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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 011 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 26 octobre 2011

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Encore une fois, veuillez nous excuser. La tenue d'un vote explique notre petit retard. Je remercie les membres aux pieds agiles qui, dans un suprême effort, sont parvenus à arriver d'avance. Je leur en sais énormément gré.
    Aujourd'hui, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions les maladies chroniques liées au vieillissement. Nous accueillerons des témoins très intéressants, et notre séance se poursuivra jusqu'à 17 h 20. À la fin de la séance, nous expédierons très rapidement les affaires du comité.
    C'est ainsi que nous accueillons le président directeur général d'Associated Medical Services Inc., le Dr William Shragge.
    Bienvenue, monsieur Shragge.
    Nous accueillons également la directrice de la Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées, Mme Wilson. Très bien. Merci.
    Nous accueillons aussi Régine Laurent et Lucie Mercier, respectivement présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec et conseillère syndicale du secteur sociopolitique de cet organisme. Bienvenue.
    Enfin, nous accueillons Lynn Cooper, présidente de la Coalition canadienne contre la douleur. Bienvenue, nous sommes tellement heureux que vous soyez venue.
    Débutons par les exposés d'une durée de dix minutes. Ensuite, ce sera la période de questions. Commençons par M. William Shragge.
    Merci beaucoup. Bonjour, mesdames et messieurs.
    Je vais commencer par présenter mes excuses pour mon retard. Je vous remettrai un mémoire dans lequel se trouvera toute l'information sur laquelle s'appuiera mon exposé. À la fin de l'exposé, j'aurai des copies en anglais, mais la traduction sera accessible de la manière habituelle. Veuillez me pardonner de ne pas l'avoir sous la main aujourd'hui.
    Pour commencer, permettez-moi de vous remercier tous de l'occasion que vous m'accordez de vous parler du thème des maladies chroniques liées au vieillissement. Je formulerai mes remarques d'après le point de vue des fournisseurs de soins de santé. Je pourrais ajouter que c'est un point de vue qui est souvent escamoté, mais qui devient de plus en plus important parce qu'on revient aux soins axés sur les besoins du patient.
    Je me présente. Je suis le Dr William Shragge. De formation, je suis chirurgien cardiologue, pédagogue et administrateur médical. Je suis actuellement président-directeur général d'Associated Medical Services Inc. Aujourd'hui, je parlerai au nom de cette organisation, que je représente.
    AMS a derrière lui une longue histoire dans la prestation des soins de santé. J'ajouterais que c'est un objet de fierté. Il a été mêlé au système de soins de santé, en Ontario particulièrement. Fondé et constitué en société en 1937 par le Dr Jason Hannah, il a été le premier organisme canadien sans but lucratif à être parrainé par un médecin et à fournir des soins de santé prépayés. Quand ce rôle de fournisseur de soins a pris fin avec la naissance du régime d'assurance maladie, notamment celui de l'Ontario, le gouvernement de cette province l'a autorisé à utiliser ce qui restait de son fonds de réserve à des fins caritatives; c'est ainsi qu'est né le nouvel AMS, organisme philanthrope dont les dons s'élèvent à environ un million de dollars par année.
    À l'origine, AMS a surtout appuyé des travaux savants en histoire de la médecine. Il a également contribué à l'amélioration des soins de santé et de la santé des Canadiens dans les domaines de la bioéthique, des soins en fin de vie et de l'enseignement médical, particulièrement grâce à son parrainage de l'instruction des futurs médecins de l'Ontario par l'initiative dite EFPO.
    Le comité étudie les maladies chroniques liées au vieillissement. C'est une étude qui se fait attendre depuis longtemps. Elle correspond à deux thèmes primordiaux. D'abord la réalité démographique qui fait que les Canadiens âgés constitueront une fraction croissante des consommateurs de services de soins. Ensuite, la gamme des maladies chroniques et aigües liées au vieillissement, qui s'étend de façon spectaculaire, à mesure que notre espérance de vie continue d'augmenter.
    Tous les propos qui se tiendront graviteront autour d'un personnage avec qui nous devons refaire connaissance, c'est-à-dire le fournisseur de soins, assailli sans cesse par une foule de difficultés dont le nombre croît exponentiellement. Il faut ajouter à ce tableau une population qui peut être incroyablement difficile à gérer, d'après le fournisseur de soins, et un milieu de travail qui, souvent, fait énormément problème, d'après les personnes âgées et leurs familles.
    Les soins de santé se sont égarés. Les yeux braqués sur le progrès technique, nous n'avons pas remarqué la désolation croissante du paysage que nous avons parcouru. Un paysage de traitements et de techniques, d'évaluations et de quête d'efficacité, de routines et de lignes directrices, de hiérarchies et de règlements. Les patients et leurs familles traversent ce paysage sans nous connaître ni avoir l'impression que nous les connaissons, en tant qu'individus éprouvant des craintes et des désirs tout en manifestant des symptômes et des signes.

  (1540)  

    Pendant que nos patients se succèdent dans une sorte de brouillard et que notre travail est réduit à des tâches frénétiques, nous risquons d'être sourds à l'appel qui nous a fait embrasser les soins de santé, la vocation médicale. Nous cherchons à tâtons une raison d'être alors que l'absence de relations de soins, dans les soins de santé, nous démoralise, nous et nos patients.
    Le projet « AMS Phoenix Project: A Call to Caring » se fonde sur la prémisse selon laquelle les professionnels de la santé fournissent les meilleurs soins quand ils sont capables à la fois de compassion et qu'ils maîtrisent leur art. C'est particulièrement le cas en prestation de soins chroniques aux personnes âgées, dans des milieux souvent privés des éléments essentiels à la prise en compte des besoins du patient.
    AMS se propose d'agir comme catalyseur du changement pour faire des investissements stratégiques et collaborer avec les enseignants, les professionnels de la santé, les gestionnaires des lieux de travail et les autres partenaires pour favoriser et maintenir des milieux d'enseignement et de travail qui respectent cet équilibre, l'équilibre entre la compassion et la maîtrise technique.
    Son projet cherche à remettre les soins, l'empathie et la compassion à l'ordre du jour dans les soins de santé et à rééquilibrer le couple compassion et maîtrise technique, grâce à des investissements qui favorisent d'abord les champions des relations de soins, ensuite, des stratégies innovantes d'enseignement et de pratique qui insistent sur les soins; enfin, des communautés de praticiens, qui exercent en présence les uns des autres et virtuellement.
    Certains des thèmes que le projet Phoenix explorera ont été articulés dans le projet L'avenir de l'éducation médicale au Canada (AEMC), que le gouvernement fédéral a financé et qui vient de se terminer.
    La Dre Dorothy Pringle a été nommée présidente du comité consultatif du projet Phoenix. Membre du conseil d'administration, c'est une chef de file, une éducatrice et une chercheure accomplie dans le domaine des soins infirmiers. Le Dr Brian Hodges a été nommé chef de projet. C'est un éducateur de réputation internationale, actuellement vice-président de l'éducation au réseau de santé universitaire, à Toronto.
    Notre initiative, qui se concentre intensément sur le fournisseur de soins de santé, qui gravite autour de l'empathie, de la compassion et de la prestation de soins dans le contexte des milieux d'apprentissage et de travail, correspond fidèlement au thème de la maladie chronique chez les personnes âgées. Encore une fois, on insiste sur le fournisseur de soins. Nous, à AMS, particulièrement les participants au projet Phoenix, nous avons énormément hâte de collaborer avec votre comité pour la réalisation de ce programme extrêmement important.
    Nous soulignons encore une fois notre insistance sur le fournisseur de soins de santé et l'importance de faire des problèmes touchant cet acteur un sujet important de vos délibérations, dans le cadre plus général des soins axés sur les besoins du patient. Dans toutes vos discussions, le fournisseur de soins de santé restera le dénominateur commun et, d'après nous, il est l'acteur le plus souvent négligé.
    En fin de compte, la prestation de soins respectant l'équilibre entre la compassion, la prestation de soins, l'empathie et les compétences techniques constituera la base de toutes vos délibérations et elle reste l'objectif de notre initiative quinquennale.
    AMS tient à remercier le comité de l'occasion qu'il lui a accordé de témoigner devant vous, et, comme je l'ai dit, nous avons hâte de continuer à collaborer à votre initiative, sous quelque forme que ce soit.

  (1545)  

    Merci beaucoup, docteur Shragge.
    La parole est maintenant à Mme Kimberly Wilson, de la Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées.
    Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du comité, merci de l'occasion que vous nous accordez de vous entretenir aujourd'hui des maladies chroniques liées au vieillissement. Je suis très heureuse de pouvoir prendre la parole au nom de la Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées.
    Pour la présenter rapidement, la Coalition est un organisme national qui compte environ 3 000 membres, d'un bout à l'autre du pays, qui se recrutent dans toute la gamme des disciplines et secteurs, chez les administrateurs et fonctionnaires du secteur de la santé, ainsi que chez les personnes âgées et les fournisseurs de soins.
    Notre mission est de promouvoir la santé mentale des personnes âgées, grâce à la mise en relation des personnes, des idées et des ressources. Notre principal objectif stratégique est de faire reconnaître la santé mentale des personnes âgées comme un enjeu de la santé et du mieux-être des Canadiens. En gardant cet objectif à l'esprit, je vous félicite d'avoir entrepris cette étude des maladies chroniques liées au vieillissement et d'avoir inclus les maladies mentales dans votre définition de maladie chronique.
    Comme vous le savez très bien, en 2011 les premiers baby-boomers ont 65 ans, une étape importante pour notre population vieillissante. Il faut de la planification et de la prévoyance pour que nos systèmes et nos structures s'adaptent à ce changement démographique et pour que nous n'adhérions pas à la théorie de la démographie apocalyptique ou à la notion simpliste selon laquelle cette population vieillissante aura des conséquences catastrophiques pour notre société.
    Dernièrement, j'ai eu le plaisir d'être l'un des auteurs de nouvelles lignes directrices concernant les services complets de soins de santé mentale destinés aux personnes âgées du Canada. Vous en trouverez la copie dans les clés USB qui, je pense, ont été distribuées. Ces lignes directrices ont été financées et publiées par la Commission de la santé mentale du Canada. On y expose clairement quatre populations vivant avec la maladie mentale, tard dans la vie, des populations que, j'espère, vous n'oublierez pas en étudiant les maladies chroniques. Ce sont les personnes qui vieillissent en étant atteintes de maladie mentale récurrente, persistante ou chronique; celles qui éprouvent la maladie mentale pour la première fois tard dans leur vie; celles qui manifestent des symptômes psychologiques et comportementaux associés à la maladie d'Alzheimer et aux démences connexes; celles qui ont des problèmes médicaux chroniques ayant des corrélations connues avec la maladie mentale, par exemple la maladie de Parkinson, la maladie cérébrovasculaire et la maladie pulmonaire obstructive chronique.
    Comme l'a exposé, l'année dernière, l'administrateur en chef de la santé publique dans son rapport sur l'état de la santé publique, les maladies chroniques étaient, en 2009, répandues chez les personnes âgées, dont 89 p. 100 souffraient d'au moins une de ces maladies. Beaucoup étaient victimes de plusieurs maladies chroniques. Le quart des 65 à 79 ans et plus du tiers des plus de 80 ans en déclaraient au moins quatre, notamment l'arthrite, l'hyperpression, le diabète, les maladies du coeur, le cancer ou un ACV, la maladie d'Alzheimer ainsi que des troubles de l'humeur et l'anxiété.
    Je vous rappelle que beaucoup de maladies chroniques communes de la fin de la vie ont des corrélations connues avec la maladie mentale. Par exemple, 40 p. 100 des patients qui ont eu un ACV aigu souffrent de dépression majeure. Comme l'a exposé la Société Alzheimer dans son récent rapport intitulé Raz-de-marée, nous savons également que le nombre de nouveaux cas de démence, en 2038, chez les Canadiens de plus de 65 ans, sera 2,5 fois plus élevé qu'en 2008, alors que l'incidence prévue de cette maladie se chiffrera à 257 811 nouveaux cas par année d'ici 2038.
    La comorbidité rend beaucoup plus difficile le diagnostic des maladies mentales. Il peut être difficile de démêler les symptômes des maladies physiques des manifestations somatiques des maladies mentales telles que la dépression et, faute de formation convenable, les fournisseurs de soins risquent de ne pas déceler des maladies mentales traitables, ce qui arrive effectivement. Une dépression non traitée peut se répercuter sur la santé, comme il est mentionné dans un rapport récent de l'Institut canadien d'information sur la santé, d'après lequel les pensionnaires des maisons de soins de longue durée ou de soins pour bénéficiaires internes dont la dépression est diagnostiquée et traitée restent en meilleure santé que les autres.
    J'aimerais également insister sur le fait que, malgré la nature chronique et parfois progressive de tous ces troubles mentaux communs, tard dans la vie, il existe des options et des stratégies de traitement réussi pour le rétablissement et le mieux-être des patients et que, même si certaines maladies, comme celle d'Alzheimer, sont incurables, on peut améliorer le sort des malades. En outre, on peut employer des stratégies primaires, secondaires et tertiaires de prévention pour réduire la survenue et la gravité des symptômes de même que les comorbidités. Les adultes âgés qui sont sur la voie du rétablissement et du mieux-être sont d'importants membres actifs de notre société. On les apprécie pour leur bénévolat, les soins qu'ils donnent et l'appui social qu'ils fournissent à la famille, aux amis et à la collectivité. Il vaut la peine d'investir dans eux.
    Comme vous le savez probablement, au Sommet des Nations Unies sur les maladies non transmissibles, qui a eu lieu à New York en septembre dernier, on a souligné la nécessité de reconnaître que les troubles mentaux et neurologiques, y compris la maladie d'Alzheimer, sont des causes importantes de morbidité et qu'ils contribuent, à l'échelle mondiale, à l'ampleur des problèmes de santé causés par les maladies non transmissibles.

  (1550)  

    Ces priorités sont également confirmées par les statistiques de l'Organisation mondiale de la santé, selon lesquelles, d'ici 2020, la dépression devrait se situer au deuxième rang du nombre d'années de vie corrigée de l'incapacité en ce qui concerne le total des années de vie perdues du fait d'une mort prématurée et les années de vie productive perdues du fait de l'incapacité, calculées pour tous les âges et les deux sexes.
    Et, bien sûr, la complication la plus tragique de la dépression est le suicide. Encore une fois, j'aimerais féliciter le comité pour les discussions récentes qui ont eu lieu à la Chambre des communes sur la nécessité d'une stratégie de prévention du suicide au Canada. J'aimerais également profiter de l'occasion pour vous rappeler que les adultes âgés ne sont pas à l'abri du suicide. En fait, selon les données de Statistiques Canada de 2008, les hommes de 90 ans et plus ont le taux de suicide le plus élevé au Canada, à peine un peu moins que le double de la moyenne nationale, c'est-à-dire 33,1 pour 100 000 habitants, contre la moyenne de 16,8.
    Et, pour le contexte de votre étude, vous devriez prendre en considération le fait que Heisel et Flett, dans leur recherche publiée en 2005, ont mentionné que les maladies mentales et les maladies physiques comme la maladie pulmonaire chronique, les troubles neurologiques, la douleur modérée ou grave et le cancer comptent parmi les facteurs de risque de suicide chez les personnes âgées.
    Actuellement, notre système pourvoit à des soins de courte durée, malgré la compression de la morbidité que nous constatons chez les personnes âgées. Que pouvons-nous donc faire? J'aimerais soumettre plusieurs éléments de réponse au comité. Dans la discussion sur les maladies chroniques liées au vieillissement, je vous encouragerais, dans l'approche du sujet, à utiliser un modèle socio-écologique, qui tient compte des facteurs et des processus intra- et interpersonnels, des facteurs institutionnels et communautaires, ainsi que de la politique publique. Le modèle prévoit que les efforts consacrés exclusivement aux facteurs individuels, aux dépens des autres, sont susceptibles d'échouer et que les efforts visant à améliorer la santé de l'individu devraient s'exercer simultanément à plusieurs niveaux.
    Je vous conseillerais aussi d'utiliser le modèle théorique des parcours de vie comme d'un prisme pour l'examen des maladies chroniques et du vieillissement. Cette théorie est un passage obligé pour l'examen des adultes âgés dans le contexte du temps et des structures sociales, et elle a inspiré un faisceau de travaux de recherche sur les inégalités sociales et leur accentuation à mesure que la personne vieillit — la notion des désavantages cumulés.
    En outre, je vous recommanderais vivement de ne pas en rester aux publications universitaires et d'accueillir les témoignages de personnes ayant du vécu et ceux de leurs fournisseurs de soins quand vous chercherez des moyens d'améliorer la vie des malades chroniques qui vieillissent. Un exemple à étudier serait ainsi la doctrine de l'autogestion, qui donne aux adultes âgés et à leurs fournisseurs de soins la capacité d'être des partenaires actifs et engagés dans leurs soins de santé et dans leur lutte contre la maladie.
    Je vous demanderais également d'envisager une approche fonctionnelle à la santé, qui consiste à classer les gens selon l'âge et leur capacité d'interagir avec le monde extérieur plutôt que de les étiqueter en fonction de leur diagnostic. Comme l'a déclaré de façon éloquente ma collègue la docteure Elaine Wiersma, la prévention et la gestion des maladies chroniques sont souvent axées sur la maladie, alors qu'elles devraient l'être sur la vie et la personne.
    Je vous recommanderais aussi vivement d'avoir des partenaires de travail tels que la Commission de la santé mentale du Canada, pour mettre en oeuvre des stratégies visant à effacer le genre de flétrissure qui peut empêcher les personnes âgées d'accéder aux services ou qui peut mener à la supposition erronée que certains de leurs combats font simplement partie du vieillissement plutôt que d'être attribuables à des maladies que l'on peut chercher à guérir. Je vous rappellerais également que ces personnes âgées atteintes de maladies mentales sont doublement défavorisées, à la fois par l'âgisme et la flétrissure trop répandue de la maladie mentale.
    En terminant, j'affirme ma foi dans le rôle crucial que le gouvernement fédéral peut jouer à l'égard des problèmes de maladie chronique liés au vieillissement, en dépit de la compétence des provinces en matière de santé. Comme le renouvellement de l'accord sur la santé approche, je vous incite vivement à examiner certaines recommandations formulées dans le rapport du Sénat de 2009 sur le vieillissement, notamment:
Diriger et coordonner les démarches multigouvernementales conçues pour répondre aux besoins d'une population vieillissante;
Soutenir la recherche, l'éducation et la dissémination des connaissance et des pratiques exemplaires;
Et, enfin:
Que le gouvernement fédéral lance une initiative visant à aider financièrement les provinces à mettre en place des modèles de soins intégrés à l'intention des personnes âgées et qu'il en fasse le modèle de soins de qualité pour tous les âges.
    Je vous remercie encore de l'occasion que vous m'avez accordée et j'ai hâte de poursuivre le dialogue avec vous.

  (1555)  

    Je vous remercie de ces renseignements fort utiles, Kimberly.
    Nous entendrons maintenant Mme Lynn Cooper de la Coalition canadienne contre la douleur.

[Français]

[Traduction]

    Je suis désolée. J'ai cédé la parole à Mme Lynn Cooper, présidente de la Coalition canadienne contre la douleur.
    Vous nous avez un peu prises au dépourvu.
    Ce n'est pas grave.
    Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie d'avoir invité la Coalition canadienne contre la douleur à examiner avec vous les problèmes auxquels font face les Canadiens aux prises avec de la douleur, y compris les personnes âgées. Nous vous remercions également de reconnaître que la douleur chronique est une maladie.
    Un Canadien sur cinq est aux prises avec une douleur tenace mal diagnostiquée et mal soignée. Les enfants ne sont pas épargnés, et la prévalence augmente avec l'âge. Depuis que j'ai subi une blessure au dos lors d'un accident évitable survenu au bureau il y a 25 ans, la douleur est mon lot quotidien.
    À titre de présidente de la Coalition canadienne contre la douleur, voici des témoignages de gens en proie aux douleurs: « C'est une brûlure. » « C'est un coup de couteau. » « C'est lancinant. » « C'est comme un choc électrique dans le bras. » « Je me sens si seul. » « Ma mère craint de tomber, et elle reste seule dans sa chambre pour y prendre ses repas. » « C'est une douleur incessante qui me fera perdre la raison, et j'ai bien cru la perdre momentanément. » La douleur chronique devient tellement omniprésente qu'on s'identifie presque à elle.
    La personne aux prises avec de la douleur peut se poser bien des questions: « Pourquoi ne me croit-on pas? Quand la douleur disparaîtra-t-elle? Pourquoi ne peut-on pas me soulager? Comment vais-je parvenir à subvenir aux besoins de sa famille? Comment vais-je faire pour m'amuser avec ma petite-fille? »
    La douleur se répercute sur tous les aspects de la vie de la personne souffrante. Elle nuit à sa capacité de mener une vie heureuse et normale sur les plans professionnel, familial, social et personnel. La douleur isole, déprime, démoralise, invalide, déshumanise et tue. Selon les recherches, on risque deux fois plus de se suicider si on souffre d’une douleur chronique. Il vous intéressera d'apprendre qu’une personne comme moi, aux prises avec une douleur chronique, doit assumer des coûts annuels s'élevant à plus de 17 000 $, notamment pour des médicaments et des soins qui ne sont pas couverts par l'assurance-maladie. Il est impossible d'établir le coût des problèmes psychologiques affectifs et relationnels collatéraux pour la personne et pour sa famille.
     Les adultes peuvent difficilement supporter la douleur chronique. Cependant, elle est encore plus intolérable chez les enfants et les aînés canadiens.
    Le vieillissement amène une diminution progressive de nos fonctions. Nous réagissons moins bien au stress et nous risquons davantage de contracter des maladies. Nous avons de plus en plus de difficultés à maintenir le rythme que nous impose la vie et à surmonter les obstacles. Nous avons de moins en moins voix au chapitre.
    La plupart des maladies du vieillissement s'accompagne de douleurs pénibles à supporter. Parmi les maladies chroniques les plus communes, on remarque les affections muscosquelettiques comme l'arthrite, la discopathie dégénérative, le zona, le cancer, la fibromyalgie, le syndrome de la douleur consécutive à un AVC et la neuropathie diabétique.
     La douleur toucherait de 25 à 65 p. 100 des aînés résidant dans la collectivité et jusqu'à 80 p. 100 de ceux vivant dans des établissements de soins prolongés. Trente-deux pour cent des Canadiens de plus de 85 ans se retrouvent dans de tels établissements. Malgré sa prévalence, leur douleur n'est pas traitée correctement.
    D'après les données démographiques, 20 p. 100 de la population canadienne sera âgée de 65 ans et plus en 2026. Si le soulagement de la douleur n'évolue pas, beaucoup plus de Canadiens âgés, dont moi, souffriront inutilement.
    Des mythes empêchent les Canadiens de reconnaître que la douleur chronique est une maladie et doit devenir une priorité en matière de santé. Le premier de ces mythes, c'est que toutes les douleurs sont les mêmes. Naturellement, ce n'est pas le cas.

  (1600)  

    La douleur aiguë indique que quelque chose cloche et qu'il faut prendre des mesures. Elle est temporaire. La douleur chronique dure plus de trois à six mois. Elle dépasse le temps de guérison normal. J'en souffre depuis 25 ans. La douleur chronique ne sert à rien. C'est un dérèglement. D'après les recherches, une douleur aiguë qui n'est pas bien traitée peut se prolonger indéfiniment. Elle fait naître la honte car les personnes en souffrant passent pour des gens qui se plaignent, simulent la maladie et veulent des médicaments. On comprend mal la nature de la douleur chronique. C'est pourquoi on confond généralement un mal de tête lancinant et incommodant passager avec des migraines durant des jours et des semaines.
    Autre mythe, la douleur chronique est le symptôme d'une maladie chronique, mais n'en est pas une. D'après les recherches en IRM fonctionnelle, la douleur chronique modifie le système nerveux et le cerveau. Elle possède ses propres mécanismes. C'est pourquoi il faudrait reconnaître qu'il s'agit d'une maladie, comme vous l'avez fait, et il faudrait la soigner comme telle.
    Dernier mythe, il faut apprendre à composer avec la douleur chronique. Il existe bien des moyens de l'atténuer. L'approche multidisciplinaire constitue le meilleur traitement, alliant notamment médecine, physiothérapie, ergothérapie, thérapie cognitivo-comportementale et massothérapie. En général, les Canadiens ont peu accès à ce traitement royal. Pourquoi? Parce que cette approche est difficile à offrir dans le secteur extrahospitalier et qu'elle coûte très cher.
    Les aînés dont le revenu et la mobilité ont diminué seraient moins en mesure d’en assumer le coût et de se déplacer pour recevoir de tels soins. La personne souffrant de douleurs doit participer activement à son soulagement en prenant des décisions éclairées et adoptant un mode de vie combinant alimentation saine, sommeil, hygiène et exercices physiques. En soignant mon père et ma mère, j'ai constaté que, à mesure que nous vieillissons et que sommes aux prises avec de la douleur, il nous est de plus en plus difficile de prendre des décisions en matière de soins de santé, de modifier nos comportements et de nous occuper de nous-mêmes.
    Outre les mythes que j'ai évoqués, d'autres problèmes particuliers se posent: il est difficile d'établir un diagnostic juste pour les personnes âgées et de soulager leur douleur. Pourquoi? En raison notamment de la notion fallacieuse et bien ancrée selon laquelle la douleur est l'apanage des personnes âgées; parce que les aînés se taisent par stoïcisme et par crainte de passer pour des plaignards ou à cause d'une déficience sensorielle et cognitive; parce que la douleur dérègle leurs capacités cognitives et leur comportement; parce qu'on surestime le risque de dépendance aux opiacés; enfin, et je voudrais insister là-dessus, parce que les systèmes de soins de santé canadiens ne fournissent pas l'appui nécessaire.
    Selon l'Association internationale pour l'étude de la douleur, organisme de réputation mondiale, le traitement efficace de la douleur chez les aînés doit reposer sur l'acquisition de connaissances et de compétences spécialisées. Selon les chercheurs canadiens, nos professionnels de la santé ne reçoivent pas la formation pertinente. Nos futurs vétérinaires reçoivent trois fois plus de formation sur le soulagement de la douleur que nos futurs médecins. Une telle formation n'a pas reçu l'agrément au Canada. C'est l'aspect négatif. En revanche, le Collège royal des médecins et chirurgiens a reconnu et corrigé cette lacune. Il faudra attendre deux ou trois ans avant que les futurs diplômés arrivent sur le marché du travail.

  (1605)  

     Le nombre de médecins disposés à travailler dans les installations de soins prolongés et ayant reçu la formation pertinente diminue. Moins d'étudiants en médecine se disent prêts à y travailler ultérieurement. Une proportion restreinte d'entre eux se spécialise en gériatrie. La recherche sur la douleur manque de fonds...
    Madame Cooper, je regrette mais je dois vous demander de conclure, car nous devons entendre d'autres témoins.
    Oh! Je vois. J'ai presque terminé.
    Je vous prierais d'être très brève.
    Très bien.
    Je tiens à vous remercier. Je voudrais que vous sachiez que la Coalition canadienne contre la douleur et la Société canadienne pour le traitement de la douleur ont élaboré une stratégie nationale sur la douleur.
    Merci beaucoup.
    Nous entendrons maintenant la représentante de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie de nous donner la chance d'échanger avec vous sur le sujet des personnes âgées souffrant de maladies chroniques. C'est important pour nous. Les 60 000 membres de la fédération côtoient les personnes âgées dans différents milieux et ils sont très préoccupés...

[Traduction]

    Je m'excuse, mais la sonnerie d’appel s’étant fait entendre, nous devons nous rendre à la Chambre.
    La sonnerie fonctionnera pendant 30 minutes. Les travaux sont donc suspendus, le temps que nous allions voter.
    La sonnerie fonctionnera pendant 30 minutes, ce qui nous amènera à 16 h 35. Nous aurons besoin de 15 minutes supplémentaires, et il sera alors 17 heures. Le comité souhaitera-t-il revenir pour finir d'entendre les témoins ou… Je sais que c'est passablement serré.
    Docteure Fry.

  (1610)  

    Je suis en retard, et je tiens à m'en excuser auprès de mes collègues et de nos témoins également. Je dois vous avouer que je trouve très difficile de me déplacer en fauteuil roulant pour me rendre ici.
    Deux de mes collègues et moi avons dû patienter. M. Sellah attend encore l'autobus qui le transportera ici. Il n'y en a qu'un autobus n'ayant qu'une seule place pour les personnes en fauteuil roulant. Et je devrai le prendre de nouveau pour arriver à la Chambre à temps pour le vote et en revenir.
    Je me suis portée volontaire dans le cadre de cette expérience sur laquelle nous pourrions tabler pour améliorer l'accès des personnes à mobilité réduite au Parlement.
    Docteure Fry, je vous ai aperçue à votre arrivée. Je vous admire beaucoup, car vous êtes restée assise dans le fauteuil roulant pour aller jusqu'au bout de cette expérience.
    Je dois m'excuser auprès des témoins. Nous aimerions vous convoquer de nouveau. Est-ce possible?
    Seriez-vous en mesure de comparaître ultérieurement?
    Monsieur Carrie.
    Madame la présidente, j'attendais pour voir si vous alliez le proposer. Nos témoins d'aujourd'hui ont dû voyager pour venir témoigner. J'estime que leur témoignage nous est très utile. J'ai été touché par les propos de Mme Cooper et par le courage qu'elle a manifesté en comparaissant.
    Malheureusement, de telles choses se produisent. Je demanderais donc au comité, par souci de justice, d'inviter les témoins à comparaître de nouveau, parce que nous ne pourrons pas entendre complètement leurs témoignages aujourd'hui.
    Pourriez-vous présenter une motion en ce sens?
    Pouvons-nous simplement nous entendre sur ce point? Merci.
    Nous vous nous offrons nos excuses les plus sincères. Nous n'avons pas d'autre choix. Nous en sommes profondément désolés. Je devrai suspendre les travaux, mais nous vous convoquerons de nouveau.
    Merci. La séance est levée.
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