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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 11 juin 1998

• 0908

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier (Brampton Ouest—Mississauga, Lib.)): La séance est ouverte. Ce matin, nous entendrons M. Roy Culpeper qui représente l'Institut Nord-Sud. C'est toujours agréable de reconnaître un témoin que je devrais d'ailleurs probablement connaître encore plus.

Je crois qu'on vous a dit tout à l'heure que nous avions quelques motions et quelques détails techniques à régler, mais nous avons changé notre ordre du jour et c'est vous maintenant qui passez en premier. Notre réunion concerne votre Rapport canadien sur le développement. Je crois que nous pouvons commencer si vous êtes prêt.

M. Roy Culpeper (président, Institut Nord-Sud): Madame la présidente, je vous remercie infiniment. Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous remercie de m'avoir invité pour vous présenter notre Rapport canadien sur le développement que vous aurez, je l'espère, l'occasion de lire si vous ne l'avez déjà fait.

• 0910

Le Rapport canadien sur le développement, ou RCD 1998, est la deuxième d'une série de publications de prestige de l'Institut Nord-Sud. Nous utilisons ces RCD pour examiner sous différents angles les problèmes qui marquent le développement à la fin de ce siècle. L'édition de cette année examine le rôle et l'incidence du secteur privé canadien sur les pays en voie de développement. Nous sommes déjà en train de planifier notre édition suivante, le RCD 1999, dont le thème sera le rôle et l'incidence des ONG canadiennes dans la société civile. Pour notre édition du millénaire, le RCD 2000, nous examinerons le renouvellement des orientations nationales de développement, non pas simplement dans la perspective du programme d'aide mais aussi dans celle des politiques d'investissement, d'immigration et d'échanges commerciaux et chaque RCD contient une série exhaustive de statistiques décrivant les relations du Canada avec le monde en voie de développement. En passant, cette année, nous avons également publié une version CD-ROM du rapport qui contient non seulement le rapport de cette année mais également celui de l'année dernière. Ce devrait donc être une bonne ressource pour les étudiants et pour ceux qui s'intéressent aux affaires internationales.

L'objectif de l'institut, tant dans cette série de RCD que dans son programme de recherche en général, est de favoriser l'adoption de lignes de conduite visant le monde en voie de développement qui soient cohérentes et épanouissantes et qui favorisent aussi la création d'un monde pacifique, équitable et ne mettant pas en danger l'environnement. Nous prévoyons qu'au XIXe siècle la présence du secteur privé et de la société civile dans d'autres pays, sera égale ou supérieure à celle des gouvernements. En conséquence, en tant qu'organisme canadien, nous estimons que les Canadiens devraient s'assurer que le gouvernement, le secteur privé et la société civile unissent leurs efforts dans des entreprises à l'étranger pour réaliser des objectifs communs sur la base de valeurs qui nous sont communes.

[Français]

Le rapport de cette année porte sur les sociétés canadiennes et la responsabilité sociale. C'est la question principale pour le secteur privé au XXIe siècle, c'est-à-dire la question de l'éthique et du comportement des entreprises envers la société et l'environnement dans le contexte de la mondialisation.

Pour l'institut, la publication du RCD 1998 est aussi le lancement d'un programme de recherche sur la responsabilité des sociétés dans le cadre duquel nous espérons collaborer avec un nombre grandissant de gens d'affaires et d'entreprises qui reconnaissent l'importance cruciale de ces questions.

[Traduction]

Nous sommes tout particulièrement heureux, madame la présidente, d'avoir été soutenus dans la préparation du RCD de cette année par les dons d'un certain nombre de sociétés, venant s'ajouter à la participation des ministères et des administrations fédérales, des fondations privées et des syndicats—un éventail large de soutien financier.

Qu'y a-t-il de nouveau dans le RCD 1998? Pour commencer, nous examinons les questions relatives à l'éthique d'entreprise, la déontologie et la responsabilité environnementale. Ces sujets ne sont pas exactement nouveaux mais ils sont arrivés à maturité et il semble bien qu'ils occuperont le paysage pendant un certain temps. Dans le RCD 1998, nous nous efforçons d'aller au-delà des histoires d'épouvante sur les calamités environnementales et sur l'exploitation des enfants, des réalités qui ont rendu d'autant plus urgente la moralisation des sociétés commerciales tout particulièrement dans les pays en voie de développement où les normes sont souvent inférieures et très mal respectées. Bien que nous fassions allusion à ces pratiques dans notre rapport, nous n'en faisons pas le thème principal. Nous nous sommes plutôt efforcés, de manière délibérée, d'enquêter sur les entreprises canadiennes pour faire ressortir les bonnes pratiques. C'est pour une raison particulière. Les psychologues savent depuis longtemps que le renforcement positif est beaucoup plus efficace que la simple condamnation d'un comportement indésirable ou mauvais, et c'est en fait l'approche que nous adoptons dans le RCD 1998.

Permettez-moi de vous citer brièvement quelques exemples de bonnes pratiques mentionnées dans ce rapport. Ce rapport est constitué d'une série de chapitres sectoriels décrivant les pratiques de firmes canadiennes dans divers pays en voie de développement.

Dans le secteur des services de génie conseil, par exemple, nous citons l'exemple d'Acres International, choisie pour son projet d'aménagement hydroélectrique au Népal. Ce projet était intéressant parce que la compagnie voulait y faire participer les responsables locaux, participation qui s'est concrétisée au niveau de la planification et de la conception de ce projet hydroélectrique de moyenne envergure au Népal.

• 0915

Dans le secteur minier, nous mentionnons la compagnie Alcan qui s'est servie d'une partie de ses terres en Jamaïque, terres qu'elle utilise pour la production de bauxite, pour aider l'agriculture locale. INCO, par exemple, recrute une bonne partie de ses gestionnaires pour sa mine indonésienne sur place. Noranda est citée pour ses pratiques novatrices de respect de l'environnement.

Dans le secteur des télécommunications, Nortel est citée pour avoir mis au point un procédé novateur de nettoyage de semi-conducteurs sans CFC. Il est tout particulièrement intéressant de noter que cette compagnie a offert gratuitement cette technologie à d'autres compagnies, surtout celles des pays en voie de développement.

Dans le secteur banquier et financier, nous mentionnons l'Opération micro-crédit de la Banque de la Nouvelle-Écosse en Guyane qui a permis de financer quelques 3 000 tout petits prêts. On a beaucoup parlé de cette initiative à cause de son caractère tellement exceptionnel. Ce n'est pas le genre d'activités habituelles des grandes banques.

Dans le secteur financier, nous avons constaté que la majorité des innovations, surtout dans les pays en voie de développement du point de vue de la responsabilité sociale des entreprises, concernant les intervenants relativement mineurs comme Ethical Funds Incorporated, la Social Investment Organization et le Calmeadow Institute qui fait aussi la promotion du micro-crédit.

Dans le secteur manufacturier, il y a plusieurs exemples comme l'initiative de développement rural de la filiale thaïlandaise des Chaussures Bata qui a créé des centres d'emploi à l'extérieur de Bangkok dont ont tout particulièrement profité les femmes des régions rurales qui n'ont plus besoin d'aller à Bangkok pour trouver du travail. Enfin, Dominion Textile est citée pour ses vérifications exhaustives pour garantir à ses sous-traitants des normes de santé et de sécurité environnementale supérieures.

[Français]

En conclusion, nous n'avons pas encore entrepris de recherches comparatives qui nous permettraient de comparer le niveau de responsabilités des sociétés canadiennes avec celui de leurs concurrents étrangers. Cependant, il nous semble que les sociétés canadiennes sont souvent parmi les plus progressives.

[Traduction]

Pour conclure, madame la présidente, j'aimerais dire que l'agenda de la responsabilité sociale des entreprises contient des défis majeurs. Peut-être prioritaire parmi ceux-ci est de faire autre chose que des déclarations et d'un code de déontologie que de simples propos lénifiants et de les appliquer concrètement. L'institut y veillera ainsi que sur d'autres questions connexes au cours des prochains mois.

Je m'en tiendrai là pour le moment car nous avons distribué une masse d'information assez importante sur ce rapport. J'attends donc vos questions.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Je crois que pour beaucoup d'entre nous écouter ce que se propose de faire, ou fait, l'Institut Nord-Sud, est passionnant.

Monsieur Mills.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Soyez le bienvenu à notre comité, monsieur Culpeper. Je sais que vous êtes déjà venu ici très souvent.

Je fais quelque chose qui va un peu dans le même sens quand je discute avec les représentants de compagnies, surtout dans le domaine pétrolier en Alberta. Bien entendu, depuis 50 ans ces compagnies ont parcouru dans le cadre de leurs activités presque toute la planète. Nombre d'entre elles aimeraient énormément participer au développement des infrastructures des régions dans lesquelles elles se trouvent.

Elles me disent combien elles aimeraient participer aux projets agricoles, à la construction d'hôpitaux, d'écoles, littéralement à toute infrastructure. Leur motivation est simple: la sécurité et une main-d'oeuvre formée et heureuse. Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles ces compagnies sont tout à fait favorables à ce concept global. Ce qu'elles aimeraient, en réalité, je suppose, c'est un crédit d'impôt ou quelque chose pour les encourager.

• 0920

Il me semble possible qu'un jour l'ACDI et les subventions gouvernementales finissent par être remplacés par une participation plus directe des entreprises. Pensez-vous que les compagnies canadiennes soient partie prenante? Cela s'inscrit dans le genre de scénarios que vous venez de décrire. C'est ce que me disent les types à qui je parle, les petits PDG. Est-ce que les plus grosses compagnies seraient aussi partie prenante?

M. Roy Culpeper: En fait, nous pensons que les grosses compagnies sont beaucoup plus partie prenante parce qu'elles ont une plus grande marge de manoeuvre financière. Ce sont les petites compagnies qui sont plus soumises aux pressions de la concurrence, qui sont beaucoup plus conservatrices sur le plan financier et qui ont souvent une latitude beaucoup plus limitée pour se lancer dans ce genre d'initiatives.

Il est difficile de déterminer les motifs. Je crois que vous avez raison d'affirmer que leur motivation réside en particulier dans cette main-d'oeuvre plus heureuse, plus stable et plus productive. Quand on ne traite pas correctement l'environnement, l'environnement se venge tôt ou tard mais cela ne se transforme pas forcément en dividendes à court ou à moyen terme. Je ne crois pas que cela soit le problème pour les compagnies, tout particulièrement celles qui se trouvent dans les secteurs beaucoup plus concurrentiels.

Pour ce qui est de l'ACDI et du rôle des agences gouvernementales, je caractériserais les relations comme étant de complémentarité plutôt que de substitution. En d'autres termes, il y a un certain nombre de choses que le secteur privé peut faire et dans lesquelles il excelle et il y en a d'autres qu'il ne peut pas faire.

Par exemple, construire des écoles, etc., n'est pas vraiment une activité traditionnelle des entreprises du secteur privé. Il peut arriver qu'elles le fassent simplement pour les raisons que vous avez suggérées, à savoir que cela peut leur garantir une main-d'oeuvre plus stable et plus heureuse et que cela peut aussi prévenir divers problèmes sociaux comme par exemple le chômage et la prostitution. Souvent c'est ce qui arrive en particulier dans les sites isolés.

Mais en fin de compte, il faut se demander si la responsabilité de construire des écoles et des installations sanitaires ne relève pas vraiment du gouvernement local. Les donateurs peuvent jouer un rôle en aidant les gouvernements à établir et à maintenir des installations de santé et d'éducation durables. J'estime que c'est un rôle tout à fait légitime du programme d'aide car il s'agit d'investissements sociaux, d'investissements humains dont le rendement est à très long terme et qui, généralement parlant, relèvent plus naturellement du secteur public.

J'aurais tendance à qualifier cette relation de complémentaire. Je ne vois pas les compagnies venir remplacer l'aide mais plutôt épauler les programmes d'aide et les activités des donateurs.

M. Bob Mills: On pourrait, bien sûr, accroître le niveau d'aide. L'argent ne viendra probablement pas du budget général. Nous connaissons les problèmes, ce que nous aimerions, et la réalité. Nous ne sommes même pas à la moitié de ce que nous aimerions, soit dit en passant. Il me semble que ce pourrait être le moyen de faire monter ce niveau sans avoir à se battre avec le ministère des Finances.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, beaucoup de ces types à qui j'ai parlé forent un puits artésien ce qui change toute l'attitude de la communauté envers eux. Je connais une compagnie qui est venue avec des semences. C'est un peu à la fortune du pot. Ce n'est pas du tout planifié. Il me semble que s'il y avait au moins un agronome dans le tas, cela semblerait beaucoup plus sérieux. Ce qui reste important, c'est que cela dégagerait des fonds supplémentaires pour aider ces gens à s'aider eux-mêmes, si c'est vraiment ce que nous voulons.

• 0925

M. Roy Culpeper: Oui. Je crois qu'il y a plusieurs manières d'opérer.

L'ACDI est avant tout utilisée comme un fonds qui permet d'identifier les créneaux pour les investisseurs du secteur privé dans les pays en voie de développement, et dans notre rapport, nous critiquons assez vertement les résultats de l'ACDI.

Peut-être qu'une meilleure manière de travailler avec le secteur privé serait celle, entre autres, que vous suggérez, en d'autres termes, ne pas se lancer dans des sortes d'expéditions à l'aveuglette qui ne mènent nulle part, mais plutôt travailler de concert avec des compagnies qui sont déjà sur le terrain et compléter leurs activités en investissant dans les infrastructures sociales ou physiques, où l'impact sur le développement des communautés et de la population concernée est évident.

M. Bob Mills: Comme je l'ai déjà dit, les domaines comme celui de l'agriculture sont des plus intéressants.

Certaines modifications génétiques... Mes collègues ont tous entendu mon exemple du canola, mais, pour ma part, je peux augmenter ma production de canola sur une superficie donnée de 40 p. 100 à 60 p. 100 simplement grâce au génie génétique. Mais je doute fort que les pays du tiers monde puissent obtenir ce genre de semences. Toutefois, ces entreprises pourraient leur fournir ce genre de semences, car une augmentation de la production de 40 p. 100 à 60 p. 100 ferait toute une différence.

Je voulais simplement ajouter cela. Merci.

[Français]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Monsieur Sauvageau.

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Bonjour, monsieur Culpeper, et merci beaucoup de votre présence ce matin et de vos explications sur le sujet, particulièrement en ce qui a trait au code de conduite ou code d'éthique. C'est là-dessus que je voudrais orienter mon intervention de ce matin.

J'ai lu avec beaucoup d'attention et d'intérêt le Rapport canadien sur le développement 1998, que vous nous avez fait parvenir. Je voudrais, dans un premier temps, faire un commentaire. Les questions vont venir par la suite.

Vous avez peut-être entendu dire que le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international avait l'intention—je dis bien avait l'intention—d'étudier la possibilité d'établir un code d'éthique des valeurs canadiennes pour les organismes relevant du gouvernement canadien. Malheureusement, les partis d'opposition n'étant pas majoritaires à ce comité, ce projet somme toute intéressant a été renvoyé aux calendes grecques. J'aimerais donc savoir si, à votre avis, le comité aurait dû ou devrait à l'avenir étudier ce genre de code de conduite pour le gouvernement canadien là où il a une responsabilité d'intervention.

Si jamais on pouvait réaliser ce genre d'étude, pensez-vous que les principes d'affaires de la table ronde en Suisse, en 1994, qui constituent le premier code d'éthique international né de la collaboration entre les chefs d'entreprises d'Europe, du Japon et des États-Unis, pourraient être d'une certaine utilité au gouvernement canadien?

J'aimerais que vous nous parliez du code de conduite qui a été signé par 13 compagnies canadiennes en septembre dernier, puisque vous avez dit que ces entreprises étaient un peu les chefs de file ou les leaders des entreprises canadiennes.

Je vais maintenant parler des conclusions et des recommandations que vous adressez au gouvernement canadien. Je pense que c'est le bon endroit pour en parler. Malheureusement, je n'aurai pas le temps de les citer toutes, mais elles sont toutes très bonnes.

Je veux relever deux recommandations en particulier. J'aimerais que vous nous expliquiez davantage ce que vous visez par cela. Vous dites, à la deuxième recommandation que vous adressez au gouvernement, que le gouvernement du Canada ne devrait pas appuyer financièrement des activités commerciales dans les pays dont les politiques ne s'accordent pas avec les valeurs fondamentales du Canada. D'abord, a-t-on un code qui identifie clairement les valeurs fondamentales du Canada ou si c'est aléatoire?

Quant à la deuxième recommandation, qui est selon moi la plus importante et la plus intéressante, vous dites que les valeurs du Canada, surtout celles concernant le respect des droits de la personne et la responsabilité à l'égard de l'environnement, doivent être intégrées aux programmes appuyant les activités commerciales des sociétés canadiennes et administrés par l'ACDI, la Société pour l'expansion des exportations ou d'autres organismes et programmes des gouvernements fédéral et provinciaux.

• 0930

Le président de la Société pour l'expansion des exportations nous a bel et bien dit que sa seule responsabilité était de se faire rembourser, qu'il n'y avait aucune espèce de valeur qui était transmise par les prêts dispensés par la Société pour l'expansion des exportations et les autres entreprises. Quelle est la responsabilité du gouvernement canadien à cet égard?

M. Roy Culpeper: Merci, monsieur Sauvageau. C'est une question très lourde.

Premièrement, toutes vos questions portent sur le code d'éthique et la responsabilité du gouvernement canadien. Dans le rapport, nous disons que le gouvernement canadien pourrait en faire beaucoup plus que maintenant. Premièrement, il n'y a pas d'uniformité dans les politiques du gouvernement canadien. Comme vous le dites, la Société pour l'expansion des exportations n'a aucune politique à cet égard. Nous n'acceptons pas que cette société ne fasse pas la promotion des valeurs canadiennes.

Le cas le plus actuel est celui du réacteur CANDU vendu à la Chine. Je suis d'avis que le gouvernement et la Société pour l'expansion des exportations doivent insister pour que, dans ce cas, il y ait un processus visant à assurer le maintien des normes environnementales. Mais, comme vous le savez, le gouvernement a laissé tomber le processus normal dans ce cas.

Je crois que c'est un problème un peu difficile parce qu'il faut tout d'abord établir les niveaux, les normes. Peut-être cela devrait-il encourager ce comité et le ministère des Affaires étrangères à étudier les conditions afin d'établir des niveaux acceptables pour le Canada et les sociétés canadiennes. Ce n'est pas un défi simple, pas du tout. Par exemple, dans beaucoup de pays, les droits de la personne ne sont pas respectés. Dans certains cas, c'est pire que dans d'autres.

Donc, le ministère des Affaires étrangères pourrait faire beaucoup plus. Premièrement, il est possible d'observer les conditions et d'en informer les sociétés canadiennes avant qu'elles n'investissent dans ces pays-là.

• 0935

Quant au code d'éthique des 13 sociétés dont nous avons parlé dans le rapport, nous disons que c'est un premier pas important, mais ce n'est pas beaucoup. En effet, le code ne comporte pas de mécanisme pour s'assurer que les sociétés qui ont signé l'accord maintiennent les niveaux. C'est pour cette raison que nous disons dans notre rapport qu'il doit y avoir des mécanismes pour assurer les niveaux—en anglais, c'est accountability—sans lesquels les codes d'éthique sont seulement des mots ou des principes. Ce sont peut-être des principes très nobles, mais ce n'est pas beaucoup.

Donc, en conclusion, je crois que le gouvernement canadien et les sociétés canadiennes privées pourraient faire beaucoup plus que maintenant, et même les sociétés d'État comme la SEE et l'ACDI.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Monsieur Robinson.

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Merci, madame la présidente. Je veux aussi souhaiter la bienvenue à M. Culpeper et le remercier de son mémoire.

[Français]

J'allais poser exactement les mêmes questions que M. Sauvageau sur les recommandations adressées au gouvernement et j'apprécie les réponses qu'a données M. Culpeper. Il me reste des questions sur deux autres sujets.

[Traduction]

Ma première question porte sur vos remarques sur le concept d'Équipe Canada, les missions d'Équipe Canada et le rôle du Canada dans la promotion du commerce. Dans votre rapport, vous êtes plutôt critique des conséquences des missions d'Équipe Canada. Vous dites que, depuis qu'Équipe Canada mène ses missions à l'étranger, on minimise l'importance de la sécurité environnementale, les droits de la personne et de la démocratie. Selon une de vos principales conclusions, le gouvernement canadien a privilégié la promotion du commerce au détriment des droits de la personne et des questions environnementales.

Ce sont des accusations graves que vous portez contre les missions d'Équipe Canada. Vous ne serez pas étonné d'apprendre que je suis moi-même arrivé aux mêmes conclusions. Certaines ONG ont fait les mêmes observations. Peut-être pourriez-vous nous en dire plus long et nous donner des exemples de la façon dont le gouvernement canadien a privilégié la promotion du commerce au détriment des droits de la personne et des questions environnementales.

M. Roy Culpeper: Merci. Vous avez vraisemblablement remarqué que les médias ont remarqué ces observations aussi. Ce n'est pas là la principale conclusion de notre rapport, mais c'est une conclusion tout à fait conforme à ce que nous disons. Outre les ONG, toute une gamme d'observateurs a fait écho à cette critique, y compris Sylvia Ostry et le magazine The Economist.

Il y a environ un an, The Economist a déclaré qu'il est peu probable que les missions commerciales—il parlait des missions commerciales en général et pas seulement de celles du Canada—donnent de grands résultats, qu'elles présentent certains avantages mais qu'elles comportent aussi des coûts. Or, souvent ces avantages sont des ententes qui avaient été conclues avant la mission et qui sont entérinées officiellement lors d'une cérémonie de signature qui se tient pendant la mission.

Pour ce qui est des perspectives commerciales, nous n'avons pas recueilli de preuves qui nous indiquent que les missions ont permis de créer de nombreuses nouvelles possibilités d'investissements et de commerce.

• 0940

Il faut aussi tenir compte des coûts, qui ne sont pas financiers. Bon nombre des critiques d'Équipe Canada ont mis l'accent sur le fait que ces missions comportent des coûts. Mais à la décharge du gouvernement, les coûts sont recouvrés en ce sens que les entreprises qui participent à ces missions doivent assumer leurs propres frais. Mais ces coûts ne sont pas les plus importants. Les coûts les plus importants sont les coûts que cela entraîne sur le plan politique.

Il est très difficile pour une délégation en visite à l'étranger, particulièrement une délégation de haut niveau, de mettre ses hôtes dans l'embarras. Ce n'est pas très poli, surtout s'il est clair que le principal objectif de la mission est d'assister à des cérémonies de signature et la conclusion d'ententes qui ont fait l'objet de longues négociations. Il est fort peu probable qu'on veuille mettre en danger la réalisation de ces objectifs.

C'est d'ailleurs précisément ce qu'a dit The Economist dans un éditorial paru il y a environ un an. Ce sont des coûts cachés. Les délégations en visite à l'étranger qui veulent mener ces missions à bien, prennent pour acquis qu'il ne leur faut pas soulever de sujets susceptibles de causer un embarras politique, qu'elles doivent pas aborder de sujets tels que les droits de la personne, la démocratisation et les autres sujets politiquement délicats, car elles risqueraient de ne pas se faire réinviter et devraient payer des coûts politiques considérables.

Ce n'est pas une théorie très profonde, mais, essentiellement, nous estimons que si la promotion commerciale peut se faire sans les missions d'Équipe Canada et si nous avions alors toute la marge de manoeuvre politique pour faire la promotion des droits de la personne et du développement démocratique, il serait préférable de le faire ainsi.

M. Svend Robinson: Pourriez-vous nous donner des exemples où le fait de privilégier la promotion du commerce se fait au détriment de la promotion des droits de la personne et de la protection de l'environnement? Vous avez parlé de la vente de réacteurs CANDU à la Chine. Je présume que vous incluriez aussi ce qui s'est fait en Indonésie et le fait d'avoir passé sous silence certaines violations des droits de la personne commises par l'Indonésie, n'est-ce pas?

M. Roy Culpeper: Certainement. On a largement diffusé une photo montrant le premier ministre donnant l'accolade à M. Suharto; M. Suharto n'est plus là—il n'a pas été un personnage très édifiant. On est en droit de se demander quel avantage présente ce genre de spectacle.

Il y a un encadré intéressant dans le rapport intitulé «One Country, Two Views» sur la Colombie. C'est à la page 126 de la version anglaise. Nous nous assurerons que tous les membres du comité ont un exemplaire du rapport. Tout ce que vous avez pour l'instant, c'est l'aperçu qui...

M. Svend Robinson: C'est le rapport dans son intégralité que nous n'avons pas.

M. Roy Culpeper: Notre bureau en fera parvenir un exemplaire à tous les membres du comité.

Dans cet encadré, on compare le rapport sur la Colombie préparé par le comité inter-Églises sur les droits humains en Amérique latine—qui décrit la situation des droits de la personne, l'état d'urgence et les nombreux assassinats et disparitions—avec le rapport, sur le même pays, qu'a rédigé le MAECI et qui souligne que l'économie de la Colombie est l'une des plus stables et dynamiques en Amérique latine. C'est à se demander si l'on parle du même pays.

M. Svend Robinson: J'ai des questions dans un autre ordre d'idées, monsieur le président.

• 0945

L'histoire comporte un autre bon exemple de cette attitude, à savoir dont le Canada a déroulé le tapis rouge pour Nicolae Ceausescu, avant même que nous lui vendions un réacteur CANDU. Nous tenions beaucoup à lui vendre un réacteur. Ceausescu est venu au Canada. Il y a eu un dîner officiel en son honneur dont le gouverneur général était l'hôte. Il a reçu des diplômes honoraires et a été reconnu comme étant un grand parangon de la démocratie.

Bien sûr, monsieur le président, on reconnaît maintenant qu'il était un dictateur extrêmement brutal. Je ne me rappelle plus quel parti était au pouvoir à l'époque. Je crois que c'était l'époque du gouvernement Trudeau.

Je n'ai qu'une autre question à poser, monsieur le président. Elle porte sur cette question de la responsabilité des intervenants. Dans votre rapport, vous parlez du secteur des services financiers. Vous faites mention d'une organisation d'investissement sociale qui a suggéré que les banques canadiennes deviennent des chefs de file dans la responsabilité sociale des grandes sociétés canadiennes.

J'aimerais avoir vos remarques—c'est ma dernière question, monsieur le président, sur l'un des groupes d'intervenants que vous avez recensés, à savoir les employés des sociétés. C'est un fait que les conseils d'administration des grandes banques canadiennes en particulier, mais aussi des sociétés canadiennes en général sont majoritairement sinon exclusivement composés d'hommes blancs. Si vous examinez la liste des nominations qui paraît dans le Globe and Mail, vous constatez la même chose. Il y a très peu de femmes et certainement très peu de personnes de couleur.

Dans l'évaluation et l'établissement des repères de ce domaine de la responsabilité des sociétés, vous ne parlez pas de l'équité en matière d'emploi, ni des pratiques de recrutement, ni des conditions d'emploi. Comment ces sociétés traitent-elles leurs employés handicapés? Leur milieu de travail est-il accessible aux handicapés? Comment traitent-elles les homosexuels et les lesbiennes qui sont leurs employés? Accordent-elles des avantages sociaux aux couples?

Je voudrais savoir si vous n'envisageriez pas, à l'avenir, de tenir compte de cet aspect lorsque vous examinez la question de la responsabilité sociale des sociétés et de commenter les pratiques d'emploi de ces entreprises, puisqu'elles ont une incidence directe sur l'un des groupes d'intervenants.

M. Roy Culpeper: Vous nous donnez là un exemple très intéressant. Essentiellement, nous faisons ici rapport de l'évaluation faite par les fonds d'investissements responsables et l'Organisation de l'investissement social.

Ils concluent que l'on peut accorder une note élevée aux banques... Soit dit en passant, c'est parce qu'on a accordé une note élevée aux banques que les fonds d'investissements responsables les ont inclues dans leurs portefeuilles. Étant donné que les banques ont si bien réussi, les fonds d'investissements responsables qui comptent de grandes banques ont aussi bien réussi. C'est une relation intéressante.

Le problème, c'est l'établissement d'une liste des sociétés qui ont une présence sociale. À l'heure actuelle, le mouvement de l'investissement social procède par ce qu'on appelle un triage négatif. On élimine d'abord les entreprises qui produisent ou vendent des biens nuisibles ou dangereux, tels que de l'équipement militaire, des produits du tabac, des drogues dangereuses, des pesticides, ce genre de choses. Ce genre de tri ne permet habituellement pas d'éliminer les banques.

Il manque au mouvement de l'investissement social une méthode de tri positive. Dans une méthode de tri positive, on pourrait inclure le genre de critères que vous avez mentionnés. Ainsi, les employés des banques ne sont pas syndiqués. Les banques ont toujours résisté à la syndicalisation. On pourrait aussi tenir compte d'autres facteurs tels que l'égalité des sexes et l'équité en matière d'emploi.

Je pense que le mouvement de l'investissement social est arrivé à ce point. Mais établir des critères positifs pose un plus grand défi. On se trouve donc à éliminer certaines des meilleures entreprises. Puis, il sera de plus en plus ardu d'évaluer chacune des entreprises. Je ne veux pas ainsi excuser le fait qu'on ne l'a pas fait, mais simplement vous en donner les raisons.

M. Svend Robinson: Est-ce que l'Institut Nord-Sud envisage d'ouvrir la voie en matière d'évaluations de ce genre?

M. Roy Culpeper: Comme je l'ai dit, c'est une tâche onéreuse qui présente un défi considérable. Pour la production de ces rapports, nous avons travaillé en étroite collaboration avec l'Organisation de l'investissement social et Michael Jantzi Research Associates, les experts conseils qui ont fait le travail sur le terrain. J'imagine qu'à l'avenir, nous allons collaborer encore plus étroitement avec eux et les encourager à adopter cette orientation. C'est certainement l'orientation que nous voulons adopter.

• 0950

M. Svend Robinson: Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Culpeper.

Madame Folco.

[Français]

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Bonjour, monsieur Culpeper. J'ai été très intéressée par une des recommandations et des sous-recommandations que vous avez faites dans votre rapport. Malheureusement, je n'ai eu que le résumé, mais les recommandations sont quand même là. Vous parlez de l'adoption de codes de conduite internationaux par les sociétés afin d'améliorer le bien-être de leurs employés, de leurs clients et des communautés où elles mènent leurs activités.

Il se trouve que très récemment, ce comité a reçu un certain nombre de personnes parmi lesquelles se trouvait un représentant d'une société canadienne qui oeuvrait dans un pays du Sud, qui nous a déclaré très clairement que là-bas, la société faisait tout pour améliorer le sort de ses employés et les traiter d'une manière tout à fait équitable. Cependant, dans ce pays, à l'extérieur du petit territoire où se trouvaient ces employés, il régnait et règne encore ce qu'on pourrait très certainement appeler une guerre civile, à toutes fins pratiques.

Nous avons parlé avec lui et il nous a dit très clairement: «Écoutez, si nous intervenions dans l'ensemble de cet État, les autorités étatiques trouveraient notre intervention très malvenue, et si le gouvernement canadien intervenait, on pourrait très bien se voir fermer la porte. À ce moment-là, d'autres sociétés internationales non canadiennes seraient prêtes à prendre notre place.» Donc, toujours selon cette personne, il y a une question d'équilibre entre ce que pourrait faire la société là-bas et les notions d'équité, de responsabilité, etc.

Dans les chiffres que vous nous avez remis, on indique que BCE, par exemple, est au 162e rang de Fortune 500 et que la Banque Royale du Canada, la plus grosse banque, est au 50e rang mondial. Donc, je me dis qu'en équilibrant ces deux éléments, nous sommes un très petit joueur sur la scène internationale. Nous avons quand même des responsabilités, mais nous ne voulons pas non plus nous retirer entièrement de la scène. Je me demande si vous pourriez élaborer sur la façon d'apporter un équilibre entre ces deux notions, puisque c'est une notion qui intéresse et préoccupe non seulement mes collègues de l'autre côté de la Chambre, mais nous-mêmes au gouvernement.

Nous ne voulons pas nous retirer, mais nous savons que nous avons des responsabilités en ce qui a trait aux droits de la personne à l'extérieur du Canada. Il s'agit de trouver quelque part ici un équilibre flou et mouvant, si vous voulez, mais un équilibre quand même. Pourriez-vous réagir à ce que je viens de dire, s'il vous plaît?

M. Roy Culpeper: Merci. Votre première question est un peu comme celle de M. Sauvageau, c'est-à-dire d'arriver à un critère ou à des critères pour juger des pays différents. S'il y a des pays qui se trouvent dans une guerre civile, il est très difficile d'y promouvoir les droits de la personne ou des niveaux démocratiques. Cependant, je n'accepte pas l'argument voulant que si nous ne faisons pas d'investissements dans ces pays, nos concurrents vont arriver avec leurs propres investissements et nous faire manquer les marchés de ces pays.

• 0955

Finalement, c'est une question d'éthique et c'est important. Si, comme Canadiens ayant des valeurs humaines, nous estimons qu'il est important de promouvoir la paix et les droits de la personne, il est très important que les sociétés privées et le gouvernement discutent des conditions dans les différents pays et que le gouvernement décourage les sociétés canadiennes d'investir dans les pays qui manquent de stabilité politique et où il n'est pas possible de respecter les droits de la personne.

[Traduction]

Peut-être que certaines entreprises perdraient alors des occasions qui rapportent, mais il me semble que c'est plutôt une question de normes, et de ce qu'on est prêt à payer et de ce qu'on s'attend à recevoir en retour.

Mme Raymonde Folco: Mais dans mon exemple particulier, le problème, c'est que si le Canada s'était retiré ou avait forcé cette entreprise à se retirer, celles qui auraient pris sa place seraient venues de pays qui respectent encore moins les droits de la personne. On nous remplacerait par des entreprises qui n'ont pas le moindre respect pour les droits de leurs employés dans ce pays.

Je ne veux pas dire que nous ne devrions jamais nous retirer; seulement, il faut tenter de trouver le juste milieu entre nos responsabilités... Parfois, le simple fait d'être là, de donner l'exemple et de traiter ses employés d'une certaine façon, est bénéfique. Du moins, on aide certaines personnes, même si cette aide ne s'étend pas au reste du pays.

Je ne sais pas. Je vous pose une question très concrète, car c'est un problème très concret.

Si vous vous retirez, la compagnie qui prendra votre place se préoccupera encore moins de faire respecter les droits de la personne dans ce pays. Lorsque le Canada se retire, il ne fait pas qu'agiter un drapeau en disant: «Nous partons, car nous, nous respectons les droits de la personne»; il permet aussi à des entreprises d'ailleurs de prendre sa place et d'aggraver la situation.

M. Roy Culpeper: L'argument selon lequel les normes des autres sont encore pires que les nôtres et que nous pouvons par conséquent faire fi des conditions qui prévalent, ne m'a jamais semblé très bon. Je peux conduire à une vitesse de 130 kilomètres heure parce qu'il y en a d'autres qui font 150 kilomètres heure, et ce sont eux les véritables délinquants. Cet argument ne m'apparaît pas très convaincant.

Ce qui est délicat, c'est de trouver des façons de créer la paix ou la stabilité ou d'améliorer les droits de la personne par le biais d'interventions ou d'investissements. Prenez l'exemple du Nigéria; le Nigéria a un besoin extrême d'investissements et de commerce. Il y a plusieurs façons pour les entreprises, même les entreprises responsables qui traitent bien leurs employés, d'aider le gouvernement, que ce soit en lui versant des impôts...

Pour en revenir à l'exemple du code d'éthique qu'a donné M. Sauvageau, on a récemment appris que Canadian Occidental était l'une des entreprises faisant de la prospection pétrolière au large du Nigéria; les représentants de cette entreprise ont précisément fait valoir: «Nous sommes une bonne entreprise; nous...»

• 1000

Mme Raymonde Folco: C'était une question. Je tiens à le souligner.

M. Roy Culpeper: Oui, mais les entreprises comme celle-là, en fait, investissent dans un pays où les revenus provenant du pétrole constituent le principal soutien du régime au pouvoir, alors...

Le président: Un instant. Le Nigéria est un exemple facile. Il serait utile à notre comité que vous nous fournissiez la liste officielle des positions de l'Institut Nord-Sud sur tous les pays du monde où les Canadiens, à votre avis, ne devraient pas investir, compte tenu du fait que nous voulons investir partout dans le monde pour accroître la productivité. Si vous nous remettiez la liste établie par l'Institut Nord-Sud de tous les pays où vous estimez que notre comité devrait recommander au gouvernement du Canada de ne pas permettre d'investissements canadiens—et je serais très étonné qu'il y ait d'autres pays que le Nigéria, la Birmanie et peut-être le Soudan—ce serait très intéressant. Cela nous serait utile parce que le reste ne l'est pas, à mon avis.

M. Svend J. Robinson: Monsieur le président, sauf le respect que je vous dois, je suis heureux que vous ayez dit «à mon avis», parce qu'il y a d'autres avis ici.

Le président: Oh, je sais. Je ne voulais pas...

J'aimerais bien voir cette liste, parce que nous entendons cela constamment, nous en discutons, mais lorsque viendra le temps de prendre une décision... D'autres témoins nous disent: «Sans investissements, sans une bonne productivité, il n'y aura pas de développement. Les femmes mourront de faim. Les enfants n'auront rien à manger. La paix dans le monde ne se fera pas». Alors, que pouvons-nous faire?

Il nous faut donc déterminer clairement quels pays... Dites-nous lesquels. Estimez-vous que nous ne devrions pas investir en Chine? Croyez-vous que nous ne devrions pas investir en Indonésie? Nous recommandez-vous de ne pas investir... Donnez-nous la lites, soyez honnête avec nous. Au moins, donnez-nous une liste.

M. Roy Culpeper: Ce serait une tâche assez délicate que de dresser cette liste.

Le président: En effet. Mais nous traitons ici de sujets délicats.

M. Roy Culpeper: Cela ne signifie pas que nous devions mettre la Chine sur la liste noire. Nous pouvons travailler avec des universitaires en Chine à la promotion de la lutte pour la démocratie. Nous pouvons faire certaines choses en Chine dans d'autres domaines sans qu'il soit nécessaire de leur fournir de la technologie nucléaire.

Le président: C'est vrai. Mais...

M. Roy Culpeper: Je ne crois donc pas qu'il serait utile de dresser une liste de pays où les investissements devraient être permis et de pays où les investissements devraient être interdits. Il nous faut une approche plus nuancée et des listes de pays où certaines activités nuiraient probablement à la lutte pour le respect des droits de la personne et la démocratie.

Le président: Est-ce que cela ne rejoint pas essentiellement ce que disait Mme Folco?

M. Roy Culpeper: Oui. Nous avons mentionné quelques pays comme ça, mais je pense que ce serait vous induire en erreur que de dresser une liste et de dire: «Arrêtez d'investir dans ces pays, un point c'est tout», sans penser au prochain niveau et dire: «Quel genre d'investissements encouragerait la démocratie ou nuirait à la démocratie et au respect des droits de la personne?»

Le président: C'est vrai, mais vous conviendrez avec moi que ce que nous devons faire alors, c'est essayer collectivement, comme société, de décider quels sont ces pays, et l'Institut Nord-Sud ne dispose pas de la sagesse absolue pour déterminer quels devraient être ces pays, pas plus que moi ou M. Robinson ou qui que ce soit d'autre. Chacun aura son opinion. Nous devons essayer de le faire, collectivement, en tant que société, mais nous ne pouvons pas, comme vous dites, établir une liste ferme.

Il se peut qu'il y ait des États parias. On peut dire, très bien, ceux-là sont faciles à choisir. Mais quand on entre dans des zones grises, ce que vous dites au comité, si je vous comprends bien, c'est que nous devons être conscients des effets de nos investissements. Encore là, il faut aussi reconnaître que nous vivons dans une société démocratique, et que vous n'avez pas pour fonction, et ce n'est pas ma fonction à moi non plus, de dire aux Canadiens ou aux gens d'affaires où ils peuvent aller ou ce qu'ils peuvent faire non plus. Je pense que vous serez d'accord avec ça aussi, n'est-ce pas?

M. Roy Culpeper: Eh bien, oui et non. Si, en tant que pays, nous pensons que les objectifs et les principes de notre politique étrangère qui incarnent certaines valeurs sont importants, nous devrions alors être disposés à les imposer, chose certaine aux Sociétés d'État qui encouragent l'investissement et qui fournissent des prêts et des garanties, mais aussi aux investisseurs privés. Écoutez, nous avons des règles régissant le secteur privé dans notre propre pays. Pourquoi n'aurions-nous pas des règles régissant le secteur privé de notre propre pays dans d'autres parties du monde?

Le président: D'accord. Pardon, mon interruption a été trop longue parce que...

M. Roy Culpeper: Donc vous êtes d'accord avec ça?

Le président: Oui, je suis d'accord avec ça, et je pense que votre idée des codes—je pense que nous travaillons tous avec l'idée des codes. Je pense que c'est excellent.

M. Roy Culpeper: Mais ce que nous disons dans le rapport... Nous n'en sommes qu'au début de ce dialogue. Nous avons aujourd'hui un gouvernement qui ne veut même pas pousser ce dialogue très loin, et nous l'encourageons à établir des critères et à dresser le genre de liste à laquelle précisément je faisais allusion.

Le président: D'accord. Excusez-moi de vous avoir interrompu. Nous allons passer à M. Mills et ensuite à M. Reed.

• 1005

M. Bob Mills: J'imagine que je vais rester dans le même ordre d'idées. Je me rends en Chine régulièrement depuis 1979. J'y étais plutôt avec M. Marchi et 85 PDG d'entreprises, et essentiellement, j'ai pu les aider à établir des tas de contacts. Le ministre n'y avait jamais été auparavant; j'y avais été plusieurs fois, et je sais que ces initiatives créent beaucoup d'emplois au Canada.

Autant que je sache, quand je traverse la frontière, je suis canadien et je suis prêt à me battre pour ce que représente le Canada, je ne fais pas de politique partisane.

Une voix: Ça, c'est pour les valeurs canadiennes comme les droits de la personne.

M. Bob Mills: Mais j'imagine que ce que je veux dire, c'est lorsque je suis sorti dans la rue à Shanghai, ou l'on avait rasé deux pâtés de maison, et lorsque j'ai parlé à des gens qui étaient là avec l'aide d'un interprète, j'ai dit: «Qu'est-ce que cela veut dire pour vous?» J'ai posé la question à quelques vieilles dames et à d'autres. Certains m'ont dit: «Notre famille a vécu ici pendant 2000 ans, c'était notre chez nous, mais il nous fallait faire trois pâtés de maison pour obtenir de l'eau, il n'y avait pas de courant, il n'y avait pas d'égout.» Vous imaginez la situation, vous avez été là, et vous savez qu'ils doivent transporter eux-mêmes leurs eaux usées pour le compost et tout cela. J'ai dit: «Qu'est-ce que vous pensez de ça? Vous êtes aujourd'hui des personnes déplacées.» Ils m'ont répondu ceci: «On va maintenant avoir l'électricité. On va avoir l'eau courante, dans notre propre logement.»

Les améliorations suscitées par la viabilité économique de ce pays, par les augmentations—et je pourrais citer le cas d'autres pays en exemple... parce que les choses s'améliorent, je crois que les gens ont fait beaucoup de progrès depuis... eh bien, dans le cas de la Chine, depuis 1979.

Vous devez constater les mêmes changements. Et avec ces changements, il y a amélioration. Maintenant, si on isole ces pays, je ne vois pas vraiment comment on va améliorer l'état des droits de la personne dans ces pays. C'est bien beau de dire: «Ah, c'est épouvantable; ce n'est pas comme chez nous», mais à nous aussi, il a fallu pas mal de temps pour parvenir au point où nous sommes.

S'il s'agit de gouverner 1 300 millions de gens, et en Inde c'est 1 milliard de gens—la situation n'est pas du tout la même. Écoutez, voyez toutes les difficultés que nous avons avec 30 millions d'habitants. Donc, avec des populations pareilles, quand on sait les infrastructures qu'elles nécessitent, on voit que les améliorations sont très nombreuses. Ces pays progressent, et je pense que c'est parce que nous sommes là, parce que nous les aidons. Si l'on ferme les yeux et que l'on érige une muraille autour de ces pays—mon Dieu, ils ne feront jamais rien de bon. J'ai beaucoup de mal pour ma part à fermer les yeux, à accepter une vision du monde aussi étroite.

M. Roy Culpeper: Nous ne disons nulle part dans notre rapport, ou j'espère n'avoir rien dit de tel, que nous croyons dans l'isolement des pays. L'approche que nous préconisons, et que j'ai préconisée en de nombreux autres endroits, c'est celle de l'engagement constructif. Il faut faire des choses qui aident à améliorer les conditions de vie, qui permettront d'établir des contacts avec la société civile et qui encourageront les forces de la démocratie et des droits de la personne, et cela comprend le commerce.

Mais ce que nous rejetons, c'est l'idée que l'on peut mettre toutes les questions relatives aux droits de la personne sous le boisseau, et que si nous commerçons avec ces pays suffisamment longtemps, tôt ou tard, l'état des droits de la personne va s'améliorer. C'est l'idée que nous rejetons.

M. Bob Mills: Mais ces pays sont disposés à discuter des droits de la personne chaque fois que nous le voulons. Ils en parlent ouvertement. Ils ne refusent nullement le dialogue à ce sujet, et cela représente un changement.

M. Svend Robinson: Rien n'a changé.

M. Bob Mills: La situation a changé.

M. Svend Robinson: Pas pour les droits de la personne.

Une voix: Ça n'a pas changé à Cuba non plus.

M. Bob Mills: La situation a changé. Elle a changé. Vous avez 10 ans de retard, et 10 ans dans des pays comme ceux-là, c'est une éternité. Ces pays évoluent très rapidement.

M. Roy Culpeper: Eh bien, je pense que vous avez raison. Les choses se sont améliorées, mais l'eau courante, l'électricité, les égouts et l'emploi, tout cela ne se traduit pas par le respect des droits de la personne au sens où l'entendent de nombreux Canadiens—vous savez, les exécutions sommaires, les travaux forcés, et un bon nombre d'atteintes aux droits de la personne qui sont très bien documentés. Ce sont là des problèmes qui refusent tout simplement de disparaître, en dépit de ces améliorations qui sont tout à fait bienvenues, où nous devrions être présents également, et que nous devons encourager.

• 1010

Il ne s'agit donc pas pour nous d'une approche isolationniste mais d'un engagement à divers niveaux que nous devons encourager.

M. Bob Mills: Êtes-vous d'accord pour dire que si leurs conditions de vie économiques s'améliorent, les droits de la personne vont suivre?

M. Roy Culpeper: Non, pas nécessairement. Avez-vous déjà été à Singapour?

Mme Raymonde Folco: Pardon, monsieur Culpeper.

C'est là une idée tellement étrange, monsieur Mills. Excusez-moi de le dire. Il s'est commis au niveau des droits de la personne des atrocités épouvantables en Europe, là où les conditions de vie étaient fantastiques.

M. Bob Mills: Mais c'est la position du gouvernement.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: C'est votre position, madame Folco. Vous devriez la défendre.

[Traduction]

M. Bob Mills: Voilà qui est étrange. Je défends la position du gouvernement et les députés défendent le point de vue contraire.

Des voix: Ah, ah!

Mme Raymonde Folco: Non, non, non.

Le président: Voilà qui fait toute la force de notre comité, voyez-vous? La confusion est totale.

M. Bob Mills: Il est temps de rentrer chez nous pour l'été.

Mme Raymonde Folco: Cela prouve, monsieur Mills, que du côté ministériel, il y a place pour la discussion, ce que je ne vois pas chez nos amis d'en face.

M. Sarkis Assadourian (Brampton Centre, Lib): Comment pouvez-vous condamner...

Le président: Ce que cette conversation prouve, c'est que tout le monde pense que nous allons partir demain. Ils n'en peuvent plus.

Des voix: Oh, oh!

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Avons-nous une liste d'intervenants, monsieur le président?

Le président: Oui.

M. Sarkis Assadourian:

[Note de la rédaction—Inaudible]

Le président: Un instant, monsieur Assadourian, s'il vous plaît. Nous devons rétablir un certain ordre. Nous n'avons plus que 15 minutes à consacrer à M. Culpeper.

Madame Folco, s'il vous plaît... Il y a encore M. Reed sur la liste et environ cinq autres personnes qui veulent intervenir, il faut donc arrêter.

Monsieur Reed et ensuite Mme Debien.

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Toutes mes excuses, monsieur Culpeper, si je n'étais pas ici lorsque vous avez parlé de l'inefficacité d'Équipe Canada. Je ne suis pas sûr de ce que vous avez dit, mais vous avez bel et bien cité Sylvia Ostry qui a dit qu'Équipe Canada n'était pas un véhicule efficace et tout le reste. J'ai vu le même article dans le journal, mais je l'ai lu jusqu'au bout, et elle a dit aussi qu'elle avait fait le voyage et qu'elle plaisantait. Je ne vois pas comment vous pouvez donner une telle interprétation.

Pour ce qui est des coûts d'Équipe Canada—les coûts de l'encouragement aux échanges commerciaux—il faut être juste et rappeler que les coûts représentaient moins de 0,10 p. 100 des contrats qui ont été conclus. On en est en fait à 0,20 p. 100, soit 12 millions de dollars, pour 23 milliards de dollars de vente. Il n'y a pas une seule autre entreprise au monde qui arrive à faire vendre ses produits pour 0,10 p. 100 de son chiffre d'affaires. Allez voir du côté de Kellog, vous allez probablement constater que les coûts de promotion sont de l'ordre de 50 p. 100.

Je tiens donc à vous le signaler, si vous vous en tenez aux coûts stricts d'Équipe Canada, vous allez voir que c'est une façon très efficiente de faire des affaires et de permettre à des petites et moyennes entreprises de s'implanter dans des pays qui en temps normal ne leur accorderaient pas la moindre attention. La présence d'un dirigeant gouvernemental donne une certaine légitimité au processus.

Bien sûr, si l'on tient compte de nos normes à nous, ce sont les entreprises canadiennes qui font affaires avec celles des États-Unis, de l'Australie, de la Grande-Bretagne, de la Nouvelle-Zélande, etc., mais nous sommes des pays très développés et nous faisons affaires avec plus de confiance et selon un mode différent de celui des pays en voie de développement. Je tiens donc à vous dire qu'il y a un autre aspect à cette discussion.

Il y a un autre élément qui manque dans ce débat, même si on l'a mentionné une fois, et c'est le fait qu'étant donné que les échanges mondiaux se sont mis à prendre plus d'ampleur après la Seconde Guerre mondiale, il n'y a pas eu de guerre internationale. Oui, il y a des conflits. Il s'agit de conflits internes et de guerres civiles, qui sont tragiques et terribles, mais le fait est que lorsque les gens se parlent, lorsqu'ils dialoguent et qu'ils connaissent le visage de l'ennemi potentiel, ils sont moins susceptibles de s'engager dans des conflits.

• 1015

Donc, lorsqu'on voit l'effet des missions commerciales, le concept d'Équipe Canada, le dialogue international, il faut situer tout cela dans un contexte plus large.

Je dois également rappeler qu'il y a un proverbe chinois qui dit qu'un voyage de mille milles commence par un premier pas. Nous ne cessons d'avancer, un pas à la fois. Sur notre chemin, il y a des rochers, des collines, des montagnes, des ravins, des ruisseaux qu'il faut traverser à gué, et tout le reste, mais cela ne devrait pas nous empêcher de poursuivre notre route. Ce n'est là que mon opinion bien sûr.

L'une de nos discussions, et vous pouvez vous en rendre compte autour de cette table porte sur la question de savoir ou non... Vous parlez des normes canadiennes dans votre rapport, mais comment allons-nous les faire connaître? Est-ce qu'on peut procéder par décret: «Ou vous promettez de bien vous comporter ou nous ne commercerons pas avec vous?» Ou procédez-vous par l'exemple? On peut dialoguer et conserver ses propres normes de telle sorte que lorsqu'on fait affaires, à la manière canadienne, d'autre pays nous voient faire, au lieu de porter des jugements ou de donner dans le pharisianisme en disant: «Regardez-nous. Nous sommes les plus parfaits au monde.» Et ce n'est pas le cas. Nous avons nos problèmes à nous. Le monde n'est pas parfait.

J'avance donc que lorsque nous discutons de nos rapports avec le monde, la question porte probablement sur le degré de nos actions. Franchement, le Canada est d'avis qu'il vaut mieux laisser la porte ouverte et maintenir le dialogue plutôt que d'exclure des pays parce qu'ils ne se conduisent pas de la même façon que nous.

• 1017

Le président: Vous avez pris le temps qu'avait monsieur pour répondre.

M. Julian Reed: Pardonnez-moi.

Le président: Pouvez-nous nous donner une très brève réponse?

M. Roy Culpeper: Je ne suis pas en désaccord avec tout ce que vous avez dit... eh bien, avec le gros de ce que vous avez dit. L'institut a consacré de nombreux travaux aux échanges commerciaux, à titre d'exemple. Nous pensons que nous pouvons commercer beaucoup plus avec le monde en voie de développement que nous ne l'avons fait.

Écoutez, le commerce est une voie à deux sens, et il faut que nous ouvrions aussi nos marchés aux pays en voie de développement. C'est là l'élément qui ne semble pas entrer dans la discussion. Très souvent, quand on parle dÂéchanges commerciaux, on pense aux exportations canadiennes dans les pays en voie de développement plutôt quÂaux importations en provenance de ces pays. Très souvent, on constate que nos marchés sont fermés ou limités pour les pays en voie de développement, qu'il s'agisse de barrières tarifaires ou non tarifaires.

M. Julian Reed: J'ai...

Une voix: Cela suffit, un instant.

M. Julian Reed: D'accord, excusez-moi.

J'imagine que nous n'avons pas le temps de débattre de cette question.

Le président: Nous allons céder la parole à Mme Debien.

Qui est-ce qui mène ici de toute façon?

Madame Debien.

[Français]

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur Culpeper, j'ai vécu récemment une expérience assez troublante qui a un peu rapport avec ce dont nous discutons ce matin. Je suis allée visiter l'exploitation pétrolière d'une grande compagnie canadienne en Amérique du Sud, en pleine forêt amazonienne. De l'avis même de certains dirigeants de cette compagnie, ils ne devraient pas être là étant donné la fragilité de l'équilibre écologique de la forêt amazonienne. Ce sont des forêts dans lesquelles il ne faudrait jamais aller.

On parle beaucoup des codes de conduite ou d'éthique que les compagnies canadiennes devraient se donner. Dans ce cadre, ces compagnies ne devraient-elles pas se donner comme objectif de ne jamais intervenir dans ce genre de forêt où l'équilibre écologique est très très fragile?

• 1020

Pour revenir à ce que M. Graham vous demandait, vous avez parlé de listes modulées d'endroits où les compagnies canadiennes ne devraient pas intervenir. Ne devrait-on pas aussi tenir compte, dans ce cadre, de la question de l'environnement?

Ma deuxième question porte sur l'aide liée. Vous en parlez à de nombreux endroits dans votre document. On sait très bien que dans la réalité, comme vous le dites si bien, une partie de cette aide a surtout pour but de faire tourner les affaires dans les pays donateurs. Quel est le pourcentage de l'aide liée dans les projets de l'ACDI? Selon vous, devrait-on éliminer complètement l'aide liée? Elle entraîne souvent des problèmes de corruption, des problèmes de détournement de fonds par les pays à qui on fait ces...

Quelle serait, d'après vous, la meilleure solution, et pour le pays donateur et pour le pays receveur?

M. Roy Culpeper: En ce qui concerne votre première question, dans notre rapport, nous abordons également la responsabilité sociale et la responsabilité environnementale. À notre avis, il est très important que les compagnies canadiennes envisagent les deux questions, c'est-à-dire les questions sociales et les questions environnementales. Il y a davantage de sociétés canadiennes qui sont en train d'établir des codes de développement durable. Des compagnies minières comme Placer Dome, par exemple, ont un code. Il est impossible que tous les pays en arrivent à des critères qui disent qu'on ne doit pas investir du tout. Je crois que les compagnies sont en train d'établir des normes, mais je crois que le gouvernement canadien peut aussi aider les sociétés canadiennes dans les questions environnementales.

Quant à la question de l'aide liée, la position de l'Institut Nord-Sud, depuis plusieurs années, est que l'aide liée est un point faible de notre programme d'aide. Je crois que le pourcentage est d'au moins 60 ou 65 p. 100. Il est peut-être même de 70 p. 100.

Mme Maud Debien: Le pourcentage de l'aide liée?

M. Roy Culpeper: Oui. En tout cas, c'est plus lié au Canada que dans les autres pays donateurs.

J'ai l'impression que la position de l'ACDI est qu'il est important d'avoir de l'aide liée afin d'encourager l'appui du secteur privé à notre programme d'aide.

• 1025

À mon avis, c'est absolument faux parce que la plupart des compagnies canadiennes qui font du travail dans le tiers monde le font sans l'appui de l'aide liée. Ce n'est pas nécessaire du tout, ni pour l'appui à notre programme d'aide ni pour encourager l'investissement dans le tiers monde.

[Traduction]

Le président: Il y a encore quelques députés sur la liste, mais nous avons cinq motions à adopter, et nous devons ensuite entendre M. Grand, de Paris. Je pense que nous pourrons réinviter M. Culpeper. C'est un habitué de la maison.

Merci d'avoir été des nôtres, monsieur Culpeper. Nous vous savons gré de votre participation. Il s'agit de questions très importantes, de toute évidence. Nous suivons certains de vos travaux, au niveau du Conference Board et du gouvernement, pour ce qui concerne la responsabilité sociale des entreprises. Votre contribution nous est très utile.

M. Roy Culpeper: Merci.

Si les membres du comité ont d'autres suggestions à nous faire pour le suivi, nous les encourageons certes à nous les faire connaître, et nous ferons ce que nous pourrons, que ce soit au niveau de l'institut ou des partenaires que nous avons dans notre programme de recherche. Merci beaucoup.

Le président: Merci.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: J'aimerais remercier M. Culpeper et l'inviter à revenir, compte tenu que nos collègues libéraux se disent maintenant intéressés à une étude sur le code de conduite, ce qu'on nous avait refusé auparavant. Les interventions de M. Graham et de Mme Folco nous confirment l'importance de tenir ce genre de débat et ce genre d'étude. Merci beaucoup.

[Traduction]

Mme Colleen Beaumier: J'aimerais seulement dire quelques mots sur le ton que l'on entend parfois dans ces débats, où tout le monde prétend au monopole de la solidarité. Comme je l'ai dit à M. Robinson à Genève, j'ai le luxe d'avoir des opinions socialistes parce que le pauvre petit capitaliste canadien-français que j'ai épousé s'est défoncé pour me donner le luxe d'avoir des opinions socialistes.

La plupart d'entre nous reconnaissent que les mutations sociales viennent de l'intérieur. Nous aimons croire que c'est nous qui avons changé l'Afrique du Sud. Si l'embargo a marché pour l'Afrique du Sud, c'est parce que l'Afrique du Sud était prête. En Amérique du Nord, c'est de l'intérieur que nous avons changé notre code du travail, et nous devons tous nous souvenir de cela. Si nous voulons imposer des embargos et interdire certains échanges commerciaux, les députés du Bloc n'aimeraient pas beaucoup qu'on envoie chez eux toutes les personnes que ces mesures ont mises au chômage; on pourrait donc les envoyer chez M. Robinson à la place.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Je trouve très pertinente l'intervention de Mme Beaumier. Cela démontre très bien comment on peut faire rapidement dévier un débat. Je vous remercie.

[Traduction]

Le président: Si M. Sauvageau veut proposer une motion de gratitude à l'endroit du mari de Mme Beaumier, qui a financé son...

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Non, pour faire rapidement dévier un débat.

[Traduction]

Le président: Nous avons plusieurs motions devant nous. Je crois qu'aucune ne fera l'objet d'une contestation sérieuse en principe, mais il y a des difficultés au niveau du libellé. Il se peut que la motion portant sur la CCI nous pose des problèmes. Si une résolution nous pose de sérieuses difficultés, je la mettrai de côté, et nous en reparlerons après que nous aurons écouté le professeur Grand.

M. Svend Robinson: Monsieur le président, j'invoque le Règlement; lorsqu'on nous remettra les textes des résolutions, je me demande si l'on peut indiquer les sources des résolutions. J'ai un texte devant moi qui contient une résolution, et j'ignore de qui il vient, et tout le reste.

Le président: Je dois vous présenter mes excuses. Tout d'abord, et je vais devoir demander la permission du comité, il y a la résolution sur les anciens combattants de Hong Kong.

M. Svend Robinson: Une des résolutions porte sur les anciens combattants de Hong Kong et l'autre sur la cour criminelle internationale...

Le président: En effet, vous avez raison.

Normalement, le Règlement prescrit un préavis de 48 heures pour soumettre des motions. J'ai demandé à nos greffiers de préparer ces motions parce que ces deux questions étaient en instance. La première motion, qui porte donc sur les anciens combattants de Hong Kong, fait suite à une question qui, vous vous en souvenez, a déjà été présentée. Il s'agissait de quelque chose qui n'avait d'ailleurs rien à voir avec le comité. L'annonce avait été faite, et je pense que les membres du comité aimeraient probablement y donner suite avant l'ajournement estival.

J'ai également demandé aux greffiers d'avoir l'obligeance de nous préparer un texte de résolution sur la cour criminelle internationale. Je ne pense pas que vous étiez ici à ce moment-là pour entendre cela, mais je pense que, comme nous l'avons tous entendu et que c'est notre dernier jour, peut-être devrions-nous nous en saisir également.

M. Svend Robinson: Cela nous aiderait à l'avenir si on nous disait d'où cela vient.

Le président: De la présidence.

M. Svend Robinson: Ex cathedra.

• 1030

Le président: En effet, ex cathedra et urbi et orbi. Et je vous bénis également, mon fils.

Le pauvre M. Grand va penser que nous avons tous perdu la tête, mais cela ne fait rien.

La première résolution, par ordre chronologique, a été proposée par M. Grewal, et M. Mills en a déjà parlé. Vous allez, j'imagine, monsieur Mills, éliminer la mention: «conformément au Règlement».

M. Bob Mills: Il y a deux choses que je voudrais simplement faire valoir à l'intention de mes collègues, choses sur lesquelles nous nous sommes entendus et qui vont pouvoir passer. Le texte devrait se lire: «Conformément à l'article 108(2) du Règlement». Cela signifierait donc pendant l'automne. Nous allons également remplacer la mention: «années financières à venir» par l'expression «le budget 1999-2000». Ce sera donc plus précis.

Le président: Fort bien. J'ai cru comprendre que MM. McWhinney et Reed étaient prêts à accepter cela.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): C'est une excellente motion.

[Français]

Le président: Donc, monsieur Turp, vous avez compris la proposition visant à modifier la motion? Il s'agit d'éliminer la référence à l'article 81 du Règlement et de la remplacer par une référence au paragraphe 108(2). Ensuite, au lieu de faire allusion à toute les années financières futures, on parle plutôt de 1999-2000. C'est bien cela?

[Traduction]

Monsieur Robinson.

M. Svend Robinson: Pourrais-je avoir une précision quant à l'objectif poursuivi par cette résolution? Nous nous préoccupons tous, c'est évident, des derniers essais nucléaires, mais je pense que la plupart d'entre nous sont tous aussi préoccupés par le fait que les cinq puissances nucléaires conventionnelles ne sont pas parvenues à faire quoi que ce soit de sérieux pour arriver à un désarmement.

Je me demande pourquoi nous nous en prenons spécifiquement à l'Inde et au Pakistan dans le cadre de cette étude, ignorant par là même les cinq puissances nucléaires conventionnelles. Peut-être pourrions-nous avoir des éclaircissements.

Le président: Une question très rapidement.

M. Bob Mills: Vous voudrez bien m'excuser si M. Grewal n'est pas présent, mais il est à l'étranger. Étant donné ce qui s'est produit, puisque le budget ne donne qu'un chiffre global, il aimerait avoir une ventilation plus précise de cette dépense. Il est évident que si cet argent doit aller aux ONG, ce n'est pas du tout la même chose que s'il allait directement au gouvernement. C'est cela l'objectif poursuivi. C'est quelque chose que nous pourrions demander pour tous les pays si nous le voulions.

Le président: Mon sentiment au sujet de la résolution était que nous avions la preuve—c'est ce qu'on nous avait dit—que l'aide au Pakistan et à l'Inde avait été interrompue, à l'exclusion toutefois de l'aide humanitaire. Personne ne comprend au juste la différence entre l'aide humanitaire et l'aide générale, de sorte que c'est simplement une demande d'éclaircissement. Cela n'ira pas plus loin.

M. Bob Mills: C'est simplement un complément d'information.

M. Ted McWhinney: Je pense que c'est une très bonne motion, et qui est même meilleure encore grâce aux changements proposés par M. Mills. Je dirais par contre que M. Robinson pose une question plus générale qui pourrait faire l'objet d'une résolution distincte.

Le président: Je pense que cela ressortira de notre rapport sur le dossier nucléaire. Cela fera partie du rapport, mais il ne s'agit que d'une seule disposition.

M. Svend Robinson: Le fait que les Libéraux s'entendent avec les Réformistes ne relève pas pour autant l'appui général donné à cela.

Le président: Non, mais c'est déjà un point de départ.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Une autre sorte de mariage.

[Traduction]

Le président: Écoutez, nous n'avons vraiment pas beaucoup de temps...

M. Svend Robinson: Monsieur le président, je le sais fort bien...

Le président: ...de sorte que je vais mettre très rapidement la question aux voix si cela vous pose vraiment problème.

M. Bob Mills: Cela fait trois ou quatre réunions déjà que nous en discutons.

• 1035

M. Svend Robinson: Monsieur le président, je voudrais demander pourquoi la Chine n'est pas mentionnée dans la résolution.

Le président: C'est parce que nous avons suspendu notre aide à l'Inde et au Pakistan, et non pas à la Chine. Nous essayons de comprendre la différence entre l'aide humanitaire et l'aide en général, et cela découle directement des essais nucléaires qui ont été effectués par l'Inde et par le Pakistan, comme je l'ai déjà dit. Malheureusement, vous avez raté une ou deux de ces discussions, mais la résolution a pour but précisément cela, et je pense que c'est la raison pour laquelle tout le monde y souscrit. Nous voudrions tous mieux comprendre ce que dit le gouvernement lorsqu'il annonce qu'il suspend l'aide à l'Inde et au Pakistan, mais non pas l'aide humanitaire... les gens veulent pouvoir comprendre ce que nous suspendons et ce que nous ne suspendons pas.

M. Svend Robinson: Et pourquoi nous continuons à aider la Chine, qui fait fi de ses engagements.

Le président: Cela ne me pose pas problème, mais je pense que c'est une autre question dont nous devrons nous saisir dans le cadre de l'étude complète sur le dossier nucléaire, au moment où nous préparerons notre rapport. Je pense que c'est à ce moment-là qu'il conviendra d'en parler.

M. Svend Robinson: Merci, monsieur le président.

Le président: Cela étant, puis-je conclure que la motion ainsi modifiée est acceptée de façon générale?

Des voix: D'accord.

Le président: Est-ce que cela pose problème à quelqu'un?

M. Svend Robinson: Je suis contre, monsieur le président.

Le président: D'accord, M. Robinson est contre, mais à part cela...

M. Ted McWhinney: Nous sommes contre parce que cela ne comprend pas la Chine.

Le président: D'accord, voilà donc pour la première résolution.

La seconde résolution est celle de Mme Beaumier, dont nous avons le texte depuis un certain temps déjà. Pourriez-vous la proposer?

M. Bob Mills: J'aurais une question. Il s'agit des renseignements un peu contradictoires qu'on nous a fournis. Une ministre, Mme Marleau, nous a dit qu'il faudrait augmenter cette intervention financière... et puis M. Axworthy réplique que nous devrions suspendre tous les programmes d'aide. J'imagine donc que la motion s'interprète de cette façon. Mais rien que pour préciser les choses, cette motion va parvenir aux ONG canadiennes qui travaillent avec les réfugiés se trouvant en Thaïlande ainsi qu'avec les mouvements démocratiques qui travaillent hors de ce pays. C'est mon interprétation de la chose et c'est ce que vous nous dites.

Mme Colleen Beaumier: C'est exact.

Le président: Le jeune homme que nous avons entendu, qui appartenait au groupe Karen, nous a dit en substance...

M. Bob Mills: Oui, c'est un point de vue très différent de celui de quelqu'un qui travaille avec le gouvernement.

Mme Colleen Beaumier: En effet, et personne...

Le président: C'est simplement pour donner suite à ce que nous avons déjà entendu...

Mme Colleen Beaumier: Pour donner suite à la réunion que nous avons eue avec le groupe les Amis canadiens de la Birmanie.

Le président: Madame Debien.

[Français]

Mme Maud Debien: C'est un peu en relation avec l'observation de M. Mills. Il ne s'agit pas d'aide bilatérale de pays à pays. Je pense que Colleen nous l'a confirmé la dernière fois. À ce moment-là, dans le texte français, il faudrait enlever deux mots. À mon avis, ils donnent un sens différent à la proposition. On dit à la troisième phrase: «que, de plus, le gouvernement canadien continue d'appuyer les ONG». Le «de plus» veut dire qu'il s'est passé quelque chose avant ou qu'on a l'intention de faire quelque chose avant.

Donc, pour éliminer toute cette espèce de connotation d'aide bilatérale que laisse entendre le «de plus», il faut l'enlever. Il faudrait plutôt mettre: «donc, que le gouvernement canadien continue d'appuyer les ONG». À ce moment-là, on enlève toute ambiguïté dans le texte français.

Le président: Faut-il éliminer le mot further en anglais?

Mme Maud Debien: Cela veut dire la même chose en anglais.

Le président: Cela veut dire qu'on peut éliminer further sans déformer le texte.

Mme Maud Debien: D'accord. De plus, en français, il faudrait remplacer «l'opportunité» par «la possibilité», «opportunité» étant un anglicisme.

[Traduction]

Le président: Cette résolution pose-t-elle d'autres problèmes encore? Monsieur Robinson, cela vous va?

Parfait, c'est donc unanime. Je vous remercie, chers collègues.

Pourrions-nous jeter un rapide coup d'oeil sur la résolution concernant les anciens combattants de Hong Kong? Est-elle acceptable? Je pense que nous devons donner suite à ce dossier, puisque la question a été posée.

Des voix: D'accord.

[Français]

Le président: Oui, monsieur Sauvageau.

M. Benoît Sauvageau: En ce qui a trait à la motion sur les anciens combattants de Hong Kong, je voudrais juste dire que dans le fond, c'est vraiment un beau langage diplomatique qui ne veut absolument rien dire: «continuer à examiner avec des nouveaux renseignements, s'efforcer de régler la question dès que possible à la lumière de ces conclusions». On peut bien être d'accord sur cela, mais on peut aussi souhaiter qu'il ne pleuve pas cet été et que l'hiver ne soit pas trop froid. Ce n'est pas très crédible comme résolution. Cela remet un peu le Parti libéral dans la machine de l'étude sur les prisonniers de Hong Kong. Toutefois, entre écrire cela et ne rien écrire, je trouve qu'il y a une grande similitude.

Je vous remercie beaucoup de votre attention, monsieur le président.

Le président: Vous votez contre la résolution, que vous trouvez un peu trop faible.

M. Benoît Sauvageau: Oui.

Le président: D'accord.

• 1040

Monsieur Mills.

[Traduction]

M. Bob Mills: Pour plus de précisions, je suis convaincu que cette nouvelle donnée concerne l'impôt de 1955. En fait, nous savons maintenant que les gouvernements canadien et britannique avaient eu l'occasion d'interjeter appel, mais avaient préféré ne pas le faire. Je pense que c'est cela le renseignement capital que nous trouvons ici. J'imagine que c'est ce que cela veut dire, mais ce n'est pas explicite. Si c'est effectivement le cas, à ce moment-là il est évident que tout le dossier pourra être rouvert.

Le président: Monsieur McWhinney.

M. Ted McWhinney: Ce sont deux questions distinctes. La première est une question de fait. C'est ce qui s'est produit. Lorsque vous avez écrit cela, le ministre a été piqué au vif, et nous essayons de savoir ce qu'il en est. La seconde question, ce sont les implications au niveau juridique.

J'ai personnellement jeté un coup d'oeil sur les documents juridiques en question. Les deux ne s'accordent pas nécessairement. Le fait que ces activités aient été ainsi divulguées préoccupe beaucoup le ministre, et il donne suite à tout cela. Cette motion devrait donc nous satisfaire.

M. Bob Mills: Ce qui nous inquiète évidemment, c'est que plus nous attendons, moins il y aura de dettes à payer.

M. Ted McWhinney: C'était il y a huit ministres des Affaires étrangères de cela.

Le président: Monsieur Penson.

M. Charlie Penson: J'aurais préféré que cette résolution eût contenu une recommandation disant que nous allons payer ces gens. À cette époque-ci l'an dernier, le comité avait entendu les anciens combattants. Nous en avions profité pour discuter de toute cette question avec eux, et j'ai le sentiment que nous avons à leur égard une obligation, que nous devons les payer, peu importe que nous puissions ou non trouver un complément d'information, ou peu importe le fait que nous ayons peut-être renoncé en 1953, ou je ne sais quand. Il me semble que c'est une réclamation que nous ne devrions pas ignorer. D'ailleurs, étant donné ce qui a surgi depuis et qui pourrait surgir encore, c'est précisément cela qu'il conviendrait de faire. Il me semble néanmoins que nous devrions intervenir rapidement et payer ces gens, quoi qu'il arrive. Nous devrions continuer à insister là-dessus.

Le président: Écoutez, cette résolution découle de ce nouveau complément d'information. Nous essayons simplement d'exhorter le gouvernement à regarder sérieusement ce dossier.

M. Charlie Penson: Je sais.

Le président: Nous avons déjà réglé l'autre question. Nous avons soumis notre rapport à la Chambre avec l'idée de forcer la main au comité. Nous avons donc soumis ce rapport à la Chambre. C'est fait.

M. Charlie Penson: Mais où peut-on lire qu'il faut indemniser ces gens?

Le président: Cela fait avancer le dossier.

M. Svend Robinson: Je suis d'accord avec M. Penson à ce sujet, ainsi d'ailleurs qu'avec M. Sauvageau. Une des façons possibles de répondre serait que notre recommandation réitère notre insistance auprès du gouvernement du Canada pour qu'il verse une juste indemnisation à tous les anciens combattants de Hong Kong.

Monsieur le président, si nous réitérons donc...

M. Ted McWhinney: Vous allez comprendre—je vous donne un éclaircissement—que le ministère des Affaires étrangères fera tout ce qui est en son pouvoir pour faire aboutir ce dossier. Nous essayons de découvrir les faits. Ensuite, il y aura les conséquences juridiques, qui feront que nous irons dans telle ou telle direction.

Mais en ce qui concerne le ministère des Affaires étrangères, nous allons aller jusqu'au bout de notre compétence. Peut-être se fera-t-il que ce dont vous parlez doive être soumis à un autre ministère.

Le président: Monsieur Robinson, nous allons vous écouter brièvement, après quoi nous entendrons M. Grand.

M. Ted McWhinney: Nous nous félicitons...

Le président: Excusez-moi, monsieur McWhinney.

M. Ted McWhinney: Pardon.

Le président: Pour revenir à ce que vous disiez, quel est le problème que pose le second «attendu que», qui renvoie à notre rapport demandant au gouvernement du Canada d'accueillir la réclamation...

M. Svend Robinson: Nous devrions selon moi ajouter une recommandation dans laquelle nous réitérerions notre engagement précédent, qui demandait au gouvernement de verser à tous les anciens combattants de Hong Kong une juste indemnisation.

Le président: Nous avons déjà dit cela dans l'«attendu» en question, et il faudrait donc que le comité le répète.

Une voix: En effet.

M. Ted McWhinney: Cela figure déjà...

Le président: Un instant, je vous prie; pas tous en même temps. Monsieur McWhinney.

M. Ted McWhinney: Comme je le disais, le ministère des Affaires étrangères ira jusqu'au bout des choses de son côté. Nous allons explorer le dossier et nous allons également voir s'il y a des répercussions sur le plan juridique. Comme je le disais, j'ai moi-même jeté un coup d'oeil à titre personnel sur ce dossier, mais ce que vous nous dites, c'est que, si cela dépasse les pouvoirs des Affaires étrangères, le dossier risque de faire intervenir un autre ministère. Pour autant que vous en soyez parfaitement conscients, personnellement je n'ai pas de problème.

M. Svend Robinson: Ainsi donc, monsieur le président, avec cet amendement, je proposerais que nous ajoutions aux recommandations la mention que nous réaffirmons notre recommandation précédente concernant le paiement d'une juste indemnisation à tous les anciens combattants de Hong Kong.

Le président: En d'autres termes, la disposition essentielle est ici que le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international réitère son invitation à payer.

M. Svend Robinson: C'est bien cela.

Le président: Répétant ainsi ce qui figure déjà dans la clause «attendu que».

M. Svend Robinson: En effet, de manière textuelle.

Le président: Cela consiste à dire ce que nous avons déjà dit dans notre rapport précédent.

Je ne pense pas que cela pose problème à qui que ce soit. D'accord. Je vous remercie. Tout cela est très utile. Tout le monde est d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: C'est donc adopté.

Nous ne pouvons pas faire attendre M. Grand plus longtemps, et nous allons donc passer à ce point-là. Il reste encore une motion sur la cour criminelle internationale.

Mme Raymonde Folco: Monsieur le président, pourrais-je préconiser quelque chose? Il y a deux membres, et je suis l'une de ces deux-là, qui ont une réunion de comité extrêmement importante au cours de laquelle nous allons devoir voter et prendre plusieurs décisions importantes. Je voudrais donc vous demander s'il ne serait pas possible de voter immédiatement sur les deux dernières motions, parce que ma collègue et moi allons devoir vous quitter incessamment.

• 1045

Le président: Le problème est ici que M. Mills a toute une série de changements très complexes qu'il veut apporter à sa résolution, et nous risquons de devoir y consacrer encore trois quarts d'heure, de sorte que vous ne pourriez pas nous quitter immédiatement.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Et si nous, nous avons des changements?

[Traduction]

Le président: Voilà donc le problème.

Mme Raymonde Folco: Eh bien, je n'en serai pas.

Le président: Si tout le monde était d'accord, je le serais aussi, et je serais prêt à passer au vote. Malheureusement, j'ai fait mes consultations et je me suis rendu compte qu'il n'y avait pas accord. C'est donc un peu...

Une voix: Allons-nous pouvoir le faire aujourd'hui?

Le président: Peut-être, mais ce n'est pas garanti. D'accord? Excusez-moi, madame Folco.

[Français]

C'est le problème.

[Traduction]

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Mais si nous vous quittons à 11 heures, ce n'est pas parce que nous ne vous aimons pas.

Le président: Je le sais fort bien, mais dites donc cela à M. Grand, notre professeur invité. Vous devrez peut-être le lui dire vous-même, au risque de voir le comité causer un nouvel incident international.

Le greffier me signale que nous devons maintenant clore cette séance, ce que je vais faire pour reprendre immédiatement après pour la séance suivante.

La séance est levée.