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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 015 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 11 mai 2010

[Enregistrement électronique]

  (0905)  

[Traduction]

    Bienvenue, membres du comité et témoins, à cette 15e réunion du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie, du 11 mai 2010. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous accueillons une délégation d'astronautes de la mission Expedition.
    Nous accueillons aujourd'hui deux représentants de l'Agence spatiale canadienne, M. MacLean et M. Thirsk, ainsi que M. Wakata, de l'Agence japonaise d'exploration spatiale, et M. de Winne, de l'Agence spatiale européenne.
    Bienvenue à tous. Je crois comprendre que vous avez une déclaration liminaire et je vais donc vous donner immédiatement la parole, après quoi nous aurons une période de discussion avec les membres du comité.
    Nous vous remercions de nous avoir invités à nous adresser au comité. Je n'ai qu'une très brève déclaration à faire, d'une soixantaine de secondes, parce que nous ferons ensuite une présentation que vous trouverez très intéressante, je crois.
    L'année qui vient de s'écouler est à marquer d'une pierre blanche pour le Canada. Bob Thirsk à entrepris sa mission au début de l'année avec le commandant de la station spatiale Frank de Winne. C'était la première fois qu'il y avait six personnes dans la station spatiale internationale, et la première fois que les cinq partenaires volaient en même temps. Plus que toute autre, cette mission a donc marqué un point tournant dans l'ère des vols spatiaux.
    Notre présentation est destinée à vous montrer ce qui s'est passé durant cette aventure qu'ont connue ces deux membres d'équipage pendant les six derniers mois. Bob et Franck ont volé sur un véhicule Soyouz et ont rejoint Koichi Wakata qui était arrivé dans la station spatiale sur une navette. Tous trois vont maintenant vous raconter comment se sont déroulés leurs six mois dans l'espace.
    Monsieur Chong, membres du comité permanent, c'est un grand plaisir pour nous de nous adresser au comité et de partager notre aventure avec nous.
    Pour le Canada, l'ère des vols spatiaux habités a débuté il y a 25 ans. Durant cette période, huit Canadiens, dont Marc Garneau, sont allés dans l'espace sur 15 vols différents.
    Il y est encore.
    Des voix: Oh!
    Au moins, je sais ce que c'est, l'espace.
    Désolé, messieurs. La matinée promet d'être intéressante, croyez-moi.
    Pendant ces 25 années de l'ère spatiale, le Canada a vu les rôles et responsabilités de ses astronautes s'accroître continuellement, tout comme sa crédibilité internationale auprès de ses partenaires, je crois. Lors du premier vol, en 1984, nous étions des spécialistes de charge utile, après quoi nous sommes devenus des spécialistes de mission, puis des ingénieurs de vol.
    Nous avons aussi élargi notre champ de compétences. Au début, nous nous occupions des charges utiles ou des charges expérimentales, puis des systèmes de bord des navettes. Plus récemment, nous avons été les opérateurs du Canadarm sur la navette, du Canadarm2 sur la station spatiale internationale, ainsi que d'autres outils de robotique. Steve en est un bon exemple. Aujourd'hui, nous effectuons également des EVA, des sorties dans l'espace, et je ne crois pas me tromper en disant que la formation que les astronautes canadiens ont reçue est pratiquement équivalente à celle de nos partenaires internationaux, y compris des cosmonautes russes et des astronautes de la NASA. Nos compétences sont aussi équivalentes.
    Je donnerai bientôt la parole à mes collègues mais je pense que nous sommes considérés comme des partenaires fiables et de solides membres des équipes.
    Puisque je parle de membres d'équipes, permettez-moi de vous présenter mes collègues de manière un peu plus détaillée. Frank De Winne est belge. Il représente l'Agence spatiale européenne. Avant de devenir astronaute de l'ASE, c'était un pilote d'essai militaire qui pilotait des F-16. Il lui est arrivé de devoir sauter d'un F-16. Il a aussi été commandant d'escadre.
    Franck a volé une fois sur une mission Soyouz pour rejoindre la station spatiale internationale, il y a cinq, six ou sept ans. Comme l'a dit Steve, il a aussi été commandant de bord de notre Expedition 21.
    Koichi Wakata, de l'agence spatiale japonaise, est astronaute depuis 1992. Il a volé sur deux navettes et a aussi effectué une mission spatiale de longue durée. Koichi est mon modèle. Quand je songe à ce que nous, les astronautes, appelons le comportement expéditionnaire, je songe à Koichi, un modèle de maîtrise de soi, d'attention, d'esprit d'équipe, de vie en groupe et de leadership. C'est un modèle pour nous tous. Il joue sur un autre terrain de jeu que nous, et c'est aussi un excellent compagnon de vol.
    Expedition 20/21 a été une première pour le Canada à plusieurs égards. Comme l'a dit Steve, c'était la première fois que nous faisions un vol spatial de longue durée. Nous avions effectué plusieurs vols de navette auparavant, 14 en tout. Un vol spatial de longue durée, c'est autre chose. Cela a un impact sur l'astronaute, un impact sur sa famille, et un impact sur son équipe de soutien au sol. Ce n'est pas un sprint, c'est un marathon ou un Tour de France. C'est un mode de pensée différent. C'est une nouvelle compétence et un nouveau talent que possède le Canada.
    L'an dernier, nous avons aussi eu pour la première fois deux Canadiens dans l'espace. Mon amie et collègue Julie Payette m'a rejoint en juillet. Elle est arrivée par la navette et a fait un merveilleux travail de manoeuvre des trois bras robotiques à bord de la station, ainsi que de la navette, et elle m'a rendu très fier.
    Quelques mois plus tard, le premier participant canadien à un vol spatial, Guy Laliberté — le fondateur du Cirque du Soleil —. nous a aussi rejoints en orbite.
    J'invite maintenant Franck à dire quelques mots de certaines des premières internationales associées à Expedition 20/21.

  (0910)  

    Tout d'abord, je remercie beaucoup le comité de nous avoir invités aujourd'hui.
    Évidemment, l'une des grandes premières a été d'apporter des améliorations à la station spatiale internationale pour la faire passer d'un équipage de trois personnes au début de la mission à un équipage de six personnes. Elle est aujourd'hui tellement grande qu'il faut environ deux personnes et demie ou trois pour en assurer le fonctionnement. Si l'on veut faire de la recherche scientifique et technologique sur la station spatiale, on a besoin de ces trois personnes supplémentaires.
     C'est ce qui est arrivé avec notre équipage. Nous sommes passés de trois à six, ce qui veut dire que nous avons effectué plus de 1 000 heures de travail scientifique et réalisé plus d'une centaine d'expériences durant la mission, ce qui ne s'était encore jamais vu. Cela continue d'ailleurs aujourd'hui avec les six personnes à bord de la SSI.
    Une autre première de notre mission a été le HTV, le nouveau cargo ravitailleur japonais. L'équipage de la station doit être approvisionné de nombreuses choses, notamment de matériel expérimental et de nouvelles choses à faire. Le cargo ravitailleur japonais a fait son premier vol à cette occasion.
    Il importe de souligner que la station spatiale internationale est vraiment internationale. Le HTV est un véhicule japonais qui a été capté dans l'espace par le bras robot canadien, lequel était opéré par une astronaute américaine, Nicole Stott, notre collègue. Le HTV et la station étaient sous mon commandement. Bob était l'officier de sécurité chargé de superviser toute l'opération. À ce moment-là, le commandant de la station était un Russe, Gennady Padalka.
    Tous les centres de contrôle à terre, toutes les équipes et tous les ingénieurs qui nous appuient à partir de la Terre, ont également collaboré pour assurer le succès de cette mission exceptionnelle, la mission HTV.
    La station spatiale est donc vraiment internationale et nous sommes la preuve concrète et quotidienne du fait que des gens du monde entier peuvent travailler ensemble.
    C'est un grand honneur pour moi d'être ici. J'ai commencé à travailler comme candidat astronaute en 1992. J'étais alors dans la même classe que Marc Garneau et Chris Hatfield, et j'étais très honoré de pouvoir faire partie de la communauté des astronautes. Chris était déjà un astronaute chevronné à l'époque, et je n'étais qu'un bébé astronaute. Mes collègues m'avaient même donné une sucette, à retirer avant le décollage.
    Des voix: Oh!
    M. Koichi Wakata: Depuis lors, je suis allé trois fois dans l'espace. Chaque fois, j'ai eu l'occasion de manoeuvrer le Canadarm, le bras robotique de la navette spatiale, ainsi que le bras robotique de la station spatiale elle-même, et Dextre, le manipulateur agile canadien. Ce sont de merveilleux outils de l'espace.
    Frank vous a parlé du cargo ravitailleur japonais, le HTV. Il n'y a pas que ce cargo qui soit international. Pour l'assemblage de la station spatiale, nous avons cinq partenaires et 15 pays coopérants. Nous avons des modules russes, des modules américains, le laboratoire européen Colombus, les modules de laboratoire japonais Kibo et le HTV. Sans la contribution de la technologie robotique canadienne, nous n'aurions pas pu assembler les éléments vastes et complexes de la station spatiale internationale.
    Vous devez être fiers de cette technologie. J'ai eu la très grande chance de pouvoir travailler avec les astronautes canadiens, qui sont bourrés de talent. Steve m'a beaucoup appris sur les techniques de manipulation robotique. Et il n'y a pas que les astronautes, il y a aussi les ingénieurs et les contrôleurs de mission de Saint-Hubert, ainsi que de nombreuses entreprises près de Toronto. J'ai eu beaucoup de chance de pouvoir participer à cela.
    Nous allons maintenant vous présenter le film de notre mission et répondrons avec plaisir à vos questions.

  (0915)  

    Vous voyez ici les emblèmes de toutes les agences partenaires qui participent à cette mission, et une très belle photo de la station, la SSI, qui se trouvait évidemment au coeur de nos emblèmes pour Expedition 20 et 21. Il s'agissait au début d'Expedition 20 et puis, plus tard, quand une partie de l'équipage a changé, c'est devenu Expedition 21. Les six étoiles et les deux emblèmes représentent l'agrandissement de la SSI d'un équipage de trois membres à un équipage de six.
    Nous avions deux systèmes de transport spatial humain qui sont maintenant utilisés pour la SSI. Il s'agit du véhicule russe Soyouz et de la navette spatiale américaine. Bob et Franck, avec Roman Romarenko de Russie, sont montés avec le Soyouz et moi, avec la navette.
    Me voici avant d'être harnaché, juste avant le lancement de la mission STS-127 avec Julie Payette à bord. Nicole Stott était chargée de manipuler le Canadarm2 pour capter le cargo ravitailleur japonais HTV. Ces lancements furent merveilleux.
    Je ne suis allé que dans le véhicule Soyouz. Bob peut peut-être vous parler des différences entre les deux véhicules.
    J'ai eu l'occasion de voler sur les deux. Le véhicule Soyouz, même s'il paraît relativement ancien, donne un voyage dans l'espace très doux, la seule exception étant le changement d'étages quand un étage de la fusée a épuisé son carburant et que le deuxième prend le relais. À ce moment-là, on est vraiment secoué.
    Ceci se passe avant le rendez-vous. C'est incroyable de voir cette plate-forme scientifique gigantesque flotter en orbite terrestre basse.
    Voici le véhicule spatial Soyouz juste arrimé. Bob est entré dans la station spatiale et le commandant Gennady Padalka et moi-même étions là pour l'accueillir.
    Quand on entre dans la station, on a un sentiment incroyable, quasi surréel. C'est peut-être semblable aux appareils sur lesquels nous nous sommes entraînés à Houston et dans d'autres pays, mais c'est dans une autre dimension. C'est un peu comme un tableau de Salvador Dali.
    Nous avons eu la visite de plusieurs équipages. Nous avons eu la visite de trois navettes en tout, et d'un vol Soyouz aussi. Chaque fois qu'on ouvre les écoutilles, c'est un plaisir de revoir ses amis.
    Vous voyez ici une EVA sur le segment russe. Pour la première fois en sept ou huit ans, nous avons accueilli un nouveau module, également sur le segment russe, ce qui signifie que le segment russe est maintenant sur le point d'être pleinement opérationnel. Nous avons aussi effectué beaucoup d'EVAs à partir de la navette, lorsque son équipage préparait la station pour son utilisation jusqu'en l'an 2020. La station est maintenant presque totalement assemblée et nous allons commencer à l'utiliser pendant les 10 prochaines années. À cause de cela, nous avons besoin de beaucoup de pièces détachées à l'extérieur de la station spatiale.
     Quand on fait une EVA, on est obligé de respirer de l'oxygène pur qui dénitrogénise notre sang pour nous permettre d'éviter le mal de décompression. Vous voyez ici notre bonne amie Nicole Stott sortant du sas pour sa première EVA. Ici, j'aide à manoeuvrer le Canadarm2 qui transporte Nicole et la charge utile de la station jusqu'à la soute de la navette.
    On ouvre l'écoutille pour que les gens reviennent. La sortie spatiale dure six ou sept heures mais les astronautes passent en tout huit à neuf heures dans leur combinaison spatiale sans pouvoir se gratter le nez, par exemple. C'est très intéressant quand ils reviennent.
    Vous voyez ici quelques opérations robotiques.
    Ceci est l'assemblage du module japonais de Kibo. Il y a eu trois missions de navettes et on en est ici à l'assemblage final du module. Nous avons employé le Canadarm2 pour le capter dans la soute de la navette et l'installer sur le laboratoire japonais. Après ça, nous avons transféré chaque charge utile sur la plate-forme japonaise en utilisant le Canadarm ainsi que le bras japonais.
    Vous voyez ici le véhicule HTV, le cargo ravitailleur japonais dont nous avons parlé. Vous verrez bientôt en bas à droite de l'image le Canadarm manoeuvré par Nicole pour capter ce véhicule dans l'espace, une opération très complexe. Comme d'habitude, tout le monde — toutes les équipes de contrôle, tous les participants — a remarquablement travaillé pendant cette opération.
    Le véhicule HTV est tout à fait unique. Il comporte une section centrale non pressurisée qui contient une autre palette à l'intérieur. J'ai utilisé le Canadarm2 pour extraire la palette, laquelle contenait du matériel pour d'autres expériences, et je l'ai ensuite acheminée vers le port arrière sur le laboratoire japonais pour la transférer à Frank, qui manoeuvrait le bras japonais, pour l'installation des charges utiles sur le laboratoire.
    Dans la partie pressurisée du cargo ravitailleur, il y avait cinq ou six tonnes de produits alimentaires, d'eau, de vêtements, de nouvelles expériences et de pièces détachées que nous avons transférées à bord.

  (0920)  

    Voici un autre grand moment pour l'Europe et pour moi-même : l'arrivée d'une autre navette avec un MPLM et un autre astronaute européen, Christer Fuglesang. Bob était très heureux que Julie fasse partie d'une des missions de la navette et qu'il y ait deux Canadiens dans l'espace. Cette fois, vous voyez à droite Christer Fuglesang. Nous étions donc deux Européens dans l'espace et c'était bien sûr un grand moment pour l'Europe.
    Nous transportons beaucoup de marchandises quand le MPLM et le HTV arrivent. Voici un nouveau tapis roulant qui venait d'arriver et qu'il fallait installer. Les jambes ne sont d'aucune utilité pour se déplacer dans l'espace. Elles se contentent de flotter dans le vide derrière nous et nous nous en servons donc plutôt pour transporter les marchandises.
    Vous voyez ici l'approche du véhicule russe. En Russie, ils emploient des véhicules intermédiaires, environ quatre par an, pour ravitailler la station spatiale. Les cargos ravitailleurs russes s'arriment normalement automatiquement mais vous voyez ici Max au contrôle pour intervenir si quelque chose ne fonctionne pas et qu'il faut faire l'arrimage manuellement.
    Ici, c'est le module russe dont nous parlions plus tôt, le MRM, ou module de recherche polyvalent, arrivé à la station spatiale. C'est toujours un plaisir de voir arriver les véhicules russes et d'ouvrir l'écoutille parce que les Russes ont toujours la gentillesse de mettre des fruits frais, des oignons ou des choses comme ça dans leurs véhicules. Chaque fois que nous ouvrons l'écoutille, nous sentons cette bonne odeur de fruits frais qui est très agréable.
    La principale raison pour laquelle on a construit la station spatiale était d'effectuer des expériences de niveau mondial en sciences médicales et en sciences des matériaux. Voici l'une des expériences médicales concernant l'étude de l'ostéoporose avec six souris.
    Ceci est une expérience de l'université York de Toronto. On étudie comment le cerveau s'adapte à l'impesanteur et, en particulier, comment nous nous orientons en impesanteur.
    Voici quelques expériences réalisées avec la boîte à gants de recherche en microgravité. C'est une boîte que nous utilisons pour pouvoir travailler avec des matériaux toxiques ou dangereux. Vous voyez ici du matériel d'échocardiographie.
    Les astronautes se doivent d'être polyvalents. J'ai une formation d'ingénieur et de pilote d'essai mais, quand je me suis entraîné pour devenir astronaute, j'ai dû apprendre à faire des échocardiographies, par exemple. Bob a été mon sujet à plusieurs reprises et c'était un travail très intéressant pour moi.
    Vous voyez ici une expérience spatiale en trois dimensions pour le module européen Colombus. Nous essayons de voir comment la microgravité influe sur notre perception de la distance en impesanteur.
    Ici, Nicole Stott fait une étude de phlébotomie pour l'expérience médicale. Nous recueillons des échantillons de sang et d'autres choses que nous entreposons dans le réfrigérateur du module japonais pour les renvoyer à terre par la navette ou par le Soyouz.
    Ici, Bob travaille sur l'appareil l'exercice physique. Nous en avons plusieurs, dont un ergocycle.
    Ici, c'est une expérience dans le module de laboratoire américain. On appelle ça SPHERES. Nous avons vérifié le logiciel et l'algorithme pour un vol de satellites en formation. Dans cette expérience, nous avons fait des essais avec des groupes de deux satellites puis trois satellites.
    Nous venions de recevoir un nouveau banc de laboratoire, le banc intégré des fluides, pour étudier la physique des fluides dans l'espace. L'espace est un endroit incroyable pour faire de la recherche parce que c'est un environnement où il n'y a pas de sédimentation, pas de convection, pas de diffusion et pas de flottabilité.
    Nous faisons aussi beaucoup d'études sur la biologie des plantes pour la Russie, le Japon et le Canada. Nous espérons un jour inclure des plantes dans les systèmes de maintien de la vie pour les véhicules qui iront sur Mars. Par le processus de photosynthèse, les plantes produisent de l'oxygène, extraient le bioxyde de carbone de l'air et épurent nos eaux usées. Il est donc très important d'apprendre à cultiver des plantes dans l'espace, comme la laitue que Roman manipule ici.
    Nous avions aussi une expérience de l'université du Nouveau-Brunswick à Fredericton. Il s'agit de saules pleureurs du Nouveau-Brunswick que nous avons emmenés avec nous pour essayer de comprendre ce qui cause le bois de réaction. Le bois de réaction est un mauvais bois d'oeuvre et nous essayons donc d'améliorer la production de bois d'oeuvre au Nouveau-Brunswick.
    Koichi a évoqué l'entreposage des échantillons d'urine et de sang. Voici où ils sont entreposés, dans un congélateur à -80 °C.
    Voici le nouveau tapis roulant que nous installons dans la section américaine. Comme vous pouvez le voir, nous travaillons ensemble. Le travail d'équipe est évidemment crucial dans l'espace, et il nous permet aussi de nous détendre. Après l'installation, nous voulions montrer que nous pouvions tous courir ensemble.
    Ici, je travaillais avec l'exerciseur contre résistance avancé. Nous devions faire environ deux heures d'exercices d'aérobie dans le cadre de cet exercice de musculation. Il est très important de faire cet exercice pour rester en santé, notamment pour maintenir notre densité osseuse, en courant sur un tapis roulant ou en faisant du vélo stationnaire.
    Nicole Stott est maintenant dans le module de service russe.
    Voici le vieux tapis roulant. Nous faisions environ une heure d'exercice sur cette machine puis une autre heure sur l'exerciseur contre résistance avancé.
    Comme vous le savez, nous devions nous attacher pour ne pas flotter. Il est facile de faire des extensions de bras en impesanteur, comme vous pouvez le voir.
    Des voix: Oh!

  (0925)  

    Cette image montre le résultat de tous nos exercices. Nous faisions deux heures de sport par jour.
    Je vous fais faire une visite rapide de la station. C'est une structure énorme, de 85 m de long et d'un volume équivalent à celui d'un avion gros porteur.
    Voici le laboratoire japonais. Vous voyez le drapeau canadien que je montre parce que je participe à une activité éducative avec la Terre. Voici le module Colombus. C'est un laboratoire incroyable pour faire des expériences scientifiques sur les plantes, les animaux, la biologie humaine et les matériaux.
    Ici, nous sommes dans le nodule 1. Comme vous le voyez, il y a beaucoup de visages souriants quand nous volons en impesanteur. Bob sourit toujours. Vous l'avez vu sourire lorsqu'il est entré dans la station spatiale après l'ouverture de l'écoutille. Il a cessé de sourire quand nous l'avons fermée et qu'il est retourné à terre. Bob a été mon héros dans la station pendant les six mois. C'était un plaisir de travailler avec lui.
    Ici, nous sommes dans le PMA où se trouve notre garde-manger.
    Voici encore d'autres visages souriants. Je peux vous dire qu'on travaille dur sur la station spatiale mais qu'on a aussi beaucoup de plaisir. Nous avions une excellente équipe et je pense que la clé de notre succès à été que nous étions heureux de travailler ensemble, et vraiment heureux d'être là.
    Il est très facile de passer d'un endroit à un autre. Il suffit de pousser un peu et le corps flotte très facilement mais, si l'on part en vrille, il est très difficile de s'arrêter parce qu'il faut s'accrocher à deux choses en même temps.
    Transporter une grosse charge utile, lourde, est très facile. Max s'en va à reculons dans le module de service.
    Voici le hublot du module japonais Kibo. Il y a beaucoup de hublots dans la station spatiale. Il y en a dans les modules russes et il y en a deux dans le module japonais. Regarder la belle planète Terre par un hublot vous coupe toujours le souffle.
    Nous faisons des observations de la Terre pour deux raisons. D'abord, c'est psychologiquement positif pour l'équipage de pouvoir regarder la belle planète où se trouvent nos familles. Elles ne sont pas si loin que ça de nous.
    Ensuite, nous faisons beaucoup d'observations de la Terre pour des activités scientifiques, en photographiant certains sites terrestres pour en voir l'évolution au cours des années. On s'attend évidemment à voir des changements pendant les 10, 20 ou 30 ans qu'on utilisera la station spatiale.
    Voici une très belle image de Paris, avec les Champs-Élysées. Voici une ville très similaire mais dans une autre partie du monde. C'est Médine, en Arabie Saoudite.
    Voici le centre d'entraînement des astronautes à Houston, le Johnson Space Center. Si j'avais un pointeur au laser, je pourrais vous montrer où j'habite.
    Voici les îles Grand Caïman.
    Les récifs de corail sont l'une des plus belles choses à contempler à partir de l'espace. Toutes les teintes de bleu des océans sont incroyables.
    On voit aussi des choses tristes. Voici un champ de pétrole en feu. On voit d'autres exemples de destruction de l'environnement par l'homme, ce qui est triste mais, comme l'a dit Frank, c'est aussi important sur le plan scientifique.
    Nous avons vu Doubaï, et beaucoup de constructions artificielles dans le monde entier.
    Nous avons aussi observé un ouragan, ainsi que certaines activités volcaniques dans les îles Kouriles, au nord du Japon.
    Ici, vous voyez d'autres activités quotidiennes à bord de la station où nous avons vécu pendant six mois. Il y a le travail et il y a aussi la vie quotidienne.
    Roman ne semble pas très heureux de se faire couper les cheveux par Jeff. Il vient de l'armée de l'air alors que Jeff vient de l'armée de terre. Les deux ne vont pas très bien ensemble. Jeff préfère terminer lui-même sa coupe de cheveux pour s'assurer qu'elle est parfaitement au carré.
    Voici ce que deviennent vos compagnons d'équipage après six mois de vie ensemble.
    Des voix: Oh!
    M. Frank De Winne: L'alimentation était très importante. Nous prenions tous nos repas ensemble. Nous étions six autour de la table matin, midi et soir. Quand la navette était là, comme maintenant, il y avait 13 personnes autour de la table.
    Certains sont devenus plus adeptes que d'autres à manger dans l'espace. Tim montre comment faire avec une goutte d'eau.
    Il ne faut pas sous-estimer tous ces aspects psychologiques, comme l'alimentation ou la camaraderie à bord de la station.

  (0930)  

    Ceux d'entre nous du Canada et des États-Unis avions expliqué à nos camarades russes et européens ce qu'est Halloween. Gardez cette image dans votre esprit car je vous raconterai tout à l'heure une histoire très drôle à ce sujet.
    Cette photo montre Tim prouvant aux sceptiques que Spiderman existe.
    Un moment important pour l'Europe fut celui où je reçus le commandement de la station spatiale internationale. C'était important pour l'Europe mais je pense que ce l'était encore plus pour le partenariat international car cela démontrait que cette coopération marche vraiment, même pour de petits partenaires comme l'Europe, le Canada et le Japon. Nous sommes maintenant capables de commander cette station en orbite et d'assumer exactement les mêmes responsabilités que les grands partenaires. C'est vraiment un très bel exemple de coopération internationale au plus haut niveau.
    Les seuls moments tristes sont ceux où il faut dire au revoir à ses camarades. Vous voyez sur cette photo une étiquette verte sur le dos de Nicole, indiquant qu'elle était le transfert numéro 914. C'est le transfert vers la navette. Frank De Winne et moi-même nous préparions à rentrer à la maison.
    Nous nous sommes désarrimés de la station. Contrairement à l'arrivée, lorsque le voyage jusqu'à la station dure deux jours, le retour à terre se fait en 3 heures et demie après le désarrimage.
    C'est un voyage incroyable, mieux que tous les manèges de Disney World.
    Cette photo montre le module japonais à partir d'un véhicule Soyouz. Je crois qu'elle a été prise à partir d'une navette après le désarrimage.
    Après le désarrimage, nous faisons généralement un tour complet de la station spatiale pour prendre beaucoup de photographies.
    Évidemment, c'est toujours triste de quitter la station spatiale après y avoir travaillé pendant six mois. Ce fut vraiment un séjour remarquable, avec d'excellents camarades d'équipage.
    En revanche, nous sommes aussi très heureux de revoir nos familles qui nous ont manqué pendant six mois. La séparation est d'ailleurs plus dure pour elles parce que nous, pendant cette absence, nous avons notre travail. Nos familles nous appuient non seulement pendant la mission de six mois mais aussi pendant la période préparatoire qui nous oblige à voyager dans le monde entier. Je me suis entraîné pendant quatre ans pour cette mission. Après ça, j'ai passé six mois dans l'espace. Nous devons beaucoup à nos familles parce que, sans elles, nous ne pourrions pas faire ça.
    C'était notre petit film de famille.
    Merci beaucoup, c'est très impressionnant.
    Vous deviendrez peut-être aussi un jour députés, comme M. Garneau.
    Avant de donner la parole aux membres du comité, j'ai une question à vous poser : à combien de kilomètres de la Terre se trouve l'orbite de la station spatiale internationale?
    Typiquement, à 350 kilomètres. Comme vous pouvez l'imaginer, il y a le vide sidéral et c'est un environnement très raréfié là-haut. Il y a un peu de traînée qui affecte la station et la fait redescendre petit à petit. Une fois de temps en temps, il faut relancer les moteurs pour la faire remonter. L'objectif est généralement 350 kilomètres.
     Permettez-moi de dire en même temps que les astronautes canadiens doivent être considérés non seulement comme des modèles scientifiques et techniques mais aussi comme des modèles de forme physique. Près de 25 p. 100 des jeunes Canadiens ont un excès de poids ou sont obèses. Durant l'expédition, nous avions lancé un défi, « En forme pour l'espace », pour encourager tous les Canadiens, jeunes et vieux, à parcourir en six mois à la marche, à la course ou en vélo les 350 kilomètres de distance jusqu'à la station spatiale. Il y a eu 40 000 participants. Ce fut très gratifiant.
    Merci beaucoup. Je suis très heureux de l'apprendre.
    Les membres du comité ont-ils des questions à poser à nos invités?
    Allez-y, monsieur Garneau.
    Non, je crois que je vais me contenter d'écouter.
    Voulez-vous intervenir, monsieur Rota?
    Je ferai quelques remarques et vous poserai peut-être quelques questions.
    Je me sens comme un garçon de 10 ans. Je me souviens de 1969, lors du lancement d'Apollo 11. Ça révèle mon âge mais je suis fasciné. Quel plaisir de vous voir ici! Je peux vous assurer aussi que votre perte de M. Garneau a été un gain pour nous. Nous sommes très heureux de l'avoir.
    Voici ma première remarque. Je suis très heureux de vous avoir entendu parler de coopération. Quand je vois le Canada, j'y vois beaucoup de nations différentes. Au fond, nous sommes un concentré de ce qu'il y a de meilleur du monde. Ce qui se passe dans l'espace est foncièrement une projection de ce qu'est le Canada. Je suis heureux de vous avoir entendu parler de coopération.
    Vous avez parlé des nombreux types de projets qui sont couramment financés pour la station. Comment les projets financés par le truchement de l'Agence spatiale canadienne, grâce au programme de subventions et de contributions, s'harmonisent-ils avec la stratégie scientifique et technologique du gouvernement? Je cherche une certaine forme d'harmonisation pour pouvoir expliquer cela à la population. Tout le monde n'est pas convaincu que ça vaut la peine. Peut-être pourriez-vous nous expliquer ça?

  (0935)  

     L'un des facteurs essentiels de ce que nous faisons à l'Agence spatiale canadienne est d'essayer d'harmoniser notre travail avec la stratégie scientifique et technologique.
    Prenez le travail exploratoire auquel nous avons participé en robotique. C'est nous qui assemblons la station, comme l'a dit Koichi, mais la conséquence, et c'est enthousiasmant, est que nous avons notre place sur la scène internationale. Je pense que ça contribue à l'unité nationale. Ça encourage la génération suivante à s'orienter vers la science et la technologie. Donc, en plus de jouer un rôle sur la station spatiale, nous jouons un rôle important pour la génération suivante.
    Et je ne parle ici que de robotique. En ce qui concerne l'utilisation de la station spatiale, nous travaillons dans cinq ou six domaines scientifiques différents et nous travaillons donc avec les autres ministères concernés. Par exemple, on a parlé du projet de l'université York, un projet en neurologie. Certains projets ont l'appui de Santé Canada. D'autres peuvent avoir l'appui d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, ce qui est le cas des saules pleureurs cultivés dans l'espace pour comprendre l'origine du bois de réaction. Nous avons une myriade d'expériences scientifiques importantes.
    À Santé Canada, il y a de nombreux secteurs importants dans lesquels nous pouvons apporter une contribution, comme le système cardio-vasculaire, le système neurologique et le système immunitaire. Sur les 100 vols de navette, je pense qu'il y en avait 70 qui contenaient des expériences sur le cancer, ce qui s'explique parce que les cellules réagissent différemment les unes avec les autres en impesanteur.
    La réponse est que nous essayons de tout harmoniser en fonction des critères de la stratégie de S-T.
    Une voix: M. Rota est diplômé de l'université de Calgary.
    L'université de Calgary et MDA, la société qui a fabriqué toute la robotique canadienne de la station spatiale, se sont associées à la faculté de médecine de là-bas pour créer ce qu'on appelle le neuroArm. Le neuroArm est un outil robotique de neurochirurgie — pas expérimental mais opérationnel — qui utilise les algorithmes de contrôle et le système de vision du Canadarm pour faire de la neurochirurgie. La raison en est qu'un robot peut tenir un outil dans le cerveau humain avec une extrême précision, bien mieux qu'un chirurgien, même le plus maître de lui-même. Donc, je pense que c'est la médecine qui a probablement le plus bénéficié de notre investissement spatial.
    Pour être tout à fait franc, le problème est que l'ASC a environ le tiers du budget total consacré à l'espace au Canada. Le MDN en a aussi près d'un tiers, et le dernier tiers est réparti entre Environnement Canada, RNCan, Agriculture et Agroalimentaire Canada et Pêches et océans. Ce n'est pas assez d'argent — je suis tout à fait franc à ce sujet — par rapport aux autres agences mais il faut rendre hommage aux dirigeants de l'ASC qui ont beaucoup fait avec l'argent dont ils disposaient.
    Ce qu'il faut faire maintenant, c'est améliorer l'harmonisation entre ces agences. En vertu de la Loi sur l'agence spatiale canadienne, c'est une responsabilité de l'ASC. C'est une chose à laquelle j'attache beaucoup d'importance depuis que j'en suis devenu le président, c'est-à-dire m'assurer que tous les autres ministères oeuvrent dans le même sens pour que le programme spatial canadien devienne encore plus dynamique.
    Ce qu'il nous faut, c'est un usage meilleur et plus efficient du budget total afin de mieux faire concorder les activités avec les objectifs de la stratégie de S-T.
    Merci. Ces précisions sont importantes car, bien souvent, les gens ne voient pas le lien avec leur vie quotidienne. Ils voient des gens dans l'espace, qui flottent dans la station, qui semblent avoir du plaisir, mais ils ne voient pas nécessairement tout le travail qu'ils font, et il est bon de faire ce lien pour le citoyen lambda.
    Je me remets dans la peau de cet enfant de neuf ans, en 1969, et je vais vous poser une question mais je ne suis pas sûr qu'elle concerne la stratégie du gouvernement. Vous avez l'expérience de l'espace, vous êtes allés là-bas, et on parle d'une mission habitée vers Mars. Pouvez-vous nous parler un peu des défis que poserait une telle mission? Est-ce qu'on s'y prépare déjà, quand pourrait-elle avoir lieu et comment pourrait-elle se dérouler?
     Je crois que nous avons à peu près le même âge car je me souviens très bien de ce jour de 1969 où je regardais Neil Armstrong et Buzz Aldrin marcher sur la Lune.
    Il est tout à fait exact que les astronautes d'Apollo ont influencé mon choix d'études et de carrière. En 1969, le Canada n'avait pas de programme d'astronautes mais voyager dans l'espace était l'un de mes rêves. Quand le Canada s'est préparé à lancer un programme d'astronautes, j'en ai été un candidat naturel étant donné mon intérêt et mes études en sciences et en technologie.
    Nous avions trois objectifs stratégiques avec cette première expédition canadienne : l'exploration, l'innovation et l'éducation. Tout comme les astronautes d'Apollo m'ont inspiré dans ma jeunesse, nous voulons nous-mêmes inspirer la génération suivante de Canadiens.
    Le Canada est un pays qui a été fondé en grande mesure par des explorateurs comme La Vérendrye, Champlain, Sir Alexander Mackenzie, Simon Fraser et David Thompson. Nous avons tiré les fruits de leur travail. Aujourd'hui, toutes les frontières géologiques ont été explorées mais il reste les nouvelles frontières que sont la science, la technologie, la médecine et l'espace.
    Nous voulons encourager les jeunes Canadiens à rêver mais aussi à comprendre que les rêves ne se réalisent pas sans de gros efforts. Les rêves se réalisent par la passion, le dévouement, l'appui des membres de la famille et l'éducation. L'éducation met tout le monde sur un pied d'égalité et donne les mêmes chances à tout le monde. J'ai quatre diplômes universitaires. Il faut ça pour poursuivre ce rêve.
    J'ai parlé du programme « En forme pour l'espace ». Nous avions plusieurs autres projets éducatifs qui ne consistaient pas seulement à informer les jeunes sur la science spatiale et sur la nécessité de faire des études mais aussi à les inciter à se lancer dans cette voie.
    Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.

  (0940)  

    Permettez-moi de vous montrer où en est l'exploration. Je pense que c'est un facteur important à bien expliquer, surtout à votre comité.
    Cinq pays sont partenaires dans la station spatiale internationale. Il y a 14, peut-être 15, pays qui ont fabriqué des éléments importants assemblés sur la station spatiale internationale, et 80 pays qui utilisent les données. Cet aspect de coopération internationale sur le projet technique le plus complexe de tous les temps est peut-être la meilleure chose que nous faisons. Nous pouvons montrer aux jeunes d'aujourd'hui qu'il est possible, quand on travaille ensemble, de faire quelque chose qui est techniquement tout à fait phénoménal.
    Pour ce qui est de l'exploration, ces pays déterminent ensemble des stratégies sur ce qu'il faudrait faire et où il faudrait aller. Ils ont produit un document et le Canada a été l'un des chefs de file de sa rédaction, comme les quatre autres partenaires, pour arrêter les travaux futurs. Devrions-nous aller sur la Lune, visiter des astéroïdes, aller sur Mars, utiliser les points de Lagrange? Ce sont des points stationnaires entre la Terre et la Lune qui sont excellents pour installer du matériel d'astronomie. Cette a stratégie a été arrêtée et acceptée.
    La Chine a déjà fixé sa propre stratégie. Il y a une dizaine d'années, elle avait décidé, premièrement, d'aller dans l'espace, deuxièmement, d'envoyer un homme dans l'espace, troisièmement, d'envoyer deux hommes dans l'espace et, quatrièmement, de construire une station spatiale. Elle avait annoncé qu'elle ferait tout ça en dix ans. Vous comprendrez probablement que, si nous n'avons pas éclaté de rire, nous avons au moins souri gentiment parce que nous ne pensions par ce serait possible.
    Eh bien, elle a réalisé son programme exactement comme prévu. Sa station spatiale n'est pas la même que celle-ci — ce sont simplement de véhicules réunis, et c'est un environnement relativement différent — mais ses projets futurs sont d'aller sur la Lune puis sur Mars. La Russie a une stratégie similaire. La question est maintenant de savoir ce que feront les Américains.
    Les Américains viennent juste d'annoncer la commission mise sur pied par la Maison-Blanche, par Obama, présidée par Norm Augustine. Chacun des partenaires est allé là-bas pour témoigner. J'y ai représenté le Canada.
    Les Américains souhaitent avant tout identifier les efficiences qui seraient nécessaires pour maintenir le partenariat de la station spatiale internationale et aller ensuite dans d'autres parties du système solaire. Ils veulent savoir ce que le Canada pourrait faire. On en est à l'étape des discussions, pas des décisions. Que ferait le Canada?
    Notre position est que, si les Américains décident d'aller sur la Lune, c'est ce que nous ferons. S'ils décident d'aller sur Mars, c'est ce que nous ferons. C'est parce que nous sommes un petit acteur et que nous ne pouvons pas imposer nos choix.
    Je pense que c'était un choix très diplomatique. Il semble que la préférence d'Obama soit de ne pas aller sur la Lune. Sa préférence semble être de ne pas aller sur la Lune mais plutôt d'aller sur les astéroïdes et les points de Lagrange comme escales vers la planète Mars.
    Les informations que vous avez vues récemment dans la presse au sujet du discours prononcé par Obama au centre spatial Kennedy en avril ne sont pas exactes. On a dit qu'il arrêtait l'exploration, ce qui n'est pas vrai. En réalité, ils ont annulé le véhicule de transport d'équipages à cause de problèmes de design. Ils ont annulé la petite fusée qui allait lancer le petit véhicule d'équipages parce qu'ils avaient des problèmes de design et, à cette étape du programme, ils ne veulent pas avoir de tels problèmes.
    Étant donné ces problèmes de design, les décideurs entourant Obama ont dit que, s'ils veulent aller sur Mars, ils devront le faire avec une nouvelle technologie. L'espace a toujours été le moteur de l'innovation technologique. Dans son dernier budget, Obama a gelé toutes les dépenses du gouvernement et a aboli la plupart des dépenses facultatives mais il a ajouté 6 milliards de dollars au budget de la NASA pour ces nouvelles technologies, l'idée étant d'arriver plus vite sur Mars.
    Voilà la vérité sur ce que les Américains essaient de faire.

  (0945)  

    Merci, monsieur MacLean. Merci, monsieur Rota.
    Allez-y, monsieur Cardin.

[Français]

    Vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Bonjour, messieurs, et surtout, merci de nous avoir fait entrer dans votre univers. C'était franchement très intéressant. Je sais que je suis assez fréquemment dans la lune, mais ça ne ressemble pas à ça du tout. Vous étiez déjà rendus loin quand j'ai commencé à inscrire mes questions, vous parliez de Mars.
    Aujourd'hui, est-ce davantage un défi, comme celui qui anime l'humanité depuis le début des temps? Par exemple, les premiers explorateurs qui sont venus jusqu'ici en bateau se sont parfois égarés, mais ils ont fini par trouver quelque chose. Il y a des choses à découvrir. Est-ce davantage un défi d'exploration pure, ou y voit-on également une nécessité d'aller aussi loin, dans le futur?
    Je pense que c'est les deux.
    D'abord, il s'agit naturellement du défi d'aller plus loin. Je dis toujours qu'une société qui arrête d'explorer, c'est une société qui arrête de progresser. Si on veut progresser en tant que société, on doit essayer d'aller plus loin. On pousse la technologie, la science, mais c'est beaucoup plus que ça. Il s'agit de construction de nation, d'inspiration pour les jeunes, d'éducation. Un programme d'exploration, c'est un programme sociétal, qui amène une société à un autre niveau. Dans ce cas-ci, c'est un défi.
    Deuxièmement, je pense tout de même que dans un futur lointain — je ne sais pas quand —, il est sûr que certaines de nos ressources sur Terre ne suffiront plus pour faire toutes les choses qu'on veut faire. Il y a beaucoup de ressources qui pourraient être disponibles: celles de la Lune, celles des astéroïdes, celles de Mars, celles d'on ne sait pas où encore. D'ailleurs, on sait que toutes les fois où l'homme a découvert de nouvelles terres, de nouveaux endroits, ça lui a apporté des choses. Ce ne sont pas des choses qu'il espérait ou pensait trouver. Quand Christophe Colomb a essayé de faire le tour du monde pour trouver une nouvelle route vers les Indes, il a plutôt découvert quelque chose qui a fondamentalement changé notre monde, et je pense que la même chose arrivera si on continue à explorer.
    Je pense donc que c'est un défi, mais aussi que ça va devenir une nécessité dans le futur. Je suis d'accord avec Steve au sujet de ce qu'on fait présentement aux États-Unis. En effet, avec les moyens technologiques actuels, il sera très difficile d'explorer et de retirer tous les bénéfices de cette exploration. Peut-être pourrait-on uniquement considérer cela comme un défi. Toutefois, pour vraiment en retirer tous les bénéfices, je pense qu'on a besoin de nouveaux moyens technologiques, et je pense qu'il faut faire les choses différemment de ce qu'on fait aujourd'hui. Je pense que ce qu'a décidé le président Obama, aux États-Unis, est très important.
    De même, en Europe, on est aussi en réflexion quant à ce que l'Europe doit faire, quant à ce qu'elle doit apporter à ce programme d'exploration. En Europe, on est conscient que, premièrement, l'exploration spatiale relève d'abord de la politique et de la coopération internationale et, deuxièmement, si on ne continue pas à explorer, les Chinois, les Russes et les Américains vont le faire. Partout dans le monde, on va continuer à explorer.
    Une des grandes préoccupations pour l'Europe est de trouver une façon de rassembler tout le monde, partout sur la Terre, non pas uniquement les partenaires actuels qui seront sans doute au coeur du programme d'exploration, mais aussi les Chinois, les Indiens, les Brésiliens, et même les Africains, qui sont aussi d'intérêt pour nous. Il faut trouver comment on peut promouvoir le partage, entre tous ces pays, d'une vision globale, d'une vision de paix, d'un désir, comme Steve l'a dit, de réussir quelque chose ensemble qui puisse constituer un exemple pour tous les jeunes et pour tout le monde sur la planète. Il faut trouver comment on peut bâtir ce programme, et quel rôle l'Europe doit jouer dans ce processus.
    Cette réflexion qui a cours actuellement en Europe est très importante, maintenant que l'Union européenne, avec le nouveau traité qui a été signé en décembre dernier, a son propre rôle à jouer et ses propres compétences dans le domaine de l'exploration spatiale. Même si on n'est pas un partenaire aussi important, qu'on n'a pas autant de leaders, qu'on n'a pas autant de moyens que les Américains ou que les Russes, je pense que l'important pour l'Europe — à mon avis, c'est la même chose pour le Canada —, c'est de contribuer en partageant ses valeurs dans la mise sur pied de programmes d'exploration spatiale. Vous l'avez fait, au Canada, en affirmant vos valeurs de diplomatie, vos valeurs d'ouverture, votre désir de tirer le meilleur de tous les peuples. Vous le faites très bien dans le domaine de l'exploration spatiale. C'est ce que l'Europe veut faire dans le futur.

  (0950)  

    Vous avez dit quelque chose d'important à propos de l'exploitation, ou plutôt de l'exploration — effectivement, les deux mots se ressemblent. Vous avez parlé de répondre à des besoins en allant plus loin pour trouver autre chose. De là vient aussi la nécessité d'une coopération mondiale dans le domaine de l'exploration. On peut penser à ce qui s'est produit dans l'histoire. Je ne veux pas faire de philosophie ni d'histoire, mais on peut penser aux guerres issues de l'exploration et de l'exploitation de ressources qui ont eu cours partout sur la planète. Effectivement, il ne faudrait pas reproduire ça, il ne faudrait pas que ça devienne un objectif. D'ailleurs, si cet objectif existe, c'est qu'on sent qu'on va manquer de ressources ici. À cause de l'exploitation qu'on fait des ressources de la Terre, dans quelques décennies, la Terre va peut-être ressembler à un raisin sec. Il faudra donc avoir recours aux ressources extérieures. C'est pour ça qu'il est nécessaire que cette exploration fasse l'objet d'une coopération mondiale. Il ne faut pas reproduire ailleurs les guerres qui ont eu lieu dans le passé.
    Beaucoup des choses dont vous parliez ont été réalisées. Des recherches ont été effectuées, des découvertes ont été faites et servent aujourd'hui sur Terre. Une des choses dont vous parliez tout à l'heure m'intéresse particulièrement, et c'est le programme d'entraînement. Vous disiez que la population était de plus en plus obèse, et que vous aviez élaboré un programme d'entraînement à partir de ce constat. Ce ne sont probablement pas des choses qui ressemblent au programme d'entraînement 5BX conçu à l'intention des grands aviateurs. Est-ce que ces programmes sont offerts?
    Je vais répondre à cette question. Ce que vous dites à propos de l'exploration est intéressant. On pourrait en parler pendant toute une journée. Il y a de grands défis sur le plan technique. L'invitation d'un pays comme la Chine pose aussi de grands défis, dont celui de convaincre tous les gouvernements du monde de faire ça au même moment. De plus, à mon avis, comme Frank l'a dit, il est très important d'adopter une vision innovatrice dans ce qu'on va faire. Il y a l'exemple de la Russie qui fait toujours la même chose depuis 50 ans. Elle fait exactement la même chose qu'en 1951. La Russie ne donne pas l'exemple en matière d'innovation technologique.
    Ici, il faut y penser. Si on utilise les mêmes moyens technologiques qu'on utilise présentement, comme la navette et les vaisseaux Soyouz, on va seulement explorer la planète Mars. Par contre, si on développe la technologie, il va y avoir des retombées dans chaque secteur. Au Canada, pendant 20 ans, on a eu un taux de retour sur investissement de 8 à 12 chaque année pour l'exploration qu'on faisait. Je voulais mentionner ça avant de répondre à l'autre question.
    Ce que j'ai trouvé intéressant du programme que Bob a élaboré — je dois dire que c'était son idée de mettre sur pied le défi En forme pour l'espace —, c'est que la plupart des gens qui y ont participé étaient des aînés, des gens d'environ 55 ans et plus, et c'était possible pour eux de le faire.
    Il y a un lien avec ce qu'on a fait dans les années 1960 avec les Prix du Gouverneur général: il y avait le bronze, l'argent et l'or. Toutefois, on ne voulait pas savoir qui était le meilleur ou le deuxième. On voulait solliciter la participation des gens, plutôt que de promouvoir la compétition en établissant des rangs. On a fait participer tous les aînés qui le voulaient. C'est ce qui m'a impressionné, d'autant plus que j'ai reçu beaucoup de courriels. Même ma tante, à 85 ans, était toute fière de me dire qu'elle venait de finir la marche vers la station spatiale.
    Je pense qu'on peut faire beaucoup au Canada dans ce domaine. C'est quelque chose d'important pour nous.

  (0955)  

    Merci, monsieur MacLean.
    J'avais « la question qui tue ».
    Vous avez une autre question?
    Il ne comprend pas ce que ça veut dire. C'est une blague québécoise.
    D'accord.
    C'est dans Tout le monde en parle. Voici donc la question qui tue: en a-t-il coûté 32 millions de dollars à Guy Laliberté?
    C'est 35 millions de dollars, plutôt.
    D'accord. Alors, avez-vous eu un feuillet T4 modifié avec des avantages? Ah, ah!
    Je prendrai seulement 60 secondes pour parler de Guy Laliberté. Pour moi, c'était une question difficile. Allait-on appuyer une telle mission, compte tenu du fait qu'on utilisait les fonds de notre pays, ou faudrait-il reculer et le laisser faire son spectacle? J'ai donc décidé qu'on allait l'appuyer, sans toutefois dépenser beaucoup d'argent. Il fallait l'appuyer avec les gens. Il fallait s'assurer qu'il allait recevoir une bonne formation. C'est ce que nous avons fait, car notre station spatiale est un atout extraordinaire, et si quelqu'un faisait une erreur, nous perdrions ce que nous avons accompli. Nous avons donc donné une formation à Guy, une formation qui était meilleure que celle qu'on donne aux autres touristes.

[Traduction]

    Nous l'avons appelé un « explorateur spatial privé », pas un touriste, pour essayer de l'encourager à comprendre le rôle qu'il jouait.
    Guy a un passé. Je ne sais pas si c'est vrai ou non mais il a manifestement une réputation. Toutefois, je peux vous dire que, dès que je l'ai rencontré, j'ai su qu'il avait beaucoup de mémoire et qu'il pouvait se concentrer sur ce qui est important, et il s'est incroyablement bien entendu avec tout l'équipage.
    Il avait une mission et un travail. Je pense qu'on peut dire qu'il a réussi à cet égard. Les médias ont calculé qu'il a reçu pour 865 millions de dollars de publicité pour sa campagne One Drop, ce qui donnera des résultats à terme et je lui tire mon chapeau pour cela.
    Les autres touristes de l'espace n'ont pas accompli autant que lui. C'était un plaisir de participer avec lui à cette mission. J'ai travaillé avec lui et j'ai appris le connaître pendant ses six mois d'entraînement. Au fond, ce fut un partenariat étonnant entre l'Agence spatiale canadienne et le Cirque du Soleil.
    Merci beaucoup, monsieur MacLean.
    Monsieur Van Kesteren, c'est à votre tour.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins. Tout ceci est incroyable.
    J'avais beaucoup de questions auxquelles on a déjà répondu durant l'exposé mais l'une des choses qui me frappent, c'est le degré de camaraderie auquel vous êtes arrivés. Je pense que nous sommes tous d'accord sur l'importance de la collaboration entre les nations. Quelle occasion incroyable de faire avancer nos causes!
    Il y a un ancien adage disant que « les peuples périssent par absence de vision ». Je pense que nous pourrons éviter de périr si nous avons tous une vision commune, et l'espace en est manifestement une.
    Vous avez mentionné plusieurs possibilités : aller sur Mars, aller sur un astéroïde ou peut-être même aller au-delà. Avez-vous perçu une évolution vers une vision commune de l'Union européenne, des États-Unis, du Japon et du Canada? Avons-nous inclus d'autres pays? Vous avez évoqué la Chine, qui semble avoir ses propres objectifs, mais a-t-on essayé de faire entrer la Chine dans cette sphère, ainsi que l'Inde ou le Brésil?
    Ce sont les pays évidents mais je pense à des pays comme la Turquie, par exemple, ou à n'importe quel autre, d'ailleurs, et je veux leur dire : « Écoutez, nous voulons vous intégrer à ça. Voici comment vous pourriez contribuer. Voici quels seraient les avantages pour vous. »
    Au Canada, nous avons envoyé plusieurs astronautes dans l'espace. On pourrait en envoyer d'autres pays. Avance-t-on vers cela? Si oui, où en sommes-nous à cet égard et quels sont vos plans?

  (1000)  

    Je vais laisser Koichi commencer et j'ajouterai un mot ensuite.
    En fait, cela se discute déjà. Par exemple, le Japon est actuellement le seul pays d'Asie participant à la station spatiale internationale. Chaque année, nous organisons le Asia-Pacific Regional Space Agency Forum, où il y a des représentants du Canada, des États-Unis, de la Russie, du Kazakhstan, de la Chine, etc. Beaucoup de pays y participent. Nous y parlons de l'utilisation de la station spatiale.
    Les cinq partenaires centraux de la station spatiale internationale n'en discutent pas encore officiellement mais, au niveau bilatéral, nous en discutons avec d'autres pays. Le Japon essaye d'ouvrir les possibilités d'utilisation du module Kibo.
    Comme l'a dit Steve, nous avons élargi la participation. Plus de 80 pays utilisent les données que nous recueillons dans la station spatiale internationale. Je pense que c'est dans cette voie que nous allons et nous avançons déjà.
    Je tiens à réitérer que l'Union européenne possède une compétence spatiale. De ce fait, nous avons eu une première réunion à Prague, l'an dernier, pour essayer de débattre de ce que l'Europe devrait faire dans l'exploration spatiale. On a décidé de tenir une conférence de suivi cette année, le 21 octobre, à Bruxelles. Les instances politiques nous ont donné un certain nombre de questions dont nous devrons débattre lors de cette conférence.
    L'une des questions que l'Agence spatiale européenne nous a demandé d'examiner avec les États membres de l'Europe est la possibilité de créer un forum mondial au niveau politique pour débattre d'exploration spatiale. C'est une question qui a été posée, il n'y a pas encore eu de décision, mais je pense qu'il y a une volonté, au moins en Europe, de créer une telle tribune au sein de laquelle chaque nation pourrait participer au débat sur ce grand programme.
    Évidemment, ça prendra beaucoup de temps. La coopération n'est pas facile. Soyons réalistes, quand il n'y a qu'un seul décideur et un seul budget, les décisions sont beaucoup plus faciles que lorsqu'il y a 25 nations autour de la table qui souhaitent toutes avoir leur mot à dire et avoir leur part du gâteau, mais je pense que les bienfaits, à long terme, sont réellement incroyables, et j'espère que nous débattrons de cette question le 21 octobre à Bruxelles. J'espère que nous aurons une réponse positive et que nous pourrons créer ce forum mondial au niveau politique pour discuter d'exploration spatiale à l'échelle mondiale.
    C'était la même chose avec la commission de la Maison-Blanche. La première série de témoignages portait sur la technologie, la vision et l'orientation que nous devrions peut-être prendre. Trois mois plus tard, on m'a demandé de revenir et on a parlé pendant toute la journée de comment faire participer la Chine. Étant donné que la Chine est une nation spatiale de plein droit — elle a 40 000 employés dans son centre de contrôle des missions, ce qui est plus que n'importe quelle autre nation —, la question est de savoir comment collaborer avec elle et quel rôle le Canada voudrait jouer si nous allions dans cette voie. On discute beaucoup de ces questions et il y a beaucoup de volonté aux niveaux les plus élevés pour faire ce genre de chose.
    En revanche, les choses changent dans l'espace. Je vous ai parlé d'exploration des astéroïdes et de Mars mais, il y a à peine 10 ans, les satellites avaient une résolution de 30 mètres environ. Aujourd'hui, notre RADARSAT-2 a une résolution d'un mètre. Les satellites optiques ont une résolution d'un demi-mètre. Il y a actuellement 70 satellites d'observation terrestre en orbite autour de la Terre. Dans 10 ans, il y en aura 300. Cela changera vraiment la manière dont nous travaillons et je pense que le Canada se doit de rester à l'avant-garde dans ce domaine.
    Prenez l'agriculture, par exemple. En utilisant les données de quatre satellites différents — nous avons fait cela avec des projets de l'Île-du-Prince-Édouard et de la Saskatchewan —, nous pouvons accroître les rendements futurs de 35 p. 100 à 80 p. 100. Étant donné que 13 p. 100 du PIB Canadien provient de l'agriculture, ça fait 2 milliards de dollars par an, même si on ne fait ça qu'à 10 p. 100. Le défi est de convaincre tous les agriculteurs d'utiliser ces ressources, mais elles sont là. Nous sommes à un point tournant de ce que l'espace peut faire pour la Terre, et à un point tournant de ce que nous pouvons faire en matière d'applications.
    Lors de la dernière conférence spatiale, qui s'est tenue en Corée — la prochaine se tiendra en Tchécoslovaquie —, il y avait 72 pays. Il y a quelques années, c'était la moitié. Le nombre de pays sur le point d'entrer dans l'ère spatiale est énorme. Le Brésil commence, l'Inde va doubler son budget sur les deux ou trois prochaines années, et cela s'explique par l'amélioration de la qualité des données que nous pouvons obtenir pour apporter des bienfaits à la Terre.
    Il est très important de tirer parti de cette émergence dans l'utilisation de l'espace. S'il y a une chose dont j'aimerais que vous vous souveniez à la suite de cette réunion, c'est que l'espace devrait être un élément essentiel de l'infrastructure gouvernementale. Si nous faisons ça, ça nous projettera dans l'avenir. J'ai parlé de tout cela à Gerry Ritz et ça l'a extrêmement intéressé. Quand je suis parti, il m'a serré la main et m'a dit : « Vous savez, Steve, c'est ça qui va projeter l'agriculture canadienne dans l'avenir. C'est ce qu'il faut faire. »
    Cela dit, il y a aussi l'environnement bureaucratique d'Ottawa. Beaucoup de personnes appuient ces idées mais le défi est de faire ça en temps opportun afin de pouvoir faire concurrence aux autres nations.

  (1005)  

    Vous venez d'ouvrir la porte à ma question suivante. Je parlais à l'un de mes collègues qui a participé à une étude sur l'agriculture. Son groupe est allé en Saskatchewan et il me parlait justement d'un agriculteur qui utilise cette technologie. Les résultats sont incroyables. Comme vous dites, les répercussions sont tout simplement phénoménales.
    Vous avez déjà soulevé cette question mais j'y reviens. Je me souviens que nous avions toutes ces petites calculatrices de Texas Instruments à l'époque du premier voyage des Américains dans l'espace et qu'elles nous fascinaient tous. C'était un résultat direct des voyages sur la Lune.
    Vous avez parlé d'agriculture et de beaucoup d'autres choses. Y a-t-il d'autres retombées du programme spatial qui ont une incidence vraiment profonde sur cette planète que vous n'avez pas mentionnées mais dont vous aimeriez parler?
    Ce que j'ai dit, c'est que, dans l'ensemble des priorités du gouvernement, l'espace devrait être un élément essentiel de l'infrastructure du gouvernement. C'est la phrase très importante que je voudrais vraiment graver dans votre esprit.
    Si je prends chaque ministère, comme Agriculture et Agroalimentaire, je peux trouver des exemples incroyables. Je soupais hier soir avec Claire Dansereau, la sous-ministre de Pêches et océans, et j'ai pu lui faire part d'un exemple éclatant. C'est la même chose pour Environnement Canada, pour lequel vous pouvez bien deviner quel est l'exemple éclatant.
    Je serai franc. On voit beaucoup de gens parler de changement climatique à la télévision. Je m'intéresse au changement climatique depuis les années 80. J'ai volé au-dessus du pôle en faisant des mesures de la couche d'ozone. Je crois qu'il est très important que ces informations spatiales soient communiqués aux dirigeants du pays pour qu'ils aient les bonnes données qui leur permettront de prendre de bonnes décisions sur le changement climatique. Nous sommes positionnés pour faire ça mais ça exige un investissement.
    Je m'étais dit que je ne dirais pas ça mais je vais le dire. Notre budget représente 40 p. 100 de ce qu'il était en 1996 et nous sommes encore efficaces. Je ne le répéterai pas mais il faut investir pour faire ça. Nous sommes efficaces au sens où, avec nos partenaires, nous avons le meilleur matériel optique pour mesurer le changement climatique dans le monde.
     Nous n'utilisons pas cet équipement à l'heure actuelle?
    Nous avons placé en orbite un satellite contenant le meilleur instrument optique au monde. Il fait des mesures mais nous devons rendre cela opérationnel et en envoyer d'autres dans l'espace.
    Je pourrais vous en parler pendant une heure.
    Puis-je vous parler de médecine et de télésanté? J'ai une formation médicale et je ne suis peut-être pas objectif.
    J'ai parlé tout à l'heure du neuroArm. L'une des choses que l'équipe à terre doit faire est d'assurer la santé des astronautes en orbite. Nous sommes isolés quand nous sommes là-haut. Si quelqu'un a un problème de santé, on doit décider très vite s'il faut le renvoyer à terre ou le laisser continuer en orbite. Notre préférence est de continuer la mission si c'est possible. Nous avons donc une certaine capacité médicale sur place, à bord de la station, et nous avons aussi une certaine formation médicale. Nous pouvons nous occuper des problèmes typiques, mais aussi de certains problèmes graves, comme les dysrythmies cardiaques.
    Beaucoup des techniques que nous avons mises au point ont eu des retombées terrestres. Beaucoup du matériel de télémétrie des services de soins intensifs provient du programme spatial, de la technologie sans fil à la technologie de miniaturisation.
    L'un des problèmes que connaît le Canada est d'attirer de jeunes médecins dans les collectivités isolées ou les collectivités du Nord. L'une des raisons en est qu'ils ne pensent pas avoir de soutien technologique là-bas. Bon nombre des technologies que nous avons mises au point — en ultrasons, en télésanté, en consultations de spécialistes de centres de soins tertiaires — l'ont été de concert avec des gens sur terre. Le Canada est un pays qui a vraiment besoin de télésanté et nous travaillons bien à ce sujet. Dans notre programme, les retombées vont dans les deux sens. Nous irons un jour sur Mars et il faudra être capable d'opérer des astronautes sur Mars. Les opérations chirurgicales de laparoscopie que nous mettrons au point pourront aussi être exécutées dans le nord du Canada, ce qui devrait constituer un attrait pour les jeunes diplômés de médecine du Canada et en attirer certains dans les petites collectivités du Nord.

  (1010)  

    Merci, monsieur Thirsk.
    Avant de donner la parole à monsieur Masse, je m'adresse à vous, monsieur MacLean. Vous avez parlé du changement climatique. Je suppose que c'est un domaine que vous connaissez bien. Il y a eu de vifs débats récemment sur la véracité des données scientifiques à ce sujet et j'aimerais vous demander ce que vous en pensez.
    C'est une question à laquelle il serait très difficile de répondre en quelques mots. Elle exige en réalité une longue discussion.
    Je me trouvais cette année dans le Grand Nord. Nous avons l'intention d'installer une station terrestre très haut dans le Grand Nord et je suis allé là-bas pour la première fois. Je pense que ce qu'on y voit est tout à fait éloquent.
    Qu'on appelle ça du changement climatique ou non, il y a des changements qui se produisent. Le Nord est en train de fondre. Des régions qui gelaient en août, à la fin de l'été, ne gèlent plus maintenant en août. Le Louis Saint-Laurent est là-bas et ne rencontre plus souvent de glaces. Lorsque nous étions en orbite, nous avons pris des photos pour un programme Students on Ice — des photos de leur navire — et il n'y avait pas de glace autour.
    J'ai volé en 1992. Lors de ma première mission, j'ai fait un vol équatorial et j'ai donc pu voir tous les glaciers entre +28° et -28°. Lors de ma deuxième mission, je suis allé jusqu'aux latitudes de la station spatiale, qui sont beaucoup plus hautes. Il y avait manifestement moins de glace — d'après mon souvenir, pas des mesures — sur toutes les montagnes, et c'était le même mois à 14 années d'écart. Il y a des changements.
    Cela dit, je n'estime pas que c'est un désastre. Je conteste les gens qui vont à la télévision dire que c'est un désastre. Pour moi, c'est une opportunité. Si toute la calotte glaciaire du Groenland se met à fondre dans l'océan, est-ce que le niveau de l'océan montera? Oui, il montera, et il montera du niveau que disent les scientifiques, mais nos modèles ne sont pas très bons.
    L'une des raisons pour lesquelles nous faisons pression pour inclure une mission PolarSat dans le prochain budget, et vous verrez cela dans le prochain cycle budgétaire, est qu'elle nous permettrait de mesurer les caractéristiques climatiques du Grand Nord à distance.
    L'Europe a beaucoup de satellites qui volent à basse altitude et mesurent le changement climatique, mais seulement de manière parcellaire. Notre objectif est de placer un satellite en orbite géosynchrone pour pouvoir faire des mesures globales. En améliorant les données du Grand Nord, nous améliorons les données transmises au sud et nous améliorons les modèles. Nous améliorons notre capacité à prévoir le changement climatique. C'est là que les différents pays devraient investir, à mon avis. Le Canada devrait participer à ça. En fait, l'ONU a fait une analyse des écarts et le deuxième satellite le plus important que l'ONU aimerait voir dans le ciel est un satellite auquel le Canada pourrait contribuer.
    Il n'y a pas eu d'engagement à ce sujet. C'est une discussion. L'objectif est d'obtenir ces données, de mesurer le changement climatique, de façon à améliorer les modèles et à donner aux dirigeants de la nation les réponses dont ils ont besoin pour pouvoir formuler les bonnes politiques.
    Merci beaucoup de votre réponse.
    Je donne la parole à M. Masse.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être venus informer le comité sur ce travail très important.
    Je suis cependant choqué. Je ne sais pas comment vous pouvez dire que la disparition de certaines espèces n'est pas un désastre. Je trouve ça vraiment assez choquant parce que c'est ça le résultat ultime du phénomène, qu'on l'appelle le changement climatique ou autre chose. Nous voyons un changement mondial. Les plantes, les animaux et la race humaine vont se trouver dans un environnement totalement différent. J'en reste là pour le moment.
    Je voudrais revenir sur ce que vous avez dit auparavant. En ce qui concerne le budget principal, l'agence spatiale a demandé 390 millions de dollars au gouvernement et en a reçu 110. Quel effet cela aura-t-il sur le plan du travail que vous exécutez? Qu'est-ce que vous ne pourrez pas faire à cause des 300 millions de dollars en moins?

  (1015)  

    Quand on m'a nommé, j'ai reçu le mandat de dresser un plan sur ce ce que ce pays devrait faire dans l'espace.
     Nous sommes actuellement dans une situation budgétaire assez difficile. Dans le budget de 2009, nous avons reçu 110 millions de dollars. Cette somme est destinée à combler l'écart entre l'exploration que nous faisons depuis 1986, lorsque nos activités en robotique procédaient d'un mandat du gouvernement du Canada, et le coût que nous avons calculé pour la prochaine décision importante à prendre en matière d'exploration. Donc, ces 110 millions de dollars étaient pour la robotique.
    Le gros élément suivant du plan est la mission de constellations RADARSAT, qui est une série de missions pour faire des mesures qui contribueront à notre souveraineté et à notre sécurité, et qui contribueront aussi aux pêches et aux océans, dans le cadre de notre activité en agriculture et en agroalimentaire. C'est l'un des quatre satellites dont nous avons besoin pour faire ça.
    Pour ce système, il y avait 397 millions de dollars dans le budget de 2010, et on nous a demandé de trouver 100 millions de plus dans nos ressources existantes. C'était le coût du programme sur cinq ans. Le coût réel de ce système satellitaire sera d'environ 897 millions de dollars.
     Le grand projet dans lequel nous devrions investir ensuite, à mon avis, serait une constellation PolarSat. Il s'agit d'une série de deux satellites qui amèneront l'Internet à haute capacité dans le Grand Nord. Ça n'existe pas pour le moment. Anik F2 fonctionne bien à 60° de latitude et fonctionne par intermittences jusqu'à 70°, à peu près, et il faut améliorer ça. Notre thèse est que le développement du Nord canadien se fera plus rapidement si l'on bâtit la bonne infrastructure.
    Le deuxième objectif de ce système satellitaire est climatique. Actuellement, il n'y a pas de satellite climatique sur le Grand Nord. On a des données partielles sur le climat. L'Europe a des satellites climatiques qui volent à basse altitude mais ils ne fournissent que des données partielles. Il n'y a pas de satellites de type NOAA en orbite au-dessus de l'équateur. Nous avons des informations sur le climat jusqu'à environ 55°. Nous n'en avons pas pour le Nord et ce satellite climatique contribuera à l'Organisation météorologique mondiale, sans compter qu'il améliorera tous les modèles dont je parlais.
    Ensuite, il y a le changement climatique, qui est important pour l'Agence spatiale canadienne. Je mentionnais il y a un instant les gens qui en parlent à la télévision. Il y a des différences. C'est un dossier important. C'est une priorité pour le pays mais il faut des données exactes. Nous ne pouvons pas être tenus en otages par quelqu'un qui nous menace avec des données qui sont fausses. C'est tout ce que je voulais dire. Je ne disais pas que ce n'est pas un problème. La troisième portion du PolarSat est cette capacité particulière de nous donner de meilleures mesures de ce qui se passe réellement du point de vue du changement climatique.
    Vous avez dit que l'administration Obama fournira environ 6 milliards de dollars pour cela. Il se trouve que c'est le chiffre de mise en oeuvre de la TVH. C'est une question de choix.
    J'aimerais savoir pourquoi personne n'est retourné sur la Lune. On dit que c'était un accomplissement important pour l'humanité, bien sûr, mais Obama regarde plus vers Mars. Pourquoi personne n'est-il retourné sur la Lune? Est-ce que ça ne présente aucun intérêt, si ce n'est sur le plan symbolique, ou est-ce parce qu'on estime avoir plus à gagner à aller sur Mars?
    Je pense que ce que vous avez fait est important. Vous avez abordé certains éléments très concrets en parlant des différentes choses qui manquent dans le système. Les gens n'en sont pas conscients. Si vous allez dans l'épicerie du coin et demandez aux gens pourquoi nous devrions aller dans l'espace, que vous diront-ils? Vous avez mentionné des choses très concrètes qui sont très cohérentes, des choses qui concernent la vie quotidienne des gens.
    Pourquoi Mars plutôt que la Lune?
    C'est une question difficile. Je vais vous indiquer ce que nous savons actuellement au sujet de la Lune.
    Du point de vue canadien, la réponse est simple. Nous n'avons pas de communauté lunaire tellement importante alors que nous avons une grande communauté martienne universitaire. Du point de vue canadien, ma décision est facile à prendre. Si vous me demandiez ma recommandation, je pourrais facilement laisser la Lune de côté à cause de cela.
    D'un point de vue mondial, c'est un peu différent. Dans le Bassin d'Aitken, au pôle Sud de la Lune, on pense actuellement qu'il y a un lac. Il est gelé. Il est un peu souterrain. Il fait 965 kilomètres de large. On apprend aussi des choses intéressantes avec le régolite de la Lune et il y aurait donc des raisons techniques et scientifiques d'y aller. Si nous allons sur la Lune, cela nous permettra de tester notre équipement car ce n'est que trois jours de voyage. Si nous allons d'abord sur la Lune, nous pourrons vraiment améliorer les chances de survie du premier équipage qui ira sur Mars. Il y a tout un débat à ce sujet.
    Voyons maintenant ce que nous savons de Mars. Mars a une atmosphère. Mars a un système climatique. Mars a des océans, qui se sont évaporés. Il est possible — c'est en cours de discussion et je ne donne pas de réponse — que nous en apprendrons plus sur notre Terre en allant d'abord sur Mars.
    Je vous ai parlé de l'instrument optique qui vole actuellement en orbite et dont l'ONU aimerait qu'il y en ait plus. Nous pouvons l'envoyer tourner autour de Mars. Nous apprendrons ainsi les caractéristiques de la planète Mars et nous pourrons utiliser ces données pour améliorer ce qui pourrait se passer sur la planète Terre.
     Il y a un champ magnétique sur Mars. Il n'y a pas de champ magnétique d'importance sur la Lune. Par conséquent, étudier ce qu'on appelle le flux d'électrons sortant de l'atmosphère martienne serait très important car c'est différent de ce que... Il y a un échange dynamique dans l'atmosphère spatiale, que nous mesurons. C'est différent dans l'atmosphère martienne et dans l'atmosphère terrestre. Il est important de faire ce genre de mesures pour mieux comprendre notre propre planète.
    D'un point de vue canadien, si nous pouvions convaincre les autorités de dépenser un certain nombre de millions de dollars, aller sur un astéroïde est une chose que nous pourrions faire car le delta-v — c'est la vélocité delta — pour aller sur un astéroïde est petit. Concevoir quelque chose pour atterrir à distance sur Mars coûterait trop cher considérant les sommes que le gouvernement canadien serait prêt à y consacrer.
    Il y a toutes sortes de raisons différentes de faire une chose ou l'autre. Parfois, c'est la Lune qui sort gagnante. Internationalement, on juge parfois que ce serait plus intelligent d'aller sur la Lune et, parfois, sur Mars. D'un point de vue canadien, Mars et les astéroïdes représenteraient aussi une décision plus brillante pour stimuler l'innovation dans notre pays.

  (1020)  

    Très bien.
    Une dernière brève question. Il y a une chose qui intrigue beaucoup mes électeurs, et ce ne sont pas les seuls. Je vous rappelle que vous témoignez sous serment, ici. Est-ce que la nourriture spatiale est bonne?
    Des voix: Oh!
    M. Brian Masse: Nous voyons ces aliments spatiaux conditionnés mais je voudrais savoir si c'est vraiment bon. Ce n'est pas que j'en achète mais on aimerait savoir.
    Bob, je vais vous laisser y aller mais je vais commencer.
    L'estomac s'arrête quand on entre en orbite. Tous les systèmes ralentissent un peu leur fonctionnement et le HCI que sécrète l'intérieur de l'estomac pour digérer les aliments ne fonctionne plus tout à fait de la même manière qu'auparavant. De ce fait, la meilleure chose à prendre quand on arrive là-haut — tout le monde n'est pas d'accord et c'est une donnée un peu anecdotique —, c'est du cocktail de crevettes avec autant de raifort que possible. Si vous faites ça, ça relance votre estomac.
    Je peux vous dire que le cocktail de crevettes a un goût excellent quand on se trouve pour la première fois en orbite. Par contre, les crevettes ont alors une consistance de carton. C'est le compromis à accepter.
    Vous n'aurez aucun problème dans les réceptions à Ottawa.
    Des voix: Oh!
    Merci, monsieur Masse.
    Monsieur McTeague, vous avez la parole.
    Dans ce contexte, Brian posait une excellente question lorsque nous arrivions. Il se demandait comment les astronautes servent leurs repas dans l'espace. Mike Lake et Mike Wallace se sont tous deux exclamés : « Sur une soucoupe volante ».
    Merci d'être ici, messieurs. Comme beaucoup, nous avons grandi dans l'ombre de la grandeur des astronautes et avons voulu être des astronautes. Certains d'entre nous n'y sommes pas tout à fait arrivés. Nous avons fini députés, ce que nous croyons être une noble activité et, bien sûr, M. Garneau nous en a donné la preuve. Il n'est pas ici en ce moment mais c'est vrai.
    Je m'intéresse à la déclaration du président Obama et à votre interaction avec la station spatiale dans sa relation avec les astéroïdes proches de la Terre. Je voudrais une meilleure description de ce dont on parle à ce sujet et de l'intention réelle. Je suppose qu'il y a un certain nombre d'astéroïdes à portée de notre planète qu'on pourrait atteindre par la navette ou avec d'autres formes de fusées. Est-ce qu'on a l'intention, comme je le pense, de faire atterrir quelqu'un sur un astéroïde dans un but d'exploitation de produits ou de compréhension des astéroïdes?
    L'un d'entre vous pourrait-il répondre à cette question? Cette idée me fascine.

  (1025)  

    J'essaie de me souvenir du chiffre. Je crois qu'il y a 3 800 astéroïdes catalogués entre les orbites de Mars et de Jupiter. Certains ont une taille égale au tiers ou à la moitié de notre lune. D'autres sont beaucoup plus petits, certains n'ayant que la taille d'un terrain de football en diamètre elliptique. On en trouve chaque jour de nouveaux.
    L'une des raisons d'aller sur un astéroïde — je vais être ésotérique pendant une seconde — est de se placer en orbite de transfert pour aller ailleurs. Il y a une orbite et on adapte votre orbite pour le moment où elle sera dans cette section afin d'atterrir sur l'astéroïde. Ensuite, on peut partir de là pour aller ailleurs dans l'espace observer une partie différente de l'espace ou des choses qui sont un peu différentes.
    On ne comprend pas très bien pourquoi il y a tant d'astéroïdes. Il y a de nombreuses théories sur les origines de la Lune et il y en a aussi sur les origines des astéroïdes, mais c'est une chose qu'on ne comprend pas encore très bien.
     D'un point de vue scientifique, il est important d'y aller. On peut y envoyer des robots au lieu d'êtres humains, et on l'a déjà fait. Les Japonais sont allés à un astéroïde. Les Américains sont allés à une comète, qui est une agglomération de roches et de glace. Ce n'est pas la même chose qu'un astéroïde. En théorie, un astéroïde était autrefois un corps planétaire, tout comme la Terre ou Mars.
    Si l'on veut aller sur un astéroïde, c'est pour comprendre notre monde au-delà de l'orbite terrestre basse. Nous ne comprenons pas très bien cette partie de l'espace. L'une des raisons pour lesquelles nous volons à 300 ou 400 kilomètres, comme l'a dit Bob, est qu'il y a une atmosphère à cette altitude. C'est presque le vide mais il y a des atomes solitaires et des électrons solitaires là-bas. Il n'y a pas une seule molécule d'oxygène mais il y a des atomes d'oxygène. Ici, dans notre espace, il y en a 10 à la puissance 23. Là-bas, dans l'espace, il y en a quelque chose comme 10 à la puissance 10 ou 10 à la puissance 6, dépendant de l'altitude. Cela cause de la traînée, comme l'a dit Bob, mais cela nous protège aussi des rayonnements ionisants.
    Il est important pour nous d'aller à l'extérieur de l'environnement protecteur de la terre pour voir si nous pourrions fonctionner au-delà. Nous avons cette question de nos satellites géosynchrones qui montent jusqu'à une altitude de 36 000 kilomètres. Il faut renforcer leur électronique pour qu'elle résiste aux rayonnements, par rapport à ceux qui sont plus bas.
    Votre dernière remarque concernait l'exploitation. C'est une question à laquelle il est très difficile de répondre à cause des coûts de transport pour renvoyer ça sur Terre.
    Veuillez m'excuser. A-t-on fait des calculs sur le risque qu'un de ces astéroïdes devienne dangereux dans sa proximité de la Terre?
    Oui, on en a fait. En fait, celui où ils vont aller, et je pense que c'est une coïncidence, est Apophis. Il y a un point focal où il se trouvera entre la Terre et la Lune en 2036. Je me trompe peut-être sur l'année. À ce moment-là, s'il arrive dans ce point focal... Le point focal est un secteur de l'espace défini par l'orbite qu'il suit pour y revenir au cycle suivant. L'ONU a identifié Apophis comme étant celui qui a le plus de chance, à notre connaissance, de faire cela. Je dois cependant dire que la marge d'erreur dans ces calculs est très élevée.
    J'aborde maintenant un secteur dont vous ne souhaitez peut-être pas parler mais qui m'intéresse beaucoup, comme tous les parlementaires, je crois.
    Ai-je raison de dire que votre budget n'a pas augmenté de manière notable, ou pas du tout, depuis 1999? Autrement dit, le budget que vous aviez à l'origine, nonobstant vos demandes, n'a pas été modifié, ne serait-ce que pour refléter la valeur du dollar canadien de 1999 en termes réels...

  (1030)  

    Exact. Je peux vous donner des chiffres. C'est si je vous donne une opinion personnelle que j'entre peut-être dans un terrain un peu dangereux, mais je peux vous donner les chiffres. C'est le budget de l'ASC seulement. En 1997, c'était 496 millions de dollars. Quand nous avons été promulgués comme agence, on nous a donné un budget de 300 millions de dollars. J'étais au fond de la salle à l'époque, et l'idée était que l'Agence spatiale canadienne recevrait un budget de 300 millions et qu'il y aurait ensuite une série de projets importants de la Couronne qui pourraient le porter jusqu'à 600 ou 700 millions.
    Je pense que les dirigeants de l'ASC de l'époque ont fait un bon travail pour obtenir l'accord leur permettant d'avoir un budget de base de 300 millions puis un budget de projets de 300 à 500 millions.
    Évidemment, le budget de projets ne s'est jamais matérialisé. En outre, notre budget de base a évolué comme ceci — vers le bas. Cette année, notre budget était de 358 millions de dollars, ce qui comprend des sommes au titre du programme de relance économique. Voilà pourquoi c'est un peu plus que 300 millions. Avec l'examen stratégique, on prévoit que ce sera 278 millions dans deux ou trois ans. Si nous voulons être une nation spatiale à la hauteur, il nous faut beaucoup plus.
     Merci beaucoup, monsieur MacLean.
    Vous avez la parole, monsieur Wallace.
    Je serai très bref. J'ai quatre questions. Je fais aussi partie du Comité des finances et je vais donc contester un peu ces chiffres.
    La somme que nous avons sous les yeux dans le budget de l'année à venir est de 390 millions de dollars, tout compris. Vous avez raison de dire que c'était 355 millions environ en 2009-2010. C'était 378 millions l'année suivante, et ça recommence à baisser ensuite. Vous avez raison de dire que ça descend jusqu'à 312 millions.
    Toutefois, c'était 390 millions parce qu'il y a eu des réaffectations de crédits.
    L'un des problèmes de l'Agence — et de toutes les agences spatiales au monde — est que nous travaillons sur des projets internationaux. Donc, si nous avons un grand projet de 1 milliard de dollars, comme pour la station spatiale, et qu'il y a un retard d'une année, nous devons réaffecter des sommes substantielles sur l'année suivante. Notre budget est de 358 millions de dollars mais les réaffectations de crédits sur l'année suivante le portent à...
    Mais, monsieur, les réaffectations se font à l'intérieur de l'agence. Si le projet ne décolle pas et que vous ne dépensez pas l'argent l'année prévue, vous devez le réaffecter. Le simple fait que l'argent vous ait été accordé ne veut pas dire que vous allez le conserver si le projet ne se réalise pas.
    Si nous ne pouvons pas le réaffecter sur l'année suivante, c'est vrai.
    Mon argument en réponse à M. Masse est que vous avez effectivement 390 millions de dollars cette année, pour 721 ETP. Ça monte un peu l'année prochaine et ça baisse un peu l'année suivante.
    Oui, et vous verrez que ça descendra à environ 280 millions dans cinq ans.
    Écoutez, je n'ai que trois ans devant moi.
     Je m'adresse maintenant à M. Wakata. Konnichiwa.
    Le gouvernement du Japon a changé, au bout de 40 ans. Le nouveau gouvernement est-il aussi engagé que le précédent à l'égard du programme spatial?
    L'engagement du gouvernement est le même et, maintenant, avec la proposition de M. Obama de prolonger la station spatiale internationale de cinq ans, jusqu'en 2020, la question de savoir s'il vaut la peine de prolonger la vie de la station spatiale fait actuellement l'objet de vifs débats au Japon tout comme au Canada et en Europe.
    Jusqu'à présent, l'appui du public a été très solide, surtout l'an dernier lorsque six d'entre nous ont été dans l'espace. Nous avons actuellement un astronaute japonais dans l'espace pour une mission de longue durée, et nous y avions une astronaute japonaise le mois dernier. Il y a eu deux Japonais dans l'espace en même temps. C'était une première. L'an dernier, c'étaient Julie et Bob qui volaient en même temps.
    Quoi qu'il en soit, l'appui de la population est très solide pour le moment.
    Le gouvernement avait-il pris position à ce sujet pendant les élections?
    En général, il y est très favorable. En ce qui concerne l'exploration, j'étais il y a deux semaines avec le ministre des Sciences du Japon à l'occasion d'un symposium sur la question de savoir si nous devrions aller sur la Lune ou sur Mars. Pour le moment, l'intérêt du Japon pour la Lune est très fort.
    Bien. Arigatou gozaimasu.
    On a parlé d'Obama et de la prolongation mais il faut essayer d'être franc parce que la situation financière des États-Unis est très mauvaise. Un jour ou l'autre, ils vont devoir prendre le taureau par les cornes et commencer à se pencher sur leur dette et leur déficit. Je ne sais pas quand cela arrivera mais ça risque d'arriver.
    Si les États-Unis décident de réduire leurs dépenses spatiales, quelles seront les conséquences pour l'Agence spatiale canadienne? Pourriez-vous survivre sans la part de leur PIB qu'ils dépensent maintenant?

  (1035)  

    La relation avec la NASA représente environ 70 p. 100 de notre budget. La relation avec l'ASE, environ 30 p. 100. En outre, bien que ce soit un petit pourcentage, nous avons quelques projets très intéressants avec le Japon.
    Nous n'avons pas accès à l'espace. Actuellement, nous dépendons de la Russie et des États-Unis pour aller dans l'espace. L'Inde nous aide également avec quelques projets.
    Si un grand partenaire comme les États-Unis décidait de ne pas créer de véhicule spatial pendant plusieurs années, cela nous fixerait au sol. L'une des manières dont j'envisage notre partenariat en exploration, dans un sens, est que nous attendons l'invitation des États-Unis à participer à cette grande aventure de l'espace mais, s'ils décident de ne pas entreprendre cette grande aventure, il nous sera difficile de contribuer de manière importante. Ce serait très grave pour nous.
    Les États-Unis sont un grand partenaire, évidemment. Envisagez-vous d'autres partenariats avec d'autres pays au cas où ils décidaient de ne pas y aller?
    Oui. En fait, notre industrie parle déjà à la Turquie, que vous avez mentionnée. C'est une nation émergente qui a l'intention de consacrer de l'argent à des satellites d'observation terrestre. Notre industrie lui parle, ainsi qu'au Brésil et même à Doubaï. Doubaï est très intéressé à obtenir une capacité d'observation là-haut.
    Je vais vous montrer quelque chose. Nous sommes tous au courant de la crise financière. Je ne veux pas en faire un cliché mais je crois que nous ne sommes pas... Si nous faisons ce que nous disons dans notre plan — par exemple, l'agriculture de précision, l'observation des côtes, la science océanique et l'amélioration des capacités des océans —, nous ne contribuerons pas seulement à résoudre cette crise économique, nous contribuerons aussi à la croissance économique et à la relance de l'économie.
    Les chiffres sont très convaincants. En agriculture, les chiffres sont très convaincants. Les chiffres dans le secteur militaire pour assurer la sécurité du pays en utilisant plus de ressources spatiales et de manière plus intégrée sont très convaincants, et je pense que si nous réalisons ce plan, nous aiderons le monde à sortir de cette débâcle financière.
    Une dernière question d'intérêt personnel. C'est sur le sommeil dans l'espace. Est-ce que votre besoin de sommeil change? Actuellement, vous avez besoin de six, sept ou huit heures de sommeil. Je sais que vous devez faire de la musculation. Est-ce que votre sommeil change? Est-ce que vous devez éteindre les lumières pour vous dire que c'est la nuit pour dormir?
    Si vous aimez le camping, vous aimeriez être astronaute car beaucoup des choses qu'il faut faire sont les mêmes qu'en camping. On mange des aliments lyophilisés, on n'a pas d'eau courante, on n'a pas de réfrigérateur ou de congélateur, et on dort dans des sacs de couchage. Généralement, on dort dans des sacs de couchage. Moi, je dormais dans un sac de couchage attaché à la paroi d'une station de sommeil. Quand vous êtes dans un milieu neutre sans pesanteur, votre corps a tendance à prendre la position foetale. Vous êtes totalement détendu. Il n'y a aucune pression du matelas sur votre corps. Chaque soir, je prenais mon iPod pour écouter de la musique et je m'endormais dès la première chanson. Je dormais très bien.
     Lors d'un vol précédent, nous avions fait des études du sommeil avec des EEG et avions constaté une chose. Vous savez probablement qu'il y a plusieurs phases de sommeil. Il y a une phase qui est associée aux ondes delta dans les EEG. Dans l'espace, nous perdons cette phase du sommeil, et c'est la phase de repos. Donc, je me réveillais chaque jour assez fatigué.
    Par contre, s'endormir n'était pas un problème. Je me réveillais fatigué le matin mais, vous savez, je me disais ensuite : « Bon Dieu, je suis dans l'espace ! »
    Des voix: Oh!
    Merci beaucoup.
    Et cela me revigorait.
    Au fait, certaines des études sur le sommeil sont canadiennes, de Toronto.
    Merci beaucoup, monsieur Thirsk.
    Vous avez la parole, madame Lavallée.

[Français]

    Je ne suis pas un membre habituel de ce comité — je commence à le devenir, mais je ne suis en réalité qu'un membre substitut de ce comité. Je siège plutôt au Comité permanent du patrimoine canadien. Je suis ici particulièrement parce que l'Agence spatiale canadienne m'intéresse. Son siège social se trouve dans mon comté, Saint-Bruno—Saint-Hubert. Alors vous comprendrez que la nature de mes questions sera un peu différente.
    J'ai aussi un peu envie de m'excuser, parce que je sais — je suis assez intelligente pour le savoir — que vous jouez dans les hautes sphères, si je puis dire, autant dans le domaine spatial que dans le domaine politique. À Saint-Hubert, on a immensément de respect pour la grandeur de vos projets, leur utilité et leur complexité. On est vraiment très fiers de vous. Vous inspirez le respect partout sur la rive Sud.
    Vous avez la tête dans l'espace, mais, bien entendu, les pieds à Saint-Hubert. On dit aussi, à Saint-Hubert, qu'on est la région de l'« aéro »: il y a un aéroport dont on est également très fiers, on a l'École nationale d'aérotechnique qui forme des techniciens en aéronautique, de même que Pratt & Whitney et toute la panoplie d'entreprises aérospatiales. On est très fiers d'avoir chez nous l'Agence spatiale canadienne.
    Cependant, il n'y a presque aucun contact avec la région. Moi-même, à titre de députée, j'ai déjà écrit à un de vos prédécesseurs — qui n'était pas Marc Garneau — et celui-ci ne m'a même pas répondu. À un moment donné, l'espèce de commissaire industriel de la région, Jacques Spencer, a voulu communiquer avec l'Agence spatiale canadienne. Je l'ai invité à Ottawa et je l'ai présenté à Marc Garneau, qui lui a ouvert une porte chez vous, monsieur MacLean, et je vous en remercie beaucoup. Depuis, le projet de développement économique va bon train. Cela dit, vous comprendrez que ce n'est pas la bonne façon de fonctionner.
     Les gens de la région sont très sensibilisés à l'aérospatiale; ils ont des projets en aérospatiale de tous les genres. Il y a le développement économique, mais aussi des développements culturels qu'on voudrait faire. On a également des organismes qui font la promotion auprès des jeunes de tous les métiers de l'aérospatiale, y compris celui d'astronaute.
    Mes concitoyens m'en voudraient de ne pas vous poser la question que je vais vous poser aujourd'hui. En effet, je me sens obligée de vous la poser: que faut-il que je fasse, comme députée de Saint-Bruno—Saint-Hubert, pour instaurer une nouvelle collaboration entre la région et l'Agence spatiale canadienne, pour que ses dirigeants, ou les gens que vous délégueriez, aient envie de voir ce qui se passe dans la région et de nous raconter ce que vous faites? Comment peut-il y avoir une certaine collaboration?

  (1040)  

    En premier lieu, je dois dire que le travail effectué par la région autour de l'aéroport de Saint-Hubert est vraiment impressionnant. Je suis dans la région depuis 20 ans. Je viens d'Ottawa, mais je connais la région de la rive Sud depuis 1972.
    Je ne sais pas exactement, mais les mandats de rayonnement et de promotion sont des choses très importantes pour l'Agence spatiale canadienne. À ce jour, on a du matériel dans 40 000 salles de classe dans 25 000 écoles un peu partout au Canada. On essaie de faire un bon travail à cet égard.
    On dit que l'espace est comme un aimant pour le talent, qu'il stimule l'innovation. Or, on n'a pas un grand budget pour ça. Je pense que le budget alloué à la communication est d'environ 6 millions de dollars par année, ce qui n'est pas beaucoup, comparativement à la NASA qui consacre 150 millions de dollars à l'éducation. Ainsi, c'est difficile à faire.
    Cela dit, on essaie d'améliorer cette situation. On est fiers d'être à Saint-Bruno, à Saint-Hubert, à Saint-Lambert. La région est très jolie, avec ses montagnes. Cette année, on a décidé d'organiser une exposition qui a commencé il y a deux semaines. Je ne sais pas si vous êtes passée près de l'agence au cours des deux dernières semaines. Il y a une grande tente qui fera office de musée.
    Je ne le savais même pas.
    Oui, c'est comme un musée.
    Personne ne m'a invitée. Personne ne me l'a dit. Ce n'est pas écrit dans les journaux.
    Ce n'est pas encore commencé; ça commencera en juin.
    Une voix: Ce sera annoncé cette semaine. Ce n'est pas ouvert.
    M. Steve MacLean: Ce n'est pas ouvert, mais la tente est là.
    Ce que j'aimerais faire, c'est ériger un musée dans la région de Saint-Hubert. On parlait de nos réalisations dans le domaine médical. On fait beaucoup de travail sur le plan des systèmes cardiovasculaire, immunitaire et neurologique. Les données sont impressionnantes dans ces domaines. Il faut les expliquer à tout le monde. Il faut offrir une formation pour que tout le monde comprenne qu'il est très important d'investir dans l'espace. C'est ce qu'on va faire.
    La dernière chose que je veux faire aussi est de vous inviter à venir nous rendre visite. Vous serez mon invitée spéciale, spatiale.

  (1045)  

    Monsieur MacLean, j'ai été obligée de m'inscrire à une visite guidée offerte dans le cadre d'un colloque qui a eu lieu à Saint-Hyacinthe pour pouvoir aller visiter l'Agence spatiale canadienne. J'y vais en août. Toutefois, si vous m'offrez une autre visite, ça me fera immensément plaisir.
    Je veux seulement vous faire comprendre que vos voisins sont vos alliés, à tous égards. On veut collaborer avec vous, mais on veut être en contact avec des gens de l'agence, pour pouvoir faire des choses ensemble. Pour ce qui est de votre musée, vous ne pouvez pas savoir à quel point je suis favorable à son développement. Il y a aussi d'autres projets en ébullition et on aimerait les partager.
    On n'a pas nécessairement besoin d'argent. Ce n'est pas une question d'argent, c'est seulement une question de collaboration. On doit se parler et pouvoir développer ensemble des projets, pour que les gens de chez nous connaissent mieux les gens de chez vous et vice-versa.
    Je vais vous donner mon adresse. Ainsi, vous pourrez m'inscrire à votre liste d'invitation.
    Merci.
    Merci, madame Lavallée et monsieur MacLean.
    Monsieur Lake.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président, et merci à tous nos invités. On peut dire que c'est une séance vraiment intéressante.
    Monsieur MacLean, je reviens sur cette question de budget, simplement parce que je veux éclaircir un peu la situation qui me semble assez confuse, comme ces questions ont tendance à l'être. Les chiffres que vous avez mentionnés sont ceux du budget de base, j'imagine, et les 110 millions de dollars dont vous avez parlé du budget de 1009 serez donc additionnels...
    Les chiffres qu'il a donnés sont les totaux. Les 300 millions sont une base et, quand on arrive aux 358 millions... Les 390 millions de dollars sont les réaffectations. Ceux-là font partie d'un budget de relance et le reliquat du vieux projet.
    Est-ce que les 110 millions du budget de 2009 et les 397 millions sur cinq ans du budget de 2010 représentent les fonds de projets dont vous parliez, les fonds supplémentaires?
    Oui.
    Il y a donc une conversation qui continue. C'est de cela que ça fait partie, en relation à ce qu'il pourrait peut-être y avoir dans des budgets futurs ou non.
    Je pense que votre argument est qu'il y a certaines choses que nous pourrions vouloir envisager à l'avenir, si je vous comprends bien.
    Si vous voulez faire un travail de premier ordre dans certains des exemples que j'ai mentionnés — si nous parlons d'agriculture, si nous parlons de science océanique,si nous parlons de sécurité et de souveraineté, si nous parlons de notre rôle éventuel en exploration —, nous parlons d'un budget supplémentaire de 2 milliards de dollars sur cinq ans. C'est ce qui nous amènera à la table. Cela stimulerait l'innovation, et la raison en est qu'un plan, quel qu'il soit, ne peut pas être qu'une liste de projets car, si ce n'est qu'une liste de projets, vous n'êtes qu'une liste de projets.
     Ce qu'il faut faire, c'est avoir une série de programmes qui, intégrés, répondent à une priorité. Par exemple, l'agriculture de précision exige quatre satellites différents, dont un pour mesurer les précipitations, un pour mesurer l'humidité du sol, et un pour mesurer le cycle de vie de la récolte. À l'heure actuelle, nous mesurons la vitesse de croissance du blé au Canada. Nous donnons les informations chaque semaine à Agriculture Canada, et la Commission canadienne du blé s'en sert pour fixer le prix du blé. Nous lui disons à quelle vitesse pousse le blé en Chine et en Russie. Avoir ces données est un moteur économique très important mais, si nous voulons que tout le plan fonctionne, nous devons intégrer ces données de plusieurs secteurs différents et, pour faire cela, dans une première étape, il faudra 2 milliards de plus sur cinq ans.
    Je reviens sur ce que vous avez dit du changement climatique car j'ai trouvé cela très intéressant.
    Il est toujours un peu dangereux d'aborder cette question. J'ai eu l'impression que vous disiez en réalité que vous tenez compte des données probantes et des opportunités qui existent par le truchement de nos efforts dans l'espace pour essayer de cerner les lacunes des données probantes, dans un sens, de façon à faire en sorte que nos décisions soient fondées sur des données réelles. Peut-être pourriez-vous nous donner quelques précisions sur les données probantes concernant le changement climatique?

  (1050)  

    C'est un domaine fascinant parce que le changement climatique est vraiment une opportunité. Mon opinion est que l'atmosphère est fragile, très fragile. D'après les photos que Bob, Franck et Koichi vous ont montrées, c'est incroyablement mince. L'analyse des particules de cette couche atmosphérique incroyablement mince est très importante. Nous savons, d'après le trou d'ozone, que si l'on change ne serait-ce qu'un tout petit peu la concentration de chlore, on change en réalité combien il y a d'ozone là-haut et on change combien de lumière touche la surface de la Terre.
    Ce qu'il importe de faire, c'est de mesurer cela avec exactitude. Pour les Jeux olympiques de Chine, nous avons installé sept instruments optiques sur les collines entourant Beijing. Quand les Chinois fermaient une usine, nous pouvions mesurer les conséquences sur l'air ambiant. Quand ils en fermaient une autre, puis encore une autre, nous pouvions mesurer ce que ça faisait sur l'air. Ce qu'ils faisaient, c'est qu'ils optimisaient les usines qu'ils devaient fermer pour donner l'impression que l'air était propre...
    Des voix: Oh!
    M. Steve MacLean: ... au-dessus de Beijing pendant ces deux semaines. L'air n'est pas propre au dessus de Beijing, on peut le voir quand on est dans l'espace.
    Il y aura des changements. Il y aura de la fonte de glaces dans le Nord. C'est clair. Il y aura des changements du niveau des océans, dépendant de ce qui arrivera.
    Ma position à ce sujet comprend deux éléments. Premièrement, nous devons cesser de rejeter des éléments dans l'atmosphère parce que nous ne savons pas quelles en sont les conséquences. Nous devons donc simplement minimiser cela. Nous devons chercher de nouvelles ressources renouvelables. Il est très important de comprendre comment produire de l'énergie sans avoir d'émissions de combustibles fossiles.
    Deuxièmement, il nous faut des données probantes pour pouvoir décider où situer le développement. Le Canada avancera vers le Nord dans les 30 prochaines années à cause du changement climatique. Quand vous aurez des données probantes vous permettant de comprendre le climat, la géologie et l'infrastructure — quand je parle d'infrastructure, je parle de composition du sol —, vous saurez où il faut aller là-bas.
    Mon sentiment est que les gens iront si nous commençons à y construire. C'est comme avec le chemin de fer, c'est quand il a été construit que nous sommes allés dans l'Ouest. Si nous construisons une infrastructure spatiale pour avoir des communications et des informations sur le climat, nous nous développerons beaucoup plus vite dans le Nord, et je pense que c'est quelque chose qui n'est pas seulement puissant mais aussi visionnaire.
    Bien.
    Je reviens sur cette question d'argent. Je saute un peu d'un sujet à l'autre mais je veux terminer là-dessus parce que c'est intéressant. En vous adressant à nous aujourd'hui, vous vous adressez évidemment aussi aux Canadiens qui vous suivent en direct et pourront prendre connaissance de votre témoignage.
    Vous parlez de 2 milliards de dollars sur cinq ans. C'est le chiffre que vous avez mentionné et c'est une somme non négligeable. Évidemment, le Canada a la réputation mondiale d'avoir assez bien géré cette crise mondiale que nous venons de traverser et d'avoir un gouvernement qui a géré les finances publiques avec prudence au cours des années.
    Quel argument présenteriez-vous à l'électeur canadien lambda assis dans son salon et calculant ses impôts pour le convaincre que nous devrions prendre 2 milliards de dollars de son argent afin de le donner à l'Agence spatiale canadienne pour qu'elle fasse les choses dont vous avez parlé?
    Vous savez quoi? Ce qui est intéressant quand on essaie de répondre à des questions de ce genre, c'est que les gens s'attendent toujours à ce qu'on le fasse en 10 secondes et en une seule phrase. Une réponse de 10 secondes, c'est bon pour la télévision mais ce n'est pas bon pour la planification stratégique. Donc, la solution, c'est de donner l'exemple de quelque chose qui est important pour les Canadiens afin de leur montrer ce que l'espace peut leur apporter, et de leur donner ensuite un autre exemple, et puis encore un autre.
    Prenez la sécurité de nos côtes. Nos militaires et nos agents de la sécurité publique, qui font partie de plusieurs ministères différents, comme vous le savez, protègent très bien nos approches maritimes à l'ouest et à l'est. Nous avons cependant un trou noir au nord. Nous n'avons pas là-bas la protection requise.
    L'espace ne peut être qu'une solution partielle car il faut des ressources intégrées pour assurer la sécurité de l'ensemble du pays, mais l'espace, si nous investissons comme nous disons qu'il faudrait le faire, nous aidera à rehausser très bien la sécurité de nos côtes. Nous avons un système qui nous permet de voir tous les navires circulant dans le monde et ce qu'ils font. C'est quelque chose qui est important non seulement pour le Canada mais pour le monde entier. Voilà pour la sécurité.
     Voici maintenant un exemple qui trouvera plus d'écho dans la population. Nous avons parlé d'agriculture pendant toute la matinée. C'est énorme. On peut changer le PIB d'un pays simplement en utilisant les ressources de l'espace. C'est difficile à faire, c'est difficile de changer comment les gens pensent culturellement, mais c'est faisable parce que les données sont maintenant convaincantes. Ce que nous disent les données sur les cultures est très convaincant.
    C'est la même chose en foresterie. Nous perdons chaque année des forêts au Canada. Je crois que c'est équivalent à quatre fois la superficie de l'Île-du-Prince-Édouard. Les ressources spatiales nous permettent de voir cela plus rapidement et d'y mettre fin. Il y a dans l'ouest une propagation d'insectes qui détruisent nos forêts. Nous pouvons identifier cela de l'espace et savoir où aller. Nous pouvons gérer beaucoup mieux nos ressources.
     Si je prends la science océanique, c'est des océans que viendront les ressources alimentaires du monde à l'avenir. J'ai fait partie du comité consultatif de Copenhague où j'ai rencontré Galen Weston, une personne très intéressante. Sa société, qui engrange plusieurs milliards de dollars de revenus chaque année, se concentre sur les océans pour ses approvisionnements alimentaires futurs.
    Si je prends simplement les communications et le côté économique des choses, une réponse très simple est que vous ne pourriez pas utiliser aujourd'hui votre carte de crédit à Toronto si quelqu'un d'autre l'avait utilisée 10 minutes auparavant à Vancouver. Ce sont nos ressources spatiales qui empêchent de faire ça. Je pourrais vous donner une liste de tout ce qui se passerait au Canada pendant une journée sans espace, et je n'ai même pas encore parlé des communications.

  (1055)  

    Merci, monsieur MacLean et monsieur Lake.
    Nous allons terminer la séance avec monsieur Masse.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens tout d'abord à rendre publiquement hommage à monsieur MacLean. Je vous ai communiqué la lettre d'un électeur et vous lui avez répondu en deux ou trois semaines. Je tiens à vous dire que je vous en suis très reconnaissant car, parfois, quand nous transmettons un problème à un ministère ou à une agence, il peut disparaître pendant plusieurs mois. Votre réponse a été très rapide et très complète et je tenais à le souligner publiquement car c'est important pour moi, dans mon rôle de député. Je suis sûr que les autres députés l'apprécient aussi.
    J'aimerais parler un peu de déchets, maintenant. Vous avez dit qu'il y aura quelque 300 satellites de plus dans l'espace. Qu'y a-t-il actuellement dans l'espace comme matériel hors service ou comme objets ne servant plus à rien et risquant de nuire à notre gestion de cette sphère, en plus des satellites à venir plus tard? Qui a la responsabilité de nettoyer l'espace? Est-ce que quelqu'un doit le faire ou est-ce que c'est simplement chacun pour soi et qu'on laisse tout en plan?
    C'est une excellente question. Je n'aime pas donner de chiffres car ils changent rapidement mais je crois qu'il y a actuellement 9 800 objets de plus de 10 cm, ce qui est la limite minimum de ce que surveille NORAD. Mon chiffre n'est peut-être pas tout à fait exact mais il est clair qu'il y en a beaucoup.
    Évidemment, l'espace, c'est vaste. Ce chiffre ne veut pas dire qu'il n'y a plus de place mais il n'est quand même pas négligeable.
    Toutes les nations spatiales conviennent que c'est un problème. Par exemple, pour la constellation RADARSAT qui vient juste d'être approuvée dans le budget de 2010, nous aurons la responsabilité d'assurer le démantèlement du système de satellites une fois qu'on aura fini de les utiliser, afin de les ramener sur terre et de les laisser s'incinérer dans l'atmosphère.
    L'Agence ou l'entreprise a donc cette responsabilité? C'est intéressant car nous effectuons en ce moment une étude du secteur des télécommunications. Ces entreprises envisagent de lancer d'autres satellites.
    Mon impression est que l'espace est quasiment devenu un dépotoir et qu'on laisse tout sur place. Personne ne semble assumer cette responsabilité. Devrions-nous instaurer un mécanisme de responsabilité à ce sujet de façon à garantir, par exemple, que quiconque lance un satellite qui tombe en panne ou qui connaît des problèmes a la responsabilité d'en débarrasser l'espace?
    Permettez-moi de préciser plusieurs choses
    Jusqu'à environ 800 kilomètres, la gravité fait que l'espace atmosphérique est autonettoyant. L'espace est très propre jusqu'à environ 800 kilomètres.
    Pendant ma sortie spatiale, par exemple, j'ai laissé échapper un boulon, un boulon minuscule. C'était embarrassant pour moi mais ça arrive. Dans la presse, on s'est fait les gorges chaudes du fait que j'avais contribué à laisser des cochonneries dans l'espace. La vérité est que ce boulon s'est désintégré en brûlant dans l'atmosphère quatre jours plus tard. Donc, nous ne parlons pas de déchets en orbite terrestre basse. Nous parlons de la position de nos satellite géosynchrones, c'est-à-dire de tout les satellites de la série Anik du Canada et de tous les autres satellites de Télésat. Une fois que leur vie utile est terminée, c'est-à-dire entre 15 et 30 ans, ils restent là-haut pendant longtemps.
    On admet généralement qu'on ne peut plus faire ça maintenant. On doit trouver le moyen de ramener ses satellites vers le bas de façon à les laisser s'incinérer dans l'atmosphère lorsque leur vie utile est terminée.

  (1100)  

    Merci, monsieur MacLean.
    Merci, monsieur Masse.
    Voulez-vous nous montrer ou nous dire quelque chose d'autre, monsieur Thirsk?
    Oui, je veux simplement remercier le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie de nous avoir invités à comparaître. Pour commémorer notre visite, j'aimerais vous laisser ce que nous appelons un montage célébrant la participation du Canada à Expédition 20/21 à bord de la station spatiale internationale. Je vous remets en même temps un drapeau canadien qui a passé du temps avec moi dans l'espace. Il a passé six mois là-haut et a fait 3 000 fois le tour de la Terre.
    Je vous invite simplement à exposer ce montage dans un endroit qui rappellera aux membres de votre comité que le Canada est une nation spatiale jouissant d'une excellente réputation auprès de ses partenaires de la station spatiale. Nous produisons des bénéfices concrets et tangibles pour le Canada.
    Des voix: Bravo !
    Merci beaucoup.
    Je remercie les témoins de leur comparution.
    La séance est levée.
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