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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 036 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 18 novembre 2010

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Ceci est la 36e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne en ce jeudi 18 novembre 2010.
    Nous allons poursuivre l'étude de notre projet de loi S-6. Cependant, auparavant, mesdames et messieurs, j'aimerais passer en revue quelques points d'ordre administratif.
    Premièrement, lors de notre prochaine réunion, nous recevrons au moins un autre témoin encore, voire deux. Nous prenons les dispositions avec le dernier témoin et nous attendons sa confirmation. Ensuite nous procéderons à l'étude article par article.
    Lors de la réunion suivante, le ministre comparaîtra au sujet du projet de loi C-4, comme vous vous en souviendrez. Ensuite nous nous attaquerons au projet de loi C-21.
    Monsieur Comartin, vous souhaitiez inviter des témoins sur le projet de loi C-21. Vous avez demandé la comparution de Statistique Canada. Le ministère nous a fait savoir qu'il n'a pas de nouveaux renseignements à apporter. Par ailleurs, ils ne sont pas disponibles aux deux dates que nous leur proposions.
    Aucun des autres membres n'a proposé de témoins. Je veux juste vous mettre au courant, car notre calendrier est maintenant très serré.
    Allez-y, madame Jennings.
     Ai-je bien entendu que le comité procédera à l'étude article par article du projet de loi S-6 mardi après-midi?
    Oui.
    L'avis que nous avons reçu précédemment n'indiquait pas d'étude article par article mardi, me semble-t-il.
    Quel sorte d'avis avez-vous reçu?
    C'est le calendrier des travaux du comité.
    En fait, le rapport du comité directeur a été adopté et il indiquait l'étude article par article du projet de loi S-6.
    Nous ferons l'étude article par article mardi.
    Oui.
    Quand devons-nous alors soumettre nos amendements?
    Nous aimerions avoir les amendements d'ici lundi midi, si cela vous convient.
    C'est midi, lundi. Merci.
    Je signale que nous prévoyons de tenir une réunion du comité directeur le mardi 23 novembre à 11 h 30. Je crois savoir que l'on vous a demandé si vous étiez disponibles, et les trois membres de l'opposition sont disponibles à cette heure-là.
     Enfin, vous devriez avoir en main un budget pour l'étude du projet de loi S-6. Ce n'est pas un gros budget. Le montant demandé est de 3 800 $ pour couvrir les frais des témoins.
    L'adoption est proposée par M. Lee.
    (La motion est adoptée.) [Voir Procès-verbaux]
    Le président: La parole est à M. Comartin.
    En ce qui concerne le projet de loi C-21, il y avait eu quelques discussions entre la greffière et mon bureau au sujet de l'audition d'un témoin supplémentaire, à cause de cette affaire qui a éclaté plus tôt cette semaine, cette combine à la Ponzi où toutes les accusations ont été retirées. J'aimerais avoir une idée...
     À mes yeux, et sans faire preuve de partisannerie excessive, si l'on va introduire le projet de loi C-21, et qu'on laisse faire ce genre de choses, et cela n'arrive pas qu'en Ontario, on se demande pourquoi prendre la peine de légiférer. Ce projet de loi va créer de nouvelles infractions relativement à la criminalité en col blanc. Des accusations sont portées en vertu de la loi actuelle, puis on y sursoit, et on ne se contente pas de surseoir aux accusations, on les retire carrément, sans autre forme de procès.
    J'aimerais que l'on invite un témoin qui pourra nous donner une idée de ce qui se passe réellement en Ontario.
    Qui proposez-vous d'inviter?
    Le procureur général de l'Ontario mène une enquête là-dessus en ce moment-même, et je crains donc que nul représentant direct du gouvernement n'accepte de prendre la moindre position tant que l'enquête se poursuit.
    Plusieurs avocats de Toronto ont représenté un certain nombre des victimes dans cette affaire. Il est clair qu'il y a eu fraude et d'autres activités illégales. Ensuite, nous voyons les accusations soit retirées soit suspendues ou bien des amendes très minimes sont imposées — rarement des peines de prison — simplement parce que les procureurs n'ont pas assez de ressources pour mener les procès.
    Puis-je m'en remettre à vous alors pour trouver des témoins?
    Oui. Je ne voulais pas que le procès-verbal indique que j'admettais que nous n'allions pas entendre de témoins.
    Non, je n'aurais jamais eu cette présomption. C'est juste que le seul témoin que vous avez proposé a répondu, en substance, qu'il n'y a pas grand-chose à ajouter. Je me ferais un plaisir d'en inviter un autre.

  (1535)  

    En ce qui concerne les renseignements que nous avons eus la dernière fois de Statistique Canada, soit le bulletin Juristat, je suppose que nous pourrons examiner ces chiffres lors de notre examen du projet de loi C-21.
    J'imagine qu'ils feront partie du dossier.
    Madame Jennings.
    Pour revenir à la question des travaux futurs de ce comité et du rapport du comité directeur, puis-je savoir quand ce rapport a été présenté au comité plénier et adopté?
    Je vais demander à la greffière de chercher la date pendant que nous procédons à l'audition de notre témoin, et nous pourrons peut-être revenir sur ce sujet à la fin de la réunion. Est-ce d'accord?
    Merci.
    D'accord, revenons au projet de loi S-6. En fait, nous avons deux points à l'ordre du jour. Nous avons le projet de loi S-6 et également l'examen d'une nomination par décret en vertu des articles 110 et 111 du Règlement.
    Nous allons commencer par la nomination par décret. Il s'agit de la nomination par décret de Susan O'Sullivan au poste d'ombudsman fédérale des victimes d'actes criminels. Au cours de la deuxième heure, comme nous le lui avons demandé, Mme O'Sullivan se mettra à notre disposition pour répondre aux questions sur le projet de loi S-6. Nous aurons également M. Howard Sapers, l'enquêteur correctionnel, et son directeur exécutif et avocat général, Ivan Zinger.
    Voici ce que je propose de faire. Nous allouons habituellement une heure pour un examen de nomination par décret. Si nous n'avons pas besoin de tout ce temps, je prendrai le reliquat pour la suite de la réunion et le scinderai en deux. La moitié sera consacrée à Mme O'Sullivan et l'autre à M. Sapers. Cela convient-il aux membres du comité?
    Très bien, nous allons procéder ainsi.
    Mme O'Sullivan est parmi nous.
    Je pense que vous connaissez la routine. Vous avez 10 minutes pour une déclaration liminaire, et ensuite les membres vous poseront leurs questions.
    Vous avez la parole.

[Français]

    Bonjour, monsieur le président et membres du comité. Je suis ravie d'être ici cet après-midi et d'avoir cette chance de vous rencontrer et de discuter de ma nomination comme ombudsman fédérale des victimes d'actes criminels.
    Permettez-moi d'abord de dire que j'ai été à la fois honorée et extrêmement enthousiaste d'accepter ce poste et de mettre ma passion au service des victimes d'actes criminels. Je crois que cette organisation a vraiment la capacité de changer les choses pour le mieux et de sensibiliser certains aux défis difficiles auxquels sont confrontées les victimes au Canada.
     Vous m'avez invitée ici aujourd'hui pour parler des compétences et des capacités qui me permettent de m'acquitter de mon travail d'ombudsman. Permettez-moi de dire que je crois que la sélection de dirigeants d'organisations comme la nôtre est importante et que je soutiens pleinement sans réserve les mesures prises à cette fin.
     Pour faciliter votre examen, je vous donnerai cet après-midi un bref aperçu de mes antécédents et de mon expérience, y compris des compétences et des capacités que je mettrai à contribution dans ce poste. Je vais aussi partager avec vous un peu la passion particulière qui m'anime à ce sujet et mon style de direction.

[Traduction]

    J'aimerais d'abord prendre quelques instants pour vous parler un peu de moi et de mes origines.
    Je suis née et ai été élevée ici à Ottawa, et j'appartiens à une famille de six enfants. Mes parents ont inculqué à chacun d'entre nous le sens élémentaire du bien et du mal, l'importance de l'honnêteté, de l'intégrité, du respect d'autrui et de l'éthique. Leur règle d'or était simplement que si l'on peut aider quelqu'un, il faut le faire.
    Je vous fais part de cela cet après-midi car ce sont là les valeurs fondamentales qui me guident dans ma vie tant personnelle que professionnelle. Je définis mon style de leadership comme centré sur les principes; autrement dit, faire la bonne chose pour la bonne raison.
    Mon expérience professionnelle remonte à presque 30 ans. J'ai reçu mon diplôme de l'Université Carleton en avril 1981 et j'ai commencé comme agente de police un mois plus tard. Je suis entrée dans la police car je voulais aider les gens et faire une différence dans ma collectivité.
    J'ai commencé ma carrière comme patrouilleuse et j'ai travaillé à la Division de la patrouille, puis à la Division des enquêtes criminelles et au Soutien opérationnel. J'ai pu voir de première main l'effet destructeur que les actes criminels peuvent infliger aux victimes: des parents à qui l'on apprend que leur enfant a été tué par un chauffard ivre; conduire un entretien avec des enfants agressés sexuellement; enquêter sur des crimes dont la victime souffre de déficience et peut être incapable de communiquer; voir la victime d'une agression familiale devoir ramasser ses enfants, quelques affaires et se réfugier dans un foyer pour sa sécurité et celle de ses enfants; voir des familles et des victimes s'efforcer de naviguer dans notre complexe système de justice pénale.
    Dans tous ces rôles, je me suis rendue compte aussi que, pour répondre aux besoins des victimes, il faut la collaboration d'organismes multiples, de façon à les soutenir dès le contact initial à travers toutes les étapes du système de justice pénale et au-delà.
    Après cette expérience, je suis passée aux Services de patrouille, où j'ai été promue inspectrice de district, puis inspectrice de service. À ce titre, j'étais responsable de me rendre sur les lieux d'incidents majeurs et à haut risque et de commander les opérations. Ce poste m'a aidé à rester calme lors d'une crise et à agir de manière stratégique, et surtout, avec flexibilité. Il m'a appris qu'il est important de rechercher des solutions originales et d'évaluer toutes les options et résultats possibles avant d'agir.
    Au milieu des années 1990 j'ai été détachée au Collège canadien de police, où j'ai eu l'occasion de travailler pendant un an dans une unité des aptitudes de communication et une autre année dans l'unité de formation de cadres. Mais j'ai eu surtout une occasion particulière — et certains d'entre vous se souviendront du rapport Rix Rogers sur l'abus sexuel des enfants —, celle de diriger une initiative de formation policière nationale en matière de prévention de la violence familiale et j'ai corédigé et contribué à plus de 10 rapports nationaux concernant la formation policière relativement aux victimes vulnérables.
    En 2001, j'ai été nommée chef adjointe du Soutien opérationnel et ai pu travailler à quelques projets importants, notamment la gestion des situations d'urgence. J'ai travaillé sur le plan quinquennal de gestion des situations d'urgence de la municipalité. J'ai été coprésidente du programme des urgences d'origine chimique, biologique et nucléaire ici, dans la région de la capitale nationale.
    J'ai été cadre supérieur responsable du programme de promotion du respect dans le milieu de travail du Service de police d'Ottawa, programme qui a été déployé sur cinq ans et qui s'attaque à l'un des objectifs les plus difficiles de toute organisation, soit la création d'un cadre de travail sain et sûr. J'ai également été partie prenante au partage d'information entre partenaires gouvernementaux en vue de contrer les atteintes à la sécurité, ainsi qu'à la prévention de la criminalité et à l'élaboration de la stratégie relative aux jeunes du Service de police d'Ottawa. Et j'ai eu aussi la grande chance de participer à la refonte de la gestion du stress dû à des incidents critiques suite, malheureusement, à de nombreux suicides d'agents au sein de notre organisation.
    En 2006, j'ai occupé le poste de chef adjointe des Opérations de patrouille, où j'ai pu faire preuve de nouveau de leadership dans le domaine de la planification stratégique, en particulier à titre de présidente des deux plans d'activité du service de police d'Ottawa.
    J'ai terminé ma carrière comme chef adjointe du Soutien opérationnel, où j'ai joué un rôle de premier plan dans l'élaboration et l'exécution d'un programme appelé « Opération Intersect », joué un rôle de leadership comme présidente de l'Association des anciens du cours de leadership en contre-terrorisme, qui est un réseau international de hauts dirigeants policiers travaillant sur des enjeux tels que le leadership, le renseignement et les opérations en rapport avec le terrorisme, un domaine de plus en plus important tant dans notre ville que notre pays.
    Au-delà des aptitudes à la gestion et au leadership, le poste de chef adjoint exige également de ne pas avoir peur de s'attaquer aux problèmes difficiles. Souvent il n'y a pas de précédent aux décisions qu'il faut prendre. Dans ce poste, et tout au long de ma carrière, j'ai milité pour le progrès, afin de continuer d'avancer et de trouver des façons nouvelles et efficaces de résoudre des problèmes de plus en plus complexes.
    Je ne m'attribuerai jamais le crédit du bon travail fait par la police d'Ottawa, car la vérité est que le travail ne vaut que ce que vaut l'équipe derrière vous, et j'ai eu le privilège de travailler avec certaines des meilleures équipes. Je dirais, cependant, que les compétences que j'ai acquises en travaillant avec ces équipes et en les dirigeant me seront très précieuses dans mes nouvelles fonctions.

  (1540)  

    Notre temps ensemble est limité, et je vais peut-être essayer d'illustrer mon style de leadership et mon expérience au moyen de deux exemples précis.
    Le premier dont j'aimerais vous faire part — et je l'ai mentionné plus tôt — est l'Opération Intersect. Elle est le résultat de mon travail avec des leaders dans le domaine du contre-terrorisme.
    Dans la région de la capitale nationale, il fallait établir un cadre trigouvernemental, un cadre de collaboration et de partage de l'information entre les municipalités, les provinces et le gouvernement fédéral; autrement dit, faire en sorte que, lorsque des décisions difficiles doivent être prises face à des menaces, ces décisions s'appuient sur les meilleurs renseignements disponibles, des renseignements devant être partagés entre les divers organismes.
    Nous étions confrontés à six menaces différentes et le cadre autorisait une action planifiée de la part de tous les intervenants de façon à atténuer les effets de la crise, d'une manière qui alerte sans alarmer et accroît la sécurité et la sensibilité du public en période d'instabilité et d'incertitude. L'Opération Intersect est maintenant en place et a servi à l'occasion de nombreux événements majeurs dans la région de la capitale nationale et elle a été déployée à l'occasion de grands procès de terroristes comme Khawaja. Je pourrais continuer à l'infini.
    L'Opération Intersect met en jeu plus de 32 organisations.

  (1545)  

[Français]

    Le programme est aussi disponible dans les deux langues officielles.

[Traduction]

    La réussite de ce programme a été mise en évidence, je pense, lorsque j'ai été invitée à représenter l'organisation à l'occasion d'une conférence internationale sur le contre-terrorisme au printemps dernier à Londres, en Angleterre, pour faire une communication sur le genre de travail que fait notre collectivité pour démanteler les silos que l'on rencontres dans un environnement à organismes multiples.
    Le deuxième exemple que j'aimerais mettre en lumière — et la raison pour laquelle je mentionne l'Opération Intersect est que ce programme est le fruit de cinq années d'excellent travail. Il s'agissait de mieux coordonner la réponse face aux victimes du crime ici, dans la ville d'Ottawa, et c'est un programme connu sous le nom de Programme de coordination de l'aide aux victimes. Il résulte de la prise de conscience du fait que si nous voulons réellement répondre aux besoins de toutes les victimes, cela ne peut être le fait d'un seul organisme, et qu'il faut collaborer de manière stratégique pour mettre à profit les moyens de toute l'organisation pour soutenir les victimes et satisfaire leurs besoins particuliers.
    Si je puis le dire, ce programme met à profit également toutes les leçons tirées de l'Opération Intersect et rassemble, comme je l'ai mentionné, des représentants des trois niveaux de gouvernement afin de fournir le soutien voulu aux victimes ici, dans la ville d'Ottawa. Ce programme en est encore à ses débuts. Je ne doute pas que le travail accompli va résulter en des changements positifs pour les victimes, localement et au-delà.
    Lorsque ce poste m'a été offert, je l'ai considéré comme taillé sur mesure pour moi. J'ai considéré que mon expérience dans la police au cours des 30 dernières années m'a conféré une profonde sensibilité pour les répercussions immédiates et claires de la criminalité sur les victimes. Le traumatisme, le désarroi, la force et la résilience des victimes que j'ai vues et aidées ont toujours été pour moi une source d'inspiration dans mon travail au sein de la collectivité et continueront de m'inspirer à titre d'ombudsman.
    Je suis ravie de cette occasion d'utiliser mon expérience pratique et tout ce que j'ai appris auprès des victimes que nous avons assistées, afin de faire une différence pour tous les Canadiens. Pour moi, c'est l'occasion de boucler la boucle de mon travail et d'aider ceux qui sont les plus touchés par la criminalité, les victimes. Il ne fait aucun doute qu'à titre d'ombudsman j'ai une responsabilité beaucoup plus large enver les victimes d'actes criminels au Canada. C'est pourquoi j'ai travaillé très fort pour me mettre à niveau et me familiariser avec les limites, les capacités et le rôle d'un ombudsman dans l'administration fédérale. Je continuerai à parfaire ces connaissances à l'avenir.
    Je conclurai en vous faisant part de ma vision pour ce bureau et le travail que nous pouvons accomplir. En tant qu'ombudsman, je considère que mon rôle est d'amener des changements positifs pour les victimes. J'ai la responsabilité envers à la fois les victimes et le gouvernement de faire en sorte que notre bureau soit responsable envers les victimes, que nous soyons à l'écoute des problèmes que les victimes soulèvent et que leurs voix soient entendues au niveau fédéral.
    Il existe de nombreuses façons d'accomplir cela, mais mon approche préférée est de garder ouvertes les lignes de communication et de donner à tout un chacun la possibilité de contribuer à la solution. Nous devons trouver un terrain d'entente entre les pouvoirs publics, les ONG et les victimes de façon à rendre possible le changement.
    Je ne serai pas toujours d'accord avec le gouvernement, et lorsque je serai en désaccord, je le ferai savoir. Cependant, il ne s'agit pas de critiquer... Ce qui me tient à coeur, c'est de faire la bonne chose pour les bonnes raisons et d'améliorer le sort des victimes du crime au Canada.
    Monsieur le président et membres du comité, j'espère vous avoir apporté cet après-midi les renseignements dont vous avez besoin pour avoir confiance en moi dans mes fonctions d'ombudsman des victimes d'actes criminels. Je crois apporter à cette fonction un passé avéré de travail acharné, d'intégrité et de leadership.

[Français]

    Je me suis orientée vers le domaine de l'application de la loi pour aider les gens. Aujourd'hui, dans ce nouveau poste, je continue à travailler au service du public et j'espère bien continuer à le faire pendant les trois prochaines années.

[Traduction]

    Étant donné mes 30 années d'expérience pratique, mon style de leadership et ma vision pour ce bureau, je pense avoir ce qu'il faut pour poursuivre l'oeuvre de ce bureau et faire pencher la balance en faveur des victimes.
    Je me ferais un plaisir de répondre aux questions que vous pourriez avoir. Merci.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Avant de passer aux questions, je veux rappeler aux membres du comité que si une personne nommée est convoquée par nous pour un examen... S'il s'agit d'une nomination par décret — et je cite O'Brian et Bosc — les comités « sont limités par le Règlement à l'examen des titres, qualités et compétences de l'intéressé et à ses capacités d'exécuter les fonctions du poste... ». Je vous demande donc de coopérer et de respecter cela. Mais comme toujours, je me montrerai raisonnable quant aux questions que j'autoriserai.
    Nous allons commencer avec Mme Jennings.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame O'Sullivan, je vous remercie de votre présentation et je vous félicite pour votre nomination. Je trouve que votre vision du rôle de l'ombudsman fédéral pour les victimes est louable.
    Vous avez dit que vous n'hésiteriez pas à dire publiquement que le gouvernement a tort lorsque vous croyez qu'il erre par ses pratiques ou ses politiques.
    Que pensez-vous d'un gouvernement qui alloue un budget pour apporter des services aux victimes en laissant près de la moitié de cet argent sur la table et en même temps lance une campagne publicitaire dirigée...?

  (1550)  

[Traduction]

    Nous avons un rappel au Règlement.
    Allez-y, monsieur Dechert.
    Monsieur le président, je pense que Mme Jennings n'a peut-être pas entendu ce que vous avez dit au sujet de la teneur des questions pouvant être posées au témoin relativement à sa nomination. Peut-être pourriez-vous le répéter, car je pense que la nature de sa question déroge clairement aux règles que vous avez fixées.
    Elle a probablement entendu. Il s'agit maintenant de veiller à respecter la règle.

[Français]

    J'aimerais répondre. Avant de faire de la politique, j'étais membre d'un comité de sélection pour des hauts dirigeants. Je peux vous dire qu'une partie de l'exercice et du processus permettant de déterminer si une personne est apte à combler un poste est de la mettre en situation et de voir les réactions, les conclusions et les solutions proposées par la personne.
    Je suis en train de décrire une situation hypothétique pour voir comment Mme O'Sullivan agira dans son rôle d'ombudsman fédérale. Je pense que c'est tout à fait approprié et correspond au mandat et au règlement que vous avez soulignés et lus à haute voix à tous les membres de ce comité.

[Traduction]

    Monsieur Comartin, allez-y.
    Anticipant que je risque d'enfreindre la règle que vous avez rappelée, je ne suis pas sûr de vouloir qualifier cela de décision.
    Il est clair que le rôle de l'ombudsman comporte un volet de promotion et de défense. Je pense que ce à quoi Mme Jennings voulait en venir, et ce qui m'intéresse aussi, c'est la façon dont cet ombudsman particulier voit son rôle de défense.
    Je suis un peu préoccupé par ce que vous avez dit au départ, monsieur le président, car cela restreint notre faculté de poser des questions à — j'allais dire cette candidate — cet ombudsman des victimes d'actes criminels dans notre pays concernant la façon dont elle voit le rôle de défense des victimes qu'elle est censée jouer.
    Tout d'abord, ce que j'ai dit au sujet de la limitation du champ de cet examen vient tout droit d'O'Brien et Bosc et reflète le Règlement. Ce que j'ai dit n'est pas mon opinion personnelle. J'ai cité directement O'Brien et Bosc. Voilà les limites dans lesquelles cet examen doit se dérouler. En tant que président, j'ai la latitude de donner une interprétation relativement généreuse de cette règle, mais il ne s'agit pas de trop déborder. Gardons cela à l'esprit.
    Ce que vous ne pouvez pas demander à Mme O'Sullivan, c'est le genre de politiques qu'elle va suivre. Elle ne devrait certainement pas compromettre les décisions qu'elle prendra à l'avenir. C'est toute la raison d'être de ces restrictions. Je pense que nous le comprenons tous. Tout le monde ici, sauf un membre, est juriste, et nous comprenons donc cela.
    Nous reviendrons à vous, gardant à l'esprit ces remarques.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'ai peut-être omis de clarifier que le cas que je soumettais à Mme O'Sullivan était hypothétique.
    Je reviens sur le programme du gouvernement. Par exemple, un montant de 10 millions de dollars est alloué pour fournir et apporter des services directs aux victimes d'acte criminel au cours d'une année financière. À la fin de cette année financière, seulement la moitié de cette somme a été dépensée, mais pendant cette même année, le gouvernement a dépensé plus que la moitié du budget pour une campagne publicitaire qui est fondée sur la prémisse que certaines...

  (1555)  

[Traduction]

    Un instant, madame Jennings.
    Monsieur Petit, est-ce un rappel au Règlement?

[Français]

    Oui. J'invoque le Règlement. Vous avez expliqué le Règlement à Mme Jennings. Or, de manière indirecte, elle fait exactement ce que vous venez de lui dire de ne pas faire. Elle fait de la politicaillerie, et je n'aime pas ça.
    Votre histoire d'exemple hypothétique, ça ne marche pas. Tout ce que vous voulez, c'est de viser le Parti conservateur. C'est tout ce que vous faites, et ce n'est pas correct. Ce n'est pas pour ça que madame est ici. C'est ce que je voudrais vous faire comprendre. Le président s'est...

[Traduction]

    Monsieur Petit, à l'ordre.
    Écoutez, je vais permettre à Mme Jennings de poursuivre. Si je pense à la fin de sa question qu'elle enfreint les règles, le Règlement de la Chambre, je le lui ferai savoir.
    Je veux être équitable envers tout le monde, mais avançons. Si elle enfreint le Règlement, je l'arrêterai.
    Monsieur Woodworth.
    J'espère que vous ne m'en voulez pas d'intervenir sur le rappel au Règlement, encore que vous semblez avoir déjà rendu la décision.
    Je pense qu'il est sage de ne pas demander à un témoin d'essayer de préjuger une décision particulière. Si vous soumettez un cas hypothétique à une personne dans la position du témoin, vous l'invitez à préjuger. C'est pourquoi le rappel au Règlement est fondé. Nous pouvons poser des questions sur les croyances et opinions générales. Mais de soumettre un scénario hypothétique et demander à un témoin ce qu'il ou elle ferait dans un tel cas revient à l'inviter à préjuger. C'est ce que la règle cherche à éviter.
    Merci.
    Le problème, c'est qu'elle n'a pas fini de poser sa question. Une fois qu'elle l'aura posée, je pourrai déterminer si elle est acceptable ou non.
    Madame Jennings, poursuivez.
    Je vais ouvrir une parenthèse. M. Petit ne s'en est peut-être pas rendu compte, mais il vient de dire que mon cas hypothétique n'était pas hypothétique mais bien réel. Je suppose que je vais devoir changer l'exemple. Je ne voudrais pas mettre Mme O'Sullivan dans la situation difficile de devoir se prononcer sur un événement ayant réellement eu lieu sous ce gouvernement conservateur. Il avait un budget de près de 10 millions de dollars pour les services aux victimes d'actes criminels, mais il ne l'a pas dépensé. Au lieu de cela, il en a laissé la moitié dans la caisse et s'en servi pour une campagne publicitaire de 6 millions de dollars intitulée « Les victimes comptent » dans laquelle il affirme que certaines lois sont appliquées alors qu'elles ne le sont pas.
    Madame Jennings, à l'ordre.
    Revenons au témoin.
    Merci.
    Voyant à quel point les membres conservateurs sont chatouilleux, je vais laisser de côté le cas hypothétique.
    J'ai juste une question. Votre CV est impressionnant, et je pense que vous avez démontré sur papier que vous avez les qualifications voulues pour le poste. C'est peut-être un simple oubli, mais sur votre CV vous mentionnez que vous avez été chef adjointe, Soutien opérationnel, et chef adjointe, Opérations de patrouille, d'octobre 2001 à août 2010. Cependant, vous avez négligé de dire pour quel service de police vous travailliez. Je suppose que c'était celui de la ville d'Ottawa.
    Oui, désolée, c'était le service de police d'Ottawa.
    Félicitations pour votre excellente carrière. Si j'en juge d'après votre CV, vous avez les qualifications, et je suis impatiente de vous voir au travail.
    Merci.

[Français]

    Monsieur Ménard, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis également impressionné par votre curriculum vitae.
    Je connais peu votre bureau. J'aimerais que vous nous le fassiez connaître en quelques mots, très rapidement. J'ai trois questions courtes. Combien d'employés avez-vous?
    Il y a approximativement 600 personnes civiles et 1 400 officiers. Il y a donc 2 000 personnes.

  (1600)  

    Il y a donc 2 000 personnes?
    Oui. Il y a 2 000 employés dans le Service de police d'Ottawa.
    Le service?
    Oui.
    Oh, vous voulez parler du nouveau bureau?
    Non. Je veux savoir combien de personnes s'occupent des victimes. Vous êtes l'ombudsman des victimes.
    Tout le service en est responsable, en réalité.
    On parle donc essentiellement de 2 000 personnes.
    Il y a les 2 000 personnes qui occupent un emploi au Service de police d'Ottawa. La responsabilité des victimes incombe à tous les membres. Par exemple, il y a des officiers qui répondent à des appels.
    Je ne comprends pas. Je veux savoir combien il y a de personnes dans le nouveau service que vous avez intégré au mois d'août, soit le Bureau de l’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels.
    Il y a 11 personnes.
    D'accord. Où sont affectées ces 11 personnes?
    Elles sont dans le même bureau, ici à Ottawa.
    Elles sont à Ottawa, mais elles se déplacent, évidemment, selon les plaintes qu'elles ont à traiter.

[Traduction]

    Il y a deux façons dont le bureau aide les victimes: collectivement et individuellement. Collectivement, nous tendons la main dans tout le pays. Les gens appellent le bureau ou nous envoient un courriel. Nous traitons toutes les plaintes émanant des victimes enregistrées au niveau fédéral.
    Le mandat nous permet également de passer en revue les plaintes, de sensibiliser aux besoins et préoccupations des victimes et d'identifier les enjeux émergents et de faire des recommandations au gouvernement.

[Français]

    Nous avons peu de temps, madame O'Sullivan. Je pense que vous n'aurez pas d'objection à répondre à ma prochaine question.
    Trouvez-vous que c'est un nombre suffisant, compte tenu de l'énorme tâche que vous avez décidé d'assumer?
     Présentement, je prépare un plan stratégique afin de préciser les priorités du bureau. En outre, je soumets celui-ci à un examen, qui n'est pas encore terminé. Pour répondre directement à votre question, je dirai qu'il faut terminer l'examen, mener à terme les concertations auprès des victimes et des groupes qui soutiennent les victimes, sur le plan national. Quand l'examen sera terminé, il va falloir déterminer si le nombre de personnes travaillant au bureau est suffisant pour exécuter le mandat du bureau.
    Pour ce qui est de votre travail, il consiste essentiellement à recevoir les plaintes des victimes, mais vous envisagez aussi, j'imagine, présenter chaque année au gouvernement une liste de choses qui devraient être changées, dans l'intérêt des victimes. Est-ce exact?
    Oui. Aujourd'hui, par exemple, je fais des présentations dans le cadre de comités. Il y a aussi un rapport annuel qui est

[Traduction]

déposé ici auprès du gouvernement.

[Français]

    J'ai intégré mon nouveau poste en août dernier, et j'ai fait beaucoup de commentaires destinés au public. Par exemple, pendant la deuxième semaine suivant ma nomination, j'ai fait une déclaration sur le registre des armes à feu. C'était entièrement public.
    Sur quoi?

[Traduction]

    Le registre des armes à feu.

[Français]

    D'accord.
    J'ai pris contact avec les médias. J'ai envoyé une lettre au ministre Nicholson. Ça allait à l'encontre de la position du gouvernement. Ce n'est qu'une façon d'illustrer comment le bureau peut faire entendre sa voix. On peut, en effet, faire des présentations dans le cadre de ce type de comité et utiliser les médias.
    Disposez-vous des fonds nécessaires pour commander des études que vous pourriez juger nécessaires, par exemple sur le soin devant être apporté aux victimes ou sur la meilleure façon d'agir avec elles? Je parle entre autres des services de police, évidemment, parce que vos 11 employés ne pourront jamais à eux seuls aider les victimes. Vous allez devoir recourir à des organisations locales.

[Traduction]

    Je pense qu'il faut tout considérer comme faisant partie d'un tableau d'ensemble. Le bureau dispose d'un certain budget, et ce travail est en cours. Il a aussi des frais de fonctionnement et des salaires à payer.
    Ai-je assez dans mon budget pour entreprendre des études massives? Non, ce n'est pas le cas.
    Comme je l'ai indiqué, nous élaborons un plan stratégique pour les trois prochaines années. Nous travaillons à une vision à l'horizon de cinq à 10 ans. Nous procédons à un examen. Et j'ai dit vouloir des lignes de communication ouvertes. Beaucoup d'organismes s'occupent des services aux victimes, et comme vous le savez très bien, les provinces et territoires sont largement responsables de la prestation des services aux victimes sur le terrain. Donc, le mandat du bureau concerne les victimes enregistrées au niveau fédéral, mais nous recevons aussi énormément d'appels d'autres personnes et nous les aiguillons vers les services appropriés, au niveau provincial ou territorial selon le cas.
    Pour répondre à votre question, nous allons examiner tout cela. J'ai eu l'occasion de rencontrer au cours des 12 dernières semaines un nombre énorme de personnes à travers le pays, d'engager des consultations avec les victimes, de rencontrer d'autres organismes fédéraux, tels que les Services correctionnels du Canada et la Commission des libérations conditionnelles, de rencontrer beaucoup d'autres contacts régionaux relativement à ces services, de faire une présentation à plus de 90 juges sur les enjeux. Nous saisissons donc toutes les occasions d'utiliser et garder ouvertes ces lignes de communication afin d'exécuter le mandat du bureau. Je débute et, comme je l'ai dit, je pense que quiconque à ma place vous dirait que d'avoir plus d'argent et pouvoir...

  (1605)  

[Français]

    Votre CV est impressionnant, mais je remarque que vous avez toujours évolué dans le domaine de la police.
     Ne sentez-vous pas le besoin d'avoir à vos côtés des gens qui ont une formation en sciences humaines, par exemple en psychologie ou en sociologie?

[Traduction]

    Comme je l'ai indiqué, j'ai eu l'occasion de travailler avec des universitaires tout au long de ma carrière. J'ai une liste à votre disposition, si vous voulez la voir. Je mène et ai mené des recherches poussées avec des universitaires comme Julian Roberts, dont le travail est très renommé, et le professeur Skoog. Je fais appel à la recherche et aux universitaires, absolument, s'agissant de cerner les problèmes, et je les consulte. J'ai des antécédents dans ce domaine.
    Vous aurez peut-être remarqué également dans mon CV que j'ai coprésidé le comité CISP, le Comité des informations et statistiques policières. Il s'agit de partir des faits, car la plupart du temps notre bien le plus précieux ce sont les gens, et si nous allons utiliser ces ressources pour soutenir les victimes, nous devons tenir compte des faits...
    Pendant mes quatre années au comité CISP, j'ai beaucoup travaillé sur les données relatives à la criminalité, en particulier l'uniformisation des déclarations d'actes criminels. J'ai été très fière en tant que présidente du comité de contribuer à l'élaboration de l'indice de gravité des actes criminels. Comme vous le savez tous, nous disposons aujourd'hui de trois outils au Canada pour déterminer le niveau de sécurité de nos collectivités. Le taux de criminalité en est un. L'indice de gravité des actes criminels a été mis au point après quatre années de travail pour assurer que nous ayons les bonnes données. Et l'autre outil, bien sûr, est l'Enquête sociale générale.
    J'ai beaucoup d'expérience et d'antécédents pour ce qui est du travail avec les universitaires et je suis grande partisane de la recherche des faits...
    Merci de cette question.
    Merci.
    Nous passons à M. Comartin.
    Merci, monsieur le président.
    Merci d'être ici, madame O'Sullivan. Comme les intervenants précédent, j'ai moi aussi été très impressionné par votre CV.
    J'ai quelques préoccupations et j'aurais pensé que cette question viendrait de mes collègues du Bloc. Vous vous exprimez manifestement très bien en langue anglaise, mais j'ai retiré l'impression aujourd'hui que vous ne parlez pas couramment le français. Où situeriez-vous votre capacité à lire, écrire et parler couramment le français?

[Français]

    Je suis à l'aise dans les deux langues. Je profite de toutes les occasions qui s'offrent, au bureau, pour communiquer en français avec mes collègues ainsi qu'avec les intervenants et les groupes de victimes. Pour moi, il est très important que les gens puissent recevoir les services dans la langue officielle de leur choix. La grammaire et les temps de verbes me causent parfois des problèmes, mais ma compréhension est bonne. Si je suis passionnée par un sujet, je choisis de parler anglais.
    Allez-vous recevoir de la formation en français?
    J'en ai reçu à l'université. Quand j'étais au Service de police d'Ottawa, j'ai suivi un cours privé dispensé par un professeur.
    Parmi les personnes qui travaillent avec vous, certaines sont-elles complètement bilingues?
    Oui, tout à fait.

[Traduction]

    Mon autre préoccupation, très franchement, nous ramène à un sujet que vous avez déjà évoqué, le registre des armes à feu. J'avoue que j'étais impliqué d'assez près dans ce débat, à l'époque où votre nom a d'abord été évoqué comme prochaine ombudsman. Je pense que votre réaction initiale vous a démarqué de votre prédécesseur; de fait, votre prédécesseur vous a reproché de n'avoir pas pris position immédiatement sur le registre des armes à feu. De fait, à l'époque, madame O'Sullivan, vous avez exprimé une incertitude — disons-le ainsi, du moins c'est ainsi que les médias l'ont rapporté — quant à l'opportunité pour l'ombudsman de prendre position sur un enjeu comme celui-ci. Je sais qu'ultérieurement vous l'avez effectivement fait. Il est clair que vous avez un rôle de défenseur. Êtes-vous d'accord avec moi là-dessus?

  (1610)  

    Je ne sais pas si nous devrions utiliser le mot « ombudsman », mais nous utilisons certainement le mot « promotion », la promotion de la justice pour les victimes.
    Plus précisément, dans la brochure que vous avez distribuée, on lit que vous avez pour mandat de conseiller le gouvernement du Canada sur la façon de modifier ses lois, ses politiques et ses programmes de façon à mieux satisfaire aux besoins des victimes. Cela vous met clairement en situation, de temps à autre, de formuler des recommandations, fondées sur ce que les victimes d'actes criminels vous disent, concernant les modifications à la loi et le système judiciaire.
    Oui.
    Et vous ne voyez pas cela comme un rôle de promotion?
    Il s'agit de faire entendre la voix des victimes, oui.
    Et vous serez cette voix?
    Oui.
    Pour aborder un dernier domaine, les Britanniques sont allés beaucoup plus loin que tout ce que nous faisons au Canada sur le plan de l'aide aux victimes de la criminalité. Je ne sais pas si vous avez lu cet article paru ces derniers mois qui dit que certaines victimes se sentent presque harcelées tellement la police cherche à les aider. Avez-vous examiné le système au Royaume-Uni?
    Deux fois, en fait. Lorsque j'y étais au printemps en une capacité totalement différente, j'ai saisi l'occasion pour me rendre au bureau de soutien de Londres pour prendre connaissance de leur plan stratégique, et particulièrement du Livre blanc. J'étais récemment en Écosse où j'ai pris connaissance de leur plan d'activités intitulé « Do you know how supporting victims of crime is helping Scotland? »
    J'ai également eu l'occasion de rencontrer plusieurs des dirigeants là-bas il y a quelques semaines, particulièrement Owen Sharp, qui est directeur général des opérations de Victim Support England and Wales. Comme vous le savez, l'Angleterre connaît quelques problèmes particuliers y compris ses dépenses. Il y a beaucoup de similitude, bien sûr, avec le Royaume-Uni. L'approche retenue est nationale. Le message qui se dégage de Victim Support Scotland est que ce document a réellement suscité beaucoup de soutien aux victimes en Écosse. Une autre chose très intéressante au Royaume-Uni, en particulier chez Victim Support EU, c'est qu'ils travaillent tous actuellement à un manifeste. Mes contacts là-bas m'ont assurée qu'aussitôt qu'il serait prêt ils nous l'enverront. Ce manifeste va au-delà des droits des victimes. Les discussions portent maintenant sur la façon d'exécuter...
    Je vous remercie donc de cette question. Je pense qu'ils font du travail fantastique là-bas, et nous continuerons de collaborer avec eux.
    Dans le cours de votre mandat de trois ans — plutôt deux ans et demi maintenant avant que vos trois années soient écoulées — pensez-vous être en mesure de faire des recommandations au gouvernement fédéral sur une expansion des services aux victimes d'acte criminel?
    Oui.
    C'est tout, monsieur le président. Je vous remercie.
    Merci, monsieur Comartin.
    Nous allons passer au côté gouvernemental, et je donne la parole à M. Norlock.
    Merci beaucoup, madame O'Sullivan. Vous avez un CV très impressionnant. Vos réponses aux questions m'ont impressionné.
    Je partage une histoire de 30 ans avec la police, beaucoup dans la vallée de l'Outaouais pendant la première moitié, et je viens d'une famille de six. Et ce sera le point de départ de mes questions.
    Vous dites que vos parents vous ont enseigné certaines valeurs fondamentales. À mon sens, et vous pourrez me dire si j'ai raison, lorsqu'on vient d'une famille relativement nombreuse, et à notre époque six enfants semblent être une famille plutôt nombreuse, on apprend à partager. On apprend à choisir ses priorités, car les familles ont des revenus limités, surtout celles qui ont six enfants qui réclament beaucoup. Et l'on apprend aussi à vivre selon ses moyens, mais cela ne signifie pas que l'on n'aspire pas à mieux. Donc, en partant de ces valeurs fondamentales, comment voyez-vous la gestion de votre service, en ce sens que vous devez partager avec d'autres ministères, que vous devez apprendre à vivre selon vos moyens? Comme membre d'un service de police vous pourrez nous dire aussi s'il vous est jamais arrivé de disposer de ressources limitées. Je pense que vous conviendrez avec moi que les ressources ne suffisent jamais, mais que parfois il faut se débrouiller avec ce que l'on a.
    J'aimerais donc que vous nous disiez quelques mots à ce sujet et ensuite plus précisément en quoi votre rôle d'ombudsman reflétera ces valeurs et certaines de ces limites, mais sans que cela vous empêche de représenter ceux auxquels les policiers ont affaire en premier, c'est-à-dire les victimes. Nous sommes le premier contact que les victimes ont avec la société. Comment gérez-vous tous ces éléments qui se confondent? Peut-être pourriez-vous juste faire quelques remarques générales dans cet ordre d'idées.

  (1615)  

    Tout d'abord, le bureau de l'ombudsman n'existe que depuis trois ans, et j'ai donc le privilège de partir du fondement construit par l'ancien ombudsman et son personnel.
    Certaines de mes priorités seront l'approche et la sensibilisation, la gestion des risques, les rôles et responsabilités et la consultation. Je vais réfléchir aux remarques de M. Comartin. J'ai beaucoup d'opinions, j'ai beaucoup d'expérience comme agente de police. J'apporte cela à la table.
    L'une de mes résolutions est d'être la voix des victimes. Lorsque je parle pour les victimes, je veux réellement être leur voix. L'une des priorités de notre bureau est de continuer à élaborer un cadre de consultation et de dialogue dans tout le pays, afin que nous puissions nous connecter. En 12 courtes semaines, j'ai parlé à beaucoup de personnes dans différentes provinces et territoires. Nous avons parlé de la nécessité d'un dialogue national. Je sais qu'il existe divers comités consultatifs.
    Je vais prendre un exemple. Services correctionnels Canada a investi pendant plusieurs années dans le Comité consultatif national autochtone, qui compte parmi les personnes les plus représentatives du pays pour traiter de ces problèmes. Serait-il possible pour mon bureau de mettre à profit les travaux de ce comité et de pouvoir y participer en ouvrant les lignes de communication?
    Nous ne voulons pas réinventer la roue. Les victimes nous ont dit quels sont les problèmes. Il s'agit de construire un cadre de dialogue plus large pour mettre à plat ces problèmes. Tout le monde ici sait que les victimes ont des besoins différents, que ces besoins peuvent être très spécifiques et qu'il n'y aura probablement pas de consensus sur toutes les priorités qui dépendent de l'expérience et des besoins d'une victime.
    On entend parler de problèmes tels que le trafic de personnes, le terrorisme, la corruption d'enfants sur l'Internet, les victimes touchées par l'immigration et l'expulsion, la nécessité de renforcer et de mieux informer les victimes. Voilà certaines des priorités que nous visons. À cette fin, il faut avoir ce dialogue et cette consultation. Nous devons être un reflet raisonnablement fidèle de ce que les victimes nous disent au Canada. Et nous devons continuer à travailler sur ces rapports et stratégies de premier plan qui existent déjà. Nous savons quels projets de loi sont proposés. En établissant ce cadre, nous pourrons mieux travailler.
    Merci.
    Vous avez mentionné votre consultation des victimes d'actes criminels, et vous avez mentionné quelques domaines qui en font l'objet. Les gouvernements futurs vont introduire des lois en matière de criminalité et d'ordre social sur lesquels vous pourrez vouloir influer. Pensez-vous que vous serez à l'aise pour travailler avec le ministère de la Justice ou le ministre de la Sécurité publique sur les projets de loi? Hésiterez-vous à faire savoir aux ministres ce que pensent les victimes d'un projet de loi donné, sur la base de vos conversations avec elles?
    À ce stade, je manierais avec prudence le mot « travailler avec ».
    Le bureau a déposé, par exemple, un rapport dans lequel nous formulons des recommandations. Ces recommandations préconisent 13 modifications de la LSCMLC. Nous avons donc des outils pour proposer des changements qui nous paraissent s'imposer en vue de mieux satisfaire les besoins des victimes.
    La communication est l'un des plus gros problèmes. Beaucoup de gens font d'excellentes choses auprès des victimes, dont les pouvoirs publics. J'ai rencontré beaucoup de membres de différents partis qui me donnent aussi des avis. En sus, nous avons les outils voulus pour formuler ces recommandations.
    À notre bureau, du fait de la nature de notre mandat, nombre des plaintes que nous recevons concernent le SCC et la Commission des libérations conditionnelles. Au cours des trois dernières années, le SCC a lancé une initiative relative aux victimes. Il importe d'avoir des lignes de communication ouvertes et de considérer certains des points d'accord qui nous permettront de nous écouter les uns les autres et d'isoler les difficultés. J'ai été encouragée de voir, lors des conversations avec les divers organismes, leur volonté de faire plus pour les victimes d'actes criminels.

  (1620)  

    Nous avons terminé le premier tour. Un consensus semble se dégager ici. Mme O'Sullivan comparaît également au sujet du projet de loi S-6. Nous pourrions entamer cette partie de notre réunion tout de suite, si vous le souhaitez. Cela nous laissera plus de temps.
    Une voix: Non, j'ai une question.
    Le président: Vous avez une autre question?
    Une voix: Oui.
    Le président: D'accord. Il nous reste environ 10 minutes. Nous allons commencer avec les libéraux.
    Monsieur Lee, c'est vous? Cinq minutes.
    Madame O'Sullivan, votre CV et votre carrière au sein du service de police d'Ottawa sont très impressionnants. Je suis sûr que vous n'aurez aucune difficulté côté gestion.
    Lorsque vous êtes arrivée à votre bureau, je suis sûr qu'il avait sa part de problèmes administratifs et de coupures de presse et de dossiers en cours. Je suis simplement curieux, avez-vous hérité de problèmes laissés derrière lui par votre prédécesseur?
    Deuxièmement, vous êtes en poste depuis environ trois mois. Avez-vous déjà un projet favori? Je sais que vous consultez et réfléchissez à l'avenir, mais je me demande simplement si vous en avez un intéressant les victimes.
    Premièrement, avez-vous hérité de problèmes que vous allez chercher à résoudre? Deuxièmement, avez-vous des projets favoris?
    En réponse à votre première question, les recommandations concernant la LSCMLC et le projet de loi C-39 sont des questions qui m'ont été léguées. Mon prédécesseur recherchait un financement pour les CAE, les centres d'appui aux enfants. Il l'a obtenu. Le gouvernement a apporté cette aide.
    Si vous me demandez quel est mon projet favori, je crois qu'il s'agit réellement du plan stratégique futur, de la consultation, de façon à continuer à construire sur les bases déjà jetées. Il ne s'agit pas seulement de soumettre des recommandations après consultation. L'une des choses que nous omettons souvent c'est de boucler la boucle et de faire savoir aux victimes ce que fait le bureau, où en sont ces priorités que nous établissons avec eux, afin de les garder informés de ce que nous faisons, des progrès réalisés, et pouvoir venir ici vous rencontrer à la fin de mes trois années pour vous dire ce que nous avons réalisé. Le projet est donc réellement la santé de ce bureau. Les victimes connaissent des centaines de problèmes et il est nécessaire d'établir ces priorités et de mettre à profit l'énergie de ce bureau, des organisations de victimes et des victimes de ce pays pour réaliser ces objectifs.
    Merci.
    Je vais partager le restant de mon temps, si je puis, avec M. Kania.
    Monsieur Kania.
    Merci, monsieur le président.
    Félicitations et bienvenue.
    À la page 3 de votre CV, sous « Comités antérieurs », vous indiquez: « Depuis ma nomination comme ombudsman fédéral pour les victimes d'actes criminels, j'ai démissionné... »
    Avez-vous jamais été membre ou militante d'un parti politique?
    Non.
    Premièrement, ce n'est pas une question autorisée par les règles, croyez-le ou non. Renoncez à toutes questions concernant les dons politiques ou l'appartenance à des partis politiques. C'est tiré directement de O'Brien et Bosc.
    En guise de rappel au Règlement, je ne veux pas perdre de temps là-dessus maintenant. Je ne suis pas sûr de comprendre les suggestions de la présidence. Cependant, nous n'avons pas besoin de discuter de cela maintenant, et...
    Vous avez la réponse. Lisez seulement la page 1012 d'O'Brien et Bosc. C'est écrit là en noir et blanc.
    D'accord. En ce qui concerne votre rôle, j'ai une question en deux parties. Premièrement, comment voyez-vous votre rôle au niveau fédéral par rapport à l'aide aux groupes et associations de service aux victimes sur le terrain, localement? Par exemple, il existe un groupe de service aux victimes à Brampton, ma ville, et j'aimerais savoir comment vous allez les aider directement.
    Deuxièmement, il me semble que l'un des problèmes majeurs des victimes réside dans les ordonnances de restitution et le fait qu'elles ne sont pas exécutées ou alors seulement partiellement. J'aimerais donc savoir si vous êtes informée de ce problème et si vous seriez prête à y réfléchir et à agir, et le cas échéant comment.
    Je connais très bien les problèmes relatifs à ces soutiens, ayant passé 30 années à les confronter en première ligne. Le soutien direct et la prestation de ces services sont de la responsabilité des provinces et territoires.
    Ce que nous pouvons faire dans notre bureau, c'est travailler avec les principales ONG des diverses provinces. Comme vous le savez bien, il existe des organisations nationales, telles que le Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes, Victimes de violence, et il en existe dans différentes provinces et territoires. Nous pouvons donc relier ces voix nationales.
    J'ai effectivement été en contact avec certaines personnes dans les provinces, et je fais très attention de ne pas marcher sur les pieds ou d'essayer de faire le travail qui appartient aux provinces et territoires. Je pense que ce bureau peut jouer un grand rôle de liaison entre les provinces et territoires afin de conjuguer les forces et créer une synergie pour régler les principales difficultés dont souffrent les victimes.
    Vous avez mis le doigt sur un enjeu qui, bien que ne relevant pas de ce bureau, revient dans toutes les provinces que j'ai visitées.

  (1625)  

    Merci.
    Nous passons à M. Lemay.

[Français]

    Félicitations, madame, je pense que vous allez avoir beaucoup de travail. J'ai trois questions.
    Tout d'abord, il s'agit d'un mandat de trois ans. Est-ce que ce mandat est renouvelable?
    C'est au gouvernement de décider.
    Mais dans votre contrat, est-ce que c'est écrit que c'est renouvelable ou que rien n'est écrit?
    Ce n'est pas un contrat; c'est un nomination d'une durée de trois ans.
    D'accord. Vous relevez du ministère de la Sécurité publique?
    Non, du ministère de la Justice, du ministère de M. Nicholson.
    Pardon? Du ministère de la Justice et...
    Du ministère de M. Nicholson.
    Quelle approche entendez-vous adopter? Je suis très préoccupé par les victimes, pas seulement en général, mais chez les Autochtones. Il y a une crise pancanadienne énorme au sein de la population autochtone. Il est extrêmement difficile de travailler avec les victimes chez les Autochtones.
    Est-ce que vous avez déjà établi une politique? Est-ce que vous avez déjà commencé à réfléchir à une certaine approche à cet égard?
    Oui, absolument. Je veux organiser une rencontre avec Sisters in Spirit. J'ai aussi eu une réunion avec le chef Stan Grier, qui représente les services de police amérindiens du Canada, qui sont au nombre de 38. M. Grier est coprésident d'un comité de l'Association canadienne des chefs de police. Il y a eu une réunion à Vancouver parce que c'est une priorité pour le comité de l'ACCP de travailler avec le bureau. J'ai tenu beaucoup de réunions avec d'autres services, avec les Inuits ici, à Ottawa, mais ce sont des services nationaux. Alors, c'est une priorité pour le bureau aussi.
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Nous arrivons à la fin de notre première heure, et je vais donc clore cette partie de la séance. Nous allons maintenant poser nos questions à Mme O'Sullivan sur le projet de loi S-6, conformément à la demande de Mme Jennings.
    Je donne la parole à Mme Jennings.
    Le comité va-t-il déposer un rapport?
    Oui, et je vous remercie de l'évoquer.
    Il existe une motion coutumière que le comité pourrait adopter, qui dirait que le comité a examiné les qualités et les compétences de Susan O'Sullivan, ombudsman fédéral des victimes d'acte criminel, et il la trouve compétente pour exécuter les fonctions de ce poste et il endosse sa nomination sans réserve.
    Souhaitez-vous l'adopter?
    Je propose la motion.
    (La motion est adoptée.)
    Merci. Dois-je faire rapport de cette motion à la Chambre?
    Des voix: D'accord.
    Le président: Nous allons poursuivre avec les questions sur le projet de loi S-6.
    Avant de passer aux questions, je crois que vous avez une déclaration liminaire, madame O'Sullivan.
    Oui.

[Français]

    Monsieur le président, mesdames et messieurs, merci de me donner la possibilité de m'adresser à vous aujourd'hui pour parler du projet de loi S-6 et de la disposition de la dernière chance. J'ai pris connaissance des propos de plusieurs témoins importants qui ont comparu devant le comité et ont abordé la question sous de nombreux angles très différents.
    Il est clair que le sujet n'est pas simple et qu'une foule d'arguments valables peuvent être présentés pour ou contre la disposition. Cependant, je ne suis pas ici pour analyser ces arguments. Je suis ici en ma qualité d'ombudsman fédérale des victimes d'actes criminels afin de jouer un rôle qui est notre raison d'être: donner une voix aux victimes.
    Je vais vous faire part de ce que nous disent les victimes pour que vous puissiez en tenir compte dans vos délibérations.

  (1630)  

[Traduction]

    J'ai eu l'occasion récemment de parler à quelques victimes et groupes de défense des victimes de cette question. Malheureusement, je n'ai pas procédé à des consultations poussées à ce stade, le temps ne me l'ayant pas permis. Aussi, les vues que je vais vous répercuter sont celles des groupes avec lesquels j'ai eu l'occasion de parler, mais elles ne peuvent être considérées comme représentatives de l'opinion des victimes dans leur ensemble.
    Au cours de mes entretiens, il m'est apparu très clairement qu'il existe un fort soutien au projet de loi S-6 sur la base des trois grands principes qu'il épouse: responsabilisation, transparence et compassion.
    Le premier, la responsabilisation, est prépondérant. Ceux qui ont perdu des proches victimes d'actes de cruauté horribles et brutaux veulent avoir la certitude que leur auteur sera traduit en justice et purgera une peine de prison. Selon leur perspective propre, les victimes peuvent considérer cette peine comme un moyen de réadapter le coupable et de l'aider à devenir un membre amendé et productif de la société. Dans une autre optique, la victime peut juste vouloir garantir que le coupable ne se promène pas en liberté et qu'il paye pour la vie qu'il a prise. Dans l'un ou l'autre cas, quelle que soit l'optique, il importe à la victime que le coupable purge sa peine et que cette responsabilisation soit préservée.
    Dans ces conditions, on peut comprendre qu'il soit difficile pour une victime de comprendre pourquoi un contrevenant, condamné à une peine de 25 ans, recevrait la possibilité de sortir plus tôt, de payer une dette moindre à la société pour le crime commis et, en substance, puisse payer un prix de rabais pour la vie qu'il a enlevée.
    Cela ne signifie pas qu'il n'y a pas des arguments convaincants dans l'autre sens, fondés sur l'impact que cette perte d'espoir peut avoir sur la réinsertion du contrevenant. C'est un débat important et je suis sûre que vous allez le tenir ici, mais je vous présente pour ma part le point de vue de la victime.
    Le deuxième élément, la transparence, fait intervenir la mesure dans laquelle les victimes sont informées de la clause de la dernière chance en général, de la demande présentée par un contrevenant le cas échéant et de leur droit de participer au processus. Comme vous le savez, la notification et son caractère obligatoire ou facultatif dépend de la province. Par exemple, nous croyons savoir qu'en Ontario les victimes n'ont pas de droit légal d'être informées lorsqu'un contrevenant demande l'application de la clause de la dernière chance, ni du moment où cette demande est entendue par un jury. Cela ne signifie pas forcément que la notification n'est pas donnée dans la pratique, mais elle est discrétionnaire et ne constitue pas un droit. Les victimes n'ont aucun recours si elles ne peuvent pas réellement être partie prenante au processus.
    Je ne m'attarderai pas trop là-dessus, car c'est là une fonction provinciale. Je dirais, cependant, que toutes les victimes méritent d'être tenues informées et de jouer un rôle véritable au sein du système de justice pénale si elles le souhaitent.
    Le troisième principe est la compassion, et c'est vraiment là le noeud de l'affaire pour les victimes. La souffrance qu'éprouvent les victimes est dévastatrice et pour les personnes suffisamment fortes pour essayer d'avancer dans la vie, l'obligation de revivre le crime ravive, encore et encore, la pire souffrance qu'ils aient jamais connue. Oui, les victimes peuvent choisir de ne pas assister à l'audience, mais comme tout le monde, les victimes ressentent souvent une forte compulsion à être là en personne et à défendre la personne même qui ne le peut pas — la victime.
    Même avant l'audience, l'incertitude peut causer des dégâts. Certaines victimes diront que le pire est tout simplement de ne pas savoir quand ou si le meurtrier va faire la demande et, si c'est le cas et qu'elle est rejetée, s'il va essayer de nouveau et dans combien de temps. Cet état d'incertitude est une source d'angoisse et de tension supplémentaire à celle qu'ils connaissent déjà. Dans le système actuel, les victimes peuvent avoir à faire face à ces audiences jusqu'à cinq fois au cours d'une peine à perpétuité, soit après 15, 17, 19, 21 et 23 années de détention.
    Ce problème pourrait être réglé de différentes façons. Celle proposée dans le projet est de supprimer carrément la clause du dernier espoir. Une autre façon pourrait être d'appliquer les dispositions préconisées pour les contrevenants déjà incarcérés à tous les délinquants, soit limiter rigoureusement le nombre de demandes pouvant être présentées en exigeant un intervalle d'au moins cinq ans entre chaque demande de libération anticipée.

[Français]

    Dans le fond, tout ce que veulent les victimes c'est que d'autres ne vivent pas ce qu'elles ont vécu. Elles veulent que le contrevenant soit tenu responsable de son crime. Elles veulent participer au processus à part entière, si elles le souhaitent, et elles ne veulent plus revivre le crime à répétition pour pouvoir se tourner vers l'avenir et la guérison.
    Le projet de loi sous sa forme actuelle répond à certains de ces souhaits, mais il ne constitue pas nécessairement l'unique solution pour régler le problème.
    Au nom de mon bureau, je réitère mon appui aux victimes que nous représentons et j'encourage les députés à appuyer le projet de loi aussi rapidement que possible.
    Thank you. Merci.

  (1635)  

[Traduction]

    Merci.
    Mesdames et messieurs, voici ce que je propose: cinq minutes pour les questions, maximum.
    Nous allons commencer avec M. Woodworth pour poursuivre la rotation, puis nous donnerons la parole aux libéraux et ensuite à M. Ménard. Nous n'avons qu'une demi-heure. Je demande votre collaboration. Ensuite nous irons à M. Comartin, car sinon il serait exclu si nous continuons la rotation, car le prochain intervenant serait un libéral, puis nous aurions trois conservateurs, n'est-ce pas?
    Monsieur le président, à mon sens, cette partie de notre réunion est entièrement nouvelle et par conséquent les règles déterminant les tours de questions s'appliquent. Cela dit, je ne suis pas opposée à réduire le temps imparti pour que chacun des quatre partis puisse poser des questions à ce témoin sur le projet de loi S-6, mais ceci n'est pas une continuation de la partie précédente.
    Le fait que Mme O'Sullivan soit entendue directement après sa comparution au sujet de sa nomination n'a absolument rien à voir avec le fait qu'elle est là comme témoin sur le projet de loi S-6. Par conséquent, l'ordre normal des questions s'applique: Parti libéral, Bloc, NPD, puis Parti conservateur; et vu le temps total dont nous disposons, je n'ai pas d'objection à ce que vous le divisiez en quatre parties égales, mais il faut commencer avec les libéraux.
    Excellent, je crois que nous avons résolu le problème.
    Oui, monsieur Lee.
    D'après l'ordre du jour d'aujourd'hui, M. Sapers va également faire un exposé. Ne pourrait-il pas le faire tout de suite?
    Non. Il a demandé à comparaître à part. C'était une demande précise; autrement nous...
    Lors d'une autre réunion?
    Non. Eh bien, oui, séparément, lors de la séance d'aujourd'hui.
    Nous allons donc faire tout cela en 55 minutes.
    Eh bien, il y a deux témoins...
    M. Derek Lee: D'accord.
    Le président: Nous avons habituellement deux témoins.
    Nous allons donc procéder ainsi, car le résultat est le même. Si chacun d'entre nous prend cinq minutes, chaque parti aura l'occasion de poser ses questions.
    Qui va donc commencer pour les libéraux?
    Madame Jennings.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup de votre présentation, madame O'Sullivan.
    Puis-je vous demander si vous connaissez les chiffres les plus récents sur le nombre de détenus, de contrevenants, purgeant actuellement une peine à perpétuité dans nos pénitenciers? Oui ou non.
    Je viens juste de parler au Service correctionnel du Canada. Je crois savoir qu'il y en a 680 susceptibles de se prévaloir de la clause du dernier espoir. Ce n'est peut-être pas le chiffre exact, mais c'est ce qu'il me semble. Mais il y a environ 3 000 détenus à perpétuité.
    Oui. Connaissez-vous également les chiffres réels, qui nous ont été communiqués par le Service correctionnel, du nombre de détenus qui ont effectivement demandé la libération anticipée au titre de la clause de la dernière chance, c'est-à-dire le nombre effectif de cas référés en révision à la date d'octobre 2010, ainsi que les résultats, etc.? Connaissez-vous ces chiffres?
    Je les ai quelque part. Je n'ai pas les chiffres exacts ici. Je sais que c'est un petit nombre et que...
    D'accord, mais vous ne connaissez pas les statistiques les plus récentes.
    Avez-vous connaissance d'une étude scientifique ayant été menée sur les victimes, les familles de victimes de meurtre, quant à leur expérience avec la clause de la dernière chance, leur expérience avec le système judiciaire lorsque le meurtrier a été traduit en justice, jugé coupable, condamné à vie — 25 ans si nous parlons de meurtre au premier degré — leur expérience alors, leur vécu entre ce moment et la demande effective de libération, et si leurs vues sont restées inchangées ou non? Avez-vous connaissance d'une telle étude?
    Je n'ai pas connaissance d'une étude. Mais j'ai parlé avec des victimes au sujet...
    Non, je comprends. Ne pensez-vous pas qu'à titre d'avocate des victimes il vous incombe, entre autres, de faire en sorte d'avoir en main les meilleures connaissances scientifiques de façon à pouvoir conseiller adéquatement les victimes et le gouvernement quant à la politique à suivre?

  (1640)  

    Je pense que la recherche universitaire est importante, mais je pense aussi qu'il faut respecter l'expérience personnelle des victimes...
    Certainement, mais l'une des façons de respecter les victimes est de veiller à ce qu'elles soient informées des faits...
    Rappel au Règlement, monsieur le président.
    Je pense que le témoin mérite qu'on la laisse répondre à la question au lieu de se faire interrompre après quelques mots,comme vient de le faire Mme Jennings. Je trouve incroyablement insultant cette façon de faire en comité. Une fois qu'un témoin commence à répondre à une question et n'a clairement pu prononcer que quelques mots, cette personne devrait être autorisée à essayer de répondre.
    Eh bien, mesdames et messieurs, la règle générale est que la personne qui pose les questions décide comment elle veut procéder. Certes, cela doit toujours se faire dans les limites de la courtoisie et des convenances et, de manière générale, je pense qu'il y a lieu de laisser les témoins répondre. Mais en fin de compte, lorsque nous donnons à un membre ses cinq ou sept minutes, il en fait ce qu'il veut et je vais certainement traiter chacun d'entre vous avec respect à cet égard. Si les choses dérapent et que vous ne pouvez plus entendre ce qui se dit, je vais évidemment intervenir.
    Madame Jennings, poursuivez.
    Merci, monsieur le président.
    Madame O'Sullivan, si je vous ai coupé la parole, je m'en excuse. Ce n'était pas mon intention. Il me semblait que vous aviez effectivement répondu à ma question et c'est pourquoi j'allais passer à une autre.
    Ne pensez-vous pas que l'une des façons de faire preuve de compassion envers les victimes est de veiller à leur soumettre tous les faits pertinents? si elles maintiennent néanmoins leurs opinions, très bien, mais dans certains cas elles peuvent changer d'avis.
    Notre bureau a fait quelques recherches en prévision de cette comparution et nous avons constaté qu'il y a très peu de données sur l'impact de la clause de la dernière chance sur les victimes. Nous avons donc tenté de nous informer — évidemment pour être armés des meilleurs renseignements possibles — mais nous n'avons pas trouvé grand-chose à cet égard.
    Merci.
    Dans ces conditions, ne pensez-vous pas que l'une de vos recommandations ou déclarations aurait dû être pour dire qu'il y a très peu de recherches à ce sujet et que peut-être le gouvernement aurait dû veiller à rassembler tous les faits justifiant ce projet de loi avant de l'introduire?
    Une partie du problème ici, comme vous l'avez indiqué, réside dans le petit nombre de cas et l'autre partie est la difficulté à obtenir des victimes des informations sur ces sujets difficiles. Sont-elles seulement capables d'en fournir? Souhaitent-elles le faire? Comme vous l'avez indiqué, je ne crois pas que les nombres soient très importants.
    J'ai parlé à certaines personnes et obtenu leur permission. Un exemple est Priscilla de Villiers, que le comité connaît probablement bien. Elle a passé de nombreuses années à traiter de cette question et a parlé de ce que ressentent ceux qui assistent à ces audiences. Je peux vous dire que dans ma carrière antérieure j'ai connu des personnes qui ont perdu des proches et qui m'ont parlé de ce qu'elles ressentaient en devant revivre encore une fois...
    D'après ce que j'ai lu et selon les renseignements fournis également par Service correctionnel Canada, les nombres sont faibles. Il est de ce fait très difficile d'étudier l'impact.
    J'étais justement à Regina il y a quelques jours. J'ai vu et écouté — encore une fois, je respecte la confidentialité — une femme qui a perdu deux de ses enfants aux mains d'un meurtrier. Le conférencier parlait de la nécessité de rassembler des données sur la médiation entre victime et contrevenant et du travail qu'il faut consacrer à rassembler ce genre de données et à étudier l'impact.
    C'est de longue haleine. Toute donnée qui peut aider les gens, faciliter la prise de décisions ou informer sera précieuse. La question est de savoir s'il en existe suffisamment et combien de temps cela prendrait de les rassembler. Sont-elles appropriées? Je ne suis pas universitaire ou scientifique, mais quand j'ai vu le nombre d'années qu'il a fallu investir pour essayer de rassembler 500 cas... Habituellement, ces travaux sont de longue haleine.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Ménard pour cinq minutes.

[Français]

    Je comprends votre sympathie pour les victimes, et soyez certaine que je la partage.
    Cependant, je constate quand même qu'il y a vraiment très peu de prisonniers condamnés à perpétuité pour meurtre qui cherchent à recourir à ces dispositions.
    Certains dangers nous ont été signalés, et vous les reprenez. Notamment, les victimes pensent que, tous les deux ans, elles peuvent être appelées à comparaître pour contester une demande de liberté avant les délais prescrits. On a appris, selon les statistiques, que ce n'est jamais arrivé qu'une personne fasse une demande tous les deux ans, autant de fois, etc. On nous a expliqué aussi — d'autres l'ont fait avant vous — que c'est très long de préparer un dossier pour tenter de profiter de cela. En plus, le jury qui entend la première demande peut déterminer que la prochaine demande va devoir être faite plus tard qu'après deux ans. Et au fond, on changerait la loi pour régler une situation qui n'est jamais survenue.

  (1645)  

[Traduction]

    Comme je l'ai indiqué dans ma déclaration liminaire, je sais que vous avez reçu de nombreux témoins qui ont une longue expérience de la gestion des détenus et de l'impact de cette mesure. Pour ma part, je suis la voix des victimes. Aussi, comme je l'ai indiqué dans ma déclaration liminaire, j'ai contrebalancé mon propos en admettant qu'il y a aussi des considérations relatives à la gestion des contrevenants.
    Ce que je peux vous dire, c'est que certains avis formulés par les victimes auxquelles j'ai parlé... Tout d'abord, nous parlons là de meurtriers qui ont commis des crimes particulièrement horribles puisqu'ils ont écopé de 25 ans. Les victimes font aussi état de leur perte de confiance dans le système judiciaire lorsqu'elles voient des criminels condamnés à vie ne pas purger leur 25 années.
    Donc, encore une fois, dans ma déclaration, j'ai certainement essayé de reconnaître — et je l'ai fait — certains de ces autres problèmes qui se posent et que vous, membres du comité, devez examiner. Mais encore une fois, je suis ici la voix des victimes.

[Français]

    À vous entendre, au début, très honnêtement, j'avais l'impression que toutes les victimes étaient contre la disposition de la dernière chance.

[Traduction]

    Je ne puis dire cela, et je l'ai précisé dans ma déclaration liminaire. Au cours du bref intervalle de temps depuis qu'on m'a demandé de comparaître devant votre comité, j'ai essayé de consulter autant que possible. J'ai pris langue, par exemple, non seulement avec le Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes, dont je sais que votre comité le connaît très bien, mais aussi avec l'Association canadienne des policiers et M. Charles Momy. J'ai parlé personnellement avec des gens comme Priscilla de Villiers et Sharon Rosenfeldt — encore une fois, c'est avec leur permission que je cite leur nom. J'ai également parlé avec FACT, Families Against Crime and Trauma, en C.-B. J'ai également parlé avec M. Joe Wamback.
    J'ai donc saisi toutes les occasions possibles, mais comme je l'ai dit dans mes remarques liminaires, je ne puis affirmer que cette consultation représente toutes les victimes au Canada. Je ne puis le dire. J'ai fait tous les efforts raisonnables pour comparaître devant le comité en m'appuyant sur autant de consultation et de dialogue que possible pour être cette voix des victimes. Et encore une fois, j'ai admis qu'il existe d'autres points de vue, et je suis sûre que M. Sapers va traiter de ces autres aspects, comme beaucoup d'autres témoins l'ont fait.
    Je viens devant vous avec les opinions de personnes très en vue sur la scène nationale. Elles parlent beaucoup de leur perte de confiance dans le système de justice pénale lorsque des meurtriers condamnés à vie ne purgent pas leur peine, alors qu'il s'agit de meurtres au premier degré et de criminels condamnés à des peines à perpétuité.
    Je sais que le comité envisage d'autres options, ou l'option d'une application rétrospective plutôt que rétroactive. Voilà donc ce que je vous soumets.

[Français]

    Vous reconnaissez qu'il doit y avoir des dispositions dans le Code criminel qui permettent effectivement à des gens condamnés à l'emprisonnement à perpétuité pour meurtre de sortir de prison avant la fin d'une peine de 25 ans s'ils démontrent une bonne conduite, s'ils sont définitivement réhabilités. On nous a signalé des cas où même la famille d'une victime de meurtre, par exemple, était en faveur de cela.
    Donc, vous reconnaissez qu'on doit garder dans nos lois des dispositions de la dernière chance.

[Traduction]

    Pourrions-nous avoir une réponse brève, s'il vous plaît?
    Non, non, je peux vous dire que les personnes que j'ai consultées sont unanimement en faveur du projet du de loi S-6.
    Merci.
    Monsieur Comartin.
    Merci, monsieur le président.
    Madame O'Sullivan, je ne suis pas surpris, car nous avons entendu un certain nombre de témoins et certaines des personnes que vous avez nommées aujourd'hui. Mais je suis abasourdi par l'ignorance qui persiste au sujet du fonctionnement de ce système. Vous l'avez répété aujourd'hui. Parlant au nom des victimes, vous avez mentionné la crainte qu'elles soient confrontées à une demande après 15 ans, après 17 ans, après 19 ans, après 21 ans, après 23 ans et après 25 ans. C'est absolument faux. Je vais vous faire part d'un renseignement, à vous qui êtes l'ombudsman fédérale des victimes d'actes criminels, et demander que votre bureau aide les victimes à acquérir cette connaissance, afin de contrer les marchands de peur qui attisent littéralement les passions.
    Il n'y a eu que quatre cas où un détenu a présenté une deuxième demande. L'an dernier, tous les détenus ont effectivement purgé 25 ans, même s'ils demandaient à bénéficier de la clause de la dernière chance. Nous pouvons donc dire aux familles des victimes et à leurs amis et proches: « Vous n'avez pas à vous inquiéter de cela ». Je vous demande réellement de le faire. Voilà un commentaire.
    J'ai une question. Je vous approuve fortement lorsque vous soulignez l'importance de la communication avec les familles des victimes de meurtre dans ce pays. Lors de la dernière séance, M. Head, qui est le commissaire du Service correctionnel, a révélé que l'année avant que l'intéressé soit admissible à demander la libération anticipée — admissible seulement à la demander — un entretien a lieu. Les chiffres nous apprennent et l'histoire nous montre que seuls 18 p. 100 font la demande. Donc, on pourrait faire savoir cela aux 82 p. 100 de familles de victimes. Seriez-vous en faveur d'un amendement à ce projet de loi qui imposerait à Corrections Canada d'informer les familles de victimes de meurtre de ce pays à ce moment-là — principalement après 14 ans — que le détenu ne va effectivement pas demander la libération anticipée, afin qu'elle n'ait pas cette angoisse, cette crainte de devoir suivre de nouveau la procédure?

  (1650)  

    Je pense qu'il y a beaucoup de choses à faire pour informer les victimes, pas seulement en rapport avec la clause de la dernière chance.
    J'ai mentionné la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et son article 39. Il y a beaucoup d'information. Certains renseignements doivent être fournis et d'autres peuvent l'être. L'autre considération est que souvent il s'agit de simples politiques, et je sais que M. Head a indiqué qu'il n'y a pas d'obligation. Je pense donc qu'il faut aller plus loin.
    Je pense qu'il faut certains changements afin que les victimes puissent être informées de... Et encore une fois, le rapport que nous avons déposé contient 13 recommandations. De toute évidence, les victimes ont besoin d'être informées. Elles ont besoin de cette information et ce doit être un droit. J'ai conscience de certaines des autres difficultés à cet égard, et j'irais donc un pas plus loin et dirais qu'il faut veiller à satisfaire les besoins des victimes, au niveau fédéral, sur le plan de l'information, à quantités d'égards.
    Je suppose que cette réponse signifie que vous souscririez à une disposition contraignante dans la loi obligeant Corrections Canada à fournir cette information aux familles des victimes de meurtre de ce pays.
    Tout ce qui va mieux renseigner les familles des victimes sera utile.
    Merci.
    Merci, monsieur Comartin.
    Nous allons passer à M. Woodworth.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je veux commencer par vous remercier de votre présence parmi nous, madame O'Sullivan.
    Je dois dire que je ne siège à ce comité que depuis 15 ou 16 mois environ, mais pendant ce temps j'ai réfléchi à certains des enjeux récurrents auxquels nous sommes confrontés. À mon avis, l'un d'entre eux est que, parfois, les besoins des victimes sont en contradiction avec ceux des contrevenants.
    Je prends un peu de recul pour dire que sur le plan des principes généraux, chaque réinsertion d'un contrevenant est une bonne chose pour les victimes. Donc, selon cette perspective très générale, les besoins des victimes et ceux des contrevenants convergent au niveau de la réinsertion. Mais à certains autres égards, les victimes ont des besoins qui ne correspondent pas toujours à ceux des contrevenants. J'ai donc été très heureux d'entendre votre témoignage car vous avez très bien exprimé cela lorsque vous avez catégorisé ces besoins comme étant la responsabilisation, la transparence et la compassion. Je suis on ne peut plus d'accord avec vous, encore que j'aurais apporté un surcroît de précision en disant que les victimes ont besoin de tourner la page, de certitude, de protection contre une victimisation ultérieure et du sentiment d'être traitées équitablement par rapport au traitement des contrevenants. Et, bien sûr, parfois ils souhaitent aussi dénoncer.
    Fois après fois nous nous retrouvons assis dans ce comité et nous n'entendons que la voix des délinquants. Il faut lire entre les lignes et tous les membres ne semblent pas recevoir le même message que moi. J'ai été donc très heureux de votre témoignage aujourd'hui.
    Je sais qu'au début des années 2000, l'ancien gouvernement a modifié la disposition de la dernière chance de façon à en exclure les auteurs de meurtres multiples. Après avoir entendu mon collègue dire tout à l'heure que son parti exige toujours des preuves, je me suis demandé si votre recherche aurait mis à jour des éléments probants sur lesquels l'ancien gouvernement, ce parti, se serait appuyé aux alentours de 2003 pour apporter ce changement, je suppose pour favoriser d'une certaine façon les victimes?

  (1655)  

    Il faudrait que je vérifie. Je sais que certains changements ont été apportés, je crois, en 1997.
    Je ne contesterai pas la date, car je n'en suis pas sûr moi-même.
    Excusez-moi, car je n'ai pas vraiment vérifié... mais oui, c'était en 1997.
    Avez-vous découvert des éléments probants, résumant le point de vue des victimes, que l'ancien gouvernement aurait utilisés pour justifier ce changement en 1997?
    Je n'ai pas cela sous les yeux. Je ne puis répondre à la question.
    Très bien.
    En sus de vous remercier d'avoir si bien énoncé les besoins des victimes aujourd'hui, je n'ai pas d'autres questions ou commentaires.
    Merci beaucoup.
    Tout le monde a pu poser une question. Je propose d'entendre maintenant M. Sapers.
    Merci, madame O'Sullivan, de votre comparution. Nous vous souhaitons beaucoup de succès dans vos nouvelles fonctions. Je sais que vous les occupez depuis quelques mois déjà, et tous nos voeux vous accompagnent dans votre mission d'être la voix des victimes dans notre pays.
    Je remercie le comité de m'avoir invitée à comparaître concernant les deux sujets que vous avez traités aujourd'hui. Thank you.
    Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes.

    


    

    Nous sommes de retour pour l'examen du projet de loi S-6.
    Nous avons avec nous M. Howard Sapers, enquêteur correctionnel, ainsi que M. Ivan Zinger, directeur exécutif et avocat général.
    Soyez les bienvenus.
    Vous avez une déclaration liminaire à faire, et ensuite nous aurons une période de questions.

  (1700)  

    Merci, monsieur le président, et merci de nous recevoir. Je suis heureux d'être de retour devant le comité et d'avoir cette possibilité de vous aider lors de vos délibérations sur le projet de loi S-6.
    Comme vous l'avez mentionné, je suis accompagné de M. Zinger. Je dirais quelques mots et ensuite M. Zinger prendra aussi la parole.
    Par ailleurs, je crois savoir que le comité a reçu les transcriptions de notre témoignage antérieur au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles en juin dernier. Cela étant, et ne voulant pas abuser de votre temps, je vais résumer rapidement quelques éléments saillants de ce témoignage antérieur, afin de passer directement à la période des questions.
    Du point de vue de mon bureau, ce projet de loi doit être étudié dans le contexte d'autres lois récemment proposées et adoptées qui se traduiront par une augmentation substantielle de la population carcérale et de la durée des peines purgées. Cumulativement, ces mesures auront une incidence sur le taux, le coût, la durée et la distribution des peines d'incarcération.
    La durée moyenne d'une peine d'emprisonnement pour meurtre au Canada est plus longue que dans la plupart des autres démocraties avancées du monde. L'imposition d'une période automatique d'inadmissibilité à une libération conditionnelle de 25 ans aux délinquants condamnés à la prison à perpétuité fait qu'il sera plus difficile, du fait des limitations de l'infrastructure et des soins, de répondre aux besoins associés au vieillissement dans un pénitencier fédéral. Les coûts cumulatifs, en augmentation constante, liés à l'incarcération d'un plus grand nombre de délinquants pour une durée plus longue avant qu'ils ne soient admissibles à la libération conditionnelle s'étendront sur plusieurs années.
    Sur la base des chiffres d'aujourd'hui, chaque année d'incarcération supplémentaire coûte en moyenne 100 000 $. Par comparaison, la surveillance d'un délinquant dans la collectivité, lorsque cela est approprié, équivaut à un quart des dépenses encourues pour sa détention.
    Je vais maintenant demander à M. Zinger d'étoffer un peu le contexte et cette perspective avant de poursuivre.

[Français]

    Comme l'a souligné M. Sapers, la durée moyenne d'une peine d'emprisonnement pour meurtre au premier degré est plus longue au Canada que dans d'autres démocraties.
    Au Canada, la durée moyenne d'une peine d'emprisonnement pour meurtre au premier degré s'élève à plus de 28 ans, tandis que dans d'autres démocraties semblables au Canada, comme la Nouvelle-Zélande, l'Écosse, la Suède et la Belgique, la durée moyenne d'une peine d'emprisonnement pour ce même délit est en deçà de 15 ans.
    De plus, les délinquants qui purgent une peine d'emprisonnement à perpétuité au Canada passent d'office au moins deux ans dans un établissement à sécurité maximale, quel que soit le risque qu'ils représentent.
    Au Canada, une peine d'emprisonnement à perpétuité porte bien son nom. Il ne faut pas oublier que les délinquants condamnés à une peine d'emprisonnement à perpétuité et à qui l'on accorde une libération conditionnelle sont sous l'autorité du Service correctionnel du Canada qui les surveille jusqu'à leur décès.
    S'il est adopté, le projet de loi S-6 imposera une période automatique d'inadmissibilité à la libération conditionnelle de 25 ans aux délinquants condamnés à la prison à perpétuité pour meurtre au premier degré.
    Pour les délinquants condamnés pour meurtre au deuxième degré, la période d'inadmissibilité imposée par le juge, laquelle varie entre 15 et 25 ans, ne sera plus assujettie à un nouvel examen en vertu du projet de loi S-6.
    Près de 20 p. 100 des 13 800 hommes et femmes actuellement détenus dans un établissement carcéral fédéral purgent une peine d'emprisonnement à perpétuité. Ces délinquants, dont l'âge moyen est de 33 ans, deviendront vraisemblablement des personnes âgées avant qu'on n'étudie la possibilité de leur accorder une libération conditionnelle.
    Le pourcentage de délinquants plus âgés, ceux de 50 ans et plus, a augmenté de 50 p. 100 au cours de la dernière décennie. Cette proportion de la population carcérale a des besoins différents et souvent coûteux en ce qui a trait à l'hébergement, aux services de santé, aux programmes et aux soins palliatifs.
    Le Service correctionnel du Canada devra aussi corriger les limites imposées par son infrastructure vieillissante, laquelle a été conçue, initialement, pour une génération de délinquants au profil bien différent et plus jeune.
    Monsieur Sapers, c'est à vous.

  (1705)  

[Traduction]

    Comme vous le savez, le rapport annuel de mon bureau pour l'année 2009-2010 a été soumis au Parlement il y a deux semaines environ. Ce rapport dépeint l'intérieur des établissements carcéraux fédéraux: un milieu hostile, tendu, bondé, explosif et stressant.
    Comme je l'écris dans ce rapport, les conditions actuelles à l'intérieur de nos pénitenciers fédéraux mettent en péril la capacité du Service correctionnel du Canada d'assurer une détention sécuritaire et efficace. L'accès aux programmes de traitement de ces facteurs qui contribuent au crime, en particulier l'abus de substance, la violence familiale, des antécédents de violence et de traumatisme, demeure un problème, sachant que seulement 2 p. 100 des 2,5 milliards de dollars en dépenses annuelles sont utilisés à cette fin.
    L'augmentation du taux d'incarcération qui résultera nécessairement de la réduction ou de la suppression de l'admissibilité à la libération conditionnelle doit être soigneusement pesée à la lumière des difficultés que rencontre déjà l'autorité correctionnelle canadienne sur le plan de la capacité d'accueil, de l'intervention et des programmes.
    La clause de la dernière chance est liée à l'abolition de la peine capitale en 1976. Elle était destinée à motiver les délinquants purgeant des peines d'emprisonnement de longue durée. Elle ne garantit pas que le contrevenant bénéficiera d'une libération conditionnelle. La notion même de dernière chance reconnaît expressément la possibilité pour un délinquant de changer, de s'amender et de devenir un citoyen responsable et respectueux de la loi, et ce même après avoir commis une infraction parmi les plus graves.
    En toute probabilité, le projet de loi S-6 augmentera le nombre d'années que les délinquants purgeant une peine d'emprisonnement de longue durée devront attendre avant de pouvoir accéder à un programme correctionnel. Des longues périodes d'inactivité vont certainement nuire à la motivation et à la capacité de ces détenus de participer à des programmes, surtout lorsqu'ils avancent en âge et que leur santé se détériore inéluctablement.
    Enfermer davantage de détenus pendant plus longtemps, pour les relâcher ensuite sans le bénéfice d'interventions efficaces, est non seulement coûteux, c'est aussi inefficace.
    En conclusion, il me semble qu'il faut examiner les projets de loi relatifs à la justice pénale dans le contexte du maintien d'un équilibre adéquat entre les mesures de répression et de dissuasion et les principes tout aussi importants de réinsertion et de réadaptation.
    Je répondrai volontiers à vos questions.
    Merci.
    Merci.
    Je donne la parole à Mme Jennings. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci à vous, monsieur Sapers, ainsi qu'à votre collègue, pour vos exposés.
    J'ai une question. Lorsque vous y aurez répondu, je céderai le reste de mon temps à mon collègue, Andrew Kania.
    Les quatre principes sur lesquels repose notre système de justice pénale et notre Code criminel sont clairement énoncés. Vu votre expérience avec le système correctionnel, êtes-vous d'avis qu'avec le projet de loi S-6 le gouvernement actuel a trouvé le juste équilibre entre les mesures de répression et de dissuasion et les principes tout aussi importants de la réinsertion et de la réadaptation?
    L'exigence d'abord d'une révision judiciaire puis l'examen par une commission des libérations conditionnelles de la demande de libération a été expressément inscrite dans la loi pour réaliser cet équilibre. Je n'ai vu aucun élément probant indiquant que l'intention présidant aux dispositions actuelles n'ait pas été réalisée.
    Par conséquent, la conclusion doit être que le projet de loi S-6, qui altérerait cet équilibre, n'établit pas un équilibre approprié entre les mesures existantes visant à réprimer et dissuader et les principes tout aussi importants de la réinsertion et de la réadaptation.
    Puis-je donc conclure que, selon votre avis réfléchi, le projet de loi S-6 n'établit pas cet équilibre?
    Je pense que les dispositions actuelles remplissent les objectifs pour lesquels elles ont été conçues.
    Merci.
    Monsieur Sapers, je vous ai entendu témoigner précédemment, pas dans ce comité-ci mais au Comité de la sécurité publique, auquel je siège. Vous avez fait remarquer, par rapport aux diverses lois de justice pénale qui sont adoptées, que nous souffrons en substance d'une sous-capacité, que nous n'avons pas des programmes de santé mentale appropriés dans les prisons, et qu'il se pose divers problèmes de financement.
    Pour être équitable envers le gouvernement relativement à ce projet de loi particulier, j'ai examiné les statistiques pour 2008-2009. En 2008, sur le nombre des détenus demandeurs, seulement 109 ont été acceptés. En 2009, le chiffre n'était que de 131.
    Par rapport à ce projet de loi et le nombre de détenus qui reçoivent effectivement cette libération anticipée et qui en seraient dorénavant empêchés, cela n'est pas vraiment un problème du point de vue de la structure globale, car nous ne parlons ici que d'une poignée de détenus.

  (1710)  

    Nous parlons d'un petit nombre de détenus chaque année, mais il faut aussi considérer l'effet cumulatif au fil des ans.
    Je comprends bien. À cet égard, aux fins de cette analyse, car il y aura bien quelques effets, savez-vous...? Lorsque je regarde ces chiffres, par exemple, ils montrent les taux de récidive pour 2008, et il y a eu une poignée de personnes qui ont été renvoyées en prison pour avoir contrevenu à leurs conditions de libération.
    J'essaie de déterminer empiriquement le problème que l'on cherche à résoudre avec ce projet de loi. Il faut le peser à la lumière des autres problèmes que l'on va engendrer, tels que l'insuffisance de capacité et tels que, ferais-je valoir, le plus grand risque couru par les gardiens de prison, qui s'opposent à cette mesure, crois-je savoir, car elle amoindrit la motivation des détenus à se réadapter et à bien se comporter en prison. Cela expose donc les gardiens de prison à plus de risque.
    J'aimerais avoir votre avis à ce sujet, et que vous me disiez si vous pouvez trouver un argument, sur une base intellectuelle ou empirique, qui puisse justifier cette mesure.
    Je vais simplement vous faire part de quelques faits. Selon mes données les plus récentes, 0,2 p. 100 des contrevenants condamnés pour meurtre ont vu leur semi-liberté révoquée pour avoir commis un délit violent. Environ 500 détenus purgeant une peine pour meurtre sont placés en semi-liberté chaque année. La récidive est d'environ 0,2 p. 100.
    Au cours des cinq dernières années, le taux de réussite des contrevenants en semi-liberté condamnés pour meurtre a dépassé 90 p. 100, et pour ceux que nous considérons comme ayant échoué — les 10 autres pour cent — 8,2 p.—100 ont failli à cause de violations techniques de leurs conditions de libération, au lieu d'être accusés d'un nouveau délit.
    Merci.
    Je pense que vous avez cité l'aperçu statistique publié par Sécurité publique Canada. Je veux juste assurer que les choses soient claires. Cette publication mentionne qu'il y a eu 173 décisions judiciaires relatives à la clause de la dernière chance, dont seulement 130 ont abouti à une libération. Il faut bien préciser que c'est 130 depuis 1987. C'est donc un très petit nombre chaque année. Je veux juste signaler que ce n'est pas 130 chaque année. Ce n'est pas vrai. C'est depuis 1987.
    Merci.
    Monsieur Ménard, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Merci.
    Vous avez bien exprimé votre point de vue. Soit dit en passant, nous sommes convaincus de ce que vous dites. Toutefois, vous êtes probablement conscients que du côté du gouvernement, ils n'en sont pas convaincus. Il serait tout de même important que le public le sache.
    Quand le projet de loi a été présenté par le solliciteur général Warren Allmand en 1976, il disait ce qui suit. Je cite un résumé qui nous a été fourni par la Bibliothèque du Parlement:

Une période d'incarcération avec espoir de libération conditionnelle et l'encouragement supplémentaire qui en découle pour le détenu, et la protection des gardiens, et la possibilité de revue de cette admissibilité à la libération conditionnelle après 15 ans est nécessairement mieux qu'une sentence de mort parce qu'elle supprime la possibilité d'une erreur irréversible d'exécution.
    En effet, le système, depuis 1976, a rempli ces objectifs.

[Traduction]

    Je suis d'accord. Je pense que les dispositions actuelles ont rempli leur objectif.
    Une peine à perpétuité au Canada est une peine à perpétuité. Les contrevenants vont purger une partie de cette peine en prison et une partie de cette peine, si leur risque est gérable, dans la société.
    L'expérience de notre pays montre qu'une libération conditionnelle correctement supervisée gère très bien le risque.

  (1715)  

[Français]

    On n'est pas les seuls dans le monde. Il y a d'autres démocraties avancées avec lesquelles on se compare souvent. On nous a donné des chiffres. On se compare avec la Nouvelle-Zélande, l'Écosse, la Suède, la Belgique, l'Australie. D'ailleurs, je ne sais pas pourquoi on n'inclut pas la France dans ces comparaisons. Enfin, la Belgique est un pays partiellement francophone. Il y a aussi les États-Unis.
    Évidemment, tous les pays civilisés se sont posé cette question quand ils ont aboli la peine de mort — la plupart l'ont fait. Par quoi fallait-il la remplacer? Est-ce que c'était purement et simplement par l'emprisonnement à perpétuité? Ils ont tous répondu non. Ils ont plutôt opté pour une longue période d'incarcération et la possibilité d'obtenir une peine plus courte, après révision par un juge, et par un jury — c'est notre cas, n'est-ce pas? Le jury représente bien la population, je pense.
    La durée moyenne d'incarcération pour les gens condamnés à l'emprisonnement à perpétuité en Nouvelle-Zélande est de 11 ans, de 11,2 ans en Écosse, de 12 ans en Suède, de 12,7 ans en Belgique, et de 14,8 ans en Australie. Les États-Unis sont les champions mondiaux pour ce qui est du taux d'incarcération. Je pense que ce taux est de 7,5 ans plus élevé qu'au Canada. Le taux d'incarcération du Canada s'aligne sur celui des autres démocraties. Or, même aux États-Unis, c'est 18,5 ans, sauf pour les cas où il n'y a aucune possibilité de libération conditionnelle. Dans ces cas, c'est 29 ans.
    Selon les prévisions, on atteindrait la durée maximum des États-Unis, soit exactement 28,2 ans. Ce serait comme si on n'admettait pas la possibilité de libération conditionnelle avant terme.
    Est-ce la même chose pour les autres pays civilisés dont vous connaissez sûrement l'expérience?
    Pour vous donner une idée, les données comparatives pour les différents pays ont été relevées deux fois, à ma connaissance, soit en 1999 par le ministère du Solliciteur général, ou le ministère de la Sécurité publique, et à nouveau en 2005 par ce même ministère. Je ne sais pas comment les pays ont été choisis. Habituellement, un appel est fait à différents pays, et on attend les réponses des différentes juridictions.
    Si on compare le Canada aux autres pays, on voit qu'il est beaucoup plus punitif. Vous avez absolument raison de le souligner.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Comartin.
    Merci, monsieur le président.
    Merci de votre présence, monsieur Sapers et monsieur Zinger.
    Pour revenir à la question de M. Kania, mon analyse de ce programme, le programme de la clause de la dernière chance, connaît le taux de récidive le plus bas de tous nos programmes de libération conditionnelle pour meurtre. Il connaît le taux de récidive le plus bas de tous ces programmes. Pouvez-vous me dire si ma conclusion est juste?
    Je n'ai pas fait cette analyse. Selon mon expérience, ceux condamnés à perpétuité se comportent bien lorsqu'ils sont supervisés dans la société. Depuis l'introduction de la disposition de la dernière chance dans le code — sauf erreur — je crois que 14 recondamnations pour crime violent ont lieu. Je n'ai pas en tête le chiffre total de ces libérations. Mais comme je l'ai dit, 500 détenus sont libérés par an, et nous avons donc une expérience considérable.
    Sur le nombre de tous ceux libérés sous le régime de la clause de la dernière chance, deux seulement ont été renvoyés en prison pour un délit violent ou grave. Et de fait, nous ne savons pas s'il y a eu des lésions physiques; nous ne connaissons pas les circonstances.
    Oui, c'est juste.
    Très bien.
    Concernant l'autre point — j'ai l'impression que je devrais le savoir — connaissez-vous un autre pays au monde utilisant l'approche de la clause de la dernière chance? Je sais que la plupart des pays ont un système de libération conditionnelle, mais en existe-t-il un qui applique ce modèle?

  (1720)  

    Les comparaisons sont très difficiles à réaliser, car parfois la libération conditionnelle est prononcée par un tribunal et dans certains pays elle est décidée par les autorités carcérales. Je me ferais un plaisir de remettre au comité l'étude de 1999, ainsi que la mise à jour de 2005. Je crois que votre chargé de recherche l'a déjà, mais je vous la communiquerai volontiers. Elle pourra peut-être vous donner un complément d'information.
    Je m'adresse au chargé de recherche: avons-nous ces deux études? Je ne crois pas les avoir vues. Elles datent de 1999 et 2005.
    Il vaudrait mieux que vous répétiez les titres des études.
    Monsieur Zinger, pourriez-vous répéter le titre des deux études?
    Certainement. La première étude est intitulée « Life Sentence for First-Degree Murder--Canada and the International Equivalents: Eligibility and Average Time Served ». C'est un document qui a été publié par Sécurité publique Canada — à l'époque le ministère du Solliciteur général — daté du 17 février 1999. Nous venons juste de demander la mise à jour. Cette mise à jour est encore une fois un document de Sécurité publique Canada intitulé « Average Time Incarcerated for First-Degree Murder Conviction: A 2005 Update ». En gros, il met en lumière certaines des structures légales des systèmes judiciaires de divers pays.
    Monsieur Comartin, demandez-vous si cela nous a été distribué, ou si notre analyste a connaissance de ces études?
    Je demande si elles ont été distribuées. Je pense en avoir vu quelques parties, mais je ne crois pas avoir vu toute l'étude. Il y en a peut-être eu des extraits dans certains des mémoires que nous ont présentés les témoins.
    Il y a peut-être une référence à ces études dans le résumé législatif.
    Il va se renseigner.
    Pourriez-vous les distribuer?
    Remettez-nous au moins les copies numériques.
    Très bien, veuillez poursuivre, s'il vous plaît.
    Monsieur Sapers, je crois que c'est dans votre partie de l'exposé que vous avez indiqué que le projet de loi S-6 — je suis à la troisième page du mémoire — va probablement allonger la période que les détenus purgeant une longue peine devront attendre avant de bénéficier de programmes correctionnels.
    Puis-je conclure que c'est parce que leur date de sortie va être plus lointaine que Corrections Canada ne va tout simplement pas leur offrir les programmes, ou bien est-ce parce qu'ils ne vont pas demander à en bénéficier?
    Votre première hypothèse est juste, de façon générale. Le SCC offre les programmes à un moment plus rapproché de la libération conditionnelle possible.
    D'accord.
    Je n'ai pas d'autres questions. Merci.
    Merci.
    Monsieur Dechert.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, merci d'être venus nous rencontrer et de nous faire part de vos avis.
    Monsieur Sapers, vous concluez vos remarques liminaires en disant qu'il faut établir un équilibre entre les mesures visant à réprimer et dissuader et les mesures qui promeuvent les principes de la réinsertion et de la réadaptation.
    Ma perception de ce projet de loi, et celle du gouvernement, est qu'il n'est pas conçu pour réprimer ou dissuader. Nous cherchons à réaffirmer les droits des victimes et à promouvoir le respect des victimes, de leurs familles et de leurs collectivités. Nous cherchons à restaurer la confiance dans notre système de justice pénale. Et nous cherchons à faire en sorte que les peines imposées par les tribunaux soient effectivement purgées par les auteurs de meurtre au premier degré. Voilà la raison d'être de ce projet de loi.
    Nous ne prétendons nullement que ce projet de loi va réprimer ou dissuader. De toute évidence, il va réprimer dans la mesure où les auteurs de meurtre au premier degré vont passer un peu plus de temps en prison. Ils ne pourront pas commettre un autre délit pendant qu'ils seront en prison. Mais ce n'est pas là l'objectif.
    J'espère que tous les Canadiens comprennent la raison d'être de ce projet de loi. Nous voulons concevoir un système qui respecte les victimes. L'ombudsman des victimes vous a parlé tout à l'heure de l'immense angoisse que vivent les familles des victimes lorsqu'elles s'attendent à devoir affronter une audience sur la clause de la dernière chance, puis une audience d'une commission de libération conditionnelle. Il se peut qu'elles soient confrontées à cela à de multiples reprises, obligées chaque fois de revivre les pires heures de leur vie.
    Pour chaque meurtrier, il y a au moins une victime. Mais pour chaque victime, il y a de nombreux membres de la famille et amis. Des collectivités entières sont touchées. Certains de ces crimes horribles commis récemment traumatisent des collectivités entières. Ces collectivités vont être traumatisées fois après fois lorsque ces demandes au titre de la dernière chance sont déposées.
    Peut-être pourriez-vous réfléchir un peu à cela.
    Vous nous avez donné une liste de pays qui, à votre avis, connaissent des périodes d'incarcération plus courtes que le Canada. Vous avez mentionné la Nouvelle-Zélande, l'Écosse et la Suisse, et c'est très intéressant. Mais vous n'avez pas mentionné les États-Unis qui, d'après ce que je sais de l'histoire, est la plus ancienne démocratie de l'ère moderne, notre plus grand partenaire commercial et plus proche voisin. Vous n'avez pas mentionné la durée moyenne d'incarcération des responsables de meurtre au premier degré dans ce pays. Je sais que certains États appliquent la peine de mort, mais beaucoup ne le font pas. Peut-être pourriez-vous nous informer de cela.
    En outre, je me demande si vous pourriez nous parler de l'Inde. C'est la plus grande démocratie du monde, avec 1,3 milliard d'habitants, et comme nous membre du Commonwealth. Nous avons plus d'un million de Canadiens d'origine indienne. Je me demande si vous pourriez nous citer les chiffres pour l'Inde.

  (1725)  

    Merci.
    Je répondrai d'abord à la question et réagirai ensuite à certains des commentaires.
    Je doit m'excuser auprès du comité. Je n'ai pas les chiffres sur l'Inde au bout des doigts, mais je ferai de mon mieux pour vous procurer ces renseignements.
    Mais je peux vous parler un peu des États-Unis. La longueur moyenne des peines pour meurtre purgées aux États-Unis en général est de 18,5 ans. La peine à perpétuité avant libération conditionnelle est de 29 ans. Cela exclut les sorties pour cause de décès, car des gens décèdent en prison, les peines commuées et les libérations pour des raisons de compassion. Donc, sur un plan donné, les États-Unis ressemblent au Canada. Nous sommes autour de 28 ou 29 ans. Une autre façon de voir la chose, c'est qu'aux États-Unis on purge environ 10 ans de moins qu'au Canada.
    J'aimerais une clarification concernant les personnes qui purgent 18,5 années. Est-ce pour meurtre au premier degré?
    C'est pour ceux condamnés à la prison à perpétuité. Aux États-Unis il n'y a pas toujours la même distinction que dans notre Code criminel. Nous distinguons entre le meurtre au premier et au second degré. Cette distinction n'existe pas dans tous les États américains.
    Le meurtre au premier degré est l'infraction la plus grave dans nos lois. Peut-être pourriez-vous nous dire quel est le pourcentage des meurtriers coupables au premier degré comparé au second degré, ou...
    J'ai ce renseignement et je vais vous le communiquer. Les chiffres que l'on m'a envoyés des États-Unis concernent les personnes condamnées à vie, donc qui ont écopé d'une peine à perpétuité.
    Pour ce qui est de la répartition des contrevenants, ceux condamnés pour meurtre au premier degré sont actuellement au nombre de 851 à l'échelle nationale. La population totale nationale de ceux condamnés pour meurtre au second degré est de 1 850.
    Le nombre total de ceux incarcérés était hier de 13 863.
    Il importe que les gens comprennent bien que le projet de loi S-6 ne vise pas tous les meurtriers, mais uniquement les auteurs de meurtre au premier degré.
    Certainement.
    C'est un nombre relativement faible.
    Vous avez mentionné un certain nombre d'autres...
    Monsieur Dechert, je suis désolé, mais il ne nous reste plus de temps. Il est 17 h 30.
    Je veux remercier nos témoins de leur comparution. Votre témoignage nous sera utile et nous allons certainement le prendre en considération dans la suite de notre étude de ce projet de loi. Merci à tous deux.
    La séance est levée.
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