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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 050 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 10 mars 2011

[Enregistrement électronique]

  (1310)  

[Français]

    Aujourd'hui, le 10 mars 2011, nous tenons la 50e séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international dans le cadre de la 40e législature.

[Traduction]

    Aujourd'hui, nous poursuivons notre étude des implications de la Loi sur l'immunité des États.
    Nous accueillons deux témoins aujourd'hui. L'un d'eux est ici, et l'autre témoignera par téléconférence. Nous leur demanderons d'y aller de leur exposé, puis nous passerons aux questions, qui s'adresseront aux deux.
    Après, je propose que nous réduisions le temps alloué aux questions pour nous occuper des deux ou trois motions présentées par des membres du comité et pour voir si nous pouvons parvenir à un consensus. Puisque nous ne savons pas combien de temps sera nécessaire pour en débattre, je propose de traiter de ces deux points à la fin plutôt qu'au début. Cela vous convient-il?
    Une voix: D'accord.
    Le président: Bien. Fantastique.
    Nous allons commencer par M. Larocque. Il vient de l'Université d'Ottawa, et il est dans la salle. Quand il aura terminé, nous donnerons la parole à M. Grossman, qui se joindra à nous par vidéoconférence, de Montréal.
     Monsieur Larocque, vous pouvez commencer.

[Français]

    Membres distingués de ce comité, je vous remercie chaleureusement de m'avoir invité à témoigner devant vous concernant les implications de la Loi sur l'immunité des États et du projet de loi C-483, Loi modifiant la Loi sur l’immunité des États (génocide, crimes contre l’humanité, crimes de guerre et torture). Je suis conscient que le projet de loi n'est pas présentement à l'étude devant ce comité. Cependant, mes propos relativement aux implications de la Loi sur l'immunité des États reflètent mon soutien à ce que le projet de loi C-483 prévoit apporter à l'état du droit.

[Traduction]

    Je m'appelle François Larocque. Je suis avocat, professeur agrégé et vice-doyen de la Faculté de droit de l'Université d'Ottawa. Ces 10 dernières années, j'ai consacré ma recherche universitaire aux diverses questions d'ordre juridique liées aux litiges en matière de droits de la personne, à l'échelle internationale; il s'agit de poursuites judiciaires intentées dans un pays par rapport à des violations graves aux droits fondamentaux de la personne commises dans un autre pays.
    À titre d'avocat en exercice — directement ou comme conseiller, tant au Canada qu'au Royaume-Uni —, j'ai participé à plusieurs poursuites intentées par des survivants d'actes de torture cherchant à obtenir le droit de recours civil contre les gouvernements qui les ont torturés. Il y a notamment le procès Bouzari et, tout récemment, les poursuites intentées contre l'Iran par la succession de Zahra Kazemi et par Stephan Hachemi.

[Français]

    Dans le cadre de ces poursuites, les tribunaux de l'Ontario et du Québec ont conclu que la Loi sur l'immunité des États avait pour effet de protéger les gouvernements qui commettent la torture et de protéger aussi les tortionnaires. Autrement dit, notre Loi sur l'immunité des États a pour effet d'assurer l'impunité face aux violations les plus claires du droit international.
    Manifestement, l'actuelle Loi sur l'immunité des États est déficiente et doit être modifiée, afin que les Canadiens et les Canadiennes qui ont survécu aux supplices de la torture aient accès à la réparation en justice à laquelle ils ont droit. C'est pourquoi j'estime que le projet de loi C-483 mérite le soutien de tous les honorables membres de ce comité lorsqu'il sera à l'étude, ce que je souhaite.

[Traduction]

    Le projet de loi C-483 est une bonne idée dont le temps est venu, tout simplement. Dans mon exposé, comme il est indiqué dans le résumé que j'ai fait circuler, j'aborderai brièvement trois points. Je serai honoré de donner plus de détails à ce sujet dans mes réponses aux questions des députés.
    Comme vous le savez, les crimes pour lesquels le projet de loi C-483 prévoit créer une exception en vertu de la Loi sur l'immunité des États — le génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre et la torture — sont prohibés en vertu des normes impératives du droit international, du droit canadien et de la common law. Il n'y a pas d'exemples plus éloquents de violation des droits fondamentaux et universels de la personne que ces crimes.
    Le projet de loi C-483 est une bonne idée parce qu'il règle une incohérence internationale. Bien que les pays de droit civil permettent aux victimes d'intenter des poursuites dans le cadre d'un procès pénal, le Canada ne le permet pas. Je suis d'avis que les Canadiens qui ont survécu à la torture et à des crimes contre l'humanité méritent tout autant de pouvoir poursuivre les auteurs de ces crimes que les survivants qui habitent en France, en Italie ou en Espagne. Le projet de loi C-483 réglerait ce problème.
    Le projet de loi C-483 est également une bonne idée parce qu'il règle une incohérence canadienne. En 2000, lorsque le Canada a adopté la Loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre pour satisfaire à ses engagements en vertu du Statut de Rome, il a expressément retiré tout droit à l'immunité dans le cadre des procès pénaux pour ces crimes, mais n'a rien fait pour permettre les poursuites civiles pour ces mêmes gestes.
    Je suis d'avis que si un tortionnaire ou un génocidaire ne peut invoquer l'immunité dans le cadre d'un procès pénal, il n'y a en principe aucune raison justifiant qu'on lui permette de réclamer l'immunité dans le cadre d'une poursuite civile.

[Français]

    J'arrive au deuxième point du plan de la présentation que j'ai fait circuler.
    Le projet de loi C-483 s'inscrit dans la tendance mondiale visant le retrait de l'immunité à l'égard des violations graves des droits fondamentaux de la personne. Dans leur témoignage de mardi dernier, Matt Eisenbrandt et Jayne Stoyles, du Centre canadien pour la justice internationale, ont évoqué à cet égard les développements juridiques dans la Loi sur l'immunité des États aux États-Unis, dans la jurisprudence de la Cour de cassation de l'Italie et dans les travaux du Comité des Nations Unies contre la torture. En 2005, ce comité reprochait au Canada d'avoir manqué à ses obligations internationales en ne permettant pas à toutes victimes de torture d'obtenir, dans tous les cas, la réparation en justice à laquelle elles ont droit.
    Je tiens à souligner deux développements supplémentaires. Premièrement, dans son rapport de 2005, le Comité des Nations Unies contre la torture a émis des commentaires négatifs à l'égard du Canada. Il a fait les mêmes reproches à l'égard d'autres pays, en l'occurrence le Japon, la Nouvelle-Zélande et la Corée du Sud. Selon le comité, ces pays, comme le Canada, ne respectent ni la lettre ni l'esprit de la Convention contre la torture. C'est quelque chose que je tenais à porter à votre attention.
    Deuxièmement, vous le savez peut-être déjà, il y a eu la Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens qui a été conclue en 2004. À l'heure actuelle, seulement 28 pays ont signé cette convention et 11 seulement l'ont ratifiée. Pour tout dire, c'est une convention qui ne fait pas l'unanimité à l'échelle internationale parce qu'elle codifie et reprend essentiellement les mêmes exceptions que nous retrouvons dans notre Loi sur l'immunité des États, une loi qui est déficiente.
    Je tiens à souligner quelque chose au sujet de cette convention. Des huit pays qui l'ont ratifiée, trois d'entre eux — la Suisse, la Norvège et la Suède — ont déclaré que cette convention ne portait pas préjudice au développement en droit international d'une exception qui favoriserait le déni d'immunité en cas de poursuite pour des violations graves du droit international.
    Je vous ai fourni, avec le plan que j'ai fait circuler, un exemple de ces déclarations interprétatives, soit celle de la Suisse, qui a été émise le 16 avril 2010. Je vais la lire en anglais:

[Traduction]

La Suisse considère que l'article 12...

[Français]

    il s'agit de l'article équivalant à l'article 6 de notre loi canadienne prévoyant une exception pour les délits commis en sol canadien

[Traduction]

... ne règle pas la question des actions en réparation pécuniaire pour violations graves de droits de l'homme prétendument attribuables à un État et commises en dehors de l'État du for. Par conséquent, cette convention ne préjuge pas les développements du droit international dans ce domaine;

  (1315)  

[Français]

    Pour tout dire, l'état du droit en matière d'immunité à l'échelle internationale est en pleine évolution.

[Traduction]

    Mon troisième et dernier point est que le projet de loi C-483 est une bonne idée parce qu'il répond aux recommandations des tribunaux qui ont entendu les affaires Bouzari, Arar et Kazemi.
    Dans chacune de ces affaires, à tort ou à raison — je dirais à tort —, les tribunaux canadiens ont conclu que la création d'une nouvelle exception à l'immunité des États concernant les violations graves à la loi internationale relève uniquement du Parlement. Le projet de loi C-483 créerait de telles exceptions pour cas d'infractions à la loi internationale les plus évidents et ferait en sorte que seules les demandes légitimes seraient entendues par nos tribunaux.
    Dans le même ordre d'idées, je recommanderais au comité — s'il devait un jour étudier l'avant-projet d'une mesure législative visant à modifier la Loi sur l'immunité des États — d'adopter un libellé qui clarifierait la relation entre la Loi sur l'immunité des États et l'évolution constante du droit relatif à l'immunité des États de la loi internationale et de la common law. Le dernier article que je vous ai fourni, qui est la disposition interprétative de la Suisse à cet égard, est un bon exemple de ce genre de libellé.
    En terminant, le projet de loi C-483 n'est pas seulement une bonne idée; c'est aussi la bonne chose à faire pour retirer l'immunité aux gouvernements qui violent ouvertement les droits fondamentaux de la personne . Il donne aussi accès à la justice aux survivants, qui ont déjà tant souffert.
    Je remercie le comité du temps qu'il m'a accordé.

[Français]

    Merci beaucoup, professeur Larocque.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Grossman.
    Monsieur Grossman, vous pouvez commencer.

[Français]

    Membres distingués du comité, j'aimerais vous remercier sincèrement de cette occasion de témoigner devant vous. Je crois que tout le monde ici présent reconnaît l'importance des questions dont ce comité est saisi. On a distribué à cet égard un bref survol du contenu de mes commentaires aujourd'hui.
    Je suis un avocat montréalais au sein du cabinet Osler, Hoskin & Harcourt. Je suis membre du Barreau du Québec et de l'Association du Barreau de l'Ontario. J'enseigne actuellement un cours sur le droit de la preuve à l'Université McGill. Au cours de ma carrière, j'ai eu le privilège de travailler avec l'honorable juge Michel Bastarache, alors qu'il était juge à la Cour suprême du Canada, et avec l'honorable Irwin Cotler sur des questions touchant aux droits de la personne, dont celle concernant l'immunité des États. J'agis présentement comme procureur pour le Centre canadien pour la justice internationale dans le dossier Kazemi contre l'Iran. Je dois souligner que je témoigne aujourd'hui uniquement à titre personnel et non en tant que représentant de l'une de ces organisations.

  (1320)  

[Traduction]

    Dans le document que j'ai fait parvenir au comité, j'ai souligné trois principes que je considérerais comme les points de départ de notre étude des implications de la Loi sur l'immunité des États. Je crois que ces principes suscitent relativement peu de controverse.
    Le premier, c'est que nous sommes convaincus que notre système judiciaire est équitable autant pour les Canadiens que pour les parties qui comparaissent devant les tribunaux. Sur la scène internationale, nos tribunaux ont, à juste titre, la réputation d'être des bastions de justice et d'impartialité. De plus, j'aimerais insister sur le fait que dans notre système judiciaire, il existe des procédures accessibles à tous les défendeurs leur permettant de rejeter sommairement les accusations ou les allégations abusives ou non fondées qui pèsent contre eux. Il n'est pas nécessaire que cela se limite aux cas liés aux États étrangers; tous les défendeurs peuvent s'en prévaloir. Cela fait partie de l'équité et de la teneur de notre système judiciaire.
    Le deuxième principe, c'est qu'en droit canadien, le caractère absolu de l'immunité n'existe pas. Récemment, dans sa décision dans l'affaire Kuwait Airways, la Cour suprême a eu l'occasion de donner son avis sur cette question précise. Comme il est indiqué au paragraphe 24 de la décision, la Loi sur l'immunité des États a clairement écarté la doctrine du caractère absolu de l'immunité de juridiction des États étrangers. En l'occurrence, le principe sur lequel nous nous fondons pour entreprendre cette étude, celui qui nous amène à étudier les implications de la Loi sur l'immunité des États, c'est que pour les États étrangers, le caractère absolu de l'immunité n'existe pas.
    Le troisième principe, c'est que la torture, le génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre — autrement dit, les crimes dont traite le projet de loi C-483 — sont des crimes particulièrement odieux, et le gouvernement ne devrait pas tourner le dos aux victimes de ces actes. Et ce que je veux dire, c'est que cela vaut autant pour le côté moral que judiciaire.
    Sur le plan juridique, le Canada a des obligations internationales par rapport à la torture, au génocide, aux crimes contre l'humanité et aux crimes de guerre. En droit international coutumier, tous ces crimes sont clairement interdits. Au niveau pénal, comme M. Larocque l'a mentionné, le Canada a adopté des mesures pour certains de ces crimes. J'aimerais souligner qu'à l'échelle internationale, en vertu de certains mécanismes comme la Convention des Nations Unies contre la torture, le Canada a des obligations précises au civil aussi. L'article 14 de la Convention des Nations Unies contre la torture stipule:
Tout État partie [cela comprend le Canada] garantit, dans son système juridique, à la victime d'un acte de torture, le droit d'obtenir réparation et d'être indemnisée équitablement et de manière adéquate, y compris les moyens nécessaires à sa réadaptation la plus complète possible.
    Partant du troisième principe, c'est-à-dire de l'obligation morale et juridique du Canada de ne pas abandonner les victimes à leur sort, nous arrivons à l'essentiel de mon exposé: par rapport à ces crimes, quels aspects de la Loi sur l'immunité des États et de ses implications devons-nous examiner? Cela m'amène à appuyer le projet de loi C-483 sans réserve et à demander au comité de faire de même. Dans cette optique, nous pouvons considérer le projet de loi C-483 non seulement comme une mesure, mais en fait — à bien des égards — comme une mesure conservatrice qui traite des questions de l'immunité des États dans un contexte d'impunité, dans le contexte des crimes les plus odieux connus de l'humanité.
    Je crois qu'il est juste de dire qu'il appartient au Parlement de régler la question par l'adoption d'une mesure législative. En effet, comme l'a dit M. Larocque, dans la mesure où les tribunaux canadiens ont statué sur cette question et conclu que l'immunité de l'État existe dans ces domaines, ils l'ont fait en fonction de la Loi sur l'immunité des États, et en se fondant sur le principe selon lequel ils estiment représenter la volonté du Parlement.
    Je dirais, bien respectueusement, que le Parlement n'avait pas l'intention de régler la question de l'immunité des États étrangers à cet égard. Cependant, relativement à la torture, au génocide, aux crimes contre l'humanité et aux crimes de guerre, d'un point de vue international, de même qu'en fonction du principe général des pays de droit civil, on constate — par le biais de leur système de partie civile et par des décisions comme celle de l'Italie, comme M. Larocque l'a mentionné — que l'immunité est quelque chose que la loi internationale ne permet plus, même dans le contexte civil. Si les tribunaux canadiens accordent l'immunité pour ces crimes, on suppose que c'est uniquement parce que les décisions sont fondées sur la Loi sur l'immunité des États. À cet égard, nous croyons que le comité et le Parlement ont l'obligation morale et légale d'adopter le projet de loi C-483.

  (1325)  

    En clair, la Loi sur l'immunité des États est une loi fédérale qui ne devrait pas être utilisée comme base pour perpétuer une injustice contre les victimes. À cet égard, le projet de loi ne peut être considéré comme rien d'autre qu'une exception à une exception. Dans certaines circonstances seulement, c'est ce qui, selon certains juristes, supprime un obstacle que semble créer la Loi sur l'immunité et c'est ce qui permet à la justice de suivre son cours dans le cadre de notre système judiciaire reconnu et juste.
    De plus, le projet de loi C-483 respecte le rôle des parties en litige. Le litige est un processus très difficile, et j'oserais dire que c'est particulièrement vrai pour les victimes de crimes comme la torture et le génocide. Financièrement et psychologiquement, le litige est difficile. Le projet de loi C-483 n'enlève pas ce fardeau pour les demandeurs. Qui plus est, il ne force pas l'État canadien à jouer un rôle actif dans la poursuite des États étrangers en justice. Il permet simplement aux victimes de crimes atroces de laisser la justice suivre sont cours. Il élimine simplement un obstacle pour les victimes de ces crimes, dans la mesure où l'on considère que la Loi sur l'immunité des États crée cet obstacle.
    En clair, je dirais que les États étrangers accusés d'avoir commis un génocide et d'autres crimes atroces ne méritent pas d'être traités mieux que d'autres défendeurs dans notre système judiciaire.
    Le projet de loi C-483 ne fait pas beaucoup de choses importantes. Il n'accorde rien de plus aux tribunaux canadiens. Au contraire, il favorise de façon explicite les recours utilisés dans les tribunaux de ces pays étrangers. Il n'étend pas la compétence territoriale des tribunaux canadiens à cet égard, et il ne s'agit pas d'une innovation au point de vue international ou national.
    La Loi sur l'immunité des États reconnaît déjà que des exceptions à l'immunité existent et que l'immunité absolue n'est pas la règle au Canada. En d'autres termes, ce que nous examinons, c'est la possibilité de tracer une ligne. Nous ne sommes pas saisis de la question de savoir si l'immunité des États étrangers est une bonne idée. Ce type d'immunité absolue a déjà été rejeté par le Parlement et les tribunaux, et sur la scène internationale.
    La question qui nous occupe, c'est de savoir où tracer la ligne. Je fais respectueusement valoir qu'il ne faut pas tracer la ligne d'une façon qui nous amènerait à punir deux fois les victimes de torture, de génocide, de crime contre l'humanité et de crime de guerre. Je fais respectueusement valoir aux membres honorables du comité que l'appui du projet de loi C-483 fera progresser le droit au Canada, sera utile pour que justice soit faite et fera en sorte que les États étrangers défendeurs qui sont accusés de crimes atroces ne bénéficieront pas d'un traitement de faveur indu en vertu de la loi.
    Je serai ravi de répondre à vos questions à cet égard. Je vous remercie beaucoup du temps que vous m'avez alloué.
    Merci beaucoup, monsieur Grossman.
    Afin que nous ayons suffisamment de temps pour examiner les deux motions, je propose que nous nous en tenions à des séries de questions de cinq minutes. Je sais que c'est serré, et les membres du comité peuvent s'y opposer, mais je dis seulement qu'ainsi, nous aurions le temps de nous occuper des motions. Comme je constate que personne ne s'y oppose, c'est ce que nous ferons.
    Je veux également vous aviser qu'à 14 heures, je devrai céder le fauteuil. M. Silva me remplacera. Je dois aller en Chambre pour m'occuper d'une autre affaire.
    Monsieur Silva.
    Je remercie beaucoup les témoins de leur présence.
    Bien entendu, j'appuie fermement le projet de loi que propose mon honorable collègue, M. Cotler. Je veux seulement faire deux ou trois remarques pour ensuite poser une question.
    La tendance que j'observe, c'est que petit à petit, nous acceptons le droit international et reconnaissons davantage sa valeur, et je crois que le projet de loi apporte une contribution en ce sens. Il démolit la culture de l'impunité derrière laquelle bon nombre d'États et de dictateurs peuvent se cacher depuis tant d'années alors qu'ils tuent massivement leur population.
    Si la mesure législative était déjà en vigueur, j'aimerais savoir quel effet elle aurait sur deux situations en particulier. Je veux vous entendre tous les deux à ce sujet ou connaître le point de vue de celui d'entre vous qui se sent le plus à l'aise pour répondre.
    Dans le cas de Stephan Hachemi, dont la mère a été tuée en Iran, est-ce que la mesure législative lui permettrait de poursuivre plus facilement au civil les tueurs d'une citoyenne canadienne, soit sa mère?
    L'autre cas, c'est celui du retour de Duvalier à Haïti. Je suis très préoccupé par ce qui se passe dans ce pays. Beaucoup d'Haïtiens au Canada ont souffert sous son régime. Seraient-ils capables de le poursuivre pendant qu'il se trouve à Haïti? Je crois que son retour accroît l'instabilité au pays. Si la mesure législative était en place, permettrait-elle aux Canadiens qui vivent ici d'agir?

  (1330)  

    À qui adressez-vous la question?
    À la personne qui se sent la plus à l'aise pour répondre.
    Monsieur Larocque, voulez-vous être le premier à répondre?
    Je vais tenter de répondre en premier et je laisserai David répondre dès qu'il sera prêt.
    En ce qui concerne la situation de Stephan Hachemi, le projet de loi serait utile. Toutefois, comme vous le savez peut-être, la Cour supérieure du Québec a reconnu que Stephan Hachemi avait déjà les motifs nécessaires pour entamer des poursuites et que l'immunité ne s'appliquait pas dans son cas, en raison des troubles émotionnels dont il a souffert au Canada. Puisqu'il a subi des torts ici, l'Iran ne bénéficiait donc pas de l'immunité.
    Cela étant dit, le jugement qu'a rendu la Cour supérieure du Québec a créé une situation particulière où les membres de la famille d'une victime de torture obtiennent réparation, mais où les victimes elles-mêmes qui sont à l'extérieur du Canada n'ont aucun recours. Le projet de loi serait donc utile à cet égard, vraiment très utile.
    En ce qui concerne Duvalier, à mon avis, comme il n'est plus chef d'État il ne pourrait pas bénéficier de l'immunité d'aucune façon. Ainsi, les règles normales de juridiction s'appliqueraient. Si jamais l'on faisait valoir qu'il mérite l'immunité, il est clair que le contenu du projet de loi viendrait annuler cet argument.
    Je vais en profiter pour continuer sur la même lancée que M. Larocque.
    Le projet de loi pourrait être utile aux plaideurs, car il élimine l'argument de l'immunité automatique qui permet aux États d'invoquer l'impunité en méprisant les tribunaux canadiens.
    En ce qui a trait à la situation d'Hachemi et de Kazemi, nous avons un jugement de la Cour supérieure du Québec. J'approuve la décision de la cour dans la mesure où elle permet à l'affaire Stephan Hachemi de se poursuivre. Il y a présentement appel sur cette affaire, où l'on tranchera la question concernant M. Hachemi et la succession.
    Les faits dans cette affaire nous permettent de dire que le libellé actuel de la Loi sur l'immunité des États fait en sorte qu'on peut poursuivre l'Iran sans susciter la question de l'immunité au Canada. Toutefois, nous sommes encore dans l'attente d'un jugement à cet effet. Nous n'avons même pas encore été devant la Cour d'appel. Il est certain que les faits dans l'affaire Kazemi sont utiles.
    L'élément du projet de loi C-483 qui nous aide le plus, c'est que nous pouvons démolir, dès le début, l'argument de l'impunité que présentent les États étrangers sans devoir passer par tous ces débats. Dans l'exemple d'Haïti, dans la mesure où une telle demande serait faite, le projet de loi la détruirait. Je crois que c'est le fait de réduire à néant cette demande qui importe concernant l'argument de l'impunité, pas seulement de l'immunité, mais de l'impunité des États étrangers.
    Merci.

[Français]

    Madame Deschamps, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je ne suis pas une experte en droit international, mais au début de la semaine, j'ai eu l'occasion d'entendre des experts qui nous ont permis de saisir l'essence du projet de loi C-483. Je suis en faveur d'un tel projet de loi et mon parti l'est également. J'aurais deux brèves questions à poser concernant ce projet de loi.
    Le sous-comité étudie aussi actuellement la question de la violence sexuelle à l'égard des femmes dans les pays en conflit ou dans les États fragiles. Dans le cadre de ce projet de loi, le viol pourrait-il être reconnu comme un crime?

  (1335)  

    La réponse simple, c'est oui, absolument. Le viol est reconnu comme un instrument de guerre. En temps de conflit, c'est un crime de guerre. En dehors d'un conflit, c'est un crime contre l'humanité, surtout lorsque les viols sont utilisés à grande échelle et de manière systématique. J'ai eu l'occasion de participer, avec une organisation qui s'appelle AIDS-Free World et la Stephen Lewis Foundation, à la rédaction d'un rapport dénonçant l'utilisation du viol systématique par le gouvernement Mugabe. Les conclusions juridiques étaient claires: le viol est un crime de guerre ou un crime contre l'humanité, selon les circonstances. Il serait donc directement visé par un projet de loi comme celui-ci.
    D'accord. M. Grossman, voulez-vous ajouter quelque chose?

[Traduction]

    Je vais simplement ajouter que j'approuve ce que M. Larocque dit. Il est certainement incontestable que dans certaines situations, la violence sexuelle sera visée par le contenu du projet de loi, et je crois que ce devrait être le cas. Ce crime devrait être traité sérieusement — en fait, comme l'une des plus graves violations des droits à la liberté et des droits humains — et on l'a donc inclus avec raison.

[Français]

    Dans votre présentation, vous avez parlé des engagements internationaux du gouvernement. Le fait que le Canada soit signataire d'engagements ou de conventions à l'égard des droits de la personne ne lui impose-t-il pas l'obligation de lever l'immunité des États concernant ces crimes?
    C'est certainement la conclusion à laquelle est arrivé le Comité contre la torture, qui est un organe des Nations Unies constitué en vertu de la convention. Tous les quelque 180 pays qui ont signé la Convention contre la torture — c'est l'un des traités les plus largement ratifiés sur terre — ont conféré au Comité contre la torture la légitimité et l'autorité de se prononcer sur le sens des engagements qu'ils ont pris en vertu de cette convention.
     L'interprétation autoritaire qu'a faite le Comité contre la torture à l'égard de l'article 14 évoqué par mon collègue, c'est justement que l'obligation de donner un recours civil inclut l'obligation de lever l'immunité pour permettre ce recours.
    D'accord, merci.

[Traduction]

    Voulez-vous intervenir, monsieur Grossman?
    Encore une fois, simplement pour appuyer les propos de M. Larocque, le Comité sur la torture des Nations Unies a souligné comme sujet de préoccupation, en ce qui concerne le Canada, l'absence de mesures efficaces pour accorder des indemnisations civiles aux victimes de torture dans toutes les affaires.
    Nous croyons que le contexte dans lequel cela a été dit, c'est-à-dire après que la Cour d'appel de l'Ontario a rendu sa décision sur l'affaire Bouzari, ainsi que les commentaires qui ont suivi, par exemple, dans les articles du Tort Law Review, établissent clairement le lien entre la position que le Canada a selon l'interprétation des tribunaux dans la Loi sur l'immunité des États et les obligations en vertu de l'article 14 de la convention.
    Monsieur Marston.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis ravi que nos deux témoins fassent valoir leur expérience aujourd'hui.
    Je vais commencer par M. Larocque. Bien sûr, monsieur Grossman, si vous voulez répondre aussi, je serai heureux d'écouter ce que vous aurez à dire.
    Je suppose que vous connaissez tous les deux le projet de loi S-7 du sénateur LeBreton. Il y a des ressemblances. Je pense que le projet de loi aurait été plus efficace si l'on avait jugé bon d'y ajouter ce que M. Cotler a inclus dans le sien en ce qui a trait au génocide, aux crimes contre l'humanité, etc. Les Canadiens en général seraient très surpris du confort, si l'on peut dire, que nous procurons aux autres pays dont les leaders contribuent à la torture. Je suis certain qu'ils seraient surpris et assez incrédules.
    L'une des préoccupations, par contre, c'est d'en venir à un point où dans la loi, nous commençons à qualifier des pays de terroristes. Il faut alors déterminer qui est un terroriste et qui ne l'est pas et, bien entendu, certains pays occidentaux ont tendance à être sélectifs. Par exemple, en 1979, j'ai passé six mois en Arabie saoudite et j'ai vu des gens là-bas qui étaient soumis à de la torture par leur propre gouvernement pour diverses raisons.
    Songez au fait que les gens qui ont participé aux attentats du 11 septembre venaient d'Arabie saoudite, mais nous ne disons pas que l'Arabie saoudite est un pays terroriste; de plus, des milliers de personnes vont à Cuba chaque année, et des pays choisissent de qualifier Cuba d'État terroriste. Il doit y avoir un équilibre. Ce que je veux dire, c'est que si l'on parle d'extradition des États-Unis vers la Syrie, c'est très troublant.
    De quelle façon régleriez-vous la situation? Devrait-on même aller jusqu'à qualifier des États de terroristes?

  (1340)  

    J’ai écrit à ce sujet. Je demanderais aux membres de consulter la bibliographie que je leur ai fournie et qui se trouve à la fin du document que j’ai distribué. Sous la rubrique Book and Book Chapters, le troisième élément est intitulé Civil remedies for terrorism. C’est un chapitre que j’ai écrit précisément au sujet des anciens projets de loi sur le terrorisme et dans lequel je m’élève fermement contre toute procédure qui viserait à désigner des États.
     J’estime que c’est une politisation du processus judiciaire. À mon avis, une telle procédure est dépourvue de principes, et on ne devrait pas l’adopter comme approche. C’est ce qu’ont fait les États-Unis. Ils se livrent maintenant à un jeu très fâcheux qui consiste à ajouter des États à la liste des pays désignés ou à les en retirer, et à utiliser la liste comme une carotte politique, si je peux m’exprimer ainsi. Dernièrement, par exemple, le gouvernement américain a retiré la Libye de la liste. Je pense que les Américains le regrettent maintenant. Cela a été fait il y a plusieurs mois, avant que la situation explose là-bas.
     Cet exemple nous montre pourquoi on aurait tort de désigner des États, que ce soit pour leurs actes terroristes, la torture qu’ils infligent, leurs crimes contre l’humanité ou leurs crimes de guerre. Ces crimes sont indéfendables et interdits par les plus hautes normes du droit international, peu importe qui les commet.
    Monsieur Grossman.
     Je vais répondre en ajoutant très rapidement deux points pratiques et un point théorique.
     Premièrement, si le gouvernement fédéral adopte un mode opératoire qui consiste à ajouter continuellement des pays à la liste et à surveiller tout ce qui se passe, cela lui imposera une dure obligation sur le plan pratique. Si le Canada est bien intentionné et de bonne foi et s’il tient à demeurer équitable, il sera forcé de veiller à ce que la liste soit toujours à jour, au fur et à mesure que les circonstances évoluent.
     Mon deuxième point découlant du premier est que le Canada devra alors s’employer à faire traduire des États étrangers en justice beaucoup plus activement que ne le prévoit le projet de loi C-483.
     Comme je l’ai mentionné, le projet de loi C-483 impose aux plaideurs privés le fardeau de rechercher un règlement à leurs différends devant les tribunaux. Le gouvernement fera en sorte qu’il y ait cette exception à l’immunité des États mais, ensuite, il ne sera pas forcé de prendre position. Il n’aura pas besoin de déclarer qu’il appuie ou non tel ou tel État. Cette tâche incombera aux plaideurs.
     En exerçant des pressions sur le gouvernement pour qu’il tienne à jour une liste de pays contrevenants, on lui demande vraiment de jouer un rôle très actif qui peut lui sembler approprié ou non à ce moment-là.
     Finalement, par principe, je n’ai aucun mal à dire que tous les États tortionnaires, tous les États qui se rendent coupables de génocides, tous les États qui commettent des crimes contre l’humanité ou des crimes de guerre devraient être exposés par un projet de loi qui prévoit une exception à l’égard de l’immunité des États, car nous croyons que notre système de justice est capable de repousser les plaintes frivoles et abusives. Nous avons foi en sa capacité de le faire.
     Il ne fait aucun doute que, dans la mesure où un État est accusé injustement, la cause n’aura pas de répercussions sur lui. Par contre, si nous n’adoptons pas cette position, il y a de bonnes chances que ce projet de loi n’atteigne pas son objectif qui est d’amoindrir grandement l’impunité dont jouissent les États étrangers par rapport à ces crimes.
    Notre comité entend des témoins dans le cadre de divers enjeux, et l’impunité est une question qui ne cesse d’être soulevée compte tenu des actes horribles qui sont commis.
     Je suis d’accord avec nos deux témoins. De plus, j’ai parlé de la désignation des États à d’autres porte-parole en matière de justice, et ils s’entendent tous pour dire que c’est une mesure que nous ne devrions pas prendre.
     Je vous suis très reconnaissant de l’appui que vous avez apporté au NPD aujourd’hui; je vous taquine évidemment tous les deux. En réalité, cette situation est très importante, et notre comité la prend très au sérieux.
     Je vous remercie de vos témoignages.
     Merci beaucoup, monsieur Marston. Nous allons maintenant passer à M. Hiebert.
    Je vous remercie tous deux de votre participation. Vos témoignages sont très intéressants. Mon temps est compté, alors je vais entrer immédiatement dans le vif du sujet.
     À l’heure actuelle, quels pays autorisent ce que le projet de loi C-483 propose?

  (1345)  

    Tout d’abord, je devrais commencer par dire que la plupart des pays du monde n’ont pas de loi sur l’immunité des États. En théorie, dans la mesure où ils appliquent le droit international coutumier et suivent la hiérarchie des normes impératives et des normes du droit international, tous les pays qui n’ont pas adopté une loi sur l’immunité des États peuvent entreprendre ce que le projet de loi C-483 propose.
     Pour ce qui est des tribunaux qui ont conclu que les États ne jouissaient pas d’une immunité à l’égard des crimes visés par ce projet de loi, il n’y en a aucun, mis à part ceux des États-Unis, de l’Italie et de la Grèce.
    D’après vos dires, quels pays possèdent une loi sur l’immunité des États semblable à celle que nous aurions si l’on y apportait les modifications proposées?
     La minorité des pays de la planète et, ce qui est ironique, c’est qu’ils suivent la tradition de la common law et qu’ils ont adopté une loi sur l’immunité des États. Donc, pour répondre à votre question, seuls les États-Unis ont une loi sur l’immunité des États qui comporte des exceptions. Mais, pour en revenir encore une fois à la question de M. Marston, ces exceptions s’appliquent seulement aux États désignés.
    Votre réponse m’amène à ma deuxième question. Donc, en l’absence d’un traité, ne sommes-nous pas assujettis seulement au droit international coutumier qui exige qu’un État se soumette volontairement au jugement d’un autre pays? Dans ce contexte, quelle est la probabilité qu’un pays étranger — disons l’Iran — se soumette au jugement d’un tribunal canadien?
     Monsieur Grossman, vous êtes également invité à répondre.
    Voulez-vous répondre d’abord, et j’enchaînerai ensuite?
    Certainement.
     En ce qui concerne le principe selon lequel tout État avec lequel nous n’avons pas conclu un traité est tenu de se soumettre à notre compétence, je répondrais simplement qu’à bien des égards, nous avons admis que ce n’était pas le cas. Comme je l’ai déjà mentionné, le droit canadien ne reconnaît pas la notion d’immunité absolue. Nous sommes simplement en train de fixer des limites en ce moment. Donc, le point de vue selon lequel tous les États doivent nécessairement se soumettre à la compétence canadienne pour que nos tribunaux puissent porter des jugements à leur égard est une position qui a déjà été invalidée par la version actuelle de la Loi sur l’immunité des États.
     Pour ce qui est de ce qui se déroule dans la sphère privée par rapport à des enjeux comme les génocides, les crimes contre l’humanité, la torture et les crimes de guerre, encore une fois, nous ne pouvons pas vous donner une réponse complètement claire. Comme je l’ai indiqué, nous plaidons en ce moment l’affaire Kazemi. Plusieurs éléments précis de cette cause indiquent clairement qu’il est possible que nous puissions exercer notre compétence sur l’Iran, en l’occurrence l’absence de son consentement.
     De manière plus générale, j’ajouterais simplement que le consentement à l’égard de la compétence ne représente pas nécessairement le point de départ lorsqu’il est question de ces crimes ou de l’objet de ces poursuites. Il faudra déterminer au cas par cas si un État particulier se soumet ouvertement au jugement des tribunaux de notre pays. À mon avis, le projet de loi C-483 indique sans ambages aux pays étrangers que nous n’accepterons pas qu’ils tournent délibérément le dos à notre système de justice et ce, en toute impunité. Nous n’accepterons pas qu’ils déclarent n’être nullement assujettis à nos tribunaux dans ces contextes. Même si, dans le cadre de leur droit national ou de leurs interactions avec leurs citoyens, ces pays étrangers indiquent qu’ils refusent de se soumettre à nos tribunaux, les Canadiens et le gouvernement canadien décréteront qu’ils n’acceptent pas l’excuse de l’impunité lorsque les crimes sont d’une telle gravité. Selon moi, c’est la position de principe qu’adopte le projet de loi C-483.
    Pour être bref, j’ajouterais seulement avoir cru comprendre que votre question portait principalement sur l’exécution. L’exécution est une question épineuse même dans les affaires commerciales. C’est toujours un défi, même lorsqu’il s’agit de causes ordinaires. Cela dit, l’exécution n’a pas besoin d’être assujettie au consentement. Il ne serait pas nécessaire, par exemple, que l’Iran consente à l’exécution d’un jugement prononcé contre lui. Nous pourrions simplement aller de l’avant et exécuter un jugement qui viserait, par exemple, les biens non diplomatiques de l’Iran au Canada. En réalité, les pays investissent partout; il serait de bonne guerre de geler leurs avoirs, si je peux m’exprimer ainsi.
    Le temps alloué pour cette série de questions est écoulé. Cela met fin aux questions destinées aux témoins.
     Nous vous remercions beaucoup d’avoir participé à la séance. Nous allons maintenant nous occuper de quelques motions. Vous pouvez rester ou partir, mais nous vous remercions infiniment tous les deux de votre présence parmi nous aujourd’hui.
     Peut-être est-ce aussi une bonne occasion pour moi de libérer le fauteuil et pour vous de l’occuper, monsieur Silva, si vous êtes disposé à le faire.

  (1350)  

     Le comité est saisi de deux motions. Je vais les accueillir dans l’ordre où elles ont été présentées. Nous allons nous occuper d’abord de celle de M. Cotler, puis de celle de M. Marston.
     Avez-vous tous eu le temps d’examiner la motion de M. Cotler? Quelqu’un souhaite-t-il en débattre?
     Allez-y, monsieur Marston.
    Cette motion ne me préoccupe pas mais, puisque nous avons déjà adopté un rapport du comité et qu’il a été présenté au Parlement, je me demande pourquoi nous devons faire cela.
    Je pense qu’à ce moment-là, on a présenté une demande au comité. Il y a eu quelques problèmes par rapport…
    Une voix: [Note de la rédaction: inaudible]
    Le vice-président (M. Mario Silva): Exactement.
     M. Cotler pourrait peut-être répondre à cette question.
    M. Marston a raison. Nous avons produit un rapport qui traite de la quadruple menace iranienne. Depuis la publication de notre rapport, la situation en Iran s’est considérablement détériorée, surtout en ce qui concerne les violations des droits de la personne.
     C’est pourquoi nous avons tenu une audience spéciale et entendu des témoins. On m’a demandé de résumer les préoccupations et les recommandations qui ont été formulées au cours de notre audience, uniquement par rapport à la situation des droits de la personne en Iran.
    Merci.
     Quelqu’un souhaite-t-il en débattre? Y a-t-il consentement unanime?
     (La motion est adoptée.) [Voir le Procès-verbal]
    Le président: Nous allons maintenant passer à la motion de M. Marston. Avez-vous tous eu le temps de l’examiner?
     Monsieur Marston.
     J’ai cru comprendre que M. Cotler songeait à lui apporter un amendement, mais je n’ai eu aucune nouvelle de lui après. Je ne sais pas s’il a été en mesure de le faire.
     Monsieur le président, je l’ai effectivement examinée, mais j’ai pensé qu’il valait mieux la laisser telle quelle. Je crois qu’elle est appropriée dans sa forme actuelle.
     Quelqu’un souhaite-t-il en débattre? Y a-t-il consentement unanime?
     (La motion est adoptée.) [Voir le Procès-verbal]
    Le président: Merci. Je ne crois pas que nous ayons d’autres points à régler.
     La séance est levée.
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