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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 092 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 1er mars 2018

[Enregistrement électronique]

  (0905)  

[Français]

    Conformément à l'article 108(3) du Règlement, nous procédons à l'étude sur l'accès des services à la petite enfance dans la langue de la minorité.
    Avant de passer à cette étude, j'aimerais prendre quelques minutes pour saluer très respectueusement la sénatrice Claudette Tardif. Nous sommes à Edmonton, dans sa ville. Mme Tardif est une pionnière de la francophonie partout au pays, mais plus particulièrement dans l'Ouest. Pendant environ 13 ans, elle a été sénatrice au Sénat du Canada. Le but de cette rencontre est de lui rendre hommage.
    Pendant une dizaine d'années, Mme Tardif a aussi été présidente de l'Association interparlementaire Canada-France. La langue française et Mme Tardif, c'est intimement lié. Je tenais absolument à ce qu'il soit fait mention, dans le compte rendu, de l'hommage que nous rendons à cette grande Canadienne qui fait rayonner la langue française d'un océan à l'autre.
    Madame Tardif, nous vous invitons à nous adresser quelques mots.
     Monsieur le président, j'aimerais d'abord vous remercier de vos gentilles paroles à mon égard, ainsi que tous les membres du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes qui sont ici, dans ma province. Je suis très fière de vous accueillir à Edmonton et que vous soyez ici pour entendre les gens de la communauté franco-albertaine qui mettent beaucoup d'énergie et de détermination à faire avancer le fait français en Alberta.
    Vous l'avez bien dit, le Comité permanent des langues officielles me tient à coeur. Dès ma nomination au Sénat en 2005, j'ai été membre du Comité et j'ai travaillé pendant de nombreuses années à ce dossier. J'ai à coeur notre identité canadienne et la valeur que nous donnons au bilinguisme et à la dualité linguistique de notre pays. Je vous souhaite de très bonnes réunions.
    Merci beaucoup de l'hommage que vous me rendez.
    Madame Tardif, merci beaucoup pour tout ce que vous avez fait et pour tout ce que vous allez continuer à faire.
    Madame Tardif, où en êtes-vous en ce qui concerne les consultations? Vous êtes toujours impliquée dans ce dossier.
    Ce matin, nous avons le plaisir de recevoir les témoins suivants: à titre personnel, Mme Dolorèse Nolette, vice-doyenne et directrice du Centre collégial de l'Alberta, Campus Saint-Jean; M. Albert Nolette, de l'Association canadienne-française de l'Alberta; Mme Nathalie Lachance, du Conseil scolaire Centre-Nord; Mme Marie Commance-Shulko, d'Edmonton Public Schools; Mme Cynthia Huard, présidente de l'Institut Guy-Lacombe de la famille; Mme Gillian Anderson, présidente de la Fédération des parents francophones de l'Alberta; enfin, Mme Sarah Lessard, de la Société de la petite enfance et de la famille du Sud de l'Alberta.
    Bonjour et bienvenue à tous.
    Nous voulons entendre tous vos témoignages, mais il nous faut réserver un peu de temps à la période des questions pour que les députés puissent vous poser des questions ou faire des commentaires. Vous disposez donc de cinq minutes chacun pour faire votre exposé et je serai assez strict à cet égard.
    Madame Nolette, vous avez la parole.
    Merci de nous recevoir et de l'attention que vous portez non seulement à la cause de la francophonie en Alberta, mais aussi au dossier de la petite enfance en particulier.
    Je m'appelle Dolorèse Nolette et je suis l'une des doyennes adjointes du Campus Saint-Jean. J'occupe la fonction de directrice du Centre collégial de l'Alberta, qui offre une formation technique parallèlement à la formation universitaire au Campus Saint-Jean. Ce centre en est à ses premières années de développement.
    Le Centre offre des cours depuis septembre 2015. Nous offrons actuellement deux programmes: administration des affaires et gestion touristique, qui sont tous deux d'une durée de deux ans.
    Nous avons des projets en cours d'élaboration qui sont tout près d'aboutir, dont deux niveaux de formation à la petite enfance qui sont exigés par le gouvernement de l'Alberta de quiconque souhaitant travailler dans les différents services à la petite enfance. Ces formations, soit Éducation à la petite enfance de niveau 2 et Éducation à la petite enfance de niveau superviseur, sont sur le point de recevoir l'approbation du ministère des Études supérieures du gouvernement de l'Alberta. Nous espérons lancer le niveau 2, qui est un certificat, en septembre 2018.
    En raison des besoins de la communauté francophone et de l'urgence d'offrir de la main-d'oeuvre qualifiée apte à travailler dans tous les services à la petite enfance, nous travaillons en collaboration avec la Fédération des parents francophones de l'Alberta pour offrir des cours hors programme et répondre à des besoins immédiats. Nous voulons aussi aider les organismes ou institutions à obtenir l'accréditation et la reconnaissance dont ils ont besoin.
    Allez-vous m'informer du temps qu'il me reste?

  (0910)  

    Vous en êtes à la moitié.
    C'est parfait. Je veux relever le défi!
    Nous sommes en train d'élaborer un programme d'aide aux élèves avec une spécialisation en soutien au développement phonologique — soit l'aide en orthophonie — et à l'articulation. Ce genre d'employés peuvent aider la petite enfance. Compte tenu de l'évolution des systèmes en Alberta, nous avons besoin de tels employés. Vous pourrez me poser des questions, si cet aspect vous intéresse.
    Je vais maintenant parler des défis particuliers auxquels nous devons faire face.
    Il faut comprendre que le Centre est une institution collégiale, soit le Campus Saint-Jean, à l'intérieur d'une institution universitaire, soit l'Université de l'Alberta, qui est une université de recherche. Nous sommes toujours en train d'essayer d'ouvrir des portes et de faire avancer les systèmes et les modes de pensée des gens de la plus grande institution afin d'offrir de la formation de niveau collégial en français pour répondre aux besoins des francophones en Alberta.
    En ce qui concerne le programme d'éducation à la petite enfance et l'évolution de ce programme, nous sommes en train de mettre en place un programme, alors que le gouvernement de l'Alberta nous dit qu'il n'y a pas de nouveaux fonds pour cela en ce moment. Par conséquent, nous allons utiliser les fonds qui nous seront accordés suivant la Feuille de route pour les langues officielles du Canada pour mettre ce programme sur pied en attendant une meilleure saison économique en Alberta. Nous pourrons alors faire une demande de financement au gouvernement provincial.
    Je crois que le gouvernement de l'Alberta a un rôle à jouer. Il ne doit pas se fier uniquement aux communautés de langue officielle pour mettre sur pied des services à la petite enfance.
    Madame Nolette, merci beaucoup de votre présentation.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Albert Nolette.
    Monsieur Nolette, tout d'abord, les membres du Comité et moi-même désirons vous remercier grandement d'avoir participé activement à l'organisation de la journée.
    Nous vous écoutons.

  (0915)  

    Je tiens à vous remercier de votre visite dans l'Ouest du pays, et plus particulièrement en Alberta, afin de rencontrer nos communautés. Je tiens également à vous remercier de nous avoir invités à témoigner dans le cadre de votre étude sur l'accès des services à la petite enfance dans la langue de la minorité.
    Je m'appelle Albert Nolette. Je suis le papa de Xavier, 22 mois, et le serai d'un autre enfant à naître prochainement. J'ai donc des motifs très personnels de m'intéresser au dossier de la petite enfance. Je suis le vice-président de l'Association canadienne-française de l'Alberta, aussi appelée l'ACFA.
    Je vais vous donner un aperçu de l'ACFA. Celle-ci a pour mission de défendre les acquis de la communauté francophone en Alberta, de faire avancer ses droits et d'accroître sa vitalité. Elle représente les 268 640 Albertains d'expression française, et elle est la porte-parole concernant les enjeux ayant un impact sur la francophonie en Alberta.
    Dans nos démarches et les gestes que nous posons, nous sommes appuyés par plusieurs dizaines d'institutions et d'organismes qui travaillent en étroite collaboration avec nous afin d'assurer une vitalité à la langue française, que ce soit à Edmonton, à Calgary, à Fort McMurray, à Lethbridge, à Red Deer, à Jasper, à Canmore, à St-Isidore, à Bonnyville, à Camrose, à Grande Prairie et j'en passe. En Alberta, nous avons le privilège d'être témoins d'une francophonie dynamique, diverse et florissante, ancrée dans une histoire riche.
    Selon Statistique Canada, la population de langue maternelle française en Alberta a crû de 28,9 % au cours des 10 dernières années et de 55,5 % au cours des 25 dernières années. Aujourd'hui, la population de langue maternelle française en Alberta atteint 88 220 individus, et de nombreux francophones des quatre coins du pays et de partout dans le monde viennent s'y établir.
    Toutefois, la croissance rapide de notre communauté, le fait qu'elle compte 26 % d'immigrants et l'augmentation du nombre de familles interlinguistiques représentent de grands changements démographiques, ce qui donne lieu à des besoins d'adaptation importants quant aux services.
    Plus que jamais, la petite enfance est considérée comme un dossier prioritaire pour notre communauté, et nous en avons notamment fait un objectif stratégique dans notre cadre de développement communautaire 2015-2020.
    En contexte minoritaire, vous conviendrez avec moi que les communautés de langue officielle ne peuvent se fier seulement au gouvernement pour le développement des programmes et des services adaptés aux réalités linguistiques et culturelles sur le territoire. Elles doivent en être les principaux artisans. Cependant, de nombreux services directs aux citoyens, les services à la petite enfance en sont un bon exemple, sont offerts sur le plan provincial par des gouvernements qui n'ont pas toujours d'obligations envers la minorité, comme c'est le cas en Alberta. Nos communautés ne sont donc pas toujours consultées ou prises en compte lors du développement de programmes. Ainsi, les programmes proposés pour répondre aux besoins de la population générale ne sont pas toujours les mieux adaptés, les plus efficaces ou les plus efficients pour nos communautés.
    Lorsqu'on parle des services à la petite enfance dans les communautés en situation minoritaire, l'objectif est d'être un complément aux foyers francophones interlinguistiques afin d'assurer la transmission de la langue française et la construction identitaire de nos tout-petits. Ce mandat additionnel et absolument nécessaire n'est souvent pas pris en compte par notre gouvernement. Cela demande donc un effort supplémentaire, mais essentiel, de la part des intervenants de nos communautés qui travaillent dans ce secteur.
    En ce sens, il est impératif que le gouvernement fédéral joue un rôle clé en matière de financement et qu'il définisse enfin un mécanisme permettant de faire respecter les clauses linguistiques dans les transferts fédéraux et provinciaux. Il doit veiller à ce que le financement attribué aux communautés linguistiques en situation minoritaire soit investi dans des services conçus par nos communautés et qui leur sont précisément destinés. Ces services doivent répondre adéquatement à nos besoins, suivre un cheminement logique qui permet d'accroître la capacité communautaire et être effectivement accessibles aux citoyens d'expression française.
    Une autre option serait d'interagir directement avec nos communautés sur ces questions, comme c'est le cas dans d'autres secteurs de développement, par exemple en matière de santé.

  (0920)  

    C'est avec beaucoup de respect que nous vous soumettons ces observations, et nous espérons qu'elles entraîneront des changements importants et bénéfiques susceptibles de préserver la vitalité de la collectivité de langue française en Alberta.
    Je vous remercie de votre attention, et je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Nolette.
    Nous continuons maintenant avec Mme Lachance.
    Madame Lachance, nous vous écoutons.
    Je remercie le Comité de nous rencontrer aujourd'hui afin de l'aider à faire le point sur un des dossiers les plus importants du développement des communautés francophones en Alberta, soit celui de la petite enfance. Je suis Nathalie Lachance, présidente du Conseil scolaire Centre-Nord.
    Je voudrais aussi souligner que nous sommes sur le territoire visé par le Traité no 6 et sur l'ensemble du territoire de la nation métisse en Alberta.
    Nous sommes un des quatre conseils scolaires francophones de la province, et près de 3 400 élèves sont répartis dans nos 19 écoles. Le développement des écoles francophones passe nécessairement par celui de structures et de programmes pour la petite enfance. Non seulement cette période de la vie d'un enfant constitue une période charnière quant à son développement, mais elle représente également un moment critique dans l'acquisition et le maintien de la langue française, en plus de jouer un rôle essentiel dans la construction identitaire de l'enfant et dans son sentiment d'appartenance à la communauté. C'est pourquoi les conseils scolaires ont adopté des politiques visant à appuyer des programmes comme celui de la prématernelle dans leurs écoles.
    Nous souhaitons vous faire part de trois défis qui semblent récurrents dans la prestation des services à la petite enfance dans les communautés desservies par notre conseil scolaire.
    Premièrement, il y a l'absence d'un financement garanti pour assurer la stabilité et l'harmonisation des modèles de livraison des services à la petite enfance. Une grande proportion des services à la petite enfance en français dans notre province relève presque du miracle. Ces services sont le résultat de l'engagement et de la bonne volonté de parents bénévoles, du parrainage de projets par des associations ayant des ressources souvent insuffisantes et de l'appui des établissements scolaires.
    L'école francophone est souvent le lieu de rassemblement des familles francophones où se transmettent la langue et la culture et où se tiennent des activités entourant la construction identitaire des jeunes. Il semble alors normal de s'attendre à ce que les établissements scolaires en milieu minoritaire jouent un rôle de levier dans la prestation des services à la petite enfance. Dans certaines de nos communautés, une pression s'exerce d'ailleurs visant l'intégration de programmes préscolaires, parfois précaires, au système d'éducation francophone. Il en résulte un modèle fragmenté de prestation de services. Par exemple, dans certains cas, des comités de parents gèrent des prématernelles dans les locaux de nos écoles, alors que, dans d'autres situations, le conseil scolaire a dû prendre en charge la prestation du programme de prématernelle. La fragilité des services met une population d'enfants à risque avant leur entrée dans le milieu scolaire.
    Deuxièmement, nous déplorons le manque d'espaces appropriés. Nous rencontrons régulièrement des représentants du gouvernement provincial pour souligner le fait que nous avons un énorme déficit en infrastructures. Vous pouvez imaginer que l'ajout de la prématernelle et de garderies dans nos écoles représente un défi en matière d'espaces. Contrairement à l'ensemble de la population anglophone de la province, les services disponibles pour les familles francophones sont peu nombreux. Les parents francophones travaillent et leurs besoins grandissants en matière de services à la petite enfance — disponibles en français — constituent un défi quant à l'accessibilité et à la proximité. Dans certaines communautés rurales, des espaces sont disponibles, mais les ressources humaines manquent, alors que, dans les communautés urbaines, les espaces sont insuffisants pour répondre à la demande. Le décrochage culturel et identitaire des familles est fréquent quand celles-ci n'accèdent pas facilement à des services de qualité en français offerts à des prix raisonnables pour les jeunes familles.
    Des demandes d'espaces sont souvent adressées aux écoles francophones. Comme les espaces réservés à la petite enfance dans les écoles sont généralement plus abordables, le pragmatisme, du point de vue opérationnel, de l'intégration des espaces de la petite enfance dans l'école francophone devient attrayant. Le bénéfice pour les parents dépasse les aspects de construction identitaire et de consolidation des services disponibles en français. Toutefois, cette solution est également précaire, car les espaces consacrés aux programmes liés à la petite enfance dans les écoles sont rares et ne peuvent être garantis à long terme.
    La croissance des effectifs scolaires dans plusieurs de nos écoles ajoute un degré de fragilité au prêt de locaux pour la petite enfance. Nous devons faire face à des défis quant aux espaces destinés à nos élèves, lesquels mènent à la fâcheuse solution de devoir demander à des services de garderie de quitter nos écoles — et cela nous brise le coeur. Vous pouvez comprendre les répercussions que cela aura à l'avenir.
    Le défi lié aux espaces et à l'accès à des services à la petite enfance est mesuré chaque année, alors que les enfants de la prématernelle ne représentent qu'une portion des enfants qui s'inscrivent à la maternelle dans nos écoles. Si nous avions plus d'espaces réservés aux programmes liés à la petite enfance, nous pourrions préparer nos écoles francophones à accueillir de plus grandes cohortes d'enfants.
    Le troisième défi consiste en la pénurie de ressources humaines qualifiées pour répondre aux besoins. Les conseils scolaires sont en mesure d'appuyer, en partie, les programmes grâce au financement alloué dans deux domaines précis, soit la francisation et l'appui aux besoins spéciaux. Toutefois, ces programmes d'appui ne touchent qu'une portion des enfants d'âge préscolaire. Par conséquent, l'argent disponible pour appuyer les programmes liés à la petite enfance des conseils scolaires ne permet pas nécessairement un financement complet des programmes.
    Le recrutement d'éducatrices et d'éducateurs qualifiés pour assurer la prestation des programmes est un aussi grand défi que celui lié à la rétention de ce personnel. De plus, une pénurie de personnel qualifié dans des domaines tels que l'orthophonie et l'ergothérapie demeure problématique.
    Merci.

  (0925)  

    Merci beaucoup, madame Lachance.
    Nous poursuivons avec Mme Commance-Shulka.
    Madame Commance-Shulka, nous vous écoutons.
    Je m'appelle Marie Commance-Shulko et je ferai ma présentation en anglais. Est-ce que cela vous convient?

[Traduction]

    Ce n'est pas un problème.
    C'est un honneur et un privilège d'être ici aujourd'hui. Le Conseil des écoles publiques d'Edmonton offre depuis fort longtemps des programmes de formation en langue seconde aux élèves, aux parents et aux enseignants.
    Au sein du conseil, je travaille à l'Institute for Innovation in Second Language Education, que l'on appelle affectueusement l'IISLE. J'ai remis quelques brochures à Christine qui vous dira comment elle les mettra à votre disposition. Vous y trouverez des renseignements sur les services que nous offrons à tous les élèves qui sont inscrits au programme d'immersion française.
    Nous avons commencé à offrir un programme d'immersion française en 1974. Pour vous donner un peu de contexte, nous avons à l'heure actuelle 17 écoles d'immersion française au sein du conseil, qui vont de la maternelle à la 12e année, et 4 027 élèves participent au programme, dont 458 sont inscrits à la maternelle cette année, et 455 en première année. Nous avons des politiques et des règlements qui régissent l'enseignement et l'apprentissage dans un programme d'immersion française.
    À la maternelle et en première année, tout le programme est en français, et il se poursuit jusqu'en janvier de la deuxième année, moment où on commence à donner des cours d'art en anglais. Outre cela, toutes les matières sont enseignées en français par nos enseignants. Nos élèves qui arrivent en maternelle et en première année — car c'est à ce moment qu'ils peuvent commencer — n'ont pratiquement pas été en contact avec la langue avant d'arriver. Ils viennent de foyers où on ne parle qu'en anglais, ou de foyers où on ne parle qu'occasionnellement en français, et ils viennent aussi de plus en plus de foyers allophones, où on ne parle ni l'anglais, ni le français.
    J'ai aussi remis à Christine un outil pour élaborer un programme en langue seconde de qualité que nous avons créé pour nos enseignants et nos écoles. Il a été préparé à l'intention des administrateurs, des parents et des enseignants et se veut un outil de réflexion sur les façons d'examiner et d'aborder divers aspects des programmes d'immersion française.
    L'inclusion est un mot d'ordre au Conseil des écoles publiques d'Edmonton, et par inclusion, je veux dire qu'on veut que les 458 élèves qui sont inscrits à la maternelle cette année soient encore là dans 13 ans à la fin de leur douzième année lorsqu'ils obtiendront leur diplôme. Par le passé, et ce n'est pas le cas au Conseil des écoles publiques d'Edmonton, on a souvent conseillé aux élèves qui éprouvaient des difficultés de quitter le programme. Nos élèves ont tous leur façon d'apprendre, et nous devons trouver la meilleure façon et les meilleures ressources pour les accompagner dans leur apprentissage.
    Nous travaillons très fort pour mettre en place de bonnes pratiques pédagogiques pour nos élèves de la maternelle et de première année, et nous nous employons à adapter de nombreuses ressources à l'immersion française. Parmi ces pratiques, mentionnons la lecture dirigée et les mathématiques dirigées, offertes en français, et les interventions en littératie et en mathématiques.
    Un des défis que nous devons relever dans l'éducation à la petite enfance est de déloger le mythe persistant qui veut que le français ne soit que pour certains élèves seulement. Nous sommes, nous aussi, aux prises avec un manque d'adjoints d'enseignement qui parlent français et qui pourraient aider les jeunes élèves. Nous n'avons pas assez non plus de ressources adaptées à la langue et à l'âge. Nous savons aussi que les déplacements en autobus des élèves en immersion française qui doivent se rendre à différentes écoles sont longs et coûteux. Le nombre de places disponibles au préscolaire est également insuffisant. Beaucoup de nos écoles aimeraient offrir un programme préscolaire en français, mais elles ne peuvent pas le faire.
    Au sujet de l'accès des services à la petite enfance, nous aimerions pouvoir avoir accès à des orthopédagogues en lecture, des psychologues, des ergothérapeutes et des orthophonistes bilingues, pour qu'ils puissent travailler en français avec nos jeunes élèves. Nous aimerions aussi avoir accès à des assistants en éducation qui parlent français. À l'heure actuelle, il est rare d'en avoir un dans une école qui peut parler français. Il serait très important pour nous d'avoir des bibliothécaires qui parlent français et d'avoir accès à des ressources de qualité adaptées à l'âge pour nos élèves en immersion française. J'entends par là des ressources adaptées à la langue, sans être trop enfantines pour eux.

  (0930)  

    Nous aimerions pouvoir compter sur des moyens de transport fiables, ponctuels et à faible coût pour nos écoles d'immersion française. Comme je l'ai mentionné, il serait merveilleux d'avoir plus de centres préscolaires où nos élèves pourraient commencer à apprendre la langue à un plus jeune âge encore.
    Et pour nous, nous aimerions qu'il y ait plus de recherches effectuées sur les meilleures méthodes à utiliser pour enseigner à nos jeunes apprenants; qu'il y ait des fonds et des possibilités pour nos éducateurs, en plus de nos enseignants et adjoints d'enseignement, d'apprendre le français; et qu'il y ait plus de représentation au niveau provincial pour obtenir un financement suffisant pour les programmes d'immersion française, y compris pour le transport; et bien sûr qu'on maintienne le Programme des langues officielles dans l'enseignement.

[Français]

    Je vous remercie de m'avoir consacré de votre temps.

[Traduction]

    Merci beaucoup, Marie.

[Français]

    Nous allons continuer avec Mme Huard.
    Madame Huard, vous avez la parole.
     Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les membres du Comité d'être parmi nous aujourd'hui.
    Je m'appelle Cynthia Huard et je suis la présidente de l'Institut Guy-Lacombe de la famille. Je suis aussi la maman de trois filles, qui ont respectivement 1, 3 et 5 ans.
    Pour alléger ma présentation, je vais utiliser l'acronyme IGLF pour désigner l'Institut. C'est ce que nous faisons dans la communauté. Nous avons comme mission d'aider les familles de l'Alberta à optimiser en français leurs connaissances, leurs habiletés et leurs compétences en vue d'atteindre le mieux-être. Au quotidien, nous sommes ce qu'on appelle un centre d'appui parental, et nous travaillons directement avec les enfants de 0 à 5 ans, ainsi qu'avec leurs parents. Nous travaillons aussi avec les enfants d'âge scolaire, mais pour aujourd'hui, je vais me concentrer sur les services que nous fournissons à la petite enfance.
    Notre mandat consiste à offrir aux familles un accompagnement qui cible leur croissance, qu'elle soit personnelle, sociale, culturelle, identitaire ou linguistique. Nous offrons aussi de la formation en matière d'habiletés parentales. Nous avons un centre de ressources et une magnifique bibliothèque francophone. Nous travaillons à l'intégration et à la réintégration du français au foyer sur les plans identitaire et culturel. Nous faisons aussi un travail important qui touche le développement du sens d'appartenance, ainsi que la promotion de la santé mentale et physique. Ce sont tous des domaines dans lesquels nous travaillons au quotidien.
    Puisque nous abordons maintenant la question du mandat, j'en profite pour mettre en lumière quelques faits. Contrairement à nos homologues anglophones des Parent Link Centres, qui disposent de plus de 50 centres dans la province, nous nous n'avons que deux centres d'appui parental pour travailler avec les familles francophones. Notre organisme a un double mandat. Je vais vous expliquer ce que j'entends par là.
    Comme tous les Parent Link Centres, nous devons fournir du soutien et des ressources aux familles qui comptent des enfants de 5 ans et moins. On parle donc de toute une gamme de programmes, d'activités, d'ateliers d'habiletés parentales, de questionnaires sur le développement de l'enfant, et ainsi de suite. Nous travaillons dans bien des domaines.
    Par contre, notre situation langagière en tant que groupe minoritaire nous amène aussi à travailler de façon ardue à la transmission de la culture et de la langue, ainsi qu'au sens d'appartenance à la culture francophone. Nous assumons donc un double mandat. Cependant, ce deuxième mandat, soit la transmission de la langue et de la culture, n'est pas officiellement reconnu par le gouvernement provincial. Nous ne recevons donc pas de fonds supplémentaires pour mener à bien ce deuxième mandat. En outre, la subvention que nous recevons du ministère des services à l'enfance, au niveau provincial, est sensiblement la même que pour tous les autres centres d'appui parental anglophones.
    D'ailleurs, depuis que notre organisme a été reconnu en tant que centre d'appui parental par le gouvernement provincial, ce dernier a instauré un moratoire sur la création de tels centres. Depuis 10 ans, la province n'a donc pas créé de nouveaux centres d'appui parental. Il va sans dire que ce moratoire freine l'expansion de nos services. Comme vous le savez — M. Nolette en a parlé —, la population francophone ne cesse de croître en Alberta. En 10 ans, beaucoup de choses ont changé et les besoins ne sont plus ce qu'ils étaient.
    À titre d'information, l'an dernier, l'IGLF a offert ses services à environ 2 500 participants uniques. Cette année, nous espérons voir ce chiffre dépasser la barre des 3 000 participants. Bien que nous soyons très fiers de ces chiffres, nous savons que nous ne touchons malheureusement qu'une minorité des enfants francophones d'Edmonton et des villes avoisinantes. Nous ne voulons pas laisser de côté les autres familles, mais malheureusement, faute de ressources, tant financières qu'humaines, nous ne pouvons pas leur offrir les services de qualité qu'elles méritent.
    Les familles anglophones ont toutes un centre d'appui parental à proximité. Il y a en effet des Parent Link Centres dans presque chaque arrondissement d'Edmonton. En revanche, les familles francophones n'ont accès qu'à deux centres dans toute la province, dont l'un est à Edmonton et l'autre, à Calgary. L'IGLF souhaite donc prendre de l'expansion dans la capitale elle-même pour rejoindre ces familles francophones, qu'on retrouve aux quatre coins de la ville d'Edmonton. Malheureusement, plusieurs d'entre elles sont pénalisées en raison de la centralisation de nos services en un seul centre.

  (0935)  

     J'aimerais aussi ajouter que l'IGLF est vraiment au coeur de la communauté, dans la mesure où nous travaillons main dans la main avec les écoles et les garderies. Nous voulons devenir la référence de choix pour les parents qui ne savent pas vers qui se tourner. Grâce à nos ateliers parentaux, des parents se sentent épaulés et écoutés, et nous constatons que ces ateliers ont des répercussions directes sur les enfants.
    Ai-je encore du temps?
    Votre temps est écoulé.
    J'ai fourni au Comité mes notes d'allocution. J'avais d'autres points à soulever, mais j'imagine que le message...
    Vous pourrez peut-être le faire en répondant à des questions des membres du Comité.
    Oui, certainement. Je suis disposée à répondre à toute question.
    Nous allons poursuivre avec Mme Anderson.
    Je vais essayer de procéder rapidement, parce que mon discours est assez long.
    Bonjour, je m'appelle Gillian Anderson et je suis présidente de la Fédération des parents francophones de l'Alberta, la FPFA. Je siège au conseil d'administration depuis sept ans et j'ai été élue présidente en novembre dernier.
    Au nom de notre fédération, je vous remercie de vous être déplacés en Alberta. Cela nous permet de vous présenter notre réalité et d'échanger ouvertement avec vous. Nous vous sommes très reconnaissants du temps que vous nous accordez pour discuter en personne de ce dossier très précieux pour les parents que nous représentons.
    Ma présentation en quatre parties se veut simple et claire.
    Premièrement, je vais parler de l'état de la transmission de la langue française en Alberta. Deuxièmement, je vais décrire les besoins de services de garde pour contrer l'assimilation linguistique. Troisièmement, je vais parler du rôle du gouvernement fédéral dans le dossier de la petite enfance et de l'approche qu'a adoptée notre province pour réduire les frais de garde pour certaines familles et certaines garderies ciblées, mais pas pour toutes. Finalement, je vais expliquer pourquoi notre fédération ne croit pas que ce modèle albertain dessert bien la communauté francophone. Grâce à notre motivation à élaborer un modèle entrepreneurial, nous avons ajouté 93 places en garderie francophone dans la dernière année.
    Commençons donc par l'acquisition et la transmission du français. De nombreuses études démontrent que l'âge critique pour l'acquisition langagière chez les enfants se situe entre 0 et 4 ans. En octobre 2016, le Commissariat aux langues officielles a publié un rapport intitulé « La petite enfance : vecteur de vitalité des communautés francophones en situation minoritaire ». Ce rapport concluait que plus un enfant tarde à apprendre une langue, moins il a de chances de la maîtriser. Or, pour que l'enfant francophone apprenne puis maîtrise le français, il doit d'abord avoir accès à des services à la petite enfance de qualité, et le plus tôt possible.
    L'accès à des centres d'appui parental — il y en a deux en français en Alberta —, des programmes de prématernelle et des services de garde en français peuvent aider à contrer l'influence d'un environnement à prédominance anglaise en offrant un environnement anglais-français plus équilibré.
    En Alberta, le taux de transmission de la langue française des parents à leurs enfants est préoccupant. En fait, le taux de transmission du français est plus faible ici que la moyenne nationale. Plus précisément, lorsque la langue maternelle des deux parents est le français, seulement 74 % de leurs enfants parleront français, comparativement à la moyenne nationale de 90 %. Lorsque seule la mère parle français, le taux de transmission est de 28 %, contre 40% au niveau national. Enfin, lorsque seul le père parle français, le taux de transmission du français chute à 13 %, en comparaison avec 29 % au niveau national.
    Je vais maintenant parler des besoins en services de garde en français. Le recensement de 2011 indique que, en Alberta, 2 950 élèves âgés de 0 à 4 ans avaient au moins un parent francophone. Une étude de 2014 de Statistique Canada a révélé que, en Alberta, 40 % des parents désiraient inscrire leur enfant dans un service de garde. C'est donc dire que le besoin réel serait de 1 180 places en garderie francophone dans la province.
    En 2016, nous avons mené notre propre étude sur les services de garde. Cette étude a évalué à 513 le nombre de places en garderie francophone. Il manque donc 660 places. De plus, nous avons découvert que le manque de places en garderie était intimement lié au manque d'expertise pour favoriser l'ouverture de nouvelles garderies, ainsi qu'une inadéquation sur le plan des ressources humaines pour gérer efficacement les services existants. À titre d'exemple, les services de garde en français sont surtout gérés par des sociétés de parents bénévoles qui n'ont pas toujours le temps, l'énergie ni l'expertise nécessaires pour bien exploiter ces services et assurer leur pérennité.
    Ajoutons que notre étude nous a poussés à concevoir un modèle d'appui centralisé, basé sur les 10 services essentiels suivants pour faciliter la création de places en garderie: la gestion des inscriptions; les ressources humaines; la comptabilité; la réglementation; l'accréditation; la gouvernance; la programmation; les communications; les subventions; et le développement.
    L'un de ces 10 services, en particulier, est très innovateur. Nous avons créé une banque de remplaçants disponibles aux bénéficiaires des services de la FPFA. Autrement dit, les garderies et les sociétés de parents qui paient les frais inhérents à ces services ont accès à notre banque de remplaçants. La main-d'oeuvre en services de garde est problématique partout au pays et elle accuse un haut taux de roulement. Notre banque de remplaçants permet d'assurer une continuité dans l'offre de services, tant dans les grands sites que dans les plus petits. Maintenant, lorsqu'un employé est absent ou malade ou qu'il démissionne, la Fédération a sa banque d'employés prêts et capables de travailler.

  (0940)  

     Je vais maintenant passer au modèle albertain d'appui aux garderies. De prime abord, nous sommes reconnaissants de l'engagement du gouvernement fédéral et de son apport financier considérable aux provinces en appui au dossier de la petite enfance. Nous sommes conscients que chaque province a la responsabilité d'adopter sa propre approche dans l'évolution rapide de ce dossier. Chez nous, le ministère provincial des services à l'enfance préconise un modèle de garderie à 25 $ par jour, alors que la moyenne est de 55 $ par jour pour la garde d'un enfant.
    Lorsque l'Alberta a lancé son modèle, tôt en 2017, elle a reçu sept demandes pour des projets francophones, mais aucune n'a été retenue. Dans le second appel d'offres, en janvier 2018...
    Votre temps est écoulé, madame Anderson.
    C'est tout?
    Oui. Vous pourrez continuer plus tard en répondant aux questions et aux commentaires des membres du Comité.
    Nous passons à Mme Lessard.
    Je m'appelle Sarah Lessard et je suis la maman de trois petites filles qui fréquentent une école francophone du Conseil scolaire FrancoSud, à Calgary. Elles sont en prématernelle, en première année et en troisième année.
     C'est un dossier qui m'inspire et qui me touche personnellement. Je suis vraiment contente que vous soyez venus ici pour écouter notre communauté. J'ai participé à des discussions et à des conférences, où on constate toujours ce manque pour la petite enfance, on le souligne. Je suis vraiment contente que vous soyez ici pour nous écouter et rencontrer tous les partenaires de la communauté.
    Je représente aujourd'hui la Société de la petite enfance et de la famille du Sud de l'Alberta, la SPEFSA. Mme Huard a déjà parlé des centres d'appui aux francophones en Alberta. Elle est notre partenaire à Edmonton, et moi, je suis à Calgary.
     Notre association a été fondée en 2007 grâce aux fonds du Programme d'action communautaire pour les enfants, le PACE. Ces fonds fédéraux servent à soutenir des centres familiaux.
    Mme Huard a un peu parlé des centres d'appui. De notre côté, il a fallu attendre 10 ans. En 2016, le gouvernement de l'Alberta a enfin reconnu que nous n'avions pas de financement pour un centre d'appui. Nous recevions des fonds du gouvernement fédéral, mais aucuns du gouvernement provincial. Nous avons dû attendre jusqu'en 2016 pour recevoir des fonds du gouvernement de l'Alberta pour le centre d'appui de Calgary. C'est vraiment la SPEFSA qui a insisté pour que nous obtenions ces fonds et la reconnaissance de notre désignation de centre d'appui à Calgary.
    Depuis 2016, nous avons aussi reçu des fonds pour mettre sur pied des projets en région. Nous sommes situés à Calgary, mais notre centre d'appui veut créer un réseau pour les communautés en région. Nous avons reçu des fonds pour nous permettre d'offrir des services dans plusieurs régions du Sud de l'Alberta, qui est la limite du territoire que nous desservons. Nous essayons de desservir des familles dans différentes régions.
    En 2016, lorsque nous recevions seulement des fonds au titre du PACE, il y avait 1 400 participants. Au cours des deux dernières années, soit depuis que nous avons reçu plus de fonds du gouvernement de l'Alberta pour la désignation du centre d'appui, nous avons pu doubler nos chiffres. En deux ans, je trouve que nous avons fait de grandes avancées au chapitre de la petite enfance dans le Sud de l'Alberta.
    Je vais expliquer les services que nous offrons, parce que je trouve que c'est important. Calgary est souvent la porte d'entrée vers la francophonie. Les familles qui arrivent à Calgary recherchent dans Google les mots « familles francophones ». C'est souvent ainsi qu'elles trouvent notre organisation.
     Nous offrons à la communauté francophone des services de développement de l'enfant, des séances de lecture de contes, du yoga pour la famille, du bricolage et plusieurs activités pour développer toutes les capacités des enfants avant qu'ils commencent l'école.
     Nous offrons à notre communauté de l'éducation parentale, qui est importante à l'équilibre familial, sous la forme d'ateliers parentaux de type « pratiques parentales positives », ou PPP. Ces ateliers montrent aux familles comment mettre en place des pratiques positives. Ces services sont offerts dans la plupart des communautés anglophones, mais nous, à Calgary, avons seulement deux centres qui offrent ces services en français. Nous offrons aussi un soutien à la famille qui peut prendre la forme de cuisine communautaire ou de cours prénataux, par exemple.
    L'information et l'orientation que nous donnons aux familles constituent un autre aspect de notre mandat. Ces dernières viennent vers nous parce qu'elles ne connaissent personne et ne comprennent pas comment le système fonctionne. Nous sommes là pour les guider dans leur expérience à Calgary et en Alberta.
    Nous avons aussi un questionnaire sur les étapes de développement, qui est un outil très important. Nous travaillons avec les garderies et les parents. Ce questionnaire aide les parents à savoir où en sont leurs enfants avant qu'ils commencent l'école.

  (0945)  

     Cela peut nous permettre de savoir, par exemple, qu'un enfant a besoin de développer sa motricité fine. Avant leur arrivée à l'école, nous pouvons donc offrir du soutien à nos élèves pour les guider vers l'autonomie afin qu'ils soient prêts pour l'école.
    Par ailleurs, nous offrons le seul service de bibliothèque francophone disponible aux familles à Calgary. Cela répond à un de leurs grands besoins. Lorsqu'elles y entrent, elles sont émerveillées et se réjouissent d'avoir ce service. Nous n'avons malheureusement pas beaucoup de fonds pour assurer ce service.
    Finalement, un autre de nos services concerne la transmission de la langue et de la culture. Nous sommes là pour soutenir les familles. Au centre d'appui, on voit souvent des familles qui viennent d'arriver à Calgary et qui n'ont pas réussi à obtenir d'emploi parce qu'elles ne parlent pas anglais. Elles inscrivent donc leurs enfants à des écoles anglophones et à des activités exclusivement en anglais. Nous devons donc leur dire que, si elles veulent rester à Calgary, il est essentiel qu'elles soutiennent la francophonie. C'est bien d'avoir ces activités en anglais, mais nous devons expliquer aux parents qui arrivent en Alberta qu'ils doivent soutenir la francophonie, faute de quoi elle va se perdre.

  (0950)  

    Merci beaucoup, madame Lessard.
    Est-ce que c'est terminé?
    Oui, votre temps de parole est écoulé depuis déjà une minute et demie. Vous pourrez continuer lors de la période des questions et commentaires.
    Nous allons donc commencer la période des questions de la part des membres du Comité.
    Monsieur Généreux, vous avez la parole.
    Bonjour à tous. Je vous souhaite la bienvenue et vous remercie d'être ici. Je m'appelle Bernard Généreux et je suis le député de Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup. Pour ceux qui connaissent le Québec, j'ajoute que cette circonscription se situe au sud du Saint-Laurent, un peu à l'est de Québec, en direction du Nouveau-Brunswick.
    Madame Nolette, ne soyez pas offusquée si je ne pose pas de questions à tout le monde. En effet, nous ne disposons que de six minutes chacun.
    Mme Nolette et moi avons quelque chose en commun puisque le Campus de Saint-Jean a une entente avec le Collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière depuis des dizaines d'années. Plusieurs anglophones francophiles viennent étudier le français à La Pocatière depuis très longtemps. D'ailleurs, je connais M. Fortin, qui a été l'un des instigateurs de ce phénomène et qui vit toujours à Rivière-Ouelle, mon village natal en quelque sorte.
    Hier, nous étions à Vancouver. La Colombie-Britannique n'a pas de loi d'application sur une entente avec les francophones. Le fait qu'ils ne soient pas reconnus est une entrave importante à l'ensemble des services et à leur relation avec la province. J'ai compris qu'ici, en Alberta, cela est apparu il y a un an ou deux — quelqu'un pourra me le dire. C'est donc relativement nouveau.
    Voyez-vous déjà une différence dans les relations entre la province et l'ensemble des groupes que vous représentez concernant la loi qui a été mise en application ici, en Alberta? Si oui, comment se traduit-elle?
    On sait que les besoins relatifs à la francophonie au Canada sont très importants. Nous en avons été témoins ailleurs. D'ailleurs, les témoins qui sont venus à Ottawa dans le cadre de quelques autres études que nous avons faites, issus de différents secteurs d'activité, nous ont tous dit que les besoins étaient immenses et que vous n'aviez pas les moyens d'y répondre.
    Madame Lessard, est-ce que l'application d'une nouvelle loi par la province vous facilite la tâche?
    Vous avez parlé du fait que nous avons reçu du financement, mais c'était avant la mise en place de la politique.
    Ce n'est donc pas nécessairement à cause de la politique.
    Non.
    Je vous écoute, monsieur Nolette.
    En fait, nous voyons déjà que la politique porte ses fruits. La Politique en matière de francophonie albertaine a été adoptée par le gouvernement albertain au mois de juin 2017.
    Cela ne fait donc même pas un an.
    C'est tout à fait nouveau. Cependant, à mon avis, sa mise en oeuvre repose sur la bonne foi du gouvernement albertain. Elle ne crée pas d'obligation comme telle. C'est plutôt une politique qui incite tous les ministères à développer des services en français qui n'entraînent pas de coûts supplémentaires.
     Une enveloppe budgétaire a-t-elle été prévue par le gouvernement ou n'y en a-t-il pas du tout?
    D'après ce que je comprends, il existe une enveloppe fédérale. Cependant, elle existe déjà.
    Pour que l'Alberta obtienne des fonds, on doit essentiellement prendre de l'argent des autres provinces.
    Il y a donc un besoin...
    Excusez-moi de vous interrompre, mais je veux être certain bien comprendre.
    Ce que vous dites, c'est que la province peut aller puiser dans des fonds fédéraux dans une assiette commune à toutes les provinces. Si des provinces pigent davantage dans ces fonds, les autres provinces en auront moins. Est-ce bien ce que vous dites?
    Ce que j'ai compris, c'est qu'une enveloppe budgétaire fixe est prévue pour les provinces qui offrent des services en français. Or l'Alberta vient tout juste d'adopter une politique en matière de francophonie, et l'enveloppe budgétaire n'a pas augmenté. Ainsi, si l'Alberta va chercher des fonds, elle le fait au détriment des autres provinces. À mon avis, il faut augmenter l'enveloppe, afin d'appuyer les provinces qui veulent offrir plus de services à la population de langue officielle en situation minoritaire.

  (0955)  

    D'accord, merci.
    Selon nous, un autre élément très important, et c'est celui du « par » et du « pour ». Nous en avons d'ailleurs beaucoup parlé. Les communautés francophones du Canada veulent avoir accès au financement. Advenant le cas où elles ne le reçoivent pas directement, il faudrait à tout le moins s’assurer que le fédéral et les provinces ont l’obligation de rendre des comptes. Il faut s’assurer que l’argent dévolu aux provinces pour telle ou telle activité francophone sera véritablement utilisé à cette fin, particulièrement en éducation.
    Ce que nous avons cru comprendre, c’est que lorsque des fonds sont transférés aux provinces pour le francophonie, ces derniers ne sont pas toujours utilisés par les services qui en ont fait la demande.
    Madame Nolette, vous pourriez peut-être nous faire part de vos commentaires à ce sujet.
    Je ne peux pas faire de commentaire sur ce qui touche le monde scolaire.
     D'accord.
    Personnellement, je travaille en ce moment au niveau postsecondaire et je préférerais ne pas...
    D'accord.
    Notre réunion est publique. Ce que nous disons ici ne reste pas ici. Ce n'est pas comme à la chasse, où ce que nous disons reste au chalet. Tout le monde pourra lire nos propos. Je ne veux pas que mes questions vous mettent dans l'embarras.
     Ce qui préoccupe le Comité, c'est que l'argent fédéral dépensé soit bien dépensé. Nous voulons nous assurer que l'argent est utilisé pour les raisons pour lesquelles il a été donné aux provinces. Ce n'est pas toujours évident, parce que le gouvernement fédéral ne demande pas toujours de reddition de comptes aux provinces. Pourtant, cela nous permettrait véritablement de voir les effets des sommes dépensées.
    Merci, monsieur Généreux.
    Nous passons maintenant à M. Arseneault.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je reviendrai peut-être sur les questions de M. Généreux, parce que je les trouve pertinentes. Elles font partie des questions que j'aimerais poser, mais mon temps de parole est seulement de cinq minutes.
    Je m'appelle René Arseneault, fier Acadien du Nouveau-Brunswick. Je suis le député de Madawaska—Restigouche, circonscription qui s'étend du nord-centre jusqu'au nord-ouest, de la Baie-des-Chaleurs jusqu'à la rivière Restigouche et jusqu'aux lacs du Haut-Madawaska.
    Monsieur Nolette, je veux m'assurer d'avoir bien compris les chiffres que vous avez mentionnés plus tôt. Le nombre de francophones a augmenté de 28 % au cours des 10 dernières années, c'est bien cela?
    Oui.
    Le nombre de francophones a augmenté de 55 % depuis 25 ans, c'est bien cela?
    Je n'ai plus les chiffres devant moi.
    D'accord. De toute façon, ce n'était pas ce chiffre qui m'importait.
    En fait, je voulais savoir si 45 % de ces francophones étaient vraiment des immigrants.
    Une très grande proportion des francophones sont des immigrants.
    J'ai arrondi à 45 %, pour avoir un chiffre rond, mais c'était à peu près cela, n'est-ce pas?
    Oui.
    D'accord.
    Nous avons entendu une foule de témoins parler de domaines autres que celui de la petite enfance. À un moment donné, nous avons parlé de l'immigration. L'immigration est importante. Nous avons appris que c'est un défi d'amener des immigrants francophones chez nous, mais que le défi de la rétention de ces immigrants est encore plus grand.
    Madame Lessard, tantôt, vous avez résumé quelque chose que nous savons tous très bien, mais je veux vous entendre le dire de nouveau. Vous avez dit que vos organismes étaient devenus la porte d'entrée des nouveaux arrivants francophones.
    Quelles répercussions cela peut-il avoir sur l'immigration francophone de savoir que leurs enfants peuvent recevoir une éducation en français dès la petite enfance? Selon vous, quelle est la relation entre le taux de rétention de ces immigrants francophones et l'offre active de services en éducation, de services spécialisés et tout cela? Y voyez-vous une relation?
    Ma question est-elle claire?
    Non.
    Observez-vous une relation directe entre ces deux facteurs? Autrement dit, une offre active de services à la petite enfance donne-t-elle lieu à un taux de rétention plus élevé des immigrants francophones?
    Je ne sais pas si je vais répondre correctement.

[Traduction]

    Vous pouvez répondre dans la langue de votre choix.

[Français]

    Je pense qu'il faut vraiment que nos services soient accessibles pour que nous obtenions un taux de rétention élevé. C'est vrai non seulement pour les services à la petite enfance, mais dans tous les domaines. C'est à l'étape de la petite enfance qu'il faut attraper les enfants, si je puis dire. Il faut vraiment prendre en main les enfants dès cette étape. S'ils entrent dans un système où il n'y a pas de français, il est trop tard. Nous avons besoin de les accueillir dès la petite enfance afin d'augmenter cette rétention.
    Je n'ai pas de statistiques à vous fournir et je n'ai pas fait de calculs, mais, selon mon expérience, plus les enfants sont jeunes lorsque nous les prenons en main, plus ils vont demeurer dans la francophonie.

  (1000)  

    Aussi, les parents vont demeurer dans les régions.
    Dans votre cas, vous représentez la région du sud de la province.
    Madame Huard, avez-vous quelque chose à ajouter?
    J'aimerais renchérir sur les propos de ma collègue. En fin de compte, nos organismes sont très similaires.
    J'ai beaucoup aimé l'expression qu'elle a employée lorsqu'elle a dit que nous étions la porte d'entrée. Déjà, vous pouvez imaginer à quel point il peut être difficile d'arriver dans un nouveau pays; c'est d'autant plus difficile quand on ne peut pas s'exprimer dans sa propre langue. Souvent, lorsque les gens se présentent à notre centre, ils poussent un soupir de soulagement. Ils se sentent chez eux, ils se sentent compris et accueillis. Nous les appuyons et nous répondons à leurs questions. Nous offrons des ateliers ne serait-ce que pour les informer de la façon de s'habiller en hiver. Certaines personnes qui arrivent au pays n'ont jamais connu la neige. Nous les accueillons en conséquence.
    Nous offrons également des services de garde pour permettre aux parents d'apprendre l'anglais, par exemple. D'autres organismes s'occupent d'accueillir les nouveaux arrivants, de leur enseigner l'anglais et de les aider à trouver un emploi. Pour notre part, nous offrons un service de gardiennage pour que les parents puissent faire ce genre de démarches.
    Nous n'avons pas de statistiques non plus nous permettant de déterminer si nos services permettent d'augmenter le taux de rétention des immigrants. Je n'en suis pas sûre à 100 %, mais j'ose croire que nos organismes facilitent l'intégration des nouveaux arrivants francophones ici, en Alberta.
    Ici, vous vous trouvez comme devant un tribunal, mais c'est vraiment plus décontracté. Vos propos et les documents que vous nous transmettez deviennent des éléments de preuve qui nous permettent de rédiger des rapports. S'il y a des éléments que vous n'avez pas eu l'occasion de communiquer, vous pouvez envoyer ces informations à notre greffière. Cela nous aidera à rédiger nos rapports.
    Monsieur Nolette, avez-vous des statistiques qui démontrent que la rétention des immigrants francophones a plus de succès dans les régions où il y a une offre active de services à la petite enfance?
    Je n'ai pas ces statistiques.
    Est-ce qu'elles existent, selon vous?
    Je ne le sais pas, je suis désolé.
    D'accord.
    J'aimerais revenir sur les propos de M. Généreux. Il est vrai qu'il est difficile pour le gouvernement fédéral de suivre la trace des fonds destinés aux organismes francophones, les uns après les autres, car la francophonie est éparpillée au sein d'un immense pays, à l'extérieur du Québec.
    Est-ce qu'il existe un organisme albertain qui chapeaute tous les organismes francophones? À titre d'exemple, est-ce que l'Association canadienne-française de l'Alberta compte tous les acteurs de la francophonie albertaine parmi ses membres?
    Oui, monsieur. L'ACFA est la porte-parole des francophones de l'Alberta. L'ACFA parle au nom de tous les Albertains d'expression française. Elle veut faire avancer tous les dossiers qui touchent la francophonie, y compris les services à la petite enfance. Nous travaillons en collaboration avec tous les autres organismes, dont ceux qui sont ici aujourd'hui.
    Il me reste cinq secondes.
    Il ne vous reste plus de temps, mais prenez ces quelques secondes quand même.
    Monsieur Nolette, je vous invite à nous faire part, au nom de toutes les communautés et de tous les organismes francophones, des pistes de solution qui nous permettraient de savoir où vont les fonds du gouvernement fédéral destinés à la francophonie albertaine, par exemple, de connaître les répercussions de ces fonds et les bienfaits qu'ils procurent, de façon à nous assurer que cela compte et permet de belles avancées.
    Merci, monsieur Arseneault.
    Nous allons continuer avec M. Choquette.
    Merci, monsieur le président.
    Je m'appelle François Choquette. Je suis le député de Drummond et je suis également vice-président du Comité.
    Madame Nolette, vous avez parlé de la formation du personnel. Vous avez dit que la feuille de route vous permettrait d'ajouter de nouveaux programmes. Pouvez-vous nous en dire quelques mots?
    Pour le moment, seuls les fonds de la feuille de route nous permettront de mettre sur pied de nouveaux programmes. Le Campus Saint-Jean reçoit une part de l'enveloppe destinée à la formation postsecondaire. Le Centre collégial ira chercher des fonds dans cette enveloppe pour le programme d'éducation de la petite enfance.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Nolette, vous avez parlé d'un problème que vous vivez, à savoir le fait qu'il n'y ait pas de clause linguistique dans plusieurs transferts fédéraux. Vous avez parlé du transfert en santé. Nous avons appris hier que le transfert en santé du fédéral subirait des compressions, ce qui nous inquiète beaucoup.
    Y a-t-il d'autres domaines où des réussites seraient possibles?
    Pour ce qui est de la petite enfance, à moins que je ne me trompe, le fédéral ne verse pas d'argent présentement. C'est un manque important. Vous venez de dire à quel point la petite enfance est importante pour maintenir, voire bâtir notre identité francophone.
    Qu'en pensez-vous? Est-ce un domaine pour lequel le gouvernement fédéral pourrait conclure une entente directement avec les communautés?

  (1005)  

    D'après moi, oui, et je vais laisser à mes collègues ici présents l'occasion d'exprimer leur point de vue à ce sujet.
    Pour revenir à ce que MM. Arseneault et Généreux ont soulevé plus tôt, je dirais que le financement direct des communautés assurerait une utilisation plus efficace des fonds. En ce moment, les fonds destinés ultimement aux communautés de langue officielle en situation minoritaire passent par plusieurs étapes bureaucratiques. Par exemple, ceux qui sont destinés à des institutions postsecondaires passent du ministère du Patrimoine canadien au ministère de l'Éducation de l'Alberta, pour se rendre ensuite au ministère des Études supérieures de l'Alberta, puis à l'Université de l'Alberta et, enfin, au Campus Saint-Jean. Cela représente de nombreuses couches de bureaucratie.
    Ce n'est qu'un exemple parmi d'autres. Ce phénomène a fait l'objet de plusieurs critiques. Je crois qu'il y aurait lieu, en Alberta et ailleurs au Canada, de verser les fonds plus directement aux communautés. Dans le cas de l'éducation de la maternelle à la 12e année, par exemple, les conseils scolaires francophones de partout au pays, qui ont été créés par des lois provinciales, pourront conclure des ententes directement avec Patrimoine canadien. De cette façon, les fonds de ce ministère n'auront plus à passer par les ministères provinciaux, puis par les conseils scolaires, avant d'arriver finalement aux élèves. Les conseils scolaires sont bien gérés. Je suis certain que Mme Lachance pourrait nous parler de la possibilité de conclure ce genre d'entente.
    Bref, à mon avis, le financement direct serait une façon d'assurer la reddition de comptes et d'éviter que l'argent ne se perde dans les couches bureaucratiques.
    Merci beaucoup.
    Il me reste très peu de temps. Je voulais poser une question à tout le monde, mais je n'y arriverai pas, malheureusement.
    Madame Lachance, vous avez dit avoir besoin de plus d'espaces réservés à la petite enfance. Pouvez-vous nous parler plus en détail de ce besoin? Comment le fédéral pourrait-il vous appuyer, notamment en matière d'infrastructures?
    Nos besoins en matière d'infrastructures sont criants. Pour pouvoir justifier que nous avons besoin d'une école, nous utilisons des locaux qui sont loin d'être adéquats. Ce sont souvent de vieilles écoles ou encore des bâtiments plutôt commerciaux qui n'étaient pas des écoles au départ. Vous pouvez comprendre à quel point cela peut être un défi de créer des salles de classe et, à plus forte raison, des espaces pour la petite enfance. Dans certaines de nos écoles, nous réussissons à créer des classes de prématernelle, mais c'est de plus en plus compliqué d'obtenir des espaces pour la petite enfance, étant donné que des écoles sont déjà à 100 % ou à 120 % de leur capacité.
    Pour ce qui est d'un possible appui fédéral, il s'agirait de nous aider à avoir des écoles qui accueillent les enfants de la petite enfance jusqu'à la 12e année. Il faudrait aussi comprendre l'importance des écoles; celles-ci sont au coeur de la communauté francophone.
    Le problème vient-il du fait que Statistique Canada n'a pas l'information exacte sur les ayants droit et que cela vous empêche de demander plus d'écoles au ministère, ou du fait que vous attendez encore ces nouvelles écoles que vous avez demandées?
     Je dirais que c'est l'un et l'autre.
    Les deux situations sont donc problématiques.
    Il y a aussi l'attrition découlant du fait que plusieurs ayants droit n'inscrivent pas leurs enfants à nos écoles. C'est un problème sur tous les plans.

  (1010)  

    Ce sont des défis pour vous, bien sûr.
    Madame Commance-Shulko, il y a un engouement très fort pour les programmes d'immersion française en Colombie-Britannique.

[Traduction]

    Est-ce la même chose ici en Alberta?

[Français]

    Par ailleurs, il y a un problème concernant l'enseignement du français langue seconde. En Colombie-Britannique, le programme est un peu difficile. Les gens s'inscrivent moins aux cours de français langue seconde; ils choisissent plutôt d'autres langues.
    Ici, en Alberta, qu'est-ce que vous remarquez relativement à ces deux programmes?
    Ma collègue Tamie Beattie sera ici cet après-midi pour parler de l'enseignement du français langue seconde, alors vous pourrez lui poser cette question.
    Merci beaucoup.
    Nous cédons maintenant la parole à un fier Acadien, Darrell Samson.
    Vous avez six minutes.
    Est-ce pour le deuxième tour?
    Non, c'est pour le premier tour. Nous en sommes toujours au premier tour.
    Monsieur Samson, vous pouvez faire votre présentation.
    Je n'ai pas perdu de temps, j'ai encore six minutes? Je n'ai pas commencé ma présentation.
    Il s'est déjà écoulé 14 secondes.
    Bonjour à tous. Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
    Je suis le seul Acadien de la Nouvelle-Écosse élu au fédéral. Je porte tout cela sur mes épaules, car cela me tient à coeur. J'ai travaillé pendant 31 ans au sein des conseils scolaires. Avant d'être élu, pendant 11 ans, j'ai été directeur général de toutes les écoles francophones de la Nouvelle-Écosse. J'ai d'ailleurs eu le grand plaisir de travailler avec Mme Dolorèse Nolette pendant quelques années. J'ai beaucoup fait affaire avec des associations et des organisations comme les vôtres, et je dirais que le sujet le plus important, c'est la petite enfance. Il n'y a pas de doute que cela aide chaque membre de la communauté à bâtir son identité et sa fierté et que cela rehausse la qualité de l'éducation. C'est la chose la plus importante.
    En Nouvelle-Écosse, lorsque j'étais directeur général, notre système a mis sur pied un programme pour la petite enfance, et aujourd'hui je suis très fier de dire que tous les élèves de 4 ans y ont accès. C'est une avancée très importante.
    Je sais qu'il y a des représentants de Patrimoine canadien ici. Tantôt, quelqu'un a demandé si le fédéral versait des fonds pour la petite enfance. Je pense que la petite enfance est l'un des domaines les plus importants pour Patrimoine canadien aujourd'hui, donc des projets sont possibles avec ce ministère. Il s'agit d'ouvrir les lignes de communication.
    J'aimerais poser une question ouverte à tous. Je sais que parfois mes préambules sont très longs et que c'est dangereux, d'ailleurs mes collègues me le rappellent souvent, mais voici la situation. Je crois que l'Alberta vient de signer ou signera bientôt une nouvelle entente avec le fédéral en matière de petite enfance. Pour la première fois de l'histoire du Canada, il y aura une disposition indiquant clairement que des fonds doivent être consacrés à la communauté francophone. Est-ce que quelqu'un voudrait en parler?
    Si vous n'étiez pas au courant, cela me fait plaisir de vous annoncer la nouvelle. Je veux certainement que vous fassiez des appels cet après-midi et que vous posiez des questions, parce que c'est extrêmement important que vous le sachiez. C'est une première, et cela vous donnera dorénavant un moyen d'action pour aller chercher des fonds essentiels.
    Madame Nolette, très rapidement, pouvez-vous nous dire s'il y a une augmentation du nombre d'étudiants dans les programmes d'éducation à la petite enfance? Par ailleurs, est-ce que ces programmes sont offerts en ligne?
    La réponse courte est oui, nos programmes seront offerts à la fois en ligne et en présentiel, selon le modèle choisi par les étudiants. Puisque nous attendons toujours l'approbation du ministère des Études supérieures afin de mettre en oeuvre notre programme, je ne peux pas vraiment vous répondre concernant l'intérêt réel. Nous avons cependant une idée très claire de l'intérêt perçu, pour ainsi dire.
    Notons qu'au cours des trois dernières années, nous avions une entente avec le Lakeland College ici, en Alberta. Cette entente se termine le 31 mars. Conformément à cette entente, ce collège a traduit son programme, qui était offert entièrement en ligne, afin de l'offrir en français. Nous pensons que nous pouvons maintenant faire un travail davantage pertinent pour le milieu minoritaire francophone en formant des éducatrices qui sont sensibles aux questions interlinguistiques et interculturelles ainsi qu'aux réalités du développement langagier en milieu minoritaire.

  (1015)  

    Merci. Nous avons seulement six minutes, alors il faut procéder rapidement.
    Bien sûr, je veux féliciter les gens du conseil scolaire pour leur travail. C'est extrêmement important. Les écoles sont le point de rassemblement de toute la communauté et je remercie tous les organismes qui y contribuent d'une façon ou d'une autre.
    Il y a une nouveauté: pour la première fois, des fonds pour les infrastructures sont disponibles par l'entremise d'Infrastructure Canada. Auparavant, les organismes allaient toujours chercher des fonds auprès de Patrimoine canadien pour les infrastructures et les programmes, mais il était difficile d'en obtenir parce que toutes les communautés de langue en situation minoritaire en demandaient. Nous avons maintenant créé une enveloppe pour cela à Infrastructure Canada et il est possible de demander des fonds. Le seul problème, c'est que les projets de la province seront inscrits à une liste de priorité. Dans certaines provinces, il faut se mettre à genoux pour figurer sur la liste. Au moins, sachez que cela existe: cela vous permettra d'avoir des discussions.
    Comme l'a mentionné Mme Lachance, la question des espaces est très importante. Encore une fois, c'est beaucoup plus difficile en situation minoritaire. Les garderies et les services à la petite enfance sont d'une importance cruciale. Le problème est que nous n'avons pas d'écoles avoisinantes. S'ils veulent réellement inscrire leurs enfants à l'école francophone, les parents doivent avoir accès à un service de garderie avant et après l'école. Cet argument est extrêmement important qu'il faut rappeler aussi souvent que possible.
    Je vais vous dire qu'en Nouvelle-Écosse, dans l'espace de 10 ans, c'est à 95 % grâce au programme offert à la petite enfance que nous avons augmenté notre population d'élèves de 25 % sur le territoire de la province. La totalité des élèves anglophones a diminué de 15 %, ce qui donne un différentiel de 40 %. Il est vrai que le conseil scolaire avait un très bon directeur général et de très bons enseignants, mais, au bout du compte, cela a été le résultat du travail effectué sur le terrain.
    De la même manière, chacun d'entre vous a un rôle extrêmement important à jouer. Je vous félicite et je vous remercie de ce travail. Nous avons vraiment ici aujourd'hui une variété de représentants qui démontre cette vitalité.
    Je termine...
    C'est à mon tour de vous remercier, monsieur Samson, car nous devons passer immédiatement au prochain intervenant, soit M. Vandal.
    Je suis député fédéral de Saint-Boniface—Saint-Vital, dans la ville de Winnipeg.
    J'aimerais poursuivre la discussion sur un sujet que mon ami M. Samson a abordé. J'ai eu le plaisir d'annoncer vendredi dernier, au nom du ministre Jean-Yves Duclos, une entente bilatérale entre le Manitoba et le Canada en matière de petite enfance. Je crois que, la même journée, la Colombie-Britannique a annoncé la signature d'une même entente. Donc, l'Alberta l'a déjà signée. L'entente avec le Manitoba est de 47 millions de dollars sur trois ans, dans le but de créer 1 400 places en garderie dans cette province. Nous essayons de déterminer combien de ces places seront destinés aux francophones, et ce n'est pas facile. Toutefois, comme M. Samson l'a dit, il y a une clause qui garantit des places en milieu francophone. Je vous encourage à faire vos propres recherches et démarches pour déterminer ce qui vous revient.
    Puisque personne n'était au courant de cette entente entre l'Alberta et le Canada, ma question porte sur les relations au sein de la province. Est-ce que le gouvernement de l'Alberta a un plan stratégique à l'égard de la petite enfance? De plus, quelles sont les relations entre vos organismes et le gouvernement provincial?
    M. Nolette pourrait répondre en premier.

  (1020)  

    Pardon. La question était: comment sont nos relations entre nos organismes et le gouvernement provincial?
    Premièrement, est-ce que la province a un plan stratégique à l'égard de la petite enfance francophone? De manière plus générale, quelles sont vos relations avec la province en ce qui concerne la petite enfance?
    De façon générale, la relation est bonne présentement, comme en témoigne l'annonce, en juin dernier, d'une politique sur la francophonie.
    En ce qui touche la petite enfance plus particulièrement, je vais céder la parole à Mme Anderson.
    Nous avons fait la demande pour plusieurs places en garderie. L'argent qu'on nous donne pour des places à 25 $, c'est bien beau, mais nous avons aussi besoin d'un réseau de garderies qui desserve toute l'Alberta, et pas seulement de places à 25 $.
    Je ne sais pas si cela répond à votre question.
    À la FPFA, nous planifions la mise sur pied d'un réseau de garderies qui desservirait toute la province, mais cela vient de nous. Nous attendons le soutien financier du gouvernement pour aller de l'avant.
    Quelle est la longueur des listes d'attente pour une place dans une garderie francophone?
    Les listes d'attente sont très longues. Ce n'est pas partout qu'on offre des places dans une garderie francophone. De telles places sont offertes à Edmonton, mais il n'y en a pas nécessairement en dehors d'Edmonton ou de Calgary. Il y a de petits endroits qui en offrent, mais ce n'est pas partout. En fait, les besoins sont méconnus, car certains parents francophones ne connaissent pas l'existence de places en français. Si ce choix ne leur est jamais offert, leurs enfants vont toujours fréquenter des garderies anglophones. S'il y avait des places en garderie francophone, je suis sûre qu'on en profiterait, mais il n'y en a pas.
    J'ai une question d'ordre plus général.
    En Alberta, la population francophone est-elle regroupée à Edmonton, à Calgary? Où trouve-t-on le plus grand nombre de francophones en Alberta?
    Il y a des francophones partout dans la province. Bien sûr, il y en a plus à Calgary et à Edmonton, mais il y a des poches de francophones dans le nord-ouest, dans le nord-est, dans le sud, dans les Rocheuses. La population francophone est très éparpillée, mais très présente.
    Cela complique l'offre de services. Dans le cas de Winnipeg, la plupart des francophones vivent à Saint-Boniface—Saint-Vital. C'est plus facile pour les écoles et les garderies francophones.
    Quel est le salaire annuel moyen d'un éducateur à la petite enfance dans votre province?
    Madame Nolette, voulez-vous répondre?
    J'espérais que la question ne s'adresserait pas à moi.
    N'importe qui ayant l'information peut répondre.
    Honnêtement, je ne le sais pas.
    D'après les chiffres avancés il y a une semaine, il me semble que le salaire horaire varie entre 17 $ et 22 $, selon l'expérience et les études de l'éducatrice.
    Il me reste 30 secondes pour poser une question générale.
    Quelle est la principale priorité en matière de services francophones à la petite enfance en Alberta? N'importe qui peut répondre.
    Je dirais que c'est l'offre de services et l'accès.
    Il faut vraiment rejoindre les francophones là où ils sont. Si nous ne leur offrons pas de services, ils vont aller du côté anglophone. Ils n'utiliseront pas nos services en français. Il doit d'abord y avoir des points de service partout à Edmonton et à Calgary, mais aussi en région.
    Merci beaucoup, monsieur Vandal.
    Madame Boucher, c'est votre tour. Vous pouvez commencer par vous présenter.
    Je ne prendrai pas beaucoup de temps pour me présenter, parce que je veux vous donner le plus de temps possible pour répondre.
    Je m'appelle Sylvie Boucher et je suis une députée conservatrice de la grande région de Québec, plus précisément Beauport—Côte-de-Beaupré—Île d'Orléans—Charlevoix. J'ai été secrétaire parlementaire de la ministre de la Francophonie et des Langues officielles ainsi que secrétaire parlementaire pour la Condition féminine.
    Tantôt, vous avez dit que, pour qu'il y ait reddition de comptes, il faudrait donner l'argent directement aux organismes. Cela s'est déjà fait dans le passé et on s'est fait ramasser. Je m'en souviens, car c'est le gouvernement conservateur qui était alors au pouvoir.
    L'Alberta vient tout juste de signer une entente, mais les demandes pour des places dans des garderies francophones sont noyées dans les demandes pour des places dans des garderies anglophones. Il n'y a rien de structuré pour la base francophone ici, en Alberta. Ai-je bien compris?

  (1025)  

    Cela existe, mais nous avons besoin de plus de fonds pour offrir des services partout dans la province. Nous avons des idées, mais c'est dur de les réaliser sans argent.
    En ce moment, la province a-t-elle une oreille favorable à votre égard? Le gouvernement fédéral transfère de l'argent aux provinces, mais ce sont elles qui décident où elles le donnent. Les francophones de l'Alberta sont-ils entendus? Hier, nous sommes allés à Vancouver et nous avons appris que l'écoute dépendait de la façon dont cela fonctionnait. Les francophones de là-bas ne sont pas reconnus. Les francophones de l'Alberta sont-ils reconnus comme une minorité?
    Je dirais que cela est variable et que cela dépend du domaine. Dans certains domaines, la relation avec le gouvernement provincial est excellente, mais dans d'autres domaines, elle est plus difficile.
    Dans quels domaines la relation avec la province est-elle plus difficile? Nous avons besoin de le savoir pour vous aider.
    Je dirais qu'en matière d'éducation, il y a une bonne écoute. Toutefois, on nous répond régulièrement que la situation économique est difficile et que le rattrapage en matière d'infrastructures n'est pas limité aux infrastructures francophones.
    D'accord, c'est clair. Merci.
    Je vais laisser le reste de mon temps de parole à M. Généreux.
    Merci, madame Boucher.
    Je voudrais revenir sur votre réponse, sans vouloir vous mettre dans l'embarras.
    Il est question des infrastructures liées à la petite enfance. Comme vous le savez, à Vancouver, il y a une crise relativement aux coûts des loyers et des infrastructures. C'est tellement dispendieux que c'est presque impossible d'avoir de nouveaux espaces. Est-ce la même chose en Alberta?
    J'imagine qu'il y a une différence entre Calgary et Edmonton, particulièrement en ce qui concerne l'accès à des espaces publics. Les coûts sont-ils un frein?
    Les coûts sont élevés en Alberta. Le coût de la main-d'oeuvre est très élevé, car il est lié à l'économie locale où le domaine des ressources naturelles offre des salaires importants.
    Au sujet du coût des logements, je ne pense pas que la situation soit la même qu'à Vancouver. La situation à Vancouver est quand même unique au pays.
    En matière d'infrastructures, quelle est la priorité? Le budget du gouvernement a ajouté 400 millions de dollars pour tout l'espace francophone du Canada. Nous verrons comment cela va se traduire. Le diable est souvent dans les détails. Il faudra voir comment l'argent va réussir à se rendre jusqu'à vous.
    Si des sommes d'argent étaient disponibles dès demain matin, quelle serait la priorité absolue en matière de petite enfance? Serait-ce de construire de nouvelles garderies? Serait-ce d'intégrer les garderies dans les écoles ou de les construire près de celles-ci?
    Je vais changer de chapeau, car je suis aussi la présidente du comité des parents.
    Chez nous, c'est une question qui revient souvent. Il faut que les garderies soient dans les écoles. Il faut trouver une façon d'inclure ces infrastructures dans les écoles. Selon moi, la question est là. Je ne pense pas que cela entraînerait trop de coûts. Comme vous l'avez mentionné, pour augmenter le taux de fréquentation de nos écoles, il faut vraiment que les garderies soient dans les écoles.
    Au Québec, on appelle cela la...
    Malheureusement, nous devons nous arrêter ici, monsieur Généreux.
    Au nom de tous les membres du Comité, je voulais vous remercier de vos excellentes présentations et de l'excellent échange que nous avons eu. Votre contribution aux travaux de notre comité est tout à fait essentielle. Enfin, je vous félicite de votre travail sur le terrain. Bravo!
    Des voix: Bravo!
    Nous allons suspendre la séance jusqu'à cet après-midi. Nous rencontrerons d'autres témoins à 14 heures.
    Merci beaucoup.

  (1030)  


  (1405)  

    Bienvenue à cette séance du Comité permanent des langues officielles qui se poursuit.
    Je veux d'abord vous dire que nous sommes très heureux d'être parmi vous aujourd'hui à Edmonton.
    C'est une journée tout à fait spéciale. Tantôt, on m'a remis le texte de la proclamation du Mois de la francophonie albertaine. C'est tout à fait extraordinaire. J'aimerais vous lire non pas le document dans son entier, mais les trois derniers paragraphes:
ATTENDU QUE chaque année en mars, les Rendez-vous de la Francophonie sont célébrés partout au Canada par 10 millions de Canadiens d’expression française, dont plus de 268 000 en Alberta; et

ATTENDU QUE le 20 mars de chaque année, la Journée internationale de la Francophonie est célébrée par 270 millions de locuteurs du français du monde entier;

PAR CONSÉQUENT, le lieutenant-gouverneur en conseil ordonne l’émission d’une proclamation proclamant le mois de mars de chaque année comme étant le Mois de la francophonie albertaine.
    C'est signé par l'honorable Rachel Notley, première ministre de l'Alberta.
    Je pense que ce geste est vraiment très important pour l'Alberta. Je voulais simplement le souligner.
    Nous venons tout juste de visiter une garderie. Ce matin, nous avons souligné à quel point il était important que les jeunes apprennent le français tôt dans leur vie. C'est dans ce contexte tout à fait extraordinaire que nous vous rencontrons ici aujourd'hui, et nous en sommes très heureux.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue aux divers intervenants que nous accueillons aujourd'hui. Tout d'abord, nous recevons à titre personnel Mme Martine Cavanagh, qui est professeure au Campus Saint-Jean de l'Université de l'Alberta, Mme Katherine Mueller, qui est instructrice à la Werklund School of Education, à l'Université de Calgary, et M. Steven Urquhart, qui est professeur agrégé de français et directeur du Département des langues modernes à l'Université de Lethbridge. Nous accueillons également M. Albert Nolette, de l'Association canadienne-française de l'Alberta. Nous avons aussi parmi nous Mme Kate Peters, qui est membre du conseil d'administration national de Canadian Parents for French; elle est accompagnée de son bébé, à qui je souhaite la bienvenue également. Nous recevons aussi Mme Victoria Wishart et M. Michael Tryon, de Canadian Parents for French en Alberta, Mme Sarah Fedoration, qui est directrice adjointe de l'École Grandin, du conseil scolaire Edmonton Catholic Schools, et Mme Tamie Beattie, qui est coordonnatrice du programme de français au Edmonton Public School Board.
    Je vous souhaite à tous la bienvenue.
    Je remercie tout particulièrement M. Albert Nolette, qui est en quelque sorte l'âme organisatrice de cette journée.
    Je pense n'avoir oublié personne.
    Nous allons procéder de la façon suivante. Vous allez disposer de cinq minutes chacun. Je serai un peu strict quant à la durée des interventions, étant donné que nous voulons vous entendre tous. Si certains prennent trop de temps, d'autres en auront moins. C'est pourquoi il faudrait essayer de se limiter à cinq minutes. Si vous dépassez le temps imparti, je vous en aviserai. Nous allons tous vous entendre et nous passerons ensuite à la période des commentaires et questions à laquelle vont participer les membres du Comité.
    Je vous remercie de participer à cette séance.
    Nous allons commencer tout de suite par Mme Martine Cavanagh.

  (1410)  

    Je propose de vous présenter ma perspective particulière sur le paysage linguistique de l'Alberta en me concentrant sur ce que je connais le mieux de par ma fonction de vice-doyenne en éducation au Campus Saint-Jean de l'Université de l'Alberta: la formation d'éducateurs francophones pour les programmes d'immersion et les écoles francophones.
    D'abord, je dirai deux mots sur la situation de fond, qui prend la forme d'une tendance actuelle. Comme vous le savez sans doute déjà, les programmes d'immersion et les écoles francophones sont de plus en plus populaires en Alberta et dans l'Ouest canadien. Permettez-moi de vous citer quelques chiffres, pour vous donner une idée. À l'heure actuelle, il y a 46 000 élèves inscrits aux programmes d'immersion, ce qui représente environ 6,6 % de la population totale des élèves, et il y a environ 8 000 élèves inscrits dans les écoles francophones. En 15 ans, les inscriptions aux programmes d'immersion ont augmenté de 50 % et celles dans les écoles francophones ont presque doublé. Si nous nous fions aux statistiques, cette tendance à la hausse se maintiendra au cours des 20 prochaines années.
    Au-delà des chiffres, j'aimerais insister sur le fait que nous sommes au coeur d'une situation inédite. Plusieurs raisons expliquent cet engouement pour les programmes d'immersion et les écoles francophones.
    Parmi les raisons, on cite le fait que les anglophones et les immigrants allophones ont une conscience accrue des avantages du bilinguisme sur les plans intellectuel, culturel et socioéconomique.
    Il existe également le facteur de la deuxième génération de finissants de l'immersion qui n'ont pas besoin d'être convaincus des bénéfices du bilinguisme et qui inscrivent leurs enfants à l'école d'immersion afin qu'ils aient accès aux mêmes possibilités qu'eux.
    Il y a aussi la migration des francophones de l'est vers l'ouest du pays, surtout vers l'Alberta, qui a augmenté de façon très marquée durant les dernières années.
    Finalement, l'immigration en provenance des pays francophones d'Afrique a augmenté très rapidement en Alberta durant les dernières années.
    En conséquence, un nouveau défi se présente à nous, à la francophonie albertaine et à notre institution.
    À présent, je vais parler de notre place dans le portrait en tant qu'établissement francophone.
    Actuellement, le programme de formation d'enseignants du Campus Saint-Jean ne parvient pas à répondre à la demande d'enseignants francophones. En effet, seulement un poste sur quatre est pourvu par notre institution. Chaque année, les écoles des conseils scolaires francophones et celles offrant des programmes d'immersion française se tournent vers les provinces de l'Est et, tout récemment, vers l'étranger, vers des pays comme la France, pour trouver des enseignants qualifiés. La hausse rapide des inscriptions dans les écoles d'immersion française et les écoles francophones a conduit à une pénurie grave d'enseignants qualifiés pour oeuvrer dans ces deux contextes éducatifs, surtout dans les provinces de l'Ouest.
    Toutefois, il y a une lueur d'espoir. Il y a deux sources de solutions potentielles. Nous avons, au Campus Saint-Jean, de plus en plus d'étudiants provenant des programmes d'immersion qui souhaitent à leur tour devenir enseignants dans les écoles d'immersion. Nous avons aussi un nombre croissant d'étudiants issus de la diaspora francophone africaine.
    Cette conjoncture actuelle offre quatre défis. En plus du défi de la formation qui se pose évidemment à toute faculté d'éducation, nous faisons face, au Campus Saint-Jean, à trois autres défis majeurs. Le premier est celui de garantir la compétence linguistique de nos étudiants issus des programmes d'immersion et de français langue seconde. Le second est celui de garantir la compétence culturelle de nos étudiants immigrants d'Afrique. Enfin, le troisième est celui de répondre à la demande continue de directions d'écoles francophones.
    Voici ce que nous proposons pour relever ces trois défis.
    Du côté du développement des compétences langagières, il nous faut développer des outils d'évaluation de langue efficaces, mettre en place des mesures de soutien linguistique efficaces tout au long du programme et développer des cours bien adaptés aux besoins variés des étudiants.
    Du côté de la compétence culturelle, il nous faut créer un programme passerelle visant la familiarisation avec le contexte scolaire canadien avant l'entrée au programme de formation. Ce programme est fondamental pour permettre une intégration sociale réussie des nouveaux arrivants francophones, en particulier celle des femmes, qui représentent un pourcentage élevé de notre population étudiante. Ensuite, il nous faut mettre en place des mesures d'encadrement des étudiants durant le programme de formation et durant les stages. Il nous faut aussi élaborer des formations pour les enseignants qui accueillent des stagiaires dans leur classe.
    Du côté des directions d'écoles, il nous faut créer un ensemble de cours en ligne en administration scolaire, dont les objectifs seraient alignés sur la nouvelle norme de qualité pour le leadership scolaire. Ces cours permettraient d'obtenir un certificat pouvant mener à l'obtention d'une maîtrise en éducation.

  (1415)  

    La mise en place de ces mesures exige des moyens financiers importants. Or force est de constater que, si les besoins ne cessent d'augmenter, les ressources, elles, ne cessent de diminuer. À titre d'exemple, le budget du service de la pratique, qui gère les placements de nos étudiants stagiaires, est passé de 600 000 $ en 2012 à 200 000 $ en 2017. Cette baisse signifie qu'on ne peut pas aller de l'avant avec le programme passerelle, les programmes d'encadrement, ce qui brime tout particulièrement les femmes issues de l'immigration, qui voient leurs chances d'accès à un emploi d'éducatrice diminuer.
    En conclusion, l'éducation est un élément clé dans la promotion du bilinguisme dans l'Ouest canadien. Le programme de formation des éducateurs au Campus Saint-Jean a un rôle essentiel à jouer dans ce projet. Nous élaborons la vision et les mesures nécessaires pour relever le défi et invitons le gouvernement fédéral à collaborer à leur mise en oeuvre.
    Merci beaucoup, madame la vice-doyenne de l'éducation au Campus Saint-Jean de l'Université de l'Alberta.
    Nous allons passer tout de suite à Mme Katherine Mueller.

[Traduction]

    Katherine travaille au Werklund School of Education à l'Université de Calgary.

[Français]

[Traduction]

    Je suis très heureuse de vous parler aujourd'hui à titre d'instructrice des enseignants en formation initiale en français qui sont inscrits au programme de baccalauréat en enseignement à la Werklund School of Education de l'Université de Calgary. J'enseigne les cours de spécialisation en français aux candidats inscrits au baccalauréat en éducation qui se spécialisent dans l'enseignement en immersion française et du français langue seconde, et dans un contexte francophone.
    De plus, je participe depuis plusieurs années au placement en stage des candidats, et je les supervise pendant leur première année de stage.
    Je vous parlerai avec plaisir des problèmes liés à la formation des éducateurs de FLS et des programmes d'immersion française, de même que des programmes qui sont offerts en Alberta.
    Le programme de baccalauréat en éducation offert à la Werklund School of Education est un programme primé. Nous offrons divers parcours aux étudiants qui veulent obtenir leur diplôme en enseignement, y compris un programme B.Ed. de deux ans après obtention d'un diplôme.
    Les cours de spécialisation en français mettent l'accent sur la pédagogie fondée sur la recherche afin d'offrir une solide formation et un solide perfectionnement professionnel à nos futurs enseignants en français. À la Werklund School, nous avons environ 20 étudiants qui obtiennent leur diplôme chaque année, et près de 90 % d'entre eux sont embauchés immédiatement à leur sortie. La plupart travaillent dans la région de Calgary pour le Calgary Board of Education, le Calgary Separate School District, la Rocky View Schools Division, la Foothills School Division, les écoles privées dans la région et le Conseil scolaire FrancoSud.
    Près de la moitié de nos candidats au baccalauréat cette année ont pour langue maternelle le français et viennent de France, du Québec et de communautés francophones ailleurs au pays, ainsi que d'autres pays de la francophonie. Les autres sont des étudiants qui ont eux-mêmes appris le français dans un programme d'immersion ou de langue seconde. Notre programme est structuré de telle sorte que les enseignants en formation initiale forment une cohorte qui sont ensemble dans plusieurs cours pendant les deux ans, ce qui leur permet de tisser de solides liens professionnels.
    La Werklund School of Education entretient des liens étroits avec les écoles et les divisions scolaires de la région, et nous nous efforçons de répondre à leurs besoins pour que la formation que nous offrons aux enseignants soit en phase avec la réalité des salles de classe.
    Il est indispensable de maintenir des liens solides entre les programmes de formation des enseignants et les écoles qui offrent des stages à nos enseignants en formation initiale. Nous cultivons ces liens afin que la formation que nous leur donnons soit ce dont ils auront besoin dans les salles de classe d'immersion française ou de français langue seconde.
    Les besoins en enseignants d'immersion française et de français langue seconde hautement qualifiés vont croissants dans la région de Calgary, et nous continuons activement de recruter de nouveaux candidats.
    J'ai plusieurs observations au sujet de l'état de la formation en français à Calgary, que je fais encore une fois à titre d'instructrice qui enseigne à l'université à des enseignants en formation initiale.
    Premièrement, les écoles à Calgary et dans la région offrent des programmes d'immersion française tant au point d'entrée initiale — c'est-à-dire au préscolaire, à la maternelle et en première année — qu'en entrée tardive, soit à la septième année. Nous offrons divers programmes de français langue seconde, et des programmes aux élèves francophones. De plus, trois écoles qui font partie du Calgary Board of Education offrent actuellement un programme de FLS intensif.
    Deuxièmement, les partenariats de recherche entre l'Université de Calgary et les conseils scolaires locaux ont donné lieu à une relation fructueuse et à des réflexions utiles sur la prestation de cours de français qui profitent au programme de préparation des enseignants de l'université et aux enseignants dans les salles de classe.
    Je participe par exemple depuis 2012 à une étude longitudinale avec le Calgary Board of Education sur les stratégies de perfectionnement des compétences linguistiques orales et scolaires dans les salles de classe de FLS et d'immersion française. J'ai collaboré avec le CBE pour offrir une semaine de formation professionnelle à environ 80 enseignants en immersion française chaque été au cours des cinq dernières années.
    Ensuite, il est grandement souhaitable d'offrir des programmes de français langue seconde et d'immersion française aux jeunes enfants. Nous savons à partir des recherches considérables qui ont été menées sur le sujet que les jeunes enfants sont tout particulièrement réceptifs à l'éducation en langue seconde. Si on leur offre cette possibilité, les élèves peuvent poursuivre leur formation en français tout au long de leur scolarité et devenir des locuteurs compétents.
    Le gouvernement de l'Alberta appuie fermement l'enseignement du français, et les programmes d'immersion à Calgary demeurent très populaires. Toutefois, ce ne sont pas toutes les écoles au sein du Calgary Board of Education qui offrent un programme de français langue seconde. À ma connaissance, la décision est prise par la direction de l'école, à la demande des parents et en collaboration avec eux.
    De plus, il est parfois difficile pour les enfants de continuer leur formation en FLS ou en immersion française dans certains quartiers où ils n'ont pas accès, après leurs études primaires, à un programme au premier cycle du secondaire dans leur région. Les administrateurs et les éducateurs des programmes d'immersion à Calgary ont appris dernièrement une nouvelle angoissante: le Calgary Board of Education vient de désigner les programmes d'immersion et d'autres programmes comme programmes optionnels en raison du coût élevé du transport des élèves qui choisissent un programme qui se donne à l'extérieur de leur quartier.
    Ainsi, les élèves en immersion française de ce conseil scolaire n'ont pas accès au transport en autobus, et les parents doivent avoir recours au transport public ou à d'autres modes de transport s'ils veulent que leurs enfants participent à un programme d'immersion française. Je sais que le programme d'immersion française du Calgary Board of Education a connu quelques départs à la suite de cette décision. Il est pénible de voir des contraintes financières pousser les écoles à considérer les programmes d'immersion comme des programmes optionnels ou les éliminer complètement.
    Dans le cadre de mon travail avec les enseignants réservistes et les enseignants de français langue seconde et d'immersion en français, tant dans le contexte des stages que de la recherche, j'ai eu l'occasion de discuter avec des enseignants en première ligne et d'en apprendre sur les défis qu'ils doivent relever. Un des plus importants est le manque de matériel pédagogique et de ressources disponibles pour les enseignements en immersion française. Ils sont nombreux à créer leurs propres ressources et à utiliser les ressources créées pour les francophones.
    Il est indispensable de reconnaître que les approches pédagogiques en FLS et en immersion française diffèrent grandement de celles du français langue maternelle, et il est important que les enseignants en français langue seconde et en immersion française puissent avoir accès à du matériel et des ressources spécialisées pour les aider. Nous devons aussi nous assurer que le matériel pédagogique est adapté au contexte canadien.

  (1420)  

    Katherine, je vais vous demander de poursuivre en répondant aux questions ou commentaires des membres.
    Bien sûr.
    Nous passons à Steven maintenant.

[Français]

    Je vais, moi aussi, parler en anglais.

[Traduction]

    Merci de votre invitation. Je suis directeur du Département des langues modernes à l'Université de Lethbridge, professeur agrégé de français, et directeur du French Language Centre, le FLC, à l'Université de Lethbridge, qui est financé par le Protocole sur les langues officielles dans l'enseignement. Avant de poursuivre, j'aimerais simplement mentionner que je suis un peu triste de voir que je suis le seul représentant du sud de l'Alberta. Je sais que Calgary est dans le sud, mais le sud comprend également bien sûr Medicine Hat. Il aurait été important pour votre rapport d'avoir les commentaires des consultants en matière de français dans les villes importantes qui se trouvent à deux heures au sud de Calgary.
    À titre de professeur de français et de directeur du FLC, je connais les membres de la communauté francophone et francophile du sud. Mes enfants vont à l'École Lavérendrye et le FLC collabore avec l'ACFA et Cinémagine dans divers projets axés sur le français. Ma femme est conseillère pédagogique au conseil scolaire catholique à Lethbridge, et nous connaissons de nombreux enseignants de français au sein du conseil public. Il s'agit parfois d'anciens étudiants à l'Université de Lethbridge qui sont ensuite devenus correcteurs des DELF, les tests de compétence en langue française, que le centre offre aux étudiants universitaires, le Tous Publics, et aux élèves du primaire, le Junior.
    Je pense que les divers intervenants francophones, l'École Larérendrye, l'ACFA, Cinémagine et le FLC collaborent de plus en plus souvent à divers projets et activités. Nous avons un concours de courts métrages, une semaine du film francophone, des projets de traduction, etc., dans la région depuis quelques années, soit quatre si je me souviens bien. Je trouve toutefois qu'il manque encore de communications entre l'université, la communauté francophone et les conseils scolaires. Les fonds versés au FLC ont permis de promouvoir le français sur le campus, d'attirer de nouveaux étudiants, et de rallier les intéressés au français dans la ville et la région immédiate.
    Je suis très reconnaissant au gouvernement fédéral de son financement. Les inscriptions sont quelque peu en baisse à l'université, et il est donc nécessaire de poursuivre les efforts pour promouvoir le français, par exemple en exerçant des pressions pour rendre le français obligatoire à l'obtention d'un diplôme universitaire au Canada anglais.
    Cela étant dit, le financement est vraiment important, car il stimule l'intérêt à l'égard du français à Lethbridge et à Medicine Hat, où nous offrons aussi les tests DELF et gérons un groupe de correcteurs qui comprend des enseignants et deux professeurs au collégial.
    Au sujet des préoccupations et des recommandations, je m'inquiète du niveau de compétence des enseignants qui n'ont pas le français comme langue maternelle et qui enseignent le français au FLC et dans les programmes d'immersion. J'ai le sentiment qu'ils communiquent des erreurs de toutes sortes aux élèves du primaire et du secondaire. C'est, bien sûr, le point de vue d'un anglophone. Ainsi, pour aider ceux et celles qui ne sont pas suffisamment en contact avec le français, le FLC organise notamment des séances de rattrapage, ou des ateliers de perfectionnement. Toutefois, nous manquons cruellement, dans le sud à tout le moins, de mentors et d'enseignants francophones, et d'assistants linguistiques franco-canadiens, de même que d'occasions de perfectionnement pour les non-francophones qui veulent améliorer ou peaufiner leurs connaissances du français.
    Nous avons besoin d'occasions de recevoir une dose intensive de français, puisque les cours universitaires en sont souvent privés, faute de financement, de temps et de personnel. Cela s'applique également, à mon avis, aux écoles primaires et secondaires. Il serait formidable d'avoir pour les étudiants et les universités des séjours d'immersion payés, des jumelages d'écoles ou de villes, des voyages, des échanges ou des activités de correspondance avec des écoles au Québec ou ailleurs, notamment en Acadie. Il est indispensable, à mon avis, de créer des liens de cette nature pour assurer la survie, la prospérité et la qualité du français dans le sud de l'Alberta.
    Il faut aussi créer des postes pour établir ces liens. Ce ne sont pas des tâches que l'on peut confier aux enseignants, qui en ont déjà de lourdes tâches d'enseignement. Il nous faut des gens pour le faire.
    Il serait aussi merveilleux d'obtenir du financement pour mettre en place des activités radiophoniques dans les écoles et les universités, ainsi que des chaînes YouTube, des groupes d'échanges, des concours de poésie, des concours d'épellation, des dictés, et des études en traduction à l'Université de Lethbridge. Les compétences interculturelles et en traduction sont des options intéressantes pour les étudiants et elles sont sous-utilisées.
    Le programme échange-travail Québec-Alberta a malheureusement été supprimé il y a quelques années. C'était une excellente idée. En créant et mettant à l'essai un programme subventionné de style « Découverte du français » ou un programme d'apprentissage continu à l'Université de Lethbridge, en collaboration avec l'ACFA et d'autres organismes à Lethbridge, on pourrait favoriser l'apprentissage du français à l'extérieur des salles de classe. Je sais que cela existe ailleurs, mais pas dans le sud.
    Dans le sud de l'Alberta, nous devons stimuler le désir à l'égard de tout ce qui touche au français, et non pas voir cela comme une obligation, en faisant la promotion du Canada français, de son histoire, de sa présence dans la région — nous avons la coulée à Lethbridge, par exemple —, et lutter contre l'idée que le français québécois ou le français canadien est pauvre. J'entends ce commentaire constamment. Faire des anglophones qui ont appris le français et qui ont de bons emplois et une belle qualité de vie des vecteurs de la promotion du français serait important selon moi.
    Enfin, il semblerait logique également de faire la promotion du français en même temps que des langues et de la culture autochtones dans la région — la plus grande réserve au Canada est située à côté de Lethbridge. Les deux sont des minorités et sont négligées et traitées de la même façon, à différents degrés de mépris.

  (1425)  

    Merci. Il n'y a pas de solution magique. J'en suis conscient, mais je crois que mes opinions reflètent celles de mes collègues.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Urquhart.
    Monsieur Nolette, vous avez déjà fait une présentation ce matin, mais maintenant vous allez nous parler du sujet à l'ordre du jour de cet après-midi.
    Nous vous écoutons.

  (1430)  

    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à vous remercier de nouveau de nous avoir invités à témoigner dans le cadre de cette étude sur les programmes d'enseignement du français et de l'anglais langue seconde.
    Fondée en 1926, l'Association canadienne-française de l'Alberta, ou ACFA, a pour mission de défendre les acquis de la communauté francophone en Alberta, de faire avancer ses droits et d'accroître sa vitalité. Elle représente 268 640 Albertains d'expression française et est la porte-parole concernant les enjeux ayant une incidence sur la francophonie albertaine.
    Dans le cadre de cette étude, j'aimerais m'attarder sur les trois points principaux suivants: un statut officiel pour les programmes d'immersion française, un appui au Campus Saint-Jean pour combler la pénurie d'enseignants de langue française et un rapprochement entre les communautés francophones et les apprenants du français.
    Au sujet du premier point, soit un statut officiel pour les programmes d'immersion française, je souligne que l'ACFA prépare actuellement un mémoire qu'elle déposera prochainement au Comité sénatorial permanent des langues officielles dans le cadre de sa vaste étude sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles. L'ACFA souhaite apporter une idée novatrice en proposant une nouvelle partie sur l'éducation dans la Loi sur les langues officielles afin de confirmer le statut officiel des programmes d'immersion française et de proposer un encadrement du rôle d'appui financier du gouvernement fédéral à l'enseignement du français comme langue seconde.
    Afin d'expliquer mon propos, j'aimerais vous faire part d'une situation survenue récemment en Alberta, dont Mme Mueller a parlé plus tôt.
    En juin dernier, un conseil scolaire de Calgary a pris la décision de facturer le transport par autobus à des parents qui souhaitaient envoyer leurs enfants à l'école d'immersion française, prétextant qu'il s'agissait d'un programme de choix. Ne pouvant se permettre une telle dépense, des parents ont dû retirer leurs enfants de ce programme.
    Pour l'ACFA, cette situation n'a pas lieu d'être. Si la dualité linguistique est une valeur fondamentale de ce pays, et le ministre Morneau l'a réitéré mardi lors du dévoilement du budget de 2018, l'immersion française doit être considérée comme un programme de base permettant de former des citoyens canadiens capables de penser, de s'exprimer et de travailler dans les deux langues officielles.
    Grâce à des parents albertains qui ont revendiqué leurs droits, l'éducation francophone est aujourd'hui protégée et encadrée par l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, ce qui a été un appui considérable à la vitalité des communautés francophones et acadienne d'un bout à l'autre du pays. Nous croyons fermement qu'il est temps que les programmes d'immersion française bénéficient également d'un statut, d'une protection et d'un encadrement, et la Loi sur les langues officielles pourrait être l'endroit propice où intégrer cette modification. Cela nous fera plaisir de vous faire part de cette partie majeure de notre mémoire lorsqu'il sera finalisé et déposé.
    Le deuxième point de ma présentation traite de l'appui au Campus Saint-Jean de l'Université de l'Alberta.
    Le Campus Saint-Jean est la seule institution postsecondaire de langue française dans la province. Il est donc d'une importance capitale pour la communauté francophone de l'Alberta. Il y a une demande sans cesse croissante pour de la main-d'oeuvre bilingue, en particulier pour des enseignants qualifiés pour enseigner dans les écoles primaires et secondaires de langue française. Malheureusement, le Campus Saint-Jean est sous-financé de façon chronique en ce qui a trait aux activités et aux immobilisations et n'a pas suffisamment d'autonomie pour répondre aux besoins spécifiques. Ainsi, afin de répondre à la pénurie d'enseignants de langue française, le gouvernement fédéral pourrait travailler de concert avec notre communauté, l'Université de l'Alberta et le gouvernement albertain en vue de trouver des solutions précises pour remédier à la situation précaire du Campus Saint-Jean.
    Mon dernier point porte sur le rapprochement entre les communautés francophones et les apprenants du français.
    L'été passé, l'ACFA a conclu une entente avec Canadian Parents for French de l'Alberta afin de développer des liens plus étroits et de promouvoir la langue française et les avantages du bilinguisme officiel. Ce genre de collaboration est particulièrement important dans le contexte actuel.
    Aujourd'hui plus que jamais, les finissants et les élèves qui étudient en immersion française peuvent rêver à des carrières prometteuses. L'adoption d'une politique en matière de francophonie par le gouvernement de l'Alberta et la proclamation de ce matin, qui reconnaît annuellement le mois de mars comme le Mois de la francophonie albertaine, sont des gestes qui viennent normaliser le fait français et augmenter les possibilités de vivre, de travailler et de s'épanouir en français en Alberta.

  (1435)  

    Cependant, les responsabilités dans ce dossier oscillent entre notre gouvernement provincial, qui n'a pas officiellement d'obligations linguistiques, sauf quelques exceptions, et le gouvernement fédéral. Il est donc important que le gouvernement fédéral joue un rôle de sensibilisation, de persuasion et de leadership afin de répondre aux enjeux soulevés, car, ultimement, c'est la citoyenneté canadienne qui en est touchée.
    C'est avec beaucoup de respect que nous avons fourni ces pistes de réflexion. Je vous remercie de votre attention et je suis disposé à répondre à vos questions.
    Merci beaucoup de cette présentation, monsieur Nolette.
    Nous allons maintenant entendre Mme Peters, qui est membre du conseil d'administration national de Canadian Parents for French.
    Madame Peters, vous êtes en compagnie du plus jeune témoin que nous ayons reçu au Comité. Je pense que votre fille Anne a quelques semaines à peine.
    Tout à fait. Anne dort, donc je vais parler à sa place.

[Traduction]

    J'ai demandé si je pouvais prendre la parole aujourd'hui, car je suis membre du conseil d'administration national de Canadian Parents for French. Toutefois, je peux aussi vous parler à titre de personne en apprentissage continu du français, de co-parent d'un détenteur de droits, et de membre de la communauté de langue minoritaire ici en Alberta. Je suis également fière de faire partie des 6,6 % de Canadiens qui parlent français à l'extérieur du Québec et de pouvoir m'exprimer dans les deux langues officielles.

[Français]

    Ma collègue Martine Cavanagh a présenté des statistiques sur les programmes de français langue seconde ici, en Alberta. Je ne vais donc pas revenir sur ce point, ni sur les programmes offerts au Campus Saint-Jean, puisque Mme Mueller vous a parlé des programmes offerts à l'Université de Calgary.
    J'ajouterais que, depuis 2014, l'Université de l'Alberta offre également une formation au niveau collégial. En outre, de la formation aux adultes et de la formation continue sont offertes partout dans la province, par l'entremise de programmes non accrédités. Les universités de Lethbridge, de Calgary et de l'Alberta proposent des cours ainsi que les Alliances françaises.
    J'ai pu profiter de plusieurs de ces programmes de français langue seconde au cours de mon apprentissage. Par exemple, à 15 ans, j'ai suivi un cours optionnel de français de base, que j'ai détesté. J'ai également suivi des cours à l'Université de Calgary pour mon éducation universitaire. De plus, j'ai beaucoup profité des événements offerts en français par la communauté francophone, où j'ai pu exercer mon français et rencontrer mon mari.
    Ce bref portrait démontre la diversité de l'offre des programmes de français langue seconde ici, en Alberta. J'aimerais ajouter que je suis très reconnaissante d'avoir pu suivre tous ces cours en Alberta. Beaucoup de ces programmes sont financés par la feuille de route.
    Cela étant dit, je suis d'accord avec les intervenants précédents lorsqu'ils disent qu'il y a beaucoup de progrès à faire pour appuyer le bilinguisme ici, au Canada, ainsi que les programmes de français langue seconde.

[Traduction]

    Canadian Parents for French milite en faveur d'un accès universel aux programmes de FLS. En Alberta et partout au Canada, on ne peut pas dire que cet accès est universel. À l'heure actuelle, l'accès au programme de FLS ne permet pas à tous les Canadiens d'atteindre leurs objectifs d'apprentissage linguistique, que ce soit à cause du nombre insuffisant de places dans les programmes d'immersion, de cours de base en français ou de programmes linguistiques au niveau postsecondaire.
    En tant que mère d'un jeune enfant, j'aimerais insister sur l'importance d'offrir des possibilités d'apprentissage à la petite enfance. Les recherches indiquent que le point d'entrée idéal dans les programmes d'immersion est un programme d'immersion précoce, et en tant que personne qui a appris le français à l'âge adulte, je suis tout à fait d'accord avec cela. Je sais à quel point les occasions d'apprentissage précoce sont importantes, mais en tant que parent, je peine à y avoir accès.
    La qualité des programmes de FLS est aussi une priorité pour Canadian Parents for French, et nous avons constaté notamment que les programmes ne fournissent pas un accès équitable à un soutien pédagogique adéquat, en particulier aux élèves qui ont des difficultés et aux nouveaux arrivants. On peut remédier à ce problème en bonifiant le financement accordé au soutien en classe, ou en fournissant des occasions de perfectionnement professionnel en formation initiale ou en cours d'emploi. Je suis d'accord avec l'idée de mon collègue au sujet des occasions de formation.
    La qualité se mesure aussi par les hauts taux d'attrition que l'on observe dans les programmes d'immersion et de français de base aux niveaux supérieurs. Les élèves se découragent et perdent intérêt en constatant qu'ils ont peu d'occasions de communiquer dans un environnement linguistique réel, et c'est assurément le sentiment que j'ai éprouvé lors de ma dixième année en français.
    J'adore l'idée de Steven d'offrir des expériences de communication réelle, et les recherches montrent que c'est assurément un bon moyen de garder les élèves motivés. La qualité peut aussi être démontrée par la reconnaissance officielle de l'apprentissage du FLS. CPF milite en faveur de l'établissement de niveaux de compétence reconnus, comme le cadre européen commun de référence et les tests de compétence linguistique en français, comme le DELF. Steven en a parlé. J'ai un DELF de niveau C2. Je peux certainement vous parler de la valeur que cela représente comme apprenante du français, comme professeure de français et comme personne à la recherche d'un emploi.
    Enfin, partout au pays, les ministères de l'Éducation n'ont pas de politiques pour intégrer les programmes de FLS, et mon collègue en a parlé également. CPF prône le leadership et la responsabilisation des décideurs à cet égard, et je suis tout à fait d'accord avec les propos de l'ACFA à ce sujet.
    Je souhaiterais que le Comité encourage la ministre de Patrimoine canadien à collaborer avec les autorités provinciales et territoriales pour favoriser l'accès à tous, partout au Canada, à des programmes de FLS, et à s'engager à accroître le financement pour ces programmes et à le rendre permanent.
    Même si je crois que les programmes de FLS devraient être un droit constitutionnel, je pense aussi que le contexte actuel offre suffisamment de possibilités d'appuyer le français comme programmes de langue seconde. L'article 7 de la Loi sur les langues officielles devrait être appliqué pleinement.
    Les annonces faites dans le budget de mardi sont encourageantes, notamment le financement ciblé pour la formation des enseignants de français et l'accent mis sur l'éducation à la petite enfance. Je me réjouis également de l'engagement pris à l'égard de la révision des règlements sur les langues officielles, du financement additionnel consacré à Jeunesse Canada au travail, et des travaux en cours en vue du renouvellement du protocole d'entente relatif à l'enseignement dans le prochain plan d'action pluriannuel en matière de langues officielles.
    Je répondrai avec plaisir à vos questions.

  (1440)  

    Merci beaucoup, Kate, de votre exposé.
    Nous passons maintenant à Victoria Wishart, présidente du Canadian Parents for French-Alberta.

[Français]

    Bonjour, mesdames les sénatrices et messieurs les sénateurs. Les membres de Canadian Parents for French de l'Alberta vous remercient de votre invitation.
    Je m'appelle Victoria Wishart et je suis la présidente de Canadian Parents for French, section de l'Alberta. Je suis accompagnée du directeur général de l'organisme, Michael Tryon.

[Traduction]

    Le Canadian Parents for French-Alberta fait partie d'un organisme bénévole national de recherche qui promeut la possibilité, pour tous ceux qui considèrent le Canada comme leur pays, d'apprendre et d'utiliser le français. Nous venons en aide et nous offrons des services à environ 45 000 élèves inscrits à un programme d'immersion en français et à environ 178 000 élèves inscrits à un programme de français de base.
    Comme vous connaissez à présent l'histoire de notre organisme, son parcours et ses réussites, nous ne reprendrons pas ces éléments. En cette année 2018, CPF Alberta célèbre ses 40 années de services à la communauté albertaine de français langue seconde. Durant les quelques minutes dont nous disposons, nous aimerions vous parler un peu de la situation qui prévaut, ici, en Alberta. Nous parlerons de trois des défis importants que nous devons relever.
    Le premier, et mes collègues en ont déjà parlé, est la disponibilité des enseignants de français.
    Pour la 18e année de suite, les inscriptions aux programmes d'immersion en français ont augmenté dans presque tous les districts scolaires. Chaque fois qu'un nouveau programme est créé, au moins trois conditions doivent être remplies: il faut une salle de classe, un enseignant qualifié et des livres.
    La responsabilité de gérer les salles de classe incombe au district scolaire local. Que ce soit pour l'enseignement en anglais ou l'immersion en français, c'est le district qui administre le placement des élèves, de sorte qu'en temps normal, la dimension concernant les salles de classe est gérable. Par contre, l'offre de personnel enseignant qualifié en français ne dépend absolument pas du district scolaire. D'après les informations qui nous parviennent, nous savons que presque tous les districts scolaires manquent d'enseignants francophones ou qu'ils ont du mal à en recruter, ou les deux.
    L'Alberta a actuellement un établissement d'enseignement postsecondaire francophone spécialisé, le campus Saint-Jean, qui offre aux enseignants une formation initiale. Il remet, en moyenne, un diplôme à 75 candidats admissibles par an, ce qui veut dire que nous sommes très loin du nombre requis pour répondre à la demande en Alberta, sans parler de celle des autres régions de l'Ouest et du Nord du Canada.
    Selon nous, la pénurie d'enseignants est maintenant la première cause de l'incapacité des districts scolaires à élargir les programmes d'immersion en français ou à en créer de nouveaux. Malheureusement, aucune recherche formelle n'est menée sur cette question, mais CPF Alberta et ses partenaires s'efforcent de s'y attaquer.
    Nous allons vous parler de nos trois recommandations principales pour redresser la situation.
    La première est d'améliorer ou élargir les programmes de formation des enseignants en immersion française, ou d'offrir des programmes différents à cet égard, tout en créant des incitatifs à la formation d'enseignants en français. La deuxième est d'établir des ententes de mobilité du travail entre administrations nationales et internationales afin de normaliser les conditions d'agrément des enseignants en français, en offrant parallèlement des possibilités d'emploi de qualité en Alberta aux enseignants qualifiés. La dernière est de donner davantage d'occasions d'immersion réelle en français aux étudiants de niveau postsecondaire, aux enseignants en formation initiale et aux enseignants déjà certifiés en leur offrant des bourses, de façon à encourager la participation.
    Le deuxième défi important est de veiller à ce que l'immersion française soit considérée comme un programme distinct et inclusif officiellement reconnu en Alberta et au Canada. Contrairement aux programmes destinés aux populations ayant le français pour langue maternelle, les programmes de français langue seconde tels que l'immersion en français ou le français de base ne sont pas garantis par la Constitution. Ils sont considérés comme des programmes optionnels et ne sont offerts qu'à la discrétion des districts scolaires locaux. En Alberta, aucune disposition législative provinciale n'impose aux districts scolaires d'offrir l'enseignement d'une langue seconde. Les parents se retrouvent donc dans une situation tout à fait particulière qui les contraint à faire pression, communauté par communauté, pour obtenir un programme permettant aux jeunes Albertains de devenir compétents dans les deux langues officielles.
    Des décisions prises récemment à divers paliers de gouvernement ont fait en sorte que l'égalité des chances et l'inclusivité ont décliné en Alberta. Mes collègues en ont déjà parlé, mais nous aimerions mentionner qu'en raison des répercussions financières des décisions sur le transport scolaire pour les familles dont les enfants sont inscrits à des programmes d'immersion en français — le problème du transport en autobus —, ou des effets négatifs pour les étudiants et les programmes de FLS de la réaffectation du personnel et des ressources, l'immersion en français a connu une période difficile l'an dernier.
    Si la communauté de français langue seconde était reconnue officiellement comme communauté bilingue, non seulement nous serions mieux en mesure de soutenir les initiatives de la communauté dont le français est la première langue et de l'aider à atteindre ses objectifs, mais encore, cela pourrait faciliter l'approche et les moyens utilisés pour contrer les inégalités. Cela aiderait énormément les défenseurs locaux des parents à exercer des pressions efficaces en faveur de nouveaux programmes afin de répondre à la demande. Aucun enfant ne devrait être refusé.

  (1445)  

    Le troisième défi important que nous devons relever consiste à mobiliser les intervenants et les décideurs en faveur de l'enseignement du FLS et de ses avantages. La promotion du bilinguisme officiel est la clé pour susciter un appui à tous les niveaux de la société: au sein du gouvernement, dans les milieux de travail, dans les établissements d'enseignement et dans les domaines culturels.
    Les décideurs devraient être chargés de définir les politiques d'éducation, de fournir un financement stable, d'assurer une offre suffisante de personnel qualifié et compétent en enseignement des langues officielles, de faire état, rapidement et de manière transparente, des résultats des élèves et des programmes en langues officielles, et, enfin — et c'est pour nous un aspect essentiel —, de faciliter la participation des parents et des intervenants locaux à des processus ouverts et inclusifs de prise de décisions.
    L'efficacité de tout programme d'apprentissage des langues repose sur la force et le leadership de ses enseignants. Les universités et les administrations locales de l'Alberta doivent consulter d'autres provinces et envisager sérieusement l'utilisation et la reconnaissance du diplôme d'études de langue française, ou DELF, ou d'un diplôme canadien équivalent qui se fonde sur le Cadre européen commun de référence pour les langues comme outil commun d'évaluation de la compétence linguistique reconnu à l'échelle internationale.
    Ils devraient également envisager des volets spécialisés destinés aux diplômés de FLS qui intègrent un programme d'enseignement dans l'université de leur choix pour devenir des enseignants de français de base ou d'immersion en français, ainsi que des bourses supplémentaires pour les étudiants en éducation qui comptent enseigner le FLS en Alberta.
    En conclusion, la Canadian Parents for French est consciente de la valeur des partenariats stratégiques, qui contribuent à une meilleure dissémination de l'information sur l'importance de la promotion des langues officielles et, par conséquent, des programmes de français langue seconde partout au pays.
    Nous travaillons en partenariat avec l'Association canadienne-française de l'Alberta depuis maintenant 13 ans, ainsi qu'avec ACCENT. Nous espérons que ces partenariats se poursuivront dans l'avenir. Nous occupons une position unique qui nous permet de présenter le point de vue des parents sensibles à l'importance des langues officielles au Canada et des programmes d'éducation en français langue seconde à l'échelle du pays. Nous présentons également un point de vue de base global afin de mieux orienter les mesures à venir.
    Nous sommes très reconnaissants du soutien que le gouvernement fédéral nous a offert au fil des ans. Nous sommes impatients de travailler en étroite collaboration avec lui, et particulièrement avec votre comité alors qu'il se prépare à définir de nouvelles priorités et de nouvelles mesures en ce qui a trait au bilinguisme et à la modernisation de la Loi sur les langues officielles dans le but d'appuyer le rapprochement, la vitalité des communautés et l'exemplarité du gouvernement.

[Français]

    Nous vous remercions de cette occasion de comparaître devant le Comité sénatorial permanent des langues officielles.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais apporter une petite précision: nous sommes le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes.
    Excusez-moi; j'ai lu ce qui était écrit dans la présentation.
     Comme vous le savez, les sénateurs du Canada ne sont pas des élus. Ici, il y a des élus de la Chambre des communes, qui adoptent des budgets, entre autres choses. Je tenais à faire cette précision afin qu'il n'y ait aucune confusion.
    Nous allons maintenant céder la parole à Mme Fedoration.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je m'appelle Sarah Fedoration, et je suis fière de me compter parmi les 268 000 personnes qui choisissent de vivre et de travailler en français ici, en Alberta. Je suis très heureuse de vous adresser la parole aujourd'hui de l'apprentissage du français langue seconde, et plus spécifiquement de mes réflexions par rapport à trois éléments que je considère importants pour le développement de nos programmes d'immersion en français.
    Mes expériences d'apprentissage du français langue seconde ont vu le jour dans les tout débuts du programme d'immersion. Je sais que cela ne paraît pas, puisque j'ai l'air très jeune. Les francophones avec qui j'ai interagi manifestaient une telle passion pour la langue française que je ne pouvais pas m'empêcher, comme jeune anglophone, de vouloir m'engager dans cette belle communauté et de vivre en français.
    L'année 2018 marque la 19e année de ma carrière en enseignement, et de nombreuses années au sein du programme d'immersion me permettent de témoigner de sa croissance et de la disponibilité de plus de ressources de qualité en français. Toutefois, ce qui est encore plus important, c'est que j'ai pu constater la transformation de la représentation qu'on se faisait d'un programme, d'abord perçu comme élitiste et maintenant vu comme un programme accessible à tous.
     Bien que le programme ait fait l'objet de plusieurs améliorations depuis sa conception, il faut encore s'occuper d'éléments importants pour assurer son progrès et rendre plus riche l'expérience culturelle et linguistique de nos apprenants. La popularité du programme d'immersion en Alberta fait en sorte qu'il existe un besoin constant et pressant de recruter un plus grand nombre d'enseignants. La pénurie d'enseignants de langue française est un énorme problème qu'affrontent tous les conseils scolaires canadiens.
    Bien que notre campus francophone, le Campus Saint-Jean, produise environ 75 enseignants chaque année, ce nombre est insuffisant pour combler tous les postes, même dans notre région. Si nous voulons continuer de rendre les programmes d'immersion accessibles à tous, il est essentiel que les institutions postsecondaires reçoivent le soutien financier et l'engagement à long terme nécessaires pour former un plus grand nombre de futurs enseignants de langue seconde.
    À cette pénurie s'ajoute le défi de développer et de maintenir les compétences linguistiques nécessaires des professeurs de langues. Chaque salle de classe doit avoir un enseignant qualifié avec une compétence langagière élevée. Toutefois, à cause du manque flagrant d'enseignants de français langue seconde, la qualité de la langue est souvent sacrifiée rien que pour s'assurer qu'il y a un enseignant dans chaque salle de classe.
    Pour ce qui est de ma propre expérience, je dois reconnaître que, à ma graduation, j'étais parmi ceux qui n'avaient pas toutes les compétences linguistiques nécessaires pour enseigner dans nos programmes d'immersion. Même après ma formation en enseignement, je n'avais pas encore bien compris la grande responsabilité que me confiaient les parents, celle d'offrir un enseignement de qualité en français à leurs enfants.
    Je ne suis ni la première ni la dernière à éprouver une « gêne linguistique », mais la qualité et la continuité de nos programmes de langue seconde dépendent de l'importance que les enseignants accordent à leur formation continue de la langue française. Une des solutions possibles pourrait être d'offrir plus de possibilités aux enseignants, telles que des échanges, des programmes d'été et la création de programmes qui tissent des liens plus intentionnels entre les communautés francophones et les écoles d'immersion. Cela pourrait permettre aux enseignants de continuer leur développement langagier.
    Flora Lewis, une journaliste américaine, a dit:

  (1450)  

[Traduction]

     l'apprentissage d'une autre langue ne consiste pas seulement à apprendre de nouveaux mots, mais aussi à apprendre une autre manière d'envisager les choses.

[Français]

    Les activités culturelles auxquelles j'ai participé dans les écoles d'immersion en tant qu'élève m'avaient convaincue que tous les francophones étaient des bûcherons qui jouaient des cuillères et mangeaient de la tire d'érable. Toutefois, il faut aller au-delà de cette vision du bon vieux temps et faire découvrir aux élèves la richesse du français et de la culture francophone au moyen de plusieurs autres expériences qui leur permettraient de voir le monde par le biais de cette nouvelle langue.
    Pour assurer un développement plus varié chez les apprenants, un lien plus direct entre les écoles d'immersion et la communauté francophone pourrait être développé davantage.
     Par exemple, des expériences de théâtre, de danse, de visionnement de films, de sport et de musique pourraient ouvrir une fenêtre sur un nouveau monde pour les jeunes du programme d'immersion, en plus de leur permettre d'enrichir leurs expériences. Cela serait possible grâce à la création de projets entre les écoles d'immersion et les organismes francophones de chaque province. Ce genre d'investissement financier dans la création de projets pourrait amener plus de jeunes à faire comme moi et utiliser le français non seulement comme outil de communication, mais aussi à en faire une langue vivante au coeur de leur quotidien.
    Je vous remercie de l'attention que vous porterez à mon témoignage. Je suis disponible pour répondre à vos questions.

  (1455)  

    Merci beaucoup, Sarah, de cette présentation.
    Nous passerons maintenant à Tamie Beattie.
    Monsieur le président, monsieur le vice-président, mesdames et messieurs, bonjour. Je m'appelle Tamie Beattie, et je suis la coordonnatrice des programmes de langue française au sein de l'Edmonton Public School Board.
    Je vais continuer ma présentation en anglais.

[Traduction]

    Je fais partie des nombreuses personnes qui travaillent à l'Institution for Innovation in Second Language Education, que j'appellerai IISLE. L'IISLE est située dans le Languages Centre, sur l'avenue Woodcroft, lequel héberge cinq centres de ressources linguistiques. Forts de partenariats régionaux, provinciaux, nationaux et internationaux, nous délivrons des certificats internationaux en quatre langues et appuyons l'enseignement et l'apprentissage de 11 langues.
    Nous pensons être le seul district scolaire de l'Alberta ayant un mandat pour enseigner une langue seconde de la 4e à la 9e année, et doté d'une politique, de règlements et de lignes directrices concernant la langue d'instruction, les heures de cours, l'inclusion de tous les élèves et les compétences ciblées des professeurs de langue, entre autres.
    Des 100 000 élèves qui fréquentent les écoles publiques d'Edmonton, 52 000 étudient une langue seconde en 2018.
    L'immersion française se fait à deux moments: elle peut débuter à la garderie ou en 1re année, ou être entreprise tardivement en 7e année. Le français langue seconde commence en 4e année, c'est-à-dire au 2e cycle, alors que 10 écoles commencent au 1er cycle, en 1re année. Nous utilisons des cours élaborés à l'échelle locale dans le programme d'études. Certaines écoles secondaires offrent également un cours pour débutants en 10e année pour les élèves qui apprennent le français langue seconde pour la première fois.
    L' Edmonton Public Schools compte actuellement plus de 800 professeurs d'immersion française et de français langue seconde, alors que 4 027 élèves suivent le programme d'immersion française tardive et 34 934 sont inscrits à des cours de français langue seconde.
    Les élèves suivant ces deux programmes obtiennent des niveaux élevés de maîtrise de la langue selon les critères du diplôme d'études en langue française, ou DELF, un examen international. À la fin de leur programme, en 12e année, les élèves du programme de français langue seconde obtiendront la note B1, alors que la plupart de ceux qui suivent le programme d'immersion française recevront la note de B2.
    À l'heure actuelle, notre programme d'immersion française est celui qui jouit de la plus grande popularité. Nous l'offrirons donc dans deux nouvelles écoles primaires à l'occasion de la prochaine rentrée, à l'automne 2018. L'Alberta, à l'instar d'autres provinces de l'Ouest, n'a pas de mandat en matière de langue seconde; l'accès des élèves albertains à des programmes de français de qualité est donc limité. Sans infrastructures, peu nombreux sont ceux qui ont accès à une formation en français langue seconde, particulièrement à l'immersion française. L'Edmonton Public Schools est une anomalie.
    Voici certains obstacles auxquels nous nous heurtons, ainsi que quelques suggestions.
    Nous recevons du financement du Programme des langues officielles dans l'enseignement. Nous avons besoin de ce financement et nous vous encourageons fortement à le maintenir pour que nous puissions soutenir nos programmes de français. Sans ce financement, les programmes de français de notre district seraient menacés, particulièrement en ce qui concerne la panoplie d'occasions que nous pouvons offrir à nos élèves grâce à lui.
    L'Edmonton Public Schools souhaiterait également qu'il existe plus de programmes provinciaux de français langue seconde offerts à divers niveaux, comme un début à la garderie, en 1re année ou en 7e année, comme c'est le cas pour les autres langues. Il serait ainsi plus facile de satisfaire la demande des parents et de pouvoir enseigner à des élèves du début du secondaire qui n'ont pas étudié le français au primaire. Cela nous aiderait particulièrement à mieux servir les immigrants et les élèves suivant des cours d'anglais langue seconde, lesquels constituent le quart de notre population étudiante.
    Les transitions demeurent un problème. Il n'existe que deux points d'accès au français langue seconde. Comme je l'ai souligné, il nous serait utile d'avoir un programme d'étude en français langue seconde et en immersion française aligné avec le Cadre européen commun de référence pour les langues, ou CECR, car cela nous permettrait de mieux placer les élèves dans des programmes correspondant à leurs niveaux de compétence, que ce soit de la maternelle à la 12e année ou dans le système d'enseignement postsecondaire. Nous avons utilisé le financement du Programme des langues officielles dans l'enseignement pour offrir des auto-examens, particulièrement aux élèves de 12e année, et ces résultats sont reconnus dans certains établissements postsecondaires provinciaux, nationaux et internationaux.
    L'Edmonton Public Schools considère que tous les Canadiens ont le droit fondamental de recevoir de l'instruction à propos des deux langues officielles. Le gouvernement fédéral pourrait apporter de l'aide en influençant le financement et la formation des enseignants pour s'assurer que tous les élèves, y compris les nouveaux Canadiens, peuvent choisir d'apprendre les deux langues officielles.
    L'Edmonton Public Schools collabore étroitement avec l'Association canadienne des professeurs de langue seconde à l'échelle nationale et avec le Second Languages and Intercultural Council de l'Alberta Teachers' Association à l'échelle provinciale afin d'accéder aux recherches récentes sur l'enseignement et l'apprentissage d'une langue seconde.

  (1500)  

     Nous utilisons le document intitulé Literature Review on the Impact of Second-Language Learning , publié récemment par l'Association, pour informer les écoles, les élèves, les parents et d'autres intervenants du milieu de l'éducation des bienfaits de l'enseignement d'une langue seconde sur tous les élèves. Le gouvernement pourrait jouer un rôle en influençant les recherches et en contribuant à en faire connaître les résultats.
    L'Edmonton Public School Board s'appuie également sur une philosophie d'inclusion: tous les élèves ont le droit de recevoir de l'instruction à propos des deux langues officielles. Ce qui nous empêche d'atteindre cet objectif dans la province et au-delà, c'est la croyance persistante que seule le crème des élèves peut apprendre une langue seconde. Le gouvernement fédéral devrait influencer les recherches et en disséminer les résultats, jouer un solide rôle de défense des droits des élèves et inciter les provinces à imposer une exigence sur le plan de la langue seconde, laquelle serait accessible à de multiples points pour que tous les élèves puissent se prévaloir de leur droit d'apprendre les deux langues officielles.
    Quant à la Loi sur les langues officielles, elle devrait continuer de faire l'objet de révisions pour qu'elle en vienne à inclure les droits de tous les élèves canadiens à apprendre les deux langues officielles, de la maternelle à la 12e année, et ne pas protéger que les droits relatifs aux langues minoritaires, qui doivent y demeurer enchâssés.
    Merci beaucoup de nous avoir donné l'occasion de vous faire part des préoccupations et des triomphes du conseil scolaire.
    Merci beaucoup, Tammie.

[Français]

     Nous allons maintenant faire un tour de questions et de commentaires de la part des membres du Comité. Chaque membre du Comité aura la parole pendant six minutes.
    Nous allons d'abord commencer par M. Bernard Généreux.
    Monsieur Généreux, nous allons procéder comme d'habitude, c'est-à-dire que nous commencerons par nous présenter.
     Je m'appelle Bernard Généreux, et je représente la circonscription québécoise de Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, dans le Bas-Saint-Laurent. La ville de La Pocatière, qui y est située, a une entente avec le Campus Saint-Jean. Mme Fedoration est peut-être venue étudier à La Pocatière.
    D'abord, je veux vous remercier de vos excellentes présentations. Il est très difficile de me déstabiliser, mais vous avez réussi à me faire remettre en question la façon dont je concevais plusieurs aspects du monde de l'éducation. Vous avez à vous battre pour accéder à ce que vous désirez obtenir. Je vous félicite pour tout le travail que vous accomplissez depuis des dizaines d'années pour assurer que la francophonie s'épanouisse partout au Canada.
    Madame Fedoration, je dois vous féliciter particulièrement pour votre présentation. J'en ai encore des frissons. Vos références au Québec ancien étaient jolies et très amusantes.
    Plusieurs d'entre vous ont évoqué plus d'une fois la possibilité de modifier la loi, voire la Constitution. Or vous savez sans doute que ce n'est pas facile à faire, au Canada, et que c'est le genre de chose qui n'a pas lieu fréquemment. Bien des gens aimeraient le faire, pour toutes sortes de raisons, mais le jour où cela aura lieu, on ne sera pas sorti de l'auberge. Cela dit, comme vous le savez, l'éducation est une compétence provinciale. Le gouvernement fédéral pourrait avoir son mot à dire, c'est certain, mais il reste que les compétences provinciales doivent être respectées.
    Monsieur le président, je ne poserai pas de questions immédiatement. Les témoignages que nous avons entendus au cours des deux derniers jours m'amènent à penser que le Comité permanent des langues officielles devrait considérer la possibilité d'organiser à Ottawa une réunion à laquelle des représentants du monde de l'enseignement de partout au pays comparaîtraient. Je pense que nous en sommes rendus à cette étape. Les représentants des provinces en matière d'éducation, si ce ne sont les ministres, à tout le moins des hauts fonctionnaires, devraient être présents. Ils pourraient nous expliquer ce qu'Ottawa et les provinces peuvent faire en collaboration pour faire avancer le fait français partout au Canada.
    J'en fais la demande officielle. Le temps est venu pour nous d'aller plus loin. Vos témoignages m'ont beaucoup touché. Pratiquement tout le monde a pleuré aujourd'hui. C'est particulier. Nous écoutons très attentivement ce que vous nous dites.
    Le gouvernement du Canada vient d'ajouter 400 millions de dollars à la feuille de route qui va éventuellement être mise en oeuvre. Si ce sont les détails qui posent problème, il faudra voir comment l'argent va se rendre jusqu'à vous, dans quelles circonstances, de quelle façon, et ainsi de suite.
    Vous avez fait allusion à la Loi sur les langues officielles, qui sera à l'étude au cours des prochains mois. Nous allons assurément participer à son élaboration ou, à tout le moins, à son renouvellement. Si vous avez des propositions à faire à ce sujet, il serait important que vous les communiquiez au Comité, de façon à ce que nous puissions en tenir compte. Monsieur Nolette, vous avez dit, je crois, avoir des propositions à nous faire.
    J'ai pris beaucoup de notes et j'aurais 50 000 questions à vous poser, notamment sur le statut officiel dont vous avez parlé.
    Que vouliez-vous dire quand vous avez parlé de la nécessité d'avoir un statut officiel, particulièrement pour l'enseignement et l'immersion en français, dans l'ensemble du Canada?

  (1505)  

    Nous en sommes toujours à réfléchir à la façon dont ce statut pourrait s'articuler dans une nouvelle version de la Loi sur les langues officielles. Il faut vraiment assurer une protection à ces programmes de langue seconde, dont les programmes d'immersion. Ceux-ci, comme nous l'avons entendu dire aujourd'hui, semblent vulnérables à certains égards et dépendre de la bonne foi des gouvernements provinciaux, des conseils scolaires et de l'administration des écoles. Si, d'une façon ou d'une autre, le gouvernement fédéral pouvait offrir une certaine protection dans le cadre de la Loi sur les langues officielles et du financement à ces programmes de langue seconde, une étape importante serait franchie. Je peux vous assurer que, dès le moment où nous aurons terminé notre réflexion et notre mémoire, nous allons en faire part au Comité.
     Monsieur Samson, vous avez la parole. Vous pouvez vous présenter.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je m'appelle Darrell Samson et je viens de la Nouvelle-Écosse. Je suis le seul Acadien élu de cette province et j'en suis très fier. Les parents de Mme Fedoration viennent aussi de la Nouvelle-Écosse.

  (1510)  

    Elle a aussi des grands-parents du Nouveau-Brunswick.
    Des voix: Ha! ha!
    L'éducation me passionne énormément. J'ai travaillé pendant 31 ans dans le domaine de l'éducation. J'ai occupé beaucoup de postes: enseignant, directeur adjoint, directeur, superviseur, coordonnateur, directeur général adjoint. Au cours des 11 dernières années, j'ai été le directeur général de toutes les écoles françaises de la Nouvelle-Écosse. J'ai enseigné dans deux universités. Je me suis promené pas mal.
    Selon les témoignages que nous entendons depuis quelques jours et ceux d'aujourd'hui, le grand problème, en ce qui concerne l'éducation en français de la petite enfance au postsecondaire, c'est l'article 23. En effet, cet article ne parle pas de l'éducation en français pour les enfants de moins de 5 ans et pour les étudiants de 18 ans et plus. C'est une modification qui s'impose d'une façon ou d'une autre et il faut trouver une solution à ce problème.
    Je vais poser des questions brèves. Comme mon collègue M. Généreux l'a mentionné de façon passionnée, vous avez bien expliqué les défis auxquels vous faites face.
    Vous me corrigerez si je me trompe, mais je crois vous avoir entendu dire que ce ne sont pas tous les enfants des écoles publiques qui ont accès au français de base. Si c'est vrai, j'en suis étonné parce que je croyais que c'était obligatoire. Si les enfants n'ont pas accès au français de base, cela veut dire que la province ne reçoit pas de financement fédéral. Pourtant, une somme d'argent d'argent est prévue pour chaque enfant qui suit un cours de français de base à partir de la quatrième année; c'est automatique. On perd énormément d'argent si on n'utilise pas cela. De plus, je croyais que c'était obligatoire, mais il semble que ce ne soit pas le cas, n'est-ce pas?
    En Alberta, ce n'est pas obligatoire. C'est le choix de chaque conseil scolaire.
    On parle bien du français de base?
    Oui.
    Je suis étonné.
    Le problème, ce n'est pas que les conseils scolaires ne veulent pas offrir le français de base, c'est qu'ils n'ont pas d'enseignants capables d'enseigner la langue seconde.
    D'accord, c'est un peu différent dans ce cas. Il y a de l'argent disponible pour chaque élève, ce qui est essentiel.
    Est-ce que le français de base étendu existe dans cette province? Autrement dit, en plus du cours de français, y a-t-il d'autres matières qui sont enseignées en français?
    Non, pas vraiment. Seulement trois ou quatre conseils scolaires de la province offrent un cours de français intensif, et ils ne l'offrent qu'à partir de la cinquième ou de la sixième année.
    C'est-à-dire un deuxième cours.
    Oui.
    Dans certaines régions, c'est comme un mélange de français de base et d'immersion.
    On sait qu'il y a une pénurie. On sait aussi que, s'il y a des professeurs diplômés, on pourra donner ces cours et faire face aux défis. Pourquoi n'augmente-t-on pas simplement le nombre d'étudiants dans le programme d'éducation?
    Au Campus Saint-Jean, il s'agit d'abord d'un problème d'ordre financier. À l'heure actuelle, l'université reçoit du financement pour 514 étudiants. Le doyen est en train de faire des démarches pour que nous soyons financés pour chacun des étudiants, mais pour l'instant, ce n'est pas le cas. Nous avons 750 étudiants et nous recevons du financement pour 514. Nous sommes donc sous-financés.
    La province devrait investir dans ce domaine parce qu'il y a un manque d'enseignants.
    Oui.
     Je veux souligner un autre point.
    C'est une question à laquelle je pense souvent. Cela coûte le même montant d'argent pour éduquer un enfant en français de base, en immersion, en langue première, et ainsi de suite. Cela demande le même espace. Quelqu'un a mentionné cela, tout à l'heure. Il faut une salle de classe, un professeur et des ressources. C'est tout.
    Je me demande donc pourquoi la province ne voudrait pas créer ces espaces. En effet, ce serait plus ou moins au même coût, et je pense même que, dans le cas de l'immersion, le ministère du Patrimoine canadien les finance de la maternelle jusqu'à la 12e année.
    Madame Fedoration, je dois revenir à cela parce que vous avez mentionné également qu'on devrait offrir plus de possibilités aux professeurs, afin d'enrichir leur apprentissage à l'aide de cours d'été ou de programmes. Êtes-vous au courant du fait que l'Association canadienne d'éducation de langue française, l'ACELF, qui a son siège social au Québec mais qui est un organisme national, offre des cours chaque été? En avez-vous déjà suivi?
    Non, je n'en ai jamais suivi.
    Je suis au courant du fait que ces cours existent, mais je ne pense pas que la grande majorité de nos enseignants savent qu'ils peuvent aller perfectionner leur français ailleurs.
     C'est un programme exceptionnel d'une durée d'environ quatre semaines, durant le Festival d'été de Québec. C'est exceptionnel. J'y suis allé pour évaluer le programme et pour rencontrer des gens. Il est possible d'obtenir du financement du ministère de l'Éducation. Ce n'est pas un financement complet, mais les conseils scolaires peuvent également apporter leur contribution.
    C'est donc certainement une autre possibilité.
    Merci, monsieur Samson.
    Nous poursuivons avec M. Choquette.
    Lorsque vous irez à Québec, vous ferez aussi un arrêt à Drummondville, qui est seulement à une heure et demie de la ville de Québec. Vous viendrez évidemment goûter la poutine. Comme vous le savez tous, la poutine a été créée à Drummondville. Il y a toujours un débat à ce sujet, mais c'est nous qui l'avons remporté depuis longtemps. D'ailleurs, nous avons le Festival de la Poutine, bien connu, tout comme Les Trois Accords, un groupe de musiciens.
    Je suis François Choquette, du NPD. Je suis vice-président du Comité permanent des langues officielles. J'ai été élu pour la première fois en 2011. Je suis également enseignant de français de profession. Je pourrais donc éventuellement venir enseigner, ici, en Alberta, à moins que les élèves me disent qu'ils détestent le français de base et l'immersion française. Cela serait un problème.
    Je vais poser une première question. Nous avons entendu la même chose en Colombie-Britannique, à savoir que le français langue seconde et le français de base ne sont pas enseignés partout.
    Quel est le pourcentage d'enfants qui ne suivent pas de cours de français langue seconde ou d'immersion française? Est-il élevé? Quelqu'un connaît-il ce pourcentage? Quelqu'un pourrait-il transmettre ces chiffres au Comité?

  (1515)  

    Je vais transmettre les chiffres au Comité.
    D'accord, je vous remercie. Ce serait intéressant de voir l'ampleur du défi qu'il y a, ici, en Alberta et en Colombie-Britannique, où nous avons entendu la même chose.
    De plus, en Colombie-Britannique, on dit que l'immersion française est considérée comme un programme élitiste. C'est épouvantable d'entendre cela. Vous en avez parlé un peu. Il serait donc très intéressant d'inclure ce programme dans une offre, en changeant la Loi sur les langues officielles.
    Vous avez abordé le fait que ce sont les conseils scolaires locaux qui prennent les décisions. Pouvez-vous ajouter quelque chose là-dessus?
     Tout à l'heure, j'ai entendu dire que des écoles de district voudraient peut-être offrir ces cours, mais qu'il n'y avait pas assez d'enseignants. Quel est le problème exactement? Est-ce davantage en raison de la volonté des districts ou de la pénurie d'enseignants?
    Notre conseil allait lancer deux nouveaux programmes d'immersion française, il y a deux ans. Nous avons dû en éliminer un, tout simplement parce que nous n'avions pas suffisamment d'enseignants pour ouvrir une école qui couvrirait de la maternelle à la sixième année. Le besoin était de six enseignants. Notre conseil ne peut même pas offrir cela.
     Il y a donc une véritable pénurie d'enseignants. Je ne veux pas en débattre, mais il y a probablement aussi une pénurie d'enseignants pour l'enseignement du français langue maternelle aux élèves francophones. Vous cherchez des enseignants pour les programmes d'enseignement du français langue seconde, mais les établissements d'enseignement du français langue maternelle veulent garder leurs enseignants. Cela doit présenter des défis et exercer une pression épouvantable sur le plan des ressources humaines.
    Qu'est-il advenu du Student Exchange Program Quebec/Alberta?
    Il a été annulé.
    À quel moment a-t-il été annulé et pour quelles raisons?
    Je n'en connais pas la raison, mais cela doit maintenant faire six ans qu'il a été annulé. En fait, c'était quelqu'un de Lethbridge, mais qui travaille à Edmonton, qui s'en occupait.
    En quoi consistait exactement ce programme? À quoi servait-il? Fonctionnait-il bien?
    Est-ce que quelqu'un connaît un peu le programme?
    J'ai participé à cet excellent programme. Il m'a permis de passer un été au Québec, et des Québécois sont venus en Alberta pour perfectionner leur anglais.
    Personnellement, je peux dire que je me suis beaucoup amélioré en français au cours de cet été-là, grâce à ce programme d'immersion dans un environnement francophone au Québec. Cela a aussi été une belle expérience de travail en français. Plusieurs de mes amis et d'autres étudiants du Campus Saint-Jean ont aussi bénéficié de ce programme. Je trouve très dommage qu'il n'existe plus.
    S'agissait-il d'un programme provincial de l'Université?
    Je crois qu'il s'agissait d'un programme interprovincial entre les gouvernements de l'Alberta et du Québec.
    D'accord.
    Vous avez parlé de l'énorme problème lié aux ressources humaines.
    Comme j'ai encore un peu de temps de parole, j'aimerais aussi parler du problème ayant trait au matériel adapté à votre réalité, c'est-à-dire celle de l'immersion en français et celle de l'enseignement du français langue seconde.
    Comment se fait-il qu'il n'y ait pas de matériel? C'est incroyable.
    Madame Beattie, désirez-vous faire un commentaire?

  (1520)  

    Les enseignants disposent de matériel, mais, souvent, les petits conseils scolaires n'ont pas accès à des conseillers pédagogiques, contrairement aux grands conseils scolaires.
    Nous sommes vraiment chanceux puisque nous avons six conseillères pédagogiques qui ne s'occupent que du volet français. Ainsi, de concert avec les enseignants, nous pouvons créer de nouveaux projets et de nouvelles ressources, et nous pouvons offrir du perfectionnement professionnel.
    J'aimerais ajouter que le matériel pédagogique en français coûte souvent plus cher — le double — que celui en anglais. De plus, le matériel pédagogique est souvent une traduction et non pas une adaptation, ce qui a son importance pour les apprenants d'une langue seconde.
    Merci beaucoup.
    Nous avons beaucoup de livres en français. Le niveau de français convient à des élèves de 7e année, mais le contenu des livres est enfantin. Cela nous pose un problème, parce que nous cherchons quelque chose d'authentique et il faut que cela soit adapté au niveau scolaire des élèves et à leur âge.
    Merci beaucoup, monsieur Choquette.
    Nous nous transportons maintenant au Manitoba. Monsieur Vandal, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je m'appelle Daniel Vandal. Je suis le député de Saint-Boniface—Saint-Vital, une circonscription de la ville de Winnipeg. Je suis un député métis, et je suis très fier d'être membre du présent Comité.
    J'aimerais commencer par féliciter nos témoins de leur engagement en éducation auprès de leur communauté ainsi qu'envers notre langue.
    J'apprécie beaucoup ce que vous faites dans la vie.
    Les sujets dont nous discutons ici sont très vastes, et nous avons peu de temps pour vraiment en discuter — nous n'avons que six minutes. J'aimerais vous redonner la parole afin que vous puissiez donner davantage de renseignements aux membres du Comité permanent des langues officielles. En effet, cela nous aidera à rédiger notre rapport. Nous le présenterons ensuite à la Chambre des communes afin que le gouvernement y réponde.
    Quels conseils auriez-vous à nous donner? Quel message voulez-vous que nous envoyions au ministère, au gouvernement?
    Nous avons cinq minutes. Nous allons commencer par la représentante de l'Edmonton Public School Board.
    Nous avons vraiment besoin d'enseignants qui peuvent enseigner la langue française. Nous voulons aussi envoyer le message que le programme d'immersion en français n'est pas que pour les élèves les plus forts. Il faut vraiment changer le mythe selon lequel le français n'est pas pour tout le monde. En fait, le français est pour tous les élèves, peu importe leur niveau d'apprentissage. Il faut que ce soit inclusif. Cela veut dire que, dès le début, nous avons besoin de gens qui peuvent conseiller les élèves en français, d'orthophonistes et de tous ceux qui nous appuient en français.
    Merci.
    Madame Fedoration du Edmonton Catholic Schools, la parole est à vous.
    J'aimerais revenir sur le point soulevé par M. Nolette. Il faudrait que les élèves des écoles d'immersion soient reconnus comme des apprenants de langue seconde. Par exemple, je vis moi-même le plus souvent en français et rarement en anglais. En conséquence, je ne suis pas reconnue comme une personne ayant droit au programme ni comme une personne bilingue au Canada. Ce serait donc important de reconnaître les apprenants de langue seconde. Il serait aussi essentiel de continuer à offrir un perfectionnement langagier aux enseignants et aux étudiants dans des contextes authentiques.
    Merci.
    Monsieur Tryon et madame Wishart du Canadian Parents for French – Alberta, vous avez la parole.
    Merci, monsieur Vandal.
    Je suis enseignant et je travaille aussi comme suppléant quelques fois par mois au sein d'un conseil scolaire dans une région rurale située au nord d'Edmonton. On y offre un petit programme d'immersion à Sturgeon, qui compte sept enseignants et une centaine d'étudiants.
    Le défi dans les communautés rurales est de combler le manque de ressources. Nous n'avons pas accès au perfectionnement professionnel et, parfois, nous n'avons pas accès aux communautés francophones, surtout dans le sud de la province. La plupart des communautés francophones en Alberta sont situées au nord de Red Deer et, dans le sud, il n'y a aucun francophone. Il n'y a pas de possibilités.

  (1525)  

    Quelles recommandations aimeriez-vous faire au gouvernement?
    Comme Mme Fedoration l'a dit,

[Traduction]

    il faudrait admettre le fait qu'une autre communauté appuie le français langue seconde, et que les mères et les pères anglophones qui inscrivent leurs enfants en immersion française alors qu'ils ne parlent pas un mot de français figurent parmi les plus ardents défenseurs de l'enseignement du français ou du français langue seconde.

[Français]

    Merci.
    Madame Peters, vous avez la parole.
    En ce qui concerne la révision de la réglementation, je pense qu'il y a la possibilité de reconnaître les ayants droit, des gens comme moi, qui viennent d'une famille exogame et qui sont complètement bilingues

[Traduction]

    , et de moderniser la manière dont la majorité reconnaît la minorité pour mieux inclure les nouveaux Canadiens dont la seconde langue officielle constitue peut-être la deuxième ou la troisième langue, comme moi.
    Je pense aussi qu'il existe déjà des dispositions à ce sujet. Ces mesures, qui jouent le rôle de gardiennes et de protectrices des droits linguistiques, pourraient être élargies à la langue seconde.

[Français]

    Merci.
    Monsieur Nolette, nous vous écoutons.
    J'ajouterais à tout ce que mes collègues viennent de dire la recommandation d'investir dans l'enseignement postsecondaire pour deux raisons. Premièrement, il faut combler les besoins qui, comme nous l'avons entendu, sont grands et criants. Deuxièmement, cet investissement faciliterait le mandat des conseils scolaires. En effet, un élève qui a la possibilité d'étudier au niveau postsecondaire en français a probablement plus de chances de terminer sa 12e année — des études le disent. En ce moment, les options sont limitées.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Urquhard, c'est votre tour.
    Je crois qu'il faut continuer à investir dans l'enseignement du français. Beaucoup de gens sur le terrain consacrent énormément de temps à cette question. Il faut aussi veiller un peu à la qualité de la langue. C'est sûr qu'il faut recruter de nouveaux enseignants, mais, parfois, je vois que le niveau de compétence langagière de nos étudiants est assez bas, ce qui m'inquiète. Je fais partie du problème, car je suis trop gentil dans l'attribution de notes et je contribue donc à ce problème.
    Merci.
    Madame Mueller, vous avez la parole.
    Je dirais qu'il faut insister d'une certaine façon pour que les commissions scolaires privilégient le français. Comme je l'ai dit plus tôt, elles ont le choix de l'offrir ou non, faute d'intérêt de la part des parents ou faute d'argent. Selon moi, c'est honteux.
    D'accord.
    Madame Cavanagh, vous avez la parole.
    Évidemment, je prêche pour ma paroisse. Il faut absolument investir dans l'enseignement postsecondaire. C'est la clé du succès. Nous formons les futurs enseignants.
    Nous avons parlé de pénurie, mais ce n'est pas seulement une question de nombre en ce qui concerne les futurs enseignants, c'est aussi une question de qualité.
    J'ai parlé des défis liés à la compétence langagière et à la compétence culturelle parce que nous avons des élèves dans le programme d'immersion, d'une part, et d'autres qui viennent des pays d'Afrique francophone qui ont des besoins particuliers et différents. Nous avons besoin de ressources.
    Nous sommes seulement sept professeurs — seulement sept — en éducation, à l'heure actuelle à la faculté Saint-Jean. Nous aurions besoin de prêts de services, des enseignants sur le terrain qui viennent nous rencontrer et qui communiquent leur expérience aux futurs enseignants. Cela coûte très cher. Un prêt de services coûte 120 000 $ par année, simplement pour vous donner une idée.
    Il faut donc investir dans l'enseignement postsecondaire.
     Merci beaucoup, monsieur Vandal.
    Nous allons maintenant poursuivre avec M. Arseneault.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je suis René Arseneault. Je suis le député de Madawaska—Restigouche, dans le Nord du Nouveau-Brunswick. Je suis un fier Acadien.
    J'ai beaucoup de questions à vous poser, mais vos présentations sont tellement précises que nous commençons à avoir une bonne idée du rapport que nous allons pondre d'ici peu à la suite de notre tournée dans l'Ouest canadien.
    Je vais essayer de sortir un peu du cadre des questions que nous vous avons posées. J'aurais le goût d'y revenir, mais je n'aurai pas le temps.
    Hier, nous avons entendu qu'en Colombie-Britannique aussi, les commissions scolaires semblent être indépendantes l'une de l'autre, et je dois dire que cela m'étonne. Il n'y a pas qu'un seul cursus qui s'étend du nord au sud et d'est en ouest, en Alberta. C'est ce que je comprends.
    Les commissions scolaires sont-elles indépendantes? Elles peuvent choisir d'offrir un cours de français ou non. C'est bien cela?

  (1530)  

    Oui. Chaque conseil scolaire est vraiment indépendant. Il y a 62 ou 63 conseils scolaires dans la province. De ceux-ci, 42 offrent des cours de français, en plus des conseils scolaires francophones.
    D'accord.
    J'ai compris qu'il y avait des conseils scolaires laïcs et des conseils scolaires religieux. C'est bien cela?
    Oui. Ici, en Alberta, il y en a deux types: il y a des conseils scolaires publics et des conseils scolaires catholiques.
    Relèvent-ils tous du même ministère, soit du ministère de l'Éducation?
    Sur le plan du cursus, chaque conseil scolaire doit-il offrir un minimum?
    Oui, le cursus provincial.
    D'accord.
    Pourtant, vous dites qu'on pouvait choisir d'enseigner le français ou non, choisir d'offrir des cours de français ou non.
    Oui, c'est un choix. Le français n'est pas un cours obligatoire, et c'est au choix du conseil scolaire.
    D'accord.
    Dans les conseils scolaires, le salaire des enseignants est-il le même, qu'il s'agisse d'un conseil scolaire de l'Est ou d'ailleurs ou qu'il s'agisse d'un conseil scolaire anglophone ou francophone?
    Oui. En Alberta, le salaire de base est de 69 000 $. C'est presque le même pour tous. C'est seulement une question d'ancienneté. Il n'y a pas de boni pour la langue.
    Un enseignant au niveau postsecondaire à Lethbridge et un enseignant à Saint-Albert, ont-ils le même salaire?
    Oui, c'est presque le même.
    Pourquoi dites-vous « presque »?
    La province négocie principalement avec l'Alberta Teachers' Association, l'ATA, mais quelques négociations se font avec le conseil scolaire.

[Traduction]

    De façon générale, cependant, les salaires sont assez égaux à l'échelle de la province.

[Français]

    D'accord.
    Je pose ces questions, parce que je suis certain que vous recrutez tous des professeurs dans les universités du Québec, d'Acadie et de l'Ontario. Mon frère a enseigné à Yellowknife et ma bru est dans le Nord canadien.
    Le recrutement de professeurs fonctionne-t-il ou non? Vous avez dit que, lorsque vous avez les ressources financières nécessaires, les ressources humaines manquent par la suite. Est-ce que le recrutement à l'extérieur fonctionne?
    Ce n'est pas tout à fait le même contexte.
    Par exemple, les enseignants qui viennent du Québec pour enseigner ici, en Alberta, doivent avoir une bonne compréhension du milieu. Ce n'est pas évident. Nous aimerions mieux pouvoir les former ici, pour qu'ils soient bien familiers avec le contexte d'ici.
    Je comprends, mais vous nous dites que vous manquez de professeurs et que l'enseignement, lui, manque de qualité langagière.
    Les commissions scolaires le font. Elles vont partout au Canada pour recruter des enseignants.
    Cela pose aussi un problème.
    Certaines commissions scolaires d'ici vont dans l'est pour embaucher des professeurs. Les professeurs qu'ils embauchent sont des francophones de naissance, qui parlent donc très bien français. Ils viennent ici pour enseigner les mathématiques en immersion, par exemple, mais ils ne sont pas formés pour enseigner en immersion. Ils ne comprennent pas la pédagogie liée à la langue. Ils sont des spécialistes en mathématiques.
    C'est l'un des plus grands problèmes à mes yeux.
    Je comprends.
    Madame Fedoration, je vous écoute.
    Je veux tout simplement ajouter que c'est vrai que nous faisons du recrutement, mais que la rétention est très difficile. Les gens viennent souvent ici pour vivre une belle aventure, et ils retournent chez eux par la suite.
    Bâtir la capacité dans nos scolaires scolaires devient donc problématique. Il y a un mouvement continuel et nous n'arrivons pas à former et à maintenir une base d'enseignants.
    C'est intéressant.
    Il faut former plus d'enseignants, ici, pour la pédagogie de l'immersion. J'aimerais le réitérer. Enseigner en immersion, c'est enseigner toutes les matières en français, ce qui n'est pas évident. Cela demande des connaissances spécialisées.
    En effet. Il faut être généraliste, et non pas spécialisé.
    Il faut aussi comprendre comment on intègre la langue dans les disciplines et comment on enseigne simultanément la langue et les disciplines.
    Madame Cavanagh, vous parliez plus tôt de financement pour 514 étudiants.
    C'est pour le Campus Saint-Jean.
    C'est donc uniquement pour le Campus Saint-Jean.
    Est-ce qu'il y a une demande quant à l'enseignement postsecondaire que vous dispensez sur le Campus Saint-Jean?
    Me demandez-vous s'il y a une demande pour les enseignants?
    Oui.
    Oui, les inscriptions sont à la hausse.
    Cependant, vous n'avez plus de place, n'est-ce pas?
    En effet. D'abord, nous n'avons pas les ressources financières requises. Ensuite, nous avons de gros problèmes d'espace. Comme nous devons offrir une formation pratique, nous devons fixer des limites, par exemple 25 étudiants par classe, pour les envoyer dans les écoles. Nous sommes donc obligés de multiplier des sections. Nous manquons vraiment d'espace.

  (1535)  

    Je m'excuse, mais de vaus devoir vous interrompre.
    Madame Boucher, vous avez la parole.
    Bonjour, je m'appelle Sylvie Boucher. Je suis une députée de la grande région de Québec, plus précisément la députée de la circonscription de Beauport—Côte-de-Beaupré—Île d'Orléans—Charlevoix. Autrement dit, je représente la plus belle circonscription du Québec. Sous l'ancien gouvernement, j'ai été secrétaire parlementaire du premier ministre et pour la Condition féminine et secrétaire parlementaire de la ministre de la Francophonie et des Langues officielles.
    Je trouve ce voyage à la fois très pertinent et très dérangeant. Je m'explique. Je suis une petite fille du Québec, et l'histoire raconte que ce sont les Québécois qui sont des battants et qu'il n'y a pas de francophones à l'extérieur de la province. Il y a une masse importante de francophones au Québec. Or, au cours des deux derniers jours, des témoins nous ont dit que les Québécois de souche ne les aidaient pas beaucoup, que leurs interactions avec les gouvernements du Québec, peu importe lequel, avaient été plutôt rares et que les Québécois ne se souciaient pas de soutenir la francophonie.
    Cela dit, nous avons beaucoup parlé des commissions scolaires et des professeurs. Comme on le sait, l'éducation est de compétence provinciale. Je vais vous poser quelques questions.
    Comment se fait-il que vous ne trouviez pas de gens prêts à s'investir dans la francophonie? Pourquoi est-ce si difficile de trouver des professeurs?
    M. Arseneault vous a demandé si vous alliez chercher des professeurs à l'extérieur. Vous avez répondu par l'affirmative, mais en précisant que vous préféreriez les former ici. Je suis d'accord sur cela à 100 %, mais comment se fait-il que vous n'en trouviez pas? Qu'est-ce qui bloque?
    Je vais répondre en anglais.

[Traduction]

    Je pense qu'il y a là un cercle vicieux. De jeunes enseignants en formation initiale s'adressent constamment à moi parce qu'ils veulent devenir professeurs de français, mais doutent que leur français soit assez bon. Nous faisons ce que nous pouvons pour leur offrir de nouvelles occasions d'enrichir leur langue; je propose notamment un éventail de clubs et de groupes pour les aider à parler français tous les jours.
    Lorsqu'ils se présentent à l'entrevue, l'école leur annonce que leur français n'est pas assez bon pour l'immersion et les affecte aux programmes de français langue seconde. Selon moi, c'est un crime, car le français langue seconde, le français de base, exige une aussi grande qualité de l'immersion. Les candidats sont embauchés et enseignent, ou ne sont pas engagés parce que la qualité de leur français n'est pas suffisante. Cela se sait, et les jeunes enseignants n'essaient même plus.
    À moins que nous ne puissions améliorer la qualité du français dans les écoles qu'ils fréquentent avant d'aller à l'université, ils ne seront pas prêts à devenir enseignants.

[Français]

    Madame Fedoration, vous avez parlé plus tôt de « gêne linguistique ». Qu'entendez-vous par là? Les gens sont-ils embarrassés de parler le français parce qu'ils ne le maîtrisent pas ou le parlent maladroitement?
    Pour ma part, c'est la façon dont je parle l'anglais, et je n'ai pas à en être gênée.
     Je ne sais pas si vous avez lu le livre de l'ancien commissaire Graham Fraser, mais il y traite de ce phénomène.
    Il est question d'élèves de la ville ontarienne de Kingston, d'où je viens, qui ont appris le français dans le cadre d'un programme d'immersion et qui, au cours d'un voyage au Québec avec l'école, sont trop gênés pour parler le français qu'ils ont appris à Kingston, dans leur programme d'immersion.

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    Pourtant, ils ne devraient pas ressentir une telle gêne au Québec.
    En effet. À plusieurs entreprises, surtout au Québec et en Ontario, les gens me répondaient en anglais lorsque je m'exprimais en français.
    Présentement, je vis en français tous les jours, ici en Alberta. Mes amis sont francophones, je travaille en français, mais quand hors de cette province et...
    On vous parle en anglais.
    Oui, et cela m'attriste vraiment, compte tenu du nombre d'années que j'ai passées à étudier le français et à le maîtriser. Les gens me corrigent et se moquent parfois de mon accent. C'est tout à fait normal de se sentir de cette façon.
    J'ai déjà travaillé au ministère. Il est parfois difficile d'interagir avec des gens qui viennent d'autres provinces et qui parlent le français tout à fait aisément. Dans ces situations, nous nous sentons honteux parce que nous sommes des professionnels, mais que nous sommes incapables de faire une phrase sans commettre d'erreur. Je crois que la même chose se produit partout où nous voyageons, peu importe le pays. Discuter avec des francophones est intimidant.
    Pourtant, vous ne devriez jamais vous sentir ainsi.
    M. Généreux me demande s'il peut prendre la parole deux secondes.
    Vous devriez venir à La Pocatière. D'ailleurs, j'incite mes collègues à ne pas apprendre le français dans des villes comme Québec, étant donné qu'il y a trop de touristes anglophones. À La Pocatière, il n'y a qu'une personne qui parle l'anglais et c'est mon épouse. Il n'y aurait donc aucun risque.
    Je blague, mais il reste qu'il est beaucoup plus facile d'apprendre le français dans une région véritablement francophone, notamment en milieu rural, que dans une région touristique. Il ne faut pas craindre de s'exprimer dans l'autre langue.
    Merci beaucoup, monsieur Généreux.
    Voilà qui met fin à notre réunion d'aujourd'hui, à Edmonton.
    Vos interventions contribueront de façon très importante à notre rapport. Au nom de tous mes collègues, je vous remercie énormément de cette discussion, de ces échanges.
    Ne partez pas immédiatement. Je demanderais aux députés de se déplacer vers l'arrière pour que nous puissions prendre une photo de groupe.
    La séance est levée.
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