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AGRI Rapport du Comité

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Les gardiens de la terre : Un examen de la contribution de l’agriculture canadienne à l’environnement

L’apport environnemental de l’agriculture

Introduction

La relation entre les agriculteurs et leur environnement est complexe et présente de multiples facettes. Les activités agricoles permettent à la fois d’assurer l’approvisionnement alimentaire et peut contribuer à préserver l’environnement grâce à l’application de bonnes pratiques de gestion qui permettent de minimiser l’impact de l’agriculture sur le sol, l’eau et l’air. Les agriculteurs sont aussi en première ligne des transformations de leur environnement, leurs activités sont fortement affectées par les catastrophes naturelles et les phénomènes météorologiques extrêmes, mais leurs pratiques peuvent contribuer à atténuer l'évolution du climat et à s'y adapter.

C’est pour comprendre cette relation complexe que le 4 février 2021, le Comité de l’agriculture et de l’agroalimentaire (le Comité) a décidé d’entreprendre une étude sur la relation entre l’environnement et l’agriculture au Canada selon les modalités de la motion suivante[1] :

Que, conformément à l’article 108(2) du Règlement, le Comité entreprenne une étude sur les pratiques exemplaires, les outils, les technologies et les mesures qui permettraient au gouvernement du Canada de reconnaître l’importance de l’agriculture et de s’allier aux producteurs pour réduire l’impact environnemental du secteur agricole, les émissions de gaz à effet de serre et l’empreinte carbone, promouvoir la santé des sols, réduire la dépendance aux combustibles fossiles et encourager les producteurs à continuer à adopter des pratiques respectueuses de l’environnement; que cette étude prévoie l’audition de témoins ayant des connaissances particulières sur ce sujet que cette étude prévoie d’inviter à comparaître la ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire et des responsables du ministère[.]

Cette étude a été interrompue après trois réunions lorsque le 43e parlement a été dissous le 15 août 2021 ce qui a terminé les travaux des comités. Le 31 janvier 2022, le Comité reformé dans le 44e Parlement a adopté une motion proposant de reprendre l’étude et d’en élargir la portée pour traiter notamment de la « santé du sol et de la grande importance de celle-ci dans la lutte aux changements climatiques » à travers les enjeux reliés à la « gestion des éléments nutritifs et de lutte contre les organismes nuisibles de la santé du sol, du point de vue de la profitabilité et de la durabilité » [2]. Le Comité a également décidé par une motion du 5 octobre 2022 de se pencher sur le « problème de mortalité des abeilles » afin d’en identifier les causes et de tenir deux réunions sur ce sujet[3].

Ce rapport résume les témoignages entendus lors des réunions consacrées à cette étude et fait des recommandations au gouvernement fédéral. Il brosse d’abord un portrait de l’apport et de l’impact des pratiques agricoles au Canada tels qu’ils ont été présentés par les témoins, notamment en ce qui a trait aux sols agricoles, à la biodiversité, à l’utilisation des engrais et aux résidus agricoles et alimentaires. Dans une seconde partie, ce résumé se concentre sur les témoignages portant sur l’implication du gouvernement fédéral dans ces enjeux, en résumant entre autres les témoignages portant sur la tarification de la pollution, la réglementation des nouvelles technologies et la recherche et l’innovation. Finalement, les enjeux reliés à la mortalité des abeilles sont présentés dans une section séparée.

L’agriculture et l’environnement au Canada

Le rôle fondamental des sols

Les sols jouent un rôle de premier plan dans l’interaction entre les agriculteurs et leur environnement. En 2015, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a mis à jour sa Charte mondiale des sols dont le préambule traduit l’importance donnée à la santé des sols à l’échelle mondiale :

Les sols sont essentiels à la vie sur la Terre, mais les pressions exercées par l’homme sur les ressources pédologiques atteignent aujourd’hui un seuil critique. Une gestion avisée des sols est un élément essentiel de l’agriculture durable. Elle constitue en outre un facteur de régulation du climat et une voie privilégiée pour la conservation des services écosystémiques et de la biodiversité.

Les audiences du Comité ont mis en valeur l’importance de la préservation des sols pour les agriculteurs. Pour Darrin Qualman, directeur de la Politique et de l’Action en matière de crise climatique de l’Union Nationale des Fermiers, la bonne santé des sols est essentielle pour « réduire l’utilisation d’intrants; accroître la résilience, la filtration de l’eau et la résistance à la sécheresse ». En outre, Angela Bedard-Haughn, doyenne et professeure du College of Agriculture and Bioresources à l’université de Saskatchewan, a mis en lumière les services écosystémiques rendus par les sols, notamment son rôle fondamental dans le cycle de l’eau, du carbone et de l’azote.

Le sol peut notamment jouer un rôle de puits de carbone où cette substance peut rester pendant de très longues périodes[4]. Les plantes absorbent le dioxyde de carbone (CO2) de l’air à travers le processus de photosynthèse et en extraient le carbone qui représente un élément de leurs tissus comme leurs tiges et leurs racines. À la fin de leur cycle de croissance, les plantes se décomposent et le carbone hors sol retourne dans l’atmosphère alors que celui dans le sol persiste sous forme de carbone organique du sol pour composer l’essentiel de ce que l’on appelle la matière organique du sol. Le carbone organique du sol sera stocké de manière plus ou moins stable tant que le sol n’est pas perturbé[5]. Les pratiques agricoles peuvent potentiellement favoriser le cycle de croissance des plantes, atténuer les perturbations des sols et jouer un rôle important dans la constitution du stock carbone organique du sol.

Les témoins ont donné des illustrations des facteurs qui peuvent affecter la santé des sols agricoles. Angela Bedard-Haughn, a rappelé que l’adoption du semis direct, c’est-à-dire sans labour au préalable, a largement contribué à améliorer la santé des sols de l’ouest du Canada et l’augmentation des stocks de carbone. Elle a toutefois rappelé que la persistance de ces stocks dépend du maintien de ces pratiques bénéfiques dans le temps[6]. Mike Ammeter, président de la Canadian Canola Growers Association, a illustré les multiples avantages de cette pratique sur les sols :

Les agriculteurs ont fait la preuve de leur capacité à adopter des innovations bénéfiques pour l’environnement, comme le travail de conservation du sol ou la culture sans labour. Il y a plus de 10 ans, j’ai personnellement commencé à pratiquer la culture sans labour sur mon exploitation afin d’utiliser plus efficacement des ressources limitées et d’améliorer l’état des sols. En adoptant volontairement cette pratique, les agriculteurs comme moi ont amélioré la couverture du sol, séquestré du carbone et réduit le risque d’érosion du sol tout en réduisant les besoins en carburant et en main‑d’œuvre. En 1991, 7 % des terres agricoles canadiennes étaient ensemencées selon des pratiques sans labour. En 2016, ce chiffre est passé à plus de 60 %.

D’autres pratiques bénéfiques de gestion du sol permettent de minimiser les perturbations voire de restaurer les sols. Jennifer Haverstock, conseillère agricole certifiée et une agronome professionnelle, explique que son organisme, Perennia Food and Agriculture, fait la promotion des cultures de couvertures qui permettent de renforcer la résilience des sols, de lutter contre l’érosion et améliorer la capacité de rétention de l’eau en plus de favoriser la séquestration du carbone.

Recommandation 1

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada mette en place un cadre pour encourager les agriculteurs canadiens qui utilisent des solutions fondées sur la nature afin de lutter contre les changements climatiques, en guise d’affirmation du bon travail qu’ils accomplissent déjà en vue de réduire leurs émissions, notamment la production agroécologique, sans labour, à travail du sol réduit, à cultures de couverture et à cultures intercalaires, par exemple en envisageant de les rémunérer pour les services écosystémiques qu’ils fournissent.

À l’inverse, certaines pratiques contribuent à dégrader la qualité des sols. Pour donner une illustration de ce fragile équilibre, Daniel Bernier, conseiller de l’Union des producteurs agricoles, a expliqué comment l’utilisation de machinerie toujours plus lourde dans les champs a entrainé des problèmes de compaction des sols. Ce problème est dû, selon lui, en grande partie au manque de main-d’œuvre qui pousse les agriculteurs à compenser le manque de personnel par l’acquisition de machines qui, s'ils leur permettent de travailler plus rapidement, plus efficacement et avec moins de passages, peuvent aussi favoriser la compaction en raison du poids supplémentaire[7]. Selon l’agronome Jean Caron, la compaction entraine une réduction de l’oxygène disponible dans le sol pour les micro-organismes qui utilisent à la place de l’azote du sol pour respirer, ce qui entraine à la fois des émissions d’oxyde nitreux – un gaz à effet de serre – et une diminution de la disponibilité de l’azote pour les plantes[8]. Il a aussi insisté sur l’influence des conditions climatiques et pédologiques régionales sur la sévérité de ce problème[9] :

Les sols de l’Est du Canada, c’est-à-dire ceux de l’Ontario, du Québec et du Nouveau Brunswick, sont travaillés dans des conditions très humides. C’est aussi le cas des sols de la vallée du Fraser, en Colombie‑Britannique. De façon générale, les sols de l’Est deviennent beaucoup plus sensibles à la compaction que les sols que de l’Ouest, où il y a des déficits hydriques plus importants.

Certains témoins ont toutefois souligné que certaines des pratiques bénéfiques qui peuvent prévenir la compaction ne sont pas facilement applicables partout au Canada. Par exemple, le climat plus humide de l'est du Canada rend plus difficile le recours à des pratiques telles que le travail du sol sans labour[10].

Recommandation 2

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada travaille à encourager les pratiques exemplaires permettant aux exploitations agricoles dans l’est du Canada de séquestrer davantage de carbone par hectare, tel que la réduction de la compaction du sol.

Du côté de l’élevage, les pâturages naturels représentent une utilisation des sols particulièrement favorable au stockage du carbone en raison des perturbations limitées du sol dans ces systèmes de production, de la fertilisation apportée par les animaux et de la croissance racinaire des plantes favorisée par le broutage des tissus aériens des plantes. Andrea Stroeve‑Sawa, directrice du conseil, Canadian Roundtable for Sustainable Beef, estime qu’au Canada les éleveurs de bœufs gèrent un total de 34 millions d’âcres de pâturage, « un écosystème menacé à l'échelle mondiale dont moins de 20 % demeure intact », fournissant un habitat à plus de 60 espèces en péril et séquestrant environ 1.5 milliards de tonnes de carbone.

Toutefois, les témoins représentant les secteurs de l’élevage et des plantes fourragères ont déclaré être alarmés par la perte de ces milieux. Citant les données du recensement de l’agriculture entre 2011 et 2016, Cedric MacLeod, directeur général de l’Association canadienne pour les plantes fourragères, a rapporté des pertes d’environ 1 million d’acres de Prairies herbeuses entre ces deux dates au Canada et conséquemment des pertes du carbone stocké dans ces sols. Cette perte a été notamment entrainée par les difficultés économiques du secteur bovin depuis les années 2000, liées entre autres à l’Encéphalite spongiforme bovine (ESB)[11]. Les représentants de la Canadian Cattlemen’s Association ont toutefois souligné que ces conversions de terres sont aussi le produit de l’insuffisance des mécanismes de gestion des risques accessibles aux producteurs bovins par rapport aux producteurs de cultures qui ont accès à des outils comme l’assurance‑récolte[12].

Recommandation 3

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada, en collaboration avec les provinces et les territoires :

  • investisse dans la recherche et la technologie afin d’aider les éleveurs de bovins à tirer parti des mesures de conservation qu’ils prennent déjà;
  • mette en place un plan de protection et de restauration des prairies herbeuses pour mieux comprendre la conservation des terres et la diminution des émissions du secteur agricole, tout en augmentant la séquestration de carbone;
  • envisage des manières d’intégrer le rôles des animaux d’élevage dans les processus de régénération des prairies herbeuses.

Comme première étape dans la protection des prairies herbeuses, Paul Thoroughgood, directeur national de l’agriculture et de la durabilité de Canards illimités Canada, a suggéré au gouvernement d’établir un « [inventaire pancanadien] des pâturages et des terres humides » étant donné l’importance environnementale de ces milieux. Dans le même ordre d’idée, Duane Thompson, président du Comité de l’environnement de la Canadian Cattlemen’s Association, propose de mettre en place une « stratégie globale d’utilisation des terres par tous les ordres de gouvernement et les intervenants afin d’établir un équilibre entre l’expansion urbaine, la production agricole et la protection de l’environnement ». En outre, Eric Toensmeier, directeur du Perennial Agriculture Institute, a soutenu la mise en place d’une telle stratégie par l’entremise du projet de loi C-203 : Loi concernant la conservation et la santé des sols qui « vise à établir une stratégie nationale visant à promouvoir les initiatives, dans tout le Canada, ayant pour objet de conserver et d’améliorer la santé des sols ». Ce dernier a également mis de l’avant l’importance d’encourager le développement de l’agroforesterie dans les systèmes d’élevage. Selon lui, les taux de séquestrations du carbone sont de « trois à cinq fois plus élevés que dans les fermes qui utilisent uniquement les systèmes de culture et de pâturage améliorés[13] ».

Paul Thoroughgood a également demandé qu’une attention particulière soit accordée aux habitats tels que les terres humides et les prairies herbeuses qui sont « souvent considérés comme improductifs et même comme des passifs, ce qui les rend propices à l'élimination ». Il souligne que la préservation de ces habitats peut générer des bénéfices environnementaux considérables prenant l’exemple de « l'entretien de quatre acres de terres humides [qui] permet[trait] de stocker autant de carbone que s'il n'y avait pas de labourage sur un quart de section de terres cultivées dans les Prairies canadiennes pendant 25 ans ».

Recommandation 4

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada, en partenariat avec les intervenants du secteur, les gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux :

  • collecte de l’information sur les prairies herbeuses, les pâturages et les terres humides afin d’établir un équilibre entre l’expansion urbaine, la production agricole et la protection de l’environnement, et ce dans le respect de leurs compétences respectives;
  • étudie les moyens de récupérer les terrains fédéraux non utilisés afin de les convertir en terres agricoles productives, mélangées à des écosystèmes indigènes;
  • fasse la promotion de l’agriculture régénératrice dans les zones urbaines et suburbaines.

Recommandation 5

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada élabore un plan d’action sur une stratégie nationale visant à améliorer la surveillance des sols, le partage des données et la promotion des meilleurs pratiques pour améliorer et protéger la santé des sols, en collaboration avec des chercheurs, des propriétaires terriens, des intervenants de l’industrie, les gouvernements provinciaux et territoriaux, dans le respect de leurs compétences, des membres des Premières Nations et des universitaires, d’une manière similaire à l’analyse et à l’évaluation de la stratégie lancée par le gouvernement de l’Australie en 2022.

La biodiversité

En plus de leur rôle important dans les efforts de réduction des gaz à effet de serre (GES), les pâturages hébergent une importante biodiversité. Duane Thompson a notamment souligné que les pâturages bovins sont des habitats importants pour certaines espèces d’oiseaux menacés dans les Prairies. Selon une étude de l’Alberta Biodiversity Monitoring, cité par Andrea Brocklebank, directrice exécutive du Beef Cattle Research Council, les pâturages bovins représentent un habitat aussi favorable, voire plus propice à la majorité des oiseaux et mammifères sauvages, par rapport aux milieux naturels.

Certains témoins ont mentionné notamment les bénéfices sur la biodiversité que peuvent apporter les techniques de l’agriculture régénératrice. S’il a admis que le concept d’agriculture régénératrice manque d’une définition uniforme, Mervin St. Luce, chercheur scientifique du ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, en a dressé les grandes lignes en indiquant qu’il s’agit d’envisager « la production alimentaire dans un système naturel autant que possible. Cela concerne à la fois la réduction des pesticides et, en fonction du sol, la création d’un écosystème diversifié pour pouvoir produire des aliments ».

Pour un des chercheurs du ministère, la biodiversité est un des éléments fondamentaux de cette approche qui promeut notamment la biodiversité souterraine en encourageant la rotation des cultures diversifiées[14]. Ryan Cullen, entrepreneur en agriculture à petite échelle et urbaine à City of Greens Farm, une ferme qui revendique l’emploi des techniques d’agriculture régénératrice, a ajouté que leur approche vise à intégrer des considérations à la fois sociales, environnementales et économiques à la production agricole :

Sur notre ferme, la planification et la gestion sont holistiques et suivent les principes de l’agriculture régénérative, ce qui signifie que nous ne tenons pas uniquement compte de la façon dont notre base de ressources, nos décisions, nos systèmes de production et nos résultats influent sur nos résultats financiers, mais également de leurs effets bénéfiques sur notre environnement et sur les gens de notre collectivité. L’agriculture régénératrice consiste à gérer de façon holistique, de sorte que nous prenons des décisions qui ne sont pas seulement fondées sur les aspects économiques, mais qui tiennent également compte des répercussions et des bienfaits sociaux et environnementaux.

Les engrais et l’agriculture de précision

Les engrais sont nécessaires à la bonne croissance des plantes, mais leur application en excès peut entrainer des conséquences néfastes sur l’environnement notamment lorsque les éléments nutritifs – en particulier l’azote – ne sont pas entièrement utilisés par les plantes. Les nutriments en excès peuvent être lessivés dans les cours d’eau et les eaux souterraines où ils favorisent la croissance d’organismes nuisibles pouvant entrainer leur eutrophisation et acidification[15]. Les engrais sont également une source d’émissions de GES lors de leur production[16], mais aussi lorsque leur application entraine un excès d’azote dans les sols, favorisant les émissions d’oxyde nitreux un GES représentant près de la moitié des émissions agricoles[17]. Darrin Qualman, directeur de la Politique et de l’Action en matière de crise climatique, de l’Union Nationale des Fermiers a détaillé les différentes manières dont les engrais peuvent contribuer aux émissions de GES :

Lors de sa fabrication, l'engrais azoté est une source importante de dioxyde de carbone. […] Lorsqu'il est utilisé dans les champs agricoles, l'azote produit des émissions d'oxyde nitreux, et l'engrais azoté produit des sources importantes de méthane à partir de sa charge en matières premières gazières. […] La surutilisation de l'azote a un large éventail d'effets néfastes sur l'environnement, dont des zones océaniques mortes, l'acidification et la pollution des eaux souterraines par les nitrates.

Bien que les intrants agricoles tels que les engrais puissent avoir des effets néfastes sur l'environnement, Justine Taylor, directrice, Gestion responsable et durabilité chez CropLife Canada, a souligné que les technologies, y compris les engrais ou les produits antiparasitaires, « permettent d'accroître la productivité des terres, ce qui permet ensuite de conserver une plus grande partie des terres dans leur état naturel ».

En décembre 2020, le gouvernement a annoncé qu’il chercherait à réduire les « émissions d’oxyde nitreux liées à l’application d’engrais de 30 % par rapport aux niveaux de 2020 ». Lors de leur témoignage, les fonctionnaires d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) ont indiqué mener des consultations à propos de cette cible avec les intervenants du secteur[18]. Certains témoins se sont montrés préoccupés à la perspective que cette cible puisse ne pas avoir l’effet escompté sur les émissions d’oxyde nitreux et nuire à la profitabilité des entreprises agricoles[19]. Toutefois, après la fin des consultations du ministère le 31 août 2021, le gouvernement a rappelé que cette cible était volontaire et visait uniquement les émissions de GES liées à l’application d’engrais – et non les quantités appliquées – et qu’il procéderait d’une manière « flexible, collaborative et fondée sur la science[20] ».

Lorsque les engrais sont appliqués de manière optimale, il est possible à la fois de minimiser leurs impacts sur l’environnement tout en maximisant les rendements. C’est l’objet du programme de gérance des nutriments 4B qui est « centré sur l’application de la bonne source [d’engrais] selon le bon taux, au bon endroit et au bon moment[21] ». Pour Jennifer Haverstock une meilleure gestion des applications d’engrais représente également un bénéfice économique pour les agriculteurs puisque « la fertilité appliquée va directement à l’alimentation des cultures, ce qui donne aux agriculteurs un meilleur rendement de leur investissement ». Clyde Graham, vice-président exécutif de Fertilisants Canada, s’est félicité de la « reconnaissance [par AAC] du programme [des 4B] à titre de solution novatrice pour réduire les gaz à effet de serre ». Il a également encouragé le gouvernement à mettre cette technique au centre de la stratégie fédérale afin d’atteindre la cible de réduire les GES liés aux engrais de 30 %. D’autres pratiques peuvent également permettre de réduire ces émissions. Eric Toensmeier a, par exemple, souligné que les systèmes de cultures agroforestiers permettent de limiter les émissions d’oxyde nitreux grâce aux racines des arbres qui absorbent les excédents d’engrais qui ne sont pas consommés par les cultures.

L’agriculture de précision – « pratique qui exploite des technologies de collecte automatisée de données, comme la cartographie à taux variables, l’intelligence artificielle et l’imagerie numérique, pour orienter des activités de gestion agricole ciblées[22] » – offre une synergie intéressante avec le programme des 4B selon Keith Currie, premier vice-président de la Fédération canadienne de l’agriculture[23]. Il a donné l’exemple de l’utilisation de « capteurs de culture et de sol » qui permettent d’optimiser l’application des fertilisants et de réduire ainsi les émissions d’oxyde nitreux de 15 à 25 %. Il a plus largement décrit les avantages de l’agriculture de précision :

Les technologies agricoles de précision permettent en outre d’accroître l’efficacité énergétique grâce à l’analyse de la flotte et aux systèmes de navigation automatique qui réduisent le nombre de passages nécessaires pour la pulvérisation, le labour et la récolte. Une étude américaine a démontré que cela pourrait diminuer la consommation de carburant dans une proportion pouvant atteindre 6 %, soit l’équivalent de 18 000 envolées aériennes. La même étude concluait que la baisse de consommation pourrait encore être réduite de 16 % si cette technologie était utilisée à plus grande échelle.

Wade Barnes, directeur général de Farmers Edge Inc., a expliqué comment son entreprise fournissait de tels services et que l’adoption de ces technologies à grande échelle « est en grande partie attribuable au fait qu’il est rentable de mettre en œuvre ce genre de technologies. Cela permet de préserver le sol et l’épandage d’azote aux bons endroits conserve l’humidité ».

Recommandation 6

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada reconnaisse l’importance du Programme de gérance des éléments 4B comme outil de gestion des engrais durable et encourage l’adoption des autres techniques d’application d’engrais « intelligentes ».

Le recyclage des résidus agricoles et la lutte contre le gaspillage alimentaire

La production agricole génère de nombreux sous-produits qui peuvent être utilisés, maximisant ainsi les ressources consacrées à leur production. Le Comité a rencontré de nombreuses organisations qui s’affairent à favoriser la valorisation de ces sous-produits. Innovation Bio-industrielle Canada est l’une d’entre elle et « offre des conseils et des services d’investissement stratégique essentiels aux organisateurs d’entreprise, surtout aux entreprises en démarrage, dans le domaine des technologies propres, vertes et durables ». L’organisation estime que le secteur agricole génère plus de 50 millions de tonnes de résidus agricoles durables qui pourraient être converties en bioproduits industriels comme des plastiques ou des résines[24]. Afin de fournir les capitaux nécessaires aux entreprises dans ce domaine, elle encourage le gouvernement fédéral à lancer une « initiative nationale d’accélérateur d’entreprises vertes[25] ». Son directeur exécutif, A.J. (Sandy) Marshall a donné des exemples de valorisation de ces résidus :

L’hydrogène à faible teneur en carbone, le gaz naturel renouvelable et les biocarburants produits à partir de ressources renouvelables réduisent l’intensité carbonique du bassin énergétique utilisé pour le logement et la mobilité. Les produits biochimiques et les biomatériaux peuvent être utilisés pour produire des matériaux destinés à remplacer les substituts d’origine fossile pour les applications de fabrication avancée, telles que celles qu’on utilise dans les secteurs de l’automobile, des camions et des autobus, ainsi que de l’aérospatiale et de la construction.

Pour Eric Toensmeier, le Canada pourrait potentiellement alimenter son industrie des bioproduits et biomatériaux grâce des matières premières issues des systèmes de production agroforestière. Il estime que le climat du Canada est propice à la culture des saules et des peupliers, deux types d’arbres dont le bois est intéressant pour les industries des matériaux et des matières premières chimiques.

Les produits agricoles peuvent parfois être utilisés comme source d’énergie. Jim Everson a ainsi décrit le potentiel du canola de devenir une source de biocarburant importante au Canada et une importante contribution aux objectifs des émissions de GES du secteur des transports. Cette perspective est selon lui encouragée par la mise en place du Règlement sur les combustibles propres qui prévoit d’exiger une réduction progressive de l’intensité en carbone des carburants commercialisés au Canada et une teneur minimum en biocarburants, de 5 % pour l’essence et 2 % pour le diesel. David Wiens, vice-président des Producteurs laitiers du Canada a également mentionné le potentiel des biodigesteurs qui permettent de convertir de la matière organique comme le fumier de bovins en source d’énergie alternative et pouvant réduire jusqu’à 60 % des émissions de méthane liées à l’entreposage du fumier. Toutefois, il rappelle que le coût de ces installations est très élevé et qu’un « financement du gouvernement pour les biodigesteurs, ainsi que pour d’autres formes d’énergie renouvelable » serait bienvenue.

Angela Bedard-Haughn a toutefois mis en garde contre l’effet du retrait des résidus de cultures des champs pour produire de l’énergie ce qui pourrait réduire la quantité de carbone retournant dans le sol et annuler les efforts de séquestration. Elle recommande aussi de mener des analyses complètes du cycle de vie afin de déterminer dans quelles conditions l’élimination des résidus de cultures est appropriée[26]. Pour les représentants d’Innovation Bio-industrielle Canada, certaines technologies évitent cet écueil. Par exemple la technologie conversion thermique permet de transformer les matières résiduelles en biocarbone, utilisé ensuite comme engrais et qui permet de limiter les pertes d’éléments nutritifs entrainés par la production agricole et de faire retourner le carbone dans le sol[27].

La valorisation des déchets alimentaires représente une autre piste de solution pour améliorer le bilan environnemental du secteur. Bruce Taylor, président de la firme d’ingénierie Enviro-Stewards, a rappelé qu’à l’échelle mondiale, près du tiers des aliments produits sont gaspillés et estime à 49 milliards de dollars par an, le coût au Canada de l’eau utilisée pour produire des aliments gaspillés. En outre, il a rappelé que les aliments jetés contribuent à émettre des GES sous forme de méthane lorsqu’ils se retrouvent en décharge. Il a salué le Défi de réduction du gaspillage alimentaire lancé par AAC, qui prévoyait de récompenser des projets de réduction du gaspillage comme un pas dans la bonne direction pour limiter ce problème.

Le secteur de l’élevage représente également un acteur important de la valorisation des déchets agricoles et alimentaires. Andrea Stroeve-Sawa a rappelé que près de 58 % des aliments sont perdus ou gaspillés chaque année et a expliqué que l’élevage bovin est particulièrement bien placé pour recycler les produits qui ne sont pas adaptés à la consommation humaine comme les « cultures endommagées par les intempéries ou les ravageurs, des sous-produits de fabrication » mais aussi les fruits et légumes qui ne respectent pas les normes d’apparence pour la vente au détail ».

Le Comité a aussi entendu Greg Wanger, fondateur et président-directeur général, Oberland Agriscience, une entreprise d’élevage de mouches noires du soldat, fondée en 2017 et basée en Nouvelle-Écosse, qui utilise les déchets et résidus organiques comme nourriture pour insectes. L’entreprise offre ainsi un débouché aux entreprises de la chaîne d’approvisionnement alimentaire soucieuses de remplir les objectifs en matière de gouvernance environnementale et sociale en réduisant leurs émissions de GES liées au gaspillage alimentaire. Il a expliqué comment son produit peut être utilisé comme aliment polyvalent pour le bétail, la volaille et l'aquaculture :

La mouche noire du soldat accumule naturellement de très grandes quantités de calcium. Elle en accumule des milliers de ppm — parties par million — dans son corps, qui devient alors une source de calcium biodisponible facilement absorbable pour la volaille ou le bétail. […] Des études réalisées dans l'industrie porcine ont aussi montré que l'ajout d'un complément de larves de mouches noires du soldat dans l'alimentation des porcs contribue à réduire leurs troubles intestinaux et en fait des porcs plus en santé et plus productifs à la ferme. Il en va de même dans l'industrie du saumon. Ici, en Nouvelle-Écosse, nous travaillons en étroite collaboration avec l'industrie de l'aquaculture. Les saumons sauvages passent beaucoup de temps à manger des insectes dans les rivières, alors leur métabolisme est déjà fait pour ce genre d'alimentation. L'ajout d'un supplément de larves de mouches noires du soldat est donc excellent pour eux.

Greg Wanger a exhorté le gouvernement à soutenir la collecte de données et la recherche dans le domaine de l’élevage des insectes et des utilisations des produits qui sont issus de cette industrie ainsi qu’à assouplir le cadre réglementaire encadrant la gestion des matières résiduelles qui sont utilisées comme matière première dans son industrie.

Les initiatives du gouvernement

La tarification de la pollution par le carbone

La mise en place d’un système de tarification de la pollution par le carbone représente l’un des efforts du gouvernement pour réduire les émissions de GES du Canada dans l’ensemble de l’économie et, notamment dans le secteur agricole. La Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre qui est entrée en vigueur le 21 juin 2018 prévoit une redevance fédérale sur les combustibles, qui s’applique au secteur agricole canadien dans ce qu’on appelle les « administrations assujetties au filet de sécurité fédéral[28] » et concerne 21 types de combustibles[29]. Les agriculteurs peuvent obtenir un certificat d’exemption pour se soustraire à l’application de la redevance sur les combustibles. Pour ce faire, ils doivent démontrer que le combustible est un « combustible agricole admissible » et qu’il est destiné à être utilisé exclusivement dans l’opération d’une « machinerie agricole admissible » tel que défini par la Loi. Une exemption particulière est également prévue pour les exploitants de serres[30].

Conscient que « de nombreux agriculteurs utilisent le gaz naturel et le propane dans le cadre de leurs activités », le gouvernement a annoncé dans le budget 2021 son intention de « retourner une partie des produits de la tarification de la pollution directement aux agriculteurs des administrations assujetties à un filet de sécurité (actuellement l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba et l’Ontario) ». Le 9 juin 2022, la Loi d’exécution de la mise à jour économique et budgétaire de 2021 a reçu la sanction royale et a fourni un nouveau crédit d'impôt remboursable aux agriculteurs. Outre cette loi, le projet de loi C‑234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre vise à élargir la définition de « machines agricoles admissibles » et de « carburant agricole admissible » afin d'ajouter le propane et le gaz naturel à la liste des carburants exemptés. Au moment de la publication de ce rapport, le Comité sénatorial de l’Agriculture et des Forêts avait complété l’examen de ce projet de loi.

Lorsqu'elle a témoigné au sujet du projet de loi C-206 Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre au cours de la 43e législature, Karen Ross, directrice de Fermiers pour la transition climatique, a expliqué qu'il était « essentiel de fixer un prix pour la pollution par le carbone pour respecter les engagements du Canada en matière de réduction des émissions » et d'encourager la transition vers des technologies de remplacement qui n'utilisent pas de combustibles fossiles. Keith Currie a également reconnu que la tarification du carbone constitue « un incitatif commercial à faire la transition vers des carburants moins polluants et à améliorer son efficacité énergétique ». Toutefois, il a ajouté – en écho à de nombreux témoins – que pour certaines pratiques agricoles il y a un manque d’alternatives à l’utilisation de combustibles vers lesquels les agriculteurs peuvent se tourner. C’est notamment le cas du séchage des grains qui requiert d’utiliser du gaz naturel ou du propane, deux carburants qui ne sont pas éligibles à une exemption[31]. Les représentants de l’Agriculture Carbon Alliance ont reconnu que certaines technologies existaient pour le séchage de grain notamment par l’emploi de la biomasse agricole, mais que celles-ci ne sont pas adaptées à la taille des exploitations de l’Ouest du Canada et du manque de main-d’œuvre pour les mettre en place[32]. Pour ces raisons, plusieurs témoins ont fait part de leur appui au projet de loi C-234 qui vise notamment à ajouter le gaz naturel et le propane à la liste des combustibles agricoles admissibles à une exemption à la redevance[33].

Alors que la redevance sur les combustibles cible uniquement les émissions de GES liées à l’utilisation de carburants, la majorité des émissions du secteur agricole sont liées à la fermentation entérique, aux sols agricoles et à la gestion des fumiers[34]. Pour valoriser les efforts réalisés afin de réduire les émissions, voire d’absorber des GES, les fonctionnaires du ministère de l’Environnement ont décrit le projet mené par leur ministère de mettre en place un système fédéral de compensation des émissions de GES[35] :

[Le système fédéral de compensation des émissions de gaz à effet de serre] vise à encourager l’adoption de mesures rentables de réduction des émissions de gaz à effet de serre provenant d’activités qui ne tombent pas sous le coup du système fédéral de tarification de la pollution par le carbone, ce qui s’entend de nombreuses activités du secteur agricole. Les crédits compensatoires peuvent offrir un incitatif financier pour une activité sous la forme d’un crédit qui peut être vendu afin de compenser une quantité équivalente d’émissions de gaz à effet de serre d’une autre source.

Le ministère doit encore définir des protocoles de compensation afin de déterminer la « démarche standard à suivre pour quantifier les réductions et les absorptions d’émissions pour les activités admissibles ». À ce stade, le ministère travaille activement à la mise en place d’un protocole pour les pratiques de gestion durable des terres agricoles qui permettent la captation du carbone organique dans le sol et envisage la possibilité de protocoles de compensation supplémentaires pour « ce qui est de la gestion des aliments du bétail, de la non-conversion des prairies, de la réduction des émissions d’oxyde d’azote provenant des engrais, de la digestion anaérobie et de la gestion du fumier du bétail[36] ». Le système viserait à reconnaître les « changements de comportement à l’avenir et non [à] constituer une récompense pour une action précoce[37] ».

De nombreux témoins ont salué cette initiative de valorisation des pratiques qui permettent de réduire des émissions ou d’absorber des GES, mais se sont montrés préoccupés par le fait que les agriculteurs qui ont été les premiers à adopter des technologies et des techniques de pointe pourraient être comparativement désavantagés par rapport aux autres. Pour Angela Bedard-Haughn, l’adoption généralisée du semi-direct dans l’Ouest du Canada a permis d’améliorer considérablement la santé des sols et de séquestrer du carbone depuis les années 1980 et il est selon elle à la fois nécessaire de reconnaître les efforts réalisés, mais aussi d’encourager le maintien de ces pratiques dans le temps sans quoi le carbone absorbé risque d’être relâché dans l’atmosphère. Jim Everson a ajouté que récompenser les producteurs proactifs peut les encourager à « passer à la prochaine étape » et à réaliser les investissements nécessaires pour adopter de nouvelles pratiques bénéfiques. Certains témoins ont suggéré au gouvernement fédéral de choisir une année de référence antérieure afin de tenir compte de l'adoption précoce de bonnes pratiques. Aldyen Donnelly, conseillère spéciale, Marchés du carbone chez Terramera, a rapporté que l’entreprise Nori – qui gère un système de crédits compensatoire privé aux États-Unis – a plutôt utilisé l’année de référence de 1999 pour mesurer l’évolution des stocks de carbone estimant qu’il était difficile d’obtenir les données nécessaires pour réaliser des estimations antérieures des stocks de carbone.

La réglementation des nouvelles technologies

Le Comité a entendu de nombreux témoignages affirmant que pour encourager l’adoption de pratiques qui réduisent les émissions de GES, le gouvernement devrait s’assurer que la réglementation leur permette d’adopter les technologies du futur.

À l’époque où le Comité a tenu la majorité de ces audiences, les témoins du secteur de l’élevage ont fréquemment évoqué le potentiel de certains additifs alimentaires pour réduire les émissions de méthane – un GES – chez les bovins. Le 3-nitrooxypropanol (3‑NOP) est une substance qui peut être utilisé dans ces additifs alimentaires et des études ont démontré que son utilisation pouvait réduire les émissions de méthane liées à la fermentation entérique[38]. Si de nombreux témoins se sont montrés intéressés par le potentiel de ces additifs, plusieurs d’entre eux ont estimé – à l’époque de leur comparution – qu’en raison de leurs caractéristiques techniques certaines de ces substances ne pourraient pas être autorisées comme additif alimentaire selon la réglementation canadienne, mais devraient passer par le processus d’approbation plus long et plus couteux des médicaments vétérinaires[39]. Aussi, Andrea Stroeve-Sawa, a proposé « d’ouvrir une voie réglementaire » pour permettre l’approbation de ces produits comme aliments et non comme médicaments. Le Comité reconnait avoir eu écho de mesures prises par Santé Canada et l’Agence canadienne d’inspection des aliments (CFIA) sur une base individuelle afin de permettre à des produits contenant du 3-NOP de suivre la voie réglementaire réservée aux additifs alimentaires pour animaux.

Les témoins ont aussi souligné la nécessité que les organismes réglementaires se tiennent à une approche fondée sur la science et qui favorise l’innovation notamment en matière de sélection végétale et d’autorisation des pesticides[40]. Ian Affleck, vice-président, Biotechnologie de CropLife Canada, a salué l’investissement de 50 millions de dollars que le gouvernement a consenti à l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) destiné à renforcer son mandat, mais il a indiqué souhaiter que ce financement se concentre sur la « transmission rapide des innovations aux agriculteurs » et à la prestation des programmes plutôt qu’à leur seule surveillance. L’ARLA est chargée de la réglementation des pesticides au Canada à travers leur homologation, réévaluation « à la suite d’une évaluation rigoureuse et fondée sur des données scientifiques afin de s'assurer que les risques qu'ils posent sont acceptables » et de faire la promotion de la lutte antiparasitaire durable[41].

Recommandation 7

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada aide le secteur de l’élevage à réduire les émissions de méthane et leur incidence sur les changements climatiques en créant une nouvelle voie réglementaire axée sur l’environnement et fondée sur la science pour l’approbation des produits agricoles et vétérinaires présentant des avantages environnementaux, tel que les additifs alimentaires à base de 3-NOP.

L’édition génique représente une autre innovation technologique qui appelle une modernisation réglementaire. Cette nouvelle technologie permet aux concepteurs de végétaux « d’apporter des modifications ciblées à l’ADN d’une plante » et contribue à accélérer les programmes d’amélioration végétale[42]. Entre le 19 mai 2021 et le 16 septembre 2021, l’ACIA a mené des consultations afin de déterminer la manière dont les produits de l’édition génétique devraient être traités sur le plan réglementaire[43]. En mai 2023, l’Agence a publié de nouvelles notes d’orientation pour les végétaux à caractères nouveaux selon le Règlement sur les semences. Pour Erin Gowriluk, il est important que les producteurs aient accès à cette technologie en particulier dans le contexte des changements climatiques afin de permettre le développement de semences conçues pour être résistantes aux sécheresses.

Le soutien à la recherche, l’innovation et l’accès et la collecte de données

AAC dispose d’un réseau de 20 centres de recherche situés partout au Canada et dont les chercheurs contribuent à « orienter la production agricole vers l’établissement d’agroécosystèmes et de paysages agricoles durables et résilients[44] ». Le Comité a pu avoir un aperçu des travaux de ces centres de recherche en recevant le témoignage de plusieurs scientifiques du ministère qui travaillent sur des sujets d’intérêt environnemental tel que l’étude de la stabilité du carbone dans le sol, les émissions d’oxyde nitreux, le cycle et la séquestration du carbone ou encore l’impact des pratiques de gestion bénéfiques du sol[45].

Judith Nyiraneza, chercheuse scientifique au ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, a notamment présenté le projet de laboratoire vivant de l’Île-du-Prince-Édouard dont elle est la cheffe de projet et qui vise à améliorer la qualité du sol et de l’eau. L’initiative des laboratoires vivants est une nouvelle approche de recherche du ministère qui sollicite l’implication « des agriculteurs, des scientifiques et d’autres collaborateurs afin d’élaborer conjointement et de mettre en pratique des pratiques et des technologies novatrices » qui visent à résoudre les problèmes environnementaux en mettant l’emphase sur l’expérience et les connaissances des agriculteurs. Des fonds de 185 millions de dollars sur 10 ans ont été alloués pour cette initiative et quatre laboratoires vivants ont été établis : au Canada Atlantique (Île-du-Prince-Édouard), dans l’est des Prairies (Manitoba), au Québec et en Ontario. Le 14 juillet 2022, le gouvernement a annoncé la création de neuf nouveaux laboratoires vivants en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle‑Écosse et à Terre-Neuve-et-Labrador[46].

Cette nouvelle initiative de soutien à l’innovation a été bien accueillie par les principaux représentants du secteur qui saluent cette approche qui prend en compte les enjeux spécifiques de chaque région. Les représentants de la Fédération canadienne de l’agriculture et de l’Agriculture Carbon Alliance ont tous deux recommandé d’étendre cette initiative davantage dans l’Ouest canadien afin de traiter les problématiques qui surviennent en raison des épisodes de conditions climatiques extrêmes comme les sécheresses et les inondations que cette région connait maintenant fréquemment[47].

D’autres témoins ont mis davantage l’accent sur le financement fourni par le fédéral aux programmes de recherche et d’innovation. Andrea Brocklebank a estimé que le financement du gouvernement fédéral ne suit pas la demande croissante pour de nouveaux programmes de recherche sur la durabilité du secteur agricole et rapporte que le ratio de financement entre le gouvernement et l’industrie était globalement à la baisse. Elle suggère que le « financement institutionnel de base pour l’agriculture [soit] rajeunit afin d’embaucher des chercheurs et de soutenir l’infrastructure ». La nécessité d’investir dans des programmes de vulgarisation qui permette de transmettre les nouvelles connaissances aux agriculteurs a également été soulevée[48].

Recommandation 8

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada soutienne mieux les recherches menées par des Autochtones pour promouvoir la réconciliation et l’application des systèmes de connaissances autochtones à une agriculture durable.

Les autres initiatives du gouvernement fédéral

Les témoins entendus par le Comité ont globalement fait part de l’importance des programmes gouvernementaux pour soutenir l’adoption et le maintien de pratique durables.

Le Fonds d’action à la ferme pour le climat a été mis en place en 2021 afin d’encourager les producteurs à adopter des pratiques de gestion bénéfiques visant à réduire leurs émissions de GES et favoriser la séquestration du carbone. Douze organisations ont été choisies dans le cadre ce programme afin de redistribuer les fonds pour permettre aux agriculteurs d’adopter ces pratiques. Le programme suit une approche flexible dans le cadre de laquelle les organisations ont été chargées de soumettre un plan de mise en œuvre adapté à leur région et permettant d'atteindre au mieux les résultats escomptés. Le fonds fait partie de l’initiative gouvernementale Solutions agricoles pour le climat qui comprend également le Fonds des solutions climatiques axées sur la nature d’Environnement et Changement climatique Canada – qui vise à la restauration et à la conservation des terres humides, des tourbières, des prairies et des forêts afin de piéger et de stocker le carbone – et le programme de plantation de deux milliards d’arbres de Ressources naturelles Canada.

Plusieurs des organisations qui sont venues comparaître devant le Comité sont des récipiendaires du Fonds. Par exemple, l’Union des producteurs agricoles a reçu des fonds afin de « rétribuer les agriculteurs du Québec qui adoptent des pratiques de gestion bénéfiques en ce qui concerne les cultures de couverture et la gestion de l’azote » et le Conseil canadien du canola a mené un projet d’utilisation ciblée de l’azote dans les Prairies[49]. Rosalie Gillis-Madden, gestionnaire technique, Fonds d’action à la ferme pour le climat, Perennia Food and Agriculture, qui mène un projet du Fonds en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve-et-Labrador a expliqué que le programme générait un grand intérêt de la part des producteurs, mais a expliqué que ceux qui avaient adopté de telles pratiques au préalable montraient parfois de la réticence à participer :

Beaucoup d’agriculteurs ont déjà adopté ces pratiques exemplaires de gestion, et le financement du Fonds d’action à la ferme pour le climat est uniquement destiné à ceux qui commencent à adopter ces meilleures [exemples] de gestion. Donc, on observe une certaine hésitation chez les agriculteurs qui le font déjà, car ils ont l’impression d’être un peu laissés pour compte pour ce programme de financement, mais cela suscite certainement un grand intérêt. Chez Perennia, nous en faisons la promotion depuis des années. Nous sommes très heureux de voir que ce financement favorise l’adoption de certaines de ces pratiques.

Mike Ammeter a évoqué l’importance des programmes de gestion des risques de l’entreprise agricole tel qu’Agri-stabilité ou Agri-investissement afin d’assurer la stabilité économique des exploitations agricoles qui permettra, selon lui, aux agriculteurs de mener par eux-mêmes les investissements dans les nouvelles technologies ou les équipements qui amélioreront la durabilité de leurs opérations. Faisant le parallèle avec le système d’écoconformité mis en place dans l’Union européenne où l’accès à certaines aides est assujettis à la mise en place de mesures environnementales, certains témoins ont indiqué ne pas souhaiter voir un tel modèle reproduit au Canada. La représentante des Producteurs de grains du Canada a justifié cette position en expliquant que les agriculteurs font face à des risques sans précédent et que leur accès à ces programmes est essentiel. De sa part, le représentant de la Canadian Cattlemen’s Association estime que cela pourrait pousser les agriculteurs à gérer leurs exploitations en fonction des programmes, plutôt qu’en visant à optimiser leurs systèmes de production[50].

Recommandation 9

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada reconnaisse les bons gestes environnementaux en agriculture:

  • en travaillant avec l'industrie et les chercheurs pour approuver une méthode d'évaluation de l'apport environnemental d'une innovation qui accorde une juste valeur aux agriculteurs qui mettent en œuvre ces innovations;
  • en soutenant la croissance et les investissements dans les secteurs de l'agriculture et de l'agroalimentaire des protéines à base de plantes;
  • en donnant accès à des financements aux producteurs de façon décentralisée et pas nécessairement dans le cadre d’un programme fixé par le gouvernement, les entrepreneurs étant les mieux placés pour décider du bon moment pour les investissements;
  • en s’assurant d’apporter une reconnaissance et une rétribution des gestes positifs posés pour l’environnement dans le passé.

Conclusion

L'agriculture canadienne a une longue tradition de gérance de l'environnement et les agriculteurs ont constamment cherché des moyens innovants de réduire leur impact sur l'environnement tout en augmentant leur production. Le gouvernement fédéral peut prendre plusieurs initiatives pour aider les agriculteurs à exploiter pleinement leur potentiel d'innovation et à préserver les ressources naturelles pour les générations futures. En coopération avec les acteurs concernés, les provinces et les territoires, il peut fournir un cadre national pour la collecte de données, permettant, par exemple, aux agriculteurs d'identifier les possibilités de préserver les prairies et les zones humides dans leurs exploitations. Le gouvernement fédéral peut promouvoir les efforts de réduction des émissions dans l'agriculture, tels que le programme de gestion des nutriments 4B et d'autres méthodes d'application d'engrais, et il peut identifier et encourager les pratiques qui augmentent la séquestration du carbone dans les sols agricoles. Le Comité a également entendu des témoins qui ont identifié de nouvelles technologies et méthodes disponibles dans d'autres pays qui réduisent les émissions à la ferme, mais qui ne s'intègrent pas nécessairement dans les voies existantes d'approbation réglementaire du Canada. Le gouvernement fédéral devrait examiner la façon dont il évalue ces produits afin de s'assurer que les agriculteurs canadiens continuent d'être à la pointe de la production alimentaire durable dans le monde.

La mortalité des abeilles

Introduction

Le 5 octobre 2022, le Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire de la Chambre des communes a adopté une motion demandant que le Comité « réserve deux des séances prévues pour l’étude sur l’apport environnemental du secteur agricole pour traiter exclusivement du problème de mortalité des abeilles, en identifier les causes et faire des recommandations pertinentes au gouvernement […] ». Lors des trois réunions tenues sur cette question entre le 24 avril et le 31 mai 2023, le Comité a entendu les témoignages de responsables du gouvernement du Canada, de représentants d’organismes apicoles canadiens et américains, d’apiculteurs et d’un représentant d’un organisme à vocation environnementale. La présente annexe renferme les observations et les recommandations du Comité au sujet des témoignages reçus au cours de ces réunions.

Les abeilles mellifères en agriculture au Canada

Les abeilles mellifères et autres pollinisateurs jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes agricoles. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture estime que la valeur mondiale des cultures vivrières qui dépendent de la pollinisation correspond à au moins 235 milliards de dollars américains par année[51]. Au Canada, les abeilles jouent un rôle direct dans la production du miel, dont la valeur naturelle a atteint 253 millions de dollars en 2022[52], et elles fournissent également jusqu’à 90 % de la valeur de la récolte de produits agricoles comme les baies, les fruits de verger et les graines de canola hybrides grâce à la pollinisation. Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) estime que la pollinisation des abeilles mellifères génère une valeur de récolte supplémentaire de 7 milliards de dollars par année pour ces produits[53].

L’abeille mellifère a été introduite en Amérique du Nord par les colons européens au XVIIe siècle pour rendre plus efficaces les méthodes de production agricole couramment utilisées. Dans les régions où les hivers sont froids, comme au Canada, les apiculteurs assurent la survie de leurs ruches en recourant à l’isolation et à d’autres méthodes de gestion. Il est néanmoins fréquent que les abeilles meurent pendant cette période. Par exemple, avant 1987, un taux de mortalité de 10 % était couramment signalé en Amérique du Nord, l’apiculteur provincial de l’Ontario précisant que le taux maximal acceptable de pertes hivernales est généralement établi à 15 % au Canada[54].

Le taux de mortalité des abeilles est cependant en hausse depuis les dernières décennies. Au cours de l’hiver 2007–2008, les apiculteurs canadiens ont commencé à déclarer des taux de mortalité en hiver aussi élevés que 35 %. Cette tendance s’est poursuivie ces dernières années, alors que les apiculteurs de certaines régions du Canada ont observé des taux de mortalité en hiver supérieurs à 50 % dans leurs colonies. Le taux de mortalité des abeilles a été exceptionnellement élevé au cours de l’hiver 2021–2022 au Canada. Tom Rosser, sous‑ministre adjoint, Direction générale des services à l’industrie et aux marchés, ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, a qualifié l’hiver 2021–2022 d’« année exceptionnellement mauvaise », mentionnant que jamais des taux de mortalité aussi élevés n’ont été observés dans les colonies d’abeilles mellifères des apiculteurs canadiens, selon les données consignées. L’Association canadienne des professionnels de l’apiculture (ACPA) a fait état d’un taux de mortalité des abeilles à l’échelle nationale de 45,5 % pendant l’hiver 2021–2022, ainsi que de pertes à l’échelle provinciale allant de 15,3 % en Nouvelle-Écosse à 57,2 % au Manitoba[55].

Les scientifiques attribuent généralement ces taux de mortalité élevés à une combinaison de plusieurs facteurs, notamment les parasites et les organismes nuisibles, les pratiques de gestion apicole, les températures anormales et l’utilisation de néonicotinoïdes, une catégorie de pesticides agricoles pouvant nuire aux abeilles. Selon une enquête menée par l’ACPA en 2022 auprès des apiculteurs canadiens, les causes de mortalité des abeilles les plus fréquemment mentionnées étaient des mesures de contrôles inefficaces contre le varroa et d’autres parasites, des reines de mauvaise qualité et la faiblesse des colonies à l’automne[56].

Mesures fédérales pour renforcer les colonies d’abeilles mellifères au Canada

Contrôles à l’importation

Pour favoriser le maintien et la reconstruction de leurs colonies, les apiculteurs canadiens importent souvent des abeilles au printemps afin de remplacer celles qui sont mortes pendant l’hiver. L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) est chargée de la réglementation de l’importation et de l’exportation des animaux, y compris les abeilles mellifères. Parthi Muthukumarasamy, directeur exécutif, Direction des programmes internationaux, Agence canadienne d’inspection des aliments, a indiqué que l’ACIA effectue des « évaluations des risques fondées sur des données scientifiques » pour déterminer si les abeilles importées d’autres pays présentent un niveau de risque acceptable pour la santé des abeilles canadiennes.

L’ACIA divise les importations d’abeilles mellifères en deux catégories : les reines, dont les œufs donneront des ouvrières, et les abeilles en paquets, formées de milliers d’ouvrières et d’une reine fécondée. M. Muthukumarasamy a précisé que, si les reines peuvent être inspectées individuellement pour déterminer leur état de santé et détecter la présence de parasites, les abeilles en paquets, formées de 8 000 à 12 000 abeilles mellifères, ne peuvent faire l’objet d’un examen semblable au même taux d’exactitude. Par conséquent, pour les apiculteurs canadiens, les options d’importation d’abeilles en paquets sont plus limitées. À l’heure actuelle, l’ACIA autorise l’importation de reines de l’Australie, du Chili, du Danemark, de l’Italie, de Malte, de la Nouvelle‑Zélande, de l’Ukraine ainsi que des États de la Californie et d’Hawaï aux États‑Unis, mais n’autorise l’importation de paquets d’abeilles mellifères que de l’Australie, du Chili, de l’Italie, de la Nouvelle‑Zélande et de l’Ukraine.

Depuis 1987, le Canada interdit l’importation de paquets d’abeilles des États‑Unis, après avoir détecté la présence du varroa dans des colonies d’abeilles aux É.‑U. L’ACIA a reconduit l’interdiction dans une décision de 2013, étant d’avis que ces importations présentaient toujours un risque élevé de transmission de parasites et d’organismes pathogènes.

Lors de leur parution devant le Comité, plusieurs organisations apicoles canadiennes ont prôné le relâchement de ces restrictions afin de leur permettre d’acheter des abeilles de remplacement provenant de certaines régions des États‑Unis, notamment la Californie du nord[57]. Selon ces organisations, en plus d’être plus rentables que les abeilles importées de l’Australie, de la Nouvelle‑Zélande et de pays européens, les abeilles des États‑Unis seraient mieux adaptées aux saisons de croissance du Canada. John C. Hamilton, gestionnaire des ruchers, Division des ruchers de la Nouvelle-Écosse, Oxford Frozen Foods Ltd., a précisé que les paquets d’abeilles de la Californie seraient mieux adaptés à la production canadienne que celles provenant de l’hémisphère sud :

Les abeilles qui proviennent de la Californie sont des abeilles de printemps. La pollinisation des amandiers commence le jour de la Saint-Valentin. Un mois plus tard, c’est terminé et il n’y a plus rien à partir de ce moment‑là jusqu’en juin. Il y a de petites cultures de pollinisation dans l’ensemble des États-Unis, mais les grandes récoltes de miel proviennent de la luzerne et du trèfle plus tard dans l’année. À cette période de l’année, les abeilles sont largement excédentaires, car il s’agit de grandes et fortes colonies que l’on peut secouer. C’est vraiment très efficace. Ce sont des abeilles de printemps. Ce ne sont pas des abeilles qui entrent en automne ou en hiver en Australie et en Nouvelle-Zélande. Ce sont des abeilles locales.

Certains témoins représentant des organisations apicoles canadiennes et américaines ont également dit être d’avis que l’évaluation de 2013 de l’ACIA ne reflète plus correctement le risque lié à l’importation d’abeilles des États‑Unis[58]. Ils ont fait observer que nombre des risques décrits dans l’évaluation, dont le varroa résistant à l’amitraze, la loque américaine et le petit coléoptère des ruches sont déjà présents au Canada. De même, alors que l’évaluation de 2013 fait état de préoccupations concernant de soi-disant abeilles « africanisées » ayant des gènes plus agressifs, des témoins ont expliqué que les abeilles ayant ces caractéristiques ne pourraient survivre à l’hiver canadien et que les avancées en matière de dépistage génétique permettraient d’éliminer ces abeilles des paquets d’abeilles mellifères destinés au Canada.

M. Muthukumarasamy a précisé qu’en 2022, l’ACIA a demandé aux intervenants de lui présenter de nouvelles données scientifiques sur la santé des abeilles mellifères aux États‑Unis pour l’aider à déterminer si une nouvelle évaluation des risques était nécessaire. Il a indiqué que l’ACIA déterminerait bientôt s’il y a suffisamment de nouvelles données pour procéder à une nouvelle évaluation. Au mois de juillet 2023, l’ACIA a communiqué aux intervenants de l’industrie que l’agence procédera à une nouvelle évaluation des risques qui devrait s’achever au début de l’année 2024[59].

Étant donné que les abeilles mellifères traversent couramment la frontière canado‑américaine à la recherche de sources de butinage, plusieurs témoins ont recommandé que les deux pays collaborent sur la question de la santé des abeilles. Ron Greidanus, délégué, Conseil canadien du miel, Alberta Beekeepers Commission, a recommandé que le Canada et les États‑Unis travaillent de concert à l’élaboration d’une stratégie apicole nord-américaine afin d’établir une approche commune en matière d’organismes nuisibles et de parasites.

Recommandation 10

Le Comité recommande que l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA), dans le cadre de son évaluation des risques liés à l’importation d’abeilles en provenance des États-Unis, examine la possibilité d’autoriser les importations provenant de territoires plus petits (par exemple des états, municipalités, ou des entreprises individuelles), notamment ceux situés dans des zones sûres et dans les territoires nordiques des États-Unis et qui se conforment aux exigences canadiennes, tout en tenant compte des préoccupations des apiculteurs canadiens liées à aux abeilles à la génétique dite « africanisée ». Dans le cas où l’ACIA refuserait de ne pas accepter de nouvelles importations en provenance des États-Unis, le Comité recommande que l’ACIA explique clairement, les causes de refus et les correctifs qui seraient nécessaires de la part des apiculteurs Américains pour permettre de réduire les risques associés à leurs importations.

Production nationale

Des témoins ont aussi encouragé les efforts visant à favoriser l’autosuffisance apicole du Canada et à réduire sa dépendance à l’importation. Jake Berg, président, Conseil canadien du miel, a indiqué que l’un des problèmes de la production nationale de reines est un problème de synchronisation : la plupart des apiculteurs ont besoin de reines plus tôt qu’elles peuvent être fournies au Canada. M. Berg a néanmoins recommandé l’augmentation de la recherche sur la production hivernale de reines afin d’aider à combler cet écart et, surtout, pour remédier aux pénuries locales lorsque les pertes dans une région du pays sont plus importantes que dans d’autres.

Maggie Lamothe Boudreau, vice‑présidente, Apiculteurs et Apicultrices du Québec, a dit qu’elle et d’autres apiculteurs du Québec menaient des recherches sur les façons de préserver les réserves de reines pendant l’hiver afin d’aider à la reconstitution des colonies au printemps. Elle a également recommandé que des efforts soient faits pour simplifier les échanges de reines et de « nucléi », c’est‑à‑dire de petites colonies formées d’une reine et d’ouvrières, au Canada afin de favoriser l’autosuffisance.

Contrôle et surveillance des maladies

Parasites et organismes pathogènes

Les colonies d’abeilles canadiennes sont vulnérables à plusieurs parasites et organismes pathogènes pouvant propager des maladies, rendre les abeilles moins productives et accroître leur taux de mortalité. Plusieurs témoins ont souligné la menace que représentent actuellement les maladies bactériennes pathogènes associées à l’acarien Varroa destructor, aussi appelé varroa, ainsi qu’à la loque américaine et à la loque européenne. Les témoins ont aussi exprimé des préoccupations à l’égard des nouvelles menaces. Par exemple, Daniel Winter, président, American Beekeeping Federation, a encouragé le Canada à maintenir une approche proactive à l’égard de l’acarien Tropilaelaps, un parasite qui est présent dans plusieurs pays asiatiques et qui se reproduit trois fois plus rapidement que le varroa.

Varroa

Selon l’enquête de 2022 de l’ACPA mentionnée plus haut, les apiculteurs canadiens ont dit de l’acarien varroa qu’il était la plus importante source de mortalité des abeilles mellifères dans leurs colonies pendant l’hiver. Le varroa est apparu dans les colonies d’abeilles en Asie, avant de migrer en Amérique du Nord dans les années 1980. Agissant comme un parasite, l’acarien affaiblit les colonies d’abeilles mellifères en causant des lésions aux abeilles et en transmettant des organismes pathogènes dans les colonies. Ces dommages peuvent être particulièrement graves en hiver, lorsque les abeilles vivent en étroite proximité afin de maintenir une température constante et qu’elles sont incapables de quitter la ruche, permettant ainsi la propagation générale des parasites et des organismes pathogènes.

Le principal outil qu’emploient les apiculteurs canadiens pour protéger leurs colonies contre le varroa est l’apivar, un acaricide dont la substance chimique active est l’amitraze. Plusieurs témoins ont toutefois dit craindre que l’acarien varroa puisse bientôt développer une résistance à cette substance et qu’aucun produit de rechange ne soit disponible sur le marché canadien[60]. Ernesto Guzman, professeur, Association canadienne des professionnels de l’apiculture, bien qu’il ait reconnu que des cas de résistance à l’amitraze aient été signalés au Canada, a précisé que son organisation n’avait pas de « preuve concrète » de ce phénomène et a recommandé que d’autres tests soient effectués pour déterminer les taux de résistance dans différentes régions du pays.

Certains apiculteurs ont recommandé que des alternatives à l’amitraze soient élaborées et rapidement approuvées par les organismes de réglementation. Plusieurs témoins ont qualifié de prometteuses certaines nouvelles préparations d’acide oxalique, tout en précisant que ces nouveaux produits n’étaient pas encore disponibles au Canada. Frédéric Bissonnette, directeur exécutif par intérim, Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA), ministère de la Santé, a déclaré que l’ARLA, qui supervise l’homologation et l’utilisation des produits antiparasitaires au Canada, est « au courant » de la résistance à l’amitraze dans les colonies d’abeilles canadiennes, mais qu’elle n’évalue pas de nouveaux produits de lutte contre le varroa à l’heure actuelle.

Outre les produits antiparasitaires, Jean-François Doyon, président, Les Ruchers D.J‑F. Inc., a souligné le rôle que peut jouer la technologie pour aider les apiculteurs à assurer la santé des colonies. M. Doyon a indiqué que son entreprise utilise une application appelée Nectar pour suivre le déplacement des ruches, la provenance des reines et l’évolution des populations de varroa, ce qui lui permet de mieux cerner les causes de mortalité hivernale. Il a toutefois reconnu qu’il peut être difficile pour les exploitations plus petites de mettre en œuvre ce type de technologie et, à l’instar d’autres témoins, a recommandé que le gouvernement déploie des équipes de « transfert technologique » pour aider les petits apiculteurs à apprendre comment utiliser les technologies novatrices dans leur travail.

Recommandation 11

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada, en collaboration avec le secteur apicole, les provinces et les territoires :

  • investisse plus dans le secteur de la recherche en apiculture dans le but de rendre le Canada autosuffisant dans la production et la sélection de reines et d’abeilles;
  • étudie l’existence et l’étendue d’éventuelles relations de cause à effet entre la dégradation des sols, le changement climatique et l’augmentation des concentrations de parasites d’espèces désirées comme les abeilles domestiques, y compris, mais sans s’y limiter, le varroa, les coléoptères des ruches et les fausses-teignes de la cire;
  • utilise des technologies de pointe pour protéger et favoriser la reproduction des pollinisateurs;
  • supporte un plus grand maillage entre les centres de recherche et développement des gouvernements, des universités et de l’industrie en ce qui concerne toutes les causes de mortalité des insectes pollinisateurs.

Conservation de l’habitat et biodiversité

Pesticides

Les agriculteurs utilisent des pesticides pour lutter contre les organismes vivants qui nuisent à leurs cultures, y compris certains types d’insectes. Ces substances peuvent cependant avoir des effets non voulus sur des organismes; il a été démontré qu’elles ont un effet aigu (mort immédiate) et chronique (à long terme) sur les larves d’abeilles et les abeilles adultes.

Comme l’a dit M. Bissonnette dans son témoignage, au printemps et à l’été 2012, l’ARLA a reçu des signalements indiquant des taux de mortalité anormalement élevés, des pertes de colonies et des comportements anormaux parmi les populations d’abeilles mellifères dans des régions maïsicoles en Ontario et au Québec.

Sur les cadavres d’abeilles prélevés dans ces régions et analysés par l’ARLA, 70 % présentaient des résidus de néonicotinoïdes (aussi appelés « néonics »), de clothianidine et de thiaméthoxame, de soi-disant « pesticides systémiques » utilisés pour traiter les semences de maïs et de soya. Ces pesticides systémiques, appliqués sur les semences mises en terre, sont conçus pour diffuser dans la plante à mesure qu’elle pousse, offrant ainsi une protection contre les organismes nuisibles issus du sol et contre ceux qui attaquent le plant en début de saison. La substance diffusant dans la plante à mesure qu’elle pousse, elle peut être présente sur la surface de la plante, ainsi que dans son nectar et son pollen, lesquels constituent une source essentielle de nourriture pour les abeilles. Le sol et l’eau à proximité peuvent aussi contenir des traces de cette substance chimique si celle-ci est transportée par la poussière produite au moment de l’ensemencement. Par ailleurs, les abeilles peuvent être accidentellement aspergées de pesticide au moment de l’application.

En réponse à ces constatations, l’ARLA a publié en 2014 une série de meilleures pratiques pour la protection des pollinisateurs au moment de planter des semences traitées avec des néonics. L’ARLA affirmait qu’entre 2014 et 2016, les « incidents impliquant des abeilles ont diminué de 70 à 80 %[61] ». En 2019, l’ARLA a réévalué l’utilisation de trois pesticides (clothianidine, imidaclopride et thiaméthoxame), dans le but de déterminer leur risque pour la santé des pollinisateurs. À la lumière de cette réévaluation, l’ARLA a interdit en milieu agricole certains usages de ces pesticides dont on a déterminé qu’ils étaient nuisibles aux abeilles.

Lisa Gue, responsable, Politique nationale, Fondation David Suzuki, a indiqué que l’utilisation des néonics est encore répandue dans le traitement des semences à l’extérieur du Québec, où leur utilisation a été interdite à moins d’avoir été approuvée par un agronome agréé[62]. Mme Gue a souligné l’effet qu’ont selon elle les pesticides et les agents stressants sur la santé des pollinisateurs indigènes et sauvages au Canada, qui, dit-elle, sont souvent ignorés :

En plus des abeilles domestiques, qui ont fait l’objet d'une grande partie des témoignages précédents, il y a plus de 800 espèces d’abeilles indigènes au Canada qui jouent également un rôle important dans la pollinisation. Si nous n’entendons pas sonner l’alarme pour les abeilles indigènes, c’est en grande partie parce qu’il n’y a personne pour le faire. Bien entendu, les apiculteurs surveillent activement les populations d’abeilles domestiques, alors que, comme l’a dit le témoin lors de la ronde précédente, les populations d’abeilles sauvages sont non seulement plus difficiles à suivre, mais il y a aussi moins de ressources disponibles pour le faire, même si nous savons que bon nombre de ces populations sont également en déclin.

Recommandation 12

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada soutienne la recherche et le développement de nouveaux biopesticides.

Recommandation 13

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada veille à ce que l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire dispose des ressources nécessaires pour remplir son mandat et mène une étude approfondie sur les pesticides, notamment les néonicotinoïdes, afin d’examiner leur impact et leur effet cumulatif sur les humains, les abeilles et les pollinisateurs indigènes ainsi que sur leur impact économique sur l’industrie agricole.

Plantes apicoles

Des témoins ont insisté sur l’importance de l’accès des abeilles mellifères et des autres pollinisateurs à des sources de butinage diversifiées. Mme Lamothe Boudreau a souligné l’importance des diverses variétés de cultures pour la santé des abeilles mellifères :

[N]ous devons avoir accès à de la biodiversité. Le pollen est extrêmement important pour les abeilles. Il leur permet de nourrir leur couvain et de leur fournir tous les acides aminés nécessaires à leur alimentation. Une déficience en pollen de quelques semaines affecte non seulement la génération d’abeilles qui subit cette déficience, mais aussi les trois à quatre générations subséquentes. C’est comme si nous et nos enfants mangions du spaghetti pendant trois semaines; nous manquerions de vitamines et nos enfants n’auraient pas toutes celles qui sont nécessaires à leur croissance.

Deux témoins ont fait mention de la stratégie pour la biodiversité [en anglais] de l’Union européenne, qui offre aux agriculteurs des mesures d’incitation financières pour les encourager à protéger les haies, les zones riveraines et les habitats naturels pour les pollinisateurs sauvages, la qualifiant d’initiative exemplaire en la matière[63]. M. Doyon, a recommandé aux agriculteurs d’aménager des bandes riveraines, de semer des plantes mellifères et d’arrêter de tondre les bords de routes et de semer plutôt des fleurs mellifères pour offrir aux abeilles des sources de butinage de grande qualité. Or, le Comité note que certaines fermes canadiennes font face à des difficultés qui les empêchent d’adopter ces pratiques. Certaines fermes ontariennes, par exemple, ont été touchées par le phragmite envahissant, une mauvaise herbe vivace qui dégagent des toxines dans le sol qui nuisent à la croissance des plantes environnantes et les font mourir.[64]

Recommandation 14

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada travaille avec les provinces et les territoires afin d’élaborer une stratégie pour utiliser et diversifier les infrastructures naturelles, notamment les plantes fourragères sauvages et protéger les pollinisateurs naturels sur les terres agricoles.

Conclusion

La dernière décennie a été difficile pour les apiculteurs canadiens. Le Comité a entendu des témoignages indiquant que les niveaux élevés et persistants de mortalité des abeilles ont conduit certains apiculteurs à se demander s'ils pouvaient continuer à exercer leur activité, mettant ainsi en péril la future génération de producteurs et les services de pollinisation essentiels qu'ils fournissent aux agriculteurs. Pour répondre aux préoccupations du secteur, le gouvernement fédéral doit veiller à ce que les apiculteurs canadiens puissent avoir accès à des importations sûres et abordables, notamment en provenance de zones sûres aux États-Unis. Le gouvernement fédéral devrait également veiller à ce que l'ARLA dispose des ressources nécessaires pour remplir son mandat, à savoir fournir aux producteurs un accès à des produits antiparasitaires efficaces en temps opportun et veiller à ce que ces produits n'aient pas d'effets indésirables sur les pollinisateurs et d'autres parties de l'écosystème. Le gouvernement fédéral devrait également examiner comment les terres agricoles peuvent offrir aux pollinisateurs un fourrage plus diversifié.


[1]              Chambre des Communes, Comité de l’agriculture et de l’agroalimentaire (AGRI), Procès-verbal, 4 février 2021.

[2]              AGRI, Procès-verbal, 31 janvier 2022.

[3]              AGRI, Procès-verbal, 5 octobre 2022.

[4]              AGRI, Témoignages, Louis-Pierre Comeau (chercheur scientifique, Paysages et carbone dans le sol, ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire [AAC]); et Ed Gregorich (chercheur scientifique, Division agri-environnement, AAC).

[5]              Institut canadien des politiques agroalimentaires, Séquestration du carbone dans les sols agricoles : atteindre les cibles canadiennes en matière de changements climatiques, 21 avril 2022.

[6]              AGRI, Témoignages, Angela Bedard-Haughn (doyenne et professeure, College of Agriculture and Bioresources, University of Saskatchewan, à titre personnel).

[7]              AGRI, Témoignages, Jean Caron (agronome, professeur, chaire de recherche industrielle du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada en conservation et en restauration des sols organiques cultivés, Université Laval, Département des sols et de génie, à titre personnel).

[8]              Ibid.

[9]              Ibid.

[10]            AGRI, Témoignages, Susie Miller (directrice exécutive, Canadian Roundtable for Sustainable Crops).

[11]            AGRI, Témoignages, Ed Gregorich (AAC); et Duane Thompson (président, Comité de l’environnement, Canadian Cattlemen’s Association).

[12]            AGRI, Témoignages, Duane Thompson (Canadian Cattlemen’s Association).

[13]            AGRI, Témoignages, Eric Toensmeier (directeur, Perennial Agriculture Institute).

[14]            AGRI, Témoignages, Reynald Lemke (chercheur scientifique, Santé environnementale, AAC).

[15]            AGRI, Témoignages, Darrin Qualman (directeur de la Politique et de l’Action en matière de crise climatique, Union Nationale des Fermiers).

[16]            Ibid.

[17]            Gouvernement du Canada, Gaz à effet de serre et agriculture.

[18]            AGRI, Témoignages, Matt Parry (directeur général, Direction de l’élaboration et de l’analyse des politiques, Direction générale des politiques stratégiques, AAC).

[19]            AGRI, Témoignages, Wade Barnes (directeur général, Farmers Edge Inc.).

[20]            Gouvernement du Canada, Cible de réduction des émissions attribuables aux engrais du Canada.

[21]            AGRI, Témoignages, Clyde Graham (vice-président exécutif, Fertilisants Canada); et Candace Laing (vice-présidente, Développement durable et relations avec les parties prenantes, Nutrien Ltd.).

[22]            Gouvernement du Canada, Agriculture de précision à plus petite échelle.

[23]            Keith Currie est aujourd'hui président de la Fédération canadienne de l'agriculture. Conformément au procès-verbal, il est mentionné avec le titre qu'il portait au moment de son témoignage devant le Comité.

[24]            AGRI, Témoignages, A.J. (Sandy) Marshall (directeur exécutif, Innovation Bio-industrielle Canada).

[25]            Ibid.

[26]            AGRI, Témoignages, Angela Bedard-Haughn (À titre personnel).

[27]            AGRI, Témoignages, A.J. (Sandy) Marshall (Innovation Bio-industrielle Canada).

[28]            Le régime fédéral de tarification de la pollution par le carbone s’applique automatiquement aux provinces et aux territoires dépourvus d’un régime de tarification du carbone qui répond aux normes nationales minimales de rigueur du gouvernement fédéral.

[29]            Agence du revenu du Canada, Taux de la redevance sur les combustibles.

[30]            Gouvernement du Canada, Allègement de la redevance sur les combustibles.

[31]            AGRI, Témoignages, Keith Currie (premier vice-président, Fédération canadienne de l’agriculture); et Erin Gowriluk (directrice générale, Producteurs de grains du Canada).

[32]            AGRI, Témoignages, Scott Ross (coprésident, Agriculture Carbon Alliance); et Dave Carey (coprésident, Agriculture Carbon Alliance).

[33]            AGRI, Témoignages, Scott Ross (Agriculture Carbon Alliance); Mike Ammeter (président, Canadian Canola Growers Association); et Erin Gowriluk (Producteurs de grains du Canada).

[34]            Environnement et Changement Climatiques Canada, « Chapitre 5 : Agriculture », Rapport d’inventaire national : sources et puits de gaz à effet de serre au Canada 1990-2021, 2023.

[35]            AGRI, Témoignages, John Moffet (sous-ministre adjoint, Direction générale de la protection de l’environnement, ministère de l’Environnement).

[36]            Ibid.

[37]            AGRI, Témoignages, John Moffet (ministère de l’Environnement).

[39]            AGRI, Témoignages, Frank Annau (directeur, Politiques environnementales et scientifiques, Fédération canadienne de l’agriculture); Andrea Stroeve-Sawa (directrice du conseil, Canadian Roundtable for Sustainable Beef); et Duane Thompson (Canadian Cattlemen’s Association).

[40]            AGRI, Témoignages, Mike Ammeter (Canadian Canola Growers Association); et Ian Affleck (vice-président, Biotechnologie, CropLife Canada).

[41]            Gouvernement du Canada, Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire.

[44]            AGRI, Témoignages, Gilles Saindon (sous-ministre adjoint, Direction générale des sciences et de la technologie, AAC).

[45]            AGRI, Témoignages, Louis-Pierre Comeau (AAC); Reynald Lemke (AAC); Ed Gregorich (AAC); et Judith Nyiraneza (chercheuse scientifique, Gestion de la nutrition des plantes, AAC).

[47]            AGRI, Témoignages, Keith Currie (Fédération canadienne de l’agriculture); et Scott Ross (Agriculture Carbon Alliance).

[48]            AGRI, Témoignages, Andrea Brocklebank (directrice exécutive, Beef Cattle Research Council); et Jennifer Haverstock (directrice, Horticulture, Perennia Food and Agriculture Inc.).

[49]            AGRI, Témoignages, Daniel Bernier (conseiller, Recherches et politiques agricoles – environnement, Union des producteurs agricoles); et Jim Everson (Conseil canadien du canola).

[50]            AGRI, Témoignages, Erin Gowriluk (Producteurs de grains du Canada); et Duane Thompson (Canadian Cattlemen’s Association).

[51]            Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, Why bees matter: The importance of bees and other pollinators for food and agriculture, 20 mai 2018, p. 6 [disponible en anglais seulement].

[52]            Statistique Canada, Tableau 32-10-0353-01 : Production et valeur du miel.

[54]            Gouvernement de l’Ontario, Rapport de l’apiculteur provincial pour 2020.

[56]            Ibid., p. 6.

[57]            AGRI, Témoignages, John C. Hamilton (gestionnaire des ruchers, Division des ruchers de la Nouvelle-Écosse, Oxford Frozen Foods Ltd.), Jeremy Olthof (ancien président, Alberta Beekeepers Commission), et Ron Greidanus (délégué, Conseil canadien du miel, Alberta Beekeepers Commission).

[58]            AGRI, Témoignages, John C. Hamilton (Oxford Frozen Foods Ltd.), Jeremy Olthof (Alberta Beekeepers Commission), Paul van Westendorp (apiculteur de la province, gouvernement de la Colombie-Britannique), et Daniel Winter (président, American Beekeeping Federation).

[60]            AGRI, Témoignages, John C. Hamilton (Oxford Frozen Foods Ltd.), Jake Berg (président, Conseil canadien du miel), Ron Greidanus (Conseil canadien du miel, Alberta Beekeepers Commission), Jean-François Doyon (président, Les Ruchers D.J-F. Inc.)

[61]            Santé Canada, Les néonicotinoïdes au Canada.

[62]            Gouvernement du Québec, Comprendre la justification et la prescription agronomiques.

[63]            AGRI, Témoignages, Paul van Westendorp (gouvernement de la Colombie-Britannique); et Lisa Gue (responsable, Politique nationale, Fondation David Suzuki).

[64]            Gouvernement de l’Ontario, Feuille de renseignements Phragmite.