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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 027 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 3 juin 2014

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

     Mesdames et messieurs, bonjour. Soyez les bienvenus à cette 27e réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
    Nous poursuivons notre étude sur le financement social. Nous avons deux heures d'évaluation. Durant la première heure, nous recevrons deux témoins du ministère de la Sécurité publique et de la protection civile, soit M. Shawn Tupper, qui est sous-ministre adjoint au Secteur de la gestion des urgences et des programmes, et M. Bobby Matheson, directeur général du Centre national de prévention du crime.
    Avant de commencer, permettez-moi, messieurs, de vous présenter des excuses. Comme vous le savez, le mois de juin peut être très particulier sur la Colline. Il y aura des votes et les cloches vont sonner à 15 h 47. Lorsque cela se produira, nous allons suspendre la séance pour aller voter — très rapidement, nous l'espérons —, puis nous reviendrons ici pour terminer la première heure.
    Voilà le programme qui nous attend. Je crois savoir que les deux témoins ont un exposé, alors nous passerons aux questions tout de suite après. Cette façon de procéder ne posera pas de problème, car je crois que nous connaissons tous le sujet. Nous commencerons par les questions du gouvernement.
    Madame James, nous vous écoutons.
    Merci, monsieur le président. Merci à nos fonctionnaires d'être revenus pour nous donner plus d'information.
    De nombreux témoins qui étaient ici lors de la dernière séance du comité ont parlé de finance sociale sous l'angle de la présente étude, mais nous devons regarder les choses de plus haut et examiner ce qui a bien fonctionné avec la stratégie actuelle du Centre national de prévention du crime, le CNPC, ainsi que les paramètres de ce programme.
    Pourriez-vous parler un peu de l'énorme succès remporté grâce au financement accordé par le gouvernement dans ce domaine, des résultats obtenus et de la façon utilisée pour mesurer l'étendue du succès des programmes de financement particuliers?
    Nous sommes en train de vous préparer une trousse passablement étoffée, en fonction des questions que vous avez posées la dernière fois que j'étais ici. Nous essayons d'examiner certains programmes qui visent à trouver des solutions de rechange aux suspensions, comme le programme communautaire Stop Now and Plan qui s'adresse aux enfants de 6 à 11 ans qui sont presque tombés dans les rouages du système judiciaire. Nous procédons à la cueillette d'information sur la thérapie multi-systémique, qui a particulièrement bien fonctionné avec les jeunes de 12 à 17 ans.
    Tous les programmes auxquels je fais allusion — et nous serons aussi en mesure de vous brosser un portrait beaucoup plus général — donnent des résultats très encourageants. Par exemple, 92 % des jeunes qui avaient quitté un foyer ont pu le réintégrer après trois mois dans notre programme de thérapie multi-systémique. Nous serons en mesure de vous donner une foule de renseignements sur une variété de programmes qui ont connu un vif succès et qui démontrent que nos efforts ont une incidence sur les jeunes de notre pays.
    J'aimerais qu'on s'attarde un peu sur la thérapie multi-systémique... Vous avez dit que 92 % des jeunes qui avaient quitté leur foyer ont été en mesure d'y retourner et d'y rester au moins trois mois. Qu'arrive-t-il après six mois? Après un an? Ces projets sont-ils surveillés longtemps, afin d'en jauger le succès réel?
    Avons-nous des preuves indiquant que les jeunes qui reviennent dans leur foyer seront désormais moins enclins à commettre un acte criminel? La question centrale ici est la prévention du crime, alors j'essaie de comprendre comment on peut mesurer la réussite de ce programme particulier, de comprendre l'incidence qu'il pourra avoir sur la prévention du crime dans un an, dans deux ans et durant les années subséquentes.

  (1535)  

    Ces projets sont des projets quinquennaux, et nous sommes en mesure de suivre les gens visés durant toute la durée du programme. Nous ne pouvons pas les suivre une fois le financement quinquennal terminé. C'est comme cela que le programme est conçu. Nous estimons que cinq ans de collecte de données et de surveillance est un processus assez instructif.
    Les preuves sont sans équivoque. Il est très clair que les jeunes à risque qui réussissent à rester dans un foyer, dans un milieu familial, qui bénéficient de l'aide de leurs parents et de leurs proches et qui sont en mesure de vivre dans une certaine stabilité seront mieux en mesure d'éviter d'avoir affaire avec la loi. Nous avons donc une preuve tangible que la présence d'un foyer stable est une bonne façon de prévenir le crime.
    C'est encourageant de savoir que certaines mesures ont du succès. Je sais cependant que d'autres ne font pas aussi belle figure. Dans vos travaux sur le financement des programmes, en avez-vous cerné certains qui tombent dans cette catégorie?
    J'ai fait un certain nombre d'annonces dans ma région de Scarborough et aux alentours, mais j'ai entendu des histoires sur certains des programmes de financement. Je pense en outre à ces participants qui ont donné un spectacle de marionnettes et à d'autres situations semblables. Je crois que les gens qui réfléchissent à la prévention du crime ne s'imaginent pas des enfants prenant part à ce type d'activités.
     Je me demandais si vous aviez une idée des programmes qui ont connu moins de succès que la thérapie multi-systémique dont vous avez parlé.
    Nous sommes en train de colliger ces informations. Je n'ai pas la liste des programmes moins réussis sous la main.
    Je me contenterai de dire — comme j'en ai parlé lors de mon dernier passage — qu'essentiellement, nous répartissons nos investissements en trois: les programmes qui ont fait leurs preuves, les programmes prometteurs et les nouveaux programmes. Les investissements dans les programmes qui ont fait leurs preuves et les programmes prometteurs donnent généralement de très bons résultats. Mais, à l'évidence, la conception même des nouveaux programmes comporte une part d'expérimentation. C'est une faible portion de nos investissements, mais nous acceptons que la conception prévoie une part d'expérimentation, puisque c'est la façon de vérifier si quelque chose fonctionne. Si ça ne fonctionne pas, nous suspendons le financement. Mais nous apprenons des choses, nous pouvons comprendre pourquoi le projet n'a pas fonctionné, y apporter des modifications et le remettre en marche. Nous pouvons cesser tout simplement de le financer, en présumant ou en concluant que ce n'est pas un investissement qui en vaut la peine, du moins, pas pour ce qui est de réduire la criminalité.
    Merci.
    Nous avons reçu tout récemment un représentant des cercles de soutien et de responsabilité.
    Oui.
    Il avait des chiffres très intéressants à nous communiquer sur le taux de réussite des particuliers qui sont sortis de prison. Le programme qu'offrent ces cercles, lesquels sont financés partiellement par le gouvernement... Il a été admis qu'ils n'avaient pas eu à chercher de bailleurs de fonds au cours des cinq dernières années, en raison du financement du gouvernement, mais les représentants étaient aussi ouverts à nos idées sur la finance sociale et ont cru que cela pourrait être pertinent.
    L'un des aspects de la finance sociale est que le financement est fonction du rendement. Si l'on se fie aux statistiques que le représentant des cercles de soutien a présentées, je ne douterais pas que des investisseurs externes souhaitent participer à des projets qui ont un tel taux de réussite.
    Croyez-vous que ce type de programme visant à réduire le taux de récidive chez les détenus libérés aurait avantage à envisager la finance sociale?
    En termes simples, oui.
    Je connais aussi cet exposé, ainsi que les statistiques que ce témoin a présentées, bien que je n'en connaisse pas les sources.
    Nous travaillons actuellement avec l'organisme CoSa afin d'évaluer le programme que nous avons financé. L'évaluation devrait être complétée cet automne. Ce n'est qu'à partir de ce moment que nous serons en mesure de jauger les résultats du financement quinquennal que nous leur avons accordé. En présumant que les données présentées soient conformes aux résultats de notre évaluation, nous aurons là un bel exemple de programme qu'il sera possible de promouvoir auprès de partenaires de la communauté avec lesquels des arrangements en matière de finance sociale sont possibles.
    Merci beaucoup, madame James.
    Au tour, maintenant, de Mme Doré Lefebvre.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie MM. Matheson et Tupper d'être parmi nous aujourd'hui. C'est grandement apprécié.
    Monsieur le président, je considère qu'il est extrêmement important de recevoir des témoins pour discuter de divers sujets liés à la sécurité publique du pays. Comme nous l'avons mentionné à plusieurs reprises de ce côté-ci de la table, nous pourrions consacrer notre précieux temps de travail à des études plus importantes plutôt que de continuer à traiter de la finance sociale.
    Si vous me le permettez, je vais déposer un avis de motion. Je vais le lire avant de poser mes questions. La motion propose ce qui suit:
Que le Comité mène une étude sur l’accès aux soins de santé dans les pénitenciers fédéraux en tenant compte des récentes coupes dans les soins infirmiers des établissements du Service correctionnel Canada et de l’effet qu’elles ont sur le personnel et que le Comité rapporte ses constats à la Chambre des communes.
    Je dépose donc cet avis de motion.
    Messieurs, vous venez tout juste de parler de l'organisme CoSA, et j'ai trouvé cela extrêmement intéressant. Je voulais justement poser des questions à ce sujet. Vous avez dit que ce serait intéressant de présenter cela aux promoteurs ou à n'importe quel investisseur privé. C'était, je crois, votre dernier commentaire,.
    Or des témoins nous ont dit considérer que certaines sphères de la sécurité publique ne devaient pas être ouvertes aux investisseurs privés. Certains nous ont donné comme exemple les sans-abri et les personnes âgées et d'autres ont parlé de la réinsertion sociale des détenus. L'organisme CoSA se spécialise dans les cercles de soutien destinés aux détenus à risque très élevé, aux délinquants sexuels.
     Pourquoi, d'un côté, nous dit-on qu'il ne devrait pas y avoir d'investissements privés dans le cas de ces délinquants à risque élevé alors que, de votre côté, vous nous dites que ce serait une excellente idée qui devrait être proposée à des investisseurs privés?
     Sur quoi basez-vous cette affirmation?

  (1540)  

[Traduction]

    Je crois que le concept du financement social est loin d'être quelque chose de figé. Je crois que notre capacité à trouver des partenaires qui peuvent fournir des ressources — et pas seulement de l'argent, mais aussi des contributions en nature — ne signifie pas que le gouvernement se lave les mains de ses obligations de rechercher de bonnes politiques en matière de réintégration. Il s'agit plutôt d'élargir la gamme des partenaires avec lesquels nous travaillons.
    Il est donc question de notre aptitude à trouver des partenaires qui sont prêts à financer un projet. Par exemple, nous travaillons avec la Société John Howard afin de trouver des programmes de placement pour aider les délinquants à risque élevé qui, sans cette aide, auraient de la difficulté à se trouver un emploi. Cet organisme est en mesure de prendre des arrangements avec la ville pour que ces délinquants puissent, par exemple, faire des travaux d'entretien dans des logements sociaux, ou il peut exploiter une petite entreprise où ils pourront travailler et être rémunérés. C'est John Howard qui fait la supervision, et la ville en tire avantage puisque, par l'entremise d'une entente contractuelle, elle s'attache certains services pour ses logements sociaux. Il s'agit d'un cycle positif
    Il ne s'agit pas de remplacer le gouvernement, mais bien de multiplier les partenariats et les relations, et de faire jouer d'autres ressources pour l'obtention de résultats qui fonctionnent quant à la réintégration des délinquants.

[Français]

    Votre budget a-t-il été réduit au cours des dernières années?

[Traduction]

    Le budget actuel du Centre national de prévention du crime est d'environ 41 millions de dollars. Le plan de réduction du déficit a réduit ce financement d'environ 1 million de dollars. Dans mon ministère, comme les deux plus importants postes budgétaires sont le Programme des services de police des Premières nations et le programme pour la prévention du crime, il était très difficile de les laisser intacts.
    Mais en ce qui concerne le Centre national de prévention du crime, le budget annuel actuel est d'environ 41 millions de dollars, une enveloppe qui a été réduite d'environ 1 million de dollars depuis l’exercice du PARD. Alors, le budget n'a pas été réduit de beaucoup.

[Français]

    Monsieur Matheson, est-ce que votre centre a subi des compressions budgétaires?
    Selon vous, cette réduction n'affecte pas du tout les services que vous offrez?

[Traduction]

     En fait, au cours des quatre dernières années et à cause du réaménagement de ce programme, en 2008 — nous avons eu ni plus ni moins à nous restructurer et à reprendre nos positions — nous n'utilisions même pas tout notre budget.
    À l'heure actuelle, le montant d'argent utilisé est le plus élevé que nous ayons jamais dépensé sur des programmes de prévention du crime.

  (1545)  

[Français]

    Je n'arrive pas à me rappeler si je vous ai posé cette question la dernière fois. Vous pourrez me rafraîchir la mémoire à ce sujet.
    Vous avez dit considérer que l'organisme CoSA pourrait bénéficier d'investissements privés ou de finance sociale. Pensez-vous à d'autres sphères de la sécurité publique où l'on pourrait recourir à la finance sociale? En revanche, y a-t-il des sphères pour lesquelles il serait important, selon vous, d'éviter complètement d'y recourir?

[Traduction]

    Je comprends votre point de vue, et j'estime moi aussi qu'il y a sans conteste certains secteurs où le gouvernement doit maintenir sa présence. Je crois bien que les délinquants à risque élevé sont de ceux-là, et la santé mentale aussi, surtout lorsqu'elle concerne les délinquants. Cela ne veut pas dire que nous ne sommes pas en mesure de mettre au point des arrangements pour travailler avec nos partenaires communautaires, mais ce sont assurément des secteurs où le gouvernement doit maintenir sa présence.
    Comme je l'ai dit à la dernière séance, nous n'entrevoyons pas de suppression dans notre financement ou quelque changement de programmation que ce soit qui pourrait suggérer un retrait du gouvernement de ces secteurs de programmes.
    Je crois qu'il y a d'autres secteurs — comme la réintégration des délinquants moins à risque — qui pourraient facilement bénéficier d'un partenariat robuste avec la communauté. Les communautés pourraient s'investir d'importante façon, et notre rôle en serait un de supervision et de surveillance, essentiellement.
    Merci beaucoup, monsieur Tupper.
    Merci, madame Doré Lefebvre.
    La parole est maintenant à M. Norlock.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins, et je les remercie notamment parce que c'est leur deuxième apparition devant ce comité pour ce très important sujet. Et je vais vous expliquer pourquoi je pense que c'est un sujet important.
    Durant le week-end, j'ai eu l'occasion d'assister au 10e anniversaire de ReStore, qui est une composante d'Habitat pour l'humanité. Je crois que j'ai déjà mentionné dans ce comité comment 12 jeunes difficiles à employer avaient été inclus dans l'un des projets de construction de l'organisme en raison d'une subvention gouvernementale accordée par l'entremise d'un partenariat d'un autre ministère — et pas de celui de la sécurité publique —, dois-je préciser. Or, il semble que cet investissement ait fait en sorte qu'environ 10 des 12 jeunes ayant participé au projet travaillent maintenant à plein temps dans l'industrie de la construction.
    N'est-ce pas là un exemple parfait de ce qu'un coup de pouce financier de la part du gouvernement à un organisme sans but lucratif peut faire pour aider la communauté et loger trois familles — qui, si je ne m'abuse, avaient toutes des enfants? Je rejoins en cela votre première déclaration selon laquelle un domicile de bonne tenue abritant une famille aimante et pleine de sollicitude est la première bénéficiaire, certes, mais les vrais bénéficiaires, ce sont la société et ces 10 jeunes qui n'avaient pas d'emploi ou qui étaient sur la liste des gens difficiles à employer, c'est 10 personnes qui font maintenant partie de la population active et qui paient des impôts.
    Pouvez-vous relever des similarités avec d'autres types d'investissements gouvernementaux pour lesquels le gouvernement, sans nécessairement intervenir directement — je pense par exemple aux questions de formation et à d'autres types d'activités qui se font en partenariat avec des organismes non gouvernementaux —, obtient de bons résultats avec un déboursé modeste?
    L'exemple que vous venez de donner est parfait. Le printemps dernier, le gouvernement fédéral a conclu une entente partenariale nationale avec Habitat pour l'humanité. Or, bien que mon ministère ne fournisse pas tout le financement qui va dans ce partenariat, c'est grâce aux partenariats horizontaux que nous avons établis entre les ministères que nous sommes en mesure d'obtenir ce genre de résultats.
    Aux termes de ce partenariat avec Habitat pour l'humanité, notre but est de faire en sorte que des délinquants soient embauchés sur tous les sites de construction de l'organisme à l'échelle du pays et qu'ils deviennent des employés des magasins ReStore. C'est un très bon exemple de la façon dont le gouvernement peut, avec un financement très modeste, avoir une incidence remarquable sur les possibilités offertes aux délinquants pour réintégrer la communauté.
    Je crois que notre meilleur exemple de rentabilité est cette petite entreprise qui a été lancée il y a deux ans, en Colombie-Britannique. Il s'agit d'un projet pour le recyclage des bardeaux en asphalte provenant de maisons. C'est une nouvelle technologie verte. Il semblerait que personne n'a jamais été capable de recycler des bardeaux en asphalte auparavant. Maintenant, cela se fait avec un nouveau procédé vert, ce qui permet de supprimer des tonnes de déchets des dépotoirs de cette province. Mais ce qui est le plus important, c'est qu'avec un investissement de 2 375 $ par personne, nous avons appuyé la création d'emplois à plein temps et à salaire décent pour 40 délinquantes de la Colombie-Britannique.
    C'est un exemple formidable. Il nous est bien sûr arrivé de dépenser beaucoup plus que 2 375 $ par personne sur des particuliers, mais ce modeste investissement — un investissement qui est venu d'Emploi et Développement social Canada, qui a fourni l'argent — a un impact très positif sur ces 40 femmes.

  (1550)  

    Il n'est parfois pas question d'investissements provenant du ministère de la Sécurité publique. D'autres organismes gouvernementaux peuvent investir en vue d'obtenir des résultats positifs avec des délinquants potentiels, etc.
    Je tiens seulement à...
    Je m’excuse, monsieur Norlock. Le timbre se fait entendre.
    Je sais que nous sommes au beau milieu d’une bonne discussion, et je suis bien entendu reconnaissant de la contribution de nos témoins. Le timbre se fait entendre, et nous n'avons malheureusement aucun contrôle sur le temps que cela nous prendra. Nous espérons reprendre rapidement nos travaux. Bien entendu, si jamais nous dépassons l’heure prévue, nous avons d'autres témoins à entendre. Nous espérons être de retour à temps.
    Nous suspendrons nos travaux, et nous espérons être de retour à temps pour poursuivre la séance.
    Les travaux sont suspendus.

  (1550)  


  (1635)  

    Chers collègues, nous reprenons notre étude sur la finance sociale.
    Pour la deuxième heure, nous accueillons, à titre personnel, Gregory Jenion, qui est professeur au Département de criminologie de l'Université polytechnique Kwantlen.
    Bienvenue, monsieur. Nous sommes ravis de vous accueillir au comité.
    Vous avez 10 minutes pour votre exposé, si vous en avez un. Ensuite, nous passerons aux séries de questions.
    Vous avez la parole, monsieur.
    J'ai préparé un exposé. Je vais donc commencer par vous le lire.
    C'est parfait.
    Excellent.
    Monsieur le président, mesdames, messieurs les membres du comité, je vous remercie de m’offrir l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui.
    Je crois comprendre que le comité souhaite établir les liens qui existent entre la finance sociale et la prévention du crime au Canada. Je vais tout d’abord vous donner quelques renseignements généraux sur les initiatives et les pratiques durables en matière de prévention du crime.
    Le Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime énonce ce qui suit:
Il apparaît clairement que des stratégies de prévention du crime bien conçues permettent non seulement de prévenir la criminalité et la victimisation, mais aussi de favoriser la sécurité collective et de contribuer au développement durable des pays. La prévention du crime, lorsqu’elle est efficace et judicieuse, améliore la qualité de vie de toute la population.
    Bon nombre de pays fondent leur stratégie nationale sur ce recueil. Comme le comité le sait déjà, le Canada est signataire des Principes directeurs pour la prévention du crime.
    Le Plan d’action visant à diminuer efficacement la criminalité, publié par Sécurité publique Canada en 2007, énonce par ailleurs ce qui suit:
La prévention de la criminalité ne saurait reposer sur une seule approche. Il faut un vaste arsenal d’interventions pour arriver à une efficacité maximale. En conséquence, le CNPC fait sienne la position que traduisent les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention du crime adoptés...
    De plus, les principes directeurs des Nations Unies mentionnent ce qui suit:
La coopération et les partenariats devraient faire partie intégrante d’une prévention du crime efficace, compte tenu de la grande diversité des causes de la criminalité et des compétences et responsabilités requises pour s’y attaquer. Ces partenariats s’exercent notamment entre les différents ministères et entre les autorités compétentes, les organisations communautaires, les organisations non gouvernementales, le secteur privé et les particuliers.
    Or, ces principes directeurs n’expliquent pas en détail la marche à suivre. Par exemple, ils n’indiquent en rien la manière de collaborer avec la collectivité en établissant des partenariats ou de réaliser une analyse diagnostique initiale en vue de cerner les préoccupations de la collectivité.
    Les chercheurs ont mis en évidence les nombreux obstacles à franchir. Comme le professeur Hastings l’a bien décrit, la première difficulté concerne l’absence de consensus sur les causes du crime et les cibles de la prévention. La deuxième difficulté a trait au niveau de confiance des gens dans les solutions proposées pour résoudre les problèmes de criminalité. La troisième difficulté découle des différences sur le plan de l’importance accordée à la collectivité.
    Cette absence de détails nous pousse à chercher où ces principes directeurs sont actuellement mis en oeuvre. L’expérience britannique relative à la prévention du crime est souvent qualifiée de succès. Ses défenseurs l’ont décrite dans de nombreux rapports publiés au fil des décennies, notamment les rapports Cornish, Gladstone et Morgan.
    Le rapport Morgan, en particulier, se penchait sur les façons dont la prévention du crime pouvait devenir une pratique normale entre les organismes et l’établissement des modalités administratives en ce sens. Selon les principales recommandations formulées dans le rapport, la prévention du crime incomberait obligatoirement aux autorités locales.
    L’expérience britannique a abouti à la Loi sur la criminalité et le désordre, qui concrétise les recommandations du rapport Morgan. Ce pouvoir légal a permis de passer outre les menaces naturelles qui sont inhérentes à la prévention du crime en fournissant une structure d’obligations et de reddition de comptes essentielle à la viabilité des mesures. La prévention du crime est passée d’un voeu pieux et d’intentions de bonne foi à un programme durable et plus sûr.
    Le Canada ne dispose d’aucune législation semblable.
    Le rapport Horner est à consulter si l’on veut passer au crible les recommandations qui portent sur le contexte canadien et qui sont semblables à celles formulées dans le rapport Morgan portant sur le contexte britannique. Bien qu’ils mettent peu l’accent sur la responsabilité législative, la plupart des piliers fondamentaux desquels découle la stratégie nationale sont repris dans les recommandations du rapport. Il convient de noter que ce ne sont pas toutes les recommandations du rapport qui ont été mises en oeuvre.
    L’une d’entre elles était directement liée au financement:
Le Comité recommande qu'une portion des fonds confisqués en tant que produits de la criminalité soit affectée à des activités de prévention du crime et que le gouvernement fédéral alloue à des activités de prévention du crime, pendant une période de cinq ans, 1 % par année du budget actuellement consacré à la police, aux tribunaux et au système correctionnel. Au bout de cinq ans, le Canada devrait consacrer à la prévention de la criminalité 5 % du budget fédéral affecté au système de justice pénale.

  (1640)  

    Manifestement, le rapport Horner prévoyait des investissements dans la prévention nationale du crime bien plus importants qu’ils ne le sont actuellement. Je n’ai donc pas été surpris de lire ce qu’a déclaré M. Shawn Tupper lors de son témoignage devant votre comité: « Les gouvernements ne disposent pas des ressources financières nécessaires au maintien à long terme de tels programmes. »
    Comme il ne me reste pas beaucoup de temps, en gardant à l’esprit le contexte général de la prévention du crime, j’aimerais résumer mes propos en disant qu’il importe peu que nous traitions de l’innovation sociale par l’intermédiaire de la finance sociale ou d’autres programmes de partenariat progressif, en l’absence d’un cadre législatif qui englobe les obligations, la reddition de comptes et la transparence ou d’une augmentation considérable de l’engagement financier du gouvernement fédéral envers les municipalités. Je reprendrai ce que d’autres collègues ont dit à ce sujet, à savoir que pour le moment il serait naïf de présumer que le progrès en matière de prévention du crime est inévitable.
    Je serai ravi de répondre à vos questions.
    Parfait. Merci beaucoup, professeur Jenion.
    Monsieur Payne, veuillez ouvrir le bal, s’il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci de votre présence, monsieur Jenion.
    Monsieur le président, par votre entremise, j’aimerais poser des questions au témoin.
    Je regardais votre commentaire, à savoir que les gouvernements ne disposent pas des ressources financières nécessaires, et je me suis rendu compte que vous n’aviez pas cité toute l’intervention dudit témoin. Si cela ne vous dérange pas, j’aimerais le faire aux fins du compte rendu:
Les gouvernements ne disposent pas des ressources financières nécessaires au maintien durable de tels programmes. C’est pourquoi la mise à profit de nouveaux partenariats peut prendre le relais des financements gouvernementaux temporaires; cette transition est essentielle si nous voulons répondre aux besoins de nos collectivités en matière de sécurité publique. Il s’agit, pour nous, de mettre en oeuvre des programmes d'innovation sociale efficients qui peuvent devenir durables.
    C’est intéressant. Nous avons en fait entendu bon nombre de représentants d’organisations qui nous ont parlé de ces mesures novatrices, des programmes d’obligations, etc. C’est intéressant de constater que des gens trouvent des idées qui sortent des sentiers battus.
    Selon moi, il y a de l’innovation en la matière. Des possibilités s’offrent aux organisations. Nous avons entendu nombre de nos collègues mentionner certaines de ces initiatives novatrices. Prenons l’exemple d’Habitat pour l’humanité et des maisons construites dans le cadre de ce programme. L’un de mes collègues a justement parlé de ce programme et d’un projet dans sa circonscription. J’aimerais qu’il nous en reparle au comité.
    Je ne sais pas s’il me reste beaucoup de temps, monsieur le président.

  (1645)  

    Vous avez amplement le temps.
    J’aimerais connaître votre opinion au sujet de l’innovation. Êtes-vous disposé à vous pencher sur la question? Est-ce à des années-lumière de ce que nous devrions faire, selon vous?
    Des possibilités s’offrent évidemment au gouvernement fédéral. Je crois que ce serait une excellente possibilité pour nous, en tant que gouvernement, de créer un projet pilote en vue de collaborer avec d’autres organisations et de voir ce que nous pouvons accomplir avec de telles initiatives. Nous avons entendu des représentants d’organisations nous dire qu’ils avaient connu beaucoup de succès en la matière, dont la Société John Howard.
    Merci, monsieur le président.
    Si vous me le permettez, j’ai en fait étudié un rapport qui vous a été remis et qui est intitulé Social Impact Bonds: Overview and Considerations. Je crois comprendre qu’il en a été question plus tôt dans votre étude. Bien entendu, le rapport ne dépeignait pas très favorablement les obligations à impact social. On peut lire à maintes reprises dans le rapport que cela comporte des risques, que ce n’est pas éprouvé et que les résultats ne sont pas bien connus.
    Je ne pense pas que ces initiatives devraient être balayées du revers de la main, mais je doute que ce soit la solution pour avoir des mesures globales et durables en matière de prévention du crime.
    Ce qui m’inquiète également, c’est lorsque je regarde le tableau 1 sur les obligations à impact social. Ce rapport vous a été remis. Le point 6 mentionne que l’évaluateur surveille sur une base continue les progrès du programme de prévention. Eh bien, qui sont ces évaluateurs? Qui sont les surveillants? À quel point sont-ils tenus de faire preuve de transparence et de divulguer les renseignements? Je crois que ce serait très important de définir le tout si nous décidions d’aller de l’avant en la matière.
    Je crois qu’il y a certes des possibilités pour les organisations, et nous avons entendu des témoins. Par exemple, le représentant de Deloitte a mentionné bon nombre de questions sur lesquelles nous devons nous pencher avant toute chose. Nous ne pouvons pas nous lancer tête baissée dans l’aventure.
    L’autre élément important à reconnaître est que les gouvernements ne peuvent pas tout accomplir seuls. Nous n’avons pas réponse à tout. Il y a des gens à l’extérieur du gouvernement qui ont acquis une expérience différente et qui peuvent proposer d’excellentes idées au gouvernement. Si nous restons assis les bras croisés en nous disant que cela ne correspond pas... Je crois que nous devons étudier et essayer de nouvelles idées.
    Nous venons de parler des CSR. Des représentants sont venus témoigner devant notre comité il y a deux ou trois semaines et nous ont expliqué ce qu’ils avaient fait en collaboration avec des investisseurs privés. Il était alors question de financement provenant du CNPC. M. Tupper a traité du potentiel à cet égard. Il se pourrait que l’une des organisations offre du financement, et d’autres organismes communautaires seraient peut-être prêts à donner un coup de main en la matière.
    D’après moi, si nous établissons les conditions et les règles régissant l’ensemble du processus — il faut évidemment réaliser une vérification et être en mesure d’évaluer les résultats —, nous avons réellement l’occasion de nous pencher sur de telles initiatives, plutôt que de tout simplement les balayer du revers de la main en disant que ce n’est pas possible. Bref, selon moi, c’est tout à fait possible de mettre sur pied un projet pilote. Je crois que nous manquerions à notre devoir si nous décidions de ne même pas examiner cette possibilité.

  (1650)  

    Parfait. C’est bien. Merci.
    Monsieur Garrison.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, professeur Jenion, de votre présence aujourd’hui au comité. Je sais que vous avez de l’expérience non seulement sur le plan universitaire, mais aussi sur le plan pratique, parce que vous avez travaillé de concert avec les autorités de Surrey sur leurs stratégies de prévention du crime. Dans votre exposé, vous avez dit qu’il était nécessaire d’augmenter considérablement l’engagement financier envers les municipalités.
    Aimeriez-vous nous expliquer davantage votre pensée?
    Monsieur le président, si vous me le permettez...
    Oui, allez-y.
    J’ai vu des municipalités éprouver des difficultés en ce qui concerne la prévention du crime et le financement. Le budget des services de protection de Surrey est affecté en grande partie aux services de police et d’incendie. Dans ma dissertation, je vais au-delà de ce qui fonctionne et j’examine les diverses stratégies des municipalités. Dans mes rencontres avec des fonctionnaires et des gestionnaires de Surrey, j’ai noté que les gens ont constaté une réduction considérable du financement fédéral concernant notamment les services de police contractuels dont ils jouissaient depuis 20 ou 30 ans.
    Par contre, indépendamment de tout cela, les budgets des services de police et d’incendie de la ville ne prévoyaient même pas un montant pour un gestionnaire en prévention du crime. Lorsque j’ai commencé à écrire au sujet de l’expérience en matière de réduction du crime de Surrey et des politiques de la ville, les autorités municipales ont été choyées d’embaucher un dénommé Lance Talbot, qu’elles ont par la suite perdu au profit du B.C. Transit, notamment parce que le salaire y était beaucoup plus alléchant.
    Bref, le financement est un enjeu très important dans les municipalités.
    Diriez-vous que c’est sur la scène municipale que les investissements dans la prévention du crime sont les plus efficaces? Est-ce ce que vous en concluez?
    Eh bien, je ne crois pas avoir dit cela. Si nous prenons le recueil des Nations Unies, il est clairement écrit — et le Canada en est signataire — que la prévention du crime est plus efficace lorsqu’elle est entreprise par les administrations locales, soit les municipalités.
    À mon avis, le rapport de l’ONU et le rapport Horner précisent que les municipalités doivent être au centre de la prévention du crime au Canada.
    Dans votre exposé, vous avez parlé de l’absence d’un cadre législatif en ce qui a trait aux obligations, à la reddition de comptes et à la transparence pour ce qui est des projets novateurs. C’est une préoccupation que nous avons essayé de soulever ici.
    Pourriez-vous nous dire quelques mots au sujet des problèmes relativement à la reddition de comptes et à la transparence?
    Avec plaisir. Je crois que le premier élément vise tout simplement la diffusion des renseignements.
    Outre le rapport Cornish, la première grande étape, selon moi, pour le Royaume-Uni est le rapport Gladstone, qui est en gros un rapport plutôt aride. Ce rapport établit une méthodologie, mais il affirme clairement que, dans le contexte britannique, il faut adopter une approche fondée sur des données probantes en vue d'arrêter de répéter les erreurs du passé. En ce sens, la prochaine étape était de diffuser à grande échelle nos conclusions.
    Tout d'abord, la reddition de comptes signifie aussi la diffusion de manière transparente des renseignements. De plus, il importe aussi de souligner que la Crime and Disorder Act impose une responsabilité et une obligation aux personnes. La loi prévoit en fait ce que les gens doivent faire. Cela ne donne pas naissance à un nouvel organisme pour surveiller les initiatives de prévention du crime. Cela explique plutôt aux gens responsables ce qu'ils doivent faire en vertu de la loi.
    Dans nos discussions, je crois que nous avons souvent regroupé les organismes sans but lucratif, les organismes de bienfaisance et les personnes morales à but lucratif. Nous avons eu des exemples de chaque groupe dans nos discussions. À votre avis, devrait-il y avoir des préoccupations ou une reddition de comptes qui varient en fonction de ces trois catégories ou pouvons-nous tous les traiter de la même manière dans le cadre des projets?
    Lorsque je travaillais avec la ville de Surrey et que je siégeais à son conseil, j’ai également eu l’occasion d’interviewer des organismes sans but lucratif, des organismes de bienfaisance. Certains organismes confessionnels étaient très nerveux à l’idée que les gouvernements interviennent dans leurs activités. À mon avis, leurs activités sont très importantes étant donné qu’elles mettent en oeuvre toutes sortes de programmes de relation et de rétablissement en toxicomanie, des programmes qui sont tous relativement peu connus par la société en général, mais qui, selon moi, sont substantiels. Cependant, ils répugnent à ce que les gouvernements s’ingèrent trop dans leurs programmes. Par conséquent, je pense que, manifestement, il faudrait procéder un peu différemment dans des cas comme ceux-là.
    Je pourrais peut-être revenir sur les observations qui ont été formulées plus tôt à propos des indicateurs de rendement parce que, parfois, ces indicateurs présentent aussi des failles et des dangers. C’est la raison pour laquelle la reddition de comptes doit dépasser la simple mesure du rendement. Je pense que nos voisins du Sud sont aux prises en ce moment avec leur scandale des anciens combattants, parce que les indicateurs de rendement ont poussé, selon moi, certaines personnes à trafiquer les chiffres sous forme de listes d’attente. Je crois donc que nous devons faire attention à cela, si nous mentionnons que les indicateurs de rendement sont tout ce que nous entendons par responsabilité.

  (1655)  

    Il vous reste une autre minute.
    L’allusion que vous avez faite au rapport Horner, un rapport publié par un comité de la Chambre des communes en 1993 si vous ne vous en étiez pas rendu compte, préconise un niveau de dépenses beaucoup plus élevé, alors que la bureaucratie actuelle affirme que nous n’avons pas les moyens d’effectuer ce genre de dépenses. Le rapport Horner m’a donné l’impression qu’il s’agissait d’un investissement plutôt que d’une dépense, que, si le gouvernement investissait davantage dans la prévention du crime, il épargnerait de l’argent à long terme. Est-ce la teneur du rapport Horner?
    Oui, je dirais que c’est exact. Je pense que c’est l’esprit du rapport. Il dépasse les voeux pieux et la poudre aux yeux pour s’orienter vers la durabilité. Il est difficile de désapprouver le mot « prévention ». La prévention est un merveilleux concept; on souhaite tous prévenir la criminalité. Je ne crois pas qu’on pourrait trouver des gens où que ce soit qui ne désirent pas prévenir la criminalité, mais la question est de savoir comment maintenir cet effort. À moins que nous déployions des efforts massifs, je ne crois pas que nous puissions présumer que nous réussirons.
    C’est bien. Merci beaucoup. Votre temps de parole est écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Maguire, qui dispose de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Jenion, je vous remercie de votre exposé. Il m’amène certainement à vous poser quelques questions à propos du domaine en entier que vous avez étudié au département de criminologie de l’Université polytechnique Kwantlen.
    Pourriez-vous nous donner des nouvelles peut-être de certaines des études ou des documents que vous avez présentés dans ce domaine? J’ai cherché quelques-uns de ces documents ou de ces études, mais je n’ai pas trouvé grand-chose de publié au chapitre des outils de prévention du crime liés à la finance sociale. J’étais curieux de savoir si vous pourriez nous faire part de certains des ouvrages universitaires que vous avez écrits.
    Bien sûr. Je serais heureux de le faire.
    Je pense que je pourrais commencer par vous parler de ma dissertation, qui porte non seulement sur le contexte mondial des efforts de prévention du crime, mais aussi sur nos efforts à l’échelle nationale, y compris le plan municipal de prévention du crime que la ville de Surrey a élaboré.
    Mon superviseur principal était M. Paul Brantingham, le fondateur de la criminologie environnementale, et mon superviseur externe était M. Marcus, le fondateur de la théorie de la criminalité axée sur les activités routinières et de la théorie des possibilités. De plus, je continue à enseigner la prévention du crime à l’Université polytechnique Kwantlen, et ce, depuis près de 10 ans. Un grand nombre de mes articles portant sur le taux de criminalité ont été publié dans les revues Canadian Journal of Criminology et Journal of Criminal Justice, ainsi que quelques autres revues qui figurent dans ma biographie sur la plage Web que vous pouvez lire.
    Ce qui importe encore plus, c’est que j’ai interviewé des délinquants dans leur milieu carcéral à la fois dans le cadre du projet 6116, c’est-à-dire l’étude nationale des jeunes contrevenants coupables de vols d’automobile menée en collaboration avec le centre de services de détention des jeunes de Burnaby, et dans le cadre d’un projet dirigé par M. Simon Verdun-Jones au Centre de psychiatrie médico-légale. Voilà quelques-unes des expériences que j’ai acquises.
    Je m’intéresse davantage aux outils de finance sociale, et à certains des domaines que nous pourrions examiner. Premièrement, vous avez mentionné le modèle britannique. Pourriez-vous le comparer au modèle de New York? Croyez-vous que le modèle de New York a donné quelques bons résultats?

  (1700)  

    Il faudrait que je le réexamine et que je procède maintenant à une comparaison exacte.
    De plus, si les gouvernements devaient passer à des programmes financés par le secteur privé selon des modèles de finance sociale, des programmes qui seraient plus autosuffisants, quels genres de mécanismes de reddition de comptes seraient nécessaires, à votre avis, pour assurer leur réussite?
    Il faudrait assurément que les projets fassent l’objet d’une surveillance sans lien de dépendance avec le partenariat privé. De plus, comme je l’ai indiqué plus tôt, cette reddition de comptes devrait dépasser le seul recours à des indicateurs de rendement.
    Quels genres de mesures utiliseriez-vous pour évaluer l’atteinte des objectifs des initiatives de ce genre? Comment jugeriez-vous ces initiatives?
    Je dirais que j’utiliserais entre autres le taux de criminalité. J’entends souvent dire que le taux de criminalité diminue au Canada et d’autres observations de ce genre. Soyons clairs; il s’agit du taux de crimes signalés, et nous le savons.
    Nous savons aussi que quelque chose d’autre diminue. Selon l’Enquête sociale générale Victimisation, en 2004, 34 % des Canadiens signalaient des crimes à la police. En 2009, cette statistique est passée à 31 %. À quel point ce chiffre doit-il reculer avant que nous remettions en question même les taux de criminalité déclarés officiellement?
    La surveillance des taux de récidive ne serait-elle pas une meilleure façon d’évaluer les taux de criminalité? Pourriez-vous formuler des observations à ce sujet?
    Oui, ce pourrait être une mesure.
    Si vous examiniez cette question et certains des programmes sociaux qui existent à l’heure actuelle, qu’il s’agisse d’obligations à impact social ou d’autres programmes, quel genre de participation à l’ensemble du processus exigeriez-vous de la part des intermédiaires?
    Il faudrait que je passe un peu plus de temps à réfléchir à fond à cette question.
    Pensez-vous qu'ils joueraient un rôle quelconque dans la surveillance permanente des programmes?
    M. Gregory Jenion: Oui.
    M. Larry Maguire: Si vous examiniez la façon de mettre en oeuvre les modèles de finance sociale, comment procéderiez-vous pour le faire? Nous avons parlé d'un certain nombre de mécanismes de financement social visant à réduire les taux de criminalité. Quelle est la marche à suivre que vous privilégieriez?
    Il faut établir clairement qui était responsable du programme et qui pourrait être tenu responsable de ses résultats, ainsi que la mesure dans laquelle la diffusion des renseignements sur le programme et des résultats du programme pourrait être généralisée...
    Les éléments clés de sa réussite feraient-ils partie de l'ensemble du processus d'information sur la façon de commencer par mettre en oeuvre le modèle de finance sociale, ainsi que de la façon de mettre en oeuvre le programme?
    Je n'en suis pas certain. Je dois dire que, compte tenu de mes antécédents, mon approche en matière de résolution de problèmes de criminalité et de maux sociaux est très axée sur la situation en question. Nous ne pouvons pas supposer que tous les contextes sont identiques. Je n'appliquerais pas un genre de recette magique à diverses régions urbaines ou rurales du Canada.
    Donc, vous envisageriez l'adoption de différentes approches dans différentes régions du Canada.
    Je me demande quelles ententes contractuelles il faudrait conclure pour mettre en oeuvre un modèle de finance sociale fructueux et sur quel ensemble de règles reposeraient ces ententes contractuelles. Selon vous, qu'est-ce qui devrait être mis en place pour assurer un genre de cohésion entre ses éléments?
    Il faudrait que je réfléchisse un peu plus à votre question, monsieur.
    L'un des témoins qui ont comparu devant le comité a décrit le processus comme étant essentiellement une perte totale accompagnée de l'espoir d'un résultat. Donc, je me demande si vous pourriez comparer cette notion à un modèle d'obligations à impact social où l'investissement est durable et un résultat est attendu sur le plan sociétal. Ne convenez-vous pas que, du point de vue des contribuables, il vaut mieux qu'ils s'attendent à ce que leurs impôts donnent des résultats et préviennent en fait la criminalité?
    À la page 6 du rapport qui vous a été remis, l'auteur dit ce qui suit:
Étant donné que, jusqu'à maintenant, aucune obligation à impact social n'est parvenue à l'étape où elle rapportera des bénéfices, il n'est pas possible de déterminer si ces bénéfices se matérialiseront.
    Je ne suis pas certain que nous sachions encore si ces programmes seront bénéfiques — s'ils produiront les résultats escomptés — ou durables, ou les deux.

  (1705)  

    Merci beaucoup, monsieur Maguire.
    Monsieur Easter.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également les témoins de leur présence.
    Au cours de votre déclaration — et je reviendrai au sujet à l'étude dans un moment —, vous avez parlé de l'absence d'entente sur les causes du crime, ce qui, à mon avis, est probablement l'un des problèmes les plus importants que nous omettons de cerner.
    Quel travail a été effectué dans ce domaine?
    Larry et moi venons tous deux du secteur agricole. Nous savons parfaitement que, si nous avons un problème, quel qu'il soit, nous n'allons pas le régler à moins d'en connaître la cause. Si nous pouvions déterminer les causes de ces problèmes, nous pourrions probablement faire beaucoup plus que nous efforcer de les régler après coup.
    Avez-vous des observations à formuler dans ce domaine?
    Le slogan de la campagne de réduction de la criminalité de la mairesse Dianne Watt parlait de trouver les causes profondes du crime. C'était le coeur de la campagne. C'est une chose de le dire, et c'en est une autre de comprendre vraiment ce que cela signifie et dans quel contexte, etc. Une grande partie de cette question dépend de recherches très récentes, de nouveaux concepts que nous ne cessons d'apprendre.
    En 2012, Mme Andrea Curman a publié sa thèse de doctorat de l'Université Simon Fraser intitulée « Crime and Place: A Longitudinal Examination of Street Segment Patterns in Vancouver, BC », dans laquelle elle a démontré qu'un grand nombre de crimes se produisaient seulement sur un très petit nombre de rues.
    On ne sait même pas encore si ces rues constituent un quartier. Ce seul renseignement pourrait modifier fondamentalement ce que nous pensons du crime, tant en théorie qu'en pratique. Cette thèse a été publiée il y a à peine deux ans. Le travail d'Andrea Curman est publié avec celui de M. Martin Andresen de l'Université Simon Fraser, qui est l'un des jeunes rédacteurs les plus prolifiques d'aujourd'hui.
    En ce qui concerne les autres causes, je peux simplement rappeler à tous que le recueil des Nations Unies ne traite pas seulement de la prévention de la criminalité liée au développement social, mais aussi de la prévention situationnelle de la criminalité. Il y a toute une foule d'études et de documents qui portent sur la prévention situationnelle de la criminalité, un domaine qui échappe souvent au grand public et qui relève seulement de la compétence de la police, des tribunaux et des services correctionnels.
    C'est certainement un domaine qui nécessite le déploiement d'un plus grand nombre d'efforts. Je vous remercie de votre réponse.
    Vos observations semblent aussi faire ressortir la nécessité d'avoir un cadre législatif pour s'attaquer à la prévention de la criminalité, ou est-ce pour avoir recours à la finance sociale? Je suppose que je vous demande précisément ce que vous entendez par là.
    Ma crainte concernant la finance sociale est la suivante. Je pense que cette idée a un certain potentiel, mais je crains que, si nos programmes sont grandement tributaires de la finance sociale, ils varient d'une région à l'autre du Canada.
    Dans certaines régions, des investisseurs seront disposés à investir des fonds, alors que, dans d'autres régions, comme peut-être dans le Nord et dans certaines des plus petites provinces, il n'y aura pas cette volonté d'investir. Il s'ensuit qu'on pourrait se retrouver avec une combinaison de programmes: les programmes de prévention de la criminalité qui sont financés par le gouvernement fédéral, les services de police fédéraux, provinciaux et municipaux et la finance sociale.
    Qu'en pensez-vous?
    Je pense qu'il est essentiel d'adopter une mesure législative qui crée un certain sentiment de responsabilité, d'obligation et de transparence. Je pense que, parmi toutes les choses qui ont poussé le Royaume-Uni, ou la Grande-Bretagne, si vous voulez, à abandonner leur approche répétitive ou paralysée en matière de prévention du crime, il y a la Crime and Disorder Act.
    À mon avis, trois articles précis de la Crime and Disorder Act transforment l'effort.
    Le premier est l'article 17 qui exige que toutes les parties des politiques des autorités locales continuent de tenir compte des questions de sécurité de la collectivité, mais non au détriment de leurs autres responsabilités.
    L'article 5 force d'une manière ou d'une autre les autorités locales, les services de police, les services de santé et les autres comités de libération conditionnelle à travailler ensemble à la résolution des problèmes de criminalité et à mettre de côté les questions de compétence ou peut-être les cloisonnements, entre autres choses.
    Dans l'article 6, des partenariats sont prévus pour produire et publier des stratégies à l'égard de ces problèmes. Ces stratégies doivent être fondées sur un examen de la criminalité qui est effectué régulièrement au sein de leur collectivité.
    Selon moi, tout est vraiment dans le pouvoir législatif. La loi présume aussi qu'une contribution financière substantielle sera apportée pour financer l'effort.

  (1710)  

    S'agit-il de la Crime and Disorder Act de l'Angleterre ou...? Je me demande, monsieur le président, si nos analystes pourraient obtenir une copie de cette loi afin que nous puissions en avoir un aperçu.
    Êtes-vous en train de dire que le gouvernement fédéral devrait prendre l'initiative de fournir ce cadre législatif général? Ou est-ce que ce devrait être une entreprise de coopération? Comment suggéreriez-vous que cela se produise?
    En Grande-Bretagne, Tony Blair a repris l'effort et l'a intégré dans la stratégie nationale. Alors, oui, je pense que cela devrait avoir lieu à l'échelle nationale.
    Soyez très bref, monsieur Easter.
    Je voulais seulement souligner une chose, monsieur le président.
    Vous avez mentionné en passant que vous aviez interviewé des délinquants. Je pense que c'est véritablement une excellente façon d'obtenir des opinions de base sur ce qui les a amenés à commettre des crimes et de connaître les causes profondes du crime, en quelque sorte. Qu'est-ce que cette expérience vous a appris qu'il nous serait utile de savoir?
    Eh bien, nous avons appris certaines choses, la première étant l'invariabilité de la courbe âge-criminalité. C'est-à-dire que la plupart des délinquants commettent des crimes quand ils sont jeunes et n'en commettent plus jamais par la suite.
    Merci.
    D'accord. Merci, monsieur Easter. Vous avez dépassé votre temps.

[Français]

    Monsieur Rousseau, vous avez la parole.

[Traduction]

    Cinq minutes.

[Français]

    Monsieur Jenion, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui.
    Je présume que vous entendez l'interprétation simultanée?

[Traduction]

    Je peux vous entendre.

[Français]

    Monsieur Jenion, quel danger guette les programmes de prévention du crime s'ils sont financés et parrainés par le secteur privé, surtout en ce qui a trait aux outils et aux paramètres qui pourraient être employés pour les évaluer?

[Traduction]

    Je vous remercie de cette question. Se fier uniquement à des indicateurs de rendement...

[Français]

    Pourriez-vous nous donner plus de détails sur les incidences, le taux de criminalité et d'autres choses du genre?

[Traduction]

    Je pense qu'il faut comprendre que le taux de criminalité ne mesure pas nécessairement ce que nous croyons qu'il mesure. Plus précisément, j'ai ici un article qui a été publié dans le Delta, un journal local de Surrey, dans lequel on cite un sergent-chef du nom de Garry Beggs, qui dit que la prostitution à Newton a augmenté d'un seul coup de plus de 300 %, et que cela ne voulait pas dire que les agents de la GRC ne faisaient pas leur travail. Et il a raison. C'est plutôt parce qu'ils avaient modifié leurs parcours de patrouille, ainsi que ce sur quoi ils concentraient leurs efforts.
    Compte tenu de la baisse du nombre de crimes signalés par les Canadiens, je ne crois pas que le taux de criminalité soit une excellente mesure à utiliser pour établir le rendement.

  (1715)  

[Français]

    J'aimerais poursuivre dans la même veine.
    Quel pourrait être le danger, surtout pour les petites communautés ou les régions un peu plus éloignées? En effet, quelquefois, il y a certains types de crimes, mais le financement social du secteur privé n'est pas toujours possible. Quel danger guette ces communautés?

[Traduction]

    Que l'argent qu'elles auraient pu recevoir ne se rende pas à elles, mais qu'il soit plutôt destiné à d'autres entreprises.
    Puis-je ajouter quelque chose?
    Oui.
    Même si le recueil des Nations Unies appuie, avec raison, les programmes de développement social, nous devons aussi bien veiller à ne pas nous limiter à des programmes sociaux qui ne visent que la réduction de la criminalité. La bonne gouvernance et une société éveillée devraient aussi contribuer à ce genre de choses, peu importe que cela mène à une réduction de la criminalité ou non.

[Français]

    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président ?

[Traduction]

    Vous avez une minute.

[Français]

    À la fin de votre allocution, vous avez dit ceci:
[...] il importe peu que nous traitions de l’innovation sociale par l’intermédiaire de la finance sociale ou d’autres programmes de partenariat progressif, dans un contexte où il n’y a ni cadre réglementaire d’obligations et de responsabilités obligeant la transparence ni augmentation considérable de l’engagement financier du gouvernement fédéral envers les municipalités [...]
    Pouvez-vous en dire plus à cet égard, s'il vous plaît?

[Traduction]

    En ce qui concerne particulièrement les municipalités?

[Français]

    C'est cela, de façon plus spécifique.

[Traduction]

    Dans ma dissertation, j'ai parlé des menaces naturelles qui sont inhérentes à la prévention du crime, que j'ai appelées dérives tertiaires, suivant ce que nous appelons le modèle PST qui est appliqué à la prévention du crime, soit le modèle primaire, secondaire, tertiaire. Pour l'autre, j'ai parlé de glissement du développement social.
    Ce que j'ai dit, c'est que si nous ne pouvons trouver de moyens de faire face aux menaces naturelles qui sont inhérentes à la prévention du crime, nous devrons à terme revenir à la façon très traditionnelle et réactionnaire de faire les choses: la police, les tribunaux, les mesures correctionnelles, en partie parce qu'ils interviennent dans les activités au quotidien du système et que tout revient naturellement à cela. En revanche, l'autre point, c'est que nous commencerions doucement à faire avancer les programmes sociaux uniquement dans le but de réduire le crime ou de prévenir le crime. Ce serait aussi une erreur, dont un effet sérieux serait de criminaliser certaines populations marginalisées.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    C'est maintenant le tour de M. Norlock.
    Merci beaucoup, monsieur le président et, par votre intermédiaire, merci au témoin d'être présent.
    J'ai lu et je vous ai écouté avec intérêt, quand vous avez cité certains des principes des Nations Unies... Je suis d'accord avec la plupart des énoncés, surtout celui selon lequel il n'y a pas qu'une façon de prévenir le crime.
    Je pense que les témoignages que le comité a entendus et les énoncés faits par le secrétaire parlementaire sont exactement cela; que dans le travail exploratoire du comité au sujet de la finance sociale, il nous faut peut-être nous pencher sur les façons de diversifier notre portefeuille de prévention du crime, si vous voulez.
    J'ai trouvé particulièrement intéressante la deuxième partie qui porte sur la coopération et les partenariats — qu'ils devraient faire partie d'une prévention efficace du crime. C'est ce que presque tous les témoins ont admis, soulignant que d'autres pays et entités se lancent dans la finance sociale, ce qui ne se limite pas aux obligations à impact social. Cela correspond bien à ce qu'Einstein a dit, que la folie, c'est de faire toujours la même chose et de s'attendre à un résultat différent. C'est vrai?
    Donc, nous voulons faire les choses différemment pour obtenir de meilleurs résultats et investir les précieux deniers publics de la façon dont les gens s'attendent... Donc, ne trouvez-vous pas que le gouvernement devrait explorer l'avenue de la finance sociale, comme élément de sa stratégie de prévention du crime — entre autres éléments?
    Je vais m'en tenir à ce que j'ai dit précédemment: bien entendu, j'appuie toute entreprise qui réduirait les torts causés aux Canadiens. Cependant, si c'est une entreprise indépendante qui n'entre pas dans un cadre stratégique plus général, je ne crois pas qu'on pourrait la qualifier de durable. Mais je pense que si on peut démontrer que c'est efficace, il faut y donner son appui. Je ne sais pas si les ouvrages récents — du moins ce qui a été fourni au comité — disent que cela produit l'effet ou les résultats souhaités.

  (1720)  

    Donc, vous dites que le gouvernement ne devrait pas entreprendre quelque expérience que ce soit concernant la prévention du crime? Que nous devrions attendre que quelqu'un d'autre nous présente une meilleure façon de faire que nous pourrions alors adopter?
    Non. Je pense que...
    Rapidement, que dites-vous, monsieur?
    Rapidement, je dis que les solutions ponctuelles, ou les solutions qui ne font qu'éteindre des feux de broussailles, concernant le crime et les problèmes sociaux, finiront dans les annales de l'histoire, sans cadre stratégique plus vaste...
    Donc, vous ne pensez pas que les stratégies de prévention du crime du gouvernement fédéral sont de bonnes stratégies. Je ne veux pas parler en termes absolus, cependant, parce que rien n'est absolu.
    Je dis que nous ne savons pas.
    Comment saurions-nous, rapidement, monsieur?
    Au fur et à mesure que nous obtiendrions des éléments probants.
    D'accord. Si nous adoptons un programme selon lequel nous voulons réduire... Je dois pousser cela au point où les gens à la maison vont comprendre et où je ne tomberai pas dans l'ésotérisme. Disons qu'il y a un problème dans un village ou une ville, parce qu'il y a beaucoup de vandalisme. Un groupe de la collectivité, par exemple, Centraide, dit qu'il voudrait travailler avec les jeunes — parce que tout porte à croire que ce sont les jeunes —, afin de prévenir le vandalisme et qu'à cette fin, il va appliquer des programmes pour lesquels il lui faut du financement.
    Puis, un membre de collectivité — disons, le propriétaire du Tim Hortons — dit qu'il aimerait contribuer à cela et donner de l'argent pour la mise en place du programme. Un an, ou un an et demi plus tard, peu importe, leur contrat social démontre que le vandalisme a diminué dans la mesure établie par le contrat, et tout le monde dans le village le constate. Vous dites que ce n'est pas vraiment une bonne mesure.
    Non, ce n'est pas ce que je dis. Je dis que...
    Excusez-moi. Veuillez conclure.
    Je pense qu'il faut envisager tout ce qui peut contribuer à la réduction du crime au Canada, en particulier à la réduction des torts causés aux Canadiens par ces crimes. Il faut envisager des entreprises de ce genre. Je dis qu'il faut les faire entrer dans un cadre stratégique plus général qui garantit la responsabilité et la transparence.
    Bien. Merci beaucoup.
    Monsieur Garrison, c'est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais poursuivre dans la même veine, car je pense que c'est un point important. Ce que vous dites, c'est que nous avons devant nous un produit qui n'a pas fait ses preuves. Vous ne vous y opposez pas, mais vous pensez que mettre tous nos oeufs dans le même panier peut nous amener dans la mauvaise direction. Est-ce que c'est là où nous nous en allons?
    Nous nous en tenons au rapport que vous avez sous les yeux — un rapport très sobre et intéressant sur les obligations à impact social. Je crois qu'il dit clairement qu'il reste à en constater les résultats complets.
    D'après votre expérience, sur le plan de la recherche universitaire et appliquée, est-ce qu'il y a d'autres solutions que nous savons déjà fonctionner et auxquelles nous devrions plutôt consacrer des ressources?
    Cela dépend du problème dans le contexte local. Parfois, certains types de programmes de développement social ou de programmes polyvalents sont très efficaces. À Surrey, on recourt à certains éléments de cela pour empêcher les jeunes de joindre des gangs.
    Ailleurs, une mesure de réduction des situations ou des occasions pourrait représenter la meilleure solution. Ce que je cherche à dire, c'est que c'est propre au contexte du problème.
    Si nous nous penchons sur un problème en particulier, comme les gangs à Surrey, vous diriez qu'il existe plusieurs outils possibles. Il faut comprendre le problème particulier, puis choisir un de ces outils. Je sens que vous ne seriez peut-être pas disposé à choisir un outil qui n'a pas fait ses preuves, à ce moment-là.
    S'il y avait une autre option, en effet.

  (1725)  

    Excusez-moi, monsieur Garrison. J'aimerais demander des éclaircissements.
    Monsieur Jenion, vous avez de nouveau mentionné le rapport. Parliez-vous toujours du rapport Morgan?
    Le rapport Morgan? Oui.
    C'est bon. Je voulais simplement des éclaircissements pour nos analystes. Merci beaucoup.
    Vous pouvez poursuivre, monsieur Garrison.
    Poursuivez, maintenant qu'on vous a interrompu.
    Des voix: Oh, oh!
    Mes excuses, monsieur. Nous obtenions simplement des éclaircissements pour l'analyste.
    L'une des choses dont vous parlez était dans le mémoire d'Elizabeth Lower-Basch sur les obligations à impact social. Elle a dit deux choses que je trouve intéressantes.
    L'une est que le coût sera presque toujours plus élevé, parce que vous devez créer une nouvelle structure bureaucratique ou une nouvelle entité pour gérer la démarche axée sur l'investissement social. L'autre est que je pense qu'elle a au moins laissé entendre qu'il faut toujours des ressources gouvernementales pour établir de tels programmes.
    Je me demande si vous avez des commentaires sur ces deux points que j'ai tirés de son rapport.
    Je pense que non. Il faudrait que j'y pense.
    D'accord.
    M. Easter vous a posé une question, tout à l'heure, à laquelle vous n'avez pas répondu. C'est peut-être que vous ne pouvez pas y répondre, mais il était question de notre crainte selon laquelle, si l'on opte pour l'investissement social, c'est le secteur privé qui détermine où sont affectées les ressources. Je ne cherche pas à savoir si c'est ce qui va se produire, mais plutôt la mesure dans laquelle cela aurait une incidence sur notre approche globale de réduction de la criminalité, en tant que société, si les intentions de chacun dictaient les décisions relatives à la façon dont l'argent est investi.
    Je reviendrais aux propos d'un membre du comité, précédemment, qui a dit que ce serait une approche fragmentée.
    Donc, ce que vous préconisez — j'en sais un peu sur votre travail —, c'est un engagement général concernant la réduction de la criminalité, et l'intégration de la réduction de la criminalité dans les autres activités du domaine judiciaire. Est-ce là que l'exemple britannique entre en jeu?
    Je pense qu'il faut aller plus loin que le préambule de certains types de lois en matière de justice pénale qui existe actuellement. Il faut énoncer et imposer l'obligation de faire certaines choses à certaines personnes clés en position de pouvoir.
    Dans l'exemple britannique que vous avez donné, les gens sont obligés d'intégrer cela dans leurs plans et de travailler avec d'autres agences — le genre d'exigences précises pour les agences existantes qui s'occupent de prévention des crimes et de justice.
    ... et faire en sorte qu'elles soient complètement transparentes pour le public et qu'elles soient publiées annuellement. Non seulement la publication traiterait du taux de criminalité donné, mais elle comporterait aussi des données d'enquête annuelles sur la victimisation continue et ce genre de choses.
    Permettez-moi de dériver un peu. Dans le district Commercial Drive-Grandview de Vancouver, ils ont entrepris de réaliser une enquête communautaire locale. Ils ont été stupéfaits de toutes les autres préoccupations des membres de la collectivité concernant les questions de justice pénale et de problèmes sociaux. Bon nombre de ces préoccupations n'apparaissent pas dans les statistiques officielles.
    De toute évidence, nous voulons comprendre parfaitement ce que les membres de la collectivité pensent, non seulement sur le plan de la réduction des actes criminels, mais aussi sur le plan de l'atténuation des peurs, qu'elles soient fondées ou non, et nous voulons aussi connaître les autres infractions de nuisance qui les dérangent.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Vous avez 15 ou 20 secondes si vous le voulez, madame James, et ce sera tout.
    Merci. Bien sûr.
    Vous avez mentionné que vous avez préparé une dissertation sur la prévention du crime. Est-ce que vous y avez inclus l'étude de la finance sociale? Je me pose la question parce que vous avez aussi mentionné que vous aviez lu les ouvrages fournis au comité et qu'ils ne semblaient pas très positifs. J'ai été présente à chacune des séances du comité, depuis le début de cette étude, et je pense que tous les témoins, sauf un, ont été très positifs. En fait, avec les deux témoins qui étaient ici au cours de la première heure, nous avons discuté de l'organisme CoSA. Ils ont dit que la finance sociale s'appliquerait à ce groupe.
    J'aimerais savoir quels ouvrages vous avez reçus et si vous n'avez reçu qu'une partie des ouvrages.

  (1730)  

    Ma dissertation ne contenait rien au sujet des obligations à impact social.
    Bien. Merci beaucoup.
    Monsieur Jenion, merci d'être venu comparaître devant le comité. Je ne peux dire si c'était agréable ou intéressant, mais cela nous a donné l'occasion de vivre une expérience.
    Merci infiniment de vos commentaires d'aujourd'hui.
    La séance est levée.
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