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PACC Rapport du Comité

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Armoiries parlementaires

CHAMBRE DES COMMUNES
CANADA


INTRODUCTION
OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS
CONCLUSION


 

Conformément à l'alinéa 108(3)e) du Règlement, le Comité permanent des comptes publics a l’honneur de présenter son

ONZIÈME RAPPORT

Le Comité a étudié le chapitre 17 du Rapport du vérificateur général du Canada -- Le programme Travaux d’infrastructure Canada : Phase II et suivi de la vérification de la Phase I -- de septembre 1999 et a convenu de présenter le rapport ci-après :

 

INTRODUCTION

L’expression récente « entente de collaboration » désigne les efforts déployés collectivement par les pouvoir publics au Canada pour fournir des services à l’ensemble de la population. Ces efforts prennent la forme d’ententes entre divers ordres de gouvernement et, à l’occasion, les secteurs bénévole et privé, de sorte que les pouvoirs, les responsabilités et les coûts liés à la conception et à la fourniture des services sont partagés. Les pouvoirs publics canadiens ont ainsi collaboré par le passé, mais les ententes de collaboration sont devenues plus fréquentes et d’une envergure plus vaste.

Le programme Travaux d’infrastructure Canada (appelé ci-après le Programme) est un bon exemple d’entente de collaboration. Lancé en 1994, il suppose la participation de trois ordres de gouvernement, à savoir les gouvernements fédéral et provinciaux ainsi que les municipalités, à un effort visant à stimuler l’emploi et à maintenir et à développer l’infrastructure locale. Le gouvernement fédéral a pour responsabilité d’approuver le financement conjoint de projets proposés par les provinces. Les gouvernements provinciaux assument, quant à eux, la responsabilité des opérations au jour le jour et se chargent de la prestation des programmes.

À l’origine, le Programme devait être de nature provisoire, puisqu'il devait prendre fin après deux années, les sommes consacrées au Programme devant toutefois être échelonnées sur trois ans. Dans son budget de 1995, le gouvernement fédéral a prolongé le Programme jusqu’en 1998-1999, mais sans prévoir de financement supplémentaire.

Au moment où le Programme est arrivé à son terme, soit en mars 1999, les trois ordres de gouvernement avaient dépensé plus de 8,3 milliards de dollars, sur lesquels le gouvernement fédéral avait contribué 2,4 milliards de dollars.

Le vérificateur général a publié les résultats d’une vérification du Programme dans son Rapport de novembre 1996. Le Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes a étudié ces résultats avant de produire, le 17 novembre 1997, un rapport contenant ses recommandations (Sixième rapport).

En janvier 1997, le gouvernement avait annoncé que le Programme serait prolongé (pour devenir la Phase II) et qu’il y consacrerait 425 millions de dollars de plus. Les provinces et les autres partenaires devaient injecter 850 millions de dollars supplémentaires. En 1999, lorsque le vérificateur général a assuré le suivi de sa vérification de 1996, il en a profité pour effectuer une vérification de la Phase II.

C’est pour cela que le Comité désire revoir les conclusions des vérifications. Le Programme était novateur, supposait des dépenses considérables et a fait l’objet d’un rapport antérieur du vérificateur général et du Comité. Le gouvernement ayant annoncé qu’il prolongerait le Programme pour une troisième phase, il devient encore plus impératif de tirer les enseignements des phases écoulées et de les appliquer dès à présent. Ainsi, le Comité a rencontré à deux reprises des témoins pour se pencher sur le chapitre 17 du Rapport du vérificateur général de septembre 1999.

La première réunion a eu lieu le 24 février 2000. M. L. Denis Desautels, FCA, vérificateur général du Canada, et Mme Maria Barrados, vérificatrice générale adjointe, ont représenté le Bureau du vérificateur général du Canada. M. Richard B. Fadden, secrétaire adjoint, secteur des Opérations gouvernementales, et M. Ralph Heintzman, secrétaire adjoint, Service et innovation ont représenté le Secrétariat du Conseil du Trésor.

Il y a eu une seconde réunion le 21 mars 2000, au cours de laquelle Mme Barrados a représenté le Bureau du vérificateur général. M. Henno Moenting et M. John Mayne, tous deux directeurs principaux à la Direction générale des opérations de vérification, l’accompagnaient. M. Eric L. Shipley, directeur général, Gestion de l'information et de l’exécution des programmes, Bureau national des infrastructures; M. Toby Fyfe, directeur, Diversification des modes de prestation de service, Service et innovation et M. Tom Fitzpatrick, agent de politiques supérieures, Service et innovation représentaient le Secrétariat du Conseil du Trésor.

 

OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS

Le programme Travaux d’infrastructure Canada a connu un succès remarquable à plusieurs égards. En tant qu’entente de collaboration, il a suscité l'engagement, la collaboration et la coopération de trois ordres de gouvernement. Il est rare qu’un tel niveau de collaboration entre pouvoirs publics se produise au Canada; tous les participants devraient donc en tirer une grande fierté. Nous espérons que, de ce point de vue, le Programme devienne un modèle.

Comme l'a fait remarquer le vérificateur général, les responsables provinciaux et fédéraux du Programme ont indiqué que ce dernier avait bel et bien permis d’établir des relations fédérales-provinciales constructives (17.35). Dans ses deux rapports, le vérificateur général a informé le Parlement que les responsabilités confiées en vertu du Programme l’avaient été en fonction des domaines de compétence de chacun (26.29, 17.20). Cela se justifiait du point de vue constitutionnel et du point de vue pratique.

Grâce à la formule utilisée pour le financement (chacun des partenaires contribuant à raison d’un tiers environ), les divers parties au Programme ont pu collectivement appuyer des projets qu’ils n’auraient pu appuyer à titre individuel. Les projets ainsi financés étaient clairement présentés comme des efforts collectifs des trois ordres de gouvernement (17.38). Les Canadiens ont ainsi eu une preuve tangible que leurs pouvoirs publics sont capables de travailler de concert pour stimuler l’économie et fournir une infrastructure bien nécessaire.

Le Programme a permis de mener plus de 17 000 projets d’ingénierie et projets de construction un peu partout au pays. Un grand nombre de ces projets ont nécessité la construction ou la réparation d’équipements d’une importance vitale et ont apporté des avantages durables à de nombreuses collectivités, ce que M. Fadden a pris soin de souligner (17.02.00, 1555). Enfin, les deux phases du Programme ont été mises en place rapidement, ce qui a contribué à leurs succès, car, comme le vérificateur général l’avait déclaré dans sa vérification de 1996, « le calendrier de mise en œuvre est une considération importante sur le plan de la rentabilité, vu que le Programme visait à stimuler l’activité économique là où c’était le plus nécessaire ». (26.25)

Le Comité reconnaît les efforts déployés par les trois ordres de gouvernement et estime que le Programme représente un bon modèle pour ce qui est des ententes de collaboration. Les vérifications ont néanmoins révélé un certain nombre de lacunes, dont certaines se sont répétées de la phase un à la suivante malgré les correctifs recommandés par le vérificateur général en 1996. Il s’agissait de questions de gestion et de contrôle financier, de vérification et de communication au Parlement.

Le programme Travaux d’infrastructure Canada est un programme de contributions, c’est-à-dire que le versement des fonds de source fédérale dépend du respect de conditions liées au rendement et de la conformité aux exigences du Programme, notamment le contrôle adéquat des fonds publics. Comme l’a mentionné le vérificateur général :

Ces exigences ont des conséquences importantes pour le régime de responsabilisation qui se rattache au Programme ¾ soit l’obligation mutuelle de rendre compte des partenaires des ententes et l’obligation de rendre compte au Parlement des dépenses effectuées et des résultats obtenus. (17.15)

La vérification a permis d’établir toutefois que l’on ne se préoccupe pas suffisamment du respect des normes en matière de rendement et des exigences du Programme. Dans certaines provinces, des municipalités ont reçu des fonds pour des travaux entrepris, sans que les fonctionnaires provinciaux n’exigent de factures ou de preuves de paiement (17.75). Dans toutes les provinces assujetties à l’examen, les fonctionnaires fédéraux se sont fiés aux administrations provinciales et municipales qui leur ont affirmé que les projets avaient été mis en œuvre et que le remboursement des coûts avait été demandé conformément aux ententes fédérales-provinciales et aux lignes directrices (17.75).

Les vérifications de conformité sont l’un des moyens de s’assurer que des mécanismes de contrôle de gestion financière adéquats sont en place. Elles permettent également d’obtenir un certain degré de certitude lorsque l’on ne dispose pas de reçus et d’états des dépenses détaillés et que l’on se fie aux affirmations des intéressés. Dans son Sixième rapport (35e législature), le Comité a reconnu l’utilité des vérifications de conformité et approuvé leur usage pour ce qui est du programme Travaux d’infrastructure Canada.

En réponse à l’une des recommandations que le vérificateur général a formulées dans son rapport de 1996, le Secrétariat du Conseil du Trésor a fait savoir que les vérifications de conformité constituaient une exigence de la Phase II (17.81). Le vérificateur général a toutefois révélé que les vérifications de conformité ne se faisaient pas en temps opportun. Sauf au Québec et, dans une moindre mesure, en Colombie-Britannique, ce type de vérification était censé se terminer un bon moment après l’instauration du Programme. Il est arrivé à maintes reprises que la vérification de conformité ait lieu une fois le projet terminé et les fonds versés (17.75). Les vérifications de conformité ont été terminées en moyenne à peu près deux années et demie après le lancement du Programme (17.77).

Dans les cas où la vérification de conformité a eu lieu en temps voulu, il est arrivé que certains paiements aient été retenus jusqu’à ce que les justificatifs demandés soient fournis (17.78). La façon dont le Québec mène ce type de vérifications constitue un bon modèle. Dans cette province, un échantillon de projets est retenu en fonction du risque et de l’importance et une vérification a lieu avant le versement du dernier paiement. Si un rajustement s’impose, le montant peut alors être déduit du dernier versement effectué (17.80). Le Comité a reconnu la valeur de l’approche adoptée au Québec dans son rapport du 17 novembre 1997 et a recommandé que cet exemple soit suivi.

Les vérifications de conformité effectuées en temps opportun sont l'assurance, pour les représentants de tous les ordres de gouvernement, les parlementaires et la population canadienne, que les fonds publics sont dépensés uniquement pour les fins prévues. Le Comité recommande donc :

RECOMMANDATION 1 :

Que soient incorporées aux ententes fédérales-provinciales relatives à la Phase III du programme Travaux d’infrastructure Canada des modalités prévoyant que des vérifications de conformité seront effectuées avant le dernier versement. Ces vérifications devraient porter essentiellement sur des échantillons de projets qui auront été retenus en fonction du risque qu’ils présentent et de leur importance.

Des vérifications de conformité menées en temps opportun permettent de déceler la nécessité de modifier l’approche suivie à l’égard du Programme (17.77). Un autre moyen de déceler les changements à apporter serait d’évaluer de façon rigoureuse les programmes.

M. Shipley a signalé que la Phase I du Programme avait fait l’objet d’une évaluation. Il a fait remarquer que cela avait été très utile pour toutes les parties intéressées et que les leçons tirées de l’évaluation peuvent être facilement appliquées à la Phase III. Il a ajouté « ce serait une bonne idée d’intégrer dans ce programme quinquennal l’exigence de faire des évaluations périodiques » (21.03.00, 15:40). Le Comité est d’accord avec ce point de vue et recommande :

 

RECOMMANDATION 2:

Que les enseignements tirés de l’évaluation de la Phase I du programme Travaux d’infrastructure Canada soient appliqués à la conception de la Phase III du Programme;

Et :

RECOMMANDATION 3:

Que l’on élabore, au moment de la conception de la Phase III du programme Travaux d’infrastructure Canada, un cadre d’évaluation comportant des évaluations périodiques et une évaluation finale du Programme. Ce cadre devra préciser les rôles et les responsabilités en matière d’évaluation et être mis en place avant l’application du Programme;

RECOMMANDATION 4:

Que le cadre d’évaluation de la Phase III du programme Travaux d’infrastructure Canada soit axé sur la réalisation de tous les objectifs du Programme;

RECOMMANDATION 5:

Que l’on prévoie des ressources suffisantes pour la conduite d’évaluations périodiques et d’une évaluation finale avant la mise en place de la Phase III du programme Travaux d’infrastructure Canada;

RECOMMANDATION 6:

Que le cadre d’évaluation de la Phase III du programme Travaux d’infrastructure Canada soit déposé à la Chambre des communes avant le lancement du Programme;

RECOMMANDATION 7:

Que le rapport et tous les documents connexes contenant les résultats de l’évaluation finale de la Phase III du programme Travaux d’infrastructure Canada soient déposés à la Chambre des communes au plus tard un mois après avoir été terminés; et

RECOMMANDATION 8:

Qu’il y ait un engagement formel d’assurer le suivi de toutes les conclusions et recommandations contenues dans les évaluations périodiques et l’évaluation finale de la Phase III du programme Travaux d’infrastructure Canada, surtout dans la mesure où elles concernent des programmes ultérieurs de même nature.

L’un des principaux objectifs du Programme était d'assurer le financement de projets d’infrastructure venant s’ajouter à des projets déjà prévus ou en cours et financés selon d’autres modalités. Autrement dit, il s’agissait de nouveaux projets qui auraient pour conséquence de créer de nouveaux emplois et une infrastructure et qui n’auraient pu avoir lieu sans le financement assuré par le Programme. Or, la formule de financement de ce dernier (chaque ordre de gouvernement assurant un tiers à peu près du financement) était fort différente de celles utilisées par les gouvernements provinciaux et les municipalités, en vertu desquelles les provinces assument entre 50 et 100 % des coûts. Il y a ainsi eu encouragement à faire financer des projets provinciaux-municipaux dans le cadre du programme Travaux d’infrastructure Canada, phénomène connu sous le nom de substitution de programme.

Même s’il est impossible d’éliminer à tout jamais la substitution de programme, il est possible et il faudrait faire en sorte de réduire sa fréquence. Or, malgré les inquiétudes soulevées par l’évaluation menée en 1996 et les exemples de précautions à prendre suggérés par le vérificateur général, les mécanismes visant à limiter les substitutions entre les programmes fédéraux et provinciaux étaient plutôt rares lors de la Phase II (17.63).

La substitution de programme peut gravement entraver la création d’emplois et la mise sur pied de nouveaux projets. Il faut donc qu'à l'avenir toute entente prévoie des mécanismes limitant les possibilités de substitution de programme. Le Comité recommande donc :

 

RECOMMANDATION 9:

Que l’on prévoie, au moment de la conception de la Phase III du programme Travaux d’infrastructure Canada, des mesures de protection contre la substitution de programme et des références particulières aux mesures mises en place avec succès au Québec et en Saskatchewan.

La création d’emplois était l’un des principaux objectifs du Programme, le nombre et le type d'emplois créés sont les deux principaux critères en fonction desquels l’on a pu juger du succès du Programme. Il n’est donc pas surprenant que les statistiques relatives à la création d’emplois découlant du Programme aient été matière à controverse. Si le Comité ne tient pas à prendre le parti de qui que ce soit, il estime qu’il faut absolument montrer de façon explicite le type d’emplois créés et la méthode utilisée pour quantifier la création d'emplois. Le Comité recommande donc :

 

RECOMMANDATION 10:

Que le Secrétariat du Conseil du Trésor communique au Parlement le nombre approximatif d’emplois créés par suite de la mise en place de la Phase III du programme Travaux d’infrastructure Canada, en précisant le type d’emplois créés (à temps plein, à temps partiel, temporaires, permanents, indirects, directs), les méthodes utilisées pour quantifier cette création d’emplois et toute limite liée aux estimations présentées.

Le Comité a été particulièrement déçu du contenu et du ton des réponses du Secrétariat du Conseil du Trésor aux recommandations du vérificateur général. Dans certains cas, le Secrétariat était d’accord avec ces recommandations, mais n’a fourni que peu de détails sur les correctifs qu’il prendrait. À d’autres reprises, les recommandations ont été carrément rejetées. D'ailleurs, le Secrétariat a indiqué que, à son avis, le chapitre contenant les résultats de la vérification présentait une « vision négative et non appropriée d’un programme dont les résultats ont été couronnés de succès ».

Le Comité estime que le Secrétariat ne comprend pas les enjeux et passe à côté d’occasions d’apporter des améliorations utiles à la Phase III du Programme. Le Comité, s’attendant à une étude plus rigoureuse de ses recommandations et à une réponse à ces dernières, recommande :

 

RECOMMANDATION 11:

Que le Secrétariat du Conseil du Trésor revoie soigneusement les observations et recommandations contenues dans le chapitre 17 du Rapport de septembre 1999 du vérificateur général du Canada et remette, au plus tard le 30 septembre 2000, un plan d’action détaillé dans lequel seront indiquées les mesures qu’il prendra pour donner suite aux recommandations du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes.

 

CONCLUSION:

Dans moins d’un an, le gouvernement fédéral et les provinces et territoires du Canada lanceront la troisième phase du programme Travaux d’infrastructure. Comme l’a relevé le vérificateur général du Canada et des témoins entendus par le Comité, les premières phases du Programme ont présenté certains points forts et produit divers bienfaits. Mais elles présentent aussi un certain nombre de lacunes que les deux vérifications ont mis en lumière.

Ces lacunes ne font pas de ce programme un échec. Mais, de l’avis du Comité, si les concepteurs de la prochaine phase ne tirent pas les enseignements nécessaires des failles décelées, le succès futur du Programme sera menacé. Compte tenu du temps qu’il reste avant la mise en place de cette phase, ils ont largement le temps d’effectuer les changements demandés par le Comité et le vérificateur général du Canada.

Pour conclure, le Comité a pris bonne note du travail effectué par le vérificateur général du Canada conjointement avec certains de ses homologues provinciaux. Le Comité avait recommandé cette forme d’entente de collaboration et est ravi de voir que ses suggestions ont été suivies.

 

Conformément à l’article 109 du Règlement, le Comité demande que le gouvernement dépose une réponse globale au présent rapport.

Un exemplaire des procès-verbaux pertinents (réunions nos 14, 18 et 28) est déposé.

 

Respectueusement soumis,

Le président,

 

JOHN WILLIAMS, député