas et la plupart des anglophones ne savent pas ce qu'ils font ou ne savent même pas qu'ils existent, parce qu'il n'y a pas de publicité en anglais.

+-

    Le président: Merci. J'ai quelques questions et peut-être que M. Sauvageau voudra reprendre la parole.

    Premièrement, en ce qui concerne les questions soulevées par M. Sauvageau sur le financement, êtes-vous membres du QCGN?

    Aux fins du compte rendu, le QCGN est reconnu pour se plaindre de manière répétée, ou pour affirmer, pour être juste, que le niveau de financement que les francophones hors Québec obtiennent comparativement au niveau de financement obtenu par les anglophones au Québec est plus élevé, que le soutien financier global du gouvernement du Canada est substantiellement inférieur dans le cas des anglophones. C'est là l'affirmation du QCGN et on peut présumer qu'il a des chiffres à l'appui.

    Deuxièmement, dans le tableau auquel a fait allusion M. Sauvageau—et nous allons nous assurer que vous en ayez une copie—je reviendrai sur l'Institut Missisquoi... Des 16 régions, il a parlé d'une seule, la vôtre, mais sur les 16 régions, il y en a trois qui reçoivent la quote globale élevée, deux qui reçoivent la quote moyenne et deux qui reçoivent la quote faible, et la vôtre en fait partie, et enfin, neuf régions ont la quote très faible. Alors, voilà le portrait global du sondage et je pense qu'il est utile que cela figure également au compte rendu.

    Si vous continuez d'affirmer que la première chose que vous aimeriez voir, c'est plus de consultation, j'aimerais savoir si je dois comprendre que les plans d'accès, qui sont le fondement de la mise en application du projet de loi C-142, ont été élaborés sans consultation?

+-

    Mme Stella Kennedy: Les plans initiaux ont été réalisés après consultations. Nous savons tous que ces plans d'accès sont maintenant vieux de quatre ans. Les choses deviennent plus difficiles. Nous n'avons plus de coordonnateur régional. Nous n'avons pas de comité régional. Nous avions ces deux services. Quelqu'un à la Régie régionale est responsable de ce dossier et nous avons une bonne relation de travail avec ce dernier. Il est responsable de beaucoup d'autres dossiers, alors cette question est en quelque sorte tombée dans l'oubli.

+-

    Le président: Je devrais le savoir, mais je l'ignore. À quelle fréquence est-ce que ces plans doivent être révisés?

+-

    Mme Stella Kennedy: Tous les trois ans.

+-

    Le président: Alors, à la première occasion, il y a eu des consultations appropriées. Mais au moment du renouvellement, il n'y en a pas eu?

+-

    Mme Stella Kennedy: Les choses sont en voie de réalisation. Nous avons parlé à la Régie régionale, mais nous n'avons pas eu de rencontre encore. La personne responsable du dossier à la Régie a fait parvenir un sondage aux établissements au début de l'été pour savoir où ils en étaient rendus. Les plans n'ont pas été renouvelés, alors il s'agit d'un dossier sur lequel nous travaillons.

+-

    Le président: Votre groupe a-t-il participé à ce qui suit? Le plan d'action rendu public en mars de cette année par le gouvernement comportait une somme d'argent, répartie sur une période de cinq ans, pour la formation, ou la rétention, dans le cas du Québec, si ma mémoire est fidèle, de 75 millions de dollars. De cette somme, 12 millions de dollars devaient être utilisés pour la communauté anglophone du Québec. Savez-vous à quoi cet argent servira et si vous allez en tirer avantage en termes d'accessibilité plus grande aux gens qui peuvent vous aider dans la langue de votre choix?

+-

    Mme Stella Kennedy: C'est la somme d'argent pour laquelle le QCGN servira de fiduciaire.

+-

    Le président: Non, je ne crois pas. Aux dernières nouvelles, j'ai entendu dire que ce serait l'Université McGill qui serait appelée à administrer cet argent.

    Alors, vous n'avez pas à participer à cela?

À  +-(1050)  

+-

    Mme Stella Kennedy: Non.

+-

    Le président: Très bien. Peut-être auriez-vous avantage à faire un suivi de cette question.

    Ma dernière question concerne votre deuxième recommandation, ou l'une de vos recommandations, à savoir que si le gouvernement du Canada tentait d'améliorer, par quelque mesure législative que ce soit, le sort des anglophones au Québec et des francophones hors Québec en terme d'accès aux services de santé, vous aimeriez que cette mesure concerne également les services sociaux. Pourriez-vous en dire un peu plus sur cette question?

+-

    Mme Kim Harrison: Les programmes préventifs qui s'adressent à la source des problèmes, comme l'abus de substances, l'alcoolisme et les problèmes sociaux n'existent pas du tout pour les anglophones à Gaspé. Alors, je pense que des services comme ceux-là auraient très certainement un effet énorme sur l'amélioration de la santé de la population anglophone.

+-

    Le président: Et où les gens obtiennent-ils de l'aide à l'heure actuelle, si tel est le cas?

+-

    Mme Stella Kennedy: Beaucoup de gens sont laissés pour compte. Si vous avez besoin d'un psychiatre anglophone, vous devez quitter la région ou, si vous êtes chanceux, vous aurez des services par l'intermédiaire d'un interprète. Un hôpital à Maria a recours aux services d'un interprète.

+-

    Le président: Est-ce que cela concerne les services psychiatriques?

+-

    Mme Stella Kennedy: Eh bien, si vous voulez; elle est là pour tout ce qui peut survenir.

    Je suis travailleuse sociale en protection de l'enfance et nous avons des travailleurs sociaux anglophones. Alors il n'y a pas de problème de ce côté-là.

    Mais comme l'a dit Kim, beaucoup d'autres services offerts par les organismes communautaires ou le secteur privé—qui sont très restreints à Gaspé—n'existent pas. Nous n'avons pas de services.

+-

    Le président: Y a-t-il des recours en justice qui ont été intentés à la suite de l'absence de services qui sont censés être garantis par le loi?

+-

    Mme Stella Kennedy: Non, pas dans notre région.

+-

    Le président: Merci.

+-

    Mme Kim Harrison: Je pense que les anglophones ont perdu la faculté d'exiger des services. Les établissements pensent que tout va bien et que la communauté est bien desservie. C'est l'un des principaux problèmes.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Sauvageau.

[Français]

+-

    M. Benoît Sauvageau: Permettez-moi, étant donné que je suis francophone, de m'exprimer en français. Nous bénéficions de la traduction simultanée. Nous nous faisons les chantres de la promotion de cette langue. Je pensais que je parlais de votre organisation, de votre milieu, de votre réalité démographique, et on me présente un autre tableau. Je vais donc me référer à l'autre tableau. Quand on consulte le tableau que vous nous avez présenté, on voit que le pourcentage total de satisfaction est de 72 p. 100.

    Je voudrais préciser ma question. J'ai demandé quels montants d'argent votre organisme recevait, et non pas quels montants recevait la communauté anglophone du Québec tout entière comparativement aux communautés francophones du Canada tout entier. Je voudrais qu'on compare des pommes avec des pommes et des oranges avec des oranges, parce que je pense qu'il y a une différence entre être anglophone en milieu minoritaire dans cette mer anglophone que sont le Canada et l'Amérique du Nord, et être un francophone en milieu minoritaire en Saskatchewan ou dans les Territoires du Nord-Ouest. Le président est sûrement d'accord avec moi à ce sujet.

    Concernant les montants d'argent qui ne seraient pas les mêmes, on peut penser qu'étant donné que le gouvernement du Québec respecte les droits des communautés anglophones, les communautés anglophones doivent moins dépenser pour faire la promotion de leurs droits. Je pense à la loi 142 au niveau de la santé, qui existe seulement au Québec, ainsi qu'aux institutions scolaires anglophones au Québec, qui existent depuis plus longtemps, me semble-t-il, que les institutions scolaires francophones dans les autres provinces canadiennes. C'est une chose.

    J'aimerais maintenant demander à notre recherchiste s'il est possible d'avoir un tableau semblable sur le pourcentage de satisfaction, le nombre de médecins et les services offerts en français dans les autres provinces canadiennes. Ce n'est pas à vous que je le demande, parce que ce n'est pas à vous de me fournir ces données. Ainsi, on va pouvoir comparer des pommes avec des pommes et des oranges avec des oranges.

    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci.

    Y a-t-il d'autres commentaires?

    Monsieur Simard, vous avez la parole.

[Traduction]

+-

    M. Raymond Simard: Peut-être une dernière observation.

    Dans ma circonscription de Saint-Boniface, nous avons l'hôpital de Saint-Boniface, qui embauche quelque 4 000 ou 5 000 personnes. Dans les faits, nous avions perdu le contrôle de l'hôpital en terme de communauté; il n'offrait presque aucun service en français. Nous nous sommes mobilisés et nous avons placé des gens dans les conseils de direction.

    Alors, je veux juste vous dire qu'il est important de vous mobiliser et de faire valoir votre point de vue dans ces conseils de direction. Je pense que vous n'avez pas d'autre choix.

    Je pense que partout au Canada, notre population âgée a droit à des services dans sa langue. Lorsque vous êtes malades, que vous ne vous sentez pas bien, que êtes mourants ou vulnérables, vous devriez avoir le droit d'avoir des services dans votre langue. C'est le dernier commentaire que j'aimerais faire.

À  -(1055)  

-

    Le président: Monsieur Bellemare, avez-vous autre chose à ajouter?

    Madame Kennedy ou madame Harrison?

    Je tiens à vous remercier toutes les deux d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui et d'avoir alimenté notre réflexion sur l'état des services de santé offerts aux minorités linguistiques partout au pays.

    J'aimerais aviser mes collègues du comité que nous allons recevoir la première ébauche du rapport demain avant midi et j'ose croire que demain après-midi, lorsque nous nous réunirons à huis clos, nous allons progresser rapidement dans l'examen de cette ébauche de rapport.

    Je remercie encore une fois nos témoins de ce matin. Merci beaucoup.

    La séance est levée.