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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON AGRICULTURE AND AGRI-FOOD

COMITÉ PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 11 décembre 2001

• 0904

[Traduction]

Le président (M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.)): Bonjour à tous. La séance est ouverte et nous allons entreprendre notre étude conformément au paragraphe 108(2) du Règlement.

Nous allons d'abord consacrer la première partie de notre séance de ce matin aux représentants de Fleurs Canada Inc. et de l'Association canadienne des pépiniéristes et des paysagistes. Soyez les bienvenus.

Avant de donner la parole aux témoins, j'aimerais remercier Suzie Larocque pour le travail qu'elle a effectué auprès du comité ces derniers mois. Suzie nous quittera dans quelques jours pour occuper un autre poste.

• 0905

Suzie, je sais que les membres du comité ont bien apprécié les notes d'information et les renseignements que vous leur avez fournis, au nom du greffier. Je tiens à vous remercier et je vous souhaite bonne chance dans votre nouveau poste; à l'avenir, si nous avons besoin d'aide, nous nous souviendrons de votre numéro de téléphone.

M. McTavish prendra la parole en premier pour nous présenter un exposé de 10 à 15 minutes, après quoi nous lui poserons des questions.

Soyez le bienvenu au comité. Nous vous remercions pour les magnifiques fleurs qui ont été déposées à nos places ce matin, et nous pouvons aussi en admirer de très belles à l'écran. Je ne vois pas de colibri à proximité, mais je suis certain qu'il doit y en avoir un à la porte.

Monsieur McTavish, vous avez la parole.

M. Bruce McTavish (président sortant, Planification et gérance, Association canadienne des pépiniéristes et des paysagistes): Merci beaucoup, mesdames et messieurs les membres du comité permanent de bien vouloir nous accueillir aujourd'hui.

Nous prendrons quelques minutes pour vous dire qui nous sommes.

Comme nous sommes un secteur qui vend de la beauté, nous avons voulu présenter un exposé PowerPoint. Nous voulons ainsi vous montrer un peu ce que nous faisons dans l'environnement canadien, non seulement pour protéger l'environnement mais aussi pour embellir les quartiers urbains. Nous avons quelques diapositives à vous montrer.

Si nous voulions vous rencontrer, c'est notamment parce que nous représentons un secteur clé de l'horticulture et que nous ne parlons pas souvent de nous. L'occasion nous a donc paru bonne de venir vous dire qui nous sommes, parce que nous nous considérons comme un élément clé de l'agriculture.

Vous avez devant vous aujourd'hui des représentants de toutes les régions du Canada. Nous en avons de l'ACPP, soit l'Association canadienne des pépiniéristes et des paysagistes, qui représente des grossistes, des détaillants, des paysagistes. Nous avons des représentants de Fleurs Canada, le secteur de la floriculture, et de la FIHOQ, soit la Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du Québec.

Nous sommes un groupe très homogène. À nous trois, nous couvrons tout le secteur de l'horticulture ornementale.

Nous aimerions vous parler un peu de notre industrie. Nous allons vous dire qui nous sommes et ce que nous sommes, puis nous vous parlerons un peu des choses que nous faisons et qui nous semblent critiques pour maintenir la vitalité et la prospérité de notre industrie. C'est ce que nous allons donc faire et nous avons divers orateurs qui prendront la parole sur les différents sujets.

Qui sommes-nous? La floriculture. Quand on pense à la floriculture, tout ce qu'il faut savoir, c'est ceci. Quand vous entrez chez un fleuriste, dans une jardinerie, vous voyez des plantes pour plates-bandes, des plantes en pot, du feuillage, des plantes vertes. Tout produit ornemental provenant d'une serre qu'on peut acheter vient de la floriculture. Pour ce qui est des pépiniéristes, si vous entrez dans une jardinerie soit pour embaucher un paysagiste soit pour acheter des arbres, des buissons, des rosiers, des azalées, des rhododendrons, des arbres de rue, tout cela relève du secteur des pépiniéristes.

Pour beaucoup de gens, il est assez intéressant d'apprendre que nous représentons 40 p. 100 de tout le secteur horticole, si l'on combine la floriculture et les pépinières. Nous sommes ainsi le plus grand secteur de toute l'horticulture, avant celui de la culture des pommes de terre, des légumes ou des arbres fruitiers.

Peu de gens s'en rendent compte, parce que nous formons pour ainsi dire une majorité silencieuse. Nous ne nous vantons pas trop et nous sommes en bonne partie des tenants de la libre entreprise ce qui fait que nous avons rarement comparu devant les politiques. Bien que nous ayons certains projets en marche et que nous recevions beaucoup d'aide de gens comme la Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, nous collaborons très étroitement avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments, dont nous vous parlerons un peu plus tard.

Si l'on tient compte de la valeur totale à la ferme des ventes de produits horticoles, le chiffre d'affaires en 2000 a été de 1,76 milliard de dollars. Les ventes au détail se sont, elles, chiffrées à 3,7 milliards de dollars. Nous sommes donc un secteur d'activité assez important. Si vous consultez les dernières données de Statistiques Canada, vous verrez que nous avons 52 000 employés et que nous sommes le secteur agricole qui connaît la plus forte croissance. Depuis 10 ans, notre croissance annuelle a été d'environ 8,7 p. 100.

La diapositive suivante vous montre, en pourcentage, la répartition des plantes ornementales, des légumes, des pommes de terre, et ainsi de suite. Cela vous donne une bonne idée de notre importance par rapport aux autres secteurs de l'industrie.

• 0910

Il y a un autre secteur que nous représentons aussi et que je n'ai pas mentionné au début—en effet beaucoup de nos membres ont aussi des gazonnières et cultivent des arbres de Noël. Si on les inclut, il faut ajouter des chiffres d'affaires respectifs de 79 et 73 millions de dollars. Quand vous achetez du gazon pour votre pelouse, c'est notre produit.

Si vous êtes allés au marché hier soir admirer tous ces beaux arbres de Noël, vous pouvez être assez sûrs qu'ils venaient de chez nos membres.

L'année dernière, nous avons connu une année assez exceptionnelle, en grande partie grâce aux exportations.

Comme toutes les autres industries au Canada, il est vraiment important pour nous que la frontière demeure ouverte. Une grande partie de notre croissance est liée aux exportations, surtout vers les États-Unis, et nous sommes bien sûr en faveur de toutes mesures qui pourraient accélérer le passage de nos camions à la frontière afin qu'ils ne soient pas retardés.

L'année dernière les ventes en floriculture ont augmenté de 20 p. 100, et de 23 p. 100 pour ce qui est des pépinières; je vais vous montrer dans un instant que nos exportations ont augmenté de 35 p. 100 au cours des trois dernières années.

Autre fait intéressant, qui nous aide d'ailleurs à gérer les risques, c'est que nous produisons beaucoup sous verre et sous polyéthylène, et nous gérons donc notre environnement. Nous avons une énorme diversité de cultures—7 500 cultures différentes dans les pépinières et plus de 200 en floriculture. Ainsi donc si une culture ne donne pas de bons résultats, on peut habituellement la remplacer par une autre. Ce n'est pas comme si nous pratiquions la monoculture. Ce n'est pas comme la culture des pommes de terre. S'il y a trop de pommes de terre sur le marché, tout le monde en souffre. On peut avoir trop de roses, mais pas assez de rhododendrons, et nous essayons de maintenir un équilibre dans notre industrie.

La diapositive suivante est un graphique des ventes, puis nous allons passer directement à la dernière dont je vais vous parler, qui est probablement à mon avis très importante. On y montre la balance commerciale.

Je pense que tous les gens dans la salle viennent du secteur agricole et comprennent ce qui peut se produire quand survient un changement de cette ampleur dans notre balance commerciale avec les États-Unis.

Pour ce qui est de l'horticulture ornementale et des produits de pépinière, nous avions toujours été un importateur net des États-Unis. Il y a eu un revirement important vers 1997, et vous pouvez voir que nous sommes devenus un exportateur net, l'écart étant sensiblement le même qu'il était auparavant avec les États-Unis.

Il y a un facteur que nous examinons et auquel nous attachons une grande importance, c'est la façon dont nous entretenons nos rapports avec nos clients et autres cultivateurs américains, pour nous assurer de ne pas nous placer, sur le plan commercial, dans une position délicate par rapport aux États-Unis.

Je conclurai ainsi et je donne la parole à Garry.

M. Garry Watson (directeur exécutif, Fleurs Canada): La diapositive suivante montre que nous avons beaucoup de points communs avec d'autres secteurs agricoles. Un bon nombre de nos problèmes sont les mêmes mais nous connaissons aussi de nombreuses réussites en commun. J'aimerais exposer certaines des raisons qui expliquent la réussite de l'horticulture ornementale.

La main-d'oeuvre, l'essence, l'électricité et d'autres facteurs de production nous coûtent assez chers, mais nous avons des installations de premier ordre qui sont efficaces sur le plan énergétique ce qui fait qu'il est à la fois possible et facile pour nous de gérer ces coûteux intrants. Nous avons un mécanisme perfectionné de distribution des produits en gros parce que nos produits sont périssables. Un retard d'un jour dans le transport altère grandement la qualité du produit. Nous avons des marchés ainsi que des produits universellement intégrés.

Il survient à l'échelle mondiale des événements qui ont une incidence sur le prix et la qualité des fleurs et des plantes au Canada. Nous disposons d'une technologie de pointe et le Canada a d'excellentes possibilités d'exportation de sa technologie en recherche, en science, en installations, en architecture d'ordinateur et des contrôles informatisés. Nous recevons un excellent appui du secteur bancaire, parce qu'il considère le secteur horticole, et surtout celui des plantes ornementales, comme un bon endroit où investir maintenant. Nous recevons l'appui d'importantes associations—les trois qui comparaissent ici ce matin. De plus, et c'est important, ce sont en grande partie des adeptes de la libre entreprise qui ne sont assujettis ni à des offices de commercialisation ni à des systèmes de quotas.

Vous voyez ici un ensemble de serres à Leamington, en Ontario. Au Canada, il y a un peu moins de 4 000 acres sous verre ou sous pellicule plastique double, sous polyéthylène. Pour ce qui est des pépinières, il y a un peu moins de 100 000 acres de produits de pépinières en production, sans compter 22 000 autres acres consacrées à la production du gazon.

Nous aimerions maintenant parler un peu d'un véritable secret de polichinelle ici au Canada. Dans l'horticulture ornementale, nous pâtissons du fait que nous n'avons pas en matière de commercialisation un programme actif de promotion générique des plantes et des fleurs, et nous accusons un retard par rapport à d'autres pays. Par exemple, moins de cinq ménages au Canada achètent des fleurs chaque mois. Au jour le jour, les Canadiens achètent le quart ou le huitième du nombre de fleurs que nos amis européens achètent; là-bas, acheter et recevoir des fleurs fait partie des habitudes. Au Canada, nous considérons souvent les fleurs comme un produit de luxe.

• 0915

Aux États-Unis, il y a quelques années, on a réalisé un projet pilote d'une durée de trois ans qui visait à montrer qu'à l'aide d'un programme de commercialisation générique on pouvait accroître les ventes de fleurs entre les grandes fêtes traditionnelles. On était ainsi parvenu à augmenter le chiffre d'affaires de 10 p. 100 en seulement trois ans. À l'expiration du programme, les ventes sont aussitôt retombées à leur niveau traditionnel.

En ce moment, un nouveau programme est en cours de réalisation aux États-Unis, il s'agit de la Flower Promotion Organization, qui est un programme conjoint entre les cultivateurs sud-américains et les compagnies horticoles américaines. On a montré l'année dernière qu'avec un programme de promotion ciblée dans cinq villes américaines, on a pu augmenter les achats et la fréquence des achats de fleurs de 27 à 58 p. 100, selon le moment choisi pour effectuer le sondage.

Je vais maintenant donner la parole à notre collègue.

[Français]

M. Jacques Côté (directeur exécutif, Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du Québec): Pour poursuivre sur cet important enjeu qu'est la promotion générique, disons que les États-Unis constituent le plus important marché potentiel pour l'exportation de nos végétaux d'ornement.

Les exportations canadiennes aux États-Unis ne constituent présentement que 1,5 p. 100 des ventes de plantes ornementales aux États-Unis, où le marché total est de 12,1 milliards de dollars.

Les Pays-Bas sont le chef de file mondial dans la promotion de l'horticulture ornementale. Ils basent cette promotion sur l'uniformité et la qualité du produit, l'intégration au mode de vie, la fraîcheur et la normalisation de l'entretien et de la manipulation.

Toujours en matière de promotion générique, le secteur ornemental canadien a un pressant besoin d'un programme de promotion. L'évaluation des coûts pour un tel programme est d'environ 5 millions de dollars par année. Les résultats prévus sont des profits accrus, plus d'emplois, plus d'entrées de la TPS, l'augmentation du registre des salaires et l'augmentation des taxes corporatives. Pour arriver à la promotion générique, il faut passer par le contrôle de la qualité. Les consommateurs canadiens qui achètent des plantes les achètent pour leur qualité et s'attendent à des produits libres de parasites.

La CNLA, de même que notre fédération, est à l'origine d'un programme d'assurance-qualité pour les pépinières, programme similaire à l'assurance-qualité ou au contrôle de la qualité pour les vins, à l'ISO—tout le monde connaît l'Organisation internationale de normalisation—, à l'assurance-qualité telle qu'elle existe aux Pays-Bas ou encore à Florverde, un programme à succès en Colombie. Bref, on parle de l'adaptation des meilleurs méthodes et des programmes de contrôle de qualité, tant européens que canadiens, qui ont eu du succès.

[Traduction]

M. Garry Watson: La principale différence entre les plantes ornementales et les autres produits, c'est que nous n'effectuons pas de prélèvement sur chaque vente afin de promouvoir la consommation de nos produits au Canada. C'est pourquoi nous cherchons à élaborer un programme de promotion générique.

Quand nous nous adressons à nos producteurs, nous constatons que la plus grande préoccupation dont ils font part à leurs associations, c'est leur incapacité à affronter la concurrence internationale en raison d'un manque d'accès à de bons produits de lutte antiparasitaire. Nous travaillons d'arrache-pied depuis plusieurs années, ou la nature de nos industries, pour promouvoir une gestion intégrée des ravageurs. Cela veut dire que nous faisons appel à toutes les méthodologies possibles en alternance—méthodes chimique, naturelle, biologique et pratiques culturales—pour nous assurer d'avoir des produits de bonne qualité.

• 0920

Toutefois, nous devons avoir accès à certains produits antiparasitaires qui seront efficaces dans nos environnements à surface restreinte. Une vaste sélection de ces produits est offerte aux producteurs américains et européens, mais pas encore aux Canadiens. Nous avons du mal à y avoir accès, mais nous sommes parvenus à travailler avec les organismes de réglementation au Canada, et nous avons réalisé certains progrès.

Voici quelques chiffres, à titre de comparaison. Dans notre secteur d'activité, 901 nouveaux ingrédients actifs et usages ont été mis à la disposition de l'horticulture ornementale aux États- Unis l'année dernière. Au Canada, nous n'en avons eu que 24. Nous sommes donc bien en retard par rapport aux États-Unis en matière d'accès à ces produits.

Notre système comporte des éléments dissuasifs. Je ne veux pas ressasser le sujet, mais le coût de promotion d'un nouvel ingrédient actif au Canada comporte des frais d'utilisation et le rendement d'une telle opération pour les sociétés de produits chimiques et les autres est trop souvent trop modeste pour justifier ce coût. On est souvent tenu de répéter des résultats scientifiques qui peuvent être disponibles ailleurs, ou de faire en plus des essais en champ à cause des zones climatiques du Canada.

Mais surtout, une fois qu'on a fait tout le travail exigé par l'Environmental Protection Agency des États-Unis, notre agence canadienne exige une restructuration des données qui peut coûter de 30 000 $ à 40 000 $, ce qui nous désavantage considérablement par rapport à nos concurrents; par ailleurs, nous n'avons pas suffisamment accès à de nouveaux produits antiparasitaires plus sûrs.

Au lieu de s'en plaindre, notre industrie a décidé d'intervenir de façon positive. La diapositive suivante montre quelques initiatives de collaboration avec les autorités canadiennes pour essayer d'accélérer l'enregistrement des nouveaux produits et pour mieux faire comprendre pourquoi nous en avons besoin si nous voulons offrir à nos consommateurs des produits plus propres, plus sûrs et exempts de parasites.

Le National Ornamental Minor Use Label Expansion est un comité constitué de représentants de la floriculture, des forêts, des pépinières et des gazonnières, qui fait de la prospective et qui détermine les ingrédients actifs les plus utiles dans chaque secteur d'activité. Il soumet conjointement à notre agence de réglementation de la lutte antiparasitaire les besoins des différents secteurs ce qui permet de gagner du temps aussi bien pour les producteurs que pour l'organisme de réglementation, et surtout, d'économiser de l'argent pour les fabricants de produits chimiques agricoles.

On nous a félicités d'avoir contribué à réduire la charge de travail de l'ARLA. Nous avons eu hier une réunion très productive avec des représentants de cette agence, pour voir si on pouvait collaborer davantage de façon à inciter toutes les parties à mettre à la disposition de nos producteurs un arsenal plus efficace de produits antiparasitaires. Grâce à de telles initiatives, la floriculture a réussi à faire approuver 18 nouveaux produits en un an ou deux, alors qu'il n'y en avait eu que trois au cours des 20 années précédentes. Les pépinières n'ont connu que peu d'amélioration, mais elles rattrapent rapidement leur retard. Nous nous attendons à des résultats spectaculaires au cours des prochaines années.

Nous avons accordé notre appui aux recommandations figurant dans un récent rapport du Conseil canadien de l'horticulture. Nous voudrions que le gouvernement s'engage à modifier radicalement le processus de réglementation. On a fait état, hier, des succès spectaculaires résultant des études conjointes réalisées avec les États-Unis et d'autres pays. Nous sommes tout à fait favorables à cette formule. Nous travaillons avec nos homologues étrangers à l'élaboration d'un plan d'action concernant les nouveaux produits à faible risque. Nous sommes bien conscients des problèmes que rencontrent l'ARLA et les autres participants, et nous voulons collaborer à des opérations d'homologation conjointe.

M. Jeff Hicks (président des National Growers, Association canadienne des pépiniéristes et des paysagistes): Si vous vous souvenez de la diapositive sur la balance commerciale...

Le président: Excusez-moi, monsieur Hicks, mais l'exposé dure depuis près de 18 minutes. Pouvez-vous résumer, de façon qu'il nous reste du temps pour le dialogue et les questions?

M. Jeff Hicks: Certainement. Il ne nous reste plus, je crois, que trois diapositives.

Si vous vous souvenez de celle sur la balance commerciale, vous comprendrez pourquoi les trois prochaines diapositives sont si importantes pour notre industrie. Le commerce est essentiel et l'apparition de parasites dans notre pays peut nous empêcher d'exporter si nous ne parvenons pas à les neutraliser.

Les invasions de ravageurs non indigènes ont eu un effet dévastateur pour le Canada, en particulier depuis quelques années. Le virus de la sharka du prunier en Ontario et la rouille blanche du chrysanthème en Colombie-Britannique ont récemment occasionné des pertes considérables au gouvernement canadien. L'Agence canadienne d'inspection des aliments a dépensé plus de 40 millions de dollars pour venir à bout de la sharka du prunier en Ontario, et dans l'espace de huit semaines, la rouille blanche du chrysanthème vient de nous coûter 2 millions de dollars.

• 0925

Il est prioritaire d'élaborer une nouvelle stratégie pour le secteur, en partenariat avec le gouvernement. Cela veut dire qu'il faut mettre au point des mécanismes adéquats de dépistage, d'éradication et d'indemnisation.

La diapositive suivante illustre les composantes de la stratégie. Des mécanismes de dépistage précoce, aussi bien par le secteur que par le gouvernement, sont importants. Au Canada, c'est l'Agence canadienne d'inspection des aliments qui joue le rôle clé en matière d'éradication et de dépistage. Elle fait un excellent travail, comme on a pu le constater récemment. Cependant, compte tenu de l'augmentation des parasites un peu partout dans le monde à cause de la mondialisation, nous prévoyons que l'ACIA sera sollicitée de plus en plus et nous souhaitons faire en sorte que cet organisme soit doté des ressources nécessaires.

Nous pouvons informer les intervenants du secteur de manière à ce qu'ils participent au service de dépistage. En effet, des mesures d'information et un programme de dédommagement permettraient aux producteurs d'être intégrés au service de protection de l'ACIA. Bon nombre des ravageurs ressemblent au départ à des parasites passablement inoffensifs. Il est donc nettement préférable d'informer les gens pour qu'ils puissent savoir quoi et comment chercher.

Un système de prélèvements imposé essentiellement à ceux que l'on pourrait appeler les importateurs ou les créateurs du risque, à savoir notamment les fournisseurs de fardage et de bois d'arrimage, les villes portuaires, etc. nous permettrait de créer un fonds qui pourrait financer l'éradication et le dépistage.

L'éradication d'urgence permettrait d'améliorer les partenariats avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments, de mieux coordonner les efforts comme ce fut le cas récemment dans la lutte contre la sharka du prunier et la rouille du chrysanthème. On pourrait ainsi réduire les coûts de l'éradication, de la recherche et des mesures de quarantaine...c'est évident. Si nous pouvons dépister le ravageur plus tôt et l'éradiquer plus rapidement, il en coûtera moins cher. Les coûts de gestion des ravageurs baisseront eux aussi, évidemment...ainsi que les dommages à l'environnement.

Passons à la spongieuse qui est établie sur la côte Est et qui a eu des effets dévastateurs. Si elle envahissait la côte Ouest, ses effets seraient encore plus dévastateurs. Elle éliminerait les peuplements de chênes de Garry à Victoria. Les effets sur l'environnement seraient énormes.

Aux États-Unis, le capricorne d'Asie a eu des effets dévastateurs sur les programmes de plantation d'arbres en bordure des routes et dans les parcs. Nous venons d'assister aux ravages causés dans les parcs d'Halifax par une poussée récente du dendroctone de l'épinette. Encore là, l'effet sur l'environnement a été considérable.

Également, dans l'optique des producteurs...la tâche de l'ACIA est facilitée lorsque ces derniers peuvent prendre des décisions visant à éliminer les récoltes pour éradiquer un ravageur du fait qu'il existe un programme de dédommagement.

Voilà qui essentiellement termine notre exposé. Merci beaucoup de votre attention. Nous sommes disposés à répondre à toutes questions.

Le président: Merci, monsieur Hicks, monsieur McTavish et monsieur Watson.

Howard.

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Nous sommes heureux de vous accueillir ici ce matin, messieurs. D'autant plus qu'il a été question de «libre entreprise» et d'un secteur d'activité où l'on évalue les possibilités et les problèmes, où l'on prend des décisions et où l'on va de l'avant vers une réussite éclatante.

Sur une valeur de production de 1,7 milliard de dollars, quelle est la valeur des exportations de votre secteur à l'heure actuelle?

M. Garry Watson: Elle est de 400 millions de dollars environ, semble-t-il.

M. Howard Hilstrom: Vous surpassez donc la valeur des produits exportés sous le régime de la gestion de l'offre qui se chiffre à 250 ou 300 millions de dollars environ.

Vous avez parcouru beaucoup de terrain et nous acceptons tout ce que vous avez proposé. Nous allons peut-être vous sembler sauter du coq à l'âne, mais un certain nombre de questions méritent d'être soulevées.

J'aimerais tout d'abord vous parler d'un aspect soulevé dans un article du magazine American Nurseryman, en date du 15 novembre. On y laisse entendre que le matériel de pépinière canadien importé aux États-Unis n'est peut-être pas exempt de maladies, en raison des déficiences du système canadien de quarantaine phytosanitaire. Les exportations aux États-Unis posent-elles donc un problème et, à mesure que nous augmentons nos exportations, doit-on s'inquiéter de voir les Américains invoquer des raisons d'ordre phytosanitaire pour interdire l'importation aux États-Unis de nos produits?

M. Bruce McTavish: En effet, cela nous inquiète certes à mesure que nous voyons évoluer la balance commerciale. Nous avons eu hier avec l'ACIA des rencontres très fructueuses dont l'objet était de mettre au point des stratégies pour que, justement, cela ne se produise pas.

• 0930

Nous envisageons deux aspects. Tout d'abord, l'homologation. Il y a de cela un certain nombre d'années, l'ACIA a établi un programme d'homologation aussi bien pour les fleurs que pour les pépinières. Voilà qui a tendance à rassurer peu plus les importateurs des États-Unis. Par ailleurs, toutefois, nous estimons que de telles déclarations ne sont pas fondées. Nous avons également l'intention de consacrer plus de temps à informer les producteurs et les acheteurs américains de la réalité canadienne. Nous estimons en effet disposer de l'un des meilleurs systèmes au monde pour la lutte aux ravageurs parasites et la quarantaine phytosanitaire. Un peu partout dans le monde, les gens sont aux prises avec ces poussées épidémiques. Il est extrêmement important, comme nous l'ont dit hier les représentants de l'ACIA et de la Direction générale des services à l'industrie et au marché, de communiquer avec la clientèle des États-Unis.

M. Howard Hilstrom: C'est M. Watson, je crois, qui a mentionné plus tôt que vous aviez entendu parler hier d'une grande réussite en matière de produits phytosanitaires et de produits chimiques pour ce qui est du Canada et des États-Unis. Est-ce de cela que vous vouliez parler, monsieur Watson?

M. Garry Watson: J'ai fait un commentaire à cet effet.

D'après ce que nous savons, l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire collabore de façon très diligente avec ses homologues des États-Unis. Il existe de plus aux États-Unis un programme très fortement subventionné au palier fédéral et au palier des États, à savoir le programme IR-4. Il s'agit du genre d'organisme de coordination dont nous avons parlé. Notre comité officieux fournit des résultats qui permettent de collaborer avec les organismes de réglementation de manière à identifier les objectifs prioritaires qui permettront de faire évoluer les systèmes de réglementation de manière à assurer une harmonisation des deux processus. Ainsi, les résultats du travail effectué dans un pays seront acceptés dans l'autre.

M. Howard Hilstrom: D'où tenez-vous cette information?

M. Garry Watson: Nous avons participé jeudi et vendredi à un atelier de deux jours portant sur l'homologation de produits d'usage limité et réunissant l'ensemble des intéressés du Canada. Il y avait là des représentants de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, des fabricants de produits chimiques, des associations et des producteurs. Nous savons fort bien que le système n'est pas parfait, mais on constate une volonté de travailler ensemble à la mise au point d'une approche nationale coordonnée qui permettra de lever certains des obstacles qui ont été définis.

M. Howard Hilstrom: Ce qui semble se dégager des échos qui nous proviennent d'à peu près tous les intéressés, aussi bien des associations de vétérinaires que de l'Institut canadien des engrais et des associations d'agriculteurs, c'est que l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire est dans un piètre état. Il faut au ministre de la Santé jusqu'à quatre ans pour faire approuver l'utilisation de certains produits nouveaux ou faire supprimer certains anciens produits plus toxiques et de moindre qualité. Je suis content donc de vous entendre dire que vous estimez que les choses vont s'améliorer, même si ce n'est pas ce que nous disent la majorité des représentants du secteur.

Vous vous considérez comme des exploitants agricoles et vous remplissez des formulaires de déclaration de l'impôt sur le revenu agricole. Or, les ministres de l'Agriculture, y compris le ministre fédéral, ont fait savoir qu'un plan quinquennal existait pour l'agriculture. Bien entendu, nous attendons des détails et nous n'avons rien vu à cet égard dans le budget d'hier. Cependant, le ministre Vanclief a comparu devant notre comité et déclaré que toutes les exploitations agricoles seraient dotées d'un plan environnemental d'ici cinq ans. Avez-vous reçu des renseignements à ce sujet ou avez-vous été informé de ce que vous aurez à faire à cet égard?

M. Garry Watson: À titre d'information préalable, nous savons que les serres—et je crois que la même chose s'appliquera aux pépinières—devront faire la preuve d'une gestion responsable en matière d'environnement et être vraisemblablement intégrées à un programme d'assurance de la qualité qui mesure les intrants et les extrants, tout comme cela se fait en Europe, de manière à pouvoir garantir au public que l'environnement ne subit aucun tort.

• 0935

M. Howard Hilstrom: En terminant, j'aimerais tout simplement avertir les gens du secteur d'avoir à l'oeil le gouvernement actuel, étant donné qu'il impose aux agriculteurs de l'Ouest, à l'heure actuelle, un organisme de commercialisation que la majorité des exploitants agricoles contestent, dont une minorité importante souhaite tout simplement se débarrasser, et que l'autre tiers envisage avec indifférence. Il s'agit de notre Commission canadienne du blé. Les libéraux nous l'imposent. Ils obligent les agriculteurs à commercialiser leurs produits en passant par cet organisme, qu'ils le veuillent ou pas. Je tenais à vous en avertir.

En dernier lieu, je vous inviterais à nous parler brièvement de la recherche portant sur le matériel de pépinière. Comment le gouvernement participe-t-il à la recherche dans votre secteur? Ou encore, l'assumez-vous entièrement vous-même?

M. Bruce McTavish: Lorsqu'on est véritablement en faveur de la libre entreprise et de l'indépendance, il faut être indépendant. Nous avons donc tendance à effectuer beaucoup de recherche de façon indépendante. Dernièrement, toutefois, nous avons eu accès à certains financements gouvernementaux par le truchement du programme d'initiative conjointe d'Agriculture Canada dans le cadre duquel le ministère assure un financement à hauteur de 50 p. 100.

Cependant, nous effectuons beaucoup de recherche de façon indépendante. Nous obtenons également de nombreux brevets et droits d'auteur. En travaillant de façon indépendante, nous conservons les retombées financières de nos découvertes.

M. Howard Hilstrom: Merci.

Le président: Merci, Howard.

Est-il besoin de signaler aux témoins que les membres du comité représentent divers partis. J'ai constaté des expressions d'étonnement chez certains. Sachez que Howard est député de l'Alliance canadienne. Nous allons passer ensuite au Bloc. Il arrive aux membres du comité de faire preuve d'esprit de parti. Comme président, je dois être impartial, mais, de toute manière...

Marcel, vous avez le champ libre.

[Français]

M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Merci, monsieur le président. Vous avez bien fait de faire une distinction entre les deux partis. Moi, je suis du Bloc québécois.

Malheureusement, j'ai manqué le début parce qu'il y a beaucoup d'activités en même temps. Peut-être avez-vous déjà répondu aux questions que je poserai au début de votre intervention. D'abord, je voudrais vous remercier de votre magnifique présentation et de nous avoir montré de façon tangible votre produit.

Je remarque que l'horticulture en général est très en vogue depuis quelques années, entre autres les produits de décoration, les fleurs, enfin tout ce qui contribue à l'embellissement de l'environnement. Je ne sais pas si vous l'avez mentionné, mais est-ce que c'est un domaine qui... On sait qu'il y a encore énormément de possibilités de ventes. Par exemple, vous avez mentionné que les États-Unis, entre autres, sont un des gros marchés que vous essayez de pénétrer. En termes de création d'emplois, avez-vous des chiffres? Qu'est-ce que ça représente, des ventes d'un million de dollars ou d'un milliard de dollars dans ce domaine? Est-ce efficace pour l'économie?

M. Jacques Côté: Un milliard de dollars de ventes au détail, c'est 30 000 emplois en haute saison. Il y a des emplois à temps partiel et des emplois permanents. Le tiers de ces emplois sont des emplois permanents. Donc, l'équation est de 30 000 personnes pour un milliard de dollars de ventes.

M. Marcel Gagnon: Cela veut dire que plus on fait la promotion des produits fabriqués ici à l'étranger, plus on crée d'emplois ici. Aux États-Unis, vous connaissez une progression depuis trois ou quatre ans, qui fait que la balance des paiements est positive, c'est-à-dire qu'on vend plus qu'on achète de l'étranger. Est-ce que cette possibilité d'avancer davantage sera encore grande au cours des prochaines années?

M. Jacques Côté: Oui, elle sera énorme. On peut dire que si on fait la promotion générique et qu'on encourage l'exportation de nos végétaux d'ornement, les possibilités sont énormes. On voit qu'il y a un marché de 12 milliards de dollars aux États-Unis. Nos plantes ont la réputation de croître en milieu nordique. Cette caractéristique importante de nos végétaux d'ornement fait qu'ils sont très prisés dans le nord des États-Unis.

• 0940

Cependant, jusqu'à maintenant, nos exportations sont restées un peu timides. Si on exclut les arbres de Noël, qui se vendent très bien, il nous reste beaucoup à faire pour prendre notre place du côté est du Canada, sur le marché du nord-est des États-Unis, par exemple.

M. Marcel Gagnon: Il y a un problème depuis le 11 septembre. Compte tenu que l'exportation de vos produits doit être extrêmement rapide, qu'il faut que vos produits passent la frontière rapidement, est-ce que cela vous a causé des problèmes? Actuellement, pour la période des Fêtes, est-ce que la situation s'est replacée?

M. Jacques Côté: On n'a pas encore constaté tellement de problèmes, mais il faudra voir. C'est encore récent.

M. Marcel Gagnon: C'est tant mieux. Vous n'en cherchez pas.

M. Jacques Côté: Non.

M. Marcel Gagnon: Il y a d'autres domaines où, depuis le 11 septembre... Mais on sait que la situation s'est replacée aux frontières.

Quand on parle d'horticulture, on parle beaucoup de pesticides de toutes sortes. D'ailleurs, vous mentionnez qu'aux États-Unis, il y a 901 produits homologués, alors qu'au Canada, il n'y en a que 24. Quand on parle de pesticides, on parle de dommages à l'environnement. J'ai entendu dire que vous essayiez de vous autocontrôler en matière de protection de l'environnement. Est-ce que le besoin en pesticides est très grand et est-ce que vous demandez d'en avoir autant qu'il y en a aux États-Unis?

M. Jacques Côté: L'horticulture ornementale prend à peu près 3 p. 100 des pesticides qui sont appliqués en agriculture, ce qui est relativement peu. Souvent, l'horticulture ornementale est pointée du doigt. On dit que c'est une question d'esthétique. Mais pensons à tous ses bienfaits. Vous le savez qu'en milieu urbain, tout est un peu artificiel. On doit créer des pelouses et des jardins. Or, si on ne fait rien pour protéger ce patrimoine végétal, il va s'en aller, avec tous les inconvénients que cela comporterait. Pensons seulement à la photosynthèse, à la purification des gaz et à l'oxygène qui se dégage de tout ce patrimoine végétal. C'est un peu comparable à un pharmacien qui nous fournit les pilules requises pour venir à bout des prédateurs de ces jardins.

M. Marcel Gagnon: Ce que vous dites est vrai, surtout pour les arbres de Noël, par exemple. Mais les pelouses ne sont peut-être pas ce qui améliore le plus l'environnement. On remarque aussi que les pelouses sont souvent faites sur des terrains impropres. Par exemple, dans les villes de la région, on est obligé de se servir d'énormément d'eau, souvent d'eau potable, malheureusement, pour garder les pelouses dans un état agréable à voir. Quand vous vendez des pelouses, est-ce que vous donnez des conseils afin qu'on puisse améliorer l'environnement, c'est-à-dire des conseils sur la façon d'améliorer le sol sur lequel on fait pousser les pelouses?

M. Jacques Côté: Je vais demander à M. Mousseau de répondre à cette question.

M. André Mousseau (président, Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du Québec): À l'heure actuelle, quand on veut travailler en milieu urbain, on se rend compte qu'il y a beaucoup à faire au niveau de l'information des gens. On travaille énormément là-dessus afin d'inculquer aux gens des notions de bon entretien des pelouses.

Plus tôt, vous disiez que les pelouses n'étaient peut-être pas si importantes, mais 10 000 pieds carrés de pelouse équivalent à ce qu'une personne respire. Si la pelouse autour d'une maison est faite correctement et croît bien, elle compense pour la personne qui vit à l'intérieur. Il faut dire que c'est quand même une chose très importante.

À l'heure actuelle, le plus gros problème au niveau des pesticides, c'est qu'on a peu accès aux nouveaux pesticides moins dangereux. C'est ça, le problème; ce n'est pas qu'on en utilise beaucoup. C'est un problème d'accès aux nouveaux pesticides qui sont beaucoup moins dangereux pour l'environnement. On est pris avec d'anciens pesticides qui sont plus ou moins toxiques, tandis que les nouveaux le seraient beaucoup moins. Mais la vitesse à laquelle on peut y avoir accès retarde notre capacité de développer notre industrie et notre compétitivité face aux Américains qui sont à côté.

M. Marcel Gagnon: Donc, ce qui manque, ce sont les pesticides qui sont moins dommageables pour l'environnement auxquels vous n'avez pas accès.

• 0945

[Traduction]

Le président: Merci, Marcel.

Murray.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Au caucus rural ce matin, nous avons effectivement rencontré des représentants de l'ARLA, en la personne de Claire Franklin et de Wendy Sexsmith. Nous avons pu constater ce matin qu'il existe certainement un manque de communication entre le secteur et l'ARLA. Je vais vous citer un exemple.

Dans le cadre des travaux du groupe de travail du premier ministre sur les perspectives d'avenir de l'agriculture, nous avons appris que, dans le secteur horticole, on est à la recherche d'un produit de vaporisation d'argile fine sur les pommes. Il s'agit du kaolinton. Or, ce matin, j'ai demandé en quoi consistait le problème. Eh bien, c'était tout simplement que les intéressés avaient demandé un permis de recherche qui leur fut accordé, mais ils n'avaient pas demandé d'homologation.

Ainsi, nous les députés, nous entendons les représentants du secteur nous dire qu'il existe un problème. Lorsque les représentants de l'ARLA comparaissent, nous constatons qu'il s'agit d'un problème de communication. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet et aussi au sujet du IR-4. C'est une question que nous avons également abordée ce matin. Vous pourriez peut-être nous en dire davantage au sujet du fonctionnement.

M. Jeff Hicks: Je vous remercie de cette question.

Vous avez tout à fait raison. Les communications sont au point mort entre le secteur et l'ARLA. Pour ce qui est des systèmes horticoles canadiens, le processus d'homologation ne fonctionnait pas de la même façon il y a un certain nombre d'années. Tout ce processus est d'ailleurs assez nouveau pour moi. Le système a changé au cours des 10 dernières années. Auparavant, le CCH adoptait des résolutions lors d'une réunion et ses cadres dirigeants les présentaient au ministre de l'Agriculture, je crois, qui avait la responsabilité du dossier et, à ce moment-là, l'ARLA et Santé Canada travaillaient de concert avec eux. Voilà comment les choses fonctionnaient auparavant. Il n'y a pas très longtemps, on a confié la responsabilité à Santé Canada, ce qui fut sans doute une décision très sage dans l'optique de la santé des Canadiens. Ainsi, le mandat de l'ARLA consiste à protéger la santé des Canadiens. Nous comprenons cela tout à fait. Par contre, le secteur a dû s'imposer la tâche d'apprendre comment composer avec le nouveau système alors qu'auparavant, le système était conçu en fonction de nos besoins.

Le système n'est pas vraiment convivial. Je l'ai moi-même constaté. C'est certainement possible. La floriculture a eu plus de succès que nous parce qu'elle paie maintenant un employé à plein temps pour s'occuper des rapports avec l'ARLA. Notre industrie ne produit pas suffisamment de recettes pour nous permettre de le faire. Pourtant, nous considérons que c'est nécessaire et nous le ferons. Nous ne sommes pas riches, malgré ce qu'on pourrait croire d'après nos diapositives. Nous ne voulons pas engager cette dépense à moins que ce soit nécessaire. C'est probablement ce que nous devrons faire parce que le processus est plutôt complexe et que nous devons savoir comment il fonctionne. Nous savons cependant que les communications sont très importantes.

M. Murray Calder: Je voudrais proposer quelque chose vu que le groupe d'étude cherche des solutions aux problèmes de l'industrie. C'est ce que nous faisons comme députés: nous essayons de résoudre un problème à la fois. Si nous ne réussissons pas à résoudre entièrement le problème de l'ARLA, nous savons que, d'ici quelques années, vous nous demanderez encore d'intervenir. Je voudrais envisager quelque chose de plus proactif qu'une solution à l'interne.

Aux États-Unis, l'EPA a créé un poste d'ombudsman qui s'occupe des problèmes administratifs. J'ai fait quelques recherches là- dessus. On pourrait créer un poste d'ombudsman au bureau de la vérificatrice générale. Le mécanisme existe déjà. Il suffirait juste de l'élargir. Que penseriez-vous de l'idée d'avoir un ombudsman qui s'occupe des problèmes de l'ARLA. S'il y a des problèmes bureaucratiques, l'ombudsman pourrait s'en occuper.

M. Garry Watson: Merci de la question.

• 0950

Nous ne voulions laisser entendre qu'il n'existe pas de problèmes à l'ARLA. Nous avons cependant constaté il y a quelques années qu'on peut faire beaucoup pour éviter les malentendus si l'on ouvre des voies de communication.

La création d'un poste d'ombudsman est l'une des choses qu'ont recommandé le Conseil canadien de l'horticulture et les participants à l'atelier des intervenants la semaine dernière. Nous serions d'accord pour qu'on nomme quelqu'un pour faire ce que nous avons essayé de faire jusqu'ici, soit de trouver une solution au problème sans hostilité.

Le président: Rick.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC/RD): Merci, monsieur le président.

Je voudrais poser quelques questions avant qu'on revienne à la discussion sur l'ARLA, qui me semble tout à fait raisonnable.

D'après vos diapos, il semble bien évident que le commerce vers les États-Unis a pris beaucoup d'ampleur en 1997. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous avez commencé à avoir un surplus commercial à compter de 1997?

M. Bruce McTavish: Je pense qu'il y a quelques raisons à cela. Je vais vous parler de la situation en Colombie-Britannique parce que c'est là que Jeff et moi avons nos pépinières. Nous avions lancé un certain nombre de projets à l'époque et je pense que la croissance de l'industrie est attribuable en partie à nos efforts et en partie à la chute du dollar.

Avec l'aide de la DGSIM pour les pépinières, nous avons lancé une très bonne campagne de publicité dans les revues de vente en gros des États-Unis où l'on donnait l'adresse d'un site Web contenant la base de données de toutes les plantes disponibles. L'année dernière et l'année précédente, le site Web recevait de 25 000 à 30 000 visites par mois. Nous en recevons maintenant près de 100 000 par mois. Un très grand nombre de clients américains visitent le site. C'est en partie à cause de l'aide fournie par la DGSIM.

M. Rick Borotsik: Comme vous le dites, nous avons maintenant une part de 1,5 p. 100 du marché américain, ce qui est relativement peu.

La Hollande est-il encore le principal pays exportateur vers les États-Unis et lui enlevons-nous une part de son marché?

M. Bruce McTavish: Le marché américain a pris énormément d'ampleur. Il augmente de près de 500 millions de dollars par année.

M. Rick Borotsik: Et c'est cette croissance qui vous aide.

M. Bruce McTavish: Nous pouvons répondre à une partie de cette demande parce que les producteurs américains ne peuvent pas suffirent.

M. Rick Borotsik: Cela me rend toujours nerveux quand une industrie commence à avoir une balance commerciale favorable. Nous l'avons vu pour d'autres denrées. Comme vous êtes de la Colombie- Britannique, la situation du bois d'oeuvre vous viendra tout de suite à l'esprit.

Y a-t-il des problèmes à l'horizon? Vous avez mentionné les parasites et les règlements phytosanitaires... Y a-t-il des problèmes à l'horizon relativement au commerce vers les États-Unis?

M. Bruce McTavish: Les associations américaines ont commencé à parler de dumping.

M. Rick Borotsik: Avez-vous obtenu l'appui du gouvernement pour les questions commerciales? Le gouvernement n'a pas fait grand-chose pour aider l'industrie du bois d'oeuvre. Avez-vous déjà fait des démarches?

M. Bruce McTavish: Oui, et c'est l'une des raisons pour lesquelles nous sommes ici. Nous en avons aussi discuté avec la DGSIM hier et nous en parlerons aux experts des questions commerciales d'Agriculture et Agroalimentaire Canada cet après- midi.

Notre groupe essaie d'anticiper les problèmes au lieu d'y réagir.

M. Rick Borotsik: Merci beaucoup. Il vaut toujours mieux être proactif.

M. Bruce McTavish: C'est ce que nous essayons de faire.

M. Rick Borotsik: Merci.

J'ai deux autres questions très brèves. Relativement à l'éradication d'urgence, vous avez parlé dans votre exposé de dédommagement pour les récoltes détruites. Il n'en a pas été beaucoup question. L'ACIA n'a pas maintenant de politique relativement au dédommagement. Nous avons examiné une autre question connexe dans le cadre de l'étude de la Loi sur les espèces en péril pour obtenir une indemnisation lorsqu'un producteur doit maintenir un habitat pour une espèce en péril. Le gouvernement ne prévoit aucune indemnisation pour l'instant. Êtes-vous convaincu de pouvoir obtenir un dédommagement relativement au programme d'éradication?

M. Garry Watson: Dans le cas des fleurs, au lieu d'en demander après l'éradication, nous considérons qu'il serait préférable de créer une caisse dont on pourrait obtenir une indemnisation le cas échéant. On pourrait peut-être remanier en ce sens les régimes d'assurance-récolte pour que les producteurs puissent s'assurer contre tous problèmes futurs s'ils le désirent.

La situation est un peu différente pour les pépinières, mais Jeff pourra peut-être vous en parler.

M. Rick Borotsik: Avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Jeff Hicks: Non, la réponse était relativement complète.

Nous ne savons pas vraiment à quoi une telle caisse ressemblerait pour l'instant. Nous savons cependant qu'il serait très utile d'en avoir une. Cela soulagerait aussi l'ACIA d'un grand poids.

M. Rick Borotsik: Je voudrais poser une dernière question au sujet de l'ARLA, monsieur le président.

• 0955

Monsieur Watson, vous avez dit que vous n'aimiez pas le mot «harmonisation». Pouvez-vous me dire pourquoi? Il me semble que l'harmonisation est un mot très approprié lorsqu'on parle de l'ARLA et de l'EPA. Pourquoi n'aimez-vous pas de mot?

M. Garry Watson: Je pense que ce mot peut prêter à des interprétations erronées. Je préférerais des mots comme «accord» et «conjoint». Lorsqu'on parle d'«harmonie», on semble vouloir dire que tout est merveilleux.

M. Rick Borotsik: Mais vous n'avez rien à redire à cette notion.

M. Garry Watson: Non.

M. Rick Borotsik: C'est simplement le mot que vous n'aimez pas.

M. Garry Watson: Ce mot est un peu trop lourd de signification.

M. Rick Borotsik: Vous m'avez fait peur. Je dois admettre que vous m'avez fait bien peur parce qu'il était question de collaboration et que vous avez semblé dire que l'harmonisation ne serait pas efficace.

M. Garry Watson: L'important, c'est de collaborer.

M. Rick Borotsik: L'ARLA parle effectivement de collaboration et d'harmonisation, mais fait-elle vraiment le nécessaire pour y parvenir?

M. Garry Watson: Je pense qu'il y a encore beaucoup à faire. Ce qui est encourageant, c'est que le principal agent de l'IR-4 était à notre atelier jeudi et vendredi et qu'on nous a offert toute l'aide nécessaire pour aplanir les difficultés.

Nous avons aussi rencontré le directeur des agences britannique et australienne après la réunion. Ils nous ont dit: «Ne vous inquiétez pas trop. Nous sommes nous aussi passés par là et nous avons fini par régler les difficultés.» Ils nous ont donc encouragés et offert d'aider et de conseiller le Canada et les États-Unis.

Le président: Merci, monsieur Watson et Rick.

Il y a maintenant plusieurs membres du comité qui voudraient poser de courtes questions.

Pouvez-vous être bref, David? J'essaierai ensuite de donner la parole à Rose-Marie.

M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne): Je voudrais simplement savoir s'il y a des restrictions pour l'exportation de vos produits, surtout vers les États-Unis et l'Europe? Les producteurs de votre industrie sont-ils subventionnés aux États-Unis? C'est une chose que nous avons déjà constaté pour d'autres produits.

M. Bruce McTavish: Non. Jusqu'ici, il y a eu libre échange pour nos produits avec les États-Unis. Sauf pour certaines restrictions phytosanitaires traditionnelles, nous n'avons pas de problèmes commerciaux.

M. David Anderson: Et vous n'en prévoyez pas plus tard?

M. Bruce McTavish: Non.

Le président: Merci, David.

Rose-Marie.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Merci de votre exposé. Ma circonscription de Lambton—Kent—Middlesex dans le sud-ouest de l'Ontario est probablement l'un des chefs-lieux des fleurs ornementales à cause de Rosalea Gardens, que vous connaissez sans doute très bien. Les jardins sont d'excellents voisins. Je n'ai pas besoin d'éclairage extérieur parce que les serres illuminent tout le ciel, mais c'est vraiment très beau.

Vous dites avoir une part de 1,5 p. 100 du marché américain. Quel pourcentage voudriez-vous avoir? Est-ce essentiel pour les producteurs de fleurs et pour les pépiniéristes d'appartenir à une association? La question du dédommagement pose-t-elle de graves problèmes à votre industrie?

M. Bruce McTavish: Nous avons justement discuter de notre part du marché et nous pensons que nous pourrions probablement la doubler en cinq ans. Les producteurs devraient pour cela construire l'infrastructure nécessaire et prendre de l'expansion. Mais c'est ce qui arrivera si la tendance actuelle se maintient.

M. Jeff Hicks: Nous avons vraiment pris les devants pour ce qui est du dédommagement. Les invasions parasitaires sont à la hausse. Il y en a une paraît-il aux États-Unis. Si cela se produit au Canada, l'ACIA devra être en mesure de prendre des mesures d'éradication rapide dans n'importe quelle pépinière ou production horticole.

Nous avons donc pris les devants en ce qui concerne le dédommagement. Ce n'est pas vraiment un problème pour l'instant, même si l'on a dû détruire certaines récoltes à cause du virus de la sharka dans des pépinières du sud de l'Ontario. Nous préférons cependant anticiper.

Mme Rose-Marie Ur: Devez-vous appartenir à une association?

M. Jeff Hicks: Ce n'est pas essentiel, mais comme le signale Bruce, vu qu'il y a libre échange dans notre industrie, les membres de nos associations représentent de loin la plus grande partie des recettes produites par l'industrie. Les producteurs importants reconnaissent la nécessité de collaborer pour être plus forts et nos associations collaborent donc de façon très étroite. Dans bien des cas, les autres producteurs de l'industrie sont aussi bien nos amis que nos concurrents.

Le président: Merci, Rose-Marie.

La famille de Mark possède un très grand nombre de serres, situées à l'extrémité opposée de la Colombie-Britannique, sur l'île du Cap-Breton.

Mark, vous disposez de quelques minutes.

M. Mark Eyking (Sydney—Victoria, Lib.): Merci d'être venu. L'aspect commercialisation m'intéresse vivement et je pense que ce sera la clé de votre succès. Mes cousins cultivent des fleurs en Hollande, si bien que je connais assez bien le système de vente aux enchères qui est le leur. La salle des ventes est tout simplement phénoménale. Vingt acres sont recouvertes d'un toit. Et c'est là que se font les tractations pour les fleurs, comme vous le savez.

• 1000

Quand on va en Europe, on voit des fleurs. Tout le monde achète plus de fleurs qu'ici. Vous avez donné des comparaisons avec l'Amérique du nord et à mon avis, il y a un grand potentiel de croissance ici. Je souhaiterais que tous les magasins vendent des fleurs. Je ne sais pas si nous pourrons atteindre cet objectif mais la clé du succès passe par la promotion, le prix et la disponibilité. Puisqu'on peut installer des réfrigérateurs pour conserver les produits laitiers et les boissons gazeuses, pourquoi ne pourrait-on pas en installer de plus petits...?

Je me demande comment nous pourrions percer sur ce marché. Je constate qu'autour de moi les gens achètent des poinsettias une fois par année et des bouquets de fleurs trois ou quatre fois. Si nous pouvions donc exploiter ce marché, même si c'était un achat toutes les deux semaines...avez-vous de bonnes idées quant à la façon de procéder?

M. Jeff Hicks: Eh bien, cela rappelle la «promotion générique des plantes» dont nous parlions dans notre exposé. Notre produit est la seule denrée agricole qui est frappée par la TPS. Il faudrait donc que les contribuables en profitent quelque part. Si nous pouvons augmenter la demande, et on a pu nettement prouver que c'était possible, si nous pouvons donc travailler ensemble à cet aspect-là, notre industrie va se consolider et prospérer pour générer plus de recettes.

Nous avons certainement pour objectif de faire en sorte que les gens achètent plus de phytoproduits au Canada et en même temps, espérons-le, que nos exportations augmentent. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

Le président: Merci, Mark et Jeff.

Il fallait que je permette à Mark de faire un peu de publicité pour votre secteur auprès de la population canadienne.

Au nom des membres du comité, je vous remercie d'être venus aujourd'hui. Nous pourrions certainement discuter encore longtemps car je prévois que votre secteur se développe et offre un potentiel colossal. Il y a bien des jours durant l'année, la Fête des mères...et peut-être qu'une fleur pour la Fête des pères serait une bonne idée également, car cela nous donnerait un jour au mois de juin.

De toutes façons, merci d'être venu comparaître. Il faut espérer qu'au fur et à mesure que votre secteur prendra de l'essor, notre gouvernement pourra continuer à vous aider à résoudre les problèmes que vous rencontrez et à matérialiser les ambitions que vous avez pour l'avenir.

Sur ce, la séance est levée pour cinq minutes, après quoi nous entreprendrons la deuxième partie de notre séance, alors que nous accueillerons la commissaire à l'environnement.

Merci d'être venus.

• 1002




• 1012

Le président: Nous reprenons nos délibérations pour étudier le chapitre 1—le bassin des Grands Lacs et du fleuve Saint- Laurent—du rapport à la commissaire à l'environnement et au développement durable.

Nous accueillons ce matin Mme Gélinas, du Bureau du vérificateur général et Mme Baltacioglu, d'Agriculture et Agroalimentaire Canada.

Madame Gélinas, vous passerez en premier. La plupart des membres du comité sont de retour. Nous vous souhaitons la bienvenue et nous sommes impatients de vous écouter.

Mme Johanne Gélinas (commissaire à l'environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président, de me donner l'occasion de comparaître devant le comité. C'est la première fois que je comparais et je me réjouis à l'idée de revenir souvent. Je vous présente mes collègues, John Reed et Peter Morrison.

Le poste de commissaire a été créé en 1995 en vertu des modifications à la Loi sur le vérificateur général. Mon groupe est tenu, en vertu de son mandat législatif, de vérifier les questions relatives à l'environnement et le développement durable, d'assurer le suivi de la mise en oeuvre des engagements pris par les ministères dans leurs stratégies de développement durable et d'en faire le compte rendu.

Aussi, un processus de pétition a été mis en place et nous avons reçu quelques pétitions concernant les questions agricoles. L'un de mes objectifs est de mieux faire connaître ce processus aux Canadiens.

J'aimerais vous présenter les principales constatations de notre récente vérification du bassin des Grands Lacs et du Saint-Laurent. Je veux vous donner un aperçu général de nos principales constatations et vous faire part de certaines précisions sur des sections qui concernent l'agriculture.

L'agriculture joue un rôle essentiel, en particulier parce que les pratiques agricoles peuvent avoir des répercussions à l'extérieur des exploitations agricoles, mais également parce que les pratiques agricoles des agriculteurs peuvent influer sur leur propre mode de vie et sur les activités dans d'autres secteurs.

Notre vérification était axée sur la gestion par le gouvernement fédéral de la durabilité dans le bassin des Grands Lacs et du Saint-Laurent pour deux raisons importantes. Le bassin est une ressource environnementale cruciale pour le monde entier et 16 millions de Canadiens dépendent de ses ressources pour l'air pur et l'eau potable, la santé, l'emploi et les activités récréatives.

Quatre domaines d'intérêt ont retenu notre attention—l'eau, les espèces et les espaces en péril, les pêches et l'agriculture. Nous voulions alors savoir si le gouvernement respectant ses engagements, s'il appliquait de saines pratiques de gestion pour les problèmes examinés et s'il avait en place des structures de régie satisfaisantes dans l'ensemble. Plusieurs ministères fédéraux ont été touchés par cette vérification.

• 1015

[Français]

Même si nous avons ciblé le bassin, bon nombre des questions et des programmes fédéraux que nous avons examinés ont une portée nationale, et c'est pourquoi nos constatations peuvent avoir des répercussions à l'échelle du pays entier. J'aimerais ajouter que la tâche d'assurer la durabilité du bassin n'est pas l'apanage du gouvernement fédéral. C'est un domaine de compétence partagée, et les provinces ont un rôle déterminant à jouer, tout comme d'autres ordres de gouvernement, l'industrie, les organisations du secteur agricole, les scientifiques et la population.

Le rapport a dévoilé des succès et des améliorations remarquables en ce qui touche l'environnement dans le bassin au cours des trois dernières décennies. La vérification précise le rôle joué à cet égard par les fonctionnaires fédéraux.

Pourtant, selon les données scientifiques les plus probantes à l'heure actuelle, même si certains aspects du bassin s'améliorent, d'autres se détériorent sous nos yeux. Au cours de la prochaine génération, la population canadienne des environs du bassin devrait augmenter de 3 millions de personnes et son produit intérieur brut sera supérieur de 60 p. 100 à ce qu'il est aujourd'hui. Le secteur agricole est sur le point de connaître une très forte croissance. Le gouvernement fédéral appuie l'objectif de porter la part des exportations agricoles du Canada dans le monde à 4 p. 100 d'ici 2005.

Voilà qui m'amène à ma principale préoccupation: l'avenir du bassin est menacé. Les efforts déployés par le gouvernement fédéral ont perdu leur dynamisme. Le leadership, l'innovation, l'activité scientifique et la diligence, qui ont eu une incidence favorable sur le bassin dans le passé, marquent un recul. Nous constatons un sentiment de complaisance et non d'urgence, de la résignation et non de l'inspiration.

[Traduction]

Nos conclusions générales mettent en lumière quatre grands thèmes.

Premièrement, des questions importantes sont négligées. Des engagements nationaux et internationaux clés ne sont pas respectés en partie parce que le financement accordé aux ministères a diminué. Par exemple, sur les 125 millions de dollars en fonds nouveaux annoncés par le ministre de l'Environnement en 1994, seulement 12 p. 100 ont été distribués aux ministères pour le Plan d'action des Grands Lacs. Il n'y a pas d'arrimage entre les engagements pris par le gouvernement et les ressources affectées à cette fin.

Deuxièmement, il n'y a pas de stratégie à long terme pour l'ensemble du bassin pour contrer les principales menaces. Aucun organe fédéral n'énonce un point de vue concerté et cohérent sur les enjeux clés qui concernent les Grands Lacs et le bassin.

Troisièmement, les systèmes de mesure et de surveillance de la recherche scientifique sont inefficaces. L'information nécessaire pour prendre des décisions éclairées dans des secteurs tels que les milieux humides, les sols et l'habitat du poisson présente de graves lacunes.

Quatrièmement, le rôle du gouvernement fédéral évolue et se fait plus discret. Le gouvernement ne se sert pas des pouvoirs et outils dont il dispose pour s'attaquer aux problèmes difficiles. Il s'en remet, de plus en plus, aux partenariats pour atteindre ses objectifs. La vérification a soulevé des questions fondamentales sur le rôle du gouvernement pour ce qui est de surveiller les interventions de ses partenaires et de veiller réellement à ce que les objectifs fédéraux et nationaux soient atteints.

J'aimerais maintenant vous entretenir plus particulièrement des sections de la vérification portant sur l'agriculture. Plus de 100 000 fermes font la plus grande utilisation des terres entourant le bassin et contribuent, dans une proportion d'environ 40 p. 100, à la valeur de la production agricole canadienne. À un niveau plus général, les pratiques agricoles dans le bassin ont des effets que l'environnement ne peut continuer d'absorber. Pour gérer avec succès les effets environnementaux de l'agriculture, de nombreux agriculteurs doivent améliorer leurs pratiques.

Cependant, notre vérification n'était pas centrée sur eux, mais sur le rôle joué par le gouvernement fédéral.

Agriculture et Agroalimentaire Canada consacre beaucoup plus d'argent aux programmes agricoles comme les programmes de soutien du revenu et de stabilisation qu'il n'en dépense directement pour réduire l'incidence de l'agriculture sur l'environnement. Ainsi, en 1998-1999, il leur est consacré 211 millions de dollars et 5,4 millions de dollars aux programmes environnementaux.

• 1020

De plus ces programmes pourraient, sans qu'on le veuille, inciter les agriculteurs à prendre des mesures nuisibles pour l'environnement, contrant ainsi les gains réalisés grâce aux programmes environnementaux.

C'est pourquoi nous avons examiné la mesure dans laquelle le ministère évalue adéquatement les effets environnementaux de ses divers programmes et politiques. Nous avons constaté que le ministère n'avait pas respecté pleinement son engagement d'évaluer de tels programmes.

Nous avons constaté également des lacunes au chapitre de la conformité aux exigences législatives pour ce qui est de l'évaluation des programmes de soutien du revenu prévus par la Loi sur la protection du revenu agricole. Par exemple, l'évaluation prévue du Compte de stabilisation du revenu net n'a pas été faite.

Par ailleurs, en 1990, le Cabinet a demandé aux ministères d'évaluer les répercussions environnementales de leurs nouveaux programmes et de leurs nouvelles politiques, c'est-à-dire d'effectuer une évaluation environnementale stratégique. Toutefois, nous avons constaté que le ministère s'acquittait de cette tâche à l'aide d'une approche ponctuelle et incomplète.

[Français]

Nous avons aussi examiné les interventions d'Agriculture et Agroalimentaire Canada au regard de deux questions très prioritaires: l'érosion des sols et la gestion des fumiers et des engrais. En ce qui concerne l'érosion des sols, le sol de presque la moitié du territoire agricole de l'Ontario risque d'être emporté par les eaux de ruissellement plus vite qu'il n'est renouvelé. Cette situation peut avoir de graves répercussions sur la capacité des agriculteurs de produire des récoltes. C'est aussi un grave problème environnemental. Les mesures mises en oeuvre par les gouvernements fédéral et provincial depuis 10 ans ont bien ralenti l'érosion, mais à ce rythme, il faudra 90 ans avant que les pertes de sol ne soient abaissées à un niveau qui soit soutenable.

La ministère a fixé des objectifs de réduction de l'érosion des sols, mais il n'a pas de plan d'action précisant comment il doit atteindre ces objectifs. Pour ajouter au problème, l'information scientifique sur les sols qui est essentielle à une bonne gestion des terres se fait de plus en plus désuète et perd son utilité. La question des sols montre que le développement durable est autant un problème économique et social qu'un problème environnemental: comment l'agriculture peut-elle être durable s'il n'y a pas de terres cultivables?

Nous avons aussi examiné la gestion du fumier et des engrais, en partie parce qu'Agriculture et Agroalimentaire Canada, Environnement Canada, les provinces et les organisations agricoles accordent une importance considérable à cette question. La mauvaise utilisation du fumier et des engrais sur les terres agricoles a endommagé l'écosystème du bassin. Les nutriments s'accumulent dans les sols des exploitations agricoles, et leurs effets sur l'environnement, qui se manifestent surtout par la contamination de l'eau, continuent d'augmenter. Dans plus de 30 p. 100 des terres agricoles du bassin, les teneurs en azote résiduel atteignent des niveaux tels qu'il y a risque de contamination de l'eau. Par exemple, à l'embouchure de la rivière Yamaska, au Québec, les concentrations de phosphore et d'azote inorganique sont plus élevées que dans tout autre affluent du fleuve Saint-Laurent. La principale cause en est la croissance de la production animale dans le bassin hydrographique—croissance de 30 p. 100 au cours des 20 dernières années. Dans le sud-ouest de l'Ontario et au Québec, bon nombre des cours d'eau du bassin ont des concentrations de phosphore plus élevées que les quantités fixées par les provinces comme objectifs pour la qualité de l'eau. Le problème de la gestion sécuritaire des fumiers et des engrais empire. Nous avons conclu qu'il était temps que le gouvernement repense sa stratégie concernant ce grave problème.

[Traduction]

En conclusion, monsieur le président, notre vérification montre clairement que la voie empruntée par le gouvernement fédéral dans le bassin n'est pas soutenable et qu'il doit encore intégrer pleinement le principe du développement durable. Il a de bonnes intentions et de bonnes idées et bon nombre d'entre elles sont décrites dans les stratégies de développement durable.

• 1025

Je peux vous affirmer que les ministères ont convenu de la justesse de mon rapport et qu'ils ont consenti à mettre en oeuvre les recommandations qui les concernent. Je suis certaine que les ministères seraient heureux que vous les aidiez à définir leurs buts et à les atteindre. Le comité voudra peut-être examiner les interventions prévues et les mesures mises en oeuvre maintenant par le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire pour donner suite à nos recommandations.

Monsieur le président, je vous remercie, ainsi que les membres du comité. Je serai heureuse de répondre à vos questions et de poursuivre cette discussion. Merci.

Le président: Merci, madame Gélinas.

Madame Baltacioglu, je vous souhaite la bienvenue à notre comité. Je pense bien que nous pouvons maintenant écouter votre exposé de la part d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, après quoi nous poserons nos questions.

Le rapport du vérificateur général ne cesse de m'étonner. J'ai travaillé pour les comptes publics pendant plusieurs années.

Howard, cela nous fait penser aux clôtures électriques chez nous pour empêcher le bétail de s'évader.

Je pense que parfois ce rapport est choquant pour nous aussi, les députés. Il contient des éléments très alarmants, et nous sommes, bien entendu, obligés de les noter.

Alors madame, soyez la bienvenue, et nous écoutons maintenant le rapport d'Agriculture Canada.

Mme Yaprak Baltacioglu (sous-ministre adjointe, Direction générale des politiques stratégiques, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je suis accompagné de mon collègue, Simon Kennedy, le directeur général, Direction de la planification et de l'intégration des politiques, et de Frank Brunetta, notre directeur général de l'examen de programmes.

J'ai préparé un exposé, monsieur le président. Il est assez long. Alors, je propose pour gagner du temps et pour permettre aux députés de poser des questions à Mme Gélinas aussi bien qu'à moi et à mes collègues, de le déposer. Vous pouvez l'obtenir auprès du greffier dans les deux langues officielles. J'espère qu'ainsi nous épargnerons un peu de temps.

Dans ma déclaration, j'ai quatre points principaux à souligner. Premièrement, l'agriculture et l'agroalimentaire est une industrie qui vaut 130 milliards de dollars et qui fait partie du moteur économique du pays. Il faut donc en priorité nous assurer que ce secteur puisse s'épanouir et prospérer dans des conditions écologiques et économiques acceptables.

Le deuxième point que nous voulons souligner est que le ministère prend cette responsabilité très au sérieux, car la santé de l'environnement est l'une des sous-fonctions de notre plan d'activités. Je crois que lors de sa comparution ici il y a quelques semaines, notre ministre a fait le point sur notre plan d'activités et le rôle qu'y occupe l'environnement.

Nos ministères font diligence pour s'assurer de travailler ensemble comme un ministère unifié au niveau de nos méthodes de recherche de l'application des programmes, et l'élaboration des politiques. Nous travaillons en équipe, comme un ministère unifié, et, comme mon exposé le dit, cela veut dire que nous organisons les tâches internes de notre ministère en fonction de ce travail commun. Il en est ainsi pour tous nos secteurs d'activités, surtout celui consacré à l'environnement.

Troisièmement, je dirai que l'environnement est probablement l'un des dossiers politiques les plus horizontaux au sein du gouvernement. Il recoupe plusieurs ministères et sphères de compétence. Ainsi, nous nous rendons compte à Agriculture et Agroalimentaire Canada que nous ne pouvons pas travailler seuls, sans la collaboration de nos collègues d'Environnement Canada, Pêches et Océans, et d'autres ministères qui traitent de ressources naturelles. C'est ainsi que nous avons mis en oeuvre plusieurs mécanismes pour assurer la bonne coordination de ces travaux que nous exécutons de concert.

Le dernier point dans ma déclaration, monsieur le président, c'est que l'agriculture est une compétence partagée entre les deux ordres de gouvernement, fédéral et provincial. Ainsi, il ne se passe pratiquement rien à moins que les deux ordres de gouvernement ne se concertent considérablement.

Comme vous le savez tous parfaitement, notre ministre, M. Vanclief, a rencontré ses collègues provinciaux et territoriaux en juin dernier à Whitehorse. Lors de cette réunion-là, les ministres de l'agriculture se sont mis d'accord sur un Cadre stratégique pour l'agriculture à cinq volets: la gestion des risques et la protection du revenu; assurer le renouvellement du secteur sur le plan des compétences et des outils; assurer la salubrité et la qualité des aliments—le Canada est reconnu partout dans le monde pour ses aliments de qualité supérieure—; l'environnement fait partie du Cadre stratégique pour l'agriculture; et, bien sûr, la science fait partie du cadre à la base de tout ceci.

• 1030

Nous nous concertons avec nos collègues provinciaux actuellement pour faire en sorte que cette vision stratégique se traduise en programmes sur le terrain l'an prochain. Hier, M. Martin a dit dans son budget que le gouvernement fédéral assumerait sa part du financement prévisible et à long terme de cette initiative. Je dirais qu'il s'agit d'un très bon début pour ce dossier stratégique, et qu'on espère que toutes ces mesures répondront à la plupart des questions qu'a soulevées le rapport de Mme Gélinas.

Merci beaucoup, monsieur.

Le président: Merci à vous.

Howard, aimeriez-vous commencer?

M. Howard Hilstrom: Je céderai la parole à mon collègue, David Anderson.

Le président: Merci.

M. David Anderson: Merci. Merci d'être venus aujourd'hui.

Certains d'entre nous croyons que souvent, le gouvernement entrave plutôt que facilite la croissance, surtout dans les Prairies, et que parfois, le gouvernement se trouve à être le problème plutôt que la solution. J'aimerais savoir si vous avez fait l'analyse environnementale de l'ingérence gouvernementale dans l'agriculture?

La Commission canadienne du blé est un exemple qui me vient tout de suite à l'esprit. Les agriculteurs des Prairies sont obligés de vendre leur blé par l'entremise de cette commission. Par conséquent, certains agriculteurs, les producteurs biologiques par exemple, ont du mal à vendre leur blé. La Commission ne tient pas beaucoup à vendre leur blé. Elle est très en retard sur la notion des blés dont l'identité est préservée, donc, si des agriculteurs veulent cultiver des cultures spéciales et les vendre eux-mêmes en petit nombre, ils n'ont pas le droit de le faire. Alors, leur seule option est de revenir aux méthodes classiques, à savoir utiliser beaucoup d'engrais pour augmenter le rendement et essayer de vendre de grosses quantités de blé.

Avez-vous étudié les incidences environnementales des politiques gouvernementales sur les agriculteurs?

Mme Johanne Gélinas: Non, nous n'avons fait rien de semblable. Pour les besoins de ce rapport, nous nous sommes concentrés essentiellement sur l'état de l'environnement dans le bassin des Grands Lacs et du Saint-Laurent, et sur la gestion de ce dossier par le gouvernement fédéral.

M. David Anderson: Ce sont les bases du nouveau programme ou du nouveau cadre que vous établissez, et je me demande si vous avez étudié les incidences économiques qu'aura ce nouveau cadre sur les producteurs? Ma question s'adresse à Agriculture et Agroalimentaire Canada.

Mme Yaprak Baltacioglu: En ce qui concerne votre question sur la Commission canadienne du blé, d'abord, je ne peux pas vous dire si une telle évaluation a été effectuée, mais j'essaierai de trouver la réponse et de vous la faire parvenir à une date ultérieure.

Pour ce qui est des incidences économiques du Cadre stratégique pour l'agriculture, ce cadre prévoit une stratégie intégrée. Il s'agit d'assurer le dynamisme, la prospérité et la durabilité à long terme de l'agriculture canadienne. Il s'agit donc des aspects économiques de ce secteur.

Si vous me demandez quelles sont les incidences des initiatives environnementales sur le revenu des agriculteurs, si c'est cela, votre question, alors oui, nous l'examinons, en effet. Lors de sa dernière comparution ici, notre ministre a clairement dit que souvent, les agriculteurs ne peuvent pas répercuter les coûts des mesures environnementales sur le consommateur. Par conséquent, les agriculteurs auront besoin qu'on les aide à améliorer leurs pratiques environnementales.

M. David Anderson: Quels genres d'initiatives envisage le gouvernement? Quand vous parlez des questions de traçabilité et de sécurité alimentaire et des études d'impact sur l'environnement qui doivent être menées dans chaque exploitation agricole, ce sont les producteurs qui doivent directement en assumer les coûts. Qu'est-ce que le gouvernement envisage de faire pour les aider?

Mme Yaprak Baltacioglu: Le gouvernement tient à élaborer les programmes de concert avec les provinces, parce que nous tentons d'élaborer un cadre commun de concert avec les gouvernements provinciaux.

Cependant, il existe bon nombre d'initiatives en matière d'environnement. Par exemple, l'accord de Whitehorse prévoit des initiatives complètes en matière d'environnement. Ces initiatives portent sur des questions telles que la planification environnementale au niveau de l'exploitation agricole et aussi des mesures pour assurer que les producteurs aient des outils dont ils ont besoin pour prendre des décisions en matière d'environnement... Par exemple, nous sommes en train de mettre à jour notre rapport d'indicateurs environnementaux, auquel fait référence Mme Gélinas dans son rapport, pour assurer que les producteurs soient au courant de l'état de l'environnement. Cette mise à jour vise à assurer que ces agriculteurs aient accès aux connaissances scientifiques et aux outils dont ils ont besoin pour améliorer leurs pratiques, et qu'ils aient aussi accès aux incitatifs. Néanmoins, je n'ai pas d'information exacte pour l'instant au sujet de ces incitatifs.

• 1035

M. David Anderson: Savez-vous qu'il y a des gouvernements provinciaux qui ne collaborent pas avec vous en ce qui concerne les études environnementales des exploitations agricoles, etc.?

Mme Yaprak Baltacioglu: Monsieur, je ne suis au courant que de l'accord entre les ministres fédéraux et provinciaux conclu à Whitehorse. À mon avis, ils ont réaffirmé leur point de vue très fermement lors de leur réunion à Toronto le 11 octobre. Tous les ministres provinciaux, ont appuyé le Cadre stratégique pour l'agriculture lors de la réunion et ils ont continué à soutenir ce cadre après la réunion, lequel prévoit des «initiatives complètes en matière d'environnement dans les exploitations agricoles.»

M. David Anderson: En tant que producteur, j'ai un grave sujet de préoccupation soit que les agriculteurs continuent à faire l'objet de la plupart des critiques pour des problèmes environnementaux auxquels fait face notre société. Je ne pense pas au cours de l'année dernière avoir entendu parler des problèmes de l'étalement des villes. Ce phénomène a une grande incidence sur l'agriculture dans la région des Grands Lacs. La province de l'Alberta est aussi aux prises avec le bouleversement des écosystèmes. Cela a une incidence, entre d'autres, sur le prix des terres. Avez-vous mené une étude sur les répercussions de l'étalement des villes sur l'agriculture et les coûts qui en découlent pour les agriculteurs?

Mme Johanne Gélinas: Non. Cependant, notre évaluation nous a permis de soulever cette question et de signaler qu'il existe aussi un problème à cet égard. Nous avons dit qu'en n'étudiant pas l'aménagement communautaire et l'étalement des villes on pourrait aussi constater une incidence sur le prix des terres agricoles.

J'aimerais revenir sur un des points que vous avez soulevés et auquel nous faisons référence dans notre rapport. Chaque programme et politique au niveau fédéral, et bien entendu, au niveau d'Agriculture Canada, devrait être étudié sous l'optique des trois piliers du développement durable. Les trois piliers sont les suivants: l'aspect économique de toute politique et programme; leur aspect social; et l'aspect environnemental de ces programmes et politiques. Le respect de ces trois piliers nous permet de disposer de toute l'information pertinente pour prendre une décision éclairée. Par la suite, s'il faut mettre en oeuvre un programme différent pour contrer les répercussions environnementales de certaines pratiques, on pourra le faire. Les travaux du ministère de l'Agriculture sont souvent lacunaires, c'est-à-dire que l'on ne tient pas compte de l'environnement. Le ministère devrait se concentrer davantage sur les évaluations environnementales des pratiques agricoles.

M. David Anderson: Pourrais-je faire une suggestion? À mon avis, le ministère s'est trop concentré sur l'aspect environnemental dans l'élaboration du Cadre stratégique pour l'agriculture, parce qu'il n'a pas tenu compte du cadre économique. Le ministère tente de se distancer des agriculteurs. Je dirais qu'aucun autre ministère n'a abdiqué ses responsabilités envers ses clients comme l'a fait le ministère de l'Agriculture.

Le ministère de la Santé existe pour assurer l'innocuité des aliments et la santé de la population. Le ministère de l'Environnement est responsable de protéger l'environnement. Ces deux éléments sont les pierres angulaires du Cadre stratégique élaboré par le ministère de l'Agriculture et de la l'Agroalimentaire dont l'objectif est de ne plus soutenir les agriculteurs. Le ministère ne tient donc plus compte de l'aspect social. Clairement, le ministère ne veut plus offrir un appui social aux agriculteurs. Il ne veut plus non plus assurer un soutien économique. Le nouveau cadre stratégique du ministère de l'Agriculture se concentre essentiellement sur les questions environnementales.

Mme Yaprak Baltacioglu: Monsieur Hubbard, vous permettez que je réponde brièvement à cette question?

Le président: Oui.

Mme Yaprak Baltacioglu: Le cadre de la politique agricole prévoit un cadre général pour ce secteur vu sous tous les angles. Aucun secteur économique ne peut prospérer à long terme s'il fait fi de questions comme l'environnement. La viabilité est à l'ordre du jour pour toutes les industries, tous les secteurs et tous les pays. L'inaction dans le domaine environnemental implique des conséquences qui pourraient être très graves sur le plan économique pour le secteur agricole.

Plusieurs études démontrent... L'Université de Guelph a récemment publié des études sur les conséquences que l'inaction en matière environnementale peuvent avoir sur le revenu des cultivateurs. Il y a aussi d'autres problèmes comme la question de responsabilité, la façon dont le secteur est perçu par le public, la possibilité de perdre des marchés à cause de la perception qu'on a de l'agriculture canadienne.

Je dois reconnaître que les cultivateurs canadiens ont à coeur la bonne gestion de leurs terres. Je conviens donc avec vous que ce n'est pas seulement le secteur agricole qui doit être blâmé pour toute la pollution et tout ce qui arrivé. Cela dit, nos cultivateurs doivent être reconnus sur le plan international comme les meilleurs du monde.

• 1040

Le cadre de notre politique agricole n'a pas exclu les aspects économiques.

L'accord de principe conclu par nos ministres à Whitehorse précise que ce cadre n'enlèvera rien aux mesures de protection. Il va construire quelque chose sur nos acquis dans ce domaine.

Le président: Merci, David.

Je sais que Marcel fait preuve de patience parce qu'il veille aux intérêts du bassin du Saint-Laurent et qu'il aura sûrement des questions à poser sur la région du Bas-du-Fleuve.

Marcel.

[Français]

M. Marcel Gagnon: Merci, monsieur le président.

Effectivement, c'est une belle rencontre qu'on a ce matin, mais c'est aussi une rencontre un peu démoralisante. Madame, je pense que vous faites un portrait très exact de la situation en ce qui concerne l'environnement, et vous touchez, bien sûr, la question du développement du durable. La dame dont j'ai aussi de la difficulté à prononcer le nom nous dit d'un côté que le ministère prend la situation au sérieux. Elle nous dit qu'il y a un travail harmonieux qui se fait. On constate qu'il y a une détérioration de la situation. Même si, comme vous le mentionnez, il y a eu une amélioration du côté des Grands Lacs, il y a aussi une détérioration ailleurs. C'est un peu déprimant d'entendre cela. On devrait au moins se dire que l'on constate qu'il y a une situation pénible pour l'environnement, qu'on est en train de s'autodétruire et qu'on prend cela au sérieux au ministère, et qu'on fait des efforts.

Vous mentionnez même, madame Gélinas, des sommes d'argent qu'on aurait dû dépenser. Par exemple, seulement 12 p. 100 des 125 millions de dollars qui auraient dû être dépensés pour l'environnement depuis 1994 ont été dépensés aux endroits où ils devaient l'être.

Je ne sais pas quelle question poser parce que c'est un peu comme je le disais. Je cherche à poser une question pour m'encourager, et l'Alliance canadienne ici, à côté, trouve que ça va trop vite pour la protection de l'environnement.

Est-ce qu'on cherche à détruire la planète? Si vraiment l'environnement n'est pas utile, qu'est-ce que le développement durable? Je voudrais demander à la dame du ministère de l'Agriculture si, effectivement, c'est sérieux quand on dit que le ministère de l'Agriculture prend en main la situation de la protection de l'environnement et du développement durable. Comment pouvez-vous dire cela alors qu'on constate presque complètement l'inverse?

[Traduction]

Mme Yaprak Baltacioglu: Le ministère prend cette question très au sérieux.

Au moment de la rédaction de ce rapport, la situation pouvait- elle s'améliorer? Absolument. Doit-elle encore s'améliorer? Il est certainement possible d'améliorer beaucoup de nos pratiques.

Je vais vous donner quand même quelques exemples de ce que nous avons déjà accompli. Notre direction de recherche compte 19 stations de recherche à l'échelle nationale qui font de la recherche et des travaux scientifiques sur des questions agricoles. Cette année nous regroupons les travaux de la direction de la recherche sous quatre grands programmes nationaux de façon à ce que ces 19 stations n'agissent pas de façon indépendante en établissant leurs propres priorités. Elles vont plutôt coordonner leurs activités par rapport à ces quatre programmes nationaux.

L'un de ces programmes nationaux concerne l'environnement. Qu'est-ce que cela nous donne? Grâce à cette orientation nous allons affecter les bonnes ressources là où c'est nécessaire. Nos travaux scientifiques ne contribuent pas seulement à l'élaboration de la politique ministérielle mais donnent aussi des outils aux cultivateurs pour qu'ils améliorent leurs pratiques environnementales.

C'est une des constatations de Mme Gélinas dans son rapport sur nos activités scientifiques et son harmonisation ou manque d'harmonisation avec les mesures environnementales.

• 1045

La deuxième initiative de notre direction de la recherche a, elle aussi, été très influencée par le rapport de Mme Gélinas. Celui-ci constate que nos recherches ne tiennent pas vraiment compte des répercussions environnementales. Nous avons maintenant mis en place un système, j'ai oublié son nom, selon lequel tous les projets sont évalués par rapport à une série de critères, y compris les conséquences environnementales.

Voilà donc un exemple de ce que nous avons fait et comment nous adaptons nos pratiques.

Encore une fois, le ministère fait l'objet de critiques concernant l'efficacité de nos évaluations des répercussions environnementales de nos politiques et de nos programmes.

La Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et la Loi sur la protection du revenu agricole imposent certaines obligations. Nous sommes tenus de revoir ces programmes et c'est ce que nous avons fait l'année dernière.

Pouvons-nous faire davantage? Certainement. Je pense que grâce à ce rapport, nous avons appris à nous organiser pour mieux effectuer ce travail.

[Français]

M. Marcel Gagnon: J'aimerais vous croire. Si vous dites vrai, on devrait voir les résultats quelque part. Par exemple, pour 1998-1999, on dit de ce côté-ci qu'on dépense trop d'argent pour l'environnement et pas assez pour le développement économique. Pour 1998-1999, au point 13 du discours de Mme Gélinas, on peut lire que sur les 211 millions de dollars consacrés au développement économique, 5,4 millions de dollars ont été dépensés pour la recherche ou enfin pour travailler à la protection de l'environnement. Quand on détruit, il faut aussi qu'on soit capable, sans nécessairement construire, d'au moins maintenir. Actuellement, on continue de détruire. Cela me fait penser à une caricature que j'avais vue de quelqu'un qui se préoccupait de l'environnement. On y voyait un chameau en train de manger des dollars parce qu'il n'y avait plus rien à manger. On ne se nourrit pas longtemps comme ça. Il ne s'agit pas seulement de développer. Il faut vraiment penser à...

Vous êtes tout encouragée par le discours du budget d'hier. Où, dans le discours du budget d'hier, voyez-vous des préoccupations environnementales, madame?

Mme Johanne Gélinas: Je ne commenterai pas le budget d'hier, si vous me le permettez. Je vais me réserver un peu de temps pour en faire une lecture attentive. Mais j'aimerais revenir sur certains points que vous avez soulevés.

Tout d'abord, je ne voudrais surtout pas laisser une impression tout à fait négative des efforts qui sont faits dans le domaine de l'agriculture. Il y a un certain nombre de programmes, de projets qui ont été mis en place avec la collaboration d'Agriculture Canada. Dans certains cas, ce sont des programmes volontaires. Je doute qu'on puisse atteindre tous les objectifs du développement durable avec, notamment, des programmes volontaires. Ce qu'il est important de faire, c'est de s'assurer que ça aura une résonance dans la communauté, que ça va même amener des changements de pratiques. Je dirais qu'Agriculture Canada est un ministère beaucoup orienté dans le domaine de la recherche. Il faut qu'il y ait un transfert de technologies dans le domaine des technologies propres, environmentally friendly, dirait-on, et c'est une portion qui est encore déficiente selon les résultats de notre vérification.

Je disais qu'il y avait de bonnes idées. Il y a les Clubs-conseils en agroenvironnement au Québec et les Environmental Farm Plans en Ontario. Il y a aussi tout le travail qu'Agriculture Canada a fait dans le domaine des indicateurs agroenvironnementaux. Ce sont des éléments qui sont intéressants. Ce qui est déficient, par contre, c'est l'évaluation de ces programmes afin de voir dans quelle mesure ils ont une influence réelle sur l'amélioration de la qualité de l'environnement.

C'est un travail qu'Agriculture Canada, dans sa réponse à nos recommandations, s'est engagé à faire de façon plus substantielle au cours des prochaines années. Par ailleurs, ces gens ont développé au fil des ans une stratégie de développement durable pour leurs secteurs spécifiques. Ce que nous soulevons dans notre rapport, c'est que ça va prendre un plan d'action précis, ce qui est encore manquant, avec un calendrier de réalisations, pour qu'on soit en mesure de faire le suivi de leurs progrès au fil des ans et qu'on ne prenne pas conscience, dans 10 ans, que peu de travail a été fait. Donc, il nous faut vraiment une façon de mesurer les progrès. L'information dont on dispose actuellement est trop vague pour nous permettre d'aller de l'avant dans ce domaine.

• 1050

M. Marcel Gagnon: Je pense qu'il faudrait un calendrier et une surveillance pour qu'il soit mis en place...

[Traduction]

Le président: Marcel, je reviendrai à vous.

Murray.

M. Murray Calder: Je veux changer le sujet. J'ai constaté que votre vérification ne traite pas notamment de la séparation entre les zones urbaines et rurales du pays. Il s'agit d'un problème important pour moi, tant dans mon rôle d'agriculteur qu'en tant que consommateur.

À l'heure actuelle, dans l'industrie avicole, nous travaillons à un programme d'analyse des risques et de maîtrise de contrôle critique. Notre exploitation devrait être conforme d'ici la fin de l'année et, l'année prochaine nous nous occuperons des normes ISO 14001.

Auriez-vous des observations à faire à propos de l'opportunité de considérer un programme genre analyse des risques et maîtrise de contrôle critique pour étudier l'environnement, puisque nous avons déjà le plan environnemental pour les exploitations agricoles. Voilà ma première question.

Moi, j'habite à peu près à 25 milles de Walkerton, donc je sais qu'il s'agira d'une question importante.

Ma deuxième question porte sur la séparation dont je parlais. À l'heure actuelle, il y a de moins en moins d'entreprises de conditionnement auxquelles les agriculteurs peuvent vendre leur production. Ces entreprises exercent des pressions pour que les exploitations agricoles grossissent, au nom de l'efficacité. Et pourtant, le citadin trouve toujours du plaisir à faire une promenade en voiture à la campagne et à regarder toutes les exploitations pastorales qui s'y trouvent. Donc, il y aura sûrement des frais connexes. Je me demande qui les assumera. Est-ce que ce sera l'agriculteur...à cause du phosphore...dont vous avez parlé?

On sait que le citadin utilise 15 fois plus de pesticides et d'engrais à l'acre que l'agriculteur. Une forte pluie suffit pour emporter tout cela dans le système de drainage pluvial, qui se déverse directement dans la rivière.

Avez-vous donc examiné l'application à l'acre dans les zones urbaines du pays et ses effets sur le bassin?

Mme Johanne Gélinas: Non, nous ne l'avons pas examiné. Au fond, au risque de vous donner une réponse décevante, je dois m'en tenir au rapport et à ce que nous avons examiné.

Nous avons examiné la façon dont le gouvernement fédéral a géré certaines questions dans le bassin des Grands Lacs. L'agriculture en était une.

Ce n'est pas à moi d'établir les politiques, de décider ce qu'il faudrait faire à l'avenir. Je soulève des questions. Nous soulevons les mêmes que vous, et nous demandons comment Agriculture et Agroalimentaire Canada va s'en occuper.

Par contre, je pourrais peut-être ajouter qu'à l'avenir, nous allons étudier les collectivités viables. Nous examinerons le monde rural et le monde urbain pour voir comment ils sont déconnectés et comment leurs objectifs peuvent se rejoindre.

Malheureusement, je ne peux pas répondre clairement à votre question. Peut-être que ma collègue le peut.

Mme Yaprak Baltacioglu: J'ai une observation à faire sur l'idée d'examiner l'action en faveur de la protection de l'environnement agricole suivant l'exemple de l'analyse des risques et la maîtrise de contrôle critique par rapport au système d'assurance de la salubrité des aliments. D'après la majorité des groupes de producteurs auxquels moi et mon ministère avons parlé, le système d'analyse des risques et de maîtrise de contrôle critique sur les exploitations agricoles a véritablement été stimulé. C'est grâce aux efforts des producteurs et des associations industrielles. Les aviculteurs du Canada, par exemple, les éleveurs de porcs soutiennent tous ces efforts.

Je sais que l'on critique toujours beaucoup le caractère volontaire et donc non exécutoire de ces programmes. En réalité, ils ont plus d'effets que s'ils étaient obligatoires, puisque les agriculteurs agissent à l'unisson. Ces programmes vont avoir une grande portée puisque les associations commencent à exiger une couverture à 100 p. 100.

Vous le savez sans doute mieux que moi, puisqu'on ne peut pas déclarer que les poulets du Canada sont les meilleurs ou qu'ils ne présentent aucun risque pour la santé ou qu'ils sont homologués en vertu du système de l'analyse des risques et de maîtrise de contrôle de critique si certains le font et que d'autres ne le font pas.

Donc, au niveau de l'environnement, je pense qu'il y a du retard par rapport à l'initiative sur la salubrité des produits agricoles. Mais je pense que toute mesure peut et doit s'en inspirer avec la participation directe des producteurs, sinon le changement profond n'aura pas lieu sur le terrain.

• 1055

M. Murray Calder: Du point de vue des coûts, tout le monde gagne. Tout le monde veut avoir trois repas par jour.

Ce qui me préoccupe actuellement, par exemple, après l'épisode de Walkerton l'an dernier, c'est que les exploitations agricoles qui n'ont pas un programme convenable de gestion des nutriments pour l'entreposage du fumier, etc., devront assumer des coûts indirects, si bien que la disparition des petites et moyennes exploitations s'accélérera. L'industrie agricole s'orientera ainsi vers les grosses exploitations que personne ne semble désirer.

Manifestement, il y a un coût que quelqu'un devra assumer. Pensez-vous que seul l'agriculteur devrait l'assumer? Pensez-vous que le consommateur ait une responsabilité—puisqu'il en tire profit aussi? Qui devrait partager ce coût?

Mme Johanne Gélinas: Dans mon bureau, monsieur le président, si nous prêtons une attention particulière au développement durable, c'est notamment parce que nous croyons qu'il faut tenir compte des trois composantes du développement durable, soit l'économie, le plan social, et l'environnement. Nous devons établir, une fois que nous comprenons bien l'incidence de l'agriculture sur ces trois composantes, à laquelle donner la priorité.

Ce n'est pas à moi d'établir l'ordre de priorités. Ce que je dis, c'est qu'il y a des renseignements qui manquent à l'heure actuelle et qui sont nécessaires à la prise de décisions éclairées au niveau fédéral. Nous devons recueillir tous ces renseignements. Quel sera le coût d'un programme rigoureux en matière de fumier et d'engrais? Je ne peux pas vous donner les réponses, mais, comme vous, je soulève ces questions-là.

Mon rôle, c'est de dire qu'il faut examiner cela dans le cadre du développement durable. À l'avenir, il faudra décider des priorités et de ce que nous sommes prêts à accepter en tant que société.

M. Murray Calder: Une dernière question.

Le président: Murray, soyez bref, d'accord?

M. Murray Calder: D'accord. Ma question sera courte.

Au premier point de l'article 10 à la page 3, vous avez dit:

    Par exemple, sur les 125 millions de dollars en fonds nouveaux annoncés par le ministre de l'Environnement en 1994, seulement 12 p. 100 ont été distribués aux ministères pour le plan d'action des Grands Lacs.

Où sont passés les 88 p. 100?

Mme Johanne Gélinas: Je ne pense pas que nous puissions vous donner la réponse, n'est-ce pas? En partie?

M. John Reed (directeur principal, Bureau de la Commissaire à l'environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général du Canada): En fait, à la page 282 de ce rapport, vous trouverez un graphique qui traite précisément de cette question.

Où est passé le reste? Bref, on ne l'a jamais distribué. On avait annoncé un programme quinquennal de 150 millions de dollars au total, dont 125 millions de dollars en nouvelles dépenses. On a distribué les fonds la première année, et on a ensuite fermé le robinet. Les fonds n'ont jamais été distribués aux ministères.

Le président: Merci, Murray.

En passant, monsieur Reed, pendant qu'on en y est, si je me souviens bien, Environnement Canada a en fait beaucoup financé l'opération dépollution et l'étude environnementale du Saint-Laurent il y a à peu près trois ans. Est-ce que vous pensez à cela aussi, ou uniquement à Agriculture Canada?

M. John Reed: Les 125 millions de dollars dont j'ai parlé, pour les Grands Lacs étaient destinés à sept ministères différents. Du côté du Saint-Laurent, il y a une espèce de programme fédéral équivalent dont le financement est différent. Cela comprend Agriculture Canada, mais pas à l'exclusion d'autres ministères.

Le président: Mais pouvez-vous nous donner une idée de l'ampleur du programme du Saint-Laurent? Il s'agissait d'une entente de coopération, je crois, avec la province du Québec et de gros montants d'argent.

M. John Reed: Oui.

Le président: Je pense que le comité devrait probablement le recevoir, si vous l'avez. Peut-être pourrait-on y revenir plus tard, si vous ne l'avez sous la main.

M. John Reed: C'est dans le rapport. J'y reviendrai.

Le président: D'accord.

Dick, pourriez-vous...?

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Merci, monsieur le président. Merci à tout le monde d'être là.

Je trouve ce rapport toujours très accablant. On dit très clairement que les pratiques agricoles dans certains endroits ont des effets que l'environnement ne peut continuer d'absorber. On fait état de lacunes importantes, d'information qui n'est pas à jour, de plans d'action qui n'ont pas été mis au point, de programmes principaux qui n'ont pas été mesurés, du besoin d'une gestion plus efficace, et du manque d'harmonie entre les politiques et les programmes fédéraux.

• 1100

Or, le préambule, dans les points saillants—et ceci s'adresse aux fonctionnaires qui sont présents—énonce qui suit:

    Agriculture et Agroalimentaire Canada approuve nos recommandations. [...] mais il n'est pas clair qu'il traitera tous les volets de nos recommandations.

La question directe est la suivante: allez-vous traiter tous les volets de nos recommandations?

Mme Yaprak Baltacioglu: Oui, nous allons traiter tous les volets du rapport. En ce qui a trait aux recommandations, il y a plusieurs questions précises à l'égard desquelles le ministère devra apporter des améliorations. Nous avons déjà commencé.

Depuis la publication de ce rapport, et les années couvertes par la vérification—j'ignore lesquelles, peut-être que John Reid pourra préciser—nous avons ou bien réglé ou bien commencé à améliorer la plupart des choses qui ont fait l'objet d'une recommandation. Nous avons donc pris des mesures depuis la publication de ce rapport, nous avions en fait commencé même avant.

La discussion sur le cadre stratégique en matière agricole devrait nous permettre de nous attaquer à certains des résultats très critiques de ce rapport, notamment la coopération fédérale- provinciale, qui fait quoi, et quels résultats concrets cherchons- nous à obtenir—cette dernière question sera la plus difficile.

Mme Joanne Gélinas: Monsieur le président, permettez-moi d'ajouter quelque chose à cet égard à la réponse d'Agriculture Canada. Je dois dire que du point de vue de la vérification, la réponse que nous avons reçue est d'une nature trop vague pour nous permettre de faire le suivi des progrès à l'avenir. Comme vous le savez sans doute, nous faisons un suivi, à l'instar du vérificateur général, et nous avons besoin d'engagements clairs—par rapport aux mesures et au calendrier—pour pouvoir mener à bien notre travail. Malheureusement, à certains égards, étant donné nos recommandations, on ne sait pas exactement comment le ministère traitera les recommandations, même là où il les a retenues.

J'aimerais revenir à votre question précédente concernant le financement. Selon notre rapport, de 1993 à 1998, le financement du travail environnemental au sein du ministère de l'Agriculture a diminué de 75 p. 100. C'est un chiffre énorme par rapport aux dépenses environnementales au sein du gouvernement fédéral.

Monsieur le président, nous avons la réponse à votre question. Je laisse à John Reed le soin d'y répondre.

Le président: C'est pour le comité.

M. John Reed: Il s'agit du financement du programme Saint- Laurent Vision. Ce programme en est maintenant à sa troisième étape, qui durera de 1998 à 2003. L'apport fédéral via plusieurs ministères sur cette période s'élève à 123 millions de dollars. Plus loin dans cette section, il y a un graphique concernant ce programme qui illustre qu'il y a eu des réductions des chiffres annoncés, mais ces réductions-là n'étaient pas aussi importantes que celles que j'ai décrites dans le cadre de la partie du programme visant les Grands Lacs.

Le président: Dick, continuez.

M. Dick Proctor: Merci, monsieur le président. Et merci pour ces réponses.

Permettez-moi de poser deux questions rapides dans le peu de temps qu'il me reste. Vous avez soulevé l'étalement urbain, en notant qu'il se chiffre à 16 p. 100 pour l'Ontario au cours du siècle, je présume. Vous dites, d'un ton quelque peu défaitiste, et j'aurais aimé qu'on l'exprime autrement, que «d'autres pertes sont inévitables à mesure que les secteurs urbains prennent de l'expansion». J'aurais aimé qu'on dise qu'il faut se pencher sur l'étalement urbain—qu'il nous faut des règles fédérales- provinciales en la matière—plutôt que de dire tout simplement qu'on s'y résigne.

Vous dites également «Les pratiques agricoles dans le bassin ont des effets que l'environnement ne peut continuer d'absorber». D'après vous, qu'est-ce qui cause le plus grand problème: les pratiques agricoles ou l'étalement urbain? À votre avis, lequel de ces deux phénomènes est plus nocif?

Mme Johanne Gélinas: Les deux phénomènes ont des effets importants, selon le point de vue. Du point de vue des villes, ce sont les pratiques agricoles qui posent problème. Du point de vue des agriculteurs, ce sont les villes qui posent problème. Je crois qu'il faut examiner les deux côtés de façon sérieuse, mais je ne vais pas dire que l'un ou l'autre est plus nocif. Ce sont deux grandes questions que nous devons examiner.

• 1105

John, est-ce que vous permettez que mon collègue ajoute quelques mots?

Une voix: Certainement.

M. John Reed: Si vous avez demandé laquelle de ces deux choses représente la plus grande menace, les pratiques agricoles ou la croissance de la population, par opposition à l'étalement urbain, je choisirais la croissance de la population. Si je me souviens bien, le rapport dit que dans l'espace d'une génération il y aura trois millions de gens de plus dans la région du bassin. Évidemment, ces gens vieillissent, ils ont besoin d'espace pour vivre, ils consomment de l'eau, des ressources et de l'énergie, ils tirent la chasse d'eau de leurs toilettes et achètent des autos. Lorsqu'une population est en pleine croissance, elle consomme davantage de ressources.

Mme Johanne Gélinas: Et ces gens doivent manger. C'est pourquoi l'agriculture joue un rôle clé.

M. Dick Proctor: Je serai très bref, monsieur le président. Merci.

À la page 161 du rapport de la baie de Quinte...j'ai grandi tout prêt de la baie de Quinte. À mon avis, c'est un des plus beaux endroits au monde et il est très décourageant de voir que l'initiative amorcée au début des années 90 s'est terminée en queue de poisson en dépit du fait que, selon le rapport, le programme a été créé à un moment critique. Qu'est-ce qui s'est passé? Pourquoi n'a-t-on pas mené à bien cette initiative?

M. Peter Morrison (directeur, Bureau de la commissaire à l'environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général du Canada): Merci, monsieur le président.

Nous n'avons pas examiné en détail pourquoi cette initiative a sombré. Nous avons parlé avec les gens vivant dans la baie de Quinte et ils nous ont dit que leurs objectifs avaient été atteints. Ils ont dit qu'ils étaient près d'améliorer la qualité de leur eau selon les normes qu'ils s'étaient fixées et c'est pourquoi ils n'ont pas choisi de mener à terme cette initiative en particulier. C'est malheureusement tout ce que j'en sais.

M. Dick Proctor: Merci.

Le président: Madame Ur.

Mme Rose-marie Ur: J'aimerais remercier nos témoins pour leur exposé intéressant.

Pour revenir à la question de Dick, à savoir si le plus grand problème pour l'environnement est la croissance démographique ou l'agriculture, cela va peut-être vous surprendre, mais les agriculteurs vivent avec leurs familles sur leurs fermes et se préoccupent autant que n'importe qui de l'environnement. On ignore trop souvent le rôle que jouent les villes et on perçoit les citadins comme étant ceux qui veulent protéger l'environnement. Croyez-moi, j'ai vu beaucoup de pelouses soignées dans nos villes et même dans nos petits villages sur lesquelles on avait appliqué des quantités de pesticides et d'autres engrais. Devinez où ces produits se retrouvent après de fortes pluies. Ils ne restent pas dans les égouts pluviaux; ils se retrouvent éventuellement dans nos aqueducs. Je crois donc qu'il nous faut tenir compte de la vue d'ensemble et non seulement de l'agriculture.

Il y a un programme dans le cadre de l'initiative de gérance agricole et environnementale financée en vertu du FCADR. Dix millions de dollars sont alloués pour résoudre des problèmes environnementaux en matière de qualité de l'eau. En fait, le programme se concentre d'abord et avant tout sur la qualité de l'eau et du sol, sur la gestion du fumier, sur les déchets des aliments transformés et d'autres questions de la sorte. Ces problèmes ont-ils été réglés? Est-ce que 10 millions de dollars sont vraiment assez pour s'attaquer à cette gamme de problèmes?

J'aimerais que vous soyez bref, car j'ai encore deux questions.

M. Peter Morrison: Nous n'avons pas examiné l'efficacité de ce programme en particulier. Mais nous avons certaines inquiétudes en ce qui concerne le suivi donné par le ministère de l'Agriculture, à savoir si les objectifs des programmes ont été atteints. Un thème qui revient souvent dans le rapport est le manque d'évaluation et de compréhension en ce qui concerne les effets concrets des politiques.

M. John Reed: Puis-je faire une brève intervention? Nous sommes évidemment en train de parler des divers secteurs agricoles, mais ce que vous dites au sujet des autres secteurs est également pertinent; on les mentionne ailleurs dans le rapport.

Par exemple, il y a encore beaucoup de progrès à faire au niveau des effluents municipaux. Quarante pour cent des communautés dans la région du bassin continuent de rejeter... Saviez-vous que ces effluents ne font l'objet que d'un traitement primaire qui n'est pas très poussé. Encore une fois, nous parlons d'agriculture, mais les problèmes dans la région du bassin vont bien au-delà de ce secteur.

• 1110

Mme Rose-Marie Ur: Puisque je représente une grande circonscription agricole, je m'assure qu'ils font bien leur travail.

Vous avez aussi dit dans votre exposé que le CSRN n'a pas été évalué selon les normes. Vous souleviez également des questions quant à l'érosion du sol, et j'imagine que vous savez que les agriculteurs, du moins dans mon coin de pays, pratiquent la culture sans travail du sol. À mon avis, c'est une pratique positive en agriculture qui a aidé à ralentir l'érosion du sol. Auriez-vous des commentaires à faire là-dessus?

Mme Johanne Gélinas: Nous sommes au courant des bonnes pratiques visant à diminuer l'érosion des sols. Mais le problème demeure néanmoins et il faut y trouver une solution, monsieur le président, puisque, comme je l'ai déjà dit, si nous restons sur la présente voie, il faudra attendre 90 ans avant de régler le problème, c'est-à-dire avant de trouver une solution rentable. C'est longtemps. Nous devons nous attarder davantage à ce problème pour protéger nos sols.

Mme Rose-Marie Ur: Je ne sais pas si vous êtes bien placée pour le dire, mais croyez-vous qu'on devrait aller dans ce sens?

Mme Johanne Gélinas: Nous disons que le ministère de l'Agriculture devrait faire des recherches dans ce domaine. Je ne veux pas dire que les recherches n'ont pas été sérieuses jusqu'à présent, mais on devrait en faire une priorité afin de trouver une solution. Étant donné les pratiques actuelles, nous n'allons pas trouver une solution de sitôt. John, y a-t-il des exemples précis qu'on pourrait donner?

M. John Reed: Merci, monsieur le président.

Nous avons évidemment toute une section qui s'occupe de l'érosion des sols, et nous avons précisé que beaucoup d'agriculteurs pratiquent maintenant la culture sans travail du sol ou font un travail de conservation du sol. Cela a réduit le taux d'érosion des sols. La recherche est importante, car des études ont démontré que ce genre de pratique peut donner lieu à des problèmes imprévus. C'est pourquoi nous devons trouver, par le biais de la recherche, des façons de mieux gérer l'érosion des sols. Ce n'est pas seulement une question de travailler davantage le sol. D'après les études les plus récentes, il faut faire très attention aux genres de pratiques que nous voulons encourager.

Le président: Merci, madame Ur.

Monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président.

J'aimerais remercier nos témoins d'être venus. Il est évident qu'on pourrait débattre de ce sujet pendant plus d'une heure et demie.

Il semble y avoir un conflit en ce que dit le rapport du vérificateur et ce que dit le ministère de l'Agriculture. Madame Gélinas, vous dites dans votre rapport qu'il ne semble pas y avoir une vision, qu'il n'y a pas de progrès ni d'innovation—ces commentaires visaient le gouvernement en général. Mais puisque nous avons des témoins du ministère de l'Agriculture, je me concentrerai sur ce domaine. Le rapport d'Agriculture Canada nous dit que le ministère a fait des progrès au niveau du plan agricole environnemental. En Ontario, 19 000 agriculteurs font partie du programme. Au Québec, il y en aurait 4 000. D'un côté, vous nous dites qu'il n'y a ni innovation, ni progrès. Mais de l'autre, le ministre nous dit le contraire. Étant donné cette contradiction, pouvez-vous nous dire ce qu'il en est?

Mme Johanne Gélinas: Nous avons commencé la vérification au début de l'an 2000 et nous l'avons terminé en avril 2001. Au cours de nos vérifications, nous avons évidemment des discussions avec les ministères. Ils sont au courant de nos travaux. Par conséquent, peut-être choisiront-ils de se concentrer davantage sur des questions que nous avons portées à leur attention. Donc, dès que nous avons terminé la vérification au printemps 2001, ils ont lu le rapport, ce qui est bien. Ils sont prêts à aller de l'avant avec certaines initiatives en réponse à certaines questions que nous avons soulevées. C'est probablement une coïncidence. Ils sont allés de l'avant sur des questions que nous avons jugées importantes.

M. Rick Borotsik: Yaprak pourrait peut-être ajouter quelques mots.

Mme Yaprak Baltacioglu: Je ne crois pas qu'il y ait une grande différence entre ce que disent les deux parties. Nous avons pris très au sérieux le rapport de Mme Gélinas. Notre ministère travaille depuis longtemps sur des questions environnementales. Nous faisons partie d'une petite poignée de ministères qui dépensent autant de temps et d'énergie sur les questions liées à l'environnement.

• 1115

M. Rick Borotsik: Merci. Cela me mène à ma prochaine question.

Mme Yaprak Baltacioglu: Et nous allons en faire davantage.

M. Rick Borotsik: Je sais.

Soit dit en passant, tous ceux qui sont assis autour de cette table sont en faveur de l'agriculture, de l'agriculture durable, et les producteurs sont les mieux placés pour en parler.

Vous dites que le ministère de l'Agriculture est un des chefs de file au sein du gouvernement en matière d'environnement. Nous avons parlé brièvement de la façon dont, dans la région du bassin, d'autres industries devraient également se préoccuper de cette question. Étant donné les problèmes causés par les aciéries de Hamilton et par les autres activités qui ont lieu dans la région des Grands Lacs, ce n'est pas tout de la faute de l'agriculture. En ce qui a trait aux systèmes de traitement des eaux usées des municipalités—et j'en connais quelque chose—ils sont très inefficaces. À mon avis, si on examinait les problèmes causés par les villes dans la région du bassin des Grands Lacs, on s'apercevrait qu'ils sont beaucoup plus grands que ceux causés par l'agriculture.

On parle d'empiétement humain. Vous avez raison. Trois millions de gens de plus vont avoir un effet beaucoup plus important sur l'environnement que les pratiques agricoles. Je suis conscient que nous sommes ici au comité de l'agriculture, mais nous devenons très sensibles lorsque nous en parlons avec nos propres producteurs.

Pourquoi les autres secteurs ne sont-ils pas aussi pointés du doigt, plutôt que seulement le secteur agricole?

Mme Johanne Gélinas: Mes collègues pourront répondre à vos questions et vous expliquer pourquoi nous avons choisi de cibler les problèmes précis entourant la région des Grands Lacs.

M. John Reed: Merci, monsieur le président.

Je ne suis pas sûr qu'on puisse dire que les autres secteurs ne sont pas pointés du doigt. Je n'ai pas cherché à savoir lequel recevait le plus d'attention. Le secteur industriel a été lourdement réglementé depuis près de 20 ans et il a produit un certain nombre de...

M. Rick Borotsik: Le fait d'avoir des règlements et le fait de les appliquer sont deux choses différentes, monsieur Reed.

M. John Reed: C'est vrai. J'en conviens. Mais il y a assurément des règlements provinciaux et fédéraux. Nous le notons dans notre rapport.

L'approche municipale est différente. On y a privilégié une approche qui passe non par la voie de la réglementation, mais plutôt par la voie de l'infrastructure et de l'investissement en capital, et on a encouragé...

M. Rick Borotsik: Ou bien pas assez.

M. John Reed: Ou bien pas assez.

M. Rick Borotsik: Est-ce que je peux poser encore une question? Le président va bientôt me couper la parole.

Dans votre rapport, vous parlez d'une cible à l'exportation des produits agricoles canadiens de 4 p. 100 d'ici à 2005 des exportations mondiales. J'aimerais vous poser une question hypothétique. Étant donné ce qu'on dit dans votre rapport au sujet de l'érosion des sols et du fait qu'il y ait peu de pratiques durables, croyez-vous que le ministère de l'Agriculture se trompe en se fixant cette cible? Ne devrait-il pas opter pour une autre politique?

Mme Johanne Gélinas: Tout ce que je peux dire là-dessus, c'est que si le gouvernement fédéral énonce ainsi clairement son intention de faire augmenter les exportations, il est plus qu'important maintenant d'aborder la question de l'environnement et du développement durable pour s'assurer qu'on trace la voie du développement durable au pays.

Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter, monsieur le président, que vous avez raison. Nous nous sommes penchés sur l'agriculture aujourd'hui, mais nous aurons également l'occasion de parler du chapitre concernant les pêches en ce qui a trait à la vérification touchant la région des Grands Lacs et d'autres régions.

M. Rick Borotsik: Oui, mais vous allez sans doute reprocher l'épuisement des stocks de poissons à l'agriculture.

[Français]

Le président: Claude, s'il vous plaît.

M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.): On dit que bon nombre des cours d'eau du bassin du sud-ouest de l'Ontario et du Québec ont des concentrations de phosphore qui dépassent les normes. Est-ce qu'il y a trop d'élevage pour le sol disponible ou si la réglementation en matière d'épandage n'est pas assez sévère?

Mme Johanne Gélinas: Je ne peux malheureusement pas répondre à cette question. C'est un constat qu'on fait. On se dit que le problème doit être pris de front pour qu'on soit en mesure de trouver des solutions. S'il y a trop de production, il n'y a pas assez de sol pour faire l'épandage. Il appartient aux ministères provinciaux et fédéral de l'Agriculture d'aborder cette question, mais il n'en reste pas moins qu'il y a un problème sur lequel on doit se pencher à court terme parce que, comme on le mentionnait plus tôt, on se dirige directement dans le sens opposé à la voie du développement durable si rien ne se fait.

M. Claude Duplain: Je vais vous poser une question qui va peut-être faire frémir certaines personnes. Le rapport que vous nous présentez nous fait frémir. On a vu les réactions de M. Gagnon, à tort ou à raison. Je connais des environnementalistes qui sauteraient très haut si je leur donnais ce rapport.

• 1120

On parle de budgets depuis tout à l'heure. Murray demandait qui, du fermier ou du consommateur, devait absorber les coûts de certaines réglementations. De toute façon, c'est toujours le consommateur qui va absorber ces coûts en bout de ligne.

Tout à l'heure, M. Gagnon et moi parlions à quelqu'un qui disait que, depuis qu'il était tout jeune, on disait que les coupes forestières en Amazonie détruisaient le poumon du monde, mais qu'aujourd'hui, on nous disait que ce n'est absolument pas vrai, que les feuilles qui tombent équivalent à l'azote ou...

Quand je regarde votre rapport, il me fait paniquer. J'aimerais savoir à quel point ce rapport est vraiment fiable au point de vue environnemental. On parle toujours d'argent. Est-ce une question d'argent ou de réglementation qui fait qu'on ne va pas assez vite pour protéger l'environnement? On parle depuis tout à l'heure de millions de dollars, mais si on fait des réglementations... On parle de l'étalement urbain et de la croissance démographique. Pourquoi est-ce qu'on ne ferait pas dès aujourd'hui une réglementation sur la direction qu'on doit prendre pour protéger l'environnement et peut-être pour réparer certaines choses? Il est vrai que des choses ont été faites. Lequel est le plus important?

Mme Johanne Gélinas: Vous avez posé deux questions.

Premièrement, vous avez demandé si le rapport était fiable. J'ose croire que oui. Il s'appuie sur des faits évidents. Nous nous appuyons sur l'information qui est disponible dans les ministères. Je dirais, en appui à la fiabilité, que ma collègue du ministère de l'Agriculture va de l'avant avec les recommandations et reconnaît le problème.

Quand on soulève un problème dans notre rapport, on a des discussions. Les engrais et le fumier sont un problème qu'Agriculture Québec et Agriculture Canada ont soulevé il y a longtemps. Nous n'avons pas inventé ce problème. Il existe et il est documenté. Nous regardons la façon donc le gouvernement fédéral s'acquitte de sa tâche pour régler les différents problèmes qui sont soulevés.

Cela étant dit, est-ce une question d'argent ou une question de réglementation? C'est un peu des deux, mais c'est surtout une question de changement de comportement de l'ensemble des citoyens du Canada.

On a tous un rôle à jouer pour se mettre sur la voie du développement durable. On a un exercice d'introspection à faire comme individus. On doit se demander si les gestes qu'on pose vont dans le sens du développement durable. Les agriculteurs ont des questions à se poser. Les résidents des centres urbains ont des questions à se poser. C'est une question de changement de comportement. Il n'y a personne à blâmer ici. Il y a une situation qui mérite d'être prise en considération et on doit travailler ensemble à trouver des solutions.

Ma collègue mentionnait au début de sa présentation que l'environnement était un enjeu horizontal. Il n'appartient pas à un seul ministère d'aborder cette question. C'est une question de responsabilité gouvernementale, et tous les acteurs doivent être présents à la table, que ce soit Environnement Canada, le ministère des Pêches, le ministère de la Santé ou le ministère de l'Agriculture. C'est un enjeu qui est devenu trop important et trop complexe pour qu'on donne à un seul ministère la responsabilité de régler l'ensemble des problèmes. On est tous concernés par l'environnement et le développement durable.

[Traduction]

Le président: Merci, Claude. Marcel voudrait faire une petite intervention... Howard, soyez bref, s'il vous plaît, et nous passerons ensuite à Marcel.

[Français]

M. Marcel Gagnon: C'est qui, finalement?

[Traduction]

Le président: Un instant, Marcel.

[Français]

M. Marcel Gagnon: Merci.

Pour ma part, je crois que le rapport est fiable, mais ce n'est pas le rapport qui me fait paniquer. Madame Gélinas, dans vos dernières phrases, vous avez mis le doigt sur le coeur du problème: l'environnement est l'affaire de tout le monde.

Je n'en veux pas aux représentants du ministère de l'Agriculture, mais je préférerais qu'on me dise que ça ne va pas bien et qu'on réagisse plutôt que de me dire, par exemple, que le ministère prend les choses au sérieux. On voit les résultats. Je pense qu'il faut vraiment considérer ce rapport comme étant extrêmement éclairé. C'est une lumière rouge qu'on allume pour l'avenir. On doit régler ces problèmes.

Je veux vous remercier pour le travail que vous avez fait. Je veux aussi remercier les gens du ministère de l'Agriculture de nous mettre devant la situation qu'ils connaissent, mais...

[Traduction]

Le président: Marcel, je vais vous couper la parole.

• 1125

[Français]

M. Marcel Gagnon: Je m'excuse. Merci.

[Traduction]

Le président: Howard, avez-vous une intervention à faire? Ensuite, Rick en aura une.

M. Howard Hilstrom: Très rapidement, si vous vous demandez pourquoi le secteur agricole et les producteurs se préoccupent des initiatives gouvernementales, dans les années 20 et 30, on a vigoureusement encouragé la mise en jachère d'été dans les provinces des Prairies. Puis, il y a eu un grand bol de poussière. Ensuite, le ministre Vanclief est venu nous dire encore une fois cet été que la mise en jachère d'été était une bonne idée, et ainsi de suite. Cela soulève donc quelques objections.

Pour ce qui est des questions écologiques, je suis éleveur de bétail et j'ai quelque 300 têtes de bétail au bord du lac. J'ai posé une clôture. L'élevage se fait conformément aux principes de l'analyse des risques et la maîtrise des points critiques. Donc, l'industrie du boeuf fait son travail.

Il y a deux choses d'inquiétantes. Premièrement, en Oklahoma, une municipalité poursuit des aviculteurs pour avoir pollué deux lacs. Cela m'amène à la question que vous avez soulevée en disant qu'il y aura probablement trois millions de personnes de plus dans la région du bassin des Grands Lacs, et que la province de Québec augmente sa population dans les zones agricoles.

Avec cette croissance démographique, il faut évidemment accroître la production alimentaire, comme vous l'avez dit. En vertu des lois fédérales, il faut que la production alimentaire ait lieu dans ces provinces-là. Il s'agit nommément du programme de gestion de l'offre.

Avez-vous examiné l'expansion agricole nécessaire, y compris l'accumulation de fumier découlant d'une production alimentaire accrue, pour subvenir aux besoins des populations qui ne cessent de croître dans le bassin des Grands Lacs? Est-ce qu'on examinera la politique gouvernementale pour voir s'il y a lieu, lorsque la gestion du fumier cause un problème, de répartir la production agricole entre les provinces? Est-ce que le gouvernement devrait avoir une politique de répartition de la production dans tout le Canada, de sorte que des régions comme la Saskatchewan, qui a une faible population mais une grande superficie, avec plus de 40 p. 100 des terres arables au pays, pourraient jouer un rôle beaucoup plus important dans la gestion de l'offre?

Avez-vous examiné cela? Est-ce une pratique durable que d'augmenter sans cesse la production de bétail en Ontario et au Québec?

Mme Johanne Gélinas: À propos de votre dernière question, nous n'avons pas encore examiné cela, puisque nous nous penchons sur les Grands Lacs.

Pour ce qui est de la première partie de votre question, je suppose que nous avons...

M. Howard Hilstrom: La question porte sur les Grands Lacs—la croissance des produits laitiers et des produits à base de poulet, qui sont des produits soumis à la gestion de l'offre, dans le bassin des Grands Lacs inférieurs.

M. John Reed: Nous n'avons pas procédé à cette évaluation-là, mais le ministère a évalué l'objectif national en matière d'exportations et a essayé d'examiner les conséquences notamment pour l'environnement et pour la croissance économique. On a clairement recensé des effets néfastes.

Nous n'avons pas considéré ce que cela signifie par rapport à une modification des politiques du ministère. Je pense que les fonctionnaires du ministère pourraient y répondre.

M. Howard Hilstrom: J'aimerais demander à Yaprak alors de dire alors si la politique agricole envisage la concentration de la production du bétail dans certains secteurs du pays.

Le président: Howard, je pense que nous avons tous compris.

Je vais donner à Rick à peu près une minute.

M. Rick Borotsik: Je n'ai besoin que de 30 secondes. Lors de l'exposé, on a fait une observation à propos du compte de stabilisation du revenu net, le CSRN. Vous avez dit qu'il y avait des manques de conformité, et qu'il n'y a pas eu d'évaluation de ce programme précis. Je présume qu'il s'agit d'une évaluation de la conformité avec une exigence quelconque, mais laquelle? Je suis mal à l'aise quand je vois qu'on dit que le CSRN est un très bon programme, et quand vous commencez par dire que l'évaluation n'a pas eu lieu, pourriez-vous m'expliquer tout cela, s'il vous plaît.

Mme Johanne Gélinas: Il y a des éléments qui manquent, et Peter ou John pourrait en parler.

M. Peter Morrison: Comme vous savez sans doute, la Loi sur la protection du revenu agricole exige que ces programmes-là soient soumis à une évaluation environnementale. Étant donné qu'une évaluation environnementale de cette loi a été effectuée en 1993, nous nous préoccupions du fait qu'un rapport aurait dû être préparé en 1998. Le ministère a consacré beaucoup de temps à réfléchir aux éventuelles conséquences environnementales, mais n'a pas produit de rapport final résumant l'évaluation environnementale. Voilà la préoccupation que nous exprimions.

Le président: Rick, je suis désolé, votre temps est écoulé. Nous aurons une brève séance à huis clos après, si tout le monde peut rester.

• 1130

Nous aimerions remercier tous nos témoins d'être venus. Comme nos questions le laissent entendre—je sais qu'en tant que président je n'ai pas eu le temps de bien réfléchir à certaines de mes propres questions—c'est une question très importante. En tant que Canadiens, nous devons reconnaître que la moitié du problème, si tant est qu'il y ait un problème, c'est que deux pays touchent au bassin.

Je viens d'interroger un de nos attachés de recherche sur les trois millions de personnes. S'agit-il de trois millions de personnes de notre côté ou de l'autre côté de la frontière? En tant que Canadiens, nous devrions sans doute nous demander si nous réussissons mieux ou non que nos cousions de l'autre côté des lacs.

Il s'agit d'une énorme masse d'eau douce, sans doute la plus grande du monde. Elle nous est très importante, en tant que Canadiens et Nord-Américains—en tant que bons citoyens du continent. Je ne suis pas sûr de l'orientation future du comité, mais je sais qu'il s'agit d'un sujet que nous devons étudier davantage, et l'agriculture n'est sans doute qu'une très petite partie du problème général que nous avons.

Les Américains ont fait des progrès avec le canal Love et ces régions-là. Nous, les Canadiens, avons également fait des efforts.

En tout cas, merci d'être venus. C'était très intéressant. Il se peut qu'on vous demande de revenir. D'après moi, c'est le fameux...sur la ferme, comme Howard, et maintenant il a ce système de choc. Certaines de vos observations nous choquent effectivement, lorsqu'on nous dit ce qui pourrait être fait et ce qui devra sans doute se faire.

Quoi qu'il en soit, le comité de l'agriculture veut examiner ces questions, et Agriculture et Agroalimentaire Canada veut s'y attaquer. En tant que députés canadiens, nous voulons voir une solution pour l'avenir, pour le XXIe siècle, pour le Canada.

Donc, merci. Sur ce, cette partie de notre séance est levée.

[La séance se poursuit à huis clos]

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