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Je déclare la séance ouverte.
Comme vous pouvez le constater, nous avons un ordre du jour assez bien rempli. J'ai demandé aux représentants des trois ministères — Agriculture, Industrie et Finances — de rester avec nous durant la première heure. Ensuite, comme vous pouvez également le constater, durant le reste de la journée, nous allons recevoir des témoins de différents secteurs. Ce sont bien entendu des témoins qu'avaient proposés des députés du gouvernement et de l'opposition. Je crois que nous avons une bonne séance en perspective.
Durant la première heure, nous aurons avec nous des représentants des ministères de l'Agriculture, des Finances et de l'Industrie. Avant qu'on entende leur témoignage, je vais seulement vous lire un extrait du O'Brien et Bosc, pour vous rappeler le genre de questions auxquelles les représentants devront répondre. Je cite un passage de la page 1068:
Une attention particulière est accordée à l'interrogation de fonctionnaires. L'obligation faite aux témoins de répondre à toutes les questions posées par un comité doit être mise en équilibre avec le rôle que jouent les fonctionnaires lorsqu'ils donnent des avis confidentiels à leur ministre. La tradition veut qu'on envisage ce rôle par rapport à la mise en oeuvre et à l'exécution de la politique gouvernementale plutôt qu'à la détermination de celle-ci. En conséquence, on a dispensé les fonctionnaires de commenter les décisions stratégiques prises par le gouvernement. En outre, les comités acceptent ordinairement les raisons données par un fonctionnaire pour refuser de répondre à une question précise ou à une série de questions supposant l'expression d'un avis juridique, pouvant être considérées comme en conflit avec leur responsabilité envers leur ministre, débordant de leur domaine de responsabilité, ou pouvant influer sur des opérations commerciales.
Je vous ai lu cet extrait à titre informatif.
Nous recevons aujourd'hui Claude Carrière, du ministère de l'Agriculture, John Connell, du ministère de l'Industrie, et Jeremy Rudin, du ministère des Finances.
Monsieur Carrière, vous allez faire, je crois, un exposé au nom des trois, et ensuite, nous allons passer aux questions.
Monsieur Carrière, vous disposez des 10 minutes.
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Monsieur le président, je suis accompagné de Jeremy Rudin, sous-ministre adjoint à la Direction de la politique du secteur financier du ministère des Finances, et de John Connell, sous-ministre adjoint délégué au Secteur de la politique stratégique du ministère de l'Industrie.
Mes collègues sont ici avec moi aujourd'hui parce que la responsabilité des coopératives est partagée par les trois ministères. Je me réjouis certainement de cette occasion qui m'est donnée de m'adresser au comité et de contribuer à vos discussions sur ce secteur vital de notre économie. Cependant, avant de le faire, j'aimerais placer la question dans le plus vaste contexte de la contribution de notre ministère à la stratégie globale de réduction du déficit du gouvernement dans le cadre du Plan d'action économique de 2012.
Comme nous le savons tous, le gouvernement entend réduire son empreinte et demande aux ministères de se concentrer sur leurs mandats de base. Bien que la majeure partie de ce que fait notre ministère profite directement au Canada rural, nos principaux groupes d'intervenants demeurent les producteurs et les transformateurs agricoles. Il s'agit de la fin d'un cycle où les programmes étaient systématiquement renouvelés et le début d'un processus continu d'évaluation par rapport à des objectifs, processus au cours duquel certaines initiatives seront aussi graduellement éliminées.
Les programmes du Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives ont atteint leurs objectifs et, comme bien des programmes dans presque tous les ministères, ils n'ont pas été renouvelés. Il ne fait aucun doute que le Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives a réalisé un solide travail de base qui permet aux collectivités d'interagir plus efficacement et de profiter des possibilités qui s'offrent pour promouvoir leurs propres intérêts. Cela dit, je pense que pratiquement chaque ministère au sein de l'administration publique a une part de responsabilité dans le développement rural, et en particulier dans le développement économique. Chaque ministère doit veiller à ce que ses programmes et ses politiques tiennent compte des situations particulières des Canadiens des régions rurales. En d'autres termes, ces programmes et ces politiques devraient être vus à travers ce qu'on a appelé la lentille rurale. Dans cette perspective, nous nous sommes engagés à collaborer avec d'autres ministères fédéraux pour nous assurer que les préoccupations des régions rurales font partie intégrante des décisions en matière de politiques et de programmes.
Pour faciliter cette approche, nous disposerons d'un groupe restreint mais spécialisé voué à la coordination stratégique et à la recherche dont le rôle à l'avenir sera d'optimiser les ressources et d'infléchir les décisions d'autres ministères fédéraux. Ce groupe spécialisé pourra faire usage des ressources de l'ensemble du ministère et contribuera à intégrer le travail d'Agriculture et Agroalimentaire Canada et des organismes de son portefeuille, dans l'intérêt des Canadiens des régions rurales.
[Français]
Bien entendu, les coopératives continueront à jouer un rôle déterminant dans cette nouvelle approche. Je suis persuadé que les députés autour de cette table sont pleinement au fait de l'importante contribution qu'apportent les coopératives à l'économie du Canada en procurant des biens, des services et des emplois aux Canadiens, tant dans les petites collectivités que dans les grandes villes.
Le secteur coopératif continue à prouver qu'il peut être une structure commerciale compétitive et rentable dans l'économie d'aujourd'hui, répondant aux besoins et aux particularités des marchés et des collectivités qu'il dessert. Les agriculteurs canadiens peuvent compter sur un réseau de coopératives agricoles très fort, qui leur assure un bon contrôle des coûts de production, l'accès au marché et un transfert d'habiletés et d'expertise.
Le gouvernement a montré qu'il soutenait les coopératives de diverses façons au fil des ans. À titre d'exemple, je citerais la Loi canadienne sur les prêts agricoles, un programme de garantie de prêts de financement qui facilite l'accès des coopératives au crédit. Aux termes de cette loi, les coopératives agricoles peuvent avoir droit à des prêts à hauteur de 3 millions de dollars pour transformer, distribuer ou mettre en marché des produits agricoles. Le ministère et les organisations de son portefeuille continuent à offrir un large éventail de programmes destinés aux coopératives agricoles.
Cela me donne la chance de parler d'AgriGuichet, qu'on appelle en anglais AgPal. Il s'agit d'un nouvel outil de recherche sur le Web mis au point par le ministère pour aider les producteurs et les autres intervenants du secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire à trouver les programmes et services fédéraux, provinciaux et territoriaux s'appliquant précisément à eux. Les coopératives agricoles peuvent recourir à cet outil pour trouver une grande variété de programmes.
Certains programmes, comme Éducation en agriculture et Agri-débouchés, sont disponibles aux coopératives actuelles et nouvelles qui reflètent les secteurs où elles évoluent, les besoins de ceux qui les dirigent et de ceux qui utilisent leurs services.
Tous ces renseignements figurent dans le Guide des programmes gouvernementaux accessibles aux coopératives, dont un exemplaire a déjà été envoyé à des milliers de coopératives dans l'ensemble du pays. C'est un guide qui est également disponible sur le Web.
Les provinces et les territoires jouent également un rôle important dans la découverte de façons innovatrices de financer les coopératives et leur développement.
De plus, le gouvernement se réjouit de soutenir la décision des Nations Unies, qui ont fait de 2012 l'Année internationale des coopératives. Nous collaborons avec l'Association des coopératives du Canada et le Conseil canadien de la coopération et de la mutualité à promouvoir cette année internationale et à en faire un succès, notamment lors du Sommet international des coopératives qui se tiendra en octobre à Québec. Respectant son engagement, le ministère collaborera avec le secteur afin de préparer un rapport définitif aux Nations Unies sur l'année 2012 au Canada.
En résumé, alors que notre ministère se concentre davantage sur son mandat principal, les besoins et le potentiel du Canada rural et du secteur coopératif continueront à éclairer nos politiques et nos programmes au ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et dans l'ensemble de l'administration publique.
Encore une fois, je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de participer à cette discussion.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'être ici ce matin.
On dénombre plus de 9000 coopératives au Canada et 18 millions de membres. Historiquement, on sait que cela a commencé très modestement, au début des années 1900. Chaque communauté avait des gens, des besoins et des services spécifiques. Il y a eu beaucoup de regroupements dans le domaine de l'agriculture et dans celui des services financiers, notamment. Au Québec, les coopératives d'assurance, dont Promutuel, ont vraiment marqué l'histoire de notre pays elles aussi.
Il y a eu une tendance marquée à voir apparaître des coopératives dans les petits milieux, mais aussi dans des plus grands milieux. Elles ont concurrencé certains services que les villes offraient. Si on se rappelle un peu l'histoire, on sait que les banques étaient surtout situées dans les villes et les grandes communautés. Elles n'allaient pas nécessairement donner de services aux petites communautés, comme celle d'où est issu le Mouvement Desjardins, qui offrait davantage un service de proximité.
Puis, il y a 25 ou 30 ans, on a remarqué la tendance des coopératives à se regrouper en fédérations, pour se donner des services à elles-mêmes. Elles avaient besoin d'expertise et d'immeubles pour se gérer et se vérifier entre elles. Depuis 25 ans, on remarque aussi beaucoup de fusions. Avant, on voyait souvent deux coopératives fusionner. Aujourd'hui, 10, 12, 15 et parfois même jusqu'à 20 coopératives fusionnent pour se donner des services.
Pensez-vous que cette tendance va demeurer? Où s'arrêtera-t-elle? Quels défis cela peut-il entraîner pour les coopératives? Généralement, les gens sont fiers d'être membres d'une coopérative, d'avoir une part active. Cependant, quand elles deviennent plus grosses, on sent moins ce sentiment d'appartenance chez les membres. On commence à ressentir cela dans le milieu. Les membres trouvent que leur coopérative est devenue tellement grosse, mais tellement loin de ce qu'était l'initiative de base.
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Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité. Je m'appelle Denyse Guy et je suis la directrice générale de l'Association des coopératives du Canada, l'ACC.
J'aimerais tout d'abord vous remercier d'avoir invité l'ACC à participer à ces séances historiques sur le secteur coopératif. Il est tout à fait à propos que ces audiences aient lieu en 2012, qui a été déclaré l'Année internationale des coopératives par l'Assemblée générale des Nations Unies.
L'ONU a demandé à tous les États membres de prendre des mesures qui permettront de soutenir le développement des coopératives. Le comité chargé de superviser la participation du Canada à l'Année internationale des coopératives, qui comprend des dirigeants du secteur coopératif canadien ainsi que le directeur exécutif du Secrétariat des affaires rurales et des coopératives du gouvernement fédéral, a fixé trois grands objectifs pour 2012: sensibiliser davantage le public aux coopératives et à la contribution socio-économique du modèle d'affaires coopératif; soutenir la croissance et la durabilité des coopératives; mettre sur pied des initiatives qui porteront des fruits au-delà du 31 décembre 2012.
L'Association des coopératives du Canada est une organisation nationale qui représente des coopératives et des caisses de crédit au Canada. Il est à espérer que les séances du comité permettront de comprendre pourquoi le secteur coopératif a besoin d'un partenariat solide avec le gouvernement fédéral.
Comme vous le savez, on compte 9 000 coopératives au Canada, qui représentent 18 millions de membres et plus de 150 000 emplois. Le secteur coopératif est bien ancré dans le paysage canadien, dans chaque coin du pays. On trouve des coopératives dans différentes régions et différents secteurs du Canada.
J'aimerais vous parler de certaines coopératives qui sont bien établies au Canada, qui sont membres de l'ACC et qui ne sont pas représentées ici aujourd'hui.
Arctic Co-operatives Limited — que vous avez peut-être vue aux actualités du matin de CTV au cours des deux derniers jours — est une fédération de services qui appartient à 31 coopératives communautaires du Nunavut et des Territoire-du-Nord-Ouest. Cette fédération coordonne les ressources, renforce le pouvoir d'achat de ses membres et fournit un soutien opérationnel et technique aux coopératives communautaires qui exploitent des magasins d'alimentation, des postes d'essence, des hôtels et des entreprises de mise en marché d'oeuvres d'art et d'artisanat.
La Federated Co-operatives Limited est une organisation aux multiples facettes, qui appartient à environ 235 coopératives de détail réparties dans l'Ouest canadien. Ces coopératives en sont les membres propriétaires. La Federated Co-op fournit à ces derniers des services de vente en gros, de fabrication, de marketing et d'administration, sous la forme de provenderies, de magasins d'alimentation, d'installations pétrolières et d'une raffinerie.
Co-op Atlantic est le deuxième grossiste coopératif régional au Canada et la plus importante entreprise coopérative au Canada atlantique. Co-op Atlantic a son siège à Moncton et regroupe plus d'une centaine d'entreprises coopératives. L'organisation fournit des services et des produits dans les secteurs de l'alimentation, de l'agriculture, de l'énergie, du logement social et de l'immobilier à des organismes et entreprises dans plus de 150 communautés.
Ce sont de grandes coopératives, bien établies, et il faut savoir qu'il existe des coopératives de toutes les tailles et de toutes les formes. Dans vos circonscriptions, les coopératives prennent différentes formes et oeuvrent dans différents domaines: agriculture, logement, services de garde, alimentation, services de soins de santé, approvisionnement en eau, stations de radio et fabrication. La liste est longue. Les possibilités sont infinies. Elles sont déjà à l'oeuvre dans vos patelins.
L'innovation caractérise les modèles coopératifs. Non seulement les coopératives sont à l'oeuvre dans vos circonscriptions et aident vos électeurs, mais elles font preuve d'innovation pour répondre à des besoins ressentis par les communautés et les citoyens que vous représentez. Le modèle coopératif de propriété est assez souple, résilient, réceptif et adaptable pour répondre aux préoccupations des communautés locales.
Le service de garde Aashiana, à Ajax, est un exemple de cette innovation. Cette coopérative offre des services de garde à ses membres, qui sont de nouveaux Canadiens, et elle permet à des femmes de réaliser des économies d'échelle en achetant de la nourriture en vrac, en partageant les coûts d'administration et de commercialisation et en ayant accès à des possibilités de perfectionnement professionnel.
HealthConnex, qui se trouve à Truro, en Nouvelle-Écosse, est en train de changer la relation médecin-patient en mettant l'accent sur les soins de santé plutôt que sur les soins au malade. Grâce à divers services basés sur le Web, HealthConnex donne aux médecins plus de temps pour se concentrer sur le bien-être et le maintien en santé des personnes.
Modo, la coopérative automobile de Vancouver, qui est la plus importante au Canada, existe maintenant depuis 15 ans. Il s'agit d'une coopérative à but non lucratif, qui a été mise sur pied en 1997 pour favoriser le partage de voitures et sensibiliser la population aux avantages qu'offre le partage de voitures par rapport à la propriété individuelle.
Ce ne sont que quelques exemples d'innovation. Les coopératives sont le moteur de l'économie canadienne, ce qui a été dit au cours de nos trois autres entretiens.
Les coopératives comportent un modèle de gouvernance unique, mais ce sont aussi des entreprises. À ce titre, elles fournissent des services nécessaires à leurs membres et à tous les Canadiens. Elles assurent 150 000 emplois au Canada. Elles contribuent à la création d'emplois. Il y a au moins 2 000 communautés où l'on trouve au moins une coopérative de crédit ou une caisse populaire, et plus de 1 100 communautés où le seul fournisseur de services financiers est une coopérative.
Les coopératives font de l'argent. Leurs actifs sont évalués à 330 milliards de dollars. Elles paient des impôts. La Loi de l'impôt sur le revenu ne favorise pas les coopératives par rapport aux autres types d'entreprises. Que ce soit un syndicat de blé, une coopérative laitière, une coopérative de détail ou de gros, elles payent toutes des impôts selon les mêmes barèmes et les mêmes règles.
Les coopératives favorisent et créent l'innovation. Je vous ai présenté différents types de modèles. Ils ont en commun une bonne gouvernance. Ce sont des entreprises dirigées démocratiquement, qui visent à répondre aux besoins socio-économiques de leurs membres.
Les coopératives sont non partisanes. Elles ont démontré qu'elles favorisent l'entraide en permettant aux gens de travailler ensemble à la réalisation de buts communs. Leurs membres sont de tous les partis politiques.
Les coopératives sont des entreprises de forme unique. Elles constituent une force économique depuis plus de 100 ans. Elles ont bâti le Canada. Elles ont permis d'établir des communautés d'un océan à l'autre. Les coopératives sont des entreprises, mais des entreprises différentes. Elles sont axées sur la communauté et animées par des valeurs. Elles ne se soucient pas uniquement de leur bilan, mais aussi des besoins de leurs membres et de la qualité de vie des communautés. Une coopérative appartient conjointement aux membres qui utilisent ses services. Tous les membres d'une coopérative ont des droits de vote égaux et appliquent le principe démocratique « un membre, une voix ». Ce sont là des valeurs que les Canadiens ont à coeur.
En échange, tous les membres partagent les profits de la coopération, selon l'utilisation qu'ils font des services coopératifs.
La mise sur pied d'une coopérative n'est pas chose facile, vous pouvez me croire. J'oeuvre dans ce domaine depuis des années. Aucun guide de développement ne répondra à toutes les questions. Malheureusement, les services offerts aux entreprises par le gouvernement fédéral ne répondent pas aux besoins du secteur. Bien sûr, nous avons un livre et beaucoup de services, mais ils ne répondent pas aux besoins du secteur.
Le modèle d'affaires des coopératives n'est pas reconnu dans le langage qu'utilise le gouvernement dans ce domaine. Toutefois, le taux de survie des coopératives est plus élevé que celui des entreprises traditionnelles, comme il a été mentionné précédemment. Deux études réalisées au Québec et d'autres menées en Colombie-Britannique et en Alberta ont établi des statistiques sur le taux de survie des coopératives.
Notre secteur ne demande pas de cadeau ni de traitement de faveur. Il souhaite simplement avoir accès à ce qui est déjà offert aux autres entreprises canadiennes. En même temps, il faut comprendre que notre modèle d'affaires est unique.
Les coopératives ont de bonnes relations avec le gouvernement. Le paysage dans lequel elles évoluent a récemment changé, de même que notre façon de penser. Dans le cadre du plan d'action de réduction du déficit mis en oeuvre par le budget de 2012, Agriculture et Agroalimentaire Canada a réduit ses dépenses de 10 p. 100. Nous le savons tous. Il a aboli le programme de l'IDC et a réduit le rôle du Canada dans le secrétariat des coopératives.
Le secteur coopératif comprend pourquoi ces coupes étaient nécessaires et appuie les efforts déployés par le gouvernement en vue d'équilibrer le budget. Ces compressions ne signifient pas la fin des relations entre le secteur coopératif et le gouvernement fédéral, mais offrent plutôt l'occasion d'emprunter une nouvelle direction.
Quelles sont donc les difficultés qu'éprouvent les coopératives qui cherchent à obtenir du financement auprès du gouvernement fédéral? En raison de son modèle de propriété particulier, une coopérative est différente des autres petites et moyennes entreprises. Lorsque nous comparons les deux modèles, nous voyons à quelles difficultés se heurtent les coopératives qui essaient d'accéder au financement et aux programmes fédéraux offerts présentement aux PME. Les nouvelles coopératives n'ont pas accès à des capitaux propres et n'ont pas d'antécédents en affaires; par conséquent, on a tendance à les laisser pour compte. Cette situation est aussi en partie attribuable au fait que les personnes qui gèrent les programmes d'aide aux entreprises connaissent peu les coopératives et la façon dont elles fonctionnent.
L'accès au financement est un problème de longue date pour les coopératives, si bien que bon nombre ont renoncé à travailler avec le gouvernement fédéral. Un des principaux facteurs qui empêchent les coopératives d'accéder au financement et aux programmes fédéraux, c'est que les fonctionnaires ne comprennent pas ce qu'est une coopérative. La plupart considèrent que ce n'est pas un modèle d'affaires sérieux. Dans leur langage, les programmes fédéraux actuels s'adressent aux sociétés, aux partenariats, aux entreprises à propriétaire unique et aux organismes à but non lucratif, mais rarement aux coopératives.
On ne comprend pas la propriété. Une coopérative est une entreprise qui appartient aux membres qui utilisent ses services, achètent ses biens, transforment ses produits ou travaillent pour elle. Le fait que les membres des coopératives ne peuvent fournir de garanties personnelles est perçu comme un manque de sécurité. Les demandes présentées par les coopératives ne cadrent pas facilement avec les programmes gouvernementaux, qui sont surtout conçus pour les entreprises privées. Si vous n'entrez pas dans le moule, vous n'êtes pas admissible.
Un nouveau centre de responsabilité doit être établi au sein du ministère de l'Industrie du Canada. Agriculture et Agroalimentaire Canada a depuis toujours été le ministère fédéral responsable des coopératives. Le secteur coopératif aimerait qu'Industrie Canada joue ce rôle. La diversité du secteur coopératif correspond beaucoup mieux à ce que fait Industrie Canada, en comparaison avec le ministère de l'Agriculture, qui assume présentement cette responsabilité.
Le partenariat entre Agriculture Canada et le secteur coopératif canadien a été bon, mais le secteur ne se limite pas à l'agriculture et à la production agricole. Les coopératives sont présentes dans de nombreux domaines, comme la vente au détail, la fabrication, les services financiers, l'assurance, le logement, les soins de santé, les services sociaux, les ressources naturelles, les services publics, l'énergie et l'eau, les transports, les services professionnels et techniques, le secteur culturel et le tourisme.
Un partenariat entre Industrie Canada et le secteur coopératif serait tout naturel. Le modèle coopératif peut aider non seulement Industrie Canada, mais tous les ministères, organismes et sociétés d'État du gouvernement fédéral à mettre en oeuvre leurs politiques. Nous proposons d'aborder les politiques et les programmes du point de vue des coopératives pour voir comment celles-ci peuvent être mieux utilisées au sein du gouvernement.
Bonjour. Je tiens à remercier le comité de nous avoir donné l'occasion de présenter le point de vue du secteur bancaire sur le statut des coopératives au Canada.
Mon intervention aujourd'hui sera axée sur les coopératives financières.
L'Association des banquiers canadiens représente 54 banques membres, des banques bien gérées et bien capitalisées, qui oeuvrent sur un marché concurrentiel soumis à une supervision stricte. Un système bancaire solide et stable est la pierre angulaire d'une économie saine, et l'ABC croit que les coopératives de crédit font partie intégrante d'un système financier solide et concurrentiel.
J'aimerais préciser que, lorsque je parle des coopératives, j'inclus les caisses populaires, que ce soit au Québec ou à l'extérieur du Québec.
Un secteur financier solide et stable facilite l'essor des entreprises et permet aux Canadiens de s'acheter une maison, d'épargner pour les études de leurs enfants et de constituer une épargne-retraite. Les consommateurs et les entreprises au Canada bénéficient d'un large choix de produits et de services financiers accessibles et abordables, tels que les comptes de chèques et d'épargne, les produits d'assurance et de placement, ainsi que les services de financement et les prêts hypothécaires. Par ailleurs, la compétition pour la prestation de ces produits et services est tellement féroce que les banques se retrouvent en concurrence dynamique non seulement entre elles, mais également avec une myriade d'autres fournisseurs de services financiers, notamment les coopératives de crédit. Ces institutions offrent des produits et des services similaires aux produits et services offerts par les banques.
Le Canada, dont 99 p. 100 de la population est titulaire d'un compte auprès d'une institution financière, dispose de l'un des systèmes financiers les plus accessibles au monde lorsqu'il s'agit, par exemple, de comptes de chèques et d'épargne. Les banques offrent sur le marché plus de 100 forfaits bancaires, ce qui fait que les jeunes, les personnes âgées et les organismes sans but lucratif peuvent profiter de comptes à frais modiques ou sans aucuns frais. En effet, 30 p. 100 des Canadiens ne paient aucuns frais de service sur leur compte de chèques ou d'épargne de base. Les coopératives de crédit offrent également leurs propres forfaits.
Les Canadiens sont bien conscients du rôle des coopératives de crédit ainsi que du niveau de la concurrence et du choix dans les services financiers au Canada. Au total, 92 p. 100 des Canadiens pensent que les consommateurs disposent d'un bon choix de produits financiers. En effet, les coopératives de crédit occupent une part du marché équivalente à 15 p. 100 pour les dépôts, 12 p. 100 pour les prêts hypothécaires à l'habitation et 19 p. 100 pour les crédits aux petites et moyennes entreprises.
J'aimerais commenter la grande évolution que nous constatons au sein des coopératives de crédit au Canada. Afin de maintenir le niveau élevé de concurrence et de choix dont bénéficient les consommateurs et les entreprises au pays, le mouvement des coopératives de crédit a procédé à une réorganisation considérable. En effet, les coopératives de crédit, et conséquemment les centrales qui les soutiennent, ont effectué des fusions en vue d'appuyer leurs projets d'expansion et de profiter des économies d'échelle.
De plus en plus, les coopératives de crédit s'éloignent de leur modèle traditionnel à une ou deux succursales. À l'échelle du système de coopératives actuel, on constate une baisse du nombre effectif de coopératives de crédit, accompagnée, par contre, d'une expansion de leur réseau de succursales. Au Canada, une des coopératives de crédit compte près de 100 succursales, trois ont entre 50 et 75 succursales, 12 ont entre 20 et 50 succursales et 28 coopératives de crédit comptent de 10 à 20 succursales. La taille de ces réseaux de succursales est comparable à la taille de nos petites et moyennes banques.
Cette croissance du réseau de succursales va de pair avec une croissance du bilan. Au cours des 10 dernières années, le volume du bilan de la coopérative de crédit moyenne a triplé. Il est vrai que la coopérative de crédit moyenne est en expansion, mais il est vrai aussi que les coopératives de crédit les plus importantes se sont taillé la part du lion dans certaines provinces. En Alberta, par exemple, les deux plus grandes coopératives de crédit détiennent 73 p. 100 des actifs des coopératives de crédit de la province, la plus grande institution détenant 58 p. 100 des actifs. En Colombie-Britannique, en Saskatchewan et en Ontario, les parts des deux plus grandes institutions de chaque province sont respectivement de 51, 40 et 37 p. 100.
Afin de pouvoir fournir un appui efficace en matière de gestion des liquidités, de traitement des paiements et d'autres services à ces coopératives de crédit en croissance, les centrales de coopératives de crédit dans certaines provinces ont, elles aussi, procédé à des fusions. En 2008, les centrales de coopératives de crédit en Colombie-Britannique et en Ontario se sont jointes pour former la Central 1 Credit Union, alors que, en 2011, les centrales de l'Île-du-Prince-Édouard, du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse ont formé l'Atlantic Central. Par ailleurs, des discussions ont eu lieu en vue d'une plus grande consolidation au niveau des centrales. Je tiens à souligner que ces centrales sont sous réglementation fédérale alors que les coopératives de crédit sont sous réglementation provinciale.
Parlons à présent de l'initiative du gouvernement visant la création de coopératives de crédit fédérales.
Au fur et à mesure que les coopératives de crédit évoluent et apportent davantage de concurrence et de choix sur le marché financier, au-delà des frontières provinciales, il est essentiel que leur croissance soit adéquatement encadrée, afin que chaque coopérative de crédit de même que le système financier national dans son ensemble bénéficient d'un environnement sain et sécuritaire.
C'est pourquoi l'ABC appuie résolument les efforts du gouvernement fédéral visant l'établissement d'un cadre juridique permettant aux coopératives de crédit d'être incorporées et réglementées au niveau fédéral.
Le projet de cadre réglementaire, qui fait actuellement l'objet de consultations soutenues, soumet les coopératives de crédit fédérales aux mêmes règles de prudence, de capitalisation et de liquidité que les banques, et leur confère les mêmes pouvoirs commerciaux et d'investissement. Parallèlement, le projet de cadre réglementaire donne aux coopératives de crédit la possibilité d'élargir les choix qu'elles offrent aux consommateurs, en améliorant les services aux membres actuels et en attirant de nouveaux membres au-delà des frontières provinciales.
Bien que les coopératives de crédit provinciales puissent incorporer une filiale bancaire ou établir une association de détail, ces options restent lourdes et ne permettent pas de tirer avantage des économies d'échelle. La loi sur les coopératives de crédit fédérales prévoit un moyen plus direct, plus simple et plus homogène pour faciliter les opérations dans plus d'une province. L'ABC est d'avis que l'ajout d'une option fédérale offre une souplesse accrue dans l'exploitation, la supervision et la réglementation des coopératives de crédit au Canada.
Les coopératives de crédit peuvent rester sous réglementation provinciale, ce qui veut dire que leurs activités seront restreintes à leur province d'incorporation. Pour les coopératives de crédit qui désirent croître en offrant leurs services à des membres dans plus d'une province, le cadre fédéral offre une option intéressante.
Il importe que le cadre règlementaire des coopératives de crédit ne comporte aucun chevauchement ni aucune lacune. Par exemple, des organismes de réglementation provinciaux ont exprimé leurs inquiétudes à l'égard de quelques coopératives de crédit qui profitent des lacunes dans la loi et la réglementation provinciales afin de faciliter des dépôts transfrontaliers. Cette situation peut créer de la confusion au sujet de la nature de ces institutions et de l'organe qui en est responsable, ainsi que sur la nature de la garantie du dépôt. Par contre, le cadre fédéral fournit une voie simple, claire et non équivoque pour joindre les membres partout au pays.
La loi sur les coopératives de crédit fédérales est un modèle adéquat pour remédier aux lacunes législatives et règlementaires. Les coopératives de crédit incorporées selon le modèle fédéral profiteront de la surveillance du Bureau du surintendant des institutions financières et de l'assurance-dépôt offerte par la Société d'assurance-dépôt du Canada, alors que les consommateurs et les entreprises au Canada profiteront d'un plus grand choix et d'une concurrence accrue.
En bref, la loi sur les coopératives de crédit fédérales contribue grandement à la création d'un régime réglementaire adéquat, efficace et efficient pour un mouvement moderne de coopératives de crédit au Canada.
Merci infiniment du temps que vous m'avez accordé. Je serai ravi de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président et membres du comité, de nous avoir invités à faire partie de cette étude très importante sur les occasions et les défis auxquels fait face actuellement le secteur des coopératives au Canada.
Je m'appelle Stephen Fitzpatrick et je suis vice-président des services aux entreprises et directeur des finances de la Centrale des caisses de crédit du Canada. À ce titre, je vous parlerai du point de vue des caisses de crédit, des institutions financières à service complet qui appartiennent en coopérative à leurs membres individuels et commerciaux.
Je vais aborder deux ou trois des sujets dont mon collègue a parlé mais, comme vous pouvez vous y attendre, il se peut que nous ayons des points de vue légèrement différents sur certaines questions.
Je devais être accompagné par M. Denis Laframboise, qui est le président et chef de la direction de Your Credit Union, une caisse de crédit d'Ottawa. Toutefois, il a dû régler des affaires personnelles ce matin. Il sera peut-être ici un peu plus tard, mais nous allons aller de l'avant.
J'aimerais tout d'abord vous parler du contexte dans lequel évoluent les coopératives de crédit. Le système canadien des caisses de crédit est un compétiteur dynamique dans le secteur des services financiers. La Centrale des caisses de crédit du Canada, aussi appelée « Centrale du Canada », est l'association professionnelle nationale pour les organisations qui en sont membres, c'est-à-dire les centrales, et, par leur entremise, pour 363 caisses de crédit canadiennes.
Les caisses de crédit du Canada fonctionnent avec un réseau de succursales comptant plus de 1 700 emplacements, et ces succursales servent plus de 5 millions de membres et emploient presque 26 000 personnes. Presque le quart de ces succursales desservent de petites communautés pour qui elles constituent le seul fournisseur de services financiers.
Pour ces coopératives financières qui appartiennent à leurs membres, le service continue d'être la motivation première, et cet engagement à l'égard du service est de plus en plus reconnu. Pour la septième année consécutive, les Canadiens ont placé les caisses de crédit au premier rang pour l'excellence des services à la clientèle, parmi l'ensemble des institutions financières, dépassant largement les banques canadiennes dans le classement des meilleurs services bancaires de Synovate Canada pour 2011. Les caisses de crédit se sont également distinguées dans les catégories « Donne de l'importance à mes affaires » et « Excellence des services en succursale ». De surcroît, les caisses de crédit se sont classées à égalité au premier rang des institutions financières canadiennes dans les catégories « Planification et conseils financiers » et « Excellence des services bancaires téléphoniques ».
J'aimerais maintenant souligner certaines des tendances actuelles du système canadien de caisses de crédit. Tout d'abord, les caisses de crédit continuent d'avoir un excellent rendement. Même pendant la crise économique, le système canadien des caisses de crédit a produit d'excellents résultats. À la fin de 2011, les caisses de crédit canadiennes avaient augmenté leurs actifs de 10,1 p. 100 par rapport à 2010, pour atteindre 140,2 milliards de dollars tout en générant une rentabilité record. En gros, ces actifs sont comparables à ceux de la Banque Nationale du Canada.
Notre modèle coopératif est un facteur clé de notre rendement financier solide. Nos responsabilités directes envers nos membres, qui ont chacun leur mot à dire sur notre fonctionnement, signifient que les caisses de crédit sont des prêteurs prudents et qu'elles sont naturellement portées à faire des investissements productifs dans nos communautés locales. Ce rendement financier solide a entraîné une croissance continue du nombre de membres. Aujourd'hui, plus de 5,2 millions de Canadiens sont membres d'une caisse de crédit. La croissance du nombre de membres a légèrement dépassé la croissance de la population. En dépit de la concurrence des grandes banques et des autres fournisseurs de services financiers, l'adhésion aux caisses de crédit a augmenté à un taux annuel de 1,2 p. 100 au cours des 10 dernières années. Pendant la même période, la population canadienne a connu une croissance annuelle de 1 p. 100.
La consolidation du système des caisses de crédit est une tendance qui se maintient. Depuis des décennies, certaines caisses de crédit réagissent à un environnement de plus en plus complexe, aux coûts de conformité et aux changements démographiques en regroupant leurs activités. Les fusions entre des caisses de crédit voisines, qui pensent de la même façon, offrent des solutions efficaces qui permettent de relever les défis que pose la compétitivité de notre secteur de services financiers en évolution rapide, tout en permettant des occasions de croissance et de diversification sur un marché plus important.
Bon nombre de petites et de moyennes caisses de crédit, et dernièrement de grosses caisses de crédit, continuent de mettre leurs forces en commun pour réduire les coûts indirects, se payer des nouvelles technologies et proposer une gamme plus large de meilleurs produits. Par conséquent, entre 1992 et 2011, le nombre de caisses de crédit a diminué de 726, soit un taux moyen de déclin d'environ 36 caisses de crédit par an.
Tandis que les fusions ont réduit le nombre total de caisses de crédit, le réseau de succursales, combiné avec la gamme de services bancaires électroniques offerts aux membres, demeure solide. Par exemple, au cours des 20 dernières années, le nombre de guichets automatiques bancaires dans le système a augmenté d'environ 50 p. 100.
Dans l'ensemble, les fusions des caisses de crédit ont contribué à notre dynamisme et renforcent notre engagement envers les services bancaires locaux et communautaires. Le résultat: une combinaison de petites, de moyennes et de grosses caisses de crédit qui appartiennent à des intérêts locaux et qui reflètent l'individualité et le caractère des communautés qu'elles servent.
J'aimerais parler brièvement de l'option de caisse de crédit fédérale. La consolidation et la croissance du système ont des répercussions sur la portée géographique conventionnelle des caisses de crédit. En Colombie-Britannique, par exemple, les trois caisses de crédit les plus importantes détiennent 61,5 p. 100 de l'actif du système provincial. De même, en Alberta, la caisse de crédit la plus importante détient 59,6 p. 100 de l'actif, et à Terre-Neuve-et-Labrador, la plus importante en détient 52 p. 100. Pour ces caisses de crédit, le potentiel de croissance et d'expansion le plus important se situe hors de la province d'incorporation. Voilà une des raisons pour lesquelles Centrale du Canada a accueilli avec plaisir la loi sur les caisses de crédit fédérales qui a été adoptée dans le cadre du budget de 2010. Nous avons été ravis d'entendre, la semaine dernière, qu'une ébauche de règlement avait été publiée afin de recueillir des commentaires. Nous nous réjouissons à l'idée de l'entrée en vigueur de cette loi, qui permettra aux caisses de crédit de choisir une nouvelle option qui leur permettra de saisir les occasions de croissance et d'améliorer le service qu'elles offrent à leurs membres.
Tandis que nous gérons la croissance et les attentes de plus en plus importantes de nos membres et des communautés que nous servons, les caisses de crédit font face à des défis relatifs aux marchés et à la réglementation, dans lesquels le gouvernement fédéral joue un rôle. Je souhaite attirer l'attention du comité sur deux de ces défis en particulier.
Le premier a trait aux petites entreprises. Les caisses de crédit apprécient le rôle que nous jouons au sein d'un cadre de réglementation solide afin de protéger les épargnes des Canadiens et assurer leur sécurité. Toutefois, nous partageons les préoccupations de bon nombre des députés concernant le fait que les règles sont appliquées de la même manière pour les institutions financières qui comptent 2 000 employés et celles qui en comptent une douzaine ou moins, ce qui entraîne des coûts de conformité relativement élevés pour les caisses de crédit. Dans son rapport final qu'elle a publié récemment, la Commission sur la réduction de la paperasse du gouvernement a souligné qu'une approche universelle en matière de réglementation avait tendance à imposer un fardeau indu aux petites entreprises, comme les caisses de crédit.
Nous encourageons fortement le gouvernement fédéral à donner suite à l'engagement pris dans le budget de 2011 d'obliger les organismes de réglementation à examiner la réglementation actuelle et future du point de vue des petites entreprises, afin de s'assurer que les nouvelles règles et les règles existantes n'ont pas un effet négatif sur les caisses de crédit et ne donnent pas des avantages imprévus aux institutions financières de plus grande taille.
Un autre enjeu qui préoccupe les caisses de crédit est le mandat conféré par la loi à Financement agricole Canada. Les caisses de crédit apprécient le rôle joué par Financement agricole Canada en tant que partenaire engagé qui appuie l'agriculture canadienne et ce, bon an mal an. Toutefois, FAC est dans une position anormale comparativement aux autres institutions financières de l'État. Comme l'organisme n'est pas assujetti à l'exigence de prêter d'une manière qui complète les activités des institutions financières du secteur privé, il peut devenir un concurrent féroce et direct des caisses de crédit tout en profitant des avantages du marché qui sont liés à son statut de société d'État.
FAC se trouve également dans une situation unique car, contrairement à Exportation et développement Canada et à la Banque de développement du Canada, il n'est pas assujetti à un examen parlementaire régulier de son mandat. Centrale du Canada recommande au gouvernement d'effectuer un examen public de la Loi sur Financement agricole Canada afin d'assurer que cet organisme continue à jouer un rôle pertinent sur un marché concurrentiel. Nous recommandons également que le gouvernement envisage de modifier la loi et le principe de fonctionnement de FAC afin de les rapprocher davantage de ceux de la Banque de développement du Canada et d'Exportation et développement Canada. Cela signifie, d'abord, que la loi qui régit FAC devrait faire l'objet d'un examen parlementaire régulier et, ensuite, que cette loi doit être modifiée pour que FAC fonctionne d'une manière complémentaire aux activités des prêteurs du secteur privé, plutôt que leur faire concurrence.
Monsieur le président, Centrale du Canada remercie le comité et vos collègues d'avoir entrepris cette étude importante et opportune. Cette année, au Canada, les caisses de crédit participent à des célébrations pour souligner l'Année internationale des coopératives 2012. C'est un moment idéal pour réfléchir au rôle essentiel qu'ont joué les coopératives dans le développement de notre pays et à ce que nous pouvons faire ensemble pour continuer à encourager et à développer les coopératives et les caisses de crédit en tant qu'entreprises démocratiques, réceptives et prospères.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de vous présenter quelques idées aujourd'hui. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Merci.
Eh bien, je vais revenir, moi aussi, à ce que nous disions à ce sujet. Je ne pense pas à rater une occasion; je m'attends à ce que notre comité fasse son travail, puisque nous sommes ici et que c'est l'été. Nous allons continuer de nous entretenir avec tous les experts que nous pouvons trouver. Mme Guy et moi avons parlé à plusieurs reprises au sujet des coopératives. Nous allons simplement continuer à le faire. Notre comité va rédiger un excellent rapport, à temps pour cette conférence.
Quiconque veut assister à cette conférence peut certainement le faire. Je n'ai pas encore vu de chaînes sous les tables. Nous sommes tous libres et capables d'y aller. La réponse du gouvernement pourrait aussi tenir compte de l'information recueillie au cours de la conférence. Je crois que c'est très important.
Vous avez parlé des coopératives et de la façon dont elles fonctionnent, selon le principe « un membre, un vote ». C'est la même chose ici, au Parlement.
J'aimerais parler un peu des institutions financières.
Tout d'abord, j'offre d'emblée mes excuses à M. Wrobel. Je vais comparer l'association bancaire canadienne aux coopératives de crédit pour ce qui est des services, et vous n'allez pas gagner.
Des voix: Oh, oh!
M. Joe Preston: J'ai appris très tôt dans ma vie d'entrepreneur, grâce à un excellent mentor, que la meilleure relation qu'il me fallait — après la relation que j'ai avec ma femme —, c'est celle que j'ai avec mon banquier, mon institution financière, en tant que personne d'affaires.
À l'occasion, ma femme doit avoir la même relation également.
Une voix: Mais pas votre chef?
M. Joe Preston: C'est à peu près dans cet ordre.
Mais c'est vrai, et j'ai constaté... Je vais encore faire l'éloge des coopératives de crédit. Le responsable des prêts à ma coopérative de crédit est aussi l'instructeur de baseball et un membre du club philanthropique dont je fais partie. Ce sont des choses de ce genre. Je ne dis pas que cela n'existe pas dans le secteur bancaire, mais je vous remercie d'avoir signalé que le service est votre devise. C'est une excellente chose.
L'un des documents que nous avons ici dit que 19 p. 100 des prêts que reçoivent les petites et moyennes entreprises sont consentis par des coopératives de crédit. Quel pourcentage représentent les coopératives de crédit dans le secteur bancaire au Canada? Est-ce que ce 19 p. 100 est bien au-dessus de la moyenne?
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Bonjour à tous et merci de nous avoir invités.
Je suis directeur général de la Fédération de l'habitation coopérative du Canada et je suis vice-président du groupe du logement au sein de l'Alliance coopérative internationale.
J'aimerais d'abord vous parler de logement coopératif et du rôle joué par les coopératives au bénéfice de la plus récente génération de Canadiens. J'aurais ensuite quelques observations au sujet des coopératives en général et de leur fonction au sein de l'économie canadienne. Je vous indiquerai enfin le rôle qui m'apparaît désormais raisonnable et pertinent pour le gouvernement canadien.
Vous devriez avoir dans votre trousse un document intitulé L'habitation coopérative au Canada. Vous y retrouverez, dans un ordre sans doute plus logique, la plupart des commentaires que je vais vous adresser et bien davantage. Je vais me contenter de vous présenter un bref survol de la situation.
Au Canada, la quasi-totalité des coopératives d'habitation ont été créées suivant une formule visant l'offre de logement abordable, sans but lucratif. Elles ont vu le jour au début des années 1970 dans le cadre de trois programmes gouvernementaux. On s'interrogeait alors de plus en plus sur l'efficacité véritable du recours aux fonds publics pour offrir du logement abordable aux Canadiens. En constatant que l'on créait ainsi des ghettos et des zones interdites, plutôt que des communautés, le gouvernement a jugé — avec un peu de persuasion de la part de notre secteur et d'autres intervenants — que le moment était venu d'envisager un modèle différent.
Au départ, on a eu recours aux coopératives pour créer des communautés abordables, de taille plutôt réduite, regroupant des gens de différents niveaux de revenus, contrairement au modèle monolithique et ciblé des projets de logement social malheureusement associés à une image typique de délabrement communautaire.
Trois grands programmes fédéraux se sont succédé. Le premier a été offert en 1973. Le plus récent a pris fin en 1992. Plus de 60 000 unités de logement coopératif ont été rendues accessibles grâce à ces programmes.
En outre, un vaste programme similaire a été offert en Ontario sur une période de dix ans, soit de 1986 à 1995. Il faut également noter des programmes de moindre envergure, mais tout de même efficaces, au Québec et en Colombie-Britannique. Au total, ces programmes distincts ont permis d'offrir quelque 100 000 unités de logement coopératif supplémentaires au Canada.
En général, ces programmes ont été couronnés de succès. Les coopératives sont des entreprises et certaines connaissent des difficultés financières, mais elles parviennent plus souvent qu'autrement à devenir des entités viables qui offrent du logement abordable aux Canadiens tout en développant un sentiment d'appartenance, non seulement au sein de la coopérative elle-même, mais aussi dans l'ensemble de la collectivité où elle se situe. Bien souvent, les membres des coopératives ne se limitent pas à cet engagement; ils apportent leur contribution à la collectivité toute entière. Il n'est donc pas rare de voir des anciens du milieu coopératif exercer des fonctions municipales ou communautaires, et jouer de différentes manières des rôles importants auprès de leurs concitoyens.
Malheureusement, le secteur du logement coopératif n'est guère favorisé par les stratégies d'investissement des gouvernements actuels. Le gouvernement fédéral s'est retiré du secteur du logement. Je ne suis pas ici aujourd'hui pour faire valoir que le fédéral devrait se remettre carrément à offrir des programmes de logement. Je l'exhorte toutefois à continuer de financer le logement social et de veiller à ce que les provinces et les territoires puissent compter sur une source stable de fonds à cette fin. Il revient alors à mes homologues et à moi-même de convaincre les provinces et les territoires de consacrer une partie de ces fonds au développement du logement coopératif, car nos membres souhaitent vraiment que l'on en fasse davantage.
C'est essentiellement le modèle de logement coopératif que l'on retrouve au Canada, alors que les coopératives à capitalisation ont plutôt été privilégiées dans le cadre de certains modèles européens. J'ai d'ailleurs préparé un document d'une page au sujet de ce modèle dont je vais vous entretenir brièvement.
Il y a très peu de coopératives d'habitation à capitalisation au Canada. Les condominiums remplissent en grande partie le rôle pouvant être joué par ce type de coopératives. On constate toutefois que certaines provinces souhaitent se tourner de plus en plus vers les coopératives à capitalisation pour offrir des programmes d'accession à la propriété à coût abordable. Comme il n'y a sans doute aucune province qui désire utiliser les transferts fédéraux à cette fin, on a recours pour ce faire au modèle des coopératives à capitalisation décrit dans ce document. Je ne crois pas nécessaire de vous en fournir une explication plus détaillée pour l'instant.
Nous croyons que c'est une façon logique de procéder, car on s'adresse ici à des gens qui n'ont aucune expérience comme propriétaires immobiliers. Tous peuvent ainsi travailler de concert pour s'assurer de bien cerner et comprendre les responsabilités et les risques associés au statut de propriétaire. Nous allons collaborer avec quelques provinces afin de déterminer les possibilités d'adaptation.
Au Royaume-Uni, on envisage actuellement un modèle de capitalisation avec participation. Les prix des logements demeurent très élevés dans les grandes villes britanniques, tout comme à Vancouver, Toronto, Montréal ou Calgary — la liste est longue.
Grâce au modèle de capitalisation avec participation, l'accès à la propriété devient possible pour ceux ne pouvant réunir suffisamment de capitaux en contractant un prêt hypothécaire. Ce modèle est généralement fondé sur une formule de propriété partielle du logement, assortie du paiement d'un loyer à une association d'habitation, avec l'option d'accroître jusqu'à 100 % sa part de propriété.
Nous croyons que ce modèle pourrait être appliqué au Canada, peut-être en adaptant la formule de coopérative plurilatérale. Suivant cette forme de coopérative d'habitation, les postes d'administrateurs ne sont pas accessibles qu'aux seuls membres. D'autres intervenants de la collectivité peuvent ainsi mettre à contribution leurs compétences diverses, mais toujours dans une position minoritaire de telle sorte que les membres bénéficiant des services de la coopérative en conservent le contrôle.
Je peux donc vous dire que les coopératives d'habitation sont un bel exemple de réussite. Elles favorisent vraiment le développement des communautés. Nous aimerions beaucoup qu'il y en ait davantage et nous apprécierions grandement que votre comité formule des recommandations en ce sens.
J'aimerais maintenant vous entretenir brièvement de quelques-uns des objectifs du comité. Il faut notamment cerner le rôle stratégique des coopératives au sein de notre économie. On vous en a sans doute déjà parlé aujourd'hui. Je sais que vous avez reçu la représentante de l'ACC. La différence fondamentale c'est que nous parlons de coopération axée sur les gens, plutôt que sur les profits.
Loin de moi l'idée de laisser entendre que le profit est mauvais en soi. Si l'on met toutefois l'accent sur les gens qui offrent ou utilisent les services, on obtient un modèle facilement adaptable qui contribue à la création d'emplois et à une croissance durable, mais dans une perspective axée sur les valeurs. J'estime que le moment ne saurait être mieux choisi pour que nous envisagions l'adoption d'un modèle d'affaires permettant de remplacer quelques-unes des pratiques en usage au sein du libre marché actuel par de nouvelles solutions misant davantage sur les valeurs.
Le sujet des banques a été soulevé juste avant que je prenne la parole. Je dirais que les banques canadiennes s'en tirent plutôt bien par rapport aux institutions européennes, notamment. Il est intéressant de considérer les événements récents en Grande-Bretagne, dans le contexte du scandale de la fixation des taux d'intérêt à la banque Barclays. On a assisté là-bas à un exode des dépôts bancaires vers les institutions coopératives.
Je pense que l'on verra de plus en plus les gens chercher, non pas à déloger le modèle capitaliste traditionnel de libre entreprise — j'estime que les rumeurs de son décès sont grandement exagérées —, mais à trouver des solutions de rechange mettant l'accent sur les gens et les choses qui comptent vraiment, comme l'emploi et la croissance.
Je ne m'attends pas à ce que le gouvernement garantisse la solvabilité des coopératives. J'estime cependant que celles-ci devraient bénéficier de règles du jeu équitables au sein de l'économie canadienne.
Cela me fait penser à une observation du professeur Watson qui devait témoigner aujourd'hui, mais n'a malheureusement pas pu être des nôtres. J'aurais bien aimé le rencontrer. Il a dit essentiellement que le modèle des coopératives fonctionne bien et ne nécessite pas une aide additionnelle ou un soutien particulier de la part du gouvernement.
Je me souviens que M. Bélanger a abondé dans le même sens, et je suis du même avis. Un tel appui n'est pas requis. Mais avant d'aller plus loin, je crois qu'il convient de déterminer ce qu'on entend au juste par des règles du jeu équitables.
S'il y a tout lieu de croire que les entreprises privées de toutes sortes peuvent bénéficier d'un soutien important par le truchement du régime fiscal canadien ou des programmes de subventions directes, alors il convient de revoir notre façon de faire les choses. J'ai ici une liste partielle de l'aide consentie aux secteurs du tourisme, de l'automobile — rappelez-vous les mesures de sauvetage — et du pétrole et du gaz.
Dans le rapport sur les dépenses fiscales du gouvernement du Canada rendu public le 9 janvier dernier par le ministère des Finances, on peut voir le total des sommes consenties, essentiellement sous forme d'allègements fiscaux, pour aider différents secteurs en fonction de ce qu'on considère être les intérêts stratégiques de notre économie.
Je ne vais pas essayer d'établir s'il s'agit vraiment d'intérêts stratégiques pour notre pays. Je veux toutefois faire valoir que les coopératives méritent d'être prises en compte de façon équitable. Si l'on vient en aide aux entreprises, il n'y a aucune raison que l'on n'en fasse pas autant pour les coopératives. Je souhaiterais notamment que les ressources mises à disposition par Industrie Canada puissent également bénéficier aux coopératives.
Selon moi, le moment ne saurait être mieux choisi pour que le gouvernement du Canada envisage la création d'un centre d'excellence en entrepreneuriat coopératif. On ne saurait laisser un plus bel héritage à l'issue de l'Année internationale des coopératives célébrée en 2012.
Je vous remercie.
Bonjour à tous. Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité spécial sur les coopératives de la Chambre des communes, je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole aujourd'hui.
Je m'appelle Franck Lowery et je suis premier vice-président, avocat principal et secrétaire du Groupe Co-operators limitée.
Un Canadien sur trois est membre d'une coopérative ou d'une caisse d'épargne et de crédit. Notre pays compte plus de 10 000 coopératives et caisses d'épargne et de crédit qui emploient plus de 150 000 personnes et ont un actif combiné d'environ 167 milliards de dollars.
Le Groupe Co-operators est l'une de ces entités coopératives.
Nous appartenons à 45 coopératives, centrales de caisses de crédit, fédérations de caisses populaires, organisations agricoles et regroupements semblables, totalisant 4,5 millions de membres au Canada. Fiers de notre place parmi les plus grandes organisations de notre secteur au pays, nous offrons de l'assurance et des services financiers à plus de 2 millions de Canadiens. Nous nous employons à être l'assureur de prédilection pour les coopératives et les caisses d'épargne et de crédit. Nous offrons toutefois nos services à l'ensemble des Canadiens.
À l'instar des nombreuses coopératives qui ont vu le jour pour répondre à différents besoins socioéconomiques, le Groupe Co-operators a été mis sur pied par un regroupement d'agriculteurs qui recherchaient une protection d'assurance que les marchés financiers privés ne voulaient pas leur offrir. Tout le chemin parcouru depuis nos origines modestes montre bien à quel point le modèle coopératif peut être une formule gagnante en matière d'entrepreneuriat.
Nos valeurs coopératives s'accompagnent nécessairement d'un engagement en faveur des collectivités où nous sommes présents par le truchement de l'emploi, de la philanthropie, du développement économique local et du développement coopératif. De nouvelles petites coopératives faisant leur apparition un peu partout au pays peuvent ainsi bénéficier de subventions dans le cadre de notre fonds pour le développement coopératif. En outre, nous investissons dans l'infrastructure nécessaire au développement de coopératives. L'an dernier seulement, nous avons remis plus de 650 000 $ en droits d'adhésion et cotisations à différentes associations coopératives canadiennes. Notre fondation caritative offre du soutien pour les projets durables de développement communautaire. Nous fournissons bénévolement nos services aux fins du développement coopératif, au Canada comme à l'étranger.
Notre présidente et chef de la direction, Kathy Bardswick, est cette année la représentante du Canada au sein de l'Alliance coopérative internationale (ACI), ce qui nous rend également très fiers.
Parlons maintenant du rôle des coopératives au Canada.
Nous sommes bien placés pour savoir que les coopératives contribuent au maintien du tissu social canadien et à la survie des collectivités, car elles sont mises sur pied pour répondre à des besoins communs à la faveur d'une gestion démocratique. Le modèle coopératif est la forme d'entrepreneuriat la mieux adaptée pour la réalisation des objectifs des politiques sociales et publiques. Le caractère particulier des entités coopératives s'est démarqué au cours de la crise économique des quatre dernières années alors qu'elles ont généralement pu se passer des mesures publiques de sauvetage qui ont permis la survie de nombreuses entreprises à capital-actions ou de propriété privée. Pendant que la confiance de la population à l'égard du secteur financier et des activités connexes était mise à rude épreuve, nous pouvions plus que jamais miser sur les valeurs éthiques qui sont à la base du mouvement coopératif. Comme toutes les autres entreprises, les coopératives ont besoin d'un cadre réglementaire efficient qui ne va pas à l'encontre des investissements et de la productivité. Elles ont toutefois également besoin d'un environnement tenant compte du caractère unique de leur nature coopérative.
J'aimerais surtout vous entretenir de la nécessité pour la Loi canadienne sur les coopératives de tenir compte de ce caractère unique du mouvement coopératif. Il convient de modifier cette loi si l'on souhaite que les coopératives soient plus nombreuses et obtiennent de meilleurs résultats. En l'absence des changements requis, on fera obstacle à l'émergence de différentes variétés de coopératives capables de contribuer de façon importante à la prospérité future de l'économie canadienne en offrant de bons emplois et de la stabilité. La Loi canadienne sur les coopératives doit mieux reconnaître la nature unique de l'entreprise coopérative.
En 1998, la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA) a servi de guide à la modernisation de la Loi canadienne sur les coopératives. La LCSA régit les sociétés commerciales à capital-actions, plutôt que les organisations axées sur leurs membres ou leurs valeurs comme les mutuelles, les coopératives ou les associations d'assistance mutuelle.
Comme il se doit, certaines dispositions d'application logique pour les sociétés par actions ne le sont pas nécessairement pour des organisations coopératives s'intéressant d'abord et avant tout à leurs membres.
Toujours concernant la Loi canadienne sur les coopératives, il y a trois problèmes que je souhaite porter à votre attention. Il y a d'abord la question du principe coopératif. En vertu du paragraphe 18(2), une personne peut demander au tribunal de trancher si elle croit qu'une coopérative n'est pas organisée ou exploitée ou n'exerce pas ses activités commerciales selon le principe coopératif. Ce principe défini à l'article 7 de la loi est essentiellement conforme à l'énoncé d'identité coopérative qui guide toutes les organisations coopératives sous l'égide de l'ACI.
L'article 329 de la loi permet à un tribunal ayant compétence dans le secteur où la coopérative a son siège social d'ordonner la tenue d'une vaste enquête en ouvrant droit à toutes sortes de recours possibles. En vertu de l'alinéa 313(1)a), un tribunal peut ordonner la liquidation et la dissolution d'une coopérative s'il est d'avis qu'elle n'exerce plus ses activités selon le principe coopératif.
Je vous invite à réfléchir sérieusement au sens de ces dispositions. Ainsi, une personne qui n'apprécie pas les coopératives ou qui voudrait en faire fermer une pour un motif ou un autre a accès à un recours pouvant mener à la dissolution de la coopérative sans que ses membres aient leur mot à dire, ce qui va à l'encontre du processus démocratique constituant l'essence même du mouvement coopératif. L'intéressé soumet alors sa requête à un juge qui connaît généralement très peu les coopératives et les lois qui les régissent, et rend de ce fait sa décision en s'appuyant sur la jurisprudence et les principes applicables aux sociétés par actions.
Sans vouloir trop entrer dans les détails de cette situation particulière, disons tout de même qu'il s'agit d'un recours draconien qui, même s'il n'a pas encore été utilisé à ma connaissance, dissuade de nombreuses grandes organisations d'adopter le régime de la Loi canadienne sur les coopératives. Plus une organisation prend de l'ampleur, moins elle sera donc portée à se placer sous le coup de cette loi.
Pour corriger la situation, nous vous soumettons très respectueusement qu'il faudrait confier la tâche de déterminer si la coopérative continue d'exercer ses activités suivant le principe coopératif à un groupe d'experts nommés par l'ACC et le CCCM, plutôt qu'à un tribunal normalement chargé d'appliquer les lois régissant les sociétés par actions. En outre, il faudrait modifier cette exigence en indiquant que la coopérative doit « généralement » exercer ses activités selon le principe coopératif. L'échelle des sanctions devrait débuter par un délai, de six mois par exemple, accordé à la coopérative fautive pour rectifier le tir.
Le deuxième problème touche en fait la loi dans son ensemble. Comme on l'a rédigée en s'inspirant d'une loi conçue pour les sociétés par actions, plutôt que pour des entités axées sur leurs membres, elle comporte des articles dont l'application peut être logique dans le contexte d'une société par actions pas vraiment démocratique où la valeur des votes varie en fonction de la classe d'actions détenues ou dont les actionnaires minoritaires ne jouissent d'aucun droit, mais qui n'ont pas nécessairement leur raison d'être pour une entreprise coopérative administrée suivant un régime démocratique.
Il existe de nombreuses dispositions législatives autorisant un recours pour abus afin de protéger les actionnaires minoritaires des sociétés par actions, mais rien de semblable pour les coopératives. On peut vraiment se demander comment des mesures pareilles ont pu se retrouver dans une loi sur les coopératives, mais c'est pourtant bel et bien le cas. Nous estimons qu'il convient de se pencher sur ces anomalies et d'apporter les correctifs qui s'imposent.
Le droit à la dissidence est un autre concept parfaitement logique dans le contexte de la loi régissant les sociétés par actions dont certains actionnaires minoritaires n'ont pas d'influence véritable. Dans le cas des coopératives, il est désormais cependant reconnu que les votes sont répartis entre les membres, plutôt qu'en fonction des capitaux de chacun. Par définition, le principe voulant que chaque membre ait droit à un vote s'applique aux coopératives de premier niveau.
Enfin, pour les sociétés qui sont en fait des instruments d'investissement appartenant en large partie aux détenteurs de capitaux et dont l'un des propriétaires peut vouloir acheter les parts d'un autre, il est approprié de recourir aux règles touchant les acquisitions forcées — exigeant notamment la majorité au sein d'une minorité. Ce n'est pas nécessairement la même histoire dans le cas des coopératives.
Les entités coopératives sont intrinsèquement et par définition des institutions démocratiques.
Au sein d'une démocratie, chacun a le droit d'exprimer son désaccord, mais c'est la majorité qui l'emporte et les dissidents doivent respecter la décision prise collectivement. J'ai pu l'entendre ce matin même: une personne, un vote. Nous ne pouvons pas, par exemple, nous opposer à la façon dont nos impôts sont dépensés pas plus qu'à toute autre décision de politique publique prise au nom des citoyens par les élus du peuple. Les coopératives sont des regroupements autonomes de personnes aux fins d'un objectif commun dont elles contribuent à la réalisation par la voie démocratique — comme c'est le cas pour notre pays dans son ensemble.
Dans une organisation ou une société véritablement démocratique, à partir du moment où la majorité a décidé de la voie à prendre, tous les membres doivent suivre cette voie. Même si les gens ne sont pas nécessairement d'accord, le principe démocratique autorise les élus du peuple à établir les politiques publiques. Si jamais les élus négligent de le faire, ils seront sans doute défaits et remplacés par d'autres. C'est la sanction à laquelle ils s'exposent, plutôt qu'à un recours pour abus ou à un droit de dissidence.
Mon dernier élément ne se retrouve pas dans la loi, mais nous croyons que vous devriez envisager son inclusion, avec le libellé approprié.
Depuis environ un an, il est beaucoup question des mesures de démutualisation des compagnies d'assurance de biens et risques divers au Canada. Il n'existe actuellement aucune réglementation en la matière, mais le gouvernement a fait part de son intention de soumettre des mesures semblables à des consultations publiques dans le courant de l'été.
Le secteur de l'assurance-vie a connu une vague de démutualisation il y a une dizaine d'années. Le gouvernement de l'époque a adopté des règlements régissant ces démutualisations. Nous savons tous comment les choses ont tourné.
Comme j'ai déjà travaillé pour des mutuelles, je peux vous dire comment je vois le processus de démutualisation. L'entreprise est transformée en société à capital-actions et ses actions finissent par aboutir sur les marchés publics. Le processus fait des gagnants et des perdants, généralement à l'avantage d'une faible minorité de titulaires de polices, d'administrateurs, de cadres supérieurs, de courtiers et d'experts-conseils qui touchent des bénéfices inattendus. Compte tenu du grand nombre de titulaires de polices avec participation, ce phénomène a été moins marqué dans le secteur de l'assurance-vie, mais il le sera bien davantage dans l'industrie des assurances de biens et risques divers si le gouvernement adopte des règles similaires.
C'est un processus qui n'est pas vraiment avantageux pour les mutuelles, les coopératives et les associations d'assistance mutuelle. De plus, tous les citoyens ayant contribué au fil des ans à la richesse et aux profits de ces compagnies n'en tireront aucun bénéfice. Ce sera le cas uniquement pour les titulaires de polices en vigueur ou relativement récentes, même s'ils ne sont pas vraiment à l'origine de la vaste majorité de la richesse et des surplus engrangés.
Les bénéfices engendrés par des opérations semblables font en sorte que les mutuelles, les coopératives et les associations d'assistance mutuelle ne pourront jamais atteindre collectivement une taille leur permettant de soutenir la concurrence des sociétés à capital-actions du secteur privé. Même si plusieurs générations ont contribué à créer les excédents en soutenant la nature démocratique de l'entreprise, il y en a toujours quelques-uns qui n'hésitent pas à prendre leur bénéfice en faisant fi de toute démocratie.
En fait, cela devrait procurer un avantage aux autres organisations axées sur leurs membres dans un contexte où les fusions semblent essentielles au maintien de la capacité concurrentielle, mais c'est plutôt le contraire qui se produit.
Dans le cas d'une entreprise comme le Groupe Co-operators, si nous souhaitions garder une société dans le secteur des mutuelles, en vertu d'une réglementation semblable à celle s'appliquant à la démutualisation des compagnies d'assurance vie, il nous faudrait essentiellement procéder à sa démutualisation, retirer tous les bénéfices associés au statut de membre, et en faire l'acquisition comme un actif. Ainsi, ceux qui ont accès à de grandes quantités de capitaux sont ceux que notre système autorise...
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Je n'aurai pas besoin de 10 minutes. Je tiens à remercier le comité de m'avoir invité à prendre la parole.
Je suis président de l'Ontario Mutual Insurance Association. Nous regroupons 44 compagnies mutuelles d'assurance de biens et risques divers en Ontario. Chacune de nos compagnies membres existe depuis plus de 100 ans, la doyenne remontant à plus de 150 ans. Les mutuelles ont vu le jour en Ontario, comme dans les autres régions du Canada dans la plupart des cas, en raison des problèmes d'accès à l'assurance dans les secteurs ruraux de la province à compter de 1830 jusqu'à la fin du XIXe siècle. Des agriculteurs se sont alors regroupés en s'engageant à s'aider les uns et les autres lorsque des pertes sont encourues. C'est essentiellement ce mouvement qui a été à l'origine de l'industrie de l'assurance mutuelle.
Nous sommes très fiers de pouvoir perpétuer cette tradition encore aujourd'hui. Contrairement à certaines des mutuelles dont M. Lowery nous a parlé, chacune de nos compagnies membres est fondée sur le principe de la pleine participation. Cela signifie que l'acheteur d'une police auprès d'une mutuelle de notre association en devient un membre avec droit de vote pouvant exercer tous les droits démocratiques dont jouissent les autres titulaires de police. Nous n'avons pas de structure de partage de propriété.
Dans l'ensemble, nous estimons que la formule de propriété mutuelle joue un rôle très important en favorisant la diversité du secteur des services financiers. Nous sommes conscients que différentes formes de propriété doivent cohabiter, et nous craignons que les démutualisations envisagées fassent essentiellement passer le secteur de l'assurance sous le régime des sociétés à capital-actions, souvent contrôlées par des intérêts étrangers, ou de la propriété privée fermée. Nous jugeons important que certaines entreprises présentent une formule de propriété différente.
Actuellement au Canada, il n'y a pas vraiment de problème d'accès à l'assurance pour les titulaires de police. Cependant, les choses ont la mauvaise habitude de changer, et il se pourrait fort bien qu'à un moment ou à un autre, la disponibilité de la protection d'assurance devienne insuffisante en raison de la conjoncture planétaire. Dans un scénario semblable, les mutuelles appartenant à des intérêts locaux et contrôlées par ceux-ci pourraient certes offrir une solution de rechange très viable.
Je pense que quelques-unes des menaces les plus importantes pour les petites entreprises comme les nôtres... Je me dois de préciser que nous ne représentons qu'une portion très faible de l'ensemble du secteur des assurances de biens et risques divers, bien que nous nous situions tout de même parmi les 10 premiers en Ontario pour ce qui est des primes originales émises. Le plus important membre de notre association émet des primes d'une valeur totale de 80 millions de dollars alors que le plus petit n'en a que pour un demi-million de dollars. Notre regroupement permet de répondre aux besoins de 44 compagnies présentant un éventail diversifié de caractéristiques.
Nous travaillons en étroite collaboration avec l'autorité réglementaire provinciale. Nous nous inquiétons de la prévalence des initiatives réglementaires découlant de la conjoncture mondiale en raison des effets néfastes possibles pour les entités plus petites. Nous croyons à la nécessité d'une réglementation rigoureuse, mais nous estimons que toutes les dispositions réglementaires, y compris celles touchant la norme de capitaux propres pour les assureurs, doivent tenir compte de la situation particulière de certaines entités de moins grande envergure comme celles que nous représentons.
Nous sommes favorables au concept général des mutuelles et des coopératives, car nous croyons que ces types de propriété jouent un rôle important au sein de l'économie canadienne. Si nous sommes ici aujourd'hui, c'est en grande partie grâce à des gens qui étaient disposés à assumer le fardeau de la propriété alors que d'autres ne voulaient pas faire leur part.
Voilà qui termine ma déclaration préliminaire.
Je vous remercie.
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Merci beaucoup. Je suis heureux d'avoir l'occasion de venir vous parler.
L'histoire de Gay Lea Foods est un peu différente, je pense, de celle d'autres associations venues vous parler. Je ne représente pas une association; je représente une coopérative particulière, mais qui adhère aux mêmes principes et aux mêmes valeurs que Frank Lowery.
Je vais vous donner le contexte — je vous ai fourni un document que je ne lirai pas, mais je vais vous parler des points saillants. Gay Lea est la deuxième coopérative en importance au Canada. C'est la plus importante de l'Ontario. En 2010, elle arrivait au huitième rang des coopératives non financières. Nous avons 1 200 fermes laitières à l'échelle du Canada, et 3 300 membres, lesquels ne sont pas que des exploitants de fermes laitières, mais des employés aussi.
Nos membres produisent quelque 800 millions de litres de lait, ce qui équivaut à environ 30 p. 100 du lait traité en Ontario. Nos recettes de cette année dépasseront les 500 millions de dollars. Sur le plan du volume, nous arrivons au quatrième rang des entreprises de transformation des produits laitiers au Canada. Nous avons, sans nul doute, de nombreuses installations dans le sud de l'Ontario.
Nous comptons 650 employés à temps plein ou partiel. Nous sommes une entreprise de transformation importante, dans un marché à créneaux. Si vous mangez du fromage cottage, de la crème sure ou du beurre, ou si vous succombez aux plaisirs coupables de la crème fouettée en aérosol, vous consommez vraisemblablement des produits issus de mes installations du sud de l'Ontario.
Sans vouloir offenser quiconque, nous produisons le meilleur fromage au sud de Saint-Albert.
Des voix: Oh, oh!
M. Michael Barrett: Au cours des 10 dernières années, notre coopérative a investi 170 millions de dollars dans le développement des investissements. Outre un petit contrat de location-acquisition, nous n'avons plus aucune dette. Ce sont nos membres, et seulement nos membres, qui ont tout financé.
Nous ne sommes pas qu'une bonne coopérative, nous sommes aussi un bon employeur. Nous étions l'un des 100 meilleurs employeurs en 2010-2011, et le meilleur employeur comptant plus de 50 employés en 2011. Dans la région du Grand Toronto, nous avons remporté le prix d'excellence en gouvernance de 2009 à 2011. Nous avons été sélectionnés pour un grand prix aux entreprises novatrices trois années de suite, et nous avons aussi remporté un Global Co-operator Award. Nos valeurs et principes nous importent beaucoup.
Nous sommes soumis à la Loi sur les sociétés coopératives. À l'instar de nombreuses autres coopératives, nous avons une brochette complète d'agriculteurs administrateurs. Chaque membre a une voix. Au cours des cinq dernières années, nous avons investi des centaines de milliers de dollars dans la conception d'une formation à divers modèles de gouvernance et de formation au leadership, non seulement pour notre propre coopérative, qui a gagné des prix dans le secteur coopératif, mais aussi pour les autres coopératives agricoles.
L'un des aspects les plus importants de la coopérative, c'est de veiller à ce que ce soit une bonne entreprise, mais il faut aussi pouvoir bien diriger l'affaire et entretenir de bons rapports avec les membres.
Gay Lea Foods remet 40 p. 100 de ses profits à ses membres. Ils reviennent donc aux agriculteurs. Ils sont réinvestis dans les biens d'équipement — tracteurs ou exploitations agricoles —, ou servent à garantir la durabilité économique dans les secteurs ruraux. C'est très important pour nous, pour appuyer la communauté rurale.
Pourquoi les agriculteurs font-ils partie d'une coopérative laitière? Certainement parce qu'ils peuvent ainsi être propriétaires d'une partie du secteur de la transformation. Ils peuvent exercer une influence en tant que groupe, et participer aux profits d'un secteur intégré verticalement. Une seule personne ne peut posséder l'industrie, mais 1 200 personnes peuvent posséder une partie de l'industrie. Pour vous donner une idée, je vous dirai que nos membres ont 80 millions de dollars investis dans une coopérative dont les actifs équivalent à environ 230 millions de dollars.
Les coopératives sont à n'en pas douter un facteur de changement. Compte tenu des enjeux du côté du commerce mondial, le secteur de la régulation de l'offre subit des pressions. Je ne vais pas consacrer tout mon temps à parler de la mesure dans laquelle une coopérative solide est une solution de rechange ferme et viable à la régulation de l'offre, mais si vous regardez les cas de trois pays en particulier... La Nouvelle-Zélande a toujours été présentée comme le but et le modèle de changement. La Nouvelle-Zélande possède une coopérative nationale très solide qui bénéficie du soutien du gouvernement fédéral et de la loi, ce qui en fait une entité viable. Au Danemark et en Hollande, les coopératives sont également soutenues fermement par la loi, ce qui garantit l'existence d'une industrie laitière viable.
Dans les pays où il n'y a pas de mesures législatives fermes pour soutenir le mouvement coopératif — l'Australie, l'Allemagne et la Grande-Bretagne —, l'industrie laitière se caractérise par des agriculteurs qui font faillite, des prix inférieurs et des coûts de production élevés. Par exemple, la Grande-Bretagne est devenue un importateur net de produits laitiers, alors qu'elle était un exportateur net.
Le modèle coopératif offre une solution de rechange aux différents modèles économiques qui ont été proposés.
Celui qui a le plus perdu à cause de tous les changements d'ordre économique qui sont survenus, c'est l'agriculteur. Pourquoi faut-il une coopérative pour l'industrie laitière? C'est certainement parce qu'elle doit assurer sa propre durabilité. C'est aussi une question de résilience économique. Gay Lea et une organisation comme Agropur en sont des exemples.
Dans le secteur coopératif, nous ne demandons pas de traitement spécial. Nous ne voulons que l'égalité des chances. Nous ne demandons pas de faveurs, mais de la justice. Nous ne recherchons pas un soutien inconditionnel, mais un investissement rationnel.
Du point de vue de Gay Lea, le secteur coopératif a besoin de ce qui suit. Il faut reconnaître que le secteur économique est une solution économique et sociale viable. Nous devons avoir accès de la même façon que les autres au même soutien économique, législatif et commercial. Il faut reconnaître le rôle que les coopératives jouent déjà dans la société. Il faut comprendre que le modèle de gouvernance et les valeurs qui l'accompagnent sont essentiels, que la transparence en est un élément important et que la possibilité d'avoir un tel modèle est un atout.
Nous parlons de la règle des 98 p. 100, selon laquelle 98 p. 100 de l'information des coopératives doit être connue. Mes membres connaissent mon salaire et mes primes, parce qu'ils sont propriétaires de la coopérative.
Il faut aussi reconnaître que le secteur coopératif n'est pas qu'un modèle économique favorisant la croissance nationale, mais aussi un modèle économique favorisant l'aide internationale. J'ai passé beaucoup de temps à l'étranger, en raison de l'aide que Gay Lea offre au développement international. J'ai marché dans les rues de Katmandou, et j'ai vu que les bonnes intentions de bien des pays se sont traduites par des immeubles fermés, et ce, à cause de l'absence de durabilité. Ce que je constate, dans les pays du tiers monde et les pays en développement, c'est que les coopératives y créent une infrastructure de développement économique durable et que cela fonctionne. Les effets ne durent pas que 3 ans, ou 10 ans. Ils sont là pour de bon.
Nous avons construit une école pour 300 enfants, au Népal. Aujourd'hui, 1 200 enfants la fréquentent. Nous avons construit trois salles de classe, puis la communauté en a bâti 12 autres, ainsi qu'un laboratoire informatique, un laboratoire scientifique, un puits et des toilettes à l'intérieur. C'est grâce à l'objectif commun d'un modèle économique — le modèle coopératif — que cela se réalise.
Cela ne se produit pas qu'à l'étranger, mais aussi dans les régions rurales. Gay Lea Foods consacre probablement autour de 350 000 $ au développement de coopératives au Canada. Nous avons pu contribuer au soutien d'activités comme l'établissement d'épiceries locales, à des endroits où on a fermé la seule épicerie et où les grosses entreprises de détail n'appuient pas l'épicerie locale. Nous avons fait des dons et offert du soutien à la gouvernance par l'intermédiaire de l'Ontario Co-operative Association, afin de veiller à ce que les communautés qui se trouvent à plus de 80 kilomètres de l'épicerie la plus proche puissent subvenir à leurs propres besoins.
Le modèle coopératif est très important. Gay Lea est un modèle de fonctionnement d'une coopérative. Nous avons été en mesure de bâtir notre coopérative. Nous avons pu tripler nos ventes. Nous avons pu quintupler notre rentabilité, non pas parce que nous avons profité de stimulants économiques, mais parce que c'est un modèle qui fonctionne et qui est durable au sein de notre communauté.
Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président, et merci de m'avoir invité.
Je suis ici au nom de Farmers of North America. Je vais vous en dire un peu plus à propos de cette organisation tout à l'heure. Je me contenterai de dire, pour le moment, qu'elle a comme principal mandat d'améliorer la rentabilité des exploitations agricoles. À cette fin, en réalité, j'aimerais remercier le gouvernement actuel pour certaines des choses qu'il a déjà faites et qui ont donné à nos membres les outils qu'il leur faut pour améliorer leur rentabilité. Bien entendu, si j'abordais cette question, la discussion serait bien plus longue.
Je vais adopter une approche un peu différente, en ce qui concerne les coopératives.
Je pense que FNA a été invitée à cette tribune parce que les gens disent souvent que notre organisation a certaines caractéristiques apparentées aux principes de la coopérative. Je vais donc vous expliquer un peu notre façon de fonctionner. Je vais aussi me concentrer très précisément sur les intrants agricoles, car ils sont au coeur de nos activités. Les intrants agricoles sont sans nul doute très importants. Notre façon de fonctionner, qui inclut certains principes coopératifs, a fini par permettre aux agriculteurs d'économiser des centaines de millions de dollars du côté des intrants agricoles. Je vais, bien entendu, exprimer mon appui aux coopératives.
J'aimerais parler un peu de notre organisation, qui est unique et novatrice. J'aimerais ensuite proposer une chose qui pourrait permettre un investissement d'un milliard de dollars dans des projets agricoles, coopératifs ou autres, qui pourraient contribuer à la rentabilité des exploitations agricoles.
Permettez-moi d'abord de dire que de toute la gamme des coopératives, nous portons principalement notre attention sur les coopératives agricoles et, comme je l'ai dit précédemment, sur les intrants agricoles. Bien entendu, nous savons aussi qu'il existe des coopératives de commercialisation très prospère, comme mon collègue de Gay Lea vient de le dire. Nous avons vu des coopératives échouer. Elles ont eu du succès au début, mais ont soudainement perdu leur orientation et ne sont plus entre les mains d'agriculteurs. Et nous avons vu d'autres coopératives fournissant des intrants remporter beaucoup de succès.
Je dirai seulement que, d'après nous, il ne faut pas soutenir les coopératives pour des raisons idéologiques seulement, mais plutôt pour une raison très pragmatique et terre à terre: elles doivent contribuer à favoriser la concurrence sur le marché. Si une coopérative, entre autres agricole, ne contribue pas à favoriser la concurrence sur le marché, nous croyons alors qu'elle est là pour des raisons idéologiques. Nous croyons que c'est faire fausse route. Comme je l'ai dit plus tôt, il existe certainement des coopératives qui l'ont fait avec grand succès.
Nous savons que les agriculteurs ont besoin d'un coup de main, compte tenu de la consolidation des industries en aval et en amont. L'un des buts de FNA est d'amener les agriculteurs au point où ils peuvent accéder à des options peu coûteuses et plus rentables parce qu'elles existent.
Lors d'une réunion que j'ai eue avec un producteur d'engrais, il y a quelques années, j'ai appris que les entreprises de ce secteur augmentaient les prix parce qu'elles le pouvaient.
Ce que nous voulons — et nous y arrivons déjà dans certains secteurs —, c'est de continuer à amener les agriculteurs au point où, grâce à nous, ils peuvent choisir entre la coopérative ou les autres organisations, les options à faible coût et plus profitables, parce que ces options existent. Je crois que la coopérative a le même mandat. Cela aurait pour effet de donner nettement plus de force aux agriculteurs, et plus de pouvoir sur le marché.
Encore une fois, je le répète et je ne le dirai jamais assez, que nous parlions d'une coopérative ou de quelque organisation novatrice que ce soit, comme FNA, il faut que l'issue soit une concurrence accrue sur le marché. Et il faut que les agriculteurs profitent des bienfaits de cette concurrence accrue.
Bon nombre d'entre vous se demandent peut-être pourquoi je mets tant l'accent sur les intrants agricoles. Dans l'enquête qu'il a menée en 2009 auprès de ses clients, Financement agricole Canada a demandé aux agriculteurs quelles étaient leurs principales préoccupations. Les trois premières préoccupations des agriculteurs, cette année-là, étaient, premièrement, les coûts des intrants; deuxièmement, la rentabilité; troisièmement, les prix du marché.
C'est intéressant. Je ne suis pas psychologue, mais puisqu'ils se préoccupent des coûts des intrants, puis de la rentabilité, puis des prix du marché, j'en conclus qu'ils voient les coûts des intrants comme étant un obstacle plus important à la rentabilité que les prix du marché. C'est pourquoi nous nous concentrons autant sur les coûts des intrants. C'est la véritable raison de la création de Farmers of North America.
Je vais décrire notre organisation et vous pourrez voir ce que nous avons en commun avec la coopérative. Nous n'en sommes pas une, mais nous en avons adopté certains principes.
FNA est tout simplement une alliance commerciale d'agriculteurs. C'est une organisation dont les membres sont des agriculteurs et dont le mandat est d'améliorer la rentabilité des exploitations agricoles. Nous comptons quelque 10 000 agriculteurs membres à l'échelle du Canada, et ce, dans toutes les provinces, sauf à Terre-Neuve.
FNA — je vais l'appeler FNA à partir de maintenant — ne vend rien au détail. FNA crée des liens avec les agrofournisseurs, négocie les prix à la baisse pour les agriculteurs, puis s'arrange pour que les agriculteurs traitent directement avec les agrofournisseurs partenaires. Notre organisation est composée de membres et elle jette un pont solide entre les agrofournisseurs et nos membres agriculteurs.
En l'absence d'agrofournisseurs intéressés à traiter avec FNA, nous créons simplement nos propres fournisseurs. Les participants à la chaîne de valeur ne sont pas tous aussi manifestement convaincus, en amont qu'en aval, de l'importance de s'associer pour veiller à ce que tous les éléments de la chaîne de valeur soient rentables.
Comme je l'ai dit, entre autres choses, nous avons travaillé à créer des liens et des partenariats avec les agrofournisseurs. S'ils ne sont pas prêts à le faire, par exemple, dans le secteur des engrais, ou des pesticides, nous créons notre propre partenaire fournisseur et fonctionnons avec lui comme nous le ferions avec n'importe quel autre fournisseur. FNA négocie un prix pour ses agriculteurs, et l'agriculteur traite directement avec l'agrofournisseur.
Là où nous ressemblons à une coopérative, c'est que ce sont les membres agriculteurs qui profitent des bas prix. Dans certains cas, ce que nous avons fait pour empêcher la transparence des prix qui permettrait à tous les agriculteurs canadiens de profiter de prix réduits, c'est d'en faire profiter à nos membres sous la forme de stimulants leur donnant les moyens d'agir. Nos agriculteurs reçoivent un rabais initial, en tant que membres, puis les autres avantages et économies reviennent aux membres sous la forme de stimulants.
La différence entre FNA et les coopératives, c'est que nos membres obtiennent un rabais sur chaque produit et programme particulier qu'ils utilisent. Autrement dit, nous ne répartissons pas ce que vous appelleriez les profits et pertes pour simplement régulariser les avantages. Un agriculteur qui utilise des engrais obtiendra toutes les économies possibles sur les engrais. Les avantages ne sont pas répartis avec les autres économies liées à d'autres produits.
L'autre différence entre FNA et les coopératives, c'est le mode de gouvernance. Nous avons un conseil consultatif, mais notre structure de gouvernance s'appuie sur une personne. La raison pour laquelle nous avons opté pour une solution aussi simple, c'est que nous devons agir rapidement.
Je ne sais pas combien d'entre vous ont vu le film avec Sharon Stone et Gene Hackman, Mort ou vif, mais on disait, dans le titre d'appel, que dans cette ville, vous êtes l'un ou l'autre. Nous savons que si vous n'êtes pas là où le besoin se fait sentir et au moment où il se fait sentir, le besoin disparaît. Nous avons une structure de gouvernance très simple qui permet la prise rapide de décisions. La décision peut se prendre dès aujourd'hui, compte tenu de l'information que nous fournissent le conseil consultatif ou nos membres.
Cela étant dit, et maintenant que j'ai décrit ce que nous considérons comme étant une organisation très novatrice, je vais vous présenter ma suggestion. Je sais qu'on a beaucoup parlé d'éliminer le financement de certaines organisations, etc. Nous croyons qu'il existe une structure qui permettrait aux agriculteurs d'investir beaucoup de leur propre argent dans le secteur de l'agriculture s'ils étaient encouragés à le faire. Je vous présente cette suggestion — j'ai des copies en anglais et en français, que je vais remettre au secrétariat plus tard, de sorte qu'elles puissent être distribuées.
Dans la structure actuelle de gestion des risques d'affaires du secteur de l'agriculture, nous avons ce que nous appelons la fourchette supérieure de 15 p. 100...
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Merci, monsieur le président.
Merci, chers témoins, d'être ici aujourd'hui. Je suis très heureux que vous soyez venus nous parler, en plein mois de juillet, du fonctionnement de vos associations et de vos entreprises et de ce qu'elles accomplissent.
Je viens de Prince Albert, en Saskatchewan, une région qui compte de nombreuses coopératives. La Saskatchewan Wheat Pool a déjà été l'une des coopératives de la Saskatchewan; il y a donc bien des choses à dire au sujet du bon fonctionnement des coopératives dans notre province.
Dans ma ville natale, c'est-à-dire Canwood, la coopérative est l'endroit principal pour acheter des oeufs, du lait, des provisions, etc. Vous savez que vous pouvez acheter tout cela à la coop, et que les produits sont toujours frais et bons. De plus, la coopérative emploie des gens de la région, ce qui est très positif. Elle vend aussi du combustible et des choses de ce genre.
Je trouve que les modèles opérationnels que vous avez choisis pour vos associations sont intéressants.
Monsieur Friesen, votre modèle est un peu différent de celui d'une coopérative moyenne. J'ai quelques questions qui viennent des témoins précédents et qui concernent la démutualisation dans le secteur de l'assurance. J'aurais aimé qu'on pose une question à ce sujet, car l'une des préoccupations que j'ai entendues concernait la fusion des coopératives. Lorsque les coopératives fusionnent entre elles, on perd une certaine indépendance ou saveur locale au sein du conseil d'administration.
Monsieur Barrett, j'aimerais commencer par vous. Votre coopérative s'étend à l'échelle provinciale, n'est-ce pas? Vous avez des représentants un peu partout dans la province. Comment choisissez-vous vos délégués, et qui fait partie du conseil d'administration?