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SPER Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Sous-comité de la condition des personnes handicapées du comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 21 mai 2002




¿ 0935
V         La présidente (Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.))

¿ 0940
V         M. Cam Crawford (président, Institut Roeher)
V         La présidente
V         M. Cam Crawford
V         La présidente
V         M. Paul Crête (Kamouraska--Rivière-du-Loup--Témiscouata--Les Basques, BQ)
V         Mme Alison Schmidt (témoignage à titre personnel)
V         M. Gerard Yetman (directeur, Programmes nationaux, Société canadienne du sida; représentant, Canadian Working Group on HIV and Rehabilitation)
V         Mme Peggy Proctor (témoignage à titre personnel)
V         Mme Stephanie Nixon (représentante, Canadian Working Group on HIV and Rehabilitation)
V         Mme Elisse Zack (représentante, Canadian Working Group on HIV and Rehabilitation)
V         

¿ 0945
V         M. William P. Ashdown (vice-président, Mood Disorders Society of Canada)
V         M. Bob Baldwin (directeur national, Politiques sociales et économiques, Congrès du travail du Canada)
V         M. Spencer
V         M. David Walker (témoignage à titre personnel)
V         M. George Cameron (témoignage à titre personnel)
V         Mme Sherri Torjman (vice-présidente, Caledon Institute of Social Policy)
V         Dr Ashok Muzumdar (président, Canadian Association of Physicians with Disabilities)
V         M. Harry Beatty (directeur, Politiques et recherche, CDDH: Centre de la Défense des Droits des Handicapés)

¿ 0950
V         Mme Tina Head (avocate principale, Services juridiques, Bureau du Commissaire des tribunaux de révision, Régime de pensions du Canada/Sécurité de la vieillesse)
V         M. G. Peter Smith (commissaire, Tribunaux de révision, Régime de pensions du Canada/Sécurité de la vieillesse)
V         M. François Bélisle (directeur général, Association canadienne des paraplégiques)
V         M. Neil Pierce (directeur général, Division Alberta, Association canadienne des paraplégiques)

¿ 0955
V         Mme Sue Lott (témoignage à titre personnel)
V         Mme Susan Williams (directrice générale, Prestations d'invalidité et appels, ministère du Développement des ressources humaines)
V         Mme Deanna Groetzinger (Société de la sclérose en plaques du Canada)
V         Mme Wendy Steinberg (analyste des politiques, Association canadienne pour la santé mentale)
V         Mme Linda Simpson (représentante, Association canadienne des professionnels en réadaptation)
V         Mme Donna Klaiman (directrice, Éducation et développement professionnel, Association canadienne des ergothérapeutes)
V         M. Vincent Boyce (Alliance canadienne des victimes d'accidents et de maladies du travail)

À 1000
V         M. Dave MacKenzie (Alliance canadienne des victimes d'accidents et de maladies du travail)
V         M. Wolfgang Zimmerman (représentant, National Institute of Disability Management and Research)

À 1005
V         La présidente
V         Mme Sherri Torjman

À 1010

À 1015

À 1020

À 1025

À 1030

À 1035

À 1040
V         La présidente
V         M. David Walker

À 1045
V         La présidente
V         M. David Walker
V         La présidente
V         M. David Walker
V         La présidente
V         M. Harry Beatty
V         M. Bob Baldwin

À 1050
V         La présidente

À 1055
V         M. Bob Baldwin
V         Mme Sherri Torjman
V         La présidente
V         M. Harry Beatty

Á 1100
V         La présidente
V         M. Paul Crête
V         Mme Sherri Torjman

Á 1105
V         La présidente
V         M. Cam Crawford
V         La présidente
V         Dr Ashok Muzumdar

Á 1110
V         La présidente
V         Dr Ashok Muzumdar
V         La présidente
V         Dr Ashok Muzumdar
V         La présidente
V         Dr Ashok Muzumdar
V         La présidente
V         M. Solberg
V         La présidente
V         Mme Francine Knoops

Á 1115
V         La présidente
V         Mme Sue Lott
V         La présidente
V         M. Wolfgang Zimmerman

Á 1120
V         La présidente
V         M. George Cameron
V         La présidente
V         Mme Susan Williams
V         La présidente
V         Mme Sherri Torjman
V         Mme Susan Williams
V         La présidente
V         Mme Nancy Lawand (directrice, Administration des prestations du Régime de pensions du Canada, Ministère du Développement des ressources humaines)
V         La présidente
V         Mme Nancy Lewand
V         La présidente
V         Mme Susan Williams

Á 1125
V         La présidente

Á 1130
V         Mme Deanna Groetzinger
V         La présidente
V         M. Vincent Boyce

Á 1135
V         La présidente
V         M. Vincent Boyce
V         La présidente
V         M. Vincent Boyce
V         La présidente
V         M. Vincent Boyce
V         La présidente
V         M. Vincent Boyce
V         La présidente
V         Mme Peggy Proctor
V         La présidente
V         M. Monte Solberg

Á 1140
V         Mme Nancy Lawand
V         M. Monte Solberg
V         Mme Susan Williams
V         M. Peter Smith
V         M. Monte Solberg
V         M. Peter Smith

Á 1145
V         La présidente
V         M. Gerard Yetman

Á 1150
V         La présidente
V         Mme Alison Schmidt
V         La présidente
V         Mme Alison Schmidt
V         La présidente
V         M. Neil Pierce

Á 1155
V         La présidente
V         M. William P. Ashdown
V         La présidente
V         Mme Wendy Steinberg

 1200
V         La présidente
V         Mme Wendy Steinberg
V         M. Dave MacKenzie
V         La présidente
V         M. Dave MacKenzie

 1205
V         La présidente
V         M. Dave MacKenzie
V         La présidente
V         M. Cam Crawford

 1210
V         La présidente
V         M. Bill Young (attaché de recherche du comité)
V         La présidente

 1215
V         M. Laurie Beachell (coordonnateur national, Conseil des Canadiens avec déficiences)
V         La présidente
V         La présidente
V         Mme Marg Ruttan (lauréate, Bourse de recherches de la flamme du centenaire)

 1255

· 1300
V         La présidente

· 1305
V         Mme Stephanie Nixon
V         La présidente

· 1310
V         M. Laurie Beachell

· 1315
V         La présidente
V         M. Laurie Beachell
V         La présidente
V         Mme Donna Klaiman

· 1320
V         La présidente
V         Mme Peggy Proctor

¸ 1400
V         La présidente
V         M. Cam Crawford

¸ 1410
V         

¸ 1415
V         Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD)
V         M. Laurie Beachell
V         Mme Peggy Proctor

¸ 1420
V         La présidente










CANADA

Sous-comité de la condition des personnes handicapées du comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 023 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 21 mai 2002

[Enregistrement électronique]

¿  +(0935)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.)): Nous allons commencer. Il y a toutes sortes de choses de prévues ce matin, y compris l'assermentation de nouveaux députés et plein d'autres choses un peu partout. Les députés vont courir à gauche et à droite comme de vrais parlementaires. Nous sommes très heureux de vous accueillir tous ici ce matin.

    C'est toujours un plaisir pour notre mini sous-comité de tenir ces réunions qui regroupent des membres de la communauté des personnes handicapées. Nous nous attaquerons aujourd'hui à quelque chose de particulièrement intéressant puisque, après une vingtaine d'années, nous allons enfin pouvoir sortir peut-être des sentiers battus. Si nous devions élaborer un nouveau régime de pensions du Canada, de quoi aurait-il l'air? Serait-il semblable à celui qui existe maintenant? Et à quoi penserions-nous pour offrir ce qu'il y a de mieux aux Canadiens?

    Comme vous le savez, en ma qualité de simple médecin de famille, j'ai rempli ces formulaires pendant 25 ans et ça ne m'a pas beaucoup plu. Je ne suis donc pas toujours particulièrement objective dans ce dossier. Les gens étaient toujours intimidés par tous ces paliers d'appel. Vous pouvez essayer de me persuader du contraire, ou alors nous pouvons profiter de l'occasion qui nous est maintenant offerte.

    Nous avons persuadé—je crois—la Chambre des communes d'entreprendre quelque chose de nouveau pour elle. Il s'agit de cet exercice d'orientation. Ce que vous nous apprendrez aujourd'hui sera proposé aux Canadiens dans le cadre d'un échange en direct au sujet de ce qui fonctionne bien et de ce qui ne fonctionne pas dans le régime de prestations d'invalidité, les cas refusés, les médecins, les sociétés d'assurance et tous les intervenants. Nous espérons que nos discussions d'aujourd'hui nous permettront de poser de bonnes questions lorsque nous consulterons les Canadiens au sujet de ce programme extraordinairement important du gouvernement.

    Je suis ravie que vous ayez pu vous joindre à nous. Ce n'était peut-être pas brillant de notre part de fixer cette réunion au mardi suivant une longue fin de semaine, mais je vous suis très reconnaissante d'être venus. Vous comprendrez que notre calendrier parlementaire nous laisse très peu de temps et nous voulons nous assurer d'accomplir cette tâche.

    À cause du moment choisi pour la réunion, certains intervenants clés ne pourront pas se joindre à nous cet après-midi. Selon les résultats de nos discussions de ce matin, il y a une petite chance que nous puissions terminer avant 14 heures, avant que nous allions tous à la Période des questions. Sinon, nous pourrons nous réunir de nouveau à 15 h 30 à l'édifice du Centre.

    Mais attendons de voir comment se déroule la réunion. Nous ne voulons pas abuser de votre patience, mais nous voulons tirer le plus grand profit possible du fait que vous êtes tous ici en même temps.

    Nous devrions peut-être commencer par expliquer qui est ici. Vous pourriez probablement présenter toutes les personnes assises à vos côtés, mais nous n'allons pas prendre le risque. Chacun se présentera lui-même, en commençant par Cam Crawford.

¿  +-(0940)  

+-

    M. Cam Crawford (président, Institut Roeher): Je m'appelle Cam Crawford et je viens de l'Institut Roeher.

+-

    La présidente: Puisque j'ai été très brève, vous pourriez peut-être chacun prendre 15 secondes pour nous expliquer ce qu'il y a de pire et de mieux, à votre avis, dans le régime d'invalidité du RPC.

+-

    M. Cam Crawford: La liste des choses qui fonctionnent le mieux est difficile à établir. Parmi les problèmes du régime qui me viennent à l'esprit, il y a la difficulté des gens à être admissibles aux prestations et les sommes princières que reçoivent les gens lorsqu'ils prennent leur retraite—500 $ ou 600 $ par mois dans la plupart des cas, ce qui n'est pas beaucoup lorsque c'est le seul revenu sur lequel on compte pour vivre.

[Français]

+-

    La présidente: Bonjour, monsieur Crête.

+-

    M. Paul Crête (Kamouraska--Rivière-du-Loup--Témiscouata--Les Basques, BQ): Bonjour, madame. Je m'appelle Paul Crête et je suis député de Kamouraska--Rivière-du-Loup--Témiscouata--Les Basques.

    Ma contribution la plus importante pourrait être de traiter de la façon dont la Régie des rentes du Québec s'occupe des personnes handicapées. Dans le passé, ses pratiques ont été un peu différentes de celles du Régime de pensions du Canada. Il y a peut-être des leçons à apprendre de ce côté-là.

[Traduction]

+-

    Mme Alison Schmidt (témoignage à titre personnel): Je m'appelle Alison Schmidt. Je dirige un service d'aide aux demandeurs de prestations d'invalidité à Regina, en Saskatchewan. J'aide les gens au cours des processus d'appel.

+-

    M. Gerard Yetman (directeur, Programmes nationaux, Société canadienne du sida; représentant, Canadian Working Group on HIV and Rehabilitation): Je m'appelle Gerard Yetman. Je suis directeur des programmes nationaux de la Société canadienne du sida. Le RPC pose de nombreux problèmes dont le principal est qu'il n'est pas adapté aux cas de maladies cycliques.

+-

    Mme Peggy Proctor (témoignage à titre personnel): Je m'appelle Peggy Proctor, et je viens de Saskatoon, en Saskatchewan. J'ai récemment coordonné un projet national sur des incapacités multiples dans le cadre duquel un certain nombre de groupes de personnes handicapées se sont réunis pour discuter de leurs problèmes communs. Le régime d'invalidité du RPC était l'un des problèmes qui revenait fréquemment dans la discussion. C'est ce dont je suis venue vous parler.

+-

    Mme Stephanie Nixon (représentante, Canadian Working Group on HIV and Rehabilitation): Bonjour. Je m'appelle Stephanie Nixon. Je suis l'une des coprésidentes du Canadian Working Group on HIV and Rehabilitation, c'est-à-dire le groupe qui a organisé le projet que Peggy a dirigé pour nous. Nous participerons avec plaisir à la discussion de ce matin.

+-

    Mme Elisse Zack (représentante, Canadian Working Group on HIV and Rehabilitation): Je m'appelle Elisse Zack. Je suis directrice générale du Canadian Working Group on HIV and Rehabilitation.

    L'incapacité cyclique ou épisodique est l'un des principaux problèmes que le projet dirigé par Peggy nous a permis d'identifier ou de confirmer. On a également discuté des problèmes des personnes dont l'état de santé est imprévisible et qui doivent avoir recours périodiquement aux prestations d'invalidité.

    L'autre problème était celui de l'évaluation des différents types d'incapacité dont souffrent les personnes atteintes du sida. Comment peut-on faire des évaluations valables alors qu'on ne comprend pas vraiment la maladie.

+-

    Mme Francine Knoops (directrice, Affaires professionnelles, Association des psychiatres du Canada): Bonjour. Je m'appelle Francine Knoops et je représente l'Association des psychiatres du Canada. Notre association possède un groupe de travail sur l'assurance invalidité. Ce groupe a examiné les préoccupations des médecins au sujet des régimes d'assurance privée et ils viennent d'entreprendre une étude semblable au sujet du RPC. Comme vous l'avez remarqué, cela dépend en grande partie des difficultés que les médecins, et plus particulièrement les psychiatres, éprouvent avec leurs patients qui estiment devoir être traités différemment.

    Il y a donc toute un éventail de questions, dont je parlerai peut-être plus tard au cours de nos discussions, dans le domaine de la protection des renseignements, de l'exactitude des diagnostics et de l'écart entre la fonctionnalité et le diagnostic—ce genre de choses.

¿  +-(0945)  

+-

    M. William P. Ashdown (vice-président, Mood Disorders Society of Canada): Bonjour. Je m'appelle Bill Ashdown et je travaille pour la Mood Disorders Society of Canada. Nous avons un grand nombre de questions et de préoccupations au sujet du RPC en particulier et de la protection offerte par divers types d'assurance. Je suis venu ici pour vous faire profiter, si possible, de mon expérience de travail direct sur le terrain. J'ai bien hâte d'entendre ce que les autres ont à dire et de voir si leur expérience est semblable à celle de nos membres. Merci.

+-

    M. Bob Baldwin (directeur national, Politiques sociales et économiques, Congrès du travail du Canada): Je m'appelle Bob Baldwin. Je suis directeur des politiques sociales et économiques du Congrès du travail du Canada. J'ai également été pendant longtemps membre du conseil consultatif sur le régime de pensions du Canada, à l'époque où cet organisme existait.

    L'un des points forts du RPC, c'est que tous les membres de la main-d'oeuvre active y participent, ce qui est d'une importance énorme au niveau des prestations. Mais pour ce qui est de l'assurance invalidité, le plus grand problème, c'est le fait qu'une partie importante des personnes handicapées n'ont pas accès aux prestations du RPC. On a déjà signalé les problèmes des gens qui souffrent d'incapacité à court terme ou intermittente, ce qui est un problème important. L'autre grand groupe de personnes exclues est celui des personnes qui n'ont jamais pu être intégrées au marché du travail en raison de leur incapacité.

+-

    M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne): Je m'appelle Larry Spencer et je suis un député de Regina. Nous avons participé à une étude sur le crédit d'impôt pour personnes handicapées et nous avons constaté qu'il y a une grosse différence au niveau des critères d'admissibilité. À cause de cela, je crains que nous n'ayons, au moyen de différents formulaires, dont les formulaires de demandes, limité la portée du programme par rapport à ce qui était initialement prévu dans la loi. C'est ce qui me préoccupe.

+-

    M. David Walker (témoignage à titre personnel): J'ai participé il y a six ans à l'examen du Régime de pensions du Canada dans le cadre duquel on a tenu des consultations nationales qui ont débouché sur certaines modifications. J'aimerais savoir quelles sont les répercussions pour les autres et je suis prêt à apporter aux discussions une perspective historique. Je n'ai pas de plainte particulière à présenter pour l'instant. Merci.

+-

    M. George Cameron (témoignage à titre personnel): Bonjour. Je m'appelle George Cameron. Je publie un magazine intitulé Canadian Disability. J'ai également représenté pendant plusieurs années des personnes handicapées devant des tribunaux et des commissions.

    Ce qui me préoccupe, c'est que de nouvelles sortes de maladies se sont déclarées dans notre société au cours des 20 dernières années. On donne souvent à ces nouvelles maladies le nom de syndrome de fatigue chronique ou de fibromyalgie. Je soumets qu'il faudrait trouver des façons de tenir compte de ces maladies. Il est difficile d'en faire le diagnostic et le pronostic et cela entraîne de grandes difficultés dans le processus d'appel.

    Merci beaucoup.

+-

    Mme Sherri Torjman (vice-présidente, Caledon Institute of Social Policy): Bonjour. Je m'appelle Sherri Torjman et je représente le Caledon Institute of Social Policy.

    Je suis d'accord avec Bob Baldwin. L'une des grandes forces de ce programme est le fait qu'il accorde une protection universelle à tous les Canadiens qui travaillent. La plupart des Canadiens ne sont pas réellement au courant de la protection très importante qu'offre ce programme. Le problème, bien sûr, ce sont les critères d'admissibilité, le manque d'uniformité dans l'application du régime et le fait que tant de gens soient laissés pour compte.

+-

    Dr Ashok Muzumdar (président, Canadian Association of Physicians with Disabilities): Je m'appelle Ashok Muzumdar. Je représente la Canadian Association of Physicians with Disabilities. Notre organisation a été formée récemment.

    Madame la présidente, permettez-moi de faire une remarque. Il y a une autre catégorie de médecins qui se situe plusieurs degrés au-dessous des simples médecins de famille, et ce sont les spécialistes. Malheureusement, je fais partie de cette catégorie.

    Nous n'avons pas de dossier particulier à l'heure actuelle, mais notre mandat consiste entre autres à essayer d'améliorer la qualité de vie de toutes les personnes handicapées, pas seulement celle des médecins. Puisque notre organisation est toute nouvelle, elle remonte à 18 mois à peine, nous en sommes nous-mêmes à l'étape de la recherche. Je suis venu pour écouter et pour apprendre.

    Merci de m'avoir invité.

+-

    M. Harry Beatty (directeur, Politiques et recherche, CDDH: Centre de la Défense des Droits des Handicapés): Je m'appelle Harry Beatty et je représente le Centre de la défense des personnes handicapées, une clinique d'aide juridique qui dessert les personnes handicapées. Nos bureaux sont à Toronto. Nous faisons partie du réseau des cliniques d'aide juridique communautaires de l'Ontario, qui a mis sur pied un groupe de travail sur le régime d'invalidité du Régime de pensions du Canada. Ce groupe est composé de personnes qui offrent régulièrement des services d'aide juridique relativement au Régime de pensions du Canada.

    L'une des questions sur lesquelles nous mettons l'accent lorsque nous aidons des particuliers, c'est la prétendue «intégration» des prestations à d'autres régimes. Il vaudrait mieux à notre avis parler de «confusion».

    Permettez-moi de vous donner un exemple au sujet de la réadaptation, qui a été mentionnée également par d'autres intervenants. Le fait pour une personne de devoir vérifier si elle est admissible à deux ou trois programmes différents et de faire approuver son plan de réadaptation par deux ou trois programmes différents peut être un obstacle paralysant. Il vaudrait peut-être mieux envisager des politiques uniformes en matière de réadaptation et des exemptions communes en matière de revenu. Il existe de nombreux exemples de divergence entre les programmes, y compris dans les définitions de l'invalidité. Un grand nombre de nos clients participent à deux programmes ou plus.

¿  +-(0950)  

+-

    Mme Tina Head (avocate principale, Services juridiques, Bureau du Commissaire des tribunaux de révision, Régime de pensions du Canada/Sécurité de la vieillesse): Bonjour. Je m'appelle Tina Head et je suis avocate principale au Bureau du Commissaire des tribunaux de révision. Le Bureau est le premier de deux paliers d'appel du Régime de pensions du Canada. Comme on peut s'y attendre, environ 95 p. 100 des appels dont nos tribunaux sont saisis portent sur les prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada.

    Nous comparaissons devant le comité en tant qu'intervenant organisationnel, mais le commissaire et moi-même avons l'intention d'écouter très attentivement les propos des autres personnes présentes. Nous souhaitons nous aussi vous faire part de certaines questions qui nous préoccupent. Je cède la parole au commissaire qui est assis à ma droite.

+-

    M. G. Peter Smith (commissaire, Tribunaux de révision, Régime de pensions du Canada/Sécurité de la vieillesse): Merci Tina.

    Je m'appelle Peter Smith et je suis commissaire des Tribunaux de révision du RPC/SV. Je sais que c'est une appellation interminable, mais je n'y suis pour rien, je vous assure.

    Comme Tina l'a signalé, nous sommes venus ici essentiellement pour mettre en pratique ce que nous préconisons. Nous tâchons d'offrir des occasions de perfectionnement professionnel aux quelque 300 intervenants de nos tribunaux dans les différentes régions du pays. Comme nous leur soulignons l'importance de l'écoute active, il est important que nous la pratiquions nous-mêmes.

    Quand nous avons comparu devant le sous-comité il y a une quinzaine de jours, nous nous sommes engagés à lui présenter d'ici la fin de l'été des propositions de réforme de la politique, des modalités et des programmes, ce qui n'est pas toujours le rôle d'un tribunal administratif. Comme vous le savez, nous sommes un organisme quasi judiciaire ou un tribunal administratif. Cependant, étant donné que le sous-comité examine cette question et que le Régime de pensions du Canada fera l'objet d'une révision législative d'abord au niveau fédéral, nous estimons utile de soumettre quelques idées. Nous espérons également entendre les bonnes idées que d'autres intervenants pourront exprimer.

+-

    M. François Bélisle (directeur général, Association canadienne des paraplégiques): Bonjour. Je m'appelle François Bélisle et je suis le directeur général de l'Association canadienne des paraplégiques, ici à Ottawa.

    La plupart des grands problèmes ont déjà été signalés, mais je dirais qu'il faut se pencher sur les critères d'admissibilité, parce que dans certains cas ils peuvent dissuader les personnes handicapées de retourner au travail. Certains intervenants ont mentionné des lacunes au niveau de la coordination et du montant des prestations. Voilà les sujets dont j'aimerais que l'on discute.

+-

    M. Neil Pierce (directeur général, Division Alberta, Association canadienne des paraplégiques): Bonjour. Je m'appelle Neil Pierce et je suis le directeur général de l'Association canadienne des paraplégiques en Alberta. J'aimerais compléter l'intervention de François en signalant également les problèmes relatifs à l'admissibilité au Régime de pensions du Canada.

    Mes conseillers qui travaillent sur le terrain trouvent que l'on interprète de façon trop étroite la notion d'invalidité grave et prolongée. Au Canada, beaucoup de personnes ayant subi une section complète de la moelle épinière sont jugées inadmissibles.

    De plus, nous trouvons que la définition de l'invalidité est trop étroite et repose sur un modèle médical. On devrait insister davantage sur la participation des spécialistes professionnels à l'évaluation des répercussions de l'invalidité sur l'aptitude à l'emploi. Il faudrait aussi renforcer le programme de réadaptation professionnelle, qui même s'il est excellent, pourrait encore être amélioré.

¿  +-(0955)  

+-

    Mme Sue Lott (témoignage à titre personnel): Bonjour. Je m'appelle Sue Lott. J'exerce le droit à Ottawa et je fais également de la recherche. Je comparais devant le comité à titre d'auteure d'une recherche récente que j'ai menée pour le compte du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision.

    L'étude en question portait sur l'intégration du RPC avec des régimes d'assurance privés, ainsi que les raisons d'une telle intégration et les enjeux qu'elle soulève. Le problème tient essentiellement au montant des prestations auxquelles les gens ont droit, à l'incapacité des personnes intéressées à comprendre la façon dont les deux régimes—l'un public et l'autre privé—s'harmonisent et, en fait, réduisent le montant des prestations auxquelles ils ont droit. Voilà le problème fondamental que mon étude a révélé. Je vous remercie de votre attention.

+-

    Mme Susan Williams (directrice générale, Prestations d'invalidité et appels, ministère du Développement des ressources humaines): Bonjour. Je m'appelle Susan Williams et je suis la directrice générale responsable de l'administration des prestations d'invalidité versées dans le cadre du Régime de pensions du Canada. J'ai l'intention d'écouter très attentivement les discussions qui auront lieu ce matin. Tous les commentaires sur le RPC nous intéressent au plus haut point car nous voulons améliorer le programme pour le rendre plus accessible aux clients et plus adapté à leurs besoins.

+-

    Mme Deanna Groetzinger (Société de la sclérose en plaques du Canada): Je m'appelle Deanna Groetzinger et je suis membre de la Société de la sclérose en plaques du Canada.

    Environ 10 000 personnes atteintes de sclérose en plaques touchent actuellement des prestations d'invalidité du RPC; il s'agit donc d'une très importante source de soutien de revenu pour ces personnes. Cependant un certain nombre de personnes atteintes de sclérose en plaques nous ont fait part des difficultés qu'elles avaient éprouvées au chapitre de l'admissibilité aux prestations. La sclérose en plaques est une maladie dont les symptômes peuvent fluctuer énormément dans le temps, même s'il s'agit d'une maladie progressive. Nous sommes ici pour observer, écouter et peut-être aussi proposer certaines améliorations.

+-

    Mme Wendy Steinberg (analyste des politiques, Association canadienne pour la santé mentale): Je m'appelle Wendy Steinberg et je représente l'Association canadienne pour la santé mentale. Comme plusieurs intervenants l'ont déjà signalé, le caractère épisodique et imprévisible des symptômes des maladies mentales graves entraînent des difficultés particulières pour les personnes qui demandent des prestations d'invalidité prévues par le RPC.

    La définition de l'invalidité nous préoccupe également, de même que la tendance à assimiler l'invalidité à l'inaptitude permanente à l'emploi. En réalité, la plupart des personnes atteintes de maladies mentales graves sont capables de travailler, dans une certaine mesure, dans un milieu de travail souple et soutenant. L'approche du tout ou rien ne correspond pas à la réalité que vivent les personnes que nous représentons. J'espère pouvoir engager un dialogue sur ces questions aujourd'hui.

+-

    Mme Linda Simpson (représentante, Association canadienne des professionnels en réadaptation): Je m'appelle Linda Simpson et je représente l'Association canadienne des professionnels en réadaptation. Je vois certains de nos membres dans la salle. Je suis venue ici aujourd'hui pour entendre différents points de vue et prendre connaissance de certains enjeux liés au mode de prestation des services.

+-

    Mme Donna Klaiman (directrice, Éducation et développement professionnel, Association canadienne des ergothérapeutes): Je m'appelle Donna Klaiman et je représente l'Association canadienne des ergothérapeutes.

    Il y a deux grands sujets que nous voulons aborder aujourd'hui. Le premier est la redéfinition des critères d'admissibilité aux prestations d'invalidité du RPC; notre position est très semblable à celle des intervenants précédents. À l'heure actuelle, un des critères d'admissibilité est défini comme une invalidité grave ou prolongée ayant entraînée l'incapacité permanente d'occuper un emploi rémunérateur. À notre avis, il faudrait redéfinir ce critère de manière à ce qu'il corresponde plutôt à un manque à gagner important et permanent causé par une invalidité. Si on adoptait cette définition, les personnes touchées pourraient travailler de façon sporadique quand elles seraient en mesure de le faire, même si leurs revenus d'emploi à long terme auraient sensiblement et définitivement diminués.

    Le deuxième sujet que nous souhaitons signaler a trait aux mesures incitatives qu'on pourrait instaurer. Les personnes ayant une expérience particulière de travail pourraient voir relever leurs prestations d'invalidité du RPC à long terme. Merci.

+-

    M. Vincent Boyce (Alliance canadienne des victimes d'accidents et de maladies du travail): Bonjour mesdames et messieurs les députés. Je m'appelle Vincent Boyce et je représente l'Alliance canadienne des victimes d'accidents et de maladies du travail. Je m'excuse d'être arrivé en retard, mais nous nous sommes trompés d'édifice. Selon nos renseignements, nous devions nous rendre au numéro 180, salle 604. C'est là que nous nous trouvions à 9 heures, avant qu'on nous indique que la réunion se tenait ici. Je vous présente donc nos excuses.

    Je fais également partie de l'Alliance des victimes d'accidents et de maladies du travail du Manitoba; je représente l'Alliance canadienne depuis relativement peu de temps. Au Manitoba, les travailleurs blessés ou malades sont renvoyés de la commission des accidents du travail au régime d'invalidité du RPC, et vice-versa. J'espère retirer de cette table ronde les éléments de solution que je pourrais ramener avec moi afin d'aider les travailleurs invalides du Manitoba et d'ailleurs, puisque notre association représente également l'ensemble du Canada.

À  +-(1000)  

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    M. Dave MacKenzie (Alliance canadienne des victimes d'accidents et de maladies du travail): Je me suis rendu au mauvais édifice comme Vince. Je m'appelle Dave MacKenzie et je suis originaire de la Nouvelle-Écosse. Je suis le représentant de l'Alliance canadienne des victimes d'accidents et de maladies du travail pour cette province.

    Nous avons eu des différends interminables avec les responsables des prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada. Je suis toujours très contrarié quand je lis certaines des lettres concernant nos membres. J'en ai une ici décrivant le cas d'un travailleur qui a présenté une demande de prestations d'invalidité au Régime de pensions du Canada en octobre 1997. Il y a eu des appels à différents paliers, le dernier datant du 18 octobre 2000. On a alors fait savoir à ce travailleur que son appel serait entendu au niveau suivant le 29 mai.

    Il y a quelques jours, alors que j'animais une séance de formation à Niagara Falls, j'ai reçu un appel de ce travailleur. Il m'informait que lui et moi n'allions pas comparaître pour l'audition de son appel le 29 mai, puisque les autorités compétentes étaient revenues sur leur décision du 18 octobre 2000 et avaient décidé qu'il avait droit aux prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada.

    La lettre portait la date du 8 mai et il ne l'a reçue que vers le 12 mai. À ce moment-là, il lui restait environ dix jours pour présenter une nouvelle demande au Régime de pensions du Canada pour être admissible aux prestations d'invalidité. Mais on lui avait fait perdre deux ans et demi de sa vie.

    Je me demande si les personnes dans cette salle s'imaginent ce que c'est que d'essayer de survivre en ayant pour tout revenu que les prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada. C'est un véritable tour de force de subvenir aux besoins de deux personnes avec 700 $ par mois.

    C'est pourquoi je propose que le gouvernement adopte une loi interdisant aux compagnies d'assurance et à la Commission des accidents du travail de récupérer de l'argent à même les prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada. Si vous recevez une pension de votre régime d'assurance ou de la CAT, on peut déduire de votre indemnité d'accident du travail la moitié de vos prestations d'invalidité du Régime des pensions du Canada.

    Je ne pense pas que cette façon de faire soit conforme à l'esprit du Régime de pensions du Canada en ce qui concerne les travailleurs invalides. C'est d'ailleurs ce qu'a conclu un tribunal de l'Ontario dans un jugement dont j'ai ici une copie. Tant que le gouvernement n'aura pas légiférer pour empêcher que l'on prive les travailleurs invalides de leurs moyens de subsistance, nous devrons envisager d'autres solutions.

    J'espère que j'apprendrai quelque chose de nos échanges d'aujourd'hui. Merci.

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    M. Wolfgang Zimmerman (représentant, National Institute of Disability Management and Research): Je suis très heureux d'être ici aujourd'hui et je m'excuse de mon retard.

    J'aimerais exprimer quelques brefs commentaires. Premièrement, j'estime, particulièrement à la lumière de ce qui se passe actuellement en Colombie-Britannique, que nous devons tout mettre en oeuvre pour renforcer notre système national. Le RPC est le seul système d'envergure nationale permettant d'aider les personnes invalides, et ce régime est la cible de vives critiques.

    Deuxièmement, j'aimerais souligner qu'à mon avis le RPC ne peut pas fonctionner en vase clos. Nous devons privilégier une approche beaucoup plus harmonisée tenant compte de toutes les mesures qui s'adressent aux personnes invalides. Cette approche devrait regrouper les mesures liées à l'emploi, à l'autosuffisance et à l'accession à l'autonomie pour les personnes atteintes d'invalidité. Il ne faut pas se limiter aux prestations sans tenir compte des autres aspects. Ce serait une erreur à mon avis.

    Troisièmement, il faudrait que le système soit beaucoup plus proactif. Quand le RPC commence à s'occuper de leurs dossiers, bien des gens ont déjà cessé de travailler pour l'entreprise qui les employait avant qu'ils ne deviennent invalides.

    Un des éléments qui ressort de l'expérience européenne et de l'expérience américaine c'est que même en période de forte croissance économique, le taux de chômage des personnes atteintes d'invalidité ne diminue pas. Il faut donc envisager un véritable changement de paradigme. À mon avis, les prestations d'invalidité du RPC ne peuvent suffire, à elles seules.

    Pour cette raison, je suis convaincu qu'il faut chercher des moyens de renforcer les partenariats avec le secteur privé afin de favoriser le retour au travail et de réduire le nombre de travailleurs qui deviennent invalides. Je pense qu'il faut envisager tous les moyens nécessaires pour y arriver, qu'il s'agisse de favoriser l'acquisition de compétences supplémentaires ou de conclure des ententes différentes. Il faut absolument faire preuve de créativité, car à mon avis les mesures du RPC relatives à l'invalidité ne sont ni viables, ni acceptables.

    Merci de votre attention.

À  +-(1005)  

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    La présidente: Merci beaucoup.

    Nous accueillons aussi Reed Elley, député allianciste.

    Comme nous l'avons expliqué, la cloche va sonner. Les choses se dérouleront comme d'habitude, mais nous allons rester ici et poursuivre nos travaux même pendant l'assermentation des nouveaux députés. Ce sont là les cérémonies de la Chambre des communes, dont nous allons faire abstraction aujourd'hui.

    J'ai maintenant l'immense plaisir de présenter Sherri Torjman. Nous qui nous intéressons aux questions liées à l'invalidité nous sentons très privilégiés d'accueillir une femme aussi intelligente et dévouée, qui est toujours capable de jeter un éclairage nouveau. Au Caledon Institute, Sherri consacre beaucoup de son temps à étudier la situation des personnes handicapées au Canada. Elle y travaille depuis la parution de Obstacles et continue à publier des articles de fond qui stimulent la réflexion. Elle a récemment rédigé un document sur le RPC à l'intention du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision.

    Nous lui avons demandé de venir nous donner un bref cours d'histoire ce matin, mais surtout de nous parler des aspects administratifs de la politique actuelle et de nous donner son avis sur les réformes possibles.

    Merci beaucoup, Sherri.

+-

    Mme Sherri Torjman: Merci beaucoup, madame la présidente. Je vous remercie de cette flatteuse présentation. Je vous suis également reconnaissante de m'avoir demandé de lancer une discussion extrêmement importante, non seulement pour les personnes ayant une déficience, mais pour l'ensemble du pays. Au nom de nous tous, merci de nous donner l'occasion de participer à cette démarche.

    Si je me fie à la fourchette de participants à cette table ronde, vous allez entendre le point de vue de Canadiens et de Canadiennes de tous les milieux. Je sais qu'en tant que députés, vous êtes au courant de nombreux problèmes reliés aux prestations pour invalidité du Régime de pensions du Canada. Vous passez sans doute beaucoup de temps à régler les problèmes de vos électeurs, si bien que vous connaissez déjà bon nombre des sujets de préoccupation. Je pense cependant que vous entendrez parler d'autres questions, par exemple de la part des consommateurs, qui ont déjà décrit certains des principaux problèmes qu'ils éprouvent par rapport au programme et à la procédure d'appel. J'y reviendrai dans quelques instants. Vous entendrez également le point de vue des fournisseurs de services, qui s'interrogent sur le rôle qui leur incombe dans le système et sur l'orientation des patients; ils décriront également les tensions et les fardeaux que le système leur impose. Enfin vous entendrez sans doute aussi le point de vue du secteur des régimes d'assurance privés, parce que les rapports entre ce secteur et le Régime de pensions du Canada est un sujet de mécontentement indéniable. Enfin, vous entendrez le point de vue des personnes chargées du financement et de la vérification de ce régime.

    Avant d'en venir à cette brève description et à certains des problèmes, j'aimerais dire quelques mots au sujet de cette table ronde. Au cours des dernières années, beaucoup d'efforts ont été entrepris au Canada pour améliorer plusieurs de nos programmes. Je pense que beaucoup d'intervenants ont participé à ces discussions de bonne foi. Ils ont signalé un grand nombre de lacunes du régime et j'espère que cette démarche aboutira à l'amélioration du régime et à des résultats pour tous les Canadiens. Dans bien des cas, de telles démarches n'ont pas été fructueuses.

    Il est arrivé qu'on lance le débat sur certaines questions soit pour amputer certains programmes, soit pour les abolir complètement. Je dois avouer que, même si j'attends beaucoup de cette démarche et même si j'apprécie que l'on procède à cet examen, j'ai également certaines inquiétudes. Je crains que l'issue de cette démarche n'améliore pas la situation des Canadiens et des Canadiennes. Bien entendu, la gestion responsable des finances publiques ou, si l'on veut, la perspective financière, est absolument essentielle si l'on veut faire quoi que ce soit. Mais ce n'est pas la seule perspective dont il faut tenir compte. La perspective humaine est extrêmement importante, et c'est celle que j'applique personnellement. J'espère que nous privilégierons cette perspective au moment de déterminer l'issue de cet examen et de ces discussions.

    Avant d'aborder les questions précises qui ont été soulevées, il me semble important de décrire certains des points forts du régime; et d'ailleurs vous avez demandé notre avis à ce sujet. J'estime qu'il est très important de passer en revue certains des atouts du régime afin de bien les connaître. Quand on veut procéder à une réforme, il faut comparer l'état actuel du système et ce qui est proposé afin de faire en sorte que les aspects positifs actuels du système sont sauvegardés dans le système réformé.

    Beaucoup d'entre vous connaissent sans doute de façon générale l'historique du Régime de pensions du Canada. La loi qui l'a institué n'a pas été facile à faire adopter. Beaucoup d'entre vous ont étudié ou étudient actuellement le Régime de pensions du Canada. Il faut savoir que ce régime est l'aboutissement de négociations et de discussions longues et ardues.

    Bob, vous êtes bien placé pour le savoir, étant donné certaines fonctions que vous avez exercées.

    La mise en place du Régime de pensions du Canada a été considérée comme un miracle politique. Il importe de se le rappeler, parce que les députés se sont battus très fort pour faire approuver les mesures de protection prévues par le régime.

    Quelles sont donc ces mesures? Elles sont nombreuses. L'une des plus importantes a été mentionnée au début de la séance. La couverture universelle, c'est-à-dire la protection de tous les travailleurs. Bien entendu, cette protection est limitée dans la mesure où elle ne s'applique qu'aux travailleurs. Mais il s'agit d'une disposition très importante du Régime de pensions du Canada, car la protection est offerte aux travailleurs autonomes, contrairement à d'autres régimes importants, notamment le Régime d'assurance-emploi, dont les travailleurs autonomes sont exclus. Le RPC est transférable, si bien que les travailleurs sont protégés peu importe la région du Canada où ils vivent.

À  +-(1010)  

    Le régime est équitable partout au pays. On reçoit les mêmes montants peu importe la région où l'on habite. Les prestations sont indexées au coût de la vie, contrairement à beaucoup d'autres types de prestation. Certaines dispositions autorisent le retrait du régime, si bien que si on éprouve des difficultés pendant certaines périodes, on peut faire retirer les prestations du calcul. Il y a également des dispositions relatives à l'éducation des enfants, qui constituent--une protection très importante. Enfin, le Régime de pensions du Canada prévoit le versement de prestations d'invalidité, comme chacun le sait. Voilà pourquoi nous sommes ici aujourd'hui.

    Il est très important d'être conscient de cet avantage, qui fait que tout Canadien qui paie les cotisations prévues et qui correspond à la définition comprise dans la loi est admissible. Dans le cas de beaucoup d'autres régimes, particulièrement les régimes privés, il n'est pas facile d'être admissible. Ainsi, si vous avez une maladie ou si des membres de votre famille souffrent d'une maladie d'origine génétique, on peut vous refuser. Le Régime de pensions du Canada ne fixe aucune condition de cette nature. C'est donc une protection très importante qu'il faut garder à l'esprit.

    Je vais maintenant résumer le fonctionnement du Régime de pensions du Canada. En ce qui concerne les prestations d'invalidité, le régime comporte deux volets. Le premier est un taux fixe et le deuxième, un taux variable. Le taux fixe est important parce qu'il est censé reconnaître le fait que toute personne atteinte d'une invalidité grave et prolongée doit assumer des coûts additionnels en raison de cette invalidité. Il ne s'agit pas d'un gros montant, mais il assure quand même une protection de base. Le taux fixe s'élève à 364 $ par mois en 2002. Ce n'est pas un gros montant, mais il est néanmoins important. S'ajoute à cela un montant variable qui équivaut à 75 p. 100 de la prestation de retraite que vous auriez accumulée. Dans ce cas, le montant maximal est de 592 $ par mois. Par conséquent, la prestation d'invalidité maximale s'élève actuellement à 956 $ par mois, c'est-à-dire 11 473 $ par année.

    Je dois cependant préciser que même s'il s'agit du montant maximal, ce n'est pas le montant moyen de la prestation. La plupart des gens reçoivent moins que cela, parce que leur rémunération n'atteint pas le maximum prévu. D'après les statistiques de 2000, les plus récentes dont je dispose, bien que le ministère ait peut-être des chiffres plus récents, la prestation moyenne était de 737 $ par mois pour les hommes et de 625 $ pour les femmes. On voit donc que les montants réellement versés sont sensiblement moindres que les montants auxquels les gens auraient droit.

    Quels sont les critères d'admissibilité aux prestations d'invalidité? Il y a deux critères principaux, fondés sur les années de cotisation et sur la définition de l'invalidité. Il faut cotiser pendant quatre ans sur six pour avoir droit à la prestation d'invalidité. De plus, il faut répondre aux critères énoncés dans la définition, c'est-à-dire souffrir d'une invalidité à la fois grave et prolongée. Selon la définition en vigueur, une invalidité n'est grave que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité n'est prolongée que si elle est censée continuer pendant une période longue, généralement interprétée comme au moins un an. Voilà les deux principaux critères. Ils ont soulevé de véritables difficultés, sur lesquelles je reviendrai tout à l'heure.

    Comme des facteurs nombreux et complexes interviennent dans la définition de l'admissibilité, le régime comporte une procédure d'examen. D'autres intervenants en ont parlé ce matin. Il y a dans la salle des représentants qui s'occupent du processus d'examen. Toute personne dont la demande a été rejetée peut demander une révision dans les 90 jours. Elle peut ensuite demander une reconsidération de son cas. Cela est essentiellement prévu par le régime, même si le cas de cette personne serait revu par quelqu'un qui n'aurait pas pris part à la décision initiale. Si après avoir pris connaissance de l'issue de la révision de son cas, la personne se sent toujours lésée, elle peut porter l'affaire en appel au palier suivant, devant un Tribunal de révision. Cette démarche est prévue par l'article 82 de la Loi sur le Régime de pensions du Canada. Et si elle n'est toujours pas satisfaite de la décision rendue à cette étape, elle peut porter l'affaire en appel à un troisième palier, la Commission d'appel des pensions. Les décisions de la Commission d'appel des pensions sont généralement considérées comme finales, bien que dans certains cas elles puissent être portées en appel devant la Cour fédérale. J'aborderai tout à l'heure une décision importante de la Cour fédérale.

    Il existe au Québec un régime analogue, le Régime des rentes du Québec. Il fonctionne à peu de choses près comme le RPC. Les niveaux de prestations sont exactement les mêmes, mais il existe néanmoins des différences très importantes.

À  +-(1015)  

    Il y a des différences en ce qui concerne l'évaluation initiale de la demande. Dès l'entrée en vigueur de son régime, le Québec a pris des dispositions spéciales qui tiennent compte du fait que les personnes âgées de 60 à 64 ans qui ont une déficience auront sans doute du mal à se retrouver du travail si elles ont été mises à pied ou si elles veulent se recycler. Les travailleurs âgés ont donc droit à une reconnaissance particulière, et le régime est un peu plus indulgent à leur endroit. Il s'agit là d'une reconnaissance très importante de la part du Québec.

    Il y a aussi un autre aspect très important au Régime des rentes du Québec—et quelqu'un y a fait allusion quand nous avons fait un tour de table. C'est le fait que les divers programmes sont beaucoup plus intégrés dans cette province. Les Québécois ont leur programme d'aide sociale, leur programme d'indemnisation des accidents du travail de même leur Régime des rentes du Québec qui relèvent tous du gouvernement provincial. Ces trois programmes se conjuguent efficacement, si bien que la plupart des gens ne se trouvent pas laissés pour compte. Ils ne passent pas entre les mailles du filet comme c'est le cas dans d'autres régions du pays où les gens ont un régime d'aide sociale et un régime d'indemnisation des accidents du travail gérés par la province alors que le régime de pensions d'invalidité est national, avec les problèmes que cela suppose. On peut donc tirer des enseignements importants de ce qui se fait dans cette province-là.

    Pour ce qui est du montant total des prestations d'invalidité pour l'année 2000, 2,5 milliards de dollars de prestations d'invalidité ont été versés aux termes du Régime de pensions du Canada. C'est 13 p. 100 du montant total des prestations versées au titre de ce régime, et cela représente une baisse de 17 p. 100 par rapport à 1994. La proportion est tombée à 13 p. 100 en 2000.

    Il convient de souligner aussi qu'il y a une prestation pour les enfants. Quiconque est admissible à la pension d'invalidité et a un enfant de 18 ans ou moins—ou de 25 ans ou moins qui fait des études à plein temps—est admissible à la prestation pour enfant s'il en fait la demande. Il s'agit d'un montant forfaitaire égal à 184 $ par mois ou à 2 205 $ par an. Ce n'est pas beaucoup, mais c'est quand même un montant important. La prestation pour enfant occasionne de graves problèmes d'interface avec d'autres régimes d'assurance, notamment les régimes d'assurance privés.

    Il ne s'agit là que d'un aperçu très bref. Je voulais vous parler brièvement de ces aspects du régime, car l'examen éventuel du régime ne devrait pas compromettre les mesures de protection très importantes qui y sont prévues.

    Quels sont les défis? Il y en a plusieurs dont j'aimerais vous entretenir: le nombre de cas qui est très élevé et qui augmente, il faudrait vérifier s'il augmente effectivement; les critères d'admissibilité; certains problèmes d'ordre administratif; les problèmes d'interface, les troubles médicaux qu'ont soulevés les participants; et les attentes relatives au travail.

    Depuis toujours, on s'inquiète du nombre élevé de personnes qui demandent la pension d'invalidité et on se demande s'il va continuer à augmenter ainsi. On peut prédire avec pas mal de certitude le montant des prestations de retraite. On ne sait pas si les gens vont prendre leur retraite à 60 ans ou à 65 ans, mais les prévisions actuarielles relatives aux prestations de retraite sont assez fiables. Vous ne serez pas surpris d'apprendre que la chose est un peu moins facile pour ce qui est des prestations d'invalidité, qui sont bien moins prévisibles. Il y a aussi certains troubles médicaux qui ont fait leur apparition et que nous devrons décider d'accepter ou de rejeter. On s'inquiète pour l'avenir du régime.

    Qu'en est-il du nombre de demandes? Depuis que les premières prestations d'invalidité ont été versées en 1970, le nombre de demandes augmente de façon assez constante. C'est que les gens cotisaient et que le régime ne faisait qu'entrer en vigueur. Nous nous attendions à cette hausse. À la fin des années 80, le nombre de demandes a baissé quelque peu, mais il a augmenté de façon radicale entre 1990 et 1995. À compter de 1995, il s'est stabilisé. L'accroissement que nous avons connu de 1990 à 1995 a toutefois soulevé beaucoup de questions au sujet de l'avenir du régime de prestations d'invalidité. C'était presque l'état de panique car on se demandait si cet accroissement constant n'allait pas faire éclater le régime. Nous avons d'ailleurs produit un court commentaire intitulé History/Hysteria, car les inquiétudes au sujet de l'avenir du régime nous semblaient confiner à l'hystérie, alors que le gonflement de la demande nous paraissait être une conséquence directe des décisions prises à l'époque, à savoir les directives très explicites de la part des parlementaires qui, ayant été sensibilisés aux problèmes, avaient opté pour un élargissement du régime.

À  +-(1020)  

    Je vous explique un peu ce qui s'est passé. En 1981, un comité parlementaire a publié le rapport Obstacles, où il exposait beaucoup des lacunes des prestations d'invalidité prévues au Régime de pensions du Canada et préconisait des améliorations importantes au chapitre de l'accès et du montant des prestations. Ce rapport a ensuite conduit à plusieurs études d'envergure sur la façon de réformer en profondeur l'assurance invalidité au Canada.

    Les propositions qui en sont issues n'ont jamais eu de suite, principalement à cause des dépenses qu'elles auraient entraînées et aussi de leur complexité administrative. Le Parlement a toutefois décidé d'apporter certaines améliorations au régime. C'est ainsi que nous avons eu droit en 1987 à une modification législative visant à changer les critères de cotisation et à améliorer le niveau des prestations.

    D'après cette mesure, la période de cotisation était de cinq ans sur dix avant 1987, tandis qu'après 1987, elle était de cinq sur dix ou de deux ans sur trois. Le délai de rétroactivité des demandes a par ailleurs été porté de douze mois à quinze mois, et la prestation mensuelle est passée de 91 $ à 233 $, pour qu'elle soit conforme au niveau fixé au Québec, qui était plus élevé à ce moment-là.

    En 1992, une nouvelle directive parlementaire d'envergure—un projet de loi d'initiative parlementaire—est venue allonger la période de grâce pour les demandeurs retardataires. Étant donné que la plupart des gens ignorait l'existence des mesures de protection prévues, le Parlement a jugé qu'il était important de s'assurer que les gens soient informés de l'existence du régime et qu'ils en comprennent les modalités, si bien qu'il a décidé d'allonger le délai.

    Par conséquent, vous l'aurez deviné, le nombre de demandes s'est mis à augmenter. Je ne comprends pas pourquoi on a été si surpris par cet accroissement à l'époque, puisque c'était précisément là l'objet de certaines des modifications qui avaient été apportées.

    En 1993, le vérificateur général a fait état dans son rapport de nombreux problèmes liés à l'administration du programme, mais il a aussi indiqué que beaucoup de Canadiens n'étaient pas au courant qu'ils y étaient admissibles. Il a donc recommandé la mise en place d'un important programme de sensibilisation.

    Ainsi, beaucoup de provinces ont entrepris d'examiner de fond en comble leurs programmes respectifs et ont transféré bon nombre de leurs prestataires à la pension d'invalidité. En Ontario, quelque 16 000 assistés sociaux ont été transférés au RPC. Le Nouveau-Brunswick, la Colombie-Britannique et l'Ontario ont réalisé des études exhaustives. Il y a donc eu, encore une fois, gonflement de la demande, mais il s'agissait en fait de la conséquence directe d'une directive qui avait été mise en place.

    Les critères d'admissibilité constituent un autre facteur important, de manière générale. Une note de service interne de DRHC, en date de 1989, soulignait l'importance de tenir compte de facteurs socio-économiques dans l'évaluation des demandes. Il s'agissait, non pas d'une directive parlementaire, mais bien d'une note de service interne où l'on rappelait l'importance de certains des autres facteurs qui influent sur l'employabilité. Cette note de service avait elle-même son origine dans plusieurs décisions de la commission d'appel où l'interprétation des modalités du régime et la définition des critères d'admissibilité avaient été mises en doute. L'effet a été bien entendu d'accroître le nombre de demandes.

    En 1995, de nouveaux critères médicaux ont été adoptés pour aider les fonctionnaires appelés à évaluer les demandes. Depuis 1995, le nombre de personnes admises au régime a en fait plafonné et a baissé.

    Faut-il s'en féliciter ou s'en inquiéter? C'est à cette question que nous cherchons à répondre dans notre étude. Qu'est-il arrivé à ce point tournant en 1995? Le régime avait-il été trop élargi, ou était-il comme il devait l'être? Quelles ont été les conséquences de cela? Il s'agit là de questions très importantes.

    Il y a un lien entre les critères d'admissibilité et l'accroissement du nombre de demandes et, comme nous l'avons entendu dire, on s'inquiète notamment de l'interprétation du critère de la gravité. Devrait-on tenir compte d'autres facteurs qui influent sur l'employabilité? Devrait-on tenir compte du degré d'alphabétisation, de la compétence linguistique, de la violence dont la personne aurait pu avoir été victime et du taux de chômage dans la région où elle présente sa demande? Tous ces autres facteurs qui influent sur l'employabilité devraient-ils être pris en considération en l'occurrence?

À  +-(1025)  

    La question est très importante parce que, quand on examine certaines des décisions des commissions d'appel, on constate les variations dans la façon d'interpréter ou d'appliquer les critères, si bien que le moment est venu de tenir un débat pancanadien sur la question. La Cour fédérale, dans sa décision d'août 2000 relativement à l'affaire Villani, a en fait soulevé la question du critère de la gravité. Elle en traite pendant au moins 100 pages—entrant dans des détails qu'on préférerait ignorer ou qu'on n'est pas à même de comprendre—s'interrogeant sur la façon dont les critères d'admissibilité ont été interprétés au fil des ans et disant qu'il faut vraiment se pencher sur cette question parce qu'on est peut-être allé trop loin dans la façon de l'interpréter.

    En même temps qu'on s'interroge sur la façon de déterminer la gravité, on s'interroge sur d'autres troubles médicaux. Certains des participants en ont parlé, et je trouve que c'est une question très importante. Faudrait-il ajouter à la liste des troubles médicaux donnant droit à la pension d'invalidité d'autres troubles qui ne répondent pas aux critères en place parce qu'ils ne présentent pas des caractéristiques qu'on est en mesure d'évaluer objectivement sur le plan médical, mais qui sont néanmoins considérés comme des troubles débilitants?

    Vous avez parlé, par exemple, de divers troubles: George, fibromyalgie, stress chronique, troubles mentaux et maladies mentales, sida, etc., qui sont nouveaux en ce sens qu'on n'y avait pas pensé quand le régime a été mis en place. Dans certains cas, on n'en connaissait même pas l'existence. Dans certaines provinces, la commission de l' indemnisation des accidentés du travail reconnaît l'existence de certains de ces troubles, d'où les pressions pour qu'il en soit tenu compte également dans les décisions relatives au Régime de pensions du Canada.

    C'est donc là une question très importante que soulèvent les participants ici présents.

    Il y a une troisième question, qui a été soulevée elle aussi par plusieurs personnes: il s'agit des attentes relativement au travail. Il est très important à mon avis de discuter sérieusement de cette question. Nous avons bien plus de personnes employables de nos jours, en partie à cause des progrès technologiques et en partie à cause des médicaments qui permettent à bien des gens de continuer à fonctionner pendant un certain temps. Pourtant, le Régime de pensions du Canada continue à fonctionner comme si tout était noir ou blanc. On est admissible ou bien on ne l'est pas. Or, nous savons que le monde est plutôt gris maintenant, sur le plan tant figuratif que littéral, si bien que cette question a des répercussions pour l'ensemble des régimes de pension.

    Faudrait-il prévoir des prestations partielles? Faudrait-il mettre en place un régime d'admissibilité temporaire et, dans l'affirmative, quelles en seraient les répercussions au chapitre de l'assurance? Le régime serait-il alors fondé sur un examen du revenu? Nous trouverions-nous en fait à modifier de manière fondamentale la nature de la protection qui est assurée?

    La question est extrêmement importante. Et je suis d'accord avec la personne qui a dit que, si nous décidons d'examiner les attentes relatives au travail, nous ne pouvons pas le faire uniquement dans le cadre du régime en tant que tel. Ce serait quelque chose de très dangereux à mon avis.

    Il est important d'examiner dans leur ensemble toutes les mesures de soutien au chapitre de l'invalidité, comme le fait le tout petit comité si parfait qui se penche là-dessus. Le tout petit comité si parfait examine aussi le coût des mesures et des services de soutien en cas d'invalidité et tente d'apporter des changements au régime fiscal. Il y a toutefois une foule d'autres changements qui pourraient être apportés au chapitre du logement.

    Si donc on décide de faire quelque chose en ce qui concerne les attentes relatives au travail, il faudrait tenir compte des autres changements dans leur ensemble. Sinon, on se trouverait à apporter au régime des modifications qui pourraient à la longue nuire énormément aux personnes qui en ont besoin.

    Il y a des problèmes administratifs. Certains des problèmes dont j'ai fait état sont en fait des problèmes à long terme qui exigeraient une étude approfondie et qui mettraient en cause bien d'autres régimes. Il y a toutefois des problèmes d'ordre administratif qui pourraient être réglés assez rapidement.

    Vous allez entendre bien des clients vous parler des difficultés qu'ils ont à obtenir des renseignements de base au sujet du régime. Quand ils appellent, ils se trouvent parfois pris dans un engrenage sans fin «faites le 9, faites le 1, faites le 3», et n'arrivent pas à parler à une personne en chair et en os. Parfois aussi, on leur envoie une lettre où on leur dit que leur demande a été rejetée, par exemple, mais sans aucune explication.

    De nombreux problèmes ont été soulevés relativement à la procédure d'appel: des gens qui sentent qu'ils n'ont pas eu droit au même traitement que d'autres, qui s'estiment atteints dans leur dignité, qui ont l'impression de ne pas avoir été bien compris ou qui, dans certains cas, se sont même sentis obligés de dire certaines choses. On s'inquiète aussi qu'il n'y ait pas de compte rendu de la procédure d'appel et qu'il est donc impossible d'aller vérifier ce qui s'est dit.

À  +-(1030)  

    Il est important par ailleurs de savoir que tant le régime que la procédure d'appel sont soumis à des pressions intenses. Le nombre de cas est très élevé et les attentes ne sont pas faciles à satisfaire étant donné les budgets et le désir d'éviter que le régime ne soit géré de façon irresponsable. Les représentants du régime se trouvent aussi confrontés à des choix très difficiles, et il est important de tenir compte de leurs préoccupations aussi.

    Il y a de graves problèmes d'interface entre le Régime de pensions du Canada et les régimes d'assurance privés pour ce qui est des critères d'admissibilité et des attentes des compagnies d'assurance qui renvoient souvent les gens au Régime de pensions du Canada au cas où, même si elles savent qu'ils n'y sont sans doute pas admissibles. Il en résulte un fardeau disproportionné pour le régime.

    Il y a aussi le grave problème de la récupération fiscale des prestations d'invalidité. Quand on souscrit à un régime d'assurance, on s'attend à recevoir les prestations auxquelles on a droit, mais le régime est géré à l'heure actuelle comme s'il s'agissait d'un régime fondé sur l'examen du revenu, alors que ce n'était sans doute pas là l'intention au départ.

    Il y a aussi des problèmes d'interface complexes par rapport à l'indemnisation des accidentés du travail et à l'aide sociale pour ce qui est de savoir si c'est bien le Régime de pensions du Canada qui devrait être sur la première ligne d'intervention. Était-ce là l'intention du législateur? Il faudrait peut-être préciser où se situe le premier niveau de responsabilité dans cette ensemble très complexe de régimes d'aide.

    Je voulais aussi revenir à ces problèmes de financement dont j'ai parlé et aux pressions qui s'exercent sur le personnel en raison précisément des changements qui ont été apportés récemment au financement du régime. Je ne sais pas si vous allez discuter de ces questions. Il y a certainement parmi les participants des gens, comme David Walker, qui pourraient vous en parler de façon très éloquente et en toute connaissance de cause.

    Des changements importants ont été apportés récemment au financement du Régime de pensions du Canada qui pourraient en fait influer sur les décisions relatives à l'avenir du régime. À partir de sa création jusqu'en 1997, le régime a été financé selon la formule du financement par répartition. Les cotisations étaient fixées en fonction d'une certaine fourchette de gains. Le régime était doté d'une réserve pour éventualités équivalant à deux années de prestations.

    Pour assurer au régime un financement plus sûr et pour mieux le capitaliser, parce qu'il est financé principalement par les cotisations des employeurs et des employés, on a opté pour ce qu'on appelle un financement partiel. Ainsi, l'accroissement des taux de cotisation a été considérablement accéléré, sur une période plus courte, afin d'en arriver à une réserve équivalant à cinq années de prestations. Cette réserve de placement peut être utilisée pour générer des fonds, des intérêts et d'autres types de dividendes qui peuvent ensuite être réinvesti dans le régime.

    Certains diront que le financement du régime est bien plus sûr qu'il ne l'était auparavant, ce qui est un avantage considérable. Tout dépend bien sûr de l'évolution du marché—et, comme vous le savez, on ne sait jamais dans quel sens le marché va évoluer.

    L'autre avantage, c'est que le fardeau du financement repose davantage sur l'actuelle génération de travailleurs. Ce sont là autant de questions qui se posent au sujet de la répartition entre les générations du fardeau de la pension d'invalidité prévue aux termes du Régime de pensions du Canada. Il y a toutefois un élément qu'il est important de souligner, à savoir qu'on s'est entendu pour plafonner les cotisations d'ici à 2003. Les taux de cotisation seraient plafonnés à 9,9 p. 100 et ne pourraient pas augmenter au-delà de ce niveau.

    Si donc on décide de s'en tenir à ce niveau et de limiter ainsi notre marge de manoeuvre financière, nous nous trouvons en fait à fixer les paramètres budgétaires du régime, à moins que la réserve de placement ne génère beaucoup de revenus. Voilà ce qui m'inquiète de cette idée de procéder à un examen budgétaire du régime. Je trouve qu'il faut absolument tenir compte, non pas seulement des pressions budgétaires, mais aussi des préoccupations humaines, dont l'importance est tout aussi grande.

    Il y a beaucoup de questions auxquelles il faut trouver des réponses. Quelles sont les possibilités de réforme qui s'offrent à nous? Je veux vous en parler très brièvement parce que ces possibilités ont déjà été décrites dans une multitude de rapports. Je vais vous parler des grandes orientations de réforme, après quoi nous pourrons peut-être discuter des détails.

À  +-(1035)  

    Les grands courants de réforme sont en fait des réformes administratives immédiates qui peuvent être mises en place à court terme; certaines réformes à moyen terme pourront être réalisées sans grande difficulté; enfin, il y a des réformes globales qui nécessiteraient la reconfiguration de A à Z de nombreux programmes de sécurité du revenu.

    En ce qui concerne les réformes immédiates, toutes les personnes ici présentes pourraient en proposer plusieurs. Je sais que l'idée d'enregistrer les délibérations en appel, par exemple, a été proposée par un groupe avec lequel Harry Beatty travaille, et ce serait certainement fort utile. Le fait d'avoir accès aisément aux informations, d'assurer l'uniformité des décisions et de former les membres des commissions d'appel à l'écoute active sont des réformes administratives importantes qui peuvent être réalisées sans délai.

    On peut aussi mettre en oeuvre l'intégration d'autres programmes, même si, comme le disait Harry Beatty, cela nous obligera à fusionner certains secteurs relatifs à la formation professionnelle, et on peut aussi mieux uniformiser la formation professionnelle et s'assurer que les interventions relatives à la formation professionnelle commencent plus tôt dans le processus. Le RPC fait justement cela dans plusieurs cas, de concert avec un certain nombre de provinces, et il est entré en pourparlers avec certaines commissions d'indemnisation des accidentés du travail du pays. On a peut-être une plus grande marge de manoeuvre en ce qui concerne l'assurance-emploi. Les deux programmes sont administrés par le même ministère.

    Pour ce qui est des problèmes à moyen terme, il faut commencer à clarifier les critères d'admissibilité, comme on l'a dit, et régler la question des prestations partielles. On pourrait aboutir au bout du compte à une sorte de proposition à long terme si cela empiète sur l'aspect retraite de ces prestations. Pour ce qui est du genre de soutien lié au travail, c'est quelque chose qu'on peut faire immédiatement. Il y a beaucoup de travail en chemin de ce côté. Certaines de ces réformes nécessiteront une coordination.

    Parlons enfin de la réforme globale. On ne manque pas de rapports, de travaux et d'études sur la question de la réforme globale. Il y a plus de 20 ans qu'on se propose de réformer l'aspect invalidité du Régime de pensions du Canada: on a proposé de le retrancher du RPC, de mettre en place une nouvelle forme de prestations visant à remplacer les gains, d'avoir une assurance accidents globale pour tout le pays, d'avoir une assurance publique globale pour tout le pays qui inclurait tout, d'avoir une assurance privée globale pour tout le pays et de créer aussi un revenu garanti. Comme bon nombre d'entre vous le savent, le revenu garanti a des formes très diverses. Même si l'on parle d'un revenu garanti, il y a plusieurs manières d'instaurer une telle mesure.

    Tout cela revient à dire que nous pouvons bâtir à partir d'une bonne somme de travail. Bien sûr, il faudra faire des études coût-utilité. Mais je crois que le plus important, dans toute réforme, dans toute réforme globale, c'est de s'assurer que les mesures de protection sociale que nous avons en place aujourd'hui soient intégrées dans toute nouvelle réforme et que l'on évite de perdre les aspects essentiels qui sont si importants dans le Régime de pensions du Canada.

    Mes meilleurs voeux de succès vous accompagnent dans vos délibérations. En notre nom à tous, merci beaucoup de nous avoir invités à cette discussion.

À  +-(1040)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup, Sherri.

    Quelqu'un veut-il commenter l'exposé de Sherri, nous parler des grands moments historiques du régime ou de l'intention de la législation?

    David, voulez-vous bien nous dire ce qui s'est passé en 1995?

+-

    M. David Walker: Je dirais tout d'abord que l'exposé de Sherri était magistral, et que le texte qu'elle citait, qui a été publié par son institut, l'Institut Caledon, vaut vraiment la peine d'être lu si vous pouvez le trouver. La rétrospective qu'elle donne au début est à mon avis le meilleur résumé de 12 pages qui existe au Canada sur l'histoire du Régime de pensions du Canada.

    Ce qui est important pour notre groupe, ce sont les effets des changements qui ont été apportés au volet invalidité du Régime de pensions en 1996. J'ai dit ailleurs que le volet invalidité du Régime de pensions du Canada n'était pas bien connu ou ne faisait pas l'objet de grandes discussions, surtout au niveau politique, avant que nous n'entrions dans ce processus de révision.

    Maintenant que la loi impose une révision aux trois ans, il appartient aux personnes comme les défenseurs du RPC que vous retrouvez autour de cette table, madame la présidente, de s'assurer que leurs vues seront connues et que les vues du comité seront connues aussi avant l'automne prochain, lorsqu'une révision nationale aura lieu. Ce sera à l'initiative, j'imagine, du ministère des Finances au sein du gouvernement du Canada parce c'est à partir de là que le programme est géré. C'est une responsabilité qu'il partage avec DRHC.

    La chose à faire, c'est de prendre certaines idées que Sherri nous a proposées, particulièrement en ce qui concerne l'admissibilité, et certains des nouveaux critères médicaux qui ont été mis en place en 1995-1996, et s'assurer que l'on comprend au niveau politique les effets que ces mesures ont.

    Quand on façonne un train de mesures—et je songe ici au train de mesures de 1996 qui est devenu la loi de 1998—, il y a des moments où l'on sait parfaitement ce que l'on fait et d'autres où l'on n'est pas sûr des effets qu'elles auront. Les résultats peuvent être positifs ou négatifs deux ou trois ans plus tard, mais chose certaine, il faut entendre les voix des groupes qui sont représentés ici pour savoir quels ont été les effets.

    Cette question m'intéresse tout particulièrement parce qu'il y a des choses qui n'avaient pas été du tout discutées en 1996, la question des nouvelles maladies, des maladies épisodiques, et de la souplesse accrue qu'il faut intégrer dans le programme d'invalidité pour tenir compte de tous ces changements.

    Sans vouloir être injuste, je dirais qu'il n'y a eu à peu près aucun dialogue national sur cette question à l'extérieur de ces groupes. Plus ces questions sont portées à la connaissance du public et comprises...

    Donc pour en revenir à ce que disait Sherri, je vous rappelle que certaines de ces mesures sont axées sur le long terme. On ne comprend pas toujours les maladies au début, mais il y a des experts ici qui peuvent nous aider à préparer vos audiences.

    Comme vous le savez, le RPC a été soumis à une révision aux cinq ans en 1980, et on est maintenant passé à une révision aux trois ans. Il en est ainsi parce que nous ne voulions pas retomber dans la crise que nous avons vécue en 1996, soit au niveau du financement ou du programme comme tel. Si les gens peuvent saisir cette occasion pour commencer à travailler tôt, leurs idées pourront être intégrées dans le système, et on s'assurera ainsi que le volet invalidité est mieux adapté.

    Je crois que Sherri a dit plus d'une fois que cette question concerne également le secteur privé, secteur que j'ai appris à connaître au cours des cinq dernières années. Il faut penser qu'il y a dans ce secteur aussi des personnes qui essaient de trouver le meilleur moyen de servir leur clientèle et d'intégrer ces programmes au niveau fédéral-provincial.

    Voilà ma réaction aux propos de Sherri.

À  +-(1045)  

+-

    La présidente: Mais cette crise que vous venez de mentionner, était-ce une crise causée par l'escalade des coûts?

+-

    M. David Walker: Elle a découlé des observations répétées du vérificateur—de l'actuaire en chef, pour être exact—, qui ne cessait d'émettre des avertissements à l'effet que le programme n'était pas viable. Il a dit que si l'on maintenait la même formule de financement, c'est-à-dire de payer au fur et à mesure, que le taux atteindrait les 14 p. 100 au début du siècle. C'était une crise.

    Puis, comme Sherri l'a fait valoir dans son mémoire et comme d'autres ici le savent, en raison des nouveaux critères mis en oeuvre par les parlementaires, y compris moi à l'époque, les coûts se sont avérés plus importants que prévu, et il y a eu un croisement.

    Je dois utiliser avec prudence le mot «crise» lorsqu'il est question d'invalidité. Il y avait un croisement au moment où nous menions l'examen public, et l'information se fonde sur la tendance à la hausse des dépenses, qui ont grimpé jusqu'à 17 p. 100. En fait, bon nombre de changements déjà mis en oeuvre par DRHC ne sont pas encore enregistrés parce qu'ils sont trop récents.

    La crise découle des pressions qui se sont exercées sur le programme, mais la philosophie de base qui sous-tend les régimes publics de pensions dans le monde occidental commençait à s'éloigner de la formule du financement au fur et à mesure pour se diriger vers un système comportant un coussin, pour en prévenir l'effondrement. Il faut étudier l'histoire un peu pour comprendre que des régimes publics de pensions se sont déjà effondrés. Ils ne constituent pas une garantie.

    Avec ce type de programmes on a l'impression qu'ils ont toujours existé, mais il ne faut pas oublier qu'il y a eu une lutte acharnée pour l'obtenir en 1966. Auparavant, d'autres régimes avaient connu l'échec dans le monde occidental industrialisé, aussi faut-il être circonspect lorsqu'on affirme qu'il y a crise. Ce n'est pas nécessairement une crise fabriquée de toute pièce, mais il faut être prévoyant pour garantir qu'il y aura suffisamment d'argent mis de côté pour assurer tous les versements.

+-

    La présidente: Et à ce moment-là, il faut prévoir plus de souplesse, de façon que les gens puissent réintégrer le marché du travail, et faire des économies de cette façon—cela a-t-il été envisagé?

+-

    M. David Walker: Non. Peu d'attention a été accordée à la souplesse du programme. On s'est davantage attardé sur la stabilisation du financement. C'était une préoccupation beaucoup plus pressante. Comme je l'ai dit, parce que j'ai dirigé les consultations publiques—permettez-moi de me défiler—, nous n'avons pas eu assez de temps pour nous livrer aux réflexions novatrices voulues. C'est pourquoi nous insistons fermement pour obtenir cette révision aux trois ans. On peut voir s'accumuler des problèmes qui nécessitaient une solution, et en voici un, mais aucun véritable travail de défense n'a été fait lors de l'examen de 1996, rien qui aurait pu nous pousser à intégrer au programme cette souplesse que presque tout le monde dans la salle a mentionnée dans les remarques liminaires.

+-

    La présidente: Merci.

    Bob Baldwin, puis Harry Beatty.

    Et voici Anita Neville de Winnipeg.

+-

    M. Harry Beatty: Ma députée, je dois le préciser.

+-

    M. Bob Baldwin: J'aimerais parler surtout de la question du nombre de dossiers au milieu des années 90, parce que vous aviez demandé si quelqu'un voulait en parler plus en détail.

    Au cours des deux derniers jours, j'ai surtout voulu aller au-delà du nombre total de personnes touchant les prestations d'invalidité du RPC pour examiner plutôt la vitesse de traitement des dossiers dans le programme. Ce faisant, j'ai été surpris par ce que j'ai constaté, et j'espère que vous serez d'accord que cela mérite d'être partagé.

    Si l'on regarde le nombre de demandes reçues entre l'exercice de 1989-1990 et celui de 1993-1994, ainsi que le nombre de demandes acceptées du premier coup, on constate d'abord une énorme augmentation du nombre de demandes reçues au cours de cette période. En fait, la proportion de demandes accueillies favorablement est restée très stable. Autrement dit, l'augmentation considérable du nombre de nouveaux prestataires a découlé non pas de l'exercice du pouvoir discrétionnaire par rapport aux demandes soumises, mais plutôt de la flambée du nombre de demandes. Qu'est-ce qui a provoqué cette augmentation? Dans le secteur public, on se perd en conjectures. En partie, il semble que cela résulte du fait que les provinces insistent désormais beaucoup plus pour que les prestataires d'aide sociale ayant une déficience fassent une demande auprès du RPC invalidité. Il en va de même pour les régimes d'assurance privés.

    Il est intéressant de noter qu'à partir du milieu des années 90, on enregistre un fléchissement considérable du nombre de demandes reçues—de sorte que, par exemple, en 1993-1994, on a reçu 109 000 demandes contre 59 000 demandes en 1999-2000, soit une réduction de près de la moitié. Pendant cette période, on a également enregistré un recul constant de la proportion de demandes menant directement au versement de prestations. Ainsi, ces deux facteurs entrent en compte pour expliquer la diminution du nombre de nouvelles prestations après le milieu des années 90.

    En fait, je dois dire que ces données font partie d'une réponse à une question écrite d'un député, mais elles sont corroborées par les chiffres du livre de données des programmes de la sécurité du revenu, où l'on retrouve le nombre des nouveaux prestataires sur une base annuelle.

    Autre élément intéressant, il semble y avoir une proportion plus importante de demandes qui mènent à des appels de deuxième et de troisième instance. On voit ce nombre augmenter après le milieu des années 90 également. Il semble, par ailleurs, qu'une proportion plus élevée de ces appels résultent désormais d'une initiative du ministre. Tout cela pour dire que, du point de vue administratif—les règlements en place—, il y a des points intéressants qui méritent votre étude.

    Permettez-moi d'ajouter autre chose pendant que j'en ai l'occasion. Je voulais parler de la distribution par âge et par sexe des prestataires, en comparant la période qui s'étend de la fin des années 80 au milieu des années 90, d'une part, à la fin des années 90 d'autre part. Il y a une constatation fort prévisible: les femmes constituent une proportion beaucoup plus importante des prestataires. Naturellement, cela traduit l'évolution du niveau de participation des femmes dans la population active.

    Il est intéressant de noter aussi, en marge, cependant, que l'augmentation du nombre de prestataires de pension d'invalidité enregistrés de la fin des années 80 au milieu des années 90 concerne davantage les groupes plus jeunes que les plus âgés. Ce sont les personnes plus âgés qui représentent le plus grand nombre de prestataires, mais si l'on regarde le changement proportionnel enregistré de la fin des années 80 au milieu des années 90, les plus jeunes sont majoritaires.

    Encore une fois, à cet égard, je dois dire que, lorsque le Conseil consultatif du RPC a recommandé la formule des deux années de cotisation au cours des trois dernières années, la justification du Conseil devait être, en partie, que cette mesure rapprochait le régime des programmes privés d'assurance-invalidité de longue durée, lesquels n'exigent pas normalement de longues périodes d'emploi. La recommandation se fondait également sur l'inquiétude que les jeunes familles pouvaient subir tout autant que les familles plus vieilles les effets économiques négatifs de l'invalidité. Il a donc été intéressant de voir ce train de mesures.

À  +-(1050)  

    David Walker sait que nous partageons souvent le même point de vue, mais pas nécessairement en ce qui concerne la situation financière du RPC qui prévalait au milieu des années 90. Je n'entrerai pas dans les détails, mais il est certain qu'un taux de cotisation inférieur à 10 p. 100 constitue une contrainte considérable pour l'avenir du Régime de pensions du Canada. Pour ma part, j'estime que c'est un taux trop bas qui entraîne des restrictions pour tous les volets du programme.

+-

    La présidente: Je cède maintenant la parole à Harry Beatty qui sera suivi de Paul Crête.

    Étant un peu le porte-étendard de la reddition de comptes à diverses tables rondes du Conseil du Trésor et sur d'autres tribunes, lorsqu'on me demande de parler du RPC, je suis toujours préoccupée, lorsque je lis les rapports, de constater qu'il est évalué en fonction du nombre de problèmes plutôt que de la sécurité que les gens estiment avoir ou ne pas avoir sur le plan de leurs revenus.

    Je ne suis qu'une omnipraticienne bien ordinaire, mais lorsque je parlais à mes patients, ils me disaient que, ce qu'ils voulaient, c'était savoir que leur revenu était en sécurité et qu'on ne les pourchasserait pas pour savoir s'ils portaient leurs sacs d'épiceries alors que ça n'avait rien à voir avec la dépression ou la fibromyalgie.

    Lorsqu'on me dit que le nombre de cas a baissé et qu'un nombre donné de personnes ne reçoivent plus de prestations du RPC, à moins qu'on me dise que ces personnes travaillent dorénavant ou sont prestataires de l'aide sociale, comme parlementaire, je ne peux déterminer si c'est une bonne chose ou non.

    Les témoins d'aujourd'hui devraient pouvoir m'aider à assurer le suivi de ces bonnes statistiques sur le nombre de gens qui ne reçoivent plus de prestations d'invalidité du RPC. Ne nous faudrait-il pas savoir ce que ces personnes sont devenues avant de dire si ce résultat est positif ou non? J'ignore si Bob a des données ou des informations à ce sujet.

À  +-(1055)  

+-

    M. Bob Baldwin: Malheureusement, non, je n'en ai pas, mais je tenterai d'en trouver. Je sais toutefois qu'une bonne part des personnes qui ne reçoivent plus ces prestations sont décédées ou ont pris leur retraite.

+-

    Mme Sherri Torjman: Une petite précision: les prestations d'invalidité sont versées jusqu'à l'âge de 65 ans, âge auquel les prestataires ont alors droit à des prestations de retraite. Vous avez donc tout à fait raison. Mais, à mon sens, la baisse du nombre de prestataires n'est pas tant attribuable au fait que certains cessent de recevoir des prestations qu'au fait qu'il y a moins de gens qui demandent ces prestations. Si tel est le cas, votre question est très pertinente. Et que fait-on pour suivre les personnes dont la demande a été rejetée et pour déterminer ce qu'elles deviennent? Je ne crois pas que l'on sache ce qu'il advient de ces personnes, honnêtement.

+-

    La présidente: Je crois que ce qui m'a fait réagir, c'est une phrase dans le rapport au sujet du retrait des prestataires. J'ignore si on parlait de l'âge magique de 65 ans ou si c'était des prestataires dont on avait réévalué le cas. Il y en a eu, et le vérificateur général et d'autres avaient demandé cette réévaluation.

    Mais que sont devenues ces personnes? Souffraient-elles de fatigue chronique ou de fibromyalgie? S'agissait-il des cas les plus difficiles à évaluer? C'est mon impression.

    Harry, à vous la parole.

+-

    M. Harry Beatty: Bob a souligné plusieurs choses. Je vous encourage tous à jeter un coup d'oeil sur les statistiques concernant le programme de sécurité du revenu qu'on trouve sur l'Internet, car certaines comparaisons permettent de brosser un tableau clair de la situation. Ainsi, un de ces tableaux montre qu'en moyenne, les nouvelles prestations mensuelles à l'échelle du pays—à l'exclusion du Québec, bien sûr—en 1980 étaient de 2 147 $, alors qu'en l'an 2000, elles étaient de 2 144 $. Essentiellement, ces prestations sont les mêmes depuis 20 ans alors qu'il y a 2,5 millions de moins de cotisants, que la population est plus jeune et que bon nombre de déficiences n'étaient pas reconnues en 1980.

    Quant à la somme totale consacrée à ce programme, on constate qu'elle totalise 2,5 milliards de dollars pour les cinq ou six dernières années, ce qui prouve qu'on n'a pas tenu compte de l'augmentation des salaires, de l'inflation, de la croissance de la population, du nombre accru de cotisants, et ainsi de suite. À mon avis, il ne fait aucun doute que les mesures administratives et législatives qui ont été prises ces dernières années en réponse à la crise de financement ont touché de façon disproportionnée les prestations d'invalidité par opposition aux autres éléments du régime.

    Examinons maintenant les changements qui ont été apportés à la règle de cotisation, laquelle est passée de cinq sur dix—ou deux sur trois—à quatre sur six. On voit que la règle de cinq sur dix s'appliquait à beaucoup de gens qui avaient versé des cotisations pendant 20 ou 25 ans, dans certains cas, depuis la création du régime. Mais quand ces personnes deviennent handicapées, si d'autres facteurs les ont forcées à ne pas travailler pendant deux ou trois ans, elles n'ont pas droit aux prestations.

    Ces autres facteurs peuvent inclure l'incapacité à trouver un emploi; par conséquent, ce sont les groupes au sein de notre société qui sont toujours désavantagés pour quelque raison que ce soit qui sont les plus touchés. Ça touche aussi les femmes qui ne sont pas considérées comme faisant partie de la population active parce qu'elles prennent soin d'enfants qui ont plus de sept ans ou d'un adulte handicapé, ce qui est très courant dans notre société.

    Je crois que beaucoup de gens—je n'ai toutefois pas de statistique à vous donner—qui ont travaillé et cotisé pendant 25 ans n'ont plus droit aux prestations depuis qu'on a modifié la règle des cinq sur dix. La règle des quatre sur six est beaucoup plus restrictive pour ceux dont la déficience est apparue graduellement et ceux qui ne font pas partie de la population active pour d'autres motifs—économiques, sociaux ou autres. Dans les faits, le nombre de nouveaux cas est de beaucoup inférieur à la moitié de ce qu'il était il y a cinq ou six ans, juste avant que l'on commence à apporter des changements administratifs et autres.

    Comme Sherri l'a fait remarquer, il y a un pic vers 1994 et 1995, parce que le projet de loi C-57 permettait les demandes tardives, à mon avis. Cela a donné une deuxième chance à beaucoup de gens et c'est ce qui explique ce pic mais qui fausse un peu les données sur le nombre de gens ayant une déficience selon les critères.

    C'est essentiellement ainsi que Bob a aussi interprété les statistiques.

Á  +-(1100)  

+-

    La présidente: Ce sont là, Harry, des cas que nous voyons dans nos bureaux, nous, les députés, des personnes qui ont travaillé pendant 25 ans pour ensuite perdre leur emploi, mais qui ne sont devenues malades que plus récemment. Il y a aussi des cas où on a eu du mal à diagnostiquer la fibromyalgie, la fatigue chronique ou même la sclérose en plaques.

    Mais quelque chose s'est produit, et même si cette personne a travaillé pendant 25 ans, elle est considérée comme ayant été en chômage depuis deux ans et n'a pas droit aux prestations. Ce sont les cas qui sont les plus difficiles pour nous, les députés, à comprendre. Si une personne a versé des cotisations pendant 25 ans, pourquoi lui imposer une telle restriction?

    Monsieur Crête, vous avez la parole.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Merci, madame la présidente.

    Je voudrais que Mme Torjman illustre la situation dont elle a parlé. Elle dit qu'il faudra faire très attention à la façon dont interagissent les programmes. Je crois avoir compris que si on améliore la situation concernant le Régime de pensions du Canada, mais que l'on n'ajuste pas les mesures en conséquence, qu'il s'agisse du crédit d'impôt ou d'autres formes d'aide, on pourrait, malgré de bonnes intentions, se retrouver avec des gens dont la situation serait pire après qu'avant. J'aimerais que vous ou d'autres intervenants ici présents me donniez quelques exemples de cette situation pour qu'on puisse bien la comprendre.

[Traduction]

+-

    Mme Sherri Torjman: Je vous donne un exemple. Si on s'attend véritablement à ce que certaines de ces personnes aillent travailler ou retournent au travail, il faudrait apporter les changements connexes, par exemple, à certains crédits pour personnes handicapées, ne serait-ce que pour permettre que des coûts plus importants soient déduits, en raison des coûts élevés associés au retour au travail. On devrait aussi prévoir d'autres formes de soutien. C'est là un domaine où toutes les mesures sont interreliées. Il faudrait donc envisager un système d'employabilité.

    Mais d'autres questions sont liées à cette interrelation. Si une prestation est versée dans le cadre d'un programme, sera-t-elle récupérée dans le cadre d'un autre programme? Cela s'est produit dans plusieurs cas. Ainsi, quelqu'un a fait allusion au secteur de l'assurance privée. Lorsque quelqu'un a droit à une prestation d'invalidité et aussi à une couverture additionnelle parce qu'il a une assurance privée, la valeur de la prestation d'invalidité est récupérée auprès du régime d'assurance privée. C'est un problème qui devrait nous amener à bien examiner tous ces programmes et leurs interactions.

    On devrait peut-être aussi envisager des évaluations conjointes qui serviraient à plus d'un régime. Quelqu'un a mentionné qu'il ne serait alors pas nécessaire de remplir deux ou trois formulaires et de faire faire différentes évaluations des possibilités professionnelles se fondant sur des définitions différentes. Il serait tout à fait possible d'intégrer certaines des procédures qui sont les mêmes dans les différents programmes.

    La question des liens entre les différents régimes que vous avez posée comporte en fait plusieurs dimensions. Elles doivent être examinées à différents niveaux selon qu'il s'agit de prestations, de participants communs ou de réadaptation avant que soient déterminées les mesures de soutien connexes qui devraient accompagner tout changement au Régime de pensions du Canada.

Á  +-(1105)  

+-

    La présidente: Malheureusement, le secteur de l'assurance n'a pas envoyé de représentant aujourd'hui.

    Nous voulions justement les interroger sur les évaluations. Certains prétendent que les sociétés d'assurance ont dans les faits refilé le coût des évaluations au RPC et ensuite utilisé ces évaluations médicales pour leurs propres fins. Cela me semble injuste. Ce serait chic de leur part si elles assumaient une partie de ces coûts.

    C'est maintenant au tour de Cam Crawford suivi du Dr Muzumdar, qui, heureusement, est venu représenter la profession médicale. Malheureusement, ni l'AMC ni le Collègue des médecins de famille du Canada ne sont venus. Je vous remercie donc, docteur, de vous faire le porte-parole des médecins.

    Cam, à vous la parole.

+-

    M. Cam Crawford: Je fais beaucoup de recherches sur la situation des personnes handicapées et je suis souvent frustré de ne pouvoir répondre à la question de savoir ce qu'il advient des personnes qui cessent de recevoir des prestations d'invalidité? Malheureusement, les données sur le nombre ne sont pas très révélatrices, car je ne crois pas que l'on suive ces cas-là. Si l'on suit ces personnes, les informations à leur sujet ne sont pas publiques, pour autant que je sache.

    Les grands ensembles de données qu'on peut obtenir par l'entremise de Statistique Canada, telles que l'enquête nationale sur la santé de la population et l'enquête sur le dynamique du travail et du revenu proviennent d'enquêtes longitudinales nous permettant de suivre des groupes de gens sur une période donnée. On y demande notamment si le répondant reçoit un revenu du Régime de pensions du Canada, mais pas précisément s'il s'agit d'un prestation de retraite du RPC par opposition à une prestation d'invalidité. Cela nous permet d'apprendre que des personnes handicapées ont un revenu provenant du RPC mais cela ne vous indique pas de quel programme précisément proviennent ces prestations. Ce n'est donc pas très utile pour les analyses. C'est toutefois un problème qu'on pourrait régler en demandant tout simplement à Statistique Canada d'être un peu plus précis dans ses questions pour que l'on sache de quel programme ces prestations proviennent.

+-

    La présidente: Merci.

    À vous la parole, docteur.

+-

    Dr Ashok Muzumdar: Je voudrais faire deux ou trois observations.

    Sherri a indiqué que depuis la création du régime dans les années 70, je crois, il y a eu des pics et des creux et je peux comprendre qu'au début, à la naissance du régime, l'effet d'inertie s'est fait sentir. Il a fallu un certain temps avant que le programme ne prenne son élan. C'est un peu comme démarrer une voiture: Elle ne démarrera pas à 100 kilomètres à l'heure—à moins qu'elle ne soit conduite par votre fils de seize ans. Il lui faut un peu de temps pour accélérer.

    J'ai aussi été frappé par le fait qu'au début des années 90—je crois que Sherri a dit de 1990 à 1995—il y a eu augmentation. Je me disais, madame la présidente, que c'est lié à la santé économique du pays. Pendant la deuxième moitié du XIXsiècle, vers 1870, un économiste britannique dont j'ai malheureusement oublié le nom a écrit un essai où il affirmait que la santé physique des habitants d'un pays était directement liée à la santé économique. On s'est moqué de lui à l'époque, mais sa théorie s'est confirmée car c'est le cas aujourd'hui.

    Au début des années 70, il y a eu ralentissement économique, même récession. Est-ce un facteur qui a eu une incidence sur le régime? Harry a mentionné qu'on avait permis les demandes tardives par suite de l'adoption de la nouvelle loi. C'est bien sûr un facteur important, mais je me demande ce qu'on constatera, dans quelques années, quand on examinera la situation qui a prévalu après le 11 septembre. Constatera-t-on une augmentation du nombre de demandes au RPC? C'est une question que je me pose.

    J'ai remarqué une autre chose comme médecin pratiquant: Le public semble croire que beaucoup de gens présentent des demandes de prestations sans véritablement croire qu'ils y ont droit. C'est un peu comme acheter un billet de loterie. Si vous n'en achetez pas, vous ne gagnerez jamais, comme on dit souvent. Alors, les gens tentent leur chance, mais d'après mon expérience personnelle, ces gens sont peu nombreux et ne constituent qu'une minorité.

    En général, les gens présentent une demande pour des raisons tout à fait légitimes et certains voient leurs demandes rejetées, à tort. Mais d'après mon expérience de médecin, ces demandes rejetées à tort sont peu nombreuses. Moi, je fais une évaluation objective et je laisse aux administrations du Régime de pensions du Canada le soin de prendre la décision. On semble croire que bien des gens tentent leur chance et présentent une demande sachant qu'ils n'ont pas droit à ces prestations, mais ils sont très peu nombreux, d'après mon expérience. La majorité des demandeurs ont droit aux prestations et devraient les recevoir.

    Je voulais simplement faire cette observation. Merci.

Á  +-(1110)  

+-

    La présidente: Croyez-vous que ce petit pourcentage de demandeurs qui n'ont pas droit aux prestations compte un nombre disproportionné de gens qui présentent une demande sous la pression d'un proche, même si vous et moi savons qu'ils n'ont pas droit à ces prestations? Souvent, à mon sens, les gens savent qu'ils n'ont pas droit à ces prestations, mais ils présentent une demande quand même parce que, s'ils ne le font pas, on les exclura d'un autre régime.

+-

    Dr Ashok Muzumdar: En effet, je me souviens d'au moins un patient qui m'a dit lui-même que quelqu'un d'autre lui avait dit de tenter sa chance, qu'il n'avait rien à perdre et qu'il aurait peut-être la surprise de recevoir des prestations du Régime de pensions du Canada. En effet, c'est vrai. Ces personnes se fient à leurs voisins ou leurs parents

+-

    La présidente: Ou elles subissent les pressions de leur assureur; c'est plutôt à cette situation que je pensais.

+-

    Dr Ashok Muzumdar: Oui, bien sûr, il se peut que la société d'assurance ait exercé des pressions.

+-

    La présidente: Ou peut-être est-ce le régime d'aide sociale qui exige, avant de verser des prestations, qu'on fasse une demande au Régime de pensions du Canada, ce qui est assez agaçant.

+-

    Dr Ashok Muzumdar: À mon avis, c'est dans l'ordre des choses. C'est inévitable, dans notre société. En général, les membres de notre société sont des gens francs et honnêtes. Dans leur esprit, le travail apporte plus de dignité, car lorsqu'on travaille, on a la satisfaction d'être productif et d'apporter sa contribution à la société.

    Bien sûr, les statistiques nous montrent que lorsqu'on travaille, on gagne davantage d'argent que lorsqu'on ne travaille pas, même lorsqu'on est prestataire de l'aide sociale. Le revenu de travail est toujours supérieur, même s'il s'accompagne d'impôts importants. La plupart des gens ne sont pas malhonnêtes. La plupart, au contraire, sont honnêtes mais il leur arrive parfois de subir l'influence des autres, et en effet, il s'agit parfois des sociétés d'assurance, qui leur suggèrent de présenter une demande au RPC.

+-

    La présidente: Je dis toujours, et certains de mes collègues m'ont déjà entendu le dire, que j'aimerais avoir une estampe dans mon bureau qui dirait «très motivé, préférerais travailler». C'est dans cette optique que nous participons à ces conversations.

    Nous souhaitons la bienvenue à Monte Solberg, dont nous avons été ravis d'apprendre qu'il est le nouveau porte-parole de l'Alliance canadienne en matière de développement des ressources humaines. Soyez le bienvenu, Monte.

+-

    M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Merci.

    Je présume que vous m'aviez présenté pour une raison particulière.

    La présidente: Non.

    M. Monte Solberg: Bon, d'accord. Je suis bien heureux de pouvoir vous écouter pour l'instant.

+-

    La présidente: Je vous ai présenté seulement pour savoir si vous voulez figurer sur la liste des intervenants.

    Figurent déjà sur ma liste Francine, Sue, Wolfgang, George, Deanna et Vincent, suivis de Monte, s'il le souhaite.

+-

    Mme Francine Knoops: Eu égard au nombre de cas, ce qui s'est passé en 1995 est la question de savoir si des facteurs de nature administrative contribuent à la tendance à la baisse, votre étude pourrait donner aux Canadiens des informations objectives sur les changements dans le nombre de cas, les tendances dans les maladies et déterminer si ce nombre disproportionné des nouveaux cas proviennent de ces nouvelles catégories de maladies en vous basant sur les données épidémiologiques émergentes, comme celles du rapport de l'an dernier de l'Organisation mondiale de la santé qui indiquent clairement que les maladies psychiatriques représenteront sous peu quatre des dix principales maladies.

    Nous devons donc établir des liens entre nos programmes de soutien du revenu et les prévisions sur la prévalence des maladies et des déficiences pour les années à venir. C'est tout ce que je voulais souligner.

Á  +-(1115)  

+-

    La présidente: Merci.

    Sue Lott, vous avez la parole.

+-

    Mme Sue Lott: Merci de me donner l'occasion d'intervenir. Je sais que nous passons un peu d'un sujet à l'autre, mais j'aimerais revenir à l'intégration des prestations et au lien entre les divers programmes de revenu pour les personnes handicapées et les assurances privées.

    Il importe de comprendre qu'il y a des obstacles. Le premier, c'est la Loi sur le RPC même. La Loi sur le RPC permet l'intégration des prestations. Elle prévoit précisément le cas d'une personne qui a droit aux prestations d'invalidité du RPC et à des prestations d'un régime d'assurance privée. Si la société d'assurance a signé un accord d'intégration des prestations avec le gouvernement fédéral, elle peut servir de premier payeur des prestations du RPC pour ensuite recevoir une espèce de paiement forfaitaire rétroactif.

    Le deuxième obstacle est celui de la Loi uniforme à laquelle toutes les sociétés d'assurance des différentes provinces sont assujetties. C'est un contrat uniforme qui, comme je viens de le dire, est essentiellement le même dans toutes les provinces, ce qui permet la coordination ou l'intégration des prestations.

    Ce sont là deux obstacles importants que je voulais souligner.

+-

    La présidente: Wolfgang.

+-

    M. Wolfgang Zimmerman: Je vous remercie, madame la présidente.

    Je crois qu'il faut que le gouvernement détermine également l'orientation qu'il veut donner à ce programme à l'avenir.

    J'ai eu la chance au cours des 60 dernières années, en collaboration avec trois collègues, d'être responsable de la Commission des accidents du travail en Colombie-Britannique. Nous avons dû faire certains choix.

    À mon avis, il y a deux éléments importants. L'un consiste essentiellement à administrer un régime d'assurance qui tient compte de tous les éléments qui sont indispensables pour en assurer la viabilité et des questions entourant l'évaluation actuarielle, l'accès au programme et la stabilité financière à long terme.

    Je crois que l'autre question qu'il faut soulever, c'est dans quelle mesure le gouvernement veut que le RPC soit un agent social de changement. À quel niveau voulons-nous intervenir et comment voulons-nous intervenir? Je crois que c'est l'autre aspect de l'équation.

    Nous avons certainement essayé de répondre à la question de toute évidence en procédant à des consultations importantes auprès du public. Je suppose que cela m'amène à la deuxième partie de ma question à Sherri et peut-être à Cam.

    Dans quelle mesure avons-nous réussi à évaluer de façon concrète les répercussions du programme, pour ce qui est d'essayer d'empêcher les particuliers ou de réduire le nombre de personnes qui font appel au système, pour ce qui est d'examiner les profils de clients, les profils professionnels, etc.? Avons-nous des profils et des évaluations détaillés de ceux qui ont demandé à avoir accès au système et dont les demandes ont été rejetées? Que leur arrive-t-il?

    Autrement dit, l'examen de certains critères très importants fondés sur des résultats nous permettrait de devenir un véritable agent de changement.

    Comment d'importants changements structurels dans les secteurs de compétences d'une province influent-ils sur le système? Comment les types de changements qui se produisent à l'heure actuelle en Colombie-Britannique influeront-ils sur le système? Vous avez d'importants organismes qui contribuent au soutien de l'invalidité qui essaient de retirer de 500 à 800 millions de dollars du système par le biais de changements à la réglementation. Où se manifeste une redéfinition importante?

    Je n'ai pas la réponse. J'ignore si Sherri, Cam ou quelqu'un d'autre peut y répondre.

    Je considère que c'est le genre de recherche que doivent faire toute organisation ou gouvernement désireux de voir le programme devenir un important agent de changement social, en dehors du rôle actuariel d'un organisme de soutien du revenu, de façon à prendre toutes les mesures nécessaires pour maintenir sa stabilité financière à long terme.

Á  +-(1120)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    George.

+-

    M. George Cameron: Merci beaucoup. J'ai une brève observation et une question en deux parties.

    Vous avez parlé de ce qui arrive à ceux qui ont des maladies chroniques et dont l'appel est rejeté. Je peux vous fournir certaines preuves empiriques à ce sujet. Je suis un peu mal à l'aise. Il serait sans doute préférable que vous entendiez le témoignage d'une personne qui a une déficience et dont la demande a été rejetée.

    Il s'agit d'un certain nombre de cas sur un certain nombre d'années. En règle générale, les gens veulent travailler mais ne le peuvent pas et finissent par tout perdre. Ils perdent souvent leurs économies et leurs REER. Ils perdent leur maison, et la famille se désintègre. Ils vivent seuls. Ils peuvent finir par vivre avec un membre de la famille ou un ami. Ensuite, leur appel est rejeté et ils ne reçoivent absolument aucun revenu. D'après mon expérience, ils persistent dans ce style de vie. Je n'ai pas suivi ces gens, mais cela me semble être ce qui se passe.

    J'ai une question en deux parties. Elle concerne surtout la situation administrative après 1995 et 1996. M. Beatty a déjà indiqué qu'il y a eu un changement apporté à la période d'admissibilité qui est passée de cinq sur dix à quatre sur six. Cela a d'importantes répercussions sur les personnes qui ont fait appel.

    Certaines personnes, par exemple, ont peut-être arrêté de travailler en 1995, demandé des prestations d'invalidité en 1996 et suivi divers processus d'appel. En 1995, lorsqu'elles ont présenté leur demande, la période minimale d'admissibilité aurait été l'an 2000. L'appel est entendu en 1998. Elles comparaissent devant un tribunal d'examen ou une cour d'appel pour constater que la période minimale d'admissibilité a expiré en décembre 1997.

    Cela met les gens dans une situation très difficile, surtout compte tenu de l'autre exigence administrative voulant qu'elles fournissent des preuves médicales objectives de la déficience. Elles doivent remonter dans le temps et cela pose un certain problème.

    Pourquoi a-t-on modifié la période de cinq sur dix à quatre sur six?

    Mon autre question porte sur les réévaluations. J'ignore si Sherri ou Bob peuvent parler de la situation concernant les réévaluations. C'est un autre important élément administratif qui a été adopté, je crois, en 1996 par le Régime de pensions du Canada pour, je crois, assurer une certaine efficacité par rapport au coût.

    Je vous remercie, j'espère que mes questions sont claires.

+-

    La présidente: Nous devrions peut-être demander à Susan d'y répondre.

+-

    Mme Susan Williams: Oui, je vous remercie. Je tiens simplement à rectifier votre premier point.

    Si une personne dépose un appel et doit attendre une certaine période avant que cet appel soit entendu, si les règles d'admissibilité sont modifiées, ces nouvelles règles ne s'appliquent pas à cette personne. Donc ces gens-là ne se trouvent pas dans la situation que vous décrivez. Une personne qui est admissible selon la règle du cinq sur dix mais qui doit attendre deux ou trois ans pour un appel, continuerait d'être admissible, même si les règles ont changé dans l'intervalle.

+-

    La présidente: Et en ce qui concerne la deuxième partie de la question de George, en ce qui concerne la réévaluation...

+-

    Mme Sherri Torjman: Susan, vous voudrez peut-être répondre aussi à la question concernant la réévaluation et ce qui s'est produit à ce stade, parce que le ministère a entrepris une importante initiative de réévaluation au cours des années 90.

+-

    Mme Susan Williams: Comme je viens d'arriver au ministère, je n'y répondrai pas moi-même, mais je demanderai à Nancy Lawand de bien vouloir en parler.

+-

    La présidente: Nancy, vous restez à la table.

+-

    Mme Nancy Lawand (directrice, Administration des prestations du Régime de pensions du Canada, Ministère du Développement des ressources humaines): Je crois que Sherri a mentionné que le vérificateur général a fait les observations en 1993 et en 1996. L'une des observations portait sur le fait qu'il n'existait aucun système formel pour réévaluer les personnes qui continuaient de recevoir les prestations, pour déterminer si elles y étaient toujours admissibles.

    Le ministère a effectivement établi une fonction de réévaluation. Elle est prévue par la loi, et il existe un pouvoir législatif prévoyant l'examen des bénéficiaires. Ce programme est en cours depuis plusieurs années et a évolué pour cibler les clients en fonction de divers critères.

    J'ignore si vous vouliez une précision en particulier, mais si vous avez besoin de plus de renseignements, nous pourrons les fournir à tous les membres du comité par la suite.

+-

    La présidente: S'agit-il d'une réévaluation au hasard? S'agit-il d'une vérification? Certains diagnostics sont-ils plus susceptibles de devoir faire l'objet d'une réévaluation? Comment procédez-vous?

+-

    Mme Nancy Lewand: Il y a différents éléments déclencheurs de prévus, mais nous essayons d'en faire une analyse coût-avantage. Dans certains cas, on fixera une date de réévaluation après l'acceptation initiale d'une demande—en fonction de la condition médicale du requérant. Si ce n'est pas une condition sujette à des rechutes, mais dont on attend un certain résultat dans quelques années, on fixera alors une date pour un nouvel examen. Dans d'autres cas, on établit des correspondances par rapport au revenu déclaré à l'Agence des douanes et du revenu du Canada.

    Mais nos méthodes évoluent aussi. Nous communiquons plus souvent avec les clients par téléphone lorsqu'une réévaluation approche, pour évaluer la situation du client avant de procéder à un examen formel.

    Encore une fois, nous pouvons vous fournir de plus amples renseignements, et des informations plus détaillées, si vous le souhaitez.

+-

    La présidente: Puisque Deanna est la suivante sur la liste des intervenants, nous nous demandions il y a un certain temps s'il y avait des groupes consultatifs consacrés à des secteurs spécialisés, qui viennent en aide au ministère pour certaines maladies. Je devine qu'il est peu probable qu'une personne atteinte de sclérose en plaques ne voie sa condition s'améliorer largement. Et avec certaines conditions, d'après ce que je sais de la sclérose en plaques, et surtout de la SLA, on constate que, dans certains cas, les patients meurent avant que nous n'ayons réglé leurs dossiers.

    Dans le cas d'une maladie comme la SLA, essayons-nous de mettre au point un programme sur mesure qui permet un traitement accéléré du dossier une fois le diagnostic effectué?

+-

    Mme Susan Williams: Nos évaluations ne varient pas en fonction de la maladie. Elles portent sur les limites physiques qu'éprouvent les personnes, mais nous avons en effet un programme de traitement accéléré des dossiers pour les personnes atteintes de maladies mortelles.

    Pour ce qui est de la SLA, bien sûr, nous en tenons compte. L'un des facteurs est le stade de la maladie au moment où nous recevons la demande, parce que certaines personnes souhaitent continuer à travailler pendant les premiers stades de la maladie.

    Si quelqu'un doit cesser de travailler à cause d'une telle déficience, je crois que cette personne répondrait à nos critères de traitement accéléré du dossier. En raison de la nature de notre programme, notre approche est différente de celle pratiquée dans d'autres pays. Nous ne nous contentons pas de dire: «Diagnostic X; cochez cette case». Nous essayons d'examiner la situation dans son ensemble.

Á  +-(1125)  

+-

    La présidente: Nous en avons parlé avec la Société canadienne de la sclérose en plaques, la Société canadienne de la sclérose latérale amyotrophique, et avec d'autres organismes—nous avons consulté les organismes représentant les malades. Peut-être que cela serait utile dans le cas de la fibromyosite et du syndrome de fatigue chronique. La Société de la sclérose en plaques a une idée précise du moment à partir duquel les patients devraient toucher des prestations. Cet organisme connaît à fond la maladie.

    Certains des problèmes qui affligent le régime tiennent au fait qu'une ou deux personnes atteintes de fatigue chronique touchent les prestations alors que tout le monde sait qu'elles n'y ont pas vraiment droit, et cela ternit tout le programme. Mais si ces sociétés participaient à l'étape de l'évaluation de la maladie, qu'il s'agisse du VIH ou d'une autre maladie...elles pourraient nous aider en partageant le fardeau de la décision d'accepter ou de rejeter une demande, et elles pourraient nous aider à déterminer si une déficience est bien liée directement à la maladie.

    Dans certains cas, bien sûr, la personne souffre de deux ou trois affections en même temps, et dans ce cas, les symptômes ne s'additionnent pas mais se multiplient. Peut-être faut-il faire comme on fait en médecine de famille, c'est-à-dire une évaluation gériatrique parce que le cas est fort complexe, par opposition à compliqué, et nécessite donc un type d'évaluation bien précis.

    Quoi qu'il en soit, peut-être que Deanna peut nous venir en aide avec ce que son organisme propose de faire pour DRHC, annuellement et gratuitement.

    Des voix: Oh, oh!

Á  +-(1130)  

+-

    Mme Deanna Groetzinger: Chose certaine, les maladies comme la sclérose en plaques sont imprévisibles. Quant à l'imprévisibilité de la maladie, les crises suivies de rémissions, je pense que nous partageons en partie cette expérience avec les personnes atteintes du VIH/sida, et aussi avec certaines maladies mentales.

    Il y a certains aspects complexes avec lesquels il faut assurément se débattre. Mais, d'après notre expérience, lorsqu'une personne prend conscience qu'elle doit quitter le monde du travail, probablement parce qu'elle a éprouvé des problèmes de fatigue ordinaire, probablement à cause de certains aspects cognitifs, qui ne constituent pas nécessairement une incapacité physique à laquelle on pense le plus souvent, en termes de difficulté de se déplacer, à ce moment-là, la personne trouve déjà difficile de travailler à plein temps. Nous avons donc des problèmes de ce genre.

    Nous aimerions obtenir un certain nombre d'éléments. Nous voudrions un système plus souple qui tienne compte du travail à temps partiel. Je sais qu'il y a eu des projets pilotes à ce sujet. Ce pourrait être très avantageux pour les gens qui ont une incapacité qui, sans être exactement occasionnelle, se fait sentir de façon beaucoup plus accentuée durant certaines périodes.

    Mais les experts s'entendent pour dire que la plupart des personnes atteintes de sclérose en plaques peuvent essentiellement s'attendre à se retrouver en chômage. Je pense que c'est le message que nous devons absolument faire comprendre aux représentants de DRHC, et nous essayons de le faire par l'éducation.

    Cela dit, j'aime bien ce que j'entends au sujet des systèmes intégrés, c'est-à-dire une meilleure intégration avec présence possible d'assureurs privés, peut-être accompagnée de programmes provinciaux. Si l'on pouvait mettre en place un tel système, et aussi un système qui permettrait aux gens de travailler à temps partiel, ce serait un grand progrès pour les maladies imprévisibles de ce genre et ce ne serait pas nécessairement plus complexe que ce que nous avons actuellement. Je pense qu'il faudrait que les gens se concertent beaucoup plus qu'ils ne le font maintenant, mais je suis contente d'entendre dire qu'on s'efforce de faire preuve d'imagination. C'est très encourageant.

+-

    La présidente: La question sur laquelle nous vous demandons de nous aider, c'est de savoir si la pension d'invalidité du RPC est le meilleur instrument pour le travail à temps partiel, ou bien si l'on pourrait faire quelque chose en collaboration, en utilisant d'une manière différente l'a-e. Y aurait-il d'autres moyens d'obtenir ce résultat?

    Le témoin suivant est Vincent. Ensuite, à un moment donné, j'aimerais que le commissaire intervienne, ou bien Tina, pour nous dire quelle a été votre expérience, quand vous voyez ces gens-là en tête-à-tête pour la première fois, et en quoi cela change votre évaluation de la qualité de vie réelle de ces personnes. Peut-être que Vincent pourrait nous aider aussi à cet égard.

+-

    M. Vincent Boyce: La plupart de mes questions ont été posées par George. J'ai par contre une foule de réponses.

    Il a notamment parlé des gens qui perdent leur maison, etc., quand ils sont frappés par une crise de ce genre. S'il y a une chose qui me trouble au plus haut point, à titre de défenseur de personnes qui sont dans cette situation, c'est de voir des compagnies d'assurance privées leur claquer la porte au nez en leur disant: «Vous devriez chercher une autre solution». Cela m'a été dit très souvent à propos de gens que je représentais. Avez-vous songé à la possibilité d'avoir une pension d'invalidité du RPC? Avez-vous songé à l'aide sociale? Les gens trouvent cela frustrant. Très souvent, ils sont forcés de faire une demande au RPC et leur demande est évidemment rejetée, comme nous le savons bien sûr. Ils n'étaient pas admissibles au RPC, à cause des critères. Évidemment, ce gens-là sont les laissés-pour-compte du système. Leur propre compagnie d'assurance leur a claqué la porte au nez et les a dirigés vers le RPC, alors qu'on sait bien qu'ils ne pouvaient toucher une pension, et ils se retrouvent complètement dépourvus. C'est ce qui arrive à beaucoup de gens que je représente.

Á  +-(1135)  

+-

    La présidente: S'agit-il surtout de travailleurs qui ont subi des blessures?

+-

    M. Vincent Boyce: La plupart, oui.

+-

    La présidente: Ces personnes ont essuyé un refus de la Commission des accidents du travail.

+-

    M. Vincent Boyce: Oui. La commission m'a demandé si j'avais songé à chercher une autre source de revenu, même si l'on savait que la personne ne pouvait pas retourner au travail.

+-

    La présidente: Comment évaluez-vous le travail de la Commission des accidents du travail pour ce qui est des travailleurs qui souffrent de maladies mentales?

+-

    M. Vincent Boyce: La situation s'est légèrement améliorée, mais la lutte sera longue et dure. Il reste encore beaucoup à faire.

+-

    La présidente: Mais y a-t-il des gens dont l'état est compliqué et qui sont donc renvoyés, au lieu que la Commission des accidents du travail étudie leurs dossiers?

+-

    M. Vincent Boyce: C'est tout à fait cela.

+-

    La présidente: Peggy, nous avons hâte de vous entendre nous parler de votre travail dans le domaine du VIH/SIDA.

    Ensuite, nous entendrons Monte.

+-

    Mme Peggy Proctor: J'ai été embauchée par le Groupe de travail canadien sur le VIH et la réadaptation pour inviter des groupes de personnes handicapées à nous parler des problèmes qui se posent couramment pour ceux qui souffrent de maladies épisodiques. Il y avait autour de la table des gens de diverses organisations représentant les personnes atteintes de diabète, de sclérose en plaques, de maladie mentale, et du cancer.

    Quand on a commencé à discuter du caractère particulier des maladies épisodiques, la sécurité du revenu était un problème énorme, et cela s'applique à tous les paramètres de la sécurité du revenu, qu'il s'agisse d'assurance privée, de régime public, etc. Les gens ont besoin de savoir qu'ils peuvent compter sur un revenu qui soit sûr et qui ne pourra pas être supprimé par quelqu'un qui dirait: «Vous êtes assez bien pour travailler, et nous allons donc vous supprimer vos prestations». Ensuite, quand la personne présente une nouvelle demande, elle se fait dire: «Vous souffrez d'un état pathologique préexistant et vous n'êtes donc pas admissible, nous ne pouvons pas vous assurer».

    Il y a beaucoup d'obstacles et de facteurs de dissuasion qui empêchent les gens d'être membres de la population active. Le nombre de particularités communes à tous ces groupes était renversant.

    Une autre question qui est ressortie de cette rencontre, était la définition de déficience pour différents paliers de gouvernement, divers programmes, et les régimes publics et privés. Le mot «invalidité» suggère une incapacité physique. Les autorités aimeraient que la personne soit affligée d'une incapacité permanente qui ne change pas, parce qu'autrement, c'est difficile à administrer.

    Parmi les autres questions qui ont été abordées, citons les soins, le traitement, le soutien et l'intégration des services de soins de santé. J'essaie de penser aux autres grands thèmes qui ont émergé. Je pense que je vais m'en tenir à cela.

+-

    La présidente: Merci.

    Monte.

+-

    M. Monte Solberg: Merci, madame la présidente.

    Je pourrais peut-être commencer par faire une observation. Le plus troublant, dans tout cela, c'est l'idée que l'on change les règles du jeu sans préavis, surtout sans légiférer. Il faut espérer que le ministère est conscient que c'est vraiment injuste et qu'il faut tenir un débat sur tout cela. Si le régime n'est pas financièrement viable ou bien s'il y a d'autres problèmes, il faudrait au moins en débattre publiquement.

    Je veux maintenant poser une question précise au sujet du régime accéléré pour les malades en phase terminale. Serait-il possible de décrire ce processus. Deuxièmement, est-ce que vous savez combien de temps il faut pour obtenir des prestations, dans le cas des gens à qui on a diagnostiqué une maladie terminale?

Á  +-(1140)  

+-

    Mme Nancy Lawand: Pour répondre d'abord à votre deuxième question, nous avons une norme de service d'application générale pour le traitement de nos demandes. Le délai est de 62 jours, sauf erreur, pour une demande initiale. Il y a un contrôle continu à cet égard, peu importe qu'il s'agisse ou non d'une maladie terminale. Toutes nos demandes sont traitées par le système régional de prestation de services, et il y a un processus pour s'assurer que les demandes qui émanent de personnes souffrant de maladies terminales sont étudiées dans les plus brefs délais. Les employés savent qu'ils doivent se conformer à des normes de service rapides. Les autres demandes sont examinées dans les plus brefs délais, compte tenu de ces normes.

    Je pense que cela répond aux deux questions.

+-

    M. Monte Solberg: C'est évidemment une question de jugement, jusqu'à un certain point. Y a-t-il des procédures rigides et établies pour accélérer l'étude du dossier d'une personne atteinte de SLA, pour qu'elle puisse toucher les prestations dans les plus brefs délais? Comme la présidente l'a dit tout à l'heure, on ne veut pas que l'affaire soit étudiée seulement quand la personne est sur son lit de mort. Y a-t-il une procédure fixe, ou bien est-ce une question de jugement?

+-

    Mme Susan Williams: Je pourrais peut-être expliciter ce que Nancy a dit. Si l'on examine de façon générale le cas des personnes atteintes de maladies terminales, quant à savoir si la personne touche des prestations seulement quand elle est sur son lit de mort, cela dépend évidemment de la date de la demande, et il y a des gens qui tardent beaucoup à présenter leur demande. Quand une personne atteinte d'une maladie mortelle présente une demande, son dossier passe immédiatement au-dessus de la pile.

    Habituellement, l'élément complexe dans l'évaluation d'un dossier est l'aspect médical. Si quelqu'un souffre d'une maladie mortelle et que son cas est très simple, la procédure administrative peut être très rapide. Je ne sais pas par coeur combien de temps cela peut prendre. Nous pouvons vérifier si nous avons des renseignements à vous donner là-dessus. Nous essayons évidemment d'aller le plus vite possible.

    Je voudrais mentionner aussi un élément que nous avons établi depuis environ un an, à savoir que nous communiquons rapidement avec le client, dès que nous recevons une demande. S'il s'agit d'une personne atteinte d'une maladie terminale, il est certain qu'à ce moment-là, nous lui donnerons l'assurance que son dossier sera étudié le plus rapidement possible et nous donnons une idée de la date à laquelle nous espérons avoir une réponse. Je crains de ne pouvoir être plus précise pour l'instant.

+-

    M. Peter Smith: Je voudrais ajouter une observation en réponse à la question de M. Solberg. Du point de vue du tribunal de révision, nous n'avons pas de règles fixes pour accélérer l'examen des dossiers des maladies de ce genre, par exemple la SLA, mais nous faisons preuve de jugement. Peut-être que le ministère et nous-mêmes devrions envisager cela.

    À l'instar du ministère, nous avons des normes relativement au délai avant qu'une audience ait lieu et que la décision soit rendue. Actuellement, ces normes ne dépendent pas de l'état ou de la maladie du client, mais peut-être que nous devrions l'envisager.

+-

    M. Monte Solberg: Je pense que la façon de le savoir serait de faire effectuer une sorte de vérification de l'optimisation, qui vous permettrait de savoir combien de temps les gens atteints de ces maladies doivent attendre. Il ne m'apparaît pas clairement que vous possédez ces données, et peut-être que vous devriez les avoir.

+-

    M. Peter Smith: Sur ce point précis, non, nous ne faisons pas de vérification de l'optimisation, mais je peux dire à tout le monde que demain, les tribunaux de révision vont recevoir un important rapport de recherche sur la satisfaction des clients, enquête réalisée auprès de 1 400 de nos appelants—je crois que le ministère est au courant de ce dossier—dont 200 sont en fait dans la catégorie des gens qui ont choisi de ne pas faire appel. Nous nous engageons à communiquer à quiconque un résumé de ce rapport. Je le considère comme un document public.

    Nous avons reçu des renseignements préliminaires qui nous donnent une petite idée de notre performance et, dans cette mesure... Mais il s'agit d'informations qualitatives. Ce n'est pas une vérification de l'optimisation qui nous donnerait des chiffres réels, mais si l'on y ajoute d'autres renseignements obtenus par les gestionnaires, nous serons en mesure de faire une évaluation approximative.

    M. Monte Solberg: Merci.

Á  +-(1145)  

+-

    La présidente: J'ai sept personnes sur la liste des personnes qui veulent intervenir et je pense qu'il est important que l'on réponde avec franchise, lorsque l'une des personnes ici présentes connaît la réponse à la question qui a été posée.

    Premièrement, je souhaite la bienvenue à Nancy Karetak-Lindell, qui vient d'aussi loin qu'il est possible de venir, du Nunavut. Mais je pense que vous reconnaîtrez tous que le Nunavut a probablement les meilleures données disponibles sur les personnes handicapées. Le problème, c'est que la plupart des gens là-bas ne sont pas admissibles à la pension d'invalidité du RPC; par conséquent, le programme leur est à peu près inutile. Nous sommes toujours heureux d'entendre le point de vue de Nancy sur ce qui se passe dans notre immense pays.

    Je propose que l'on passe dans l'ordre tous ceux qui figurent sur la liste des intervenants, sous réserve d'intervention inopinée. Nous servirons ensuite un déjeuner léger et nous espérons que vous reviendrez ensuite à la table pour que l'on puisse entendre Marg Ruttan, gagnante de la bourse de recherche de la Flamme du centenaire, qui nous dira quelques mots de ce prix et de ce qu'elle a écrit. J'espère que nous pourrons ensuite reprendre le fil de notre conversation sur le travail remarquable que Bill et Kevin ici présents ont fait relativement aux questions dont ils doivent connaître la réponse pour progresser dans leurs travaux et dans nos délibérations pour rejoindre les Canadiens.

    La parole est donc à Gerard, et ensuite à Alison.

+-

    M. Gerard Yetman: Merci. J'ai un commentaire et une recommandation pour faire suite à une observation que M. Crawford a faite tout à l'heure relativement à la recherche. Je m'étonne beaucoup de constater l'absence de liens entre la recherche en santé et la recherche financière qui se fait au RPC.

    Tout à l'heure, madame la présidente, vous avez évoqué ce qui arrive à ces gens-là et les raisons des fluctuations du début des années 90. Je me disais seulement que, du point de vue du VIH, si l'on examine les données de la santé pendant ces périodes, de 1990 à 1995, nous avons eu plus de 20 000 Canadiens diagnostiqués du VIH. Entre 1990, 1994, et 1998, ces chiffres ont changé de façon spectaculaire, surtout à cause du taux très élevé de décès à cette époque. De plus, de nouveaux médicaments sont arrivés qui prolongent la vie.

    En conséquence, nous avons vu une forte fluctuation au sein de cette communauté, et il est certain qu'il y a eu un changement marqué du nombre de bénéficiaires du RPC. C'est également pendant cette période que, à cause du coût élevé des médicaments, un certain nombre de personnes ont dû renoncer au RPC pour toucher des prestations provinciales, pour être admissibles au régime de gratuité des médicaments.

    Par exemple, si l'on regarde ce qui s'est passé en Ontario, en 1998, le coût moyen de la thérapie par médicaments pour une personne était de plus de 10 000 $. En 1998, il en a coûté à la province d'Ontario 62 millions de dollars pour répondre aux besoins des gens qui vivent avec le VIH/SIDA. Il y a des gens qui ont dû renoncer à un régime fédéral pour adhérer à un régime provincial.

    Donc, il est certain que si nous faisons des recommandations et que nous essayons de réformer le RPC, nous devons englober dans la recherche tous les groupes représentant diverses maladies, parce que des chiffres comme ceux-là, et aussi la recherche qui a été faite dans différents domaines, par exemple, les travaux du GTCVR, le groupe de la réadaptation, et de la Société canadienne du sida, qui ont fait des études portant directement sur l'impact du RPC—je vais laisser à la commission le soin d'en parler—ont de très lourdes conséquences financières pour l'avenir et sur la façon dont le RPC pourra continuer de servir les Canadiens.

    Merci.

Á  +-(1150)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Alison.

+-

    Mme Alison Schmidt: Merci beaucoup.

    Je suis quelqu'un qui reçoit plus de cent appels téléphoniques par mois de personnes à qui l'on a refusé des prestations d'invalidité du RPC et qui ont interjeté appel. Je fais ce travail depuis maintenant quatre ans et demi et j'ai recouvré environ 750 000 $ d'arriérés de paiement pour des Canadiens ordinaires atteints d'invalidité. La plupart des gens qui m'appellent ont une demande légitime. Je ne fais pas de miracle et je veux savoir pourquoi il est nécessaire pour les Canadiens ordinaires d'endurer pareilles difficultés pour recevoir une prestation à laquelle ils ont droit.

+-

    La présidente: Je suis d'accord.

    De toutes ces personnes qui ont fait appel à vous, quel est le pourcentage de cas que vous avez pu régler?

+-

    Mme Alison Schmidt: Comme je l'ai dit, au cours des quatre dernières années, je crois avoir récupéré au total 781 000 $ en arrérages à partir de mon sous-sol en Saskatchewan. Je dirais qu'on peut régler la majorité des cas, environ 70 ou 75 p. 100. Au niveau du tribunal de révision de DRHC, la plupart des gens ont énormément de mal à avoir gain de cause. Ils ont habituellement plus de chance lorsqu'ils sont en mesure de témoigner en personne devant un tribunal capable d'évaluer leur crédibilité et de prendre connaissance des problèmes ou des limites que leur déficience impose à leur vie.

    J'arrive parfois à faire témoigner des médecins, mais le milieu médical est très mécontent. Les médecins se demandent pourquoi les arbitres ne croient pas leurs lettres? Je fais intervenir un psychiatre qui a écrit neuf lettres pour le compte d'un requérant qui était en fait un pasteur de l'Église unie. C'était un homme très malade, atteint de dépression bipolaire, et il avait dû témoigner devant le tribunal de révision et révéler des aspects extrêmement intimes de sa vie, expérience très gênante pour lui, pour obtenir gain de cause.

    Le plus gros pourcentage de ma clientèle se compose probablement de personnes entre 55 et 60 ans qui ont été victimes de l'abrogation des politiques relatives aux travailleurs âgés. J'ai reçu des gens presque illettrés qui n'étaient même pas capables de remplir les formulaires de demande. J'ai reçu des gens qui sont même parfaitement incapables d'interjeter appel. Ils n'ont pas la moindre idée du genre d'informations qu'ils doivent réunir. Tout le processus les terrifie, et ils n'ont personne à qui s'adresser. Je reçois des appels des quatre coins du pays, donc le besoin en matière d'information et d'aide est évident.

+-

    La présidente: Neil, avez-vous une réponse à cette question?

+-

    M. Neil Pierce: Je ne sais pas si je peux répondre à cette question, mais je peux peut-être répondre à la question que vous avez posée à Deanna de la Société canadienne de sclérose en plaques: Quel conseil donneriez-vous à DRHC? Je vais répondre par un commentaire et une recommandation.

    Mon commentaire concerne surtout ces Canadiens atteints de traumatismes médullaires qui ont beaucoup de mal à obtenir des prestations d'invalidité. C'est encore plus difficile maintenant pour ceux qui sont atteints de paraplégie ou qui ont des blessures qui ne sont pas guéries. Notre organisation croit que la déficience pour nos gens n'est qu'un seuil dans la vie d'une personne et que nous devrions accorder autant d'importance à la promotion des capacités des gens. Je songe à ce qu'a dit Wolfgang plus tôt au sujet de la rééducation professionnelle qui doit commencer au tout début du processus.

    Ce que moi-même ou notre association recommandons, c'est d'instaurer un programme de taux variables de telle sorte qu'une personne puisse travailler un jour dans sa vie sans craindre de perdre le soutien du revenu. La garantie des prestations est essentielle pour ces personnes atteintes de blessures catastrophiques, dont le gagne-pain dépend vraiment de la garantie des prestations, car dans certains cas, c'est ce qui leur permet d'acheter des médicaments qui leur sauvent la vie. Très souvent, quand on travaille, on n'a pas nécessairement droit à certains de ces avantages sociaux.

    Je pense que nous devons éliminer les mesures de rétablissement rapide, même s'il s'agit d'une amélioration réelle par rapport au système qu'on avait autrefois, parce que le rétablissement rapide ne garantit des prestations que pour une brève période. Même si c'est une amélioration par rapport au passé, un programme de taux variables assurerait des prestations à tout moment dans la vie d'une personne. Puis, si cette personne retourne au travail demain, travaille pendant un certain temps, et cesse de travailler un an ou deux ans plus tard, elle pourrait récupérer ces prestations sans avoir à se soumettre de nouveau à tout le processus d'arbitrage.

    Certains ont même dit que le programme de taux variables pourrait fonctionner tout aussi facilement à l'intérieur du programme existant d'assurance-emploi, ce qui pourrait aussi contribuer à rendre le programme plus efficient et à épargner de l'argent, de telle sorte que les personnes qui ne peuvent pas travailler auraient des prestations garanties pour la vie.

Á  +-(1155)  

+-

    La présidente: Idée très intéressante.

    Monsieur Ashdown.

+-

    M. William P. Ashdown: Merci, madame la présidente.

    Tout d'abord, j'aimerais remercier Alison Schmidt qui a soulevé certaines questions que je comptais mentionner, et je lui en suis reconnaissant.

    Lorsque j'aide les personnes à trouver le programme d'invalidité auquel ils peuvent s'adresser, et lorsque je les aide dans le processus, ce qui me préoccupe, c'est qu'on ne reconnaît pas le fait que les maladies mentales sont aussi des maladies invalidantes. Comme Francine Knoops l'a dit plus tôt aujourd'hui, l'Organisation mondiale de la santé reconnaît aujourd'hui que des dix plus grandes maladies invalidantes sur la planète, quatre sont de nature psychiatrique.

    Cependant, sur le terrain, on constate que les définitions de la déficience, de ce qui constitue une déficience, diffèrent énormément. Par exemple, la définition de l'OMS n'est certainement pas celle qu'emploie Revenu Canada, ou ADRC, ou peu importe comment ça s'appelle maintenant. Cela ne semble pas non plus être la définition en usage à DRHC.

    Cela nous pose un vrai problème. Nous avons non seulement une population qui est au départ très malade et qui a beaucoup de mal à obtenir ces prestations pour commencer, mais comme leur base de travail est instable, cela complique les choses encore plus. J'ai vécu des tas d'expériences déplaisantes en essayant d'expliquer à des gens que, non, le gouvernement ne croit pas que vous êtes handicapés, même si votre assureur privé, ou la Commission des accidents du travail, croit le contraire.

    Diverses personnes m'ont résumé cela à plusieurs occasions, et elles disaient essentiellement la même chose: «Vous voyez, je suis tellement fou que même le... gouvernement du Canada s'imagine que je n'ai droit à rien. Cela peut vous sembler drôle, sauf qu'il y a eu au moins deux incidents au cours des deux dernières années où ces dossiers ont été fermés parce que les requérants se sont suicidés. Pour certaines personnes avec qui je fais affaire, c'est plutôt une question de vie ou de mort.

    Ce qui illustre pour moi la nécessité pour le personnel de DRHC de reconnaître résolument que la maladie mentale est une maladie invalidante. Et nous devons savoir quelles mesures prend DRHC pour éduquer son personnel et s'assurer qu'il demeure constamment sensible à ce phénomène, si l'on veut.

+-

    La présidente: Linda?

    Oui.

+-

    Mme Wendy Steinberg: Merci. Je vais reprendre là où Bill Ashdown s'est arrêté.

    Je représente l'Association canadienne pour la santé mentale. Et toutes les personnes atteintes de maladies mentales au pays font appel à nous. Pendant plusieurs années, j'ai géré une initiative nationale en matière d'emploi qui aide les personnes atteintes de déficience psychiatrique à réintégrer le marché du travail. L'un des principaux obstacles, à part le stigmate social associé à la maladie mentale, était la rigidité des systèmes de sécurité du revenu, notamment le programme d'invalidité du RPC.

    Il est donc sûr que ce qu'on a dit autour de la table aujourd'hui, à propos de la reconnaissance des maladies mentales, de la nécessité d'avoir un système qui soit adopté, tout cela est très important pour les personnes que nous représentons. Pour faire écho à ce que Bill Ashdown a fort bien dit, le système actuel ne tient pas compte des réalités entourant la vie d'une personne atteinte d'une maladie mentale grave.

    Il y a eu de nombreuses avancées au cours des 30 dernières années ou depuis que la législation initiale est entrée en vigueur, des avancées en psychophamarcologie, ainsi qu'une grande évolution vers les services de soutien communautaire, si bien que la plupart des personnes aujourd'hui qui sont atteintes d'une maladie mentale grave peuvent travailler. Elles sont capables de travailler dans une certaine mesure, souvent à temps partiel et dans un contexte de travail souple.

    Je crois donc que le programme est basé sur une hypothèse qui est souvent fausse—à savoir qu'une telle personne est incapable de travailler. Cette réalité ne correspond pas du tout à notre groupe. Ça ne tient plus, dirait-on. Ça tenait peut-être il y a 30 ans de cela, mais il y a eu de nombreuses avancées médicales depuis, et chose certaine, une évolution dans la pensée des gens.

    Nous réclamons le genre de programme à prestation partielle ou réduite dont on a parlé, de préférence à l'approche du tout ou rien, une approche qui peut tenir compte des zones grises que mentionnait Sherri Torjman, et il faut cesser de penser que la situation de ces gens est en noir ou en blanc.

    Il y a tellement d'éléments qui ne correspondent pas à notre population: la définition de déficience; les exigences relatives aux cotisations, étant donné les liens limités ou épisodiques entre notre population et le marché du travail, chose qui est causée par les séjours intermittents à l'hôpital; sans parler de la discrimination dont souffrent nos gens lorsqu'ils essaient de réintégrer le marché du travail. Il y a une foule de problèmes comme ceux-là, mais ce qui profiterait le plus à notre groupe serait un système où l'on reconnaît le potentiel de travail.

    Je pense qu'il faut faire la différence entre la capacité de travailler et la capacité de subvenir à ses propres besoins. Nos gens sont parfois tout à fait en mesure de travailler; mais ils ne sont pas en mesure de tirer un revenu suffisant de leur travail. Et je crois qu'il ne faut pas faire d'adéquation entre la capacité de travailler et la capacité d'obtenir un revenu suffisant.

    C'est le sens que nous donnons au filet de sécurité sociale, et ce qui semble révélateur, c'est qu'un nombre croissant de nos interlocuteurs continuent de glisser hors de ce filet.

  +-(1200)  

+-

    La présidente: Êtes-vous donc d'accord avec la question que posent les médecins sur le formulaire: «Cette personne est-elle en mesure de subvenir à ses propres besoins?»

+-

    Mme Wendy Steinberg: Oui. Ce qui vaut mieux que de demander: «Est-ce que cette personne peut travailler?», ce qui semble insuffisant.

    La présidente: Nous allons maintenant entendre David, suivi de Cam.

+-

    M. Dave MacKenzie: Tout d'abord, je tiens à vous dire que votre système de sonorisation laisse beaucoup à désirer. J'ai un tout petit peu de mal à entendre, et la moitié des personnes ici présentes ne parlent pas très fort. Je n'entends qu'un murmure. Je n'ai pas compris la moitié de ce qu'on a dit ici, et je voudrais maintenant...

+-

    La présidente: David, je vous interromps tout de suite. Nous avons demandé au début de la séance si quelqu'un voulait l'un de ces appareils parce qu'on peut s'en servir pour entendre l'anglais aussi, et le son ici n'est pas très bon. Mike va vous en procurer un, d'accord? J'aurais préféré que vous nous signaliez le problème plus tôt parce que c'est l'un des problèmes que pose cette salle en particulier.

+-

    M. Dave MacKenzie: J'ai bien entendu quelque chose au sujet de la baisse du nombre de requérants à certains moments, qui est attribuable au fait que certains requérants sont épouvantés par les décideurs du RPC chargés d'administrer le volet invalidité. Par exemple, ils invitent à témoigner une personne qui a une cinquième ou une sixième année, et cette personne devra affronter un médecin qui a un curriculum vitae de six pages. Ces personnes n'ont pas les moyens d'engager un avocat.

    Il y a ce gars-là qui m'a téléphoné et qui pleurait littéralement au bout du fil, il disait qu'il ne pouvait pas y aller parce qu'il avait peur. Le RPC lui avait envoyé une lettre avec le curriculum en six pages de son médecin, le médecin qui allait l'interroger devant le tribunal. Il faut que ce genre de chose cesse. Ce sont des tactiques d'intimidation. Ce sont des chasses aux sorcières, peu importe comment vous voulez appeler cela. Mais ce sont les décideurs du RPC qui font ce genre de choses.

  +-(1205)  

+-

    La présidente: Est-ce que cela intimide les gens au point où ils ne font même pas de demande?

+-

    M. Dave MacKenzie: Au départ, lorsque les gens font leur demande, c'est précisément comme cela qu'ils s'y prennent. Ce sont des tactiques d'intimidation. On ne se rend pas compte qu'il y a des gens—la moitié d'entre eux—qui n'ont que cinq ou six années d'études, qui sont incapables de lire correctement ou alors qu'ils ne comprennent pas ce qu'ils lisent. Je peux vous dire que cela me fait mal au coeur de voir ces gens venir me trouver pour me demander «Qu'est-ce que je dois faire? Ces gens m'intimident». Ils leur envoient une lettre pour leur dire qu'ils vont devoir comparaître devant un comité, mais que cela n'est pas formel du tout. Mais peu importe que ce soit le cas, ils ont une peur panique. Il y en a même qui n'en dorment pas de la nuit et qui en font une diarrhée. Ils ne parviennent pas à composer avec les faits. Et lorsqu'ils comparaissent, ils sont terrifiés. Moi, j'ai vu des gens en proie à la panique, à des crises de larmes, etc.

    Le RPC ne tient pas compte de certains des facteurs pertinents. Les gens comme celui dont je vous ai parlé... ce type a fait sa demande en 1997 et la décision n'a été rendue qu'en mai 2002. Son audience a eu lieu le 18 octobre 2000. Vous voyez ce que je veux dire? Qu'est-ce qu'il doit faire? Mourir de faim? Se suicider? Peut-être est-ce cela qu'ils veulent. Et c'est peut-être aussi la raison pour laquelle il y a une diminution.

+-

    La présidente: Eh bien, je pense que ce que nous devons faire ici, c'est partir du principe qu'à un niveau ou à un autre, l'intention sur le plan politique était bonne. Mais les sentiments exprimés par ces gens au sujet de leurs rapports avec le système sont parfaitement authentiques. Lorsqu'on examine un peu l'administration ou si l'on songe à la politique exemplaire que nous voulons avoir dans ce domaine, nous devons faire en sorte que ces gens aient le sentiment que quelqu'un se soucie de leur sort.

    Je pense que c'est précisément ce que Sue et les gens du ministère espèrent pouvoir découvrir. Comment faire pour ne plus donner le sentiment que c'est une chasse aux sorcières ou que c'est un système conçu pour que les gens échouent? Si c'est cela le sentiment qui en découle, il est certain que le système ne marche pas. C'est aussi le sentiment que j'avais dans mon cabinet, lorsque j'exerçais la médecine générale, face à ces gens qui n'avaient pas fermé l'oeil de la nuit parce qu'ils avaient peur de devoir comparaître devant le tribunal. Lorsque j'ai assisté à la séance de formation offerte en juillet dernier par le commissaire, le but de l'exercice était de faire en sorte que les gens qui font partie de ces tribunaux comprennent le point de vue du client et de faire en sorte que les clients comprennent pourquoi cette information qui avait été refusée auparavant était maintenant divulguée, pourquoi aussi ils essayaient de faire changer les choses de manière à mettre tout le monde sur un pied d'égalité. Mais comme vous le dites vous-même, si vous recevez une lettre de six pages écrite dans un style qui n'est pas simple à comprendre, signée par un médecin au titre ronflant et qui ne semble pas vraiment avoir un rapport avec la question de savoir si votre cause va ou non être entendue, il est évident que par définition même, ce genre de situation vous met en porte-à-faux.

    Je vous remercie donc de nous avoir fait part de tout cela et de nous avoir rappelé à l'honnêteté en faisant l'adéquation entre ce que nous pensons faire et le sentiment qu'en ont les gens.

    Cam, avez-vous quelque chose à ajouter à cela?

+-

    M. Cam Crawford: Je n'ai rien à suggérer à ce sujet. À mon avis, tout le monde devrait convenir qu'un système qui donne l'impression d'être compatissant est préférable à un système perçu comme hostile.

    Ce que j'espérais faire, c'est simplement faire valoir trois éléments pour poser le contexte. Au plan international, nous travaillons dans le cadre de programmes d'aide aux personnes handicapées et d'accès au marché du travail. Par rapport aux autres pays de l'OCDE, le Canada dépense peu dans l'ensemble au titre du programme d'aide financière à participation, si on fait la comparaison avec les programmes semblables à celui du RPC qu'offrent les autres pays. La bagarre fiscale a à mon avis été remportée, du moins sur le plan international. On pourrait même peut-être défendre l'idée de l'élargir.

    Le second élément est que, toujours sur le plan international, les recherches qui sont actuellement en cours vont à mon avis déboucher sur une recommandation très claire en faveur de l'élimination du critère d'employabilité pour la détermination de l'admissibilité aux prestations d'invalidité. Dans de nombreux pays, on a constaté que cette formule du tout ou rien constituait en réalité un piège en ce sens qu'elle offrait aux gens toutes sortes de bonnes raisons perverses pour ne pas chercher du travail. Ce constat est fort répandu. Il est donc logique d'éliminer le lien entre les deux.

    Le troisième élément est quelque chose dont je n'ai pas encore parlé. Certes, un grand nombre de questions ont été posées ici. Mais en l'occurrence, il s'agit de tous ces gens qui aident de façon privée un membre de leur famille victime d'une déficience ou qui est né handicapé. Nous savons, d'après ce qu'ont publié les services d'indemnisation des accidents du travail, que les gens qui font partie des «professions axées sur la relation d'aide», c'est-à-dire ceux qui travaillent dans les hôpitaux, sont très lourdement handicapés par rapport à d'autres secteurs de l'économie. Cela est dû à toutes les maladies de dos et à tout ce qui se produit chez les gens qui en aident d'autres.

    Ce qu'on sait moins bien par contre, c'est que les gens qui, tout en ne faisant pas partie de la population active, aident en privé un membre de leur famille, affichent également un taux d'invalidité relativement élevé. Dans certains cas, c'est en aidant un membre de leur famille lui-même handicapé qu'ils se sont trouvés handicapés.

    Si quelqu'un, une femme mettons, quitte la population active pour aider son conjoint invalide en raison d'un accident du travail, et si cette femme, trois ou quatre ans plus tard, devient elle-même invalide, elle risque de ne pas avoir droit aux prestations d'invalidité du RPC.

    Il y a donc, et c'est cela la problématique que je vous soumets, tout un groupe de gens qui offrent un service incroyablement utile à la société, un service qui représente une valeur économique énorme. Mais à cause des règles actuelles, ces gens risquent de ne pas être admissibles à une pension d'invalidité, voire de ne pas avoir droit à une pension de retraite parce qu'ils ont jugé qu'ils se devaient d'offrir leur aide à autrui.

    Cela, c'était simplement pour ouvrir un peu le cadre de référence.

  +-(1210)  

+-

    La présidente: Est-ce que je dois revoir votre travail avant de vous donner 20 minutes pour le déjeuner? Qu'en pensez-vous?

    Bill, allez-vous nous expliquer tout cela?

    Nous reviendrons donc rapidement à 12 h 30 pour entendre Marg Ruttan. Nous poursuivrons ensuite jusqu'à 14 heures si cela vous convient.

    Vous voulez le faire tout de suite ou après le déjeuner?

+-

    M. Bill Young (attaché de recherche du comité): Nous pouvons le faire tout de suite.

    La présidente: En effet, c'est ce que je préférerais.

    M. Bill Young: D'accord. Parmi les questions qui, à notre avis, pourraient être utilement examinées pendant la deuxième partie de la séance, après le déjeuner, il y aurait l'admissibilité et la définition. Quels devraient être les critères? Comment parvenir à intégrer les maladies épisodiques et les maladies nouvelles? Est-ce qu'une prestation partielle serait une solution raisonnable? Quelle devrait être la place de la réadaptation professionnelle?

    L'autre série d'éléments concernait l'intégration. Comment parvenir à mieux intégrer la prestation d'invalidité du RPC aux autres programmes de soutien du revenu financés par l'État et les assurances privées dans le cas des gens que leur déficience empêche de conserver un emploi régulier? Arrive-t-il souvent que des gens qui reçoivent une prestation d'invalidité du RPC ne soient plus admissibles aux services et aux auxiliaires reliés à leur déficience? Est-ce que le RPC devrait envisager la possibilité d'intégrer également les activités de soutien?

    Enfin, sur le plan financier, les changements aux critères d'admissibilité à une pension d'invalidité du Régime de pensions du Canada devraient-ils s'accompagner d'une modification de la formule de calcul de comptabilisation des cotisations?

    Comme l'a déjà dit Sherri, je pense que n'importe lequel de ces changements pourrait avoir des répercussions financières. Serait-il commode ou utile de séparer les cotisations à l'assurance-invalidité du RPC des cotisations au régime de retraite du RPC?

+-

    La présidente: Vous aurez donc toutes les réponses dans 20 minutes si nous vous donnons à manger? Est-ce cela?

    Nous aimerions également pouvoir vous renvoyer ces questions ultérieurement afin que vos organismes puissent y réfléchir et nous répondre par écrit. Peut-être aurons-nous davantage de questions à votre intention d'ici la fin de la matinée, mais c'est un début.

    Ensuite, je pense que nous allons nous munir des prismes à court terme, à moyen terme et à long terme de Sherri afin que le comité puisse recommander—ou plutôt demander aux Canadiens—comment ficeler tout cela à court terme, à moyen terme et à long terme.

    Certains d'entre vous m'ont déjà entendu le dire, dans pratiquement tous les dossiers qui surgissent au Canada, quel est le problème le plus important pour les femmes, quel est le problème le plus important pour les personnes handicapées? Ce qui se passe, c'est que pratiquement tout ce qui nous tient à coeur concerne quatre ordres de gouvernement et se retrouve dans au moins trois ministères différents. Si vous parvenez à nous aider à résoudre cela, nous serons bien placés pour être le meilleur pays au monde.

    Avant d'ajourner pour le déjeuner, je voudrais accueillir Laurie Beachell, que vous connaissez déjà tous, ainsi que Mary Ennis. C'est vous qui devrez faire tout le gros du travail pendant la seconde moitié.

  +-(1215)  

+-

    M. Laurie Beachell (coordonnateur national, Conseil des Canadiens avec déficiences): Nous venons tout juste de quitter vos collègues au Comité permanent des finances, pour votre gouverne, pendant ces deux heures de discussion avec vos collègues, ce qui comprend les questions et réponses qui ont suivi, les prestations d'invalidité du RPC et le crédit d'impôt pour personnes handicapées ont représenté au moins le tiers des questions qui ont été posées, suite à la discussion, par tous les partis—l'Alliance, le Bloc et les Libéraux.

+-

    La présidente: Voilà qui est excellent. C'est très bien que je n'étais pas là. Cela aurait pu être 100 p. 100.

    Nous allons donc simplement suspendre nos travaux pendant 20 minutes pour vous permettre de manger une bouchée.

  +-(1217)  


  +-(1252)  

+-

    La présidente: J'ai maintenant le très grand plaisir de vous proposer notre gâterie de mi-parcours, c'est-à-dire la Bourse de recherches de la flamme du centenaire pour les personnes handicapées. J'ignore si vous le savez, mais la fontaine de la flamme du centenaire qui se trouve devant le Parlement reçoit des petites offrandes—et nous avons eu de biens meilleurs résultats depuis l'introduction des pièces de 2 $. On recueille en effet dans cette fontaine entre 3 000 $ et 4 000 $ par an, et nous avons décidé par une loi du Parlement d'accorder le montant ainsi recueilli à un lauréat. La personne en question a un an pour utiliser cet argent afin de rédiger un rapport axé sur les réalisations publiques d'un ou de plusieurs Canadiens handicapés.

    Cette bourse, qui représente 3 000 $ pour 2002, vient donc de toutes les pièces de monnaie qui sont jetées dans la fontaine de la flamme du centenaire, à quoi viennent s'ajouter des dons de particuliers ou d'entreprises. N'importe quel citoyen du Canada qui souffre d'une déficience peut faire une demande en envoyant le descriptif de son projet de recherche qui vise à faire connaître les réalisations d'un concitoyen ou d'une concitoyenne victime d'une déficience au greffier du comité permanent, accompagnée d'une lettre d'appui.

    J'ai donc le très grand plaisir d'annoncer que le Sous-comité de la condition des personnes handicapées a choisi Marg Rutten, originaire d'Edson en Alberta. Mme Ruttan va nous livrer la synthèse de son rapport concernant une compatriote handicapée, Darlene Long. Le rapport sera affiché dans son intégralité sur le site Web.

    Bienvenue donc et félicitations.

+-

    Mme Marg Ruttan (lauréate, Bourse de recherches de la flamme du centenaire): Merci.

    J'ai eu beaucoup de plaisir à écrire ce rapport sur Darlene Long. J'ai fait la connaissance de Darlene quand j'ai appris que j'étais atteinte de la même affection qu'elle, la malformation de Chiari I. Il s'agit d'une affection très rare.

    En vous écoutant discuter des Canadiens avec des déficiences ce matin, j'ai constaté que vous n'aviez pas abordé les déficiences très rares. La malformation de Chiari I ne touche qu'environ 250 ou 300 Canadiens, mais il y a beaucoup d'autres troubles et maladies qui sont également très rares. Les personnes qui en sont atteintes semblent laissées pour compte, parce qu'elles n'ont personne pour les représenter dans des échanges comme celui-ci, contrairement aux personnes atteintes de maladie mentale ou de sclérose en plaques. Voilà pourquoi elles sont souvent oubliées.

    Je vais vous parler un peu de Darlene Long et ensuite un peu aussi de la malformation de Chiari I. Darlene a exercé la profession d'infirmière pendant de nombreuses années. Ses amis la surnommaient «Elbows», ce qui veut dire en français «Les coudes», parce qu'elle avait l'habitude de s'appuyer le coude sur le mur lorsqu'elle circulait dans les couloirs. Elle s'appuyait ainsi pour maintenir son équilibre, car un des symptômes de la malformation de Chiari I est un manque d'équilibre. Elle a eu ce symptôme pendant longtemps, puis un jour elle a fait une chute.

    Cette affection est souvent aggravée par le fait de soulever un objet lourd ou de tomber. L'état de santé de Darlene s'est détérioré très vite. Un jour, elle n'a plus été capable de marcher ni même d'avaler. On l'a opérée, et au cours des dernières années, elle a subi plusieurs interventions chirurgicales. Malheureusement, son état de santé ne s'est pas beaucoup amélioré. Seul le fonctionnement de ses nerfs optiques s'est amélioré, après s'être gravement dégradé. Grâce à la chirurgie, elle a pu au moins recouvrer partiellement la vue.

    Comme Darlene était une professionnelle de la santé, elle savait où chercher pour se renseigner sur sa maladie, mais elle a constaté qu'il existait très peu d'informations à ce sujet. Elle a fini par trouver un médecin à New York qui s'occupait sérieusement de ce problème. Elle a commencé à travailler avec lui et, en collaboration avec trois Américains, elle a créé en 1995-1996 un site Internet présentant des renseignements sur sa maladie et certains problèmes qui y étaient reliés.

    Grâce à ce site Internet, elle a aidé plus de 1 500 personnes dans le monde, jusqu'en Australie. Elle a aidé beaucoup de personnes aux États-Unis et plusieurs au Canada, dont moi-même. Nous avons pu trouver sur ce site Internet l'adresse de médecins qui connaissent bien la maladie et qui cherchent de nouvelles façons de la traiter. Cela s'est avéré extrêmement utile.

    Pendant tout ce temps, elle a travaillé à enrichir ce site Internet et à mettre au point notre liste d'envoi, qui permet de poser des questions et d'obtenir des renseignements par courriel. Les personnes dont le nom figure sur cette liste ne donnent pas de renseignements d'ordre médical, mais plutôt un soutien moral.

    Quand j'ai commencé à éprouver ce problème et que les symptômes sont devenus graves, on m'a dit que j'avais une otite interne. Puis on m'a dit que j'étais en ménopause, et après cela, on m'a dit que j'étais déprimée. Et après tout ce temps, car deux ans et demi s'étaient écoulés, j'étais effectivement déprimée et je pensais avoir perdu la raison. C'est vrai, parce que tout à coup je ne pouvais plus faire les choses que je faisais parfaitement auparavant. Je ne pouvais plus marcher dans le corridor sans m'appuyer sur les murs. Le simple fait de respirer prenait toute mon énergie. Ma maladie ressemblait beaucoup à la sclérose en plaques en ce qu'elle s'accompagnait d'une grande fatigue. On pense vraiment qu'on est en train de perdre la raison.

    Ce n'est que par accident qu'on a diagnostiqué la maladie dont je souffre. On m'a prescrit des examens par IRM dans le but de déterminer si mes symptômes étaient attribuables à la sclérose en plaques. Or, l'affection dont je suis atteinte ne peut être diagnostiquée que par IRM. Par conséquent, à moins de soupçonner la sclérose en plaques et de demander un test d'IRM pour la confirmer, les médecins ont peu de chances de découvrir la malformation de Chiari I.

  +-(1255)  

    C'est très difficile et on se sent très seule, on a même l'impression de devenir complètement folle. Peut-être le devient-on. Puis vous réalisez ce qu'est le problème et c'est un véritable soulagement.

    La contribution qu'elle a faite est phénoménale pour nous tous. Je voulais tout simplement savoir que je n'était pas complètement folle. Je suis parfaitement saine d'esprit. J'ai tout simplement cette condition stupide. Au moins je sais que je peux composer avec elle. De savoir ce qu'on a nous permet de nous adapter à notre nouveau style de vie, de composer avec notre problème et de redevenir ce qu'on était autant que possible. La contribution qu'elle a faite est donc phénoménale à cet égard.

    Je sais que bien des Canadiens victimes d'autres handicaps ont fait des contributions semblables et ce, à partir de leur vécu. Quelque chose leur est arrivé et ils ne savaient pas ce que c'était. Ils ont cherché des renseignements d'abord pour eux-mêmes et ont fini par en faire part aux autres. C'est vraiment d'un grand secours pour tout le monde.

    Très brièvement, je veux vous parler un peu de ce qu'est la malformation de Chiari I. C'est une malformation qui se caractérise par un trop grand nombre de cerveaux. C'est le noeud du problème. La partie arrière de votre crâne ne se développe pas complètement et, conséquemment, une partie de votre cerveau se retrouve dans le tronc cérébral. Puisque c'est à cet endroit que la plupart des fonctions corporelles sont organisées, cela a des répercussions sur toutes sortes de choses. Votre équilibre peut en souffrir et votre vision aussi. Les gens qui ont la Chiari I finissent souvent par avoir besoin d'une sonde gastrique. Comme ils ne peuvent plus avaler, ils doivent être nourris grâce à une sonde. Leur vision peut en souffrir beaucoup. D'autres fonctions sont aussi touchées comme la capacité de se rappeler, d'écrire ou même de s'exprimer.

    Une des pires conséquences de cette malformation est la perte du contrôle de sa température corporelle. Pendant des années, j'ai vraiment souffert de la chaleur et j'avais toujours très chaud. Pendant un certain temps, j'ai cru que j'avais des chaleurs, mais ce n'était pas le cas. C'était vraiment difficile, parce qu'en plein hiver, je circulais vêtue d'un pull. C'était comme cela que je m'habillais, et tout le monde me demandait où était mon manteau. J'en avais assez de toujours répondre «Occupez-vous de vos affaires». Cette malformation affecte vraiment la température du corps et bon nombre des gens, outre moi, sont aussi touchés.

    Soit dit en passant, cette pièce est fort agréable. C'est un des endroits les plus frais que j'ai fréquentés depuis longtemps. C'est fantastique.

    La Chiari I peut donc être vraiment débilitante. Elle peut même vous tuer. Cela n'arrive pas souvent, mais cela arrive quand même. Si votre cerveau descend beaucoup plus bas qu'il ne devrait l'être, ça peut vous tuer. Vous vivez dans cette crainte, mais bien des choses peuvent vous tuer, alors pour moi ce n'est pas là le problème. Il s'agit de trouver un moyen de vivre sa vie au maximum et de composer avec son handicap en même temps.

    À mon avis, l'essentiel, et je crois que la plupart des autres témoins seront d'accord avec moi, c'est de savoir de quoi on souffre. Une fois qu'on sait, on peut essayer de trouver des solutions. Mais jusqu'à ce qu'on sache ce qu'est le problème, on est dans le brouillard, c'est comme marcher dans le noir. Pour moi, la clé, c'est de savoir ce qu'est le problème.

    Ce matin, on a parlé de beaucoup de choses. On a parlé de santé mentale, de sclérose en plaques et de personnes handicapées qui ont de la difficulté à recevoir des prestations du RPC. Il y a tant de problèmes. Je constate que ce que vous faites revêt un aspect assez général. Ce que je vous présente aujourd'hui, c'est beaucoup plus précis—un tout petit aspect du tableau général. Vous avez un grand défi à relever, et j'espère que dans ce contexte, vous tiendrez compte des maladies et conditions qui sont peu connues et qui n'attirent pas beaucoup l'attention parce que peu de personnes en sont atteintes. Les gens atteints de ces maladies rares ont droit à une aide aussi.

    Je vous remercie de m'avoir accordé l'occasion de rédiger ce rapport et de vous en faire part.

·  +-(1300)  

+-

    La présidente: Au nom de tout le monde, je vous remercie beaucoup.

    Nous ferons une pause à 14 heures. Ceux qui le souhaitent peuvent venir avec nous à la Flamme du centenaire pour se faire photographier. Je crois que ce serait préférable que l'on voie la Flamme du centenaire dans les clichés.

    Une partie du travail de ce tout petit comité quasi parfait, est de faire connaître votre expérience. Les affections rares reçoivent peu d'attention et donc peu de financement pour la recherche, et je crois donc que c'est un privilège pour nous d'entendre vos histoires et de nous permettre de vous aider à faire davantage connaître ces maladies rares. Je vous remercie beaucoup de vous être déplacés.

    Il faut se remettre au travail. Je veux d'abord m'assurer que vous compreniez bien qu'un des objectifs de nos délibérations auquel nous espérons engager votre participation, est de poser des questions à la population et aux principaux intervenants. Nous espérons que vous accepterez de jouer le rôle d'un employé de la Bibliothèque du Parlement ou de député pour y réfléchir. Si vous étiez à la place des médecins, assureurs et représentants des commissions des accidents du travail de ce pays, que demanderiez-vous aux Canadiens qui reçoivent une pension d'invalidité du RPC ou qui s'inquiètent de perdre celle-ci ou qui sont trop malades pour interjeter appel d'une décision défavorable à leur égard? Quelles questions croyez-vous que nous devrions poser?

    Nous espérons que vous participerez aux activités à venir par le biais de notre site Internet ou en communiquant avec Mike, Bill et Kevin par écrit ou autrement. Nous, les membres du comité, essaierons de déterminer comment faire en sorte que le prochain chapitre de cette entreprise nous permette d'obtenir encore plus de renseignements.

    Peut-on tenter de mettre les questions que nous posons en contexte? Par exemple, que se passe-t-il lorsque quelqu'un est privé de prestations d'invalidité du RPC? George est au courant de ces difficultés, il sait que certaines maladies ne peuvent être dépistées par des tests en laboratoire, bien que la personne qui en souffre soit très mal et incapable de travailler malgré son désir. C'est une mesure d'aide que nous espérons obtenir pour tous les Canadiens.

    Nous souhaitons la bienvenue à la formidable Wendy Lill, qui est la conscience de ce comité. Elle était retenue par des délibérations sur la Loi sur la radiodiffusion ce matin. N'est-ce pas?

    Nous apprécierons toute forme de renseignement, même si nous n'obtenons pas de réponses détaillées à nos questions aujourd'hui.

    À présent, Stephanie, êtes-vous prête pour la grande question puisque j'ai sauté votre nom sur la liste des intervenants un peu plus tôt?

·  +-(1305)  

+-

    Mme Stephanie Nixon: Volontiers. J'apprécierais beaucoup.

    On a fait cette observation avant la pause du déjeuner, mais je vais tenter de la transformer en réponse à votre dernière question qui avait trait aux interrogations que l'on doit se poser.

    Je crois que nous savons tous que les prestations d'invalidité du RPC sont d'un grand secours pour les personnes handicapées. La question est donc la suivante: qui sont ces personnes handicapées qui sont mal servies par le régime? On a beaucoup insisté sur le fait qu'il fallait rencontrer les différents groupes servant aux diagnostics pour les interroger sur leur expertise. Nous avons entendu des arguments probants à cet égard, surtout du point de vue psychiatrique, psychologique et de la santé mentale.

    Bien que je croie que le recours aux groupes de diagnostic soit une façon de parvenir à nos fins, je crois que ce serait intéressant de se pencher sur le handicap lui-même aussi. Quelles sont les caractéristiques d'un handicap qui sont communes à tous les groupes?

    Je représente le point de vue des personnes atteintes du VIH et je puis vous dire que tout ce que j'ai entendu aujourd'hui est véritablement le reflet du quotidien des gens atteints du VIH pour qui la politique du RPC en matière d'invalidité est une constante préoccupation.

    Je voudrais renchérir sur les observations de Marg voulant que si l'on arrive à donner un nom au problème, on peut enfin commencer à composer avec lui. Je ne crois pas que cela surprenne qui que ce soit, surtout pas les gens qui travaillent au RPC. Ils sont déjà au courant de cela. Je voudrais insister là-dessus. L'un des défis de la Division de l'administration de l'invalidité est de bien servir les personnes qui ont des maux intermittents, imprévisibles, permanents et imperceptibles. C'est le lot de certains groupes représentés ici, je crois.

+-

    La présidente: Je voudrais aussi savoir s'il y a des groupes quelconques qui possèdent un inventaire des outils de mesure. Je pense que la fatigue est l'un des états les plus incapacitants, et pourtant nous ne la mesurons pas particulièrement bien. J'ai déjà été chargée d'aider des gens à témoigner ou à décrire dans quelle mesure ils étaient fatigués et en quoi cela leur avait rendu la tâche impossible, et ils avaient tendance à vraiment sous-estimer leur fatigue, même dans leur exposé circonstanciel. Qu'il s'agisse de l'hépatite C, du sida ou de la sclérose en plaques, ou encore de la fatigue chronique, il y a des outils que nous pourrions ou devrions avoir pour mieux définir la fatigue, comme nous le faisons dans le cas de la dépression.

    Je disais pendant la pause que j'ai eu une patiente qui avait trois cancers primaires différents et dont la demande a pourtant été rejetée, parce que chacun d'eux, à lui seul... Mais le critère de base était seulement cette fatigue débilitante qui me semblait un élément contribuant à la faiblesse caractérisée de son système immunitaire, ce qui fait qu'elle était vulnérable et qu'un autre cancer ou maladie quelconque pouvait à tout moment s'introduire dans son organisme.

    Nous devons par ailleurs déterminer si les instituts de recherche en santé peuvent nous aider dans certains dossiers. Y a-t-il des questions que nous devrions poser à la communauté des chercheurs multidisciplinaires en santé pour nous aider à faire du meilleur travail à long terme, pour que nous sachions ce que ces maladies peuvent avoir en commun, et qui peuvent nous éclairer sur la question de savoir si certaines personnes sont capables ou non de subvenir à leurs propres besoins. J'aimerais bien avoir de l'aide ou des exemples quelconques, parce que très souvent, notre travail de parlementaires consiste à prendre des éléments qui fonctionnent bien dans un secteur et à les transférer dans un autre secteur. J'aimerais bien avoir votre aide à cet égard.

    La question numéro un au palmarès est celle de l'admissibilité et de la définition. Avez-vous des observations à formuler là-dessus? Si l'on passe en revue la liste de Kevin—admissibilité, réadaptation professionnelle et prestations partielles, intégration, soutien et services, et financement—je pense que nous devons probablement nous assurer de ne pas oublier le financement, parce que si tout cela est dicté par une volonté absolue de contenir les coûts et de nous limiter à ce que nous pouvons nous permettre, ou la volonté de ne pas toucher au régime de retraite, ou bien certains arguments qu'il me semble avoir entendus durant les audiences préliminaires, il est évident que tout cela ne débouchera pas sur un programme optimal. Mais par ailleurs, si tout est fait de manière qu'un tel ne puisse faire de récupération ou qu'il soit obligé de le faire, ou pour que les primes d'assurance n'augmentent pas, ou bien... Nous devons nommer également tout cela.

    Pouvez-vous m'aider à cerner la définition? La définition devrait-elle être la même pour le crédit d'impôt pour personnes handicapées, le RPC et l'indemnisation des accidents du travail? On nous serine toujours la même chanson: «Pourquoi la définition est-elle différente?» Est-ce parce que nous continuons d'utiliser le mot «déficience» alors que nous devrions plutôt parler d'«incapacité» ou d'un autre concept? Devrions-nous trouver un autre mot à définir, ou bien devrions-nous établir une définition commune, ou bien devrions-nous passer une heure et demie tous les jours à expliquer aux gens pourquoi la définition est différente selon le programme?

    Laurie.

·  +-(1310)  

+-

    M. Laurie Beachell: La question de la définition de la déficience est celle qui est la plus complexe de tout notre ensemble de problématiques. Il nous est arrivé d'essayer de concevoir à des fins pratiques un genre d'évaluation médicale, un diagnostic qui fixe un état pathologique. Il nous est également arrivé d'utiliser un modèle de déficience fonctionnelle analysant la façon dont le diagnostic avait une incidence sur la vie quotidienne. Nous avons ensuite abandonné l'édifice médical pour adopter plutôt un modèle davantage social, un modèle qui conçoit la déficience comme un obstacle qui interpelle les victimes dans leur environnement.

    Je me refuse toutefois à préconiser une définition unique de la déficience qui vaudrait pour tous les programmes. La déficience doit être définie en fonction du programme correspondant. Par exemple, nous ne recommanderions pas que la définition de la déficience dans le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi soit la même que pour le Régime de pensions du Canada. Lorsque nous parlons d'emploi, nous parlons des obstacles à l'emploi. Lorsque nous parlons des prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada, nous parlons d'un revenu de remplacement pour ceux et celles qui faisaient partie de la population active mais qui sont désormais incapables de travailler à plein temps ou à mi-temps en raison d'une déficience.

    Dans le cas du système fiscal, nous ne parlons pas de la même chose non plus. Dans ce cas-là, il s'agit des gens qui, en raison d'une déficience, ont des dépenses supplémentaires qui peuvent être compensées par le jeu du système fiscal.

    Tout cela est donc extrêmement complexe, et le problème est que tout le monde cherche, dans cette définition, une formule magique. Mais lorsqu'il s'agit de définir la déficience, cette formule magique n'existe pas. L'envergure de la fonction, la taille des obstacles, ce qu'une personne en fauteuil roulant peut faire par rapport à une autre, ce qu'une personne souffrant d'un handicap mental peut faire par rapport à une autre, tout cela est tellement vaste que les obstacles eux-mêmes sont extrêmement individualisés.

    Tout ce que nous pouvons faire, c'est revenir à un principe quelconque affirmant que les modèles doivent être tels qu'ils peuvent donner des moyens aux gens qui sont victimes d'une déficience. Admettons par exemple que le guide du médecin ait été mis à l'essai auprès de personnes avec déficiences faisant partie d'un groupe cible—je ne pense pas cela ait été le cas, mais je me trompe peut-être—certains des problèmes que nous constatons pourraient être réglés. Nous aurions créé des solutions et nous serions arrivés à un meilleur entendement en mettant cela en pratique auprès de gens souffrant d'une déficience.

    C'est un peu comme le formulaire de crédit d'impôt pour personnes handicapées. Nous pourrions arriver à un meilleur résultat en en parlant autour de nous avant de changer le formulaire. C'est la même chose pour le guide du médecin dans le cas du RPC. Je pense que la collectivité a des réponses à cela, et je pense aussi que cette collectivité peut nous donner des outils pour traiter de ce problème.

    Cela pourra vous sembler un peu extrême peut-être, mais chaque partie du corps peut faire l'objet d'une déficience, et chaque maladie, chaque partie du corps humain est couverte par une organisation, n'est-ce pas? Vous allez donc avoir beaucoup de mal à faire la liste. Ce que vous devez faire, c'est regarder l'impact sur l'individu et, soyons francs, un système qui permettrait de déterminer cela sous l'angle médical ne sera pas nécessairement le meilleur. Nous savons tous que les médecins—en toute déférence—font un travail merveilleux, mais je suis persuadé qu'ils préféreraient s'occuper de la santé de leurs malades plutôt que d'être obligés à décider si un de ceux-ci doit recevoir une pension, un permis de stationnement ou un crédit d'impôt.

·  +-(1315)  

+-

    La présidente: Ou un permis de conduire.

+-

    M. Laurie Beachell: Ou un permis de conduire. Ce système n'est donc pas bon, et un médecin n'est pas vraiment un bon gardien lorsqu'il s'agit de déterminer un besoin. Certes, le milieu médical a quelque chose à apporter, mais il faut l'intervention d'un autre gardien, il faut aussi un processus de détermination qui ne soit pas à base médicale mais qui tienne plutôt compte des obstacles qui entravent la participation, au lieu de se contenter de dire je suis quadraplégique, et je souffre de telle ou telle maladie.

    Je dirais donc, s'agissant de la définition, qu'il n'y a pas de réponse facile et que nous n'avons pas intérêt à circonscrire les choses jusqu'à arriver à une définition unique.

+-

    La présidente: Dans votre intervention, vous avez parlé à la fois de la définition et de l'admissibilité. Je pense que c'est précisément ce que nous avions entendu à propos de l'étude DTC qui disait que les médecins n'étaient pas particulièrement heureux de la chose, et en particulier ceux qui exercent dans une petite ville et à qui il échoit de donner le feu vert ou non. C'est là quelque chose qui pèse lourdement sur la relation entre le médecin et son malade, et les médecins nous disent qu'il doit y avoir un autre moyen. Je parle ici du fait que ce sont eux qui doivent faire le bilan médical.

    Qu'en pensent nos spécialistes de la réadaptation? Pourriez-vous le faire mieux que les médecins?

+-

    Mme Donna Klaiman: Puis-je répondre?

    La présidente: Oui.

    Mme Donna Klaiman: J'aurais quelques réflexions à ce sujet et je voudrais revenir à deux questions que vous avez évoquées.

    En premier lieu, il nous faut une définition qui intègre les obstacles à la participation, et il nous faut aussi une définition qui tienne compte de la perte majeure et de la possibilité de pouvoir gagner sa vie à long terme par opposition à une déficience grave prolongée. Je suis donc un peu assise entre ces deux chaises, mais je pense également au fait que devoir décider du niveau d'aptitude et d'employabilité de quelqu'un est un fardeau très lourd pour le système médical.

    J'aimerais proposer une autre façon de concevoir l'activité, en l'occurrence en partant d'un modèle de performance professionnelle, c'est-à-dire le modèle qu'utilisent actuellement les ergothérapeutes au Canada. Nous regardons la vie quotidienne sous l'angle des activités. Les activités, c'est tout ce que les gens font pour eux-mêmes, pour profiter de la vie, occuper leurs loisirs et travailler, ainsi que les rôles que les individus assument pendant toute leur vie. Il faut que les gens puissent choisir leurs types d'activité.

    Peut-être la définition que nous utilisons pour le RPC ou tout autre programme doit-elle être suffisamment large afin de ne pas se limiter uniquement aux activités rémunératrices, mais plutôt de tenir compte de tout ce que les gens doivent faire, de tous les choix qu'ils peuvent exercer, en matière d'activités. Dans cette perspective, nous pourrions, je crois, maximiser la productivité et réduire au minimum les limites imposées au mode de vie, et ainsi empêcher une plus grande dépendance.

    Peut-être devrions-nous songer à l'expression «perturbation professionnelle» plutôt qu'à des termes comme «déficience» et «invalidité de longue durée».

    Je vous remercie.

·  +-(1320)  

+-

    La présidente: Peggy a une autre idée.

+-

    Mme Peggy Proctor: [Note de la rédaction: difficultés techniques].

¸  +-(1400)  

+-

    La présidente: [Note de la rédaction: difficultés techniques]...lorsque nous avons perdu le déterminant social, la dignité. En fait de bien-être, c'est en fait ce que nous espérons pour les Canadiens.

    Cam, vous allez nous dire ce que nous devons faire.

+-

    M. Cam Crawford: Je peux résumer ce qui a été dit.

    Mais laissez-moi d'abord faire une observation...[Note de la rédaction: difficultés techniques]Ce qui me frappe, c'est que pour pouvoir discuter de l'admissibilité, il faut d'abord élucider trois questions.

    Premièrement, la personne en question a-t-elle une déficience fonctionnelle, une limitation...[Note de la rédaction: difficultés techniques]. Puis il y a une seconde question, qui est celle-ci: dans le meilleur des scénarios, la personne en question pourrait-elle reprendre une activité quelconque au sein de la population active? C'est là une question fort différente, et qui nécessite pour y répondre l'intervention d'une personne toute différente ayant des habilités très différentes aussi.

    La troisième question est qu'étant donné qu'en temps réel...[Note de la rédaction: difficultés techniques]

¸  +-(1410)  

+-

     [Note de la rédaction: difficultés techniques]...au niveau provincial. Est-ce que cela provoque un nombre énorme de dossiers pour le RPC? Je ne vais pas m'étendre très longtemps sur la question de l'administration, mais ce qu'on a surtout fait valoir, c'est que le système ne donnait pas l'impression d'être très convivial, ne donnait pas l'impression d'être très efficace pour...[Note de la rédaction: difficultés techniques]...un peu comme un système policier, alors qu'il devrait donner l'impression d'être plus accommodant et plus chaleureux.

    Il faut également sensibiliser davantage les administrateurs du système, tout en reconnaissant qu'ils sont déjà très lourdement sollicités puisqu'ils doivent gérer énormément de dossiers tout en jugulant les coûts. Tous ces éléments doivent être circonscrits.

    Les auxiliaires et les services, le financement—nous avons maintenant une réserve de cinq ans pour les imprévus. J'imagine qu'à ce moment-là il faut impérieusement se demander si c'est une bonne idée. Cette réserve doit-elle être plus grosse encore? Faudrait-il relever les taux de cotisations? À l'heure actuelle, après 2003, les cotisations seront plafonnées. Le contribuable peut-il être davantage sollicité? Voilà toutes sortes de questions qui doivent être analysées.

    Une autre question qui n'a pas été évoquée est celle de ce qu'il en coûte d'empêcher les gens d'avoir un revenu suffisant. Le revenu est l'élément dont dépend le plus la santé. Si nous privons les gens d'un revenu décent et assuré, qu'est-ce que cela aura comme conséquence au niveau du stress, de la fatigue, de l'activité du système immunitaire, de la santé physique, des problèmes familiaux et, au bout du compte, d'un recours accru aux services de santé, aux services sociaux et aux programmes de santé mentale. Tous ces éléments ont un coût indéniable. Avons-nous analysé les implications financières de toutes ces coupures à court terme dans les dépenses associées aux programmes?

    Enfin, il y a quelques considérations d'ordre général. Lorsque vous vous réunirez pour arrêter les réponses à toutes ces questions, souvenez-vous de ce que vous demandait Sherri qui vous implorait de reconnaître qu'à l'heure actuelle, le système repose sur une excellente idée, une assurance universelle qui couvre quiconque a un travail rémunéré et paie sa part. C'est également une assurance transférable, dans la mesure où, peu importe où on se trouve au Canada, on est couvert. C'est une formule équitable dans le mesure où, à tout le moins, tout le monde est traité de la même façon. Cela ne veut pas dire pour autant que le système soit nécessairement juste, mais au moins qu'il est équitable.

    Il y a également l'indexation par rapport à l'inflation. En fait, j'avais une question à poser à ce sujet. Je pensais que les cotisations avaient été désindexées, mais qu'il fallait les indexer. Cela, c'est une observation d'ordre général. Pour un certain temps peut-être, il y a effectivement eu indexation. Désindexation? Pour la pension de retraite de base, certainement.

    Ainsi, quiconque réunit toutes les conditions est admissible. Il ne s'agit pas d'un programme de sécurité du revenu dans la mesure où les prestations sont proportionnelles au revenu. Ce n'est pas non plus un programme résiduel comme l'est le programme de bien-être social. Cela est donc excellent. Il y a également une procédure d'appel. Au moins peut-on se plaindre si on estime avoir été traité injustement.

    Nous devons nous attaquer aux points faibles du système et le principal de ces points faibles est précisément, à mon avis, toute cette série d'exclusions qui sont prononcées sur le plan administratif et qui dépendent des critères d'admissibilité.

    Voilà comment je résume la discussion d'aujourd'hui.

¸  +-(1415)  

+-

    Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Je veux d'abord vous remercier tous du temps que vous nous consacrez aujourd'hui. Ce n'est pas la dernière fois que l'on vous invitera, nous vous demanderons de nous accorder encore davantage de temps. Je trouve ce projet passionnant.

    Je voudrais vous raconter une histoire sur les handicaps et la flamme du centenaire. Je quittais le travail il y a deux semaines et, en approchant la flamme, j'ai aperçu un jeune homme sauter dans la fontaine pour en ressortir avec une poignée de pièces et s'enfuir. J'ai hurlé: «Ne faites pas cela, cet argent est pour les personnes handicapées!» En le regardant s'éloigner, j'ai constaté qu'il boitait, qu'il titubait, qu'il semblait ne pas s'être lavé depuis fort longtemps, et c'est alors que j'ai compris combien les handicaps étaient nombreux et divers. L'abus de substances, la pauvreté, le manque d'estime de soi étaient sans doute responsables de l'état de cet homme.

    Mes paroles flottaient dans l'air. Je me suis sentie bête, et j'ai compris qu'un individu lourdement handicapé quittait la flamme du centenaire avec une poignée de monnaie. J'ai vraiment réfléchi, j'ai repensé à ma définition des handicaps et à la santé et au bien-être. Nous n'avons certainement pas assez fait pour assurer le bien-être des gens.

    En terminant, je dirais que nous avons beaucoup de pain sur la planche. Je suis enthousiaste à l'idée de revoir notre façon de penser radicalement et, d'ailleurs, il faudra longtemps s'attarder au concept de l'aménagement des services. En gros, je crois que le plus important, c'est de s'assurer que l'on comprenne bien les besoins des personnes handicapées. Leurs besoins varient et il faudra se donner le temps de les comprendre. C'est notre plus important défi, qu'il soit question d'un enfant dans le système scolaire, d'une personne qui vient de recevoir un diagnostic de sclérose en plaques ou de n'importe quelle autre situation: il faut du temps et de la compassion. Je me réjouis de lancer ce projet et vous remercie sincèrement de votre participation.

+-

    M. Laurie Beachell: [Note de la rédaction: difficultés techniques]...je veux donc encore une fois remercier le comité. Votre travail soutenu est primordial et l'énergie que vous y consacrez fort appréciée.

    Je soulignerai au passage que j'ai raté une partie des discussions de la matinée puisque j'étais retenu au Comité des finances pour les consultations prébudgétaires. En ce qui a trait à un programme autofinancé, je crois que bien peu de Canadiens croient que le RPC arriverait à relever ce défi; il faudrait qu'il comprenne non seulement ce que sont nos besoins, mais qu'il comprenne notre raisonnement. [Note de la rédaction: difficultés techniques]...et c'est pourquoi je crois qu'il serait hasardeux de tenter de transformer le RPC en une fin des fins pour nos seuls objectifs. Bon nombre de nos objectifs sont, bien honnêtement, étroitement liés aux compétences provinciales et aux mesures de soutien si nécessaires aux personnes handicapées. Le RPC ne saurait être la solution à tous ces problèmes. Le programme d'invalidité du Régime de pensions du Canada peut sans doute être grandement amélioré, mais il ne sera jamais une panacée pour toutes les personnes handicapées au Canada, et je ne crois pas que nous voulions créer un programme qui le soit.

+-

    Mme Peggy Proctor: [Note de la rédaction: difficultés techniques]

¸  -(1420)  

-

    La présidente: C'est très bien.

    J'ajouterais aux observations de Laurie que lors de nos séances d'information sur le programme, on nous a laissé croire que peu importent les décisions que l'on prendrait au sujet de la pension d'invalidité du RPC, on ne nuirait pas au régime de retraite. Ce que Laurie essaie de nous faire comprendre, c'est que si on déclarait que tout le monde devait travailler jusqu'à l'âge de 67 ans, l'importance de nos ressources nous permettrait d'en faire davantage pour les personnes handicapées. J'espère qu'on ne se montrera pas trop intransigeant au cours de cette étude et que l'on tentera de trouver les solutions les plus adéquates pour tous les Canadiens et ce, dans le respect de leur dignité et de leurs droits civiques.

    Je vous remercie beaucoup d'avoir accepté notre invitation. Je crois que nous avons l'impression d'avoir pris l'entrée et que le plat principal nous attend; nous espérons que vous vous joindrez à nous pour le digestif. Merci beaucoup.

    La séance est levée.