Bienvenue à la 87e réunion du Comité permanent du commerce international.
La réunion d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride, conformément au Règlement. Par conséquent, les membres y assistent en personne dans la salle et à distance au moyen de l'application Zoom.
J'ai quelques observations à faire à l'intention des témoins et des membres du Comité.
Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Pour ceux et celles qui sont en ligne, veuillez mettre votre micro en sourdine lorsque vous ne parlez pas. Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Si des problèmes techniques surviennent, veuillez m'en informer immédiatement. Nous devrons suspendre la séance pour nous assurer que l'interprétation est correctement rétablie avant de reprendre la séance. Je demande à tous les participants de faire attention quand ils manipulent les écouteurs afin d'éviter les retours de son.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 17 octobre 2023, le Comité poursuit son étude sur la grève de 2023 au port de Vancouver.
Nous recevons aujourd'hui Bruce Rodgers, directeur exécutif, et Julia Kuzeljevich, directrice, Politique et Affaires Réglementaires, de l'Association des transitaires internationaux canadiens, qui témoignent par vidéoconférence. Nous accueillons également Lauren Martin, directrice principale, Relations gouvernementales et politiques, du Conseil des viandes du Canada. Nous recevons aussi de nouveau Bridgitte Anderson, présidente-directrice générale du Greater Vancouver Board of Trade, par vidéoconférence. Mme Anderson ne sera parmi nous que pendant la première heure de la réunion.
Nous accueillons également Robert Ballantyne, ancien président et conseiller principal de l'Association canadienne de gestion du fret; Tim McEwan, vice-président principal, Affaires corporatives, de la Mining Association of British Columbia, qui se joint à nous par vidéoconférence; et Michel Murray, conseiller syndical au syndicat des débardeurs du port de Montréal, avec lequel nous attendons toujours de communiquer par vidéoconférence.
Bienvenue à tous. Nous allons commencer par les déclarations préliminaires, puis nous passerons aux questions.
Monsieur Rodgers, je vous invite à vous adresser au Comité pour un maximum de cinq minutes.
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Bonjour et merci de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui.
[Français]
Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, au nom de l'ATIC, soit l'Association des transitaires internationaux canadiens, nous vous remercions de nous donner l'occasion de nous adresser à vous aujourd'hui.
[Traduction]
Je dirai très brièvement, pour ceux et celles qui ne le savent peut-être pas, que les transitaires prennent le contrôle des expéditions, qu'il s'agisse d'importations ou d'exportations, et les acheminent jusqu'au client final par le mode de transport le plus rentable. Nous représentons environ 12 000 employés d'entreprises membres, qui manutentionnent environ 80 % du fret transporté au Canada. De plus, comme notre association représente des camionneurs portuaires — appelés fournisseurs de services factage —, des courtiers en douane et d'autres secteurs de service, nous pouvons légitimement prétendre représenter tous les acteurs clés de la chaîne d'approvisionnement du Canada.
Les interruptions de travail dans les ports de la côte Ouest l'été dernier ont porté un coup assez dur à nos membres et à nos clients. Nous estimons également que c'est un signe que nous devons commencer à aller au‑delà de la tendance traditionnelle et nuisible à la confrontation qui caractérise le milieu du travail de l'industrie portuaire canadienne.
L'année 2023 a certainement été l'année des conflits de travail dans les ports. Des grèves ont sévi sur la côte Ouest au Canada et aux États‑Unis également. Dans le Sud-Est des États‑Unis, bien que des négociations soient en cours, le syndicat a déclaré que les membres devraient se préparer à débrayer en octobre prochain. Et voilà qu'on envisage maintenant la possibilité d'une grève au port de Montréal.
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Nous avons sondé nos membres en prévision de cette comparution, les interrogeant sur les répercussions de la grève de l'été dernier sur la côte Ouest, et ils ont répondu en disant que l'aspect le plus frustrant de la situation à Vancouver semblait être le manque total de compréhension des chaînes d'approvisionnement au Canada. La couverture médiatique a mis l'accent sur les répercussions pour la Colombie‑Britannique, sans comprendre le volume de marchandises qui arrivent par les ports de la Colombie‑Britannique à destination des centres intérieurs, principalement le Sud de l'Ontario.
Voilà qui met en exergue un point que nous voulons faire remarquer au Comité. Les victimes des grèves ne sont pas les travailleurs, qui reçoivent habituellement leurs arriérés salariaux au moment du règlement. Ce ne sont pas non plus les gestionnaires des ports et des entreprises ouvrières. Les victimes, ce sont les petites entreprises ordinaires, que personne n'indemnise de leurs pertes.
Pour vous donner un exemple précis des répercussions sur les clients d'un transitaire, qui ont été touchés par la situation à Vancouver, un importateur a déclaré qu'en raison de la livraison tardive d'articles d'importation saisonniers, un client a raté une échéance et, par conséquent, a perdu une commande. Comme ces produits sont saisonniers, il n'a pas pu trouver d'autre acheteur. Ce client a cet inventaire sur les bras et, à cause de l'argent qu'il y a investi, il ne peut pas acheter d'autres biens saisonniers et continuer de faire fonctionner son entreprise.
Du point de vue de l'exportateur, nous avons entendu le témoignage d'un client qui faisait affaire avec un acheteur étranger pour des contrats de vente plus longs, de 90 jours à un an, par exemple. En raison des continuels problèmes de chaîne d'approvisionnement qui se sont produits au Canada, cet acheteur s'approvisionne maintenant principalement ailleurs dans le monde. L'exportateur canadien obtient une petite partie du volume de marchandises, et les contrats de vente prévoient un seul envoi et sont d'une durée limitée, comme 30 jours.
Il ne devrait y avoir aucun doute dans l'esprit de quiconque que les perturbations modifient le trafic et peuvent entraîner des changements permanents sur les itinéraires d'envoi.
Dans une entrevue accordée de novembre, un gestionnaire de la chaîne d'approvisionnement d'Inside Logistics a fait valoir qu'au cours des deux dernières années, les ports de la côte Est ont volé le volume d'importation des ports de la côte Ouest, car les expéditeurs cherchent à éviter les arriérés et les retards.
Maintenant que nous envisageons la possibilité d'une autre perturbation au port de Montréal, nos membres constatent que les expéditeurs commencent à aller voir ailleurs pour trouver des voies d'acheminement plus fiables. On ignore si ces changements sont temporaires ou permanents. Nous croyons que M. Miao a posé une question à ce sujet jeudi dernier, et c'est l'un des aspects les plus inquiétants des interruptions de service.
Les coûts liés à l'inflation ont fait augmenter les demandes des travailleurs, tandis que le trafic a commencé à diminuer substantiellement, une diminution qui se poursuit à ce jour. Nous craignons que les négociations ne soient ardues.
Pour conclure, à la suite de la débâcle survenue sur la côte Ouest cet été, le , a parlé d'un examen approfondi de l'industrie portuaire, en mettant l'accent sur l'avenir de la main-d'œuvre portuaire. Le 19 octobre, il a publié une déclaration confirmant qu'Anthony Giles et Kevin Banks ont été retenus pour entamer la première partie de ce processus d'examen. Leur travail doit se terminer au plus tard le 31 décembre, ce qui est peut-être un jour trop tard pour le port de Montréal.
Nous voyons des employeurs et des syndicats européens collaborer pour assurer la compétitivité et offrir des salaires décents, et pourtant, au Canada, nous semblons être condamnés à débrayer comme s'il s'agissait d'une obligation lors des négociations. Nous espérons et croyons qu'il est temps d'adopter une meilleure approche.
Voilà qui conclut notre exposé. Merci beaucoup.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Bonjour à tous. Je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître au nom du Conseil des viandes du Canada.
Je m'appelle Lauren Martin et suis directrice principale des Relations gouvernementales et des politiques. Nous sommes ravis de vous faire part de nos commentaires au sujet de la grève au port de Vancouver.
Le Conseil des viandes du Canada représente les abattoirs, les transformateurs de viande et les fournisseurs d'équipement et de biens pour l'industrie de la viande qui sont titulaires de permis fédéraux. Nos membres transforment plus de 90 % du porc et du bœuf du Canada. Ils nourrissent les Canadiens et le monde avec certaines des meilleures protéines au monde. L'industrie canadienne de la viande rouge apporte plus de 32 milliards de dollars à l'économie canadienne et assure 288 000 emplois partout au Canada.
Comme les membres du Comité le savent pertinemment, l'économie du Canada dépend fortement du commerce. En ce qui concerne la viande rouge, le Canada exporte près de 70 % de son porc et 50 % de son bœuf dans plus de 90 pays du monde, ayant des relations commerciales lucratives dans des pays asiatiques comme la Chine et le Japon, qui sont accessibles par les ports de l'Ouest.
En 2022, les transformateurs canadiens ont exporté pour 9,5 milliards de dollars de produits de viande rouge, ce qui inclut le porc, le bœuf, l'agneau et d'autres produits. Nous ne pourrions pas acheminer ces marchandises de manière efficace et rentable vers les marchés sans infrastructures de transport fiables, que ce soit pour le transport terrestre, aérien ou maritime. Environ 25 % des marchandises échangées au Canada passent par les ports de l'Ouest. Ces derniers constituent la plus grande porte d'entrée du Canada, où transitent chaque jour des marchandises d'une valeur de plus de 800 millions de dollars, y compris des produits de viande rouge.
Nos membres consacrent des ressources considérables à l'établissement et au maintien de relations avec des clients du monde entier. Lorsque les entreprises ne peuvent pas exécuter les commandes de façon fiable, cela met en péril ces relations. En raison de notre dépendance à l'égard du commerce et des importants marchés accessibles par les ports de l'Ouest, les répercussions de ce conflit ont été beaucoup plus profondes que celles de la plupart des autres interruptions de travail, bien que nous ayons vu une situation presque tout aussi inquiétante se développer dans la Voie maritime du Saint‑Laurent cet automne.
Pour faire du Canada un partenaire commercial concurrentiel dans l'économie mondiale, les entreprises doivent être en mesure d'acheminer les marchandises jusqu'au marché et les en faire venir de façon efficace et fiable, comme je l'ai souligné. La viande rouge ne peut pas attendre pendant des jours, voire des semaines, sans se gâter. Compte tenu de la nature de nos produits, notre chaîne d'approvisionnement est conçue pour les expédier efficacement vers les marchés. Nous n'avons pas la capacité de stocker des marchandises non expédiées pendant des semaines.
Lorsque nos membres sont confrontés à un événement qui dépasse leur capacité de stockage ou qui est même près de la dépasser, ils sont forcés d'arrêter la production. Les animaux ne peuvent pas quitter la ferme, ce qui a des répercussions sur les familles agricoles et leurs profits, sans parler des conséquences sur le bien-être animal. Les effets des situations de ce genre se font sentir chez les entreprises et les particuliers tout au long de la chaîne d'approvisionnement, et il ne suffit pas d'appuyer sur un bouton pour redémarrer les activités.
J'ai maintenant illustré les décisions difficiles que les entreprises doivent prendre lorsqu'elles font face à l'incertitude. Il est malheureux que la grève soit survenue alors que les industries sont toujours aux prises avec la fragilité des chaînes d'approvisionnement après la pandémie, les pénuries de main-d'œuvre et l'inflation. Il va sans dire qu'il n'est pas non plus dans l'intérêt du public de mettre en péril des produits périssables comme la viande rouge. Ces longues perturbations du marché font gonfler les coûts des entreprises qui mettent de la nourriture sur la table des familles et ont une incidence sur l'abordabilité des aliments.
Les Canadiens s'attendaient à ce que nos élus règlent rapidement ce conflit de travail. Le conflit a plutôt traîné pendant 35 jours. La Chambre de commerce du Grand Vancouver a estimé à 10,7 milliards de dollars les répercussions des 35 jours de grève de juillet dernier. Bien que nous respections le droit de grève des travailleurs, il faut trouver un équilibre entre ces intérêts et l'intérêt public.
À l'avenir, le gouvernement fédéral doit être prêt à intervenir beaucoup plus tôt qu'il ne l'a fait l'été dernier et à utiliser tous les outils à sa disposition pour amener les parties à s'entendre. En outre, il devrait envisager des solutions comme des dispositions de maintien de service, comme celles accordées dans le cas du grain, pour tous les produits périssables, comme la viande rouge. Nous recommandons vivement de telles mesures, qui protégeront les voies essentielles d'acheminement de la viande rouge vers le marché, la réputation commerciale de notre pays et l'abordabilité des aliments pour tous les Canadiens.
Voilà qui conclut mon exposé. Merci beaucoup.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
L'Association canadienne de gestion du fret, ou AGF, représente les intérêts de l'industrie canadienne du transport de marchandises auprès de tous les ordres de gouvernement depuis 1916. Malgré quelques apparitions, je n'étais pas présent à la première réunion.
Des voix: Ha, ha!
M. Robert Ballantyne: L'AGF n'est pas une association qui se limite à une industrie. Elle s'occupe du transport de marchandises par tous les modes de transport — aérien, maritime, ferroviaire et routier — qui ont une incidence sur les chaînes d'approvisionnement des entreprises de toutes les industries. Nous comptons parmi nos membres des entreprises agricoles, minières, manufacturières, de transformation des aliments et de vente au détail. Certains de nos membres sont bien connus.
En outre, l'AGF est le membre canadien du Global Shippers Forum. Dans le cadre de cette relation, nous participons à un dialogue avec divers organismes des Nations unies qui ont une incidence sur le commerce mondial, comme l'Organisation maritime internationale.
L'expression « chaîne d'approvisionnement » est une bonne métaphore pour décrire les relations complexes entre tous les intervenants qui participent au transport des marchandises du point d'origine à la destination. Avec la croissance du commerce international, ces chaînes sont devenues de plus en plus complexes. Une chaîne ne peut pas être plus forte que son maillon le plus faible. Si l'un de ces maillons est rompu, c'est toute la chaîne qui s'en ressent.
Puisque le Comité s'intéresse au commerce international du Canada, il devient évident qu'un arrêt de travail à un « maillon » important dans la chaîne, comme le port de Vancouver, aura des répercussions à grande échelle sur l'économie canadienne et les clients étrangers du Canada. Cela peut aussi avoir des répercussions potentielles sur la santé et la sécurité des Canadiens.
Bien que l'AGF respecte les droits des travailleurs, il faut tenir compte des répercussions des arrêts de travail dans de nombreuses industries qui sont essentielles au fonctionnement de l'économie et de la société canadiennes. Comment pouvons-nous établir un juste équilibre entre les droits d'environ 7 000 travailleurs du port de la côte Ouest et les droits de millions de Canadiens de partout au pays, notamment d'autres travailleurs syndiqués?
Le Code canadien du travail contribue dans une certaine mesure à résoudre cette problématique. Voici quelques dispositions pertinentes.
Il y a d'abord les services essentiels. Le paragraphe 87.4(1) du Code canadien du travail prévoit que, durant une grève ou un lock-out, l'employeur, le syndicat et les employés « sont tenus de maintenir certaines activités — prestation de services, fonctionnement d'installations ou production d'articles — dans la mesure nécessaire pour prévenir des risques imminents et graves pour la sécurité ou la santé du public. » La deuxième disposition est le paragraphe 87.7(1), qui exige que l'industrie des débardeurs continue d'assurer des services sur les navires céréaliers pendant une grève ou un lock-out.
En ce qui concerne les services essentiels, on peut faire valoir qu'ils devraient être élargis au‑delà « des risques imminents et graves pour la sécurité ou la santé du public ». Les répercussions majeures sur la société canadienne des ruptures de maillons dans la chaîne d'approvisionnement causés par les interruptions de travail dans les ports et les chemins de fer sont telles que le Parlement devrait envisager d'élargir la définition de « services essentiels » pour tenir compte de ces répercussions vastes et majeures.
De plus, même s'il convient que les navires céréaliers continuent d'être desservis pendant une grève, il est temps d'envisager d'étendre cette exigence à d'autres produits et industries, comme ma collègue, Mme Martin, l'a déjà fait remarquer.
En prévision de la présente réunion, l'AGF a communiqué avec un certain nombre de ses entreprises membres au sujet des répercussions qu'elles ont subies. Bon nombre de nos membres importateurs signalent qu'ils ont dû commencer à prendre des mesures avant qu'une possible grève de la chaîne d'approvisionnement ne survienne. Cela peut avoir des coûts importants. Si les produits retardés sont saisonniers ou urgents, cela peut entraîner des pertes de ventes et de revenus.
La prospérité du Canada dépend de son commerce international, et les interruptions de travail sont l'un des nombreux problèmes qui ont une incidence sur la réputation du Canada en tant que partenaire commercial fiable. En plus des grèves, les inondations et les incendies survenus dans l'Ouest canadien ont eu des répercussions sur les services ferroviaires et de camionnage dans certaines régions. Des gens qui protestaient contre divers problèmes partout au pays ont également bloqué des voies ferroviaires.
L'AGF obtient chaque année des renseignements du Programme du travail du Canada sur l'expiration des conventions collectives dans le secteur des transports. La liste de 2023 comprend l'entente sur les débardeurs de la côte Ouest et l'entente sur la Voie maritime du Saint‑Laurent, qui ont toutes deux expiré le 31 mars. Comme quelqu'un l'a mentionné, ces ententes n'ont pas été conclues sans qu'il y ait des grèves. Il convient également de souligner que, le 31 décembre — c'est‑à‑dire dans environ trois semaines —, le contrat des débardeurs au port de Montréal prendra fin, tout comme cinq ententes ferroviaires conclues avec le CN, CPKC et Ontario Northland, qui arriveront à échéance à la fin du mois.
L'AGF se réjouit que le Comité se penche sur ces questions importantes, et nous pensons qu'il serait utile que le Parlement étende son examen des relations de travail à tous les maillons de la chaîne d'approvisionnement canadienne.
Je vous remercie de m'avoir offert l'occasion de témoigner. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
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Bonjour, madame la présidente et distingués membres du Comité.
Je m'appelle Tim McEwan et je suis vice-président principal des affaires corporatives à la Mining Association of British Columbia, ou MABC.
Je témoigne aujourd'hui depuis les territoires communs, traditionnels, ancestraux et non cédés des Tsawwassen et des autres peuples salish de la côte.
La MABC représente 17 mines en activité, deux fonderies et plus d'une douzaine de projets d'exploitation en Colombie‑Britannique. L'industrie minière est un important utilisateur des ports de la côte Ouest du Canada et le plus grand secteur d'expédition en ce qui a trait au volume, utilisant les modes de transport ferroviaire et maritime.
La majeure partie du volume de la production de la Colombie‑Britannique est expédiée à des clients étrangers au Japon, en Corée, en Inde et ailleurs. Cela a représenté 28 % de la valeur totale des exportations de la Colombie‑Britannique en 2022, soit 18 milliards de dollars. L'industrie minière de la Colombie‑Britannique emploie environ 35 000 personnes dans la province, pour un salaire annuel moyen de 139 000 $.
Lorsque les mines et les fonderies réduisent leurs activités, les répercussions se font sentir non seulement sur nos employés, mais aussi sur les 3 800 entreprises et fournisseurs des communautés de la province qui dépendent de l'industrie pour leur subsistance économique.
La grève de l'été dernier est survenue dans la foulée des perturbations sans précédent qui ont touché la chaîne d'approvisionnement pendant la pandémie, des feux de forêt record et des rivières atmosphériques qui ont sectionné des voies ferrées et des autoroutes. La grève a eu un effet majeur sur le secteur minier et les fonderies de la Colombie‑Britannique.
Premièrement, elle a perturbé la livraison de fournitures et de matériaux essentiels aux activités de nos membres, comme de nouveaux équipements et d'autres intrants pour des projets d'immobilisations et du matériel à l'appui des opérations en cours.
Deuxièmement, sur le plan de l'exportation, chaque exploitation minière de la Colombie‑Britannique a été touchée différemment par la grève en raison de facteurs comme la nature du produit extrait, l'emplacement de la mine et le mode de transport utilisé pour expédier le produit. Quelques mines ont été en mesure d'acheminer des expéditions vers d'autres ports, bien que cela ait exigé des frais, des efforts et du temps supplémentaires, mais d'autres exploitations n'avaient pas cette possibilité. L'incapacité d'acheminer les produits vers les marchés internationaux a obligé certaines mines à stocker des produits sur place ou dans des wagons partout en Colombie‑Britannique, tout en devant composer avec des limites physiques et financières qui les forçaient à se demander combien de temps elles pourraient le faire.
Avec une grève ou un lock-out prolongé, le secteur minier de la Colombie‑Britannique risque de perdre des clients étrangers au profit de producteurs de l'extérieur du pays. Tout au long de cette période, les clients étrangers ont souvent posé des questions au sujet de la grève et du moment où elle prendrait fin. Plus la grève se prolongeait, plus certains membres de la MABC ont dû planifier en vue de fermetures ou des mises à pied temporaires.
Au‑delà des effets immédiats de la grève, les perturbations ont également causé dans l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement une congestion importante qui a mis de nombreuses semaines à se résorber complètement. En termes simples, plus une perturbation persiste longtemps, plus il faut de temps pour éliminer la congestion, alors que les relations avec la clientèle et la réputation du Canada en tant que fournisseur fiable sont mises à mal.
Compte tenu de la taille et de l'ampleur du secteur minier de la Colombie‑Britannique, les répercussions sur l'économie et la réputation de notre province et du Canada — tout cela — ont été substantielles. La grève a également eu des conséquences en cascade sur les travailleurs, les fournisseurs et les communautés, non seulement en Colombie‑Britannique, mais aussi dans les communautés minières des quatre coins du pays. Il est également important de souligner que notre industrie a des objectifs communs avec les gouvernements du Canada et de la Colombie‑Britannique pour faire avancer l'exploitation d'un plus grand nombre de mines de minéraux critiques et pour contribuer à la lutte contre les changements climatiques et aux impératifs de sécurité du pays et des ses alliés.
Parmi les possibilités qu'offrent les minéraux critiques figurent des milliards de dollars en investissements potentiels, des milliers d'emplois bien rémunérés qui permettent de subvenir aux besoins de familles, d'importants partenariats avec les Premières Nations et de nouvelles occasions contractuelles et économiques dans les communautés de toute la province.
Des chaînes d'approvisionnement sûres, certaines et prévisibles, notamment grâce à la fluidité dans les ports de la côte Ouest, sont indispensables aux efforts collectifs que nous déployons pour favoriser la croissance de la Colombie‑Britannique et du Canada à titre de fournisseur de minéraux critiques à faibles émissions de carbone vers les marchés nationaux et internationaux. À l'avenir, il est évident que si le Canada veut renforcer ses relations commerciales et faire croître son économie d'exportation, y compris les possibilités liées aux minéraux critiques, le gouvernement fédéral doit disposer d'options plus efficaces pour résoudre les conflits de travail qui ont une incidence sur l'économie nationale.
La MABC voit l'examen entrepris par le en vertu de l'article 106 du Code canadien du travail comme une occasion de proposer ces solutions. Nous exhortons le gouvernement fédéral à trouver un équilibre entre de véritables négociations collectives et des solutions qui protègent les chaînes d'approvisionnement britanno-colombiennes et canadiennes et notre réputation internationale en tant que fournisseur privilégié et fiable de minéraux et de métaux critiques à faibles émissions de carbone.
Je tiens à vous remercier aujourd'hui de m'offrir l'occasion de vous fournir un point de vue sur la grève de l'été dernier dans les ports de la côte Ouest du Canada.
J'ai hâte à la période de questions et de réponses.
Merci.
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Bonjour. Je représente le Syndicat des débardeurs du port de Montréal, un syndicat qui a été fondé en 1902 et qui a donc plus de 100 ans d'histoire.
En vertu de l'article 108 du Règlement de la Chambre des communes, je témoigne devant vous pour vous parler des répercussions de la grève du port de Vancouver l'été dernier. Au port de Montréal, nous sommes bien placés pour vous parler du droit de grève, puisque nous l'avons exercé en 2020 et en 2021.
Je me sens un peu comme un chien dans un jeu de quilles, avec tous les intervenants précédents qui ont parlé de la chaîne d'approvisionnement et de la réputation internationale du Canada. Je suis obligé de vous dire que le Canada a signé, en 1972, un accord international sur le droit syndical. Le droit syndical reconnaît le droit de grève et son pendant, le droit au lockout pour la partie patronale, comme un élément fondamental. D'ailleurs, je suis également obligé de vous rappeler que le droit de grève est un droit reconnu par la Charte canadienne des droits et libertés, comme l'a confirmé l'arrêt Saskatchewan.
En ce qui concerne la restriction du droit de grève prévu au Code canadien du travail, je suis obligé, encore une fois, de vous rappeler que ce droit a déjà été restreint. À la fin des années 1990, à la suite du rapport Sims, intitulé « Vers l'équilibre », le Code canadien du travail a été modifié de façon à restreindre le droit de grève en obligeant, tant la partie patronale que la partie syndicale, à donner un avis de 72 heures avant d'exercer le droit de grève ou de lockout.
Au port de Montréal, lorsque nous envoyons un avis de 72 heures avant de déclencher une grève, les navires sont au large de Terre‑Neuve. La chaîne d'approvisionnement n'est donc pas rompue. Le préavis de 72 heures permet de trouver un chemin de remplacement temporaire pour maintenir la chaîne d'approvisionnement. Je suis donc très surpris que tous les intervenants parlent de restreindre le droit de grève de quelque façon que ce soit.
On a aussi parlé des services essentiels, soit de l'article 87.4 du Code canadien du travail. Or les services essentiels ont déjà été établis.
Le 8 juin 2020, le Conseil canadien des relations industrielles a rendu une décision célèbre concernant le port de Montréal. Il a dit qu'il n'y avait pas de service essentiel à maintenir, puisqu'il n'y avait aucun danger imminent et grave pour la population. Bien sûr, il y a un impact économique. Qui ferait une grève sans qu'il y ait d'impact économique? Bien sûr, le droit au lockout a aussi un impact économique sur les travailleurs. L'équilibre existe déjà.
Si vous devez regarder ce qui se passe dans le domaine du débardage, vous devriez, selon nous, mettre l'accent sur l'article 34 du Code canadien du travail. Comment sont constituées les associations patronales? Pourquoi, dans le port de Vancouver, y a-t-il eu des grèves l'été dernier? Pourquoi, dans le port de Montréal, y a-t-il eu des grèves il y a deux ans? C'est peut-être parce que les véritables décideurs ne sont pas assis à la table. Lorsque nous négocions, nous parlons à des représentants des ressources humaines. Les opérateurs maritimes et les compagnies maritimes ne' sont pas assis à la table de négociation.
C'est ce que j'ai compris, lors du dernier conflit de Vancouver, que j'ai suivi de près. Les compagnies maritimes et les opérateurs maritimes n'étaient pas assis à la table de négociation. Alors, avant de parler de chaîne d'approvisionnement et de réputation internationale, il faudrait éliminer le danger à la source et s'assurer que les véritables décideurs sont assis à la table de négociations.
Nous croyons que le Comité devrait plutôt se pencher sur les relations de travail, voir en quoi elles consistent et déterminer qui sont les gens qui sont assis à la table pour négocier. Présentement, au port de Montréal, nous sommes en train de négocier avec l'association patronale, et aucun décideur n'est assis à la table. Même le président de l'association patronale n'est pas assis à la table de négociation. La conciliation s'est terminée il y a deux jours et nous sommes maintenant en période de médiation. La partie patronale n'a même pas encore déposé ses offres salariales.
Avant de parler de chaîne d'approvisionnement et de réputation, le Comité devrait véritablement regarder les relations de travail et la composition des tables de négociation.
Je vous remercie beaucoup de votre attention.
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Je vous remercie beaucoup.
Bonjour, madame la présidente, messieurs les vice-présidents et distingués membres du Comité.
Je m'adresse à vous aujourd'hui depuis le territoire traditionnel des nations des Musqueam, des Squamish et des Tsleil-Waututh.
Au nom de nos membres qui représentent plus de 5 000 entreprises, je vous remercie de m'offrir l'occasion de traiter des répercussions économiques importantes de la grève de 13 jours qui a touché les ports de la côte Ouest du Canada cet été. Cette grève, la plus longue en près de 40 ans, s'est déroulée après des années de difficultés dans la chaîne d'approvisionnement, qui échappaient en grande partie à notre contrôle. Le cumul de ces événements a eu une incidence sur l'image et le rôle du Canada en tant que partenaire stable dans la chaîne d'approvisionnement mondiale.
En mars 2020, la pandémie a eu pour effet de déclencher un raz‑de‑marée de déséquilibres dans le transport de conteneurs à mesure que les usines du monde entier fermaient, ce qui a entraîné des pénuries, de la rareté et des accumulations. En juillet 2021, des feux de forêt ont endommagé des voies ferrées et paralysé les envois ferroviaires. En novembre 2021, une rivière atmosphérique a causé des milliards de dollars de dommages économiques à deux liaisons ferroviaires de catégorie 1 et à deux réseaux routiers, qui ont été héroïquement reconstruits. Ces événements mettent en lumière la pression extrême qui a alimenté l'inflation et causé un stress économique, que nous avons été en mesure de contrôler en partie, mais pas entièrement.
Nous savons que nous devons renforcer la résilience climatique dans la chaîne d'approvisionnement, et nos membres investissent à cette fin. Ces investissements dans notre résilience et notre croissance iront de pair avec des emplois bien rémunérés et souvent syndiqués.
Dans ce contexte, au cours des mois qui ont précédé le 1er juillet, nous nous sommes inquiétés des répercussions économiques à court et à long terme d'une grève dans les ports de Vancouver et de Prince Rupert. Nous avons informé le gouvernement et les industries tributaires des ports des dommages qui pourraient survenir si la grève entraînait la fermeture des ports. Malheureusement, nos craintes se sont concrétisées quand une grève a été déclenchée sur la côte le jour de la fête du Canada.
Pendant la grève, nous avons lancé un calculateur de fermeture du port, un outil conçu pour visualiser l'ampleur des perturbations commerciales. Les chiffres étaient renversants: chaque jour, des échanges commerciaux d'une valeur de 800 millions de dollars étaient perturbés. Notre calculateur a estimé la valeur des perturbations commerciales à 10,7 milliards de dollars.
Ces perturbations ont eu des répercussions dans des secteurs essentiels de partout au pays, comme ceux de la fabrication, de la vente au détail, de l'agriculture, de l'énergie et de l'automobile. Les petites entreprises ont manqué de matériaux de construction nécessaires à la construction de logements pour les Canadiens. Les concessionnaires automobiles locaux attendaient des livraisons de véhicules et de pièces. Les industries exportatrices ont perdu leur capacité d'acheminer leurs produits vers les marchés, ce qui a rendu plus difficile l'obtention de contrats mondiaux qui stimulent l'investissement et l'emploi de Canadiens. Les usines de pâte et papier étaient à l'arrêt. Comme vous l'avez entendu, les sociétés minières ont réduit leurs activités, et des entreprises de toutes les régions du Canada ont dû faire face à une augmentation des coûts et des délais d'attente pour les marchandises. De plus, le réacheminement des marchandises destinées au Canada vers d'autres ports a non seulement entraîné des coûts supplémentaires et des retards pour les entreprises, mais a aussi inutilement amplifié l'empreinte environnementale de notre commerce.
Bien que la grève se soit déroulée en Colombie-Britannique, ses effets se sont fait sentir à l'échelle nationale. Nous considérons le port de Vancouver comme le « port du Canada », car il y transite autant de marchandises que dans les cinq plus grands ports réunis. À lui seul, il voit passer environ 25 % de toutes les marchandises échangées au Canada. Cela signifie que les conflits à long terme comme ceux que nous avons vécus cet été ont des conséquences étendues qui touchent l'ensemble du pays.
Des milliards de dollars de marchandises ont été déroutés de Vancouver vers d'autres ports, principalement celui de Seattle et d'autres ports des États-Unis et du Mexique, au fur et à mesure que les changements de port et les détournements de cargaisons augmentaient. Tout cela a coûté cher au Canada. Les entreprises ne pouvaient pas planifier adéquatement leurs opérations et leur effectif sans savoir si les ports seraient ouverts d'une minute à l'autre. Cette situation a été aggravée par les valses-hésitations dans le cadre des mesures de grève.
Tout au long de la grève et par la suite, nous avons constamment exhorté le gouvernement fédéral à envisager des outils supplémentaires pour faciliter la conclusion d'ententes durables pendant les interruptions de travail qui touchent l'ensemble de l'économie. L'examen entrepris par le en vertu de l'article 106 du Code canadien du travail est une occasion importante de le faire.
Je conclus en vous remerciant de nouveau de m'avoir offert l'occasion de vous faire part de mes réflexions sur les répercussions de la grève. Nous sommes impatients de collaborer avec le gouvernement pour veiller à ce que de véritables négociations collectives puissent avoir lieu sans avoir de conséquences préjudiciables sur notre économie nationale et notre réputation de partenaire commercial fiable et stable.
Merci. Je répondrai à vos questions avec plaisir.
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Merci, madame la présidente.
Je tiens à dire aux fins du compte rendu, surtout à l'intention de M. Murray, que personne ici ne conteste le droit du syndicat de faire la grève pour de meilleurs salaires. Les partis à la Chambre des communes appuient unanimement ce droit, mais nous voulons examiner les répercussions économiques de cette grève. C'est le but de cette étude.
Je voulais faire un suivi rapide. Je demanderai aux trois témoins — soit ceux de l'Association des transitaires, de la Chambre de commerce et de l'Association canadienne de gestion du fret — de répondre.
Il y a eu toutes sortes de rapports sur les répercussions économiques. Je pense que la valeur des marchandises qui ont été perturbées est évaluée à 10 milliards de dollars. Je veux parler des répercussions économiques pour les petites entreprises et d'autres acteurs, car je ne pense pas que nous comprenions bien l'impact réel, et notamment le fait que les entreprises peuvent perdre des clients parce que leur approvisionnement en produits est maintenant instable. Les compagnies vont donc s'approvisionner ailleurs.
Pourriez-vous tous nous donner votre son de cloche et dire si vous pensez ou non que ces facteurs ont été pris en compte dans les calculs des répercussions économiques?
Monsieur Ballantyne, pourquoi ne répondriez-vous pas en premier?
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Vous avez entièrement raison de dire que le calculateur ne tient compte que de la valeur des marchandises. La Banque Royale a effectué une analyse et conclu que 63 000 conteneurs avaient été touchés.
Pour ce qui est des répercussions économiques générales, cependant, le calculateur n'a pas tenu compte du manque de stock touchant les petites et moyennes entreprises au chapitre des ventes et de la production, ou les autres genres de répercussions qui entrent vraiment en ligne de compte, comme le temps qu'il a fallu pour se rattraper par la suite.
Parmi les secteurs dont le Greater Vancouver Board of Trade a eu des échos de la part de ses membres figurent ceux des mines — dont mon collègue, M. McEwan, peut parler —, de la potasse, de la foresterie, des concessionnaires automobiles, du camionnage et de l'agriculture. Toutes ces industries ont fait état de répercussions économiques, qui étaient considérables.
À ce que je sache, notre calculateur tenait compte de la valeur des marchandises échangées et non de l'ensemble des répercussions économiques. Je ne sais pas si ce travail a déjà été fait.
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Je répondrai à cette question également.
Dans ma déclaration préliminaire, j'ai donné deux exemples précis, l'un du point de vue de l'importateur et l'autre du point de vue de l'exportateur.
L'importateur a été touché parce que lorsqu'il y a une grève ou une interruption de travail de 13 jours, il faut comprendre qu'une journée de grève nécessite environ sept jours de rattrapage pour acheminer les marchandises à destination en raison de l'arriéré qui s'est créé. Il n'y a pas que les répercussions des 13 jours. L'effet global se fait sentir pendant deux ou trois mois.
J'ai donné deux exemples, dont celui d'un importateur dont les marchandises saisonnières n'étaient pas arrivées à temps. Il est pris avec ces produits sur les bras, car il ne pourra pas les vendre avant un an. Il subit des conséquences financières parce qu'il est pris avec ces produits et, je le répète, l'impact global est important pour un petit importateur.
L'autre exemple que j'ai donné est celui d'un exportateur. Ici encore, en raison du manque de fiabilité de la chaîne d'approvisionnement du Canada, l'acheteur étranger s'approvisionne maintenant auprès d'autres pays. Ici encore, une compagnie qui achetait régulièrement des produits et des stocks délaisse le Canada pour s'approvisionner ailleurs, et tout le monde a été touché.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Monsieur Murray, en vous écoutant, je me suis senti préoccupé. Je suis convaincu que les syndicats sont nécessaires dans toute société. Ils ont joué un grand rôle dans la protection des droits des travailleurs et la prestation d'avantages sociaux. Cependant, en vous écoutant maintenant, je perçois dans votre discours une attitude désinvolte à l'égard de la réputation du Canada et des perturbations de la chaîne d'approvisionnement, ainsi qu'une absence d'égard pour les dizaines de milliers de travailleurs touchés par la grève de quelques centaines de travailleurs.
Comme il est question des répercussions économiques, je reviendrais probablement plus tard à vos mots exacts. Vous avez dit qu'un équilibre existe.
Comment puis‑je accepter cela? Nous parlons du fait que l'impact économique total de la perturbation du commerce est évalué à 800 millions de dollars par jour, l'effet cumulatif étant d'environ 10,7 milliards de dollars. Si c'est là l'attitude des travailleurs — dont j'appuie le droit de se syndiquer et faire la grève —, je devrais peut-être accepter la proposition de M. Ballantyne d'élargir la définition des services essentiels.
Le Canada est un pays prospère, mais 65 % de son PIB vient du commerce. Nous avons besoin que ce commerce se fasse librement. Le monde est très concurrentiel à l'extérieur du pays. Nous n'avons pas les avantages naturels dont nous bénéficiions autrefois. Le marché est très concurrentiel; or, le port de Vancouver figure au 347e rang sur 348 dans le classement mondial de l'efficacité portuaire.
Nous pouvons ergoter sur les indicateurs de performance et ce qui est considéré comme les facteurs. Cependant, nous ne sommes même pas près de nous rapprocher des 25 % supérieurs. Nous sommes dans l'impasse et nous en prenons acte. En 2019, selon les perceptions de l'industrie sur la qualité des infrastructures de transport à l'exportation, nous sommes passés des 10 pays de tête au 32e rang. Lorsque c'est le cas et que les syndicats déclarent avec grande désinvolture qu'il existe un équilibre en ce qui concerne les répercussions économiques, je suis vraiment préoccupé.
Si vous avez des réflexions à ce sujet, voudriez-vous prendre une minute pour nous en faire part? J'ai très peu de temps et j'ai d'autres questions à poser.
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Merci, monsieur Murray. J'ai très peu de temps et j'ai des questions à poser aux autres témoins. Merci.
Monsieur Ballantyne, je sais que par « services essentiels, » on entend fondamentalement qu'il faut tenir compte de la sécurité et de la santé du public.
Ne devrions-nous pas tenir compte des gagne-pain et du nombre de personnes qui sont directement touchées par une grève dans des infrastructures très essentielles? En plus des pertes... Je peux comprendre que les entreprises subissent des pertes, comme celles dont Mme Martin a parlé au sujet de la viande rouge qui s'avarie, car son cycle de vie est très limité.
Je peux comprendre cela, mais le gagne-pain de dizaines de milliers de travailleurs qui sont directement touchés devrait‑il être pris en considération lorsque nous définissons les services essentiels?
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Merci, madame la présidente.
Je suis heureux de me joindre à vous pour cette importante étude. Je salue mes collègues ainsi que les témoins qui sont parmi nous ce matin.
Avant de poser mes questions, j'aimerais rectifier les faits. Plus tôt, mon collègue M. Seeback a mentionné que son parti n'était pas contre le droit de grève. Cependant, quand on n'est pas contre le droit de grève, on ne demande pas de rappeler le Parlement pour légiférer en vue de mettre fin à une grève. C'est pourtant ce que le chef du Parti conservateur a fait au mois de juillet dernier, lors du conflit au port de Vancouver. Pour les dédouaner un peu, je rappelle que les premiers ministres de l'Alberta et de la Saskatchewan avaient fait la même chose. Je remets donc les choses dans leur contexte pour les gens qui nous écoutent. On peut donc mettre les bouffonneries de côté.
Je vais maintenant poser mes questions. Monsieur Murray, vous avez parlé de l'importance d'aller à la source du problème. Quand on veut éviter les conflits, il faut justement réunir les parties prenantes à la table. Dans votre allocution, vous avez parlé du recours aux lois spéciales, comme vous l'avez vécu au port de Montréal, notamment. Ce n'est pas arrivé dans le cas du port de Vancouver, mais, comme vous l'évoquez, le Canada a tout de même un triste bilan en ce qui concerne l'adoption de lois spéciales pour forcer les travailleurs à retourner au travail. Vous l'avez vécu en avril 2021.
Pouvez-vous nous parler des conséquences qu'aurait eues l'adoption d'une loi spéciale sur les droits des travailleurs lors du conflit du port de Vancouver, l'été dernier?
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De notre côté, nous avons subi l'imposition d'une loi spéciale par la ministre Filomena Tassi. Je dois rappeler le contexte entourant le conflit, à l'époque. Nous avions dit que l'employeur avait pris trois mesures contre nous et que, s'il les retirait, le syndicat retirerait son avis de grève et il y aurait un retour au travail. L'employeur ne les a pas retirées, le gouvernement a légiféré et nous avons subi l'adoption d'une loi spéciale.
Celle-ci a imposé un arbitrage des différends, qui a eu lieu au port de Montréal. Tout ce que cela a donné, c'est que toutes les demandes, tant celles de la partie patronale que de la partie syndicale, qui étaient sur la table de négociation en 2020 et en 2021 ont été reportées à 2023. On a seulement repoussé le problème. C'est bien connu, les arbitres évitent les endroits bien pointus des conventions collectives, de peur de briser l'équilibre qui existe entre les parties.
L'arbitre a pris un an pour nous entendre et, maintenant que l'arbitrage des différends a été fait, la très grande majorité des demandes réciproques se retrouvent de nouveau à la table de négociation, cette année. On n'a donc rien réglé en imposant un arbitrage des différends au moyen d'une loi spéciale.
D'ailleurs, je ne voudrais pas être qualifié de désinvolte, mais je dois rappeler que la loi a été adoptée alors que le gouvernement libéral était majoritaire, alors qu'il ne l'était pas lorsqu'il y a eu la grève au port de Vancouver.
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Merci, monsieur Murray.
C'est important de rappeler les faits. Je me souviens, comme on le dit chez nous, au Québec. Ce n'est pas seulement inscrit sur nos plaques d'immatriculation, c'est notre devise.
Monsieur Murray, vous avez aussi parlé des problèmes liés à l'absence de véritables décideurs à la table de négociation.
Selon vous, qu'est-ce qui explique cette absence?
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L'actuel article 34 du Code canadien du travail a été écrit en 1970, à la suite d'une commission royale d'enquête, appelée la commission Picard.
Les belles années des associations patronales durant lesquelles les gens étaient embauchés par les compagnies maritimes pour faire le travail sont terminées. Il n'y a pas de représentant des opérateurs maritimes et des compagnies maritimes aux tables de négociation. C'est comme si votre comité ou un ministre des affaires internationales devait négocier un traité international avec un autre pays, mais qu'il envoyait le jardinier du Parlement pour négocier. On devrait nécessairement envoyer les employés du ministère ou le ministre lui-même. Dans notre cas, lors de nos négociations, les vrais décideurs n'étaient pas à la table de négociation. La même chose s'est produite à Vancouver; la BC Maritime Employers Association, ou BCMEA, a eu exactement le même problème.
Avez-vous entendu parler des problèmes au port de Halifax? Pas du tout. Halifax a négocié au cours des deux dernières années, et il y a eu un règlement cette année. Savez-vous quoi? Les représentants des opérateurs maritimes et des compagnies maritimes étaient assis à la table de négociation. Il n'y a pas eu de perturbations au port de Halifax pour conclure un contrat de quatre ans. Au port de Montréal, comme à Vancouver, il faut revenir à la source de la lacune. La raison pour laquelle il y a des problèmes sur le plan des relations de travail, c'est que les vrais décideurs ne sont pas assis aux tables de négociation. S'il y a une loi spéciale à adopter, il s'agit de celle qui forcerait les véritables décideurs, les représentants des compagnies maritimes et des opérateurs maritimes à s'assoir à la table de négociation.
Merci à tous les témoins qui sont ici aujourd'hui.
Je vais poursuivre avec M. Murray.
Tout au long de cette étude, on nous a dit que la réputation du Canada est entachée, et on nous a donné une liste de raisons: la pandémie, les changements climatiques, les rivières atmosphériques et les incendies, puis la grève à Vancouver. Il n'y avait pas eu de grève au port de Vancouver depuis 1969, alors les choses vont bien. En 2010, comme nous l'avons entendu lors de notre dernière réunion, la British Columbia Maritime Employers Association, ou BCMEA, le groupe d'employeurs, a mené les négociations pour les employeurs. Ce n'était pas cette association qui prenait les décisions, ce qui a entraîné des retards.
Je ne sais pas si c'est la raison pour laquelle les travailleurs ont été mis en lock-out en 2018, mais le syndicat de Vancouver nous a dit qu'il présentait ses positions en moins d'un jour et qu'il fallait de 7 à 10 jours pour que l'employeur réagisse. C'est ce qui cause ce type de retards.
Il semble que tout le monde soit prompt à rejeter la responsabilité d'un conflit de travail sur les travailleurs alors que des entreprises de transport de conteneurs et des ports à conteneurs partout dans le monde réalisent des profits sans précédent et que l'inflation atteint des niveaux records. Les travailleurs veulent une part de ces profits pour pouvoir faire face à l'inflation: ils veulent continuer à vivre une vie acceptable. Pourtant, on s'en prend à eux lorsque les employeurs ne semblent pas négocier de bonne foi, ou du moins pas efficacement.
Je me demande si vous pourriez réagir à ma diatribe, et surtout à la croyance selon laquelle le syndicat semble toujours pointé du doigt lorsqu'il y a une grève.
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Vous avez entièrement raison. Je ne pense pas qu'il y ait un syndicat au Canada qui fasse la grève avec plaisir. C'est un moyen de pression qu'on met sur nos employeurs et les compagnies maritimes. Personne ne fait cela par plaisir. On le fait pour obtenir un règlement plus rapidement.
Vous avez entièrement raison de dire que la structure patronale, tant de la BCMEA que de l'Association des employeurs maritimes, ou AEM, nous empêche de parler avec les véritables décideurs.
Je vais me répéter encore une fois: à Halifax, les vrais décideurs sont à la table de négociation, et il n'y a pas eu de conflit de travail. C'est la même chose dans le cas des débardeurs de Vancouver. Ils ont des demandes syndicales et les gens qui sont à la table de négociation ne prennent pas de décision et doivent transmettre ces demandes à un conseil d'administration, qui est une espèce de « Chambre étoilée ». Dans notre cas, nous ne rencontrons jamais un tel conseil d'administration.
Je reviens à mon propos d'origine. Il faut vraiment revoir l'article 34 du Code canadien du travail, si on veut éliminer ou réduire au maximum les possibles conflits de travail. Nous aussi, au port de Montréal, avant 2020, les dernières perturbations remontaient à 2000, soit 20 ans plus tôt, où il y avait eu un lockout de sept jours de la part de la partie patronale. Il faut vraiment revoir la structure patronale pour que les vrais décideurs soient assis à la table.
Vous avez entièrement raison. C'est bien facile de blâmer les travailleurs qui font la grève, de les qualifier de « désinvoltes », comme l'a fait un peu plus tôt un député, mais on ne fait pas cela par plaisir. On veut véritablement négocier de meilleures conditions de travail pour nos gens, et c'est uniquement le rôle que doivent jouer les syndicats.
[Traduction]
J'aimerais revenir sur la loi antibriseurs de grève. La Chambre de commerce du Canada a comparu devant nous lors d'une réunion précédente et nous a tous exhortés à voter contre le projet de loi antibriseurs de grève. C'est le NPD qui a inclus cette demande dans l'entente conclue avec les libéraux.
Vous avez mentionné que le Québec s'est doté d'une loi antibriseurs de grève il y a des années, tout comme la Colombie-Britannique. On croit généralement qu'une loi antibriseurs de grève raccourcit les conflits de travail, parce que le patronat ne peut pas faire appel à des travailleurs de remplacement.
Pouvez-vous nous parler de votre expérience au Québec?
:
Lors de notre dernier conflit, en 2020-2021, une des compagnies a utilisé des briseurs de grève; il y a eu des événements qui ont mené à des incidents que personne ne souhaitait. Cela a créé beaucoup de tension sur les lignes de piquetage et à la table de négociation, puisqu'on avait utilisé un certain nombre de briseurs de grève pendant la grève des débardeurs du port de Montréal.
Je pense que l'histoire est connue de tous. Avant la mise en place de lois anti-briseurs de grève, il y avait des affrontements, il y avait de la violence, ce qui n'était souhaité par personne. Toutefois, quand on fait le piquet de grève ou qu'on est en lockout et que des gens entrent faire son travail, de toute évidence, les esprits s'échauffent et les gens deviennent un peu plus agressifs. Ce n'est pas souhaitable, à une table de négociation. Personne ne veut que des événements externes à la table de négociation viennent perturber ce qui s'y passe. Je crois qu'une loi anti-briseurs de grève va certainement éliminer toute la tension qui peut exister.
En 2020, nous avons vécu des tensions avec des briseurs de grève avec une compagnie appartenant à Logistec, au Québec. Cela a créé beaucoup de tension, ce qui a nécessairement perturbé la négociation.
:
Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins d'être ici parmi nous.
Avant de poser mes questions, j'aimerais revenir sur les propos de mon collègue d'à côté et lui dire qu'on n'a jamais voulu forcer le retour au travail des travailleurs durant cette grève. On blâmait le gouvernement parce qu'il n'agissait pas.
J'étais surpris de voir que mon collègue était très énervé et qu'il voulait offrir un spectacle. Cela m'a vraiment surpris.
J'aimerais poser ma première question à M. Rodgers.
Selon vous, comment peut-on définir ce que sont les services essentiels? D'après ce que j'entends, l'économie ne serait pas un service essentiel.
:
Monsieur Rodgers, je m'adresse encore à vous.
Si j'ai bien compris, un jour de grève équivaut à six jours de retard, je crois. C'est ce que vous avez dit tout à l'heure.
Cette grève, qui s'est réglée après 13 jours, équivaut donc à trois mois de retard.
Après cette grève, l'économie n'a pas repris son cours normal. Les entrepreneurs continuent de subir des pertes.
Pouvez-vous me dire à combien s'élèvent les pertes occasionnées par cette grève? Avez-vous des chiffres là-dessus?
:
Merci, madame la présidente.
Merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
J'aimerais revenir un peu en arrière. Avant la grève au port de Vancouver, comme nous le savons, la période après la pandémie a vu d'énormes répercussions sur la chaîne d'approvisionnement. Je me souviens qu'un intervenant de ma circonscription, Richmond-Centre, m'a dit qu'un conteneur de fret coûtait plus de 10 000 $.
Depuis le début de la grève en juillet, ressent‑on toujours les effets de la reprise des suites de la pandémie?
M. Ballantyne ou M. Rodgers pourraient peut-être nous faire part de leurs commentaires à ce sujet.
:
C'est une question assez générale, et il n'est pas particulièrement facile de prédire l'avenir.
Il y aura toujours un besoin de débardeurs. Je pense que nous pouvons dire que peu importe ce qu'apportera la possibilité d'une plus grande automatisation — comme dans presque tous les champs d'affaires —, des changements technologiques voient le jour, et ces changements mènent souvent à une productivité accrue.
Je pense qu'il serait raisonnable que les exploitants de terminaux, les administrations portuaires et les autres intervenants envisagent une introduction raisonnable de la technologie. Espérons que cette technologie améliorera la productivité des débardeurs.
Je ne peux pas vous répondre avec plus de précision.
:
On risque de recourir encore une fois aux briseurs de grève dans n'importe quel conflit, que ce soit une grève ou un lockout susceptible de toucher des travailleurs relevant de la compétence fédérale.
C'est ce qu'on observe présentement au port de Québec.
Au risque de me répéter, les employés de la compagnie Québec Saint‑Laurent, ou QSL, en sont à 14 mois de lockout. Ils vont passer un deuxième Noël aux lignes de piquetage, alors que des briseurs de grève ont fait leur travail pendant cette période.
Si ce qui est recherché est d'adoucir les relations de travail et de réunir toutes les conditions gagnantes pour que les parties s'entendent le plus rapidement possible, le projet de loi anti-briseurs de grève devrait être appliqué immédiatement après sa sanction royale.
La loi spéciale, soit la Loi prévoyant la reprise et le maintien des opérations au port de Montréal, est entrée en vigueur immédiatement après la sanction royale.
Je ne vois donc pas pourquoi on se donne un délai de 18 mois pour faire entrer en vigueur des dispositions aussi fondamentales pour des travailleurs qui relèvent de la compétence fédérale.
Dans le cadre de cette étude, nous examinons aussi les innovations liées aux ports qui pourraient contribuer à l'efficacité et à la performance.
Votre collègue du Greater Vancouver Board of Trade nous a fait part, lors de sa dernière comparution, de ses craintes concernant l'incidence de l'automatisation des opérations portuaires, qui pouvaient aussi avoir des conséquences sur les emplois.
De votre côté, pouvez-vous nous dire s'il existe des craintes concernant l'automatisation, qui semble inévitable à moyen terme?
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Dans l'ensemble des pays du monde, tous les débardeurs sont préoccupés par l'automatisation. Cela pose un risque pour les emplois et pour la productivité.
Une étude réalisée en Europe a démontré que l'automatisation était moins productive que des opérateurs humains utilisant des pièces de machinerie. Tous les débardeurs, qui gagnent leur vie grâce à ce métier, sont préoccupés par l'automatisation. Je vous ferai parvenir l'étude avec plaisir après la réunion d'aujourd'hui.
Je ne suis pas certain que c'est la Finlande, mais un pays a établi que, pour les débardeurs qui se trouvaient près de pièces de machinerie mécanisées, les risques liés à la santé et à la sécurité étaient beaucoup plus élevés, et qu'il y avait eu des pertes humaines.
:
Merci, madame la présidente.
Je remercie tous les témoins d'avoir pris le temps de venir ici aujourd'hui.
J'aimerais commencer par M. Rodgers ou Mme Kuzeljevich.
Les répercussions du côté des expéditions, comme nous l'avons entendu, s'élèvent à environ 13 milliards de dollars, et la perte économique nette se chiffre à environ 1 milliard de dollars. Cela semble en grande partie attribuable à l'imprévisibilité et à l'incertitude causées par la grève, ou par la période qui a précédé la grève.
Pour en revenir à l'expiration de la convention collective le 31 mars 2023, ne convenez-vous pas qu'il est certainement possible que ces nombres soient beaucoup plus élevés? Y a‑t‑il des effets persistants qui pourraient perdurer après la grève?
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Une des conversations que nous tenons aujourd'hui vise à trouver des mesures ou des solutions pour nous assurer qu'à l'avenir, le processus de négociation à la table est en mesure de continuer. Je pense que nous sommes tous d'accord sur le fait que les meilleures négociations sont celles qui sont conclues à la table de négociation.
Le gouvernement a présenté le projet de loi .
Afin que nous parlions tous de la même chose, j'aimerais dire ce qui suit: ce projet de loi vise à modifier la loi actuelle et à moderniser le fonctionnement des systèmes de transport maritime et ferroviaire du Canada; à supprimer les obstacles systémiques afin de créer une chaîne d'approvisionnement plus fluide, plus sûre et plus résiliente; à élargir le mandat des administrations portuaires canadiennes en matière de gestion du trafic; à positionner les ports du Canada en tant que centres stratégiques qui soutiennent la performance de la chaîne d'approvisionnement nationale et gèrent efficacement les décisions d'investissements en vue d'une croissance durable; à améliorer la connaissance du gouvernement des ports et de leurs opérations; ainsi qu'à moderniser les dispositions relatives à la sécurité ferroviaire et à la sûreté du transport des marchandises dangereuses.
Dans sa forme actuelle, le projet de loi est une approche gagnante. Il peut évidemment être renforcé, et c'est à cela que nous travaillons.
J'aimerais entendre ce que les témoins ont à dire sur ce sujet.
Premièrement, sont-ils d'accord sur le fait que les meilleures ententes sont conclues par les parties à la table de négociation?
Deuxièmement, j'invite chaque témoin à me faire part de ses réflexions sur le texte législatif. Certains témoins ont déjà proposé des suggestions, mais d'autres n'ont pas encore eu l'occasion de le faire. Qu'est-ce que cela signifie pour les membres et les secteurs que vous représentez?
Madame Martin, je vous demande de répondre la première à la question. Les autres témoins pourront y répondre par la suite.
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Je vous remercie pour votre question.
Je ne suis pas en mesure de parler du projet de loi .
Je dirais que, de façon générale, notre association est en faveur de la libre négociation collective; je le suis aussi. Elle est enchâssée dans la Constitution de notre pays.
Lorsque l'on se retrouve dans une impasse, toutefois, il doit y avoir en place des outils qui peuvent être utilisés pour garder les parties à la table afin qu'elles puissent en arriver à un règlement juste et équitable. Nous sommes d'ailleurs très heureux de voir l'examen que le entreprend en vertu de l'article 106 du Code canadien du travail en ce sens. Dans certains cas, cela peut vouloir dire un arbitrage exécutoire, l'arbitrage des offres finales ou d'autres moyens de régler un différend.
:
Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins d'être avec nous aujourd'hui.
J'aimerais simplement revenir sur certaines des questions qui ont été posées plus tôt et sur certains des commentaires qui ont été faits par les représentants de l'Association des transitaires internationaux canadiens. Ils ont notamment parlé des répercussions possibles. On a l'impression qu'au lieu de les éviter, les grèves deviennent la norme dans le cadre des négociations, ce qui finit par nuire aux entreprises.
Monsieur Rodgers, vous avez dit que, compte tenu de la menace qui planait sur Montréal, les transporteurs et les autres joueurs déplaçaient les approvisionnements pour éviter ce port.
Pouvez-vous nous expliquer cela en détail? Savez-vous, par exemple, combien il y a eu de déplacement et ce qu'ils représentent sur le plan des coûts?
:
Si vous pouviez nous en parler, nous vous en serions très reconnaissants.
Au bout du compte, on craint que ces entreprises ne reviennent pas. Elles finiront par trouver d'autres itinéraires qui leur conviennent et elles continueront d'éviter le port de Montréal, tout simplement, ce qui nuit aux deux parties. Voilà pourquoi je pense qu'il leur incombe de travailler ensemble à l'amiable afin d'en arriver à un règlement et à un accord équitable qui profite à tous. Si nous perdons cette clientèle, elle ne reviendra jamais.
En ce qui concerne la notion d'une journée de grève pour sept jours de rétablissement, nous avons reçu l'autre jour des représentants de Constructeurs mondiaux d'automobiles, qui ont confirmé cette statistique en affirmant que la situation avait ajouté 60 jours à l'arriéré de livraison. C'est aussi ce qui me préoccupe.
Monsieur Rodgers, je pense que dans votre déclaration préliminaire... Vous n'avez pas proposé d'idées, mais vous avez dit qu'il devait y avoir une autre façon d'éviter cela. Je me demandais simplement si vous aviez des idées ou des suggestions concrètes sur la façon dont nous pouvons éviter ce conflit de travail continu dans les ports.
:
Je remercie tous les témoins.
Ce qui se passe lorsqu'on est l'un des derniers intervenants, c'est que bon nombre des questions ont déjà été posées.
J'aimerais poser une question à nos invités, parce que nous avons abordé de nombreux sujets. Est‑ce qu'ils approuvent la position du gouvernement voulant que les meilleures négociations en matière de travail se fassent à la table?
J'aimerais que tous les témoins me répondent par oui ou par non. Nous avons déjà présenté la question. À notre avis, les meilleures ententes se prennent à la table des négociations.
Monsieur McEwan, comme je vous vois sur mon écran, j'aimerais commencer avec vous.
La raison pour laquelle je pose la question, c'est que tout le monde semble approuver cette déclaration. Ce que nous avons entendu — et c'est appuyé par d'autres témoignages —, c'est que les travailleurs de remplacement prolongent les grèves ou les lock-out, parce qu'ils détournent l'attention des négociations, qui ne sont pas sérieuses. C'est un problème, et cela prolonge les choses. L'histoire du Canada le démontre encore et encore.
Si nous ne voulons pas de grèves ou de lock-out à long terme, comme c'est le cas dans le cadre du système actuel, nous devons changer ce système pour que tout le monde s'entende au sujet d'une orientation.
Tandis que j'ai la parole, j'aimerais aussi parler de la réputation du Canada. Je suis également coprésident du Groupe interparlementaire Canada-Japon, et à ce titre, j'ai eu de nombreux échanges avec des politiciens et des entreprises de l'Asie. Certains étaient ici tout récemment, à la fin août et en septembre. Ils considèrent le Canada comme un partenaire très fiable, surtout compte tenu de la guerre illégale de la Russie contre l'Ukraine et de ce que fait la Chine dans la mer de Chine méridionale et la mer de Chine orientale.
Les Japonais ne sont pas les seuls. Les gens de la région sont très enthousiastes au sujet de la stratégie indo-pacifique, parce qu'ils cherchent non seulement la paix et la sécurité, mais aussi des possibilités commerciales.
L'une des questions que j'aimerais poser au groupe concerne la capacité de nos ports de la côte Ouest, parce que ces joueurs veulent conclure plus d'ententes avec le Canada. Ils considèrent que nous avons une excellente réputation. Nous sommes un pays stable. Nous avons des vues similaires sur la démocratie et le capitalisme. Quelle est la capacité de ces ports? Devons-nous investir davantage dans les infrastructures pour nous assurer de pouvoir répondre aux besoins de nos amis des pays de l'ANASE — les Philippines ou le Japon — qui cherchent à accroître leur sécurité et à venir au Canada? Quelle est notre capacité?
De plus, quelles sont les menaces? Je pense toujours aux forces, aux faiblesses, aux possibilités et aux menaces. L'une des personnes ici présentes a parlé de certains changements climatiques, notamment de l'élévation ou de la baisse du niveau de la mer et des incendies.
J'aimerais entendre M. McEwan en premier, parce que je crois qu'il est l'un de ceux qui ont parlé des événements météorologiques et de la façon dont ils pouvaient perturber les chaînes d'approvisionnement.
:
Je comprends que ce n'est pas facile de répondre quand on est confronté à la vérité, madame la présidente.
Voilà ce qui se passe actuellement: des gens font de la désinformation et, quand on leur met la vérité sous les yeux, ils font des rappels au Règlement et ne veulent pas que les analystes nous aident dans notre travail.
Je vais donc me faire un devoir d'informer correctement les gens qui sont ici, dans cette salle, et les gens qui nous écoutent. Le projet de loi a été adopté à l'étape de la troisième lecture le 29 avril 2021 et, comme vous vous en doutez, il a reçu la sanction royale. C'est un projet de loi spéciale qui a été déposé par le gouvernement, c'est-à-dire le Parti libéral, et appuyé par ses amis du Parti conservateur. Alors, quand un de mes collègues essaie de me faire passer pour un ignare parce que je suis nouveau au Comité, et qu'il me dit que son parti n'est pas en faveur des lois spéciales, je trouve cela inquiétant. C'est très dangereux.
Je vais m'adresser à M. Murray. Nous ne pouvons pas poser de questions aux analystes, mais nous pouvons certainement en poser aux témoins.
Monsieur Murray, vous avez vécu ce conflit de travail visé par cette loi spéciale. Vous rappelez-vous qui a déposé ce projet de loi? Qui l'a appuyé? Il ne faudrait pas croire que cela s'est fait tout seul, puisque le gouvernement était minoritaire.
:
Vous rappelez un très mauvais souvenir aux débardeurs et aux débardeuses du port de Montréal.
Ce projet de loi avait été déposé par Filomena Tassi, qui était ministre du Travail à l'époque, et avait été appuyé par les conservateurs, même si nous avions eu l'occasion de parler avec ceux-ci et qu'ils nous avaient quand même aidés à retirer l'arbitrage des propositions finales, qui est la pire chose en matière de relations de travail.
J'avais parlé à des gens autour de la table, à l'époque, et nous avions réussi à retirer cela du projet de loi. Je remercie ceux qui ont participé à cela.
J'aimerais m'adresser à M. McEwan. Vous avez bien expliqué pourquoi l'exploitation minière est importante aujourd'hui. L'un de vos membres, Teck Resources, a une grande fonderie dans ma circonscription qui est très importante pour toutes les raisons que vous avez évoquées, en plus d'y être l'un des plus gros employeurs.
Je veux aussi vous demander quels sont les défis auxquels font face vos membres dans l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement. De toute évidence, les ports maritimes sont importants, mais je me pose la question. De façon particulière, le service ferroviaire semble être essentiel à l'exploitation minière. Il permet de transporter les marchandises lourdes.
Dans le but d'examiner l'hypothèse voulant que tous les problèmes liés à la chaîne d'approvisionnement soient attribuables aux travailleurs qui veulent une juste part des profits, j'aimerais que vous nous parliez des autres problèmes auxquels vos membres font face en ce qui concerne les chaînes d'approvisionnement.
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Oui, bien sûr. Je vous remercie de la question, monsieur Cannings.
Comme je l'ai dit dans mes remarques liminaires, nos membres ont fait face — comme tout le monde — à des défis dans la chaîne d'approvisionnement au cours des dernières années en raison de la pandémie, des feux de forêt et des rivières atmosphériques. Les rivières atmosphériques ont particulièrement perturbé la chaîne d'approvisionnement.
M. Sheehan en a parlé plus tôt. Dans le contexte des débouchés commerciaux dans la région de l'Indo-Paficique, nous devons veiller — surtout en Colombie-Britannique — à ce que nos routes, nos voies ferrées et nos ports soient suffisamment résilients pour faire face à ces défis, et c'est pourquoi nous avons exhorté les deux paliers de gouvernement à investir à cet égard.
En ce qui concerne la grève de l'été dernier, notre position est la suivante: nous soutenons la négociation libre et collective et pensons que les meilleurs résultats sont obtenus à la table des négociations, mais nous voulons également que les activités continuent. Il est absolument essentiel que le secteur riverain de nos ports de la côte Ouest soit accessible et que la circulation y soit fluide pour l'exportation de nos produits de base et l'importation des matériaux nécessaires à nos opérations.
Toute grève — ou lock-out — ne devrait pas être tolérée, peu importe sa durée. C'est pourquoi l'examen de l'article 106 arrive à point nommé. Il permettra de déterminer quels sont les outils pouvant être déployés lors d'une impasse dans les négociations et l'échéancier prévu pour leur utilisation.
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Permettez-moi de commencer.
La réponse est oui, selon nous. La situation actuelle a somme toute des répercussions majeures. Pour revenir au commentaire précédent sur le progrès de l'expansion et à la question de savoir si nous disposons de la capacité nécessaire, nous savons que le projet du terminal 2 de Roberts Bank à Vancouver va ajouter 1,6 million de conteneurs dans ce port d'ici 2030.
Le problème du Canada est en partie lié au temps qu'il faut pour que certains de ces projets soient approuvés et mis en œuvre. Lorsque l'on a présenté le projet d'expansion du terminal 2 de Roberts Bank pour la première fois... Vingt ans se seront écoulés entre la conception et le début des opérations, ce qui est beaucoup trop long. Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre aussi longtemps.
Sachant qu'il y aura 1,6 million de conteneurs supplémentaires d'ici sept à huit ans, nous cherchons à déterminer si nous disposons des bonnes infrastructures. Qu'en est‑il des liaisons ferroviaires, des routes, des terminaux, des terrains? Disposons-nous du nécessaire à cet égard? Il faut prendre tout cela en compte dès maintenant.
Nous ne pouvons pas attendre que le terminal à conteneurs soit construit et que les conteneurs soient livrés pour décider quoi en faire. Nous sommes déjà bien conscients de la situation, et nous devons commencer à prendre des initiatives dès aujourd'hui.
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C'est une question importante, car l'un de nos principaux problèmes était le manque d'informations. Il y a eu un effort concerté de la part de Transports Canada pour réunir les parties prenantes quotidiennement, ce qui s'est avéré fort utile. Cependant, certaines négociations étaient silencieuses et nous manquions alors d'informations cohérentes. Un jour, on semblait s'entendre, et le lendemain, c'était mort. Un jour, on avait vent de menaces de mises à pied dans l'une des entreprises ferroviaires, et le lendemain, on n'en parlait plus.
Mon travail consiste entre autres à relayer ces informations à nos membres et c'est devenu problématique parce qu'il semblait y avoir un manque de transparence. Je comprends que nous ne puissions pas tout savoir lors des négociations, mais nous aurions besoin d'un mécanisme pour communiquer les informations dont nous avons parlé. Si l'on transmettait des informations tangibles aux parties concernées dans un délai raisonnable, on améliorerait le processus de négociation de ces dernières.
Nos membres ont ressenti les effets de cette incertitude. Bien que nous ne puissions pas la chiffrer, la durée de ces négociations et le temps qu'il faut pour en arriver à des décisions génèrent de l'incertitude, et cela a un coût.
Pour revenir à l'une des questions précédentes, l'une des améliorations possibles serait d'établir un échéancier pour ces négociations.