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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 018 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 13 mai 2010

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    J'aimerais que l'on commence tout de suite. Nous vous souhaitons la bienvenue à la séance no 18 du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international, qui porte sur le projet de loi C-300, Loi sur la responsabilisation des sociétés à l'égard de leurs activités minières, pétrolières ou gazières dans les pays en développement.
    J'aimerais m'assurer que tout fonctionne bien.
    Monsieur Steiner, est-ce que vous nous entendez?
    Excellent. Nous vous entendons. Merci beaucoup.
    Nous allons commencer par Steven Schnoor, qui va nous présenter sa déclaration préliminaire.
    Steven, vous avez dix minutes.
    Monsieur Steiner, à votre tour, vous aurez dix minutes, puis nous aurons deux ou trois séries de questions, selon le temps disponible.
    Richard Steiner est professeur et spécialiste de conservation à l'Union internationale pour la conservation de la nature. Il présentera son témoignage à partir de Anchorage.
    Nous vous entendrons dans quelques minutes. Nous allons commencer par M. Schnoor.
    Monsieur Schnoor, la parole est à vous. Vous avez dix minutes. Après que nous aurons entendu les deux témoins, des membres du comité poseront des questions et feront certains commentaires.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis un étudiant au doctorat de Toronto. Je suis ici parce que je crois que nous avons un problème très grave et systémique. Je crois également que le projet de loi C-300 est un pas en avant en ce qui concerne ce problème.
    Depuis cinq ans, j'effectue des recherches sur les activités des sociétés minières canadiennes à l'étranger et je porte un intérêt particulier à l'Amérique centrale. Je suis allé au Guatemala et au Honduras plusieurs fois au fil des ans, et j'ai constaté que les sociétés minières canadiennes qui exploitent ces régions causent véritablement du tort aux populations locales. Ces dernières sont en colère contre le Canada et les Canadiens.
    J'ai également produit des documentaires pour sensibiliser les gens à ce problème et pour présenter les points de vue des communautés marginalisées qui ne sont pas souvent entendues, dont un grand nombre sont très mécontentes des impacts négatifs qu'elles affirment avoir subis par suite des activités des sociétés minières canadiennes qui exercent leurs activités près de chez elles.
    Cette question a retenu mon attention il y a un peu plus de cinq ans, quand une population locale a déversé sa rage sur moi. Je faisais du bénévolat au Guatemala avec une petite ONG environnementale canadienne qui met en oeuvre des projets visant la salubrité de l'eau dans des pays en développement
    Pendant mon séjour, trois autres Canadiens et moi avons été pris pour des employés clandestins d'une société minière canadienne. Les gens de la région ont cru que nous faisions semblant de travailler pour des ONG afin d'accéder à leurs terres et de les prospecter pour trouver des gisements minéraux. Ils étaient véritablement enragés.
    Ce jour-là, un agriculteur local avait été tué dans une manifestation contre la mine de Marlin qui appartient à des intérêts canadiens. À leurs yeux, nous représentions une société minière canadienne. Nous avons été blâmés pour la mort de cet agriculteur et accusés de leur avoir fait subir les effets néfastes de l'exploitation minière. Nous sommes presque devenus la cible d'une foule enragée dans un pays où il y a malheureusement encore beaucoup de justiciers. Notre vie était menacée, et nous sommes très chanceux de nous en être sortis indemnes. Je serai heureux de vous fournir plus de détails à cet égard si ça vous intéresse.
    Le lendemain, j'ai communiqué avec l'ambassade du Canada à Guatemala pour rendre compte du fait que mes collègues et moi avions presque été tués parce qu'on nous avait pris pour des représentants d'une société minière canadienne. Je voulais savoir ce que les sociétés minières canadiennes faisaient dans la région pour causer autant d'indignation.
    On m'a dit, de manière très directe, que les sociétés minières canadiennes n'avaient fait, dans les faits, rien de mal; plutôt, elles étaient la cible de campagnes de désinformation lancées par des ONG environnementales extrémistes de gauche qui endoctrinaient les campesinos pauvres, ignorants et illettrés pour leur faire croire que les sociétés minières canadiennes allaient leur donner le sida et lancer un monstre à leur poursuite.
    Cela m'a surpris. J'ai affirmé n'avoir rien entendu au sujet du sida des Guatémaltèques à qui j'avais parlé et qu'on ne m'avait certainement rien dit au sujet d'un monstre. Ce que les Guatémaltèques locaux m'avaient dit, c'était qu'on creusait une mine d'or canadienne à ciel ouvert dans les hautes terres dans l'ouest du pays. Il s'agit de la mine de Marlin, dont Goldcorp est maintenant propriétaire. Les gens étaient indignés parce qu'ils n'avaient pas été antérieurement consultés, comme la loi l'exigeait.
    J'avais également entendu dire que la société canadienne qui creusait cette mine — il s'agissait de Glamis Gold, qui est maintenant Goldcorp — exploitait le même type de mines au Honduras, à savoir la mine de SanMartin, dans la vallée Siria. On m'avait dit que, depuis l'ouverture de la mine, les gens avaient signalé des changements radicaux dans la région où elle était exploitée. En raison du processus minier qui exige une immense quantité d'eau, les rivières et les puits s'étaient complètement desséchés. Cela a complètement détruit l'économie primaire de la région de 40 000 habitants, c'est-à-dire l'agriculture, et a poussé d'innombrables jeunes à quitter la région et à trouver du travail aux États-Unis.
    Les gens m'ont également dit que l'eau qui leur restait était extrêmement polluée et contenait du cyanure et des métaux lourds. Selon eux, cela avait causé un large éventail de problèmes de santé, qu'ils attribuaient à la pollution qui était apparue depuis la création de la mine. Ces problèmes comprenaient, entre autres, une augmentation du taux de fausses couches aussi bien chez les humains que parmi le bétail.
    Les gens craignaient également les graves conséquences à long terme de la consommation d'eau contaminée par des métaux lourds pendant une période prolongée, dont le cancer et les maladies du foie. Je dois souligner qu'un grand nombre de ces personnes n'avaient pas accès à des services de santé adéquats et n'avaient pas les moyens d'acheter de l'eau purifiée.
    Quand j'ai parlé de ces préoccupations à la dame de l'ambassade, elle m'a dit que rien de cela n'était vrai. Elle a affirmé être tout juste revenue de la région et avoir vu la mine de ses propres yeux. Elle pouvait confirmer que tout allait bien. Je l'ai questionnée au sujet des préoccupations relatives au cyanure, dont elle a fait peu de cas. Elle m'a assuré que le cyanure n'était pas très dangereux, en réalité. Elle m'a même dit que les amandes en contiennent naturellement.
    Après avoir raccroché, je me sentais encore plus troublé qu'auparavant. Je réalisais que le problème allait au-delà des allégations très graves faites contre une société minière canadienne. Le problème semblait comprendre une position du gouvernement canadien qui appuyait entièrement l'industrie canadienne tout en délégitimisant les préoccupations des communautés touchées.
    L'année suivante, je suis retourné dans la région avec du matériel vidé pour attester de ce qui allait se passer et des conditions dans la vallée Siria, au Honduras. Ce que j'ai vu n'avait rien à voir avec les propos de l'ambassade canadienne. Rien n'allait. Presque toutes les préoccupations qu'avaient soulevées les Guatémaltèques locaux m'ont été confirmées. En fait, un grand nombre de ces préoccupations ont ultérieurement été relevées par des scientifiques de renommée mondiale, dont l'ingénieur en environnement Paul Younger de la Newcastle University, au Royaume-Uni.

  (1110)  

    En tant que citoyen canadien, je dois vous dire que je suis profondément troublé par le fait que l'ambassade canadienne aurait presque pu se faire passer pour le service des relations publiques d'une société minière. J'ai commencé à comprendre pourquoi les gens de la région, que j'avais rencontrés, parlaient souvent avec amertume du gouvernement canadien et le considéraient plus ou moins comme un représentant des sociétés minières canadiennes dans la région qui semblait faire très peu de cas du bien-être et des préoccupations légitimes des communautés touchées. « S'il ne se moque pas de nous, » m'a-t-on demandé à plus d'une reprise « pourquoi ne fait-il rien pour régler ces graves problèmes? »
    L'un de mes documentaires qui était très critique à l'égard de l'industrie minière canadienne a ultérieurement été la cible d'un campagne de désinformation menée par l'ambassade elle-même. En janvier 2007, j'ai filmé l'expulsion forcée de cinq communautés de Mayas Q'eqchi indigènes de leurs terres ancestrales à El Estor, dans l'est du Guatemala.
    Des centaines d'agents de la police d'État et de militaires ont exécuté ces expulsions forcées sur l'ordre de la société minière canadienne Skye Resources, qui, depuis, a été achetée par la société minière canadienne HudBayMinerals. Les employés de la société minière ont utilisé des scies à chaîne et des torches pour détruire les demeures sous les yeux des femmes et des enfants. Il y a plus de détails sur ces expulsions dans mon mémoire.
    Skye Resources a allégué avoir maintenu une ambiance paisible durant cette mesure. Elle nie toute responsabilité pour la violence que les deux jours d'expulsion ont entraînée.
    Ma vidéo montre bien que les expulsions n'avaient rien de paisible. Elle est montrée dans des festivals du film partout dans le monde, et, jusqu'à ce jour, 150 000 personnes l'ont vue en ligne.
    Peu après la diffusion de la vidéo en ligne, l'ambassadeur canadien au Guatemala à l'époque, Kenneth Cook, a commencé à répandre de faux renseignements à son sujet. M. Cook a déclaré que la vidéo manquait de crédibilité parce que la pauvre femme maya Q'eqchi qui se plaignait des expulsions forcées dans la vidéo était, en fait, une actrice que j'avais rémunérée pour jouer ce rôle. Par ailleurs, les photographies que je montre dans la vidéo — dont certaines montrent des maisons incendiées et les témoins de cette destruction en état de profond désespoir — étaient non pas des photos des expulsions comme je l'alléguais, mais plutôt de vieilles photos du conflit interne, qui a pris fin en 1996. Il a allégué les avoir vues à de nombreuses reprises au fil des ans, dans une multitude de contextes différents.
    Ces allégations sont très graves, et elles sont entièrement et catégoriquement fausses. Elles me font passer pour un propagandiste manipulateur. Elles défendent la position de la société minière et mettent en doute les revendications territoriales de longue date, ainsi que les besoins en matière de développement et de droits de la personne de la population locale maya Q'eqchi, qui est appauvrie. Je suis profondément préoccupé par le fait que ces actes reflètent peut-être un gouvernement qui privilégie les industries extractives canadiennes qui exercent leurs activités à l'étranger au détriment des préoccupations et du bien-être des communautés locales.
    Je dois vous dire que je poursuis actuellement l'ancien ambassadeur pour diffamation. Je dois également vous dire que je n'avais pas l'intention de le faire, initialement. C'est seulement après que l'ambassade et le gouvernement n'ont...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. j'ai de la difficulté à... J'aimerais souligner que cette affaire est évidemment devant les tribunaux. Nous entendons cette affaire ici aujourd'hui en l'absence de toute corroboration des nombreuses autres sociétés concernées. Je crois vraiment qu'il incombe au comité de reconnaître que cette affaire est devant les tribunaux à l'heure actuelle et qu'il ne peut être pas approprié pour nous d'avoir cette discussion.
    Cela n'est pas un rappel au Règlement.
    Monsieur Schnoor, pouvez-vous continuer?
    Merci.
    Comme je vous le disais, je n'avais pas l'intention de poursuivre, initialement. Ce n'est qu'après avoir constaté que l'ambassade et le gouvernement ne répondaient pas à mes préoccupations que j'ai décidé qu'une action en diffamation était peut-être le meilleur moyen de rétablir la vérité, et de défendre ma vidéo et ma réputation, mais je n'en dirai pas plus à cet égard.
    Maintenant, le projet de loi C-300 pourrait aider à régler ce type de problème puisqu'il permettrait au gouvernement canadien de refuser l'appui de l'ambassade aux sociétés qui ont été reconnues coupables de violer les droits de la personne et d'autres normes. Il pourrait également garantir que l'ambassade canadienne ne se retrouve pas dans la position incommode de défendre les intérêts des sociétés minières qui violent peut-être les normes en matière de droits de la personne.
    En tant que citoyen canadien, je suis également profondément troublé par le fait que les pratiques des sociétés minières canadiennes qui exercent leurs activités à l'étranger ont nui gravement à la réputation de notre nation. En fait, j'ai une petite anecdote pour vous.
    Il y a quelques années pendant que je travaillais au Guatemala, j'ai perdu mon chapeau. L'un de mes compagnons de voyage m'a donné le sien, mais il y avait un drapeau canadien brodé à l'arrière. Cela m'a posé problème. Je ne me sentais pas en sécurité quand je portais la feuille d'érable canadienne, et je peux vous dire que je suis allé acheter un crayon feutre noir pour dissimuler mon propre drapeau. Je l'ai fait pour ma propre sécurité.
    L'approche actuelle que l'industrie et le gouvernement canadien ont proposée, au lieu des mesures comme le projet de loi C-300, me semble entièrement inadéquate: les politiques en matière de RSE sont fondées sur les mécanismes volontaires, et il n'y a aucune mesure pour garantir le respect de ces politiques. De tels mécanismes volontaires ne constituent qu'un stratagème pour détourner l'attention de meilleurs mécanismes qui garantiraient une véritable responsabilisation.
    J'aimerais souligner que je ne suis pas contre les mines. Je ne suis pas du tout contre le développement, mais je suis contre l'exploitation et je suis contre l'exploitation qui veut se faire passer pour du développement, cela va de soi. Je suis pour la responsabilisation. Le comportement des sociétés minières et des ambassades canadiennes à l'étranger nuit aux gens, ainsi qu'à notre réputation, et c'est inacceptable.
    Je crois également que les Canadiens prennent de plus en plus conscience de ce problème. Certains des actes commis à l'étranger sont si scandaleux et inacceptables pour les Canadiens moyens que je crois fermement qu'ils seraient contrariés s'ils apprenaient que nos représentants élus s'opposent à des mécanismes de responsabilisation comme le projet de loi C-300, sur l'ordre évident du puissant lobby minier.
    Le projet loi C-300 ne détruira pas notre économie. Il ne détruira pas notre industrie minière. Le projet de loi C-300 ne poussera pas toutes les sociétés minières à plier bagages et à quitter le pays. Je crois qu'il faut respecter l'intelligence du Canadien moyen, arrêter d'entonner cette rengaine et faire ce qui convient.
    Pour conclure, je doute qu'il y ait qui que ce soit dans cette salle qui se sente à l'aise avec les conditions que nous exportons à l'étranger, que nous imposons à des gens qui vivent généralement dans des pays pauvres à gouvernance très faible. Ces États sont souvent corrompus. Ils n'ont aucunement la volonté de protéger les intérêts de ceux parmi leurs habitants qui sont les plus vulnérables et dont les droits sont les plus souvent violés. Les Canadiens veulent des normes contraignantes et des mécanismes de responsabilisation pour les sociétés qui exercent leurs activités au Canada. Nous devrions nous attendre à rien de moins pour les gens qui vivent à l'étranger.
    Avant de céder la parole au prochain témoin, j'aimerais vous fournir une dernière raison pour laquelle je crois que nous devons mettre en place des mécanismes de responsabilisation pour tenir les sociétés canadiennes responsables de leurs actes commis à l'étranger.
    Le 27 septembre 2009, près d'El Estor, au Guatemala, Adolfo Ich Chamán, un enseignant et un leader communautaire qui s'est souvent prononcé contre la mine Fenix de HudBay, a été battu, coupé à la machette et tué par balles, censément par le service de sécurité de HudBay Minerals, tout près du lieu où j'ai tourné mon documentaire. Des témoins ont attesté le fait que Mynor Padilla, chef de la sécurité à HudBay, était parmi les hommes qui l'ont tué.
    Jusqu'à ce jour, il n'y a pas eu d'enquête. Il n'y a pas eu d'arrestation ni d'accusations, et personne n'a été tenu responsable. Ce n'est pas surprenant. Les NU ont récemment déclaré que le taux d'impunité des meurtres au Guatemala est de 98 p. 100. Si le Canada ne fait rien, personne ne sera jamais tenu responsable de tels meurtres. Il est possible que nous ne sachions jamais ce qui est arrivé.
    Des mécanismes de responsabilisation canadiens sont réellement nécessaires. Le projet de loi C-300 est un pas dans la bonne direction.
    Merci.

  (1115)  

    Merci, monsieur Schnoor.
    Nous allons maintenant entendre M. Steiner.
    Vous avez la parole pour dix minutes, monsieur.
    Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs.
    Je suis Richard Steiner. Je suis professeur à l'Université de l'Alaska depuis environ 30 ans. Je suis biologiste de conservation et membre du groupe de travail du secteur privé sur la responsabilité sociale et environnementale de l'Union internationale pour la conservation de la nature — je suis à bout de souffle.
    J'ai travaillé partout dans le monde sur les problèmes liés à l'industrie extractive et à divers enjeux environnementaux et sociaux. Depuis quelques années, je travaille dans le nord de la Colombie-Britannique avec la population locale. J'admire beaucoup le Canada: ses habitants, sa nature et son gouvernement.
    Hier, je suis revenu en Alaska après un voyage d'une semaine et demie dans le golfe du Mexique, où j'ai réalisé une évaluation rapide du déversement de pétrole causé par la plate-forme pétrolière Deepwater Horizon. Je considère cet événement comme un exemple tragique et poignant de ce qui peut se produire quand une société de l'industrie extractive ne fait pas l'objet d'une surveillance adéquate de la part du gouvernement et assure essentiellement son autosurveillance. Selon moi, il s'agit d'un exemple très récent de ce qui peut survenir.
    J'appuie fortement le projet de loi C-300. Je crois que vous devriez tous tirer une grande fierté de sa création et de sa présentation. Je recommande respectueusement qu'il soit renvoyé à la Chambre et adopté.
    Il a la visée très noble et simple de garantir que les sociétés minières, pétrolières et gazières du Canada agissent d'une manière qui est conforme aux pratiques environnementales internationales et aux engagements du Canada relatifs aux normes internationales en matière de droits de la personne. La plupart des sociétés affirment qu'elles le font déjà. Je ne comprends donc pas pourquoi elles s'opposent à un projet de loi qui permettrait simplement de garantir que c'est effectivement le cas.
    En réalité, un grand nombre de ces sociétés ne respectent pas les normes en question, et je crois que vous aurez entendu le témoignage éloquent de M. Schnoor. Malheureusement, ce qu'il a dit est vrai. C'est vrai pour les sociétés américaines et pour les sociétés de toute la planète — pas seulement pour les sociétés canadiennes.
    Plusieurs des centaines de milliers de projets miniers canadiens qui sont mis en oeuvre partout dans le monde sont extrêmement problématiques. M. Schnoor a parlé de quelques-uns de ces projets, qui sont mis en oeuvre au Guatemala. Il y en a d'autres au Mexique, au Pérou, au Panama, dans les Philippines, en Inde, au Tibet, en Afrique du Sud, en Tanzanie, et dans la République démocratique du Congo. Nous pourrions tous les énumérer ainsi que le problème qu'ils posent.
    Les trois que je connais le mieux, grâce au travail que j'ai fait dans divers pays, sont: la mine Porgera, dans les hautes terres dans l'ouest de la Papouasie-Nouvelle-Guinée; le nouveau projet Nautilus lancé par un conglomérat canadien au large de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, dans la mer de Bismarck et dans la mer des Salomon, le projet El Dorado de Pacific Rim, en El Salvador.
    Le projet Porgera, mis en oeuvre par Barrick Gold, la plus importante société d'exploitation aurifère du monde, qui a son siège à Toronto, est simplement l'une des pires atrocités environnementales et en matière des droits de la personne que j'ai vues de toute ma vie. C'est la Porgera Alliance qui m'a amené là-bas il y a deux ans pour que je voie ce qui se passait, pour que je rencontre les gens et pour que je formule des recommandations.
    Il y a eu un grand nombre d'exécutions sommaires, qui, selon la population locale, ont un lien direct avec le service de sécurité embauché par la mine. Tout a commencé quand de nombreux habitants locaux ont été déplacés pour que la mine soit creusée.
    La société a détruit les rivières Porgera, Lagaip et Strickland sur des centaines de kilomètres, et des millions de tonnes de déchets sont rejetés chaque année dans ce qu'on appelle par euphémisme la « décharge fluviale des résidus miniers » — les déchets de la mine sont tout simplement déchargés dans la rivière locale. Il y a plusieurs mètres de sédiments et de résidus miniers toxiques au fond d'un grand nombre de ces rivières.
    Cette entreprise est censée appuyer des pratiques environnementales et sociales exemplaires, ainsi que des pratiques exemplaires en matière d'emploi. Ce n'est évidemment pas le cas.
    Le projet Nautilus est le tout premier projet d'exploitation minière en mer de l'histoire de l'humanité. Ce projet n'a pas été élaboré avec le consentement libre, préalable et éclairé de la population locale. Son énoncé des incidences environnementales, que la population locale m'a demandé d'étudier en son nom, est inadéquat. Il s'agit encore une fois d'un projet mis en oeuvre en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Je suis d'avis que les responsables de Nautilus ont engagé un processus qui co-optait véritablement le gouvernement en place; elle a résisté à la notion d'un comité consultatif de citoyens légitime pour que les citoyens soient sur un pied d'égalité en Papouasie-Nouvelle-Guinée.

  (1120)  

    Enfin, le dernier projet que je connais très bien et qui est mené par une société canadienne est le projet El Dorado de Pacific Rim. L'Union internationale pour la conservation de la nature m'a envoyé en El Salvador en janvier dernier pour une mission d'enquête. Il y avait eu plusieurs exécutions sommaires, qui, selon la population locale, étaient directement liées à l'influence de Pacific Rim, une société canado-américaine.
    Plusieurs habitants locaux qui s'opposaient à l'exploitation de la mine ont été tués l'an dernier. Les habitants locaux croient que Pacific Rim a joué un rôle dans ces exécutions et que la société verse des fonds aux représentants locaux pour qu'ils mènent une campagne d'intimidation et de violence contre les opposants à la mine. Je suis d'avis que Pacific Rim a probablement violé les lignes directrices de l'OCDE pour les multinationales relativement aux pots-de-vin et à beaucoup d'autres choses.
    Il est important de souligner que ni le gouvernement américain ni le gouvernement canadien n'a fait preuve de diligence raisonnable pour fournir des examens de conformité avec les lignes directrices de l'OCDE qu'ils se sont engagés à respecter. Ces lignes directrices sont excellentes, mais elles ne servent à rien si les gouvernements et les industries ne les respectent pas.
    Enfin, le public s'oppose tellement au projet de Pacific Rim en El Salvador, que le nouveau président du pays, Mauricio Funes, a réclamé l'interdiction de toute extraction de métaux dans le pays. C'est ce qui risque d'arriver quand une entreprise, de quelque pays que ce soit, ne fait pas preuve de sincérité et d'honnêteté et ne respecte pas les normes internationales en matière de pratiques exemplaires auxquelles elle prétend se conformer.
    Cela peut nuire à toutes les autres entreprises, y compris les entreprises canadiennes, qui souhaitent exercer des activités dans ce pays. Le projet de loi C-300 pourrait donc avoir des effets très positifs.
    Tous ces projets miniers canadiens que j'ai mentionnés comportent des éléments très négatifs: violation des droits de la personne; pratiques de travail douteuses; déplacement forcé d'habitants locaux; violence et assassinats dirigés contre la population locale, qu'il s'agisse d'actes dont l'entreprise est directement ou indirectement responsable; corruption des représentants locaux et pots-de-vin; dommages graves et durables à l'environnement, et trahison en ce qui concerne les promesses de développement durable et d'amélioration du bien-être local.
    En toute franchise, un grand nombre de ces projets ont perdu leur permis social d'exploitation et, comme M. Schnoor l'a mentionné, ils nuisent beaucoup à l'image du Canada dans beaucoup de ces endroits. Le fait est que les gouvernements hôtes dans les pays en développement n'ont tout simplement pas la capacité technique et financière voulue pour assurer une surveillance adéquate de ces projets; par conséquent, ils permettent aux entreprises de jouer tous les rôles. Ce n'est pas une manière efficace de faire des affaires.
    Le Canada vaut mieux que ça. Nous valons tous mieux que cela. Il y a un grand nombre de normes en matière de RSE dans le monde. Il y a les politiques de la Banque mondiale et les politiques de l'OCDE, que tous les pays membres se sont engagés à respecter. La Banque d'import-export des États-Unis utilise actuellement les lignes directrices de la SFI. La JBIC, l'organisation Nippon Export Investment Insurance, a ses propres lignes directrices. Toutes les banques de développement multilatérales en ont... Les Principes de l'Équateur. Même les sociétés de l'industrie extractive ont des lignes directrices en matière de RSE.
    Malheureusement, elles ne fonctionnent pas. Sans cette étape additionnelle que le projet de loi C-300 fournirait au gouvernement pour qu'il assure indépendamment l'examen et la reconnaissance de la conformité, nous n'y arriverons pas. Les actes sont plus éloquents que les mots. Les gens voient les sites Web habiles et enchanteurs des entreprises qui disent à quel point elles sont formidables, mais, au fond, ils voient que ça ne fonctionne pas. On peut faire un certain nombre de comparaisons entre des sociétés de placement privées américaines à l'étranger et les sociétés visées par le projet de loi C-300... Je pourrai les passer en revue plus tard, si vous le souhaitez.
    Au bout du compte, le Canada peut indiquer la voie à suivre en ce qui concerne l'amélioration de la responsabilisation sociale des sociétés avec ce projet de loi. C'est tout à fait excitant. Un certain nombre de personnes dans la communauté internationale suivent ce débat de près. Elles attendent avec impatience de voir le Canada assumer ce rôle de chef de file.
    Il s'agit d'une avancée considérable qui donne à toutes les sociétés canadiennes l'égalité des chances. Les entreprises qui respectent déjà ces normes auront un avantage concurrentiel, et c'est très bien puisque celles qui ne les respectent pas réduisent leurs coûts. Elles ont donc actuellement un avantage. Le projet de loi rétablira l'égalité des chances. Il mettra la barre plus haut pour les entreprises américaines qui travaillent dans ces endroits. Je pense qu'il s'agit d'une bonne chose.
    La barre sera également placée plus haut pour les gouvernements hôtes. Le projet de loi leur donnera une meilleure idée de ce que constituent les pratiques exemplaires internationales et les aidera dans leur examen de la conformité.

  (1125)  

    Le projet de loi est clair et précis. Il fait preuve de prudence et de modestie. Il ne vise pas du tout trop haut. Si ce projet de loi avait été adopté et qu'une loi avait été appliquée, l'atrocité qui a eu lieu à la mine de Porgera, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, ne serait tout simplement jamais arrivée. Dans le cas de Pacific Rim, le gouvernement d'El Salvador n'aurait peut-être pas tenté d'interdire toutes les activités d'extraction des métaux dans le pays si cette loi avait été en vigueur et si Pacific Rim avait pris des mesures efficaces pour atténuer les problèmes qu'on a vus là-bas.
    Vous pourriez envisager plusieurs amendements, mais je crois que, en fait, le projet de loi C-300 est très explicite, et je vous recommande respectueusement de l'adopter. C'est tout ce que j'ai à dire pour l'instant. Je serai heureux de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Steiner. Nous passons donc aux questions.
    Je vais commencer par le parrain du projet de loi, M. McKay.
    Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à M. Steiner et à Steven Schnoor.
    Ma question est d'ordre général et elle porte sur le fait que les représentants du gouvernement et des sociétés minières refusent de croire les témoignages que vous avez présentés ici aujourd'hui.
    Vous avez tous deux été des témoins directs de certaines choses, vous avez parlé à des gens et vous avez fait des essais. Néanmoins, on ne croira pas vos rapports. Mes amis de l'autre côté de la salle auront de la difficulté à les croire, et, en fait, ils attaqueront votre crédibilité personnelle.
    Le fait que nous recevions rapport après rapport mentionnant ces problèmes ne semble pas important. On les passe sous silence ou on en fait abstraction. Vous, vous produisez des documentaires, et, au lieu de traiter des faits présentés dans le documentaire en tant que documentaire, on attaque votre réputation personnelle, tout comme la vôtre, monsieur Steiner.
    La liste des allégations de violations des droits de la personne et de dégâts causés à l'environnement est très longue. Nous savons très bien que beaucoup de ces pays ont des systèmes de gouvernance très faibles, et, malgré tout, nous ne voulons tout simplement pas confronter ces faits, qui heurtent notre psychique canadienne. En fait, si l'un d'entre vous aviez dit ce que vous venez de dire à l'extérieur de la salle, sans immunité parlementaire, on vous poursuivrait demain, à coup sûr.
    Ces gens n'ont absolument aucun recours. S'ils se plaignent dans leur propre pays, on en fait peu de cas. S'ils viennent ici, les tribunaux disent que ce qui se passe à l'extérieur du pays ne les regarde pas.
    Il n'y a aucune loi qui force qui que ce soit à donner suite à ces plaintes. J'aimerais donc que vous abordiez la question du déni, et du refus de reconnaître les faits sur lesquels vos témoignages ont porté.
    Peut-être allons-nous commencer par M. Schnoor.

  (1130)  

    Je suis entièrement d'accord avec vous. C'est extrêmement déconcertant. Il ne s'agit pas seulement d'un refus de croire des gens comme moi et comme M. Steiner, qui présentent des faits probants à l'appui de problèmes causés par les activités des sociétés minières canadiennes.
    Comme je l'ai dit plus tôt, ce qui m'a dérangé, de prime abord, c'est l'énergie avec laquelle l'ambassade, du moins dans le cas de mon expérience à Guatemala, s'est donnée du mal pour déligitimer l'opposition locale. Je trouve cela très inquiétant parce que la résistance ne disparaîtra pas uniquement parce que l'on nie son existence. Cette résistance ne disparaîtra pas, même si on en fait fi ou qu'elle est déligitimée.
    Je vais vous donner un petit exemple. Dans la région qui entoure la mine Marlin, les communautés locales ont commencé à tenir des consultas communautaires, c'est-à-dire des consultations ouvertes. La question qu'elles se posent est la suivante: « Voulons-nous ces activités dans notre région? » Les habitants de cette région, une écrasante majorité, ont répondu non. J'ai agi à titre d'observateur international pour certaines de ces consultations, et, d'un point de vue émotionnel, j'ai été bouleversé de voir des centaines de personnes se présenter aux consultations pour dire: « Nous ne voulons pas d'activités minières ».
    Quelle est la position de notre ambassade au sujet de ces consultations? Selon elle, ces consultas ne sont pas légitimes parce qu'elles sont organisées par des activistes, des ONG, qui manipulent les campesinos afin qu'ils rejettent l'exploitation minière. C'est entièrement faux, selon mon expérience. Pourtant, on continue de nier farouchement les faits et d'inventer n'importe quel mécanisme pour ne pas avoir à porter attention à la volonté du peuple.
    Qu'est-ce que ça va donner? Croyez-vous que les gens qui se rassemblent, les milliers de personnes qui se rassemblent et qui disent « nous ne voulons pas », partiront, qu'elles accepteront la position du gouvernement canadien, pour lequel elles ne sont que des marionnettes dont les ONG tiennent les ficelles? Elles ne partiront pas.
    Permettez-moi de poser la même question à M. Steiner.
    Monsieur Steiner, quelle est votre réaction à cet égard?
    Je réagirais en disant que le comité, le gouvernement et la population ne sont pas obligés de nous croire, M. Schnoor et moi. L'objectif du projet de loi C-300 est d'imposer un autre niveau indépendant d'examen par vos deux ministres, afin qu'ils confirment ou infirment les allégations sur lesquelles ces plaintes sont fondées. C'est la raison d'être du projet de loi C-300. Ne me croyez pas sur parole. Si votre ministre des Affaires étrangères et du Commerce international reçoit une plainte légitime et fondée, laissez-le enquêter afin qu'il détermine s'il existe des éléments de preuve convaincants à son appui ou si elle doit être réfutée. En ce qui concerne le projet dont je viens de parler à la mine Porgera et celui de Pacific Rim, on ne peut douter du résultat, et je soupçonne que c'est probablement aussi le cas des problèmes que M. Schnoor a constatés au Guatemala.
    C'est toute la raison d'être du projet de loi C-300. Il y a des plaintes. Le projet de loi est un mécanisme qui permettra aux gens de déposer ces plaintes. J'espère que si le projet de loi C-300 est adopté... Si je devais suggérer un amendement, ce serait que toutes les entreprises soient visées pas seulement les sociétés de l'industrie extractive. C'est le seul avantage des modifications qui ont été apportées par la Régie pour les investissements privés à l'étranger au manuel environnemental ici aux États-Unis. L'un des seuls avantages de ce manuel, par rapport au projet de loi C-300, c'est qu'il s'appliquera à toutes les entreprises; cependant, le manuel est axé sur les projets, tandis que le projet de loi C-300 s'applique à l'entreprise quel que soit le projet particulier qui pose problème.
    Je voudrais seulement dire: « Ne nous croyez pas sur parlole. ».

  (1135)  

    Merci.
    Je voudrais seulement faire quelques commentaires supplémentaires sur toutes ces lignes directrices qui existent — les Principes de l'Équateur, et ceux de la SFI, de l'OCDE et d'une multitude d'autres organisations — auxquelles ces entreprises réagissent en se mettant la main sur le coeur et en disant à quel point elles sont obsédées par les principes de responsabilité sociale des entreprises. Elles produisent des rapports annuels formidables selon lesquels tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, et ces allégations dont vous avez parlé, qui vous vaudront de nombreuses critiques, seront escamotées.
    Dites-moi, que fera le projet de loi C-300 pour que l'on prenne ces allégations au sérieux?
    Monsieur Steiner.
    Premièrement, les actes ont plus de poids que les paroles, comme vous l'avez laissé entendre. Il y a toute une série de lignes directrices en matière de RSE, et toutes les entreprises soutiennent qu'elles se soumettent aux pratiques exemplaires internationales et ainsi de suite.
    Si c'est vrai, pourquoi alors s'opposer au projet de loi indépendant C-300 dans le seul but d'affirmer que c'est vrai? Manifestement, le fait qu'une entreprise ou un représentant du gouvernement s'oppose à ce projet de loi très prudent, raisonnable et modeste indique tout bonnement le fait qu'il n'est pas certain que les entreprises sont effectivement honnêtes et franches quant à leur conformité avec les normes en matière de RSE. Si les entreprises et les représentants du gouvernement étaient convaincus qu'il n'y avait pas de problème, alors le projet de loi C-300 ne leur serait presque d'aucun intérêt.
    Ces entreprises sont nombreuses, et elles seront jugées à leurs actes, comme on dit dans le sud des États-Unis. C'est le reflet de la surveillance qu'exerce le gouvernement. Comme je l'ai dit, le Canada et les États-Unis sont tous deux membres de l'OCDE; ils sont tous deux signataires des lignes directrices de l'OCDE, et pourtant les atrocités se poursuivent. Si les gouvernements avaient réellement fait leur travail et exercé une surveillance, Porgera, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et Pacific Rim ne se seraient jamais produits.
    À mon avis, le projet de loi C-300 est excellent. Il est de loin supérieur aux lignes directrices de l'OPIC en cours d'élaboration aux États-Unis, et ce, pour trois raisons précises: la première, c'est que le projet de loi C-300 s'applique de manière universelle, comme nous l'avons mentionné plus tôt, à toutes les entreprises de l'industrie extractive, sans égard au fait qu'elles reçoivent un soutien gouvernemental, et pas seulement en fonction d'un projet donné. Voilà un aspect positif. C'est une bonne idée.
    Deuxièmement, le projet de loi C-300 impose une enquête et des sanctions obligatoires en cas de non-conformité; parmi les sanctions, mentionnons la perte de l'admissibilité au financement ou à l'assurance fournie par le gouvernement, ou à tout autre soutien offert par le gouvernement, au soutien fourni par l'ambassade, comme nous l'avons entendu dire plus tôt, et au soutien fourni par Exportation et Développement Canada. C'est une très bonne idée.
    Troisièmement, le projet de loi C-300 exige des ministres des Affaires étrangères et du Commerce international qu'ils élaborent et appliquent de manière indépendante ces normes; le projet de loi exige également qu'ils mènent une enquête sur les plaintes non vexatoires. C'est un mécanisme très simple et direct de gouvernance et de jurisprudence, à mon avis.
    Cela changerait véritablement la dynamique, et les entreprises qui se comportent bien à l'étranger apprécieront le fait que les entreprises qui se comportent mal, et qui tirent un « avantage » présentement en sabrant dans les coûts perdront cet avantage. Ainsi, le projet de loi donne un avantage concurrentiel aux entreprises qui se comportent bien.
    Merci, Richard. Nous aussi, nous utilisons cette expression: jugeons-les à leurs actes.
    Nous allons donner la parole à Mme Deschamps pendant sept minutes.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
     Avant qu'on ne présente le projet de loi C-300, il y a eu une vaste consultation dans tout le Canada. Il y a eu une table ronde à laquelle ont participé des organisations de la société civile, des experts, des gens des compagnies minières aussi.
    Monsieur Steven, si vous me permettez — je ne sais pas comment prononcer votre nom de famille —, avez-vous suivi ces consultations?
    Et vous, monsieur Steiner, y avez-vous participé d'une certaine façon?

  (1140)  

[Traduction]

    Oui, je suis au courant, sans toutefois en connaître les détails. Je n'y ai pas participé. Mais je crois que c'est le cheminement normal pour le dépôt d'un projet de loi.
    Armés de nobles intentions, nous pourrions discuter toute la journée de la responsabilité sociale des entreprises, mais, j'insiste, c'est la manière dont ces entreprises exercent leurs activités à l'étranger qui compte. Ce sont les choix que font ces entreprises quant à l'exercice de leurs activités dans ces pays. C'est le fait de se tenir à l'écart de certaines régions où il ne faudrait pas faire d'exploitation minière, gazière ou pétrolifère. Et quand les entreprises décident d'aller exercer leurs activités dans certaines régions, elles doivent s'assurer de le faire en ayant obtenu au préalable le consentement libre et informé, et elles doivent agir de manière transparente, ouverte, honnête et aussi responsable que possible sur le plan environnemental, point à la ligne.
    Nous pouvons organiser une foule de consultations et de discussions, et nous pouvons élaborer toutes les normes possibles, mais nous n'arriverons à rien sans ce niveau additionnel d'examen indépendant et de sanctions obligatoires quand une entreprise se révèle ne pas être fidèle à sa parole.
    J'aimerais soumettre une dernière chose à votre attention. Si les ministres concluent qu'une entreprise n'est pas conforme, qu'elle ne suit pas les lignes directrices de la SFI ou les normes qui ont été élaborées, le comité pourrait envisager de lui accorder une période probatoire d'une durée de six mois à un an, ou quelque chose du genre, qui lui permettrait d'atténuer et de régler le problème afin de redevenir conforme.

[Français]

    J'ai une autre question qui sera probablement abordée durant la deuxième heure par les autres témoins. Pouvez-vous me parler des Principes de l'Équateur?

[Traduction]

    Je présume que vous vous adressez à M. Steiner?
    Qui veut répondre à cette question?
    Si vous me le permettez, je répondrai rapidement à votre première question.
    Une chose que je trouve plutôt curieuse... n'oublions pas que le rapport du groupe consultatif remis à la table ronde était le fruit d'une entente entre la société civile et l'industrie. Si l'industrie était à la table et a apposé sa signature sur le rapport du groupe consultatif, il est pour le moins étonnant que cette même industrie affirme maintenant ne pas vouloir entendre parler du projet de loi C-300.
    En ce qui concerne les Principes de l'Équateur ou les lignes directrices de la SFI, la seule chose que je dirais, c'est que, compte tenu du fait qu'elles intègrent de telles mesures discrétionnaires quant à la manière dont elles sont appliquées dans des cas précis, et compte tenu du fait que, du moins dans le cas d'Exportations et développement Canada, il n'y a aucune transparence quant à la manière dont ces mécanismes sont réellement appliqués, j'estime qu'il est difficile de croire qu'il s'agit d'une véritable responsabilité, parce que des mécanismes peuvent réellement produire un comportement responsable.
    Monsieur Steiner, aimeriez-vous ajouter quelque chose?
    Je souscris aux propos de M. Schnoor.
    L'aspect discrétionnaire de ces lignes directrices est préoccupant. Dans une certaine mesure, le projet de loi C-300 accorde aux ministres le pouvoir discrétionnaire de mener un examen, et il ne sera pas possible de contourner cela. Une bonne partie de ces examens seront une question d'appréciation.
    Quand les ministres, agissant de manière indépendante au nom des Canadiens, se pencheront sur les faits d'une plainte précise — disons pour la mine Marlin, au Guatemala, ou le projet de Pacific Rim, au Salvador, ou Porgera, en Papouasie-Nouvelle-Guinée —, ce sera à eux de décider, en exerçant leurs pouvoirs discrétionnaires de manière indépendante, si une entreprise se conforme aux lignes directrices que le gouvernement... qu'ils ont élaborées.
    Il y a toujours un aspect discrétionnaire à ce genre de situation, mais je pense qu'il s'agit d'un autre niveau de rigueur indépendante que vous mettriez en application.

[Français]

    À ceux qui sont défavorables au projet de loi C-300, on répond que les compagnies minières qui ont leur siège social ici, au Canada, vont aller s'installer ailleurs.
    Croyez-vous réellement que ces départs auront lieu si le projet de loi C-300 est adopté?

[Traduction]

    Je...
    Si c'est à moi que vous adressez cette question, je pense que ce ne serait pas le cas.
    Désolé, monsieur Schnoor.

  (1145)  

    Pas du tout, je vous en prie, répondez à la question.
    Comme j'habite en Alaska, un État où le développement des ressources constitue une préoccupation politique dominante, je peux vous dire que cela présente des avantages et des inconvénients. Il faut tout simplement faire face à la musique.
    Mais cela fait des années que nous entendons cette menace selon laquelle, si le gouvernement de l'État augmente les taxes sur le pétrole, alors les entreprises pétrolières vont faire leurs boîtes et aller ailleurs. Eh bien, la réalité est la suivante: quel que soit le lieu où les entreprises veulent exploiter de riches ressources naturelles, leur marge de profit est telle qu'ils ne vont pas faire leurs boîtes et aller ailleurs. Où les entreprises déménageraient-elles leur siège social? Elles ne vont certainement pas venir aux États-Unis. Je pense que c'est un écran de fumée.
    De plus, en ce qui concerne les entreprises qui vous disent que le projet de loi C-300 leur causerait tellement de tort qu'elles vont tout bonnement aller ailleurs s'il est adopté, quelle conclusion tirez-vous quant à leur engagement en matière de responsabilité sociale et à leur conformité avec les lignes directrices pertinentes? Moi, j'en conclus qu'elles savent qu'elles ne s'y conforment pas.
    Alors, à toute entreprise qui affirme qu'elle ferait ses boîtes et ira ailleurs si le projet de loi C-300 est adopté, je répondrai: « je vous en prie », parce que je ne voudrais pas les avoir dans mon pays non plus.
    Monsieur Schnoor, pouvez-vous terminer? Le temps est écoulé, mais vous pouvez terminer rapidement.
    Je souscris aux propos de M. Steiner.
    Pour y donner suite, je trouve également qu'il s'agit d'une logique bien curieuse. À mon avis, ce n'est rien d'autre qu'une diversion et un épouvantail. Les avantages liés à l'inscription d'une entreprise minière au Canada, y compris les lois sur l'impôt et les exigences relativement souples en matière de divulgation, l'emportent de loin sur tout avantage qu'elles trouveront à Londres ou à New York, et elles ne vont certainement pas aller à Beijing.
    À mon avis, tout cet argument est plutôt curieux. Pourquoi partiraient-elles? Est-ce parce qu'elles risquent de perdre du financement public si elles contreviennent aux normes qu'elles prétendent déjà respecter? C'est une logique bien étrange.
    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Abbott.
    Merci. Je ne vais prendre que 30 secondes avant de partager mon temps de parole avec M. Goldring.
    Je pense que la réponse à la préoccupation de M. McKay, c'est qu'alors que ces messieurs et tous les témoins bénéficient de l'immunité parlementaire — autrement dit, ils ne peuvent faire l'objet de poursuites pour les propos qu'ils tiennent ici — de l'autre côté de la médaille, ces deux hommes ont saisi l'occasion pour faire des allégations particulièrement graves et extravagantes contre certaines entreprises minières. De toute évidence, il nous faudra donc, dans l'intérêt de l'équité, donner l'occasion aux entreprises minières de raconter leur version de l'histoire, par vidéo ou en comparaissant devant nous dans le cadre de ce processus, parce que nous ne voulons certainement pas nous limiter à une seule version de l'histoire.
    Je ne remets pas en question la véracité des commentaires des témoins; tout ce que je dis, c'est qu'il y a une autre version à cette histoire. Nous allons passer en revue les témoignages, nous examinerons les noms des entreprises à qui ils s'en sont pris et nous donnerons à ces dernières l'occasion de venir présenter leur version de l'histoire. J'espère que le comité sera d'accord avec cela.
    Merci.
    Monsieur Goldring.
    Merci.
    Messieurs, je tiens à souligner que le gouvernement canadien n'a pas agi de manière strictement isolée sur cette question. En mars 2009, il a annoncé — et a incorporé — une stratégie en matière de responsabilité sociale des entreprises, et, de fait, y travaille activement. L'industrie minière canadienne possède une excellente réputation partout dans le monde, et c'est probablement en partie parce que... et cela leur a permis d'exercer leurs activités partout dans le monde.
    Je dois convenir avec mon collègue du fait que, en quelques minutes à peine, les témoins ont fait des commentaires méprisants à l'égard de Goldcorp, Pacific Rim, l'ambassadeur lui-même, et, d'après le contenu de ces documents, Hudbay Minerals, Skye Resources et Inco. Je suis convaincu que si nous avions davantage de temps, cette liste pourrait s'allonger considérablement.
    Mais revenons au projet de loi C-300, qui me préoccupe. Je suppose que je poserais la question suivante à M. Steiner, en sa qualité d'Américain de l'Alaska. Manifestement, si ici au Canada, cette initiative bénéficie d'un appui important, il doit avoir une initiative semblable aux États-Unis, alors vous pourriez peut-être nous expliquer comment les États-Unis envisagent cette question. Ensuite, j'aimerais également soulever quelques-uns des points dans ces documents qui me préoccupent particulièrement.
    Monsieur....?

  (1150)  

    Merci, monsieur.
    Tout d'abord, en réponse aux commentaires du précédent intervenant selon lequel les entreprises dont nous avons parlé aujourd'hui, incluant Barrick, Pacific Rim, etc., devraient avoir la chance de comparaître devant le comité, je pense que nous pouvons avoir une très bonne idée du scénario... Nous pouvons savoir exactement ce qu'elles diront. Elles nieront avoir fait quoi que ce soit de mal et affirmeront mettre en oeuvre les meilleures pratiques exemplaires élaborées au niveau international.
    Nous savons que c'est ce qu'elles vont dire, et c'est bien parfait. Mais, monsieur, si vous avez l'intention de les inviter à comparaître devant le comité, je vous suggérerais alors d'inviter également certaines des personnes qui vivent dans les environs des mines, celles qui subissent ces problèmes, afin de leur permettre de vous faire connaître leur point de vue sur cette question.
    En ce qui a trait au second point, la question du deuxième intervenant au sujet de l'initiative américaine visant à accroître la responsabilité sociale des entreprises à l'étranger, je suis d'avis que le gouvernement américain a réagi plus lentement que le gouvernement canadien. Je pense que le projet de loi C-300 serait un pas de plus que là où nous sommes présentement, mais, comme je le mentionnais plus tôt, la Overseas Private Investment Corporation, OPIC, quelque peu semblable à EDC, possède effectivement ses propres lignes directrices en matière de RSE. Elle est en train de les revoir.
    D'ailleurs, je pense que leurs nouvelles lignes directrices doivent être publiées le 20 mai, dans environ une semaine. Voilà une perspective palpitante. J'ai essayé de m'imaginer à quoi cela allait ressembler, mais j'ignore quelles seront ces nouvelles lignes directrices.
    Mais, une fois de plus, selon moi, le seul avantage que confèrent les lignes directrice de l'OPIC, c'est qu'elles s'appliquent à toutes les industries, pas seulement les industries extractives — les pêches, la foresterie, les produits pharmaceutiques, les investissements financiers, le transport et l'agriculture —; toutes ces autres activités étrangères qu'exercent les entreprises américaines. Je pense que c'est un avantage. Encore une fois, l'inconvénient, c'est qu'il n'y a pas de véritables mécanismes de conformité; à l'heure actuelle, les lignes directrices de l'OPIC ne contiennent aucune sanction obligatoire. Elles ne s'appliquent qu'à la pièce, à un projet particulier... De sorte que si, par exemple, une entreprise a un problème dans un projet donné, les lignes directrices de l'OPIC se concentreront sur ce projet en particulier, plutôt que sur l'ensemble des activités de l'entreprise.
    Il y a donc des inconvénients en ce qui a trait...
    Monsieur, c'est peut-être là l'un des problèmes. Puisque ce projet de loi précise qu'il faut prendre des mesures pour toutes les plaintes, qui, comme c'est écrit ici, autre que « frivoles » et « vexatoires », tout d'abord, il leur faudra mener une enquête sur chacune d'entre elles pour établir cela.
    M. Richard Steiner: C'est exact.
    M. Peter Goldring: Par exemple, nous venons d'entendre des propos à l'encontre de six entreprises différentes, et cela prendrait tout un processus d'enquête afin de déterminer s'ils étaient frivoles ou vexatoires.
    Ainsi, le projet de loi oblige les entreprises et le gouvernement à faire une grande quantité d'enquêtes, de travail juridique et de travail préparatoire, et là, vous nous dites qu'aux États-Unis, cette composante a été laissée de côté. C'est peut-être une exigence trop stricte à intégrer.
    Avec tout le respect que je vous dois, monsieur, je ne suis pas d'accord. Je pense que les normes américaines ne sont pas à la hauteur de ce que propose le projet de loi C-300. Une fois de plus, je pense que si les entreprises sont certaines de leurs résultats en matière de RSE et de leur profil à l'étranger, le projet de loi C-300 ne devrait leur causer aucune inquiétude, et ce serait la même chose pour le gouvernement. Si les ministres sont certains que les entreprises minières canadiennes qui travaillent à l'étranger, comme vous venez de le dire...
    Eh bien, si nous laissons tomber cette composante, il y en a une autre ici qui est préoccupante. Elle oblige toutes les entreprises à se conformer à toutes les lois internationales sur les droits de la personne, les lois internationales partout dans le monde, voire même les obliger à se conformer à des lois que le gouvernement canadien n'admet pas particulièrement dans certaines circonstances.
    Donc, une fois de plus, vous pourriez peut-être nous dire si ce type de mesures se retrouvent dans les normes américaines, parce que si c'est le cas, alors il nous faudrait le savoir, et si ce n'est pas le cas, alors il y a peut-être un motif pour cela, également.
    Monsieur Steiner, je vais vous laisser répondre à la question. Je veux simplement que M. Goldring sache que son temps est écoulé, mais je vous en prie, répondez à la question.
    Ensuite, nous passerons à M. Dewar.
    Oui, je pense que les normes américaines exigent que les entreprises se conforment aux conventions et aux pratiques exemplaires internationales sur les droits de la personne. J'ajouterais également que la Ex-Im Bank, la Export-Import Bank aux États-Unis, met déjà en application des lignes directrices de l'ISE. EDC possède son propre ensemble de normes et de lignes directrices environnementales, mais comme nous le disions, si les entreprises les respectent déjà, alors ce niveau supplémentaire d'examen ministériel ne devrait pas leur poser problème.
    C'est ce que le projet de loi C-300 propose pour l'essentiel. C'est très raisonnable et prudent, et, selon moi, un pas plutôt modeste dans la bonne direction.
    Ainsi, les lignes directrices de la SFI — Société financière internationale — sont certainement meilleures que celles de l'OCDE, auxquelles des entreprises des États-Unis et du Canada ne se conforment pas non plus. Ce n'est donc pas trop demander que d'augmenter nos attentes à l'égard des industries extractives partout dans le monde. Nous pouvons faire mieux, et je suis certain que le fait que les entreprises soient motivées à adopter un comportement social responsable — toutes les entreprises —, cela place tous les joueurs sur un pied d'égalité, et les entreprises qui assumaient déjà leurs responsabilités sociales en tireront un avantage compétitif.
    Merci.

  (1155)  

    Merci, monsieur Goldring.
    Merci, monsieur Steiner.
    Nous allons maintenant donner la parole au dernier intervenant de cette série de questions.
    Monsieur Dewar, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos invités de leurs interventions.
    Monsieur Schnoor, vous avez mentionné une situation au Guatemala où la question de l'eau était préoccupante. Pourriez-vous me rappeler de quelle mine il s'agit?
    Je parlais de la mine San Martin dans la vallée de la Siria. J'en ai parlé, parce que, au Guatemala, la même entreprise construisait le même genre de mine — c'est une mine d'or à ciel ouvert —, et la population était préoccupée parce qu'elle avait entendu ce qui s'était passé à San Martin, dans la vallée Siria, au Honduras.
    Nous parlons donc de problèmes relatifs à la qualité de l'eau. Quelles sont les sources d'eau potable que ces gens utilisent pour leur propre consommation et celle de leurs animaux, etc.? Ont-ils toujours accès à des sources d'eau locales ou doivent-ils se procurer de l'eau d'ailleurs? S'il s'agit d'un problème d'eau, d'où l'obtiennent-ils?
    C'est une excellente question. La dernière fois que je me trouvais dans la vallée, c'était l'an dernier. D'après les dernières nouvelles que j'ai reçues, cette mine est en train de fermer ses portes. Les gens recueillaient de l'eau des rivières et des puits. Il semble que 20 des 22 rivières s'étaient complètement asséchées, ce qui signifie qu'il ne restait plus que deux rivières, et les puits s'étaient également asséchés. J'ai rencontré des fermiers qui se sont plaints que leur bétail refusait de boire l'eau disponible parce qu'elle était d'une couleur très rouge et dégageait une odeur. Le bétail a senti que quelque chose n'allait pas avec cette eau.
    Ce que les gens faisaient, c'est que ceux qui avaient de l'argent achetaient de l'eau dans de gros barils — ceux qui pouvaient se le permettre. Ceux qui ne pouvaient pas se le permettre continuaient à boire l'eau des puits existants, et, en raison de cela, ils avaient le sentiment qu'ils étaient atteints de quantité de maladies. C'est assez traumatisant. Quand vous visitez la région, vous n'avez pas besoin d'aller loin pour rencontrer des gens qui vous diront qu'ils sont très malades et qui ont des preuves pour en attester.
    La question de l'eau est très grave. D'après ce que je comprends, de nombreux hydrogéologues respectés affirment qu'il s'agit d'un problème très répandu quand il y a de l'exploitation minière à ciel ouvert; on constate qu'il y a souvent de la concurrence pour l'eau. Ce type de mines consomment des dizaines de milliers de litres d'eau par heure. Les entreprises prétendent recycler une partie de l'eau, mais c'est également discutable.
    Alors, que font les gens? Ils boivent... Ceux qui peuvent se le permettre devront acheter l'eau, mais ceux qui ne peuvent se le permettre continuent de boire l'eau des puits existants, et ils se sentent incroyablement frustrés.
    Ont-ils touché des indemnités pour leur permettre d'acheter l'eau dont ils ont besoin pour alimenter leurs familles et leurs animaux?
    Autant que je sache, non. Je sais que l'entreprise minière a fourni de l'eau dont elle a précisé qu'elle ne devait pas servir à la consommation humaine. C'est bien entendu parce qu'elle était trop toxique pour la consommation humaine. L'entreprise l'admettait.
    À cela, les gens répondaient que, eh bien, on leur disait de se servir de cette eau pour laver leurs vêtements et peut-être arroser leurs récoltes, de sorte qu'il était impossible qu'elle ne pénètre pas dans leur corps. Ils affirment que s'ils arrosent leurs récoltes avec cette eau, elle infiltre la terre et est ensuite absorbée par les aliments qu'ils mangent. Alors ils trouvaient que c'était un geste plutôt ridicule de la part de l'entreprise; c'était ce que ressentaient certains d'entre eux.
    Autant que je sache, ils n'ont jamais touché d'indemnités pour l'eau potable. Voilà ce que j'en sais.
    Je vous remercie de votre réponse.
    Je suis également préoccupé par la manière dont l'ambassade vous a traité. Il y a plus de 20 ans, je me trouvais au Guatemala et j'ai eu besoin des services de l'ambassade. Je suis un peu perturbé par la manière dont l'ambassade vous a traité. Je veux dire, cela s'est produit...
    L'ambassadeur n'est plus en place, n'est-ce pas?
    C'est exact.
    À l'heure actuelle, l'ambassade a-t-elle un point de vue différent? Savez-vous ce qu'elle répond aux allégations de la population de la région et à ses préoccupations? Savez-vous si l'ambassade a changé de point de vue, ou est-elle restée campée sur ses positions? Peut-être ne le savez-vous pas?

  (1200)  

    Je ne pourrais pas faire de commentaires sur des changements qui auraient pu avoir lieu depuis que l'ambassadeur Kenneth Cook a quitté son poste.
    Je pense que cela pourrait intéresser le comité. Nous pourrions peut-être trouver le moyen de nous informer à ce sujet. Je suppose que je pourrais écrire une lettre afin de connaître le point de vue actuel. Nous devons adopter un point de vue impartial, et si nous donnons l'impression que la balance penche d'un côté ou de l'autre... y compris de votre côté...
    Si l'ambassadeur a pris connaissance de vos données probantes, il ne devrait pas aller faire la promotion de votre film pour la seule raison que vous lui avez fait connaître votre point de vue, pas plus qu'il ne devrait le faire pour le point de vue opposé. C'est de la diplomatie élémentaire. De sorte que je trouve cela préoccupant, particulièrement au moment où nous élargissons nos activités en Amérique latine et que nous semblons vouloir faire la promotion de nos intérêts commerciaux au détriment d'autres intérêts.
    Je vais maintenant adresser mes questions à M. Steiner.
    Vos commentaires sur le projet Nautilus m'intéressent. À la lumière des événements qui se sont déroulés récemment, pourquoi devrions-nous nous préoccuper de ce projet? Pourquoi, en particulier, le Canada devrait-il s'en préoccuper? Comment le projet de loi C-300 pourrait-il avoir un véritable effet sur ce projet, et quelles sont vos préoccupations?
    Dans le cas du projet Nautilus, à un certain moment, le siège social de l'entreprise se trouvait à Vancouver, puis à Toronto; ainsi, le Canada a des intérêts miniers dans ce projet. Je pense que Barrick pourrait avoir des intérêts dans ce projet. Je ne connais pas très bien la structure du consortium d'entreprises, mais le projet est allé de l'avant. À l'échelon local, tout le long de la côte de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, bon nombre des questions en matière d'engagement civique ont été posées. Beaucoup de gens ont l'impression qu'on ne les écoute pas.
    C'est la même bonne vieille méthode où Nautilus, l'entreprise, a payé des personnes choisies pour prétendre que le projet est acceptable, qu'il ne causera pas de tort. À mon avis, l'entreprise a contourné le processus gouvernemental là-bas, et, dans les pays en voie de développement, c'est assez facile.
    À l'heure actuelle, dans les pays en voie de développement, aux États-Unis, c'est assez facile pour ces entreprises de l'industrie extractive très futées de contourner le processus gouvernemental. C'est encore plus facile pour elles de se comporter ainsi avec les gouvernements des pays en voie de développement, comme la Papouasie-Nouvelle-Guinée. C'est facile de corrompre. C'est facile de donner des pots-de-vin. C'est facile de contourner le processus, et c'est ce qui s'est produit là-bas.
    Je ne crois pas que l'énoncé des incidences environnementales... J'ai rédigé un long examen technique de ce document, et il ne convenait tout simplement pas aux fins auxquelles il devait servir... Si le projet de loi C-300 était adopté, les populations locales de la Papouasie-Nouvelle-Guinée pourraient déposer une plainte selon laquelle il n'y a pas eu de transparence, d'engagement civique et de consentement préalable libre et éclairé et que les entreprises n'ont pas encore obtenu l'approbation publique. Alors, vos ministres pourraient examiner cette situation et établir la validité de ces allégations, puis proposer des mesures d'atténuation appropriées.
    À propos de la question que vous avez posée, je voulais également dire...
    Puis-je vous interrompre un instant? Excusez-moi, mais pourriez-vous me rappeler la nature exacte du projet Nautilus?
    Je suis désolé. Très exactement, il s'agit de la toute première initiative commerciale d'extraction minière dans les grands fonds marins de l'histoire. Il s'agit d'exploiter les importants dépôts de minéraux sulfurés des systèmes hydrothermaux des grands fonds marins, à un mille de profondeur dans la mer de Bismarck, au large de la Nouvelle-Irlande et de la Papouasie-Nouvelle-Guinée. C'est le premier projet de ce genre de l'histoire. Il s'agit d'une technologie remarquable, mais comme il s'agit du premier projet de ce genre de l'histoire, qui devrait faire l'objet d'un examen minutieux, tant par le gouvernement de la Papouasie-Nouvelle-Guinée que par l'entreprise et les gouvernements hôtes — ainsi que par le gouvernement du Canada.
    Si vous me permettez d'ajouter quelque chose, en ce qui concerne le lien avec l'ambassade mentionné par M. Schnoor, je me suis rappelé une rencontre avec les représentants de l'ambassade américaine tandis que je me trouvais au Salvador il y a deux mois; la réunion portait sur des problèmes avec Pacific Rim, parce que le permis d'exploitation de ce projet est inscrit aux États-Unis, pas seulement au Canada. Les représentants se rangeaient complètement aux côtés de l'entreprise, contre le gouvernement du Salvador et contre la population de Cabañas, où on propose d'exploiter la mine. J'ai trouvé cela stupéfiant. Cela se déroule sous l'administration Obama. — remarquez qu'il s'agit d'une nouvelle administration, et le nouvel ambassadeur n'est pas encore arrivé là-bas —, ils appuient ce projet.
    Pacific Rim a déposé une plainte aux termes de la CAFTA au Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements, à la Banque mondiale, à Washington. Ces différends sont en cours d'arbitrage au moment même où nous nous parlons. L'ambassade américaine affirme soutenir les plaintes déposées par l'entreprise, qui exige des indemnités à hauteur de centaines de millions de dollars du gouvernement du Salvador parce qu'il ne lui a pas accordé le permis d'exploitation dont elle avait besoin.
    J'affirme que les ambassades doivent faire preuve de beaucoup plus de diplomatie; ce problème n'est pas l'apanage du Canada.

  (1205)  

    Bon point.
    Merci, monsieur Dewar.
    Je crois que M. Patry a une question de 30 secondes à poser. Nous allons ensuite suspendre la séance.
    Oui. Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Steiner, vous venez de mentionner un point relatif au Salvador. J'aimerais en savoir plus, parce que, d'après ce que j'en comprends, c'est la première fois au monde qu'un pays a mis fin à toutes les activités d'exploitation minière, parce qu'il semble que c'est un exemple très utile pour ces pays.
    Au Salvador, est-ce que toutes les entreprises à qui on a interdit d'exercer leurs activités — je ne dis pas qu'on les a jetées dehors — étaient des entreprises canadiennes? Y a-t-il eu des conséquences importantes pour le Salvador à ce moment-là? Y a-t-il eu des conséquences?
    Cette situation illustre un lien important avec ce que le projet de loi C-300 permettrait de faire. Si le projet de loi C-300 avait eu force de loi il y a cinq ou dix ans, alors l'entreprise au coeur du projet cité par M. Schnoor dans la vallée de la Siria, au Honduras, le projet San Martin, aurait exercé ses activités de manière beaucoup plus responsable.
    Voici comment fonctionne la dissémination de l'information au-delà des frontières. Les gens de Cabañas au Salvador se sont rendus sur le site de la mine San Martin. Ils ont constaté les atrocités qui se sont déroulées là-bas. Ils sont entrés au Salvador et ont dit: « Il est hors de question que nous acceptions que l'on fasse ce genre de tort au Salvador ». Ce message s'est répandu partout dans le pays. Le nouveau président a affirmé: « Cela n'en vaut pas la peine et nous proposons d'interdire toute exploitation minière des métaux au pays.
    Oui, pour autant que je sache, ce serait le premier pays au monde à prendre de telles... Pensez à l'inconfortable position concurrentielle dans laquelle se retrouvent d'autres entreprises canadiennes légitimes d'exploitation minière qui pourraient vouloir faire de l'exploitation minière au Salvador à l'avenir.
    C'est la raison pour laquelle il s'agit d'une loi très prudente, selon moi, qui favorise les intérêts du développement économique.
    Merci.
    D'accord.
    Je voudrais faire un rappel au Règlement.
    Le président: Maintenant? D'accord, je vais attendre.
    M. Peter Goldring: Je l'espère bien.
    Au cours de notre échange, M.Steiner a mentionné que la RSE, aux États-Unis, impose l'obligation de se conformer aux normes internationales en matière de droits de la personne à l'industrie extractive, mais également à toutes les industries. Il serait utile de comprendre les pratiques exemplaires mises en oeuvre dans d'autres pays; nous pourrions peut-être avoir de la documentation à ce sujet. Cela nous serait très utile, particulièrement compte tenu du fait que nous allons procéder à un examen article par article par la suite.
    D'accord. Je ne suis pas convaincu qu'il s'agisse d'un rappel au Règlement, mais en tout cas... Je ne sais pas où nous allons obtenir cette information.
    D'accord...
    La Bibliothèque du Parlement.
    J'aimerais remercier nos deux témoins.
    Monsieur Schnoor, je vous remercie d'avoir comparu devant nous aujourd'hui.
    Monsieur Steiner, je vous remercie également.
    Je vais suspendre la séance pendant une minute afin de nous permettre de changer les porte-noms et d'accueillir de nouveaux témoins. Puis, nous reprendrons nos travaux. Merci.

    


    

  (1210)  

    Avant de donner la parole à M. Dade, je sais que M. Abbot aimerait faire une suggestion.
    J'ai fait une suggestion à certains membres du comité et à nos whips: puisque M. Obhrai, M. Rae et moi-même ne pourrons assister aux réunions du comité du 1er et du 3 juin, annulons ces réunions et reportons-les au 8 et au 10 juin, et ainsi de suite.
    J'aimerais donc proposer une motion à cette fin.
    J'ai un rappel au Règlement.
    En toute honnêteté à l'égard de M. Abbott, il a sollicité mon avis et celui d'autres, et il sait que je m'y oppose. En matière de procédure, nous n'avons pas encore été saisis de cette question en ce moment. Il peut toujours proposer la motion, mais je ne suis pas disposé à y consentir en ce moment. Nous n'avons pas été saisis de cette question, alors je ne vois pas... à moins qu'il n'ait le consentement unanime pour aller de l'avant.
    Franchement, je ne vois pas à quoi cela sert. Les membres du comité sont souvent à l'extérieur du pays ou à l'extérieur de la ville, et ils se font remplacer. Nous avons perdu beaucoup de temps en raison de la prorogation. Nous avons beaucoup de travail à faire. Alors, ne serait-ce que pour une question de procédure, à moins qu'il n'y ait consensus, je pense que ce n'est pas approprié.
    Merci.
    J'ai l'impression que je n'ai pas ce consensus, alors nous allons devoir en parler une autre fois. L'idée est lancée. Nous pourrions en parler à la prochaine réunion. Il faudra 48 heures pour l'intégrer à l'ordre du jour, puisque je constate que nous n'avons pas consensus, et, à l'heure actuelle, nous sommes saisis du projet de loi C-300.
    Madame Deschamps, vous avez une question rapide ou un rappel au Règlement?

[Français]

    Je vais être très brève. Je demande si le comité est d'accord pour qu'on puisse se garder quelques minutes à la fin de la séance pour parler des travaux à venir ou, à tout le moins, de l'ordre du jour. On ne sera pas là la semaine prochaine et le 27, on aura la visite du président du Mexique. Il faudrait peut-être qu'on ait des éclaircissements. J'ai certaines questions à poser.

[Traduction]

    Nous allons discuter de plusieurs choses, et j'ai prévu quelques minutes pour cela. C'est ce que nous allons faire tout de suite. Je sais que le président s'en vient.
    Monsieur Dade, vous avez fait preuve de patience. Je vous en remercie. Nous allons vous donner la parole à l'instant. Vous aurez 10 minutes pour prononcer une déclaration préliminaire. Vous avez déjà comparu devant des comités, et vous savez comment cela se passe. Vous parlerez en premier, puis nous ferons un tour de table pour discuter.
    Je crois que M. Dade s'est déjà présenté devant le comité du commerce international et qu'il est très bien renseigné sur la situation en Amérique du Sud et en Amérique latine.
    Bienvenue, monsieur. Nous sommes heureux de vous avoir parmi nous. Vous avez la parole.

[Français]

    Bien sûr, c'est un plaisir que de rencontrer de nouveau les membres du comité. Le dernière fois, je pense que nous avions discuté de Haïti. Depuis, nous avons bougé un peu.

[Traduction]

    C'est réellement un plaisir pour moi d'être ici. Je remercie le comité de m'avoir invité.
    C'est également un peu déconcertant d'être le seul témoin. J'ai déjà entendu dire que seuls des ministres ou des gens qui avaient de graves problèmes pouvaient se présenter devant un comité à titre de seuls témoins. Je sais que je ne suis pas un ministre, et j'espère bien que je ne suis pas non plus dans l'autre cas.
    Encore une fois, merci. C'est un plaisir d'être ici ce matin pour discuter du projet de loi C-300.
    J'aimerais parler du contexte dans lequel j'ai préparé mon exposé. On apprend beaucoup de ses professeurs du collège, mais ce qu'on apprend, ce n'est pas toujours lié à ce qui nous est enseigné. Un de mes anciens professeurs du collège disait que l'on se fait une idée d'une situation à partir de sa propre situation. C'est pourquoi avant de passer à mon exposé, je vous expliquerai les perspectives selon lesquelles nous avons analysé le projet de loi C-300.
    Premièrement, il y a la perspective de la Fondation canadienne pour les Amériques. C'est le seul groupe de réflexion canadien indépendant et non relié au milieu universitaire qui s'occupe de l'engagement des Canadiens dans cette partie du monde. Il se trouve donc à la croisée des chemins entre le milieu universitaire, la société civile, le secteur privé et le gouvernement. Nous avons noué des liens dans chaque secteur; nous le comprenons et nous sommes en mesure de collaborer avec chacun. Nous connaissons l'opinion des intervenants de chacun de ces secteurs, et nous pouvons discuter avec eux.
    Nous avons noué des relations du même type avec les institutions de politiques publiques du monde entier; ces institutions sont un peu nos soeurs, et nous pouvons échanger avec elles. Nous connaissons dans chaque pays de cette partie du monde une institution avec laquelle nous travaillons en étroite collaboration et dont la structure est semblable à celle de FOCAL, qui est je le répète un organisme indépendant de recherche sur les politiques.
    En lien justement avec le sujet qui nous occupe, nous avons déjà, également, travaillé dans le domaine du commerce et du développement ainsi que dans le domaine de la gouvernance indigène et de la responsabilité sociale des entreprises des industries extractives. C'était un projet hérité de l'Institut Nord-Sud; il était mené par une femme de la Colombie qui avait des opinions très bien définies au sujet de l'industrie minière, mais qui était également capable de faire des choses très intéressantes pour tenter d'amener les trois secteurs en question — le gouvernement, les groupes indigènes et le secteur privé — à discuter des enjeux et à essayer de concevoir de nouveaux cadres pour améliorer la discussion.
    Nous avons également effectué des enquêtes sur la pratique touchant la responsabilité sociale des entreprises et sur les investissements — en temps, en argent et en ressources — des entreprises canadiennes dans les projets de développement social, économique et communautaire.
    Voilà la perspective que nous donne la Fondation canadienne pour les Amériques.
    L'autre perspective est ma perspective personnelle. J'ai travaillé pendant 10 ans sur l'enjeu de la responsabilité sociale des entreprises dans les Amériques. Avant d'arriver au Canada et d'être recruté par la Fondation, j'occupais une position réellement unique qui m'a amené à travailler dans trois secteurs. J'ai travaillé sur le terrain, dans des collectivités pauvres et marginalisées d'Haïti, de la République dominicaine et d'ailleurs, afin de les aider à mettre en oeuvre leurs propres projets de développement social, ce qui se faisait souvent avec des sociétés minières et des entreprises du secteur privé et avec des banques. Les projets étaient réalisés non seulement avec des multinationales, mais avec de petites et moyennes entreprises de ces pays, également, et la gamme des activités liées à la responsabilité sociale des entreprises était complète.
    J'ai aussi travaillé avec les décideurs du gouvernement des États-Unis à l'élaboration d'une politique sur la responsabilité sociale des entreprises, tant dans les missions des pays où j'avais déjà travaillé qu'à Washington, en collaboration avec d'autres organismes du gouvernement américain.
    C'était donc, à mon avis, une position plutôt unique, qui m'a permis de comprendre la situation dans son ensemble, du point de vue général comme du point de vue particulier.
    Cette analyse nous permet donc très rapidement de voir le projet de loi C-300 comme une tentative de votre comité et du Parlement pour faire en sorte que les retombées de l'exploitation minière par des entreprises canadiennes soient plus positives pour les collectivités touchées. Nous avons analysé le projet de loi, ce qu'il propose et ce qu'il offre.
    Selon notre analyse, le projet de loi n'offre rien de plus que ce qui existe déjà et que ce qu'on peut réaliser avec l'aide des agents chargés de la conformité et des mécanismes internationaux déjà en place, comme les Principes de l'Équateur. En fait, ce projet de loi semble à certains égards avoir beaucoup moins de mordant que les Principes de l'Équateur et que d'autres mécanismes déjà accessibles.
    En même temps, il pourrait entraîner des coûts importants pour les entreprises minières du Canada, et pour les entreprises canadiennes seulement, et c'est un point important. Quand je travaillais sur le terrain, j'ai très souvent pu observer les répercussions des investissements privés et du comportement des entreprises, y compris leurs répercussions et leurs contributions positives.
    Nous savons que des dommages sont causés. Nous savons que les sociétés minières en causent. Et cela se produit dans des collectivités pauvres, chez qui la culture sur brûlis est la norme, un type de culture qui détruit les forêts et les terres.

  (1215)  

    La situation sur le terrain est très complexe, mais pour chaque exemple que nous connaissons d'une société minière canadienne qui a fait quelque chose de dommageable, je suis convaincu que je peux trouver trois exemples d'investissements faits dans les collectivités: amélioration des résultats en éducation et en santé et hausse de la qualité de vie des collectivités.
    Tout cela est complexe, mais si vous voulez mettre une politique en oeuvre, sachez qu'une politique efficace ne doit pas être fondée sur des cas sensationnels, qu'ils soient déplorables ou remarquables. Une politique doit être fondée sur une analyse rigoureuse et rationnelle de la situation réelle.
    Malheureusement, le projet de loi met en relief les aspects punitifs et, je le répète encore une fois, des aspects punitifs inefficaces. En visant l'amélioration des conditions sur le terrain, il laisse de côté les possibilités gigantesques et les énormes investissements que l'on pourrait entraîner en mettant l'accent sur le bon travail et les bonnes pratiques des sociétés bancaires du Canada et aussi des entreprises de l'industrie extractive, de l'ensemble des entreprises canadiennes.
    Je vais vous donner à titre d'exemple de cas où les choses peuvent mal tourner un compte rendu de l'expérience de Talisman, au Soudan. Plusieurs facteurs entrent en jeu, encore une fois. Talisman se trouvait au Soudan. Il y a eu des problèmes. L'entreprise a décidé d'y réagir en adoptant un programme de RSE très rigoureux et sérieux. Les activistes et les ONG activistes canadiens ont exercé des pressions, et l'entreprise a dû quitter le pays.
    Le projet a été repris par des Chinois et des Indiens. La première chose qu'ils ont faite — la première chose —, avant même de changer les noms sur la porte, a été de mettre la hache dans les initiatives de RSE car ils n'en comprenaient pas l'importance et ignoraient qu'ils pouvaient en tirer des avantages. Le pétrole du Soudan est toujours vendu à l'extérieur du pays. Ce sont les Chinois qui contrôlent les investissements. Pour la collectivité, la situation est encore pire qu'avant. Ce scénario peut se répéter partout dans l'hémisphère.
    Les entreprises canadiennes sont engagées, et elles mènent des projets positifs sur le terrain. Encore une fois, je peux vous donner autant de bons que de mauvais exemples de ce qui se fait. Pourtant, si on affaiblit les entreprises canadiennes en leur imposant des coûts et en nuisant à leur réputation et en demandant aux ministres d'y voir, nous pouvons provoquer de graves dommages.
    Ces dommages seraient acceptables si les résultats sur le terrain le justifiaient, si, par différents projets, on améliorait de façon visible et quantifiable les conditions de vie des collectivités touchées. Mais le projet de loi ne prévoit rien à cet égard, et ce danger est bien réel. Je peux en parler, j'en ai fait directement l'expérience pendant le projet de Falconbridge en République dominicaine, mon emploi précédent, et je peux vous dire ce que nous avons fait.
    Le véritable problème, à mon avis, c'est que le Canada a un bon modèle, et c'est un modèle que, partout dans l'hémisphère, on cherche à copier et que l'on envie, en ce qui concerne les pratiques relatives à la responsabilité sociale des entreprises. Je peux vous raconter des anecdotes, mais je peux aussi vous donner des chiffres à ce sujet.
    Laissez-moi rapidement vous raconter quelque chose. Je me trouvais à Madrid, il y a environ deux ans, et je m'entretenais avec des homologues de deux des principaux groupes de réflexion de l'Amérique latine, le Real Instituto Elcano et la Fundacion Carolina. Ces deux groupes viennent tout juste de commencer à travailler sur la responsabilité sociale des entreprises.
    Le gouvernement et le secteur privé espagnols ont estimé que leur réputation était ternie et qu'ils faisaient face à un désavantage concurrentiel en raison de leurs mauvaises notes au chapitre de la RSE, et ont pris des mesures énergiques pour régler ce problème. Mes homologues des groupes de réflexion espagnols m'ont demandé si je pouvais les faire profiter de l'expérience du Canada; ils m'ont dit que le Canada jouissait dans la région d'une bonne réputation et qu'ils considéraient que les entreprises canadiennes étaient avisées. Ils m'ont demandé de les faire profiter de cette expérience.
    Sur le moment, je me suis dit qu'ils étaient devenus fous. Ils ont un avantage concurrentiel sur nous en raison de la langue, de la culture et de l'immigration. Le seul avantage que nous possédons, par rapport à nos concurrents espagnols, réside dans la réputation des entreprises canadiennes. Nous sommes peut-être jeunes, mais nous ne sommes plus des enfants et nous n'allons pas leur abandonner tout cela. Nous pouvons cependant collaborer, de manière plus générale, dans le grand domaine des pratiques en matière de responsabilité sociale des entreprises. Je serais heureux d'en discuter.
    Pour finir, il existe des options et des solutions. On peut faire plusieurs choses. Au lieu de créer un autre niveau hiérarchique, de demander davantage de rapports, d'imposer d'autres coûts au gouvernement, on peut recourir à d'autres mécanismes.
    Il y a à EDC un agent chargé de la conformité. La plupart des sommes dont nous parlons sont versées par le truchement d'EDC. Pourquoi ne pas tout simplement renforcer cette fonction? Créer un programme équivalent à celui de la Société financière internationale ou de la Banque interaméricaine de développement, qui serait doté du personnel et des ressources nécessaires pour mener plus rapidement ses enquêtes.

  (1220)  

    C'est insensé de demander un examen à EDC, un second à l'échelon ministériel et encore un autre au Régime de pensions du Canada... On serait mieux avisé de procéder à un examen rigoureux là où c'est important, là où tout a débuté.
    On peut également travailler en se conformant aux Principes de l'Équateur. On donnerait ainsi à toutes les entreprises du monde, peu importe à quel pays elles appartiennent, des chances égales.
    Encore une fois, en ce qui concerne l'efficacité, si je dirige une société minière et que je n'arrive pas à trouver moi-même de l'argent et si je dois me tourner vers le secteur privé, est-ce que je craindrais de perdre l'argent que pourrait me donner EDC? Jusqu'à un certain point, oui, je le craindrais. Mais est-ce que je craindrais autant de perdre l'argent d'EDC que l'argent de l'Australian Export Finance and Insurance Corporation et des grandes banques commerciales comme l'Arab African International Bank, la Banco do Brasil, la Bank of America, la City Bank, CIBC, la Banque de Montréal, la Banque Royale et la Scotia Bank et ainsi de suite jusqu'à Wells Fargo?
    Les Principes de l'Équateur ont tout cet appui. Voilà les mécanismes efficaces que nous devons examiner; ils ont été mis à l'essai et ils s'appuient sur davantage de ressources. C'est pourquoi je crois qu'il existe des solutions de rechange. Je serais heureux de discuter avec ces représentants.
    La SFI et le Prince of Wales Business Leaders Forum ont établi une nouvelle carte routière pour l'intégration des droits de la personne. À mon avis, on ne pourrait pas mieux investir notre temps et notre argent; on devrait non pas créer une nouvelle bureaucratie qui n'améliore aucunement la situation sur le terrain, mais plutôt travailler de concert avec des mécanismes efficaces et éprouvés, qui ont réellement un caractère multilatéral et qui peuvent améliorer la situation sur le terrain.
    J'ai terminé. Merci.

  (1225)  

    Merci, monsieur Dade.
    C'est M. McKay qui posera la première question.
    Merci, monsieur Dade, de ce témoignage.
    Monsieur Dade, vous avez donné l'exemple de l'entreprise Talisman. C'est un choix curieux de votre part. Talisman exerçait ses activités au Soudan. Elle y avait des actifs très importants. Cependant, tout le monde savait qu'elle ne respectait sûrement aucune norme en matière de responsabilité sociale et ne se conformait ni aux Principes de l'Équateur, ni aux exigences de la SFI, ni à quoi que ce soit d'autre. On a même affirmé qu'elle aurait soutenu le génocide contre le peuple du Darfour. Elle était l'objet de critiques sévères du monde entier. Au bout du compte, elle a choisi de se départir de ses actifs, et elle a bien fait.
    Aujourd'hui, Talisman sert plus ou moins de modèle en matière de responsabilité sociale des entreprises. Ses représentants ont participé à la rédaction des rapports des tables rondes et étaient en faveur de la création d'un poste d'ombudsman. En outre, le prix des actions est assez stable. Les actifs de cette entreprise sont assez élevés, et les actionnaires peuvent dormir en paix. Ils ne sont pas visés par toutes ces allégations. C'est pourquoi je trouve que votre choix est très curieux.
    Ce qui m'étonne, dans votre témoignage, monsieur Dade, c'est que vous semblez dire que même si une entreprise canadienne n'assume pas ses responsabilités sociales, qu'elle foule aux pieds les droits de la personne et qu'il est permis de croire qu'elle soutient le génocide, on peut bien l'accepter car une autre entreprise la remplacera et prendra en charge ses actifs.
    Il me semble que c'est votre position, monsieur Dade. Est-ce que c'est bien votre position?
    Votre analyse et vos affirmations sont incorrectes.
    En premier lieu, la situation sur le terrain, en ce qui concerne Talisman, était trop compliquée pour qu'on réussisse à en faire un résumé clair à l'intention du comité, dans les délais dont nous disposons.
    Je m'arrête sur le mot « génocide »; j'insiste sur le fait que, pour porter de telles accusations, il faut avoir des preuves sérieuses, et je n'en ai pas. Je ne crois pas que quiconque ait des preuves touchant ce génocide.
    Bien sûr, quelques problèmes se sont posés pendant l'exploitation de la mine. Les responsables de Talisman se sont occupés assez tard de la question de la RSE, mais ils ont fini par s'en occuper, et ils l'ont fait dans le contexte soudanais. Ils ont décidé de modifier leurs pratiques. Ils ont étudié leurs leçons et ont commencé à prendre des mesures pour intervenir. Ils ont lancé des projets de RSE et ont voulu en faire plus pour la collectivité et mieux respecter les droits de la personne.
    L'entreprise a reçu une dure leçon, au Soudan et a dû réagir très vide. Ces décisions, ces projets et ces signes positifs ont été occultés lorsque l'entreprise a quitté les lieux, et c'est pourquoi je ne peux accepter — et je crois que c'est l'avis de la plupart des membres du comité — que l'on associe à ce qui s'est réellement passé tout le tapage autour du génocide.
    Ce que je veux vous faire comprendre, c'est que les responsables voulaient changer leurs façons de faire en adoptant de meilleures pratiques en matière de RSE, et que tout ce qu'ils ont fait a finalement été occulté. On peut bien dire que la situation par la suite était pire qu'avant.
    Il se trouve, monsieur Dade, qu'un membre de notre comité est déjà allé au Soudan à de nombreuses reprises, et j'ose dire qu'il vous contredirait probablement. C'est pourquoi j'ai dit qu'il est “permis de croire“ qu'elle soutient le génocide. Vous avez raison de dire...
    Une voix: C'est beaucoup mieux comme ça, John.
    Une voix: Ça me pose problème...
    L'hon. John McKay: Merci de votre soutien, messieurs.
    C'est que, monsieur Dade, vous semblez soutenir que, dans la mesure où une entreprise quelconque, venant d'un pays ou d'un autre, est prête à entreprendre ce type d'activités, elle peut faire tout ce qu'il faut faire pour accéder à l'actif qui l'intéresse et que tout est parfait comme cela. Sinon, c'est une autre entreprise qui s'en chargera.
    Non, ce n'est pas cela que je dis.
    Laissez-moi le dire autrement. Ce qui se passe, c'est que les entreprises investissent et adoptent des pratiques de RSE et tentent d'améliorer la vie de la collectivité. Elles mènent des consultations et investissent dans les aspects sociaux. C'est le type d'entreprises que nous voulons soutenir. C'est le type d'activités que nous voulons encourager.
    L'industrie minière a le potentiel de réellement transformer les collectivités et de favoriser leur développement, si elle agit comme il faut — si elle investit dans la collectivité et si elle la consulte. Dans certaines collectivités, les possibilités de gagner de l'argent sont rares. L'exploitation minière, lorsqu'elle se déroule de la bonne façon, peut avoir un effet transformateur.
    Dans ces cas-là, nous voulons collaborer avec les entreprises qui assument leurs responsabilités sociales et qui essaient de faire des choses. C'est cela que je veux dire, et c'est ce qui se passait au Soudan.

  (1230)  

    Monsieur Dade, je soulèverais peut-être une préoccupation... Pour certaines des personnes qui sont assises derrière vous, les sociétés minières canadiennes posent un réel problème. Le problème, c'est que si des gens essaient d'entamer des poursuites pour obtenir réparation, dans leur propre pays, elles ne pourront pas obtenir satisfaction parce que la gouvernance y est faible.
    Si ces gens viennent ici, leur cause sera rejetée en raison de la règle du forum non conveniens: ce qui se passe ailleurs n'est pas de nos affaires. S'ils demandent au gouvernement canadien d'intervenir d'une façon ou d'une autre, ils n'auront plus personne vers qui se tourner puisque rien dans la loi ne le leur permet.
    Vous semblez vouloir que: a) personne ne puisse obtenir réparation; b) le respect des principes soit volontaire. Pourtant, les gens qui sont assis derrière vous affirment que ces entreprises n'ont jamais tenu compte des droits de ces personnes ni des dommages environnementaux qui pourraient affecter leur pays et qu'elles n'ont pas non plus tenu compte de tout ce qui permettrait aux entreprises d'obtenir un permis social afin d'exercer leurs activités.
    Vous semblez défendre la position selon laquelle ces gens ne devraient avoir aucun recours, même en vertu d'un instrument modeste comme le projet de loi C-300.
    Eh bien, je trouve étrange que vous ayez commencé par parler des problèmes de gouvernance et d'absence de recours dans les pays où ces entreprises exercent leurs activités. La situation à Haïti nous a occupés assez longtemps, et le Canada a déclaré — c'était la déclaration qu'il devait faire, en passant — que Haït doit prendre les choses en main, que Haïti doit prendre la direction, que la souveraineté des Haïtiens est le principal objectif des décisions qui seront prises par le gouvernement et que nous devons respecter le désir du gouvernement, les lois du pays, le Parlement et les décisions qu'il prendra.
    Pourtant, quand il est question des pays de cet hémisphère qui, dit-on, possède des institutions juridiques solides, dont les gouvernements sont élus, dont les institutions s'accordent avec les gouvernements élus — même si ce n'est pas à la perfection —, nous décidons, si nous n'aimons pas ce qui s'y fait, de tout simplement fermer les yeux et de leur dire ce qu'ils devraient faire: nous disons que le Canada est beaucoup mieux placé pour exploiter leur environnement et mettre de l'ordre dans leurs pratiques de travail.
    Il existe, évidemment, des cas de violation flagrante des droits de la personne. Le droit à la protection, évidemment... mais je crois qu'il y a une énorme différence entre une violation flagrante et certaines des accusations qui ont été portées. Je le répète, on entend toutes sortes d'accusations... J'ai entendu tellement de choses de la part des ONG de ces collectivités. J'ai travaillé avec certaines de ces collectivités, sur le terrain, et j'ai eu affaire à des ONG — pour les financer, pour travailler de concert — et je sais qu'il est parfois difficile de savoir où se trouve la vérité.
    Nous ne pouvons pas agir en fonction d'accusations non fondées pour rendre un verdict et imposer un châtiment, et c'est ce que nous sommes en train de faire avec ces accusations non fondées...
    [Note de la rédaction: Inaudible]... certainement plus que ce que vous pourriez découvrir selon votre système...
    En ce qui concerne l'accès... Les gens ont accès en vertu des Principes de l'Équateur et par le truchement de la SFI. J'ai à la SFI des collègues avec qui je m'entretiens régulièrement. Je leur ai justement parlé, hier, au sujet des enquêtes qu'ils mènent et des ressources qu'ils y consacrent.
    Dire que les gens n'ont pas accès, c'est tout simplement faire une déclaration qui n'est étayée ni sur des faits ni sur des preuves. La SFI mène des enquêtes poussées. EDC mène aussi des enquêtes. Il existe des mécanismes, et on y a recours, et dire que...
    Le président: Je m'excuse, monsieur Dade...
    M. Carlo Dade: Je m'excuse.
    Le temps est écoulé.
    Nous allons donner la parole à Mme Deschamps, qui dispose d'un délai de sept minutes. Allez-y, s'il vous plaît.

[Français]

    Je vais laisser la parole à mon invitée d'aujourd'hui.
    Bonjour. J'ai simplement une courte question pour vous. Je ne connais pas la Fondation canadienne pour les Amériques.
    De quels organismes vos budgets proviennent-ils? Est-ce que des compagnies vous financent? D'où viennent vos budgets?
    Comme tous les centres d'investigation, les centres de recherche dans les Amériques,

[Traduction]

Nous recevons notre financement de toutes sortes de sources. Nous nous disputons les mêmes sources de financement et nous recevons notre financement de la même manière que le reçoit la Brookings Institution, Fedesarrollo, en Colombie et Consejo Mexicano de Asuntos Internacionales. Nous recevons de l'argent du gouvernement.
Nous recevons une assez bonne somme du gouvernement canadien. Mais, quand on parle du Canada, ce n'est évidemment pas une surprise pour quiconque.
    Nous recevons un peu d'argent de la Banque interaméricaine de développement. Nous recevons aussi de l'argent de la Fondation Ford et, à l'occasion, nous recevons un peu d'argent du secteur privé.
    Évidemment, il s'agit du Canada, et nous n'avons pas comme nos homologues des États-Unis la chance d'être financés par le secteur privé. Il s'agit d'un centre indépendant et neutre de recherche sur les politiques, qu'on appelle aussi un centre d'investigation ou un centre de réflexion.

  (1235)  

[Français]

    Vos recherches, vos enquêtes, touchent-elles surtout au domaine de l'industrie, ou est-ce que vous nous présentez votre point de vue aujourd'hui parce qu'on parle des compagnies minières et autres?
    Non, les investigations portent sur tous les aspects de l'engagement du Canada dans les Amériques: commerce, éducation, santé et responsabilité sociale des entreprises. Donc, il y a tout le range des activités du Canada dans les Amériques et aussi aux États-Unis. De temps en temps, nous faisons quelque chose aux États-Unis.
    Votre but est-il de faire connaître le travail de ces entreprises, d'en faire la promotion?
    Non, pas du tout. Nous travaillons avec des entreprises dans le cadre de nos recherches, par exemple la recherche de CSR Practices. Il y avait une enquête au sujet d'entreprises. Nous faisons des choses de ce genre.

[Traduction]

    Mais il ne s'agit pas de promouvoir des entreprises.

[Français]

    Si vous les défendez aujourd'hui, c'est parce que vous y croyez? Si vous faites la promotion des compagnies, que vous les défendez, c'est parce que vous croyez en leur travail.
    Il y a aussi un autre aspect de l'engagement du Canada dans les Amériques. C'est quelque chose d'important. Nous pensons, la plupart du temps, que le gouvernement est la force principale de notre engagement, mais, en réalité, il y a une ambassade du Canada au Mexique et trois ou quatre consulats, mais il y a 200 succursales de la Banque Scotia. Donc, le cercle privé joue un rôle plus important que le gouvernement dans l'engagement du Canada, et on ne peut pas éviter de traiter avec  — deal with —  le secteur privé.
    Je m'excuse de mon français, mais j'ai besoin d'essayer de le parler.
    Toute la question de la responsabilité sociale des entreprises, monsieur Dade, ce n'est pas arrivé à la suite d'un cauchemar d'une nuit. Évidemment, cela fait plusieurs années que l'on en discute, au Canada. D'ailleurs, cela a entraîné cette volonté d'organiser des tables rondes —, ces tables rondes qui se sont déplacées au Canada et auxquelles participaient les citoyens, à titre libre. Il y avait aussi des gens de la société civile, des organisations nationales, des gens des compagnies minières. En tout cas, il y avait un échantillonnage assez vaste.
    Cette consultation fut suivie d'un rapport contenant des recommandations —, rapport qui a été proposé au gouvernement. Un consensus a même découlé de cette consultation.
    Le projet de loi C-300 est très faible comparativement à ce qu'on retrouve à l'intérieur du rapport. Si, un jour, un député proposait un projet de loi dans lequel on retrouve l'ensemble des recommandations... Vous venez nous dire que c'est la volonté de la société canadienne de responsabiliser les entreprises à l'étranger, et on n'a pas d'outils pour le faire actuellement parce que tout se fait sur une base volontaire. C'est ce qui a rejailli de l'ensemble des consultations. Il y a donc vraiment un besoin et que la société canadienne estime vraiment qu'il faut responsabiliser ces sociétés à l'étranger.
    Pourquoi ces sociétés ont-elles aussi peur si elles respectent les règles, si elles sont responsables et si elles assument leurs responsabilités sociales en matière d'environnement? Pourquoi ont-elles aussi peur de ce projet de loi si rien de ce qu'elles font ne contrevient aux principes de responsabilité sociale à l'étranger?
    J'ai participé aux tables rondes, aussi. J'ai parlé et j'ai présenté quelques idées. Je crois que c'était à Montréal, en novembre dernier, si je me souviens bien. J'étais une des personnes invitées à la table ronde. Ce dont je me souviens, c'est que

  (1240)  

[Traduction]

Il y a eu opposition. Ce qui est ressorti des tables rondes, c'est qu'on voulait mettre en valeur l'avantage du Canada et faire approuver le concept d'un ombudsman robuste, si je me souviens bien, qui disposerait d'un bon financement et aurait les moyens de réagir rapidement et efficacement aux plaintes. Malheureusement, ce n'est pas ce qui se passe en réalité. Il a aussi été question d'appuyer le travail que les entreprises canadiennes faisaient sur le terrain, et je ne vois rien de cela ici non plus.
    Je sais également que des représentants de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs se sont présentés devant votre comité et ont exprimé une ferme opposition à ces projets. Tony Andrews en faisait partie, et je sais qu'ils n'appuient pas le projet de loi C-300. Donc, de toute évidence, il y a eu rupture entre les tables rondes et la présentation du projet de loi.
    Je comprends que cela soit frustrant et je sais qu'il est nécessaire de faire quelque chose, et nous sommes d'accord pour dire qu'il faut faire quelque chose de façon à ne pas perdre notre avantage concurrentiel et à mettre en relief les côtés positifs et pour dire qu'il faut en faire plus pour prévenir, limiter et réparer les dommages. Nous sommes tout à fait d'accord avec cela. Nous sommes en désaccord sur le fait que ce n'est pas le bon moyen d'y arriver. Je crois que le secteur privé, selon les témoins qui se sont présentés devant votre comité — je jette un coup d'oeil sur les documents qu'on me remet —, semble aussi y être opposé.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Lunney, qui aura sept minutes. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup.
    Eh bien, comme vous le voyez, le débat sur le sujet est assez bien tranché, apparemment.
    J'aimerais apporter une précision. Dans votre déclaration préliminaire, monsieur Dade, vous avez dit que le projet de loi vous semblait refléter une tentative du gouvernement de mettre de nouvelles mesures en place. En fait, j'espère que vous comprenez...
    Eh bien, le Parlement. Le Parlement du Canada.
    Le Parlement du Canada... Vous comprenez qu'il s'agit d'un projet de loi émanant d'un député, d'un membre de l'opposition. Bien sûr, le gouvernement...
    Eh bien, laissez-moi d'abord réagir aux remarques de M. McKay, un député pour qui j'ai beaucoup de respect, mais je dois aujourd'hui soulever une objection, car je crois que ses commentaires ont vraiment dépassé les bornes, et ses accusations — je veux dire, accuser quelqu'un qui n'est pas d'accord avec vous — dans le contexte d'un enjeu très complexe —, l'accuser d'être aveugle, démentir les témoignages, nier la vérité et nous accuser, au fond, de ne pas vouloir faire ce qu'il convient de faire, je crois, vraiment, que c'est dépasser les bornes et faire preuve d'irresponsabilité.
    Tous les membres ici présents soutiennent la responsabilité sociale des entreprises et veulent faire ce qu'il convient de faire, et je crois que, lorsque vous faites ces remarques exagérées... Vous avez raison de dire que bien des pays n'ont pas une capacité de gouvernance suffisante. Vous refusez de croire que le Canada s'efforce d'améliorer la capacité de gouvernance dans bien des pays en voie de développement et que nombre d'entreprises vont également dans ce sens. Vous dites qu'elles n'ont pas leur place dans leur pays d'origine, et, encore une fois, en disant cela vous laissez de côté les pays en voie de développement...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président...
    M. James Lunney: Eh bien, monsieur McKay...
    L'hon. John McKay: ... je n'hésiterais pas une seconde à me présenter comme témoin et répondre aux préoccupations de M. Lunney sur ce que j'ai dit ou ce que je n'ai pas dit...
    Le président: Il ne s'agit pas là d'un appel au Règlement.
    L'hon. John McKay: S'il le désire, je suis près à aller m'asseoir à côté de lui.
    D'accord, monsieur Lunney. Vous pouvez continuer.
    Eh bien, monsieur McKay, sauf votre respect, vous nous désapprouvez et vous nous accusez de refuser de voir la vérité, et pourtant nous sommes vos collègues. Je m'inscrit en faux.
    J'aimerais vous rappeler, monsieur Lunney, que vous êtes censé vous adresser au président, non pas directement l'un à l'autre.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur le président, j'estime que les accusations portées contre tous les membres découlent de l'irresponsabilité et j'en prends personnellement ombrage. Cela nie tout le bon travail que les entreprises font, comme l'ont souligné nos témoins, dans bien des cas, et je crois que vous pouvez tirer exemple du bon travail qui est réalisé.
    De plus, vous rejetez ce que notre gouvernement a accompli, depuis les travaux de notre comité, en 2006, qui ont abouti à un rapport, les longues consultations menées partout au pays, la création d'un poste de conseiller en matière de RSE, et tout ce qui a été mis en place pour régler le problème dont il est question.
    Aujourd'hui, comme notre témoin l'a souligné, il existe des options, et nous devons en choisir une pour prendre nos responsabilités dans ce dossier compliqué; il y a entre autres les Principes de l'Équateur, qui sont déjà en vigueur, les lignes directrices des Nations Unies sur la RSE, le nouveau poste de conseiller en matière de RSE, et nous espérons que tout cela permettra à la situation d'évoluer dans le bon sens.
    Vous avez déclaré, monsieur, qu'il y avait des options. Vous avez dit que les allégations pouvaient faire beaucoup de dommages. Des accusations pourraient être portées, en vertu de ce projet de loi, par des personnes qui ne sont même pas directement concernées. Des gens qui n'habitent même pas dans le pays touché pourraient porter des accusations.
    Pendant que les enquêtes sont en cours... J'ai constaté que les témoins qui ont comparu devant nous plus tôt n'étaient pas des experts des questions juridiques, même s'ils sont des experts dans d'autres domaines. Le témoin qui se trouve au fond de la salle possède une grande expertise en hydrologie, et il a travaillé pour un ONG dans des dossiers liés à l'eau et sur un dossier connexe à notre question, mais je ne crois pas qu'il se soit présenté comme un expert des questions juridiques.
    Nous avons reçu des experts juridiques qui ont affirmé que des allégations pouvaient sérieusement ternir l'image du Canada et empêcher nos entreprises d'exercer leurs activités ailleurs dans le monde — de simples allégations. Nous sommes très préoccupés — du moins, je le suis — par la possibilité d'une guérilla industrielle, de la possibilité qu'un compétiteur porte des accusations fallacieuses pour se débarrasser d'une entreprise sur laquelle nous menons une enquête.
    Pourriez-vous nous éclairer un peu ou nous en dire plus à propos de ces préoccupations?

  (1245)  

    C'est un point très intéressant. Vous soulevez-là une question importante dont les répercussions pourraient aussi être importantes.
    Les allégations reçues sur place par le bailleur de fonds ou par un collaborateur direct, par exemple la Société financière internationale ou Exportation et développement Canada, sont envisagées d'une certaine façon dans le pays où le projet est réalisé. C'est lié au projet. C'est lié aux détails particuliers du contrat, ou de l'investissement, ou des actes de l'entreprise.
    Quand les allégations sont portées à l'attention d'un ministre, en particulier si c'est un ministre canadien ou d'un gouvernement qui a une aussi bonne réputation que le Canada, les accusations prennent une tout autre dimension: on croit qu'elles sont fondées, puisque le gouvernement mène une enquête.
    Nous avons parlé de la faiblesse du gouvernement dans nombre de ces pays. Il y a là un problème. Si le gouvernement local porte des accusations, on présume toujours que c'est une bataille politique, que l'oncle de quelqu'un prend sa vengence sur l'oncle de quelqu'un d'autre, ou quelque chose du genre. Ce n'est pas ainsi qu'on réagit lorsqu'il s'agit du Canada. Lorsqu'il s'agit du Canada, on se dit: « Mon Dieu, ce pays exerce une bonne gouvernance, c'est l'emblème même de la bonne gouvernance, et si le gouvernement mène une enquête, c'est qu'il se passe quelque chose de grave et il s'est sûrement passé quelque chose qui justifie ces accusations ». Et cela est préjudiciable, surtout si d'autres pays, nos concurrents des États-Unis et de l'Australie s'appuient sur les pratiques exemplaires et les mécanismes actuels, et, soudainement, nous arrivons avec cela.
    L'autre problème que j'associe à ce projet de loi est le fait que la SFI est dotée d'une unité de contrôle de la conformité comptant 15 employés qui mènent les enquêtes. La SFI traite de 450 à 500 contrats environ par année. Bien sûr, je ne sais pas quel pourcentage de ces contrats concernent l'industrie extractive. Mais la SFI peut compter sur 15 professionnels dévoués qui s'occupent de tous les projets qui pourraient faire l'objet d'une enquête ou d'autres mesures. Le projet de loi C-300 prévoit une seule conseillère qui devrait partager son temps entre l'examen des pratiques exemplaires et tout le reste, et qui n'aurait que l'aide d'un employé des services à l'étranger.
    Il est donc possible que les choses traînent en longueur. Et plus elles traînent, plus les préjudices sont importants. Pour les activistes et les ONG, qui aiment diffuser ce type d'histoires, c'est un cadeau des dieux: des accusations portées contre un ministre, une entreprise fait face à 16 chefs d'accusation; le ministre mène une enquête sur ces 16 chefs d'accusation; ou ce sont des accusations portées il y a des années.
    Vous disposez de mécanismes plus efficients et plus efficaces qui permettent aux gens de se faire entendre et de déposer des plaintes qui seront prises au sérieux par les organismes, et vous avez les ressources nécessaires pour intervenir efficacement.
    Encore une fois, cela nous place dans une situation peu enviable, et cela n'améliore en rien la situation sur le terrain.
    Merci.
    Merci, monsieur Lunney.
    Nous allons maintenant revenir à M. Dewar, qui dispose de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux remercier notre invité de son intervention.
    J'aimerais commencer par aborder l'idée selon laquelle ce projet de loi constitue, en quelque sorte, un inconvénient pour le Canada. J'aimerais simplement mettre les choses au clair et faire inscrire dans le compte rendu une chose dont vous êtes au courant, j'en suis sûr, mais que je tiens à souligner, au cas où: les limites du pouvoir des députés font en sorte qu'ils ne peuvent pas présenter de mesures législatives ayant des répercussions financières.
    Je crois que si vous deviez poser la question à M. McKay ou aux gens qui appuient le projet de loi — et, de fait, nous avons eu cette discussion, au comité, avec les gens qui ont pris part à la table ronde —, on vous répondrait que nous aimerions tous que cela concerne non pas le ministre, mais plutôt l'ombudsman, comme cela a été proposé dans le cadre de la table ronde.
    De fait, pour nous, la mesure selon laquelle c'est le gouvernement qui nomme le conseiller est une demi-mesure et, pour bon nombre d'entre nous, c'est une mesure fâcheuse. Cela vient freiner tout l'élan donné par ce que vous proposez, c'est-à-dire un consensus, un consensus selon lequel l'industrie extractive et les compagnies minières canadiennes qui ont des activités à l'étranger doivent respecter les mêmes normes que si elles se trouvaient au Canada. Je crois que c'est une demande tout à fait raisonnable.
    Je veux donc simplement savoir ce que vous pensez. Est-ce que vous appuieriez un processus envisagé dans le cadre de la table ronde et selon lequel nous ferions appel à un ombudsman qui serait considéré comme impartial, qui disposerait de ressources et qui serait en mesure de se pencher sur les questions exigeant une enquête? Nous pourrions discuter de la façon dont les enquêtes seraient menées et de ce qui les déclencherait. Est-ce que ça ne serait pas, d'un point de vue macropolitique, une proposition qui vous semblerait valable et que vous appuieriez? De fait, c'est ce que proposait la table ronde.

  (1250)  

    Je crois qu'il serait plus constructif et plus productif de discuter de tout cela en fonction de la possibilité de véritablement... prendre n'importe lequel de ces éléments possibles au hasard, sans faire part de ses préférences. Cependant, si les choses sont faites correctement, elles peuvent représenter un avantage concurrentiel pour les industries canadiennes et venir renforcer les pratiques exemplaires partout dans le monde.
    Il y a des options. Si vous décidez d'avoir cette discussion — ce qui serait, à mon avis, une bonne idée — je vous dirais que vous devez absolument tenir compte des projets déjà existants, de ce qui existe déjà, comme les Principes de l'Équateur et les nouvelles normes de la IFC et de l'IBLF, qui s'apprêtent à être mises en place. Vous devez examiner la question en tenant compte du contexte d'EDC et du bureau de conformité.
    Si vous deviez alors en arriver à la décision qu'il s'agit là de la méthode la plus efficace et la plus efficiente, et si vous réglez les problèmes associés au fait que les ressources ne sont pas suffisantes — s'il y a un consensus à ce sujet — ce serait alors une solution meilleure que ce qui est actuellement proposé.
    Je suppose que toute la question est là. Là où nous en sommes maintenant rendus, il y a ce projet de loi, et je m'inquiète des critiques qui affirment que, si on allait de l'avant avec ce projet de loi, ce serait, en quelque sorte, un recul. Je ne suis pas d'accord. Ce n'est pas ce que je comprends de vos exposés. Je ne comprends pas comment vous pouvez fournir des données sur une chose qui n'a même pas encore été adaptée.
    Vous avez examiné le projet de loi. C'est vrai, il y a des gens qui nous ont dit qu'il n'était pas juste et qu'il nuirait... Mais en même temps il y a ces gens qui viennent nous voir et qui nous disent qu'il y aurait un problème, il y a aussi d'autres gens qui disent, que, à leur avis, il n'y en aurait pas. Ce qu'on peut dire, c'est que nous devons examiner le projet de loi maintenant et que pour bon nombre d'entre nous — et, je pense, pour les Canadiens et pour les sociétés canadiennes —, c'est maintenant qu'il faut agir.
    Quand je vois que nous avons laissé passer cette occasion, je m'inquiète parce que j'ai peur qu'il ne se passe rien, bien honnêtement, parce que le gouvernement a fait venir une conseillère... J'ai quelques petites choses à dire à ce sujet. La conseillère n'est même pas encore prête, pour l'instant, à s'occuper de quelque préoccupation que ce soit. Vous connaissez le processus, n'est-ce pas? Elle peut faire part de ses préoccupations, mais il faut être deux pour danser. Si l'entreprise refuse de participer, on ne peut pas l'obliger à le faire. Vous le savez. Je trouve donc que ce n'est pas très utile, et je pense que vous êtes probablement du même avis. S'il faut que le processus ait lieu, celui-ci doit avoir lieu.
    Enfin, à propos d'EDC, quand nous avons demandé... J'ai posé la question au comité et j'ai demandé, pendant des réunions, s'il y avait eu un cas, juste un cas, où on avait enquêté et découvert que les partenaires étaient préoccupés et avaient dit: « il faut que vous fassiez quelque chose sinon nous nous retirons » ou s'il était arrivé que les partenaires avaient retiré leur financement, et il n'y en avait pas. Il semble donc qu'il n'y a aucun problème et que tout cela ressemble à une étrange conspiration. Je suppose que ce n'est pas ce que vous pensez, parce que vous avez laissé entendre qu'il y avait certaines préoccupations et que nous devions nous en occuper.
    Monsieur Dade, si ce n'est pas le cas — et vous avez exprimé ce que cela devrait être, à votre avis —, ne serait-il pas possible d'organiser un processus qui respecterait l'architecture générale dont nous parlons? Vous avez des préoccupations au sujet du projet de loi C-300. D'accord. Mais pourquoi ne pas profiter de l'occasion et utiliser cette infrastructure pour, de fait, la modifier et adopter les principes que vous avez mentionnés, c'est-à-dire faire participer EDC et nous assurer que, quand des sociétés canadiennes se rendent à l'étranger, il n'y a pas de controverse?
    Bien honnêtement, je crois que nous entrons dans une époque où des litiges se produisent n'importe quand. Si nous n'agissons pas, nous allons nous retrouver dans la situation où se trouvaient les grandes sociétés de tabac, vraiment. Ça se produit. C'est déjà en cours. Vous pouvez voir. Ne voyez-vous pas la situation comme une occasion d'adopter le projet de loi C-300 et d'organiser l'architecture de façon à ce qu'elle soit utile?
    Pour moi, la RSE — et je suis heureux que vous abordiez cette question — signifie que des entreprises cherchent à faire le bien et à en tirer profit. Les entreprises avec lesquelles j'ai collaboré y parviennent. La très grande majorité des entreprises y parviennent. Il y a quelques entreprises qui sont encore à l'époque du néandertal et qui ne comprendront jamais, mais, si Dieu le veut, elles disparaîtront bientôt.
    Cependant, je pense que la majorité des entreprises comprennent ce qui se passe et elles souhaitent travailler dans un contexte qui viendra accroître leur avantage concurrentiel et les rendra plus efficaces et plus efficientes. De plus, je ne pense pas que les entreprises veulent faire du tort aux gens. Je ne pense pas qu'il y a des gens, sur Bay Street, qui se réveillent le matin en se disant: « Eh bien, à quel petit village du Guatemala puis-je faire du tort aujourd'hui? ».

  (1255)  

    Nous sommes d'accord. Mais que se passe-t-il quand, à cause de conséquences involontaires, elles causent du tort?
    J'y arrive. Je crois que vous devez profiter du moment. Je crois que, des deux côtés de la table, les gens sont conscients. Je crois que vous avez l'attention de tout le monde et l'occasion de faire les choses comme il faut, d'agir de façon à ce que...
    Au bout du compte, ce que vous voulez véritablement, c'est améliorer les conditions sur le terrain. Vous voulez que les sociétés canadiennes soient plus efficaces. Vous voulez qu'elles soient plus efficientes. Mais vous voulez améliorer les choses sur le terrain, et vous avez l'occasion de le faire, je pense, si vous examinez certaines des suggestions qui ont été faites.
    Je ne pense pas que vous allez y arriver avec ce que vous proposez, ni avec les coûts que vous voulez imposer. Vous avez attiré l'attention sur le problème avec le projet de loi, mais, s'il devait être adopté, vous n'auriez pas les ressources requises pour l'appliquer correctement. Et nous savons tous pourquoi. Je le sais.
    Mais tout ça peut changer d'un trait de crayon. C'est une question d'affectation. Si le gouvernement veut le faire, il peut.
    Mais vous avez aussi des problèmes concernant les documents qui serviront à élaborer les normes: il y a la politique de la SFI, les critères de performance et les dispositions relatives aux droits de la personne, mais aussi « toute autre norme compatible avec les normes internationales en matière de droits de la personne ». C'est un peu vague.
    Si j'étais dans le secteur privé, voilà la question que je me poserais: comment puis-je être tenu responsable d'actes que je commets maintenant, avant qu'une norme soit adoptée à un moment ou un autre dans l'avenir, norme qui pourra constamment changer? Ce sont ces types de questionnement qui sont préoccupants d'un point de vue politique.
    Vous avez la chance de pouvoir faire les choses correctement. Je crois que les gens sont attentifs et que tout le monde est d'accord pour qu'une décision soit prise. Je profiterais du moment et j'essaierais de faire quelque chose...
    J'ai seulement une dernière question.
    Je précise, pour le compte rendu, qu'il y a, dans le projet de loi, un délai prévu pour adopter les principes dont nous discutons et pour nous assurer que nous faisons les choses correctement. C'est important de le souligner, à mon avis. Il n'était pas question d'imposer les principes; nous avons eu un certain temps pour collaborer avec l'industrie et les intervenants afin de faire adopter ces principes. Ils ne sont pas apparus subitement, sans préavis. Je pense qu'il est important de le souligner.
    M. Carlo Dade: Très juste.
    Merci, monsieur Dewar.
    M. Paul Dewar: Merci.
    Le président: Nous allons conclure. M. Goldring souhaite poser une question, et M. Patry aussi. Il faudra faire vite parce que nous devons parler des affaires à venir. Cela ne sera pas long, mais il faut en arriver à un consensus.
    Monsieur Goldring.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Dade, dans ce document, dont vous êtes l'auteur, je suppose, vous affirmez que les normes évoluent.
    Nous voulons tous nous améliorer, et nous espérons tous que les normes évolueront éventuellement. J'aimerais toutefois revenir sur une déclaration, dont vous êtes l'auteur, je suppose, à propos du projet de loi C-300:
    
Il est tout simplement absurde d'utiliser l'expression « toute autre norme ». Comment une personne peut-elle ou pourrait-elle être tenue responsable maintenant d'un geste qui irait à l'encontre d'une norme qui sera établie ultérieurement et qui peut changer constamment?
    Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet, s'il vous plaît?
    Je pense que nous venons tout juste d'en parler, mais c'est une préoccupation très importante. Bon nombre de mes anciens collègues au sein d'organisations multilatérales et ailleurs se sont gratté la tête quand ils ont envisagé la façon dont le projet de loi pourrait être interprété par d'autres parties — y compris par des personnes qui ne font pas partie du comité et qui ne sont pas à Ottawa, qui sont dans l'industrie minière, et pas seulement au Canada, mais aussi à la SFI et ailleurs. Ça a suscité des préoccupations tout autour de la table.
    Merci beaucoup.
    Il y aura une dernière question de la part de M. Patry.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Dade.
    Je voudrais simplement souligner, d'abord, monsieur le président, que M. Goldring a cité des documents qui n'ont pas été distribués à tous les membres. Je voulais simplement le souligner. Nous ne l'avons pas parce qu'il été fourni seulement en anglais. J'aimerais aussi l'avoir, à titre de francophone.
    C'est une lettre d'opinion publique, un document public que nous avons obtenu. Il est disponible sur le site Web.
    M. Peter Goldring: [Note de la rédaction: inaudible]... à des fins de confirmation.
    Ça va. Je voulais simplement le souligner.
    Je voulais simplement vous dire, monsieur, que cela remonte à il y a plusieurs années, quand j'étais président du comité. À l'époque, nous avons publié un rapport qui était, à mon avis, excellent. et M. Martin avait organisé ces tables rondes. Comme vous l'avez dit, tous les participants à ces tables rondes étaient unanimes. Les représentants de l'industrie minière étaient aussi d'accord.
    Ce qui s'est produit depuis, c'est que nous avons changé de gouvernement et que le gouvernement est arrivé avec l'idée de nommer une conseillère. Pensez-vous vraiment qu'une conseillère peut jouer un rôle positif compte tenu du fait que, comme les sociétés auraient besoin de cet argent, elles n'auraient pas le choix d'accepter, à tout le moins, de collaborer? Si le gouvernement avait simplement nommé un ombudsman qui aurait le pouvoir d'intervenir et d'enquêter, nous ne serions pas dans la situation actuelle.
    J'ai une autre question. Vous parlez beaucoup des choses qui existent de fait. Vous constatez que les sociétés sont déjà, de fait, régies par les Principes de l'Équateur. Pourtant, je pensais que les Principes de l'Équateur demeuraient une initiative volontaire.

  (1300)  

    Ce sont des principes volontaires jusqu'à ce qu'ils soient inscrits dans les clauses restrictives dont s'assortissent les prêts. Ce sont des principes volontaires en ce sens que les sociétés acceptent de s'y conformer; cependant, une fois qu'elles le font, les principes sont inscrits dans les clauses restrictives. Ils ne permettront pas que des projets aient lieu si les sociétés n'ont pas mis en place des politiques d'examen en matière d'environnement, de droits sociaux et de droits de la personne. Il faut donc comprendre le sens du terme « volontaire ». Les sociétés acceptent volontairement d'adopter ces principes et de les respecter. Quand ils le font, elles doivent se conformer à ces principes dans le cadre de leurs projets et pour obtenir des subventions.
    Les sociétés ou les personnes qui sont directement touchées ou concernées par la question — on ne parle pas de n'importe qui dans la rue — ont des recours car des procédures sont en place au sien des banques et des sociétés. C'est en partie ce qui fait le génie des Principes de l'Équateur: le secteur privé qui assume lui-même la tâche de mettre en oeuvre les principes.
    Encore une fois, il y a environ 40 banques, institutions financières multilatérales et agences d'évaluation du crédit — je ne me souviens pas du chiffre exact — qui ont adopté ces principes. C'est un outil vraiment incroyablement efficace qui touche quiconque obtient de l'argent dans le cadre des marchés financiers commerciaux et a des répercussions sur bien des sociétés.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Dade, encore une fois, c'était un plaisir de vous accueillir. Merci d'être venu.
    Je vais tous vous donner congé et je demanderais à tous les membres de rester avec moi pour que nous puissions discuter, très rapidement, de ce que nous ferons au sujet de certains enjeux.
    Nous recevons actuellement des calendriers et des ordres du jour. Il faut discuter de la façon dont les choses se dérouleront dans les semaines à venir.
    Ce que je vais vous proposer, pendant que vous sortirez vos calendriers, c'est que nous envisagions de prolonger d'une heure notre réunion du 25 mai, selon le nombre de témoins que nous accueillerons, afin de consacrer au moins une heure aux affaires du comité. Il semble que le président mexicain viendra s'adresser à la Chambre le 27 mai. Le comité ne se réunira donc pas ce jour-là.
    Je propose donc que nous prenions du temps, le 25 mai, au comité, pour discuter de l'ordre du jour qui nous attend en juin. Ce que j'ai pensé, c'est que, si nous rencontrons, au bout du compte, trois ou quatre témoins, je proposerais à la greffière de prolonger notre réunion d'une heure. Ainsi, nous pourrions commencer à 10 h 30 et poursuivre jusqu'à 13 h 30, ou encore, si nous n'accueillons que trois témoins, nous pourrions les entendre de 11 heures à 12 h 30, puis, de 12 h 30 à 13 h 30, discuter des affaires du comité et élaborer le calendrier pour le mois de juin.
    J'ai d'autres suggestions à ce sujet. Nous pourrions envisager, peut-être de faire quelque chose sur le G8 le 1er juin et, peut-être, d'annuler la réunion du 3 juin parce que certaines personnes seraient en déplacement, mais ce n'est pas obligatoire. Nous pourrons en parler le 25 mai.
    Madame Deschamps, vous vouliez discuter de l'horaire. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

[Français]

    Je voudrais avoir des éclaircissements. Le 25, proposez-vous une rencontre du comité directeur ou la tenue d'une séance de comité? Proposez-vous les deux?

[Traduction]

    Je parle des membres du comité qui se réuniraient pour discuter des affaires du comité.

[Français]

    D'accord.
    Le 27, compte tenu de la venue du président Calderón, rien n'oblige le comité à ne pas tenir une rencontre. Si le président se présente à 10 heures à la Chambre et que son allocution dure une heure, on peut insérer à l'horaire une séance du comité de direction. C'est à la discrétion des comités, mais il n'y a pas d'obligation.

[Traduction]

    Quoi qu'il en soit, nous pourrons en discuter le 25 mai. Nous avons réservé au moins une heure pour discuter des affaires du comité. Il faudra aussi décider de ce que nous ferons le 27 mai et vérifier si les réunions de tous les comités sont annulées.

[Français]

    Je veux rappeler que le sujet de Droits et Démocratie est disparu complètement du calendrier. Je ne sais pas ce qui s'est produit, puisque nous nous étions entendus pour une autre séance à ce sujet, mais plus rien n'est prévu.

[Traduction]

    Il y aura une séance à ce sujet, c'est sûr et certain.
    De fait, j'ai envoyé une lettre cette semaine à Droits et Démocratie, par l'entremise de notre greffière, qui l'a rédigée, afin de demander de nouveau que l'organisme nous fournisse l'information et de lui faire savoir que nous en avions besoin. Nous avons aussi reçu un appel de sa part: il nous fournira quelque chose. On prévoit nous envoyer quelques rapports.
    Nous allons recevoir ces documents, mais il y a aussi d'autres renseignements que nous devrons obtenir. Je propose que nous essayions de nous occuper de tout cela pendant le mois de juin.

[Français]

    Une partie de la journée du 25 servirait à une rencontre du comité de direction, et l'autre, à une séance du comité.

  (1305)  

[Traduction]

    C'est exact.
    Monsieur Dewar.
    À ce sujet, je crois que nous devons comprendre que le temps qui était prévu pour Droits et Démocratie pendant deux séances en mai et qui a été supprimé de l'horaire devrait faire partie de l'ordre du jour des premières réunions de juin.
    Je veux aussi simplement confirmer que le comité avait demandé qu'on lui fournisse non seulement le rapport de Deloitte et Touche, mais aussi les contrats et les coûts à ce jour. Je crois que c'est M. Latulippe qui pourrait fournir tout cela. C'est ce que j'avais compris en discutant avec lui quand il était ici. Ces renseignements pourraient nous être envoyés avant le rapport de Deloitte et Touche, qui, je crois, sera prêt à la fin du mois de mai.
    Enfin, je souhaite qu'on ne se contente pas de discuter du temps consacré au rapport de Droits et Démocratie. Je sais que le rapport a été transmis aux analystes, qui regroupent actuellement l'information, mais j'aimerais aussi que les membres du comité fassent connaître leurs recommandations, le cas échéant, pour que nous puissions faire, au comité, un travail bien ciblé.
    Au bout du compte, ce que nous voulons, c'est produire un rapport, et je détesterais que cela s'étire éternellement. Je comprends les limites qui nous sont imposées à titre de comité, et je le dis en toute objectivité.
    Je demande donc que toute l'information requise soit recueillie, qu'elle soit immédiatement transmise aux membres du comité, et que ceux-ci envoient leurs recommandations aux analystes de façon à ce que nous possédions cette information quand nous nous assoirons pour examiner le rapport et les recommandations.
    Paul, j'ai la lettre que j'ai envoyée et qui contient tout ce dont nous avons parlé. Dès que nous recevrons l'information, nous veillerons à ce qu'elle soit immédiatement transmise aux bureaux. Elle devrait arriver sous peu.
    Une voix: Sauf si elle est fournie dans une seule langue...
    Le président: Dans ce cas, il faudra la faire traduire.
    Allez-y, John.
    Le 25 mai, nous pourrions accueillir cinq témoins, dont un qui a déjà témoigné — la Chambre de commerce. Je pourrais vérifier dans mes dossiers.
    Je souhaite protéger le temps consacré à ces témoins parce que j'aimerais que l'analyse article par article commence peu après. Aurons-nous vraiment deux bonnes heures à consacrer au projet de loi C-300 le 25?
    Oui. Nous aurons deux bonnes heures, et je propose que la réunion dure probablement trois heures pour que nous puissions nous pencher sur les travaux du comité.
    Donc vous regroupez tout cela avec les travaux du comité? D'accord.
    Selon le nombre de témoins, la réunion durera de 10 h 30 à 12 h 30 ou... Nous veillerons à avoir assez de temps pour nous pencher sur les travaux du comité et pour entendre tous les témoins. S'il y a cinq témoins, nous devrons commencer à 10 h 30. C'est ce que je proposerais.
    Oui. Je ne savais pas que c'était ce que vous vouliez faire; quelques-uns d'entre eux participeront peut-être par vidéoconférence, ce qui est toujours assez amusant comme on peut le voir.
    Quand procéderons-nous à l'analyse article par article?
    Cela fait partie des choses dont nous discuterons le 25 mai. Nous devons déterminer ce que nous ferons au début de juin, et nous manquons de temps.
    Nous manquons de temps, c'est vrai.
    Donc, nous nous revoyons le 25 mai. La greffière vous enverra un avis pour vous dire si la réunion durera trois heures, deux heures et demie ou deux heures, mais elle durera au moins deux heures, c'est certain.
    Merci.
    La séance est levée.
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