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RNNR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources naturelles


NUMÉRO 009 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 20 avril 2010

[Enregistrement électronique]

  (0905)  

[Traduction]

    Bonjour tout le monde. C'est avec plaisir que nous reprenons notre étude sur l'état du programme — ou plutôt des programmes écoÉNERGIE, parce qu'il y en a plusieurs. Nous nous penchons aujourd'hui sur les biocarburants. Les membres de ce comité ont démontré beaucoup d'intérêt envers les biocarburants.
    Nous recevons aujourd'hui deux groupes. Le premier est formé de Jeff Passmore, ancien président de l'Association canadienne des carburants renouvelables — le président actuel, qui devait être ici aujourd'hui, ne se sentait pas très bien, d'après ce que j'ai compris, et n'a pas pu se joindre à nous —, de Valérie Patoine, ingénieur forestier, et Lise Dubé, agronome, toutes deux de la Coopérative forestière Haut Plan Vert, de même que de Catherine Cobden, vice-présidente, Économie et affaires réglementaires, de l'Association des produits forestiers du Canada.
    C'est formidable de vous avoir tous avec nous. La greffière vous a informés sur la longueur des exposés. Nous entendons généralement ceux-ci dans l'ordre où ils sont inscrits à l'ordre du jour.
    Monsieur Passmore, nous commencerons avec vous si vous êtes prêt à présenter votre exposé aux membres du comité. Alors allez-y, s'il vous plaît. Nous passerons ensuite aux questions et aux commentaires des membres du comité.
    Merci beaucoup, monsieur le président et membres du comité, et toutes nos excuses. Gord Quaiattini, le président de l'Association canadienne des carburants renouvelables, a attrapé la grippe hier; c'est la raison pour laquelle je suis ici — et heureux d'y être.
    Merci beaucoup d'avoir invité l'Association canadienne des carburants renouvelables à comparaître devant ce comité. Nous apprécions la possibilité qui nous est offerte d'être ici et de vous parler de l'histoire du secteur des biocarburants au Canada, ce qui comprend, évidemment, l'éthanol, le biodiesel, l'éthanol cellulosique et d'autres biocarburants avancés.
    C'est aussi l'histoire de nouveaux emplois, de croissance économique, de diversité énergétique, d'avantages environnementaux et de possibilités rurales — et c'est une histoire qui continue à s'écrire jour après jour. Étant donné la récente annonce sur la réglementation qui met en vigueur la norme sur les carburants renouvelables, le moment ne pourrait être mieux choisi pour partager avec vous la contribution remarquable de notre industrie et pour aider à définir les possibilités encore plus grandes qui se dessinent.
    Tout cela est possible grâce à un partenariat fructueux établi entre le gouvernement et l'industrie. Le Parlement a ouvert la voie, et l'éthanol et le biodiesel au Canada donnent des résultats.
    Je tiens à souligner le fort soutien offert à notre industrie par le gouvernement fédéral et par ce Parlement. Cela a commencé il y a plus de 10 ans avec le programme d'expansion de l'éthanol et se poursuit jusqu'à ce jour par de nouvelles politiques intelligentes qui créent les conditions d'un succès commercial. Je vous encourage à voir la norme sur les carburants renouvelables — de même que le programme écoÉNERGIE — comme des leviers facilitant l'accès aux marchés et le financement du secteur privé pour la commercialisation de nouvelles usines. Ces outils fonctionnent et ils vont continuer à fonctionner.
    Aujourd'hui, il existe 14 usines d'éthanol et 8 usines de biodiesel au Canada. De plus, deux autres usines d'éthanol et trois autres usines de biodiesel sont en cours de construction. Prises ensemble, ces raffineries représentent une capacité de production annuelle totale de 1,95 milliard de litres — juste un peu moins de 2 milliards de litres de carburants renouvelables — et fournissent du travail à des milliers de Canadiens, surtout dans les communautés rurales.
    En fait, l'expression qui décrirait le mieux le secteur des carburants renouvelables au Canada, c'est: « produire des résultats ». Des résultats qui génèrent un rendement positif sur l'investissement, qui aident à promouvoir les priorités de ce gouvernement et de ce Parlement, et qui profitent directement au Canada et aux Canadiens.
    Permettez-moi de commencer en parlant des emplois et de la croissance, particulièrement dans le contexte d'une économie mondiale qui est encore en pleine reprise, ce qui est probablement l'une des priorités les plus importantes. L'industrie des biocarburants est déjà un précieux moteur de possibilités économiques — en particulier au Canada rural, où nos usines sont habituellement construites afin d'assurer la proximité des matières premières.
    Les avantages ne pourraient être plus clairs: la création de nouveaux emplois par la construction d'installations, en passant par les opérations, de même que des emplois et des retombées économiques indirectes, une assiette fiscale plus vaste pour les administrations locales et régionales, et des revenus plus élevés pour les agriculteurs.
    En mars dernier, la firme Doyletech Corporation d'Ottawa a réalisé une étude indépendante — la toute première de ce type — afin de mesurer les retombées économiques du secteur des biocarburants au Canada. Elle a tiré les conclusions suivantes: 12 616 nouveaux emplois directs et indirects ont été créés depuis 2006 dans le cadre de la construction de nouvelles installations de production et pas moins de 1 400 nouveaux emplois sont créés chaque année pour appuyer les opérations. En ce qui concerne l'activité économique générée par la construction des usines, elle s'élève à environ 2,8 milliards de dollars, et environ 700 millions de dollars sont générés chaque année par l'exploitation de ces mêmes usines. Presque tout cela au Canada rural.
    En ce qui concerne les recettes fiscales, si l'on combine la construction et l'exploitation, le secteur des biocarburants aide à élargir l'assiette fiscale et à financer de précieux services aux paliers local, provincial et fédéral. Cela représente plus de 82 millions de dollars pour les administrations municipales, plus de 500 millions pour les gouvernements provinciaux et près de 700 millions en revenus fiscaux au niveau fédéral.
    Ce ne sont pas des prévisions ou des estimations. Ce sont des installations existantes, construites avec des briques et du mortier, qui créent de vrais emplois, qui génèrent une véritable activité économique et qui entraînent de vraies recettes fiscales.
    Parlons maintenant des avantages environnementaux. Comme vous le savez, le secteur du transport représente un peu plus de 25 p. 100 des émissions totales de gaz à effet de serre au Canada. En conséquence, il existe peu de façons plus efficaces de réduire notre empreinte carbone que de réduire notre dépendance envers les combustibles fossiles. C'est exactement ce que font les carburants renouvelables.
    Voici quelques faits: à elle seule, la norme fédérale sur les carburants renouvelables réduira les émissions de carbone de 4,2 mégatonnes, ce qui revient à retirer un million de voitures des routes de notre pays chaque année. À la fin de 2009, l'AIE a signalé que d'ici 2015, l'éthanol à base de céréales aura augmenté les réductions de GES de 55 p. 100 comparativement à l'essence.
    L'éthanol aide aussi à réduire les émissions d'échappement et les émissions toxiques.
    Finalement, selon Ressources naturelles Canada, la production d'éthanol utilise 40 p. 100 moins d'énergie que la production équivalente de combustible fossile — un chiffre qui atteint 90 p. 100 quand on parle de technologies cellulosiques.

  (0910)  

    Malgré ces faits, nous savons que certains continuent de remettre en question les avantages environnementaux nets des carburants renouvelables. Le scepticisme — qui est entretenu dans certains cas par des intérêts qui voient notre industrie comme une menace pour leurs profits — est fort. J'aimerais donc rectifier le tir.
    Pas plus tard qu'en novembre dernier était présenté le rapport le plus exhaustif jamais produit sur les avantages environnementaux des carburants renouvelables canadiens. Réalisée par Cheminfo Services Inc., cette étude a permis de tirer des conclusions irréfutables. Elle a établi que l'éthanol produit au Canada — et je parle ici de l'éthanol de première génération, produit à partir de maïs et de blé — a réduit les émissions de GES d'environ 63 p. 100 comparativement aux combustibles fossiles traditionnels. Dans le cas du biodiesel canadien — produit à partir de graisses animales et de graisses usées —, les résultats sont encore plus impressionnants: les émissions de GES diminuent de 99 p. 100 comparativement à l'essence. Ce sont des faits. Ils sont clairs, actuels, et sont le résultat d'analyses effectuées par des experts indépendants. Je demande à ceux qui pensent autrement de présenter leurs études sur les installations canadiennes et de soumettre leurs méthodes à une évaluation indépendante. Car les décisions politiques devraient être fondées sur la même rigueur intellectuelle que les carburants renouvelables.
    En résumé, que nous parlions d'emplois, de croissance économique, de réductions des GES, de bilan énergétique ou de nouvelles possibilités pour le Canada rural, la conclusion est incontestable: le partenariat entre le gouvernement et l'industrie produit des résultats et procure des avantages tangibles.
    En conclusion, permettez-moi de souligner un dernier point. J'ai volontairement insisté sur les accomplissements réalisés jusqu'à maintenant — sur les résultats que nous obtenons déjà —, mais il y a une histoire encore plus passionnante à raconter, à savoir ce vers quoi nous nous dirigeons et ce qu'il en est de la commercialisation des biocarburants avancés. Le Canada, bien qu'il lutte parfois pour garder sa place face aux investissements massifs du gouvernement américain, est néanmoins dans une position idéale pour exercer un leadership. Si nous maintenons et renforçons notre partenariat, le Canada pourra être concurrentiel et l'emporter dans ce secteur international de plus en plus important. Au moment où nous nous parlons, des gens élaborent de nouveaux carburants renouvelables en s'appuyant sur le savoir-faire de première génération dans le but de faire des gains encore plus grands sur les plans des technologies environnementales et de l'économie. Les usines de démonstration fonctionnent — des usines qui utilisent les déchets ligneux au Québec et en Colombie-Britannique, et des épis de maïs et d'autres déchets agricoles en Ontario. La technologie fonctionne. L'opportunité est là.
    Monsieur Passmore, je vais vous demander de ralentir un petit peu parce que les interprètes ont de la difficulté à suivre.
    Je vous demande pardon.
    Merci.
    Continuez, mais un peu plus lentement.
    La technologie fonctionne. L'opportunité est là. C'est à nous de relever le défi. Nous savons déjà ce que ça veut dire pour nos secteurs de l'énergie, de l'agriculture et du transport alternatifs, mais j'aimerais prendre une minute pour parler du secteur forestier et des dizaines de milliers de personnes qui en vivent. Pensons à l'Association des produits forestiers du Canada. Les biocarburants avancés représentent un nouveau bail à vie pour cette industrie, et cela redonne espoir à des communautés du Québec et du Nord de l'Ontario, ainsi que de la majeure partie du Nouveau-Brunswick et de l'Ouest. Nous pouvons réaliser le plein potentiel écologique des sous-produits et des déchets du bois. Nous pouvons créer de nouveaux carburants ainsi que davantage d'emplois au moyen de ce qui est actuellement jeté par l'industrie forestière. Ce n'est pas seulement une approche plus prospère, c'est aussi une approche plus durable du point de vue de l'environnement.
    Tirons donc parti du partenariat que nous — le gouvernement et l'industrie — avons déjà bâti ensemble. Ainsi, nous pourrons assurer la position internationale du Canada non seulement en tant que superpuissance énergétique, mais en tant que superpuissance énergétique verte.
    Merci encore pour votre leadership et pour votre vision en tant que parlementaires.

  (0915)  

    Merci beaucoup, monsieur Passmore, pour votre exposé.
    Nous continuerons dans l'ordre où les groupes ont été inscrits à l'ordre du jour, alors nous passons maintenant à la Coopérative forestière Haut Plan Vert, représentée par Valérie Patoine et Lise Dubé. Allez-y donc dans l'ordre où vous l'aviez planifié, s'il vous plaît.

[Français]

     Nous sommes Lise Dubé, agronome, et Mme Valérie Patoine, ingénieur forestier. Dans un premier temps, nous voulons vous remercier de nous avoir invitées à venir vous présenter notre projet de développement écoénergétique.
    Trois organismes du Témiscouata, la Coopérative forestière Haut Plan Vert, le Club de gestion des sols du Témiscouata et son mandataire Ferti-Conseil et le Club d’encadrement technique en acériculture, travaillent ensemble depuis trois ans pour développer un projet de production d’énergie à partir de biomasse agricole. La coopérative est ici le porteur du projet.
     La biomasse agricole se définit comme étant des granules combustibles fabriqués à partir de plantes pérennes agricoles, le panic érigé. Une filière énergétique locale se caractérise par une production cultivée et consommée localement.
     En région, nous avons l’appui des producteurs agricoles, des producteurs acéricoles, des travailleurs forestiers, de plusieurs municipalités dévitalisées et de quelques ministères provinciaux. Grâce à la mise en valeur des terres agricoles abandonnées, nous souhaitons redynamiser nos localités rurales par la production d’énergie que le milieu pourra utiliser pour répondre à ses besoins.
    L’agriculture est en déclin dans les régions rurales comme le Témiscouata. On y constate une dévitalisation importante des municipalités rurales et une diminution des superficies en culture. L’abandon de la production animale et l’absence de rentabilité de la production de petites céréales et de foin sur de petites superficies ont amené les propriétaires à délaisser ces champs ou à demander leur reboisement. À l'échelle provinciale, le MAPAQ estime qu’il y aurait un total approximatif de 100 000 à 150 000 hectares de terres en friche ou marginales qui pourraient devenir disponibles pour la production de plantes énergétiques. Au Témiscouata, on évalue que 10 000 hectares de terres cultivées se sont perdus, entre 1997 et 2004, dans quatre municipalités situées dans un rayon de 20 km.
    Le Bas-Saint-Laurent représente la deuxième région productrice de sirop d’érable en importance au Québec, avec quelque 8 millions d’entailles et 20 millions de livres de sirop d’érable annuellement. À lui seul, le Témiscouata regroupe 5 millions d’entailles, soit près de 7 p. 100 de la production canadienne. Pour produire 1 gallon de sirop, il faut en moyenne 0,6 gallon d’huile de chauffage. Au Bas-Saint-Laurent, nous consommons près de 4 millions de litres d’huile, uniquement pour la production acéricole par année. Au Témiscouata, c’est 2,5 millions de litres de mazout.
    Ensemble, les cultures énergétiques sur les terres en friche et le besoin des acériculteurs en énergie peuvent devenir une force de développement régional et local. Un premier impact est la revitalisation du milieu rural en créant une nouvelle activité économique. La culture du panic érigé sur les terres en friche nous permettrait de produire un granule énergétique qui serait utilisé par les acériculteurs, localement, pour l’évaporation de leur eau d’érable.
    De plus, plusieurs études confirment que les bilans énergétiques et les bilans des gaz à effet de serre sont positifs dans la production et l’utilisation de plantes pérennes comme granules énergétiques. Une filière énergétique locale, novatrice, à base d'énergie verte renouvelable est née.
    Dans notre région, depuis trois ans, nous expérimentons la culture du panic érigé sur 10 hectares. Les résultats obtenus nous encouragent à poursuivre sur une plus grande échelle. La mise en terre de 2 000 hectares de panic érigé permettrait l’alimentation de tous les producteurs acéricoles du Témiscouata.

  (0920)  

    Plusieurs avantages économiques découlent de ce projet. Les propriétaires de terrain trouveront un nouveau revenu. Pour les communautés, c'est une nouvelle activité économique. En somme, c'est une solution locale à la crise du revenu pour les producteurs agricoles. Une réduction de l’ordre de 20 à 40 p. 100 des coûts énergétiques pour les acériculteurs rendra cette activité économiquement rentable. Ces coûts seront plus stables et mieux connus.
    D’autre part, ce circuit court possède des avantages environnementaux importants. Plusieurs études démontrent la diminution de 85 à 90 p. 100 des émissions de CO2 lors de la combustion du granule de panic érigé en remplacement du gaz naturel ou du mazout. Le remplacement de 3 millions de litres de mazout annuellement par une énergie verte renouvelable n’est pas négligeable. Le transport de ces litres provenant des grands centres ne sera plus nécessaire. Nous éliminons également le risque de déversement de mazout dans un milieu naturel sensible. Pendant sa croissance, le panic érigé séquestre l’équivalent du carbone émis lors de sa combustion, c’est une énergie à émission de gaz à effet de serre pratiquement neutre.
    Les éléments naturels pour la réussite de ce projet sont réunis. Le milieu possède les terres en friche et le marché potentiel. Nous avons les connaissances de base sur les techniques de culture. La technologie de granulation est bien connue. Le projet de circuit local en énergie présente des avantages économiques et environnementaux pour les producteurs agricoles et acéricoles, et aura l’effet de redynamiser le milieu. Nous avons les ressources humaines et l’énergie nécessaire à sa mise en place. C’est un beau moyen de contrer la crise énergétique en assurant un prix stable à des producteurs acéricoles. C’est une méthode simple pour contrer la dévitalisation des régions et le déclin de notre agriculture. Encore une fois, c'est un excellent moyen de réduire la pollution autant atmosphérique que terrestre.
    Cependant, l’équilibre du développement demeure un grand défi. Aucune structure de la sorte n’est encore sur pied. Sécuriser l’approvisionnement de biomasse de qualité, la transformer et la distribuer dans un rayon maximum de 100 km demeure l’enjeu.
    Le propriétaire de terres doit investir approximativement 1 200 $ à 3 500 $ l’hectare et patienter trois ans avant de faire une vente. À court terme, nous ne pouvons pas lui assurer l’achat de sa future récolte, puisque les acériculteurs n’ont pas encore les évaporateurs appropriés. La technologie pour utiliser le granule dans les évaporateurs existe, mais l’acériculteur devra renouveler son évaporateur et son réservoir d’entreposage. C'est un investissement de l'ordre de 20 000 $ à 60 000 $, selon sa production.
    Il s’agit d'obtenir l'appui financier permettant la réalisation du plan d'action que l'on vous propose ici: encourager et faciliter le transfert de l’huile vers la biomasse chez les acériculteurs; fournir l'expertise agronomique aux producteurs agricoles; accroître significativement le nombre d’hectares en culture et améliorer les connaissances en ce qui a trait aux facteurs agronomiques dans des régions comme la nôtre; diminuer les risques liés à la coordination du marché des différents acteurs afin de faciliter la prise de décision et d'accélérer l’atteinte de volumes de production économiquement viables; réaliser la mise en place de l'étape de la transformation; et, finalement, soutenir les producteurs agricoles dans la conversion vers des cultures énergétiques.
    En terminant, nous tenons à vous remercier pour votre écoute attentive. Le fait de nous avoir invitées est déjà pour nous une conviction supplémentaire. Ce voyage stimule notre engouement à aller de l'avant. Ensemble, nous en sommes convaincues, nous trouverons les moyens pour faire de nos terrains marginaux un apport économique et énergétique intéressant pour tous, et, il va de soi, pour le Canada.

[Traduction]

    Merci, madame Patoine et madame Dubé, pour votre exposé. Nous passerons plus tard aux questions.
    Nous avons comme dernier témoin Catherine Cobden, vice-présidente, Économie et affaires réglementaires, à l'Association des produits forestiers du Canada.
    Je vous remercie de votre présence. Vous pouvez commencer votre exposé, s'il vous plaît.
    Bonjour à tous, et merci beaucoup, monsieur le président et membres du comité, d'avoir invité l'industrie forestière à venir vous parler aujourd'hui de ce sujet important.
    J'aimerais commencer en vous parlant un peu du contexte économique. Je suis certaine que vous en êtes bien conscients, mais l'industrie forestière fait face à de graves difficultés économiques sur le marché international. Les raisons de ces difficultés sont nombreuses, à commencer par l'effondrement économique de nos principaux partenaires commerciaux.
    Vous devez savoir que nous ne sommes pas demeurés passifs devant ces problèmes économiques. En effet, nous avons fait des efforts considérables pour améliorer notre productivité. Je crois que nous avons maintenant distancé nos homologues américains et que nous sommes le seul secteur canadien à en faire autant en matière de productivité.
    Nous avons travaillé très fort pour élargir nos marchés. Nous ne pouvons plus nous appuyer simplement sur les États-Unis comme principal partenaire commercial; nous développons nos marchés internationaux, notamment en Asie. Nous sommes maintenant, par exemple, le principal exportateur vers la Chine.
    Nous continuons à promouvoir notre programme vert. Nous nous efforçons d'accroître nos compétences environnementales afin de pouvoir aussi devenir le fournisseur privilégié sur le marché des produits écologiques.
    De plus, notre secteur doit revoir son modèle de fonctionnement. Nous sommes particulièrement intéressés par les possibilités qui nous permettraient d'obtenir un meilleur rendement de nos ressources forestières. Ainsi, nous avons lancé tôt l'an dernier ce que nous appelons le Projet de la voie biotechnologique. Il s'agit d'une étude exhaustive qui examine trois objectifs complémentaires. Premièrement, comment transformons-nous le secteur forestier afin qu'il redevienne rentable? Deuxièmement, comment protégeons-nous les 270 000 emplois canadiens en région rurale qui existent déjà au sein de l'industrie forestière? Troisièmement, comment aidons-nous le Canada à saisir la chance unique qui lui est offerte de devenir un géant de l'énergie propre et de l'énergie renouvelable au sein de l'économie mondiale?
    Vous avez reçu une copie du rapport sur la voie biotechnologique. Il vous a été distribué à l'avance, et je vous encourage vivement à le lire, mais j'aimerais d'ici là attirer votre attention sur certains points. Ce rapport n'a pas été préparé en vase clos, et l'industrie forestière a reconnu qu'une grande partie du leadership dans ce domaine n'appartenait pas à notre secteur. Nous avons donc invité des experts pour nous appuyer, et tout au long du projet, au moins 65 experts ont joué un rôle très actif dans la rédaction du rapport. Ces experts représentaient le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux, les universités — certains des plus brillants esprits que le pays compte dans ce domaine —, les fournisseurs de technologie, qui apportent de fantastiques innovations, nos membres, qui avaient réellement besoin de comprendre les implications technologiques, économiques et sociales de ces choses, et, ce qui est tout aussi important, la communauté financière. Ce projet a en fait été dirigé par M. Don Roberts, qui est actuellement vice-président à la Banque CIBC.
    Qu'avons-nous fait? Nous avons analysé 27 technologies, tant traditionnelles qu'émergentes, puis nous les avons comparées à une panoplie de modèles pour déterminer ce qui se serait passé si nous avions agi de telle ou telle façon. Nous les avons ainsi évaluées en fonction de centaines de configurations. Nous avons aussi évalué les implications économiques, sociales et environnementales de ces différentes technologies. Les résultats se sont avérés très intéressants, et j'aimerais partager nos conclusions avec vous.
    Bien entendu, certains secteurs de notre industrie sont inébranlables et s'appuient sur des principes de fonctionnement très solides. Même si les difficultés se font actuellement ressentir, le secteur du bois d'œuvre, par exemple, s'appuie sur des principes de fonctionnement solides et retrouvera un fonctionnement optimal. Nous reconnaissons cependant que certains autres secteurs exigent des modifications, que le statu quo ne suffit tout simplement pas. Nous avons découvert, en appliquant ces différents modèles, que l'intégration de la production de bioénergie et de bioproduits aux opérations forestières existantes s'avère très profitable du point de vue économique. Par ailleurs, cela crée aussi cinq fois plus d'emplois que la production indépendante de bioénergie. Il s'agit donc d'une situation solide et avantageuse pour tout le monde — tant du point de vue économique que social — qui permet en plus de bénéficier des avantages environnementaux que présente la gestion durable des forêts, qui est la stratégie de l'industrie pour l'avenir.

  (0925)  

    L'intégration de la production de bioénergie ou de biocarburant à une usine de pâte à papier, à une scierie ou à une usine de papier fait substantiellement augmenter les retombées économiques. Ça vaut dans les deux cas, par ailleurs. Il y a l'activité hôte — les opérations de l'industrie forestière — et l'activité de production de bioénergie. Nous avons examiné la situation des deux points de vue, et dans les deux cas, le rendement du capital, par exemple, augmentait.
    En ce qui concerne les biocarburants, nous avons évalué de manière exhaustive les technologies qui s'y rapportaient — parmi les 27 que nous avions sélectionnées — et nous avons déterminé qu'il s'agissait d'un moyen à préconiser dans le cadre de la transformation de l'industrie. La conjugaison des possibilités liées aux biocarburants et des opérations forestières constitue une stratégie économique gagnante. Il n'y a pas d'autre manière de dire les choses.
    Je vais vous donner un exemple. Si on associe une usine de pyrolyse — une technologie typique en matière de biocarburant qui fait partie des exemples que nous avons étudiés — à une scierie au Québec, les retombées économiques atteindront 24 p. 100. C'est beaucoup mieux que la moyenne sectorielle au pays, qui tourne autour de 3 ou 4 p. 100. Les retombées économiques sont donc, comme je l'ai dit, une stratégie gagnante pour notre secteur.
    Dans ce contexte, la question qui se pose est la suivante: à quoi sert le financement du gouvernement? Pourquoi avez-vous besoin de nous? Quel est le but? Si ces chiffres sont réalistes, il ne fait pas de doute que les investisseurs afflueront. Tout à fait, mais le gouvernement a un rôle à jouer à court terme afin d'accélérer l'adoption de ces technologies. Pour dire les choses simplement, ces technologies ne sont pas encore tout à fait prêtes à être commercialisées. Nous espérons vivement que les gouvernements songent à promouvoir des mesures telles que la recherche et le développement continus — il est clair que ça représente pour nous une formidable possibilité —, le financement de projets pilotes et le premier mouvement de commercialisation.
    Il n'en demeure pas moins qu'il s'agit là des aspects les plus risqués de l'adoption de ces technologies. Être le précurseur dans la mise en marché d'une technologie représente un énorme risque économique, un risque beaucoup plus grand que celui que doit assumer le troisième ou le quatrième promoteur, par exemple. Nous recherchons donc réellement des possibilités de voir cela adopté. D'autres mesures incitatives, notamment à l'intention des producteurs, contribuent aussi à accélérer l'adoption de ces technologies.
    Ce n'est pas que ces mesures soient inefficaces, mais notre industrie cherche en fait à ce que ces technologies franchissent la première étape de commercialisation. Nous croyons réellement que le modèle que nous proposons — l'intégration de la bioénergie à l'industrie forestière — donnera des résultats économiques tels qu'il pourra fonctionner de manière autonome à long terme et qu'il ne nécessitera pas d'appui financier du gouvernement. Nous pouvons faire ça par nous-mêmes; il faut seulement que la technologie soit bien implantée sur le marché.
    Je sais que le gouvernement fédéral a été très clair lors du dernier budget sur le fait qu'il comprend et appuie notre stratégie de biotransformation. Le budget 2010 a établi l'initiative de prochaine génération en matière d'énergie renouvelable. Nous croyons qu'il s'agit là d'un engagement envers notre secteur et notre vision du changement. Nous croyons réellement que cela nous aidera à atteindre nos objectifs dans ce domaine.
    Monsieur le président, en tant qu'acteurs potentiels de ce secteur, nous nous permettons de présenter au comité un certain nombre de suggestions au moment où vous examinez les mécanismes de financement qui sont offerts dans ce domaine pour faire une mise au point. Par exemple, nous vous suggérons — comme nous l'avons mentionné plus tôt — de mettre l'accent sur l'adoption des technologies, ce qui ferait réellement progresser les technologies de l'étape de la recherche et du développement à celle de la première commercialisation. Vous pouvez faire cela à l'aide de méthodes de financement directes, comme nous l'avons dit, ou au moyen d'incitatifs à l'intention des producteurs, par exemple. Toutes ces mesures favorisent l'adoption des technologies.
    Dans la mesure du possible, nous vous encourageons vivement à donner à ce financement une large orientation — une orientation davantage axée sur le marché que sur les technologies ou les matières premières. Il est très important pour nous que ces fonds ne soient associés à aucune technologie ou matière première particulière. Pourquoi? Parce que notre analyse nous a démontré que l'on peut penser avoir un choix technologique ou économique optimal, mais que notre point de vue peut être trop restreint. D'autres technologies, en se développant progressivement, peuvent en effet devenir la meilleure solution économique. Il s'agit en fait de ne pas classer trop vite les perdants ou les gagnants lors du processus de développement.
    Nous suggérons aussi, lorsque cela s'applique, que vous façonniez votre approche de manière à encourager l'intégration de l'industrie forestière à la production de bioénergie.

  (0930)  

    Je le répète: nous avons découvert qu'il s'agit là d'une stratégie économique gagnante pour l'industrie mais aussi pour le secteur émergent de la bioénergie. Les paramètres économiques élémentaires — tout comme les emplois — démontrent que la combinaison de ces deux choses se révèle beaucoup plus avantageuse.
    Finalement — et cela revêt une très grande importance pour notre secteur —, nous devons veiller à ce que tout ce que nous faisons dans ce domaine garantisse des pratiques d'exploitation des ressources durables et continues, et nous devons aussi nous assurer de ne pas atteindre un point où la pression sur les ressources serait telle que nous en serions réduits, comme le disent nos amis environnementalistes, à aspirer le tapis forestier.
    L'industrie forestière canadienne demeure fermement convaincue de la nécessité de conserver des pratiques de gestion forestière durable. Notre engagement à cet égard nous a réellement permis de nous démarquer sur le marché. Il est très important que nos décisions en ce qui a trait à la bioénergie et à la fibre forestière ne nous ramènent pas en arrière à cet égard.
    Monsieur le président, j'espère que ces remarques vous sont utiles. J'aimerais à nouveau vous remercier au nom de l'Association des produits forestiers.

  (0935)  

    Merci beaucoup, madame Cobden.
    Passons maintenant aux questions et aux commentaires. Monsieur Regan, vous avez sept minutes.

[Français]

    Si vous comprenez les deux langues et que vous vouliez simplement écouter dans la langue de l'intervenant avec le dispositif, c'est le troisième canal, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais commencer avec M. Passmore.
    Vous avez mentionné que le Canada lutte, comparativement aux États-Unis, en ce qui concerne le financement accordé par les gouvernements pour promouvoir et développer les biocarburants. J'aimerais savoir à quel endroit se situe le Canada par rapport aux autres pays, comme les États-Unis, à cet égard.
    Aussi, nous entendons dire que les nouvelles initiatives des Américains inspirent confiance et fournissent de meilleurs incitatifs, qu'elles attirent par conséquent les investissements et que cela désavantage en quelque sorte le Canada. J'aimerais aussi connaître vos commentaires à ce sujet.
    Je crois que notre voisin du Sud se montre très énergique en ce qui concerne son mandat et ses objectifs en matière de carburants renouvelables. La soi-disant norme révisée sur les carburants renouvelables — la RFS2 de 2007 — établissait, je crois, une cible de 36 milliards de gallons de carburant renouvelable d'ici 2022. Trente-six milliards de gallons, juste pour mettre les choses en perspective, c'est environ trois fois et demie la consommation d'essence totale du Canada. C'est environ 30 p. 100 de la consommation d'essence des États-Unis. Il s'agit donc d'un objectif audacieux. Un certain nombre de politiques ont été mises en place pour atteindre cet objectif.
    Je dois dire qu'en ce moment, environ 14 milliards de gallons d'éthanol à base de céréales — entre 12 et 14 milliards de gallons — sont produits aux États-Unis. Cela dépasse la consommation d'essence totale du Canada, puisque nous consommons environ 10 milliards de gallons d'essence.
    Pour atteindre cet objectif de 36 milliards de gallons, les États-Unis ont mis en place une panoplie de politiques, parmi lesquelles des crédits d'impôt sur la production, des subventions, un appui à long terme pour la recherche, le développement et la démonstration, des programmes de garantie de prêts. Bref, une multitude d'initiatives stratégiques.
    Je pense que l'adoption de la norme et du règlement sur le carburant renouvelable, de même que ce 5 p. 100, en moyenne, qui entrera en vigueur en septembre 2010, permettra réellement au Canada de rattraper non seulement les États-Unis, mais aussi le reste du monde. Le monde entier se dirige vers les biocarburants. Bruxelles a aussi comme objectif d'atteindre 10 p. 100 de carburants renouvelables d'ici 2020.
    C'est donc un bon pas en avant que le Canada a fait en exigeant 5 p. 100 d'ici septembre 2010. Je pense que cela nous permet de rejoindre le monde.
    Merci.
    En ce qui a trait au financement, vous parliez de nombres absolus. Je ne parlais évidemment pas de nombres absolus. Je ne suis pas surpris que nous consommions beaucoup moins d'essence au Canada qu'aux États-Unis. Mais nous entendons toujours dire que les États-Unis dépensent beaucoup plus par habitant que le Canada.
    Madame Cobden, vous hochez la tête. Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
    Oui.
    Pour notre industrie, il ne sera jamais vraiment possible de concurrencer le trésor américain dans ce secteur. Ils sont très dynamiques, et ils ont beaucoup d'argent. On le voit bien.
    À notre avis, il faut voir quels sont nos avantages naturels. Quel est l'avantage stratégique canadien, et comment pouvons-nous l'exploiter au mieux afin de devenir des acteurs internationaux stratégiques dans ce domaine? Je pense qu'il faut prendre un peu de recul.
    C'est l'une des raisons pour lesquelles nous réclamons une stratégie sur l'énergie propre : il nous faut faire un examen de la situation internationale. À ce niveau-là, nous devons nous améliorer pour attirer des investissements dans le secteur énergétique canadien. Il faut réfléchir à la façon dont nous pouvons le faire, et exploiter nos avantages naturels.

  (0940)  

    Merci.

[Français]

    Ma prochaine question s'adresse à Mme Dubé et Mme Patoine, et aussi à Mme Cobden.
    Dans le budget de 2010, on propose un programme d'un milliard de dollars répartis sur trois ans pour la transformation des pâtes et papiers. Selon vos expériences, à quel degré de complexité vous attendez-vous pour ce qui est de soumettre une demande afin de bénéficier d'un tel programme? Quelles sont vos recommandations pour améliorer l'efficacité d'un tel processus, pour éviter des problèmes lors de la soumission des demandes?
    C'est avant tout l'accès des petits groupes qui pose un problème. On est des petits groupes et on agit localement. Pour nous, c'est vraiment l'accessibilité qui fait défaut. Depuis trois ans, on travaille et on n'a rien trouvé pour nous soutenir, même avec ce programme. C'est probablement parce qu'on est petits qu'on n'a pas accès à ces crédits. Je recommande donc qu'on rende cela le plus accessible possible. Il s'agirait peut-être de simplifier le processus. Notre recommandation serait qu'on donne l'accès à des groupes comme le nôtre.
    On parlait de production locale, de culture locale, de consommation locale. On pense que ce modèle pourrait être appliqué dans toutes les régions rurales du Canada. S'il y a d'autres groupes comme le nôtre à d'autres endroits, ils doivent vivre les mêmes difficultés. Une des recommandations serait de faciliter l'accès à ce financement à des groupes comme le nôtre.

[Traduction]

    Madame Cobden, compte tenu de votre expérience, pensez-vous que l'application de ce programme va entraîner des complications?
    Si vous voulez parler du programme vert de transformation des pâtes et papiers, ça marche plutôt bien jusqu'à présent, et c'est étonnant. Nous en sommes très satisfaits. Je dis « étonnant » parce que ce sont des sommes importantes à débloquer dans un laps de temps relativement court.
    Je tiens à dire publiquement qu'à notre avis, c'est un très bon programme. Il ne faut pas oublier qu'il est la conséquence directe d'un problème de compétitivité que nous avions aux États-Unis, où nos concurrents ont accès à des sommes bien plus importantes que 1 milliard de dollars. Je crois qu'aux dernières nouvelles, ils en étaient à environ 8 milliards de dollars. Le Canada a essayé de voir comment on pouvait rétablir des règles plus équitables pour tous, avant que toutes nos papeteries ne soient obligées de fermer leurs portes. C'est donc à cette situation qu'il fallait parer.
    Le programme n'est peut-être pas parfait, et il n'offre peut-être pas des solutions dans tous les cas, mais la situation était critique et, pour l'instant, il fonctionne bien.
    Merci, monsieur Regan.
    Je vais maintenant donner la parole à M. Guimond, du Bloc québécois, pour sept minutes.

[Français]

    Bonjour aux témoins.
    Merci particulièrement à vous, Mme Dubé et Mme Patoine, d'avoir quitté votre beau Témiscouata pour venir nous dresser le portrait de ce que vous faites depuis quelques années, qui est très novateur et très différent. Vous l'avez très bien expliqué dans votre présentation plus tôt. On peut même dire que c'est réellement la base d'un développement durable.
    J'aimerais que vous précisiez certaines choses à mes collègues qui sont autour de la table. Vous avez parlé de redynamiser l'agriculture. Vous avez parlé de produire de la bioénergie pour les acériculteurs. Cependant, quelle est la ligne réelle entre l'agriculture et la production de biodiesel pour les acériculteurs? Quelle est la situation du Témiscouata par rapport à cela, et pourquoi en êtes-vous rendues, depuis trois ans, à réfléchir à un projet comme celui-ci?

  (0945)  

    Ça a été une longue réflexion. Cela fait 20 ans que je suis agronome dans ce secteur. Mon analyse est horizontale, mais on observe une augmentation des terres en friche. Également, au sujet des agriculteurs, il faut dire que ceux-ci ont en moyenne 50 ans, qu'il n'y a pas de relève agricole et qu'ils ont abandonné la production animale, laitière et bovine. Ils se retrouvent avec des terres, et la production de céréales et de foin n'est pas rentable sur de petites superficies. Pour vous donner un ordre de grandeur, les plus grosses exploitations — il y en a quelques-unes — sont de 600 acres. C'est très petit pour une exploitation, il y a absence de rentabilité, absence de relève agricole. Lentement, les gens délaissent cette activité et laissent passer le temps jusqu'à la retraite.
    La culture des plantes énergétiques offre la possibilité d'être faite sur des terres que ces gens-là laisseraient à l'abandon. La culture est assez semblable à celle des céréales, donc un léger transfert de connaissances doit se faire. On peut utiliser les équipements qui sont sur les fermes, on peut semer avec ces équipements, on peut récolter, donc cela ne nécessite pas beaucoup d'investissement. Ce que les gens recherchent, c'est une culture qui leur permettrait d'avoir un meilleur revenu, qui demande peu d'intrants, peu de main-d'oeuvre, parce qu'ils n'y a pas de main-d'oeuvre agricole. C'est l'avantage et l'intérêt qu'ils y voient. Il s'agit de petites localités où il y a un ou deux agriculteurs par village, et quand l'un disparaît, c'est comme de perdre 100 entreprises dans une moyenne ou une grande ville.
    Pour nous, ça a un gros impact. On parle de la survie des écoles, du bureau de poste, des institutions de base dans un village — ce qui va le dynamiser. Quand on parle de redynamisation d'un milieu rural, il s'agit de remettre ces superficies en culture, ce qui créera de l'emploi. Les gens vont cultiver, acheter et vont y rester. Ces gens qui sont en fin de carrière, après avoir abandonné la production laitière, ont quand même beaucoup d'expérience derrière eux. Ils veulent l'utiliser pour se diriger vers une culture qui peut rendre la relève intéressante, permettre l'établissement d'une relève à prix abordable. Ce sont des éléments qui font qu'il y a de l'intérêt de la part des producteurs agricoles. En ce qui concerne les producteurs acéricoles, je laisserai Mme Patoine répondre.
    Vous avez mentionné que vous travaillez à ce dossier depuis trois ans, essayez donc d'expliquer à mes collègues quelle a été l'ampleur du travail pour un très petit groupe comme le vôtre, dans une région éloignée.
     Avez-vous trouvé de l'aide ou des gens pour vous appuyer? Depuis trois ans, comment avez-vous procédé pour atteindre les résultats que vous avez aujourd'hui?
    Pour ma part, il faut dire que je suis appuyée de 100 producteurs. Ils me soutiennent. J'y ai mis le temps, depuis trois ans, en fait de réunions, et j'y ai mis l'énergie. Bien entendu, on avait quelques producteurs convaincus. Entre autres, un producteur était convaincu qu'il fallait se diriger vers le domaine énergétique dans le secteur agricole. Cela a extrêmement aidé. Il est certain que lorsqu'on s'est adressés aux gouvernements, aux organismes de développement local, il a fallu convaincre les gens que la redynamisation d'un milieu rural passe par l'agriculture et par une consommation locale. C'est le principal défi parce que c'est un concept tout nouveau. Produire et consommer localement est quelque chose de très nouveau pour plusieurs personnes. On doit convaincre tous les paliers gouvernementaux de ce principe.

  (0950)  

    Après trois ans, quels sont vos besoins réels? De quoi avez-vous besoin pour être en mesure, à partir de demain, de mener à bien votre projet, et peut-être d'autres projets, j'espère, dans la région, au Québec et partout au Canada? Vous l'avez bien mentionné, c'est admissible dans toutes les régions rurales du Canada. Quels sont donc vos besoins réels, précis? Que doit faire le gouvernement pour vous appuyer adéquatement?
    Il faudrait un soutien financier aux agriculteurs leur permettant de se convertir aux énergies vertes, aux cultures renouvelables sur le plan énergétique. Il faudrait aussi un soutien financier pour permettre le transfert de connaissances nécessaires pour cultiver cette énergie renouvelable et un soutien financier pour mettre sur pied une filière de consommation, de production et de vente locale.
    Il faut mettre en place tous les chaînons de cette chaîne, la production, la transformation et la consommation. Il faut des mesures incitatives permettant aux agriculteurs de se convertir à ces cultures parce qu'elles ne sont pas admissibles. Ce n'est pas comme les céréales ou le foin. Nous ne connaissons aucun programme de soutien financier agricole pour ces cultures. Il faut les inciter à convertir ces superficies sur le plan de la transformation. Des mesures incitatives pour les acériculteurs et les poêles à granules permettrait également à ce type de circuit de démarrer.
    Merci, monsieur Guimond.

[Traduction]

    Monsieur Atamanenko, avez-vous des questions?
    Allez-y, vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci à tous les témoins de comparaître devant nous aujourd'hui.
    J'aimerais, pour commencer, vous poser deux petites questions, madame Cobden. Je n'ai pas très bien compris ce que vous vouliez dire par pyrolyse dans les scieries. Pourriez-vous nous donner des explications?
    Vous avez également dit que les fonds devraient être neutres sur le plan technologique. Je ne vois pas très bien ce que vous voulez dire.
    Ce que vous décriviez paraît intéressant, novateur et excitant, et je me demande si vous pouvez nous donner des exemples à l'étranger, exemples dont vous vous inspirez pour mettre au point cette nouvelle technologie.
    Je vais m'en tenir là pour l'instant, mais j'aurai d'autres questions plus tard.
    La pyrolyse n'est qu'une des 27 technologies que nous avons étudiées. Ce qui est très curieux, à mon avis tout au moins, c'est que cette technologie permet de convertir du bois à l'état solide en carburant liquide en moins de deux secondes.
    Puis-je vous interrompre?
    En théorie, le dendroctone du pin pourrait le faire tout aussi bien, non?
    En effet.
    Bien.
    C'est la technologie, et je suppose que vous ne voulez pas entrer dans les détails techniques.
    Par neutre sur le plan technologique, je veux dire qu'il faut éviter de dédier des fonds à telle ou telle technologie et pas à d'autres. Nous en avons étudié 27, et il y en a des dizaines d'autres, peut-être 30 ou 40, qui paraissaient aussi très prometteuses, mais que nous n'avons pas pu évaluer par manque de données solides. Avec le temps, nous réussirons à rassembler suffisamment de données et nous constaterons peut-être que ces technologies sont vraiment très intéressantes.
    L'essentiel c'est de ne pas limiter un fonds à des technologies particulières, mais de penser plutôt au produit final que l'on recherche. Ai-je répondu à votre question?
    Oui.
    Ce que nous avons fait sur le plan international? Eh bien justement, lorsque nous avons lancé ce projet... nous avons reçu des réactions de nos collègues de l'étranger qui nous demandent de venir présenter les résultats de nos recherches chez eux parce que personne n'a encore fait ça. C'est une étude unique en son genre car elle englobe les caractéristiques économiques et certains avantages environnementaux de cette technologie, pour l'industrie forestière, et nous avons même été surpris d'être considérés comme de véritables chefs de file dans le domaine. Je vais me rendre en France le mois prochain, ainsi qu'en Chine, pour en parler, parce que les gens là-bas n'ont pas encore fait de recherches là-dessus. On parlait justement tout à l'heure de tirer parti de nos avantages. Il faut saisir l'occasion lorsqu'elle se présente.

  (0955)  

    Oui. Merci.
    J'aimerais adresser ma question à M. Passmore ou aux autres témoins, s'ils veulent y répondre. Des études ont été faites aux États-Unis et en Europe qui remettent en question non seulement la rentabilité des biocarburants d'origine agricole, mais aussi leur impact net sur l'environnement, qui pourrait être négatif. Je sais que cela a créé beaucoup d'emplois dans le secteur rural au Canada, mais ce n'est pas de cela dont il est question.
    À l'article 140 de notre loi sur les biocarburants, on prévoit une analyse globale des aspects environnementaux et économiques de la production de biocarburants un an après l'adoption de la loi et tous les deux ans après ça. Pensez-vous que ce soit une bonne idée ?
    Un article a paru dans le Vancouver Sun, qui remettait en question la rentabilité des biocarburants. Je n'ai pas besoin de le citer étant donné que votre président l'a réfuté dans un autre article. Dans votre déclaration liminaire, monsieur Passmore, vous avez indiqué qu'une étude faite par une entreprise indépendante avait abouti à d'excellents résultats en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre, 63 p. 100, et 99 p. 100 pour le biodiesel. Pensez-vous que nous devrions entreprendre une étude de tous les biocarburants de seconde génération?
    Premièrement, en ce qui concerne les avantages environnementaux de l'éthanol de première génération ou à base de céréales, disons simplement que, surtout si l'on parle des usines canadiennes... il se peut que certaines usines du Midwest américain soient alimentées au charbon et que par conséquent les réductions des émissions de gaz à effet de serre soient modestes, mais au Canada, les usines de production d'éthanol sont alimentées au gaz naturel, et les réductions des émissions de gaz à effet de serre y sont supérieures à 40 p. 100, en comparaison avec l'essence. C'est la situation au Canada.
    Pour ce qui est de l'analyse de rentabilité qui a été faite, il faut savoir que ce n'est qu'une ébauche, et, comme vous l'avez constaté, nous avons publié un article réfutant certains des faits et chiffres utilisés dans l'analyse, laquelle, en fait, portait principalement sur les coûts et pas vraiment sur les avantages. Nous avons l'intention de discuter avec Environnement Canada des lacunes de cette étude, notamment le prix à long terme de 58 dollars le baril de pétrole, et le fait qu'elle ne tient pas compte des 2,8 milliards de dollars investis par le secteur des énergies renouvelables dans la création d'emplois. Les auteurs de l'étude attribuent également à l'éthanol un prix qui va exactement à l'opposé de la tendance actuelle, puisque l'essence coûte plus cher que l'éthanol depuis trois ans et qu'ils avaient prévu le contraire.
    Nous allons bien sûr réagir, et nous espérons que, dans sa forme finale, l'étude portera sur certains avantages plutôt que simplement sur les coûts.
    S'agissant de l'analyse globale dont vous parlez, nous sommes tout à fait d'accord. Ce serait un pas dans la bonne direction.
    Merci.
    Avez-vous d'autres commentaires?
    Ces commentaires devront être très brefs car votre temps est pratiquement écoulé.
    Merci.
    Avez-vous de brefs commentaires à faire?
    Madame Dubé.

[Français]

    À ce sujet, j'aimerais mentionner que ce sont des cultures pérennes, des cultures qui nécessitent peu d'intrants. Sur le plan environnemental c'est quand même très intéressant. La culture pérenne, le panic érigé, pousse d'elle-même. Elle va être plantée là pendant 10 ans et plus. Sur le plan environnemental, c'est très positif. Une tonne de panic érigé peut enlever jusqu'à 22 kg de CO2. Puisqu'elle utilise peu d'intrants et qu'elle contrôle l'érosion des sols, elle est une culture très acceptée sur le plan social.

[Traduction]

    Merci, et merci à vous, monsieur Atamanenko.
    Je vais maintenant donner la parole à un député ministériel, Mme Gallant, pour sept minutes. Cela mettra un terme à la série de questions adressées à ce groupe de témoins, après quoi nous passerons au second groupe.
    Madame Gallant, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis heureuse d'apprendre que nous rattrapons les États-Unis. Le Canada avait accumulé beaucoup de retard lorsque nous avons pris le pouvoir, et c'est réconfortant de savoir que les investissements du gouvernement dans les biocarburants ont vraiment encouragé la production de carburants renouvelables au Canada.
    Le Canada a-t-il suffisamment de ressources sur son territoire pour atteindre son objectif annuel de 5 p. 100 d'énergies renouvelables dans sa consommation d'essence? Je me contenterai d'un oui ou d'un non.

  (1000)  

    Oui.
    Un oui catégorique? Bien.
    L'industrie est-elle prête à convertir du bois en diesel ou en éthanol? En sommes-nous à l'étape de la production, ou simplement à celle de la recherche?
    Nous en sommes aux étapes finales des projets pilotes. Autrement dit, nous avons largement dépassé le stade de la recherche et nous sommes plus près de celui de la commercialisation. D'après notre étude, l'industrie forestière envisage très sérieusement de lancer des projets pilotes pour amener la technologie à l'étape suivante. C'est à ce niveau que nous avons besoin d'aide.
    Ce projet pilote reçoit-il l'aide d'un programme gouvernemental?
    Probablement du programme écoÉNERGIE pour les biocarburants, et les crédits ont sans doute déjà été débloqués. La question est maintenant de savoir quelle sera la prochaine occasion à saisir.
    Parfait.
    Il convient de faire la distinction entre le bois dur et le bois tendre. Certaines technologies fonctionnent mieux avec des bois durs, et sont plus prêtes à être commercialisées. D'autres sont mieux adaptées au bois tendre. S'agissant par exemple de l'infestation par le dendroctone du pin, l'Université de la Colombie-Britannique s'emploie activement à trouver une solution à ce problème.
    Bien.
    Il y a de nombreuses façons d'y parvenir. Dans le cadre de notre étude de 27 technologies, nous en avons examiné cinq qui concernent l'éthanol, et trois ou quatre autres qui concernent le biodiesel. Tout se tient.
    Nous avons été très heureux d'apprendre que certaines de ces technologies sont sur le point d'être commercialisées.
    J'aimerais poser une petite question sur l'utilisation d'éthanol dans le carburant. Il paraît qu'on fait plus de kilomètres avec un litre d'essence pure qu'avec un litre d'essence combinée à de l'éthanol. Y a-t-il vraiment une différence?
    L'éthanol comprend 35 p. 100 d'oxygène, et il n'y a pas d'oxygène dans l'essence. En conséquence, l'éthanol contient moins de BTU que l'essence. Mais avec un mélange à 5 ou 10 p. 100, il n'y a pas de différence au niveau de la consommation. Il y en aurait davantage si vos pneus n'étaient pas correctement gonflés.
    Est-ce qu'on fait quelque chose du côté des équivalents octane? Est-ce que les composés d'azote posent des problèmes?
    L'éthanol pur a un indice d'octane d'environ 113. Comme vous le savez, l'essence ordinaire a un indice d'octane de 87; c'est donc un carburant à indice d'octane élevé. Les pilotes de course adorent ça. Vous pouvez aussi l'utiliser pour un véhicule polycarburant où l'on peut changer le taux de compression et rouler avec 85 p. 100 d'éthanol.
    Permettez-moi de vous dire en passant que je suis venu ici avec un véhicule polycarburant fonctionnant à 85 p. 100 à l'éthanol cellulosique. Je conduis cet E85 depuis 2004.
    Quelle est la différence de prix entre ce que vous avez payé aujourd'hui et ce que vous payeriez à la pompe?
    Entre un mélange d'E5 ou d'E10, il n'y a aucune différence de prix. En ce moment, l'éthanol se vend mois cher que l'essence.
    Très bien.
    En ce moment, des études sont-elles réalisées au Canada au sujet de l'utilisation du butane comme carburant?
    Je ne suis au courant d'aucune étude à ce sujet.
    D'accord.
    L'industrie peut-elle expliquer les différences que présentent le biodiesel et l'éthanol? Nous devons comprendre les enjeux qu'ils représentent...
    L'éthanol est ajouté à l'essence, et le biodiesel, au carburant diesel.
    Ainsi, dans les recherches qui sont effectuées et à l'étape où nous en sommes, nous disposons de tout ce dont nous avons besoin pour répondre aux demandes de ces secteurs, pour ce qui est des mélanges qui sont nécessaires.
    Exactement. Nous avons passé beaucoup de temps à parler du 5 p. 100 à atteindre d'ici le mois de septembre de cette année, mais d'ici 2011, un nouvel objectif de 2 p. 100 sera fixé pour le biodiesel. Je crois que votre prochain groupe compte des personnes qui en savent davantage sur le biodiesel et qui pourront mieux répondre à vos questions.
    Et si nous parlions maintenant de la différence entre les coûts qu'engendre la production d'éthanol cellulosique et les coûts que représente production d'autres types d'éthanol? Est-ce que l'une ou l'autre de ces méthodes est vraiment plus coûteuse?
    Nous avons le problème opposé — et lorsque je dis « nous », notez que je travaille aussi pour une entreprise dont le mandat touche l'éthanol cellulosique. En général, l'éthanol cellulosique présente un plus grand coût d'investissement, mais des frais d'exploitation inférieurs. C'est le contraire pour l'éthanol produit à partir de céréales: il présente un faible coût d'investissement pour la construction des usines, mais des frais d'exploitation plus élevés, étant donné qu'il nécessite l'utilisation de déchets ne provenant pas de l'agriculture comme matières premières.
    Passer par-dessus le coût d'investissement élevé que cela représente est certainement un obstacle pour la construction des premières usines. Lorsque le produit arrive au bout de la chaîne — la molécule d'éthanol —, son prix doit être concurrentiel en regard du prix actuel de l'éthanol.

  (1005)  

    J'aimerais aussi souligner qu'en ce qui concerne l'éthanol cellulosique, toutes les technologies ne sont pas équivalentes. Nous avons constaté que cinq types de processus de production que nous avons examinés présentent de grandes différences sur le plan économique. Il est vraiment important de garder en tête que la matière utilisée compte pour beaucoup.
    D'accord.
    Le biodiesel de première génération utilise des matières premières comme le soja, la feuille de palmier et le canola. Les biodiesels de deuxième génération utilisent des matières premières biologiques non alimentaires telles que le jatropha. Le biodiesel de troisième génération se sert de matières premières telles que l'algue.
    Quand les biocombustibles de troisième génération seront-ils offerts sur le marché?
    Veuillez répondre à la question très brièvement, s'il vous plaît — si vous le pouvez.
    Ce sera probablement lorsque l'éthanol cellulosique sera déjà le marché.
    Des voix: Oh, oh!
    Merci beaucoup.
    Voici une annonce publique non payée de M. Harris, qui remplira le reste du temps.
    Merci, monsieur le président.
    Je sais que les responsables de l'APFC se sont rendus à l'Université du Nord de la Colombie-Britannique à Prince George, et qu'ils savent que notre université joue un rôle de chef de file pour ce qui est de la conception de nouvelles technologies pour la réutilisation du bois attaqué par le dendoctrone du pin.
    Je crois que c'est par simple négligence que M. Passmore a seulement parlé de l'Université de la Colombie-Britannique; il souhaitait aussi parler de l'Université du Nord de la Colombie-Britannique.
    M. Jeff Passmore: Oui. Merci beaucoup.
    Nous sommes partenaires dans ce projet.
    Monsieur Anderson, souhaitez-vous dire quelque chose?
    Je souhaite seulement poser une brève question, monsieur le président.
    Vous avez dit que vous essayiez de commercialiser tout cela. Est-ce que TDDC a joué un rôle pour ce qui est de la mise sur le marché d'une partie de cette technologie? Est-ce qu'il s'agit d'une importante...?
    Nous le souhaitons.
    Ils ont très hâte...
    M. David Anderson: De jouer un rôle.
    Nous espérons vraiment que cela soit le cas.
    Ils ne l'ont pas fait par le passé?
    En ce qui concerne ProGen?
    Oui. Les nouvelles technologies dont vous parlez et que vous souhaitez commercialiser — est-ce que TDDC a pris part à certains des travaux réalisés par le passé?
    Il existe un fonds de 500 millions de dollars pour la commercialisation des technologies ProGen. Ce fonds est maintenant disponible. On ne l'a pas encore utilisé ou on ne l'utilise pas en ce moment, et ce n'est pas la faute de TDDC. L'équipe est prête à aider. Elle n'attend que le moment où tout sera prêt.
    M. David Anderson: Merci.
    J'aimerais tous vous remercier infiniment des présentations que vous avez faites ici aujourd'hui. Elles nous ont beaucoup aidés dans notre étude.
    Nous suspendrons la séance pour deux ou trois minutes, le temps d'installer le matériel de vidéoconférence et d'inviter les prochains témoins à nous rejoindre à la table.
    Une fois de plus, merci beaucoup.

  (1005)  


  (1010)  

    Nous reprendrons maintenant la séance avec le nouveau groupe de témoins.
    Tout d'abord, j'aimerais souhaiter la bienvenue à chacun d'entre vous. Premièrement, à notre table, nous avons avec nous Mme JoAnne Buth, présidente du Conseil canadien du canola, et Mme Marie-Hélène Labrie, vice-présidente des affaires gouvernementales et des communications, pour Enerkem Inc. Ensuite, à l'arrière de la salle, nous avons avec nous M. Bliss Baker, président de Bentham and Associates, et si quelqu'un souhaite lui poser des questions, cela pourra être possible, je crois bien, et nous avons également avec nous M. Roger Samson, directeur exécutif de Resource Efficient Agricultural Production, ou REAP Canada.
    Bienvenue à tous.
    Il y a aussi parmi nous, par vidéoconférence, le professeur Daniel Sperling, de la University of California, à Davis, en Californie.
    Bienvenue à vous, professeur Sperling, cher participant à distance. Nous entendez-vous bien?
    C'est super de vous avoir avec nous. J'apprends que vous venez de revenir de Chine, donc vous souffrez peut-être un peu de décalage horaire, mais bienvenue à vous.
    Oui, je m'en ressens un peu, et il est aussi très tôt ici.
    Très bien. Les témoins se présenteront devant nous dans l'ordre prévu; la représentante du Conseil canadien du canola commencera le bal.
    Madame JoAnne Buth, la parole est à vous.
    Nous remercions beaucoup le comité permanent pour l'invitation qu'il a envoyée au Conseil canadien du canola afin de nous permettre de présenter notre point de vue sur l'initiative écoÉNERGIE pour les biocarburants ainsi que sur les politiques et les programmes fédéraux sur les biocarburants.
    En général, l'histoire du biocarburant au Canada est très positive et témoigne d'immenses progrès sur les plans de l'environnement et du développement économique. Nous croyons que l'initiative écoÉNERGIE joue un rôle clé pour l'établissement d'une industrie des biocarburants durable.
    Il existe une exception importante: jusqu'à maintenant, les progrès attendus touchant le biodiesel de canola se font toujours attendre. Bien que nous croyions que l'initiative écoÉNERGIE aide vraiment à établir un secteur des biocarburants durable, nous croyons que le gouvernement fédéral peut prendre des mesures concrètes pour garantir que les projets d'envergure raisonnable touchant le biodiesel de canola puissent aller de l'avant.
    Premièrement, le gouvernement peut veiller à ce que les projets touchant le biodiesel de canola soient appuyés dans la dernière ronde de demandes pour le programme écoÉNERGIE, qui se déroule en ce moment.
    Deuxièmement, les changements que l'industrie a recommandés à l'équipe du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire chargée de l'initiative pour un investissement écoagricole dans le biocarburant devraient être mis en oeuvre afin de faciliter les investissements dans le domaine de la production de biodiesel.
    Avant d'entrer dans les détails concernant les biocarburants, les programmes écoÉNERGIE et l'initiative pour un investissement écoagricole dans le biocarburant, j'aimerais vous donner quelques renseignements généraux sur le canola et le travail du Conseil canadien du canola.
    La culture du canola est la plus grande culture au monde qui soit entièrement canadienne. Développé au début des années 1970, le canola n'a d'égal dans le monde en raison de sa valeur nutritive. Le canola contient peu de matières grasses saturées, une portion équilibrée de matières grasses polyinsaturées et monoinsaturées, est polyvalent et présente un goût léger; l'huile de canola est l'huile que préfèrent les consommateurs, les entreprises de transformation des aliments et les restaurants.
    Le Canada est un chef de file dans le domaine de la production de canola. En 2009, environ 50 000 agriculteurs canadiens ont produit 11,8 millions de tonnes de canola. Il s'agit de la culture canadienne présentant la plus grande valeur; elle génère 4,9 milliards de dollars en recettes monétaires agricoles. Le canola est transformé en huile dans 11 usines de transformation, réparties dans quatre provinces. L'activité économique découlant du secteur canadien du canola génère presque 14 milliards de dollars annuellement pour l'économie du Canada.
    Le Conseil canadien du canola est une organisation de chaîne de valeur qui encourage la production de canola et la promotion de cette culture. Le conseil comprend des producteurs de grains, des planteurs, des employés d'installations de transformation, des transporteurs et des exportateurs. Nous centrons nos efforts sur la production de canola à des fins alimentaires. Or, l'intérêt que l'on porte aux biocarburants constitue également une occasion en or pour le Canada et les producteurs de canola. Voilà qui est excellent pour le secteur du canola: la culture de la plante est avantageuse sur les plans environnemental et économique, et elle permet à la communauté rurale d'obtenir un certain soutien et aux producteurs de récolter de plus grandes recettes.
    Grâce aux biocarburants, il est possible de diminuer la quantité d'émissions de gaz à effet de serre néfastes que produisent les véhicules. Une description détaillée des effets de la production de biocarburants au Canada et de leur utilisation au pays montre que l'utilisation de deux milliards de litres d'éthanol par année diminuerait les émissions de gaz à effet de serre de 2,8 millions de tonnes en équivalent-CO2, et que l'utilisation de 500 millions de litres de biodiesel par année diminuerait les émissions de gaz à effet de serre de 1,4 million de tonnes, ce qui équivaut, au total, au nombre de tonnes de gaz à effet de serre que produisent annuellement un million d'automobiles roulant sur les autoroutes canadiennes.
    Environ 30 p. 100 des gaz relatifs au changement climatique au Canada découlent du transport. Nous voyons le biodiesel de canola fait au Canada comme un carburant de transport vert et intelligent qui a le potentiel de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
    Une analyse du cycle de vie montre que le biodiesel de canola peut réduire les émissions de gaz à effet de serre de 75 à 85 p. 100. Ce biocarburant présente le même bilan énergétique que tous les autres carburants liquides offerts sur le marché, et génère trois fois plus d'énergie que celle qu'il doit déployer pour la produire.
    Il y a aussi des réductions d'émissions de certaines matières et d'hydrocarbures. Les producteurs de canola travaillent moins le sol, ce qui signifie que moins de carbone est relâché dans l'air. La chose la plus importante à souligner est que la culture du canola ne nécessite aucune irrigation.
    Nous savons aussi que le canola est la meilleure matière première à utiliser pour la production de biodiesel. Grâce à son rendement exceptionnel dans les températures froides et à son pouvoir lubrifiant amélioré, le canola est la matière première de tout premier choix pour la production de biodiesel canadien, et ce, en raison de sa teneur en matières grasses saturées une fois transformé en biodiesel.
    Les mélanges de biodiesel présentant 2 p. 100 de diesel renouvelable provenant du canola se sont montrés efficaces lors d'essais dans les températures froides normales de l'Alberta, et ils ont fait leur preuve au Canada depuis de nombreuses années en tant que carburants de transport. Les mélanges présentant de 5 à 20 p. 100 de biodiesel provenant du canola se sont montrés efficaces au printemps, à l'été et à l'automne, dans de maintes applications.
    Les fabricants d'équipement-moteur ont reçu l'approbation d'utiliser les mélanges de biodiesel présentant de 5 à 20 p. 100 de canola, et le biodiesel de canola répond aux exigences techniques rigoureuses de l'ASTM, de l'EN, et de l'ONGC en matière de biocarburant.

  (1015)  

    Lorsqu'on songe aux avantages sur le plan économique, les répercussions sur la stimulation économique associées à la mise en oeuvre des normes de 5 et de 2 p. 100 relatives au carburant renouvelable sont considérables. Il y a actuellement 14 usines de production d'éthanol et 8 usines de production de biodiesel en activité, et d'autres usines sont en construction. Ces raffineries emploient des milliers de Canadiens, particulièrement en région rurale.
    L'industrie s'est développée au cours des dernières années pour renforcer la capacité en prévision de la mise en oeuvre des normes canadiennes en matière de carburant renouvelable. Il y a d'autres projets à l'étape de la planification qui comptent sur l'initiative écoÉNERGIE de Ressources naturelles Canada, et également sur les programmes de l'IIEB d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, pour obtenir l'aide nécessaire à leur lancement.
    Les carburants renouvelables représentent des occasions intéressantes pour les familles d'agriculteurs canadiens car ils permettent l'augmentation du revenu et la stabilisation des prix. Le Canada arrive au troisième rang sur le plan de la production de canola et de colza; ces activités représentent 20 p. 100 de la production mondiale, mais 80 p. 100 des échanges internationaux. Cette industrie est toutefois largement dépendante des marchés internationaux, souvent imprévisibles. Elle est aussi vulnérable à la fermeture des frontières attribuable à l'imposition de barrières commerciales tarifaires et non tarifaires.
    Tout comme M. Sperling, je reviens d'un voyage en Chine, où j'accompagnais M. Ritz, ministre de l'Agriculture. En effet, l'automne dernier, la Chine a bloqué les exportations de canola en raison de l'imposition d'une barrière commerciale non tarifaire.
    L'établissement d'une industrie du biodiesel à base de canola au Canada permettrait de fournir l'appui à long terme qui est essentiel au secteur de production du canola au Canada en créant une demande inélastique, un impératif dans ce secteur qui dépend largement du marché. La production intérieure de biodiesel à base de canola stabilisera la demande de semences et accroîtra les activités à valeur ajoutée au Canada en prévision d'une utilisation accrue de canola en Amérique du Nord.
    La production de canola au Canada augmente d'année en année. Elle est effectivement passée de 9,1 millions de tonnes en 2006 à 12,6 et 11,8 millions de tonnes au cours des deux dernières années, respectivement. Nous espérons que les agriculteurs continueront de produire cette culture rentable, voire qu'ils intensifieront leur production en l'étendant à un plus vaste territoire.
    La stratégie Growing Great de l'industrie du canola vise une production et une demande soutenues de 15 millions de tonnes d'ici à 2015. Cet objectif de 15 millions de tonnes est important pour nous parce qu'il est suffisamment élevé pour que nous puissions continuer d'attirer les investissements dans ce secteur. Sur les 15 millions de tonnes, nous prévoyons que 2,5 millions seront utilisées pour le biodiesel.
    Nous sommes encouragés de voir les mesures progressives prises par le gouvernement du Canada pour favoriser la production de biocarburants comme moyen de réduire les émissions néfastes provenant des carburants traditionnellement utilisés pour le transport. Nous avons récemment applaudi la publication de nos règlements de vaste portée dans la Gazette; il s'agissait là d'une étape nécessaire à la mise en oeuvre de normes régissant les carburants renouvelables. Toutefois, l'industrie du biodiesel attend toujours que le Cabinet fixe une date pour l'entrée en vigueur de la norme de 2 p. 100 visant précisément le biodiesel ou d'autres carburants diesel renouvelables. Nous incitons le gouvernement à prendre des mesures à cet égard.
    Jusqu'à maintenant, le principal avantage du programme écoÉNERGIE est la réduction du risque associé aux prix qui est inhérent au marché des produits de base et caractérisé par l'instabilité. Ce programme vise également à augmenter la compétitivité de la production canadienne par rapport aux biocarburants importés. Il permet en outre aux usines de production canadiennes de s'établir et de se placer dans une position favorable pour être concurrentielles sur les marchés mondiaux lorsqu'elles ne recevront plus d'incitatifs.
    Le programme IIEB d'Agriculture et Agroalimentaire Canada est également important, puisqu'il prévoit des contributions remboursables pour les projets liés aux biocarburants de façon à assurer un niveau minimal d'investissement des producteurs agricoles. Ce programme est essentiel pour permettre à la nouvelle industrie des biocarburants du Canada de tirer son épingle du jeu dans les marchés des capitaux d'emprunt et des capitaux propres où la concurrence est féroce. Jusqu'à présent, ce programme n'a pas été utilisé à sa pleine mesure par les industries du biodiesel. Seule une proportion de 2 ou 3 p. 100 du financement du programme a été allouée au secteur du biodiesel, et aucuns de ces fonds n'ont servi à appuyer les usines de production de biodiesel à base de canola.
    Le Conseil canadien du canola et de nombreux autres partenaires de l'industrie ont demandé au ministre d'Agriculture et Agroalimentaire de revoir les critères du programme pour s'assurer que l'IIEB offre un appui solide aux projets liés au biodiesel à base de canola. Bien que l'initiative écoÉNERGIE et l'IIEB aient réussi à favoriser les investissements dans le domaine de la production des biocarburants, elles n'ont pas mené à un renforcement considérable de la capacité de production de biodiesel. Depuis l'annonce de ces programmes en mars 2007, aucune nouvelle usine de production de biodiesel de capacité moyenne — c'est-à-dire avec une capacité de production supérieure à 40 millions de litres par année — n'a été établie. En fait, la capacité de production de biodiesel, qui est d'environ 100 millions de litres par année, demeure largement inférieure aux attentes de l'industrie et du gouvernement. Ce volume est tout à fait insuffisant pour répondre aux exigences des gouvernements fédéral et provinciaux, qui sont d'environ 700 millions de litres par année. C'est donc dire qu'il faut compter largement sur les importations de biodiesel.

  (1020)  

    Bien que plusieurs usines de production à petite échelle de biodiesel à partir de graisses animales aient été mises sur pied au cours des dernières années, aucun projet à grande échelle — c'est-à-dire avec une production supérieure à 114 millions de litres par année — pour la production de biodiesel à base d'huile végétale n'est passé de l'étape de la planification à l'étape de la construction.
    Bref, l'initiative écoÉNERGIE et l'IIEB n'ont pas encore réussi à établir la capacité de production de biocarburants à l'échelle nationale qui serait nécessaire à l'atteinte des objectifs de l'industrie en matière d'utilisation du canola. Il s'agit là d'une lacune considérable au chapitre des résultats des programmes sur laquelle il faut se pencher.
    Nous en sommes actuellement à l'étape finale de l'établissement d'une capacité de production du biodiesel de première génération au Canada. La période de dépôt des demandes pour l'initiative écoÉNERGIE s'est terminée le 31 mars dernier, et des projets de production de biodiesel à base de canola ont été présentés. Ces projets ont besoin du financement d'écoÉNERGIE pour voir le jour.
    Si l'on se projette dans l'avenir, aucun projet ne pourra rivaliser avec ceux qui auront été subventionnés par l'initiative écoÉNERGIE. Il est donc temps de prendre des décisions importantes.
    Ressources naturelles Canada en est actuellement à l'étape finale d'examen des demandes. Nous avons cru comprendre qu'à cette dernière étape, le ministère disposait de suffisamment de fonds destinés aux carburants biodiesel renouvelables pour appuyer toute la gamme de projets de production de biodiesel et pour corriger les inégalités qui ont été observées dans l'utilisation des programmes jusqu'à maintenant.
    En particulier, nous espérons que les changements à l'objectif du programme écoÉNERGIE qui ont été recommandés par le Conseil du canola du Canada et par nos partenaires de l'industrie en décembre 2009 seront pris en compte dans les décisions finales sur la répartition des ressources. Nous encourageons le gouvernement du Canada à appuyer des projets qui pourront être durables et concurrentiels à long terme sur le marché mondial, une fois les subventions terminées. Nous parlons ici de projets de production de biocarburants de haute qualité qui permettent de faire face aux conditions climatiques rigoureuses du Canada, et de stabiliser et d'appuyer l'utilisation de l'une des plus importantes cultures du pays: le canola.
    Voilà un résumé des observations et des recommandations que nous voulions présenter à ce comité. L'initiative écoÉNERGIE joue un rôle clé dans l'établissement d'une industrie durable de biocarburants. On constate toutefois une exception notoire: la production de biodiesel à base de canola. Pour combler cette lacune, le gouvernement devrait s'assurer que les projets de production de biodiesel à base de canola reçoivent un appui au cours de l'examen final des demandes du programme écoÉNERGIE qui est actuellement en cours. Il devrait en outre revoir les critères du programme pour s'assurer que l'IIEB fournit un appui solide aux projets de production de biodiesel à base de canola.
    Il ne fait aucun doute que notre industrie continuera d'axer sa production sur les denrées alimentaires. Toutefois, nous avons en ce moment une occasion unique de développer un marché du biodiesel à partir de canola, et nous avons d'ailleurs de très bonnes raisons pour le faire.
    On observe actuellement certains obstacles à l'accès au marché, notamment pour le tourteau de canola aux États-Unis, pour les graines et l'huile de canola en Chine et pour les semences, l'huile et le tourteau de canola dans l'Union européenne.
    C'est maintenant qu'il faut prendre des mesures. Le biodiesel à base de canola est écologique et il constitue un produit à valeur ajoutée qui offre des possibilités sur le marché. Il appuie le développement économique rural et fournit des débouchés stables et à long terme pour les producteurs agricoles du Canada.
    Je vous remercie de m'avoir accueillie aujourd'hui.

  (1025)  

    Merci, madame Buth.
    Je donne maintenant la parole à Marie-Hélène Labrie, vice-présidente des Affaires gouvernementales et des communications pour Enerkem Inc.
    Je vous invite à faire votre exposé. Si possible, veuillez vous en tenir à 8 ou à 10 minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les membres du comité.

[Français]

    Je vous remercie de nous donner l'occasion d'être parmi vous aujourd'hui.
     Enerkem est un chef de file mondial dans le domaine du développement et de la production de carburant vert de nouvelle génération pour le transport.

[Traduction]

    L'entreprise que je représente construit, possède et gère des bioraffineries à la fine pointe grâce à la technologie thermochimique brevetée qu'elle élabore au Québec depuis 2000.
    La technologie unique d'Enerkem transforme les matières résiduelles, comme les déchets urbains solides non recyclables, les résidus forestiers et les déchets agricoles, en éthanol cellulosique de deuxième génération. Enerkem est la seule entreprise canadienne qui soit en mesure de produire de l'éthanol à partir de déchets urbains solides.

[Français]

     Enerkem est une compagnie québécoise en croissance qui emploie aujourd'hui 70 personnes. La compagnie a été fondée en 2000 et exploite présentement deux usines au Québec: une usine-pilote, depuis 2003, qui a permis de tester la technologie avec plus de 20 types de matière première, et une usine commerciale, à Westbury, tout près de Sherbrooke, qui utilise des poteaux d'électricité comme matière première.

[Traduction]

    Enerkem commencera bientôt la construction de la première usine commerciale de transformation des déchets urbains en biocarburant au monde. Cette usine sera située à Edmonton, en Alberta. L'entreprise a conclu une entente avec la ville d'Edmonton pour la mise en oeuvre de ce projet. Elle a également lancé un projet semblable au Mississippi, grâce à une aide de 50 millions de dollars provenant du Département de l'énergie des États-Unis.
    Outre le fait que nous répondons aux normes relatives au carburant renouvelable et que nous réduisons les émissions de gaz à effet de serre, nous contribuons également à la réduction de l'enfouissement des déchets et nous créons des possibilités intéressantes pour la transformation de l'industrie forestière en utilisant les résidus forestiers pour produire des carburants propres qui serviront au transport. Comme elles utilisent une grande variété de matières biologiques, les usines d'Enerkem peuvent être situées à la fois dans les zones rurales et urbaines.
    Pour réussir à bâtir une solide industrie des biocarburants au Canada afin que le pays devienne le chef de file dans le développement des carburants de la prochaine génération, il est nécessaire de disposer des instruments de politiques publiques appropriés. Ces instruments doivent comprendre ce qui suit:
    1) Une norme fédérale relative aux carburants renouvelables qui permette de créer un marché stable. Le gouvernement a déjà fixé un objectif de 5 p. 100 de carburant renouvelable dans l'essence d'ici à septembre 2010.
    2) Un programme d'investissement pour favoriser la construction d'installations de production de biocarburants au pays. Le gouvernement a établi le Fonds de carburants ProGen, géré par Technologies du développement durable Canada.
    3) Un programme d'incitatifs à l'intention des producteurs pour favoriser la production de carburants renouvelables au pays. Le gouvernement a mis en oeuvre le programme écoÉNERGIE pour les biocarburants, qui offre un incitatif de 10 ¢ le litre. Le programme écoÉNERGIE pour les biocarburants a grandement appuyé le secteur des biocarburants de première génération et a établi des bases solides pour l'industrie des biocarburants au Canada.
    La première génération de biocarburants a ouvert la voie à la prochaine étape de croissance, qui impliquera la commercialisation des technologies de la prochaine génération actuellement mises au point au pays, comme celle qui a été créée par Enerkem.

  (1030)  

[Français]

    Ces technologies nous permettent de produire des carburants renouvelables à partir d'un large éventail de biomasse, des résidus forestiers et même des matières résiduelles domestiques. Elles nous permettent aussi de réduire encore davantage nos émissions de gaz à effet de serre.

[Traduction]

    Selon les renseignements diffusés par Ressources naturelles Canada, le budget du programme écoÉNERGIE pour les biocarburants est actuellement de 473 millions de dollars; or, 68 nouvelles demandes ont été déposées, ce qui représente environ 2 milliards de dollars. Le gouvernement a donc la tâche ingrate de devoir décider quels programmes seront acceptés en fonction des critères préétablis. Cela illustre certes le succès du programme, mais également ses limites, puisque le gouvernement doit maintenant choisir qui seront les heureux élus.
    À titre de producteur d'éthanol de la prochaine génération, Enerkem n'a pas encore bénéficié de ce programme, car les installations viennent tout juste d'être construites et mises en opération. Nous avons toutefois présenté une demande pour deux usines commerciales, soit celle de Westbury et la nouvelle qui sera située à Hamilton.
    Nous croyons fermement que ce programme est essentiel à l'établissement d'une solide industrie des biocarburants au pays. Il contribue aussi à l'atteinte d'un certain niveau de parité avec les États-Unis, qui offrent également des incitatifs aux producteurs de biocarburant. Le programme y est toutefois plus généreux, puisqu'il fournit au total 20 ¢US le litre aux entreprises de production d'éthanol cellulosique, comparativement à 10 ¢ le litre au Canada.
    En conclusion,

[Français]

j'aimerais dire que si le Canada désire profiter de la plateforme qu'il a créée avec les biocarburants de première génération et continuer de privilégier la création d'emplois verts ainsi que la relance économique avec le secteur de l'énergie verte, ce programme doit continuer.

[Traduction]

    Les incitatifs aux producteurs offerts dans le cadre du programme écoÉNERGIE pour les biocarburants sont particulièrement importants si l'on souhaite poursuivre les efforts pour bâtir une industrie des biocarburants au pays qui soit concurrentielle et forte. Le programme écoÉNERGIE a permis la construction d'usines de production de biocarburants de première génération au pays, ce qui servira de base solide à l'établissement d'usines de production de biocarburants de la prochaine génération, comme les installations d'Enerkem. Le programme écoÉNERGIE est un programme important qui fera en sorte que les prochaines générations des technologies de production d'énergie non polluante, souvent appelées les « technologies propres », seront créées ici, au Canada, plutôt qu'à l'étranger.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'exprimer au sujet du programme écoÉNERGIE pour les biocarburants.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame Labrie.
    Nous allons maintenant entendre Roger Samson, de Resource Efficient Agricultural Production Canada, ou REAP Canada.
    La parole est à vous, monsieur Samson.
    Je tiens à remercier les membres du comité de m'avoir invité à présenter mon exposé aujourd'hui.
    Au cours des 20 dernières années, REAP Canada a été le principal organisme au Canada qui s'est consacré au développement de l'écoÉNERGIE à partir de l'agriculture. Nous sommes très satisfaits que le gouvernement fédéral reconnaisse le besoin de soutenir les initiatives de bioénergie du secteur agricole. L'appui qu'apporte le gouvernement du Canada aux initiatives d'écoÉNERGIE peut contribuer à accroître la prospérité du pays de deux façons. D'une part, cet appui favorise une augmentation de la demande de produits agricoles, ce qui stimule le cours des produits de base du secteur agricole, et d'autre part, il permet au Canada de devenir un chef de file tant dans le développement de cultures qui tirent parti efficacement de l'énergie solaire que dans l'exploitation de technologies qui transforment les végétaux en formes d'énergie utiles pour les consommateurs.
    Notre organisme appuie les concepts généraux des programmes actuels d'écoÉNERGIE, à savoir le soutien aux producteurs pour la préparation de leurs plans d'affaires, le soutien à la réduction des coûts des activités d'investissement et le soutien aux mesures incitatives pour la production de carburants. Cependant, avant de formuler des recommandations précises au comité, j'aimerais d'abord présenter l'historique de notre organisation et l'approche que nous avons adoptée en ce qui concerne la production d'énergie renouvelable à partir de l'agriculture.
    En 1991, REAP Canada a fait un exposé devant le Comité permanent de l'agriculture de la Chambre des communes sur l'état de la crise à l'époque. Nous avons proposé que la meilleure solution pour mettre fin à la crise agricole était de reconnaître la capacité de production excédentaire du secteur agricole et l'obligation des pays de tirer profit de cette capacité de production excédentaire pour développer efficacement des énergies renouvelables respectueuses de l'environnement. Vingt ans plus tard, le Canada n'a réussi que partiellement à tirer profit de ce potentiel. Nous avons réussi avec brio à stimuler le cours des produits agricoles de base en utilisant des céréales et des plantes oléagineuses comme matières premières des biocarburants liquides destinés au secteur du transport. Cependant, la crise des matières premières qui a éclaté en 2008 nous fait réaliser que l'augmentation effrénée de la demande de culture vivrière attribuable à l'utilisation des biocarburants peut être néfaste.
    Les Canadiens doivent maintenant admettre que l'augmentation rapide de la transformation des cultures vivrières en carburants renouvelables peut aussi entraîner des désavantages sociaux importants pour certaines personnes. Il ne fait aucun doute que la crise des produits de base survenue en 2008 a été causée en grande partie par l'augmentation rapide de l'utilisation des céréales secondaires. Rétrospectivement, la politique sur l'énergie renouvelable qui vise à produire des biocarburants liquides à partir de produits alimentaires de base a été un important pas en avant dans l'augmentation de la demande qu'a connu le secteur agricole du Canada. Toutefois, l'utilisation de produits alimentaires de base comme source d'énergie renouvelable peut causer un tort considérable au milliard de personnes sous-alimentées sur la Terre. Bien que le gouvernement du Canada ait toujours pour but de développer des cultures non vivrières comme source de biocarburants liquides, ce but est difficile à atteindre sur le plan technologique et financier, en dépit des efforts remarquables déployés par les entreprises canadiennes au cours des 35 dernières années.
    Pendant les 20 dernières années, le gouvernement du Canada n'a pas été en mesure de reconnaître qu'il faut d'abord et surtout considérer la terre comme un moyen de capturer et d'emmagasiner l'énergie solaire en vue de produire une quantité appréciable d'énergie à partir de l'agriculture renouvelable. Cette énergie emmagasinée doit être récoltée et convertie efficacement dans une forme d'énergie utilisable, comme les combustibles solides, les biogaz et les biocarburants liquides.
    Examinons maintenant brièvement l'état de la technologie des batteries solaires en milieu agricole. Pour ce qui est de la capture de l'énergie solaire, il est totalement inefficace d'utiliser uniquement la semence des plantes. Il faut plutôt accorder la priorité aux cultures énergétiques comme le panic raide parce que toutes les parties de la plante sont utilisées. Dans le chapitre d'un livre publié récemment en 2008 par REAP Canada sur le développement des cultures énergétiques pour des applications thermiques, on estime que le panic raide peut produire, en Ontario par exemple, 67 p. 100 plus d'énergie nette par hectare que le maïs-grain et peut produire au moins quatre fois plus d'énergie nette par hectare que le soja ou le canola.
    Il est insensé de mettre en place des mesures incitatives généreuses visant à soutenir la recherche et à appuyer la production de cultures semencières comme source de carburants. Le Canada doit instaurer des politiques d'écoÉNERGIE qui favorisent le développement de cultures énergétiques utilisant les plantes entières et doit cesser progressivement la production de céréales et de plantes oléagineuses destinées à la fabrication de biocarburants. Les cultures semencières peuvent servir à fabriquer des bioproduits, mais il serait totalement inefficace de mettre en place une politique sur l'énergie renouvelable dans le but de développer ces cultures comme sources d'énergie pour l'approvisionnement des Canadiens.
    L'administration Obama a reconnu fondamentalement ce besoin de nous tourner vers d'autres sources d'énergie que les céréales et les plantes oléagineuses en investissant massivement dans les cultures énergétiques grâce à son nouveau programme d'aide pour la culture de la biomasse. Ce programme prévoit des mesures incitatives pour les agriculteurs en permettant à ceux-ci de réduire les coûts liés à la croissance de nouvelles cultures énergétiques, et en fournissant aux usines de transformation de la bioénergie jusqu'à 45 $ par tonne pour l'utilisation de cette matière première.

  (1035)  

    J'aimerais souligner au comité que l'investissement dans les cultures énergétiques est la meilleure politique d'écoÉNERGIE à adopter si l'on souhaite tirer parti du secteur agricole du Canada pour produire de l'énergie renouvelable. Les cultures énergétiques sont les batteries solaires de l'agriculture. Elles fournissent aux petits et aux grands investisseurs la possibilité de bénéficier de matières premières relativement abondantes et abordables pour leur technologie de transformation d'énergie. Cette approche permet au gouvernement du Canada de ne plus avoir à choisir les chefs de file sur le plan de la technologie et stimule l'esprit d'entrepreneurship des entreprises canadiennes.
    Notre organisme recommande que le nouveau programme d'écoÉNERGIE remette une somme de 100 $ par acre à titre de mesure incitative aux agriculteurs qui produisent des cultures énergétiques vivaces. Cela leur permettra de réduire le manque de liquidités qu'entraîne la production de cultures énergétiques et contribuera à atténuer leurs risques. De plus, nous recommandons que le Canada mette en place son propre programme d'aide pour la culture de la biomasse, qui fournirait aux usines de transformation de la bioénergie une somme de 40 $ par tonne à titre de mesure incitative pour l'utilisation de cultures énergétiques, ainsi qu'une somme de 20 $ par tonne à titre de mesure incitative pour l'utilisation durable de résidus de culture au cours d'une période de trois ans.
    Les cultures bioénergétiques peuvent fournir au Canada un approvisionnement appréciable en énergie. REAP Canada a calculé que l'utilisation de 14 p. 100 des terres agricoles canadiennes pour les cultures bioénergétiques pourrait permettre de produire 55 millions de tonnes de biomasse, soit l'équivalent de 175 millions de barils de pétrole.
    Examinons maintenant ce qu'il advient de l'énergie recueillie sur les terres agricoles après son traitement dans une usine de transformation de la bioénergie. Nous estimons que les biocarburants liquides conventionnels, comme l'éthanol de maïs et le soja, produisent 16 et 11 gigajoules respectivement par hectare de gains énergétiques nets. Par comparaison, les cultures qui utilisent les plantes entières comme l'ensilage de maïs transformé en gazon biologique ou le panic raide transformé en granulés peuvent produire de 120 à 140 gigajoules par hectare de gains énergétiques nets.
    Cette information est tirée du même rapport auquel j'ai fait allusion plus tôt, plus précisément du chapitre du livre sur les cultures énergétiques servant à produire de la bioénergie.
    Il est évident qu'il est possible de produire une quantité considérable d'énergie renouvelable grâce aux technologies de biotransformation qui utilisent les cultures de plantes entières comme le panic raide ou l'enlisage de maïs. Sur le plan de l'efficacité, la pire chose à faire serait de transformer des cultures semencières en biocarburants liquides. Il va de soi que le gouvernement du Canada doit mettre en place des politiques d'écoÉNERGIE qui favorisent l'utilisation de cultures de plantes entières dans la production de biocarburants ou de biogaz solides densifiés pour le chauffage, l'électricité et le transport. Il est temps que le gouvernement du Canada adopte de nouvelles politiques progressistes dans le but d'utiliser nos terres agricoles et nos champs pour tirer profit efficacement du soleil.
    Merci beaucoup de votre attention ce matin.

  (1040)  

    Merci beaucoup, monsieur Samson, de REAP Canada.
    C'est maintenant le tour de notre témoin qui animera la téléconférence d'aujourd'hui. Il s'agit du professeur Daniel Sperling, de la University of California, à Davis, qui témoignera à titre personnel.
    Vous pouvez commencer votre présentation, monsieur Sperling.
    Merci beaucoup. C'est un honneur de pouvoir m'adresser à vous, monsieur le président et chers membres du comité.
    Je suis professeur en génie et en science et politique de l'environnement ici, à la University of California, à Davis, et je suis également directeur de l'Institute of Transportation Studies. J'étudie les carburants de remplacement depuis 30 ans. J'ai écrit plus de 200 articles et 12 livres sur le sujet, dont mon plus récent — c'est la seule publicité que je vais faire — Two Billion Cars, qui est paru l'an passé.
    Toutes les formes d'approvisionnement énergétique présentent d'importants aspects négatifs. Elles posent toutes sortes de problèmes, y compris la biomasse. C'est pourquoi les stratégies d'efficacité énergétique devraient occuper une place prioritaire.
    J'aimerais vous dire trois choses. Premièrement, même s'il y a beaucoup de ressources en biomasse, certaines sont clairement plus intéressantes et plus prometteuses que d'autres.
    Produire du carburant à partir d'aliments et de produits alimentaires pose problème; c'est ce que l'on appelle la première génération. En général, ces carburants utilisent beaucoup d'eau, nécessitent un grand apport d'énergie, font grimper le prix des aliments et produisent beaucoup de gaz à effet de serre. Il y a certaines exceptions. Le plus prometteur est probablement la canne à sucre du Brésil, parce qu'ils ont trouvé un moyen d'utiliser presque tout le plant de canne à sucre. Ils la cultivent très efficacement; la production est très grande. Mais il semble que ce soit une des rares exceptions.
    Les produits de deuxième génération semblent beaucoup plus prometteurs. Ce sont ceux dont vous entendez le plus parler, soit les matières cellulosiques et les matières végétales. Une grande variété de plantes et d'arbres peut être utilisée. Ces matières peuvent être produites en grande quantité, elles se cultivent sur des terres peu productives, elles nécessitent moins d'eau et d'énergie, et leur empreinte carbonique est moins importante.
    Mais voici ce que je tiens réellement à souligner quand je parle des ressources d'origine alimentaire: celle qui semble de loin la plus prometteuse et qui, je crois, constituera la ressource alimentaire la plus importante, est le flux de déchets. Cela comprend les résidus de culture, les résidus forestiers et les déchets solides des municipalités. C'est là que nous devrions concentrer nos efforts. Je crois qu'à long terme, ça deviendra la principale ressource en biomasse pour la production d'énergie et de carburant.
    Nous en arrivons au deuxième sujet, c'est-à-dire la meilleure façon d'utiliser la biomasse. C'est là qu'arrivent les incertitudes. Comme la personne avant moi l'a dit, la biomasse peut servir à produire de l'électricité. Par conséquent, elle peut être jumelée au charbon ou au combustible fossile. Elle peut aussi être convertie en biomatériaux ou utilisée dans les combustibles liquides et comme carburant dans les moteurs.
    Ce que je veux dire ici, c'est que tant qu'on parle de transport, l'application la plus importante et la plus prometteuse des biocarburants sera probablement dans les avions et les véhicules voyageant sur de longues distances, comme les camions de gros tonnage, parce qu'il s'agit là des deux moyens de transport nécessitant le plus de matières énergétiques et pour lesquelles l'électricité et l'hydrogène ne sont pas vraiment efficaces.
    Quand on pense à l'utilisation de la biomasse, on ne devrait pas perdre de vue ces deux secteurs où les biocombustibles sont les plus intéressants et où ils risquent d'être le plus utilisés.
    En troisième lieu, on arrive aux politiques. Je connais mieux ce qui se fait aux États-Unis et en Europe. Aux États-Unis, comme vous le savez, nous avons une norme sur les carburants renouvelables, et qui impose aussi un quota à l'égard des gaz à effet de serre. Je crois très fermement que nous avons besoin d'une bien meilleure politique, une qui ne préconiserait aucun carburant en particulier et qui s'appuierait sur les forces du marché. Cette approche serait semblable à celle de la Californie, qui a adopté une norme de carburants à faible teneur en carbone. C'est aussi l'approche qu'a adoptée l'Union européenne, qui s'éloigne quelque peu des mandats pour s'orienter davantage vers une norme de performance.

  (1045)  

    La Californie s'est dotée d'une norme de performance de 10 p. 100. Cela signifie que les fournisseurs de carburant doivent réduire de 10 p. 100 le taux de carbone contenu dans leurs carburants d'ici 2020. En fait, on parle de quelques grammes d'équivalent CO2 par mégajoule. Dans le cas de la Californie, ou à n'importe quel autre endroit où cette norme pourrait s'appliquer, on se fondera sur la mesure de la durée de vie. Les sociétés pétrolières, qui sont les principaux fournisseurs de carburant, seraient les plus touchées par cette réglementation, mais plus important encore, elle couvrirait tous les carburants.
    Le véritable danger, quand on parle de politiques, comme l'a dit un des intervenants, c'est que nous avons tendance à essayer de faire des gagnants. Mais dans les faits, nous ne savons pas, en tant que décideurs et universitaires, quelles seront les meilleures options. J'étudie les carburants de transport depuis 30 ans. Si vous me demandez quels seront les meilleurs carburants dans 20, 30 ou 40 ans, je vous répondrai que je ne connais pas la réponse. Je sais que certaines options sont plus prometteuses que d'autres.
    Nous avons besoin d'une politique qui ne favorise aucun carburant en particulier, qui soit axée sur le rendement, qui fasse ressortir les forces du marché et qui favorise l'innovation. C'est ce que fait la norme de carburants à faible teneur en carbone. Il serait toujours possible de la modifier légèrement et de l'améliorer, mais je crois qu'essentiellement, il s'agit de la bonne approche.
    La norme de carburants à faible teneur en carbone offre un cadre durable que nous n'aurons pas à changer après quelques années, ni à ajouter des subventions par-ci et des subventions par-là. Nous avons passé par un processus que j'appelle parfois le phénomène du « carburant du jour », où nous avons fait du coq à l'âne. Les décideurs, les législateurs, les journalistes et le public n'ont fait que passer d'une solution miracle à une autre. Ça ne marche pas. Nous continuons de faire les mauvais choix et il manque toujours de normes fondamentales en matière de performance.
    Pour conclure, c'est ce que je recommande et ce que je propose. Je m'en remets à vous, si vous avez des questions.
    Merci beaucoup de votre temps.
    Merci beaucoup, monsieur Sperling, pour votre exposé.
    J'aimerais tous vous remercier pour vos exposés.
    Il ne nous reste malheureusement que très peu de temps pour la période de questions. Nous devons céder la salle à un autre comité immédiatement après notre séance, ce qui nous laisse environ deux minutes de questions.
    Commençons par M. Tonks, avec une question rapide et claire, qui sera suivie d'une réponse rapide et claire.

  (1050)  

    Merci aux deux groupes de témoins.
    Nous avons entendu d'un peu de tout en matière d'aperçu stratégique. Mme Labrie a parlé du recyclage des déchets municipaux comme source d'énergie et source de biomasse. Il y a aussi la possibilité du canola. M. Samson nous a ensuite rappelé les conséquences pour les pays en développement.
    Ma question est la suivante. Quelle position stratégique permettrait d'arriver à la stratégie dont parlait M. Sperling, qui serait fondée sur le rendement des politiques et le libre cours de l'innovation?
    Ma question est en deux volets. Je suis certain que le comité serait intéressé de savoir ce que vous auriez à conseiller au gouvernement. L'administration Obama a-t-elle visé juste avec ses programmes de biomasse énergétique à partir des récoltes? Cette position sera-t-elle suffisamment intéressante, du point de vue des technologies non cellulaires et non cellulosiques, pour nous permettre d'avancer vers un avenir plus rationnel et mieux équilibré en matière d'innovations cellulosiques et d'autres innovations?
    Le deuxième volet de la question concerne l'établissement du prix du carbone. Comme cela augure-t-il? Je ne pense pas que nous allons en arriver là, mais le gouvernement doit savoir, et nous devons savoir, quelles seront les implications.
    Merci, monsieur le président.
    Nous avons un problème. Les deux minutes sont écoulées, et je sais que toutes les parties aimeraient poser des questions. Je ne sais pas quoi faire avec ça. Est-ce que quelqu'un voudrait répondre en quelques mots seulement, et si oui, qui?
    Monsieur Samson.
    Je travaille dans le domaine des cultures énergétiques et des systèmes de conversion bioénergétique depuis 20 ans, et d'un point de vue pratique, nous devons utiliser les terres agricoles marginales parce que ces terres ne sont pas vraiment utilisées et ne génèrent que de faibles revenus pour les agriculteurs. Nous pouvons augmenter les revenus agricoles par l'utilisation de ces terres, et si nous augmentons la demande globale du secteur agricole, nous aidons tous les secteurs comme le canola et nous pouvons produire des quantités appréciables d'énergie. L'utilisation des déchets peut s'avérer une bonne chose, mais les résidus de cultures ne sont pas réellement des déchets; ils nourrissent la terre et protègent le sol. Il faut donc agir judicieusement.
    La stratégie d'Obama d'appuyer l'utilisation durable des résidus de cultures et des résidus forestiers ainsi que les cultures énergétiques est brillante, selon moi, parce qu'elle fait en sorte que le gouvernement n'a plus à décider des gagnants technologiques du point de vue de la conversion, et constitue un investissement sûr puisque vous vous trouvez à investir dans l'énergie et fournissez un soutien à l'égard des technologies de conversion.
    Merci, monsieur Tonks.
    Madame Brunelle, vous avez deux minutes.

[Français]

    Madame Labrie, ce que fait Enerkem m'a beaucoup intéressée. Je vois que c'est très diversifié. Vous utilisez 20 types de matière première. Vous avez recours à un large éventail de biomasse. Est-ce le secret de votre réussite? Est-ce aussi le fait que l'usine est à proximité de la ressource, que ce soit les déchets ou autre chose?
    Par ailleurs, vous dites que le gouvernement américain vous a octroyé une somme de 50 millions de dollars destinée à une usine aux États-Unis, et qu'ici, le programme écoÉNERGIE comporte des limites. Compte tenu du fait que votre entreprise est une réussite, est-ce que le gouvernement ne devrait pas investir davantage pour soutenir vos efforts?
    Pour ce qui est de la neutralité de la matière première, je pense que c'est en s'assurant de disposer de la plus grande diversité possible qu'on va connaître le plus de succès.
    En ce qui a trait à votre deuxième point, je dirai qu'un modèle selon lequel les usines sont situées près de la matière première est un avantage en matière d'environnement et de développement durable.
    Concernant votre dernier point, j'aimerais souligner que le programme de SDTC, NextGen Biofuels Fund, permet d'offrir à peu près l'équivalent de ce que nous avions dans le Mississipi. Nous comptons bien utiliser ce programme au Canada pour nos usines.

  (1055)  

    Merci.
    Merci, madame Brunelle.

[Traduction]

    Monsieur Atamanenko, allez-y très brièvement avec votre question.
    Monsieur Sperling, j'ai étudié à Davis, en passant, et c'est un campus magnifique.
    Devrions-nous, dès que possible, laisser de côté les biocarburants de première génération?
    Oui, absolument. Je sais assurément qu'aux États-Unis, et probablement dans d'autres parties du monde, nous avons déjà dépassé le seuil souhaitable. Plusieurs personnes allèguent que les carburants de première génération peuvent faire une bonne transition, ou du moins jeter les bases d'une transition. C'est vrai jusqu'à un certain point, mais nous avons déjà dépassé les limites, et donc tous les incitatifs et toutes les politiques que nous pourrions mettre en place doivent être grandement axés sur les solutions de deuxième génération et les déchets.
    Merci.
    Quelqu'un a posé une question à propos du prix du carbone. Le prix du carbone est probablement la meilleure solution sur le plan stratégique, mais la plupart des politiciens ne veulent pas faire quoi que ce soit en ce sens, et c'est pourquoi je défends la norme de carburants à faible teneur en carbone comme deuxième choix, c'est-à-dire une norme qui ne favoriserait aucun carburant en particulier et qui aurait une valeur marchande de manière à renforcer le marché, à favoriser l'innovation et à créer un cadre durable. Une entité parlementaire ou un corps législatif ne devrait pas se mêler de la microgestion et de la sélection des gagnants. Ça ne ferait qu'entraîner des pertes d'argent. Une solution comme celle de la norme de carburants à faible teneur en carbone permettrait également de réduire le fardeau des contribuables parce qu'elle exige des fournisseurs de carburants qu'ils assument leurs responsabilités, en plus de réduire le besoin de subventions.
    Merci.
    Merci, monsieur Atamanenko.
    Passons maintenant du côté du gouvernement avec M. Anderson.
    J'aimerais terminer sur un commentaire plutôt qu'avec une question.
    Monsieur Samson, j'ai bien apprécié ce que vous aviez à nous dire, et je suis d'accord quant à l'importance de faire participer la communauté agricole à ce processus. Nous avons mis sur pied l'IIEB avec cette idée en tête.
    J'aimerais toutefois émettre un bémol. Je crois que dans l'esprit du public, les prix ont grimpé en 2008 supposément en raison de la production d'éthanol et de biocarburant. Je ne pense pas que ce soit exact. Les ratios stock/utilisation étaient en chute depuis des années, surtout en ce qui concerne les grains. Il y a eu de la manipulation sur les marchés financiers.
    La production d'éthanol avait peut-être quelque chose à voir avec ça, mais elle n'a pas joué un rôle majeur, et pendant que les prix restaient toujours élevés, le prix des grains baissait encore et encore. Je vois Mme Buth hocher la tête.
    Je pense que c'était une explication simple pour essayer de jeter le blâme sur la production d'éthanol. Nous devrions encourager la production d'éthanol autant que possible, ainsi que la production d'autres biocarburants liés à l'agriculture. Je ne pense pas que cet argument soit valable puisque les producteurs et les responsables mettent en place des programmes.
    Les rapports de la FAO intitulés Perspectives de l'alimentation font état des réserves de grains de 2006 à 2008. Vous constaterez qu'il y a eu une hausse de 10,9 p. 100 dans l'utilisation des autres céréales secondaires, principalement l'éthanol. Les agriculteurs du monde entier ont eu une bonne récolte en 2008. Le problème était qu'il y a eu un changement majeur dans l'utilisation industrielle, ce qui a fait baisser les réserves mondiales.
    Même si le Canada n'est pas un très gros joueurs dans l'industrie mondiale des grains, du moins en ce qui concerne les céréales secondaires, il joue tout de même un rôle dans l'importation du maïs des États-Unis. Les agriculteurs du monde étaient enchantés par ce programme, parce que ça leur a réellement permis de se renforcer et parce qu'ils connaissaient une pénurie. Mais nous devons vraiment être prudents pour ne pas aller trop loin dans ce mandat.
    Merci beaucoup à tous nos témoins pour être venus aujourd'hui. Vos commentaires nous seront très utiles dans notre étude pour la portion écoÉNERGIE pour les biocarburants. Nous nous réunirons de nouveau jeudi.
    Je vous remercie, monsieur Davis, pour avoir accepté de vous joindre à nous par téléconférence. J'ai beaucoup apprécié ce que vous aviez à nous dire, et j'aurais aimé en entendre davantage, mais notre temps est limité. Je vous remercie.
    La séance est levée.
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