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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 022 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 18 juillet 2016

[Enregistrement électronique]

  (1305)  

[Traduction]

    Chers invités et témoins, membres du Comité, il est un fait que, dans certaines parties du monde, des groupes sont visés par le nettoyage ethnique, et il ne faut pas oublier les génocides. À chaque anniversaire de l'Holocauste, de l'Holodomor et du génocide arménien, nous répétons les mots « jamais plus ». Et pourtant, il y a eu Srebrenica, le Darfour et Sinjar.
    À cause des menaces de crimes contre l'humanité, les populations vulnérables ont un urgent besoin de sanctuaires. L'importance et l'urgence de cette question sont reconnues par tous les membres du Comité. Nous allons donc étudier des façons, pour le Canada, d'appuyer les groupes ciblés, y compris en accélérant leur réinstallation et en appliquant d'autres mesures d'ordre humanitaire.
    Aujourd'hui, dans notre premier groupe de témoins, nous accueillons Heather Jeffrey, d'Affaires mondiales, et Robert Orr ainsi que Sarita Bhatla, d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.
    Nous commencerons par Heather Jeffrey.
    Je rappelle à nos témoins qu'ils disposent de sept minutes pour leur déclaration liminaire.

[Français]

     Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui pour vous parler des efforts mis en oeuvre par le Canada pour soutenir les groupes vulnérables dans des régions inaccessibles.
    Je m'appelle Heather Jeffrey et je suis directrice générale, Assistance humanitaire internationale, à Affaires mondiales Canada.
    Je ferai quelques remarques préliminaires sur les sujets que les membres du Comité nous ont soumis, puis je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Affaires mondiales Canada fait bon accueil à cette étude, car elle porte sur un grave problème humanitaire.

[Traduction]

    Les réfugiés, les personnes déplacées à l'intérieur de leur pays, les femmes, les enfants, les personnes âgées et les personnes handicapées ne sont que quelques-uns des groupes qui peuvent avoir des besoins particuliers en temps de crise. Tandis que les réfugiés jouissent d'une protection et de droits particuliers en vertu de la Convention sur les réfugiés, d'autres groupes vulnérables, comme les personnes déplacées à l'intérieur de leur pays, demeurent sous la responsabilité de leur gouvernement national. Or, toutes les personnes touchées par des crises humanitaires et dont les besoins ont été établis ont droit à l’assistance humanitaire.
    Le Canada offre son soutien à l'action humanitaire par l'intermédiaire d'un système international d'assistance humanitaire bien établi. En l’absence d'une forte présence des intervenants internationaux, le soutien peut souvent être fourni aux acteurs humanitaires locaux, comme les sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge ou par leur entremise.
    Les acteurs humanitaires ont pour tâche de sauver des vies, d'alléger la souffrance et de maintenir la dignité des populations touchées par les crises. Ils fournissent de l'aide sur la seule base des besoins établis, accordant la priorité aux cas les plus urgents de détresse et ne faisant aucune distinction entre les nationalités, les races, les sexes, les croyances religieuses, les classes ou les opinions politiques.
    L'assistance offerte est adaptée aux besoins des populations touchées par les crises et peut comprendre de l’assistance alimentaire, de l'eau, des abris, de la protection, des services de santé, de l’éducation et d'autres activités. Dans les cas de déplacements prolongés, nous soutenons aussi les efforts visant à trouver des solutions durables et nous aidons les personnes déplacées à réduire leur dépendance à l'aide pour devenir plus résilientes et autosuffisantes. Par exemple, le Canada a offert son soutien au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés afin de faciliter l’intégration locale des anciens réfugiés angolais et rwandais en Zambie.
    Les acteurs humanitaires jouent un rôle essentiel pour offrir de l'aide aux groupes vulnérables dans les régions difficiles d'accès. En appliquant les principes humanitaires d'humanité, d'impartialité, de neutralité et d'indépendance, ils sont capables d'engager un dialogue avec l’ensemble des parties au conflit afin de faire accepter leurs activités et de joindre les populations autrement inaccessibles.
    Lors du récent Sommet mondial sur l'action humanitaire qui s'est tenu à Istanbul en Turquie, le Canada a fait valoir l’importance continue des principes humanitaires et le rôle essentiel que joue l'action humanitaire fondée sur ces principes dans la prestation d'assistance aux personnes dont les besoins sont les plus grands, en particulier les femmes et les filles.
    Nous reconnaissons toutefois que les négociations pour joindre les personnes ayant besoin d'assistance humanitaire présentent des défis. Il y a souvent de nombreuses parties à un conflit. À mesure que les groupes non étatiques armés se fragmentent et prolifèrent, même les partenaires humanitaires bien établis éprouvent de la difficulté à faire accepter leurs activités et à maintenir cette acceptation. À cette fin, le Canada agit également sur le plan diplomatique — tant sur une base bilatérale que multilatérale — afin de trouver des solutions aux situations préoccupantes. Invariablement, le Canada enjoint à toutes les parties à un conflit armé — aussi bien les acteurs étatiques que des acteurs non étatiques — de respecter leurs obligations en vertu du droit humanitaire international.
    L'un des exemples de l’engagement diplomatique du Canada est notre participation au Groupe international de soutien à la Syrie, le GISS. Le GISS est coprésidé par les États-Unis et la Fédération de Russie et réunit tous les acteurs régionaux ainsi que l'Iran et l'Arabie saoudite. L'un des principaux engagements du GISS est de fournir une assistance humanitaire aux populations isolées. Les membres du groupe usent de leur influence auprès de toutes les parties sur le terrain pour qu'elles travaillent ensemble, en coordination avec les Nations unies, afin d'aider à assurer l'accès à toutes les personnes dans le besoin à travers la Syrie, particulièrement celles se trouvant dans des régions assiégées et difficiles d'accès. Environ 5,5 millions de personnes en Syrie ont besoin d'une assistance humanitaire dans les régions difficiles d'accès et assiégées. De ce nombre, près de 600 000 personnes se trouvent dans 18 régions assiégées. Les travaux du GISS ont débuté en février dernier et, en date du 23 juin 2016, les intervenants humanitaires avaient atteint 16 des 18 régions assiégées.
    Les Nations unies et ses membres, et en particulier le Conseil de sécurité des Nations unies, doivent également démontrer leur engagement soutenu à protéger les civils et à intervenir utilement en cas de violation flagrante du droit international. Au sein du système de l'ONU, le Canada soutient fermement les intervenants, y compris les représentants spéciaux, les rapporteurs et le coordonnateur des secours d'urgence de l'ONU, qui défendent les droits des civils.
    Lorsque des problèmes persistent, le Conseil de sécurité peut obliger les États à prendre des mesures visant à faciliter la prestation d'aide aux populations civiles. En juillet 2014, par exemple, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté la résolution 2165, qui autorise les agences de l'ONU à fournir de l’assistance humanitaire transfrontière en Syrie en avisant le régime Assad de leur intention, mais sans nécessairement avoir besoin de son consentement. D'autres résolutions ont eu pour effet de prolonger ce mandat jusqu'en janvier 2017. Depuis le début de l’opération, 337 convois de 7 agences ont fourni de l'aide alimentaire à plus de 2,8 millions de personnes, des articles de secours non alimentaires à 2,3 millions de personnes, et de l'eau et des services d'assainissement et d'hygiène à 2,1 millions de personnes.
    En conclusion, les acteurs humanitaires peuvent faire — et font effectivement — une réelle différence dans la vie des personnes touchées par des crises humanitaires, mais certains défis persistent. Le Canada continuera de soutenir l’action humanitaire fondée sur des principes et de défendre le droit à un accès sans entraves aux populations ayant besoin d'assistance.
    Merci beaucoup pour votre temps cet après-midi. Il me fera maintenant plaisir de répondre à vos questions.

  (1310)  

    Merci, madame Jeffrey.
    Monsieur Orr et madame Bhatla, vous avez sept minutes.
    Je m'appelle Robert Orr et je suis sous-ministre adjoint des Opérations à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Je suis accompagné de Sarita Bhatla, directrice générale des Affaires des réfugiés à IRCC.
    La réinstallation n’est bien sûr qu’un des nombreux outils permettant de porter assistance aux personnes vulnérables. Je vais vous donner un aperçu général de la manière dont le ministère est en mesure d'aider certains membres de groupes vulnérables.
    Selon l'Agence des Nations unies pour les réfugiés, un sommet record de 65,3 millions de personnes étaient déplacées à la fin de 2015, soit 21,3 millions de réfugiés, 40,8 millions de personnes déplacées à l'intérieur de leur pays et 3,2 millions de demandeurs d'asile.

[Français]

    Ces statistiques brutales incluent de nombreux membres de groupes vulnérables qui ont besoin de l'aide de la communauté internationale.
    Bien sûr, l'objectif ultime des personnes déplacées est de rentrer chez elles dans la paix et la sécurité. Le but principal du Canada est, par conséquent, de les aider à mettre en place les conditions nécessaires pour y arriver.
    Trop souvent, cela n'est pas une option. Il existe de nombreuses situations prolongées de déplacement ainsi que d'autres contextes nécessitant une protection immédiate.
    Dans de telles situations, la réinstallation peut être la meilleure option disponible pour certains individus, même si nous devons garder à l'esprit que seul un très faible pourcentage dans le monde entier a accès à la réinstallation.

[Traduction]

    L'Agence des Nations unies pour les réfugiés estime que sur les 20 millions de réfugiés dans le monde, plus d'un million devront être réinstallés en 2016. Pourtant, en 2014, l'année la plus récente pour laquelle nous avons des données, seuls 105 000 réfugiés ont été réinstallés dans le monde entier. Bien que le Canada n'ait évidemment pas la capacité d'aider chaque personne déplacée, son engagement à titre de pays à offrir la meilleure aide possible et à accueillir à bras ouverts les réfugiés demeure très fort.
    Monsieur le président, les objectifs du programme de réinstallation du Canada et du système d'asile au Canada sont de sauver des vies, d'offrir une protection aux personnes déplacées et persécutées, de respecter les obligations juridiques internationales de notre pays en ce qui concerne les réfugiés, et de répondre aux crises internationales en offrant de l'aide aux personnes dans le besoin. Tous les réfugiés réinstallés au Canada reçoivent la résidence permanente et ont la possibilité d'accéder à la citoyenneté. Ils peuvent être réinstallés à titre de réfugiés pris en charge par le gouvernement, par le biais d'un parrainage privé ou dans le cadre de notre programme « mixte » en pleine croissance, aux termes duquel le gouvernement et des répondants privés partagent les coûts à parts égales.
    En vertu de la Convention relative au statut des réfugiés de 1951 et des pratiques internationales en la matière, chaque réfugié réinstallé et pris en charge par le gouvernement doit être une personne qui craint avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social particulier ou encore de ses opinions politiques, ou qui a subi personnellement des conséquences graves en raison d'une guerre civile, d'un conflit armé ou d'une violation massive des droits de la personne. Enfin, pour être admissibles à la réinstallation au Canada, les réfugiés doivent se trouver hors de leur pays d'origine.

  (1315)  

[Français]

    Nous comptons sur nos partenaires, comme l'Agence des Nations unies pour les réfugiés, pour sélectionner les réfugiés ayant besoin de réinstallation qui peuvent par après venir au Canada à titre de réfugiés pris en charge par le gouvernement.
    Avant de recommander la réinstallation d'une personne, l'Agence des Nations unies pour les réfugiés effectue une évaluation de ses besoins en matière de protection et de sa vulnérabilité. Par exemple, elle recense les réfugiés ayant des besoins juridiques, médicaux ou de protection physique, les survivants de la torture ou de la violence, les femmes et filles à risque, et les enfants et adolescents à risque.

[Traduction]

    La détermination des vulnérabilités et des besoins en matière de protection est effectuée indépendamment des origines religieuses ou ethniques, de l'identité ou de l’orientation sexuelle, ou d'autres caractéristiques. Bien sûr, dans de nombreux cas, ces caractéristiques peuvent jouer un rôle important dans la détermination par l'Agence que certaines personnes sont vulnérables et ont besoin de protection. Par exemple, dans de nombreux pays, l'appartenance à la communauté LGBTI peut faire d'une personne une cible de violence et de persécution. Le Canada est ouvert aux réfugiés LGBTI qui font l’objet d’une recommandation de réinstallation, et nous avons établi un partenariat avec des organisations qui souhaitent parrainer des réfugiés LGBTI. Nous continuons par ailleurs de demander systématiquement à l'Agence des Nations unies pour les réfugiés de nous recommander des femmes à risque en vue de leur réinstallation au Canada. Une fois qu'un réfugié a été recommandé, un agent des visas travaillant dans une mission du Canada à l'étranger doit déterminer si sa demande de réinstallation est recevable et s'il est admissible.
    Monsieur le président, il peut être très complexe de traiter les demandes de réinstallation lorsque les réfugiés vulnérables se trouvent dans des endroits difficiles d'accès en raison de risques pour la sécurité, dans les endroits où la présence d'un agent pour une entrevue mettrait les réfugiés ou leurs familles à risque, ou dans les emplacements ou l’aspect logistique fait problème.
    Néanmoins, nous continuons à déployer des efforts importants pour traiter les réfugiés qui se trouvent à des endroits difficiles d'accès, lorsque cela est possible, et nous nous efforçons de concevoir des solutions de traitement novatrices, comme les entrevues par vidéo de réfugiés somaliens au Kenya, ou de réfugiés syriens et irakiens en Libye. Des agents des visas se rendent dans les camps de réfugiés afin de mener des entrevues dans un bureau du HCR, comme au camp de Kakuma au Kenya. Si c'est impossible, les réfugiés peuvent être transportés au bureau canadien des visas le plus proche — par exemple, les réfugiés du camp de Dadaab peuvent aller à Nairobi ou à un autre endroit comme Khartoum — où les agents des visas du Caire ou de Rome peuvent se rendre pour traiter leur dossier. Bien sûr, la sécurité de nos fonctionnaires, de nos partenaires dans le traitement et des réfugiés que nous cherchons à aider est une priorité absolue.
    Monsieur le président, s’agissant des personnes déplacées à l'intérieur de leur pays, je me dois de préciser que, conformément aux pratiques internationales, la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés a mis en place les programmes de réinstallation des réfugiés et d'octroi de l'asile au Canada pour fournir une protection aux personnes déplacées qui se trouvent hors de leur pays d'origine. Il est donc difficile d'offrir par des mesures d'immigration une protection aux personnes vulnérables déplacées à l'intérieur de leur pays et, comme Mme Jeffrey l’a souligné, il est souvent difficile d’obtenir l’accès à l’aide humanitaire.

[Français]

    Cela signifie que les efforts de protection sont principalement offerts par d'autres moyens, notamment l'aide humanitaire, les activités diplomatiques et d'autres méthodes, y compris celles visant à mettre un terme au conflit.
    Dans des cas exceptionnels, nous disposons de mécanismes juridiques pour offrir notre protection à des personnes particulièrement vulnérables.
    Par exemple, nous avons le pouvoir d'accorder le statut de résident permanent à certains ressortissants étrangers vulnérables dans des circonstances d'ordre humanitaire, selon une évaluation au cas par cas, et de prendre en considération des facteurs comme l'intérêt supérieur de tout enfant impliqué, le regroupement familial ou la discrimination.

[Traduction]

    Le ministre a également le pouvoir légal discrétionnaire d'accorder la résidence permanente aux termes de considérations d'intérêt public, généralement pour répondre à des situations particulières, exceptionnelles et temporaires. Toutefois, comme les personnes déplacées à l'intérieur de leur pays sont généralement situées dans des zones de conflit, l'établissement ne serait-ce que d'une capacité temporaire de traitement présente de nombreux défis.
    En conclusion, monsieur le président, on voit donc que le Canada utilise son programme de réinstallation pour veiller à ce que certaines des personnes les plus vulnérables du monde reçoivent sa protection. Malgré nos vaillants efforts et notre leadership mondial dans ce domaine, la réinstallation reste éclipsée par l'ampleur des déplacements et du besoin de protection dans le monde entier.

[Français]

    Monsieur le président, c'est avec plaisir que Mme Jeffrey, Mme Bhatla et moi-même répondrons maintenant aux questions des membres du Comité.

[Traduction]

    Merci, monsieur Orr.
    Madame Zahid, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président. Je suis heureuse d'être de retour à Ottawa.
    Ma question s'adresse aux représentants d'Immigration Canada et d'Affaires mondiales Canada. La communauté internationale a reçu les premiers comptes rendus des massacres et des atrocités commis par Daesh contre les yézidis en août 2014.
    Pouvez-vous nous dire quelles consignes votre ministère a reçues du ministre et du gouvernement relativement à l'assistance à apporter à la communauté yézidie entre août 2014 et septembre 2015?

  (1320)  

    Je ne pense pas que nous ayons reçu de consignes particulières du ministre de l'Immigration au sujet de ce groupe pendant cette période.
    Après la publication de ces comptes rendus en août, y a-t-il eu...?
    Pas spécifiquement dans le cas des yézidis.
    Rien?
    Cela étant, nous suivons régulièrement la situation auprès du HCR, partout où il y a des problèmes et des situations de vulnérabilités.
    Je vais cependant laisser le soin à ma collègue d'Affaires mondiales de vous en parler, parce que cela ne signifie pas que la réaction canadienne s'est limitée à cela.
    Pour ce qui est de la réaction du Canada sur le plan de l'aide humanitaire, comme je l'ai dit, nous avons un programme responsable axé sur les besoins constatés en temps réel.
    Depuis le début de la crise irakienne, nous avons consacré 140,9 millions de dollars en aide humanitaire internationale afin de répondre aux besoins des personnes les plus vulnérables. Nous acheminons notre assistance principalement de trois façons: d'abord, par le biais des agences onusiennes sur le terrain, comme le HCR, le Programme alimentaire mondial, l'Organisation mondiale de la Santé et les autres.
    Madame Jeffrey, quand avez-vous commencé cela? Avez-vous des dates?
    Les fonds nous arrivent régulièrement chaque fois qu'il y a une crise.
    Nous répondons à l'appel de fonds consolidé, qui est un processus annuel, mais nous réagissons aussi au fur et à mesure de l'augmentation des besoins constatés et de l'évaluation des besoins changeants en cours d'année. Il s'agit de fonds que nous débloquons régulièrement, à la demande de l'ONU, au Comité international de la Croix-Rouge et au Croissant-Rouge, de même qu'à des organisations non gouvernementales afin de répondre aux besoins constatés sur le terrain.
    Nous versons des fonds à des partenaires de confiance dans le domaine de l'aide humanitaire, par exemple au Programme alimentaire mondial. Ces partenaires interviennent sans cesse sur le terrain, dans ce cas en Irak, où ils identifient les besoins et où le degré de vulnérabilité est le plus élevé. Le financement canadien a pour objet de répondre aux besoins des personnes les plus vulnérables en situation de crise.
    Quand avez-vous débuté cette action?
    Au tout début de la crise et cela n'a pas arrêté depuis. En 2015, nous avons débloqué 80 millions de dollars en aide humanitaire et nous avons débloqué des fonds supplémentaires en 2016.
    Je sais que le ministre a évoqué une approche pangouvernementale pour régler le problème des crises en Syrie et dans le Nord de l'Irak qui ont été alimentées par la guerre en Syrie et par la montée de Daesh. Nous savons que la situation sur le terrain dans la région ne se réglera que par l'instauration de la sécurité et de la stabilité, de même que par les possibilités qu'on redonnera aux populations de la région. La réaction du gouvernement consiste notamment à renforcer la mission de formation des militaires sur place, à accroître l'aide humanitaire et l'aide au développement et à oeuvrer afin de renforcer la stabilité régionale. Pourriez-vous nous dire pourquoi cette approche pangouvernementale est si importante afin d'améliorer la situation dans toute cette région?
    Il existe bien sûr différentes façons d'intervenir en cas de crise profonde, comme celle que nous constatons dans cette région. Je pense qu'il est particulièrement important de recourir à tous les outils mis à notre disposition. À cet égard, je dirais qu'Affaires mondiales assume un rôle de premier plan, un rôle de rassembleur. Mme Jeffrey vous a expliqué les différentes façons pour le gouvernement de réagir efficacement à ce genre de situation. Nous travaillerons aussi en étroite collaboration avec la communauté internationale pour agir de façon efficace et le Canada assume bien sûr son rôle à cet égard.
    J'ajouterais simplement que l'approche intégrée que nous adoptons dans le cas des conflits en Irak et en Syrie est tout à fait novatrice et qu'elle constitue une évolution importante dans notre façon d'aborder l'assistance humanitaire et l'aide au développement en particulier. Nous apportons une assistance axée sur l'ensemble des besoins constatés en sécurité et stabilisation, aide humanitaire et développement.
    L'une des grandes conclusions du Sommet humanitaire mondial a été que l'aide humanitaire et l'aide au développement doivent être davantage harmonisées pour couvrir l'ensemble des besoins constatés, de l'intervention urgente en situation de crise au renforcement des capacités de résistance et, éventuellement, au retour à des solutions durables pour les populations touchées, ou à l'instauration de telles solutions. On pense à cet égard, à l'ensemble des interventions allant de l'aide alimentaire d'urgence à l'amélioration des conditions de vie et à d'autres formes de soutien des personnes nécessiteuses. Nous sommes ravis de pouvoir disposer de fonds pluriannuels qui nous permettront de mener de pair nos programmes de développement humanitaire et de stabilisation qui pourront ainsi se renforcer mutuellement. La planification conjointe de ce genre d'assistance nous permet de faire des choses que nous n'avons pas pu faire dans d'autres contextes.

  (1325)  

    Le ministère a-t-il jamais identifié les immigrants et les réfugiés par catégories, par exemple selon leur orientation sexuelle ou leur religion?
    Non, nous ne tenons pas compte de ce genre de renseignements et cela pour plusieurs raisons, mais surtout parce que ces données concernent la vie privée des personnes. Cependant, nous tenons compte de ces facteurs dans les demandes du statut de réfugié, quand il est question de vulnérabilité, et l'on peut retrouver ce genre d'information dans les notes, mais nous n'en tenons autrement pas compte.
    Pouvez-vous nous décrire les problèmes de sécurité, de logistique ou autres qui pourraient découler de toute tentative visant à faire sortir les personnes déplacées de leur pays, sans l'appui de leur gouvernement souverain, ou d'un État défaillant ou en déroute?
    On pourrait sans doute regrouper tout cela en trois catégories. D'abord, comme vous l'avez indiqué, l'accès de l'aide humanitaire devrait respecter les voeux de l'État souverain, ce qui peut être difficile dans certains cas. Dans le cas contraire, il est très compliqué d'accéder aux personnes concernées. Et puis, ce genre de chose peut donner lieu à d'autres complications. Si l'État souverain exige des permis de sortie ou ce genre de documents, il peut alors être très difficile aux personnes de sortir des frontières.
    Deuxièmement, on se heurte souvent à des problèmes de simples logistiques dans les tentatives déployées pour rejoindre les personnes. Dans une zone de conflit, il est d'autant plus difficile d'atteindre ces personnes. De plus, bien qu'il existe des outils utilisés ailleurs, comme des vidéoconférences et autres, afin de mener des entrevues, cette technologie peut ne pas être disponible dans de telles situations ou elle peut ne pas fonctionner. Voilà qui complique d'autant les choses. Il peut être difficile aussi pour les gens de trouver un moyen de transport et ainsi de suite.
    Troisièmement, se pose la question de la sécurité des personnes. Là aussi, on peut imaginer trois cas de figure. Le premier est celui de la sécurité des demandeurs eux-mêmes, parce qu'on ne veut pas les placer dans une situation où ils seraient encore plus vulnérables si les autorités apprenaient qu'ils pourraient être réinstallés. Deuxièmement, d'autres groupes pourraient avoir besoin d'une aide humanitaire, sans pour autant qu'ils soient visés par une possibilité de réinstallation. On pourrait se poser la question de leur devenir après la réinstallation d'autres groupes. Troisièmement, bien sûr, il y a la question de la sécurité des fonctionnaires qui doivent travailler dans ce genre de contexte.
    Madame Rempel, je vous en prie, vous avez sept minutes.
    Je tiens à remercier nos témoins pour leur témoignage durant l'été.
    Tout d'abord, je vais parler du rapport du HCR de juin 2015 à propos du génocide des yézidis. Il y est notamment recommandé que la communauté internationale prenne acte du crime de génocide commis par l'EI contre les yézidis du Sinjar. Selon vous, est-ce que le gouvernement a officiellement déclaré qu'un tel génocide a eu lieu?
    À la suite de la publication du rapport de la commission internationale d'enquête sur les violations des droits de la personne et sur les crimes commis en Syrie, le ministre Dion a fait une déclaration à la Chambre des communes dans laquelle il a pris acte des conclusions de la commission d'enquête. Il a déclaré que les atrocités commises par l'EI contre les yézidis du Sinjar constituent un génocide.
    Étant donné que le gouvernement a déclaré qu'il s'agissait d'un génocide, est-ce que ce génocide contre les yézidis a été pris en compte dans l'établissement de priorités pour la sélection des réfugiés en vertu de l'initiative des réfugiés syriens de ce gouvernement?
    Nous n'en avons pas tenu compte dans le cadre du processus des réfugiés syriens. Cependant, nous examinons différents programmes en vigueur pour le Moyen-Orient qui permettent d'accepter des personnes vulnérables, catégorie à laquelle appartiennent évidemment les yézidis.
    Dans un article du Toronto Star de février 2016, le HCR, dans une réponse par courriel, a indiqué ceci:
... nous recommandons la réinstallation de yézidies irakiennes actuellement en Turquie [...] et il appartient (au Canada) d'indiquer s'il envisage d'accueillir des yézidies irakiennes venant de Turquie dans le cadre de son programme de réinstallation.
    Depuis lors, puisque le HCR a soumis les noms de yézidies irakiennes en vue de leur réinstallation, le Canada a-t-il déployé des efforts particuliers pour accueillir ces femmes?
    Un certain nombre des yézidies ont été acceptées, par le truchement des...
    Combien?
    ... des programmes de parrainage privé et de parrainage gouvernemental. Comme nous ne tenons pas systématiquement compte des origines ethniques ni de l'appartenance religieuse, nous ne pouvons vous donner de chiffres.
    Très bien. Le ministère a-t-il déjà été invité à tenir compte de l'appartenance à un groupe religieux, ethnique ou de minorité sexuelle dans le cas des réfugiés afin d'établir des priorités sur la base de la vulnérabilité associée à ces critères?

  (1330)  

    Comme je le disais, nous ne tenons pas systématiquement ce genre de statistiques sur les minorités ethniques ou religieuses.
    Donc, selon vous, le ministère n'a jamais reçu pour consigne de tenir ce genre de statistiques.
    Pour répondre à votre question, tout ce que je peux vous dire, c'est que nous ne tenons pas compte de ces statistiques.
    Avez-vous déjà été invités à le faire?
    Pas à ma connaissance.
    Merci.
    En réponse à la recommandation du rapport qui est d'accélérer le traitement des demandes de réfugiés des yézidis victimes de génocide, le ministère a-t-il reçu pour ordre d'adopter des mesures spéciales à cet égard?
    Encore une fois, pour ce qui est de la réinstallation, nous suivons les indications du HCR en ce qui concerne le parrainage gouvernemental. Tout dépend des cas que nous renvoie le HCR, mais nous les examinons tous s'ils nous sont renvoyés, et avec beaucoup de compassion.
    On m'a dit que de nombreux yézidis indiquent que leur pays d'origine est l'Irak. Est-ce vrai?
    C'est vrai.
    Ce gouvernement a-t-il plafonné le nombre de réfugiés en provenance d'Irak dans le cadre du programme de parrainage privé?
    Pas pour autant que je sache, mais Mme Bhatla pourra peut-être vous répondre.
    Je ne peux pas parler pour l'instant des plafonds particuliers imposés en fonction de telle ou telle région, mais nous pourrions certainement vous obtenir ce renseignement. Le plafonnement concerne les demandes de parrainage privé, parce que...
    Le nombre de réfugiés en provenance d'Irak et pouvant être accueillis en vertu du programme de parrainage privé a-t-il été plafonné?
    Je ne peux pas vous parler de cette région pour l'instant, mais je serais très heureuse de vous faire parvenir des renseignements quant au type de plafonnement qui a été appliqué au programme de partenariat privé.
    Je tiens à souligner que ce plafond n'a pour objet que d'améliorer l'efficacité du traitement des demandes et l'élimination des arriérés, parce que nous ne voulons pas que des réfugiés fassent l'objet d'une longue période de latence avant d'être acceptés au Canada. Nous devons donc coordonner les intérêts et la capacité des parrains privés avec notre capacité à traiter les demandes outre-mer parce que nous risquerions de nous retrouver avec un flot de réfugiés devant attendre quatre ou cinq ans avant de pouvoir venir au Canada. Les parrains privés trouvent extrêmement frustrant de devoir attendre aussi longtemps les réfugiés pour lesquels ils se sont portés garants.
    Il s'agit d'un outil de planification, d'un outil opérationnel qui vise à faire en sorte que les demandeurs soient traités avec respect.
    Nous avons appris d'études antérieures réalisées par ce comité que de nombreux groupes de réfugiés parrainés par le privé, y compris les groupes de parrainage privé qui veulent faire venir des yézidis au Canada, se heurtent à une très forte résistance pour trouver des places dans le cadre du programme de parrainage privé. Ils parlent du plafonnement en place qui leur empêche de faire venir des yézidies se trouvant dans des camps en Turquie.
    Le gouvernement vous a-t-il demandé d'accorder la priorité aux demandes émanant des yézidis victimes de génocide et qui peuvent se trouver actuellement dans des camps de réfugiés en Turquie?
    Non.
    La décision du gouvernement de déclarer que l'ISIS avait commis un génocide à l'égard des yézidis a-t-elle eu des répercussions sur la façon de traiter les demandes de réfugié présentées dans le cadre du parrainage privé? Cette catégorie doit-elle être qualifiée de prioritaire maintenant que cette déclaration a été faite?
    Je vais revenir sur l'approche générale. Il est entendu que nous allons examiner les demandes de parrainage privé qui nous sont présentées.
    Je dirais toutefois qu'à l'heure actuelle, il n'existe pas de directive accordant la priorité aux demandes émanant de groupes de yézidis dont nous avons reconnu qu'ils étaient victimes d'un génocide.
    Pas précisément, non.
    Pour terminer, je sais qu'il est difficile de suivre les demandes provenant de personnes LGBTI qui demandent l'asile.
    Grâce à l'expérience que vous avez acquise avec cette initiative toute récente visant les réfugiés, y a-t-il de bonnes pratiques ou des choses que nous devrions demander au gouvernement de mettre en place de façon à mieux suivre, et faire avancer de façon prioritaire, les demandes provenant de personnes LGBTI?
    Pour ce qui est du suivi de ces personnes, nous avons connaissance d'un certain nombre de cas de personnes LGBTI, et je dois dire que nous accueillons très favorablement ce type de demande. Nous savons que cela peut être un motif grave de vulnérabilité.
    Nous ne suivons pas ce genre de choses. Comme je l'ai dit, nous ne suivons pas l'origine ethnique, la religion, ni le fait d'appartenir à la communauté LGBTI. C'est principalement pour respecter la vie privée.
    Une personne peut être une réfugiée pour plusieurs raisons et non pas pour une seule raison particulière.
    Merci, monsieur Orr. Je regrette, mais le temps de parole est écoulé.
    Madame Kwan, vous avez sept minutes, allez-y.

  (1335)  

    J'aimerais poursuivre sur cette question du suivi. Le gouvernement a reconnu l'existence de groupes particulièrement vulnérables, comme celui des LGBTI, par exemple. Si nous ne sommes pas en mesure de suivre ces groupes vulnérables pour ce qui est du nombre de membres de ce groupe qui ont réussi à déposer des demandes et à se réinstaller au Canada, comment pouvons-nous savoir si nous avons réellement atteint l'objectif recherché?
    Je me demande quelles sont les autres pratiques accessibles ou les façons qui nous permettraient de faire face à ce problème pour que nous sachions mieux si nous réussissons vraiment à fournir un soutien à ces groupes vulnérables.
    Vous avez raison. Il est difficile de suivre ces dossiers et nous ne sommes pas en mesure de dire que nous avons accepté un nombre x de personnes membres d'un groupe ou d'un autre. Ce n'est pas quelque chose que nous sommes en mesure de faire.
    La personne qui présente une demande peut se trouver dans une situation où il existe différents motifs qui la rendent particulièrement vulnérable ou qui font qu'elle a besoin d'une protection internationale. Ce peut être son origine ethnique et le fait qu'elle fait partie du groupe des LGBTI, par exemple. Il peut y avoir toutes sortes de motifs dont il faut tenir compte.
    Lorsque nous travaillons avec le HCR et parlons des catégories de cas que nous souhaitons nous être recommandés, ce sont là des aspects très précis et le genre de cas pour lesquels le Canada aimerait examiner la possibilité d'accorder la réinstallation.
    J'aimerais, si vous le permettez, préciser que nous suivons la nationalité.
    Merci.
    C'est ce qui permet de savoir, par exemple, que les demandes présentées par des yézidis font partie de la catégorie des Irakiens.
    Nous ne ventilons pas toutefois ces chiffres selon l'origine ethnique ou le type de persécution, pour des raisons qui touchent principalement au souci de protéger les personnes en question.
    Merci.
    Je crois que cela ne règle pas la question. Comment pouvons-nous savoir si nous atteignons l'objectif que nous nous sommes donné, après que le gouvernement ait déclaré qu'il s'agissait là de groupes dont il reconnaissait la vulnérabilité? Je dois admettre que, d'après les renseignements que nous avons obtenus, nous ne savons aucunement si nous avons atteint cet objectif.
    J'aimerais revenir sur la question des yézidis, puisqu'il y a un rapport qui a été publié et qui reconnaît qu'ils sont victimes d'un génocide et parce que le gouvernement n'a toujours pas déclaré que leurs demandes devaient être prioritaires. Je dois vous dire franchement que cette situation m'étonne. J'ai pensé que ces dossiers seraient prioritaires, même avant d'arriver à cette séance du Comité.
    Cela dit, je pense que le nombre maximum de cas urgents que le Canada peut traiter est d'environ 100. Est-ce exact ou ce chiffre a-t-il changé?
    Vous faites sans doute référence aux cas urgents de protection.
    Oui, c'est exact.
    Ce sont les cas particuliers qui nous sont soumis et que nous traitons immédiatement — normalement dans un délai de deux à trois jours. Il s'agit de personnes qui se trouvent dans une situation particulièrement vulnérable et qui courent des dangers très réels et imminents.
    Encore une fois, ce chiffre de 100 est un chiffre qui est utilisé pour la planification et ce n'est pas un plafond. C'est le nombre de cas que nous pouvons examiner dans ces circonstances particulières.
    Dans le cas du génocide yézidi qui a été reconnu par le gouvernement, est-ce que les demandes présentées par les femmes et les filles sont considérées comme urgentes?
    Ces demandes de protection urgente touchent les réfugiés, ce qui veut dire que ces personnes se trouvent à l'extérieur de leur pays de nationalité.
    Serait-il alors possible de faire une exception pour tenir compte de la situation unique dans laquelle se trouvent les femmes et les filles yézidies, et du génocide qu'elles subissent, de façon à écarter les diverses règles qui les excluent des catégories qui peuvent être examinées? Je crois qu'en fin de compte, il s'agit de trouver le moyen de surmonter ces obstacles, de reconnaître qu'il existe une situation particulièrement urgente. Je ne pense pas que qui que ce soit dans cette salle dirait que ce n'est pas un groupe vulnérable auquel nous devrions apporter toute l'aide que nous pouvons. Nous savons que le Canada ne peut pas tout faire, mais il devrait certainement faire plus que ce qu'il a fait jusqu'ici.
    J'aimerais parler de façon plus générale des personnes vulnérables, de la façon dont nous les évaluons et du contexte dans lequel nous le faisons. Je tiens simplement à rappeler que notre programme de réinstallation des réfugiés porte sur les personnes vulnérables telles qu'elles ont été identifiées par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, et que c'est principalement ce commissariat qui nous recommande les cas de ce genre.
    D'une façon générale, ce n'est pas nous qui décidons de rechercher les personnes X, Y ou Z parce que le Canada s'y intéresse. Nous travaillons en collaboration avec d'autres pays et nous nous fions principalement à ce que nous demande le HCR qui possède l'expertise qui lui permet de prendre en compte l'aspect global et de demander aux États nations d'accueillir des groupes particuliers ou de décider de nous recommander certains cas individuels.

  (1340)  

    Il existait, avant 2011, un programme sur les pays sources qui permettait aux demandeurs d'asile de certains pays de demander leur réinstallation sans quitter leur pays d'origine et sans être recommandés par le HCR. Ce programme pourrait-il s'appliquer à la situation de crise que connaissent actuellement les femmes et les filles yézidies?
    Nous pourrions examiner à part les programmes de pays sources, mais je pense que si l'on voulait faire quelque chose de ce genre, il faudrait plutôt adopter une stratégie de ce genre, et ce serait sans doute la façon la plus facile d'aborder ce problème.
    Je dirais que nous avons supprimé la catégorie des personnes de pays source pour la principale raison qu'il était tout à fait inefficace. Nous avions une liste de pays et des règlements que nous appliquions et grâce auxquels les demandeurs pouvaient s'adresser directement à un agent des visas plutôt que d'attendre d'être visé par une recommandation, parce qu'il était très difficile et très compliqué d'ajouter certains pays à cette liste ou de les supprimer, de façon à suivre l'évolution de la situation dans les différents pays, sans parler des aspects diplomatiques associés au fait de déclarer à un gouvernement que nous estimons que les personnes qui se trouvent sur son territoire devraient pouvoir quitter ce pays si elles le demandaient...
    Vous avez 30 secondes.
    Voici une brève question. Quelles sont les mesures que vous pouvez nous proposer pour pouvoir intervenir immédiatement et régler ce problème?
    Cela soulève des problèmes différents. Il faut commencer par admettre que la réinstallation n'est pas la seule solution. Le Canada peut faire un certain nombre de choses pour aider les yézidis qui se trouvent à l'heure actuelle dans une situation tout à fait épouvantable — tout comme un certain nombre de groupes minoritaires qui se trouvent également dans le Nord de l'Irak. Je crois que nous ramène à l'aide humanitaire que nous offrons et qu'a décrite Mme Jeffrey.
    Monsieur Sarai, vous avez sept minutes.
    Je croyais que les deux ministres d'IRCC précédents avaient émis une directive qui prévoyait le suivi de l'origine ethnique et de la religion des réfugiés. Je crois qu'il s'agissait du programme de catégories prioritaires. A-t-il été supprimé, et si c'est le cas, pourrions-nous savoir quels étaient les aspects qu'ils suivaient et quelles étaient ces catégories prioritaires?
    Oui, vous avez raison; le gouvernement du Canada précédent a créé ce programme des catégories prioritaires. Il s'agissait d'ajouter certains éléments à prendre en compte dans le traitement des demandes d'asile, mais c'était en réalité un moyen d'accorder la priorité à certains types de demandes auxquels le Canada s'intéressait plus particulièrement. Cela n'a jamais été un programme exclusif. Autrement dit, si des personnes n'étaient pas membres des catégories prioritaires, cela ne voulait pas dire que leurs demandes n'étaient pas traitées, mais c'était simplement un moyen de faire savoir au HCR quels étaient les types de dossiers qu'il conviendrait de nous recommander.
    Existe-t-il toujours?
    Il n'existe plus.
    Auparavant, lorsqu'il existait, est-ce que les yézidis ont été inscrits sur la liste des...?
    Cette liste ne comprenait aucun groupe particulier.
    Quelles étaient donc ces catégories prioritaires?
    Il y en avait un certain nombre, mais en général, il s'agissait des femmes en danger, des personnes LGBTI, des groupes minoritaires. Les catégories prises en compte étaient définies de façon très générale.
    J'ajouterais que les liens familiaux étaient un aspect important. C'était le genre de choses qui figuraient sur cette liste.
    Ce programme vous a-t-il permis de suivre le nombre de yézidis, en particulier des femmes, qui sont arrivés au Canada entre, disons, août 2014 et octobre 2015?
    Non. Nous n'avons jamais suivi cet aspect d'aussi près.
    A-t-on essayé pendant cette période de les aider ou de les faire sortir d'Irak?
    Pas que je sache.
    Il n'y avait donc pas de programme...
    Cela dit, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés suivait de près ce qui se passait, et il nous a recommandé des cas concernant des personnes qui résidaient en Turquie, et il y avait parmi elles un certain nombre de yézidis.
    Vous n'avez donc pas les chiffres sur...
    Nous n'avons pas ces chiffres.
    Mais le Canada a fait un effort particulier. C'était les Nations unies qui les identifiaient et qui nous demandaient ensuite d'intervenir.

  (1345)  

    C'est ce que fait cet organisme dans toutes les régions où nous intervenons.
    Très bien, de sorte que cela n'a pas changé.
    Pour avoir droit à la réinstallation au Canada, la personne doit répondre à la définition de réfugié au sens de la Convention outre-frontières, se trouver à l'extérieur de son pays et être gravement et personnellement menacée par une guerre civile. Pensez-vous qu'il conviendrait de modifier la définition du statut qui donne accès à la protection du Canada?
    Je pense que, dans l'ensemble, la définition de 1951 a été reprise, mot à mot, dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Cette définition de 1951 s'est avérée particulièrement utile et incroyablement solide. Si l'on devait la changer, je crois qu'il faudrait le faire de concert avec les autres pays. Nous ne sommes pas en train de nous demander si nous voulons la modifier, mais elle pourrait être plus restrictive s'il y avait un débat international sur une nouvelle définition.
    Vous avez tout à fait raison. Elle ne traite pas des déplacés internes. Cela pourrait justifier une autre discussion, mais plutôt une discussion distincte qui ne porterait pas sur la définition qu'applique le HCR ni sur celle de réfugié.
    Pour ce qui est de la situation des yézidis en Irak, est-il juste de dire que l'aspect pratique n'est pas simplement qu'ils ne se trouvent pas dans un pays différent ou qu'ils n'ont pas quitté l'Irak, mais le fait que ces personnes ne se trouvent pas dans une région sûre? Est-ce qu'Affaires mondiales Canada sait si ces femmes se trouvent dans une région sûre et qu'il suffirait de les renvoyer dans un camp du HCR à l'extérieur de ce pays? Est-ce bien là le défi qui se pose actuellement?
    Eh bien, si elles se trouvent à l'extérieur du pays, il est beaucoup plus simple pour nous d'examiner les demandes présentées par des yézidis. Le Nord de l'Irak, comme vous le savez, est une région extrêmement volatile. Nous devrons faire preuve d'une extrême prudence lorsque nous décidons de faire quelque chose en Irak.
    À l'heure actuelle, il serait très difficile de traiter ces demandes si ces personnes se trouvaient en Irak, et même d'alléger la condition qui exige qu'elles se trouvent dans un autre État pour que nous puissions examiner leurs demandes.
    C'est exact.
    Le président pourra-t-il m'avertir quand il me restera environ deux minutes?
    Il vous reste 2 minutes et 20 secondes.
    Je vais alors donner mon temps de parole à Ali.
    J'ai deux minutes?
    Merci, monsieur le président.
    Je voulais simplement poser une question très brève, compte tenu de tout ce que nous avons entendu jusqu'ici.
    Premièrement, si j'ai bien compris, le ministère rencontre tous les ans des représentants de divers pays ainsi que ceux du HCR qui travaillent dans les pays concernés. Est-il prévu de tenir des réunions avec le personnel du HCR en Turquie?
    Nous rencontrons régulièrement des représentants du HCR dans les pays où nous intervenons, mais nous avons aussi un personnel permanent qui est basé à Genève; cela nous permet d'examiner toutes sortes de questions au siège du HCR. Nous essayons toutefois également d'identifier les populations qui sont particulièrement vulnérables et à l'égard desquelles le Canada peut faire quelque chose.
    Mais il n'y a donc pas de réunion annuelle?
    Il y a aussi des réunions annuelles. Il y a également des forums importants. Il y a la grande assemblée qui a lieu en septembre chaque année et qui va se tenir bientôt. Il y a aussi les discussions permanentes que nous avons avec les représentants du HCR.
    Merci.
    J'ai une autre question sur le même sujet. Ma collègue, Mme Zahid, a parlé de la communauté yézidie, et elle a demandé si des mesures avaient été prises à son égard entre août 2014 et septembre 2015. Vous nous avez appris qu'aucune mesure particulière n'avait été prise. Y avait-il des difficultés particulières qui ont peut-être empêché le gouvernement précédent de prendre des mesures au sujet de la communauté yézidie, auxquelles vous pourriez penser?
    J'insiste encore une fois sur le fait que nous avons accueilli un certain nombre de yézidis, en collaboration avec le HCR, qui a identifié certains Irakiens, y compris des membres de la communauté yézidie, en vue de leur réinstallation. Ces dossiers ont été traités et certaines de ces personnes sont arrivées au Canada. Le travail se poursuit.
    Le Canada a pris un engagement majeur à l'égard des Irakiens. Nous devions réinstaller 23 000 Irakiens et nous avons dépassé ce chiffre en fait. Nous avons lancé une initiative majeure dans ce domaine.
    Merci, monsieur Orr.
    Madame Rempel, je crois savoir que vous allez partager votre temps de parole avec M. Kent.
    Je l'espère. Je vous remercie.
    Monsieur Orr, la politique officielle du gouvernement précédent devait viser principalement — non pas de façon à exclure qui que ce soit, mais de façon à établir des priorités dans les efforts du Canada en matière de réinstallation — les minorités religieuses et ethniques ainsi que les minorités sexuelles. Est-ce bien exact?

  (1350)  

    Entre autres. Comme je l'ai exposé, nous avons également tenu compte des liens familiaux et d'autres éléments.
    Pensez-vous que les yézidis constituent une minorité religieuse ou ethnique?
    Oui.
    Vous avez dit que ce programme avait pris fin. Est-ce le gouvernement actuel qui vous a demandé de mettre un terme à l'établissement de ces priorités?
    Dans vos remarques précédentes, vous avez dit que le programme grâce auquel vous établissiez des priorités avait pris fin. Est-ce le gouvernement actuel qui vous a demandé de le faire?
    Oui.
    Merci.
    Excusez-moi, si je peux ajouter quelque chose, il a été mis fin à l'époque au cours de laquelle le gouvernement précédent voulait effectuer un examen de l'efficacité de ce programme. Par la suite, il y a eu une élection. Il a donc pris fin avant l'élection, ou pendant cette période, de façon à pouvoir examiner comment il fonctionnait en réalité.
    Voilà qui est intéressant. S'il y avait un examen en cours qui visait à déterminer l'efficacité de... Vous avez déclaré qu'à votre connaissance, vous n'avez jamais reçu de directive qui vous demandait de suivre les données de façon à pouvoir prendre de bonnes décisions sur l'établissement des priorités relatives aux minorités religieuses et ethniques. Pourriez-vous confirmer que vous avez jamais reçu de directive vous demandant de suivre le processus d'établissement des priorités pour examiner les résultats réels des priorités établies pour les minorités religieuses et ethniques? Je vous donne simplement la possibilité de préciser à nouveau si le ministère a jamais reçu une directive de la part d'un ministre précédent qui lui demandait de suivre les données en question.
    Pour faire un suivi des yézidis?
    Pour suivre les minorités religieuses et ethniques par rapport aux résultats des efforts de réinstallation des réfugiés.
    Nous avons eu effectivement de nombreuses discussions avec le gouvernement précédent au sujet de la façon d'effectuer le suivi et des raisons pour lesquelles nous le faisons. Il ne nous a pas été demandé de suivre de façon systématique le sort des minorités religieuses et ethniques dans notre programme de réinstallation.
    À votre connaissance.
    Je vous donne simplement la possibilité de faire figurer cela au compte rendu.
    Oui, à ma connaissance, il ne nous a jamais été demandé de modifier de façon systématique la façon dont nous effectuons ce suivi.
    Vous avez également parlé de plafonds. Encore une fois, nous parlons des yézidis. Nous savons que nous recherchons des groupes de parrainage privé en mesure de faire venir des yézidis au Canada, parce qu'ils sont des citoyens irakiens. Est-il exact que le gouvernement précédent ait écarté pour les Syriens comme pour les Irakiens les plafonds prévus pour le parrainage privé?
    D'après ce dont je me souviens, c'est exact.
    Quand ce processus a-t-il changé?
    Il faudrait que je vous donne ce renseignement plus tard.
    Le processus a-t-il changé? Est-ce que les Irakiens et les Syriens ont été exemptés des plafonds applicables au parrainage privé avec le gouvernement actuel?
    Je vous ferai savoir ce qu'il en est.
    Quand serez-vous en mesure de nous fournir cette information?
    Le plus tôt possible.
    Merci.
    Nous allons envoyer une lettre au ministre, c'est ce que nous espérons. En tout cas, le Parti conservateur le fera. Nous aimerions avoir cette information le plus tôt possible. Je suis un peu surprise d'assister à cette séance du Comité sans disposer de cette information.
    Je vais donner la parole à M. Kent.
    J'aimerais simplement encore essayer de comprendre pourquoi le gouvernement actuel n'a pas accordé la priorité à l'acceptation et au traitement des minorités persécutées, y compris les yézidis et les autres.
    Monsieur Orr, je reviens à votre affirmation selon laquelle pour être admissibles à la réinstallation au Canada, les réfugiés doivent se trouver à l'extérieur de leur pays d'origine. Compte tenu de la nature unique de la situation qui règne en Irak aujourd'hui et de la région autonome kurde qui se trouve à l'intérieur de l'Irak — un État sous-national qui est peut-être la partie la plus sûre du pays, puisque le trafic aérien international s'y poursuit, tout comme le commerce dans cette partie de l'Irak aujourd'hui —, un ministre du gouvernement autonome kurde, si je puis l'appeler ainsi, est venu à Ottawa en décembre. Le ministre a parlé à un certain nombre de groupes et demandait que le Canada aide les minorités persécutées qui ont peur de se rendre dans les camps du HCR parce qu'elles y seraient persécutées, comme elles l'ont été après le début de la guerre et des déplacements internes.
    Le Canada n'a-t-il pas accès à ces personnes pour savoir...? Elles semblent être là. Les autorités autonomes kurdes ont déclaré qu'ils donneraient accès au Canada à ces groupes persécutés, des groupes qui n'ont pas été désignés par le HCR. A-t-on essayé de faire enquête, de se rendre sur les lieux et d'aider ces personnes? C'est un des principaux groupes yézidis.
    Nous examinons ce qu'il est possible de faire à l'heure actuelle. La sécurité est un aspect qui évolue constamment dans le nord de l'Irak et au Kurdistan. Il faut réfléchir soigneusement aux besoins de protection et déterminer s'il est possible et viable d'intervenir dans cette région. Il n'est pas sûr que cela soit le cas.
    Monsieur Ehsassi, vous avez cinq minutes.

  (1355)  

    Je ne savais pas que je figurais sur la liste. Je vais donner mon temps de parole à M. Virani, qui a demandé d'intervenir.
    Cela s'adresse aux représentants d'IRCC.
    Je vais vous exposer mon point de vue, ainsi que celui de la CBC, et vous me direz simplement s'il est exact ou non. À mon avis, la politique des catégories prioritaires du gouvernement précédent visait à favoriser les minorités religieuses et ethniques à l'exclusion des musulmans sunnites de la région. Est-ce bien votre avis?
    Les catégories prioritaires mentionnaient effectivement que les groupes minoritaires auraient la priorité pour ce qui est des dossiers que nous recommanderait le HCR. Je n'en dirai pas davantage.
    Le programme des catégories prioritaires a été supprimé par le gouvernement actuel parce qu'il estime qu'un réfugié est un réfugié, une personne qui répond à la définition de la Convention de Genève de 1951. Cela pourrait comprendre n'importe quelle religion, y compris les musulmans sunnites. Est-ce exact?
    C'est exact. L'important, c'est la vulnérabilité.
    Avez-vous une idée du nombre de musulmans sunnites qui sont venus au pays dans le cadre du programme RPG depuis que le gouvernement actuel a pris le pouvoir et comment ce chiffre se compare-t-il avec l'acceptation des musulmans sunnites par le gouvernement précédent avec le programme RPG?
    Monsieur le président, nous ne tenons pas compte de la religion ou de l'origine ethnique dans nos statistiques, de sorte que je ne peux pas vous donner une idée de la situation. Nous savons par contre — de façon, bien sûr, empirique — qu'un très fort pourcentage des Syriens qui sont arrivés ici sont des musulmans sunnites.
    En outre, le nombre de réfugiés RPG qui sont arrivés depuis le 4 novembre a augmenté. Est-ce bien exact?
    Effectivement, en particulier, comme vous le savez fort bien, à cause de notre initiative majeure pour les Syriens.
    D'après d'autres témoignages qu'a entendus le Comité, nous pensons que le ministère a projeté de se rendre dans le Nord de l'Irak, en particulier à Erbil, au cours de l'automne. Cette région est-elle sûre en ce moment?
    Erbil est toujours une région que nous surveillons. À l'heure actuelle, nous continuons à faire des plans pour essayer de nous rendre en Irak — pour faire passer des entrevues à des Syriens, en fait, à Erbil.
    Ce sera l'une des premières fois que IRCC se rendra dans cette région. Il faudra prendre de grandes précautions en matière de sécurité pour nous rendre dans cette région. Mais cela nous apprendra peut-être si nous pourrions également intervenir à l'égard d'autres groupes qui se trouvent dans cette région.
    Pour le moment, la décision de faire ce voyage n'est pas encore définitive. Est-ce bien exact?
    C'est exact.
    Merci.
    Voilà qui termine la première heure de notre séance.
    Je vais suspendre pour quelques minutes pour que les prochains témoins prennent place. La séance est suspendue pour deux minutes. Merci.

  (1355)  


  (1400)  

    Reprenons.
    Notre deuxième témoin est Michael Casasola, officier responsable au Canada, Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés.
    Merci d'être venu. Vous avez sept minutes, monsieur Casasola.
    J'aimerais, au nom du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, vous remercier de m'avoir invité à comparaître devant le Comité. Le HCR est heureux de constater que le Comité s'intéresse particulièrement à la protection des populations vulnérables et aux personnes déplacées à l'intérieur de leur pays, celles que nous appelons les PDIP.
    Il était prévu que le chef du service de protection pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient du HCR devait se joindre à moi aujourd'hui, mais malheureusement, mon collègue a eu un conflit d'horaire et n'est pas en mesure de m'accompagner en ce moment. Je vous indique que, si vous avez des questions techniques concernant des populations particulières, nous pourrons certainement répondre par écrit aux questions du Comité après ma comparution.
    Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a été créé en 1950 par l'Assemblée générale des Nations unies dans le but de protéger et d'aider les réfugiés et de trouver des solutions à ce problème. À l'époque, il y avait un million de réfugiés, pour la plupart originaire d'Europe de l'Est. Aujourd'hui, quelque 65 ans plus tard, le HCR fait face à des situations d'urgence et à des déplacements de réfugiés à une échelle que nous n'avons jamais connue jusqu'ici. D'après le rapport du HCR sur les tendances mondiales, il y avait, dans le monde entier en 2015, 65,3 millions de réfugiés qui avaient été déplacés de force, un sommet historique, comprenant 21,3 millions de réfugiés, 40,8 millions de PDIP — un autre chiffre record — et 3,2 millions de demandeurs d'asile attendant une réponse à leurs demandes.
    Pour ce qui est des PDIP, l'Observatoire des situations de déplacements internes affirme qu'en 2015, il y avait 8,6 millions de personnes qui avaient été récemment déplacées à l'intérieur des frontières de leur pays en raison de conflits armés, d'une violence généralisée et de violations des droits de la personne, tout cela l'année dernière. Six pays représentent 84 % de toutes les nouvelles PDIP, notamment l'Irak, l'Ukraine, le Soudan, la République démocratique du Congo et l'Afghanistan.
    Monsieur le président, ce sont les autorités de leurs pays respectifs qui sont les principaux responsables des personnes déplacées à l'intérieur de leur pays, mais la communauté internationale et l'ONU sont tenues de partager l'obligation consistant à respecter et à préserver les droits des PDIP, en particulier lorsque les États sont incapables ou refusent de le faire. Le HCR a révisé ses procédures et ses lignes directrices internes concernant ses interventions dans la situation des PDIP. Lorsqu'il se produit des situations concernant les PDIP qui sont reliées ou semblables aux situations touchant les réfugiés rapatriés et lorsqu'une intervention est nécessaire, nous décidons d'intervenir pourvu que ce soit à la demande des Nations unies et en collaboration avec d'autres agences des Nations unies ou avec des partenaires humanitaires.
    Le programme d'assistance et de protection du HCR visant les PDIP a toujours couvert une large gamme de situations et d'activités. En pratique, la nature, l'ampleur et la durée de nos activités exercées pour le bénéfice des PDIP varient en fonction des circonstances particulières y compris l'évolution du déplacement, la capacité d'absorption des communautés dans lesquelles elles se sont réfugiées, la volonté et la capacité des autorités de la région à fournir au moins un minimum de protection contre les attaques ou les agressions, la durée du déplacement, et la composition démographique du groupe déplacé.
    L'existence de fonds influence évidemment beaucoup l'ampleur de notre intervention auprès d'une population particulière. Je note qu'à l'heure actuelle, nous n'avons reçu que 43 % des fonds affectés à l'opération syrienne. De nombreuses autres opérations reçoivent des niveaux de financement beaucoup plus faibles.
    Étant donné que ce sont les conflits armés et les violations des droits de la personne qui sont principalement la cause des déplacements, les activités du HCR exigent qu'il soit présent dans des zones touchées par des troubles et des conflits graves, des zones où la sûreté et la sécurité physique sont des préoccupations clés, tout en sachant que les préoccupations au sujet de la sécurité physique du personnel de l'ONU peuvent également avoir pour conséquence de limiter l'ampleur de nos activités. L'aide apportée par le HCR a également consisté à aider les autorités nationales et autres intervenants à fournir les services essentiels aux PDIP, en particulier dans les zones rurales, notamment en livrant de l'aide non alimentaire, en mettant sur pied des services de santé de base et en fournissant des abris.
    Comme je l'ai mentionné au début, au moment de sa création, le HCR a reçu pour mission, de la part de l'Assemblée générale des Nations unies, de mettre en place des solutions pour les réfugiés. De sorte que la volonté du Canada de réinstaller des milliers de réfugiés chaque année est un élément clé qui a permis au HCR de remplir sa mission consistant à mettre en place des solutions durables. Selon sa mission, le HCR appuie et coordonne la réinstallation dans plus de 20 pays, et identifie les réfugiés candidats à la réinstallation, en se fondant sur des critères acceptés par tous les pays de réinstallation vers lesquels le HCR envoie en priorité les réfugiés ayant des vulnérabilités et des besoins aigus en matière de protection.
    Le HCR identifie les réfugiés susceptibles de bénéficier du programme canadien des réfugiés pris en charge par le gouvernement et son programme mixte d'agent de visa. De plus, le rôle du HCR qui consiste à recommander des réfugiés pour la réinstallation est décrit dans le règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés. Le Canada mérite d'être félicité pour l'expansion considérable qu'il a donnée à son programme de réinstallation l'année dernière. Le HCR a exprimé sa profonde gratitude envers le gouvernement et les Canadiens pour la possibilité qu'ils ont donnée à des milliers de réfugiés syriens au cours de la dernière année, de refaire leur vie au Canada. Le HCR remercie également le Canada parce qu'il s'est engagé à continuer à réinstaller des réfugiés syriens pendant le reste de l'année 2016 et nous espérons que le Canada pourra continuer à participer aux forums internationaux concernant la réinstallation et les réfugiés dans lesquels il pourra présenter ses plans pour l'année 2017 et au-delà.
    En passant, je voudrais également ajouter que le HCR apprécie beaucoup le montant de 150 millions de dollars que le Canada lui a accordé jusqu'ici cette année — un montant record — dont 100 millions de dollars sont destinés à appuyer nos activités syriennes au Moyen-Orient.

  (1405)  

    Il est important de noter qu'IRCC atteint les objectifs qu'il a présentés au Parlement pour ce qui est des admissions pour 2016, et que cette année nous enregistrerons le plus grand nombre de réinstallations depuis l'adoption de la Loi sur l'immigration de 1976, qui introduisait pour la première fois un programme officiel destiné aux réfugiés. C'est là bien sûr un motif de célébration, mais malheureusement, la réalité est que, malgré l'augmentation généreuse qu'a prévue le Canada, le nombre des places de réinstallation offertes par tous les pays de réinstallation est loin de répondre aux besoins de réinstallations des réfugiés identifiés par le HCR. Il y a moins d'un mois, le HCR a publié un document sur les prévisions en matière de besoins mondiaux concernant les réinstallations dans lequel il examine la population mondiale des réfugiés et identifie, parmi le nombre record de réfugiés, ceux qui ont des besoins aigus en matière de réinstallation. D'après l'étude du HCR, il y aurait 1,19 million de réfugiés à réinstaller. Par contre, il n'y a qu'environ 120 000 places de réinstallation auxquelles peut avoir accès le HCR par les pays de réinstallation, et ce, annuellement, étant donné que la réinstallation est une activité volontaire des États. Dans ce contexte, le HCR invite les pays à continuer de développer leurs programmes de réinstallation, et encourage également les États à élaborer de nouveaux mécanismes d'accès, notamment les visas ou les transferts humanitaires, le parrainage privé, l'évacuation médicale, la réunion des familles, les bourses universitaires, l'apprentissage et les régimes du personnel.
    L'accroissement de toutes ces activités de réinstallation se produit au moment du 13e anniversaire de l'attribution de la médaille Nansen aux Canadiens — la seule fois où cette médaille a été attribuée à la population d'un pays — pour reconnaître le travail accompli par elle pour aider les réfugiés. Les valeurs d'ouverture et de générosité, qui caractérisent les Canadiens, sont des valeurs que nous voulons continuer à encourager, en particulier à l'égard de tous les réfugiés qui attendent toujours une solution.
    J'aimerais conclure en affirmant qu'il y a lieu de renforcer la coopération internationale pour répondre aux défis que pose l'augmentation du nombre des déplacés internes dans le monde entier. Le rétablissement de la paix et la protection des droits de la personne sont les meilleures façons de fournir une protection vraiment efficace aux déplacés internes. Ces aspects relèvent en fin de compte des gouvernements. Les formes que peuvent prendre la protection et l'aide humanitaire que le HCR est en mesure de fournir aux personnes dans leur propre pays servent principalement à promouvoir et à renforcer la protection nationale, qui doit être assurée par les autorités nationales. Les organismes internationaux peuvent jouer un rôle complémentaire, mais ils ne peuvent se substituer aux gouvernements lorsqu'il s'agit de protéger leur propre population.
    Je vous remercie encore une fois de m'avoir invité. Je serais heureux d'essayer de répondre aux questions que vous voudrez me poser.

  (1410)  

    Merci, monsieur Casasola.
    Monsieur Ehsassi, vous avez sept minutes.
    Je vais utiliser les cinq premières minutes et donnerai ensuite les deux minutes restantes à M. Saroya.
    Monsieur Casasola, je vous remercie d'avoir eu l'amabilité de venir aujourd'hui.
    Je crois que vous travaillez pour le HCR, notamment à Ottawa, depuis 2002. Est-ce bien exact?
    C'est exact.
    Et avant cela vous avez également...
    J'ai travaillé pour le Diocèse catholique romain de Londres, où j'ai participé au programme de parrainage privé des réfugiés pendant plus de 11 ans.
    Vous possédez donc une expertise acquise au cours de nombreuses années.
    Oui.
    Il y a une chose que je vous ai entendu répéter à plusieurs reprises; c'est que vous appréciez énormément le fait qu'en général, le Canada ait adopté une attitude à l'égard de la réinstallation des réfugiés qui est tout à fait dépourvue de discrimination. Auriez-vous l'amabilité de nous en dire davantage à ce sujet?
    Lorsque vous identifiez des réfugiés qui ont besoin d'être réinstallés, il est essentiel de ne pas oublier que ce sont des réfugiés, et qu'ils se trouvent à l'extérieur de leur pays d'origine. Dans leur pays d'asile, la question qui se pose est la suivante: sont-ils vulnérables et en danger dans ce nouveau contexte? Ils sont non seulement des réfugiés, mais également des personnes en danger, qu'elles aient besoin de protection physique ou juridique, qu'il s'agisse d'une personne qui a survécu à la torture ou d'une réfugiée en danger. À partir de là, nous utilisons des critères indépendants pour étudier la population de réfugiés et identifier ceux qui ont besoin d'être réinstallés. Nous avons sept catégories — j'ai déjà fait allusion à trois ou quatre d'entre elles — que nous utilisons pour identifier ces besoins, mais en plus de tout cela, nous examinons également la question de la priorité. Est-ce une priorité normale, pour ce qui est de la réinstallation, ou est-ce un cas urgent ou une situation de crise? C'est à ces situations que répond le programme de protection urgente du Canada: les quelques cas où, d'après nous, des personnes se trouvent en danger imminent et ont besoin d'être immédiatement réinstallées.
    L'aspect essentiel est qu'il s'agit là de critères indépendants que nous appliquons à tous les réfugiés quelle que soit leur nationalité, leur genre, etc. Bien sûr, il y a des cas spéciaux comme le programme des femmes en danger, qui nous amènent à examiner de façon proactive la persécution axée sur le sexe que subissent les réfugiées, mais là encore, c'est un genre de catégorie indépendante.
    Une des réalités associées aux catégories que je viens de mentionner est que nous intervenons dans un pays d'asile. Nous sommes donc l'invité du pays qui nous accueille et nous devons travailler en collaboration avec lui. Pour offrir la réinstallation, nous devons expliquer aux autorités les catégories et les critères que nous appliquons, et non pas leur dire que nous allons nous occuper de ce groupe ethnique particulier ou de cet autre groupe ethnique, ce qui peut parfois créer des problèmes dans le pays d'asile, notamment sur le plan politique.
    Merci de cette réponse.
    Je vais également poursuivre sur la question qu'a posée Mme Zahid au cours de la première heure. Elle a demandé si, après août 2014, au moment où des atrocités horribles ont été commises contre les yézidis dans la région de Sinjar, les représentants du gouvernement avaient reçu des directives du gouvernement précédent et la réponse a été que non.
    Je me demande si vous êtes en mesure de me confirmer si, entre août 2014 et septembre 2015, vous avez reçu des directives du gouvernement canadien sur la question de savoir s'il y avait lieu d'accorder un traitement préférentiel aux yézidis.
    Je m'arrête un instant pour me demander s'il y avait quelque chose de précis à ce sujet.
    Comme l'a indiqué M. Orr, nous avons bien sûr eu des discussions avec le gouvernement à de nombreux niveaux — sur le terrain, à notre siège à Genève et ici, à Ottawa. Je dois vous avouer que la plupart de ces discussions sont confidentielles. Je pense qu'elles sont même visées par la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques.
    Je ne me souviens pas de mesure particulière. Bien sûr, le Canada s'inquiétait énormément de la situation, et il est bien connu que nous sommes rencontrés pour discuter de la création d'un bureau des minorités religieuses. Nous avons parlé des questions touchant ces groupes. Je ne peux toutefois vous mentionner des éléments précis.
    Encore une fois, la plus grande partie de nos discussions avec les gouvernements est confidentielle, tout comme les discussions qu'ont entre elles les ambassades.

  (1415)  

    Je crois savoir que la ville de Sinjar est située dans la région qui est considérée comme étant une zone de conflit en Irak. Ce fait pose bien évidemment un certain nombre de défis pour ce qui est de la capacité des représentants du HCR de traiter les demandes. Auriez-vous l'amabilité d'en dire davantage sur le genre de défis auxquels fait face le HCR dans des régions comme le Sinjar?
    Je ne suis pas un spécialiste de la situation en Irak, mais un des défis consiste à assurer la sécurité de notre personnel. Des membres de notre personnel ont été tués; d'autres ont été enlevés. Ce sont de graves dangers, bien sûr, sans parler du cas des agences humanitaires. Certains de nos partenaires ont fait face aux mêmes problèmes. Nous avons dû réduire les effectifs de notre personnel, en déplaçant certains membres de notre personnel, et en déclarant certains endroits comme étant des postes d'affectation déconseillés aux familles. Tout cela a une influence sur le type d'aide que nous pouvons apporter.
    Lorsque nous examinons la situation d'un pays comme l'Irak, qui accueille des réfugiés syriens, mais qui abrite également une population de PDIP, l'aide que nous pouvons apporter aux réfugiés est différente de celle que nous pouvons offrir aux PDIP. Par exemple, la convention sur les réfugiés nous autorise, aux termes de l'article 35, de demander aux États signataires de nous rendre des comptes, de faire rapport sur le traitement accordé aux réfugiés, de nous donner un accès à eux, par exemple. Avec les PDIP, comme je l'ai mentionné dans mes remarques, il faut d'abord obtenir une directive de l'assemblée générale pour pouvoir intervenir. Bien souvent, la nature des activités que nous pouvons exercer est limitée par les possibilités qui s'offrent à nous, étant donné qu'il s'agit de ressortissants qui se trouvent dans leur pays d'origine.
    C'est toutefois la sécurité qui est notre principale préoccupation. Nous avons déjà été obligés d'évacuer du personnel, à différents moments, en Irak.
    Monsieur Sarai, il vous reste une minute et demie.
    Le travail que vous avez effectué pour des causes humanitaires vous a probablement permis d'acquérir une certaine expertise dans ce domaine, y compris le fait que vous travaillez pour les Nations unies.
    Ma question porte sur les minorités hindoues et sikhs en Afghanistan. Le fait que leurs membres soient des PDIP qui font face à de graves dangers, en particulier les femmes, mais aussi les hommes, qui craignent être enlevés, de faire l'objet d'extorsion, de conversion forcée, et qui sont en petit nombre, j'aimerais savoir comment les Nations unies ont aidé les communautés de ce genre à s'enfuir dans le passé? Le seul fait de dire qu'ils souhaitent quitter le pays est très dangereux pour eux parce qu'ils possèdent des biens. Pour ceux qui ne se trouvent pas dans des grandes villes, leur vie est même en danger. Quelle est la ligne que les Nations unies ont choisie qui leur ont permis d'aider certaines collectivités dans le passé? Que conseilleriez-vous pour aider des personnes dans cette situation?
    Il serait très délicat de demander au HCR de faciliter le déplacement de personnes de leur pays d'origine vers un autre pays.
    La situation des sikhs afghans et les défis auxquels ils font face a bien évidemment été reconnue. Nos lignes directrices contiennent une section qui traite de la détermination du statut de réfugié pour ce qui est des Afghans et qui fait référence aux craintes qu'ils soient persécutés. C'est effectivement une disposition plus directe, pas pour ce qui touche l'Afghanistan lui-même, mais dans le cas où ces personnes se trouvent à l'extérieur de leur pays d'origine et demandent l'asile, nous fournissons des lignes directrices aux décideurs sur la façon de comprendre et d'examiner leurs demandes d'asile.
    Madame Rempel, vous avez sept minutes.
    Monsieur Casasola, je vous remercie pour tout le travail que vous avez effectué pour protéger les réfugiés. Je pense que vous allez constater que ce n'est pas un sujet partisan.
    Mes collègues d'en face posent des questions au sujet des directives particulières qui auraient été données par le gouvernement précédent dans le but de protéger les yézidis. Pour votre information, je vous dirais que nous avons entendu ici des représentants ministériels qui ont déclaré que la pratique du gouvernement précédent consistait à protéger les minorités ethniques et religieuses en leur accordant la priorité dans le traitement des demandes d'asile. Ils ont confirmé que les yézidis, bien évidemment, faisaient partie de ces catégories. Cela était intéressant, parce qu'il y a également des représentants du ministère qui nous ont dit que le gouvernement avait en fait — je crois qu'ils vont recommuniquer avec nous pour le confirmer — mis fin à ce processus. Il a également mis fin au processus consistant à soustraire les réfugiés irakiens et syriens au plafond imposé au programme de parrainage privé. Je vous donne simplement le contexte de cette discussion.
    J'aimerais examiner le rapport. J'ai lu en détail votre rapport au sujet...
    Une voix: [Inaudible]

  (1420)  

    Elle ne parle pas du rapport du HCR. C'est le rapport du Conseil des droits de l'homme de l'ONU.
    Merci.
    Désolée. Ce rapport contient trois recommandations destinées aux États membres, qui les invitent notamment à mettre en place « des plans de sauvetage visant les captifs yézidis », « un protocole pour le soin et le traitement accordé aux yézidis sauvés », des zones qui ont été « saisies par ISIS » et à accélérer le traitement « des demandes d'asile présentées par les victimes yézidies du génocide ».
    Ces dernières semaines, est-il apparu un consensus au sein de la communauté internationale sur la meilleure façon d'atteindre ces objectifs?
    Pas à ma connaissance, mais je ne suis pas toujours au courant de ce qui se dit. Une bonne partie de ces discussions ont lieu à l'heure actuelle au Moyen-Orient et en Turquie où se trouve, d'après ce que je crois, le plus fort pourcentage de yézidis qui ont fui l'Irak.
    Pour préciser...
    J'ai parlé à notre bureau situé en Turquie plus tôt aujourd'hui. Nous sommes en communication constante avec la communauté yézidie qui se trouve en Turquie.
    Pouvez-vous donc confirmer que la plupart des yézidis se considèrent en fait des ressortissants irakiens. Est-ce bien exact?
    Ce n'est pas mon domaine d'expertise, mais c'est ce que je pense.
    Pourriez-vous nous parler des difficultés que vous avez peut-être rencontrées pour intervenir auprès des minorités ethniques et religieuses, comme les chrétiens et les yézidis syriens, lorsqu'ils arrivent dans les camps du HCR pour évaluation? Quelles sont les difficultés que vous et les minorités peuvent rencontrer dans ce domaine?
    Je ne sais pas très bien. On m'a dit que certaines personnes ne s'exprimaient pas très bien, mais nous demandons toujours des commentaires précis parce que nous voulons le savoir. Malheureusement, nous n'en avons pas reçu beaucoup et je trouve cela quelque peu surprenant parce que, par exemple, le 14 février 2007, nous avons lancé un appel pour la réinstallation d'Irakiens et nous l'avons fait à l'échelle mondiale. Pendant des années, notre stratégie a consisté à fournir une protection temporaire dans la région et nous avons dit que nous allions accroître massivement le nombre des réinstallations. Lorsque M. Orr a fait référence à l'expansion du programme de réinstallation des Irakiens mis sur pied par le Canada, il cherchait en partie à répondre à cette situation.
    Malheureusement, il est vrai que nous possédons des renseignements sur l'inscription des minorités ethniques, mais nous ne les publions pas parce que ce sont des renseignements extrêmement sensibles pour la région et nous devons pouvoir faire notre travail.
    Notre action est loin de se limiter à la réinstallation. Nous devons fournir de l'aide en travaillant avec les gouvernements locaux. Cela dit...
    Pour enchaîner sur ce que vous venez de dire, j'aimerais savoir si le HCR a pris des mesures pour accorder concrètement la priorité à l'identification des yézidis, compte tenu de la déclaration de génocide, pour ce qui est des demandes d'asile. Si l'une des recommandations consiste à inviter les pays membres à accélérer le traitement des demandes d'asile et que les gouvernements déclarent s'en remettre au HCR pour identifier les réfugiés, que fait concrètement le HCR pour identifier les yézidis de façon à accélérer le traitement de leurs demandes?
    Il y a deux éléments.
    En fait, j'aimerais d'abord terminer ma dernière réponse. À leur crédit, le pourcentage des minorités religieuses inscrites est beaucoup plus élevé que celui de la population ethnique. On estime qu'elles représentaient 1 à 3 %. C'est 10 fois supérieur à la population inscrite auprès du HCR et elles ont même réussi à multiplier par deux ce pourcentage pour ce qui est des personnes réinstallées.
    Nous ne les avons pas choisies parce qu'elles avaient une croyance religieuse particulière ou étaient membres d'une minorité ethnique. C'est parce qu'elles avaient un besoin de protection physique et juridique. Parce qu'elles étaient persécutées, elles répondaient à la définition de réfugiés en appliquant des critères indépendants. Mais étant donné qu'elles étaient victimes de torture, il fallait les réinstaller pour ce motif.
    J'ai mentionné qu'il y avait sept catégories d'Irakiens qui sont venus au Canada.
    Puis-je insister pour que vous répondiez dans le temps qui me reste à la question que j'ai posée à propos des yézidis?
    Désolé.
    Vous avez demandé aux États membres d'accélérer le traitement des demandes d'asile des yézidis. Est-ce bien exact?
    Le Comité des droits de l'homme des Nations unies l'a demandé.
    Que fait le HCR pour identifier ces personnes et pour le faire plus rapidement? Les pays affirment s'en remettre exclusivement au HCR pour cette tâche. En outre, peut-être que, dans notre situation, le gouvernement a supprimé le plafond applicable au parrainage privé pour les ressortissants irakiens... Que fait le HCR pour fournir les noms des yézidis qui ont besoin que soient traitées leurs demandes d'asile?
    Nous appliquons nos critères indépendants. Nous ne disons pas: « Vous êtes un yézidi. Passez devant tout le monde et nous allons vous donner... parce que vous avez survécu à la torture. »
    Vous dites donc en fait que, dans le cas où un gouvernement se fonde uniquement sur les critères du HCR pour identifier les demandeurs yézidis, à l'heure actuelle le HCR n'a pas pris de mesure pour accorde la priorité aux yézidis, pour ce qui est du processus de sélection.
    Non, nous accordons la priorité aux yézidis qui ont survécu à la violence et à la torture, aux yézidies qui sont des femmes en danger, aux yézidis qui risquent d'être refoulés et qui ont besoin d'une protection juridique.
    La première étape est la détermination du statut de réfugié. Je pense à la situation en Turquie. La deuxième est la réinstallation et la recommandation.
    Les auteurs du rapport parlent du traitement des demandes d'asile, qui est de veiller à ce que le statut de réfugié soit déterminé pour que les demandeurs puissent être qualifiés de réfugiés.

  (1425)  

    Que fait le HCR pour accélérer cette étape ou peut-être pour mieux identifier ces victimes?
    Nous avons mis sur pied des mécanismes, en particulier dans notre bureau situé en Turquie, pour accélérer l'inscription. Le processus normal est très long à cause du nombre des dossiers qui nous sont parvenus ces dernières années. Mais nous avons effectivement des processus qui permettent à certaines personnes de voir leurs demandes traitées beaucoup plus rapidement, si nous sommes en mesure de constater qu'elles ont une vulnérabilité particulière.
    Comment cette information est-elle transmise au gouvernement du Canada?
    Nous avons régulièrement des discussions avec le gouvernement du Canada. Je pense que le poste régional de traitement des demandes pour le Canada au Moyen-Orient est situé à Ankara et notre bureau s'y trouve également.
    Avez-vous eu jusqu'ici des discussions pour utiliser cette information et traiter de façon prioritaire les demandes des yézidis qui ont été identifiés grâce à votre processus pour qu'ils puissent venir au Canada en qualité de réfugiés?
    Encore une fois, nous n'identifions pas nécessairement les gens parce qu'ils sont des yézidis, nous identifions les gens en fonction de ces critères indépendants.
    Mais dans le rapport vous dites que nous devrions accélérer...
    Ce n'est pas notre rapport. C'est le rapport du Comité des droits de l'homme.
    Excusez-moi, le rapport du Comité des droits de l'homme, sur lequel le gouvernement a fondé sa décision de déclarer qu'il avait eu génocide, affirme que nous devrions accélérer le traitement des demandes d'asile présentées par les yézidis victimes du génocide.
    Pour être clair, le HCR n'a pas jusqu'ici mis en place un processus consistant à accorder la priorité à l'identification des demandeurs d'asile victimes du génocide yézidi. Est bien exact?
    Pas pour la seule raison qu'ils sont des yézidis. Non. C'est ce que je comprends.
    Merci.
    Madame Kwan, vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur Casasola, d'être venu à notre comité.
    En ce qui concerne les groupes vulnérables, nous venons de discuter avec des fonctionnaires, qui nous sont dit qu'ils sont incapables de suivre certains de ces groupes. Est-ce que le HCR suit les groupes vulnérables aux fins du traitement des cas?
    Bien sûr, nous recensons les caractéristiques de vulnérabilité. Une des raisons pour lesquelles le Canada a pu réinstaller un grand nombre de Syriens est le fait que nous soulignions particulièrement le caractère vulnérable de certaines personnes, comme les femmes à risque ainsi que les personnes qui ont survécu à des actes de violence et de torture, comme je viens de le dire. Nous suivons ces renseignements, car ils nous aident à déterminer auprès de quels membres d'une vaste population nous devrions intervenir.
    Je vais préciser ma question, car notre gouvernement a aussi recensé des groupes vulnérables particuliers. Par exemple, il a recensé la communauté LGBTI, mais il semblerait que nous n'ayons aucun moyen de savoir avec quel succès nous aidons cette communauté vulnérable.
    Est-ce que le HCR considère la communauté LGBTI comme un groupe vulnérable, selon ses critères?
    Je le répète, cette situation serait similaire à celle des yézidis dans le sens où le simple fait d'être LGBTI... Cela dépendrait quand même du contexte dans lequel ils se trouvent, n'est-ce pas? Ont-ils besoin de protection juridique ou physique? Sont-ils en sécurité là où ils vivent, ou non? Tout cela déterminerait leur admissibilité à la réinstallation.
    Nous ne divulguons pas ces renseignements, et je crois qu'il nous serait difficile de trouver le nombre de cas de LGBTI que nous recommandons. Je peux cependant vous dire, mais seulement parce que j'ai parlé tout à l'heure des recommandations de réinstallation d'urgence et du fait que le Canada a un programme de protection urgente qui lui permet d'intervenir — et je crois que vous avez déjà parlé d'un plafond de 100 — je peux vous dire que jusqu'à présent cette année, le Canada a reçu environ 23 cas. Il s'agissait de cas très vulnérables, et plus du tiers d'entre eux était des LGBTI. Je le sais seulement parce que je reçois automatiquement une copie conforme de ces demandes, auxquelles nous accordons beaucoup d'importance.
    De quel pays viennent-ils?
    Ils viennent de plusieurs pays.
    Plusieurs pays.
    Je le répète, pour protéger la confidentialité et autre...
    Nous avons parlé de l'incapacité d'accéder à plusieurs endroits à cause de problèmes liés à la sécurité — et bien sûr, le HCR a aussi affecté des gens à différents endroits. Par exemple, nous n'avons pas de centre de traitement des demandes dans le Nord de l'Irak. Même quand le HCR recense et approuve les demandes, nous n'avons aucun moyen de les traiter parce que nous n'avons pas de centre de traitement à cet endroit.
    Le HCR peut-il nous aider? Nous reconnaissons bien sûr qu'il y a des problèmes de sécurité. Votre bureau pourrait-il nous aider à accélérer ou à traiter les demandes qu'il a déjà recensées et approuvées?
    Évidemment, nous avons discuté avec certains pays de la possibilité de le faire par vidéoconférence. Nous espérons que ce moyen réussira, et le Canada l'a utilisé avec beaucoup de succès en Syrie. Dès le début du conflit en Syrie, le Canada a établi un système qui lui a permis de réinstaller un grand nombre d'Irakiens qui se trouvaient encore en Syrie.
    Je ne sais pas précisément si nous disposons de cette technologie. Je ne suis pas informaticien, mais évidemment il y a parfois des problèmes de confidentialité et autres. Je ne sais pas par exemple si un ordinateur peut assurer les télécommunications d'un endroit à un autre avec assez de discrétion pour protéger les renseignements personnels.
    Bien sûr, nous en avons discuté avec eux, et nous leur avons parlé d'autres endroits que le Nord de l'Irak, comme le Yémen, d'autres endroits où un conflit fait rage, y compris le camp Dadaab où il y a eu de la violence. Ces questions font régulièrement partie de nos discussions.

  (1430)  

    Plus exactement, à l'automne — je crois que c'était en septembre —, le gouvernement disait que des fonctionnaires du ministère se rendraient dans le Nord de l'Irak pour essayer d'y traiter des demandes. Ensuite, ces fonctionnaires nous ont dit que s'ils n'y réussissaient pas, ils chercheraient d'autres solutions.
    Ma question est la suivante: si le gouvernement s'adressait maintenant au HCR et l'autorisait à traiter ces demandes aux endroits où nous n'avons pas de centres de traitement, votre bureau accepterait-il de le faire?
    Bien sûr, mais je le répète, si nous parlons d'une population de réfugiés...
    Oui.
    Excusez-moi, mais votre question est un peu hypothétique. Il nous faudrait des précisions, mais c'est certainement ce que nous nous efforçons de faire. C'est ce que nous nous efforçons de faire continuellement.
    Je suppose que d'autres pays se heurtent à des problèmes similaires à ceux du Canada pour traiter les demandes et avoir accès aux demandeurs, etc.
    La communauté internationale a-t-elle établi des pratiques exemplaires à ce sujet dont le Canada pourrait s'inspirer?
    Il y a d'autres solutions.
    Le Canada a pour politique d'interviewer les réfugiés; certains pays ont renoncé à le faire. Certains pays nordiques choisissent de moins grands nombres de réfugiés. Si toutes les preuves que nous leur fournissons sur un cas les convainquent, ils acceptent le cas.
    M. Alexander a observé qu'une des pratiques exemplaires du Canada qui a facilité le mouvement de très grands nombres de Syriens a été de reconnaître tous les réfugiés de prime abord. Cette pratique a réduit le volume de travail puisque les réfugiés étaient acceptés de façon conceptuelle, et je crois que le ministre actuel a adopté cette même approche.
    Nous essayons de promouvoir différentes techniques, comme la simplification de nos processus. Une recommandation de réinstallation peut exiger énormément de renseignements dans le but de déterminer le statut de réfugié. Nous pourrions aussi harmoniser l'information nécessaire à l'admission dans tous les pays de réinstallation; nous libérerions ainsi nos ressources, qui pourraient alors effectuer traiter plus de cas.
    Dans le cas du Nord de l'Irak — je me concentre sur cette région ces jours-ci —, j'ai plusieurs constituants qui attendent leurs familles parrainées, mais le gouvernement ne peut pas traiter leurs cas là où elles sont parce qu'il ne s'y trouve pas de centres de traitement.
    Recommanderiez-vous que notre gouvernement renonce à traiter ces demandes à partir du Canada et accepte de prime abord les cas dont les demandes ont été acceptées par le HCR et qui, par conséquent, peuvent être considérées comme étant valides et légitimes pour que le Canada s'en occupe?
    Il faudrait qu'on me décrive les circonstances en détail. Je suis prudent, parce que je ne veux pas proposer une stratégie autre que ce que l'on propose de faire dans la région.
    Nous discutons beaucoup avec le Canada au sujet de cette région. En fait, le Canada préside le Groupe restreint de la Syrie. Il s'agit d'un groupe d'États — en fait, tous les principaux pays de réinstallation et le HCR y sont représentés — qui se réunissent pour trouver des solutions opérationnelles. Je sais qu'ils cherchent activement à régler certains de ces mêmes problèmes pour savoir comment nous...
    Vous me posez là une question opérationnelle. Comment faire sortir cette personne? Si nous reconnaissons que cette personne a besoin de protection, alors comment pourrons-nous savoir avec certitude que vous êtes satisfaits de l'interview que vous lui avez fait passer et que vous ne pensez pas que cette personne menace la sécurité? D'un autre côté, comment saurons-nous que cette personne ne se trouvera pas en plus grand danger?
    Monsieur Fragiskatos, vous avez sept minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur Wrzesnewskyj. Nous avons un trait en commun, nos noms de famille compliqués!
    Merci d'être venu aujourd'hui, monsieur Casasola.
    Vous avez beaucoup d'expérience dans ce domaine, et je ne vous apprends rien en vous disant que les personnes vulnérables s'enfuient, qu'elles soient réfugiées ou PDIP. Ces gens prennent la fuite de manières diverses et imprévisibles. Ils nous arrivent parfois par bateau, comme les migrants tamils il y a quelques années.
    Ma question porte sur une politique de 2012. À cette époque, le gouvernement a instauré une politique qui traitait les migrants irréguliers d'une manière particulière. Par exemple, à cause de cette politique, les arrivants irréguliers n'ont pas le droit de faire une demande de résidence permanente même s'ils ont le statut de réfugié. Ils ne peuvent pas parrainer les membres de leur famille, même une épouse ou un époux. Ils sont obligatoirement détenus pendant que l'on mène enquête, et ils n'ont pas le droit d'interjeter appel.
    Face à la situation extrêmement grave à laquelle le monde fait face à l'heure actuelle — il s'agit d'un nombre record, plus de 60 millions de personnes —, qu'arriverait-il si les autres nations inséraient cette mesure dans leurs lois? Est-ce une manière efficace de traiter les personnes vulnérables?

  (1435)  

    Pour répondre à la question sur les étrangers désignés, nous avons présenté notre point de vue à ce sujet à l'époque, et vous l'avez dans vos dossiers. Je ne suis pas expert en la matière. Je me spécialise plutôt en réinstallation; ce dont vous parlez a trait à l'asile. Il est clair que nous cherchons à souligner des exemples de ce que les pays font, de ce que le Canada a fait. Nous avons tenu une réunion le 30 mars à Genève à laquelle M. McCallum a participé. Nous avons en fait souligné l'exemple du Canada pour sa réponse généreuse à la situation syrienne. Nous avons besoin de ce bon exemple. Je tournerai ma réponse en soulignant que nous cherchons beaucoup plus d'exemples positifs qui encouragent les autres nations à faire de même.
    Je ne veux pas vous placer dans une situation embarrassante; vous êtes diplomate, et je vous demande votre opinion sur une politique. Mais d'après ce que vous semblez me dire, les autres pays ne devraient pas suivre cet exemple, puisque nous faisons face à un problème mondial.
    Bien sûr. Nous cherchons à faciliter l'accès à l'asile.
    Mon collègue, M. Ehsassi, a soulevé cette question il y a quelques minutes. Si j'ai bien compris, d'après vos souvenirs, aucun membre du gouvernement précédent ne vous a consultés, ne vous a demandé de discuter de la situation des yézidis, surtout après les événements d'août 2014 à Sinjar.
    Je tiens à souligner que je suis parfaitement honnête en disant que je ne m'en souviens pas. Cela dit, il existe bien d'autres voies. Ils ont peut-être discuté de cela avec notre siège social. Comme je l'ai souligné, les discussions que nous tenons avec les gouvernements sont toujours très discrètes.
    Mais vous ne vous souvenez de rien de particulier.
    Selon les documents déposés à la Chambre des communes, des représentants d'IRCC ont reçu l'ordre du ministre de l'Immigration de l'époque de sélectionner les réfugiés en fonction de leur religion et de leur ethnie en suivant ce qu'ils appelaient le processus du secteur d'intervention privilégié.
    Selon vous, est-ce que cette façon de faire allait à l'encontre de la pratique établie et de la politique exigeant que le gouvernement collabore avec le HCR en sélectionnant les personnes les plus vulnérables?
    Je ne connais pas bien le processus du secteur d'intervention privilégié. Nous avons beaucoup discuté de notre programme de réinstallation avec le gouvernement précédent, mais ces discussions portaient sur des chiffres et sur les endroits où choisir les réfugiés. Je vous dirai honnêtement que certaines de ces conversations étaient très opérationnelles, mais je le répète, je ne pourrais pas vous parler du contenu des recommandations qu'on nous a présentées, car je ne veux pas violer la confidentialité de ces discussions.
    Ma question porte sur la notion de vulnérabilité. Pourriez-vous nous parler des dangers que comporte l'application de marqueurs identitaires particuliers pour privilégier certaines personnes vulnérables? Et quelles répercussions précises cette pratique a-t-elle sur les autres réfugiés et PDIP?
    Bien sûr. J'ai fait quelques observations liées à cela tout à l'heure, mais je ne l'ai peut-être pas fait aussi clairement que j'aurais dû.
    Nous utilisons des critères indépendants prévus dans la Convention sur les réfugiés; mais cela ne signifie pas que si vous suivez telle religion on vous considère comme un réfugié, mais que si vous suivez telle autre religion vous n'êtes pas un réfugié. La Convention prévoit que les personnes persécutées à cause de leur religion ont une des raisons qui leur permettraient d'être considérées comme des réfugiés. Dans certaines régions du monde, on mettrait certainement la communauté des réfugiés en danger en accordant à un groupe ethnique le droit à la réinstallation, ou une aide ou une faveur quelconque qui distinguerait ce groupe des autres sans qu'il ait besoin de protection. En utilisant ces critères indépendants, nous avons reçu le soutien des réfugiés eux-mêmes. Ils comprennent ces choses plus clairement: on le fait parce que cette personne a un problème particulier ou parce que c'est une mère seule qui ne jouit pas de la protection d'un homme. Ils comprennent cette notion.
    L'autre difficulté a trait aux gouvernements d'accueil avec lesquels nous devons collaborer; on a mentionné cela également. Il est même parfois difficile d'obtenir des permis de sortie. Je ne nommerai pas de pays, et il ne s'agissait pas du Canada, mais quand les politiques d'un pays se concentrent sur un groupe ethnique particulier... je me souviens qu'un pays d'asile a refusé pendant un certain temps d'accorder des permis de sortie. Nous sommes obligés de négocier toute une série de relations. Donc si nous pouvons affirmer que notre choix repose sur les critères indépendants dont nous leur parlons depuis le tout début, que dès que nous arrivons, nous cherchons des réfugiés qui ont ces besoins particuliers parce qu'ils sont détenus, parce qu'ils ont été refoulés, parce qu'ils vont se faire tuer s'ils restent dans ce pays d'asile, alors en général nous obtenons le soutien des pays.

  (1440)  

    Je pense simplement à une situation où l'on privilégie certains marqueurs identitaires, mais où une personne qui n'appartient pas à cette catégorie est beaucoup plus vulnérable. Je vais reformuler ma question. Je m'inquiète de ce qui pourrait arriver si nous privilégions certains marqueurs identitaires; selon moi, nous risquons d'aggraver la situation. Je crains cela. Je sais que vous avez déjà répondu à cela, mais à mon avis, il s'agit du coeur même de notre discussion.
    Vous avez raison et de nouveau, pour vous parler tout à fait honnêtement, il nous arrive de nous trouver dans des situations où, par exemple, nous savons qu'un groupe ethnique ou même qu'un groupe religieux sera beaucoup mieux accepté que d'autres. Ces gens passeront par le processus de détermination du statut de réfugié, mais comme leur taux d'acceptation est beaucoup plus élevé, nous harmonisons ou simplifions notre processus dans leur cas. D'un autre côté, les groupes qui sont beaucoup moins acceptés — de nouveau, je parle ici de la détermination du statut de réfugié — passeront probablement par un processus de détermination beaucoup plus rigoureux.
    J'ai une question au sujet...
    Merci. Votre temps est écoulé.
    Monsieur Kent, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Je voudrais poursuivre sur la question des personnes vulnérables, persécutées, membres de minorités qui ont réussi à sortir de Syrie ou d'Irak, mais qui ne sont pas allées dans un camp du HCR pour y être désignées, par peur de subir de la discrimination ou pire — peut-être de nouvelles persécutions dans ces camps — et qui vivent dans les économies locales de la Jordanie, du Liban, ou autre. Plus exactement, des ministres de la région autonome kurde qui visitaient Ottawa ces derniers mois se sont plaints — je crois qu'on peut le dire ainsi — de ce que de nombreux yézidis et des membres d'autres minorités, dont des chrétiens, n'ont pas été désignés par le HCR; ils ne vivent donc pas dans des camps, mais dans l'économie locale; ils ne reçoivent aucun soutien du gouvernement irakien, et le gouvernement régional autonome kurde doit assumer leur charge.
    Je reconnais que ce sont des gens déplacés dans leur pays, mais ils se trouvent dans une situation très particulière, parce que le gouvernement irakien ne se charge pas d'eux comme il le devrait. Que fait le HCR pour ces gens-là?
    Je ne peux pas vous parler en détail du programme que nous menons en Irak, parce qu'une grande partie de ses éléments sont techniques; j'espère que vous comprendrez.
    En ce qui concerne la crainte des personnes déplacées, j'en ai parlé plus tôt. Je tiens à distinguer la situation des PDIP de celle des réfugiés parce que, je le répète, dans le cas des réfugiés, nous nous appuyons sur la Convention, donc nous avons plus de pouvoir. Je vous dirai honnêtement que nous comptons sur les États-Unis et sur le Canada qui nous soutiennent, qui nous soutiennent généreusement, pour qu'ils nous appuient aussi pendant les discussions. Et je vous dirai qu'ils le font, et nous leur en sommes reconnaissants. Ils interviennent directement en groupe auprès des gouvernements.
    Mais en ce qui concerne la situation dans les camps de la région, je m'inquiète un peu de... De nouveau, je voudrais vraiment qu'on me donne plus de détails, parce que j'entends les gens dire qu'ils ont peur et autre. Parfois aussi, on dit qu'il y a des camps et en réalité il n'y en a pas à certains endroits. Je sais qu'en Turquie, par exemple, nous avons dû essayer de trouver, avec les fonctionnaires turcs, des moyens de fournir une meilleure aide à la population yézidie. Dans certains cas, les yézidis s'inscrivent chez nous sans s'inscrire auprès des fonctionnaires turcs; s'ils le faisaient, ils recevraient de l'aide. Mais ils ne veulent pas déménager d'où ils sont, et les fonctionnaires turcs sont aussi... Je ne veux pas critiquer les fonctionnaires turcs, parce qu'ils donnent asile à 2,8 millions de réfugiés — 2,8 millions de Syriens et de beaucoup de gens d'ailleurs aussi. Ils ont fait preuve d'une générosité incroyable. Mais, parfois, il s'agit de combler certains fossés; si seulement les fonctionnaires turcs pouvaient se tenir dans la région, ou si seulement les yézidis acceptaient de déménager, mais non, ils veulent rester à l'endroit où se trouve leur communauté; autrement, ils pourraient s'inscrire pour obtenir de l'aide, nous obtiendrions leurs renseignements et nous pourrions les recommander.
    Parfois, les problèmes sont tout simplement opérationnels, comme dans cette situation.
    Grâce au programme d'accueil accéléré des réfugiés que le nouveau gouvernement a lancé, quelque 10 000 personnes sur les 25 000 ont déjà entamé le processus de parrainage privé. Nous savons que ces répondants du secteur privé, qui viennent de tous les domaines et dont un grand nombre se concentrent sur des groupes ethniques ou religieux particuliers ou sur des membres de leur famille, ont causé beaucoup d'arriéré et des millions de dollars en paiements sous conditions attendant que les demandeurs obtiennent leur statut de réfugié au Canada. Le gouvernement a fixé un plafond pour ces parrainages privés, il a refusé certains cas ou n'a pas autorisé les quotas.
    Que recommanderiez-vous, non seulement à notre gouvernement, mais à tous les gouvernements, au sujet de cette capacité d'accueil, vu le succès qu'ont les répondants du secteur privé d'accepter, d'intégrer et de réinstaller efficacement les réfugiés pour qu'ils deviennent des membres à part entière de notre société? Quels conseils leur donneriez-vous?

  (1445)  

    Comme je vous le disais, j'aime le programme de parrainage privé. J'ai beaucoup investi dans ma vie pour parrainer moi-même des réfugiés.
    Votre comité a accueilli le haut-commissaire avec une grande générosité lors de sa visite au Canada; vous avez organisé un dîner en son honneur. Pendant sa visite — il m'a ensuite raconté son expérience —, il a été extrêmement impressionné par la générosité des Canadiens. Ce que je soulignerais au sujet du programme de parrainage privé, et ce qui me préoccupe cette année, n'est pas vraiment l'arriéré, mais comme l'a souligné le haut-commissaire, c'est la nécessité de maintenir cet esprit, ce puissant soutien. Nous ne voulons pas que les gens s'en écartent par frustration ou autre. Nous voulons entretenir cet esprit autant que possible.
    Cela dit, s'il réussit à mener son plan à bien, le Canada va réinstaller un nombre record de réfugiés cette année — plus qu'on ne l'a jamais vu auparavant. Ce sont donc les tensions auxquelles nous faisons face.
    Je ne veux pas critiquer à outrance, mais je sais qu'un bon nombre de groupes de notre société désirent parrainer des réfugiés — j'en fais moi-même partie —, et en même temps, le Canada fait venir un nombre record de réfugiés cette année. Alors je me demande comment soutenir cet esprit pour qu'il ne soit pas éphémère, qu'il ne soit pas une simple poussée statistique, mais que nous entamions réellement un nouveau chapitre de notre histoire.
    Monsieur Tabbara, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci. Je vais partager mon temps avec M. Virani.
    Je tiens à vous remercier pour tout le travail que vous avez accompli.
    Je voudrais vous demander comment on détermine la vulnérabilité. En Irak et en Syrie, la situation change de jour en jour. Nous avons vu récemment une attaque à la bombe qui a frappé plus de 250 civils juste après l'Aïd. Dans les cas de combats intenses dans certaines régions, comme à Fallujah ou Basra, quels critères suit-on pour déterminer la vulnérabilité des réfugiés...
    Pardonnez-moi, je ne voulais pas vous interrompre.
    D'abord, il y a le critère lié à la protection, à l'aide et autre, mais pour la réinstallation il s'agit de nouveau de reconnaître les gens qui sont des réfugiés. Nous reconnaissons tous que les gens sont en danger quand ils risquent de se faire tuer, mais dans le pays d'asile, puisque nous pouvons réinstaller seulement — avec les places qu'offre toute la communauté internationale — 1 personne sur 10 que nous recensons... Alors, nous avons 60 millions de réfugiés, dont 1,19 million nécessite une réinstallation, et nous ne disposons que de 120 000 places.
    Alors de toutes les personnes que nous voyons dans le pays d'asile, nous devons déterminer lesquelles sont en danger et lesquelles ont des besoins auxquels nous ne pouvons pas répondre?
    Maintenant, il est possible que des gens aient traversé des périodes si traumatiques qu'une fois réinstallés, ils souffrent de troubles mentaux; ce sont les gens que nous appellerions des victimes de la violence et de la torture.
    Je ne me rappelle pas si j'ai déjà mentionné cela. Avant que les Syriens ne les devancent, les Irakiens constituaient le plus grand nombre de réfugiés arrivant au Canada, et la plus grande catégorie de ces réfugiés regroupait les victimes de violence et de torture.
    Ce sont les critères que nous cherchons, les victimes de violence et de torture. Les catégories les plus communes sont celle des réfugiées à risque et celle des victimes de violence et de torture. Les autres catégories plus communes que cela concernent les besoins de protection juridique et physique. Certaines personnes se trouvent en danger dans le pays d'asile, parce qu'elles peuvent faire partie d'une minorité, alors nous les réinstallons n'importe où ailleurs dans le monde. Certaines sont menacées de refoulement, forcées de retourner dans leur pays d'origine ou peuvent être placées en détention. En effet, on n'est pas censé détenir un réfugié pour le motif que c'est un réfugié.
    Je suis heureux de vous avoir entendu parler du traitement des demandes et du fait qu'il dépend du contexte dans lequel les gens se trouvent et non de leur religion, de leur ethnie ou de leurs croyances. Si nous commençons à prioriser en fonction de la religion, à quels défis allons-nous faire face et devant quelles difficultés le HCR se trouvera-t-il?
    Cela dépend du contexte.
    Quand nous traitons ces demandes, nous cherchons toujours des critères indépendants. Maintenant, il est possible que certains groupes ethniques, à cause de leur religion, soient plus facilement considérés comme des réfugiés, mais nous les recommandons en fonction de leurs besoins de protection juridique et physique ou parce que telle ou telle femme est à risque, par exemple.
    La difficulté naît souvent de la manière dont on les traitera dans le pays d'asile; nous ne savons souvent pas si nous obtiendrons les visas nécessaires pour les réfugiés qui ont besoin que nous les réinstallions.

  (1450)  

    À vous la parole, monsieur Virani.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Vous avez une minute et demie.
    Reprenons cette question de victimes de violence et de torture. Au cours de ces dernières années, ces personnes composaient le groupe fondamental que le HCR recensait le plus souvent en Irak et en Syrie.
    En effet, à l'examen des cas individuels, nous avons recommandé le plus souvent la réinstallation des Irakiens parce qu'ils étaient différents des autres pour avoir été victimes de violence et de torture.
    Cette raison s'appliquait à des gens d'ethnies et de religions diverses.
    Tout à fait.
    Religions minoritaires ou majoritaires.
    C'est tout à fait vrai.
    La plus grande partie des gens recommandés au Canada appartenaient à une religion minoritaire.
    Les gens qui adhéraient à des religions majoritaires faisaient-ils aussi partie de ce groupe?
    M. Michael Casasola: Oui.
    M. Arif Virani: La religion majoritaire de cette région est l'islam.
    Il semblerait bien, en effet.
    Par conséquent, la majorité des personnes en fuite dans cette région pratiquent elles aussi l'islam.
    Oui.
    Quand la politique dont a parlé mon collègue M. Fragiskatos, qu'il appelle le processus du secteur d'intervention privilégié est entrée en vigueur, elle a mis un vernis...
    Pour bien éclaircir cette question, quand le HCR présentait un groupe de personnes qu'il nous recommandait de réinstaller, il y mettait un vernis supplémentaire. Le gouvernement canadien précédent sélectionnait les gens qui appartenaient à une minorité religieuse ou ethnique.
    Est-ce que je me trompe?
    Je le répète, je ne connais pas cette politique, alors je ne peux pas vous répondre.
    Savez-vous si le Canada appliquait une politique de ce genre pour la première fois?
    Nos discussions avec les gouvernements se tiennent en toute discrétion.
    Il arrive que des gouvernements nous présentent des idées que nous n'apprécions pas beaucoup, et nous le leur disons. Parfois, ils nous présentent d'excellentes idées, et nous les en remercions publiquement. C'est ainsi que se font les choses.
    Je présume que vous...
    Merci.
    Madame Rempel, vous avez cinq minutes.
    Vous semblez avoir une immense expérience; avez-vous vu des groupes persécutés ou forcés à devenir des réfugiés à cause de leur ethnie, de leur religion ou de leur orientation sexuelle? Est-ce un facteur qui force souvent des gens à devenir des réfugiés?
    La religion est l'un des motifs cités dans la Convention des réfugiés, et il est certain que les membres d'une minorité sexuelle peuvent être considérés comme des membres d'un groupe social.
    Nous avons là une cause bien fondée de craindre la persécution, et ces gens ont besoin d'autant de protection que les réfugiés.
    Dans le cadre de la crise des réfugiés au Moyen-Orient, tous les groupes, quelle que soit leur foi, sont persécutés. Mais est-ce que certains groupes risquent plus que les autres de se faire assassiner, torturer ou emprisonner à cause de l'ethnie, de la religion ou d'une minorité sexuelle à laquelle ils appartiennent?
    Je crois qu'au lieu d'essayer de les nommer, je vous aiderais mieux en vous disant que nous avons des lignes directrices...
    Est-ce que certains groupes courent plus de risques de devenir des réfugiés, ou de mourir, ou de devenir des esclaves?
    Oui.
    J'essayais de vous dire que nous suivons des lignes directrices sur la détermination du statut de réfugié des Irakiens, des Syriens, qui soulignent des catégories particulières. C'est ainsi que les spécialistes du droit des réfugiés, comme les juges, prennent leurs décisions, et nous établissons des lignes directrices prévoyant toutes sortes de...
    En fonction de leur religion et de leur ethnie.
    Cela arrive, oui.
    S'ils subissent de la persécution.
    J'ai cité l'exemple des sikhs d'Afghanistan, que nous avons recommandés tout particulièrement en fonction des difficultés auxquelles ils font face dans leur pays d'origine.
    Quand l'ONU recommande de hâter le traitement des demandes d'asile des yézidis victimes de génocide, est-ce qu'elle demande en fait aux pays d'accorder la priorité à un groupe qui est persécuté à cause de son ethnie et de sa religion?
    Je ne sais pas sur quels critères ce comité a fondé sa simplification du processus, mais je sais qu'il a reçu plusieurs recommandations.
    Je vais reformuler ma question. Considérez-vous les yézidis comme appartenant à une minorité ethnique, ou religieuse, dans la région?
    Oui.
    Alors en classant les réfugiés en ordre de priorité — et des fonctionnaires du ministère sont venus nous en parler... Vous avez dit vous-même que malheureusement, au détriment de toute l'humanité, un grand nombre de personnes sont déplacées partout dans le monde. Le Canada est une nation très avantagée, et nous sommes en mesure d'apporter de l'aide.
    Un de ces fonctionnaires nous a dit qu'une des difficultés auxquelles ils se heurtent réside dans les longs arriérés du traitement des demandes. Par conséquent — et surtout si l'ONU demande à un pays membre de hâter le traitement des demandes d'asile d'un groupe très persécuté qui, selon elle, est victime de génocide —, pensez-vous qu'il soit juste que les pays priorisent en fonction de cela?

  (1455)  

    Si vous dites qu'ils priorisent en fonction de la détermination du statut de réfugié, alors il est clair que...
    Est-il équitable que ce pays accorde la priorité aux demandes des yézidis parce que l'ONU lui a dit qu'ils sont victimes d'un génocide?
    Parlez-vous de priorité en matière de réinstallation?
    Oui, pour leur réinstallation.
    Pour la réinstallation. C'est un acte volontaire des États, n'est-ce pas?
    La recommandation suggère que l'on priorise la détermination du statut de réfugié; on n'y mentionne pas la réinstallation.
    D'accord.
    En ce qui concerne la recommandation de hâter le traitement des demandes d'asile des yézidis et les autres recommandations — dont l'organisation d'opérations de secours des yézidis —, visant à hâter ces initiatives, ne faudrait-il pas que l'ONU et les États membres concernés priorisent les groupes afin de traiter la réinstallation des yézidis en priorité?
    Je crois que j'essaie de résoudre un problème insoluble.
    Je crois que je vous comprends, et je n'essaie pas de vous créer des embûches.
    Vous avez dit plus tôt que l'ONU n'avait pas modifié ses méthodes de traitement des réfugiés du Moyen-Orient en recensant les yézidis et en transmettant ces renseignements aux pays. Le gouvernement canadien nous dit qu'il compte sur vos critères pour prioriser les demandes. Si tel est le cas, comment allons-nous aider ces gens? Ils sont victimes d'un génocide.
    Je voudrais savoir si l'ONU nous aiderait à éliminer ces obstacles bureaucratiques pour réellement hâter le traitement de ces demandes. Mes collègues posent toutes sortes de questions pour savoir si les critères liés à la religion ou à l'ethnie empêchent le traitement de ces demandes de réfugiés, et c'est le cas. C'est pourquoi vous avez énoncé cela dans votre rapport.
    Alors que fait l'ONU pour aider le Canada, qui compte uniquement sur elle pour amener ces gens au Canada?
    Tout d'abord, ces gens doivent s'inscrire auprès de nous. C'est l'une des difficultés auxquelles nous nous heurtons avec une partie de cette population. Ensuite, nous examinons plusieurs solutions. Nous n'ignorons pas le problème; nous essayons continuellement d'adapter différentes techniques. Le fait que nous ayons amené les Syriens si rapidement au Canada démontre que nous savons assouplir nos processus pour réinstaller des réfugiés en grand nombre.
    Nous ne voulons pas créer des problèmes en affirmant qu'une personne en particulier, mais pas une autre, sera réinstallée en priorité à cause de son ethnie et pour aucun autre facteur. C'est là notre problème.
    Cette recommandation...
    Merci. Votre temps est écoulé.
    Monsieur Fragiskatos, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je voudrais que vous nous disiez ce que vous pensez de la question du traitement adéquat des personnes vulnérables du point de vue du droit international et du problème auquel se heurte toute la communauté internationale. En effet, cela en soi ne pose pas de problème dans le cadre des lois canadiennes sur l'immigration et sur les réfugiés. Ces problèmes sont particulièrement liés au milieu international, qui adhère depuis 1951 à une convention qui définit les personnes vulnérables qui ont été déplacées d'une manière bien précise comme des personnes qui ont fui leur pays d'origine. C'est en quoi consiste ce critère.
    Cependant, nous avons des millions de personnes — plus de 40 millions, pour être exact — qui ont été déplacées dans leurs propres pays. Il existe aussi une convention sur les personnes apatrides. Celle-ci date de 1960, mais elle ne porte que 86 signatures.
    Excusez-moi; il y a deux conventions. Celle dont je parle porte 86 signatures. Elle n'a pas été jugée aussi importante que la Convention de 1951.
    Pensez-vous que la communauté internationale tout entière devrait examiner ce problème plus en profondeur? Comment traiter les personnes déplacées de façon générale? À l'heure actuelle, leur nombre s'élève à plus de 65 millions. On n'avait jamais vu cela. Je crois que le débat devrait s'étendre à cela. Nous devrions discuter de cela comme d'un problème qui concerne toute la communauté internationale. Le Canada pourrait peut-être soulever la question pour lancer le débat.
    Nous avons des minorités apatrides, comme les Rohingyas en Birmanie, les Haïtiens en République dominicaine, les Bédouins du Koweït qui n'ont pas de citoyenneté eux non plus, et les Nubiens au Kenya. Je pourrais continuer à en citer beaucoup d'autres. Ce sont des gens qui n'ont pas de citoyenneté.
    Nous avons aussi des gens qui ont une citoyenneté, mais qui ont été déplacés. Je me demande si le droit international et la communauté internationale disposent des mécanismes nécessaires pour aborder un problème aussi grave.
    Ce que vous décrivez, le déplacement forcé d'êtres humains, est l'un des plus grands problèmes de la communauté internationale. Ce problème est exacerbé non seulement par le nombre croissant de réfugiés, mais par le manque de solutions. Normalement, quand la réinstallation est mineure, on n'en parle pas de la même manière que de problèmes comme le rapatriement volontaire, qui constitue la solution la plus courante pour les réfugiés.
    En réalité — et c'est la cause profonde de ce problème —, les réfugiés sont forcés de rester réfugiés pour des périodes de plus en plus longues parce qu'on n'applique pas de solutions politiques à leurs problèmes. C'est pourquoi nous avons vraiment besoin que les dirigeants politiques résolvent ces conflits.
    Je m'inquiéterais beaucoup si nous entamions une discussion sur la Convention des réfugiés. Cette convention a protégé la vie de millions de personnes, et même de millions de Canadiens qui sont arrivés ici avec un statut de réfugié. Donc, je ne voudrais pas que l'on se lance dans cette discussion.
    Plusieurs importants forums où la communauté internationale discutera de certains de ces problèmes auront lieu très bientôt. Le 19 septembre, l'Assemblée générale de l'ONU tiendra un sommet pour aborder le problème des vastes mouvements de réfugiés et de migrants. Ensuite, les États-Unis vont organiser un sommet des dirigeants sur les réfugiés; je crois que le Canada contribue à l'organisation de ce sommet; on y discutera également de différentes solutions possibles.
    Cette question fait partie des graves problèmes qui bouleversent la vie de millions de personnes.

  (1500)  

    Mais il y a de l'espoir. En 1949, comme vous le savez peut-être, l'ONU a mené une étude intitulée Apatrides et réfugiés. Les auteurs de cette étude présentaient un nouveau point de vue sur le déplacement, soutenant que les personnes déplacées pouvaient fuir leur pays d'origine ou se déplacer dans leur pays même. Le comité chargé d'examiner l'élaboration de la Convention de 1951 s'est opposé à cette définition pour finalement établir celle qui se trouve maintenant dans la Convention. Il y a donc de l'espoir.
    Je suis également d'accord sur le fait qu'il faut que quelqu'un prenne les choses en main. Le Canada pourrait donc championner le réexamen de ces problèmes vu de cet angle avec les autres membres de la communauté internationale.
    Je crois que le président désirait une minute.
    Merci.
    Je voudrais juste une précision. Dans votre allocution, monsieur Casasola, en mentionnant les six pays qui, à eux tous, ont généré 84 % des PDIP en 2015, vous avez indiqué qu'il se trouvait en Ukraine 800 000 de ces personnes. Je discutais dernièrement avec des fonctionnaires ukrainiens, qui m'ont dit que le nombre de personnes inscrites s'élevait à plus d'un million et demi. Pour éclaircir cette question, l'écart entre ces chiffres provient du fait qu'il s'agit ici uniquement des chiffres de 2015 et que les chiffres précédents datent de 2014 quand la Russie...
    C'est exact.
    ... a lancé sa guerre d'agression.
    C'est cela. En mentionnant ce 84 %, je comptais les personnes déplacées dernièrement, en 2015. Ce chiffre devrait s'ajouter à ceux des personnes d'ailleurs déplacées dans leurs propres pays.
    Merci pour cette précision. Nous vous remercions beaucoup de votre travail et du témoignage que vous avez donné devant notre comité aujourd'hui.
    Cela dit, la séance est levée.
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