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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 13 avril 1999

• 0909

[Traduction]

Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): La séance est ouverte.

Nous recevons ce matin cinq groupes de témoins. J'inviterai les témoins à nous faire un exposé d'une dizaine de minutes tout au plus, ce qui devrait occuper la première heure; après quoi, nous disposerons de deux heures pour poser des questions, ce qui est d'habitude la partie la plus enrichissante des échanges.

Je vous remercie tous d'être venus nous assister dans notre étude en vue des prochaines négociations de l'OMC qui, comme vous le savez, commenceront sans doute en novembre à Seattle.

• 0910

Avant d'entendre le premier témoin, j'aimerais aborder une autre question. Le ministère des Affaires étrangères a offert de nous donner régulièrement une séance d'information sur la situation au Kosovo. Je vous recommanderais d'accepter son offre et de les tenir de 8 à 9 heures les mardis et les jeudis. C'est la seule heure où c'est possible. Il se peut que des membres du comité ne soient pas libres.

Je propose aussi d'inviter d'autres parlementaires à se joindre à nous. La séance d'information sera pour nous, mais si d'autres parlementaires veulent obtenir une mise à jour, ils en auraient l'occasion. Cela vous convient-il?

[Français]

Monsieur Turp.

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le président, je suis d'accord sur cette proposition, mais je souhaiterais que ce ne soient pas seulement des représentants du ministère des Affaires étrangères. Il faudrait la présence de gens de la Défense nationale. Hier nous avons eu un briefing et, en l'absence d'un représentant de la Défense nationale, il nous manquait beaucoup d'information. Il est essentiel d'ajouter des représentants de la Défense nationale.

Le président: C'est une bonne observation et je ferai de mon mieux pour les faire ajouter. Dans ce cas, on devrait peut-être tenir une réunion du comité; je pourrais également parler à mon collègue, le président du Comité de la défense nationale.

M. Daniel Turp: Cela commence jeudi?

Le président: Cela commencera jeudi si on le peut; je vais en faire la demande.

M. Daniel Turp: On va transmettre l'information à M. André Bachand, qui en sera sûrement heureux.

Le président: M. Bachand est toujours là.

M. Daniel Turp: Monsieur Bachand, on parlait de vous justement.

[Traduction]

Le président: Les membres du comité savent peut-être que d'après les médias des troupes yougoslaves ont franchi la frontière albanaise ce matin, peut-être dans le but d'élargir le conflit. Il s'agit de toute évidence d'une situation très dangereuse et j'imagine que les membres du comité voudront se tenir au courant à intervalles réguliers.

Passons maintenant à notre premier témoin, M. Myers, de l'Alliance des manufacturiers.

M. Jayson Myers (premier vice-président et économiste en chef, Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés.

Je m'appelle Jayson Myers. Je suis premier vice-président et économiste en chef de l'Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Canada. Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Pamela Fehr, notre analyste des politiques commerciales.

Je tiens à remercier le comité de l'occasion qui m'est offerte de comparaître à nouveau. La dernière fois, nous vous avons présenté un aperçu général de nos principaux objectifs et des grandes questions entourant la prochaine série de négociations de l'OMC. Depuis notre dernière comparution, nous avons eu l'occasion de sonder nos membres dans tout le pays. Grâce à eux, nous avons constitué une liste de recommandations plus précises que nous aimerions aujourd'hui vous exposer. Nous présenterons un document sur les recommandations au ministre du Commerce international et à ses collaborateurs.

Je profiterai de l'occasion pour vous communiquer certaines des principales recommandations. Comme vous le savez, nos membres représentent 75 p. 100 de la production industrielle du Canada et 95 p. 100 de ses exportations. Je sais que vous avez entendu beaucoup de nos membres lors de vos déplacements dans le pays. Il était important pour eux de pouvoir vous rencontrer chez eux, et ils ont beaucoup apprécié la chance de vous présenter directement leurs vues.

La dernière fois, nous avons exposé aux membres du comité les questions générales qui nous préoccupent au sujet de l'OMC. Brièvement, j'aimerais rappeler certains des principes qui selon nous devraient déterminer la position de négociation du gouvernement à la veille des pourparlers. Je demanderai ensuite à Pamela d'énumérer très brièvement les principales recommandations issues de la consultation auprès de nos membres.

Nous voulons d'abord rappeler l'importance de l'OMC en tant que pilier de la politique commerciale canadienne. L'objectif ici est de concevoir, bâtir et appliquer un régime commercial fondé sur des règles qui soient justes, efficaces et efficientes. Cela est tout à fait dans l'intérêt du Canada.

• 0915

Le principal objectif selon nous devrait être d'obtenir une plus grande libéralisation et un meilleur accès au marché pour les exportateurs canadiens—pour les entreprises canadiennes qui investissent et exercent leurs activités à l'étranger. Ce n'est pas uniquement parce qu'il est plus important que jamais pour les entreprises canadiennes d'exporter à l'étranger; c'est parce que nous nous-mêmes investissons de plus en plus dans le monde.

Permettez-moi de rappeler à votre mémoire le rapport publié par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international le 25 mars dernier et qui portait sur les priorités relatives à l'ouverture des marchés. Il s'agit d'un document d'une grande importance qui fait état des principaux problèmes aujourd'hui sur les marchés extérieurs. C'est un bon point de départ pour recenser certains des obstacles techniques, non tarifaires, et les obstacles tarifaires au commerce.

L'autre objectif d'une importance capitale, c'est d'égaliser les chances pour le Canada. Le traitement non discriminatoire des exportations et des investissements canadiens est un problème qui se rencontre partout au pays. La solution, ce n'est pas uniquement de se donner des règles, mais de s'assurer que les règles négociées dans un cadre multilatéral sont bien transparentes et appliquées.

Voilà les trois grands éléments en ce qui concerne l'élaboration des règles. Je le rappelle: les négociations de l'OMC ne servent pas uniquement à négocier l'ouverture des marchés, c'est l'occasion d'élaborer des règles et de s'assurer qu'elles sont bien appliquées.

Je vais demander à Pamela de vous exposer brièvement les principales recommandations issues de la consultation de nos membres partout au pays.

Mme Pamela Fehr (analyste des politiques, Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Canada): Merci, Jay.

Grâce à des nombreuses consultations auprès de nos membres, comme Jay l'a dit, l'alliance a constitué une liste de recommandations, que je vais maintenant vous exposer. Je vais les énumérer rapidement.

L'ampleur du cycle du millénaire est une question qui revient souvent aujourd'hui dans les milieux chargés de la politique commerciale. L'alliance a quelques observations à faire sur ce point.

Premièrement, nous estimons que le cycle du millénaire ne devrait pas être un cycle marathon, mais plutôt une négociation rapide qui aboutirait, espère-t-on, en moins de trois ans. Elle ne devrait pas porter exclusivement sur l'agriculture et les services, dont ce sera le tour l'an prochain, mais être de portée plus générale, ce qui donnerait au Canada la marge de manoeuvre nécessaire pour obtenir des résultats favorables à tous les secteurs.

Il a beaucoup été question du règlement des différends cette année. L'alliance a quatre recommandations à ce propos. Premièrement, il faut trouver une solution aux problèmes de mise en oeuvre de l'OMC. Il faudrait lever l'incertitude qui plane sur certains articles du mémoire relatif au règlement des différends.

Ce mémoire devrait d'ailleurs être modifié, de sorte que les litiges concernant les mesures destinées à appliquer les décisions de l'instance d'appel puissent être tranchés rapidement et efficacement.

L'emploi injustifié de recours commerciaux, une forme de protectionniste, cause aussi des difficultés et devrait être réglé.

Enfin, et par-dessus tout, l'OMC devrait produire un ensemble de principes et de lignes directrices destinés à régir la méthode de règlement des différends.

La facilitation de l'activité commerciale est essentielle au bon fonctionnement d'une économie productive. Il y a une ou deux choses sur lesquelles l'alliance voudrait attirer votre attention.

Premièrement, les droits de douane actuels devraient être abaissés ou supprimés. Le calendrier de réduction des droits devrait être raccourci.

Deuxièmement, il y a énormément de formalités administratives autour du dédouanement et des documents exigés à la douane partout dans le monde, et nous sommes d'avis qu'il faut les faire disparaître. Les pays membres devraient aussi se concerter pour moderniser leur système de douane, ce qui accélérerait le mouvement des marchandises.

L'Accord général sur le commerce des services est un sujet qui intéresse au plus haut point les membres de l'alliance. En général, l'AGCS devrait voir son application élargie à une plus vaste gamme de services. Il faut améliorer les règles afin d'éviter que les entreprises canadiennes soient victimes de discrimination, surtout en ce qui concerne les soumissions et les marchés publics.

L'AGCS devrait s'étendre aux sanctions visant le commerce déloyal et permettre d'appliquer le traitement national à un éventail plus vaste de services, ce qui suppose évidemment une liste d'exceptions plus courte.

Enfin, l'AGCS devrait aussi englober la libre circulation des professionnels et des spécialistes.

Les télécommunications et les technologies de l'information revêtent une importance particulière pour une économie de plus en plus alimentée par la technologie sous toutes ses formes. En général, l'Entente sur les télécommunications de base doit être approfondie, élargie et appliquée à un plus grand nombre de membres de l'OMC. Plus particulièrement, l'alliance estime que le Canada doit arriver à obtenir un véritable accès pour les fournisseurs de services de télécommunications canadiens en échange de l'élimination ou de la réduction des restrictions que le Canada impose aux investissements. Il est question ici des fournisseurs de services de télécommunications qui exploitent des installations.

• 0920

Nous proposons que les dispositions s'appliquent également aux marchés de l'État de façon à inclure les services de télécommunications et que de nouvelles obligations soient définies pour les membres dans le domaine des marchés de services de télécommunications.

Le commerce électronique revêt une importance croissante pour les entreprises canadiennes. L'alliance est d'avis qu'il importe que la communauté internationale élabore une série de règles pour garantir la libéralisation du commerce électronique et éviter des restrictions injustes ou discriminatoires dans d'autres marchés. En vertu des principes actuels qui régissent le commerce électronique, ce dernier relève de divers domaines dans le cadre de l'OMC, et nous estimons que le commerce électronique est un domaine plus vaste qu'on ne peut pas nécessairement limiter à tous ces secteurs et qu'il faudrait le considérer comme une question prioritaire à envisager lors des prochaines négociations.

À notre avis, le commerce électronique est la base des transactions commerciales de demain. Il est essentiel que les participants à la réunion ministérielle de Seattle soient conscients de l'importance de ce secteur. En outre, l'alliance souhaite qu'une déclaration soit faite à l'issue de cette rencontre en vue de prolonger ou de confirmer de façon permanente le maintien du statu quo visant les droits de douane qui s'appliquent au commerce électronique et aux transmissions numériques.

L'agriculture est évidemment l'une des questions les plus litigieuses pour le Canada lors du prochain cycle de négociations. La levée des barrières tarifaires et non tarifaires dans le secteur de l'agroalimentaire est essentielle pour accroître l'accès aux marchés. Il faut imposer des limites plus strictes à l'utilisation de mesures de protection spéciales sur les marchés étrangers et il importe de réduire les subventions aux exportations. Il est dans l'intérêt du Canada de restreindre encore le niveau des mesures de soutien intérieur autorisées, et nous estimons également que le Canada devrait jouir d'une certaine marge de manoeuvre en matière de tarification dans le secteur de la gestion de l'offre.

Enfin, il importe de faire en sorte que les éléments techniques et scientifiques du commerce extérieur, comme les mesures sanitaires et phytosanitaires, ne soient pas utilisés comme des obstacles techniques au commerce. C'est d'une importance cruciale pour nos membres qui représentent l'agriculture et l'agroalimentaire.

La transparence est une question prédominante à l'OMC, comme l'a dit Jayson dans son introduction. L'alliance fait quelques propositions précises à ce sujet. Tout d'abord, vous savez sans doute déjà que, dans une loi adoptée en février dernier, le Canada reconnaît la convention de 1997 de l'OCDE sur la corruption des fonctionnaires étrangers. À notre avis, tous les membres de l'OMC devraient reconnaître cette convention, ce qui serait un résultat positif des négociations de l'OMC.

La transparence dans l'octroi des marchés de l'État est également essentielle, et toute initiative tendant à cette fin doit être poursuivie. Enfin, il faut engager des ressources pour la formation et l'aide aux pays en développement ainsi qu'aux pays membres de l'OMC qui sont moins bien financés, afin d'en arriver à de meilleures règles régissant les marchés publics et réprimant les manoeuvres frauduleuses.

L'investissement—l'ajout de l'investissement à l'ordre du jour des discussions de l'OMC doit avoir la plus haute priorité. Le Canada doit élaborer une stratégie de négociation qui garantisse que la question sera réglée de façon à obtenir l'appui voulu au niveau national et international, pour qu'on puisse faire de réels progrès dans ce domaine. Il importe d'adopter une stratégie qui vise à établir des règles tout en protégeant les secteurs véritables de la législation et de la réglementation gouvernementales.

Dans les domaines plus précis relevant de l'investissement, nos membres estiment que le principe de l'expropriation doit être mieux défini lors des prochaines négociations, et qu'il faudra traiter de certains aspects des dispositions relatives à l'État investisseur, comme le secret et le manque de transparence. Les obstacles techniques au commerce augmentent à mesure que les barrières tarifaires tombent. Certaines dispositions d'importance cruciale ont été adoptées en vertu de l'actuel accord sur les obstacles techniques au commerce, mais il faudrait les renforcer et les élargir.

En premier lieu, il est essentiel que les pays n'aient pas recours aux exigences techniques à la place de droits de douane pour protéger leurs industries nationales. En second lieu, les principes de l'harmonisation et des exigences techniques, l'équivalence des règlements et la reconnaissance mutuelle sont les éléments de l'actuel accord sur les obstacles techniques aux commerces qui intéressent les exportateurs. À notre avis, lors des prochaines négociations, il faudra examiner ces aspects en vue de les renforcer et de les mettre en vigueur.

• 0925

Enfin, la politique et le droit de la concurrence représentent un secteur extrêmement complexe, comme nous le savons tous. L'alliance estime qu'il ne faut plus essayer de s'entendre sur le fond des règles sur la concurrence et des recours dans ce domaine, mais essayer plutôt d'élaborer une série de principes et de directives clairs qui permettront d'appliquer ces règles de façon transparente et équitable.

Les pays industrialisés devraient également s'engager à fournir une aide financière et d'autres formes d'aide aux pays en développement, pour faciliter leur transition vers la libéralisation totale des échanges.

Je vais demander à Jay Myers de traiter de quelques autres questions et de conclure.

M. Jayson Myers: Très brièvement, j'aimerais faire trois remarques au sujet du processus de négociation.

Premièrement, il est extrêmement important qu'en établissant les objectifs des négociations, le gouvernement canadien se fasse le champion non seulement de l'accès aux marchés mondiaux, mais également de l'adoption de règles et de leur mise en oeuvre. Je ne saurais trop insister sur ce point.

Nous savons très bien que ce cycle de négociations de l'OMC ne sera pas semblable au cycle précédent. Il ne s'agira pas simplement d'un groupe de délégués commerciaux qui négocient ces accords au nom des divers gouvernements en cause. Il faudra non seulement tenir compte des intérêts des entreprises, mais également gagner l'appui du public, faute de quoi cette série de négociations sera vouée à l'échec.

Nous en sommes parfaitement conscients. Et même si nous estimons que le fait de gagner l'appui de la population est un aspect très important du processus et qu'il faudra clairement lui faire comprendre les avantages de l'accès public, nous admettons également que les problèmes liés à l'environnement, à la main- d'oeuvre, aux droits de la personne font partie intégrante de ce processus d'obtention de cet appui public. À notre avis, le gouvernement du Canada devrait s'efforcer d'élaborer des solutions gagnantes et la question de la transparence est d'une extrême importance.

La mise en place de règles transparentes et plus efficaces présente des avantages pour tous. Tout le monde est gagnant lorsque les pays appliquent efficacement les règlements environnementaux qu'ils ont établis. Cela devrait être la pierre angulaire de la position du Canada. Là encore, le Canada aurait tout à gagner de défendre le principe de la transparence.

En second lieu, il est extrêmement important de faire participer le plus grand nombre de pays en développement possible au processus. Nous savons que les pays en développement ont d'énormes problèmes au niveau des ressources et des moyens techniques et il serait dans l'intérêt du Canada de fournir une aide à ces pays pour les aider à se préparer en vue des discussions qui porteront sur toute une gamme de problèmes, mais en s'assurant qu'ils reçoivent l'appui voulu et qu'ils comprennent parfaitement toutes ces questions.

Enfin, si le Canada souhaite obtenir d'autres engagements de la part des pays en développement, il est essentiel que notre pays et les autres pays industrialisés soient en mesure de donner suite aux engagements pris lors des séries précédentes de négociations de l'OMC. C'est un autre aspect d'une importance extrême.

Merci beaucoup.

Le président: Merci, monsieur Myers.

Avant de donner la parole au témoin suivant, j'aimerais demander à mes collègues du comité si nous pouvons profiter de ce qu'il y a quorum pour interrompre un instant les témoignages et adopter notre budget.

Je tiens à dire aux représentants de l'Alliance des manufacturiers et aux autres témoins présents que tous ces principes d'ouverture et de transparence que vous préconisez si chaleureusement s'accompagnent de certaines dépenses de fonds, et il faudra donc se pencher sur la question.

[Français]

Au verso de notre ordre du jour, vous trouverez les détails du budget. Il y a 32 000 $ pour nos deux experts, 20 000 $ pour nos autres témoins, un total de 26 000 $ pour l'impression de deux rapports, l'un sur l'OMC et l'autre sur la ZLEA, et diverses autres dépenses, pour un total de 80 000 $.

[Traduction]

Quelqu'un a-t-il des questions ou des remarques ou des problèmes à ce sujet? Ce n'est pas un budget pour les déplacements. Il s'agit tout simplement du budget d'administration.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le président, ne va-t-on faire aucune publicité? Je ne vois aucun budget pour la publicité. Nous n'allons pas annoncer la tenue des audiences dans tout le pays?

Le président: À l'heure actuelle, nous utilisons les listes des journalistes et nous envoyons par télécopieur dans tout le pays les renseignements concernant les audiences, dans l'espoir que les journalistes en feront état dans leurs articles.

• 0930

Lorsque nous avons effectué l'examen des Affaires étrangères il y a quelques années, nous avons constaté que le coût de la publicité, surtout dans les journaux nationaux, était vraiment prohibitif. Cela nous aurait coûté dans les 50 000 $ à 60 000 $ uniquement pour les annonces publicitaires. Dans le cas de nos déplacements dans la partie est du pays, nous avons donc décidé de ne pas faire passer d'annonce dans les principaux journaux. Cela dépasse de loin nos moyens budgétaires. Vous vous souvenez sans doute qu'il existe un budget global de deux millions de dollars pour tous les comités de la Chambre. En ma qualité de président du comité de liaison, je suis bien placé pour savoir que nous allons épuiser ce budget assez rapidement cette année.

[Français]

M. Daniel Turp: Surtout que cela va dans les coffres de Conrad Black.

[Traduction]

M. Charlie Penson: Comment cela s'est-il passé pour les audiences dans la région de l'Atlantique? A-t-on réussi à joindre ceux qui voulaient témoigner?

Le président: Demandons à Mme Bulte. C'est elle qui a présidé aux audiences dans cette région. Je vous dirai ensuite brièvement comment cela s'est passé au Québec.

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Désolée, monsieur Penson, je n'ai pas entendu ce que vous avez dit.

Le président: M. Penson a demandé pourquoi le budget ne prévoit pas de fonds pour faire connaître les audiences du comité. Je lui ai dit que c'est très cher. Il nous a alors demandé s'il y avait eu beaucoup de monde aux réunions dans la région de l'Atlantique. Estimez-vous que les gens ont été suffisamment informés de la tenue de la réunion pour pouvoir y participer?

Mme Sarmite Bulte: Dans le groupe qui s'est rendu dans les provinces de l'Atlantique, le consensus est que les gens auraient pu être prévenus plus à l'avance. Je pense que c'était plutôt une question de préavis que de publicité. On essaie de régler le problème pour la prochaine série d'audiences. Le préavis a été trop court.

En tout cas, nous avons dit aux témoins qui sont venus qu'ils pouvaient nous faire parvenir des mémoires et nous les avons invités à le faire savoir autour d'eux. C'est un message que nous avons répété haut et fort avec les journalistes.

Le problème, c'était les délais trop courts, par opposition à un manque de publicité. M. Turp pourra...

M. Daniel Turp: Je suis d'accord.

Le président: À Québec, le préavis aurait pu être plus long. Nous n'avons pas eu autant de participants que nous aurions voulu à Québec. Je ne pense pas me tromper en disant cela. Mais rendus à Saint-Hyacinthe et à Montréal, en tout cas, les gens savaient que nous venions. Si nous étions restés un jour de plus à Montréal, d'autres groupes de citoyens seraient peut-être venus. Essentiellement, les trois derniers jours d'audiences ont été un succès. Le premier jour n'a pas connu le succès que nous aurions voulu.

Avec un plus long préavis, ce sera mieux la prochaine fois. Il y a des gens qui sont intéressés. Toutes les associations qui sont ici aujourd'hui sont au courant des audiences et en informent leurs représentants locaux. Nous avons informé les députés de chaque ville, ainsi que les parlements provinciaux. Nous avons communiqué avec les présidents d'assemblée et contacté divers députés provinciaux. Un communiqué est affiché au site Web et a aussi été transmis aux médias parlementaires. Nous utilisons aussi les réseaux de divers groupes, comme le Conseil des Canadiens, CICC.

Nous sommes donc bien au courant du problème. Vu les autres restrictions qui existent, comme la réduction du nombre de députés qui peuvent voyager, je pense qu'il serait inacceptable de dépenser 60 000 $ en publicité alors que le comité a décidé de ne pas laisser voyager certains de ses propres membres à cause des frais que cela occasionne.

M. Charlie Penson: La seule chose qui m'embête, monsieur le président, c'est que si nous voulons tout faire pour informer la société civile de notre tournée et si nous tenons à ce qu'elle participe, nous devons trouver la meilleure façon possible de faire venir ses représentants. Si l'on peut y arriver au moyen de communiqués et d'annonces aux médias, je veux bien. J'ai seulement été un peu étonné de voir qu'il n'y avait pas de fonds pour la publicité.

Le président: Vous aviez raison de soulever la question, monsieur Penson.

La greffière me dit que la liste des comparutions se remplit très rapidement; les gens sont au courant et il ne semble pas que nous serons à court de témoins dans l'Ouest ou en Ontario.

Cela dit, le budget est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le président: Le budget est approuvé.

Le recrutement de M. Maule et de M. Hines est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le président: Je m'excuse d'avoir interrompu les témoins, mais il faut parfois saisir l'occasion au vol, lorsque les députés sont ici.

Je donne maintenant la parole à M. Lippert, de l'Institut Fraser.

• 0935

M. Owen Lippert (directeur, Droit et projets de marché, Institut Fraser): Bonjour et merci de m'avoir invité à prendre la parole ici aujourd'hui.

Pour vous décrire brièvement l'Institut Fraser, il s'agit...

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): On nous a remis une copie en anglais du document de M. Lippert. Y a-t-il une copie en français de disponible?

Le président: Y a-t-il une copie en français de votre déposition?

[Traduction]

M. Owen Lippert: Non, je suis désolé. Je m'en excuse.

[Français]

Le président: Le comité en fera faire la traduction. Merci.

[Traduction]

M. Owen Lippert: Merci encore, et je m'excuse de pas avoir apporté une version française de mon texte.

L'Institut Fraser célèbre cette année son vingt-cinquième anniversaire. Il s'agit d'un organisme de bienfaisance enregistré dans le domaine de l'enseignement, qui a son siège à Vancouver. Nous avons toutefois des membres ailleurs.

Aujourd'hui, je voudrais parler des priorités du Canada lors des prochaines négociations de l'Organisation mondiale du commerce. Plus particulièrement, j'aimerais discuter des priorités que devrait se fixer le Canada dans le secteur des droits de propriété intellectuelle. J'esquisserai aujourd'hui une position que le Canada pourrait piloter lors de ces négociations.

Avant d'entrer dans les détails, j'aimerais souligner que le but ultime de ces pourparlers internationaux sur les DPI, les services et quantité d'autres questions relatives au commerce est l'instauration d'une économie mondiale libre et unifiée.

Il y a plus de 200 ans, à l'époque de la publication de la Richesse des nations d'Adam Smith, l'idée du libre-échange a acquis un statut intellectuel sans précédent dans la théorie économique. Certes, des critiques ont contesté la validité du libre-échange, mais chaque tentative de miner sa validité universelle a échoué, en butte à des réserves et à des considérations dynamiques.

La vigueur du libre-échange découle du principe que, tout comme les particuliers profitent de l'échange volontaire de produits et services entre eux, les États également profitent de l'échange de produits et de services entre eux. Les gains du commerce découlent de la division du travail et de la spécialisation des travailleurs et des pays dans la production de certains produits et services. À chaque étape, la production qui en résulte crée une plus grande aisance et une plus grande richesse.

Je pense qu'il y a lieu de s'attarder sur cela un instant: il ne s'agit pas seulement de vendre des produits, des avions ou quoi que ce soit d'autre; il s'agit plutôt de l'effet de cette activité sur la transformation de l'économie.

Les prochaines négociations sur les droits de propriété intellectuelle lors du nouveau cycle de pourparlers mondiaux sur le commerce sont forcément la reprise de la tâche inachevée des accords précédents. Par suite des efforts des pays industrialisés, dont le Canada, le cycle d'Uruguay a institué une série distincte de discussions destinées à établir des normes minimales de protection des droits de propriété intellectuelle parmi les États signataires du GATT. Ces pourparlers ont abouti à terme à l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, l'ADPIC.

La teneur de l'ADPIC a été examinée de près. La plupart des observateurs s'entendent pour dire qu'il s'agit d'un tout. Les États-Unis sont censés ouvrir l'accès à leur marché et exercer des pressions sur la Communauté européenne pour qu'elle en fasse autant dans le secteur de l'agriculture et des textiles et, en contrepartie, un grand nombre de pays en développement sont censés accepter une norme internationale de protection des droits de propriété intellectuelle.

L'ADPIC, fondé sur les principes des conventions de Paris et de Berne—sur les brevets et le droit d'auteur—, obligeait les signataires à adhérer à un minimum international de normes de protection pour tous les domaines de la propriété intellectuelle: les brevets, les marques de commerce, les droits d'auteur. Deuxièmement, l'accord exigeait des mesures d'application efficace, à la frontière et à l'intérieur des pays. Troisièmement, les signataires devaient accepter les dispositions de règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce. C'était un choix déterminant, de faire trancher les différends à l'OMC plutôt qu'à l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle.

La perspective de l'ADPIC a contribué à motiver les Américains à appuyer le cycle d'Uruguay. Sans le soutien du gouvernement américain, le cycle d'Uruguay aurait fort bien pu se solder par un échec. Même si certains pays en développement ont mis en doute le prix que leur a coûté l'ADPIC en souveraineté économique perdue, les gains attribuables à l'ouverture des marchés se sont avérés irrésistibles, surtout si l'on songe à ce qu'auraient pu faire les États-Unis.

• 0940

Vous vous souviendrez que cela était aussi la situation du Canada—je vais en discuter—qui a modifié ses lois de propriété intellectuelle surtout au moyen du projet de loi C-91 en 1993 pour tirer profit de l'ADPIC.

Il serait trompeur et infructueux de décrire les futures négociations de propriété intellectuelle uniquement comme une tentative des États-Unis et d'autres pays industrialisés d'arracher des concessions à des voisins réfractaires dans le monde en développement. Un grand nombre d'États renforcent actuellement leurs droits de propriété intellectuelle pour des raisons purement intérieures et, en cela, le Canada sert de modèle. En effet, je peux vous dire incidemment que l'Institut Fraser tiendra des conférences sur les droits de propriété intellectuelle la semaine prochaine à Santiago au Chili et à Buenos Aires.

L'ADPIC était un accord révolutionnaire, ce que nul ne conteste. Toutefois, une grande partie du texte est exagérément vague et complexe. La réussite de l'accord, c'est la reconnaissance qu'il existe une norme internationale et non la formulation définitive de ces normes. On pourrait dire que le texte lui-même est de nature défensive. Ses articles peignent la diversité actuelle des régimes de DPI, les nivelant par le haut plutôt que par le bas, et appliquent au tableau une disposition de statu quo. L'utilité de l'ADPIC pour les négociateurs américains, européens et canadiens était plus d'empêcher les pays en développement de miner davantage la protection des DPI et moins de réviser substantiellement à la hausse les normes de DPI. On voit donc vers quoi s'orientent les futures négociations.

Des problèmes de libellé et de fond sont restés en suspens. Par exemple, il reste à voir quelles restrictions seront imposées à la concession de licences obligatoires; la portée des contrôles sur les prix, en particulier pour les produits pharmaceutiques; que faire lorsqu'un brevet expire dans un pays mais non dans un autre, ce que l'on appelle le problème des importations parallèles; et comment assurer une meilleure application des règles à la frontière. D'autres questions ont été écartées faute d'information ou de consensus: les signaux satellites chiffrés, le brevetage d'organismes vivants et les bases de données commerciales. Il y a en outre les notions d'investissement significatif, d'intérêts légitimes de tierces parties et de limitation des recours, ainsi que d'autres qualificatifs, comme substantiellement, raisonnablement et légitime.

Le Canada et les pays en développement avec lesquels nous voulons multiplier nos échanges ont tout à gagner d'une définition rapide de ce qui pourrait être une norme mondiale optimale. Pour les pays en développement—et, d'une certaine façon, pour le Canada également—, l'avantage réside dans la réduction de l'incertitude de la politique intérieure et dans l'atténuation des conflits commerciaux internationaux créés par le flou des obligations en matière de DPI.

On perdrait une belle occasion si l'on ne se penchait pas lors des futurs pourparlers sur la définition d'une norme mondiale optimale. Ce ne sera pas chose aisée, mais je pense que c'est possible vu l'intérêt pour la question et la tournure que prend notre économie. À tout le moins, les prochains pourparlers de l'OMC devraient faire en sorte que l'on ne revienne pas en arrière, vers l'idée de normes DPI distinctes, une pour le monde industrialisé et une autre pour le monde en développement. Agir de la sorte consacrerait en droit international un modèle de dépendance superficiellement protecteur et au bout du compte débilitant.

Le modèle des nouveaux pourparlers de l'OMC devrait en fait être l'ALENA conclu par les États-Unis, le Canada et le Mexique. Le traité devrait servir de point de départ et l'on ne devrait pas chercher à en produire une copie conforme.

Si les prochaines négociations doivent chercher à obtenir des normes plus élevées que l'ADPIC ou l'ALENA, que devraient-elles être? Ce qu'il faut bien comprendre à propos de tous ces accords, c'est que dans le fond ils viennent modifier l'ampleur des exceptions autorisées. L'ADPIC et l'ALENA ont beaucoup de similitudes, mais le texte de l'ALENA autorise moins d'exceptions que celui de l'ADPIC. Il devrait y avoir donc moins d'exceptions.

• 0945

L'exception la plus connue au traitement national dans l'ALENA est dans le domaine culturel. Depuis longtemps l'Institut Fraser et de nombreux autres commentateurs économiques jugent suspecte cette exception culturelle. Je ne m'étendrai pas sur ce sujet en état de mouvance—je songe aux revues à tirage dédoublé—, mais l'on voit bien que ce ne serait pas l'idéal si le Canada tient à créer une exception pour la culture qui vienne compromettre l'appui général en faveur du libre-échange.

L'ALENA—je l'explique dans mon mémoire—comporte plusieurs objectifs précis. J'aimerais brièvement énumérer les principales questions qui nous attendent, notamment: les licences obligatoires, les exceptions culturelles, les protections courantes, qui portent sur l'exclusivité des données, souvent pour les produits pharmaceutiques; le brevetage des organismes vivants évolués; les systèmes de réseau d'information; les secrets de fabrication et l'épuisement géographique des droits, et peut-être pourrons-nous même aborder la question des regroupements plus régionaux de spécialistes de la propriété intellectuelle. Si ces questions étaient tranchées dans ce qu'il faudrait appeler le paradigme néoclassique du moins grand nombre d'exceptions possible, nous pourrions très prochainement instaurer une nouvelle et plus rigoureuse norme internationale de droits de propriété intellectuelle.

Le Canada a l'occasion unique de mener ces négociations mondiales. Forts de l'expérience acquise lors de la modernisation de nos propres normes en 1993, nous sommes à même de mener ces négociations. De fait, la compétence du Canada est telle que l'ACDI et le ministère des Affaires étrangères aident ou songent à aider d'autres pays à négocier, notamment ceux des Antilles.

Il y a aussi des raisons concrètes pour renforcer les droits de propriété intellectuelle. L'économie canadienne a changé. Lorsqu'on regarde les murs des salles de comité, comme celle-ci, on a l'impression que le Canada est, comme l'on disait, un pays de porteurs de bois et de coupeurs... Comment on dit, déjà?

Le président: Coupeurs de bois.

M. Owen Lippert: Oui, coupeurs de bois.

Le président: Et de porteurs d'eau.

M. Owen Lippert: C'est ça.

Mais l'économie canadienne a changé. Environ 60 p. 100 de l'économie canadienne est maintenant faite de services. Des pans entiers de notre économie reposent sur la propriété intellectuelle et nous avons des marques à défendre, qu'il s'agisse de produits pharmaceutiques, de logiciels ou d'appareils Bombardier. Le Canada a donc tout à gagner en renforçant le plus possible le régime international des droits de propriété intellectuelle. Nous nuisons à nos propres intérêts lorsque nous nous accrochons à des exceptions qui, honnêtement, sont souvent de nature douteuse et sapent l'appui de la population en faveur de ces accords commerciaux internationaux. Cela ne s'applique pas uniquement aux magazines; cela touche aussi les politiques sur nos produits pharmaceutiques et la protection de nos bases de données commerciales.

Pour terminer, il faudra que le Canada réfléchisse sérieusement à ces questions s'il ne veut pas être laissé en plan lors du prochain cycle de l'OMC ou même pendant la série actuelle de négociations sur la zone de libre-échange des Amériques.

Voilà qui clôt mon exposé. Je serai heureux de répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Lippert. J'ai eu un peu peur lorsque j'ai vu que le titre de votre mémoire était: «Une visite chez le dentiste, ça suffit». Je suis heureux que vous ayez évité cette partie de votre mémoire. Merci.

Je donne maintenant la parole à Mme Bradford de Téléglobe.

• 0950

[Français]

Mme Meriel V.M. Bradford (vice-présidente, Relations avec le gouvernement et l'extérieur, Téléglobe Inc.): Merci, monsieur le président. Mesdames et messieurs les députés, bonjour. Je m'appelle Meriel Bradford et je suis vice-présidente aux relations gouvernementales et extérieures à Téléglobe Inc. Je vous remercie beaucoup de nous avoir invités à comparaître devant votre comité pour parler des priorités du Canada en matière de politique commerciale et de l'importance que revêt cette politique pour notre secteur d'activité.

[Traduction]

J'aimerais d'abord vous parler un peu de notre compagnie, Téléglobe. Comme la poule et le cochon, l'un a contribué au petit déjeuner et l'autre en a fait les frais. Nous avons fait les frais du petit déjeuner. Nous étions le cochon en ce sens que nous étions un monopole et ce monopole a été sacrifié sur l'autel de la libéralisation du commerce.

Téléglobe est une compagnie de télécommunications mondiale ayant son siège au Canada, qui répond aux besoins de connexité de télécommunicateurs, de serveurs Internet, de sociétés multinationales et de radiodiffuseurs dans le monde entier. Notre siège administratif et le centre de notre activité sont à Montréal et, par l'intermédiaire de notre filiale, Corporation Téléglobe Communications, nous possédons et exploitons un réseau de satellites et de câbles sous-marins qui relient 240 pays. Ce réseau est le deuxième au monde pour ce qui est de l'utilisation de câbles sous-marins optiques. En 1998, nous avons acheminé 15,5 milliards de minutes de télétrafic, par rapport à deux milliards en 1994. Nous avons également augmenté notre effectif de 200 personnes au Canada, portant ainsi à 5 350 employés notre main-d'oeuvre totale. Notre valeur boursière est d'environ 11,5 milliards de dollars canadiens aujourd'hui.

Le 1er octobre 1998, nous avons cessé d'être un fournisseur d'installations de télécommunications intercontinentales ayant un monopole commercial officiel au Canada. Au début de 1995—je sais qu'il est difficile pour certains d'aller aussi loin en arrière—, nous avions en effet demandé au gouvernement du Canada de mettre un terme à ce monopole pour que nous puissions nous concentrer sur notre expansion à l'échelle internationale et devenir concurrentiels sur les marchés mondiaux. C'est ce qui explique mon analogie avec le cochon et la poule. Nous avons été le bacon qui a été servi au petit déjeuner. Nous l'avons même demandé.

La libéralisation au Canada a été pour nous une expérience extrêmement positive. Après la conclusion de l'Entente sur les télécommunications de base en 1997, dans le cadre de l'OMC, la déréglementation intérieure des télécommunications tant au Canada que dans les autres pays nous a permis de pénétrer de nouveaux marchés, de mobiliser de nouveaux investissements dans les infrastructures à l'étranger et de devenir une entreprise véritablement internationale. Nous possédons maintenant des licences pour vendre ou revendre des services nécessitant le recours à des installations dans plus de 23 pays, aux États-Unis, en Europe, en Amérique latine et en Asie.

Téléglobe exploite l'un des plus vastes réseaux au monde et est un concurrent de taille de compagnies comme AT&T et MCI- WorldCom dans plusieurs domaines, notamment pour l'acheminement des communications Internet internationales. Depuis notre récente fusion avec Excel Communications, nous sommes reconnus comme étant l'un des cinq grands télécommunicateurs interurbains aux États- Unis. Je dois vous dire que notre réussite sur les marchés internationaux est en grande partie attribuable à la libéralisation des télécommunications et aux efforts déployés par notre gouvernement pour ouvrir les marchés à l'étranger.

Nous appuyons sans réserve la participation active du gouvernement du Canada aux prochaines séries de négociations de l'OMC, non seulement pour les avantages que cela présentera pour le secteur des télécommunications, mais aussi parce qu'il s'agit d'un mécanisme d'ouverture des marchés pour tous les secteurs de l'activité économique canadienne qui dépendent des marchés internationaux. Après tout, tous ces secteurs sont nos clients et nous ne pouvons que bénéficier de leur croissance.

Je tiens par ailleurs à ajouter que la libéralisation a été une expérience très positive pour le Canada, puisqu'elle a favorisé l'innovation dans l'industrie des télécommunications. Les prix de détail de l'interurbain continuent de baisser sous l'impulsion d'une plus grande concurrence et tous les clients, particuliers comme entreprises, en bénéficient. Pour avoir participé activement aux discussions sur la politique commerciale, nous sommes conscients que la prospérité économique du Canada repose essentiellement sur le commerce international et que la technologie de l'information et des télécommunications sera, dans l'avenir, la pierre angulaire de l'emploi, de la productivité et du bien-être économique du pays.

S'il est évident que les services financiers et l'agriculture seront au centre des discussions de la prochaine série de négociations de l'OMC, nous exhortons tout de même le gouvernement du Canada à accorder la priorité aux télécommunications pour les futures libéralisations.

Permettez-moi de dire quelques mots à propos de l'Entente sur les télécommunications de base.

• 0955

Malgré les progrès réalisés dans le domaine de la libéralisation en vertu de l'ETB, le commerce des télécommunications à l'étranger continue de se heurter à des obstacles gouvernementaux considérables, obstacles dont le retrait pourrait nous conférer des avantages économiques. Certes, l'ETB est relativement récente puisqu'elle n'est en place que depuis 1997, mais des télécommunicateurs avec monopole continuent de dominer dans la plupart des marchés. À la fin de 1998, près de 85 p. 100 du télétrafic mondial était encore acheminé par des télécommunicateurs monopolistiques dont beaucoup appartiennent encore à l'État.

L'ETB a été un bon point de départ pour mettre un terme aux monopoles, instituer les principes réglementaires et pour obtenir les engagements fondamentaux nécessaires à l'instauration de la concurrence dans les télécommunications de base. Lors de la prochaine série de négociations, il faudra selon nous aller plus loin encore et veiller à ce que ces engagements soient effectivement réalisés. Il faudra pousser la libéralisation dans de nombreux pays, comme au Mexique, en Inde, au Brésil et dans la majorité des pays des Antilles qui ne se sont pas engagés à libéraliser les télécommunications de base ou qui n'ont fait que de petites concessions. En réalité, il nous reste à franchir d'importants obstacles pour parvenir à tirer tous les avantages d'une concurrence pleine et entière. Ainsi, le Canada devra axer ses futures négociations commerciales sur l'adoption de mesures qui nous garantiront une véritable concurrence et un accès réel aux marchés.

Prenez la question des restrictions imposées aux investissements étrangers, qui continuent de barrer l'accès aux marchés de bien des pays, notamment du Canada. Le Mexique, membre de l'ALENA, et un important partenaire commercial du Canada, continue de limiter à 49 p. 100 la propriété étrangère des télécommunicateurs nationaux et internationaux. En pratique, cela veut dire qu'afin de pénétrer sur ce marché, les nouveaux arrivants comme Téléglobe doivent s'associer à des entreprises mexicaines, mission difficile vu la rareté des candidats. Même quand on parvient à trouver le bon associé, les restrictions sur les investissements étrangers font que le partenaire mexicain contrôle le capital engagé et que le nouvel arrivant demeure un investisseur passif. Qui plus est, le Mexique ne propose aucune licence à la revente, allant jusqu'à exiger que les télécommunicateurs effectuent des investissements dans les infrastructures de télécommunication. Cela étant, nous exhortons le gouvernement du Canada, dans les futures négociations commerciales, à réclamer l'abolition des exigences relatives aux investissements étrangers pratiquées par plusieurs pays dans le domaine des services de télécommunications.

Nous avons des suggestions à faire pour améliorer l'accord actuel. En ce qui concerne le renforcement des principes réglementaires, nous touchons ici aux questions de transparence et de respect d'une procédure équitable, qui se trouvent actuellement dans le document de référence sur les principes réglementaires. Les questions épineuses pour nous sont celles relatives à l'interconnexion, le règlement des différends et la transparence souhaitée du processus réglementaire.

Deuxièmement, il y a les règles relatives aux investissements pour les télécommunicateurs qui administrent des installations; celles-ci doivent leur permettre de lancer leur propre entreprise sur les marchés étrangers sans avoir à s'associer à un partenaire local.

Voici quelques exemples de barrières non tarifaires qui continuent d'entraver la pénétration de nouveaux marchés: obtention de tarifs appropriés et processus transparent en ce qui concerne l'interconnexion—car beaucoup de temps et d'argent sont consacrés au règlement de ces questions—, ce qui, si les dispositions étaient plus claires dans l'accord, faciliterait l'accès aux marchés et permettrait d'éviter des notes inutiles d'avocats étrangers; marchés publics de services de télécommunications, puisque, comme notre collègue de l'alliance l'a dit, il s'agit d'un secteur important appelant une plus grande libéralisation; et possibilité sans discrimination pour les télécommunicateurs étrangers de soumissionner pour l'obtention de marchés publics.

Permettez-moi de dire un mot maintenant sur les mesures prises par le Canada. Comme je l'ai dit, à la suite de notre fusion récente avec Excel Communications, nous sommes devenus une entreprise mondiale dont le siège est à Montréal et nous sommes donc enracinés ici. Au Canada, toutefois, les installations internationales, comme les stations terrestres et les câbles sous- marins, peuvent être détenues à 100 p. 100 par des intérêts étrangers. C'est l'aboutissement des dernières négociations de l'OMC. Paradoxalement, toutefois, tant que nos règles régissant les investissements étrangers ne seront pas modifiées, Téléglobe n'aura pas le droit d'investir dans des installations canadiennes.

Le président: Pourquoi est-ce ainsi? Je ne comprends pas.

Mme Meriel Bradford: Les installations nationales doivent appartenir à des intérêts canadiens en vertu de la Loi sur les télécommunications, qui n'autorise que 20 p. 100 de participation étrangère dans une installation canadienne.

Le président: Et Téléglobe n'appartient pas à des intérêts canadiens, c'est bien cela?

Mme Meriel Bradford: Téléglobe appartient à des intérêts canadiens, mais il y a plus de 20 p. 100 de participation étrangère.

Le président: Plus de 20 p. 100? D'accord.

Mme Meriel Bradford: Cette politique a vu le jour en 1987. À l'époque, nous discutions de l'Accord de libre-échange. Avant 1987, il n'y avait pas de limite sur la proportion de participation étrangère. Le Canada a imposé cette politique en 1987 et l'a incorporée en 1992 à la Loi sur les télécommunications, qui a pris effet en 1993. Les restrictions sur la propriété étrangère ne remontent donc pas bien loin.

• 1000

La centralisation internationale permet aux télécommunicateurs de soutenir facilement la concurrence internationale et nationale sans devoir réaliser de gros investissements dans les infrastructures nationales. De même, les restrictions nous empêchent d'attirer des capitaux étrangers, pourtant essentiels pour que l'industrie des télécommunications soit concurrentielle.

Je voudrais maintenant parler brièvement du commerce électronique, l'expression à la mode un peu partout et dans tous les articles que l'on lit sur l'industrie et sur le nouveau cycle de négociations.

Il est évident que le commerce électronique sera un point important du programme des prochaines négociations. Il ne faut pas perdre de vue le lien étroit qui existe entre le commerce électronique, Internet et les services de télécommunications. Il ne faut pas oublier non plus que les services de télécommunications sont essentiellement une technologie habilitante pour toutes les applications Internet. Elles fournissent les infrastructures qui permettent d'offrir ce genre de service, le commerce électronique étant simplement un type d'application Internet, au même titre que de nombreux autres, comme la télémédecine, le téléenseignement, la recherche, la vidéoconférence et le courrier électronique.

Étant donné les liens étroits qui existent entre Internet et les services de télécommunications, il faut bien comprendre que toute initiative visant à étendre l'utilisation d'Internet et du commerce électronique dans les pays industrialisés et dans les pays en développement demeurera une pure vision de l'esprit tant que l'on ne disposera pas d'une politique adaptée garantissant que les services fondamentaux de télécommunications soient offerts à des prix concurrentiels. Je rappelle donc au comité que l'adoption du commerce électronique et d'Internet lui-même repose sur l'existence d'une infrastructure de télécommunication adaptée, surtout dans les pays en développement. L'expansion et la modernisation de l'infrastructure de télécommunication dans les pays en développement, afin de leur permettre de répondre à tous leurs besoins de télécommunications—communications vocales ou de données et transmission d'images—, exigent l'injection de capitaux importants.

Pour mobiliser davantage de capitaux destinés à l'investissement, pour améliorer la performance des compagnies de téléphone et pour répondre à la demande de services de télécommunications, plus étendus et de meilleure qualité, il faudra recourir davantage aux initiatives du secteur privé. Le meilleur moyen de favoriser l'amélioration des réseaux consiste à accroître la concurrence sur le marché intérieur des membres de l'OMC, car on augmente ainsi les investissements et l'on stimule l'adoption de technologies nouvelles dans les infrastructures locales. L'absence d'amélioration des réseaux dans de nombreux pays est largement attribuable à un faible niveau d'investissements étrangers, à une politique de tarification inappropriée—par exemple, à cause de frais d'interconnexion élevés—et à l'absence de cadre législatif et réglementaire clairement défini susceptible de promouvoir une véritable concurrence. Sauf erreur, la Banque mondiale et l'UIT se sont toutes deux penchées sur cette question stratégique importante.

À notre avis, une plus grande libéralisation des marchés des services de télécommunications et l'adoption de politiques nationales favorables à cette libéralisation faciliteront la transmission des données et encourageront la propagation du commerce électronique, ce qui se traduira forcément par un élargissement aux pays en développement des avantages économiques découlant des technologies de l'information.

En conclusion, le système de commerce multilatéral régi par les règles du GATT et maintenant de l'OMC a été essentiel à la prospérité économique du Canada, puisqu'il a permis aux entreprises canadiennes d'améliorer les liaisons commerciales en Amérique du Nord et avec les pays d'Europe, d'Amérique latine et d'Asie, tout en stimulant l'emploi au Canada. Le Canada ne peut se mettre à l'abri des tendances de l'économie mondiale, comme certains intervenants voudraient vous le faire croire. Notre pays doit continuer à respecter ses engagements multilatéraux et il doit entreprendre de façon dynamique les prochaines négociations commerciales dans le dessein de stimuler les secteurs qui sont importants pour l'économie globale et le bien-être social du Canada et qui permettront de promouvoir le développement de nos partenaires commerciaux.

En signant l'ETB, le Canada s'est engagé sincèrement à ouvrir son secteur des télécommunications à la concurrence en vertu de la clause NPF. Maintenant que nous avons apporté ce changement, qui nous a permis de disposer d'un des régimes de télécommunications les plus dynamiques et les plus libéraux du monde, régime caractérisé par des prix bas et un haut niveau d'innovation, le Canada devrait commencer à négocier avec les autres pays qui ne se sont pas encore véritablement engagés à ouvrir leur secteur des télécommunications en vertu des règles de multilatéralité de l'OMC.

Téléglobe espère maintenir le dialogue avec le gouvernement du Canada et continuer d'appuyer la position de notre pays dans les futures négociations.

[Français]

J'ai cinq points à vous soumettre en tant que résumé de notre position.

D'abord, la libéralisation des télécommunications a eu des effets bénéfiques pour Télégloble et pour le Canada en général.

• 1005

Deuxièmement, les télécommunications sont une technologie habilitante à laquelle le Canada devrait accorder une plus grande priorité dans les négociations commerciales.

Troisièmement, il faut tendre vers une plus grande libéralisation afin de maintenir le rythme des changements dans l'industrie des télécommunications et il faut amener davantage de pays à ratifier l'Entente sur les télécommunications de base.

Quatrièmement, l'abandon des restrictions d'acheminement au Canada et le fait qu'il soit désormais possible d'acheminer l'ensemble du télétrafic vers l'étranger par des connexions commutées semblent remettre en question la raison d'être du plafond de 20 p. 100 imposé sur les investissements directs étrangers et la limite de 33 p. 100 sur les avoirs étrangers, en vertu de la Loi sur les télécommunications.

Et cinquièmement, avant d'entreprendre l'utilisation de l'Internet et du commerce électronique dans les pays développés et dans les pays en voie de développement, il faut que les services de télécommunication utilisés à ces fins soient accessibles et offerts à des prix compétitifs.

Je vous remercie, monsieur le président, messieurs et mesdames les députés.

Le président: Merci, madame Bradford.

[Traduction]

Je suppose dans le cadre de votre témoignage, nous recevrons ultérieurement un exemplaire de l'ouvrage de M. Sirois, dûment autographié pour les membres du comité.

[Français]

Mme Meriel Bradford: Dédicacé comme il le faut.

Le président: Dédicacé au libre commerce et à notre comité.

Mme Meriel Bradford: Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Nous donnons maintenant la parole à Mme Logan, pour l'Association de la télévision spécialisée et payante.

Mme Jane Logan (présidente-directrice générale, Association de la télévision spécialisée et payante): Bonjour. Je m'appelle Jane Logan, et je suis présidente-directrice générale de la TVSP, l'Association de la télévision spécialisée et payante.

[Français]

C'est avec grand plaisir que je vous adresse aujourd'hui la parole au nom de l'Association de la télévision spécialisée payante, la TVSP. Notre association représente le segment du système canadien de la télédiffusion qui connaît la croissance la plus rapide. On retrouve parmi nos membres la majorité des services francophones, anglophones et allophones de télévision spécialisée, payante et à la carte. Nous sommes un secteur composé de 50 réseaux axés sur des créneaux particuliers qui, considérés tous ensemble, sont en train de changer le visage de la télédiffusion.

Au cours des cinq dernières années, notre secteur a en effet plus que doublé le nombre d'heures d'émissions canadiennes qu'il offre au public canadien et sa part de l'auditoire à l'écoute de la télévision de langue anglaise, et élargi les débouchés des producteurs d'émissions télévisuelles et de longs métrages canadiens en leur procurant une clientèle intérieure servant de tremplin aux exportations. En cinq ans, les sommes dépensées par les services canadiens de télévision spécialisée et payante pour l'acquisition d'émissions canadiennes ont en effet doublé. Quant aux productions indépendantes, nous y avons investi en tout quelque 500 millions de dollars pendant la même période. Ce sont des acquisitions canadiennes.

[Traduction]

Grâce à ces investissements, les téléspectateurs ont pu choisir parmi des émissions canadiennes extrêmement populaires. L'an dernier, nous avons commandé une étude visant à déterminer les choix du public canadien. Les résultats ont montré que près de 65 p. 100 des téléspectateurs à l'écoute des réseaux spécialisés anglophones choisissaient des émissions canadiennes—le contraire de la tendance observée chez les réseaux généralistes canadiens. Quant aux téléspectateurs qui regardent les réseaux spécialisés francophones, ils optent pour un contenu canadien dans une proportion encore plus élevée.

Dans l'univers numérique qui nous envahit, les services de télévision spécialisée et payante ont fait la preuve qu'ils sont disposés et aptes à jouer un rôle capital, à la fois en créant un contenu canadien original et en offrant un second débouché aux émissions canadiennes de qualité qui instruisent, informent et divertissent les Canadiens.

Nos membres sont une composante importante d'une industrie télévisuelle et cinématographique interdépendante, constituée de producteurs, de distributeurs, de télédiffuseurs et d'autres présentateurs, d'artistes, d'équipes techniques et de services de soutien. Mes observations sont le reflet de cette interdépendance.

La réussite canadienne repose sur les réalisations de l'entreprise privée et les politiques publiques. Les Canadiens sont fiers du succès que remportent nos émissions télévisuelles dans le monde. La récente popularité de nos oeuvres, le fait que nous ayons pu attirer l'investissement étranger et réaliser des ventes à l'exportation ainsi que la réussite des services de télévision spécialisée et payante au Canada dépendent de deux facteurs. En effet, l'excellence de l'industrie canadienne, attribuable aux entrepreneurs et aux firmes qui savent comment réussir, s'est épanouie grâce à la solide assise que procurent les politiques et les programmes gouvernementaux. Sans ce partenariat entre le gouvernement et le secteur privé, nous ne pourrions soutenir la concurrence des grandes sociétés de divertissement d'envergure mondiale ni l'afflux de leurs émissions.

• 1010

Parmi les politiques et les programmes d'importance pour nos membres et l'ensemble de l'industrie télévisuelle et cinématographique, citons:

1), La réglementation relative au contenu, qui garantit la présentation d'émissions canadiennes en exigeant qu'un certain pourcentage de la grille-horaire quotidienne en soit constitué. En ce qui concerne nos membres, ce pourcentage peut varier entre 16 et 100 p. 100, mais il se situe à 60 p. 100 dans l'ensemble en moyenne, et ces 60 p. 100 d'émissions canadiennes sont diffusées aux heures de grande écoute.

2), L'article 19.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu qui stipule que la publicité doive obligatoirement être placée chez les stations et des réseaux de télévision canadiens pour être admissible comme dépense d'exploitation. Les annonceurs sont libres d'acheter du temps d'antenne aux stations américaines, mais ils ne peuvent déduire la dépense de leur revenu imposable.

3), Les mesures de contrôle de l'investissement, qui restreignent la participation étrangère aux sociétés de câblodistribution, de radiodiffusion et de télécommunications à un maximum de un tiers des actions avec droit de vote et qui exigent un contrôle canadien dans tous les cas.

4), Divers règlements du CRTC, dont la liste des services par satellite admissibles, qui spécifie quels services de programmation étrangers les entreprises de radiodiffusion autorisées, comme les sociétés de câblodistribution, ont le droit d'offrir à leur clientèle, et les règles d'assemblage, qui déterminent combien de services canadiens doivent être fournis avec les services étrangers. Les propriétaires d'entreprises canadiennes se conforment à ce régime réglementaire de façon à offrir aux Canadiens un contenu canadien et une programmation qui les intéressent. En prenant soin de choisir des services de programmation étrangers qui ne constituaient pas des concurrents pour les services spécialisés canadiens, ils ont assuré l'existence d'un marché de droits de diffusion canadiens et favorisé l'exploitation rentable de nos services axés sur des créneaux particuliers.

5), Les crédits d'impôt et le soutien financier offert par le Fonds canadien de télévision et Téléfilm, qui incitent le milieu canadien de la production indépendante, en pleine expansion, à investir dans la production et la distribution d'émissions de télévision et de films canadiens.

6), La participation publique dans la SRC et l'Office national du film.

7), Les accords de coproduction internationaux que le Canada a conclus avec une trentaine de pays.

Ces programmes et politiques ont été mis en place par toute une succession de gouvernements, sans égard à leur orientation politique. Comme les Canadiens croient au principe de la liberté d'expression et de choix, ils ne visent pas à restreindre notre accès aux produits culturels étrangers. De fait, le Canada est l'un des marchés les plus ouverts au monde pour les productions culturelles des autres, et le succès que remportent nos sites de production témoigne amplement de notre attitude positive à cet égard. Nos programmes et politiques sont plutôt là pour assurer la liberté de choix des Canadiens dans leur propre pays, et ils sont loin d'être statiques. Ils ont évolué, et continueront de le faire, de concert avec une industrie dynamique, au rythme des besoins changeants et des nouvelles réalités du Canada et du mûrissement de notre industrie. Certains considèrent toutefois que nos mesures culturelles entravent le marché libre, ce qui les rend vulnérables aux pressions qu'exercent nos partenaires commerciaux et les accords mondiaux négociés au cours de la dernière décennie. Pendant cette période, nous avons été témoins de la contestation fructueuse des politiques canadiennes relatives aux périodiques devant l'OMC et de menaces à l'égard de diverses autres mesures culturelles aux termes de l'ALENA, de L'ALE et de l'OMC.

Permettez-moi de vous citer un exemple sectoriel qui met en évidence un aspect important du problème. Lorsqu'en 1994 le CRTC a accordé une licence à un nouveau groupe de services de télévision spécialisée canadiens, dont le New Country Network (NCN), le Conseil a supprimé de la liste des services étrangers admissibles un canal spécialisé américain appelé CMT-County Music Television. La diffusion du canal CMT avait été autorisée au Canada à condition qu'il soit retiré de la liste dès qu'un service canadien serait offert. Mais ce retrait a été contesté à la fois par le Bureau du représentant au commerce extérieur des États-Unis et par CMT. Même si ces plaintes ont été abandonnées au moment de la fusion de NCN et de CMT, le CRTC a annoncé en 1997 qu'il n'appliquerait plus sa politique de retrait d'un service étranger concurrent lorsqu'un service canadien semblable obtient une licence.

À la lumière des accords commerciaux actuels, les décideurs canadiens du domaine culturel travaillent en pensant aux contestations possibles que leurs actions pourraient susciter, pratiquant une sorte de politique d'autocensure. Même si des exceptions pour la culture ou des réserves particulières au pays sont prévues et en l'absence d'engagements précis concernant nos politiques culturelles, les accords commerciaux ont d'importantes répercussions sur la souveraineté culturelle du Canada. Et ces répercussions ne feront que s'accentuer à mesure que le changement technologique estompera les distinctions entre les industries culturelles, l'informatique et les télécommunications.

• 1015

Il importe de se rappeler que ce débat ne concerne pas seulement les politiques et programmes existants; il concerne plus fondamentalement notre droit d'en élaborer de nouveaux et d'adapter ou de modifier ceux que nous avons déjà à mesure que notre société évolue. Par exemple, les programmes gouvernementaux et les lois qui régissent la concurrence doivent refléter notre marché intérieur. Le principal point à considérer ici est que les Canadiens doivent être libres de prendre eux-mêmes les décisions qui s'imposent pour répondre à leurs besoins, et non pour répondre aux pressions extérieures.

La plupart des Canadiens acceptent maintenant le principe que le commerce des produits culturels ne peut se traiter de la même façon que le commerce des autres biens et services. Le premier ministre, le ministre du Commerce international, la ministre du Patrimoine canadien et certains autres ont fait des déclarations éloquentes à ce sujet. Le seul débat qui demeure concerne donc la meilleure façon de protéger nos objectifs culturels.

L'expérience récente a prouvé que les exemptions et les réserves ne conviennent pas. Et le simple fait d'éviter de prendre des engagements précis ne semble pas fonctionner non plus, puisque le libellé de ce type d'accord peut avoir des conséquences imprévues, comme nous l'a fait découvrir la décision de l'OMC à l'égard de nos politiques sur les périodiques.

Nos membres croient qu'une nouvelle approche est nécessaire. La réunion ministérielle de l'OMC qui se tiendra prochainement à Seattle constitue à la fois un défi et une occasion. Il s'agit d'un défi parce que le programme de l'OMC en vue du nouveau millénaire sera détaillé et couvrira des sujets culturels épineux; le Canada se fera sans doute presser de prendre des engagements dans le domaine culturel. Mais cette réunion fournit également un forum où le Canada peut proposer de diriger l'élaboration d'un nouvel instrument international—une charte mondiale des droits culturels.

[Français]

De nombreux intervenants du secteur culturel ont déjà proposé une telle charte. Le propre groupe consultatif sectoriel du MAECI sur le commerce international des industries culturelles a récemment endossé le concept.

Pour qu'elle représente une solution, la charte doit bénéficier d'un statut équivalent et non secondaire à celui des accords commerciaux proprement dits. Elle doit reconnaître à quel point il est important pour tous les pays de maintenir leur diversité culturelle. Elle ne doit contenir que des engagements qui sont salutaires pour la culture et elle doit établir des règles régissant le type de mesures que les pays pourraient prendre pour promouvoir la diversité.

Point important, la charte devrait comporter certaines zones libres, c'est-à-dire la possibilité pour chaque pays de définir ses propres règles, car ce qui constitue un sujet d'importance culturelle pour un pays peut ne pas l'être pour un autre. En outre, ces définitions doivent pouvoir changer au fil du temps puisque nous ne pouvons savoir aujourd'hui quelle forme d'expression culturelle se développera au cours du prochain siècle. Enfin, toute contestation ou tout différend ayant trait à la charte devra être jugé par des spécialistes culturels et non des spécialistes commerciaux.

La bataille qui nous permettra de réaliser une charte culturelle mondiale ne sera pas facile à gagner puisqu'elle nous opposera à notre voisin et principal partenaire commercial. Le Canada a du pain sur la planche s'il veut mobiliser les pays qui pensent comme lui, mais nous avons prouvé, avec le traité sur les mines terrestres, que nous pouvions y arriver. Les enjeux sont élevés, et c'est une bataille que nous ne pouvons nous permettre de perdre.

[Traduction]

Je n'ai pas fourni autant de détails que mes collègues présents aujourd'hui car notre entreprise a lu avec intérêt le rapport du GCSCE dont nous acceptons les recommandations.

Je vous remercie.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier (Brampton- Ouest—Mississauga, Lib.)): Merci.

Nous allons maintenant donner la parole à M. Bloom, de l'Institut canadien des brevets et marques.

M. Glen Bloom (président, Institut canadien des brevets et marques): Merci.

Je m'appelle Glen Bloom et je suis président de l'Institut canadien des brevets et marques. Je suis accompagné de Stuart Wilkinson, trésorier honoraire de l'institut.

L'Institut canadien des brevets et marques, l'ICBM, est un organisme professionnel qui compte environ 1 250 membres spécialisés dans les questions touchant la propriété intellectuelle d'un bout à l'autre du Canada. Nous représentons une vaste gamme d'intérêts commerciaux au Canada, dans tout le pays.

Il est évident que la propriété intellectuelle est d'une importance cruciale à l'aube du nouveau millénaire pour les questions de compétitivité et pour faire en sorte que les entreprises canadiennes soient prospères non seulement au Canada mais aussi sur le marché mondial. Il faut absolument veiller à ce que la législation canadienne en matière de propriété intellectuelle favorise le développement de la propriété intellectuelle au Canada et les entreprises qui oeuvrent dans ce domaine. En outre, il faut faire en sorte qu'il existe des normes internationales suffisantes et efficaces relatives à la protection de la propriété intellectuelle.

• 1020

Nous vous avons remis un mémoire exhaustif et assez technique. Je n'ai pas l'intention de le lire de bout en bout, mais je voudrais simplement faire ressortir certains points essentiels et vous signaler les questions qui préoccupent notre secteur au Canada. Je vais parler tout d'abord des problèmes liés aux droits d'auteur et aux marques de commerce, et M. Wilkinson traitera de certaines questions relatives aux brevets. Je conclurai en faisant certaines remarques sur le commerce des services.

Je signale d'entrée de jeu que notre mémoire est en cours de traduction en français, si ce n'est pas déjà fait. Je crois savoir que s'il n'est pas déposé sur-le-champ dans sa version française, il devrait l'être dans le courant de la matinée.

Je voudrais faire tout d'abord certaines remarques sur les rapports existant entre les traités commerciaux, l'OMC et l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, l'OMPI.

À l'heure actuelle, certaines normes de propriété intellectuelle qui, par le passé, étaient examinées par l'OMPI seront désormais étudiées et adoptées dans le contexte des négociations commerciales de l'OMC. Il existe de nombreux traités en vigueur et des ébauches de traité à l'OMPI qui feront vraisemblablement l'objet de discussions parmi les autres partenaires commerciaux du Canada lors des prochaines négociations de l'OMC.

Je vais parler en premier des droits d'auteur, qui constituent le principal droit de propriété intellectuelle dans le domaine du commerce électronique et de l'Internet. On assiste à des progrès pratiquement tous les jours dans certains de ces domaines. À l'heure actuelle, le Canada a signé deux traités de l'OMPI, le traité sur le droit d'auteur et le traité sur les exécutants et les phonogrammes. Ces traités établissent des normes de protection de la propriété intellectuelle dans le domaine des droits d'auteur, en mettant l'accent sur l'environnement électronique.

Même si le Canada a signé ces traités, nous n'avons pas encore élaboré de politique nationale à cet égard. À l'aube des négociations de l'Organisation mondiale du commerce, il est donc essentiel que le Canada adopte une politique nationale sur ces questions au lieu de s'en faire imposer une par ses partenaires commerciaux.

Dans le domaine électronique, la protection des bases de données commerciales est une autre source de préoccupation importante. Lors de notre réunion du printemps il y a deux semaines, un discours a été prononcé par un représentant de IHS Micromedia, société canadienne qui appartient à IHS International, l'un des plus importants, sinon le plus important fournisseur de bases de données commerciales. Le conférencier a signalé dans son discours qu'étant donné la vive incertitude qui règne au Canada au sujet de la protection des bases de données, les décisions relatives aux investissements dans la création de bases de données et la commercialisation de celles-ci par ce genre d'entreprises sont prises à l'étranger et non au Canada. Il est à craindre que, faute d'une protection suffisante, efficace et bien comprise par tous, les emplois qui auraient dû profiter au Canada iront ailleurs. Bon nombre d'entreprises de bases de données appartiennent à des intérêts étrangers. Il existe une seule importante entreprise de bases de données canadiennes qui détient d'importants intérêts à l'étranger également.

Les limites de la responsabilité des fournisseurs de services sur l'Internet constituent un autre secteur où il n'y a pas de politique nationale en vigueur. Là encore, le Canada se doit d'adopter une politique avant de participer aux négociations de l'OMC.

Pour ce qui est des marques de commerce, il y a également dans ce domaine certains progrès réalisés relativement à l'harmonisation des lois des différents pays. Dans notre mémoire, nous parlons notamment du protocole de Madrid, un accord international administré par l'OMPI. L'Institut canadien des brevets et marques a de sérieuses réserves à l'égard du protocole de Madrid et de son application au Canada. À l'heure actuelle, l'adhésion du Canada à ce protocole a été retardée en raison de problèmes concernant un vote de l'Union européenne. Si ce problème est résolu un jour—et cette question relève plus de la politique que de la propriété intellectuelle—, il nous faudra examiner de près la situation pour faire en sorte que la mondialisation n'ait pas pour effet d'accorder aux étrangers une protection et un traitement plus favorables que ceux dont jouissent les PME au Canada.

• 1025

Dans le domaine des marques de commerce, la question des marques connues ou célèbres est également une source de préoccupation. Il y a actuellement des discussions à l'OMPI à Genève—il y a eu une séance en mars—où certains partenaires commerciaux du Canada souhaitent fortement accroître la protection des marques célèbres. Cela permettrait à d'importantes multinationales étrangères de jouir d'une protection bien plus vaste que celle que prévoient actuellement les lois canadiennes, ce qui empêcherait les entreprises canadiennes de garantir une protection suffisante et efficace des marques de commerce et de disposer d'une vaste gamme de marques au Canada.

L'Institut des brevets et marques a également exprimé des réserves sur l'élargissement de la protection des marques de commerce aux marques très connues. Ce sera sans doute une question qui sera portée à l'ordre du jour par les États-Unis et l'OMC.

S'agissant des brevets, avant de donner la parole à Stuart Wilkinson, j'aimerais parler d'une ébauche de traité en cours d'étude à l'OMPI à l'heure actuelle. Il s'agit d'un traité sur le droit des brevets, qui fait l'objet de négociations cette semaine et la semaine prochaine. L'ICBM a envoyé un représentant à Genève car certaines dispositions de ces traités nous préoccupent au plus haut point. Elles sont très techniques. Je n'ai pas l'intention d'en parler en détail, mais je signalerais tout simplement que le Canada doit comprendre toutes les répercussions de ces traités, suivre l'évolution de la situation et adopter une position qui reflète les intérêts canadiens avant de participer aux négociations de l'OMC.

Je vais demander à Stuart Wilkinson de vous parler plus en détail de la question des brevets. Je tiens à signaler que notre institut compte parmi ses membres des gens qui travaillent dans le secteur privé, comme moi, et surtout des membres comme Stuart Wilkinson, qui sont à l'emploi de grosses sociétés canadiennes. Stuart travaille chez Nortel.

M. Stuart Wilkinson (trésorier honoraire, Institut canadien des brevets et marques): Merci, Glen.

Comme l'a dit Glen, je porte deux casquettes. Je représente d'une part l'Institut canadien des brevets et marques, appelé désormais l'Institut canadien de la propriété intellectuelle, et à ce titre je m'occupe de l'aspect des coupeurs de bois et porteurs d'eau dont M. Lippert a parlé avec tant d'éloquence. Au sein de mon entreprise, Nortel Networks, je m'occupe également de l'incidence des brevets du monde entier sur la société et de la mesure dans laquelle celle-ci utilise ses brevets pour garantir sa compétitivité dans le monde entier.

Je m'occupe principalement des brevets. À mes yeux, les activités de l'Organisation mondiale du commerce servent principalement à faciliter les échanges commerciaux. Lorsque je considère les brevets que nous détenons et ceux que nous utilisons, je constate que le monopole des brevets est le monopole bien légitime qui stipule que l'on peut faciliter les choses jusqu'à un certain point. Le monopole des brevets est tout à fait justifié et on peut faire des échanges commerciaux dans la mesure où moi, en tant que titulaire de brevet, je vous permets d'utiliser cette invention. En réalité, donc, les brevets constituent une sorte d'obstacle au commerce, et il convient d'examiner pourquoi ils se sont révélés si utiles, en dépit des nombreuses initiatives prises en vue de la libéralisation des échanges.

Le brevet représente, de par sa nature, des dépenses et des problèmes, disons, dans le libre-échange. Le problème vient notamment de ce que le brevet est avant tout un instrument national—il y a des brevets canadiens, britanniques, américains. Il n'existe pas de brevet mondial.

Si l'on suit l'évolution du droit des brevets au cours des 10 dernières années, ou peut-être un peu plus, on constate qu'il y a eu au départ un effort en vue d'harmoniser les diverses lois dans ce domaine.

Disons que les initiatives de libéralisation des échanges visent à établir une base de référence, pour reprendre encore une fois les propos de M. Lippert, pour les lois sur les brevets, de façon à les rendre relativement compatibles les unes avec les autres. On s'oriente de plus en plus vers un régime de brevets mondiaux. Des initiatives, quoique discrètes, sont en cours.

• 1030

Il y a certains candidats qui voudront établir leur prédominance dans un régime de brevets mondiaux. Les Européens ne cachent pas le fait qu'ils en ont la possibilité, selon eux. Nos amis du Sud, d'après mon expérience personnelle, disposent d'une infrastructure qui attire généralement les activités de brevet, de sorte qu'ils disposent d'une infrastructure de brevet très avancée et, qui plus est, de tout un système pour le règlement des litiges. À l'aube des négociations de l'OMC, il faut s'attendre à ce que certains fassent des démarches très pressantes en vue d'harmoniser et de mondialiser les lois sur les brevets.

Si ces groupes de pression, ces groupes d'intérêts réussissent à nous convaincre, il faut alors se poser une question importante: que deviendront les opérations canadiennes? Le Bureau canadien de la propriété intellectuelle emploie un grand nombre de personnes. C'est une institution redoutable. Que deviendra la procédure de litige visant les brevets et les autres aspects de la propriété intellectuelle au Canada?

Si l'on examine l'avenir de la procédure des litiges, mon entreprise n'en a plus au Canada, tout se fait chez nos voisins du Sud. C'est parce qu'il y a un regroupement lent des activités liées à la propriété intellectuelle dans des territoires autres que le Canada. Ce regroupement va sans doute s'intensifier et, pour une entreprise comme la mienne, c'est plutôt une bonne nouvelle. En tant que société mondiale, cela nous convient parfaitement, mais en tant que représentant de l'Institut des brevets et marques, je pense qu'il est inévitable qu'on assiste au déclin de certains des organismes de brevet, à la disparition des gens que nous employons dans ces organismes et même de toute l'activité liée aux brevets. Ne nous y trompons pas: c'est une activité tout aussi importante que les autres activités commerciales.

À mon sens, donc, nous devrions surveiller dans quelle mesure les négociations de l'OMC visent à préconiser le déplacement des activités relatives aux brevets, aux litiges, à l'acquisition des brevets, du Canada vers des régions plus regroupées comme l'Europe, les États-Unis, etc.

Par conséquent, ce que nous devons faire lors des négociations de l'Organisation mondiale du commerce, à mon avis, c'est être vigilants pour voir dans quelle mesure les initiatives visent entièrement à établir des libertés commerciales et jusqu'à quel point elles auront pour effet de réduire ce que j'appelle «l'industrie des brevets» au Canada.

Je vous remercie.

M. Glen Bloom: J'aimerais conclure...

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Je vais vous demander de le faire en une trentaine de secondes, je vous prie. Nous aimerions garder du temps pour les questions.

M. Glen Bloom: D'accord. Je vais conclure en faisant une observation sur le commerce des services.

Dans le cadre de l'ALENA, le Canada avait imposé une réserve pour garantir l'épanouissement d'une profession et de conseils professionnels liés à la propriété intellectuelle au Canada. Il faut maintenir cette réserve dans les négociations futures de l'OMC. S'il n'existe aucune condition de résidence au Canada pour ceux qui offrent des conseils en matière de propriété intellectuelle, il est à craindre que les petites et moyennes entreprises canadiennes n'aient pas accès à ce genre de conseils au Canada et que les Canadiens doivent aller ailleurs.

Merci beaucoup de nous avoir permis de témoigner devant le comité.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Monsieur Penson.

M. Charlie Penson: Merci, madame la présidente.

J'aimerais remercier les témoins d'être venus ce matin nous aider à discuter de la position que le Canada devrait adopter lors de la prochaine série de négociations de l'Organisation mondiale du commerce, qui doivent commencer l'an prochain, sans doute.

• 1035

Nous avons entendu certains excellents exposés. La liste élargie dont les témoins nous parlent m'intéresse tout particulièrement. Selon certains, les discussions devraient porter sur des secteurs restreints mais selon d'autres, des négociations générales seraient souhaitables. J'ai l'impression qu'on propose maintenant d'aborder de nombreux autres domaines, ce qui est sans doute une bonne chose, à mon sens.

Je tiens à m'adresser en premier lieu à Mme Bradford qui, à mon avis, a fait un excellent exposé ce matin. Il eut été souhaitable que certains groupes qui ont déjà témoigné devant le comité par le passé aient été présents pour écouter votre exposé, et surtout certains groupes du secteur agricole, où les monopoles de la Commission canadienne du blé et du secteur de la gestion de l'offre dans un système de circuit fermé auraient intérêt à entendre ce genre de chose.

Votre exposé a cela de remarquable que vous avez demandé au gouvernement de supprimer le monopole pour vous permettre de prendre de l'expansion. Poussant l'audace encore plus loin, vous remettez maintenant en cause la politique sur l'investissement étranger qui semble également entraver votre expansion. Qui plus est, vous préconisez la disparition des monopoles et souhaitez que les entreprises commerciales d'État des autres pays imposent moins de contrôle pour nous permettre de profiter des télécommunications dans des pays qui ne sont pas encore passés à la privatisation ou à la libéralisation des échanges, comme le Brésil. C'est une initiative remarquable de la part d'une entreprise comme la vôtre, qui, il y a encore quelques années, jouissait d'un monopole, n'est- ce pas?

Mme Meriel Bradford: Merci de ces compliments spontanés. J'aimerais pouvoir les inscrire dans notre site Web, sur Internet.

À la base de notre réflexion et de la stratégie de notre entreprise a été la prise de conscience du fait qu'un marché de 30 millions de personnes n'était pas suffisant pour permettre l'expansion d'une entreprise internationale. Je dois rendre hommage au leadership de Charles Sirois, qui a dit qu'il valait mieux échanger un marché de 30 millions d'âmes pour un marché de 6 milliards de personnes, c'est-à-dire le marché mondial.

Il est vrai que nous étions une société d'État, et qu'il a donc fallu procéder à un changement de culture organisationnelle fondamental. Il fallait modifier notre régime de réglementation, ce que nous avons fini par obtenir des responsables de la réglementation en 1996. Cela nous a permis de passer d'un monopole fondé sur les tarifs et le taux de rendement à un monopole davantage axé sur les incitatifs, qui nous permettrait de profiter d'une diminution du prix de revient et d'en faire profiter nos actionnaires, nos employés et, cela va sans dire, nos clients.

Il faut des conditions idéales pour transformer fondamentalement une entreprise. Il faut que l'organisme de réglementation, les décideurs, la direction, les syndicats et les employés participent tous au processus, et il faut ensuite trouver les experts nécessaires pour aider l'entreprise à prendre de l'expansion à l'étranger.

C'est ce que je voulais faire partager au comité aujourd'hui, l'histoire du passage réussi d'un monopole à une entreprise mondiale. Il faut du courage pour le faire. Nous sommes très heureux des progrès qu'a connus notre entreprise.

M. Charlie Penson: Madame Bradford, lors de la réunion ministérielle de Singapour, il a surtout été question de la nécessité d'adopter un accord sur les télécommunications, et, sauf erreur, il a été entendu par les participants que tous les pays n'y adhéreraient pas sur-le-champ, mais que s'il existait une masse critique d'adhérents, cet accord serait du domaine du possible. Vous semblez dire qu'il existe encore des obstacles, que 85 p. 100 du marché mondial consiste encore en monopoles ou en entreprises commerciales d'État qui entravent votre capacité d'expansion sur ces marchés. Ai-je bien compris?

Mme Meriel Bradford: N'oublions pas que l'accord de base sur les télécommunications comptait environ 70 pays signataires. Tous ces pays ne sont pas passés à des marchés entièrement ouverts. Même parmi ceux qui ont assumé ces obligations, les changements se feront progressivement avec le temps, et ne déboucheront pas toujours sur un marché entièrement libre. C'est le premier point à prendre en ligne de compte. Le second, c'est que l'UIT, l'Union internationale des télécommunications, qui représente tous les pays du monde—et, dans la plupart des cas, leurs entreprises de télécommunications sont des membres associés—représente plus de 200 pays et entreprises.

Comme vous le savez, l'OMC ne compte que 134 membres. De nombreux pays cherchent à adhérer à l'OMC. Il y a donc un univers de 70 pays sur un univers possible de 240 pays, et il y a beaucoup de chemin à faire avant que tous les pays finissent par adhérer à l'OMC. J'aimerais dire un mot au sujet de l'importance des négociations visant à permettre à la Chine d'adhérer à l'OMC, à l'égard desquelles nous collaborons étroitement avec le gouvernement. Cette adhésion est très importante pour le système mondial et pour notre entreprise. Puis il y a l'univers extérieur, si l'on peut dire, des pays qui ne sont pas membres de l'OMC et qui ont beaucoup à faire pour en arriver à un marché plus ouvert.

• 1040

Ce que je veux vous faire comprendre aujourd'hui, c'est qu'il est très important que les pays en développement s'efforcent de libéraliser le marché des télécommunications. Il ne s'agit pas d'un seul secteur isolé du reste. Nous disons souvent que les télécommunications sont l'oxygène du système économique international, et dans votre vie quotidienne, vous utilisez tous très souvent les réseaux, que ce soit l'Internet ou le téléphone.

M. Charlie Penson: Je m'adresse à l'ensemble des témoins. J'ai l'impression que la liste s'allonge pour ce qui est des points dont on aimerait discuter lors des prochaines négociations, et j'aimerais connaître votre avis sur... Si j'ai bien compris les propos de la plupart des témoins, vous estimez que c'est une bonne idée de ne pas limiter les négociations à l'agriculture et aux services.

D'après les témoignages que j'ai entendus, j'ai établi la liste suivante: l'agriculture, les services, la propriété intellectuelle en vertu de l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce—et à ce chapitre, il reste des progrès à faire—, les télécommunications, et Mme Bradford vient de nous parler de certaines initiatives en cours, la politique sur la concurrence internationale, le règlement sur les différends et le remaniement de ce système, et les lois sur les recours commerciaux, dont certains ont parlé ce matin. On nous dit que des discussions sont en cours au sujet de l'investissement et il existe évidement des groupes qui nous demandent d'ajouter à l'ordre du jour les questions liées aux normes de travail, à l'environnement et aux droits de la personne. Je me demande si l'on s'entend... ou plutôt que pensez-vous de l'idée d'élargir la liste, ce qui nous donnerait plus de raison de croire qu'une série de négociations générales pourrait être couronnée de succès, si j'ai oublié certains domaines qu'il conviendrait d'ajouter à la liste que le Canada va proposer?

M. Owen Lippert: Je veux simplement ajouter que la liste des points à discuter ne cesse de s'allonger, et qu'elle est importante. Lorsque nous participerons aux négociations, il ne faut pas nous laisser engloutir par le grand nombre de sujets qui seront mis sur le tapis, mais il faudra plutôt choisir les domaines qui nous permettront d'organiser tout cela, et à cet égard je pense que l'aspect le plus important, sur bien des plans, sera l'investissement.

Au bout du compte, je pense que les négociations de l'OMC vont établir que la propriété intellectuelle doit être protégée en tant qu'investissement en vertu des règles sur l'investissement. Depuis l'échec de l'Accord multilatéral sur l'investissement, il y a en quelque sorte un vide à combler, mais encore une fois, l'ALENA nous offre un modèle, et puisque la propriété intellectuelle est considérée comme un investissement du point de vue de l'ALENA, nous avons là le modèle qui sera repris, à mon avis, par l'Organisation mondiale du commerce.

En cas de violation des normes sur le droit d'auteur ou les brevets, les sociétés titulaires de droits demanderont des dédommagements ou des recours privés, plutôt que de passer par un litige de pays à pays concernant l'accès au commerce notamment. Il est souhaitable que ces différends soient laissés entre les mains des sociétés privées et qu'elles réclament elles-mêmes des recours privés—voire des recours privés contre des gouvernements. À défaut de cela, tout le dossier est compromis à mon avis.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci. Quelqu'un d'autre...?

M. Jayson Myers: Puis-je ajouter quelque chose brièvement?

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Rapidement.

M. Jayson Myers: Sans vouloir rallonger votre liste de sujets, monsieur Penson, les marchés de l'État sont un secteur capital également.

Ainsi, quand on regarde la liste des sujets de négociations, on constate qu'elle est longue, non seulement à cause de la multiplicité des enjeux mais du fait que ces enjeux ne devraient pas être traités comme des cas isolés, car ils permettent de pouvoir exercer un poids sur les négociations. En outre, le nombre des sujets se multiplient parce qu'il y a quantité de domaines interdépendants, si bien que l'on ne peut pas envisager de traiter des télécommunications sans penser aux marchés de l'État. Les questions d'investissement et de propriété intellectuelle sont imbriquées l'une dans l'autre. Il est capital une fois de plus lors des prochaines négociations qu'elles ne soient pas définies nécessairement suivant le libellé officiel des traités eux-mêmes mais que l'on s'écarte de ce dernier et que l'on se demande quels sont les principaux objectifs du Canada en essayant de déterminer les éléments communs à tous ces domaines.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

[Français]

Monsieur Sauvageau.

M. Benoît Sauvageau: Ma première question s'adresse aux représentants de l'Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Canada.

• 1045

Vous avez parlé de l'Accord multilatéral sur l'investissement. Vous n'êtes pas sans savoir que le Bloc québécois, dont je fais partie, a demandé qu'il soit soustrait de l'OCDE et qu'on le négocie à l'OMC. Mais devant la levée de boucliers et devant le succès d'Internet—je rejoins ici les propos de Mme Bradford, qui représente Téléglobe—, on a vu de quelle façon la population pouvait s'y opposer.

Si on présente ce nouvel AMI sous les auspices de l'OMC, madame Pamela et monsieur Jayson, de quelle façon devrions-nous le faire? Quelles modifications devrions-nous y apporter pour qu'il soit acceptable au niveau de la société civile?

Mon autre série de questions s'adresse à Mme Bradford de Téléglobe, mais si d'autres témoins souhaitent intervenir, je les invite à le faire. Madame Bradford, à la page 4 de votre mémoire, on peut lire:

    ...nous exhortons le gouvernement du Canada, dans les futures négociations commerciales, à réclamer l'abolition des exigences relatives aux investissements étrangers pratiquées par plusieurs pays dans le domaine des services de télécommunications.

Au niveau des normes dans le domaine de l'agriculture, certains pays ont aboli ou diminué leurs exigences, tandis que d'autres ne l'ont pas fait. Est-ce que c'est équitable et égal? De quelle façon cela se passe-t-il? Pourriez-vous expliciter un peu plus cette phrase?

Toujours à la page 4, vous parlez des frais d'obtention de licence prohibitifs et du manque de clarté dans le processus d'octroi des licences. Est-ce un problème à l'échelle internationale ou un problème qu'on ne retrouve que dans certains pays? De quelle façon pourrait-on le régler?

Ma troisième question porte sur la règle de 20 p. 100 à laquelle faisait allusion le président un peu plus tôt. Je ne suis peut-être pas assez expert, mais j'ai de la difficulté à comprendre cette règle de 20 p. 100 de propriété étrangère. J'aimerais que vous nous en parliez davantage.

Si le temps nous le permet, madame Logan, j'aimerais que vous me parliez de la Charte mondiale des droits culturels. - Quelle sera notre stratégie pour arriver à cette charte qui n'est qu'à l'état embryonnaire?

Les représentants de l'alliance aimeraient peut-être répondre en premier.

[Traduction]

M. Jayson Myers: Permettez-moi de répondre à propos de l'accord sur l'investissement. À cet égard, le traitement non discriminatoire des sociétés canadiennes implantées sur d'autres marchés exige que nous gardions à l'esprit un élément essentiel à bien des égards, à savoir de ne pas négocier nécessairement un accord distinct sur l'investissement mais d'inclure le volet investissement dans d'autres secteurs ou dans d'autres accords. Il faut bien comprendre qu'il s'agit d'une question générale, étant donné les susceptibilités qu'ont suscitées les discussions entourant un accord sur l'investissement distinct. La façon la plus positive d'aborder ce problème serait de démontrer comment des dispositions touchant l'investissement canadien dans d'autres marchés constituent un élément capital de toute une gamme de questions négociées lors du prochain cycle de négociations à l'OMC. À mon avis, c'est l'essentiel.

Deuxièmement, je pense qu'il est d'une extrême importance de bien expliquer au public qu'un éventuel accord sur l'investissement ou un accord visant certains des domaines dont il est question ici va dans le sens des intérêts des sociétés canadiennes qui opèrent à l'échelle mondiale. Il ne s'agit pas seulement de sociétés étrangères venant sur le marché canadien pour l'exploiter mais également de l'intérêt des sociétés canadiennes à qui l'on veut ouvrir des marchés et assurer un traitement non discriminatoire. Je pense que c'est le message le plus important que nous puissions communiquer au grand public.

[Français]

Mme Meriel Bradford: Vous avez lu très attentivement notre mémoire et je vous remercie de votre attention.

Je traiterai d'abord des problèmes associés aux règles d'investissement. Je prendrai l'exemple du Mexique, où un certain nombre de concessions ont été accordées aux fournisseurs de télécommunications.

• 1050

Pour pouvoir entrer dans ce marché, il faut trouver un partenaire qui détient déjà ce type de concession. Téléglobe ne peut y entrer sans être associé à un partenaire, peut-être de façon passive, avec une entreprise qui n'a pas d'intérêt en télécommunications, mais il serait très difficile d'en trouver une. Il nous faut donc nous associer à une entreprise qui est déjà sur le marché et qui oeuvre dans le secteur des télécommunications, ce qui n'est pas vraiment notre approche préférée. Nous préférerions percer ce marché en tant que Téléglobe, nous y installer et nous occuper de notre commerce international, comme nous le faisons aux États-Unis ou en Angleterre.

Vous avez aussi parlé de l'obtention de permis d'exploitation. Nous avons connu de nombreux ennuis et difficultés à ce niveau, y compris en Allemagne où on avait fixé le coût d'un permis à 32 millions de marks. Nous ne voulions pourtant pas acheter le réseau, mais simplement un permis d'exploitation. Après de très longues négociations avec d'autres intervenants sur le marché, les choses commencent à s'organiser un petit peu, mais il nous a quand même fallu deux ans de discussions et d'interventions aux plans politique et juridique. Nous songeons même à aller du côté de la Commission des Communautés européennes pour trouver des solutions avant de porter notre cause auprès de l'organe de règlement des différends de l'OMC.

Il y a donc d'abord tout un processus à suivre au niveau domestique en vue de trouver des solutions, avant d'aller plus loin, soit à Bruxelles dans le cas d'un pays membre de l'Union européenne. Si on n'apporte toujours pas un remède à la situation, on peut envisager la possibilité d'aller plus loin, mais c'est très coûteux en termes d'énergie et d'argent.

Nous proposons que le document de principes de réglementation soit clarifié et précisé afin qu'on évite de tels problèmes à l'avenir. Tout le monde devrait s'entendre sur les obligations et les droits de chacun.

Je pourrais aussi citer les problèmes que nous affrontons en France et au Mexique lorsque nous tentons d'obtenir un permis d'exploitation qui nous permet d'avoir des infrastructures, que ce soit un commutateur à Paris ou un peu de fibre optique. Ces pays exigent un investissement minimum. Comme je l'ai dit, il va falloir commencer à pelleter et à trouver des tuyaux d'accès à travers Paris, bien que ce ne soit pas du tout ce qu'on veut faire. Nous voulons simplement nous brancher afin de pouvoir desservir la clientèle internationale. On a tendance à forcer à investir ceux qui veulent offrir un service et obtenir un permis d'exploitation. Encore une fois, il serait peut-être bon de préciser dans l'accord ce genre de choses pour qu'on le sache à l'avance.

J'aborderai maintenant votre question sur la règle de 30 p. 100. Téléglobe a uniquement des infrastructures pour desservir un marché international, c'est-à-dire des stations terrestres et des câbles sous-marins qui se rendent jusqu'au Canada. Ce genre d'installations n'est pas assujetti aux règles du jeu des 20 p. 100 de limite de propriété étrangère. On peut aller jusqu'à 100 p. 100 de propriété étrangère pour ce genre d'infrastructures. Téléglobe n'a donc pas d'infrastructures dites domestiques. C'est pourquoi nous affirmons être une entreprise globale qui est entrée au Canada.

Est-ce que j'ai su répondre à vos questions?

M. Benoît Sauvageau: Oui, merci.

[Traduction]

Mme Jane Logan: Si je ne m'abuse, vous me demandez sur quelle stratégie repose cette charte mondiale pour la culture. Si nous l'appuyons, c'est parce que nous la jugeons utile pour le cycle actuel, afin d'éviter un bras de fer à propos des exceptions lors du prochain cycle.

J'ai donné tout à l'heure l'exemple de Country Music Television qui illustre bien mon argument. Les communiqués de presse, de 1994, révélaient que les États-Unis étaient prêts à des représailles à hauteur de 1,6 milliard de dollars. Aujourd'hui, Country Music Television occupe un petit créneau du marché, un service télévisuel ayant un chiffre d'affaires de 10 millions de dollars.

• 1055

Il est très difficile de contrer ce genre de pression mais pourtant nous ne cessons de croire qu'il est important que les institutions culturelles racontent au public leur version des faits, et qu'il est important d'avoir des industries culturelles implantées au Canada.

Ainsi, la charte des droits culturels permettrait tout d'abord de reconnaître l'importance de la diversité culturelle, ce qui n'est pas une notion difficile à faire accepter ici au Canada. On reconnaîtrait que les biens et services culturels sont différents des autres produits. On reconnaîtrait que les mesures et les politiques nationales visent à bien marquer la différence qui existe entre les produits et services culturels et les autres.

La charte établirait également les règles visant le genre de mesures que les pays peuvent et ne peuvent pas imposer et il en résulterait une discussion sur les contingentements de contenu et leur opportunité et également sur la question des subsides et des mesures possibles. Il ne s'agit pas de demander ici carte blanche. On se borne à demander de procéder à une discussion en vue de l'établissement de normes. Enfin, la charte énoncerait les conditions de l'application des règles commerciales aux mesures culturelles, le cas échéant.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Monsieur Speller.

M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Permettez-moi à mon tour de poser des questions à Mme Logan et à M. Lippert car je suppose que ce dernier n'est absolument pas d'accord avec vous à ce sujet. Je ne sais pas si je m'aventure en disant cela.

Nous pouvons peut-être aller plus loin dans le débat. Vous demandez essentiellement une exception et vous citez diverses bonnes raisons à l'appui. Vous dites que les choses devraient être totalement libres et concurrentielles. En poursuivant ce raisonnement, je vais demander à M. Lippert ce qu'il pense que le Canada pourrait obtenir à l'OMC sous forme d'accord dans ce domaine étant donné qu'il n'est pas le seul pays à adopter cette position, car la France et d'autres pays la défendent aussi.

M. Owen Lippert: Vous avez tout à fait raison de dire que je ne suis pas d'accord et l'institut s'oppose depuis un certain temps à toute notion d'exceptions culturelles. En analysant cette notion, on constate qu'elle présente des éléments tout à fait troublants au fond. Tout d'abord, prétendre que les biens culturels sont différents des autres. C'est une position indéfendable. Nous avons les livres, les revues et tous les supports, et voilà que l'on prétend qu'il ne s'agit pas de biens physiques. On dit que c'est plutôt du domaine de l'esprit, qu'il se trouve quelque part une identité culturelle et que c'est différent. Si c'est ce que l'on veut défendre en invoquant la présence d'une identité culturelle, pourquoi demander au gouvernement de le faire? C'est une chose que chacun pourra faire de son propre chef, selon ses choix. La notion d'une culture approuvée par le gouvernement, est à l'origine de ces exceptions culturelles que l'on réclame.

Au Canada, depuis toujours nous avons voulu défendre notre culture à cause des pressions qu'exercent les États-Unis, et c'est compréhensible. Mais créer toute une gamme de nouvelles règles et sanctions n'est pas la solution. Cette solution est intenable en soi et en outre elle n'est pas acceptée par nos partenaires commerciaux, pour la plupart, car, disons-le, elle sert des intérêts très particuliers. C'est indéniable.

J'ose prédire que le Canada abandonnera la question des exceptions culturelles; il pourra le faire facilement en se donnant beaucoup de peine. Si cela se fait facilement, nos intérêts seront servis car nous éviterons ainsi l'agonie des bras de fer et des négociations houleuses.

Mme Jane Logan: Si nous avions voulu choisir la solution de facilité, la chaîne Country Music Television n'existerait pas. Les artistes canadiens ne pourraient pas se produire, peu importe que l'on aime la musique country ou pas. On doit se demander si nous voulons renoncer à une entreprise de 10 millions de dollars pour éviter des représailles de l'ordre de 1,6 milliard de dollars. Je suppose que oui. Voilà ce qui se produirait et cela se produirait dans chaque créneau du marché, dans chaque secteur culturel. Ce serait la débandade.

• 1100

C'est une question fondamentale—et c'est à mon tour; j'estime que les biens culturels se distinguent des fèves soja et du matériel de téléphonie. Ils nous permettent d'exprimer nos valeurs et notre identité. C'est peut-être là où nous devrons accepter les divergences d'opinions quant à leur valeur.

Vous demandez pourquoi nous voulons faire intervenir le gouvernement. Vous avez parlé tout à l'heure de l'importance de protéger les marques de commerce. Dans notre cas—et je parle ici pour la télévision spécialisée et la télévision payante—, les marques américaines dans le domaine du divertissement sont universellement présentes et écrasantes. La promotion qu'on en fait est telle que vous avez sans doute entendu parler de services télévisuels américains que vous n'avez jamais vus, et vous pensez tout de même que ce sont de bons services parce que la promotion de ces produits de divertissement est tellement bonne. Le secteur du divertissement américain jouit par ailleurs d'appuis financiers considérables.

Nous n'aurions même pas la possibilité d'avoir accès aux systèmes de distribution ou à la publicité. Nous ne pourrions pas soutenir la concurrence avec ces services américains, en ce sens que nous n'aurions pas les moyens d'acheter le produit—même s'il s'agissait de produit canadien—, de le présenter si nous ne pouvions pas compter sur les règles du CRTC dont je viens de vous parler. Il ne faut pas conclure pour autant que nous devons notre réussite au gouvernement; elle est beaucoup attribuable au secteur privé et aux créateurs aussi.

M. Owen Lippert: Tous les secteurs de l'économie canadienne ont dit la même chose au sujet de l'Accord de libre-échange: nous sommes trop petits pour soutenir la concurrence; on va nous faire disparaître. J'ai des amis dans le secteur vinicole qui disaient qu'ils ne pourraient pas survivre. Dix ans plus tard, ces secteurs—et il y a un certain tri qui s'est opéré—se portent très bien, merci. Les vins canadiens sont maintenant offerts sur le marché américain, même si cela pouvait paraître invraisemblable il y a dix ans.

La capacité des industries culturelles canadiennes à réussir ne sera tout simplement pas entravée par l'ouverture de ce marché. Elles survivront et se porteront très bien. Je sais que nous pouvons tourner longuement en rond là-dessus—et je ne veux surtout pas me répéter—, mais avant toutes ces règles, la culture canadienne existait. Elle se portait très bien. Il s'agit de revenir à la situation qui existait à l'échelle internationale avant ce mouvement de nationalisme défensif qui est né dans les années 60.

Mme Jane Logan: Dans les années 60, le choix en matière de divertissement était très restreint. Les foyers canadiens n'étaient pas branchés sur le câble dans 80 p. 100 des cas. Les systèmes de distribution étaient fondamentalement différents de ce qu'ils sont maintenant. J'ai moi-même grandi à Montréal dans les années 60 et j'avais, à l'époque, le choix entre quatre stations—SRC, CBC et deux stations privées. C'était une autre époque.

Il y a maintenant beaucoup de choix intéressants qui sont offerts aux consommateurs, qui deviennent très sophistiqués. Ils s'intéressent aux produits culturels. Comme je l'ai dit, dans le cas de la télévision spécialisée canadienne, notre part d'auditoire a augmenté. Nous avons d'ailleurs un produit qui attire beaucoup de téléspectateurs. Il ne pourrait toutefois pas exister sans ces politiques à cause de la présence de l'énorme machine américaine du divertissement qui se trouve de l'autre côté de la frontière.

Vous avez dit que nos produits se vendaient aux États-Unis. C'est juste, et c'est certainement le cas de nos émissions télévisuelles. Par contre, il est presque impossible de diffuser un service télévisuel canadien de l'autre côté de la frontière et d'avoir accès au système de distribution américain. Je crois que c'est dans un article du Globe And Mail que j'ai lu en fin de semaine qu'on parlait de MuchMusic USA qui tente de pénétrer le marché américain depuis 1984 et qui se heurte à bien des difficultés.

Sur le plan structurel, il y a de véritables obstacles qui nous empêchent de pénétrer ce marché. Ce marché comprend pourtant 80 millions de ménages qui parlent la même langue que nous. Je vous assure que nous y diffuserions nos services si nous le pouvions.

Le président: Merci, madame Logan.

Vous avez terminé, monsieur Speller?

M. Bob Speller: Oui, merci.

Le président: Cette discussion a été très utile.

Monsieur Penson.

• 1105

M. Charlie Penson: Je veux continuer dans cette même ligne de pensée, monsieur le président.

Madame Logan, on parle beaucoup de ce virage qui s'est opéré dans le secteur culturel qui, semble-t-il, a abandonné l'idée de demander des exceptions à l'Organisation mondiale du commerce. C'était là une idée qui avait été mise de l'avant pendant la première série de négociations. Il semble que l'on cherche plutôt maintenant à obtenir un comité ou un accord spécial de l'OMC qui serait consacré exclusivement à la culture. J'ai toutefois du mal à comprendre qui en seraient les signataires ou les participants.

Il me semble que les industries culturelles qui ont déjà témoigné devant nous considéraient les États-Unis comme la plus importante menace pour notre culture, d'où la nécessité des mesures de protection dont vous parlez. Or, le Canada jouit déjà d'une exception pour ses industries culturelles aux termes de l'ALENA. Naturellement, cette exception s'accompagne d'un droit de représailles de la part des États-Unis. Étant donné que ce droit de représailles subsistera à moins d'une modification de l'ALENA, je me demande simplement comment la chose pourrait fonctionner. Il me semble que les États-Unis n'accepteraient sans doute pas de signer un accord de l'OMC même si un certain nombre d'autres pays le faisaient. Si, donc, l'exception et le droit de représailles existants sont maintenus dans l'ALENA, où cela nous conduirait-il? Comment cela pourrait-il régler les problèmes que vous avez décrits?

Mme Jane Logan: Je ne suis pas spécialiste du commerce, mais je pars du principe qu'il y a des gens qui savent quel est le meilleur instrument à utiliser dans les circonstances. Nous parlions toutefois d'une charte des droits culturels qui ne le céderait en rien à d'autres accords. Non, les États-Unis n'apprécieront guère. Nous avons d'ailleurs été témoins des efforts des États-Unis pour faire avancer leurs objectifs culturels à l'OCDE, puis à l'AMI, et maintenant à l'OMC. Je suis donc sûre qu'il serait très utile de s'attaquer à ces questions culturelles, d'élaborer des définitions, de les réserver et de faire en sorte que l'on s'entende généralement sur les éléments de base de l'accord, même s'ils risquent de continuer à évoluer. D'où viendraient nos appuis? D'après ce que j'ai lu, j'estime que nous avons beaucoup d'appuis. Les Américains viendraient-ils à la table? Je crois que la question est assez importante pour qu'ils veuillent participer aux discussions.

M. Charlie Penson: Très bien. La question que je veux vous poser est donc de savoir si vous demandez que cet accord culturel soit abordé dans le cadre de la nouvelle série de négociations de l'OMC ou s'il devrait faire l'objet de négociations distinctes plus tard. Qu'envisagez-vous au juste?

Mme Jane Logan: Je crois qu'il vaut peut-être mieux s'en remettre aux spécialistes du commerce, mais le mécanisme qui sera retenu, quel qu'il soit, ne devrait pas pouvoir être annulé. Comme je l'ai dit, il ne devrait pas être subordonné à quelque autre accord que ce soit.

M. Charlie Penson: Très bien, mais vous n'êtes pas venue ici demander à notre comité que la culture soit incluse dans la prochaine série de négociations de l'OMC. Voilà ce que j'essaie de savoir.

Mme Jane Logan: Nous sommes ici pour donner notre appui au rapport du GCSCE qui a examiné diverses possibilités, notamment la possibilité de créer une exception pour les biens culturels, et qui s'est prononcé en faveur de l'adoption d'une charte de la culture comme étant la meilleure solution.

Si vous le voulez, nous vous présenterons un rapport complet, dans lequel nous pourrons peut-être être plus précis quant à la façon dont le mécanisme serait utilisé.

M. Charlie Penson: Oui, auquel cas, madame Logan, je crois qu'il serait utile que vous nous donniez des exemples de la façon dont l'accord aurait la préséance par rapport à l'entente que nous avons déjà avec les États-Unis dans le domaine culturel dans le cadre de l'ALENA. Je crois qu'il serait important que le comité sache comment le mécanisme fonctionnerait. J'ai du mal à comprendre cela et à croire que l'on pourra le mettre en oeuvre, mais ce serait utile que vous nous disiez un peu comment cela pourrait fonctionner.

Mme Jane Logan: Nous le ferons.

Le président: Vous ai-je bien vu esquisser le geste de dégainer votre pistolet, madame Fehr?

C'est tout, monsieur Penson?

M. Charlie Penson: Oui.

Le président: Madame Debien.

• 1110

[Français]

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Bonjour, mesdames et messieurs. Ma question s'adresse d'abord à M. Myers et ensuite à Mme Bradford parce qu'elle a traité du même sujet.

Monsieur Myers, dans votre rapport, vous avez dit que les pays industrialisés devaient accorder de l'aide financière et différentes formes d'assistance aux pays en voie de développement. J'aimerais savoir lesquelles et comment. De plus, quelle forme d'aide les entreprises pourraient-elles fournir aux pays en voie de développement?

Madame Bradford, vous avez dit qu'il fallait aussi favoriser l'accès aux infrastructures de télécommunication aux pays en voie de développement. Comment peut-on le faire et quel rôle Téléglobe pourrait-il jouer en ce sens?

Ma deuxième question s'adresse encore à M. Myers. Dans votre rapport, vous soulignez qu'il est dans l'intérêt du Canada de réduire graduellement ses mesures de soutien à l'agriculture. Est-ce que vous remettez en question toute la gestion de l'offre?

Ma dernière question s'adresse à Mme Logan. Vous avez dit que vous souteniez le Groupe de consultations sectorielles sur les industries culturelles, qui propose la création d'un nouvel instrument pour remplacer les exemptions culturelles. Plusieurs des intervenants qui oeuvrent au niveau des industries culturelles sont venus nous dire qu'ils appuyaient la création de ce nouvel instrument. Comme vous l'indiquez dans votre rapport, ça va prendre des lunes avant que la création de ce nouvel instrument puisse se faire. Croyez-vous que le Canada doit entre-temps continuer à défendre sa politique concernant l'exemption culturelle?

[Traduction]

M. Jayson Myers: Tout d'abord, je crois que l'appui aux pays en développement est important. Dans une certaine mesure, les représentants des gouvernements de ces pays viennent souvent aux séances de négociation sans avoir les ressources dont ils auraient besoin pour bien comprendre les accords qu'ils sont appelés à négocier. Ils arrivent aussi sans avoir pu bien se préparer de manière à participer pleinement aux négociations.

L'appui que le Canada pourrait apporter aux pays en développement pourrait prendre deux formes. La première serait l'échange d'information et d'expertise avec les pays en développement afin d'informer les délégués commerciaux de ces pays sur les questions clés et de les aider à se préparer à jouer leur rôle tant avant les négociations que pendant. Il est également très important que le Canada assure à ces pays l'autre type d'aide par l'entremise de l'ACDI, grâce à nos programmes d'aide publics, à nos programmes d'assistance, destinés à renforcer tous les aspects de la gestion des affaires publiques, en ce qui a trait notamment à la mise en oeuvre des règlements et des lois, ou encore à renforcer la gestion des entreprises dans les pays en développement. Il serait également extrêmement important de bâtir une infrastructure de gestion.

[Français]

Mme Maud Debien: Tout le monde sait que l'ACDI le fait déjà, monsieur. Je cherche à savoir ce que l'industrie est prête à faire pour sa part.

[Traduction]

M. Jayson Myers: Premièrement, pouvons-nous travailler avec l'ACDI. Je suis d'accord pour dire que c'est ce que fait déjà l'ACDI, mais j'estime que l'ACDI a un rôle bien plus grand à jouer pour ce qui est d'élargir la portée de son aide. L'entreprise peut aussi jouer un rôle très important pour ce qui est d'accroître la transparence tant des activités de gestion des entreprises que de la réglementation dans ces pays. La principale question qui se pose, bien entendu, est de savoir comment l'entreprise peut conjuguer ses efforts avec ceux de l'État. Je ne pense pas qu'il y ait de voie tracée d'avance quant à la façon d'assurer une relation efficace entre l'entreprise canadienne et les gouvernements des pays en développement, de sorte que cela doit se faire en collaboration avec l'ACDI ou peut-être avec d'autres organismes officiels installés dans ces pays.

• 1115

Je le répète, j'estime que l'entreprise canadienne sait bien à quel point il est important que les gouvernements des pays en développement arrivent à la table bien préparés et qu'ils appliquent de manière efficace les règles auxquelles ils donnent leur adhésion. Par ailleurs, j'estime que le Canada a l'obligation de faire respecter ce qui a été négocié dans les négociations précédentes, notamment celles d'Uruguay. Il ne sera pas facile de persuader les pays en développement de venir participer aux négociations sur une multitude de questions à moins qu'il soit bien évident que ce qui a été négocié auparavant est effectivement appliqué.

Pour ce qui est de la gestion de l'offre dans le domaine de l'agriculture, nous ne préconisons pas l'élimination du jour au lendemain de toutes les activités de gestion de l'offre. Encore là, l'objectif doit être d'ouvrir les marchés pour que les producteurs agricoles et les entreprises agroalimentaires du Canada puissent étendre leurs activités à l'échelle mondiale. J'estime que la souplesse, qui pourrait peut-être prendre la forme d'une gestion de l'offre un peu moins restrictive, est un élément essentiel.

[Français]

Mme Maud Debien: Vous savez que l'Union européenne et les États-Unis subventionnent encore énormément leur agriculture, alors que le Canada a fait plus que ses devoirs à ce chapitre. C'est la raison pour laquelle je voulais savoir si le Canada, étant donné que la ronde sur l'agriculture va commencer à l'automne prochain, doit maintenir sa position, en accord avec toutes les associations de producteurs laitiers au Canada et l'industrie laitière, qui demandent que le Canada maintienne sa position concernant la gestion de l'offre.

[Traduction]

M Jayson Myers: Je crains beaucoup que le Canada puisse être laissé pour compte de toute façon à cause de la façon dont les négociations sur les questions agricoles se poursuivent à l'échelle internationale. Nous ne pouvons pas discuter de ces questions uniquement dans l'optique de la gestion intérieure et de la gestion de l'offre agricole. Si les négociations dans d'autres domaines vont plus loin que cela, j'estime qu'il faut en quelque sorte emboîter le pas à la communauté internationale. Nous devons tout de même tenir compte, bien entendu, de l'intérêt des producteurs agricoles de toutes les régions du Canada.

Je ne dis pas qu'il nous faudrait agir de façon unilatérale, en dehors du processus de négociation. Bien sûr, en ce qui a trait aux problèmes agricoles—les subventions à la production pour le marché européen de l'exportation, la difficulté de pénétrer le marché européen et le marché américain des produits agricoles—, ces marchés sont bien plus fermés que ne l'est le marché canadien. Il n'en reste pas moins que c'est dans ce sens là qu'il faut négocier si nous voulons réaliser notre objectif d'un meilleur accès au marché. Quant à savoir ce que nous obtiendrons au bout du compte du côté agricole, il se peut bien que nous ne réalisions pas notre objectif, mais nous pouvons à tout le moins chercher à obtenir un meilleur accès au marché et être prêts, en échange, à ouvrir bien plus grand notre marché à nous, dans le cadre d'une entente réciproque. Je crois en tout cas que nous devrions aller de l'avant dans le domaine agricole et dans les négociations agricoles et ne pas agir de façon unilatérale dans le contexte des négociations générales.

[Français]

Mme Meriel Bradford: Madame Debien, vous m'avez demandé de parler de la façon dont nous pouvons, en tant qu'entreprise et société canadienne, contribuer à donner un meilleur accès aux infrastructures aux pays en voie de développement. C'est une question à laquelle nous accordons une grande importance et à l'égard de laquelle nous avons fait beaucoup de choses.

Permettez-moi de vous dire que de la façon dont évoluent les télécommunications, si on ne change pas le cadre politique et le cadre législatif, nous ne pourrons rien faire. Il est très important que nous promouvions le travail de la Banque mondiale en vue d'aider les pays qui ont choisi de changer leur cadre politique et qui veulent avoir accès à l'expertise et au vécu du Canada.

• 1120

Téléglobe est quand même un cas épatant puisqu'il a vécu tout cela lui-même. Nous sommes en mesure d'envoyer des gens sur place pour leur expliquer un peu comment nous avons réussi à changer le cadre politique et législatif au Canada afin d'avoir accès aux infrastructures et de démonopoliser les marchés. Il nous arrive souvent d'aller expliquer notre vécu. Nous accueillons souvent des délégations de l'étranger chez nous, que ce soit à Ottawa ou à Montréal. Nous offrons des visites guidées et faisons des présentations.

Il faut encourager la privatisation des monopoles d'État parce qu'il est extrêmement difficile de changer la culture de l'entreprise lorsque règne toujours un monopole d'État, dans le cadre duquel on n'a pas vraiment les outils nécessaires pour changer la culture et les marchés ou pour rendre les entreprises plus sensibles aux besoins des consommateurs.

Ensuite, il faut passer à l'adoption d'une loi cadre-qui va guider les télécommunications et régir tous ceux qui veulent entrer sur le marché. Il faut par la suite mettre sur pied une agence réglementaire indépendante qui sera capable, comme l'est notre CRTC, de gérer le marché et le transfert d'un marché monopolistique vers un marché de concurrence.

Mme Maud Debien: Une agence nationale?

Mme Meriel Bradford: Il s'agirait d'une agence implantée sur le sol national de chaque pays qui serait cohérente avec les principes de réglementation englobés dans l'OMC. On a donc déjà une idée de ce qu'il faut. Ce n'est pas un processus facile parce qu'il faut beaucoup de temps pour monter une agence, pour que les gens apprennent la transparence et les processus de réglementation, et pour développer toute une série de procédures.

Puisque nous avons nos idées sur la réglementation au Canada, nous sommes aptes à proposer des améliorations. Il faut qu'on puisse avoir accès à ces marchés pour que Téléglobe puisse y aller et offrir ses services. Il arrive souvent que lorsqu'un marché s'ouvre, les nouveaux venus décident de ne pas installer tout un réseau international qui coûte très cher. Ils préfèrent avoir accès à INTELSAT et aux câbles sous-marins, et confier le trafic à Téléglobe pour pouvoir se concentrer sur le marché domestique. Ils aiment bien choisir une entreprise canadienne qui ne leur semble pas aussi menaçante qu'un géant américain. Ils viennent souvent chez nous.

Nous offrons aussi une aide technique de formation par l'entremise d'une organisation qui s'appelle TEMIC et qui est basée à Montréal. Cette association offre aux gestionnaires des pays en voie de développement une formation en télécommunications. Elle regroupe les secteurs privé et gouvernemental, et offre toute une série de cours à chaque année aux jeunes et aux moins jeunes qui vivent dans les pays en voie de développement et qui viennent au Canada pour acquérir une formation en gestion des télécommunications. Nous sommes très présents. Nortel participe aussi à ce programme.

Nous sommes souvent appelés par l'ACDI à participer à son équipe de spécialistes en vue d'aider certains pays qui le désirent à changer leur politique et leur loi-cadre. Je participe actuellement à un projet qui vise à aider les Antilles à repenser leur cadre politique dans différents secteurs, dont celui des télécommunications. Notre vécu s'avère très utile.

Le CRTC a travaillé à la compilation d'une banque de données de spécialistes canadiens qui sont prêts à offrir leurs services techniques, de formation ou de gestion aux entreprises à l'étranger.

La Banque mondiale apporte une contribution extrêmement importante au niveau du financement du changement du cadre politique et de la loi. Pour sa part, l'OIT investit une trentaine de millions de dollars par année dans des programmes à l'intention des pays en voie de développement. Nous participons aussi à ces initiatives en les aidant à établir des priorités et en proposant des programmes. C'est un ancien fonctionnaire du ministère des Communications du Canada qui gère ce programme de 30 millions de dollars au bénéfice des pays en voie de développement.

De plus, l'Internet va offrir toutes sortes de possibilités qu'on n'a pas encore imaginées pour la télé-éducation et le travail dans un contexte global, à partir de chez nous. J'ai beaucoup d'espoir face à l'Internet pour ce genre de formation et de coopération au niveau international.

• 1125

Mme Maud Debien: Ce serait bien d'avoir l'électricité, n'est-ce pas?

Mme Meriel Bradford: Tout commence par le cadre dans lequel l'entreprise...

Mme Maud Debien: Le cadre politique.

Mme Meriel Bradford: ...peut faire la concurrence.

Le président: Merci, madame Bradford.

C'est une période de 5 minutes qui s'est transformée en une période de 15 minutes. Madame Debien, comme d'habitude, avec votre charme, vous pouvez obtenir n'importe quoi.

Mme Jane Logan: Je peux répondre très vite.

[Traduction]

Vous m'avez demandé si le Canada devait continuer de réclamer l'exemption culturelle à l'heure où il reste énormément à faire pour mettre au point une charte de la culture. Cette charte est censée devenir un nouvel instrument international qui éliminera la nécessité de créer des exceptions à l'avenir et qui aplanira les difficultés de leur mise en oeuvre. La réponse est donc non.

Vous disiez qu'il faudra longtemps pour mettre au point cette charte, et j'imagine que nous sommes d'accord, mais nous avons de solides relations avec d'autres pays qui ont déjà de nombreux programmes culturels en place. Nous pensons que nous pouvons tabler sur ces nombreuses relations pour faire avancer ce dossier, nous sommes donc confiants.

[Français]

Mme Maud Debien: En attendant, on doit maintenir l'exemption culturelle. C'est ce que vous me dites?

[Traduction]

Mme Jane Logan: Non, je dis qu'il faut la maintenir ou en négocier une nouvelle.

Le président: Monsieur Reed.

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, monsieur le président. Tout d'abord, je tiens à faire mes excuses au comité étant donné que je n'ai pas pu assister à toute la séance. J'étais retenu en Chambre. Donc si on a posé certaines de mes questions, dites-le- moi. Arrêtez-moi, et on passera à autre chose.

Ma question s'adresse aux Manufacturiers et Exportateurs du Canada et porte tout particulièrement sur l'agriculture. Dans ce domaine, on s'est toujours préoccupé de ce qu'on appelle au Canada la gestion de l'offre. Je tiens à mettre les choses au clair d'emblée en disant que la gestion de l'offre, tout d'abord, ne s'applique pas à tout le secteur agricole, loin de là. Seulement une partie du secteur agricole est visée, et la gestion de l'offre existe parce que certains pensent qu'elle profite dans une certaine mesure à l'économie canadienne et aux fermiers du Canada.

Si l'on regarde du côté américain, particulièrement là où il existe des techniques assez semblables pour l'élevage de la volaille, la production des oeufs et autres choses, ces secteurs agricoles dont l'offre est gérée chez nous sont dans une large mesure entre les mains de grandes entreprises américaines, où le fermier est devenu un employé de neuf à cinq, et nous avons décidé...

Le président: Je dirais plutôt un employé de neuf à minuit.

M. Julian Reed: Le Canada a décidé de privilégier cette technique sur les instances du secteur agricole. Nous renonçons à certaines choses d'un côté, mais d'un autre côté, le consommateur trouve son compte. Le consommateur a droit à une offre soutenue pour certains produits; il obtient ainsi des produits de la plus haute qualité, qu'on ne retrouve pas aux États-Unis, je le signale. Il y a donc certains compromis ici. Voilà pour mon petit plaidoyer en faveur de la gestion de l'offre.

Ce qui me préoccupe, quand on parle de réduction des barrières tarifaires, des subventions et des barrières non tarifaires, c'est le fait qu'on a dit du Canada qu'il avait dix ans d'avance sur la plupart des autres pays pour ce qui est de son approche à la réduction des subventions. Nous croyons que notre agriculture, si elle peut le faire à armes égales, peut concurrencer n'importe quel autre pays, mais on ne lui donne pas cette chance.

• 1130

Je vais vous donner un exemple, qui ne semble jamais faire l'objet d'un examen méticuleux, et c'est l'approvisionnement en eau aux États-Unis. L'eau est l'une des choses les plus subventionnées aux États-Unis, et on n'en parle jamais. L'alimentation en eau est pourtant gérée par le Corps de génie de l'armée. Personne ne dit que c'est une subvention, mais je vais vous dire qu'aux États-Unis, avec la demande en eau qui existe maintenant et le point presque critique que l'approvisionnement en eau a atteint aux États-Unis, il y a bel et bien subvention.

Vous pouvez donc peut-être nous aider ici. Comment allons-nous définir ce genre de barrières? Comment allons-nous caractériser ces éléments et dire que s'il n'y avait pas d'eau, si le coût de ce système d'irrigation n'était pas absorbé par le gouvernement américain, où en serait tel ou tel secteur particulier de l'agriculture? Dans quel état se trouverait l'agriculture américaine aujourd'hui? On dirait qu'on ne parle jamais de ce genre de barrières.

Le président: Monsieur Myers.

M. Jayson Myers: De toute évidence, rien n'est simple en matière d'agriculture; c'est très compliqué, comme vous dites, pour ce qui est de la gestion de l'offre. Je pense que le genre de questions que vous soulevez, pour ce qui est des subventions, dont certaines sont peut-être plus évidentes que d'autres, particulièrement sur le marché nord-américain, devraient retenir notre attention. Et je suis d'accord avec vous, je pense, pour ce qui est du degré d'ouverture du marché canadien aux produits agricoles: nous sommes en avance sur les États-Unis et un grand nombre d'autres pays aussi.

Mais ce qui nous préoccupe le plus, dans l'approche aux négociations agricoles, c'est de savoir si l'on dit simplement que tel est notre système de gestion de l'offre et nous allons le protéger quelle que soit l'orientation des négociations, ou si nous devrions préconiser dans les négociations l'ouverture la plus grande possible du marché aux producteurs canadiens. Je suis d'avis que c'est cette approche que nous devons privilégier dans les négociations. Nous devons réclamer l'accès total au marché. Et je suis d'accord avec vous pour dire qu'à armes égales, nos fermiers pourraient faire concurrence à n'importe qui et notre secteur agroalimentaire serait extrêmement compétitif. Nous devons donc réclamer l'égalisation des chances et l'accès total au marché. C'est ce qui devrait être notre objectif.

Et si nous obtenons cet accès aux marchés, si nous pouvons réduire les subventions à l'exportation sur certains marchés avec lesquels nous sommes en concurrence, il faut que notre propre système de gestion de l'offre soit assez souple pour que nous puissions maintenir ces gains, et c'est tout ce que nous disons. Encore là, nous ne disons pas qu'il faut procéder unilatéralement ici et en marge de ce que nous essayons d'accomplir à l'échelle internationale.

M. Julian Reed: Mais c'est aujourd'hui un levier auquel nous nous accrochons parce que certains pensent que nous n'arriverons pas à faire ces percées. Nous ne réussissons pas à faire de percées pour d'autres denrées. Par exemple, le vin canadien remporte des prix partout en Europe. Mais impossible d'y vendre une seule bouteille. Expliquez-moi pourquoi. C'est à cause du protectionnisme. Notre blé est le meilleur au monde. Les minotiers américains veulent du blé canadien. Mais quand on essaie de le vendre aux États-Unis, on se bute à des obstacles.

M. Jayson Myers: Mais ne devrions-nous pas essayer d'atteindre ces objectifs relatifs à l'accès aux marchés par la négociation?

M. Julian Reed: Ce sont nos objectifs, je suis d'accord. Je suis d'accord pour dire que ces objectifs devraient être les nôtres.

M. Jayson Myers: Précisément. Nous devrions négocier l'accès aux marchés, et cela devrait faire partie de notre stratégie de négociation.

• 1135

M. Julian Reed: Je m'attends à ce que, en Europe en particulier, si l'on demande aux Européens d'égaliser les chances avec le Canada pour ce qui est de la production alimentaire, il y ait de nouveau des émeutes à Paris.

Merci, monsieur le président.

Le président: Je peux peut-être alors poser quelques questions. Je dois dire, monsieur Myers, que rien que dans le secteur agricole, ce que j'ai appris, chose certaine—et je ne crois pas que je le savais lorsque ces audiences ont commencé—c'est qu'il est parfaitement évident, si l'on en croit les statistiques que nous a communiquées le milieu agricole, que les marchés canadiens sont plus ouverts que les autres, et il s'agit d'un pourcentage considérable. Nous sommes ouverts dans une proportion de 8 p. 100 ou quelque chose de cet ordre, alors que le marché américain n'est ouvert que dans une proportion de 2,5 p. 100. Si nous pouvions obtenir encore 2 p. 100 du marché américain, j'ai la certitude que beaucoup de gens seraient disposés à donner quelque chose en retour.

Mais à l'heure où nous nous parlons, tant que les autres pays ne nous rattraperont pas, nos fermiers nous demandent d'attendre qu'ils le fassent avant de parler de concessions. Mais ne nous dites pas qu'il faut renoncer à quelque chose pour obtenir un avantage éphémère, qui n'a rien à voir avec l'accès aux marchés, alors qu'on maintient dans d'autres pays les subventions aux betteraves, les exclusivités pour les arachides, et toute cette collusion qui existe dans le système politique. Ce n'est qu'une observation. Je ne vous demande pas de répondre.

M. Jayson Myers: Précisément. Nous ne devrions pas aborder ces négociations en prétendant être prêts à faire des compromis à moins que nous n'acceptions l'ouverture des marchés.

M. Owen Lippert: J'aimerais ajouter une chose. Il y a longtemps que, chez les intellectuels, on débat de l'interprétation à donner au libre-échange. Au début du XIXe siècle, Torrens s'est opposé au libre-échange en invoquant ces «termes de l'échange». C'est un concept qui a été beaucoup étudié et je me contenterai de dire qui, à l'heure actuelle, on estime que la suppression unilatérale des divers tarifs et obstacles discriminatoires s'accompagne d'une croissance économique accrue, car celle-ci se réalise non pas dans un marché fermé, mais bien en permettant aux industries d'accroître leur spécialisation et leur compétitivité. D'après les études en économie, du moins, il existe un argument très convaincant qui plaide en faveur de l'élimination unilatérale des tarifs et autres formes de discrimination. En outre, la stratégie du talion est un problème politique compte tenu des sensibilités politiques relatives aux conséquences pour l'industrie et les salaires.

Le président: Nous pourrions manifestement nous engager dans ce débat, mais peut-être serait-il préférable de ne pas le faire, car j'ai des questions à vous poser. J'abonde dans le même sens que vous, monsieur Lippert, mais je ne crois pas être assez naïf pour dire que le monde du libre-échange est merveilleux et que tous y respectent les règles du jeu.

Si vous êtes en faveur du désarmement unilatéral et que vous êtes prêt, en toute vulnérabilité, à vous jeter à l'eau, libre à vous de le faire. Mais ceux qui perdront leur emploi et qui devront passer par une longue et douloureuse période d'adaptation ne seront pas d'accord. Je ne crois pas que les élus qui font affaire avec ces gens-là seront d'accord non plus.

Nous avons entendu un excellent témoignage d'un représentant du secteur agricole du Québec. Vous n'étiez pas là, mais certains membres du comité y étaient. Il nous a dit que quiconque croit que les Européens adhéreront à un système qui entraînera la perte de plusieurs centaines de milliers d'emplois agricoles au cours des prochaines années se berce d'illusions. C'est impossible. Alors, il serait bien bon de vivre dans le monde que vous décrivez, mais ce n'est pas le monde tel qu'il existe. Or, nous devons trouver des solutions applicables au monde dans lequel nous vivons.

Sur ce, j'aimerais vous poser quelques questions. Voici la première. Vous avez parlé de l'ADPIC. Savez-vous si les États-Unis, dans leurs lois sur la propriété intellectuelle et les brevets, se sont entièrement conformés à la décision du GATT selon laquelle les lois américaines en matière de propriété intellectuelle allaient à l'encontre du GATT et si, puisque les États-Unis mènent la lutte à ce sujet, leurs lois sont maintenant conformes aux règles de l'OMC? D'après mon expérience avec les États-Unis, ils ont probablement fait des promesses qu'ils n'ont pas remplies. Ils trichent toujours. Ils trouvent toujours le moyen d'inclure dans leurs lois des dispositions qui violent... Le président accepte de faire une chose et le Congrès fait le contraire.

J'aimerais donc savoir si vous étiez au courant de ces faits.

Deuxièmement, au sujet de l'ADPIC et de meilleures normes, je crois que l'on connaîtra des difficultés lorsque la Chine accédera à l'OMC. C'est probablement dans notre intérêt à tous que d'inclure la Chine à l'OMC, mais, certainement, les Américains... Cela ne s'est pas réalisé pendant la visite de M. Zhu, mais cela semble en bonne voie de se réaliser. Cela pourrait même se faire d'ici novembre.

• 1140

Que faisons-nous de l'ADPIC? Une fois que la Chine se sera jointe à l'OMC, n'y aura-t-il pas de nouveaux problèmes assez sérieux? N'y aura-t-il pas un débat entre les pays tels que le Brésil, l'Inde et la Chine et ceux comme nous qui exportent des biens intellectuels et qui réclameront des normes plus strictes? Comment envisagez-vous la situation?

M. Owen Lippert: Pour répondre à votre question sur la conformité des lois américaines à l'ADPIC, j'ignore si tel est le cas. Les États-Unis ont récemment adopté certaines lois, en 1995, je crois. La principale difficulté du système américain, et Stuart et Glen en savent beaucoup plus à ce sujet que moi, c'est la différence entre la priorité au premier déposant et la priorité à l'inventeur. C'est là que le bât blesse, je crois, pour ce qui est de la conformité des lois américaines. Manifestement, il est dans l'intérêt des États-Unis de se conformer à l'ADPIC. Les grandes industries pharmaceutiques, du diversement et du logiciel de ce pays exportent plus de la moitié de leurs produits et font la moitié de leurs chiffres d'affaires outre-mer. Ces industries exercent donc des pressions pour que les lois nationales soient conformes à l'ADPIC afin de consolider la position américaine à l'étranger.

Pour ce qui est de savoir s'il y a d'autres intérêts en jeu, certainement, il y a toujours d'autres intérêts en jeu. Ce qui est intéressant au sujet de la Chine, c'est que, d'une certaine façon, la Chine n'a pas un aussi mauvais bilan en matière de propriété intellectuelle. Le principal problème, en Chine, c'est la copie illégale par opposition à l'appropriation de biens intellectuels sanctionnée par l'État.

Le président: C'est donc une question d'application des lois.

M. Owen Lippert: On ne connaît pas en Chine les mêmes difficultés qu'en Argentine ou en Inde, où le gouvernement ferme les yeux devant le vol de biens intellectuels étrangers pour pouvoir renforcer sa propre industrie. En Chine, ces gestes répréhensibles sont en fait illégaux, contraires aux lois chinoises, et ce problème peut se régler. Il est vrai que l'on fait beaucoup de copie en Chine, mais, au moins, le gouvernement a pris quelques mesures pour lutter contre ce crime. Je ne crois donc pas que la propriété intellectuelle constituera le principal obstacle de l'accession de la Chine à l'OMC; on remettra plutôt en question sa subvention tous azimuts des industries d'État et leur très mauvais financement.

Le président: Vous avez donné l'Inde et l'Argentine comme exemples de... avez-vous parlé de l'Argentine?

M. Owen Lippert: L'Argentine, oui.

Le président: ... comme exemples de pays où de nombreuses lois permettent...? Ces lois s'apparentent-elles à nos lois sur les brevets? Il s'agit donc de savoir si, oui ou non...

M. Owen Lippert: On y trouve diverses formes de permis obligatoires, qu'on est censé supprimer, mais il y a toujours controverse sur la question de savoir si ces pays se conforment aux règles de l'OMC, sont en voie de se conformer à ces règles ou ont des industries sans réglementation aucune.

Le président: Merci beaucoup.

M. Glen Bloom: Monsieur le président, si je peux me permettre d'ajouter une chose...

Le président: Je vous en prie.

M. Glen Bloom: En ce qui a trait aux obligations prévues dans l'ADPIC, dans une grande mesure, les lois américaines ne sont pas conformes à cet accord. La question relative aux brevets qu'a mentionnée M. Lippert, c'est-à-dire de savoir s'il s'agit d'un régime fondé sur la priorité au premier déposant ou sur la priorité à l'inventeur, n'a pas été soulevée dans le cadre des négociations sur l'ADPIC, mais elle a été abordée au niveau international à l'OMPI dans le contexte de l'harmonisation des règles juridiques de fond. Mais ce n'était pas à l'ordre du jour des rencontres sur l'ADPIC.

Au sujet de la Chine, il est certain que pour les entreprises canadiennes qui exportent à l'étranger et pour les Canadiens au Canada, le problème, c'est la contrefaçon en Chine et, du coup, l'exécution des droits en matière de propriété intellectuelle. C'est une importante préoccupation et manifestement une question qui a été abordée aux plus hauts échelons par les Américains et les Chinois.

Le président: Merci beaucoup. Vos réponses nous sont très utiles.

J'ai deux autres questions qui s'adressent à l'un ou l'autre des témoins. Monsieur Myers, pour en revenir à ce que vous avez dit sur les pays en développement en réponse à la question de Mme Debien, avez-vous suivi les négociations concernant la ZLEA? Je sais qu'un des principaux aspects de ces négociations, ce sont les micro-économies ou les économies des petits États. Croyez-vous qu'il serait logique que l'on fasse de même dans le cadre des négociations de l'OMC? Est-ce un modèle dont on devrait s'inspirer plutôt que de parler de pays peu développés ou de nouveaux pays industrialisés et ainsi de suite? Ne devrions-nous pas reconnaître que certaines économies sont plus vulnérables en raison de leur taille au sein de l'économie globale, et mettre l'accent là-dessus? C'est là où je veux en venir avec ma question.

• 1145

J'ai une question pour tous les témoins à propos du commerce électronique, qui, d'après ce qu'a dit quelqu'un dans son mémoire, serait très à la mode ces jours-ci, surtout chez nos collègues américains. Est-ce que le commerce électronique s'inscrit déjà quelque part ou devra-t-on prévoir un volet pour le commerce électronique comme on l'a fait pour les télécommunications. Si le commerce électronique s'inscrit déjà quelque part, dans quel volet figure-t-il? Dans laquelle des structures existantes trouve-t-on le commerce électronique, ou devra-t-on prévoir une nouvelle structure distincte pour cela?

M. Jayson Myers: Tout d'abord, en ce qui concerne non seulement la ZLEA, mais aussi les progrès de nos négociations avec le Chili, en ce qui concerne aussi le MERCOSUR et l'éventuelle zone de libre-échange de l'Asie du Sud dont, bien sûr, le Canada ne fera pas partie mais où le Canada constituerait une importante priorité en matière de commerce régional et de stratégies régionales en Asie du Sud, il y a beaucoup de pain sur la planche et les diverses alliances et certaines associations d'entreprises canadiennes, ainsi que certaines entreprises canadiennes, participent activement à des programmes pour aider les petites entreprises à s'adapter.

Pour ce qui est de la modernisation, surtout de la part des petites et moyennes entreprises, la réaction de ces entreprises à une plus grande ouverture des marchés... On se tourne vers le Canada et les petites entreprises canadiennes, qui ont fait l'expérience de l'ALENA et qui dispensent des conseils d'experts, mais aussi de l'aide technique.

Tout cela est extrêmement important, non seulement pour l'établissement de relations d'affaires dans ces marchés, mais aussi pour aider ces entreprises implantées dans des petits marchés, surtout dans les nouveaux pays industrialisés ou les pays peu développés, à trouver une part de l'aide technique dont elles ont besoin. C'est très important. C'est une priorité des programmes de développement commercial de l'alliance, et bon nombre de nos divisions jouent un rôle actif à cet égard.

La dernière fois que j'ai témoigné devant votre comité, je devais me rendre en Inde et au Pakistan. J'arrive de ces pays où j'ai présenté toute une série d'exposés sur l'expérience des entreprises canadiennes par suite de l'adoption de l'Accord de libre-échange et de l'ALENA.

J'ai l'impression que, dans ces économies, on juge important de mettre à contribution le milieu des affaires non seulement dans les négociations sur le libre-échange, mais aussi dans les négociations sur le commerce multilatéral, car il importe d'apaiser les craintes des petites entreprises. Plus particulièrement, la prochaine série de négociations de l'OMC se soldera par une libéralisation accrue des marchés et une concurrence globale encore plus féroce, et les petites entreprises seront de nouveau vulnérables, car elles ne pourront rivaliser avec les importations à prix modique provenant de grandes multinationales.

Bien sûr, on a débattu de toutes ces questions au Canada dans les années 80; on en débat maintenant dans les petites économies et les économies en développement. Si nous voulons que les négociations de l'OMC ne profitent pas qu'à un petit nombre de pays, si nous voulons mettre à contribution les économies en développement, il faudra tenir compte de ces préoccupations et fournir de l'aide. C'était une longue réponse à votre première question.

• 1150

Concernant le commerce électronique, je crois que ce concept va bien au-delà de la simple idée d'un marché électronique. À une époque, l'Internet était une bibliothèque électronique, on le considère maintenant plutôt comme un marché électronique. Mais en fait, l'Internet n'est qu'une forme de communication. Toutes les autres questions que nous avons abordées aujourd'hui, l'approvisionnement, la réglementation culturelle, la réglementation du contenu et de la radiodiffusion, la technologie, la protection de la propriété intellectuelle, et ainsi de suite, gravitent autour du commerce électronique.

Nous avons exempté de taxe les transactions faites sur Internet et nous ne voudrions pas régresser et voir l'imposition de nouveaux obstacles tarifaires ou non tarifaires en matière de commerce électronique. J'estime que l'on devrait plutôt tabler sur le régime qui existe.

Je serais inquiet de savoir qu'on traitera du commerce électronique dans le cadre des négociations sur les autres accords. C'est un domaine où nous pourrions promouvoir un commerce plus libre et le mouvement de services et de biens physiques de façon non électronique. Le renforcement du régime actuel, avec des règles plus précises, et la protection de la propriété intellectuelle, où les accords accusent un retard par rapport à la technologie, sont des questions distinctes. Sur de nombreux plans, nous avons de l'avance dans le domaine du commerce électronique, bien davantage que dans le traitement des autres biens et services.

Le président: Si j'ai bien compris votre réponse, vous estimez qu'il suffit, pour le commerce électronique, de resserrer les dispositions générales de l'OMC qu'elles traitent d'obstacles tarifaires ou non tarifaires, et plus particulièrement dans le domaine des services. Il n'y aura pas de code du commerce électronique, comme il existe un accord sur les télécommunications, les services financiers et bancaires, etc. Il n'y aura pas d'accord sur le commerce électronique. Il y aura simplement un ensemble de principes généraux qu'on retrouvera dans tous ces accords et qui s'appliqueront au commerce électronique.

M. Jayson Myers: Dans le cas de certains aspects du commerce électronique, nous voudrons peut-être conserver le régime actuel de communication libre et de commerce ouvert. Je ne voudrais pas que cela soit exclu simplement parce qu'on inclura le commerce électronique dans les négociations sur les accords existants.

Nous sommes d'avis que c'est un domaine important qui mérite une étude plus approfondie, que le commerce électronique pourrait très bien s'insérer dans certains des accords existants où nous pourrions faire des gains, et que, à d'autres égards, il conviendrait peut-être d'envisager un accord distinct ou, du moins, conserver les avantages du décloisonnement des marchés dont nous jouissons déjà. Encore une fois, il ne s'agirait pas d'un régime visant le commerce électronique, mais plutôt d'un régime visant les communications électroniques.

M. Glen Bloom: J'ajouterais à ce sujet qu'il faudra régler certaines questions relatives à la protection des renseignements personnels et que cela pourrait donner lieu à un volet distinct. J'aimerais aussi aborder deux autres sujets.

La question de la propriété intellectuelle soulève bien des préoccupations importantes. D'abord et avant tout, il y a la protection du contenu dans l'environnement électronique. Le traité sur le droit d'auteur de l'OMPI énonce trois points qui doivent être pris en compte. Le premier est l'établissement du droit de communiquer avec le public par le biais des télécommunications pour protéger le contenu d'Internet, lequel droit inclurait le droit de diffusion sur un site Web. Je crois que le Canada respecte déjà cette règle, mais ce n'est pas certain.

Deuxièmement, il serait nécessaire d'établir...

Le président: Est-ce en raison de notre Loi sur le droit d'auteur?

M. Glen Bloom: Notre version actuelle de la Loi sur le droit d'auteur prévoit le droit de communiquer avec le public par le biais des télécommunications. Il n'a pas encore été établi catégoriquement si ce droit s'applique si l'oeuvre est mise à la disposition du public et non pas communiquée. On souhaiterait permettre les poursuites si l'oeuvre a été mise à la disposition du public sur un site Web, sans avoir à établir si elle a été communiquée à quelqu'un d'autre.

• 1155

Le président: À votre connaissance, est-ce qu'on envisage de modifier la Loi sur le droit d'auteur en ce sens?

M. Glen Bloom: Le ministère de l'Industrie examine la ratification de ce traité; la question n'est donc pas réglée. Aucune politique n'exige que nous ratifions ce traité. Comme je l'ai dit plus tôt, j'estime qu'il nous faudrait une politique avant d'amorcer les prochaines négociations de l'OMC, car d'autres pays réclameront avec vigueur l'application du traité.

Il y a deux autres aspects du traité sur le droit d'auteur qui soulèvent des préoccupations. Ce traité défend le contournement des mesures technologiques limitant l'accès ou l'usage d'oeuvres protégées par le droit d'auteur. Cela inclurait la boîte noire qu'on trouve sur le téléviseur et qui décode illégalement les signaux. Le traité comprend des dispositions qui exigeraient une telle interdiction. Si le Canada est tenu de se conformer à ce traité, il lui faudra modifier sa loi, mais il apparaît sensé de le faire.

La troisième question, la falsification de l'information de gestion des droits—avis de droit d'auteur ou de propriété de l'information—de manière à faciliter les violations suscite de vives préoccupations.

Ce sont probablement là les trois domaines de propriété intellectuelle en matière de commerce électronique, à part la protection des bases de données de façon générale, qui suscitent des préoccupations.

Le président: Vous avez mentionné la protection de la vie privée. Est-ce que la pornographie serait une autre question?

M. Glen Bloom: Oui, mais cela va au-delà du simple dossier du commerce électronique.

Le président: Madame Bradford, et ensuite je pense que nous allons lever la séance.

Mme Meriel Bradford: Merci.

Je pense que nous en sommes vraiment presque au point où nous ne pouvons pas envisager d'affronter le système commercial mondial avec les vieilles structures que nous avions. Je dirais au comité que sans vouloir chambarder toute la structure, nous devons vraiment réfléchir à la façon de faire des affaires dans une économie mondiale. Avons-nous toutes les bonnes cases bien alignées dans l'actuelle OMC, avec le GATT ici, GATTS là-bas, d'autres codes ici ou là, et des liens avec l'OMPI? Je vous le dis bien franchement, si nous devions aujourd'hui tout refaire à partir de zéro, je ne suis pas du tout certaine que nous reconstruirions tout cela.

La question se résume donc à une question très pragmatique pour le système commercial mondial. Voulons-nous reformuler tous les instruments internationaux que nous avons, ou bien plutôt procéder à la pièce, en ajoutant un peu ici ou là, étant donné que nous voulons une récolte précoce, ou bien voulons-nous tout refondre le système commercial mondial?

C'est là une considération vraiment très générale que je fais au comité. Normalement, je n'aborderais pas cela avec vous, mais essentiellement, le commerce électronique en est arrivé au point où il faut se demander combien de gens vont pouvoir faire des transactions dans un monde branché à l'échelle planétaire. Nous n'allons pas faire des échanges commerciaux de part et d'autre de nos frontières en maintenant en place nos postes tarifaires et notre système tarifaire harmonisé. Ce n'est pas le monde dans lequel nous vivrons au cours du prochain millénaire.

Si les gens veulent vraiment réfléchir de façon créatrice aux structures qu'il nous faut, il est certain que nous aurons besoin, comme M. Bloom l'a dit, d'éléments qui sont acceptables au niveau national et à l'échelle planétaire. Je ne pense pas que tout cela doive nécessairement se faire à l'OMC. Cela veut dire repenser toutes nos institutions internationales pour le commerce électronique mondial et toutes les activités économiques mondiales. Je ne sais pas si nous, au Canada, sommes prêts à nous attaquer à cette tâche. Chose certaine, nous ne sommes pas prêts en tant qu'intervenants internationaux.

Le commerce électronique, pour moi, cela veut dire examiner chacune des cases qui existent déjà et se demander: «Ce problème-ci est-il résolu, ou bien faut-il trouver une nouvelle règle, ou un droit ou une obligation pour régler le problème?» La question reste entière, mais je suis quelque peu sceptique et je ne crois pas que nous ayons besoin actuellement de nouvelles cases.

Le président: Est-ce que l'un ou l'autre des 134 membres de l'OMC est prêt à s'attaquer à ce dossier en particulier?

Mme Meriel Bradford: Non.

Le président: C'est un grand défi, n'est-ce pas?

Mme Meriel Bradford: C'est aussi un piège, parce que les gens aiment utiliser l'expression «commerce électronique», qui est à la mode, et se mettent à penser à de nouvelles obligations. Nous devrions être un peu plus pragmatiques. Nous devons faire preuve d'imagination à long terme, mais pour le moment, il faut être plutôt pragmatiques pour ce qui est des nouveaux droits et des nouvelles obligations dont on discute actuellement.

Le président: Je remercie infiniment tous les membres du groupe.

Monsieur Reed, je m'excuse, mais je dois vraiment partir car j'ai d'autres engagements. Nous vous sommes vraiment reconnaissants d'être venus et de nous avoir fait part de vos observations très utiles.

Il est certain que si vous avez d'autres idées d'ici à ce que nous rédigions notre rapport—nous comptons remettre notre rapport en juin—, nous nous ferons un plaisir d'en prendre connaissance, de même que nos fidèles attachés de recherche, qui sont d'avides lecteurs et consommateurs de tout ce qui leur est envoyé.

Je vous remercie beaucoup d'être venus témoigner pour éclairer notre lanterne.

La séance est levée. La prochaine séance aura lieu jeudi à 9 heures, sous réserve de la possibilité d'une réunion d'information sur le Kosovo qui aurait lieu de 8 heures à 9 heures.