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Je déclare la séance ouverte. Il s'agit de la 19
e réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous poursuivons notre étude sur le Taser.
Nous souhaitons la bienvenue aux témoins. Nous avons hâte que vous nous communiquiez l'information en votre possession et que vous répondiez à nos questions.
De la Commission des services policiers de Toronto, nous recevons M. Mukherjee. Je ne sais pas si je prononce votre nom correctement. Bienvenue. Je l'ai presque eu? Je ne vais pas vous demander de prononcer le mien, comme cela nous allons être quittes.
Du Service de police de Toronto, nous recevons M. Federico.
Bienvenue, messieurs. La coutume, ici, c'est de permettre aux témoins de faire une déclaration préliminaire. Je suis sûr que le greffier vous a expliqué en gros comment nous procédons. Vous allez disposer d'environ 10 minutes. Je vais vous permettre de présenter un exposé chacun. Il va donc falloir environ 20 minutes pour ça, et ensuite nous allons passer à la période de questions et d'observations, si vous êtes d'accord.
Monsieur Mukherjee, peut-être pourriez-vous nous expliquer la nature de votre poste puis présenter votre exposé.
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Merci, monsieur le président. Mesdames et messieurs les membres du comité, bonjour.
Je m'appelle Alok Mukherjee, et je suis président de la Commission des services policiers de Toronto. Mike Federico, surintendant d'état-major, m'accompagne, et c'est la personne la mieux placée pour parler du volet opérationnel de l'utilisation du Taser par les services de police.
À titre de commandant de la première unité dans le cadre de notre stratégie d'intervention contre la violence de Toronto, il s'est vu confier la tâche de superviser l'utilisation du Taser par notre équipe d'intervention d'urgence. Il est actuellement responsable de la supervision de l'unité de formation et d'éducation du service. Il est également l'officier supérieur responsable de nos équipes mobiles d'intervention en cas de crise, qui sont le fruit d'un partenariat novateur entre le service de police et les hôpitaux et qui aident les gens qui vivent une crise psychologique.
Je suis heureux d'avoir l'occasion de parler de notre expérience de ce que nous avons appris au sujet de l'utilisation du Taser comme arme de neutralisation. Le recours aux Tasers par le Service de police de Toronto engendre depuis longtemps des débats au sein de la Commission des services policiers de Toronto, du Service de police de Toronto lui-même et au sein également de la population générale. Ma commission a pris la décision de fournir cet appareil à certains agents après avoir longuement analysé la situation. Une fois que la commission a décidé d'approuver l'utilisation limitée du Taser par le Service de police de Toronto, elle a, comme le service, mis l'accent sur l'importance d'instaurer des mécanismes de contrôle adéquats, d'offrir une formation exhaustive et de s'assurer de mettre en place de solides mécanismes de responsabilisation et de surveillance.
Je vais commencer par parler de l'utilisation du Taser par le Service de police de Toronto.
En juillet 2002, vu le succès d'un projet pilote de quatre mois mené par l'équipe d'intervention d'urgence ou EIU du Service de police de Toronto, l'organisation qui était alors le ministère du Solliciteur général de l'Ontario a approuvé l'utilisation du Taser M26 advanced par les équipes d'intervention stratégique de la police et par les unités de sauvetage des otages en Ontario. Le ministère a autorisé le Service de police de Toronto et le Service de police d'Ottawa à exécuter un projet pilote préliminaire. En février 2004, le ministère a autorisé les superviseurs de première ligne à utiliser le Taser M26 advanced. La commission n'a cependant pas immédiatement accordé l'équipement à tous les agents de première ligne du service; elle s'est plutôt engagée dans un processus décisionnel structuré.
À l'occasion de sa réunion du 18 novembre 2004, la commission a demandé de l'information sur l'état d'achèvement de la formation sur la désescalade et sur les risques pour la santé que pose le Taser et elle a notamment demandé des exemplaires des rapports et des études de recherche effectués. La commission a également exigé la création d'un protocole d'utilisation du Taser et d'un plan de mise en oeuvre d'un éventuel second projet pilote.
Le 30 mars 2006, le Service de police de Toronto a lancé ce projet pilote dans les divisions 31, 42 et 52. Dans le cadre de celui-ci, des superviseurs de première ligne en uniforme allaient utiliser le Taser. C'est seulement après avoir pris connaissance des résultats du projet pilote que la commission a autorisé la poursuite du processus d'adoption du Taser de façon provisoire.
Dans le cadre de l'examen de cette question, la Commission des services policiers de Toronto a écouté le témoignage de membres du public et demandé de nouveaux rapports au chef de la police, au médecin-hygiéniste en chef de Toronto et aux membres de la commission en ce qui concerne les travaux de recherche effectués sur les plans médical et opérationnel de l'utilisation du Taser. La commission a approuvé une ébauche de protocole d'utilisation de l'arme, et elle a exigé d'être avisée de toute modification apportée à ce protocole. Elle a également exigé qu'on lui rende régulièrement des comptes au sujet de l'utilisation du Taser.
À l'issue du projet pilote exécuté en septembre 2006, la commission, satisfaite des procédures et des méthodes de reddition de comptes établies, a autorisé tous les superviseurs de première ligne à utiliser le Taser. La commission a également signalé que le médecin-hygiéniste en chef de Toronto lui avait indiqué dans un rapport qu'il ne semblait pas y avoir d'études concernant les répercussions à long terme sur la santé chez les personnes exposées aux effets du Taser, si toutefois ce genre de répercussions existent.
C'est une question qui préoccupe les membres de la commission depuis longtemps, et ceux-ci ont dit souhaiter que des études indépendantes sur l'utilisation du Taser et les répercussions à long terme soient effectuées.
La commission a toujours mis l'accent sur l'importance de la formation des agents autorisés à utiliser le Taser. Il s'agit d'un outil puissant — comme beaucoup d'autres outils que les agents de police peuvent être amenés à utiliser —, mais il est important de considérer non seulement l'appareil lui-même, mais également les mécanismes de contrôle qui encadrent son utilisation, dont la prestation d'une formation adéquate et régulière fait assurément partie. M. Federico va vous donner davantage de détails là-dessus.
En ce qui concerne les rapports annuels présentés à la commission, à la réunion du 8 mars 2005, la commission a demandé au chef de police de lui fournir un rapport annuel sur l'utilisation du Taser par le Service de police de Toronto. Le rapport, qui est public, doit contenir des renseignements sur les éléments suivants: les plaintes et les enquêtes découlant de l'utilisation du Taser, la formation des agents, la possibilité pour les agents de première ligne d'utiliser le Taser, les incidents liés à l'utilisation de l'arme, notamment les diversions, les circonstances, le nombre de personnes touchées et le motif d'utilisation, et, enfin, les blessures subies, les décès et les actions au civil. Les membres du conseil ont été en mesure d'analyser cette information, de relever les tendances et de poser les questions découlant des rapports.
En ce qui concerne les blessures et les décès attribuables à l'utilisation du Taser par les agents du Service de police de Toronto en 2005, le Taser a été utilisé 73 fois au total pendant cette année-là, et on a fait état de blessures subies dans cinq cas seulement. Dans trois de ces cas, la personne s'est blessée elle-même. Dans les deux autres, on pense que la personne a été blessée au moment où l'agent tentait de la maîtriser, et non au moment où l'agent a utilisé le Taser. Il n'y a pas eu cette année-là de décès liés à l'utilisation du Taser par les membres du service.
En 2006, le Taser a été utilisé 174 fois, à l'occasion de 156 incidents, répartis en fonction des catégories définies relativement à l'utilisation du Taser. Il n'y a pas eu de blessures cette année-là, mis à part de petites perforations de la peau. Il n'y a pas eu non plus de décès causés par l'utilisation du Taser par les membres du service.
La commission n'a pas encore reçu le rapport de 2007. Néanmoins, les membres du service ont utilisé le Taser à l'occasion de 215 incidents entre le 1er janvier et le 31 juillet, et il n'y a eu ni blessures ni décès découlant de cette utilisation.
Pour conclure, la Commission des services policiers de Toronto voit le Taser comme un outil important, que les agents de police doivent utiliser dans certaines situations clairement définies seulement — c'est-à-dire lorsque la personne agit de façon agressive —, plutôt qu'un outil servant simplement à faire obéir. La commission est d'accord avec l'idée du chef de la police, M. Blair, selon laquelle le Taser peut être un outil précieux pour les agents de police, tant que les paramètres de son utilisation sont bien définis, que la formation nécessaire est offerte et que les structures de reddition de comptes applicables sont établies.
J'ai hâte que nous discutions de la question, et je veux maintenant céder la parole à M. Federico.
Merci.
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Merci, mesdames et messieurs. Je suis heureux que vous m'ayez invité à comparaître devant vous.
Je me propose de vous faire part de la position du chef de la police du Service de police de Toronto, M. William Blair, et de lire sa déclaration, puis de vous indiquer les sujets et les domaines dont je peux vous parler ou que je peux analyser avec vous et de vous inviter à me poser des questions. Ce sont vos questions qui me serviront de guide.
Voici la déclaration officielle qu'a faite M. Blair, chef de la police:
On a beaucoup parlé, dans les médias, du TASER et du fait qu'il soit ou non un outil approprié pour les agents de police. Le TASER a un rôle important à jouer en ce qui concerne la protection du public et de nos agents contre les personnes violentes, ainsi que la protection des personnes violentes contre les blessures qu'elles pourraient s'infliger...
Les organisations qui ont recours au TASER doivent adopter les politiques et les procédures adéquates, et elles doivent offrir la formation et la supervision nécessaires pour s'assurer que cet outil est utilisé dans les bonnes situations, pour les bons motifs. Il faut qu'une responsabilité et une transparence claires s'attachent à ces politiques et procédures. En Ontario, dans beaucoup de cas, des agents de police ont fait preuve de jugement lorsqu'est venu le temps d'utiliser le TASER pour mettre fin à une situation tendue et dangereuse. Ces exemples existent parce que l'utilisation du TASER est encadrée par des procédures, une formation et une supervision adéquates, dans un contexte de transparence et de responsabilité.
À Toronto, nous avons consacré beaucoup de temps et de ressources au travail d'évaluation des pratiques policières en Amérique du Nord, de façon à nous assurer d'offrir la meilleure formation et la meilleure supervision possible aux agents qui utilisent le Taser, ainsi que de mettre en place les politiques et les procédures leur offrant des indications claires quant au genre de situations où utiliser cette arme et à la façon de l'utiliser.
Le débat public ne doit pas faire fi du travail qui a été fait en ce qui concerne la place qu'occupe le TASER au sein de notre continuum d'utilisation de la force. Les agents de police de l'ensemble de l'Ontario sont des professionnels qui se dévouent pour la sûreté et pour la sécurité de leurs collectivités. Qu'il n'y ait jamais de doute à ce sujet. S'il est encadré par des politiques et des procédures claires, un agent ayant reçu une formation adéquate pour utiliser le TASER, s'il est bien supervisé et qu'il doit rendre des comptes pour toutes les décisions qu'il prend relativement à l'utilisation de la force, peut sauver des vies. Nos agents l'ont fait dans le passé, et ils vont continuer de le faire.
Les données concernant l'utilisation du TASER par le Service de police de Toronto montrent que les agents font preuve de jugement dans des situations difficiles et qu'ils prennent les bonnes décisions, qu'ils utilisent la force minimale nécessaire pour mettre fin à des situations souvent tendues et dangereuses. Le TASER s'est révélé être un moyen efficace de réduire les blessures subies par les membres du public et par les agents, surtout dans les cas où d'autres armes comme la matraque ou une arme à feu auraient été susceptibles d'être utilisées à la place. Ainsi, le Service est d'avis que, si elle est encadrée par les politiques, les procédures, une formation et un processus de responsabilité adéquats, l'utilisation du TASER est un moyen de recours à la force que les agents de police peuvent utiliser pour accroître la sécurité publique.
Je peux fournir aux membres du comité des renseignements sur les choses suivantes: la nature de l'appareil et l'utilisation qui en est faite à Toronto, les possibilités d'utilisation de l'appareil, le processus de responsabilisation, les politiques et les règles régissant son utilisation, la formation offerte à nos agents à cet égard, les questions d'ordre juridique que nous avons dû envisager et auxquelles nous avons dû répondre, ainsi que les enjeux relatifs à la santé et à la sécurité sur lesquels nous nous sommes penchés et qui peuvent avoir fait surface.
Je suis à votre disposition.
En réalité, à l'occasion d'une réunion précédente du comité, on m'a demandé d'effectuer le suivi auprès de M. Blair au sujet d'une visite éventuelle du centre de formation C.O. Bick, et il m'a mis en contact avec l'inspecteur Eley. Je suis en mesure de dire aux membres du comité que les responsables de ce centre de formation seraient heureux d'organiser une visite. D'après ce que je comprends, les plans ont peut-être changé dans l'intervalle, mais ces gens seraient tout à fait disposés à organiser une visite si nous souhaitions en faire une.
J'aimerais revenir sur la question des règles d'engagement — si je peux les appeler ainsi —, ou du moment où le Taser est employé. Je présume que le Service de police de Toronto, en plus d'offrir de la formation à ses agents, met à leur disposition des manuels et précise dans quelle situation ils doivent utiliser le Taser et dans quelle situation ils doivent éviter de le faire. Je ne veux ni citer ce genre de règles, pour le compte rendu aujourd'hui ni faire quoi que ce soit d'autre du genre, mais pourriez-vous en fournir un exemplaire aux membres du comité à un moment donné, c'est-à-dire des règles d'engagement ou des politiques qui précisent les situations où il convient d'utiliser le Taser et celles où il faut éviter de le faire?
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J'aimerais dire deux choses. Pour répondre à votre question de façon générale, les pratiques sont semblables partout au pays. Il y a peut-être des différences, en fonction des situations, mais je ne les connais pas précisément.
Nos règles, par exemple, sont fondées sur le principe de maintien de l'ordre généralement admis selon lequel le comportement du sujet doit être agressif. Peut-être certains services de police ont-ils défini l'adjectif « agressif » de façon plus libérale. Je ne puis rien vous dire à cet égard, parce que je n'ai pas vu les documents en question.
Le président vient de me rappeler quelque chose, et j'aimerais en parler. Il y a trois modes d'utilisation du Taser. L'un de ces modes, c'est la démonstration de la force. Il s'agit simplement d'activer l'appareil devant le sujet, pour démontrer que nous possédons ce genre d'outil et que nous pouvons l'utiliser au besoin. Le Taser peut émettre deux signaux. Le premier, c'est un viseur laser. L'autre, c'est la possibilité d'allumer les électrodes, de façon que la personne puisse voir et entendre une petite décharge électrique. Ainsi, nous pouvons montrer que nous avons la capacité d'utiliser cet instrument. C'est considéré comme étant une façon d'exercer le recours à la force, mais, évidemment, il n'y a pas de contact avec la personne. Ce n'est qu'une démonstration de la force.
Il peut y avoir des situations où nous n'avons pas encore approché pour maîtriser la personne, mais où, tout simplement pour nous assurer qu'il n'y ait pas d'ambiguïté au sujet du degré de sérieux avec lequel nous envisageons la situation et du fait que la personne peut faire l'objet d'une arrestation légale, nous pouvons produire une petite décharge électrique avec l'appareil tout simplement pour que la personne sache que nous l'avons en notre possession. Dans bien des cas, c'est la façon dont on a utilisé le Taser au sein de la police de Toronto.
L'autre façon de l'utiliser, c'est de toucher la personne avec l'appareil, et c'est ce qu'on appelle le « mode paralysie ». Il s'agit simplement d'un terme technique. On utilise l'appareil, mais on ne lâche pas et on ne lance pas les électrodes. La troisième façon, c'est de lancer les électrodes, et ça se fait à distance.
Voilà donc les trois façons d'utiliser le Taser. Ce que nous visons, c'est le recours à la force minimale, ou à tout le moins à la force intrusive minimale.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Mukherjee, monsieur Federico, merci d'être venus ici aujourd'hui.
Monsieur Mukherjee, votre réputation vous précède, même sur la côte ouest, d'où je viens.
Je suis désolée d'être arrivée quelques minutes en retard, mais je vous ai entendu parler du fait qu'il y a une enquête chaque fois qu'un Taser est montré ou utilisé. Je vous ai entendu parler du nombre d'enquêtes et ainsi de suite.
Puis-je vous poser deux questions au sujet de ces enquêtes? D'abord, y a-t-il déjà eu une enquête qui a révélé un usage inapproprié du Taser par un agent? Je ne vous demande pas de me parler de la situation ni de citer des noms — ce n'est pas ce que je veux dire. Je vous demande si l'utilisation a été jugée appropriée chaque fois.
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Si je peux ajouter quelque chose, c'est l'un des dilemmes auxquels nous sommes confrontés, parce qu'il y a eu deux ou trois recommandations du jury dans le cadre d'enquêtes du coroner — par exemple, dans l'affaire Otto Vass récemment conclue et dans le cas d'une autre personne, Christopher Reid. Dans les deux cas, le jury voulait savoir pourquoi les agents de police n'avaient pas de Tasers, parce que, s'ils en avaient eu un, MM. Vass et Reid seraient probablement encore en vie.
Mais pour que cela soit possible, il faudrait autoriser nos agents de première ligne à utiliser le Taser. Dans l'un des deux cas, les agents qui se trouvaient sur place ont fait appel à l'équipe d'intervention d'urgence, dont les membres sont autorisés à utiliser le Taser, mais ceux-ci étaient occupés ailleurs, et il y a eu une période d'attente de 15 à 20 minutes. Nous n'avons pas encore autorisé nos superviseurs à utiliser le Taser, alors personne ne pouvait se rendre sur les lieux de l'incident. Dans ce cas, la personne arrêtée est décédée.
C'est le dilemme auquel la commission est confrontée: d'une part, elle ne veut pas autoriser tous les agents de première ligne à utiliser le Taser. Ce n'est pas notre politique actuelle. Nous avons restreint l'utilisation du Taser à l'équipe d'intervention d'urgence et à nos superviseurs de première ligne. D'autre part, les jurés disent que dans certaines situations, l'utilisation du Taser aurait permis de sauver des vies.
Le débat sur les avantages et les inconvénients du Taser est un débat très important à nos yeux.
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Je fais partie des membres de la commission qui étaient tout à fait contre l'utilisation du Taser par le Service de police de Toronto lorsque le débat a commencé. Ma position était fondée sur les études médicales que j'avais lues.
Il semblait y avoir un certain nombre de questions qui demeuraient sans réponse. Il y en a encore, en ce qui concerne les répercussions du Taser sur les gens qui ont certains problèmes de santé, et je crois qu'il n'y a pas encore suffisamment de travaux de recherche concluants dans ce domaine.
Prenons l'exemple d'une femme enceinte... Lorsque Tom Smith a participé à notre tribune publique, il a dit que le Taser pouvait avoir le même effet qu'un accouchement spontané, et que le résultat pourrait être l'avortement. Mais il n'y a pas encore eu d'étude là-dessus.
Lorsque les agents de police se rendent sur le lieu d'un incident, ils ne disposent pas toujours de toute l'information concernant l'état de santé de la personne qu'ils doivent arrêter. Il y a donc encore des questions qui demeurent sans réponse.
Pour ce qui est des armes à feu, du pistolet, c'est une arme qu'on utilise depuis longtemps, alors nous connaissons les conséquences de son utilisation.
Nous commençons à peine à apprendre certaines choses au sujet de la nature du Taser. C'est ce qui fait, je pense, que nous sommes plus prudents et que nous recueillons davantage d'information après l'avoir utilisé.
C'est la différence entre les armes à feu et le Taser.
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Oui. Je suis heureux que vous posiez la question, parce que l'appareil dont nous avons fait l'acquisition est doté de plusieurs mécanismes de redondance, ce qui fait que nous sommes à même de recueillir de façon pratiquement certaine les renseignements sur le moment où le Taser a été utilisé, la façon dont il a été utilisé et le motif. L'appareil que nous possédons a deux ou trois caractéristiques qui valent la peine d'être signalées. Je suis sûr que ce sont des caractéristiques habituelles, et vous avez peut-être déjà entendu ce que je vais vous dire.
Premièrement, à Toronto, chacun des agents reçoit son propre Taser, et il en est responsable. Les cartouches d'air qui servent à projeter les dards portent un numéro de série. Le Taser comporte une mémoire électronique qui enregistre le moment exact de l'utilisation, la durée exacte, l'ampérage et les conditions. Lorsque les dards sont projetés, des confettis ou de petits marqueurs marquent la trajectoire. On peut ensuite en établir le tracé, ce qui fait que nous savons exactement quel appareil a été utilisé. Il y a donc ces mécanismes de redondance.
L'agent est tenu d'informer immédiatement, ou peu après, l'officier responsable du fait qu'il a utilisé le Taser. À ce moment-là, on retire la carte mémoire et on télécharge les données. Nous faisons une vérification aléatoire des appareils que nous avons remis aux agents, et nous utilisons les données téléchargées pour vérifier s'ils ont été utilisés. Le cas échéant, l'agent doit remplir le rapport obligatoire sur le recours à la force.
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Je l'ai fait, et j'ai été déçu de constater à quel point il y en a peu. Lorsque M. Smith est venu à Toronto, il était d'accord pour dire qu'il faut davantage d'études. Nous ne savons pas suffisamment de choses au sujet des effets physiologiques et neurologiques à long terme, ainsi que des autres effets psychologiques de l'utilisation du Taser, surtout chez les personnes qui ont certains problèmes de santé.
Nous avons demandé au médecin-hygiéniste en chef de Toronto de nous présenter un rapport, au moment où la commission débattait avant d'autoriser l'utilisation du Taser. Il a tiré la même conclusion.
Nous avons discuté de l'idée de créer une équipe qui serait probablement multidisciplinaire et qui pourrait surveiller l'utilisation du Taser, recueillir les données et créer une base de données aux fins d'analyse. La proposition n'a pas eu beaucoup d'effet. Mais j'ai de nouveau rencontré le médecin-hygiéniste en chef tout récemment, et il est toujours intéressé à participer à ce genre de travaux.
On fait certains travaux, par exemple, au centre de traumatisme de l'hôpital Sunnybrook, qui a acquis une bonne expertise dans le domaine de l'utilisation du Taser. On fait certains travaux là-bas, mais ce n'est pas encore suffisant, et l'hôpital ne produit pas de rapport public, alors nous ne connaissons pas les conclusions de ses travaux.
C'est un sujet qui demeure une préoccupation pour moi et les membres de ma commission.
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Tout d'abord, la situation que vous avez décrite, c'est-à-dire celle d'une personne qui conduit une voiture et qui a une altercation avec un agent de police est peu probable, pour la simple raison que nous avons prévu un usage restreint du Taser. À Toronto, les membres de certaines unités, qu'on appelle les équipes d'intervention d'urgence, et les superviseurs de première ligne sont les seuls agents qui possèdent un Taser.
Les autres agents de police de première ligne n'ont pas de Taser. Lorsqu'un agent arrête un conducteur et qu'il y a altercation, cet agent n'a pas sur lui de Taser à utiliser contre la personne.
De plus, ces superviseurs de première ligne et membres d'EIU sont appelés à intervenir lorsqu'une situation devient grave au point où il faut disposer davantage d'options de recours à la force.
En ce qui concerne l'accès aux services médicaux, c'est l'une des questions que la commission a examinées, c'est-à-dire que, vu le manque de connaissances sur les effets du Taser, nous voulons nous assurer de pouvoir confier immédiatement à des intervenants du domaine médical toute personne contre qui le Service de police de Toronto utiliserait le Taser.
Comme vous l'avez mentionné, cela coûte de l'argent aux contribuables. Eh bien, le maintien de l'ordre coûte quelque chose aux contribuables. Ce service est financé à même l'impôt foncier. Si une personne meurt parce que les agents chargés d'intervenir ont utilisé un pistolet, faute de Taser, cela coûte encore plus cher. On fait toutes sortes d'enquêtes — il y a les enquêtes dans les affaires de crime et aussi des enquêtes du coroner. Alors d'une façon ou d'une autre, il pourrait être intéressant de faire une analyse coût-avantage, mais cela coûte de l'argent à la population chaque fois qu'on a recours à la force.
Si l'on arrive à montrer que le Taser est avantageux parce qu'il permet de sauver des vies dans certaines situations précises, nous devons considérer cela comme étant peut-être plus important que le fait de devoir payer certains coûts liés au fait de sauver ces vies ou qui en découlent. Du point de vue du maintien de l'ordre, nous devons donc en gros trouver un équilibre, puis tenter de trouver le meilleur cadre possible, les meilleures ressources possibles, de façon à pouvoir gérer tout effet secondaire de l'utilisation du Taser.
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Je veux simplement revenir sur les situations dans lesquelles nous pouvons utiliser le Taser. Si une personne pose un risque pour la sécurité publique parce qu'elle est agressive, c'est non pas le fait qu'elle présente certaines caractéristiques physiques ou certains attributs qui est la principale chose à considérer pour l'agent, mais bien le fait qu'elle soit agressive ou non.
L'agent qui est confronté à une personne agressive peut penser pouvoir maîtriser la situation en choisissant un autre recours à la force, peut-être en exerçant une pression suffisante avec ses mains pour maîtriser la personne même si le comportement de celle-ci correspond à la définition d'un comportement agressif.
Le choix du recours à la force est fondé sur le comportement de la personne, et non sur son état. Un agent de police peut décider, en fait, même si la personne est agressive, qu'il est en mesure de régler le problème et qu'il peut maîtriser la personne par ses propres moyens, sans arme. Ce sont toujours des choix que l'agent de police peut faire.
De façon générale, nous conseillons aux agents de ne pas avoir recours à la force contre les enfants. Je peux vous dire qu'il y a des situations dans lesquelles on doit passer les menottes à un enfant simplement pour le maîtriser, mais ce n'est pas considéré comme étant la première chose à faire pour régler le problème.
Cela me donne l'occasion de parler un peu plus de ce que nous enseignons à nos agents de police au sujet de l'exercice du jugement. La première chose que les agents de police doivent faire, c'est tenter de désamorcer la situation et de maîtriser la personne. Lorsqu'il est possible de désamorcer la situation sans avoir recours à la force, c'est préférable. Encore une fois, nous devons mettre l'accent sur le choix d'avoir recours à la force plutôt que sur le choix de l'arme à utiliser; c'est la première chose qu'un agent de police doit envisager.
Ensuite, si l'arme choisie semble être celle qui va créer l'effet le plus important tout en réduisant au minimum le risque de blessure et le degré d'intrusion, c'est celle qu'il faut choisir.
Je ne sais pas si vous avez entendu parler du modèle de recours à la force. C'est un modèle qu'on enseigne partout en Ontario; je suis convaincu qu'on l'enseigne partout au pays. D'après ce modèle, les agents doivent continuellement évaluer la situation. Je peux commencer par faire un choix de recours à la force, mais je ne suis pas tenu de m'en tenir à ce choix. Il se peut que la situation évolue et que j'écarte cette option pour recommencer, par exemple, à simplement discuter avec la personne.
Les options de recours à la force font partie de l'enseignement que nous offrons à nos agents, c'est la raison pour laquelle la formation est aussi longue et que nous offrons cette formation chaque année.
Je suis heureux que vous ayez posé cette question. Merci.
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Merci, monsieur le président.
J'ai trouvé la séance d'aujourd'hui très éclairante. Je ne suis pas sûre d'être plus à l'aise, mais il est certain que l'information que vous nous avez donnée m'a impressionnée, comme l'approche que vous avez adoptée en ce qui concerne l'utilisation du Taser à Toronto.
Comme je viens de Toronto, je prononce ce nom correctement, contrairement au reste de ma famille, qui dit encore « Toronna ».
Évidemment, les agents de police ont des pistolets depuis des années, ce qui fait qu'on a eu beaucoup de temps pour préciser les protocoles concernant les rapports, la formation, et ainsi de suite, même si je sais que les pistolets ont dû évoluer avec le temps.
C'est une question à deux volets. Les gens qui sont venus témoigner ici nous ont parlé de certaines différences au chapitre de la formation, du suivi, et ainsi de suite. Ces différences sont attribuables à toutes sortes de motifs, mais ce sont des différences importantes. Savez-vous si nous ferions la même constatation en ce qui concerne l'utilisation des pistolets par les services de police de l'ensemble du pays? Trouverions-nous des différences importantes, soit dans les protocoles, soit dans les protocoles d'établissement de rapport?