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OGGO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires


NUMÉRO 012 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 1er avril 2022

[Enregistrement électronique]

  (1300)  

[Traduction]

    Bienvenue à la 12e réunion du Comité permanent de la Chambre des communes.
    Il est 13 heures, si je me fie à mon horloge, et nous voulons nous assurer d'avoir terminé avant 15 heures.
    C'est la réunion numéro 12 du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires. Le Comité poursuivra aujourd'hui ses études des projets d'approvisionnement en défense aérienne et de la stratégie nationale de construction navale.
    Le Comité examinera chaque étude séparément. L'étude des projets d'approvisionnement en défense aérienne fera l'objet de discussions durant la première heure, et l'étude de la stratégie nationale de construction navale fera l'objet de discussions au cours de la seconde heure. Les témoins qui discuteront des projets d'approvisionnement en défense aérienne feront une déclaration liminaire d'au plus trois minutes au début de la première heure. Par la suite, le reste de l'heure sera consacré aux questions des membres. Les témoins qui comparaissent dans le cadre de l'étude de la stratégie nationale de construction navale feront une déclaration liminaire d'au plus trois minutes au début de la deuxième heure. Par la suite, le reste de l'heure sera consacré aux questions des membres.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre 2021. Les membres assistent en personne dans la salle ainsi que par Zoom. En ce qui concerne la liste des intervenants, le greffier du Comité et moi-même ferons de notre mieux pour maintenir un ordre d'intervention consolidé pour tous les membres, qu'ils participent à la séance virtuellement ou en personne.
    Je saisis l'occasion de rappeler à tous les participants à cette réunion que les captures d'écran et la prise de photos de votre écran ne sont pas autorisées.
    Compte tenu de la pandémie actuelle et des recommandations des autorités de santé publique, ainsi que de la directive du Bureau de régie interne du 19 octobre 2021 de rester en santé et en sécurité, il est recommandé aux personnes qui assistent à la réunion en personne de prendre les mesures suivantes.
    Tous ceux qui présentent des symptômes doivent participer aux séances par Zoom et s'abstenir d'y assister en personne. Chacun doit maintenir une distance physique de deux mètres, qu'il soit assis ou debout.
    Tous les participants doivent porter un masque non médical lorsqu'ils circulent dans la salle. Il est fortement recommandé que les députés portent leur masque en tout temps, y compris lorsqu'ils sont assis. Des masques non médicaux, qui offrent une meilleure clarté que les masques en tissu, sont offerts dans la salle.
    Toutes les personnes présentes doivent maintenir une bonne hygiène des mains en utilisant le désinfectant pour les mains à l'entrée de la salle. Les salles de comité sont nettoyées avant et après chaque réunion. Chacun est invité à contribuer à cet effort en nettoyant les surfaces telles que le bureau, la chaise et le microphone avec les linguettes désinfectantes fournies lorsqu'il quitte un siège ou s'apprête à y prendre place.
    À titre de président, je ferai appliquer ces mesures pendant toute la durée de la réunion, et je remercie à l'avance les membres du Comité de leur coopération.
    Nous allons poursuivre notre étude des projets d'approvisionnement en défense aérienne.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins et les inviter à faire leur déclaration liminaire.
    Nous allons commencer avec M. Collins, puis nous entendrons M. Ferguson et M. Kasurak.
    Nous allons commencer avec M. Collins, s'il vous plaît, pour trois minutes.
    Je vous remercie de m'avoir invité à vous parler de ce sujet des plus importants, les projets d'achat d'équipement de défense aérienne du Canada.
    Le rapport de 2016 du Comité permanent de la défense nationale sur l'état de disponibilité des forces aériennes du Canada notait alors que « le contexte de sécurité international est imprévisible et toujours fluctuant ». Je pense que les événements des huit derniers mois, sans parler des cinq dernières semaines, ont réitéré à quel point cette déclaration est vraie, et tous ces événements ont des conséquences sur la défense aérienne du Canada et sur la politique de défense au sens large.
    Les changements rapides chez les amis comme chez les ennemis — comme l'invasion de l'Ukraine par la Russie — exigent une évaluation lucide du rôle du Canada dans le monde et des investissements que nous devons faire collectivement pour défendre efficacement notre souveraineté au pays et maintenir nos alliances sur le continent et outre-mer. Cette tâche incombe à la fois à notre gouvernement, aux parlementaires et aux citoyens.
    Cependant, l'approche adoptée pour l'équipement des Forces armées canadiennes au cours des dernières décennies n'est plus satisfaisante. Certes, dans le domaine de la défense aérienne, les gouvernements actuels et passés ont renouvelé des flottes d'avions, comme l'avion de transport Hercules C‑130J, ou introduit de nouvelles capacités, comme les avions de transport stratégique C‑17.
    Des progrès ont également été réalisés dans la fourniture de nouveaux avions de recherche et de sauvetage à voilure fixe avec les C‑295 et dans la modernisation des avions de patrouille CP‑140 Aurora. Ces deux initiatives sont les bienvenues, tout comme le projet d'acquisition d'une nouvelle capacité de transport stratégique par avion-citerne d'ici la fin de la décennie.
    Cependant, outre ces quelques exceptions, le processus d'achat d'équipement pour les principaux projets de défense aérienne reste entravé de manière frustrante par la politisation des projets et par un processus lourd, fondé sur le statu quo et partagé entre les agences centrales et la bureaucratie des achats d'équipement de la défense. De l'aveu même du ministère du MDN, il faut en moyenne 15 ans pour livrer un nouvel équipement aux FAC. Il s'agit toutefois d'une moyenne, et cela peut souvent prendre plus de temps.
    L'avion de recherche et de sauvetage à voilure fixe, par exemple, a été déterminé pour la première fois en 2002. Le dernier C‑295 est attendu en 2024, soit 22 ans plus tard. Je n'ai pas besoin de vous rappeler le cas du remplacement du CF‑18.
    Enfin, il y a la modernisation du NORAD, un élément hautement prioritaire entre le Canada et les États-Unis qui est au cœur de notre alliance de défense continentale partagée depuis 1958. Comme c'est souvent le cas, la question reste de savoir quels coûts nous sommes prêts à payer et dans quelles capacités nous sommes prêts à investir. J'espère sincèrement que des discussions comme celle entreprise par le Comité permettront de faire la lumière sur ces questions et d'orienter le gouvernement et les Canadiens sur les prochaines étapes à suivre.
    Je serai heureux de répondre à vos questions.

  (1305)  

    Merci, monsieur Collins.
    Nous passons maintenant à M. Fergusson.
    J'ai eu l'occasion d'écouter certains des témoignages présentés au Comité sur cette question, mais je limiterai mes observations aux problèmes généraux de l'approvisionnement en matière de défense dans ce pays.
    Je veux me concentrer sur deux aspects. Le premier est une situation qui me rend perplexe. Cela concerne la décision sur le F‑15, s'il s'agit bien de la décision. D'une part, le gouvernement semble dire qu'il achètera des F‑35 et, d'autre part, le Gripen est toujours dans l'équation d'une façon ou d'une autre. Ce que je crains, c'est une répétition...
    Une des particularités intéressantes de l’approvisionnement militaire au Canada, c'est qu'on fait sans cesse les mêmes choses sans en tirer de leçons. Je m'explique. Revenez à la décision d'acquérir le CF‑18, à la fin des années 1970. La décision a été retardée parce qu'on a joué la carte de la valse-hésitation entre le F‑16 de General Dynamics et le F‑18 de Martin Marietta dans une tentative d'améliorer ce qu'on appelait alors les « retombées industrielles régionales ».
    À cela s'ajoute, à mon avis, la question des 7 à 12 mois de négociations futures. Je ne sais pas trop ce qu'il y a à négocier, ici. Rappelez-vous que nous sommes membres du consortium des F‑35, avec Lockheed Martin et beaucoup d'autres pays. Nous avons signé des protocoles d'entente sur la production, le soutien et le développement subséquent avec le consortium. Ces protocoles sont censés régir l'approvisionnement ainsi que le soutien et le développement subséquent connexes. J'ajoute que les activités liées au développement subséquent et aux pièces de rechange se feront selon la formule du partage des coûts. Qu'y a‑t‑il à négocier, si tout cela est déjà en place et que la décision d'aller de l'avant rapidement devrait normalement être facile à prendre?
    La seule chose qui me vient à l'esprit, c'est que le gouvernement, le MDN et TPSGC — Travaux publics, ou peu importe le nom que porte maintenant ce ministère; je n'arrive pas à le retenir — cherchent peut-être à négocier l'établissement d'une capacité de maintenance de réparation et de révision au Canada. C'est peut-être l'objectif. Je ne sais pas comment cela s'inscrit dans le protocole d'entente ni comment les autres alliés partenaires qui ont acquis le F‑35 ont géré cet aspect. Je suppose qu'il s'agirait alors d'un modèle dont le Canada devrait s'inspirer aussi pour ces questions.
    Quant à savoir où nous allons exactement, le mystère demeure entier. Retarderons-nous encore cela d'une année, après tous les retards? Je pense que c'est extrêmement problématique.
    Je tiens aussi à faire un commentaire sur les estimations. J'ai consulté les estimations de 2011 et 2012 et divers documents liés au grand débat entourant le F‑35, notamment le rapport du vérificateur général, la réponse de la Défense nationale et l'avis du Bureau du directeur parlementaire du budget. Je trouve cela vraiment intéressant et étrange, et c'est très révélateur par rapport au problème d'estimation.
    Essentiellement, le montant convenu en 2012 par le ministère de la Défense nationale et le Bureau du vérificateur général pour l'achat de 65 aéronefs était plus élevé que le montant de 19,1 milliards de dollars, je crois, que le gouvernement vient d'annoncer pour l'acquisition d'un plus grand nombre d'avions. Pour le Comité, cela devrait soulever d'importantes questions quant à la fiabilité de ces estimations.
    Enfin, pour ce qui est de la défense aérienne en général, je crains que la décision sur le F‑35 et le remplacement du Système d'alerte du Nord soient un réel problème, comme d'autres projets d'approvisionnement en défense aérienne liés au futur navire de combat de surface. Pour l'armée, cela reflète davantage des intérêts cloisonnés qu'une perspective stratégique globale sur les exigences de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord.
    J'ajouterais qu'il est essentiellement question de défense antimissile. L'examen de cette question ne peut se limiter à ces deux éléments précis. Il est bien plus important d'intégrer tous les domaines et toutes les capacités, le réseautage et toutes les questions connexes. Pour considérer l'acquisition d'une défense aérienne pour l'Amérique du Nord et les Forces canadiennes, il faut une vue d'ensemble beaucoup plus vaste que celle que nous avons actuellement.
    Je vais m'arrêter là.

  (1310)  

    Merci, monsieur Fergusson.
    Nous passons maintenant à M. Kasurak.
    Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner devant le Comité.
    Permettez-moi tout d'abord de me présenter. J'ai passé la majeure partie de ma carrière dans la fonction publique au Bureau du vérificateur général. À mon départ, en 2007, j'étais directeur principal des programmes de sécurité nationale. Pendant mes années au sein du Bureau, j'ai dirigé les audits d'optimisation d'une dizaine de programmes d'immobilisation du ministère de la Défense nationale. Je suis actuellement chargé de cours au Centre for International and Defence Policy de l'Université Queen's et j'enseigne à l'occasion au Collège militaire royal.
    Pour en venir à l'objectif du Comité, qui vise à comprendre et à améliorer le processus d'approvisionnement des projets de défense, j'aimerais attirer l'attention sur trois grands enjeux: les politiques relatives aux approvisionnements en défense au Canada; la nature du choix entre les avions de quatrième et de cinquième génération; la capacité de la Défense à prendre en charge à la fois l'acquisition d'avions et leur entretien après l'achat.
    En ce qui concerne les politiques relatives aux approvisionnements, le Canada se bute à deux désaccords fondamentaux. D'abord, les Canadiennes et les Canadiens ne s'entendent pas au sujet du rôle des Forces armées: doivent-elles être des forces de combat ou de maintien de la paix? Ensuite, il y a un conflit entre le désir des autorités de la Défense de conserver une force polyvalente apte à combattre et le souhait manifeste de la population d'avoir une politique en matière de défense à la Walmart: économique et bon marché.
    En raison de cette absence de consensus et de la faible importance de la Défense dans les décisions électorales, l'approvisionnement de la Défense est devenu une arme pour les deux parties et a empêché l'établissement d'une stratégie nationale cohérente.
    Cette dynamique politique a perturbé le projet de remplacement des CF‑18. Lundi, le gouvernement a annoncé qu'il avait porté son choix sur le F‑35. Du point de vue des missions aériennes, ce choix est logique. La défense aérienne continentale est la principale mission de la force de chasse canadienne, et la US Air Force souhaite axer ses forces de défense aérienne continentale sur l'avion de cinquième génération. L'avion de quatrième génération sera encore utile pour le NORAD, mais le rôle que ce type de chasseur pourrait jouer sera rapidement limité.
    La guerre en Ukraine suggère que la capacité de survie dans un espace aérien contesté est essentielle. Les défenses aériennes russes sont impressionnantes et leur portée peut pénétrer à environ 400 km dans l'espace aérien de l'OTAN.
    L'OTAN et d'autres ministères de la Défense ont voté avec leurs pieds et ont opté pour le F‑35. L'entretien constitue le principal problème du F‑35 pour les forces armées. En effet, les coûts d'entretien sont énormes et inconnus. Son système d'information logistique autonome, ou ALIS, est problématique et sera remplacé. La US Air Force songe à réduire le nombre de F‑35 qu'elle acquerra en raison des coûts d'entretien du parc aérien.
    Les difficultés liées à cet avion sont exacerbées par un problème général au sein des Forces armées canadiennes relativement à l'entretien. Les Forces ont eu de la difficulté à estimer les coûts d'entretien des nouveaux appareils ou de conserver le personnel suffisant pour assumer l'entretien de l'équipement. Le ministère indique encore que la disponibilité du matériel aérospatial est d'environ 55 % et qu'une importante pénurie de main-d'œuvre persiste. L'ajout de nouveaux avions de chasse sans prévoir de fonds suffisants pour l'entretien ne fera qu'empirer une situation déjà mauvaise.
    Voilà qui met un terme à ma déclaration préliminaire, monsieur le président.
    Merci, monsieur Kasurak. Je vous en suis reconnaissant.
    J'informe tous les témoins que les membres du Comité ont reçu le texte des déclarations qui nous ont été présentées. Donc, ils les ont eues à l'avance.
    Monsieur Fergusson, si vous avez une déclaration à nous transmettre à un moment donné, veuillez l'envoyer au greffier, et c'est avec plaisir que nous la transmettrons aussi aux membres.
    Cela dit, nous passons maintenant aux questions, en commençant par M. Paul-Hus, pour six minutes.

  (1315)  

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Bonjour à tous. Soyez les bienvenus au Comité.
    Ma première question s'adressera à M. Collins.
    Monsieur Collins, vous mentionnez que le processus d'achat est lourd, au Canada, et que cela prend une quinzaine d'années, en moyenne, pour livrer les équipements aux Forces armées canadiennes.
     Avez-vous une idée du temps moyen que cela prend aux Américains et aux Britanniques pour mener à bien le même genre de projet?
    Ici, c'est 15 ans, mais qu'en est-il ailleurs?

[Traduction]

    Merci, monsieur. C'est une excellente question.
    À la question de savoir si j'ai les chiffres précis des États-Unis, je ne les ai pas.
    En général, j'ai une compréhension plutôt bonne du fonctionnement de l'approvisionnement dans une autre puissance moyenne comme l'Australie, par exemple, et j'ai bien peur que ce ne soit pas beaucoup mieux.
    Souvent, c'est intimement lié à la nature du type d'approvisionnement. Comme mon collègue, M. Kasurak, l'a fait remarquer, pour les aéronefs plus perfectionnés, la question des coûts de maintien en puissance et les négociations sur la propriété intellectuelle sont plus complexes. La liste de variables dont il faut tenir compte est longue.
    Quant à savoir si nous sommes les seuls à essayer de gérer de complexes projets d'approvisionnement en défense, je crains que ce ne soit pas le cas.

[Français]

     D'accord.
    J'ai des amis qui s'intéressent beaucoup à l'aviation et qui m'ont parlé d'une question technique en lien avec le F‑35. Il s'agit des différentes séries: le Block 2, le Block 3 et le Block 4. On m'a dit qu'il fallait vraiment qu'on fasse l'acquisition d'avions de série Block 4, sinon on allait se retrouver avec un modèle qu'il faudra mettre à jour, ce qui coûtera une fortune.
    Si le Canada achète effectivement des avions de la série Block 4, je crains que les délais de livraison soient très longs. On sait que la Finlande va recevoir ses avions de la série Block 4 en 2029. Nous pourrions donc les recevoir en 2030 ou en 2032. Est-ce une possibilité?
    D'abord, savez-vous si le Canada a l'intention de faire l'acquisition d'avions de série Block 4? Si oui, quels seront les délais?

[Traduction]

    Je ne connais pas le calendrier pour la série du bloc IV. C'est une excellente question. La Finlande y participera, bien entendu. Mon collègue, M. Fergusson, a souligné ce qui doit faire l'objet de négociations. Un des aspects clés qui doit être négocié avec l'entreprise, à mon avis, est de savoir où nous nous situerons dans le cycle de production. L'entreprise a un taux de production donné; les Américains obtiennent un nombre donné d'avions et les autres partenaires aussi.
    Je ne sais pas si mes collègues aimeraient intervenir.

[Français]

    Monsieur Fergusson, voulez-vous ajouter quelque chose?

[Traduction]

    Ce sera probablement le bloc IV. J'ai tendance à être d'accord avec mon collègue: cela doit être négocié. Le gouvernement a indiqué — en supposant une décision rapide ou une décision d'ici sept mois — que le premier appareil sera livré en 2025. Nous savons probablement où nous nous situons dans ce calendrier de production.

[Français]

    Si la Finlande, qui a déjà pris sa décision, va recevoir ses avions de série Block 4 en 2029, est-il réaliste de penser que le Canada, qui n'a pas encore pris sa décision, recevra les siens en 2025?
    Si vous n'avez pas la réponse à cette question, ce n'est pas grave, mais ce serait une question importante à élucider.
    Monsieur Fergusson, j'aimerais revenir sur ce que vous avez mentionné concernant l'annonce de lundi dernier et le dialogue qui est censé avoir lieu au cours des sept prochains mois pour finaliser, ou non, l'achat de F‑35. La ministre de l'Approvisionnement et la ministre de la Défense nationale ont annoncé qu'on procédait à l'acquisition du F‑35, mais que cela prendrait du temps. Encore une fois, on ne semble pas vraiment avancer.
     Pensez-vous que c'était une annonce purement politique?

[Traduction]

    Toutes ces annonces sont politiques, d'une façon ou d'une autre. On ne peut dissocier tout cela de la dimension politique. Comme le gouvernement accuse du retard — il était censé faire cette annonce en novembre, il y a déjà plusieurs mois —, il s'agissait probablement de choisir le moment, tout simplement.
    À mon avis, il n'est pas mauvais en soi que cela coïncide, comme M. Kasurak l'a indiqué, avec les événements en cours, notamment la guerre russo-ukrainienne et les discussions au sein de l'OTAN, puisque c'est devenu un sujet brûlant d'actualité sur la scène politique. Je pense que dans le contexte de la rencontre du premier ministre et des ministres avec les dirigeants de l'OTAN, pour lesquels c'était une question fondamentale — pas la décision en soi, mais le fait que le Canada devait agir —, le gouvernement devait s'engager à faire quelque chose, et c'est ce qu'il a fait. Voilà pourquoi on a choisi ce moment, à mon avis.
    Rapidement, concernant la Finlande, je ne sais pas si elle a pris cette décision pour attendre le bloc IV ou si cette décision est liée aux prévisions de dépenses en matière d'approvisionnement. C'est peut-être simplement cela: ils achètent lorsqu'ils sont prêts.
    Quant aux coûts de mise à niveau, ce système de blocs est conçu en fonction d'une mise à niveau continue. Je ne sais pas dans quelle mesure cela a été pris en compte dans les estimations des cycles de vie du F‑35 — qu'il s'agisse des blocs III, IV ou V —, mais cela doit faire partie des estimations à long terme.

  (1320)  

[Français]

    Merci.
    Je pense qu'il me reste 30 ou 40 secondes pour poser ma dernière question, qui s'adressera à M. Kasurak.
    Monsieur Kasurak, vous avez mentionné que les États‑Unis avaient réduit le nombre de F‑35 qu'ils avaient l'intention d'acquérir. Du côté des conservateurs, à l'époque, nous avions dit vouloir en acheter 65. Le gouvernement libéral, dans le cadre de la révision de la politique de défense, a dit qu'il allait en acheter 88. Je n'ai jamais compris pourquoi les libéraux voulaient en acheter plus que les conservateurs en voulaient dans leur évaluation de l'époque.
     Pensez-vous que le Canada devrait revenir à 65 F‑35 et acquérir un autre modèle pour effectuer différentes tâches liées au NORAD, par exemple?
    Est-ce une possibilité à étudier, monsieur Kasurak?

[Traduction]

    Je pense qu'il faut éviter l'ajout d'un deuxième aéronef dans le système en raison des contraintes que cela entraînerait sur les plans de la formation et de la maintenance. Même avec 88 avions, cela demeure une très, très petite flotte. L'ajout d'un autre appareil perfectionné n'aurait aucun sens tant du point de vue de la gestion de personnel que du point de vue financier.
    Merci, monsieur Kasurak.
    Nous passons à M. Kusmierczyk, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question pour M. Collins. Vous êtes co‑auteur d'un article qui a été publié en mars dernier, intitulé « If Only Warships Grew on Trees: The Complexities of Off-the-Shelf Defence Procurement ». Je vous accorde au passage des points bonis pour la créativité du titre de ce rapport. Dans ce rapport, vous déclarez: « Aussi tentant qu'il puisse être de croire qu'il existe une solution simple aux éternels problèmes d'acquisition de matériel de défense du Canada, il convient de faire preuve de prudence à l'égard d'un modèle fondé sur des équipements disponibles sur le marché. » Pouvez-vous expliquer pourquoi il faut faire preuve de prudence à l'égard des solutions d'approvisionnement disponibles sur le marché?
    Cela me fera plaisir de répondre à votre question. Aussi, merci du compliment pour mon style de publicitaire digne de Mad Men.
    Comme l'énonce l'article, quelques variables ont une influence. Tout d'abord, les produits disponibles sur le marché renvoient à deux réalités possibles: acheter directement de quelqu'un, d'une chaîne de production existante, ou acheter un modèle existant pour ensuite l'adapter à ses besoins.
    Le risque que cela comporte est que les compagnies et les pays qui fabriquent des biens le font surtout à partir de leurs propres spécifications; ainsi, un sous-marin allemand est avant tout fabriqué pour les réalités de la mer Baltique. Ce sous-marin sera probablement relativement petit, conçu pour les eaux peu profondes et les distances assez courtes. Si l'on optait pour ce modèle au Canada, il faudrait le modifier ici — même s'il est « disponible sur le marché » — pour répondre à nos besoins. Pourquoi acheter un sous-marin dont les capacités sont limitées pour répondre aux besoins de sa propre marine, d'autant plus que le Canada compte le littoral le plus long au monde ainsi que trois océans?
    Deuxièmement, les changements à la conception sont complexes en soi et impliquent plus que des négociations sur la propriété intellectuelle et les coûts y afférents. Le modèle d'un équipement en production existant, c'est un modèle qui est probablement âgé de quelques années. Pensez, par exemple, au pétrolier ravitailleur d'escadre Berlin qui est au coeur des nouveaux navires de soutien interarmées construits au chantier naval de Seaspan, à Vancouver. Ce modèle remonte aux années 1990. Lorsque nous l'avons acheté, il avait environ 10 ans, et nous avons dû le modifier pour l'adapter à nos besoins. Puis, il a fallu en modifier la conception, parce que c'est une construction modulaire, afin de l'adapter aux limites du chantier de Seaspan. Le chantier où ce navire a été construit, à Hambourg, en Allemagne, est en effet beaucoup plus grand que celui de Vancouver.
    Toutes ces complexités me font dire qu'il faut toujours envisager d'acheter des produits déjà existants, mais je mettrais en garde quiconque croit que cette option est rapide ou plus abordable. Cette solution est beaucoup plus complexe, surtout si on compte faire la construction ici au Canada.

  (1325)  

    Par le passé, nous avons vu des exemples où nous avons appris cette leçon à nos dépens. Je pense par exemple à l'entente du gouvernement précédent pour acheter 15 hélicoptères Chinook. Pouvez-vous nous donner quelques détails sur cette situation et sur la leçon qu'on en a tirée?
    Bien sûr. La vérificatrice générale s'est d'ailleurs penchée sur ce cas. Mon collègue voudra peut-être faire des observations dans un instant.
    Nous voulions nous procurer 15 hélicoptères. Nous voulions qu'ils puissent non seulement transporter des soldats d'un endroit à l'autre, mais aussi qu'ils soient adaptés à l'environnement canadien caractérisé par des conditions météorologiques inclémentes et de longues distances à parcourir. Dans ce contexte, il fallait modifier le modèle pour prévoir de plus grands réservoirs à essence.
    Nous voulions aussi que les Chinooks servent à plus d'une force. Le Commandement des Forces d'opérations spéciales voulait aussi être en mesure d'utiliser l'aéronef.
    Nos alliés de plus grande taille comme les États-Unis construisent ou achètent différentes versions de cet hélicoptère, mais, pour notre part, nous achetons des flottes relativement petites et nous essayons de doter les appareils d'autant de fonctionnalités que possible. Parfois, nous dressons une liste pour y indiquer tous nos souhaits. D'autres fois, toutefois, c'est simplement une question de réalités opérationnelles. On veut un hélicoptère qui peut accomplir de nombreuses tâches. Le hic, c'est qu'il faut alors modifier le modèle, ce qui implique des négociations sur la PI, l'ajout de nouveaux éléments dans un hélicoptère qui existe depuis les années 1960, puis l'assurance que la chaîne de production pourra créer le produit voulu.
    Ici encore, pour utiliser cette image, ce n'est pas comme si on pouvait se rendre chez Walmart pour y choisir un chasseur ou un navire de guerre d'une tablette. Il faut s'assurer minutieusement de faire concorder les navires avec leur mission, avec nos objectifs au Canada et avec certains des paramètres et des cadres où nous opérons. Je vous suis très reconnaissant d'avoir clarifié ces points pour la gouverne des gens qui nous regardent de la maison et pour celle de notre comité.
    Les capacités des navires, des chasseurs et des autres équipements changent, et un témoin a récemment expliqué à notre comité que les F‑35 que nous sommes en voie de nous procurer sont de loin supérieurs à ceux qui étaient disponibles il y a sept ans. Les F‑35 ont évolué. Êtes-vous d'accord avec cette affirmation? Savez-vous en quoi ils sont plus avancés et comment ces changements influencent leur capacité?
    Cette question s'adresse‑t‑elle à moi, monsieur?
    Oui, elle s'adresse à vous, ou même à n'importe lequel des autres témoins.
    Je peux tenter de répondre en premier.
    Un plan de production d'une telle envergure représente quelques milliers d'aéronefs qu'on a tendance à construire en blocs comme nos collègues l'ont indiqué plus tôt. La raison pour ce faire est d'apprendre au fur et à mesure, pour chaque bloc, quelles sont les difficultés mécaniques, surtout pour les F‑35. Comme mon collègue M. Perry l'a souligné, ces aéronefs s'apparentent à des ordinateurs volants. Quels défis pose le logiciel? Lorsque de nouveaux appareils sont exploités, on apprend comment les réparer et les construire s'ils proviennent de chaînes de production. C'est un cycle de construction normal.
    Le même cycle se produit avec les navires, soit dit en passant. Ils peuvent souvent être construits en blocs. C'est souvent à l'étape du bloc IV que quelqu'un du bureau des avions de combat interarmées ou de Lockheed Martin vient donner plus d'explications parce que, personnellement... Certains chercheurs ont du mal à établir les différences techniques précises qui expliquent la variabilité du rendement. Par exemple, un meilleur moteur peut faire une différence, ou un appareil peut être doté d'un logiciel de meilleure qualité ou qui alerte l'équipage plus efficacement lorsque des variables entraînent des pépins.
    C'est ce qui me vient d'abord à l'esprit pour répondre à la question.
    Merci, monsieur Collins.
    Malheureusement, le temps est écoulé. Messieurs Kasurak et Fergusson, si vous voulez répondre à la question, veuillez envoyer votre réponse au greffier par écrit, et elle sera distribuée.
    Je l'apprécie. Je suis désolé. Nous avons des contraintes de temps.
    Nous passons maintenant à Mme Vignola pendant six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie d'être présents, messieurs. Votre expertise est précieuse à nos yeux.
    Monsieur Collins, en ce qui concerne le Programme de l'avion d'attaque interarmées, le fédéral finance la conception et la production des F‑35 avec sept autres pays. Également, un protocole d'entente a été signé en 2006. En vertu de ce protocole, les entreprises canadiennes pouvaient soumissionner sur les marchés liés au F‑35, mais elles ne pouvaient pas inclure de compensations industrielles.
    Quelles sont les répercussions de cette entente non seulement sur l'économie canadienne, mais également sur le développement des connaissances et des technologies industrielles du Québec et du Canada?

[Traduction]

    Votre question porte vraiment sur le nœud du programme d'avions de combat interarmées, et l'accent est sur « inter ». Au cœur du partenariat entre les huit pays à l'origine du programme se trouvait l'idée que, en finançant annuellement la recherche et le développement de cet aéronef, les compagnies d'un pays donné tireraient parti de la chaîne d'approvisionnement mondiale et pourraient soumissionner des contrats. Je crois comprendre des estimations du MDN que les compagnies canadiennes se sont déjà vu octroyer environ 2 milliards de dollars américains en contrats. Le revers de la médaille est qu'il faut en fin de compte acheter l'aéronef; nous savions depuis le début que ce serait la difficulté de la tenue d'un « appel d'offres ouvert » pour remplacer les CF‑18, étant donné les modalités des ententes et des paiements effectués dans le cadre du programme d'avions de combat interarmées.
    L'autre perte — faute de trouver un meilleur mot — est qu'il est très difficile, voire impossible, pour Lockheed Martin dans ce cas précis d'obtenir des points et des compensations. C'était impossible à cause des modalités de l'entente... Comme le Canada a financé l'entente chaque année, les compagnies canadiennes ont pu participer à la construction de l'aéronef. Lorsqu'un nombre accru de pays se sont joints à l'entente, l'idée était donc que les compagnies canadiennes pourraient soumissionner [difficultés techniques] contrats de la chaîne d'approvisionnement en argent au fil du temps.
    C'est un des inconvénients, mais les avantages, selon la perspective qu'on adopte, sont de faire partie du partenariat de la chaîne d'approvisionnement.

  (1330)  

[Français]

    Merci.
    En somme, sous l'aspect des connaissances technologiques et industrielles, le partenariat profite essentiellement à Lockheed Martin et moins aux pays partenaires. Est-ce exact?

[Traduction]

    La question n'est pas simple. Ces types de projets comptent toujours un entrepreneur principal, mais les chaînes d'approvisionnement sont très élaborées et compliquées. Qu'il s'agisse d'un navire, d'un sous-marin, d'un aéronef ou d'un véhicule blindé, ces appareils nécessitent tellement de logiciels et de technologie avancée qu'ils constituent littéralement une chaîne d'approvisionnement multinationale.
    C'est le type de question qui mériterait d'être étudiée plus en profondeur, et je crois qu'il est pertinent de la poser. La population canadienne devrait savoir comment les compagnies peuvent potentiellement bénéficier du projet en conservant les sommes au pays.
    Je ne sais pas si mes collègues veulent intervenir.
    Monsieur le président, j'aimerais faire un commentaire à ce sujet, si vous me le permettez.
    Il est difficile de quantifier les sommes réelles que le Canada reçoit, quoique c'est probablement plus clair que l'autre option. Il faut garder à l'esprit qu'il était très difficile de retracer les retombées industrielles — peu importe le nom qu'on leur donne aujourd'hui. Il était impossible de déterminer s'il s'agissait de sommes qui allaient être dépensées d'une façon ou d'une autre. Une grande partie des sommes ne pouvaient être précisément chiffrées. Peu importe le système utilisé, le chiffre obtenu est assez faible.
    Cette approche implique au moins que les compagnies canadiennes doivent être concurrentielles et viables sur le plan commercial pour obtenir des contrats afin que nous ayons l'assurance d'appuyer de bons acteurs. Il faut garder l'option de rechange en tête et se demander si cette approche fonctionne réellement.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Je vais poursuivre avec vous, monsieur Kasurak. Il s'agit d'une question plutôt générale.
    Selon la politique Protection, Sécurité, Engagement, le ministère de la Défense nationale prévoyait 164 milliards de dollars pour 348 projets d’immobilisations d’ici l'exercice 2036‑2037.
    Étant donné l’explosion des coûts, notamment ceux de la Stratégie nationale de construction navale; étant donné les besoins en défense aérienne; étant donné le projet visant à renouveler la flotte de sous-marins; étant donné les tendances inflationnistes — elles sont souvent plus importantes dans le domaine de la construction de défense —; étant donné les besoins en formation pour combler la pénurie de main‑d’œuvre; étant donné les difficultés passées et présentes en matière de suivi et d’encadrement des dépenses; étant donné tout cela, le montant projeté de 164 milliards de dollars vous semble-t-il suffisant, insuffisant ou exagéré?

[Traduction]

    Je doute que ce soit une exagération. Je crains que ce ne sera pas suffisant. Jusqu'à ce que nous voyions un contrat, nous n'aurons pas de réponse claire.
    Les coûts de soutien — les coûts pour faire fonctionner les aéronefs et les entretenir pour qu'ils puissent continuer à voler — posent problème dans tous ces projets, et en particulier pour les F‑35: ces coûts grimpent en flèche et suscitent des inquiétudes même pour les Américains.
    Le montant total de la facture est un grand inconnu, et je crois que c'est un grave problème pour le gouvernement.

  (1335)  

    Merci, madame Vignola.
    Nous passons maintenant à M. Johns pendant six minutes.
    Merci à tous pour vos témoignages importants.
    Monsieur Collins, on vous a demandé plus tôt — c'était une question de M. Paul-Hus, je crois — quels pays se sont bien tirés d'affaire en matière d'approvisionnement. Vous avez répondu que des partenaires de troisième niveau comme l'Australie ont malheureusement un bilan similaire à celui du Canada.
    Pouvez-nous nous décrire un pays qui fait meilleure figure, comme le Danemark, la Norvège ou la Turquie qui sont aussi des partenaires de troisième niveau?
    C'est une excellente question, monsieur.
    Je crois que la réponse dépend de ce que vous entendez par « faire meilleure figure ». Lorsque je réfléchis aux pays qui se distinguent en matière d'approvisionnement, je pense à un projet à la fois.
    Une grande qualité que je dois attribuer aux Danois et aux Finlandais — ainsi qu'aux Suisses — est leur capacité à prendre des décisions. Le fait qu'il nous faille près de 15 ou 16 ans pour finalement en arriver à une décision... Je félicite ces pays d'avoir un processus beaucoup plus condensé, comparativement au nôtre, de quelques années seulement. C'est en définitive une question de priorités politiques. On peut se référer à la structure du processus d'approvisionnement en défense.
    Dans ce contexte, je crois que vous cherchez à savoir où des projets d'un même niveau de complexité sont bien réussis. La clé du succès dans ces exemples est que les pays en question avaient des échéanciers beaucoup plus courts pour décider du moment de l'achat des aéronefs.
    Le sujet m'amène à ma prochaine question sur les lettres de mandat de 2019. Les ministres de la Défense nationale, de Services publics et Approvisionnement ainsi que de Pêches et Océans ont tous reçu la consigne dans leurs lettres de mandat de présenter des options pour la création d'une entité unique d'approvisionnement de défense.
    Bien que cette responsabilité n'ait pas été retenue dans les lettres de mandat de 2021, pouvez-vous nous expliquer pourquoi il est important qu'une seule entité rende des comptes en matière d'approvisionnement de défense et en quoi cette structure est liée à ma question précédente?
    Un sujet qui revient souvent est de restructurer l'appareil gouvernemental pour agir en matière d'approvisionnement. Il peut être difficile de faire une refonte alors qu'on traite de grands marchés publics. Il est toutefois révélateur que, les dernières fois où le Canada a acquis une grande quantité d'équipement militaire, l'approvisionnement est passé par une agence d'acquisition de défense distincte. Le ministère de la Production de la défense, éliminé graduellement en 1969, et a été le dernier ministère à le faire.
    Dans cet exemple précis, un sous-ministre et un ministre portent les visages publics de la reddition de compte à la Chambre des communes et auprès de la population générale. Les documents confidentiels du Cabinet compliquent cependant les choses. Les mandats gouvernementaux divergents demeurent, qu'il s'agisse de prévoir des compensations, de fournir des capacités précises ou de satisfaire aux pressions des alliances. Ces mandats ne disparaissent pas, peu importent les changements apportés à l'appareil gouvernemental.
    Or, d'un point de vue de responsabilité gouvernementale, je conviens qu'il est tout à fait important d'avoir un ministre et un sous-ministre reconnaissables.
    Certains de nos alliés ont pris cette voie, soit dit en passant. À titre d'exemple, l'Australie s'est dotée d'un ministre de l'approvisionnement de défense. Le pays compte aussi une agence distincte pour ce portefeuille.
    Merci.
    Monsieur Kasurak, je vais vous laisser intervenir vous aussi. Vous avez parlé des problèmes autour de la volonté politique de s'assurer que, tout d'abord, le but soit de fournir rapidement aux hommes et aux femmes des forces armées le meilleur équipement qui soit. Pouvez-vous décrire certains des obstacles à cet égard? Ici encore, vous pourriez peut-être nommer des pays dont le processus est plus efficace que le nôtre.
    Le premier problème est qu'il n'y a pas de consensus déterminant le rôle que nous voulons confier aux forces armées ou déterminant ce qu'être « bien équipés » veut dire. Voulons-nous que l'armée soit formée pour un rôle au pays et pour exécuter des tâches constabulaires, ou voulons-nous qu'elle ait la capacité d'aller au combat en temps de guerre?
    Les électeurs disent que, oui, les Forces armées canadiennes devraient être bien équipées, mais lorsque vient le temps de payer, lorsqu'ils voient la note, ils se ravisent et disent qu'ils sont bien désolés, mais qu'ils ne sont pas intéressés à payer pour ce rôle. Les politiciens doivent alors essayer de trouver un compromis, ce que nous ne réussissons pas bien.
    De façon générale, notre stratégie globale pour les forces armées n'est pas très bien structurée. Si nous tentons différentes solutions et que nous espérons tout accomplir en même temps, nous n'atteignons généralement pas notre objectif. Nous ne faisons pas très bonne figure en ce sens.
    Y a‑t‑il des pays qui s'en tirent mieux? Je n'en suis pas persuadé. Je ne suis pas convaincu que je qualifierais l'Australie d'exemple à suivre...

  (1340)  

    Je ne pense pas que c'est ce que nous disions.
    ... quoiqu'au niveau stratégique, ils se sont ressaisis dans les dernières années, je crois — en tout cas plus que nous. Je pense cependant que tous les pays démocratiques ont du mal à résoudre les questions de « beurre et de canons. »
    Qu'est‑ce que la guerre en Ukraine — et certainement dans le contexte de l'OTAN et de nos obligations envers le NORAD — a révélé par rapport au respect de nos obligations et à la dynamique politique qui change? Comment pouvons-nous répondre aux besoins de ces engagements?
    Eh bien, maintenant, certainement, nous avons un groupe de combat en Lettonie qui est plus ou moins sur la ligne de front. L'équipement léger de l'armée et l'absence totale de défense aérienne intégrée commencent à ressembler à de mauvais choix. Nous cherchons à combler les lacunes en matière d'équipement qui s'accumulent depuis la fin de la guerre froide, soit depuis environ 1990. Nous avons cessé d'utiliser de l'équipement lourd et dense pour les services, mais, désormais, nous réalisons qu'il nous faut réexaminer la chose, si jamais nous sommes appelés à nous retrouver sur la ligne de front ou nous nous retrouvons dans une autre guerre froide.
    Merci, monsieur Johns. Nous allons maintenant passer à la deuxième série de questions.
    Nous allons débuter avec M. McCauley, pendant cinq minutes.
    Merci d'être parmi nous aujourd'hui, messieurs. Nous avons eu droit à des réponses très intéressantes.
    Monsieur Kasurak, je reviens sur votre commentaire comme quoi il n'existe pas de consensus quant à ce que nous souhaitons être et où nous souhaitons être. Lors d'une étude menée par notre comité il y a quelques années, un témoin nous avait dit que le Canada n'a pas de plan stratégique et que nous mettons bien souvent la charrue avant les boeufs en matière d'approvisionnement, car nous ignorons quelles identité ou place nous souhaitons avoir sur l'échiquier mondial.
    Avez vous vu par le passé — ou récemment — quelconque type de plan stratégique à plus long terme qui pourrait nous aider à trouver un consensus quant à ce que nous souhaitons être et ce que nous devrions acheter?
    Eh bien, par exemple, le concept « Protection, Sécurité, Engagement » dit une chose, mais la structure des forces et l'argent investi semblent en dire une autre.
    Prenons le cas de la Marine, qui se construit en fonction de son propre modèle dans « Point de mire », qui est son document stratégique. L'organisation souhaite devenir une institution mondiale. Eh bien, pouvez-vous aspirer à devenir une telle chose lorsque vous ne disposez que de 15 frégates — aussi merveilleuses soient-elles —, et peut‑on même se permettre d'acheter les 15 frégates que la Marine aimerait acheter?
    Il existe une déconnexion entre ce qui est écrit dans nos documents stratégiques et la réalité.
    Entrevoyez-vous une situation pour l'avenir? Les choses vont déjà assez mal comme cela, bon Dieu.
    Je pense aux armes de poing. Hormis les couteaux, ce sont probablement les armes offensives les plus simples que nous puissions acheter, mais notre décision d'en acheter il y a 10 ans fait encore l'objet d'une poursuite. Nous ne pouvons cesser toute activité et commencer à établir un plan stratégique maintenant. Il est trop tard pour cela.
    Comment pouvons-nous progresser adéquatement, afin d'éviter que la Marine n'ait à demander 15 navires très qualifiés, mais aussi très coûteux, ce qui pourrait ne pas correspondre aux souhaits du gouvernement ou aux exigences de nos plans?
    On compte deux enjeux, ici.
    Le premier est de savoir qui décide, et je crois que c'est le Cabinet. Au final, ces questions relèvent du Cabinet. C'est aux ministres que revient la tâche d'analyser les propositions du secteur de la défense et de dire « Oui, c'est cela que nous voulons, et oui, nous allons payer pour cela. »
    Que peut‑on faire à court terme? Probablement pas grand-chose. Peu importe ce que l'on fait, bien des choses peuvent arriver, comme se faire poursuivre par des fournisseurs déçus. Cela fait partie de la complexité de faire des affaires dans une société ouverte et qui a beaucoup de...

  (1345)  

    Je vais vous interrompre, car j'ai une autre question. J'aimerais consacrer le reste du temps qui m'est imparti aux RIT.
    Je sais que notre entente sur les F‑35 prévoit que nous ne pouvons pas avoir de RIT. Il est donc très étrange que nous ayons besoin de sept mois supplémentaires pour en venir à une décision.
    Vous pourriez intervenir rapidement tous les trois. À quel point le processus de RIT retarde-t‑il notre approvisionnement, selon vous? Combien pensez-vous que cela coûte aux contribuables, et donc, par conséquent, à nos militaires, en fin de compte? Dépensons-nous x, 20 % ou 30 % de plus sur les RIT, et ne devrions-nous pas plutôt investir cet argent dans le secteur de la défense?
    Eh bien, je vais me lancer...
    Je peux vous donner un exemple: mes amis, les Irving, ont établi une usine de frites à Lethbridge et ont dit qu'elle représentait des RIT dans le secteur de la technologie navale.
    Je dirais que les RIT engendrent des retards importants, sauf dans le cas du consortium F‑35, qui est l'un des rares projets — du bon côté — qui reconnaît la réalité du marché de la défense.
    Le programme des RIT ne tient nullement compte de ce qui est réel ou pas sur le marché, et surtout dans le secteur aérospatial.
    Que va‑t‑il se produire si les entreprises continuent sur cette voie? Certains investissent au Canada, des entreprises apparaissent, en quelque sorte, mais elles ont une durée de vie très courte, car elles n'ont pas accès au marché mondial. Une fois le projet terminé, nombre de ces entreprises disparaissent, à moins qu'elles n'aient la chance d'être intégrées dans les principales chaînes d'approvisionnement américaines.
    Le bon côté du consortium, c'est que nous disposons d'un accès au marché. Plutôt que de construire pour imprimer, nous avons accès à la technologie, car, pour que les entreprises soient ouvertes et puissent être en mesure de participer aux appels d'offres pour les composants et les sous-systèmes du F‑35, elles doivent avoir accès à la technologie et aux spécifications fournies par Lockheed Martin. Cela offre plus de possibilités, qui peuvent ensuite mener à des débouchés à long terme, parce que nous sommes maintenant liés à une chaîne d'approvisionnement mondiale qui va au‑delà du F‑35 et qui est certainement liée à un marché d'exportation nettement plus vaste.
    Voilà, à mon avis, la voie de l'avenir.
    Merci, monsieur Fergusson.
    Nous allons maintenant passer à Mme Thompson, pendant cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je tiens aussi à remercier nos témoins.
    Je vais poursuivre avec vous, monsieur Fergusson. Pourriez-vous nous dire pourquoi il est important d'acquérir des avions de chasse à la technologie moderne pour assurer la sécurité des Canadiens?
    Il est essentiel de réagir aux nouvelles menaces qui nous entourent.
    La réponse à cette question est simple: l'ancien contre le nouveau. Le Canada n'a pas le choix d'agir pour diverses raisons stratégiques: l'interopérabilité et notre réponse aux initiatives de nos alliés et des États-Unis. Il est essentiel de réagir aux nouvelles menaces plus complexes en Amérique du Nord, en particulier, que ce soit les missiles de croisière à longue portée ou les véhicules hypersoniques, et je mettrai les missiles balistiques sur la touche ici.
    Nous ne serons tout simplement pas en mesure de nous adapter, et nous ne pourrons pas être interopérables avec les États-Unis, notre allié de l'OTAN, pour coordonner et exercer une dissuasion aérienne ou aérospatiale efficace, et, en fin de compte, avoir la capacité de se défendre. Si nous n'y arrivons pas, nous serons marginalisés.
    Dans le même ordre d'idées, que penserait‑on de l'acquisition de jets modernisés pour donner à ceux qui servent au sein de l'Aviation royale canadienne et qui pilotent ces avions un avantage en matière de sécurité individuelle?
    Je pense que c'est extrêmement important. J'écoute ce que le gouvernement et les fonctionnaires disent, à savoir qu'il est important de soutenir nos hommes et nos femmes dans les forces armées. Nous devons leur fournir le meilleur équipement possible, l'équipement le plus moderne, afin de contribuer à la défense du continent nord-américain, du Canada et de nos alliés. Cela est essentiel. Nous devons le faire, à moins que nous ne décidions de tout céder à nos alliés, comme notre propre défense, en particulier, aux États-Unis.
    Cela aura aussi des répercussions sur le recrutement. Personne parmi ceux qui rêvent de devenir un pilote de chasse au sein de l'Aviation royale canadienne n'espère se retrouver avec un appareil ancien et dépassé. C'est aussi simple que cela.

  (1350)  

    Merci.
    Dans un article récent, vous avez déclaré que le simple fait d'injecter de l'argent dans le processus d'approvisionnement du secteur de la défense ne réglera pas les enjeux actuels, et qu'il nous faut un plan pour la distribution de ces fonds. Estimez-vous que le concept de « Protection, Sécurité, Engagement » ainsi que la Stratégie nationale de construction navale — je sais que nous en parlerons davantage lors du deuxième tour — sont de bons plans pour déterminer où investir des fonds pour soutenir le processus d'approvisionnement du secteur de la défense?
    Oui et non. Le fait qu'ils aient détaillé ces choses ou lorsque seraient injectés les fonds est certes important, mais cela remonte à 2017 et 2018. Nous sommes en 2022. Le monde a quelque peu changé.
    L'aspect négatif est leur trop grande ambiguïté. Je comprends les raisons pour lesquelles le gouvernement préfère l'ambiguïté à la spécificité. Le monde peut changer, et il existe aussi d'autres raisons politiques. Prenons, par exemple, la priorité de la modernisation de NORAD [difficultés techniques] et de la modernisation de la défense nord-américaine, ce qui est encore plus vaste, qu'est‑ce que cela signifie? Nous avons certes nos propres idées en la matière, mais il s'agit habituellement du Système d'alerte du Nord et [difficultés techniques] c'est beaucoup plus vaste que cela.
    Le Canada est confronté à de nombreux choix déterminants en ce qui concerne l'utilisation ou le développement de capacités efficaces de surveillance, de suivi et de discrimination des cibles pour la défense aérospatiale de son propre territoire et de l'Amérique du Nord. Ces capacités vont au‑delà des avions de chasse. Outre le ravitaillement en vol, elles comprennent potentiellement des systèmes aéroportés d'alerte et de contrôle. Elles comprennent également le rôle potentiel que jouera le futur combattant de surface. Il faudra peut-être aussi envisager des défenses terrestres afin d'avoir une approche multiple en matière de défense de l'Amérique du Nord et remonter d'une certaine façon aux années 1950 et 1960. Rien de tout cela... Tout est ouvert. Nous ne savons pas ce qu'ils planifient, et il faut un plan.
    Un autre point intéressant, et qui reflète l'enjeu stratégique du Canada, c'est que ces plans sont en cours d'élaboration, mais ils sont élaborés par le NORAD. C'est le NORAD qui est à l'origine de tout cela, et non pas notre ministère de la Défense nationale et pas nécessairement le département de la Défense des États-Unis. Le NORAD est aux commandes désormais, et cela s'insère aussi dans l'United States Northern Command.
    Merci.
    Ai‑je le temps de poser une dernière question, monsieur le président?
    Il vous reste 30 secondes.
    D'accord. Je vais donc permettre à quelqu'un d'autre de continuer, plutôt que d'avoir une réponse incomplète.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Allez‑y, madame Vignola. Vous disposez de deux minutes et demie.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Kasurak.
    La publication américaine DefenseNews indiquait, dans un article paru en juillet 2021, que le F‑35 avait encore sept carences critiques qu'on devait corriger. Le constructeur refuse de préciser quelles sont ces carences techniques. Nous comprenons que le F‑35 d'aujourd'hui est bien différent de celui d'il y a sept ans, c'est clair. Néanmoins, c'est inquiétant de savoir qu'il reste sept carences critiques.
    Pourriez-vous me donner vos impressions sur ces sept carences? Quels sont les risques encourus? Pensez-vous que ces risques sont bien évalués?

[Traduction]

    Eh bien, on a oscillé entre sept et huit carences critiques avec cet avion, mais elles changent constamment. On corrige certaines d'entre elles et de nouvelles sont relevées. Bien sûr, on ne souhaite pas nous révéler leur nature, puisque cela concerne l'efficacité de combat de l'avion.
    Le problème, avec le F‑35, c'est qu'il en est encore à la phase de production initiale à faible cadence, et ce après la construction de plusieurs centaines d'avions. Les États-Unis se sont procurés près de 25 % de leur flotte cible, et l'avion n'est pas encore complètement finalisé. Je pense que la conséquence est qu'une fois que vous faites partie du monde, vous injectez de l'argent, car c'est la nature de la bête. Tout ne sera jamais entièrement réglé, mais on ne peut se permettre de ne pas agir. On ne peut se permettre de retourner aux aéronefs de la quatrième génération qui sont plus prévisibles, parce qu'ils ne sont plus viables. Le dilemme est réel, mais il vous faut dépenser.

[Français]

     Vous avez mentionné qu'il s'agissait d'un nouvel avion et qu'on aura d'autres problèmes après avoir corrigé les problèmes actuels. Pensez-vous que le gouvernement a inclus ce facteur de risque dans son calcul des budgets relatifs à l'entretien des avions et aux autres dépenses?
    Les avions seront éventuellement en fin de vie. Dans ses prévisions budgétaires à long terme, le gouvernement a-t-il pensé non seulement à ces entretiens et à ces corrections, mais aussi à mettre de l'argent de côté?
    À votre avis, y a-t-il de la prévisibilité en lien, notamment, avec les montants qui ont été dévoilés jusqu'à maintenant?

  (1355)  

[Traduction]

    Nous l'ignorons. Nous ne l'avons pas vu. Nous n'avons pas encore pu examiner le contrat, alors nous ignorons quelles sont les projections. Cela dit, je pourrais m'avancer et prédire que peu importe la nature des projections, elles ne seront pas suffisantes en fin de compte.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Johns, pendant deux minutes et demie.
    Merci beaucoup.
    Je vais m'adresser à nouveau à M. Kasurak.
    Vous avez soulevé le problème majeur que représente la politique. Le processus d'approvisionnement a été retardé sous l'égide de gouvernements conservateurs et libéraux. Des fonctionnaires de Services publics et Approvisionnement Canada ont laissé entendre que le processus d'approvisionnement rigide du gouvernement permet de résister aux changements de direction. Nous savons qu'il y a eu des changements de direction au niveau bureaucratique aussi.
    Quels autres avantages l'approche très structurée du Canada en matière d'approvisionnement pourrait-elle procurer? Les avantages d'une approche rigide en matière d'approvisionnement l'emportent-ils sur les inconvénients, selon vous?
    Je ne suis pas certain que la rigidité apporte toujours des avantages. C'est une question de degré. Cette approche permet, ou a permis, d'offrir un certain niveau de transparence. Les freins et les contrepoids en place permettent d'avoir une meilleure vue d'ensemble du processus d'approvisionnement. C'était la réaction à la vague de contrats à fournisseur unique de l'ère Hillier; il nous fallait établir quelque chose qui donnerait au public le sentiment que ces enjeux sont examinés avec soin.
    Une telle approche permet de rassurer les gens d'une certaine façon, mais il est facile d'aller trop loin. Je pense que d'autres ont démontré qu'on a atteint ce point. Prenons le cas des projets aériens réalisés avec des préavis d'adjudication de contrat, où le gouvernement a essentiellement fait appel à un fournisseur unique. Il est difficile de dire que ces achats sont pires que ceux qui ont été faits par l'entremise d'un processus concurrentiel exhaustif.
    Pourriez-vous peut-être relever d'autres éléments de la culture ministérielle qui contribuent à des résultats positifs dans le processus d'approvisionnement?
    L'aspect positif est que la fonction publique du Canada est professionnelle et politiquement neutre, alors elle tente d'offrir aux ministres ce qu'ils ont demandé. Notre fonction publique est réactive, ce que je considère comme un grand atout, car on peut garder des fonctionnaires bien informés malgré les changements de gouvernement.
    C'est l'un des problèmes auxquels les Américains font face, car ils changent leurs hauts fonctionnaires régulièrement, au bout de quelques années.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Lobb, pendant cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je souhaite la bienvenue à tous nos témoins.
    Ma première question s'adressera à vous, monsieur Fergusson. J'ai posé des questions à quelques reprises au Comité sur les systèmes de défense aérienne portatifs. Au Canada, d'après ce que j'ai pu trouver, nous n'en avons pratiquement pas. Nous n'avons pas la capacité — et je dis cela en tant que quart-arrière du lundi matin — de soutenir l'Ukraine ou de nous défendre avec ces éléments.
    Comment en sommes-nous arrivés là?
    C'est une combinaison de plusieurs facteurs. Tout d'abord, il y a l'environnement qui existait au moment où la décision a été prise d'éliminer les capacités limitées de défense aérienne de l'armée canadienne. Cela a encore eu lieu avant le retour de la compétition et de la rivalité entre les grandes puissances que nous avons connues. Il n'y avait pas de menace aérienne pour les Forces canadiennes dans le contexte de l'Afghanistan. En Irak, nous avions affaire à des insurgés. Cette question a facilement été reléguée au second plan. Il n'y a pas de problème en ce moment. Nous n'avons pas besoin de ce matériel, alors pourquoi devons-nous nous donner la peine d'en commander? Nous pouvons compter sur nos alliés de manière limitée, car nous combattons au sein d'une coalition. Dans le contexte de la concurrence entre les forces et au sein de l'armée pour ce qui est de leur participation à des projets, la défense aérienne est rapidement passée au second plan.
    Compte tenu de l'environnement changeant qui existe maintenant, revenons à la guerre russo-ukrainienne... Bien entendu, cet environnement est antérieur à ce plan, car il a été publié en 2018 et a été mentionné en 2017. Maintenant, on reconnaît que les Forces canadiennes à l'étranger ont besoin d'une défense aérienne. La composante alliée existe toujours. En ce qui concerne la question de savoir le genre de défense aérienne dont nos forces ont besoin, c'est une question ouverte en ce moment.

  (1400)  

    Très bien.
    La dernière question que j'aimerais soulever est liée au fait que je peux trouver des articles portant sur cet enjeu — et vous les avez probablement lus ou écrits — qui remontent à près de 10 ans. J'ai l'impression que cet enjeu n'a jamais été cerné... Eh bien, de toute évidence, il n'a pas été cerné, parce que nous n'avons aucun système de défense aérienne.
    Je ne veux pas critiquer les militaires, mais comment se fait‑il que, pendant que l'ensemble du personnel militaire et des employés du MDN assurent la liaison avec nos alliés, c'est-à-dire les États-Unis et d'autres pays, ces alliés ne disent pas: « Les gars, vous ne disposez d'aucun matériel en ce moment. Vous devez parler à Justin Trudeau, à Bill Morneau ou à Chrystia Freeland et obtenir des commandes ». Comment les choses fonctionnent-elles?
    Voilà la dynamique interne qui existait dans un environnement soumis à des restrictions budgétaires ou à des restrictions liées au budget des immobilisations, si nous remontons dans le temps. Cette dynamique n'a pas disparu. Elle existe toujours, tapie sous la surface. Ces services... À mon avis, le problème est lié aux priorités qui existent de bas en haut, au sein des échelons de l'Armée canadienne. Il ne fallait pas que ces besoins rivalisent avec d'autres besoins qu'ils jugeaient beaucoup plus pressants, notamment la mise en place d'une nouvelle génération de chars de combat principaux. Il y a une dynamique à l'intérieur des services qui finit par aboutir dans le milieu interservices, avant que tous les besoins ne soient regroupés et livrés comme un ensemble au gouvernement.
    Je peux revenir en arrière. Je travaillais au Parlement il y a de nombreuses années, et je me souviens de Michael Ignatieff qui disait il y a longtemps: « Vous êtes allé acheter une Chevy, et vous êtes rentré avec une Ferrari ».
    De 2010 à 2022, je me demande si c'était une question d'argent — c'est l'argument qui a été avancé à un moment donné —, si c'était une question d'ajustement, de forme et de fonctionnalités ou si c'était simplement le fait qu'il s'agissait d'un contrat à fournisseur unique, à l'époque? En fin de compte, nous nous sommes retrouvés avec la même machine. Quelle est votre analyse de la façon dont nous en sommes arrivés là?
    Pourriez-vous préciser votre question? Je ne suis pas sûr de comprendre ce que vous entendez par « la même machine ». De quelle machine parlez-vous?
    Je voulais dire le même aéronef F‑35.
    La réponse simple est que c'est lié à la politique, à des considérations politiques. Lorsque les partis politiques décident qu'ils ont intérêt à politiser une question de défense, en raison des sommes importantes qui y sont attachées — et je comprends cet intérêt —, vous vous retrouvez soudainement face à ce problème. Nous avons observé ce problème auparavant, si nous remontons aux années 1990 — à ce long projet de remplacement des hélicoptères Sea King par des hélicoptères EH101, et à son annulation. La réponse simple est qu'il y a une ingérence politique.
    Bien sûr, cette ingérence a aussi des répercussions à l'interne, du point de vue de la professionnalisation de la bureaucratie. Oui, ils sont très professionnels, mais ils jouent aussi le jeu de la remise en question: que veut le gouvernement? Dans le cadre du processus menant à l'élection de 2015 et après, le ministère avait l'impression que les F‑35... Si le gouvernement n'est pas susceptible de voir d'un bon œil le fait d'avancer rapidement, le ministère n'ira pas de l'avant. Il trouvera d'autres projets à faire avancer. C'est la dynamique qui existe entre le gouvernement, d'une part, et les perceptions et croyances des ministères, d'autre part. Lorsque ces facteurs sont combinés, ils expliquent comment ces projets peuvent s'éterniser.
    Merci, monsieur Fergusson.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Bains pendant cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également nos invités de s'être joints à nous aujourd'hui.
    Je souhaiter aborder la question du programme de la SNCN — la stratégie nationale de construction navale — et parler des chantiers navals Seaspan de Vancouver, qui sont très importants pour notre secteur maritime. Je vais vous interroger depuis Richmond, en Colombie-Britannique.
    Étant donné que les chantiers navals ont été chargés de construire deux navires de soutien interarmées — dont le premier devrait être livré en 2023 —, pouvez-vous décrire le rôle que joueront ces navires au sein de la Marine royale canadienne?
    J'adresse ma question à M. Collins.

  (1405)  

     Bien sûr. Merci, monsieur.
    Les NSI ne fournissent pas seulement des capacités de ravitaillement en carburant, qui donnent à la Marine royale canadienne la possibilité d'exercer ses activités sur de plus longues distances et pendant une plus longue période, et qui contribuent ainsi à fournir une capacité alliée nécessaire. Les capacités de ces navires dépassent celles de leurs prédécesseurs, en fournissant essentiellement une infirmerie à bord et en transportant davantage de marchandises. Il ne s'agit pas du navire ambitieux qui avait été envisagé en 2008 et dont la construction a ensuite été annulée. Toutefois, ce navire a la capacité de transporter un nombre limité de troupes et d'hélicoptères. Il possède aussi certaines des capacités que l'on associe normalement à un navire amphibie, mais au fond, il s'agit de donner à la Marine royale canadienne la capacité de mener des opérations en mer pendant de longues périodes et de demeurer outre-mer pendant de longues périodes.
    Je vais continuer sur cette lancée en vous posant la question suivante: compte tenu de ses capacités, dans quelle mesure le navire est‑il compatible avec les autres technologies offertes par nos autres pays alliés?
    Eh bien, il doit être interopérable pour pouvoir faire ce que l'on appelle le REM, le ravitaillement en mer, avec les alliés de l'OTAN.
    Les marines plus importantes répartiraient les capacités que nous essayons d'intégrer dans le NSI entre plusieurs navires différents. Les Britanniques auraient un navire simple, comme le Tidespring, qui peut ravitailler d'autres navires. Puis ils auraient une autre classe de navires, des porte-avions, par exemple, qui ont presque une capacité de type amphibie qui leur permet de transporter un grand nombre de troupes et une grande quantité de marchandises. L'Australie a aussi cette classe de navires. Bien sûr, au Canada, nous avons cessé de chercher un gros navire tape-à-l'œil, comme le voulait l'ancien chef d'état-major de la défense, Gén. Hillier, il y a plus d'une dizaine d'années, et nous nous sommes concentrés sur ce modèle.
    D'accord. Je vais continuer à vous interroger. Pour en revenir aux avions de chasse, lorsqu'il s'agit d'assurer la sécurité des Canadiens, y a‑t‑il eu, au cours des dernières années, des améliorations notables dans le domaine de l'aérospatiale?
    Parlez-vous des capacités aériennes de l'Aviation royale canadienne ou de l'industrie?
    Oui, de l'industrie elle-même. De manière générale, des améliorations ont-elles été apportées, à votre avis?
    C'est une question à laquelle il est très difficile de répondre. L'un des créneaux du Canada, et j'insiste sur le mot « créneau », était la fabrication d'avions militaires en grand nombre, mais depuis les années 1960, nous avons cessé de les fabriquer. Nous avons fabriqué l'aéronef Arrow dans les années 1950, puis nous avons abandonné ses licences dans les années 1960. Ce que notre base industrielle de défense aérienne sait faire, du point de vue des aéronefs, c'est de fabriquer des produits liés aux satellites, aux communications et aux entreprises comme CAE qui conçoivent les systèmes de simulation d'instruction. Nous avons acquis une excellente réputation dans le domaine des capacités spécialisées de ce genre.
    Pour revenir à une question que l'un de vos collègues m'a posée tout à l'heure à propos de la politique des retombées industrielles et technologiques (RIT), l'une de ses mesures est axée sur des capacités industrielles clés, notamment la simulation. Ces créneaux particuliers liés à l'aérospatiale dans lesquels nous excellons sont ceux que la politique tente de stimuler et d'exploiter.
    Pour en revenir au sujet, tout comme j'ai posé une question au sujet de la capacité des avions de chasse et de leur compatibilité avec les F‑35 et de leurs systèmes d'armes je pose maintenant la question suivante: quelles sont notre capacité et notre compatibilité avec nos alliés du NORAD et de l'OTAN?
    La grande majorité des aéronefs que nous achetons pour nos forces armées sont fabriqués par des constructeurs alliés qui sont principalement américains. Comme l'a fait remarquer mon collègue, M. Fergusson, l'interopérabilité avec le NORAD, cet objectif de commandement binational de la défense aérienne continentale, détermine ce qui entre dans la conception d'un aéronef afin qu'il puisse contribuer à remplir la mission du NORAD.
    Alors, en remplissant ces missions...
    Merci, monsieur Bains. Cinq minutes, ça passe très vite.
    Voilà qui met fin à notre première heure consacrée à l'étude des projets d'approvisionnement en défense aérienne. Je remercie les témoins de leur participation. Parfois, il y a un peu de recoupement entre les questions liées à la défense aérienne et les questions liées à la SNCN, alors je vous remercie d'avoir répondu à ces questions.
    Monsieur Fergusson, nous vous remercions de votre témoignage d'aujourd'hui. Je reconnais que vous ne participerez pas à la prochaine heure de la réunion qui portera sur la SNCN, mais vous êtes invité à maintenir votre connexion avec la réunion. Même si vous ne participerez pas à la prochaine partie de la séance, nous vous sommes reconnaissants du témoignage que vous avez apporté aujourd'hui.
    Ceci dit, nous allons maintenant commencer la période que nous consacrons à la stratégie nationale de construction navale.
    Messieurs Collins et Kasurak, les témoignages que vous nous avez fournis ont été distribués aux membres du Comité. Ils savent donc qu'ils existent, et ils les ont reçus à l'avance.
    Nous vous accordons jusqu'à trois minutes si vous souhaitez faire un exposé rapide.
    Nous allons commencer par donner la parole à M. Collins.

  (1410)  

     Merci, monsieur le président. Je suis heureux de prendre de nouveau la parole.
    Je vais simplement répéter les parties essentielles de ma déclaration préliminaire. J'espère qu'elles pourront servir de base à une discussion plus approfondie.
    Il convient de garder à l'esprit qu'au cours de l'histoire de l'approvisionnement de la défense canadienne, il n'y a eu aucun équivalent de la stratégie nationale de construction navale qui possédait une pareille ambition. Son objectif est de mettre en œuvre un processus de construction navale continu, échelonné sur plusieurs décennies.
    À l'heure actuelle, nous envisageons de construire plus de 50 grands navires. Il y a d'autres projets de construction de petits navires de moins de 1 000 tonnes, et aussi des projets de remise en état et de modernisation. Comme l'a fait remarquer mon collègue, M. Kasurak, cela représentera une énorme somme d'argent à l'avenir.
    L'une des difficultés qui sont au cœur de la raison pour laquelle la SNCN a rencontré autant de problèmes liés au démarrage, à des retards et à des défis de production, c'est que le gouvernement du Canada tente essentiellement de reconstruire une capacité et une industrie qui ont effectivement pris fin dans les années 1990. Nous essayons également de rétablir les connaissances institutionnelles perdues au sein du ministère de la Défense nationale, de SPAC et des Forces armées canadiennes, des connaissances qui ont été perdues lors des compressions budgétaires des années 1990 et 2000. Il n'y a pas d'usine ou d'école supérieure qui forme des personnes ayant une grande compréhension du système d'approvisionnement du Canada en matière de construction navale. Cette base de connaissances doit donc être élaborée à l'interne.
    Au cours des années qui ont suivi la mise en œuvre de la SNCN, les difficultés qui sont survenues ont porté sur les estimations des coûts des projets, sur les lacunes liées à la production des chantiers navals, sur des négociations prolongées concernant la propriété intellectuelle, sur des réclamations relatives aux offres présentées par les soumissionnaires non retenus, et sur des communications inadéquates. Bien sûr, le régionalisme sera toujours présent. À certains égards, nous ne sommes pas différents de nos alliés, comme le Royaume-Uni ou l'Australie, qui, fait intéressant, ont des projets de construction navale semblables à ceux liés à la SNCN. L'établissement d'une marine et d'une garde côtière du XXIe siècle est une tâche compliquée, et des défis géopolitiques, semblables à ceux évoqués plus tôt au sujet de la défense aérienne, s'appliquent également aux intérêts maritimes du Canada.
    Une lacune importante qui, je l'espère, sera comblée dans les années à venir est liée à l'avenir de la force sous-marine. Cette force doit être remplacée au cours de la prochaine décennie, et j'espère que nous obtiendrons bientôt des réponses à ce sujet.
    C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
    Merci, monsieur Collins.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Kasurak.
    Merci, monsieur le président.
    Au lieu de lire ma déclaration, que M. Collins a devancée en faisant un excellent résumé de la situation actuelle, je voudrais simplement mentionner les deux problèmes que j'y ai signalés.
    L'une d'entre elles est que compte tenu du temps qui s'écoule en ce moment, en raison des retards constants et de la stratégie de base qui consiste à essayer d'étirer les livraisons afin d'avoir une industrie de la défense continue et durable, nous allons commencer à couper l'acier pour le NCC au moment où les frégates de patrouille les plus récentes auront près de 50 ans. La flotte de 15 frégates sera effectivement livrée en 2045. Je pense que cela représentera un problème substantiel à gérer, tant sur le plan de capacité navale que sur le plan du contrôle de la configuration des navires construits.
    Et enfin, il y a la question des coûts. À l'heure actuelle, il n'y a pas vraiment de bonne façon d'estimer ce que ces navires coûteront. Bien entendu, le directeur parlementaire du budget parle de coûts d'environ 77 milliards de dollars, mais l'ancien directeur général du programme du MDN a déclaré publiquement que nous ne pourrons pas vraiment évaluer le coût de la construction de ces navires avant d'en avoir construit au moins trois. La question des coûts est donc en suspens.
    Comme l'a récemment souligné le directeur parlementaire du budget, le programme de défense dans son ensemble déplace l'acquisition d'immobilisations vers la droite d'une manière plutôt radicale. Je pense qu'un énorme resserrement budgétaire, qui sera très difficile à gérer, nous attend et qu'il y aura un problème de capacité lorsque le MDN tentera de gérer tous ces projets plus ou moins en même temps.
    Je pense que les deux problèmes suivants sont cruciaux, c'est-à-dire le temps qu'il faudra pour livrer la flotte et les coûts croissants qui devront être gérés d'une manière ou d'une autre dans le cadre du programme de défense.
    Merci, monsieur le président.

  (1415)  

    Merci, monsieur Kasurak.
    Nous allons maintenant passer aux séries de questions, en commençant par donner la parole à M. Paul-Hus pendant six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie également les témoins de leur présence à la réunion d'aujourd'hui.
    Monsieur Kasurak, lorsqu’on parle de construction militaire, ou plus particulièrement de construction navale, puisque c’est le sujet dont il est question aujourd'hui, jecrois qu'il y a quatre parties prenantes, soit le politique, la fonction publique, l’industrie et les contribuables.
    Dans la situation actuelle, chacune des parties prenantes a toujours un problème. Le politique change d’idée. Pour ce qui est de la fonction publique, on se demande s'il y a parfois un manque de compétence. Quant à l'industrie, il semble qu'elle tire souvent la couverture de son côté.
    En ce qui concerne la construction navale, nous avons d'importantes questions, par exemple au sujet des contrats de construction des navires de patrouille extracôtiers et de l'Arctique, les NPEA.
    Dans sa présentation, M. Collins a mentionné que le contrat semblait simple, que cela allait bien et que cela devait coûter 2 milliards de dollars — il y a cinq navires et chacun coûte 400 millions de dollars. Finalement, on en a ajouté un sixième, histoire d'étirer le temps. Cela totalise 2,8 milliards de dollars. Or on apprend aujourd’hui que cela va coûter 4,3 milliards de dollars pour un dossier qui semblait pourtant simple. Encore une fois, ce sont les contribuables, la quatrième partie prenante, qui paieront pour cela.
    Monsieur Kasurak, vous venez de dire que l'on avait beaucoup de projets. Je voudrais savoir si le Canada prend une trop grande bouchée, ce qui fait que l'industrie a du mal à concrétiser ces projets. Le Canada ne devrait-il pas se tourner vers l'étranger et avoir des navires qui proviennent d'autres pays?
    Je comprends que le Canada veuille profiter des retombées économiques que cela engendre, mais, s'il n’est pas en mesure d’avoir les équipements dans un délai raisonnable, tout le monde est perdant.
    Que pensez-vous de la possibilité de faire affaire avec l'étranger pour certains produits?

[Traduction]

     Si vous me permettez de faire ce jeu de mots, je dirais qu'à mon avis, ce navire a pris le large. Le gouvernement au pouvoir — en fait, deux gouvernements — a décidé d'essayer de relancer l'industrie canadienne de la construction navale, en tant que décision stratégique. À l'heure actuelle, il y aurait certainement peu ou pas d'avantages et probablement de nombreux désavantages à tenter de modifier le processus qui a été établi.
    Monsieur le président, je ne crois pas qu'à ce stade, la tentative de modifier votre...

[Français]

    Pensez-vous que les chantiers Seaspan et Irving sont en mesure de construire tout ce qu’ils ont à construire en respectant les échéanciers? Quand on parle de frégates, le niveau de technologie demandé fait que l'on ne sait pas quel jour on va les recevoir. Au moment où on les aura, la technologie sera peut-être déjà dépassée.
    On a un autre problème en ce qui a trait à la rapidité. Les coûts sont énormes, mais que pensez-vous de la rapidité de construction? Devrions-nous rester ainsi et nous croiser les doigts?

[Traduction]

    Je ne crois pas que nous devions croiser les doigts. Je pense que le contrôle parlementaire stimulera la résolution de certains de ces problèmes. Toutefois, il serait assez difficile d'essayer d'accélérer les choses maintenant que nous nous sommes engagés dans cette voie. La capacité de Seaspan et d'Irving est ce qu'elle est. Nous devons nous accommoder de la situation. Nous devons travailler en tenant compte de cela et utiliser ces projets comme tremplins.

[Français]

    Je vous remercie.
    Monsieur Collins, en 2019, la lettre de mandat du ministre de la Défense demandait la création d'une organisation conjointe. Cette nouvelle organisation serait un nouveau ministère d’approvisionnement militaire. En 2019, c'est ce que le premier ministre demandait au ministre de la Défense. En 2021, on a retiré cette demande.
    De notre côté, c'est-à-dire du côté des conservateurs, nous trouvions que c’était une très bonne idée de prendre exemple sur le modèle australien et d'organiser notre approvisionnement militaire à un endroit, sous la responsabilité d'un ministre.
    Que pensez-vous du fait que le gouvernement a changé d’idée?

  (1420)  

[Traduction]

    Je ne suis pas sûr de la position du gouvernement à ce sujet, parce qu'il n'y a pas eu de déclaration officielle confirmant l'abandon de cette idée. Toutefois, vous avez raison de dire que cela ne figure pas dans les lettres de mandat.
    La COVID, selon moi, y est pour quelque chose. D'après les conversations que j'ai eues avec des gens du système, la résistance bureaucratique est également un facteur primordial. Les ministères n'aiment pas perdre des aspects de leur mandat à la suite de remaniements complets, et ce serait certainement le cas en l'occurrence.
     Ces deux facteurs, pris ensemble, expliquent en grande partie pourquoi cette idée n'a suscité aucune adhésion. Entreprendre un remaniement d'une telle ampleur pendant un projet de construction au titre de la SNCN, et parallèlement à l'acquisition des avions de chasse — et personne ne sait encore ce qui sera proposé dans le budget du 7 avril —, poserait un défi de taille puisqu'il faudrait effectuer un remaniement complet tout en essayant de gérer efficacement tant de projets en même temps.
     Je suis toutefois d'avis que c'est une bonne idée qui mérite d'être évaluée et poursuivie. Je ne cesserai jamais de réfléchir à la manière dont nous pourrions nous restructurer pour envisager l'approvisionnement sous un angle quelque peu différent, et je serai ravi d'obtenir des analyses plus poussées à ce sujet.
    Merci, monsieur Collins.
    La parole est maintenant à M. Housefather, qui dispose de six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je ne brosserai pas un tableau aussi sombre que celui dépeint lors de la dernière série de questions.
     Je tiens à souligner qu'à mon avis, le Canada est doté d'une excellente fonction publique. Je ne crois pas qu'il soit juste de remettre en question la compétence des fonctionnaires. Selon moi, le Canada a la chance d'avoir une fonction publique indépendante et très respectée.
    Monsieur Kasurak, je vois ici une occasion. Vous avez parlé, dans votre déclaration préliminaire, d'une des difficultés qui se présentent. En effet, la défense n'a jamais été considérée comme une priorité aux yeux de la population. Les Canadiens n'ont jamais voulu y consacrer beaucoup d'argent, et les gouvernements ont donc agi en conséquence, même si certains groupes d'intérêt estimaient que nous avions besoin d'une armée plus forte et mieux équipée.
     Je pense qu'au vu du récent conflit en Ukraine — l'horrible guerre déclenchée par la Russie —, les gens sont beaucoup plus ouverts à l'idée de dépenser davantage dans le secteur de la défense. Ils sont prêts à reconnaître les difficultés auxquelles fait face le Canada, en tant que pays arctique qui partage une frontière avec la Russie dans un monde où vous avez eu Donald Trump comme président et où vous ne pouvez pas toujours compter sur le président américain pour nous défendre. Je crois que les Canadiens commencent à se rendre compte qu'il est nécessaire d'avoir des forces armées très professionnelles et bien équipées.
    Ne considérez-vous pas cela comme une occasion, monsieur Kasurak?
    Je le considère certainement comme un besoin. Si vous regardez l'historique des dépenses en matière de défense, même au plus fort de la guerre froide, à la fin des années 1970 et dans les années 1980, lorsque le gouvernement, de par son orientation, était en faveur d'un budget militaire, il a augmenté les dépenses jusqu'à environ 2 %, et ce taux est demeuré inchangé jusqu'à la fin de la guerre froide.
     Je pense que si le besoin existe, la population sera assurément en faveur des dépenses, et les politiciens tiennent généralement compte du besoin et de la possibilité d'obtenir l'appui de la population. Je suppose que, du point de vue de la défense, il y a lieu de considérer cela comme une occasion.
    À mon sens, il y a également des occasions à saisir chaque fois que nous pouvons apporter des améliorations au ministère et à nos processus. Ce qu'on oublie souvent, d'après moi, c'est qu'il y a des compromis à faire partout.
    Nous venons de parler de la différence entre l'acquisition de navires étrangers et la création d'une industrie canadienne qui stimule l'emploi et la croissance économique au Canada et qui finit par être autosuffisante. Ainsi, une fois que nous aurons augmenté les activités de nos chantiers navals, en fonction de ce que les Américains ont besoin, pour assurer des constructions uniformes, les constructeurs seront en mesure de produire des navires moins coûteux et de meilleure qualité dans le processus de qualification des chantiers Davie, Seaspan et Irving. Il y avait donc un choix à faire.
    Nous aurions peut-être pu nous procurer des navires moins coûteux et les obtenir un peu plus rapidement si nous les avions achetés à l'étranger, mais nous avons choisi de créer des emplois au Canada et de stimuler l'économie nationale, ainsi que d'instaurer une industrie autosuffisante chez nous.
     Êtes-vous d'accord pour dire qu'il s'agit d'un compromis et d'un choix que nous avons fait? Cette question s'adresse à vous deux.
    Je crois qu'il s'agit assurément d'un choix stratégique. La question que je me pose est la suivante: que se passe‑t‑il à la fin de la production actuelle? Serons-nous en mesure d'entretenir ce que nous avons construit? Même si nous prolongeons le tout sur une très longue période, qu'arrivera‑t‑il au bout du compte?
    Les sous-marins ne font pas partie du programme.

  (1425)  

    Allez‑y, monsieur Collins.
    Je suis tout à fait d'accord, monsieur, sur cette idée de compromis. Ce qui manque depuis un certain temps dans cette discussion, ce sont les avantages que procure la capacité en matière de développement, c'est‑à‑dire la capacité de non seulement construire les navires, mais aussi — et c'est crucial — de les entretenir et de les maintenir pendant des décennies.
    Il faut donc une capacité de souveraineté nationale. À défaut de quoi, si nous ne faisions qu'acheter des navires à l'étranger, nous serions obligés de dépendre de constructeurs étrangers qui seraient responsables, à long terme, des modifications importantes ou de l'entretien, à moins que vous soyez prêts à effectuer ces tâches au Canada.
    Dans le cas des sous-marins de la classe Victoria, nous avons découvert, au moment de leur acquisition, que leur chaîne de production avait été arrêtée. Nous avons dû redémarrer cette chaîne de production à partir de zéro et apprendre depuis le début comment entretenir et maintenir ces appareils, parce que nous n'avions pas cette capacité de souveraineté.
     Je ne dis pas quelle est la bonne solution; je soutiens que cela fait partie des compromis que vous évoquez dans votre question, et nous devrions en être pleinement conscients lorsque nous prenons ce genre de décisions.
    Je vous remercie.
    Je vais terminer par une petite observation.
     Je ne suis pas du tout surpris qu'il faille quelques mois, peut-être jusqu'à sept mois, pour négocier un contrat avec Lockheed Martin. Je ne pense pas que ce soit si simple. Même si certaines des modalités sont déjà convenues, il faut négocier un grand nombre de points dans des contrats complexes. C'est ce que j'ai fait toute ma vie, en ma qualité d'avocat général, et cela ne me surprend pas du tout.
    Je remercie beaucoup les deux témoins.
    Merci, monsieur Housefather.
     Nous passons maintenant à Mme Vignola, qui dispose de six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Je demanderai à tous les témoins de répondre à mes questions l'un après l'autre.
    Cette semaine, au Comité, un témoin a dit que ce n'était pas forcément le gouvernement qui prenait les décisions concernantt la Sratégie nationale de construction navale, mais que c'était plutôt un chantier de l'Est du Canada qui lui imposait ses vues. La situation actuelle de l'explosion des coûts et des retards constants dans la livraison est préoccupante. Elle peut être expliquée par la situation que nous vivons depuis deux ans, par la pénurie de main-d'œuvre et par l'inflation liée à la construction navale. Cela dit, la capacité de coupe d'acier de chacun des chantiers a probablement des répercussions.
     Néanmoins, les propos du témoin lèvent le voile sur une autre possible raison à la hausse des coûts, une raison qui ne semble pas être dans l'intérêt ni du gouvernement ni des contribuables. Si ce chantier naval tient vraiment le haut du pavé, comme le témoin le disait, concernant les décisions, est-il possible que son influence s'étende à d'autres chantiers, que ce soit de façon favorable ou défavorable?
    Que pensez-vous de ce que le témoin a dit cette semaine?

[Traduction]

    J'ai entendu ce témoignage, monsieur le président, et je l'ai trouvé quelque peu exagéré. Je pense que le gouvernement a délibérément choisi de confier le rôle d'entrepreneur principal à l'industrie. Il a, par le fait même, cédé un peu de contrôle.
    Toutefois, les problèmes rencontrés ne sont pas vraiment attribuables à l'identité de l'entrepreneur principal ni à la provenance interne ou externe des ressources. Ils sont liés à l'état initial du chantier naval, à la situation de notre main-d'œuvre et à la complexité du système d'armes que nous essayons de construire. Je ne suis pas convaincu que le projet aurait coûté moins cher ou aurait donné de meilleurs résultats au bout du compte s'il n'y avait eu que des employés du gouvernement. Il faut, tôt ou tard, interagir avec un chantier naval.
    J'aimerais également signaler au Comité que le gouvernement est intervenu et a ordonné le gel des spécifications pour tenter de maîtriser les coûts. Cette décision a entraîné une autre série de problèmes. Le gouvernement est aux commandes, à mon avis, et les problèmes sont inévitables, vu l'ampleur et la complexité de la tâche.
    J'abonde dans le sens de mon collègue. Il a tout à fait raison.
    L'autre défi, c'est que le Canada n'est pas le seul pays parmi ses alliés à mettre en œuvre un énorme programme de reconstruction de navires, de sous-marins et d'autres capacités navales essentielles. La plupart de nos alliés les plus évidents sont maintenant les Britanniques, les Australiens, les Néerlandais et les Allemands. Les prix des produits de base, comme l'acier ou d'autres pièces utilisées dans la fabrication d'un navire, entreront toujours en ligne de compte, quel que soit l'endroit où le navire est construit.
    Il s'agit vraiment, comme je l'ai dit dans ma dernière réponse à M. Housefather, de savoir quels sont les compromis dont il faut tenir compte au moment de prendre une telle décision.

  (1430)  

[Français]

    Ainsi, au moment où les chantiers ont été choisis, ils n'étaient pas encore prêts à construire ces navires et à participer à un projet d'une telle envergure.
    Ai-je bien compris, monsieur Kasurak?

[Traduction]

    Oui et non. Les chantiers navals devaient tous être rendus conformes aux normes avant de commencer à fonctionner, ce qui a pris plus de temps dans le cas de Seaspan. Cependant, une fois qu'ils sont conformes aux normes, ce n'est plus pareil. Ils doivent être compétents pour effectuer le travail.

[Français]

    Le gouvernement est actuellement en négociations pour inclure un troisième chantier naval dans la Stratégie. Si on avait commencé ce travail plus tôt, cela aurait-il permis de régler plusieurs des problèmes qu'on rencontre actuellement en ce qui a trait aux échéanciers, aux coûts et à la coupe d'acier, par exemple?

[Traduction]

     Eh bien, cela aurait accéléré les choses. Le problème avec un troisième chantier naval est de savoir si, à la fin du programme, nous aurons assez de travail pour maintenir trois chantiers navals. Selon moi, c'est ce qui a poussé le gouvernement à limiter à deux le nombre de chantiers au début. Je ne suis pas sûr que nous sachions encore si nous pourrons en maintenir même deux, et encore moins trois, à la fin du programme.

[Français]

    Monsieur Collins, je me questionne à propos de quelques éléments de la Stratégie.
    À l'heure actuelle, pour les 15 navires de combat de surface, qui coûteront entre 56 milliards et 60 milliards de dollars, aucune date de livraison n'est encore déterminée. À cela s'ajoute le prix des deux navires de patrouille extracôtiers et de l'Arctique, ou NPEA, qui est inconnu, et ce, malgré le fait que l'entreprise chargée de les construire en a déjà construit six. En fait, on entend parler d'un coût non confirmé de 1,5 milliard de dollars pour ces deux navires de la Garde côtière.
    Pour ce qui est des petits navires polyvalents et des navires de patrouille côtière, on ne connaît ni leur date de livraison ni leur coût.
    Cela vous inquiète-t-il qu'il y ait tant de choses sur lesquelles nous n'avons pas d'information? Il s'agit quand même de notre souveraineté territoriale.
    Le président m'indique que nous n'avons plus de temps, alors vous allez devoir me répondre par écrit.

[Traduction]

    Je suis...
    Je vous remercie. Excusez-moi de vous interrompre, monsieur Collins, mais malheureusement, à cause des contraintes de temps, comme l'a proposé la députée, nous vous saurions gré de nous fournir une réponse par écrit. Malheureusement, faute de temps, nous devons avancer.
    Monsieur Johns, vous avez six minutes.
     Merci beaucoup.
    Monsieur Kasurak, nous venons d'entendre les conservateurs parler de la possibilité de construire nos navires dans d'autres pays pour accélérer le processus — pour qu'ils soient prêts dans un délai plus court.
    Pouvez-vous nous parler de l'importance des retombées économiques — en matière de création d'emplois et d'effet multiplicateur, ainsi que sur le plan des transferts économiques — que procure la construction de navires ici au Canada, et nous expliquer à quel point il est important de renforcer la capacité de construction navale dans notre pays?
    Je pense que M. Collins a déjà abordé cette question. La présence d'une industrie de la construction navale est une exigence stratégique si l'on veut avoir une marine. Chose certaine, nous ne voudrions pas perdre notre capacité de construction navale.
    Quant à l'importance des retombées économiques, je suis désolé, mais je ne suis pas qualifié pour en parler, même de façon hypothétique.

  (1435)  

    Je pense que nous pouvons tous supposer que les retombées seront très importantes, surtout dans les collectivités côtières. Je crois que M. Collins a parlé de l'importance que revêt la construction navale pour notre souveraineté.
    Cela dit, nous avons assisté à l'adoption de politiques dans le passé. Ainsi, un tarif douanier de 25 % a été mis en place pour que les entreprises canadiennes ne construisent pas de traversiers à l'étranger. Cette décision a fait beaucoup de tort à notre secteur de la construction navale. Par exemple, même dans ma province, BC Ferries construisait auparavant des traversiers en Allemagne, en Turquie et en Pologne. Notre capacité a été réduite à néant en raison des politiques.
    Monsieur Collins, reconnaissez-vous l'importance de créer ou de rétablir des politiques pour soutenir notre secteur de la construction navale et protéger les emplois ici, au Canada?
    Monsieur Johns, ma réponse à votre question rejoint ce que votre collègue du Québec a mentionné plus tôt, à savoir qu'un volet central de la SNCN concerne la fabrication de petits navires, c'est‑à‑dire des bateaux de moins de 1 000 tonnes. Les seuls renseignements que je peux trouver à ce sujet sont les rapports annuels et les communiqués de presse occasionnels. Il est très difficile de comprendre ce qui se passe exactement dans le cas des petits chantiers et installations qui ont la capacité de soumissionner pour ces contrats.
    Tous ces autres bateaux dont nous avons besoin constituent vraiment, à mon avis, la pièce manquante de la SNCN, dont vous avez parlé. Vous savez, les gouvernements provinciaux de Terre-Neuve et de la Colombie-Britannique ont acheté leurs traversiers à l'étranger, mais il s'agit là de décisions provinciales, alors que nous parlons ici d'un plan fédéral de construction navale. Quoi qu'il en soit, cela montre que si nous avions un secteur plus dynamique de fabrication de petits bateaux — c'est‑à‑dire de moins de 1 000 tonnes —, les gouvernements provinciaux seraient peut-être plus disposés à envisager une capacité de fabrication nationale.
    C'est une excellente question, et j'aimerais certes obtenir plus d'information à ce sujet.
     Le tarif douanier de 25 % a, en fait, généré 118 millions de dollars par an. Cet argent aurait pu être réinvesti au Canada, dans la création d'une plus grande capacité. C'est ce que nous soutenons en tant que néo-démocrates. Lorsque vous supprimez un tarif douanier et que vous éliminez les obstacles qui empêchent les entreprises canadiennes d'aller fabriquer des bateaux à l'étranger, nous estimons que l'élimination de ce tarif douanier très important a permis de multiplier les possibilités.
    En ce qui concerne la capacité, j'ai assisté à la conférence de la région économique du Nord-Ouest du Pacifique. Les participants ont déclaré qu'il y a des réparations d'environ 3 milliards de dollars chaque année sur la côte entre l'Oregon et l'Alaska, ce qui comprend Washington et la Colombie-Britannique, et que les chantiers fonctionnent presque à plein régime. Ils avaient besoin de plus de cales sèches flottantes. Le directeur parlementaire du budget a déterminé que le coût de la main-d'œuvre est extrêmement élevé et très concurrentiel sur les marchés où l'on construit de grands navires.
    Vous avez parlé des petits chantiers navals. Le gouvernement fédéral n'a toujours pas de programme pour construire des cales sèches flottantes. Je vis à Port Alberni, où l'on trouve le seul port en eau profonde de la côte ouest de l'île de Vancouver. L'administration portuaire du gouvernement fédéral et la Canadian Marine Engineering, qui emploie beaucoup de gens, y compris beaucoup d'Autochtones, ne peuvent pas obtenir de financement pour construire une cale sèche flottante. Pourtant, la demande est là.
    Constatez-vous un manque de cohérence dans les projets interministériels d'infrastructures de soutien entre Transports Canada et Services publics et Approvisionnement Canada?
    Eh bien, je dois dire que ce qui se passe à l'extérieur du domaine naval ne relève pas vraiment de mon champ d'expertise, mais en règle générale, je pense qu'il y a toujours lieu d'assurer une coordination interministérielle afin d'éviter les dédoublements et d'optimiser les dépenses, c'est certain.
    Monsieur Kasurak, voulez-vous faire quelques observations sur ce que j'ai dit? Je pense qu'il est vraiment important que nous obtenions une perspective complète.
    Oui. Selon moi, l'un des points que le gouvernement ne doit pas perdre de vue est ceci: lorsque le programme de la Marine et de la Garde côtière tirera à sa fin, nous aurons payé une prime pour le renforcement des chantiers navals et pour la construction navale à l'intérieur de nos frontières. Si nous ne parvenons pas à en assurer le maintien, en raison d'autres politiques qui entrent en conflit avec le soutien de l'industrie de la construction navale, nous aurons gaspillé une bonne partie de nos investissements, donc à long terme...
    Voici une question à laquelle je vais revenir avec vous, alors. Ce tarif de 25 % a constitué une excellente barrière. Il a garanti la construction d'une grande partie des traversiers de la Colombie-Britannique dans la province. Lorsqu'il a été supprimé, la construction de ces bateaux est allée à l'étranger. Croyez-vous que nous devrions rétablir ces politiques pour faire en sorte que la construction navale se fasse chez nous?

  (1440)  

    Je ne crois pas être vraiment qualifié pour parler de l'ampleur des droits de douane nécessaires, mais je pense que le gouvernement doit envisager l'industrie de la construction navale dans son ensemble et à très long terme. Les droits de douane en seraient certainement un élément.
    Merci, monsieur Kasurak. Si vous souhaitez ajouter quoi que ce soit à cette réponse, n'hésitez pas à en faire part au greffier, qui transmettra l'information aux membres du Comité.
    Nous allons maintenant entamer notre deuxième tour. Nous sommes très efficaces.
    Monsieur McCauley, vous disposez de quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Johns, je suis surpris que vous parliez de la construction en Colombie-Britannique. Je me demande si vous oubliez la décision du NPD de dépenser un demi-milliard de dollars pour la construction de traversiers en Colombie-Britannique qui ont été vendus pour 19 millions de dollars à la casse. Ils n'ont jamais été vraiment utilisés. Je pense que cela résume parfois notre capacité.
    Monsieur Collins, vous avez parlé de la capacité de souveraineté, et j'aimerais que nous en discutions. Nous avons la Stratégie nationale de construction navale, la SNCN, et nous sommes peut-être engagés dans une voie sans possibilités de revenir en arrière. Vous savez, s'il nous faut 20 ans pour construire un navire, je suis curieux de savoir comment vous pouvez revendiquer cela comme étant une question de sécurité, disons, ou une question de capacité de souveraineté, alors que nous n'avons pas vraiment la capacité de construire un navire en 10 ou 15 ans.
    Je me demande ce que vous pensez des coûts de renonciation en ce qui concerne les retombées industrielles et technologiques, ainsi que la construction ici au Canada. Je pense que dans le rapport original du directeur parlementaire du budget d'il y a quatre ou cinq ans, la prime était d'environ 25 %. Devrions-nous peut-être réexaminer cela, ou peut-être assouplir un peu les choses, pour regarder à l'étranger et rendre cet argent aux contribuables, ou pour développer d'autres industries au Canada? Nous ne construisons pas nos propres chars d'assaut ici, et pourtant nous ne prétendons pas que c'est une question de souveraineté. Nous ne construisons pas nos propres missiles ici, et nous ne déclarons pas que c'est une question de souveraineté. Pourquoi le faisons-nous à propos des navires?
    C'est une excellente question. Je pense que c'est la nature de la construction navale. Les sommes sont associées non seulement à la construction du navire, mais aussi à son entretien pendant des décennies. C'est vraiment une distinction essentielle.
    L'autre différence est que les avions...
    Nous aurions pu le faire de la même manière si nous avions accepté l'offre de Fincantieri de construire ici. Les navires seraient toujours construits et entretenus ici.
    J'aimerais bien voir les détails de l'argumentaire qu'ils ont fait au pied levé après avoir perdu. Ils n'ont jamais eu à l'expliquer et ils n'ont jamais eu à rendre des comptes. C'est ce qui est beau quand on perd et qu'on tente une explication en désespoir de cause...
    Irving non plus ni SPAC d'ailleurs.
    Que devons-nous faire pour accroître notre capacité?
    Je sais que M. Housefather a, comme il se doit, fait l'éloge de la fonction publique. Nous ne critiquons pas la fonction publique, mais nous n'avons pas les moyens, la capacité et l'expertise qu'il faut au sein de SPAC et de Travaux publics pour le faire. Le directeur parlementaire du budget a également déclaré qu'à l'avenir, quand s'amorcera la mise en œuvre du programme « Protection, sécurité, engagement », nous aurons moins de capacités.
    Comment faire face à cette situation à court et à long terme? Devons-nous faire appel à nos alliés pour obtenir de l'aide?
    Tous nos alliés font face à la forte demande mondiale de compétences professionnelles. Si vous allez à...
    Je ne parle pas de la demande de compétences, nécessairement; je parle de la demande de compétences pour la capacité liée aux acquisitions.
    C'est de cela que je parle. Il n'y a pas que la fabrication, il y a aussi la gestion de projet.
     Comme je l'ai déjà dit, aucune école ne produit des masses de personnes capables de gérer ces projets. Quand les choses sont arrêtées depuis 10 ans et que vous essayez de les rétablir, comme nous sommes en train de le faire, vous vous heurtez à d'énormes contraintes en matière de ressources humaines.
    Cela nous ramène à ce que j'ai dit précédemment. Quels sont les compromis que vous êtes prêts à accepter? Vous pourriez aller...
    Permettez-moi de vous interrompre.
    Dans le cadre d'une étude antérieure, on nous a dit que, compte tenu de la façon dont nous travaillons, vous pourriez être dans une section de Travaux publics, en train d'acheter des crayons et du papier, et être transféré dans cette division. Tout à coup, vous faites autre chose.
    Avons-nous besoin d'une division distincte au sein de Travaux publics ou du MDN, dans laquelle nous commencerions à développer cette expertise? Le système actuel ne fonctionne pas.
    C'est l'un des principaux arguments en faveur de la création d'une agence distincte chargée des acquisitions dans le domaine de la défense. Vous vous mettez à développer la capacité des ressources humaines et les connaissances institutionnelles.
    Pour en revenir à ce que vous avez dit, vous ne pouvez pas demander à quelqu'un qui a consacré une partie de sa carrière à faire l'achat de photocopieurs de se mettre à faire des acquisitions massives et complexes dans le domaine de la construction navale. C'est l'un des principaux arguments en faveur d'une agence distincte pour les marchés publics de la défense.

  (1445)  

    Merci.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Jowhari, qui dispose de quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins de leurs témoignages. Je les trouve très utiles.
    J'aimerais revenir à M. Collins et parler plus précisément d'adaptation. Dans votre déclaration liminaire, vous avez dit que la SNCN est sans précédent dans l'histoire de notre pays, tant par son ambition que par sa portée. Vous avez également dit plus tard que bâtir une marine et une garde côtière dignes du XXIe siècle est une entreprise compliquée ainsi qu'un enjeu d'ordre géopolitique.
    Nous sommes tous d'accord pour dire que des demandes d'adaptation ont été formulées. L'adaptation, dans la mesure où elle a été proposée, est un facteur déterminant de l'ampleur de l'investissement que nous devons faire.
    Je veux revenir à la question fondamentale de savoir si vous considérez qu'il s'agit d'un désir de nos forces nationales, ou bien d'un besoin. Si vous considérez qu'il s'agit d'un besoin, quels sont les facteurs qui déterminent ce besoin pour que nous puissions envisager ce type d'adaptation?
    C'est une excellente question. Nous avons perdu la capacité de faire de la conception canadienne localisée de navires complexes après les années 1990.
    L'un des risques associés à la SNCN consiste à savoir si nous devons reconstruire aussi la capacité pour essayer de faire de la conception. Combien de temps et d'argent cela va‑t‑il exiger? Ou alors, est‑ce que nous nous associons à un autre État qui utilise une conception qui est ou sera en production et, par conséquent, nous « profitons » d'une variante utilisée par un autre partenaire? Avec le temps, cela peut aider à rationaliser les chaînes d'approvisionnement et les courbes d'apprentissage sur la façon de construire, d'entretenir et d'exploiter le navire.
    C'est mon...
    Je suis désolé de vous interrompre, mais qu'est‑ce qui fait que le Canada et les besoins canadiens nécessitent ce type d'adaptation?
    Je suis désolé. Je comprends mieux votre question maintenant. Je dirais la géographie, la construction navale, le plus long littoral du monde, trois océans, les alliances et le transatlantique. Aussi, de plus en plus maintenant, nous cherchons à nous engager dans la région indopacifique. Nous nous associons avec le Japon, l'Australie et la Corée du Sud. Nous sommes l'une des rares marines au monde à avoir ce type de besoins opérationnels géopolitiques qui nous donnent les capacités d'aller dans cette direction, si nous le souhaitons.
    Je pense que cela nous ramène au point soulevé par M. Kasurak. Quelle est votre vision des forces armées que vous voulez, et qu'est‑ce que vous voulez qu'elles fassent? À ce jour, on a cherché à cocher toutes ces cases. Pour cela, vous avez besoin d'une conception qui vous permette de le faire. C'est l'une des raisons pour lesquelles, par exemple, nous avons mis l'accent sur la capacité anti-sous-marine dans notre version du type 26, mais c'est également lié à l'attaque de cibles sur terre et dans les airs.
    Merci.
    Il ne me reste qu'environ 50 secondes. Je veux revenir à une option que j'aimerais vous recommander de considérer. J'aimerais entendre vos commentaires.
    Vous avez dit que modifier le processus de gestion de l'approvisionnement au milieu d'une transformation d'une telle ampleur serait, à défaut d'être coûteux, un obstacle aux progrès futurs en matière d'approvisionnement. Que pensez-vous de la centralisation de la supervision de ce projet d'un point de vue de la gestion de projet dans l'intervalle, comme remède à court terme à un processus d'approvisionnement décentralisé?
    Eh bien, il y a déjà un bureau centralisé, le bureau de la Stratégie nationale de construction navale, qui a été mis en place à cette fin. Je pense que le grand défi est simplement d'obtenir dès le départ une harmonisation et une orientation claires en matière de politique et de bureaucratie et de veiller à ce qu'elles soient constantes au cours des décennies à venir. C'est le vrai défi.
    Merci.
    La parole est maintenant à Mme Vignola, qui dispose de deux minutes.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Collins, vous avez partiellement répondu à ma question tout à l'heure. Je vais quand même vous demander de m'envoyer une réponse plus complète.
     Je vais vous poser une deuxième question.
    Selon vous, qu'est-ce que le gouvernement canadien devrait faire pour assurer la viabilité de la construction navale au Canada afin d'assurer la souveraineté de notre pays sur nos eaux territoriales et sur notre territoire? Que devrait-on faire pour assurer cette viabilité au-delà de la Stratégie nationale de construction navale?
    J'ai l'impression que, en raison de ce que vous avez dit au sujet de notre espace géographique, il serait ridicule de ne pas avoir de construction navale forte, tout comme il serait ridicule de dire que le Japon ou l'Angleterre n'ont pas de navires. À mon humble avis, cela n'aurait pas de sens.
    Comment peut-on faire pour assurer la viabilité de la construction navale au Canada?

  (1450)  

[Traduction]

    La durabilité est assurément un élément clé. Lorsque nous achetons des plateformes et de l'équipement militaires à grande échelle, nous nous attendons à ce qu'ils durent des décennies. C'est la tendance depuis les années 1960, et c'est la vision qui a été adoptée pour cet ambitieux projet. Nous ne sommes pas les seuls à faire cela. C'est pourquoi il est si important de disposer d'une capacité nationale et de comprendre comment maintenir et modifier ces navires pendant des décennies.
    La difficulté réside dans le fait que nous avons effectivement deux mini-marines et deux bases industrielles de la défense, une sur chaque côte, car vous ne pouvez pas simplement déplacer un navire d'un port à l'autre. C'est un énorme défi de gestion de projet, et c'est un énorme coût supplémentaire. Il s'agit de savoir si nous voulons sérieusement avoir une marine répartie sur trois océans et, idéalement, toute l'année, une marine répartie sur deux océans...

[Français]

    Vous avez parlé de deux petits chantiers.
    On a mis de côté le chantier le plus expérimenté et le plus ancien, qui compte cinq docks et qui représente 50 % de la capacité de construction navale. Cela a-t-il causé un problème, à votre avis?

[Traduction]

    Pourrions-nous avoir une réponse très rapide, s'il vous plaît?
    Le principal défi pour les trois chantiers navals est que le calendrier est déterminant. Si la construction est continue, il faut se demander ce qu'il y a d'autre à venir pour assurer la viabilité de ces chantiers navals. Ils sont là pour construire des navires et pas seulement pour maintenir et modifier des navires.
    Je vous remercie de cette réponse rapide. Si vous pensez avoir quelque chose à ajouter, n'hésitez pas à le faire par écrit.
    Nous allons maintenant passer à M. Johns, qui dispose de deux minutes.
    Merci à vous tous.
    Monsieur McCauley, je dois mentionner les cafouillages du gouvernement libéral-conservateur précédent de la Colombie-Britannique, notamment le pont Port Mann, dont le coût a été dépassé de 500 %, sans parler de BC Hydro, du toit de BC Place et du Centre des congrès de Vancouver. Je pourrais continuer toute la journée, mais je ne vais pas gaspiller mes quelques minutes.
    Ma question a trait au directeur parlementaire du budget. Les coûts auxquels il arrive sont extrêmement différents de ceux du gouvernement.
    Monsieur Collins, voulez-vous faire des commentaires sur la raison pour laquelle les coûts sont si divergents?
    Monsieur, c'est une excellente question. Cela nous ramène à ce que j'ai dit dans ma déclaration liminaire, concernant la communication et une meilleure transparence.
    Qu'est‑ce qui entre dans les modèles d'évaluation des coûts? On nous dit que le budget de 62 milliards de dollars est censé être satisfaisant pour l'avenir, mais on nous dit aussi que le chantier naval de Halifax a besoin de modifications pour le type de navires de très grande taille qui y sera construit, ce qui n'avait pas été envisagé il y a plus de 10 ans.
    Il existe différents modèles de calcul des coûts. J'aimerais simplement plus de transparence pour comprendre ce qui entre dans cette modélisation particulière.
    Monsieur Kasurak, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Je pense que c'est bien dit. Le directeur parlementaire du budget a essentiellement utilisé une prévision basée sur le poids du navire, et puisque nous ne savons pas grand-chose du navire, c'est la meilleure estimation possible.
    Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration liminaire, l'ancien directeur général de la construction navale à la Défense nationale a dit qu'il faudrait construire trois ou quatre navires avant d'avoir une idée précise de ce qu'ils vont coûter. C'est vraiment une boîte noire.
    Une plus grande transparence est nécessaire, mais nous devons également être informés de manière plus continue, et c'est vraiment ce qui manque.
    Merci, monsieur Johns.
    C'est maintenant au tour de M. Lobb, pour quatre minutes.
    Merci beaucoup.
    Je suis content que M. Johns ait parlé de la transparence, car c'est une source constante de frustration depuis que je fais partie de ce comité. Je ne blâme aucune des personnes qui ont comparu devant le Comité. Si l'on considère les députés qui siègent au Comité et les fonctionnaires, comme le directeur parlementaire du budget, aucun d'entre nous n'a vraiment accès aux détails importants qui nous permettraient de savoir si les choses vont dans le bon sens ou dans le mauvais sens.
    Je me demande si M. Kasurak peut parler de son expérience au Bureau du vérificateur général.
    Aviez-vous accès à l'information dont vous aviez besoin, ou deviez-vous vous rendre aux États-Unis pour essayer d'obtenir d'autres estimations?

  (1455)  

    Un des avantages de travailler sous le régime de la Loi sur le vérificateur général — ce qui me manque maintenant — est que vous avez le droit de consulter tous les dossiers et d'interroger n'importe qui. La réponse courte est que je n'ai pas eu de grandes difficultés, même si mes collaborateurs et les fonctionnaires de la Défense se livraient parfois au jeu du chat et de la souris. En général, nous pouvions obtenir l'information dont nous avions besoin. C'est beaucoup plus que ce que vous pouvez obtenir en tant que citoyen ou député.
    Je pense que le Sénat a demandé un état des dépenses échelonnées pour les grands projets d'immobilisations, mais le ministère de la Défense nationale ne le lui a pas donné. Je pense qu'il y a un problème majeur en ce qui concerne la communication d'information au Parlement, mais au Bureau du vérificateur général, nous pouvions obtenir ce que nous voulions.
    Je pense que cela n'a pas d'importance... J'ai été au gouvernement et dans l'opposition, et c'est pareil pour les deux. Cela remonte probablement aux années Martin et Chrétien, puis aux années Mulroney, et ainsi de suite, jusqu'à Wilfrid Laurier, je suppose.
    Je pense que l'une des recommandations qui devrait ressortir de ce comité est que nous devons avoir la possibilité d'obtenir cette information, en tant que députés et en tant que comités. Je sais que la réaction immédiate de certains sera de dire que cela ne fera qu'attiser la partisanerie, mais je pense en fait que le contraire pourrait être vrai. Si vous disposez de beaucoup d'information, la partisanerie n'aura plus lieu d'être.
    Avez-vous des idées à ce sujet, ou est‑il trop difficile de dire ce que les partisans vont faire?
    Je pense que ce serait une démarche constructive. Le problème est en partie que la politique canadienne est la plus partisane de presque tous les systèmes de Westminster. Les Australiens, quant à eux, ont beaucoup plus de comités mixtes permanents qui ont tendance à être beaucoup moins partisans. Les comités britanniques sont également moins partisans.
    Je pense que c'est un objectif à atteindre, et vous ne pouvez pas y parvenir sans information. Avec de l'information, vous pouvez commencer à discuter des détails plutôt que de prendre une position politique basée sur ce que vous pensez être vrai.
    C'est très vrai.
    Il vous reste 20 secondes pour une question et la réponse.
    Je vais le faire rapidement.
    Cette question s'adresse à M. Collins seulement et porte sur la défense aérienne. Avons-nous le temps de former tout le monde aux F‑35, c'est‑à‑dire les pilotes, les mécaniciens, et ce, complètement?
    Cela fera certainement partie du calendrier de réintroduction de cet avion et, à un moment donné, nous devrons gérer deux programmes d'entraînement, pour les CF‑18 et pour les F‑35. Comme mon collègue l'a souligné, c'est coûteux et complexe.
    Merci.
    La parole est maintenant à M. Kusmierczyk, qui dispose de quatre minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Merci beaucoup aux témoins. C'est une discussion formidable.
    On a déjà répondu à la plupart de mes questions, alors je ne veux pas insister sur certaines d'entre elles, mais la Défense nationale reconnaît que les changements climatiques sont un facteur de multiplication des menaces. Je sais que c'est une question un peu difficile pour vous, mais puisque vous êtes là, je veux la poser parce que je pense que le rapport que nous allons publier devrait au moins l'aborder d'une certaine façon.
    Au cours des dernières années, les Forces armées canadiennes ont concentré beaucoup de ressources, de temps et d'énergie sur les opérations d'urgence au pays. De toute évidence, cela se fait au détriment des missions et rôles expéditionnaires et ainsi de suite.
    Je voulais vous demander si, à votre avis, les changements climatiques modifient notre façon de penser à l'acquisition de matériel de défense, et plus particulièrement à la Stratégie nationale de construction navale, et la façon dont ils devraient être pris en compte dans cette discussion.
    Je ne sais pas si vous y avez beaucoup réfléchi, mais je me demande simplement si vous pouvez nous guider un peu dans cette réflexion.

  (1500)  

    Est‑ce à moi que vous posez la question?
    C'est une question ouverte. N'importe qui peut répondre.
    Bien entendu, ma réponse sera brève. C'est une question à deux volets. Il y a l'aide aux autorités civiles, ce que les FAC ont fait dans le cadre de la réponse aux catastrophes nationales, et dans le cadre de la COVID en allant dans les maisons de soins de longue durée, et il y a toute cette autre question parallèle qui consiste à déterminer si ce rôle est vraiment celui des forces armées.
    Je sais qu'il faudra reparler de cela une autre fois, mais en ce qui concerne les changements climatiques, il n'y a pas de doute possible. Vous n'avez qu'à regarder les images de l'Arctique. Il est difficile de dissocier l'accent mis sur le besoin d'avoir des capacités dans l'Arctique en général — que ce soit en mer ou dans les airs — de ce qui se passe là‑bas. Il se peut que l'Arctique devienne un jour un passage navigable si ce que nous prévoyons se réalise, etc. C'est certainement quelque chose dont il faut tenir compte au moment de choisir le type de capacités que nous envisageons pour la Marine, et c'est quelque chose que nous devrons probablement aussi prendre sérieusement en considération pour les sous-marins.
    Puisque vous avez mentionné l'aide humanitaire et le secours aux sinistrés, c'est l'un des six objectifs de haut niveau de la politique de défense Protection, Sécurité, Engagement, mais malheureusement, les FAC ne se sont pas vraiment organisées pour en faire beaucoup. Cela a tendance à interférer avec ce qu'ils considèrent comme étant leur principale mission. Je vais m'en tenir à cela. C'est une discussion qu'il faudra avoir un autre jour.
    Merci de vos réponses.
    Puisque mon temps de parole n'est pas tout à fait terminé... Je sais que nous voulons aussi finir à l'heure et éviter de nous éterniser après 15 heures.
    Monsieur Collins, pour en revenir à mes questions initiales sur les produits déjà existants, pouvez-vous nous parler des modèles de navire de guerre déjà existants? Ces modèles pourraient-ils avoir un rôle à jouer, par exemple, dans la Stratégie nationale de construction navale?
    Il y a la classe Berlin, cette conception allemande qui est à la base des navires de soutien interarmées construits à Vancouver. Le navire de combat canadien est basé sur une version encore en cours de modification du type 26 qui provient du Royaume-Uni. Il y a plus de 10 ans, on a pris la décision consciente de suivre cette voie et de ne pas recourir à une conception locale, à quelque chose de mis au point au Canada. C'est l'un de ces grands « et si ». Si nous avions fait cela, aurait‑il été plus facile de penser à long terme à la façon dont le chantier naval devrait être construit? Aurions-nous eu une conception faite pour le Canada, plutôt que de construire un chantier, puis d'aller chercher une conception et de la modifier? Ce sont des questions complexes.
    Je répète qu'en fin de compte, les pays qui ont des capacités industrielles nationales et qui construisent des navires le font avant tout pour eux-mêmes. Donc, si vous voulez bénéficier des avantages d'un navire fabriqué en Italie ou en France, vous devrez payer plus cher pour être en mesure de le construire et vous devrez modifier sa conception. La conception française n'est pas fortement axée sur la lutte anti-sous-marine. Or, c'est un objectif que le Canada poursuit depuis des décennies. Quels sont les pour et les contre? C'est à cela que la question se résume.
    Merci beaucoup.
    Sur ce, nous sommes arrivés à la fin des questions.
    Monsieur Collins et monsieur Kasurak, je tiens à vous remercier de vos témoignages d'aujourd'hui. Merci beaucoup d'avoir été des nôtres.
    Je tiens également à remercier les interprètes du travail qu'ils ont fait aujourd'hui, les techniciens, tout le personnel qui est ici, ainsi que les analystes et le greffier.
    Sur ce, la séance est levée.
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