Passer au contenu
;

HERI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent du patrimoine canadien


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 1er mai 2002




· 1305
V         Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.))

· 1310
V         

· 1315
V         Le président
V         

· 1320
V         M. Abbott
V         M. Wes MacAleer
V         

· 1325
V         M. Jim Abbott
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ)

· 1330
V         M. Wes MacAleer
V         Mme Christiane Gagnon
V         M. Wes MacAleer

· 1335
V         Le président
V         M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.)
V         

· 1340
V         M. Wes MacAleer
V         M. John Harvard
V         M. Wes MacAleer
V         

· 1345
V         M. John Harvard
V         M. Wes MacAleer
V         M. John Harvard
V         M. Wes MacAleer
V         Le président
V         M. Rodger Cuzner (Bras d'Or—Cap-Breton, Lib.)
V         M. Wes MacAleer

· 1350
V         M. Rodger Cuzner
V         M. Wes MacAleer
V         M. Rodger Cuzner
V         M. Wes MacAleer
V         M. Rodger Cuzner
V         M. Wes MacAleer
V         M. Rodger Cuzner
V         Le président
V         Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD)

· 1355
V         M. Wes MacAleer
V         Mme Wendy Lill
V         M. Wes MacAleer
V         

¸ 1400
V         Le président
V         M. Wes MacAleer
V         Le président
V         Mme Gretha Rose (présidente, Cellar Door Productions)
V         

¸ 1405
V         

¸ 1410
V         Le président
V         M. Jim Abbott

¸ 1415
V         Mme Gretha Rose
V         M. Jim Abbott
V         Mme Gretha Rose
V         M. Jim Abbott
V         

¸ 1420
V         Mme Gretha Rose
V         M. Jim Abbott
V         Mme Gretha Rose
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon
V         Mme Gretha Rose

¸ 1425
V         Le président
V         M. John Harvard
V         

¸ 1430
V         Mme Gretha Rose
V         M. John Harvard
V         Mme Gretha Rose
V         M. John Harvard
V         Mme Gretha Rose
V         M. John Harvard
V         Mme Gretha Rose
V         M. John Harvard
V         Mme Gretha Rose
V         

¸ 1435
V         M. John Harvard
V         Mme Gretha Rose
V         Le président
V         M. Rodger Cuzner
V         Mme Gretha Rose
V         M. Rodger Cuzner
V         Mme Gretha Rose
V         M. Rodger Cuzner
V         Mme Gretha Rose
V         M. Rodger Cuzner

¸ 1440
V         Mme Gretha Rose
V         M. Rodger Cuzner
V         Mme Gretha Rose
V         Le président
V         Mme Wendy Lill
V         Mme Gretha Rose
V         Mme Wendy Lill
V         Mme Gretha Rose

¸ 1445
V         Mme Wendy Lill
V         Mme Gretha Rose
V         Le président
V         M. Jim Abbott
V         Mme Gretha Rose
V         M. Jim Abbott
V         Mme Gretha Rose

¸ 1450
V         Le président
V         
V         Le président

¹ 1500
V         Mme Maria Bernard (présidente, Société Saint-Thomas-d'Aquin)
V         

¹ 1505
V         Le président
V         M. Jim Abbott

¹ 1510
V         Mme Maria Bernard
V         M. Jim Abbott
V         Mme Maria Bernard
V         M. Jim Abbott
V         Mme Maria Bernard
V         M. Jim Abbott
V         Mme Maria Bernard
V         M. Jim Abbott
V         Mme Maria Bernard
V         M. Jim Abbott
V         Mme Maria Bernard

¹ 1515
V         Le président
V         M. Jim Abbott
V         Mme Maria Bernard
V         M. Jim Abbott
V         Mme Maria Bernard
V         M. Jim Abbott
V          Le président
V         Mme Christiane Gagnon
V         

¹ 1520
V         M. Dominic Langlois (agent de liaison, Société Saint-Thomas-d'Aquin)
V         Mme Christiane Gagnon
V         Mme Maria Bernard
V         Mme Christiane Gagnon
V         Mme Maria Bernard
V         Mme Christiane Gagnon
V         Mme Maria Bernard
V         Mme Christiane Gagnon
V         Mme Maria Bernard
V         Mme Christiane Gagnon
V         M. Dominic Langlois
V         Le président
V         

¹ 1525
V         Mme Christiane Gagnon
V          Le président
V         M. Rodger Cuzner
V         Mme Maria Bernard
V         M. Rodger Cuzner
V         Mme Maria Bernard
V         M. Rodger Cuzner
V         M. Dominic Langlois
V         M. Rodger Cuzner
V         Le président
V         Mme Maria Bernard
V         Le président
V         Mme Maria Bernard
V         Le président
V         Mme Maria Bernard
V         Le président
V         M. Dominic Langlois
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon

¹ 1530
V         Le président
V         Le président
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon
V         Mme Christiane Gagnon
V         
V         M. Steve Stapleton (président, Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier)
V         Le président
V         M. Steve Stapleton
V         

¹ 1535
V          M. Ian Petrie (président, Canadian Media Guild)
V         

¹ 1540
V         

¹ 1545
V          Le président
V         M. Ian Petrie
V         Le président
V         M. Dan Viau (président, Section locale 21M, Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier)
V         

¹ 1550
V         Le président
V         M. Jim Abbott

¹ 1555
V         M. Dan Viau
V         

º 1600
V         M. Ian Petrie
V         M. Jim Abbott
V         M. Ian Petrie
V         Le président
V         M. Dan Viau

º 1605
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon
V         M. Ian Petrie
V         Mme Christiane Gagnon
V         M. Ian Petrie
V         M. Dan Viau
V         Mme Christiane Gagnon
V         M. Ian Petrie
V         

º 1610
V         Le président
V         M. Dan Viau
V         Le président
V         M. John Harvard
V         M. Dan Viau
V         M. John Harvard
V         M. Ian Petrie
V         

º 1615
V         M. Dan Viau
V         M. John Harvard
V         M. Steve Stapleton
V         M. Ian Petrie
V         Le président
V         

º 1620
V         M. Rodger Cuzner
V         M. Ian Petrie
V         Le président

º 1625
V         Mme Wendy Lill
V         M. Dan Viau
V         Mme Wendy Lill
V         M. Ian Petrie
V         

º 1630
V          Le président
V         M. Ian Petrie
V         

º 1635
V         Le président
V         M. Dan Viau
V         Le président
V         M. Ian Petrie
V         Le président










CANADA

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 059 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 1er mai 2002

[Enregistrement électronique]

·  +(1305)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): La séance est ouverte. Le Comité permanent du patrimoine canadien, the Standing Committee on Canadian Heritage, reprend ses audiences à Charlottetown relativement à l'étude du système de radiodiffusion canadien.

    Nous sommes extrêmement heureux d'accueillir aujourd'hui un collègue de l'Assemblée législative de l'Île-du-Prince-Édouard, l'honorable député Wes MacAleer.

    Vous avez la parole, monsieur MacAleer.

    M. Wes MacAleer (témoignage à titre personnel): Merci, monsieur le président.

    To you who speak French, welcome to Prince Edward Island.

    Je n'ai qu'une connaissance limitée du français, mais je tiens à vous souhaiter la bienvenue à l'Île-du-Prince-Édouard et à vous dire comme je vous suis reconnaissant d'être venus ici pour entendre nos vues sur cette question d'intérêt national.

    J'ai ici un texte que j'ai sans doute rédigé un petit peu à la hâte, mais j'y ai tout de même mis des observations dont j'aimerais vous faire part. Je vais vous en faire lecture.

    Je m'appelle Wes MacAleer. Je siège à l'assemblée législative provinciale comme député ministériel. Je représente le district 14, Charlottetown-Spring Park, et j'ai déjà occupé le poste de ministre du Développement et du Tourisme sous des gouvernements précédents. J'ai aussi été procureur général.

    Pour ce qui est de l'expérience que j'ai des médias, j'ai été un des pionniers du développement de la télévision par câble dans les Territoires du Nord-Ouest. Avec d'autres associés, j'ai fondé une entreprise à Yellowknife, dans les Territoires du Nord-Ouest, et j'ai été propriétaire de cette entreprise de 1970 à 1996. J'ai également eu une expérience intéressante, quoique brève, comme rédacteur en chef du Guardian de Charlottetown en 1995-1996. À l'époque, le quotidien était la propriété de la Thomson Corporation.

    Je tiens à déclarer d'entrée de jeu mon appui aux radiodiffuseurs privés. J'ai été de ce nombre, et j'ai une énorme dette de reconnaissance envers le secteur privé. Les radiodiffuseurs privés ont un rôle important à jouer. Il faut toutefois reconnaître qu'ils sont soumis à des limites financières quant aux émissions qu'ils peuvent offrir. En termes clairs, les radiodiffuseurs privés doivent faire un profit, et cette préoccupation primordiale limite leur capacité à se lancer sur des marchés peu rentables ou à promouvoir des idées comme l'édification du pays, qui rapporte un bénéfice à long terme.

    J'estime par ailleurs que nous avons besoin d'un réseau canadien de radiodiffusion publique, et je tiens à souligner l'importance du rôle du réseau public. C'est par les médias que les valeurs du pays et de la collectivité se définissent, et il s'agit là d'un rôle que remplissent la radio et la télévision de Radio-Canada ainsi que les services Internet.

    Dans mon exposé, je vais utiliser de manière interchangeable les termes «Radio-Canada» et «radiodiffuseur public».

    Je dois vous signaler par ailleurs que les opinions que j'exprime n'engagent que moi. Elles ne reflètent pas les vues des organisations dont je fais partie ni des personnes que je représente en tant que parlementaire élu.

    Le premier rôle de la radiodiffusion publique au Canada est de faire la promotion du Canada auprès des Canadiens et aussi de la communauté internationale. Le rôle du radiodiffuseur public canadien est multidimensionnel. En tant qu'institution canadienne fondamentale, Radio-Canada devrait jouer un rôle central dans la vie publique canadienne. La Société a la responsabilité de servir de lieu de convergence nationale, aidant les Canadiens à se comprendre les uns les autres et à comprendre leurs valeurs. Exception faite des contacts personnels, le radiodiffuseur public est l'acteur le plus influent quand il s'agit de faire la promotion du Canada auprès des Canadiens.

    Au fur et à mesure que le Canada grandit et se développe en tant que société multiculturelle, ses citoyens ont besoin d'un diffuseur qui représente la société multiculturelle et qui est perçu comme représentant cette société. Pour y arriver, il doit avoir à son service des personnes d'origines culturelles diverses qui travaillent, non pas seulement derrière la caméra, mais aussi devant la caméra en tant qu'intervieweurs, invités et artistes.

    Notre pays étant peuplé de gens d'origines et de cultures diverses, nous avons de plus en plus besoin d'organisations et d'activités canadiennes qui favorisent une convergence canadienne et qui contribuent à renforcer l'unité de la communauté canadienne.

    Pour bâtir une Équipe Canada, que ce soit dans le domaine du sport ou dans le domaine socio-économique, il nous faut une entreprise de radiodiffusion qui fasse la promotion de la mission de cette équipe, qui reconnaisse ses héros et ses héroïnes et qui suscite l'enthousiasme pour les réalisations canadiennes. Le Canada est un pays d'une grande diversité sur le plan de sa géographie et de sa population. C'est seulement en apprenant à nous connaître les uns les autres que nous pourrons comprendre et apprécier la force que nous donne la mise en commun de nos différences.

    L'image de la société canadienne doit aussi être reflétée dans d'autres pays, y compris aux États-Unis. Au fur et à mesure que le Canada multiplie les liens économiques et accroît la coopération militaire avec les États-Unis, il devient encore plus impératif de sauvegarder et de promouvoir les valeurs canadiennes et la façon canadienne de faire les choses.

    Pour qu'ils soient conscients des différences qui pourraient les diviser, pour qu'ils comprennent ces différences et qu'ils les mettent en valeur, les Canadiens ont besoin d'un radiodiffuseur qui leur offre une programmation susceptible de plaire à ceux pour qui la chose intellectuelle est importante. Le Canada a besoin d'un radiodiffuseur public qui puisse maintenir un niveau de discussion et de débat intelligent sur les questions sociales, économiques et politiques. Même si ce type de programmation n'attire qu'une minorité de Canadiens, il est essentiel que ceux qui sont en mesure d'influer sur les politiques d'intérêt public y aient accès et qu'ils y soient exposés.

    Pour contribuer à dégager un consensus sur le pays que nous voulons nous donner, il faut que les Canadiens puissent avoir leur mot à dire au niveau local ou régional d'abord. L'appui au radiodiffuseur public n'aura de sens pour le Canada que si ce radiodiffuseur a une résonnance à la base. Les collectivités canadiennes et les personnes qui les composent doivent être renseignées sur les affaires publiques qui les touchent localement afin de pouvoir prendre des décisions éclairées sur leur avenir. Pour que les collectivités puissent être informées sur leur vie collective, le radiodiffuseur public doit leur offrir une programmation locale qui favorise cette connaissance.

    Les Canadiens ne peuvent souscrire à une vision commune du Canada que dans la mesure où ils peuvent d'abord comprendre et apprécier leur communauté. Le Canada doit toutefois être plus qu'une communauté de communautés. Nous devons avoir en commun des valeurs et une vision qui nous définissent en tant que Canadiens.

    Bien que la tâche puisse paraître déroutante, Radio-Canada a réussi à jouer ce rôle. Les Canadiens ont du mal à accepter que les Nations Unies aient déclaré que le Canada est le pays où la qualité de vie est la meilleure au monde, et ils ont aussi du mal à accepter que Radio-Canada a rempli, au fil des générations, la plus grande partie des fonctions que l'on attend d'un radiodiffuseur public.

    En mai et juin de l'an 2000, les habitants de l'Île-du-Prince-Édouard ont protesté vigoureusement pour essayer d'empêcher que le temps d'antenne accordé à une émission télévisuelle de nouvelles locales de CBC appelée Compass ne soit réduit. Parmi les émissions de nouvelles de fin d'après-midi, Compass est celle qui avait les meilleures cotes d'écoute au pays. Alors que la part d'auditoire des émissions de nouvelles de fin d'après-midi de CBC était en baisse dans les grands centres urbains de l'Ontario, son émission diffusée à partir de Charlottetown a amené la population tout entière à se mobiliser pour la sauvegarder. La différence dans les parts d'auditoire s'explique peut-être en partie par le fait que, dans l'Île-du-Prince-Écouard, les gens sont déjà rentrés chez eux à cette heure, alors que les habitants des grands centres comme Toronto sont toujours en transit entre le travail et la maison.

·  +-(1310)  

+-

     Si les gens de l'île se sont mobilisés pour appuyer cette populaire émission de nouvelles télévisées, c'est qu'ils ont à coeur d'être informés sur les questions, les événements et les gens de chez eux. Il en va de leur survie en tant que communauté. Les personnes qui composent cette communauté ne sont pas toujours d'accord sur les équipes au sein desquelles elles travaillent ou pour lesquelles elles jouent ni sur les moyens d'atteindre l'objectif final, mais le désir qu'elles ont toutes de créer une communauté sûre, économique et viable l'emporte sur toutes les autres considérations.

    Pour débattre des questions d'actualité, comprendre les divergences qui les séparent et en arriver à un consensus, les membres de la communauté ont besoin d'avoir un lieu d'échange. C'est là un des principaux rôles du radiodiffuseur public. C'est ce rôle que jouait l'émission de CBC appelée Compass. En sa qualité de radiodiffuseur public, CBC doit renforcer sa programmation locale.

    L'Île-du-Prince-Édouard et Charlottetown ne sont pas uniques en ce sens. Les collectivités canadiennes que j'ai connues appuient leurs radiodiffuseurs locaux, tant publics que privés. L'émission radiophonique que CBC diffuse dans l'île de 6 h 30 à 9 heures et qui est animée par Wayne Collins et Karen Mair est un excellent exemple de programmation locale. On y présente une vaste gamme de questions, de personnalités et d'événements de la vie insulaire. À l'échelle nationale, ma femme me dit que l'émission matinale que la radio de CBC diffuse à la grandeur du pays est aussi une tribune de discussion informée sur les questions sociales, économiques et politiques.

    Quand j'avais mon entreprise de câblodistribution à Yellowknife, dans les Territoires du Nord-Ouest, notre chaîne communautaire locale avait beaucoup d'auditeurs dans cette petite collectivité. Les gens n'y voyaient pas un concurrent ni pour la télévision locale ni pour la télévision nationale de Radio-Canada. Même si, dans les années 90, nous distribuions plus de 100 chaînes des États-Unis et du sud du Canada, la chaîne locale était celle qui alimentait le plus les discussions locales.

    Notre succès était dû en partie à la collaboration que nous recevions du personnel local de Radio-Canada. J'insiste sur ce mot «collaboration», parce que, d'après ce que j'ai lu, les radiodiffuseurs privés de nos jours considèrent Radio-Canada comme un concurrent plutôt qu'un partenaire dans la prestation de services de radiodiffusion aux Canadiens. Ces frictions ne sont pas de bon augure pour la radiodiffusion et ne sont pas non plus dans l'intérêt des Canadiens.

    Le malaise actuel est attribuable en grande partie au fait que le radiodiffuseur doit dépendre autant des fonds privés que des fonds publics pour financer ses activités. Il se trouve coincé en raison de la baisse des fonds publics qui lui sont accordés d'une part et de la concurrence qu'il doit livrer, d'autre part, pour obtenir des revenus publicitaires commerciaux. D'où le dilemme de financement de Radio-Canada. Le trésor fédéral a réduit ses contributions tout en insistant pour que l'organisation joue un rôle de service public de plus en plus exigeant et qu'elle accroisse ses revenus publicitaires. Les radiodiffuseurs privés, qui sont bien mieux équipés pour aller à la chasse aux revenus publicitaires, insistent pour dire que Radio-Canada ne doit pas gruger ainsi leur unique source de revenus.

    Il faut que les Canadiens se rendent compte de l'ampleur de la tâche qu'accomplit Radio-Canada. Compte tenu de son revenu d'exploitation par habitant, de la taille du territoire qu'elle couvre et des dépenses liées à l'exploitation des nombreux transmetteurs dont elle a besoin pour joindre son auditoire, la Société fait un travail tout à fait crédible. Le réseau diffuse en anglais et en français, mais aussi dans un certain nombre de langues inuites et des Premières Nations.

    Au fil des générations, Radio-Canada a beaucoup accompli dans l'exercice du mandat que je viens de décrire et qui lui est dévolu en tant que radiodiffuseur public canadien. Il vaut la peine qu'on l'appuie à même les fonds publics.

    Le meilleur mécanisme de financement serait que le radiodiffuseur public tire tous ses revenus du Trésor en fonction d'une formule incitative qui tiendrait compte du mandat qui lui incombe de servir l'intérêt public. On ne peut pas demander à une entreprise d'assurer le niveau de service public que j'ai décrit quand elle doit compter sur les recettes publicitaires pour une bonne partie de son budget. Le mécanisme de financement à même les fonds publics devrait être protégé en partie par la voie législative afin d'éviter l'érosion du service assuré par le radiodiffuseur.

    En conclusion, il y a deux institutions qui définissent le Canada de nos jours: l'assurance-santé et Radio-Canada. Le moment est venu de repenser le mécanisme de financement de Radio-Canada. C'est maintenant qu'il faut agir.

    Merci.

·  +-(1315)  

+-

    Le président: Monsieur MacAleer, je sais que vous avez précisé dans votre exposé que vous témoignez devant nous, non pas en tant que membre de l'assemblée législative ou de quelque groupe que ce soit, mais en votre nom personnel. Par ailleurs, je tiens à vous dire que les membres du comité vous sont tout particulièrement reconnaissants d'avoir pris le temps de venir témoigner devant nous, car vos antécédents politiques et l'expérience que vous avez du monde médiatique sont tels que votre témoignage est important pour nous, d'autant plus que vous y abordez une question qui, l'an dernier, a beaucoup retenu l'attention du comité.

+-

     Nous avons tenu une audience spéciale sur l'élimination des émissions de nouvelles de fin d'après-midi dans les diverses régions du Canada, et les députés de la région atlantique se sont fait entendre avec véhémence, notamment Wayne Easter, qui était venu témoigner devant nous à l'époque pour bien faire comprendre à CBC l'importance d'émissions comme Compass et d'autres. Je suis donc heureux que vous ayez parlé de cela et que vous nous ayez fait des suggestions bien précises sur le financement de la Société Radio-Canada. Cela nous est très utile.

    Nous allons maintenant passer aux questions. Monsieur Abbott, allez-y.

·  +-(1320)  

+-

    M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne): Merci.

    Je tiens, moi aussi, à vous remercier de votre présence ici aujourd'hui. Au comité, j'ai la réputation de poser des questions que d'autres hésitent à poser. J'en ai deux à vous poser, et les deux sont liées.

    Premièrement, je ne dis pas du tout cela pour vous offenser, mais la population de l'Île-du-Prince-Édouard est inférieure à je ne sais combien de villes ou de régions métropolitaines du Canada. Je ne peux donc pas m'empêcher de vous poser la question suivante: dites-moi franchement, tout en reconnaissant le caractère unique de l'Île-du-Prince-Édouard, jusqu'où la société CBC devrait-elle aller pour financer, comme vous le demandez, des émissions spécialement destinées à la population de l'Île-du-Prince-Édouard? Nous sommes un groupe pancanadien représentant toutes les parties et toutes les régions du Canada, et il me semble qu'à ce titre nous devons pouvoir obtenir une réponse à cette question pour nos électeurs qui ne sont pas de l'île.

    La deuxième question découle de la première. Étant donné vos antécédents dans l'industrie du câble, dont vous nous avez parlé, si nous voulions trouver une solution novatrice, pouvez-vous imaginer une relation entre CBC et le câblodistributeur local qui ressemblerait à celle que vous aviez vous-même avec CBC à Yellowknife et qui nous permettrait peut-être de résoudre le problème sans devoir consacrer autant de ressources financières afin d'assurer une programmation locale? Je dis cela en sachant que tous les membres du comité sont très conscients du fait que tous les témoins que nous avons entendus nous ont implorés de reconnaître l'importance des questions locales et du service local. Je suis certainement acquis à cette cause, comme tous les autres membres du comité, et j'essaie de trouver une façon novatrice de pouvoir faire ce qu'on nous demande.

+-

    M. Wes MacAleer: En ce qui concerne votre première observation sur le fait qu'il est peut-être difficile de justifier un certain niveau de financement public pour des petites populations quand les dépenses par habitant seraient beaucoup plus importantes qu'elles ne le sont pour l'ensemble de la population, il me semble que le défi qui se présente à nous au Canada tient au fait que le nombre d'habitants n'a jamais vraiment été une considération dans la façon dont nous nous définissons comme pays. Nous nous définissons plutôt en fonction de notre géographie. Nous avons un pays immense qui s'étend sur un vaste territoire, sans doute le plus vaste ou le deuxième plus vaste au monde, et s'il fallait se mettre à déterminer les services devant être assurés à ceux qui peuplent ce vaste territoire en fonction de leur pourcentage de la population, nous n'aurions pas de pays.

    Je ne sais pas quand tout cela a commencé, mais chose certaine, s'agissant du vaste territoire qui s'étend au nord, et j'entends par là la partie nord du Canada, que nous revendiquons, si la répartition des revenus se faisait à raison de tant par habitant, nous n'aurions pas de droit sur ce territoire. Ainsi, il faut se demander s'il est important pour le Canada de revendiquer le territoire en question.

+-

     Est-il important d'avoir un Canada qui comporte des régions peu peuplées? Cela tient-il à coeur aux habitants des centres urbains d'avoir ces régions qui sont peuplées par des gens qui sont leurs compatriotes? Il me semble que ceux qui étaient là avant nous ont décidé qu'il valait la peine d'avoir ces régions, qui sont peuplées de Canadiens. Les gens sont prêts à payer le prix pour que ces régions-là soient habitées, même si elles sont peu peuplées et qu'elles n'ont pas les mêmes services que d'autres. Ces régions en valent la peine à cause de leur potentiel futur.

    Si nous nous étions posé la question au sujet des Territoires du Nord-Ouest pas plus tard qu'il y a 50 ans même, à l'époque où j'y vivais moi-même, aurions-nous su reconnaître que nous avions des diamants au lac Contwoyto ou encore d'importantes réserves pétrolifères dans la mer de Beaufort à ce moment-là? Pourtant, le Canada sera plus riche du fait qu'il a ces richesses naturelles et qu'il y a des gens qui vivent là-bas qui se disent canadiens.

    Vous avez parlé en particulier de l'Île-du-Prince-Édouard. Le défi qui se pose quand on reconnaît la place d'une région comme l'Île-du-Prince-Édouard est que les paramètres sont en quelque sorte les mêmes. Nous avons en outre une importance historique pour le Canada, puisque c'est chez nous que le pays est né. Nous avons également certaines formes de protection qui sont garanties par la Loi constitutionnelle en vertu de laquelle il faut déterminer le niveau de protection qui est offert aux diverses régions du pays. Ce niveau de protection doit être le même pour les habitants de l'Île-du-Prince-Édouard.

    Les câblodistributeurs et Radio-Canada peuvent-ils coopérer davantage dans l'exercice de leurs activités? Je pense que oui. Nous le faisions à Yellowknife, dans cette petite collectivité, mais nous le faisions à une époque où le secteur de la radiodiffusion n'était pas tout à fait aussi structuré que maintenant. C'est peut-être parce que ceux qui vivaient là et qui travaillaient soit pour Radio-Canada soit pour notre entreprise se connaissaient. Tout ce que je veux faire remarquer, c'est que nous avions dans le contexte que j'ai connu là-bas la possibilité de travailler en collaboration et que nous le faisions.

    Cela serait sans doute impossible de nos jours dans les grands centres, puisque la structure des entreprises, tant publiques que privées, est telle qu'elle ne favorise pas la collaboration. Chaque entreprise a son domaine d'activité, et on n'empiète pas sur le domaine de quelqu'un d'autre.

    Le problème peut-il être surmonté? Il peut l'être, mais il faudrait que l'initiative vienne d'en haut. Autrement dit, si l'on veut que le radiodiffuseur privé et le radiodiffuseur public collaborent, il faut que cela vienne de ceux qui, compte tenu de la vision qu'ils ont du secteur dans son ensemble, savent ce qu'ils attendent des deux parties et énoncent des mesures et un mandat clair à cet effet. L'initiative devrait d'après moi venir de nos dirigeants fédéraux.

·  +-(1325)  

+-

    M. Jim Abbott: Merci.

[Français]

+-

    Le président: Madame Gagnon.

+-

    Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Vous avez dit que CBC, au fil des ans, avait rempli son mandat. Par contre, certaines personnes nous ont dit que Radio-Canada ne remplissait pas tout à fait son mandat, par manque de financement ou à cause des nouvelles tendances en matière de programmation, et qu'elle faisait de moins en moins d'émissions qui reflétaient les différentes réalités au Canada.

    Vous parlez de vision commune, mais je remarque, depuis le début de nos audiences, que cette vision commune est très peu présente dans les différents commentaires. Par exemple, on a voté une Loi sur les jeunes contrevenants à laquelle s'opposait la société québécoise. Dans la région du député de l'Alliance canadienne, on s'opposait à la réglementation sur les armes à feu, alors qu'au Québec, dans les centres urbains, on y était favorable. Donc, la vision commune est difficile à saisir, et c'est peut-être ce qui explique que les gens aient de la difficulté à se reconnaître dans les différentes réalités qui ont cours au Canada.

    J'aimerais que vous nous parliez, de façon plus nuancée, de ces valeurs communes qui sont si difficiles à saisir aujourd'hui. Il existe toutes sortes de tendances, et je pense que chaque communauté essaie de tirer le plus grand profit possible des décisions qui sont prises.

·  +-(1330)  

[Traduction]

+-

    M. Wes MacAleer: Je crois avoir dit dans mon exposé que, si l'on veut faire en sorte que la radiodiffusion publique renforce l'unité de la société canadienne, il faut que ce moyen soit en contact avec la base, c'est-à-dire avec la population locale. Cet élément est très important, puisque les moyens de favoriser l'unité du Canada sont d'origine locale. Je vous donne des exemples.

    Qui aurait pensé que l'humour des Terre-Neuviens pourrait avoir une résonance à Kelowna ou à Vancouver? Qui aurait pensé que quelqu'un qui chante en français, comme Céline Dion, pourrait devenir une vedette internationale, sans même parler de sa très grande popularité au Canada? Dans nos collectivités canadiennes, nous avons des artistes et du contenu qui, si nous les partagions avec d'autres régions du Canada, peuvent être présentés de façon très attrayante. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de nous mettre en frais pour trouver l'artiste ou l'émission dramatique qui représenterait tout d'un coup, comme par magie, la perspective nationale.

    L'attrait et la créativité de nos artistes tiennent d'abord à la popularité qu'ils ont dans la collectivité qui est la leur, qu'il s'agisse de la communauté francophone, de la communauté sikh ou de Vancouver. Ces artistes sont le produit d'une expérience culturelle ou d'une expérience régionale, mais si on leur donne l'occasion d'exposer leurs talents et leurs compétences aux autres Canadiens, je suis prêt à parier que, dans bien des cas, ils seront applaudis et appréciés. Il faut toutefois qu'il y ait un moyen d'expression, un mécanisme, une technologie pour que cela puisse se produire, d'où l'importance du radiodiffuseur public.

[Français]

+-

    Mme Christiane Gagnon: Plusieurs témoins nous ont dit qu'ils voulaient voir à la télévision leurs valeurs à eux, les valeurs de leurs communautés. Pour ce qui est de la radio, les commentaires étaient moins tranchants parce qu'il est plus facile de faire de la radio.

    On nous a dit que ce que les gens voyaient venait du réseau national, de Toronto et de Montréal. Les gens demandent qu'il y ait plus de diffusion locale de productions locales et régionales. Comment pourrait-on avoir un équilibre entre ce qui provient du national et ce qui provient du régional? Les gens ne demandent pas que les productions locales soient diffusées sur le réseau national, mais bien que le réseau régional puisse produire et diffuser des nouvelles et des émissions qui leur ressemblent. Ce serait plus difficile de faire l'inverse, c'est-à-dire de diffuser les productions locales et régionales sur le grand réseau. Les gens à l'extérieur du Manitoba et du Québec nous ont dit qu'ils ne voulaient pas savoir ce que le Manitoba ou le Québec disait. Le Québec nous a dit la même chose. Il se demande pourquoi les nouvelles du Manitoba ou de l'Alberta seraient diffusées au Québec. Les gens du Québec veulent savoir ce qui se passe dans leurs localités respectives au Québec le soir même. Les fins de semaine, ils n'ont même plus Radio-Canada.

    Ce sont des commentaires de ce genre qui nous ont été livrés au cours de nos audiences. J'aimerais savoir comment vous percevez tout cela.

[Traduction]

+-

    M. Wes MacAleer: C'est finalement toujours une question d'argent. Si l'on a l'argent ou les moyens, il semble que l'on puisse le faire, mais quand on n'a pas les moyens, que fait-on à la place? Ou bien on réduit la qualité de ce qui est présenté, la qualité du produit, ou bien on demande à l'artiste ou au distributeur du contenu de programmation une contribution en nature.

    Vous dites qu'il est difficile de prendre la programmation locale et de la diffuser à l'échelle nationale parce que cette programmation n'intéressera peut-être pas les gens de Vancouver. C'est juste. C'est peut-être juste pour ce qui est des nouvelles ou des questions qui n'ont qu'un intérêt local, mais il y a tout de même des aspects du pays qui sont d'intérêt national, qui ont un caractère fédéral. Nous voulons sans doute en savoir davantage sur ces aspects-là. Il y a certainement des questions qui nous unissent, et ce sont celles-là qu'il faut présenter à l'échelle nationale.

    Quand je pense aux émissions de divertissement qui sont produites au niveau local, je me dis qu'on pourrait les diffuser plus largement et qu'elles pourraient intéresser bien des collectivités autres que celles d'où elles viennent. Quand il s'agit des actualités, des nouvelles politques, sociales et économiques, il est vrai que je ne m'intéresserai peut-être pas à ce qui se passe à Trois-Rivières ou à Kelowna, mais cela m'intéresserait énormément, par exemple, de savoir comment les gens de Trois-Rivières ou de Kelowna pourraient être touchés par le dossier du bois d'oeuvre, de savoir si ces gens ont des préoccupations relativement à l'assurance-maladie ou encore de savoir ce qu'ils pensent de la fiscalité ou du libre-échange. Ce sont là des questions qui nous touchent tous dans la mesure où nous nous disons canadiens, et ce sont ces questions-là qui devraient être présentées par les médias nationaux.

    Il y a aussi l'idée de présenter la perspective canadienne et la position du Canada sur certaines de ces questions par rapport à la position d'autres pays. Comment les Canadiens réagissent-ils à la mort de ces quatre soldats du régiment d'Edmonton? Ça, c'est une question nationale. Qui est là pour dire quelque chose à ce sujet dans le cadre de l'examen qui sera fait par la commission chargée d'enquêter sur cette affaire? Quelqu'un doit être là pour parler de façon positive de la participation canadienne à cette mission, et c'est Radio-Canada qui joue ce rôle d'après ce que j'ai pu constater. Le réseau CBC vient tout juste de présenter quelque chose sur ce sujet. Tous les Canadiens ont besoin de pouvoir vivre une relation comme celle-là, où qu'ils vivent et quelle que soit la langue qu'ils parlent.

·  +-(1335)  

+-

    Le président: Monsieur Harvard.

+-

    M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Merci d'être venu nous rencontrer, monsieur MacAleer.

    Je suis moi aussi un ardent défenseur de la radiodiffusion publique, et nous n'avons donc pas besoin de discuter de ses mérites. Je veux toutefois vous parler de la façon dont nous pouvons financer la radiodiffusion publique.

    J'ai passé 18 ans à la Société Radio-Canada. Je connais assez bien son histoire, et je pense que le mécanisme de financement qui existait dans les années 50 et 60 fonctionnait assez bien. Comme il arrive souvent, cependant, la Société a pris tellement d'ampleur que les représentants politiques à Ottawa ont trouvé alarmant de constater qu'on donnait un milliard de dollars à la radiodiffusion publique. On a donc voulu redresser la barre, et c'est malheureusement la radiodiffusion régionale qui a été le plus touchée par les compressions budgétaires. Je trouve cela regrettable, car j'estime que la radiodiffusion régionale est tout aussi importante pour le tissu national ou le réseau national que n'importe quelle autre composante.

+-

    Je me demande s'il ne faudrait pas essayer de trouver une nouvelle formule de financement pour Radio-Canada. Je ne dis pas que le gouvernement fédéral devrait se retirer du financement de Radio-Canada, mais je vais simplement vous parler de ce qui me préoccupe, moi, c'est-à-dire la situation au Manitoba.

    Le Manitoba est une assez grande province, du moins en fait de superficie. Thompson est une localité minière qui se trouve à 500 milles au nord de Winnipeg. Dauphin est une localité agricole située à quelque 250 milles au nord-ouest de Winnipeg. Brandon est une ville qui compte un peu plus de 40 000 habitants et qui se trouve à 130 milles directement à l'ouest de Winnipeg. Ces collectivités ont-elles vraiment leur mot à dire? Leur voix est-elle entendue par ceux qui décident du budget de Radio-Canada? Je ne le crois pas, pas de façon directe en tout cas. Bien sûr, la directrice régionale du réseau CBC y va de ses desideratas sur ce qu'il faudrait pour assurer la couverture de la province, pour ce qui est des nouvelles et des autres domaines, mais il me semble que ce n'est vraiment pas suffisant.

    Il y a des voix comme la vôtre dans ma province, les voix de bien des gens qui appuient la radiodiffusion publique. Ces voix sont celles de conseillers municipaux, de députés provinciaux comme vous-mêmes et, bien entendu, de représentants politiques fédéraux. Comment faire pour que ces personnes aient une voix pour qu'elles puissent se faire entendre non pas seulement sur la taille du budget, mais sur la façon dont il va être réparti entre les différentes régions du pays?

    Si l'appui à la radiodiffusion publique est aussi fort au niveau municipal que je souhaiterais qu'il le soit—et je suis sûr que nous nous entendons là-dessus—peut-être qu'il faudrait permettre aux municipalités de manifester leur appui de façon tangible et d'apporter une contribution financière. Il en va de même des provinces. Nous aurions quand même une loi fédérale sur la radiodiffusion et un système fédéral de radiodiffusion publique, mais nous trouverions le moyen de faire participer d'autres entités du pays afin qu'elles apportent un soutien accru à Radio-Canada.

    À moins que nous ne trouvions une nouvelle formule de financement pour Radio-Canada, je crois que ces problèmes vont demeurer. Je dirais même qu'ils vont s'aggraver. Y aura-t-il une espèce d'épiphanie sur la Colline du Parlement qui incitera les représentants politiques fédéraux à faire passer le budget de 1 milliard de dollars, mettons, à 2 milliards de dollars? Pas de mon vivant. Vous êtes bien plus jeune que moi, alors vous avez des chances de voir ce changement de cap, mais je ne pense pas que j'en serai moi-même témoin.

    Avez-vous des réflexions à nous livrer à ce sujet?

·  +-(1340)  

+-

    M. Wes MacAleer: Tout d'abord, vous avez évoqué le fait que la formule de financement qui existait autrefois semblait donner de bons résultats d'après votre expérience. Je suis aussi de cet avis.

    Le Canada a toutefois changé. Le milieu de la radiodiffusion privée s'est beaucoup amélioré, il est devenu bien plus sophistiqué et bien plus capable. Les radiodiffuseurs privés essayent en quelque sorte de faire la même chose que Radio-Canada, qu'il s'agisse d'émissions de divertissement ou de nouvelles, et je pense que, dans les grands centres urbains, ils servent assez bien la population.

    Le problème se pose toutefois aux extrémités du pays, où les marges pour les radiodiffuseurs privés ne sont pas aussi bonnes que dans les centres urbains. Il faut que nous décidions, en tant que Canadiens, si ces extrémités du pays sont importantes pour nous, qu'il s'agisse du nord du Manitoba, de l'Île-du-Prince-Édouard, de Terre-Neuve ou des îles au large de la Colombie-Britannique. Est-il important pour nous d'avoir ces vastes superficies, peu peuplées de Canadiens, à l'intérieur de ce que nous pourrions appeler la vision d'ensemble du Canada?

+-

    M. John Harvard: Vous et moi sommes d'accord là-dessus. Ces régions ont leur place.

+-

    M. Wes MacAleer: Oui, d'accord. Si nous nous entendons sur ce principe de départ, il faut alors se demander comment on peut servir cette population. Comment peut-on lui permettre de se faire entendre à l'échelle nationale? Le problème tient à une question d'argent et à la difficulté de joindre cette population. Le radiodiffuseur public a-t-il une certaine responsabilité pour ce qui est d'assurer le service à cette population? J'estime que oui, mais j'ai surtout voulu parler de l'importance du rôle de la radiodiffusion publique dans mon exposé. Je ne sais pas; je n'ai encore entendu personne dire que Radio-Canada a un mandat national, que la Société a une responsabilité à cet égard et que nous pensons qu'il vaut la peine de prendre des fonds publics pour qu'elle puisse s'acquitter de son mandat.

+-

     On critique sans cesse Radio-Canada pour ses effectifs trop nombreux, trop bien payés, etc., mais personne ne semble parler du mandat qui est celui de cette organisation. Son mandat, d'après moi, est d'abord et avant tout de faire la promotion du Canada. C'est très vaste, et je sais que la tâche paraît confondante, mais il me semble que des gens intelligents devraient pouvoir se réunir et dire: nous voulons bâtir ici une institution qui sert le Canada, qui suscite un sentiment de fierté chez les Canadiens et qui représente le Canada à l'échelle internationale. Voilà la première tâche. Votre question est de savoir qui devrait être inclus dans la prise de décision et comment cela pourrait se faire. Cette inclusion ne se fera d'après moi que dans la mesure où ceux qui détiennent les cordons de la bourse publique voudront qu'elle se fasse.

    Vous dites qu'il y aurait un moyen d'assurer aux municipalités, aux petits câblodistributeurs ou aux petits radiodiffuseurs un moyen de participer. C'est une excellente idée, une idée que nous avons mis en pratique à Yellowknife. Le problème qui se pose toutefois tient au fait que le réseau CBC ne voit pas d'un très bon oeil ce genre d'initiative. Voilà le problème. Vous ne serez peut-être pas d'accord avec moi là-dessus, mais...

·  +-(1345)  

+-

    M. John Harvard: Je ne dis pas que le fait de se lier avec les radiodiffuseurs privés va mener bien loin. Il pourrait y avoir davantage de collaboration, mais j'aime à penser que le système de radiodiffusion public devrait pouvoir se tenir debout tout seul.

    La formule de financement actuel ne fonctionne plus. En tout cas, elle ne donne pas de bons résultats pour les régions, et je voudrais pour ma part que quelqu'un trouve un moyen de nous sortir de ce pétrin. Ce n'est pas sur la colline du Parlement que cela va se faire.

    Il me semble qu'il y a beaucoup de Wes MacAleers au Canada; ils sont légions.

    M. Wes MacAleer: Je l'espère bien.

    M. John Harvard: Je pense que vous êtes nombreux, mais vous n'êtes pas sur la scène politique fédérale. Ce n'est pas que je vous en fais le reproche. Vous vivrez sans doute longtemps. Mais il faut trouver un moyen de permettre à ceux qui ont la même conviction que vous et moi d'avoir leur mot à dire dans l'établissement des grandes orientations et de participer aux décisions budgétaires et faire en sorte que la programmation régionale reçoive plus de fonds. Voilà ce que je trouve confondant.

+-

    M. Wes MacAleer: Oui, et si les Canadiens veulent qu'il en soit ainsi, il en sera ainsi.

    Vous me demandez ce qu'il faudrait faire pour accroître l'enthousiasme des Canadiens à l'égard du système de radiodiffusion public? Tout ce que je peux répondre, c'est que c'est tout un défi.

    Je sais que, quand le service local a été réduit ici, la population s'est mobilisée pour appuyer ce service parce qu'il lui tenait à coeur. Ce service était à elle, elle y tenait.

+-

    M. John Harvard: Pensez-vous, monsieur MacAleer, que, s'il avait fallu, mettons, 250 000 $ ou peut-être même 500 000 $ de plus pour garder l'émission, pour qu'elle continue à occuper une heure complète, les habitants de l'Île-du-Prince-Édouard auraient été prêts à payer de leurs poches?

+-

    M. Wes MacAleer: La question est très intéressante. Je pense bien que la réponse serait favorable. Je ne voudrais toutefois pas me hasarder à dire dans quelle mesure on l'a fait savoir. Je suis désolé, je ne le sais pas, mais je sais que la réponse aurait été favorable.

+-

    Le président: Dans l'intervalle, nous allons cloner MM. MacAleer et Havard en de nombreux exemplaires.

    M. Cuzner.

+-

    M. Rodger Cuzner (Bras d'Or—Cap-Breton, Lib.): Si vous me permettez de vous demander de vous éloigner un peu de votre exposé pour reprendre pendant un moment votre rôle de député provincial, j'aimerais que vous nous parliez du développement des artistes ou même du développement de la télévision et du cinéma ici dans l'Île-du-Prince-Édouard. Nous avons pu constater qu'il existe des possibilités de développement d'idées et de projets dans diverses autres provinces. Y a-t-il des possibilités semblables ici grâce à l'appui de ministères gouvernementaux ou...

+-

    M. Wes MacAleer: Un centre des TI de 20 millions de dollars est actuellement en construction dans la grand-rue de Charlottetown; il se consacrera à la production sonore et visuelle.

·  +-(1350)  

+-

    M. Rodger Cuzner: Qui sont les participants dans cette affaire?

+-

    M. Wes MacAleer: La province.

+-

    M. Rodger Cuzner: La province toute seule?

+-

    M. Wes MacAleer: Eh bien, quand je dis «la province», je veux dire qu'elle est le premier bailleur de fonds. On annonce régulièrement des participants du secteur privé et on espère que des entreprises de logiciels et de production Internet loueront des locaux. À l'heure actuelle, je dirais que les trois quarts de l'espace sont loués.

    On y a fait des productions—un ensemble de productions pour Anne aux pignons verts et un certain nombre de commerciaux pour la télé. Le problème pour l'Île-du-Prince-Édouard, c'est que nos collègues des autres provinces ont une longueur d'avance. La Nouvelle-Écosse fait beaucoup de choses. Nous espérons pouvoir collaborer avec elle dans d'autres domaines, dans d'autres provinces, pour nous occuper d'une partie de la production, puisqu'elles connaissent du succès. Jusqu'à ce jour, nous n'avions pas d'installations dotées de la technologie la plus moderne. Nous avons procédé par tâtonnement. On a réussi à concentrer nos énergies en construisant cette installation. Nous allons donc être actifs dans ce domaine et plus encore dans l'avenir.

+-

    M. Rodger Cuzner: Est-ce que d'autres créateurs demandent à y participer? Comme député ministériel, vous recevez sans doute des demandes de partout, mais êtes-vous sollicité dans d'autres secteurs?

+-

    M. Wes MacAleer: Il y a deux choses ici. Il y a la technologie, qui vous permet de créer une impression, une expression de cette réalité. Il y a aussi l'élément créateur, l'élément humain. L'île a la chance d'avoir des gens les plus créateurs qui soient. La difficulté, évidemment, est de transformer cette créativité en quelque chose que quelqu'un va apprécier. Nous avons des raconteurs, des écrivains et d'autres encore. C'est en partie parce que les créateurs comptent en général les moins fortunés. Ils viennent dans l'Île-du-Prince-Édouard parce que la vie n'est pas chère et que nous avons une bonne qualité de vie. Si on est pauvre, on se tire sans doute mieux d'affaire dans l'Île-du-Prince-Édouad, mais vous pouvez aussi exprimer...

    M. Rodger Cuzner: Je viens du Cap-Breton, compris? Il y a beaucoup de créativité là aussi.

    M. Wes MacAleer: C'est vrai pour toute la région du Canada atlantique.

    Il y a beaucoup de gens dans l'Île-du-Prince-Édouard capables de se distinguer au niveau national et même international. Il s'agit de trouver le moyen de faire apprécier leur créativité. Nous espérons que ce centre nous permettra de le faire, au moins en partie.

+-

    M. Rodger Cuzner: C'est très intéressant.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Madame Lill.

+-

    Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Merci, monsieur le président.

    Je vous remercie d'être venu aujourd'hui. J'ai apprécié l'échange que vous avez eu avec M. Harvard à propos du financement de Radio-Canada. Il est bon de rappeler que la BBC consacre 7,5 milliards de dollars à son réseau public et le nôtre, 750 millions, soit le dixième. Pourtant, notre pays est beaucoup plus étendu. Nous avons un territoire immense et il est encore plus nécessaire pour nous de permettre aux diverses parties du pays de communiquer. Je pense donc qu'il faut un énorme engagement—politique, social et culturel—en faveur de la radiodiffusion publique, et pour cela il faut de l'argent.

    Vous me semblez bien informé et réfléchi et vous vous intéressez à la scène nationale; j'aimerais savoir si à votre avis le radiodiffuseur public a réussi à représenter les personnes handicapées, les Autochtones et le caractère multiethnique du pays. Ce sont trois groupes de la population qui sont avares d'éloges. Vous qui vous intéressez à toutes les dimensions du pays, qu'en pensez-vous?

·  +-(1355)  

+-

    M. Wes MacAleer: Je vais m'abstenir de répondre à propos des personnes handicapées parce que je ne connais pas aussi bien leur situation que je le devrais.

    Pour l'Île-du-Prince-Édouard, un des éléments les plus réussis chaque année est la campagne de souscription du timbre de Pâques diffusée par le réseau CBC. Les fonds sont destinés aux personnes ayant une déficience physique ou intellectuelle. Nous avons eu tellement de succès cette année que des gens sont venus de Vancouver pour paraître à l'émission parce qu'ils y croient et qu'ils savaient que grâce à CBC leur talent sera mis en valeur. Comment cela pourrait se faire à l'échelle nationale, je ne sais pas. Je ne peux vous parler que de ma région.

    Quand j'étais dans le Nord, j'ai participé à la création de la télévision dans cette région, TVNC, dont le siège a fini par être établi à Iqaluit. Nous avions trois liaisons montantes, agencées par Telesat, dans le but de diffuser les émissions autochtones dans l'est de l'Arctique, à Yellowknife et à Whitehorse. J'ai quitté le Nord avant 1996. Même si j'ai participé à la création du réseau, j'ai jugé à l'époque que la grosse difficulté allait être le contenu. La technologie était en place pour diffuser les émissions. J'ai vu des réalisations du réseau très réussies, comme les Jeux d'hiver de l'Arctique à Iqaluit. Je pense donc que la programmation autochtone à la télévision a fait beaucoup de progrès.

    Un des plus gros problèmes que nous avons eus au réseau CBC pour la diffusion d'émissions autochtones a simplement été de trouver des animateurs capables de s'exprimer dans les diverses langues à la radio. Nous ne nous occupions que de la radio. Comme vous le savez, il n'y a pas d'homogénéité des langues autochtones dans le Nord. Il y en a six ou sept. Que ce soit le dogrib, le slavey, le hare ou l'inuktitut, il faut des gens qui puissent s'exprimer de façon professionnelle. La plus grosse difficulté était de trouver des gens capables d'être formés et de parler à la radio. La technologie de diffusion, elle, existait. J'ai trouvé que CBC avait fait de l'excellent travail. Certaines des meilleures émissions que j'ai entendues dans le Nord ont été faites par des radiodiffuseurs autochtones. J'essaie de me souvenir de leurs noms. Je suis certain que certains d'entre eux sont toujours là.

    Pour avoir participé à la radiodiffusion autochtone, je dirais qu'elle a eu beaucoup de succès. Pour vous donner une idée de ce succès, je vous dirai que quand je suis parti, la population blanche se plaignait que les Autochtones avaient trop de temps d'antenne.

    Y avait-il autre chose?

+-

    Mme Wendy Lill: Un autre élément du mandat de Radio-Canada est la programmation multiethnique. Vous qui êtes à l'écoute et surveillez ce qui se passe, pensez-vous que ces groupes soient bien servis?

+-

    M. Wes MacAleer: Ce dont je me souviens le plus, c'est là où nous étions le 11 septembre. Sur les chaînes américaines, c'était des Blancs anglo-saxons qui commentaient l'événement. À CBC, on interviewait des gens de diverses cultures, ce que j'ai trouvé être de bon goût, différent et particulier.

+-

     Au moins, cela ne venait pas remplacer ce que l'on entendait ou voyait à la télévision américaine mais c'était un contraste rafraîchissant par rapport à ce qui était présenté là-bas. Cela m'a donné un point de vue sur l'événement que je n'aurais pas eu si Radio-Canada n'avait pas existée. C'est ce qui nous définit comme Canadiens. Chaque événement a plusieurs facettes et nous nous attendons à ce que le radiodiffuseur public nous les présente.

    Nous sommes un peuple inquisiteur, en tout cas je l'espère. J'espère que nous voulons bâtir une démocratie qui examine les questions sous divers angles.

¸  +-(1400)  

+-

    Le président: Monsieur MacAleer, je vous remercie énormément d'être venu aujourd'hui nous aider dans nos travaux. Vous nous avez beaucoup aidés. Nous espérons pouvoir rester en contact et si vous avez d'autres réflexions à propos du financement de Radio-Canada ou de toute autre question, n'hésitez pas à communiquer avec le comité.

+-

    M. Wes MacAleer: Je veux dire qu'à mon avis, votre travail comme institution nationale qui examine le Canada est très précieux et je vous souhaite du succès dans votre travail de consultation des citoyens.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    J'invite maintenant à comparaître Mme Gretha Rose de Cellar Door Productions. Madame Rose, merci d'être venue. Nous avons entendu parler de vous hier lorsque nous sommes allés visiter Digital Bliss. On nous a dit de bien vous écouter parce que vous avez beaucoup à dire. Nous sommes donc très heureux de votre présence parmi nous. Je vous cède la parole.

+-

    Mme Gretha Rose (présidente, Cellar Door Productions): Merci beaucoup.

    J'ai une certaine notoriété, j'imagine. Selon M. Abbott j'ai tendance à dire ce que les autres ne disent pas. J'espère que cela pourra aider le comité.

    Tout d'abord, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de m'avoir invitée à participer à l'étude de l'état du système de radiodiffusion canadien conformément au mandat qui m'a été communiqué.

    Aujourd'hui, je vais parler des questions fondamentales que sont l'état et l'avenir du contenu canadien et de la diversité culturelle, et en particulier les questions de l'étude, à savoir l'état actuel et l'orientation future du système de radiodiffusion canadien. Je me situerai dans le contexte de CBC et de tous les radiodiffuseurs privés ainsi que d'autres fournisseurs de contenu comme Internet. J'ai essayé de ne pas déborder du cadre des thèmes à discuter, ce qui n'est pas une mince affaire, je vous l'assure.

    Je vais faire mon exposé en anglais seulement et je m'en excuse.

    Le président: Vous n'avez pas à vous excuser de ne pas parler les deux langues.

    Mme Gretha Rose: D'accord.

    Je vous donnerai aujourd'hui le point de vue de la propriétaire d'une compagnie de production canadienne, qui réside dans le Canada atlantique, qui crée et finance des dramatiques pour les enfants et des documents télévisés sur les habitudes de vie au moyen de coproductions provinciales, interprovinciales et internationales. Cellar Door se charge également à l'interne du plus gros de la distribution sur le marché international.

+-

     Je connais l'industrie et son fonctionnement. Je pense avoir un point de vue représentatif de son ensemble et non pas d'un de ses éléments seulement. Je suis chef d'entreprise depuis 20 ans, dont cinq dans ce secteur. J'ai une bonne connaissance pratique des modèles de gestion dans le cadre privé et public.

    Il faut examiner les questions centrales et se pencher sur les nombreuses facettes des divers organismes de réglementation, programmes, bailleurs de fonds ainsi que leurs objectifs et critères propres à chacun. C'est un labyrinthe que la propriétaire d'une maison de production que je suis ne peut pas affirmer connaître à fond. J'ai vite appris dans ce domaine que personne ne le connaît à fond.

    À bien des égards, les lois, structures et politiques actuelles étaient et sont honorables et reflètent de bonnes intentions. Mais combinées à beaucoup de politiques et programmes fédéraux-provinciaux actuels, comme le BCPAC, le FCT et d'autres sources de financement provincial et privé, ainsi que les politiques budgétaires actuelles des entreprises concernant les bénéfices et le recrutement de radiodiffuseurs et de câblodistributeurs canadiens—celles-ci se nuisent. À mon avis,elles ne permettent pas de protéger, enrichir ou renforcer le tissu culturel, politique, social et économique du pays, et ne favorisent pas l'expression canadienne au moyen d'un vaste éventail d'émissions. Elles ne créent pas l'environnement permettant l'apparition d'un vedettariat canadien et ne s'adaptent pas facilement à l'évolution scientifique et technique.

    Nous avons vu de tentatives analogues au Royaume-Uni pour protéger les politiques culturelles. Celles-ci ont été remplacées par une politique plus «industrielle», dans le but de protéger, maintenir et élargir une base nationale vigoureuse de production. Cela répond au besoin d'une expression artistique libre—pas des politiques sur le contenu, qui nuisent à la croissance de l'industrie, des entreprises et du radiodiffuseur public-privé.

    Actuellement, il est quasiment impossible pour moi-même et beaucoup d'autres dans notre pays de financer des émissions qui répondent à 100 p. 100 aux exigences en contenu canadien à cause des besoins contradictoires des bailleurs de fonds, des radiodiffuseurs eux-mêmes et des distributeurs. Non seulement le BCPAC, le CRTC et le FCT ont des mandats et des exigences contradictoires mais les fenêtres sur le monde—les radiodiffuseurs—n'adhèrent pas nationalement et internationalement à un modèle économique sur quelque chose d'aussi restrictif que le contenu canadien et la diversité culturelle.

    Le coût d'obtention du permis de diffuser est basé sur un minimum d'heures de contenu canadien. Le minimum est aujourd'hui devenu le maximum. L'accent est mis sur les bénéfices et cela signifie acheter le plus possible de projets commerciaux avec des artistes de réputation internationale. Il s'agit souvent d'émissions américaines.

    Le coût des permis et de la participation à la production canadienne est considéré comme le prix à payer pour avoir le privilège financier d'être le réseau ou le radiodiffuseur canadien. Ce n'est pas un environnement très favorable ou encourageant pour développer une industrie, basée ou non sur la culture.

    La mondialisation et les coproductions internationales sont maintenant un moyen coûteux et très compliqué de financer nos projets. L'attrait dans bien des cas, c'est que cela permet de contourner le système du contenu canadien. En partie, les radiodiffuseurs canadiens veulent que les productions à gros budget soient certifiées comme coproductions internationales pour que leurs droits de licence soient plus bas et pour pouvoir accumuler plus de points. Ils veulent avoir accès à des artistes étrangers qu'ils peuvent assimiler à des Canadiens grâce à ces coproductions certifiées tout en profitant des crédits PDD et autres encouragements financiers.

    Pour plusieurs de mes projets, on m'a demandé, dans le cadre du développement, de trouver un partenaire étranger pour assouplir les exigences de contenu canadien. On fait cela pour attirer des artistes de l'extérieur du pays— les faire venir pour travailler à un projet—pour que la production puisse être qualifiée de production canadienne et recevoir des fonds et de l'aide à la radiodiffusion. Cela vaut pour les radiodiffuseurs publics et privés.

    J'ai une grande série de plus de 5 millions de dollars pour chaque tranche de 13 épisodes. Nous avons maintenant fait trois saisons et commençons notre quatrième. Il a fallu que je prenne la majorité du travail du Canada et que je fasse une coproduction internationale pour avoir droit au pourcentage de radiodiffusion et au financement canadien.

    Le nombre de fusions réduit le nombre des gardiens de l'accès--les fenêtres sur le monde--et beaucoup de permis sont aujourd'hui accordés à de grandes entreprises aux antécédents établis dans le financement sur les marchés internationaux. Les règlements sont perçus comme des obstacles, et des permis sont donnés à des productions qui ne sont pas à haut risque FCT ou limitées par la réglementation sur le contenu canadien. Cela nuit à la diversification nationale et à la représentation culturelle.

    Comment peut-on dépeindre du contenu visiblement canadien et la diversification culturelle quand la majorité des productions viennent du centre du pays ou quand on laisse des vedettes et artistes étrangers être considérés comme des Canadiens?

¸  +-(1405)  

+-

     Rien n'oblige les radiodiffuseurs à retransmettre une partie de leurs émissions en provenance des régions. Les régions n'ont pas normalement accès au Canada central où toutes les décisions sont prises, et encore moins aux marchés internationaux pour assembler des coproductions internationales. À mon avis, la représentation régionale n'existe pas.

    En ce qui concerne le vedettariat pour renforcer la base d'artistes, nous avons l'un des pires environnements qui soit pour développer cette base. Il n'y a pas de vedettariat canadien. On ne dépense pas d'argent pour promouvoir les émissions ou les vedettes canadiennes. Si nous ne sommes pas alignés sur des distributeurs, et le fait qu'il faut remplir toutes ces conditions canadiennes, il n'y a pas d'intérêt sur le marché international.

    Pourquoi ne pas créer un environnement où l'on peut relater des récits commerciaux solides, où la production augmente et où les artistes ont l'occasion d'être vus à l'étranger? Est-ce que les compagnies et les artistes qui ont du succès ne peuvent pas faire partie de l'identité canadienne? Les cotes d'écoute sont un facteur important du financement et font partie des critères du FCT. On me dit qu'on leur accordera encore plus d'importance la prochaine fois. Pourtant, le CRTC n'oblige pas les réseaux à promouvoir leurs productions et leurs vedettes pour que nos productions et nos artistes atteignent le sommet.

    Actuellement, EIP ou Téléfilm et d'autres bailleurs de fonds ont des exigences en matière de recouvrement. Comment avons-nous fait cela? Comment est-ce qu'une politique culturelle peut avoir une exigence industrielle de recouvrement? Les nouvelles technologies rendent encore plus difficile la situation actuelle avec les radiodiffuseurs. Ces derniers essaient maintenant de s'approprier les portions Internet des productions et compromettent les droits de l'Internet. Ils veulent inspirer la crainte plutôt que de se baser sur un modèle commercial solide en vue d'une exploitation plus rigoureuse. La même chose s'est produite tout au long de l'histoire: la télévision devait sonner le glas de la radio, l'ordinateur le glas de la télévision, les vidéos celui des films.

    Ces nouvelles technologies devraient être un mode supplémentaire de distribution, une nouvelle interface pour les productions nouvelles et remises en circulation. Pourtant, on ne nous autorise pas à les adopter et à réaliser tout notre potentiel. L'arrivée de plusieurs nouveaux programmes de radiodiffusion axés sur les productions convergentes viennent s'ajouter à ce qui existe déjà. Les réseaux Internet sont davantage neutralisés. C'est actuellement perçu essentiellement comme une façon de prendre le droit d'auteur et de forcer les producteurs à ne pas se servir des fonds actuels du FCT.

    La question n'est pas de savoir si la méthode actuelle de fixer les exigences de contenu canadien est toujours adaptée aux nouveaux médias. C'est peut-être bon en principe ou pris isolément, mais avec ce genre de structure nous ne parviendrons jamais à être novateur, à faire des progrès ou à montrer la voie; on n'arrivera même pas à la barrière de départ.

    Je n'aborde même pas la question de savoir pourquoi nous voudrions définir le contenu canadien de cette façon. Comment est-ce que les éléments visibles prédisent la culture? Est-ce qu'une politique culturelle et une politique industrielle peuvent coexister? Comment se fait-il que je doive dépeindre un thème canadien ou une situation canadienne? La créativité n'existe pas dans ce paradigme. Vous ne pouvez pas réglementer l'art de raconter. Je ne fais pas de documentaires ou d'émissions factuelles et ces règlements vont à l'encontre de la créativité artistique. Souvent, ils ne permettent pas d'envisager des thèmes généraux comme l'amour ou l'espoir ou le triomphe de la peur.

    Quel est le tissu culturel du Canada? Voila la question qu'on a posée. Je dirai que ce sont des entreprises fortes et des gens déterminés à vivre et à travailler au Canada qui racontent au reste du monde des histoires, basées sur des faits ou traitant de thèmes universels. C'est permettre à des entreprises de prendre de l'expansion et d'avoir accès à un système juste qui épaule l'ensemble des politiques en vertu desquelles nous fonctionnons actuellement. Je pense qu'il faudrait mettre davantage l'accent sur la vigueur des entreprises, faire grandir nos maisons de production pour qu'elles fassent plus de productions, peut-être en autorisant des exemptions--et je crois, dans ce cas-ci, pour les radiodiffuseurs privés, par le radiodiffuseur public-- pour plus de productions commerciales, qui utilisent des artistes canadiens et des rôles appropriés. Peut-être qu'un plus vaste auditoire permettra de faire naturellement ce que nous essayons d'imposer par règlement.

    Conscient des besoins commerciaux et économiques des radiodiffuseurs privés de réaliser des bénéfices, il faudrait permettre à l'industrie de se pencher sur des thèmes universels forts et des projets qui sont viables. Se concentrer sur les éléments canadiens qui rendent un projet réalisable ou séduisant pour des parties prenantes.

    En résumé, je crois que les principes de base de la loi actuelle ne sont pas réalisés. À bien des égards, c'est peut-être la loi actuelle qui ne permet pas à la culture et à la population canadiennes de s'épanouir.

    Je vous remercie de votre attention.

¸  +-(1410)  

+-

    Le président: Merci beaucoup, madame Rose. Vous avez produit un mémoire au ton très provocateur qui sera très intéressant pour nous tous, surtout M. Abbott, j'en suis sûr.

    Monsieur Abbott, à vous la parole.

+-

    M. Jim Abbott: En fait, je voudrais passer la journée entière avec vous...

¸  +-(1415)  

+-

    Mme Gretha Rose: Il faudra que vous m'invitiez à déjeuner.

+-

    M. Jim Abbott: ...parce qu'il y a tant de choses dans votre mémoire qui, je vous l'avoue, m'ont tout à fait dépassé. Il faudrait que je comprenne beaucoup mieux les éléments de base pour pouvoir assimiler votre information. Pardonnez-moi donc si j'aborde superficiellement certains...

    Je pense que le témoin a énormément de choses à nous apprendre. C'est ce que j'essayais de dire.

    Je pense que nous sommes d'accord. Je cite le haut de votre page 4:

Quel est le tissu culturel du Canada? Je pense que c'est des entreprises et des gens forts déterminés à vivre et à travailler au Canada et qui racontent au reste du monde des histoires, fondées sur des faits ou qui traitent des thèmes universels. C'est permettre aux entreprises de prendre de l'expansion et d'avoir accès à un système juste qui appuie l'ensemble des politiques en vertu desquelles nous fonctionnons.

    Nous sommes d'accord pour le côté anglais... Ou en tout cas j'espère que nous sommes d'accord. Autrement dit, parfois il y a méprise sur les mots.

    À la page 3, le troisième paragraphe est un élément simple de votre mémoire complexe que je voudrais mieux comprendre:

Les cotes d'écoute sont un élément essentiel du financement et des critères de financement du FCT. On me dit qu'on y accordera encore plus d'importance la prochaine fois. Pourtant, le CRTC n'oblige pas les réseaux à promouvoir leurs productions, leurs vedettes, pour que nos productions et nos artistes atteignent le sommet.

    Mon intuition me dit que c'est un point sur lequel nous ne sommes peut-être pas du même avis. Voulez-vous dire par là que le CRTC devrait imposer la façon de faire la promotion des émissions et des vedettes? Il me semblait que l'essentiel de votre exposé était de laisser les producteurs décider. Autrement dit, débarrassez-nous du FCT, du CRTC, des règlements sur le contenu canadien--je pensais que vous penchiez en ce sens. Si c'est le cas, vous dites le contraire dans ce paragraphe, où vous semblez dire que vous voudriez que le CRTC fixe par règlement la façon dont les réseaux vont promouvoir leurs productions et leurs vedettes. Ça semble être contradictoire.

+-

    Mme Gretha Rose: C'était un énoncé de ma part. Je ne suis pas en faveur de la réglementation. Pour moi, ça ne règle pas les problèmes parce qu'à mon avis on n'a pas posé les bonnes questions. Encore une fois, c'est un avis. Donc, si on a à Patrimoine canadien des programmes concernant un mécanisme de financement dont l'un des principaux facteurs de pondération sera les cotes d'écoute, et qu'il n'y a pas d'engagement dans notre secteur public-privé...

    Il faut que je fasse attention parce que les radiodiffuseurs publics et privés ont deux mandats bien différents, mais je pense que financièrement c'est la même chose. Un veut être lucratif, l'autre essaie de subvenir à ses besoins.

    Si les règlements disent qu'il doit y avoir huit heures d'émissions canadiennes par jour—je pense que c'est ce qu'ils disent actuellement—si la programmation canadienne n'est pas au centre et si les radiodiffuseurs continuent de faire la promotion de leurs grosses productions américaines comme The West Wing et toutes les autres qui sont lucratives, ça ne permettra pas aux fonds canadiens de financer leurs productions. Ça aura des effets nuisibles parce que nous n'aurons pas ce genre de cote d'écoute, faute de promotion.

    Je sais que le FCT et le conseil se débattent avec ça et qu'ils essaient d'exercer des pressions sur le CRTC pour qu'il impose des règlements relatifs à un nombre minimum de messages d'intérêt public.

    Y a-t-il une réponse facile? Non, mais c'est un domaine qui aura un effet considérable.

+-

    M. Jim Abbott: Il y a une chose que je ne comprends pas très bien. Je cherche avant tout à me renseigner. C'est-à-dire que nous sommes du même avis sur cette question mais il y a une chose que j'essaie de comprendre.

    Prenez une émission comme The Associates, par exemple, qui figure dans le contenu canadien exigé par le CRTC. Logiquement, le réseau, forcé de présenter cette émission de toute façon dans sa grille canadienne, ne devrait-il pas naturellement faire l'impossible pour en faire la promotion?

    

+-

     Autrement dit, on peut songer à l'émission The West Wing , et étant donné qu'elle a beaucoup de succès de toute façon, les gens... Je reconnais que me trouvant dans un fuseau horaire différent pour mon travail, en fait je regarde CTV pour voir à quelle heure le mercredi soir on montre cette émission. Je cherche la publicité. Il ne me semble pas raisonnable que l'émission The Associates ne fasse pas l'objet de plus de publicité que The West Wing.

¸  +-(1420)  

+-

    Mme Gretha Rose: Dans ce contexte, l'émission The Associates ferait l'objet d'une publicité plus intensive. Il y a probablement huit émissions qui sont au même niveau actuellement sur divers réseaux au Canada. Cette émission-là ferait sans doute l'objet de publicité mais que dire de tous les autres types d'émissions?

+-

    M. Jim Abbott: Je songe à des émissions comme Da Vinci's Inquest, Cold Squad, etc. J'essaie ici d'établir que vous dites bien que le CRTC devrait exiger et encourager ce type de promotion pour les productions canadiennes, c'est-à-dire que le CRTC devrait stipuler que les radiodiffuseurs canadiens doivent faire ce genre de publicité.

+-

    Mme Gretha Rose: Je ne peux rien affirmer de tel parce qu'il s'agit d'une émission. Si certains règlements qui interdisent actuellement à un réseau de s'adonner à des activités que nous estimons comporter un potentiel commercial viable, une emission qui pourrait être vendue sur le marché international et être de calibre international, étaient différents, on peut se demander s'il y aurait un problème quelconque? On ne peut pas se pencher sur un aspect sans regarder l'ensemble.

    Alors, dans ces conditions, la solution serait-elle de réglementer les cotes d'écoute? Non. Mais dans le contexte actuel, je ne pense pas qu'un système de financement proposé par Patrimoine canadien et qui soit axé énormément sur les cotes d'écoute soit la réponse non plus. C'est un fouillis.

    M. Jim Abbott: Merci.

+-

    Le président: Madame Gagnon.

[Français]

+-

    Mme Christiane Gagnon: Vous avez parlé de l'importance de la diffusion des émissions produites au Canada sur les réseaux anglais et du fait qu'on avait favorisé, au fil des ans, une production américaine. La perception qu'on a souvent au Québec, c'est que le Canada anglais n'aime pas ces émissions ou que ces émissions ne correspondent pas à ce que la population veut voir dans ces émissions anglaises. Au Québec, on a réussi à établir un lien même d'amour avec les artistes du Québec qui font de la production, des téléséries. On parle d'histoires qui se passent au Québec, et cela aide à créer une relation d'amitié et d'amour. On les regarde toutes les semaines. Moi, je suis une auditrice très assidue de toutes ces émissions.

    Comment le Canada anglais pourrait-il réussir à établir un tel pont avec ses artistes? Je suis certaine que, dans les faits, ce n'est pas le reflet de ce qu'on pense percevoir de l'extérieur. On nous dit toujours que même CBC est moins regardée parce que les gens ne regardent pas leur télévision. On m'a dit que, lorsque les émissions américaines arrivaient chez vos diffuseurs, il y avait même des publicités qui disent: «La télévision canadienne que vous regardez...». Je ne sais pas qui fait ce genre de publicité, mais dans l'esprit des gens... Nous le savons quand nous regardons des émissions américaines, mais est-ce que la population du Canada anglais sait que telle ou telle émission est américaine et que ce n'est pas une production du Canada anglais?

    J'aimerais connaître votre opinion là-dessus et également sur le Fonds canadien de télévision, entre autres sur les irritants que vous y voyiez en ce qui concerne l'appui à la production et à la diffusion d'émissions canadiennes.

[Traduction]

+-

    Mme Gretha Rose: Votre deuxième question est de taille. J'espère l'avoir bien comprise, sinon veuillez me le dire.

    Je réponds à votre première question. Il est très courant d'entendre dire que les Canadiens anglais ne regardent pas leur propre programmation, et c'est un sujet qu'on discute très souvent dans notre milieu. Pour la programmation française, l'appui est très solide, et il y a une relation très étroite avec les productions, les artistes. Il existe également une collectivité mondiale très vigoureuse. On réussit très bien dans bien des cas à vendre ces émissions à des pays francophones. C'est un sujet dont on parle fréquemment. Je ne sais pas si quelqu'un peut dire exactement pourquoi, si c'est uniquement une question culturelle, mais les téléspectateurs anglophones ne sont pas très enthousiastes quand il s'agit des émissions anglaises produites ici.

    Votre deuxième question porte sur le Fonds canadien de télévision. Comme vous le savez, ce fonds détient les montants complémentaires aux droits de licence, le PDL et le PEI, qui relèvent de Téléfilm Canada. Je pourrais vous en parler pendant des mois. Je pense détenir un diplôme en FCT désormais, une maîtrise.

    Il y a beaucoup d'enjeux contradictoires à propos du FCT. Même si les deux programmes ne se complètent pas, il existe des liens entre le Fonds et le PEI, qui est un partenaire pour l'actif, c'est-à-dire qu'il participe aux bénéfices. On s'attend à ce que ceux qui reçoivent de l'argent comptent parmi ceux qui versent certains droits de licence tout en ayant une capacité de vente à l'étranger leur permettant de rentrer dans leur argent.

    Cela est contraire à un grand nombre de conditions culturelles, comme par exemple la visibilité et les artistes canadiens, auxquels j'adhère cependant. Les distributeurs refusent de donner des avances de distribution en l'absence de viabilité commerciale sur le marché international. Il y a toujours ce conflit.

    Je l'ai déjà dit, le CRTC par lui même, sous sa forme la plus pure, fonctionne. Mais la contradiction qui règne chez tous les autres bailleurs de fonds et qui ont des besoins différents est désormais insensée.

    J'ai essayé d'expliquer un exemple, et cela est arrivé à un grand nombre d'entre nous d'un bout à l'autre du pays. Cela a été catastrophique pour l'industrie canadienne. Cela a été catastrophique pour moi, mais sur le plan émotif. Notre entreprise produit entre 10 et 15 millions de dollars de productions par année, ce qui est assez appréciable pour une petite entreprise de l'Île-du-Prince-Édouard. Étant donné les règlements qui régissent le FCT, il faut que nos productions soient homologuées coproductions internationales pour que nous obtenions de l'argent fédéral. On peut se contenter de faire valoir la licence de radiodiffusion pour la portion canadienne du budget seulement, ce qui nous donne un pointage plus élevé. Plus le pointage est élevé, plus il est probable que l'on obtiendra des fonds du FCT. Tout cela est fondé sur un barème de 59 points. Ainsi, plus on travaille à l'étranger, plus le pointage est élevé et plus grandes sont les chances d'obtenir de l'argent canadien.

    J'ai dû littéralement prendre 1,5 million de dollars au Cap-Breton pour les donner à Hong Kong afin d'obtenir de l'argent fédéral et une licence de radiodiffusion. C'est la politique de Patrimoine canadien. Ça c'est la part des radiodiffuseurs. Quand on réglemente les radiodiffuseurs, publics et privés, et quand on déroge à l'intention et à l'objectif de départ, à quoi bon des règlements? Les radiodiffuseurs quant à eux doivent les respecter. Il n'en est pas de même pour les partenaires avec lesquels nous formons un tandem pour que nos productions soient montrées dans le monde.

¸  +-(1425)  

+-

    Le président: Monsieur Harvard.

+-

    M. John Harvard: Merci, monsieur le président.

    Merci d'être venue aujourd'hui.

+-

     Je ne suis pas sûr de bien comprendre tout ce que vous dites. Je voudrais savoir si vous souhaitez qu'on maintienne le FCT. Quand vous faites une évaluation de ce fonds, vous dites que les radiodiffuseurs «ne doivent pas se conformer à un modèle économique aussi contraignant que le contenu canadien et la diversité culturelle» et qu'ils font des tours de passe-passe pour éviter de se conformer à la réglementation de façon à user de moyens leur permettant de créer des productions attrayantes sur le marché international. Est-ce que je me trompe?

¸  +-(1430)  

+-

    Mme Gretha Rose: Je ne dirais pas «font des tours de passe-passe»...

    M. John Harvard: Que diriez-vous?

    Mme Gretha Rose: ...parce qu'un radiodiffuseur doit réaliser sa marge bénéficiaire, de sorte qu'il est très risqué pour eux de s'engager avec des partenaires ayant accès à ce fonds.

    

+-

    M. John Harvard: Et ils essaient de contourner les règlements pour que leurs productions soient rentables, n'est-ce pas?

+-

    Mme Gretha Rose: Oui, pour un projet commercialement viable.

+-

    M. John Harvard: Très bien.

    Et ensuite vous dites au bas de la page 3:

    «Pourquoi me forcer à décrire une situation ou un thème canadien? La créativité ne s'exprime pas à l'intérieur de ce paradigme. On ne peut pas réglementer l'art de raconter. Je ne produis pas de documentaires ou d'émissions factuelles. Ces règlements vont à l'encontre de la créativité artistique.»

    Voulez-vous conserver le FCT avec des règlements, sans règlements, ou le supprimer?

+-

    Mme Gretha Rose: Je ne pense pas que ces organismes servent à grand-chose pour ce qui est de l'aide financière. Je conteste la façon dont le barème des points est appliqué. Sur le plan des critères, il faut respecter ceux du FCT pour le contenu, et si je présente certaines des grandes oeuvres de Shakespeare, je suis inadmissible.

    Sur une chaîne nationale, on m'a fourni l'occasion de présenter mon émission, filmée à 100 p. 100 à l'Île-du-Prince-Édouard, avec un metteur en scène canadien. J'ai eu des démêlés avec le distributeur parce que je souhaitais mêler des artistes canadiens et internationaux. Le scénario était fondé sur l'histoire du conflit opposant un père et son fils affligés par un deuil. On n'a pas jugé que c'était du contenu canadien car rien ne permet de traiter un thème universel. Il aurait fallu que je décrive un événement réel, fondé sur un ouvrage publié, avec toutes sortes d'autres conditions. Ainsi, on se trouve pénalisé. On n'accorde aucun importance à un thème plus universel. Tous ces éléments...

+-

    M. John Harvard: Quels critères voudriez-vous établir pour respecter la logique canadienne? Si le FCT n'est pas assorti d'exigences de contenu canadien, rien n'empêcherait les gens de Hollywood d'avoir accès à cet argent, car ils n'ont probablement pas accès à beaucoup de financement gouvernemental. Ils viendraient ici et produiraient une oeuvre hollywoodienne d'envergure, l'histoire d'un ménestrel bavarois, Shakespeare, que sais-je encore. Ils s'empareraient de notre argent. Je ne pense pas que cela puisse fonctionner. Qu'en pensez-vous?

+-

    Mme Gretha Rose: Je ne pense pas qu'ils puissent s'emparer de notre argent. Il s'agit ici de crédits d'impôt, et il y a des façons de protéger cela.

    Il y a divers types. Je ne dis pas qu'il faille se débarrasser du contenu canadien mais j'estime que ce qui importe c'est la façon de lui accorder des points. Combien de points accorderait-on à la longévité de la société? Actuellement, les entreprises sont précaires. Aucune entreprise ne peut vous dire d'une année à l'autre si elle obtiendra le financement nécessaire à ses productions. Alliance Atlantis a mis du temps à être prospère, à pouvoir se subvenir à elle-même.

    Il faudrait trouver le moyen d'aider vraiment la voix régionale et la voix nationale, et il faut cultiver cette base artistique pour multiplier les productions.

+-

    M. John Harvard: À cet égard, vous souhaitez des règlements pour protéger les régions, n'est-ce pas?

+-

    Mme Gretha Rose: Non, je ne parle pas au nom des régions dans ce cas-ci.

    M. John Harvard: Non, ce n'est pas ce que je veux dire. Mais vous voudriez une sorte de...

    Mme Gretha Rose: Il y a des petites initiatives pour les PME.

    M. John Harvard: Mais ça ne suffit pas.

    Mme Gretha Rose: Je songe à la façon de pouvoir filmer au Canada afin que nos entreprises prennent de l'envergure et soient solides.

+-

     Comme je vous le disais, je fonde beaucoup d'espoir sur les artistes canadiens, et je n'ai jamais très bien compris cette situation. Mais si le règlement exige que l'acteur qui touche le plus doit être canadien, alors que les distributeurs se rebiffent...

¸  +-(1435)  

+-

    M. John Harvard: Je veux poser une question pour bien comprendre. Supposons que vous rédigiez les règlements...vous. Quels seraient les deux ou trois critères de base que vous imposeriez pour promouvoir la culture et la diversité canadiennes. Quelles seraient vos exigences alors?

+-

    Mme Gretha Rose: Eh bien, pour amplifier les choses un peu, je pense que je traiterais le mandat de la CBC et celui des radiodiffuseurs privés un peu différemment, car je pense qu'un des rôles de la CBC est de promouvoir la culture et les artistes canadiens. Je pense que la société s'en acquitte assez bien, étant donné les contraintes qu'on lui impose. Croyez-moi: je ne suis pas experte en la matière. Il y a peut-être deux aspects financiers distincts. Si on envisage des productions commercialement viables, animées par des Canadiens, produites au Canada, avec du personnel canadien...

    M. John Harvard: Ça devrait s'arrêter là, n'est-ce pas?

    Mme Gretha Rose: Je pense qu'on devrait accorder plus d'importance à ces aspects-là. En outre, pour ce qui est du long terme et de la participation... Je sais que le conseil d'administration du FCT se penche là-dessus: comment surveiller la croissance d'une société, et à quel moment doit-elle être sevrée? Cela devrait se produire. Si on continue de donner facilement accès à ces fonds aux grandes compagnies de production qui sont radiodiffuseurs et distributeurs à la fois, eh bien ce sont elles qui en profiteront le plus.

    La barre est trop haute dans le cas du fonds. Les PME de notre pays n'ont pas l'occasion de concurrencer les autres, et elles réussissent très bien, étant donné la situation.

    M. John Harvard: Comment...

+-

    Le président: Vous aurez un autre tour, John.

    Monsieur Cuzner.

+-

    M. Rodger Cuzner: Je souhaiterais qu'on me donne des précisions sur deux choses qui figurent à la page 3. Vous parlez du remboursement et j'aimerais que vous développiez votre pensée quand vous dites que si une production devient un succès, le financement doit être remboursé. Voyez-vous un inconvénient à cela?

+-

    Mme Gretha Rose: Non, aucun. Le problème se pose du fait que c'est une politique culturelle. C'est à cause de la politique culturelle que cet argent est mis à notre disposition. Ce n'est pas une politique industrielle. Il y a des cas où à bien des égards on ne peut pas créer d'émissions qui soient commercialement viables sur le marché international. On n'en veut pas parce qu'elles ne sont pas de nature commerciale. On impose donc ce genre de critères et alors les bailleurs de fonds fédéraux--et cela se fait aussi à Patrimoine Canada--ont cette politique de remboursement. Chaque fois qu'on fait une vente internationale, le rendement sur leur placement leur est dû au même titre que les autres bailleurs de fonds.

+-

    M. Rodger Cuzner: La plupart d'entre eux ont des actions dans les productions, n'est-ce pas?

+-

    Mme Gretha Rose: Oui. Le PDL est un montant supplémentaire aux droits de licence, mais Téléfilm Canada—qui administre le PEI dans le cadre du FCT—détient une participation. Elle s'attend donc à rentrer dans son argent. Ainsi on accorde une certaine importance à la capacité de rentrer dans son argent. Si on ne peut pas vendre un projet à l'échelle internationale, Patrimoine Canada ne vous fournira pas l'argent nécessaire pour financer la production destinée au réseau de radiodiffusion.

    Vous allez entendre l'opinion de l'ACPFT, celle des distributeurs, j'en suis sûre... Je ne me souviens plus de l'acronyme de l'Association des distributeurs canadiens dans notre province. C'est un problème auquel nous essayons de trouver une solution depuis bien des années. Il se trouve que d'autres politiques et d'autres critères sont établis.

+-

    M. Rodger Cuzner: Vous feriez mieux d'apprendre vos acronymes dans les plus brefs délais, sinon vous allez vous en repentir.

+-

    Mme Gretha Rose: Vous avez raison.

    Je suis Canadienne et j'adore créer, et je peux très bien un bon matin comme par hasard trouver une histoire phénoménale qui va intéresser le monde. Toutes mes productions se vendent très bien sur le marché international. Elles sont toutes canadiennes, avec des artistes canadiens. Elles ont eu beaucoup de succès et j'ai dû les financer très différemment. J'ai dû faire des choses qui offensaient mon intégrité personnelle pour pouvoir avoir accès à ces fonds.

+-

    M. Rodger Cuzner: Pardonnez ma curiosité: quelle émission était en 13 épisodes et a coûté 5 millions de dollars?

¸  +-(1440)  

+-

    Mme Gretha Rose: Elle est intitulée Eckart. Il s'agit d'une animation spéciale pour les enfants qui se vend actuellement dans le reste du monde. Elle a été vendue dans 39 pays, en 13 langues différentes. Tous les acteurs, et il y en a une centaine, sont de l'Île-du-Prince-Édouard, sauf un. C'est le méchant, et il est de l'Ontario—Boussmouse.

    Actuellement, nous travaillons à un projet intitulé Doodlez, dont Disney fait la distribution dans le reste du monde. Tout cela est fait ici. Mais pour ce qui est de la visibilité du contenu canadien dans une série d'animation, c'est une toute autre chose dont je n'ai pas encore parlé ici.

+-

    M. Rodger Cuzner: Vous avez dit que nous n'avons pas pu accueillir ou réalisé le plein potentiel de certaines nouvelles technologies. Pouvez-vous nous donner des détails? Quels sont les empêchements? Qu'est-ce qui a entravé notre capacité à réaliser ce plein potentiel?

+-

    Mme Gretha Rose: Les radiodiffuseurs recherchent actuellement ces droits. Ils ne savent pas quelle en est la valeur, pas plus que le reste du monde. Ainsi, quand on veut vous accorder une licence, on s'approprie les droits Internet. Nous avons lutté contre cela. Notre industrie a beaucoup lutté contre cela. Certains ont obtenu gain de cause mais pas beaucoup. Ces droits sont à vrai dire juste neutralisés. Ils sont détenus.

    J'ai demandé aux radiodiffuseurs nationaux de me montrer leur plan d'entreprise et de me prouver que le leur était supérieur au mien et j'ai constaté qu'il n'y a pas de modèle commercial. On inspire la crainte tout simplement.

+-

    Le président: Madame Lill.

+-

    Mme Wendy Lill: Merci d'être venue et d'avoir présenté ce mémoire. Excusez mon absence pendant la période de questions. Je devais donner des coups de téléphone, et j'ai été retenue.

    Mme Gretha Rose: Les questions étaient intéressantes.

    Mme Wendy Lill: Si je vous dis cela, c'est parce que je risque de vous poser les mêmes questions. Dites-le moi si je le fais.

    Hier nous avons rencontré des gens qui travaillent à des projets d'animation au théâtre Kaléidoscope. Vous les connaissez sans doute. Ils nous ont dit que si le comité devait faire une seule recommandation, ce devrait de demander que l'argent du CTF ne soit pas à la disposition des réseaux, afin que les petites et moyennes entreprises puissent en bénéficier. Dites-moi ce que vous en pensez.

    Vous avez rappelé qu'on n'exige pas des radiodiffuseurs de retransmettre une partie de leur programmation en provenance des régions, et cela semblait vous poser des difficultés. On dirait que les gros méchants radiodiffuseurs—et je me hasarde à dire cela—s'emploient à rendre la vie difficile aux entreprises petites et moyennes qui sont créatrices.

+-

    Mme Gretha Rose: Vous allez trouver que mes propos d'aujourd'hui sont tout à fait semblables à ceux que tiendra l'Association des radiodiffuseurs qui va venir témoigner également. Les radiodiffuseurs, comme n'importe quelle société, ont la responsabilité financière de réaliser des bénéfices. C'est ce qu'il en coûte de faire des affaires.

    Il faut comprendre toutefois la réalité que nous vivons et il est problématique que les radiodiffuseurs puissent actuellement avoir accès à ces fonds, étant donné qu'ils sont déjà sollicités à outrance par l'intermédiaire de Patrimoine Canada. Ainsi, les grandes sociétés ont encore accès à ces fonds, de même que les radiodiffuseurs , et il faut s'attendre à ce que d'ici deux ou trois ans, les distributeurs puissent en faire autant.

    Il arrivera donc que ces fonds seront répartis dans bien des cas entre de grands conglomérats centralisés. Cela n'empêchera pas les PME de participer, et ensuite... Il est vrai que les PME sont installées dans les régions, en Ontario, au Québec, notamment. Mais on risque d'obtenir un point de vue tout à fait subjectif, qui à mon avis ne représente pas le Canada mais les grandes compagnies.

+-

    Mme Wendy Lill: Il est toujours bon d'offrir des solutions car les problèmes peuvent vous faire tourner en bourrique. Si vous pouviez nous faire des recommandations sur le FCT, sur la façon dont il devrait être conçu, et comment...

+-

    Mme Gretha Rose: J'en ai fait. Il y a eu beaucoup d'audiences. Je suis très forte en orientation. Il y a bien des années que je m'intéresse au FCT...

¸  +-(1445)  

+-

    Mme Wendy Lill: Je vais vous poser une autre question alors. Pourquoi le fonds a-t-il l'allure qu'il a actuellement, si tant est que vous avez fait des suggestions? Est-ce à cause de problèmes d'ordre politique...

+-

    Mme Gretha Rose: On en vient alors à la légitimité des conseils qui ont été formés. Prenez le conseil d'administration du FCT, un conseil qui a la responsabilité de sa propre formation et composition. Le conseil ne doit pas représenter de groupes en particulier mais la population en général, en l'occurrence le public canadien, et à bien des égards la culture canadienne. Mais ce n'est pas du tout ce qui s'est produit.

    Le conseil d'administration du FCT est composé de certains radiodiffuseurs, producteurs et de représentants de grandes sociétés. Il y siège un producteur indépendant. Sa composition, je l'ai toujours dit, et en public, est illégale. Un conseil d'administration ne peut pas s'occuper de sa propre composition et prétendre représenter le public canadien quand la voix des radiodiffuseurs et des distributeurs y est si prépondérante. Ça devient assez gros. Je pense qu'on peut toujours se tourner vers les textes législatifs d'origine et les politiques qui en découlent.

+-

    Le président: Nous allons devoir poursuivre mais auparavant j'aimerais savoir pourquoi vous avez dit que parfois vous deviez utiliser des méthodes qui faisaient une entorse à votre intégrité personnelle.

    Mme Gretha Rose: En effet.

    Le président: C'est une déclaration très conséquente, et il est malheureux de devoir en arriver là.

    Je vous pose la question car il nous semble, après avoir entendu les témoignages hier et auparavant, que le but du FCT était d'aider les créateurs qui n'ont pas les moyens de trouver un appui ou qui n'ont pas de pouvoir. Autrement dit, vous affirmez que les PME sont mal représentées au conseil d'administration et qu'elles devraient y être mieux représentées, n'est-ce pas?

    Deuxièmement, dans votre cas, vous auriez préféré ne pas devoir aller à Hong Kong pour votre projet de cinq millions de dollars. Dites-moi si votre produit aurait connu autant de succès, si vous ne l'aviez pas fait?

    Mme Gretha Rose: Absolument. Et nous aurions pu concrétiser un grand nombre des véritables mandats de Patrimoine Canada. En l'occurrence, employer des Canadiens.

    Le président: Troisièmement, on nous a dit hier que les gros joueurs achetaient parfois un petit joueur dans une région tout simplement pour accaparer les points régionaux au titre du Fonds canadien de télévision ou encore pour obtenir du financement à l'investissement, etc.

    Mme Gretha Rose: C'est un fait.

    Le président: Si vous avez déjà fait part de cela au FCT, et que vous puissiez nous en fournir le résumé, ce serait fort utile, parce que je pense que ce sont là des enjeux clés dans la régie de ces institutions.

    En terminant, nous avons entendu dire que le FCT était extrêmement volumineux et bureaucratique. Vous pourriez peut-être nous dire comment on pourrait alléger ses effectifs.

    Mme Gretha Rose: Volontiers.

+-

    M. Jim Abbott: Dans le même ordre d'idées, pourriez-vous nous expliquer le processus qui explique que vous ayez abouti à Hong Kong... Nous n'avons pas le temps d'en entendre le détail maintenant, mais je pense que c'est un élément central.

    Mme Gretha Rose: Avec plaisir.

    M. Jim Abbott: Pourquoi avez-vous dû procéder ainsi? Qu'est-ce qui achoppe au FCT et qui vous force à procéder ainsi.

+-

    Mme Gretha Rose: Je le dirai encore une fois, en le résumant en quelques phrases. L'accès au financement de Patrimoine canadien s'établit selon les points majeurs. Jusqu'à 40 des 59 points sont accordés en fonction du pourcentage que représente la licence de radiodiffusion canadienne du budget. Mais on a changé cela et maintenant c'est le pourcentage du budget canadien. Par conséquent, en réduisant le budget canadien et en augmentant le budget étranger, on accroît les points de radiodiffusion et la possibilité d'avoir accès au financement de Patrimoine canadien.

+-

    M. Jim Abbott: Espérons que les attachés de recherche vont pouvoir nous expliquer cela.

+-

    Mme Gretha Rose: Et cela arrive très souvent. On a déjà présenté les faits. Les gens comprennent qu'on présente les faits partout. Et c'est cela qui est vraiment bizarre. Nous avons un bon accès auprès des politiques ici et une forte représentation au Parlement. Expliquer ce qui n'est pas logique n'est pas une tâche très facile et les gens ont du mal à comprendre, mais je vais faire un effort.

    À qui voulez-vous que j'envoie le document?

¸  +-(1450)  

+-

    Le président: À la greffière du comité, Mme Fisher.

    Vous savez, madame Rose, vous êtes la première personne qui ait vraiment expliqué l'une des causes principales du problème, c'est-à-dire la composition des conseils. En d'autres mots, comment favoriser les petites et moyennes entreprises si elles n'ont aucune représentation au conseil? C'est un point très important.

    Nous tenons à vous remercier beaucoup d'avoir comparu devant notre comité et nous attendrons votre rapport. Nous avons vraiment hâte de le recevoir.

    Nous prendrons maintenant une pause de cinq minutes avant de reprendre. La séance est suspendue pendant cinq minutes, et ensuite on demandera à la Société Saint-Thomas-d'Aquin de prendre la parole.

¸  +-(1450)  


¸  +-(1455)  

+-

[Français]

+-

    Le président: Nous reprenons cette séance du Comité permanent du patrimoine canadien au sujet de l'état du système de radiodiffusion canadien.

    Nous sommes très heureux de recevoir cet après-midi Mme Maria Bernard, présidente de la Société Saint-Thomas-d'Aquin de l'Île-du-Prince-Édouard, et M. Dominic Langlois, agent de liaison de la société.

    Bonjour, madame Bernard et monsieur Langlois. Nous sommes très heureux que vous soyez ici.

    Madame Bernard, la parole est à vous.

¹  +-(1500)  

+-

    Mme Maria Bernard (présidente, Société Saint-Thomas-d'Aquin): Merci, monsieur le président. Je vais faire la présentation, mais vous pourrez poser des questions soit à moi, soit à M. Langlois.

    J'aimerais tout d'abord prendre le temps de vous remercier de nous avoir invités à venir vous parler aujourd'hui de la radiodiffusion en langue française.

    La Société Saint-Thomas-d'Aquin représente une population d'Acadiens, d'Acadiennes et de francophones qui, lors du recensement de 1996, comptait 5 700 personnes. Bien que peu nombreuse, notre collectivité affiche depuis longtemps un sens innovateur en matière de développement. À titre d'information, la population susceptible d'utiliser des services de radiodiffusion en français à l'Île-du-Prince-Édouard représente un peu plus de 10 p. 100 de la population totale de la province.

+-

     Bien que fragile, la population de langue française de l'Île-du-Prince-Édouard a réalisé, au cours des dernières années, beaucoup de progrès. Toutefois, la Société Saint-Thomas-d'Aquin, comme tous les membres qu'elle représente, se doit d'être extrêmement vigilante dans tous les secteurs de développement de notre communauté, et le secteur des communications ne fait pas exception à cette règle. Nous sommes particulièrement préoccupés par le contenu des services de radiodiffusion et de télécommunication, qui ne reflète pas souvent notre réalité.

    Pour assurer notre survivance, il est essentiel que nous ayons accès à des outils de communication qui contribuent à faire connaître et apprécier notre richesse culturelle et sociale. En ce sens, nous sommes satisfaits de l'émission du matin de la Société Radio-Canada, L'Acadie c'matin, la seule émission francophone produite ici même, au studio de Charlottetown. Cette émission est l'un des outils auxquels nous faisons allusion plus haut et elle contribue à l'épanouissement de la francophonie insulaire.

    Comme d'autres vous l'ont mentionné précédemment, nous nous devons de répéter qu'à l'exception de cette émission, le produit que diffuse la société d'État est malheureusement trop souvent fait par et pour la population québécoise. Afin que cette radio reflète aussi les couleurs de l'Acadie, nous souhaitons qu'une plus grande place soit accordée aux productions locales. Les Québécois et Québécoises sont souvent ignorants de l'existence d'une population francophone ailleurs que dans leur province. Les Québécois et Québécoises, autant que les Acadiens et les Acadiennes insulaires, gagneraient à voir et à entendre davantage l'Acadie au niveau national.

    Radio communautaire. Nous croyons également que tout devrait être mis en place pour favoriser le développement du réseau de radios communautaires au sein de chacune des communautés de langue minoritaire française. Cette année, le projet d'implantation d'une radio communautaire à l'Île a fait un pas en avant. Un coordonnateur est présentement en place afin de développer la deuxième phase du projet. Comme vous le savez certainement, les radios communautaires représentent un excellent outil de développement des communautés minoritaires. Nous appuyons le développement de celles-ci, puisque par leur mandat et le public qu'elles rejoignent, les radios communautaires viennent seconder le travail de la radio d'État.

    En ce sens, nous appuyons la recommandation de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada de «mettre en place un processus par lequel les fréquences FM seraient réservées à la mise en ondes éventuelle de stations de radio communautaire de langue française».

    Dans notre cas, le problème ne se résume toutefois pas à l'obtention d'une fréquence. Nous trouvons nécessaire de vous préciser que Patrimoine Canada ne dispose pas d'un programme d'appui financier équitable qui encourage les petites communautés comme la nôtre à aller de l'avant avec des projets de radio communautaire. Étant dispersée dans plusieurs régions de l'Île, notre communauté francophone est difficile à rejoindre et les coûts associés aux installations sont souvent faramineux. Il est regrettable que lorsque des règles nationales sont établies, elles ne tiennent malheureusement pas compte des réalités des différentes régions. C'est pourquoi nous souhaitons voir le CRTC intervenir auprès du gouvernement fédéral afin de corriger ce tir qui, trop souvent, passe à côté de nous.

    L'avènement des technologies. Dans un tout autre ordre d'idées, nous avons pris connaissance de la demande de la Société Radio-Canada en vue d'obtenir une licence afin que la Chaîne culturelle radio de Radio-Canada puisse desservir l'Île-du-Prince-Édouard. C'est avec enthousiasme que nous avons appuyé l'implantation du service de la Chaîne culturelle dans notre région. Ce projet répond à un besoin réel chez les auditeurs francophones tout en offrant un choix intéressant à tous ceux et celles qui désirent connaître davantage la culture francophone par la musique et les arts sous toutes leurs formes.

    Ce projet nous amène toutefois à appuyer une fois de plus une requête de la FCFA qui vous demande «de vous assurer qu'il y ait un organisme permanent dont le mandat serait de faire la promotion des chaînes de langue française auprès des communautés francophones et acadiennes du Canada».

    À la vitesse à laquelle s'effectuent présentement les changements dans le domaine de la radiodiffusion, il n'est pas toujours facile pour le public de s'y retrouver. Avec la possibilité d'avoir accès à des centaines de canaux de télévision et de radio, il est impératif que le CRTC tienne compte des besoins particuliers des communautés francophones et acadiennes.

    Afin d'être écoutée et regardée, une nouvelle chaîne francophone a besoin de se faire connaître. Si l'on désire freiner l'assimilation, on doit également présenter à nos jeunes un produit français de qualité qui rejoigne leurs hautes exigences, aussi bien à la radio qu'à la télévision.

    De plus, nous croyons que la Loi sur la radiodiffusion devrait être amendée afin qu'elle ne laisse aucun doute quant au mandat du CRTC de veiller au développement et à l'épanouissement des communautés de langue officielle vivant en situation minoritaire, tel que décrit dans la partie VII de la Loi sur les langues officielles. La loi reconnaît clairement l'existence des deux communautés et de leurs droits. En tant qu'organisme qui réglemente l'ensemble de la radiodiffusion et des télécommunications, le CRTC a l'obligation de respecter celle-ci.

    Nous vous encourageons à continuer de jouer un rôle de première importance dans le développement et l'épanouissement des minorités francophones du pays, et à poursuivre vos efforts. Le travail qui est consacré au domaine de la radiodiffusion et des télécommunications est essentiel car il appuie celui de la Société Saint-Thomas-d'Aquin, qui est de travailler pour que tous les Acadiens, Acadiennes et francophones puissent vivre et s'épanouir individuellement et collectivement en français à l'Île-du-Prince-Édouard.

    Encore une fois, merci de nous accorder cette tribune qui permet de favoriser une discussion entre vous et notre communauté.

¹  +-(1505)  

+-

    Le président: Madame Bernard, vous savez sûrement qu'au cours de notre travail, depuis un an, nous avons rencontré beaucoup de regroupements de francophones hors Québec. Ils ont tous exprimé la même préoccupation au sujet de l'épanouissement des communautés et des radios communautaires, et du rôle de Radio-Canada. Nous sommes très heureux que vous soyez ici pour renforcer ce message.

    Nous allons passer aux questions. Je vais demander à M. Abbott de commencer.

[Traduction]

+-

    M. Jim Abbott: Merci.

    Je vous remercie d'avoir comparu.

    Pourriez-vous nous faire un petit topo pour me mettre un peu dans le contexte? Qu'il s'agisse d'une programmation régionale ou nationale, cela m'est égal, j'aimerais savoir quel est votre accès à la radio ou à la télévision en français. Quelle est la situation actuelle des citoyens de l'Île-du-Prince-Édouard?

¹  +-(1510)  

[Français]

+-

    Mme Maria Bernard: Présentement, à l'Île-du-Prince-Édouard, on a la radio de Radio-Canada. On a une émission qui est diffusée à partir de l'Île-du-Prince-Édouard; on reçoit aussi deux ou trois émissions qui sont diffusées à partir de Moncton, et les autres nous viennent de Montréal. Pour la télévision, c'est la même chose; il y a une émission d'une heure, l'Atlantique Ce Soir, qui est diffusée en Atlantique. Il n'y a rien de diffusé à partir de l'Île-du-Prince-Édouard.

[Traduction]

+-

    M. Jim Abbott: Et cette émission, est-elle diffusée sur la chaîne qui diffuse normalement en anglais?

[Français]

+-

    Mme Maria Bernard: Non. C'est Radio-Canada en français. Les autres émissions nous parviennent de Montréal et de Québec.

[Traduction]

+-

    M. Jim Abbott: J'essaie de comprendre vos exigences ou vos demandes. Je crois qu'on parlait de 5 700 personnes. Il s'agit des francophones, dont la plupart sont Acadiens et quelques Métis.

+-

    Mme Maria Bernard: Non, il s'agit de francophones qui viennent d'autres provinces.

+-

    M. Jim Abbott: Donc vous aimeriez obtenir une station communautaire AM ou FM en français.

[Français]

+-

    Mme Maria Bernard: Oui.

[Traduction]

+-

    M. Jim Abbott: Et pour la télévision?

[Français]

+-

    Mme Maria Bernard: À la télévision, on aimerait avoir plus de programmation locale. Il y a très peu de programmation qui nous parvient de l'Île-du-Prince-Édouard. En fait, il n'y en a pas, sauf pour deux ou trois minutes de nouvelles sur l'Île-du-Prince-Édouard à l'émission  l'Atlantique Ce Soir. Il n'y a rien d'autre.

[Traduction]

+-

    M. Jim Abbott: J'essaie d'envisager une solution qui, comme on dit, est originale. Ce n'est peut-être pas une solution parfaite mais elle pourra vous permettre de vous rapprocher du but. Premièrement, savez-vous quel pourcentage des citoyens de l'Île-du-Prince-Édouard ont accès à la câblodistribution ou y sont abonnés? Je sais que vous n'êtes pas experte en la matière, mais je me demandais si vous en avez une petite idée.

[Français]

+-

    Mme Maria Bernard: On n'a pas les chiffres.

¹  +-(1515)  

+-

    Le président: Combien de personnes reçoivent la télévision par câble à l'Île-du-Prince-Édouard?

    Mme Maria Bernard: La majeure partie de la population francophone reçoit le câble. Il y a quelques villages isolés qui n'ont pas le câble. Souvent, ceux qui n'ont pas le câble peuvent recevoir Radio-Canada par satellite. C'est le cas en ce qui me concerne.

[Traduction]

+-

    M. Jim Abbott: Comme je l'ai dit, je ne dis pas que ma suggestion constitue la solution. J'essaie simplement de faire preuve de créativité, même s'il s'agit d'une solution intérimaire. Si le CRTC obligeait les câblodistributeurs à donner accès, de façon quotidienne, à une, deux ou trois heures de programmation en français qui refléterait la réalité francophone à l'Île-du-Prince-Édouard, est-ce que cela vous serait utile?

[Français]

+-

    Mme Maria Bernard: Oui, parce que si on parle des affaires locales, les gens vont écouter. À l'heure actuelle, je ne suis pas certaine que beaucoup de gens écoutent la télévision ou la radio française. Ils écoutent surtout les émissions locales. Ils préfèrent la radio communautaire qui est plus locale, mais ils écoutent aussi des émissions qui les intéressent comme le hockey. Lorsque les Canadiens jouent, la plupart des communautés francophones écoutent la partie en français parce que c'est un sujet d'intérêt, sauf maintenant à cause de la grève.

[Traduction]

+-

    M. Jim Abbott: Oui, je comprends cela. En outre quand on entre dans la saison estivale et que beaucoup d'autres activités ont lieu, j'essaie d'envisager une solution à prix modique qui vous permettrait peut-être de répondre immédiatement là certaines des préoccupations que vous avez exprimées devant nous aujourd'hui.

[Français]

+-

    Mme Maria Bernard: En anglais, il y a Compass, une émission locale. Tout le monde regarde cette émission. Pour notre part, nous n'avons pas accès à une émission de télévision locale. Ça serait une solution d'avoir une émission locale. Tout le monde regarde Compass, même les francophones, parce que c'est local. Toutefois, si on avait une émission locale en français, les gens l'écouteraient en français. Il n'y a aucune production locale à la télévision à l'Île-du-Prince-Édouard.

[Traduction]

+-

    M. Jim Abbott: Merci.

+-

     Le président: Madame Gagnon.

[Français]

+-

    Mme Christiane Gagnon: Je vous remercie de votre présentation. Comme le disait le président, ayant rencontré la plupart des communautés francophones, que ce soit dans l'Ouest ou ici, dans l'Est, nous savons que le problème est relié au pourcentage de la population. Il semble qu'il n'y ait pas de structure et d'infrastructure.

    Je faisais une remarque lors de notre séjour dans l'Ouest, si je me souviens bien, à savoir que le fait de se définir comme un pourcentage de la population évacuait la notion de peuples fondateurs et aussi le rôle que devrait jouer la télévision publique. Vous avez mentionné qu'il n'y avait pas, à Patrimoine Canada, de programme spécifique pour appuyer de façon plus forte les communautés de langue française et que c'est comme ça depuis plusieurs années. Aujourd'hui, tous veulent être branchés et parler d'eux-mêmes. Que ce soit la communauté anglophone ou francophone, tous veulent avoir une télévision qui leur ressemble et pouvoir parler de leur communauté et de leurs préoccupations.

    Vous avez souligné que les Québécois semblaient ignorer l'existence des communautés francophones hors Québec. Je pense que c'est évaluer la situation de façon un peu courte. Comme députée du Bloc québécois, je me fais un devoir de parler d'abord français lors des périodes des questions et lors des débats en Chambre, pour faire rayonner l'expression des communautés francophones. Au Québec, bien sûr, on a une communauté plus forte, mais on nous ramène toujours à notre pourcentage et, au fil des ans, ce pourcentage diminue à cause de l'assimilation. Au Québec, on est très vigilants à cet égard.

    Qu'est-ce qui pourrait peut-être amener...? On nous a parlé, par exemple, des radios communautaires qui sont un meilleur reflet de l'expression locale.

+-

     Une de leurs problématiques est de faire en sorte que les communautés francophones sur un même territoire puissent rayonner entre elles, se parler et avoir des nouvelles les unes des autres.

    À l'Île-du-Prince-Édouard, où vous êtes plus regroupés, moins éparpillés, avez-vous cette même problématique? On nous a dit hier que c'était le cas à Terre-Neuve et en Nouvelle-Écosse. Est-ce que vous avez le même problème de dispersion, ou si la communauté peut se regrouper sur un territoire? À ce moment-là, la radio communautaire peut mieux...

¹  +-(1520)  

+-

    M. Dominic Langlois (agent de liaison, Société Saint-Thomas-d'Aquin): Je m'excuse de vous interrompre. C'est le problème qui est mentionné ici, en fait. À l'Île-du-Prince-Édouard, la population acadienne est répartie dans cinq régions différentes. C'est ce qui fait qu'il serait très coûteux de développer des infrastructures de radio communautaire. Justement, il existe, à Patrimoine Canada, un programme pour favoriser le développement de ces infrastructures qui aide les communautés qui sont beaucoup plus proches, beaucoup plus regroupées, comme c'est le cas, par exemple, à Chéticamp, où ça s'est passé. Le nombre de francophones là-bas est le même qu'ici, soit environ 5 000. Le programme convenait très bien: ils sont regroupés sur le même territoire. Le problème de l'Île, c'est qu'on n'est pas regroupés et que, par conséquent, il en coûterait beaucoup trop cher pour développer des infrastructures pour essayer de rejoindre... C'est la phase qui est présentement en cours. On se demande comment on pourrait subventionner une radio communautaire à l'Île-du-Prince-Édouard, compte tenu de cet éparpillement de la population acadienne et francophone.

+-

    Mme Christiane Gagnon: Hier, on nous a donné une idée. En Nouvelle-Écosse, il pourrait y avoir un émetteur répétiteur qui pourrait mettre en réseau les radios communautaires. Avez-vous pensé à ce genre de solution?

    Les moyens financiers ne semblent pas être offerts. Il va falloir trouver d'autres solutions, mais je trouve qu'il est inadmissible, en 2002, que des communautés qui ont fondé le Canada ne puissent pas rayonner dans leur communauté. On peut dire que le Québec ne vous perçoit pas comme une communauté francophone hors Québec, mais je pense qu'il faut aussi vous donner le rayonnement dont vous avez besoin dans votre communauté. Si, dans votre communauté, vous êtes 10 ou 15 p. 100, il faut qu'il y ait un potentiel d'émissions culturelles qui reflètent votre réalité à vous.

+-

    Mme Maria Bernard: Même maintenant, notre réseautage est faible. Il y a des régions éloignées, à l'ouest de l'île, qui ont de la difficulté à capter le FM, L'Acadie c'matin. Il y en a qui ont même des problèmes de ce côté. Notre réseau n'est pas assez fort pour rejoindre toutes nos communautés. On veut une radio communautaire qui pourrait rejoindre tous les francophones de l'Île-du-Prince-Édouard. C'est à cela qu'on est en train de travailler afin de trouver ce qu'on pourrait faire pour avoir une radio communautaire qui rejoindrait tous les francophones de l'Île.

+-

    Mme Christiane Gagnon: Vous avez parlé de la réalité de la radio, mais il y a aussi celle de la télévision, qui doit être encore plus catastrophique que celle des émissions radiophoniques.

+-

    Mme Maria Bernard: Elle n'est pas tellement connue parce qu'on aurait besoin de faire connaître la télévision francophone. Les gens écoutent les choses qui les intéressent, mais on a besoin de la faire connaître davantage.

+-

    Mme Christiane Gagnon: Est-ce que des productions télévisuelles sont produites ici?

+-

    Mme Maria Bernard: Non. De temps en temps, on a une émission qui est produite ici. À l'occasion de la fête du 15 août, l'année dernière, nous avons eu un spectacle qui a été produit ici, à l'Île-du-Prince-Édouard.

    Mme Christiane Gagnon: Diffusé par quel...

    Mme Maria Bernard: Il a été diffusé par Radio-Canada. C'est arrivé une fois en cinq ou six ans. C'est très rare, mais il y a de temps en temps une émission spéciale.

+-

    Mme Christiane Gagnon: Mais ici, il y a Radio-Canada français et CBC anglais.

    Mme Maria Bernard: Oui.

    Mme Christiane Gagnon: À ce moment-là, que fait la télévision française d'ici si elle ne produit pas?

+-

    Mme Maria Bernard: Il y a seulement l'émission l'Atlantique Ce Soir qui est produite ici, et c'est à Moncton. Donc, ça reflète beaucoup l'Acadie du Nouveau-Brunswick, mais très peu l'Acadie de l'Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve. Ça la reflète un petit peu, mais c'est surtout diffusé à Moncton.

+-

    Mme Christiane Gagnon: Combien y a-t-il de personnes ici qui travaillent à la télévision de Radio-Canada?

    Mme Maria Bernard: Parmi les gens qui sont ici, il y en a deux. Celle qui travaille à la télévision, elle est là.

    Mme Christiane Gagnon: Donc, ce sont de petites équipes.

    Mme Maria Bernard: Oui, elle est là.

    Mme Christiane Gagnon: Elles font surtout de l'actualité.

    Mme Maria Bernard: Elle est à la télévision et l'autre est à la radio. C'est difficile de couvrir toute l'Île.

+-

    M. Dominic Langlois: La seule chaîne de télévision française, la chaîne de Radio-Canada, diffuse et produit de Moncton, et la seule représentante que nous avons, c'est la journaliste qui est ici présente et qui représente la télévision française de Radio-Canada.

+-

    Le président: [Note de la rédaction: Inaudible] ...en ce moment?

+-

    M. Dominic Langlois: C'est une longue histoire. Ils ne sont pas dans le même syndicat.

¹  +-(1525)  

+-

    Mme Christiane Gagnon: C'est la Guilde canadienne.

    M. Dominic Langlois: Exactement. Ils travaillent dans le même édifice que les gens de CBC et c'est pour cela qu'ils ne sont pas en grève.

[Traduction]

+-

     Le président: Monsieur Cuzner.

+-

    M. Rodger Cuzner: Oui, je représente Chéticamp, la région dont a parlé Dominic. La station communautaire à Chéticamp est un franc succès, très appréciée par les citoyens de l'endroit. De plus, nous avons une station de télévision communautaire très active et dynamique. On fait beaucoup de programmation à cette station de câblodiffusion.

    Et votre station FM, environ quel pourcentage de la population francophone l'écoute? Et pour répondre à un plus grand auditoire, combien est-ce que cela va coûter?

    Vous ne le savez pas? D'accord.

    Avez-vous des partenariats du secteur privé ou est-ce que vous recevez un soutien commercial pour gérer la station? Vous pourrez peut-être nous donner une idée de votre situation financière, de la taille de votre auditoire actuel, et nous dire ce que vous devez faire pour l'accroître?

[Français]

+-

    Mme Maria Bernard: On a seulement Radio-Canada et on n'a pas de commanditaire. On n'a rien. On a seulement Radio-Canada et on dépend de Radio-Canada.

[Traduction]

+-

    M. Rodger Cuzner: Vous n'avez pas encore la station FM?

[Français]

+-

    Mme Maria Bernard: Radio-Canada est diffusée sur FM. C'est tout.

[Traduction]

+-

    M. Rodger Cuzner: D'accord. Vous n'avez donc pas encore votre station communautaire

    Mme Maria Bernard: Non.

    M. Rodger Cuzner: Oh! Cest dommage.

    Mme Maria Bernard: Nous avons un coordonnateur qui y travaille et qui cherche à établir ce que nous avons à Chéticamp.

    M. Rodger Cuzner: Est-ce qu'on s'en rapproche ou...

    Mme Maria Bernard: Non.

    M. Rodger Cuzner: Vous êtes-vous mis en rapport avec le groupe de Chéticamp? C'est un excellent groupe de gens.

    Mme Maria Bernard: Angus Lafort.

    M. Rodger Cuzner: Angus est sensationnel, en effet.

[Français]

+-

    M. Dominic Langlois: Ils sont présentement en train de faire une étude pour voir les différentes possibilités et essayer de trouver ce qui serait le plus avantageux pour l'Île et le plus faisable sur le plan économique. C'est ce qu'on appelle la deuxième phase. C'est ce qui est à l'étude. Il y a différentes possibilités. Ils vont évidemment rencontrer les gens de Chéticamp et d'autres. Ils ont fait plusieurs démarches, et le processus est en cours. Ils n'ont pas encore arrêté une façon de faire à cause des coûts qui sont trop élevés. Ils n'ont pas encore trouvé la meilleure façon de faire. C'est là que le dossier est rendu maintenant.

[Traduction]

+-

    M. Rodger Cuzner: Vous avez un excellent modèle pour vous inspirer. Je sais que vous avez dû faire face à des défis différents, étant donné les contraintes géographiques et la population un peu éparse, mais avouons-le, ils ont une station qui réussit très bien là-bas.

    Mme Maria Bernard: Et cette station va diffuser sur l'Internet.

    M. Rodger Cuzner: Oui.

    Mme Maria Bernard: Nous pouvons l'entendre sur l'Internet. Nous étions en Louisiane la semaine dernière nous allons pouvoir écouter de la musique cajun à Chéticamp.

    M. Rodger Cuzner: Cela serait une belle occasion pour les artistes d'être entendus.

    Mme Maria Bernard: Nous voulons offrir les mêmes possibilités ici, à l'Île-du-Prince-Édouard pour qu'on puisse diffuser.

[Français]

+-

    Le président: C'est aussi une question d'argent, n'est-ce pas?

+-

    Mme Maria Bernard: Oui.

+-

    Le président: À qui vous adressez-vous pour lever des fonds?

+-

    Mme Maria Bernard: À Patrimoine Canada.

+-

    Le président: Combien une radio communautaire vous coûterait-elle?

+-

    Mme Maria Bernard: Je n'ai pas la réponse. Les gens qui font l'étude sont en train de travailler à cela. On n'a pas les réponses.

+-

    Le président: Donc, lorsque l'étude sera terminée, vous vous adresserez à Patrimoine Canada pour lui demander des fonds.

+-

    M. Dominic Langlois: Il y a un comité qui existe présentement et qui est en train de mettre sur pied cette radio communautaire. Ni Maria ni moi-même ne siégeons à ce comité-là, mais ce comité pourrait certainement donner les réponses aux questions que vous posez présentement. On pourra vous donner ses coordonnées.

+-

    Le président: Oui, je pense qu'il serait utile pour nous que vous demandiez aux gens du comité de nous faire parvenir les chiffres. Ainsi, on aura une idée de ce que représente l'établissement d'une station de radio communautaire.

    M. Dominic Langlois: C'est très détaillé. Ils ont des documents qui sont clairs et qui répondent à toutes les questions.

+-

    Mme Christiane Gagnon: Monsieur le président, je pense que Patrimoine Canada n'appuie pas les radios communautaires au Canada. Je crois qu'il ne donne pas de fonds pour l'établissement d'une radio. Il est possible que je me trompe, mais je pense qu'il ne donne pas de sommes d'argent pour le fonctionnement d'une radio communautaire. La radio communautaire à Québec ne va pas chercher ses fonds là. Elle les trouve dans la province, en particulier au gouvernement du Québec. Elle fait aussi des levées de fonds. Mais ce sera peut-être une voie. C'est une des requêtes qui sont faites: que Patrimoine Canada appuie les radios communautaires.

    Mme Maria Bernard: Oui, c'est une requête qu'on fait: qu'il appuie les radios communautaires.

¹  +-(1530)  

+-

    Le président: Ici, c'est peut-être aussi une question de langues officielles.

    Mme Maria Bernard: Oui.

+-

    Le président: C'est possible.

    Nous sommes bien contents que vous soyez venus ici aujourd'hui et nous vous remercions de votre intervention, qui renforce le message que nous avons reçu de plusieurs communautés de l'Ouest, comme l'a souligné Mme Gagnon. On l'a aussi entendu maintes fois ici même. Nous vous appuyons dans ce que vous voulez faire. Lorsque nous aurons ces documents, ils pourront nous aider à comprendre le problème que vous vivez. Merci beaucoup d'être venus ici.

    Mme Maria Bernard: Merci beaucoup. Merci de nous avoir écoutés.

+-

    Le président: Patrimoine Canada ne donne pas d'argent aux radios communautaires du Québec parce que cela fait partie du programme des minorités. Je crois que c'est là qu'ils vont aller chercher de l'argent.

+-

    Mme Christiane Gagnon: Mais les gens d'autres communautés francophones nous ont dit que Patrimoine Canada n'avait pas d'argent pour cela.

    Le président: Ah, oui?

+-

    Mme Christiane Gagnon: Je ne disais pas cela par rapport au Québec. On nous a dit que Patrimoine Canada n'avait pas d'argent pour cela.

    Le président: Il faudra vérifier.

    Mme Christiane Gagnon: Je serais bien contente s'il en avait.

    Le président: Je l'espère.

[Traduction]

+-

     Nous sommes heureux de souhaiter la bienvenue au Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier qui est représenté par M.Steve Stapleton, président de la section locale 911M et par M. Dan Viau, président de la section locale 21M. Nous avons également la Canadian Media Guild, qui est représentée par M. Ian Petrie.

    Monsieur Stapleton, nous allons vous entendre en premier. Allez-vous partager votre temps avec M. Viau ou représentez-vous les deux?

+-

    M. Steve Stapleton (président, Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier): Non. Dan a son propre exposé. Ian et moi, représentons le volet CBC ici.

+-

    Le président: Très bien. Allez-y, monsieur Stapleton.

+-

    M. Steve Stapleton: Je m'appelle Steve Stapleton. Je suis président de la section locale 911M, CEP à Charlottetown. Je suis vidéo-artiste à l'emploi du CBC à l'Î.P.-É. Je tiens à vous remercier de cette occasion de faire cet exposé.

    À l'Île-du-Prince-Édouard, la radiodiffusion publique peut se résumer en un seul mot: communautaire. Le CBC à l'Île-du-Prince-Édouard fait partie de ce que l'on appelle «le mode de vie in sulaire». Nous avons d'étroits rapports avec notre auditoire à la radio et à la télévision. Nous racontons leurs histoires et diffusons l'actualité sur ce qui se passe dans la collectivité qui habite notre île.

    La société s'inspire de CBC Charlottetown comme modèle de radiodiffusion publique parce que nos liens avec les gens, non seulement ici dans la capitale, Charlottetown, mais également dans notre bureau à Summerside, sont très étroits. Nous fournissons un service aux Prince-Édouardiens et aux Canadiens, ce qui est le mandat de CBC. Mais depuis 15 ans, ce service se détériore à cause des compressions budgétaires du gouvernement. La promesse qu'avait faite le gouvernement de fournir un financement stable ne s'est jamais concrétisée.

    Les Prince-Édouardiens se sont vigoureusement opposés au projet du CBC visant à créer un programme national diffusé à l'heure du dîner, craignant une perte d'identité en tant qu'intervenants du radiodiffuseur public.

+-

     Les employés de la SRC à Charlottetown ont souffert d'un manque de ressources pour la réalisation de notre émission à l'heure du souper, et cela nous a touchés de diverses autres façons aussi. Ces quatre dernières années, nous avons eu deux conflits syndicaux à CBC, et il y en a un en ce moment avec Radio-Canada. La direction prétend qu'elle adopte une attitude dure à cause des questions d'argent.Si c'est le cas, il faut que le gouvernement augmente son appui financier.

    Ayant été à la table de négociation au nom du syndicat, je peux vous assurer que nos demandes ont été plus que raisonnables. Ce que nous ne savons pas, c'est si le problème de l'autre côté vient d'un simple manque de ressources ou d'une mauvaise gestion. La direction a fait un sondage auprès des employés sur le cadre de travail de la SRC. Cette étude a débouché sur le rapport Hay qui a montré que les employés se méfiaient de la direction. C'était il y a un an. Rien n'a vraiment changé depuis.

    Nous avons eu aussi le spectre du président de CBC, Robert Rabinovitch, qui a dit à votre comité qu'il était déçu et inquiet de l'émission Canada Now, ce qui ne nous donne pas trop confiance en l'avenir.

    Je vais maintenant laisser la parole à Ian.

¹  +-(1535)  

+-

     M. Ian Petrie (président, Canadian Media Guild): Merci beaucoup.

    Je m'appelle Ian Petrie. Je suis journaliste de CBC ici à Charlottetown. Je suis le président local de la Guilde canadienne des médias et je vous suis reconnaissant de me permettre de dire quelques mots sur la situation à l'Île-du-Prince-Édouard.

    Comme on vient de vous le dire, la loi sur la radiodiffusion fonctionne dans l'ensemble très bien sur cette île. Il y a un bon mélange de radiodiffuseurs publics et privés. Naturellement, le marché n'est pas suffisamment étendu pour attirer énormément de participation du secteur privé, surtout dans des secteurs à coût élevé comme l'actualité télévisée.

    En ce qui concerne la radiodiffusion publique, quand je suis entré à CBC, et c'était probablement la même chose pour Steve, nous cherchions tout simplement un emploi. C'était un privilège pour un journaliste de travailler pour CBC--dans mon cas, cela remonte aux années 70--parce qu'on avait l'impression qu'on était là simplement pour couvrir les sujets, et qu'on n'avait pas à s'inquiéter des recettes publicitaires ou des réactions négatives des clients qui passaient des annonces publicitaires, que tout ce qu'il fallait faire, c'était faire le meilleur reportage possible et le présenter de façon aussi convaincante que possible. C'est un grand privilège.

    Je dois dire que nous avons énormément de chance de travailler ici, dans l'Île-du-Prince-Édouard. Nous avons un vaste public. Il n'y a pas énormément de concurrence directe du secteur privé. Cela ne veut pas dire que nos émissions sont meilleures que celles des autres. C'est simplement que le public apprécie beaucoup CBC et que c'est un grand privilège pour un journaliste de travailler dans une région où les gens entendent ce que vous faites et où vous pouvez avoir une influence sur la politique gouvernementale.

    Je sympathise avec beaucoup de mes collègues de CBC qui travaillent à réaliser des émissions de l'heure du souper dans d'autres régions du pays où personne ne regarde ces émissions. Ce sont des gens qui ont beaucoup de talent et c'est vraiment triste de faire un travail que personne ne regarde. Je voulais commencer par cela.

    Les choses ont énormément changé depuis 15 ans que je suis ici à l'Île-du-Prince-Édouard. Quand je suis arrivé, il y avait trois téléscripteurs dans l'île. CBC en avait un, le journal un autre et la radio privée le troisième. Le téléscripteur publiait tout ce qui se passait au Canada. Donc, quand on faisait une émission à la radio, c'était vraiment des nouvelles que les gens apprenaient.

    Maintenant, évidemment, avec l'Internet, pratiquement tout le monde peut avoir accès aux nouvelles en permanence. Les choses ont donc énormément changé. Je peux être installé dans le fond de la campagne de l'Île-du-Prince-Édouard et m'amuser à faire les mots croisés du New York Times le dimanche. Cela n'a peut-être pas grand-chose à voir avec le contenu de la Loi sur la radiodiffusion, mais cela risque d'avoir des répercussions sur le travail des journalistes à l'avenir. Il y a naturellement une énorme quantité d'informations disponibles. Le problème, c'est qu'on peut demander aux journalistes d'assurer la qualité de cette information et d'expliquer au public ce qui est important, pourquoi, etc. Je vais vous parler un peu de cette quantité d'informations dans le contexte de stations locales comme celle de Charlottetown.

    CBCa profondément évolué aussi. L'émission locale de l'heure du souper Compass, celle à laquelle Steve et moi-même avons travaillé depuis la fin des années 80, faisait appel aux ressources de CBC, laquelle nous communiquait des informations nationales et internationales que nous pouvions intégrer à notre émission d'une heure. Tout cela a complètement changé. Notre mandat consiste à alimenter le réseau. Pour la direction de lCBC, cela veut dire qu'on peut proposer à un public national des informations locales et régionales.

    Je ne dis pas que c'est une mauvaise chose. C'est très bien que le public national puisse savoir ce qui se passe à l'Ile-du-Prince-Édouard. Mais cela modifie tout de même dans une certaine mesure le choix et la présentation des récits. Au lieu de nous demander simplement ce que souhaite ou ce dont a besoin notre public local, nous devons nous demander ce qui peut intéresser un public national. Comment peut-on présenter les choses pour se conformer à ce mandat?

+-

     Je ne dis pas que c'est totalement négatif. Je dis simplement que cela a modifié subtilement la façon dont nous discutons de nos sujets lors de nos réunions le matin et le choix des sujets qui vont avoir le feu vert. Désormais, il faut que nous soyons convaincus que cela va intéresser le public de Toronto ou de Vancouver. Je dis simplement que cela modifie dans une certaine mesure les sujets que nous présentons.

    Le fait de vivre à proximité de ce que certains appellent une étoile de la mort culturelle met naturellement en évidence l'importance de la radiodiffusion publique. Je n'ai pas besoin de vous donner tous les détails. Au fil des ans, les gouvernements canadiens ont reconnu qu'il était nécessaire d'avoir un appui et une réglementation publics pour garantir la diffusion de récits et de musique canadiens. La création de CBC et l'appui constant à cette société sont évidemment un élément important de cette stratégie.

    J'espère que CBC assure un journalisme de base dans toutes les régions du pays. Dans le meilleur des cas, elle oblige les sociétés privées à assurer une couverture au moins adéquate aussi, ce qu'elles pourraient être tentées d'escamoter si CBC n'existait plus. Ce sont des radiodiffuseurs privés de la région qui me l'ont dit: si CBC ne couvrait pas certains sujets d'une certaine façon ou n'abordait pas certains sujets, ces radiodiffuseurs ne le feraient pas non plus. Mais comme lCBC le fait, comme il y a les ressources voulues pour le faire, ils le font aussi.

    Récemment, après plus de 15 années de compressions budgétaires imposées par le gouvernement conservateur aussi bien que libéral, le gouvernement actuel a augmenté le financement de CBC de 60 millions de dollars par an. Le président de lCBC, Robert Rabinovitch, a essayé de garantir ce montant sur cinq ans, mais cela n'a pas été le cas. Ici à Charlottetown, on n'arrête pas de nous dire que tant que cette augmentation de 60 millions de dollars sera maintenue, Canada Now et l'émission locale d'une demi-heure à l'heure du souper à Charlottetown ont des chances d'être maintenues, et j'encourage donc évidemment le comité à recommander vivemenet au gouvernement de maintenir ce financement supplémentaire.

    Mais j'ajouterais une chose. Je crois que la Loi sur la radiodiffusion s'accompagne de règlements parallèles qui donnent aux radiodiffuseurs privés des montants assez confortables aussi. Il s'agit évidemment de stations qui diffusent les émissions populaires américaines et chez lesquelles on voudrait remplacer les retransmissions américaines par des retransmissions canadiennes, avec toutes les annonces et les publicités qui les accompagnent. En un sens, quand on travaille à CBC, on a l'impression que ces diffuseurs ont une meilleure garantie de financement d'une année sur l'autre que CBC.

    Or, si ces entreprises—et il s'agit évidemment de Global, CanWest et Bell Canada Enterprises—ont emprunté et investi ces profits pour entrer dans le monde de la convergence, c'est leur affaire. Cette question n'est manifestement pas encore réglée.

    Quand nous avons entendu la petite altercation entre Izzy Asper et Robert Rabinovitch à propos des émissions de l'heure du souper et de leurs recettes, nous avons pu constater qu'en ce moment CanWest Global Communications perd énormément d'argent et voudrait bien récupérer ces recettes publicitaires. Je voudrais encourager le comité à ne pas modifier les choses ou porter de jugement pour l'instant, car tout le monde comprend bien que ces entreprises, que ce soit Bell Canada Enterprises ou CanWest Global Communications, ne vont pas continuer à perdre des dizaines de millions de dollars. Le paysage va encore évoluer. Laissons les choses évoluer avant de modifier la Loi sur la radiodiffusion ou la réglementation du CRTC.

    Ces sociétés se sont évidemment lancées dans ces entreprises parce qu'elles pensaient qu'elles rapporteraient gros. Tous les experts disaient que l'avenir, c'était la convergence. Ce n'est pas encore arrivé, et cela arrivera peut-être. Mais ce n'est pas au gouvernement d'assurer la rentabilité de ces sociétés.

    Permettez-moi de dire quelques mots encore sur le rôle du gouvernement dans la radiodiffusion publique à CBC. C'est délicat, car il y a deux ans, quand nous avons entendu dire pour la première fois que CBC allait supprimer les émissions locales de l'heure du souper pour les remplacer par une seule émission nationale, cela ne nous a évidemment pas réjouis. On nous a annoncé qu'on allait ramener de 32 à 6 le nombre d'employés à Charlottetown.

    Je me suis trouvé dans une situation très délicate. Ma crédibilité de journaliste repose sur le fait que je n'ai aucun lien de dépendance à l'égard des députés locaux et du gouvernement provincial. Or, j'ai dû modifier ce rapport car nous voulions lutter contre ce changement à CBC. Nous avons dû faire appel à nos députés locaux et à notre gouvernement provincial. Je sais que j'ai même parlé avec certains des membres de votre comité à ce sujet.

    Je suis très heureux que votre comité ait au moins tenu des audiences et convoqué Robert Rabinovitch pour le mettre sur la sellette en lui posant des questions et en essayant de donner de la publicité à toute cette affaire. Cela a manifestement influé sur la solution. Je ne dis pas qu'on a obtenu la solution parfaite, mais en tout cas elle a été différente.

¹  +-(1540)  

+-

     Il y a deux ans, quand tout ceci a débuté, nous nous sommes dits que nous allions devoir entrer en guerre contre nos patrons à Ottawa et Toronto. Ce que cela m'a appris, c'est qu'il fallait peut-être revoir le financement de CBC, parce qu'en ce moment, c'est un financement d'une année sur l'autre—vous savez, demandez une faveur à Sheila Copps et payez un peu plus cette année dans l'espoir qu'elle sera encore ministre l'année prochaine. Ce n'est pas une formule de financement de CBC particulièrement satisfaisante.

    La Guild canadienne des médias a tenu une conférence à Ottawa à l'automne dernier. Des invités du monde entier sont venus examiner les diverses formules de financement des radiodiffuseurs publics. Je conseille au comité de se procurer au moins les résultats de ces audiences—je crois qu'on en a publié les conclusions—pour envisager une formule de financement de CBC plus stable et moins tributaire de la générosité du gouvernement en place. Ce n'est pas vraiment une bonne formule de financement pour un radiodiffuseur public.

    Merci beaucoup.

¹  +-(1545)  

+-

     Le président: Merci beaucoup, monsieur Petrie.

    Pouvons-nous adresser à votre bureau directeur pour obtenir ces documents?

+-

    M. Ian Petrie: Je veillerai à ce que la direction vous le transmette. Ce sera un plaisir.

+-

    Le président: Si vous pouviez le faire en prenant soin d'en envoyer des exemplaires à notre greffière, nous vous en serions extrêmement reconnaissants.

    Monsieur Viau.

+-

    M. Dan Viau (président, Section locale 21M, Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier): Merci.

    Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, je m'appelle Dan Viau. Je suis le président de la section locale 21M du Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier. Je représente les journalistes des émissions en direct, les employés techniques d'entretien, commerciaux et des services de production d'ATV-CTV à l'Île-du-Prince-Édouard, au Nouveau-Brunswick, au Cap-Breton et à New Glasgow, en Nouvelle-Écosse, ainsi que les employés du routage, de la comptabilité et les employés de bureau d'ATV-CTV à Halifax. En un sens, je présente un peu le point de vue du radiodiffuseur privé par opposition à CBC, ce qui vous explique que nous ayons des exposés distincts.

    Pour vous donner une idée des personnes que Steve et moi représentons, notre syndicat regroupe 150 000 membres qui travaillent dans diverses industries. Vingt mille d'entre eux travaillent dans les médias—la télévision, les journaux, la radio et la réalisation cinématographique indépendante. Nous sommes le plus gros syndicat des médias du Canada. Nos membres sont les gens que vous entendez à la radio et que vous voyez à la télévision ou dont vous lisez les articles de journaux. Ce sont aussi les gens qui travaillent à l'arrière-plan, qui factionnent les caméras, font le travail de créativité, le travail technique et le travail administratif dans les installations des médias de chaque province et territoire.

    Nos membres travaillent à CTV et au Globe and Mail, à CanWest Global, à CHUM, Craig, Rogers, Shaw, Corus, Standard, lCBC, TVOntario et bien d'autres petits radiodiffuseurs et journaux.

    Je vais me concentrer aujourd'hui sur le déclin des émissions locales et régionales ici dans les Maritimes, dans le contexte de votre mandat, des thèmes de la diversité culturelle et de la représentation régionale, de la politique de radiodiffusion et du rôle du CRTC. Le vice-président national de la division des médias de notre syndicat, Peter Murdoch, comparaîtra devant votre comité dans le courant du mois, et il vous parlera de la situation à l'échelle nationale.

    Depuis cinq ans environ, la politique du CRTC consiste à autoriser les radiodiffuseurs traditionnels à se tourner vers des canaux spécialisés pour leur permettre d'affronter la concurrence de l'univers multi-canaux. Quand on parle de la radiodiffusion traditionnelle, on emploie des expressions comme «industrie arrivée à maturité» ou «industrie en déclin». Cela a un effet dévastateur sur la programmation locale et régionale. Par exemple, dans les années 80, ATV employait une centaine de membres de notre syndicat dans l'île-du-Prince-Édouard, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. Aujourd'hui, ce nombre est tombé à 22 dans les divers services opérationnels d'ATV.

    Mais, bien que le nombre d'employés administrant le contenu local et régional à l'intention de notre public dans la région des Maritimes, soit certainement une préoccupation importante, je crois que ce qui doit vous préoccuper plus particulièrement, c'est la disparition de ces émissions locales et régionales que réalisaient ces gens-là.

+-

     Le CRTC autorise les radiodiffuseurs publics et privés à mettre fin aux émissions locales, ce qui est absurde. On utilise maintenant l'infrastructure et la technologie traditionnelles pour diffuser des émissions nationales. Malheureusement, la plupart de ces émissions nationales viennent des États-Unis. Or, les dispositifs de télévision par satellite ou par câble sont mieux adaptés à ces diffusions nationales. Les radiodiffuseurs traditionnels ont un énorme avantage sur le satellite et le câble car ce sont les seuls qui peuvent assurer un contenu local et régional distinct. La popularité des émissions régionales chez le public et parmi les radiodiffuseurs privés le confirme. Mais bien que les téléjournaux soient rentables financièrement, les radiodiffuseurs privés n'ont apparemment pas l'imagination ou la motivation voulue pour réaliser des émissions locales et régionales autres que des émissions d'information.

    Par exemple, dans les années 80 et au début des années 90, ATV--j'y travaille depuis 22 ans--a réalisé tout un éventail d'émissions locales et régionales autres que des émissions d'information à l'intention du public des Maritimes. Il y avait des émissions de loisirs ou de variétés comme Up Home Tonight, Up and Coming, Maritime Country, The Andy Winters Show et The Joan Kennedy Show ou New Faces. Dans ces émissions réalisées localement, on pouvait voir des musiciens, des chanteurs, des danseurs, des comédiens et des narrateurs des Maritimes, ce qui les faisait connaître au public des Maritimes et stimulait la créativité dans l'industrie du spectacle dans la région.

    Or, aujourd'hui, malgré un succès extraordinaire dans les clubs, lors de soirées dansantes ou lors de soirées de bienfaisance, des groupes comme Glamour Puss Blues Band au Nouveau-Brunswick, qui ne peuvent pas se faire connaître parce qu'ils ne sont pas diffusés localement, en sont réduits à essayer de convaincre les réalisateurs de Toronto de les faire passer à l'émission Open Mike with Mike Bullard de CTV. Pour autant que je sache, malgré plusieurs années d'efforts, malgré leurs talents spectaculaires et leur popularité considérable dans notre région, ce groupe n'y est toujours pas parvenu.

    Parmi les autres émissions locales et régionales qui ont disparu, en partie au moins à cause de la nouvelle politique du CRTC, mentionnons l'émission scientifique qu'ATV produisait pour les enfants à Halifax, Wonder Why, et des émissions sportives comme Atlantic Grand Prix Wrestling et l'émission de course attelée At the Track.

    Certains diront peut-être que ces émissions ne seraient plus viables vu les attentes du public d'aujourd'hui, mais il reste que les radiodiffuseurs traditionnels ne sont plus motivés à élaborer de nouvelles émissions pour diffuser un contenu local ou régional à un public local et régional. Ces émissions ont tout simplement disparu. On ne les a pas remplacées, et il est peu probable qu'on les remplace à l'avenir.

    Plus près de chez nous, l'Île-du-Prince-Édouard a une culture distincte merveilleuse que les habitants de l'île veulent retrouver dans les émissions de leurs diffuseurs traditionnels. Le public énorme qui suit l'émission de CBCà l'heure du souper, Compass, et le tollé public lorsqu'on a annoncé sa suppression, atteste bien de la soif d'émissions locales de cette collectivité.

    Je crois que c'est dans toutes les trois provinces des Maritimes qu'on retrouve cette inspiration à des émissions locales et régionales reflétant la culture et les talents des Maritimes. Or, si la tendance actuelle se poursuit et si le gouvernement n'exige pas, par le biais de la Loi sur la radiodiffusion et du CRTC, que les radiodiffuseurs traditionnels s'engagent fermement et sérieusement à réaliser des émissions locales et régionales, les gens des Maritimes vont probablement disparaître à tout jamais de la télévision en dehors des émissions d'information.

    En conclusion, c'est dans les émissions locales et régionales que l'on trouve le plus de contenu canadien intéressant et viable pour les habitants de l'Île-du-Prince-Édouard et des Maritimes. L'idéal de contenu canadien tel que le conçoit le CRTC, c'est-à-dire quelque chose qui peut affronter la concurrence internationale et se vendre à l'étranger, signifie la négation des émissions locales et régionales. Sans infrastructure locale, sans personnel et sans locaux, les radiodiffuseurs sont pratiquement dans l'impossibilité de présenter la vie des Maritimes à un public national. Une version d' Anne des Pignons verts réalisée à Toronto ne présente pas la culture ou les habitants de l'Île-du-Prince-Édouard au reste du Canada.

    En autorisant la concentration de la propriété de la radiodiffusion privée, on n'a pas rendu service à l'Île-du-Prince-Édouard et aux Maritimes. Comme je vous l'ai dit, ATV avait beaucoup plus d'émissions locales et régionales qu'ATV-CTV maintenant. Et comme les radiodiffuseurs privés ont réduit leurs émissions locales et régionales, CBC a pu aussi réduire ses émissions locales et régionales. Si CBC a une position solide dans une collectivité, elle encourage la concurrence des radiodiffuseurs privés au niveau de cette communauté.

    Je vous remercie du temps que vous m'accordez et je vous invite instamment à avoir la volonté politique d'agir au mieux des intérêts de l'Île-du-Prince-Édouard et des gens des Maritimes.

¹  +-(1550)  

+-

    Le président: Je vous remercie tous les trois pour ces exposés clairs et mûrement réfléchis.

    Monsieur Abbott, vous pouvez continuer à poser vos questions.

+-

    M. Jim Abbott: Merci.

    J'ai constaté que quelques-uns d'entre vous, sinon vous tous, avez écouté les précédents intervenants. Vous vous souvenez que j'ai dit qu'une des questions essentielles auxquelles s'attaquenotre comité, c'est toute cette question de la radiodiffusion locale et de la présence locale.

    Je ne sais pas vraiment si on peut considérer que c'est quelque chose d'acquis, mais convenons pour les besoins de cette discussion qu'il est acquis qu'en raison de la convergence, en raison de la réalité à laquelle sont confrontés les radiodiffuseurs privés et en raison des conditions de financement auxquelles est confrontée CBC, la disponibilité des radiodiffuseurs privés traditionnels et de CBC--et nous parlons de télévision--va demeurer limitée. Si nous pouvons partir de ce principe, j'aimerais reprendre avec vous la thèse que j'évoquais avec les représentants de la communauté francophone qui viennent de comparaître.

    Sachant que vous avez une position à défendre puisque vous représentez les gens qui travaillent dans ce secteur, ma question n'est peut-être pas juste, mais je vais quand même vous la poser. Si la compagnie locale de câblodiffusion était tenue par un règlement ou une directive du CRTC de mettre un créneau de quatre heures par soir, de 17 h 30 à 21 h 30, à la disposition d'une entreprise locale, qui pourrait être une entreprise sans but lucratif ou un groupe de bénévoles locaux qui organiseraient ensemble des émissions de variété, j'ai l'impression qu'on pourrait permettrait aux gens du Cap-Breton et de l'Île-du-Prince-Édouard de se voir à la télévision en choisissant cette chaîne.

    Je sais bien que c'est un défi pour vous et je comprends bien que c'est un défi particulièrement lourd puisque vous défendez les moyens d'existence des travailleurs de ce secteur. Cela va certainement influer sur vos commentaires, mais j'aimerais bien avoir votre réaction à cette idée, juste pour sortir un peu des sentiers battus.

    Le président: Monsieur Viau.

¹  +-(1555)  

+-

    M. Dan Viau: Merci.

    Je comprends bien ce que vous voulez dire. Je pense que les radiodiffuseurs traditionnels tirent leur force du fait que nous tenons effectivement aux emplois, et personnellement je ne pense pas que ces emplois doivent nécessairement être liés à la radiodiffusion privée ou publique, mais que cela peut aussi être des emplois dans des entreprises de production indépendantes. Néanmoins, je crois que les radiodiffuseurs privés et publics traditionnels réalisent des émissions de qualité grâce à leur niveau d'expertise, et que ce serait rendre un bien mauvais service à la population que de s'en remettre simplement à la câblodiffusion et éventuellement à des émissions réalisées par des bénévoles.

    Je ne veux critiquer personne, mais nous avons depuis longtemps une émission locale de loisirs qui est diffusée sur le câble, quelque chose du genre Country Jamboree. C'est une émission superbe que les gens aiment bien, mais si vous regardez par exemple l'émission que nous faisions à ATV, Up Home Tonight, il n'y a vraiment pas de comparaison possible. Le calibre de l'émission, la qualité de la réalisation étaient bien supérieurs à ce qu'on peut faire dans une émission communautaire locale câblodiffusée. L'émission était diffusée par ATV dans toutes les Maritimes, et pas seulement pour le public de l'Île.

+-

     Disons que quelqu'un qui passe à une émission de ce genre, qui est réalisée par un radiodiffuseur traditionnel dans le genre de studio que nous avons, avec des gens qui sont des experts et des professionnels, la différence est énorme. Les choses se passent sur un plan complètement différent pour les artistes et le public. Je crois que c'est néfaste pour tout le monde, aussi bien les artistes que le public, de dire qu'on va laisser une chaîne communautaire prendre la relève. Certes, cela permet d'éviter la disparition totale de cette possibilité d'avoir un contenu local, mais c'est une compensation minime pour une perte énorme.

º  +-(1600)  

+-

    M. Ian Petrie: Encore deux ou trois autres points.

    Il y a un problème qui se pose dans l'immédiat du fait que ce ne sont pas tous les habitants de l'Île qui, par exemple, reçoivent la chaîne locale avec le câble. Nous avons eu beaucoup de discussions à ce sujet il y a deux ans quand on a voulu éliminer l'émission locale de l'heure du souper. La question a suscité beaucoup de discussions parmi un grand nombre de créateurs et de personnes intéressantes qui cherchaient une autre solution. Nous avons ainsi examiné un certain nombre de propositions. Je vais vous dire deux choses.

    Quand Peter Gzowski est mort, j'ai été frappé notamment par le fait que les gens avaient l'impression de se retrouver en lui dans la façon qu'il avait d'aborder les sujets qu'il présentait à son émission Morningside, parce que, très souvent, il se rendait sur place dans les régions rurales. Les choses intéressantes qui se passent au Canada, c'est dans ces régions qu'on les trouve. Les citadins--même s'ils ne sont pas touchés directement--trouvent leur inspiration dans ce qui se passe dans les villes.

    Je crois que vous êtes de l'Alberta. Il me semble...

    M. Jim Abbott: De la Colombie-Britannique.

    M. Ian Petrie: Vous savez vous-même que la population a beau ne pas être très nombreuse, il se passe bien des choses dans les endroits où les gens vivent de la pêche ou de l'exploitation forestière. C'est dans ces régions qu'on trouve l'essence même du Canada.

    Je ne dis pas que nous n'essayons pas de protéger nos emplois et tout le reste. Je dis simplement que les émissions de nouvelles que nous présente le plus souvent le câble ici--je ne sais pas ce qu'il en est dans d'autres régions du Canada--ont un caractère très amateur. J'ai participé comme bénévole à certaines de ces émissions.

    Je dirais que les réseaux nationaux, CBC y compris, du fait qu'ils reçoivent des fonds du gouvernement et du secteur privé, en diffusant, par exemple, l'émission West Wing, ont l'obligation d'exprimer ce qui se passe dans ces régions.

    Il ne s'agit pas simplement de permettre aux insulaires de se voir eux-mêmes, mais de faire en sorte que ce qui se passe dans l'Île soit présenté aussi aux autres Canadiens. Je sais bien que j'ai parlé tout à l'heure des inconvénients du nouveau rôle que nous sommes appelés à jouer, mais j'ai aussi essayé de nuancer mon propos en disant qu'il en est résulté des changements subtils dans notre façon de faire les choses.

    Il y a des centaines de façons de s'y prendre. On peut se promener avec une caméra vidéo ou envoyer sur Internet un reportage au sujet de l'ouverture ou de la fermeture d'une usine de transformation de poisson à Souris. Il est tout à fait possible de recueillir l'information et de la diffuser. Il y a bien des façons différentes et plus économiques de le faire, j'en suis sûr, que ce qu'on fait à l'heure actuelle. La population est-elle bien desservie? Les autres Canadiens sont-ils bien desservis? Je dirais que non, pas en ce moment.

+-

    M. Jim Abbott: J'essaie en fait de jrester objectif, car comme vous l'avez dit vous-même, monsieur Petrie, les nouvelles sont disponibles en continu sur Internet...

    M. Ian Petrie: Oui.

    M. Jim Abbott: ...ce qui représente un changement. Le changement tient, dans certains cas, à la convergence, mais il tient aussi de nos jours au progrès technologique. Aussi une station peut maintenant faire avec une ou deux personnes ce qu'elle faisait auparavant avec huit ou dix. J'essaie donc de voir les choses différemment. Je comprends...

+-

    M. Ian Petrie: Oui. Il y a deux ans, nous avons perdu le tiers de ceux qui travaillaient ici, précisément pour cette raison. Nous avons maintenant des vidéo journalistes. Au lieu d'avoir deux personnes, nous n'en avons maintenant plus qu'une.

    Il ne fait aucun doute que la situation est appelée à changer encore d'ici quelques années. Nous n'aurons même pas besoin de nous déplacer, nous pourrons simplement monter notre reportage et l'envoyer sur l'Internet à partir de Souris. Tout cela s'en vient. Le nombre d'emplois va sans doute changer en conséquence.

    M. Jim Abbott: Très bien. Merci beaucoup.

[Français]

+-

    Le président: Madame Gagnon.

    Mme Christiane Gagnon: Monsieur Viau voulait intervenir.

[Traduction]

+-

    M. Dan Viau: La convergence technique est certainement une réalité. Il ne fait aucun doute que nous n'avons plus besoin de techniciens à la régie ni pour s'occuper des bandes comme auparavant. Le changement va se poursuivre. Le problème tient toutefois à l'attitude de l'entreprise envers cette réalité. Parce que la convergence technique lui permet de réduire ses coûts et ses activités, elle en a conclur qu'elle pouvait aussi réduire et converger le contenu, et le nombre d'endroits d'où il provient.

    La technologie nous permettrait maintenant d'installer une caméra sur le toit d'un immeuble à Charlottetown, de filmer en direct et de diffuser ensuite le signal aux téléspectateurs de toute la région maritime ou du Canada. Ce que les téléspectateurs verraient ainsi n'aurait toutefois pas beaucoup de sens s'il n'y avait personne pour leur expliquer ce qu'ils voient et leur présenter le contexte.

º  +-(1605)  

+-

    Le président: Madame Gagnon.

[Français]

+-

    Mme Christiane Gagnon: Bonjour. Je m'excuse de ne pas avoir pu entendre vos témoignages; j'ai dû faire une entrevue à Radio-Canada, à la chaîne française. Je vais donc procéder à tâtons avec mes questions.

    Ce que je trouve le plus triste, concernant la production locale et régionale, c'est que la perspective des travailleurs du domaine de l'information et de celui de la production télévisuelle et radiophonique va se perdre à la longue. Je pense que c'est un des impacts importants qu'aura la réduction de la radiodiffusion régionale et locale.

    Dans le cas où on investirait plus d'argent pour augmenter le nombre de productions locales et régionales, disposeriez-vous des infrastructures et des ressources humaines nécessaires?

[Traduction]

+-

    M. Ian Petrie: Je vais répondre à cette question.

    Excuse me, my French is not too good, alors je vais parler anglais.

[Français]

+-

    Mme Christiane Gagnon: Ce n'est pas grave.

[Traduction]

+-

    M. Ian Petrie: Je suis sûr que, partout où vous irez au Canada, vous allez entendre des gens dire qu'ils veulent plus d'argent, plus de fonds, et ainsi de suite. Je comprends très bien dans quel monde vous vivez. Ce que j'entends les gens qui vivent à Charlottetown et ailleurs dire, qu'ils font partie des plus grands réseaux tel que celui de CBC ou de CTV, c'est que c'est proportionnel. À mesure que CBC a rétréci, nous avons dû en subir les contrecoups. Mais, si les fonds augmentent, nous aimerions que notre part augmente également.

    Oui, bien sûr, je crois qu'il y a beaucoup de gens plein de talent—Gretha Rose était ici—qui seraient ravis de travailler à la programmation artistique ou à quelque chose de ce genre. C'est un état d'esprit qui règne actuellement à CBC et chez les entreprises privées qui perdent beaucoup d'argent du fait de la convergence et de toutes ces choses: elles doivent continuer à couper dans le gras. Allons-nous atteindre le fond à un moment donné? La situation va-t-elle changer en mieux? Espérons-le.

    La vie dans les Maritimes est merveilleuse. Si vous avez un emploi, c'est un endroit idéal où vivre. Et je ne crois pas qu'il y aurait le moindre problème à attirer des gens talentueux pour faire ce type de programmation. Steve et moi sommes dans la cinquantaine, vous voyez bien, et il ne nous reste plus beaucoup de temps avant la retraite. Je m'inquiète plutôt pour la génération qui nous suit; je me demande si elle aura les mêmes possibilités que nous. C'est une inconnue. Par contre, si les fonds étaient disponibles, bien sûr, il y a des gens talentueux qui sont plus que prêts à produire ces narrations, ce contenu artistique et culturel que vous espérez.

+-

    M. Dan Viau: Bien que j'envisage les choses d'un point de vue syndicaliste, qui croit à l'importance des bonnes conditions de travail et de toutes ces choses, je ne prétends pas que ceux qui offrent cette programmation doivent nécessairement travailler pour un radiodiffuseur privé ou public. Cela peut être produit indépendamment.

    Si je me préoccupe des conditions de travail et des droits de ces travailleurs, je n'ai qu'à faire le boulot de tout bon syndicat, et de les syndiquer. S'ils travaillent pour une maison de production privée, si ce ne sont pas les employés d'un radiodiffuseur public, il nous appartient d'agir en conséquence. Les gens sont là et les installations restent là également. Je crois que les locaux de production, les compétences et la technologie qui permet d'offrir ce contenu régional ou local n'ont pas disparu. On n'a pas tout liquidé.

[Français]

+-

    Mme Christiane Gagnon: J'aimerais que vous me donniez votre impression sur un pourcentage qui nous a été donné par Radio-Canada. On dit que l'émission Canada Now rejoint 65 p. 100 des téléspectateurs de l'Île-du-Prince-Édouard. Face à une telle cote d'écoute, il y a beaucoup de diffuseurs qui seraient jaloux.

    Est-ce que Canada Now représente bien la communauté de l'Île-du-Prince-Édouard? Je ne connais pas l'émission; en fait, je connais plus les émissions du Québec, mais il reste que ça semble être assez populaire. Est-ce que les gens se retrouvent dans une émission comme Canada Now?

[Traduction]

+-

    M. Ian Petrie: Je tâcherai volontiers de répondre à cela. Oui, je crois que les gens de Île-du-Prince-Édouard voient ces émissions. Je crois par contre que CBC a beaucoup perdu de la saveur que conféraient les informations régionales.

+-

     Il y avait, naguère, un programme d'une heure, au cours duquel on diffusait des informations locales, régionales, nationales, et internationales ainsi que les actualités. Cette émission ne dure plus qu'une demi-heure. Soustrayez le temps consacré aux annonces publicitaires, et il reste de 18 à 22 minutes. C'est presque comme le titre de l'émission This Hour Has 22 Minutes. Il nous faut de 12 à 15 minutes pour faire notre bulletin d'information locale, la météo et une interview. Une fois cela fait, il ne reste guère de temps.

    Nous n'apprenons donc plus ce qui se passe au Nouveau Brunswick, en Nouvelle-Écosse ou à Terre-Neuve sur les ondes de CBC. À une certaine époque, il y avait l'émission The Maritimes Tonight, qui était en fait le bulletin de nouvelles régionales de 23 heures. On pouvait écouter cela pour savoir ce qui se passait à Terre-Neuve, en Nouvelle-Écosse ou au Nouveau Brunswick. Cette émission n'existe plus.

    Je voudrais que les habitants de Île-du-Prince-Édouard voient ce qui se passe ici. Nous avons la possibilité d'envoyer nos bulletins au réseau, et ils sont diffusés aux émissions Canada Now ou The National ou ailleurs encore. Mais ce qui manque dans tout cela, actuellement, ce sont les informations régionales. Donc, nous avons certainement perdu quelque chose.

º  +-(1610)  

+-

    Le président: Monsieur Viau.

+-

    M. Dan Viau: Si on jette un coup d'oeil sur CBC, le réseau anglais de Radio-Canada, avec la perspective d'un radiodiffuseur privé, je crois qu'il est important de savoir ce qu'étaient les cotes d'écoute avant les changements. Pour l'émission d'information de l'heure du souper, les cotes d'écoute de CBC ont diminué de 17 p. 100. Donc, si une cote d'écoute de 65 p. 100 peut paraître splendide, il faut se rendre compte qu'elle était beaucoup plus élevée avant. CBC a perdu cet auditoire. Peut-être qu'une partie de cet auditoire est passé chez nous. Mais ni nous, ni Global n'avons investi plus de ressources, d'efforts ou d'argent pour combler cette lacune.

+-

    Le président: Monsieur Harvard.

+-

    M. John Harvard: Oui, et bien, c'est vrai. Cela n'est pas très surprenant.

    Une des choses intéressantes dans ce débat, c'est que depuis 10 ou 15 ans, il y a eu beaucoup de progrès technologiques qui ont profité aux propriétaires des entreprises de radiodiffusion. Ils ont pu réaliser d'énormes économies grâce à la technologie. On aurait cru que, s'ils avaient le moindre engagement envers la programmation locale et régionale ou pour améliorer la programmation des bulletins de nouvelles ou de la programmation autre que celle des actualités, ils auraient pris une partie de ces économies et les auraient investies dans ce type de programmation. Mais ce n'est pas ce qu'ils ont fait. Ils ont simplement réalisé toutes ces économies et les ont empochées.

    Un des problèmes, c'est que les non-initiés, les spectateurs, ne savent pas vraiment quand ils sont en train de regarder de l'information mal faite. Il faut de l'argent pour faire une recherche sur un événement. Il faut de l'argent pour donner le contexte.

    Vous êtes actuellement vidéo journaliste, ici, à l'Île-du-Prince-Édouard. Vous êtes le seul pour CTV. Vous avez pas mal de travail à faire. Vous voici, vous balladant, avec une caméra et un crayon. Vous tâchez de faire un reportage. À moins d'être Superman, vous n'allez pas pouvoir faire du très bon boulot, à moins que vos employeurs ne disent «Très bien, Dan, nous allons te donner une semaine avec ta caméra et ton crayon, et tu pourras faire quelque chose de bien». Mais j'imagine qu'on ne va pas vous donner une semaine, n'est-ce pas? Vous allez devoir le faire en une journée--et peut-être même faire plus qu'un seul reportage.

    Je ne sais pas au juste ce que je vous demande, sauf que, depuis un certain temps, je me dis qu'il y a là un problème de financement. Vous avez demandé: comment trouver plus d'argent? Je vois peut-être le moyen de donner plus d'argent à CBC, mais je ne vois pas comment remettre de l'argent aux radiodiffuseurs privés ni comment les forcer à faire plus de programmation régionale.

    On peut mener un cheval à l'abreuvoir, mais on ne peut pas le forcer à boire. On peut dire à CTV ou à Pay-TV ou à qui vous voudrez, «voilà, vous devriez favoriser tel ou tel type de programmation». Eh bien, si ce n'est pas payant, de deux choses l'une: ou ils font faillite, ou ils livrent un produit tellement moche qu'aucun spectateur ne s'y intéresse.

    Voulez-vous répondre à cela, Dan?

+-

    M. Dan Viau: Je ne connais pas la réponse.

    Je crois que le CRTC doit contraindre les radiodiffuseurs privés à produire et à offrir un contenu local et régional.

+-

    M. John Harvard: Comment fait-on cela?

+-

    M. Ian Petrie: À une certaine époque, si l'on tirait des recettes publicitaires locales de Sydney ou de Charlottetown, il fallait présenter également une émission d'actualités locales. Cela a changé, il y a environ six ou sept ans.

    À l'époque où Compass durait toute une heure et connaissait les grandes cotes d'écoute dont nous avons parlé plutôt, nous obtenions pour un million de dollars par an de recettes publicitaires locales. Je ne dis pas que CBC y gagnait; l'émission coûtait peut-être 1,2 million de dollars, ou quelque chose de semblable. Mais nous avions des recettes publicitaires considérables.

    J'entends constamment le conseil d'administration de CBC dire que, si l'émission Canada Now est maintenue dans sa forme actuelle--ce qui ne fonctionne pas très bien, d'après M. Rabinovitch et d'autres, je crois--c'est, entre autres choses, parce que CBC ne peut pas se permettre de perdre encore plus de recettes publicitaires locales.

+-

     Les émissions présentées à l'heure du dîner peuvent rapporter beaucoup. Un grand nombre de téléspectateurs de la région sont devant leur poste de télévision. À l'exception de Charlottetown, c'est le réseau CTV qui possède les émissions locales présentées à l'heure du dîner, lesquelles lui rapportent beaucoup.

    Il va sans dire que, tant qu'il n'y aura pas une vive concurrence pour l'émission de Dan, on va simplement continuer à gruger les ressources, car où vont aller les gens ? Si vous voulez que la pizzeria locale que vous exploitez à Halifax soit rentable, il faut qu'une émission de nouvelles locales soit présentée pour pouvoir y faire de la publicité, ce qui, je le répète, était la façon de procéder dans le temps. Vos remarques sont tout à fait pertinentes et la réponse que vous cherchez à obtenir n'est pas claire.

º  +-(1615)  

+-

    M. Dan Viau: J'aimerais vous suggérer une idée originale, si je peux m'exprimer ainsi.

    Le magasin Eaton de Charlottetown a fermé ses portes il y a deux ans. Fait surprenant toutefois, le magasin Eaton de Charlottetown était rentable. Toutefois, il ne correspondait pas à la vision que la haute direction de la chaîne avait d'un magasin Eaton ou du niveau de bénéfices requis pour ce que cela vaille la peine, et c'est pourquoi le magasin a dû fermer. Il est bizarre de fermer un magasin qui est rentable parce qu'il ne correspond pas à une sorte de vision très générale du genre de chiffre d'affaires qu'il doit réaliser pour qu'il vaille la peine de s'en préoccuper.

    Je crains que les radiodiffuseurs privés avec leur mentalité de convergence estiment que si l'entreprise ne gagne pas assez d'argent, elle est trop peu importante pour la conserver. Je pense que c'est dans une certaine mesure la situation que l'on constate.

    Je ne sais pas comment on pourrait présenter les choses au CRTC. Une émission de variétés produite dans les Maritimes est-elle rentable? Est-ce là la question? Ou s'agit-il plutôt de voir si elle est suffisamment rentable pour que les comptables minutieux de Toronto estiment qu'il vaut la peine de la présenter?

+-

    M. John Harvard: Soyons réalistes. Les radiodiffuseurs privés ne sont pas des philanthropes. Ce sont des gens d'affaires et ils agissent d'une certaine façon pour maximiser leurs bénéfices. Si leur entreprise est cotée à la Bourse de Toronto, ils vont devoir soutenir la concurrence des autres entreprises pour attirer les investissements. Si mon taux de rendement est de 5 ou 10 p. 100 et que celui de mon concurrent atteint 15, 20, 25 ou 30 p. 100, où croyez-vous que les investisseurs vont mettre leur argent? Ils vont confier leurs placements à l'autre entreprise, et avant que j'aie le temps de réagir, la valeur de mes actions va être pratiquement nulle. C'est la réalité du capitalisme et c'est ce qui se passe.

    Je pense que nous refusons de voir les choses telles qu'elles sont. Nous nous lamentons et pleurnichons, mais il n'en demeure pas moins que nous sommes confrontés à certains faits incontournables. C'est une énigme.

+-

    M. Steve Stapleton: C'est un peu comme pour le réseau CBC. Nous avons d'excellentes cotes d'écoute ici. Nous sommes une petite province—avec 138 000 téléspectateurs—mais nous avons les meilleures cotes du pays. Nous avons dû subir les mêmes compressions que tous les autres Canadiens, puisqu'elles se sont appliquées à tout le pays. On aurait pu nous laisser tranquilles, mais c'était impossible.

    Je ne sais pas comment on peut s'en sortir, étant donné la petitesse de notre marché. Il en va de même à Terre-Neuve: cette province venait juste après nous; nous avons une population peu importante et malheureusement, les responsables tiennent compte de ce qui se passe dans le reste du pays pour prendre leurs décisions.

+-

    M. Ian Petrie: J'ajoute que lorsque Steve et moi avons parlé de la radiodiffusion publique... J'imagine que c'est lorsque le radiodiffuseur public joue un rôle encore plus important, si le marché n'est pas susceptible d'attirer un radiodiffuseur privé.

    Vous avez tout à fait raison de dire que les radiodiffuseurs privés vont s'intéresser aux marchés où ils peuvent gagner de l'argent, et il n'y a rien à redire à cela. Ils vont faire un excellent travail car ils veulent que les gens regardent leurs émissions. En Colombie-Britannique et dans d'autres provinces semblables, ils gagnent beaucoup d'argent et font du bon travail.

    Ce que nous essayons de dire--et cela ne surprendra aucun d'entre vous--c'est que, dans le cadre de son mandat et grâce aux deniers publics dont elle dispose, CBC devrait offrir une sorte de journal télévisé dans un endroit comme l'Île-du-Prince-Édouard.

+-

    Le président: Pouvez-vous attendre que d'autres questions soient posées, car il ne nous reste que 15 minutes. Nous devons nous rendre à Moncton.

    Monsieur Cuzner, vous avez la possibilité de dire ce que vous voulez.

+-

º  +-(1620)  

+-

    M. Rodger Cuzner: Je suis tout à fait conscient des changements survenus au sein du personnel de reporters attitrés de CBC ces dernières années. Je me souviens qu'il y a six ou sept ans, lorsqu'il se produisait un événement intéressant, trois personnes sautaient du camion de CBC, un cameraman et un journaliste, tandis que les journalistes du radiodiffuseur privé ne couvraient même pas l'événement. Il va sans dire qu'un grand nombre de concessions ont été faites.

    À Sydney, il y a Frank King. Il arrive, il installe sa caméra et procède à l'interview. Il doit ensuite retourner dans son bureau et faire la mise en forme de son interview, mais entre-temps il doit faire le changement d'huile de le camion. La polyvalence est à l'ordre du jour et très présente dans l'industrie de la radiodiffusion dans cette province.

    Si je discutais avec des représentants syndicaux des Mineurs unis d'Amérique et que je leur demandais ce que les gestionnaires de DEVCO font de mal—dans quels secteurs des économies sont possibles, où sont les améliorations possibles, les choses dont ils ne devraient pas s'occuper du tout—ils pourraient certainement énumérer une liste de choses qui prouvent que dans certains cas, la direction n'a pas pris les mesures les plus judicieuses ou vers quels secteurs il faudrait réorienter les efforts.

    Est-ce ce qu'il nous faudrait faire? Avez-vous des suggestions, pour ce qui est du radiodiffuseur national au moins, selon lesquelles... Y a-t-il des cas de mauvaise orientation? Y a-t-il des secteurs susceptibles d'amélioration?

+-

    M. Ian Petrie: Je me souviens--vers la fin des années 80--d'avoir lu un éditorial de Jeffrey Simpson publié dans le Globe dans Mail.Ayant travaillé à l'Île-du-Prince-Édouard, ce qui constitue un énorme privilège, je le répète, je n'avais aucune idée—et ce n'était que pure naïveté de ma part—que les émissions présentées à l'heure du dîner par CBC avaient une cote d'écoute très faible dans la plupart des régions du pays. C'était la première fois qu'il faisait valoir l'idée que CBC ne devrait pas continuer de dépenser les deniers publics dans les régions où personne ne suivait ses émissions. Il valait mieux présenter un bon bulletin de nouvelles nationales.

    C'est manifestement une idée très convaincante. Le principe de Canada Now adopté il y a environ deux ans n'est pas tombé du ciel. CBC a fait l'objet de coupures énormes depuis 1985 et, à partir de 1995, elle a dû subir d'importantes compressions budgétaires comme toutes les institutions publiques.

    Ce que nous cherchons continuellement, je suppose, c'est d'être convaincus que, tant que nous faisons notre travail, que les gens suivent les émissions... Ce qui nous inquiète, en toute franchise, Rodger, c'est que nous sommes passés d'une émission d'une heure à une émission d'une demi-heure. M. Rabinovitch et d'autres gestionnaires de la Société nous disent que cette émission d'une demi-heure ne marche pas non plus très bien. Le nombre de téléspectateurs a diminué. C'est l'émission de Kevin Newman diffusée au réseau Global qui l'emporte sur celle de Ian Hanomansing, dans la plupart des régions du pays.

    Nous nous inquiétons en nous demandant ce qui nous attend. On ne va pas rétablir l'émission d'une heure. Les responsables n'admettront jamais que cela n'a pas produit les résultats escomptés—que les gens de l'Île-du-Prince-Édouard avaient raison et qu'il faut donc rétablir l'émission d'une heure. Quelle sera la prochaine décision? S'agira-t-il d'une émission régionale diffusée à partir de Halifax, un peu comme le fait Dan? S'agira-t-il d'une émission nationale d'une heure avec six personnes à Charlottetown?

    Je ne réponds pas à votre question parce que, à mon avis, la direction de CBC a dû apporter certains changements. Il est évident que lorsque M. Rabinovitch est entré en fonction, il a dit à Eddie Goldenberg ou au premier ministre ou à celui qui a conçu l'entente qu'il était effectivement prêt à apporter des changements. Je l'ai entendu prendre la parole à l'émission As It Happens, le jour même de son entrée en fonction; il a dit qu'il aimait bien les émissions de radio de CBC, mais pas les émissions télévisées, et surtout les émissions présentées le soir à l'heure du dîner. Il n'a jamais changé d'avis depuis le jour où ce mandat lui a été confié.

    Je m'inquiète à l'idée qu'il y ait des compromis avec les radiodiffuseurs privés pour essayer d'échanger les émissions à l'heure du dîner pour la diffusion des émissions sportives. Va-t-on en arriver à ce genre d'entente? Je n'en ai aucune idée. Je ne suis évidemment pas dans le secret de ce genre d'entente.

    Ce que nous demandons, je suppose, c'est qu'on tienne compte du fait que, si l'on est à l'Île-du-Prince-Édouard—ainsi qu'à Fredericton et ailleurs, je pense—nous offrons un service qui n'existerait pas autrement. Nous faisons notre part. Nous fournissons du matériel au réseau. Nous ne sommes pas un fardeau. Nous ne posons pas de problème à CBC. Nous aimerions à l'occasion l'entendre dire à nos maîtres de Toronto, mais ce n'est pas souvent le cas.

    Tout ce que votre groupe pourra faire pour déclarer que des émissions locales—et non régionales, car c'est un mot lourd de sens dans cette région... C'est un peu comme une émission diffusée à partir de Halifax et qui s'applique à toute la région. Ce n'est pas ce que nous voulons dire. Nous voulons vraiment dire locale.

    Le président: Je crains que vous ne vous écartiez...

    M. Ian Petrie: Je le sais. Je m'égare un peu.

+-

    Le président: Non, vous ne vous égarez pas. Vous devenez de plus en plus passionné, à mesure que le temps passe. C'est compréhensible, et vous n'avez donc pas à vous en excusez.

    La parole est à Madame Lill.

º  +-(1625)  

+-

    Mme Wendy Lill: Merci beaucoup de votre présence.

    J'aimerais dire une chose. Vous savez certainement que les Néo-démocrates sont des députés syndiqués; il existe une section locale du SCEP. Nous sommes les seuls employés sur la Colline à être syndiqués.

    J'aimerais dire à mon camarade de l'autre côté de la table que le CRTC a un rôle à jouer dans l'orientation de la radiodiffusion publique, pour offrir des émissions à contenu local et régional. On a demandé pourquoi les gros radiodiffuseurs privés devraient faire leur part. Eh bien, conformément aux dispositions de la Loi sur la radiodiffusion, ils peuvent utiliser les ondes publiques et sont donc tenus de rendre quelque chose en échange. C'est un juste de retour des choses, c'est ce qu'il en coûte pour être en affaires. C'est pourquoi les radiodiffuseurs privés ont un rôle à jouer dans l'édification de la nation, et c'est prévu dans notre loi sur la radiodiffusion. Tout notre édifice repose sur ce principe. Si vous ne l'acceptez pas, il faut modifier tout le principe dont s'inspire la Loi sur la radiodiffusion, mais c'est ce qui constitue ce fondement.

    Vous parlez de décisions qu'a rendues le CRTC. On entend parler de toutes sortes de mesures prises par le CRTC qui ont créé des problèmes à tous les secteurs du domaine de la radiodiffusion. J'aimerais savoir à quelle nouvelle politique vous faites allusion--et je pense que c'était vous, Dan, qui en avez parlé--qui aurait entraîné la disparition des principales émissions locales et régionales. Est-ce une décision récente qui est à l'origine de la suppression d'émissions comme Wonder Why et Atlantic Grand Prix? Si nous avions une idée des mesures qui sont prises, nous saurions un peu plus à quoi nous en tenir.

+-

    M. Dan Viau: Étant donné le temps que prendrais une telle réponse, je vous demande instamment de reposer votre question à Peter Murdoch quand il comparaîtra devant votre comité au niveau national.

    Tout ce que je peux dire pour le moment, c'est que depuis quatre ou cinq ans, nous avons constaté que l'organisme de réglementation lâchait de plus en plus de lest aux radiodiffuseurs privés du fait qu'il n'insistait pas pour leur faire assumer leur responsabilité, laquelle leur incombe en échange de l'octroi d'une licence, puisqu'il s'agit d'un secteur d'activité réglementé.

    Quant à savoir comment on peut l'évaluer, nous laisserons Peter s'attaquer à cette question car je crois savoir qu'il en fera état en présentant le point de vue national.

+-

    Mme Wendy Lill: C'est très bien.

    J'aimerais faire une autre remarque, qui vous est particulièrement adressée, Ian.

    À Terre-Neuve, Greg Malone a comparu devant notre comité et il a fait une remarque qui m'a paru très importante. Vous dites que cela n'a aucun rapport avec l'étoile de la mort culturelle, et vous dites que les médias américains—c'est l'une des remarques de Neil Macdonald's—sont devenus des producteurs de journalisme patriotique. Ils n'ont plus assez l'esprit critique, ce qui accroît encore le fardeau qui incombe à CBC de présenter un journalisme critique et objectif sur le continent—sur l'ensemble du continent, en fait. C'est une tâche énorme. Vivre en démocratie, c'est avant tout avoir un public éclairé.

    Vous savez sans doute que la BBC a investi 7,5 milliards de dollars dans sa société de radiodiffusion publique, et que nous avons investi 750 millions de dollars dans la nôtre; pourtant, nous avons un pays beaucoup plus vaste et une société plus multi-ethnique. Cela représente un défi de taille, mais si cela vous paraît suffisamment important, alors il faut faire l'investissement voulu.

+-

    M. Ian Petrie: C'est difficile pour vous, en partie parce que CBC est importante dans les Maritimes--et vous le savez, Wendy. Les gens écoutent la radio et regardent la télévision. Par contre, en Ontario et dans les provinces de l'Ouest, la société publique n'est pas importante et les gens se moquent bien de savoir si elles offrent ou non des émissions.

    Je ne sais pas comment vous faites la part des choses. Loin de moi l'idée que ces services devraient être subventionnés ou autre chose du même genre. Pour une raison quelconque--et il existe toutes sortes de raisons historiques--le secteur privé n'a pas offert beaucoup d'émissions télévisées de nouvelles et d'actualité dans cette région. C'est la réalité. CBC comble ce vide. L'existence même de la société sera justifiée pour toutes les raisons que vous venez de mentionner, la convergence, etc.

+-

     Il va sans dire que depuis deux ans, toutes sortes d'événements incroyables se sont produits dans le monde qui ont permis à CBC de prouver son importance, même si elle était en pleine transformation. Loin de moi l'idée qu'il faille que d'autres événements incroyables se produisent pour que nous continuions à prouver ce que nous valons. Je pense toutefois que la société fait ses preuves jour après jour, en tout cas dans cette région.

º  +-(1630)  

+-

     Le président: Merci beaucoup à vous trois.

    Je voulais vous poser une ou deux questions au sujet de tout le problème lié à la diffusion d'émissions dans les régions et au niveau local.

    Je crois comprendre qu'il y a trois dossiers intéressants. Tout d'abord, une licence à été délivrée au réseau CTV dans le nord de l'Ontario et les responsables de la station ont ensuite décidé de réduire leur présence, ce qui n'est pas conforme, d'après ce que je sais, aux conditions de la licence émise par le CRTC. Il y a également le dossier de l'achat de réseau WTN par Shaw et de son déménagement à Winnipeg. Il y a également le cas d'une station de Halifax qui a été achetée par Alliance Atlantis et progressivement fusionnée dans un plus vaste réseau. Je ne connais pas les détails exacts de ce dossier, mais c'est ce que les gens nous ont dit.

    Il y aussi toute la question soulevée par CBC. Je ne sais pas si vous avez pris connaissance de l'article 3 de la Loi sur la radiodiffusion, mais il se trouve dans la loi une nuance très subtile qui prête à confusion. Si vous examinez le libellé de la loi--et je parle maintenant de CBC, les trois premières étaient des entreprises privées--à l'article 3 de la Loi, qui énonce les objectifs de celle-ci, il est dit: «la programmation offerte par le système canadien de radiodiffusion devrait à la fois...puiser aux sources locales, régionales, nationales et internationales.»

    Mais il y a un autre article distinct qui porte sur CBC et qui stipule «la programmation de la Société devrait à la fois... refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu'au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions».

    Ce sont là deux articles distints et CBC interprète ces dispositions comme signifiant que de par son mandat, elle est tenue d'offrir des services de radiodiffusion dans les régions, car c'est ce que la loi stipule.

    On pourrait également faire valoir un autre argument en demandant si CBC ne fait pas partie intégrante de tout le système canadien de radiodiffusion, ce qui l'oblige à offrir des services de radiodiffusion au niveau local? C'est un cercle vicieux, à mon avis. M. Rabinovitch prétend que la société n'est pas tenue d'offrir des services au niveau local... c'est peut-être l'un des problèmes auquel nous devons nous-mêmes trouver une solution. Mais c'est à mon avis ce qui a prêté à confusion au départ, et permis à la Société de dire que son mandat ne s'applique pas à la radiodiffusion au niveau local, mais uniquement régional.

    En second lieu, je crois que le CRTC peut avoir un impact grâce à l'octroi des licences. Le problème c'est que, lorsque les conditions d'une licence ne sont pas respectées, il est impossible de les imposer. On dirait que les gens ferment simplement les yeux et font comme si de rien n'était.

    Ce sont peut-être là deux domaines sur lesquels nous devrions nous pencher.

+-

    M. Ian Petrie: Le langage a beaucoup d'importance, il faut écouter les paroles et lire les textes attentivement. Mettons, par exemple, que Dan représente l'Île-du-Prince-Édouard. Si Dan, un journaliste vidéo, se trouve sur place pour faire un reportage par semaine à CTV, il pourrait bien représenter l'Île-du-Prince-Édouard. Peut-être que c'est insuffisant, ou médiocre, ou bien ça ne représente pas tout ce que Dan aurait voulu montrer, mais...

    Le président: C'est conforme à la loi.

    M. Ian Petrie: ...on respecte la loi. Évidemment, comme vous le dites, c'est l'un des problèmes qui vous onfrontent alors que vous vous efforcez de modifier la Loi sur la radiodiffusion ou de lui fixer des objectifs plus précis.

+-

     C'est une chose très difficile, car il est clair, comme M. Harvard et vous-même l'avez dit, quand il s'agit de sommes importantes, de postes budgétaires importants... Que sais-je, je dis souvent que l'on pourrait prendre l'exposé de Global devant le CRTC et tapisser un mur avec, parce que c'est à peu près ça que ça vaut. Évidemment, ils disent une chose mais agissent de façon très différente. Est-ce qu'on les punit? Est-ce qu'on les poursuit? Je l'ignore.

º  -(1635)  

+-

    Le président: Vous avez dit qu'on ne le faisait pas.

    Des voix: Oh, oh!

+-

    M. Dan Viau: Je voudrais donner suite à vos commentaires en disant qu'il est bel et bien vrai que si les diffuseurs privés n'étaient pas obligés par les règlements de dépenser certains montants, ils saisiraient certainement l'occasion pour réduire leurs dépenses et leurs activités. Je pense que le CRTC est tenu de veiller à ce que cela fasse partie des exigences de la radiodiffusion au Canada. Les radiodiffuseurs doivent assumer la responsabilité de se rendre sur place et d'être présents pour représenter ce qui se passe au niveau local et régional, et le CRTC est responsable de veiller à ce que cela se fasse. Je pense qu'on a permis à ces deux responsabilités de se dégrader.

+-

    Le président: Nous allons conclure sur cette note.

    Monsieur Petrie, vous nous avez fait une promesse, n'est-ce pas?

+-

    M. Ian Petrie: Oui, je vous le ferai parvenir.

-

    Le président: Nous vous remercions beaucoup pour votre comparution d'aujourd'hui. Elle nous a été extrêmement utile. Merci.

    La séance est levée.