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FAAE Rapport du Comité

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Partie II :
LE RÔLE DU CANADA DANS
LA RECONSTRUCTION ET LE DÉVELOPPEMENT

Reconstruire l'Afghanistan après des décennies de guerre n'est pas une tâche facile. On ne peut la réduire à une simple équation. De concert avec nos partenaires afghans et internationaux, nous nous efforçons de rendre irréversibles les progrès accomplis.

L’honorable Maxime Bernier, ministre des Affaires étrangères,
Témoignages, réunion 8 du FAAE,
11 décembre 2007, p. 3.

Nous devons ajuster certaines priorités, y compris les efforts de l'ACDI. On a trop mis l'accent sur certains types d'activités qui ne concernent rien d'autre que la sécurité. Je crois que nous devons le reconnaître.

Emmanuel Isch, vice-président,
Programmes internationaux et canadiens, Vision mondiale,
Témoignages, réunion 5 du FAAE,
29 novembre 2007, p. 9.

Il faut que la mission change. Il faut consacrer plus d'efforts à la reconstruction et au développement en Afghanistan afin d'aider la population à améliorer sa situation […] Ce n'est pas simplement une question de programmes, c'est une question de projets qui sont visibles pour la population. C'est le changement qu'on a recommandé.

L’honorable John Manley, président,
Groupe d’experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan,
Témoignages, réunion 18 du FAAE, 11 mars 2008, p. 2.

Au cours de son étude sur la mission canadienne en Afghanistan, le Comité s’est intéressé particulièrement au rôle joué par le Canada dans la reconstruction et le développement de l’Afghanistan, notamment à l’utilité et aux objectifs de ses programmes d’aide, à leur efficacité et leur efficience, ainsi qu’aux facteurs que le gouvernement canadien doit prendre en considération alors qu’il cherche à définir la nature de son engagement futur dans cet État ravagé par la guerre.

Le Comité estime que, malgré les progrès sensibles qui ont été accomplis aux chapitres de la reconstruction et du développement en Afghanistan, le Canada et la communauté internationale doivent redoubler d’efforts, accroître les ressources et revoir leurs priorités afin de continuer de bâtir sur les réalisations et de stimuler et de rendre irréversible le progrès dans les secteurs qui n’ont pas reçu beaucoup d’attention jusqu’à présent.

L’Afghanistan a fait beaucoup de chemin. Les propos de Mme Nipa Banerjee, responsable du programme d’aide du Canada à Kaboul de 2003 à 2006 et maintenant enseignante à l’École supérieure d’affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa, en font foi :

[É]tant donné que sa capacité était nulle quand le gouvernement afghan de transition a commencé son travail, les progrès réalisés au cours de la période post-taliban dans les secteurs social et économique sont tout à fait louables et dépassent ceux d'autres pays d'Asie du Sud-Est au cours des cinq premières années suivant leur indépendance[123].

L’honorable Flora MacDonald, ancienne secrétaire d’État aux Affaires extérieures et fondatrice de Future Generations Canada, qui a effectué de fréquents voyages en Afghanistan et qui s’est beaucoup déplacée dans ce pays au cours des dernières années, est d’accord avec Mme Banejee à propos des progrès à cet endroit, sauf que ces progrès, selon elle, « ne sont certainement pas répartis d’une façon uniforme partout dans le pays[124] ».

Les progrès sont particulièrement évidents dans le traitement réservé aux femmes, à différents points de vue. Comme la ministre de la Coopération internationale, l’honorable Bev Oda, l’a dit au Comité :

[U]ne des grandes réussites a été de leur donner (aux filles et aux femmes) accès à l'éducation formelle; les filles représentent les deux tiers des enfants qui fréquentent l'école. L'éducation et l'alphabétisation ont progressé. Les femmes peuvent maintenant se déplacer […] des Afghanes, des jeunes femmes et des jeunes filles vont à l'école, se promènent dans les rues, vont faire des courses. Ces changements importants se sont donc produits dans la vie des femmes. Il y a également eu une amélioration dans les soins qu'elles reçoivent. Il y a quatre fois plus de femmes qui peuvent avoir l'aide de sages-femmes. Grâce à de meilleurs soins médicaux, à un meilleur accès à ces soins, nous avons pu faire diminuer la mortalité infantile de 22 p. 100. Je dirais que les Afghanes sont comme toutes les autres femmes du monde. Elles ont un grand esprit d'entreprise, elles sont très industrieuses, etc. Nous avons jusqu'à maintenant versé 56 millions de dollars pour les services de microcrédit, pour le Mécanisme de microfinancement et de soutien en Afghanistan. La majorité de ceux qui ont recours à ce mécanisme sont des femmes. Elles gagnent maintenant un revenu pour leur famille. Elles mettent des entreprises sur pied. De plus, le taux de remboursement des prêts atteint 90 p. 100. Nous appuyons également leurs efforts en agriculture grâce à nos programmes qui visent les moyens de subsistance — bétail, semences, engrais. Des améliorations se font sentir. Beaucoup de femmes sont le soutien de leur famille. Elles peuvent non seulement participer davantage, mais aussi faire une contribution appréciable. Je tiens à souligner que, lorsqu'elles le peuvent, les femmes participent aux élections. Elles vont voter. Voilà qui montre selon moi qu'elles s'intéressent à leur avenir: 43 p. 100 des 6,5 millions d'Afghans qui ont voté aux dernières élections étaient des femmes. Sous le régime des talibans, elles ne pouvaient pas le faire. De plus, 25 p. 100 des parlementaires sont des femmes […] Une des choses qu'il faut comprendre, au fond, c'est que les droits fondamentaux des femmes sont reconnus. Elles sont protégées contre la violence, elles peuvent se déplacer, elles ont accès à l'éducation, au processus démocratique, à l'alphabétisation, à des établissements qui offrent de meilleurs soins de santé pour elles et leur famille. Il y a un dicton selon lequel, si on veut qu'une population soit instruite, on doit éduquer les femmes, et celles-ci font en sorte que tous soient éduqués. Même chose pour les soins de santé et les droits fondamentaux[125].

Le témoignage de l’honorable Flora MacDonald devant le Comité a aussi porté sur le rôle des femmes :

Il y a un an, la ville de Bamyan, capitale de la province du même nom, a élu sa choura. Pour la première fois dans l’histoire de l’Afghanistan, une femme a été choisie pour la diriger. Quatre des dix membres de cette choura sont des femmes. C’est une réalisation vraiment extraordinaire. Bamyan est la seule des 34 provinces afghanes à avoir une femme pour gouverneur[126].

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Recommandation 6

Le Canada devrait veiller à ce que ses projets de développement et de reconstruction continuent de tenir compte des besoins des femmes afghanes et contribuent à améliorer leurs pouvoirs sociaux, économiques et politiques.

Il ne fait aucun doute dans l’esprit du Comité que l’Afghanistan a beaucoup à gagner en continuant de recevoir l’aide et le soutien de la communauté internationale. La position des témoins à ce sujet est unanime et voici comment Matt Waldman, conseiller en matière de politique en Afghanistan auprès d’Oxfam International, l’a résumé :

Je suis certainement d'accord pour dire que nous avons fait d'importants pas dans la bonne direction dans de nombreux domaines, mais je crois qu'il est important de reconnaître que dans de nombreuses régions de l'Afghanistan […] il y a encore des zones de pauvreté extrême. Dans ces conditions, nous constatons que des personnes se joignent aux forces militantes, ou cultivent le pavot […] Il y a eu des améliorations, mais nous pouvons certainement faire davantage avec les fonds accordés à l'Afghanistan[127].

L’étendue des activités et des réalisations du Canada aux chapitres de la reconstruction et du développement

Le gouvernement canadien a solidement appuyé la reconstruction et le développement en Afghanistan, comme en témoignent sa contribution financière et les ressources humaines qu’il y a affectées, de même que l’étendue de ses activités là-bas. Le Comité l’a déjà indiqué dans son rapport préliminaire : le Canada est au nombre des cinq principaux fournisseurs d’aide de l’Afghanistan, lequel constitue d’ailleurs le plus gros bénéficiaire de l’aide bilatérale du Canada. Le Canada s’est déjà engagé à verser pour 1,2 milliard de dollars canadiens d’aide à ce pays d’ici 2011, année marquant la fin de la période de cinq ans pendant laquelle devait durer le Pacte et la Stratégie intérimaire pour le développement de l’Afghanistan[128].

L’engagement du gouvernement canadien a beaucoup évolué en  fonction de la situation et des besoins sur le terrain; en ce sens, il n’est ni statique, ni rigide. En 2006-2007, par exemple, il a dépensé plus de 250 millions de dollars, contre 139 millions de dollars l’année précédente et 100 millions de dollars l’année d’avant[129]. En 2007, il prévoyait dépenser plus de 30 millions de dollars dans la province de Kandahar, soit cinq fois plus qu’en 2005-2006.[130]

Afin de gérer ces dépenses accrues et les activités, les programmes et les projets qui y sont associés, il a fallu, au dire des représentants de l’ACDI, augmenter les effectifs de cet organisme sur le terrain, en Afghanistan, ainsi qu’à l’administration centrale. Selon Robert Greenhill, président de l’ACDI : « Notre présence sur le terrain a plus que doublé au cours des deux dernières années et elle continue d'augmenter. Nous aurons 35 professionnels en Afghanistan d'ici avril 2008, contre seulement 10 en 2006. Globalement, avec la création du Groupe d'action en Afghanistan, le programme, qui avait juste un peu plus de 20 employés à temps plein, en a maintenant près de 80[131]. » Neuf de ces employés supervisent des projets à Kandahar[132].

Le Comité note que parmi les activités auxquelles participe le Canada et auxquelles il a fourni son soutien, figurent des initiatives axées directement sur la reconstruction, telles que le Fonds d’affectation spéciale pour la reconstruction de l’Afghanistan, le Programme antimines pour l’Afghanistan, la construction de la route de Spin Boldak et les projets d’infrastructure et de réfection des routes et des ponts[133]. Il y a également des activités de développement économique, comme la mise en oeuvre du Mécanisme de microfinancement et de soutien en Afghanistan (MISFA)[134], le rétablissement des institutions de gouvernance, par l’entremise du Programme de solidarité nationale, ainsi que le soutien du processus démocratique[135]. Les contributions du Canada ont été particulièrement évidentes dans les domaines de la santé et de l’éducation[136].

À l’instar de nombreux témoins, et comme il l’avait fait observer dans son rapport préliminaire, le Comité voit bien les résultats positifs obtenus par le Canada grâce à ses efforts de développement et de reconstruction en Afghanistan. Pour une, Linda Jones, de l’organisme MEDA (Mennonite Economic Development Associates of Canada), qui a été présent pendant trois ans en Afghanistan, a indiqué que ses collègues et elle ont constaté « l'incidence extraordinaire de l'apport du Canada en termes de développement et de reconstruction de la nation[137] ».

Il ne faut pas croire que l’on tient pour acquis l’aide du Canada et son engagement à reconstruire l’Afghanistan. L’ambassadeur de l’Afghanistan au Canada, Son Excellence Omar Samad, a d’ailleurs déclaré à ce sujet au Comité :

Nous en sommes très reconnaissants et apprécions chaque dollar qui nous est versé. En tant qu'Afghan, j'ai de nombreuses fois déclaré que je tiens à ce que chaque dollar d'aide canadienne aille aussi loin que possible pour changer et améliorer les vies des Afghans, qu'il s'agisse d'enfants et de femmes, d'infrastructure, de gouvernance, de règle de droit ou de droits de l'homme[138].

Savoir reconnaître les liens entre le développement et la sécurité

Le Comité a la ferme conviction que les progrès accomplis ou à venir dans la reconstruction et le développement de l’Afghanistan, sous l’impulsion du Canada et de la communauté internationale, ne sont pas sans rapport avec l’objectif parallèle d’améliorer la sécurité de la population afghane, hommes, femmes et enfants confondus. Comme il était indiqué dans notre rapport préliminaire, le Comité soutient et apprécie à sa juste valeur la démarche à volets multiples adoptée par le Canada, qui reconnaît l’existence d’une relation mutuellement bénéfique entre la sécurité et le développement.

Le sous-ministre des Affaires étrangères, Leonard Edwards, a fait ce commentaire : « Nos projets de développement sont aussi destinés à doter le peuple afghan d'un environnement plus sûr. Les piliers se renforcent l'un l'autre en démontrant que les intérêts et valeurs du Canada sont les fondements essentiels de notre mission en Afghanistan[139]. » Il n’est pas étonnant, dans les circonstances, que le Canada ait augmenté son aide dans la région de Kandahar, où quelque 2 500 soldats canadiens sont déployés dans le cadre de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) afin d’accroître la sécurité et de réduire l’influence des insurgés, dans une proportion de près de huit fois ce qu’elle était en 2005-2006, pour ainsi la porter à 39 millions de dollars en 2006-2007[140].

Le Comité croit en même temps que le degré de sécurité assuré a une incidence sur les efforts de reconstruction et de développement. Plus les conditions de sécurité sont stables, plus il est facile d’acheminer l’aide nécessaire et d’entreprendre et de mener à bien les projets de reconstruction, et plus vite les Afghans peuvent reprendre leurs occupations quotidiennes. C’est du moins l’avis de nombreux témoins. Paul Heinbecker, par exemple, a souligné ainsi ce rapport de cause à effet :

[I]l n’est pas évident pour moi qu’il soit possible d’œuvrer en faveur du développement en l’absence d’un degré raisonnable de sécurité. Les Nations Unies viennent tout juste de déclarer que la plus grande partie du sud de l’Afghanistan n’est pas sûre pour les travailleurs humanitaires . Elle n’est pas sûre à cause de l’activité des talibans. Pour moi, c’est le point de départ[141].

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Des témoins ont cependant affirmé que la crainte d’une recrudescence des activités des insurgés mine les conditions de développement et de reconstruction et compromet tout progrès sous ce rapport. Seddiq Weera, conseiller principal du ministre de l’Éducation de la République islamique d’Afghanistan, soutient par exemple que nous « assistons à une montée de l’insurrection, tant sur le plan des combats de type guérilla que sur celui des attentats-suicide[142] ». Lina Holguin, directrice des politiques à Oxfam-Québec, a décrit ainsi l’impact de l’insurrection sur les Afghans :

En plus des 130 000 personnes déplacées à long terme en Afghanistan, 80 000 autres personnes ont été récemment déplacées en raison des combats dans le Sud du pays. La guerre affecte la capacité des gens de cultiver les terres; elle a forcé la fermeture d'établissements d'enseignement et de santé; elle a réduit la disponibilité des travailleurs humanitaires sur le terrain[143].

De plus, Peggy Mason, agrégée supérieure de recherche à la Norman Paterson School of International Affairs, de l’Université Carleton, prétend, par exemple, qu’« il n'est pas possible de bien défendre les droits des femmes en Afghanistan si la sécurité de tout le monde est de plus en plus compromise chaque jour » et que « [c]e n'est pas ainsi qu'on réussira à protéger les femmes afghanes[144] ».

L’ancien ministre des Affaires étrangères du Canada, l’honorable Maxime Bernier, l’a bien dit : « Aucun projet ne peut être réalisé sans sécurité. La sécurité, c'est la base. Les Forces canadiennes encadrent ces gens pour s'assurer que le terrain soit sécuritaire et que les projets de développement puissent être menés à bien[145]. »

L’honorable John Manley a aussi insisté sur ce point :

Il y a une relation entre la sécurité et la reconstruction, et on ne peut pas l'oublier. En ce moment, il n'est pas possible de faire avancer la cause du développement et de la reconstruction en Afghanistan sans avoir la force militaire requise pour assurer la sécurité des travailleurs, des représentants des organisations non gouvernementales et des représentants de l'ACDI ou des autres agences d'aide internationale. C'est nécessaire et la situation est dangereuse. Un gouvernement alternatif formé de talibans voudrait se présenter. Ces derniers sont prêts à dire qu'aucun progrès n'a été fait, que la force internationale ne donne rien et qu'il faut un autre soulèvement. Le conflit existe et, selon nous, il est clair qu'il faut continuer de faire un effort sur le plan de la sécurité si on veut poursuivre le développement[146].

La contribution des équipes provinciales de reconstruction (EPR) est d’une valeur inestimable sur ce plan. L’ancien ministre des Affaires étrangères a décrit comme suit les activités de l’EPR du Canada à Kandahar :

Cette équipe de 350 personnes recourt aux compétences de diplomates, d'experts en développement, de conseillers en services correctionnels, de policiers et de militaires. Son mandat correspond très bien aux priorités du Pacte pour l'Afghanistan et de la Stratégie de développement national en Afghanistan, soit la sécurité, la gouvernance et le développement. L'équipe de reconstruction appuie des programmes nationaux afghans tels que le programme de solidarité nationale […] L'équipe met également en oeuvre un large éventail de programmes : formation policière, renforcement de la gouvernance locale et de la capacité en matière de justice et aide matérielle, par exemple[147].

Matt Waldman, d’Oxfam International, s’est dit d’accord avec le travail accompli par les EPR, ajoutant :

Le mandat des EPR est très clair, et c'est de créer un environnement stable et sécuritaire favorable au développement. Nous croyons que les EPR devraient respecter ce mandat autant que possible. Nous reconnaissons que, compte tenu qu'au cours des dernières années les EPR ont participé à des activités de développement en offrant de l'aide, il peut être nécessaire pour elles de continuer dans cette voie dans une certaine mesure[148].

Le Comité comprend que l’on puisse contester l’idée de confier aux militaires, plus particulièrement aux EPR, le soin de fournir de l’aide au développement. Certains témoins ont d’ailleurs indiqué qu’en plus d’être inefficace, toute participation des militaires aux activités de développement compromet la neutralité du travail de développement. En ce qui a trait plus précisément aux EPR, Lina Holguin, directrice des politiques à Oxfam-Québec, a déclaré ce qui suit :

Ce n’est pas aux ERP d'assurer le développement à long terme, et l'armée n'a ni l'expertise ni la stabilité nécessaires pour s'en occuper. Avec ces ERP, il est également plus difficile de faire la distinction entre les militaires et les travailleurs humanitaires, ce qui met notre personnel dans une position considérablement dangereuse et réduit notre capacité de travailler. Les ERP étant associées aux militaires, des projets d'aide, comme des écoles, deviennent des cibles. Le mandat des ERP canadiennes devrait être révisé. Ces équipes ne devraient se trouver que dans les endroits où les conditions de sécurité le permettent. Elles devraient se concentrer sur la sécurité, la stabilité et le maintien de l'ordre public, ce qui est leur spécialité. Elles ne devraient offrir des secours que dans les situations où la vie des gens est en danger et aucune autre option civile n'est possible. Elles ne devraient pas fournir d'aide au développement. Compte tenu de la nature provisoire des ERP, le Canada devrait élaborer une stratégie de retrait assortie de plans de réduction et d'arrêt des activités lorsque les régions concernées redeviennent relativement sécuritaires[149].

Voici ce que Gerry Barr, président-directeur général du Conseil canadien pour la coopération internationale, avait à dire au sujet des risques que représentent les insurgés pour les travailleurs humanitaires et de l’impact de leur action sur les projets en général :

Le manque de sécurité des travailleurs humanitaires pose un véritable problème pour au moins deux raisons: premièrement, si des travailleurs humanitaires sont menacés, enlevés ou tués, il est clair qu'ils ne pourront pas apporter l'aide prévue; deuxièmement, les organismes doivent déterminer si leur personnel peut agir en bénéficiant d'un niveau de sécurité raisonnable. Plus les travailleurs humanitaires sont ciblés, moins les organismes peuvent s'occuper concrètement de leurs programmes. Cela signifie que l'aide n'atteint pas les personnes dans le besoin, ce qui a de sérieuses répercussions sur la capacité du pays de faire des progrès vitaux en matière de développement[150].

Évidemment, il ne faut pas minimiser ou négliger ces risques, et le Comité s’inquiète beaucoup du danger grandissant auquel sont exposés les travailleurs humanitaires, qui sont là pour améliorer le sort de la population locale. Le Comité est cependant convaincu que l’arrêt de toute forme d’aide au développement en raison des piètres conditions de sécurité représente une solution totalement inacceptable. L’honorable John Manley est celui qui a exprimé le mieux cet avis :

[S]i on ne peut pas agir à cause des risques pour la sécurité, il vaut certainement mieux être là à faire quelque chose, même sous la protection de l'armée, que de ne pas être là du tout, puisque la population peut bénéficier de l'aide ainsi offerte. C'est mieux que de laisser l'armée seule s'occuper de l'aide au développement[151].

Robert Jackson, directeur des relations internationales à l’Université de Redlands, n’y est pas allé par quatre chemins :

[S]i la reconstruction est menée sans appui militaire, les gens qui s’en occupent seront tués. C’est aussi simple que cela. Les talibans les assassineront […] Par conséquent, quand nous parlons d’aide et de reconstruction, nous devons tout d’abord tenir compte de la présence des talibans et donner aux travailleurs la protection nécessaire[152].

Le Comité partage unanimement l’espoir que la participation des militaires à ces activités n’est que temporaire et que plus vite les conditions de sécurité s’amélioreront, grâce à une intervention plus vigoureuse de la communauté internationale, plus vite les militaires pourront laisser à d’autres les activités de développement, l’Armée nationale afghane deviendra opérationnelle et les organismes de développement pourront œuvrer dans des conditions plus sûres.

La majorité des membres du Comité espèrent  que les annonces faites en avril 2008 par le Canada et ses alliés au sein de l’OTAN concernant l’augmentation des effectifs de la FIAS aideront à contrer les menaces posées par les insurgés, à réduire les risques pour les travailleurs humanitaires et à rétablir sur le terrain les conditions qui permettront aux ONG d’avoir les coudées franches pour faire leur travail..

Recommandation 7

Compte tenu de l’importance du rétablissement de la sécurité pour permettre la reconstruction et un développement durable, et compte tenu des conditions de sécurité qui règnent actuellement dans la province de Kandahar, les Forces canadiennes devraient continuer de fournir, par l’entremise de l’Équipe provinciale de reconstruction, la protection nécessaire à la prestation de l’aide humanitaire vitale et de l’assistance à la reconstruction et au développement aux habitants de cette province. Le gouvernement canadien, pour sa part, devrait suivre l’évolution des conditions de sécurité dans la province de Kandahar et, advenant une amélioration de ces conditions, modifier en conséquence le rôle des militaires et des EPR dans les efforts de reconstruction et de développement de l’Afghanistan.

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Établir un nouvel ordre de priorités

Bien que conscient de la nécessité d’une présence militaire pour faciliter le travail de reconstruction et de développement en Afghanistan, le Comité s’interroge au sujet de l’équilibre actuel entre les priorités de développement et les priorités de défense en Afghanistan. D’ailleurs, les témoins étaient tous d’accord pour dire qu’il fallait revoir l’ordre de priorités de façon à favoriser le développement. Citons, par exemple, Nigel Fisher, d’UNICEF Canada :

L'aide à l'Afghanistan devrait être une grande priorité pour le Canada aujourd'hui et pour l'avenir prévisible. Il est de notre intérêt d'investir dans la sécurité et la reconstruction de l'Afghanistan. Le rôle militaire du Canada est important et absolument nécessaire à l'heure actuelle, mais il ne suffit pas. Une augmentation de l'aide au développement non militaire à l'Afghanistan est absolument essentielle[153].

D’autres ont tenu des propos similaires, dont Emmanuel Isch, de Vision mondiale Canada :

Nous devons ajuster certaines priorités, y compris les efforts de l'ACDI. On a trop mis l'accent sur certains types d'activités qui ne concernent rien d'autre que la sécurité. Je crois que nous devons le reconnaître. Mais je crois aussi que les objectifs en question pourront être atteints si nous élargissons la portée de nos interventions et de notre approche sectorielle, et si nous collaborons avec un plus grand nombre de partenaires[154].

L’idée d’établir un nouvel ordre de priorités a été soulevée dans la motion adoptée par la Chambre des communes le 13 mars 2008, où il était recommandé : « que la contribution du Canada à la reconstruction et au développement de l’Afghanistan devrait être : a) revitalisée et augmentée afin de mieux concilier nos efforts militaires et nos efforts de développement en Afghanistan[155] ». Elle est abordée également dans le rapport du Groupe d’experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan, suivant lequel « [i]l est essentiel de corriger les déséquilibres, au chapitre du financement et du personnel, entre l’imposante mission militaire canadienne en Afghanistan et la mission civile nettement plus modeste qui œuvre à la reconstruction, au développement et à la gouvernance[156] ». Le Comité partage cet avis.

Cependant, bien que favorable à une stratégie mettant davantage l’accent sur le développement, le Comité prend note de la préoccupation exprimée par certains témoins à l’effet que l’établissement d’un nouvel ordre de priorités ne doit pas se faire au détriment des ressources consacrées à la défense. En cela, il rejoint le général à la retraite Lewis MacKenzie, selon qui « [o]n insiste trop sur l’aspect militaire, mais cela ne signifie pas qu’il faut le réduire. Il faut plutôt renforcer le plus possible les aspects diplomatiques et de développement[157]. »

Au moment où le Comité mettait la dernière main à son rapport en juin 2008, le Comité du Cabinet sur l’Afghanistan publiait son rapport au Parlement « L’engagement du Canada en Afghanistan », dans lequel il propose un rééquilibrage des programmes civils et militaires du Canada en Afghanistan [158].

Recommandation 8

Le gouvernement du Canada, devrait revoir son ordre de priorités en Afghanistan et s’assurer de mettre davantage l’accent sur les efforts de reconstruction, de développement et d’instauration de la paix dans ce pays, tout en maintenant son engagement militaire.

Certains des témoins qui ont abordé la question des projets de premier plan sont d’avis que la sensibilisation et la perception de la population afghane en ce qui concerne la contribution du Canada à la reconstruction et au  développement n Afghanistan s’en trouveraient améliorées. Du même coup, cela stabiliserait la situation sur le terrain, favoriserait davantage la reconstruction et le développement et réduirait au fil du temps la nécessité d’une présence militaire. Derek Burney, membre du Groupe d’experts, a dit au Comité :

Ce que nous voulons dire, c’est que les trois quarts de l’aide du Canada à l'Afghanistan emprunte des voies multilatérales ou gouvernementales. Sur place, nos efforts passent inaperçus. Nous convenons avec vous qu'il existe un certain déséquilibre, mais nous ne ferons rien pour le corriger à moins qu'un plus grand nombre de projets clairement attribuables au Canada soient mis en oeuvre dans ce pays. […] Tout ce que je puis dire, c'est que dans une zone de guerre, il faut mettre l'accent sur les projets ayant des répercussions immédiates et que les gens peuvent relier au Canada[159].

Dans son rapport au Parlement de juin 2008, le Comité du Cabinet sur l’Afghanistan fait état de trois projets de premier plan auxquels le Canada participera : la réfection du barrage Dahla ainsi que de son réseau d’irrigation et de canaux; la construction et la remise en état de 50 écoles et la formation d’enseignants dont le nombre pourra atteindre 3 000; un soutien accru à la campagne d’immunisation contre la polio [160].

Le Comité prend note des préoccupations de certains témoins au sujet des limites des projets de premier plan, notamment du  point de vue de Lewis MacKenzie, général à la retraite : « Si nous plantons le drapeau du Canada après avoir réalisé un projet […], le projet sera détruit. […] Je sais que les projets arborant le drapeau canadien sont très populaires. C’est simplement qu’ils ne durent pas très longtemps[161]. » Le colonel à la retraite Mike Capstick craignait l’effet que des projets de premier plan auraient sur la légitimité du gouvernement afghan en tant qu’autorité première aux yeux de la population locale : « […] rénover l'hôpital Mirwais et y planter un drapeau canadien ne fait rien pour légitimer le gouvernement afghan. On risque même, en agissant ainsi, d'envoyer aux habitants de la province le message qu'Ottawa peut en faire plus pour eux que Kaboul[162]. »

Dans un éditorial publié le 12 juin 2008 dans l’Ottawa Citizen, Nipa Banerjee fait écho aux préoccupations selon lesquelles les projets de premier plan nuisent à l’autorité et à la légitimité du gouvernement afghan. Elle souligne notamment qu’« ils ne contribueront en rien à accroître la présence et la visibilité du gouvernement de l’Afghanistan auprès de la population, ni à inciter celle-ci à être fidèle au gouvernement plutôt qu’aux talibans[163] ». Dans un communiqué rendu public en janvier 2008 en réaction aux recommandations du rapport Manley en faveur des projets de premier plan, CARE Canada, Oxfam Canada et Vision mondiale soulignent que ces projets « procurent peu d’avantages aux Afghans et mettent trop souvent en danger la vie des civils et des travailleurs humanitaires [164] ».

Le Comité revient cependant au fait que la sécurité et les activités de reconstruction et de développement sont intimement liées et que des améliorations apportées sur un plan auront des répercussions positives sur l’autre. Il insiste également sur le moyen proposé par Mike Capstick pour atténuer l’impact des projets sur la légitimité du gouvernement afghan : « Tout projet de ce genre devra être réalisé en partenariat avec le gouvernement afghan et la population locale. Et surtout, il devra raffermir le pilier de la gouvernance et la légitimité du gouvernement afghan en soutenant le leadership afghan et en améliorant ses moyens d'action[165]. » Ainsi, les projets de premier plan du Canada pourraient influer positivement non seulement sur la sécurité et sur la légitimité du gouvernement afghan, mais également sur la vie des hommes, de femmes et des enfants.

Recommandation 9

En mettant de l’avant les mesures les plus susceptibles de profiter aux Afghans dans le besoin et de sensibiliser du même coup la population locale aux efforts qu’il déploie, le gouvernement du Canada devrait envisager en Afghanistan les projets qui permettent de respecter l’autorité du gouvernement afghan et sont en harmonie avec les autres activités d’aide internationale.

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Accroître l’efficacité de l’aide et des mesures de contrôle

Bien que le Comité ait entendu de nombreux témoignages positifs au sujet de l’efficacité de l’aide canadienne et des mesures de contrôle, il n’est pas tout à fait convaincu du bien-fondé du statu quo et souhaite voir des améliorations..

Bon nombre de témoins ont signalé que le niveau actuel de l’aide consacrée à la reconstruction est nettement insuffisant vu les besoins de l’Afghanistan et les défis qui s’y posent. Comme l’a si bien indiqué la journaliste Sally Armstrong au Comité, « nous n’avons investi dans ce pays qu’un vingt-cinquième de l’effectif militaire et un cinquantième de l’aide accordés à la Bosnie et au Kosovo[166] ». Paul Heinbecker, ancien ambassadeur du Canada aux Nations Unies, abondait dans ce sens : « Un effort beaucoup plus important est nécessaire, aussi important, relativement parlant, que celui qui a été déployé dans les Balkans[167]. » D’autres témoins ont fait mention du fossé qui existe entre l’aide promise et l’aide réellement offerte. Par exemple, selon Matt Waldman, d’Oxfam International, auteur du récent rapport Falling Short: Aid Effectiveness in Afghanistan [168] :

Pour ce qui est du volume, l'aide est insuffisante. Selon le gouvernement afghan, le pays devait recevoir 25 milliards de dollars d'aide, mais n'en a obtenu que 15. Lorsqu'on compare les dépenses militaires aux dépenses en développement, on constate que les forces armées américaines à elles seules dépensent plus de 100 millions de dollars par jour, tandis que les dépenses d'aide sont en moyenne d'environ 7 millions de dollars par jour. Une trop grande partie de l'aide est prescriptive et fondée sur l'approvisionnement. L'aide devrait plutôt être fondée sur les besoins et la demande. L'aide est centralisée dans les centres urbains et n'a pas été distribuée également. Enfin, nous croyons que c'est pour ces raisons que l'insécurité s'est généralisée[169].

La Stratégie nationale de développement de l’Afghanistan pour 2008-2013 rendue publique en avril 2008 fait elle aussi mention du fait que « le montant d’argent qu’on s’est engagé à verser par habitant pour la reconstruction de l’Afghanistan demeure faible comparativement aux sommes versés précédemment à d’autres pays relevant d’un conflit, comme la Bosnie-Herzégovine[170]. »

Qui plus est, comme l’a dit Nipa Banerjee au Comité : « De gros volumes d'aide ne serviront à rien s'ils ne s'appuient pas sur de bons programmes qui donneront les résultats escomptés sur le terrain. Le montant des déboursés n'est pas un indicateur de succès[171]. »

Recommandation 10

Le gouvernement du Canada devrait s’acquitter de ses engagements et fournir l’aide promise à l’Afghanistan et encourager fortement d’autres donateurs dans des contextes bilatéraux et multilatéraux à lui emboîter le pas.

Le Comité a aussi entendu des témoignages au sujet de l’efficacité de l’aide et de son impact sur l’économie locale. L’ancien diplomate canadien Scott Gilmore, de Peace Dividend Trust, a soutenu que « [p]armi tous les donateurs, l’ACDI est celui qui a le plus de répercussions sur l’économie locale pour chaque dollar dépensé » et « [l]es donateurs, y compris le Canada, ont pris plusieurs engagements dans le cadre du Pacte pour l'Afghanistan, notamment d'avoir plus souvent recours à du personnel et à des entreprises afghans, mais à ce jour, personne n'a jamais essayé de déterminer précisément combien d'argent est injecté dans l'économie locale[172]. »

Matt Waldman s’est dit particulièrement préoccupé par l’affectation des ressources : « Une bonne partie de l'argent consacré à l'aide est versé à de grands entrepreneurs et à des consultants. Nous reconnaissons que des entrepreneurs et des consultants sont nécessaires au processus de reconstruction, mais cela n'empêche pas une évaluation rigoureuse de ce qu'ils offrent comme valeur contre cet argent[173]. »

Selon Nipa Banerjee, « une multiplicité de récents diplômés des pays du Nord, surrémunérés, inexpérimentés et sans formation adéquate se sont servi des crédits versés au titre de l'APD pour renforcer leurs propres capacités au sein de l'industrie de l'assistance en progression constante qui a englouti l'Afghanistan[174]. »

Le 12 juin 2008, dans sa Déclaration de la Conférence internationale de soutien à l’Afghanistan, la communauté internationale prend note de la nécessité d’améliorer l’efficacité de l’aide. Elle convient en outre d’apporter « une aide accrue, plus prévisible et plus transparente » et de fournir cette aide « de manière à promouvoir les achats publics dans le pays et le renforcement des capacités [175]

Recommandation 11

Le gouvernement du Canada devrait veiller, dans la mesure du possible, à ce que le personnel canadien œuvrant aux projets de reconstruction et de développement internationaux ait les compétences et l’expérience requises pour réaliser les projets avec efficacité en Afghanistan.

Recommandation 12

Vu l’impact qu’a la présence internationale sur l’économie et le développement des moyens d’action en Afghanistan, le gouvernement du Canada devrait accroître ses efforts afin de s’assurer que le personnel et les services afghans reçoivent toute l’attention nécessaire dans le cadre des activités de reconstruction et de développement réalisées par le Canada.

Il est absolument essentiel d’avoir de solides méthodes de reddition de comptes et d’évaluation pour établir les progrès accomplis en Afghanistan. En général, les points de repère utilisés par le Canada et par la communauté internationale sont définis dans le Pacte pour l’Afghanistan[176]. De plus, selon Nipa Banerjee, les programmes d’aide, bilatéraux ou multilatéraux, sont dotés de mécanismes de responsabilisation et de rapport. « Si le gouvernement estime que ceux-ci ne sont pas suffisants, il pourrait éventuellement exiger le respect de conditions plus rigoureuses en matière de responsabilisation, mais ce serait exclusivement de façon à pouvoir suivre l’utilisation des crédits canadiens[177]. »

Des ministres et des représentants du gouvernement ont dit au Comité qu’ils avaient confiance dans les méthodes d’évaluation utilisées pour s’assurer de la gestion fiable des fonds et des programmes de reconstruction et de développement. Bev Oda, ministre de la Coopération internationale, a dit au Comité :

Tandis que nos programmes se poursuivent, nous ne perdons pas de vue les défis à relever pour garantir l'efficacité de l'aide et la responsabilisation. Voilà pourquoi on aura recours aux contrôles, aux rapports et à l'évaluation à trois niveaux : au niveau national, avec la collaboration de la communauté internationale et du gouvernement afghan; au niveau des programmes; au niveau des projets[178].

La Ministre s’est dite convaincue que la coopération multilatérale permettait d’obtenir les renseignements dont le Canada a besoin pour satisfaire aux exigences en matière de rapports.

D'abord, il ne faut pas oublier que nous travaillons avec le gouvernement afghan et 60 partenaires étrangers. […] Étant donné qu'il s'agit d'organisations d'une grande expérience au niveau international, comme le Programme alimentaire mondial, le Programme de développement des Nations Unies, l'Organisation mondiale de la santé, l'UNICEF, la Banque mondiale, la Croix‑Rouge internationale — nous collaborons avec elles —, elles comprennent que tous les donateurs exigent des rapports sur l'utilisation de leurs fonds et contributions. Elles sont donc toujours disposées à collaborer avec nous à cet égard. Je n'aurais pas pu vous faire part de faits et de chiffres comme je l'ai fait dans mon exposé si cette coopération n'existait pas pour les rapports à fournir aux pays donateurs, aux organisations donatrices[179].

En même temps, le Comité s’est réjoui d’apprendre de la Ministre que des efforts étaient faits pour améliorer la responsabilisation et l’évaluation :

Nous venons récemment de terminer des discussions avec le gouvernement afghan […] sur le renforcement de ses exigences. Il s'agit de s'entendre, lorsque nous travaillons avec lui, sur la façon dont il rend compte de l’utilisation des fonds[180].

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Bien que la Ministre se soit montrée confiante, d’autres témoins ont fait part au Comité des points faibles des méthodes d’évaluation. Par exemple, Nipa Banerjee a affirmé : « S'agissant de l'efficacité de l'aide au développement, le suivi des dépenses à lui seul n'est pas garant d'efficacité. Ainsi des mécanismes de mesure du rendement sont essentiels[181]. » Ces préoccupations sont également exposées dans le rapport Manley : « ses objectifs [Pacte pour l’Afghanistan], valables en théorie, n’ont pas eu dans la pratique tous les effets escomptés, et les évaluations de rendement se sont avérées peu concluantes[182]. »

Par ailleurs, des témoins ont fait part au Comité de leurs préoccupations au sujet du manque de transparence du processus d’évaluation. Pierre Beaudet, professeur à l’Université d’Ottawa, a mentionné au Comité :

Je ne connais pas les résultats pratiques d'une telle situation, mais je sais que l'ACDI refuse, malgré des demandes présentées en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, de livrer l'information sur les bilans approximatifs et partiels de ces opérations. […] Plusieurs documents qui circulent actuellement montrent que ces initiatives n'atteignent pas les objectifs prévus. Les objectifs étaient peut-être louables, mais les conditions dans lesquelles on a tenté de les atteindre ont fait en sorte qu'ils n'ont pas été atteints. […] Où va cet argent? […] J'aimerais que l'ACDI fasse preuve de transparence et nous donne l'information, car cette information existe[183].

La question de la transparence a été reprise par d’autres témoins, dont Matt Waldman :

[…] il n'y a pas assez de transparence. Si c'était le cas, nous pourrions clairement cerner les mauvaises pratiques et les corriger, et c'est pourquoi nous demandons une transparence complète — des indicateurs de l'efficacité de l'aide qui s'appliquent à tous les bailleurs de fonds et mesurent tous les aspects clés de l'aide, comme les répercussions, l'efficience, la pertinence, la durabilité, la responsabilité et l'utilisation des ressources afghanes[184].

Les questions de responsabilité et de transparence ont fait l’objet de la motion adoptée par la Chambre des communes le 13 mars 2008 et demandant que la contribution du Canada à la reconstruction et au développement de l’Afghanistan soit « soumise à un plus haut niveau de transparence et d’examen, de sorte que la population canadienne puisse être certaine que nos efforts de développement donnent des résultats en Afghanistan »; on y demandait aussi que le gouvernement du Canada « informe plus franchement et plus fréquemment la population sur ce qui se passe en Afghanistan, qu’il lui présente plus de bilans sur le rôle du Canada […][185] ».

Recommandation 13

Le gouvernement du Canada doit continuer de peaufiner ses méthodes de responsabilisation et d’évaluation, pour ce qui est de ses engagements de reconstruction et de développement, et doit s’assurer d’être transparent dans son processus d’évaluation. À cet égard, le gouvernement du Canada devrait, de concert avec la communauté internationale, établir un cadre efficace pour mesurer les progrès accomplis et réaliser l’évaluation du rendement en fonction des jalons établis par la communauté internationale dans le Pacte pour l’Afghanistan.

Recommandation 14

Le gouvernement du Canada devrait prendre les mesures qui s’imposent pour informer davantage la population canadienne des efforts fructueux et infructueux du Canada au chapitre de la reconstruction et du développement de l’Afghanistan. Le gouvernement du Canada devrait faire preuve de plus de transparence dans son processus d’évaluation de son aide au développement de l’Afghanistan.

Programmes et projets de reconstruction et de développement locaux et nationaux

En ce qui concerne le rôle du Canada dans la reconstruction et le développement de l’Afghanistan, le Comité est d’avis qu’autant les objectifs nationaux que locaux sont importants pour l’avenir du pays. Il s’est réjoui d’entendre parler des efforts déployés par le Canada au niveau national, notamment pour appuyer la légitimité du gouvernement afghan. La ministre de la Coopération internationale a affirmé : « Même si les activités du Canada ciblent plus particulièrement Kandahar, son programme de développement touche l'ensemble de l'Afghanistan, et 80 p. 100 de ses engagements portent sur des programmes nationaux dont les effets se font sentir dans les 34 provinces afghanes[186]. » Nipa Banerjee a fait état de l’incidence positive de tels programmes nationaux : « […] le financement de programmes nationaux conçus et exécutés par les ministères afghans jouit justement de l'appui de la population. Nous en avons déjà certaines indications[187]. » Insistant sur l’importance respecter le principe de l’innocuité en vertu duquel toute action doit être menée de façon à profiter au pays bénéficiaire et à ne pas lui faire de tort, elle a aussi fait une mise en garde contre la tentation d’adopter des approches qui sont nuisibles parce qu’elles  «  [vont] à l'encontre de l'objectif consistant à rehausser la légitimité du gouvernement afghan[188] ».

Le Comité était encouragé d’apprendre que le Canada œuvre auprès de la population afghane pour déterminer quels en sont les besoins et pour en favoriser la prise en charge au niveau local. L’ancien ministre des Affaires étrangères a dit au Comité : « Le gouvernement du Canada, de concert avec ses partenaires internationaux, s'est engagé à aider le gouvernement afghan à assurer la sécurité, l'éducation, de meilleures possibilités économiques et un avenir plus prospère pour sa population. Chaque jour, nous voyons la différence que nous faisons sur le terrain. Les Canadiens — militaires et civils — travaillent de pair avec les Afghans pour aider ces derniers à établir une meilleure société[189]. » La ministre de la Coopération internationale a d’ailleurs indiqué dans ce sens : « Notre objectif est de permettre aux Afghans de prendre en main tous les aspects du développement de leur pays et leur avenir. Nous continuerons de leur accorder un appui ferme tandis qu'ils s'efforceront de rebâtir leur pays un village à la fois, un jour à la fois[190]. »

Le Comité croit néanmoins que l’avenir de l’Afghanistan réside principalement dans le développement des régions rurales, notamment grâce aux projets communautaires qui favorisent la prise en charge au niveau local ou par la population afghane. Dans ce contexte, les témoins s’accordaient pour dire que, même si l’attention se porte déjà sur le développement rural, il y a place à l’amélioration. Nous avions déjà pris note de ce point de vue dans notre rapport préliminaire, où il est question du témoignage de Seema Patel :

D’après nous, les crédits de reconstruction et de développement pourraient être employés de manière beaucoup plus efficace, en particulier dans les difficiles provinces du sud, en ayant recours aux services d’un personnel local tant au niveau de la planification qu’au niveau de la mise en oeuvre. En effet, la manière de le mettre en oeuvre revêt autant d’importance que le programme lui-même. Que ce soit par les shuras, c'est-à-dire les grands conseils, ou que ce soit à l’occasion de micro-projets d’électrification, ou dans le fonctionnement de divers mécanismes informels de justice, la situation en Afghanistan a démontré l’importance d’une maîtrise locale[191].

Ce point de vue demeure d’actualité. En effet, l’un des derniers témoins à comparaître devant le Comité, Matt Waldman, d’Oxfam International, l’a formulé ainsi :

J'aimerais vous parler de la question clé du développement rural. Nous croyons qu'il s'agit de l'aspect prioritaire en Afghanistan aujourd'hui. Il est clair que la situation dans les collectivités rurales est encore très difficile comparativement à celle des régions urbaines, qui ont vu certains progrès. Dans une collectivité de 260 familles où je suis allé récemment, 45 enfants sont décédés au cours de l'hiver, de causes évitables; 12 femmes sont décédées pendant la grossesse ou à l'accouchement. […] Il faut que davantage de ressources soient affectées aux collectivités, lesquelles peuvent ensuite mener le processus de développement, et nous pouvons bâtir la société civile à l'échelle locale également[192].

À cet égard, le Comité est d’avis que la possibilité pour les collectivités locales de participer à leur propre développement est de nature à les intéresser de façon plus tangible à leur avenir. Rémi Landry a dit au Comité : « Il faut habiliter les habitants et leur donner la possibilité d'assumer le contrôle, parce que c'est eux qui vont trouver les solutions. Il faut faire régner l'ordre et leur donner les moyens d'être autonomes[193]. » L’honorable Flora MacDonald s’est montrée tout aussi catégorique et confiante dans les capacités du peuple afghan d’assurer son propre avenir : « Pour l’amour du ciel, laissons les Afghans faire ce qu’ils peuvent faire, car ils se débrouillent alors très bien[194]. »

Comme le Comité s’est fait dire, les Afghans seront plus enclins à protéger les projets appartenant à des intérêts locaux et les insurgés auront moins tendance à les cibler, de sorte les conditions de sécurité s’amélioreront. L’ambassadeur de l’Afghanistan a fait remarquer qu’« [a]ucun des projets exécutés de cette manière n'a été détruit, car les locaux, les gens de la collectivité, ont protégé ces projets. Les talibans et les terroristes n'ont pas réussi ou n'ont pas osé aller dans ces collectivités pour y créer des problèmes pour eux-mêmes[195]. Le général à la retraite Lewis MacKenzie a lui aussi abondé dans ce sens : « Sur les 200 projets que nous avons financés et gérés discrètement, après avoir donné l’argent à des entrepreneurs locaux, un seul a été détruit[196]. » Emmanuel Isch, de Vision mondiale Canada, a affirmé au Comité :

Nous voulons nous assurer que le financement provenant des pays donateurs est distribué de façon plus équitable pour qu'il ne soit pas dirigé principalement vers les centres urbains, ce qui crée très peu de retombées au niveau local. Nous voulons nous assurer que les Afghans, où qu'ils soient au pays, regagnent confiance et puissent espérer bénéficier aussi des efforts déployés par la communauté internationale et leur gouvernement. Je ne demande pas que le Canada soutienne des programmes dans toutes les provinces et tous les districts, mais j'espère certainement que […] l'aide bilatérale à l'Afghanistan pourra être répartie de façon plus égale. Et j'insiste sur l'importance d'une approche communautaire et locale[197].

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L’ambassadeur de l’Afghanistan au Canada a de plus dit ceci au Comité :

Nous sommes aujourd'hui en train d'examiner de nouveaux concepts dont, par exemple, la question de savoir comment mieux encore habiliter les Afghans afin qu'ils puissent prendre des décisions au sujet de leurs priorités et besoins sans que quelque expert-conseil d'un pays tiers, travaillant sous contrat pour trois mois, vienne nous dire à nous tous comment dépenser des millions de dollars. Nous avons, au cours des six dernières années, appris beaucoup de leçons sur la façon de distribuer les fonds destinés au développement et à la reconstruction. L'une de ces leçons est qu'il faut aller dans les collectivités, aborder les Afghans, engager les Afghans et engager les collectivités. Il importe « d'afghaniser » le processus, d'écouter les Afghans, d'obtenir leur participation. Ils protégeront votre argent et ils protégeront l'école que vous construirez. Aucun des projets exécutés de cette manière n'a été détruit, car les locaux, les gens de la collectivité, ont protégé ces projets. Les talibans et les terroristes n'ont pas réussi ou n'ont pas osé aller dans ces collectivités pour y créer des problèmes pour eux-mêmes[198].

Recommandation 15

Pour mieux contribuer à la réduction de la pauvreté en Afghanistan, le gouvernement du Canada devrait s’assurer que les engagements pris à l’égard du développement rural du pays, en particulier dans les régions éloignées et les régions plus stables que Kandahar, sont intégrés aux efforts de reconstruction et de développement déployés. Le gouvernement du Canada devrait également continuer d’appuyer la réalisation de projets et d’activités ayant une incidence au niveau national.

Recommandation 16

Le gouvernement du Canada devrait continuer de veiller à ce que ses projets de reconstruction et de développement tiennent compte de l’importance de la prise en charge, par le peuple afghan, de son propre développement.

Équilibre entre les projets à court terme et les projets à long terme

Le Comité croit que les travaux de reconstruction et de développement peuvent progresser de façon soutenue et irréversible uniquement si l’on s’assure de tenir compte des dimensions à court terme et à long terme.

Comme il l’est indiqué dans le rapport Manley, les projets orientés vers le court terme ont des répercussions immédiates sur la vie des hommes, des femmes et des enfants afghans et favorisent la loyauté envers le projet global[199]. Derek Burney a indiqué au Comité :

[…] il s'agit d'une zone de guerre et […] les procédures qu'utilise normalement l'ACDI pour fournir ce genre d'aide au développement ne sont pas directement applicables à cette situation particulière. Alors, ce que nous recommandons, essentiellement, c'est qu'il y ait un changement dans les procédures permettant de répondre plus rapidement à des besoins plus fondamentaux des habitants de Kandahar dont le territoire a été rendu plus sûr par nos activités militaires. C'est ce qui nous préoccupait, la capacité de l'ACDI de réagir rapidement pour fournir de l'aide comme des puits pour l'eau potable, des centres de soins de santé, des besoins très fondamentaux des gens, de manière que toute la stratégie de libération, protection et aide au développement dans une zone de guerre soit appliquée de manière efficiente. Le changement dans les procédures qui ont été mises de l'avant et le changement d'orientation que nous avons recommandé avaient pour but de mieux adapter les activités à l'effort de reconstruction, aux besoins immédiats des habitants de Kandahar, par opposition aux besoins à long terme du gouvernement afghan de développer des capacités et des compétences pour diriger un gouvernement[200].

De plus, les projets qui procurent des résultats immédiats sont de nature à inciter la population canadienne à continuer à voir d’un œil favorable le rôle du Canada dans l’avenir de l’Afghanistan.

Recommandation 17

De concert avec ses partenaires de la communauté internationale, le gouvernement du Canada devrait appuyer davantage la réalisation de projets qui ont des répercussions immédiates sur la vie et les conditions de vie du peuple afghan.

Le Comité croit que, pour être profitables à l’Afghanistan de façon plus globale, les projets à court terme doivent s’accompagner de projets de plus longue haleine ayant une incidence plus profonde et susceptibles d’avoir des effets durables.

Les témoins reconnaissent unanimement la valeur significative des projets à long terme et estiment nécessaire d’en encourager la concrétisation. Robert Jackson a cependant signalé que le Canada et la communauté internationale doivent être prêts à fournir « une contribution globale à long terme. Une très longue période […] pouvant atteindre 30 ans sera nécessaire pour que l’Afghanistan arrive à se débrouiller tout seul[201]. » L’ambassadeur de l’Afghanistan au Canada a indiqué au Comité :

En tant qu'État fragile, nous ne pouvons pas toujours compter sur des solutions miracles ou immédiates qui satisfassent toutes les parties prenantes, qu'elles soient internes ou étrangères. Compte tenu des traditions afghanes, le processus de reconstruction est une mission à long terme, avec de nombreux écueils en cours de route, et cela exigera un sens politique aigu, une solide volonté politique, des sacrifices, des compétences en matière de leadership, de la persévérance et un appui durable pour pouvoir aboutir[202].

En fait, l’ambassadeur Samad a signalé par la suite que la patience devait s’accompagner d’échéances plus réalistes pour la reconstruction et le développement de l’Afghanistan. Voici ce qu’il a dit plus précisément à ce propos :

Essayez d'imaginer une société, qu'elle soit développée, semi-développée ou sous-développée, qui se fait marteler sans répit depuis 25 ans sur les plans politique, militaire et économique. Que se passerait-il? Vous attendez-vous à ce qu'elle récupère en l'espace de cinq ans? Ce n'est pas ce qui arrive. Cela ne s'est jamais vu dans l'histoire du monde. Pourquoi avons-nous de telles attentes dans le cas de l'Afghanistan? La question est de savoir si nous avons la volonté politique de comprendre cela puis de consentir des engagements à long terme, non seulement à l'égard de l'aspect militaire de la mission, mais également sur tous les autres fronts qui existent[203].

Une telle patience et un tel réalisme sont cruciaux  pour soutenir la volonté et l’intérêt de la communauté internationale à l’égard de la reconstruction de l’Afghanistan. En fait, selon Marc André Boivin : « […] une fois partie l'impulsion initiale de lutter contre le terrorisme, l'approche à plus long terme doit également composer avec le fait que l'Afghanistan a de nouveau peu d'importance sur la scène internationale[204]. » Mike Capstick a indiqué : « Ma plus grande crainte serait que la communauté internationale, frustrée par la lenteur des progrès, la confusion politique et la faiblesse des gouvernements en vienne à "blâmer la victime" et abandonne de nouveau l'Afghanistan et les Afghans[205]. »

Le Comité croit que c’est un ensemble de projets à court et à long terme qui profiterait le plus à l’Afghanistan et qui serait le plus utile aux fins de la politique étrangère et des objectifs d’aide du Canada. Comme il l’a déjà indiqué dans son rapport préliminaire, toute stratégie de reconstruction et de développement à court terme uniquement compromet les investissements considérables que nous avons faits jusqu’ici et nos engagements, qui sont énoncés dans le Pacte pour l’Afghanistan de 2006; elle compromet aussi un aspect plus important, soit les perspectives de vie meilleure pour le peuple afghan.

Recommandation 18

Le gouvernement du Canada devrait prendre les mesures nécessaires pour rappeler à la communauté internationale l’importance des projets de longue haleine terme pour assurer le développement de l’Afghanistan à plus long terme et de façon durable. Le gouvernement du Canada devrait aussi encourager la communauté internationale à accorder l’importance nécessaire aux projets de longue haleine, tout en faisant preuve de réalisme et de fermeté relativement aux résultats.

Recommandation 19

Dans ses activités de reconstruction et de développement de l’Afghanistan, le Canada devrait veiller à ce qu’il y ait un équilibre entre les projets à court terme et les projets à long terme.

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Coordination renforcée

Le Comité a entendu des témoignages au sujet de la coordination des activités de reconstruction et de développement du Canada en Afghanistan. Il y a, par exemple, le Conseil de coordination et de surveillance conjoint, présidé par le gouvernement afghan et par les Nations Unies, qui est principalement responsable de la mise en œuvre du Pacte pour l’Afghanistan. Selon Peter MacKay, ministre des Affaires étrangères à l’époque :

Nous allons continuer de garder à l'œil tous les projets de développement, de manière que nos efforts correspondent étroitement à l'intention et à l'objet des résolutions annuelles du Conseil de sécurité de l'ONU, ainsi qu'aux normes établies par la Communauté internationale dans le Pacte de l'Afghanistan[206].

Par contre, le Comité a aussi entendu des témoins critiquer vertement l’inefficacité des mécanismes en place, qui a pour effet, selon eux, de réduire l’impact des efforts de reconstruction et de développement en Afghanistan. Selon Stefan Lehmeir, du Comité de Comité coordonnateur canadien pour la consolidation de la paix :

Au départ, l’ONU devait se contenter de coordonner les efforts humanitaires […]. Malgré les leçons tirées au fil des ans, même le mécanisme de coordination récemment établi pour superviser la mise en œuvre du Pacte pour l’Afghanistan (Conseil de coordination et de surveillance conjoint) s'avère très peu efficace, vu sa structure et ses procédures actuelles[207].

Dans la conférence de presse qu’il a donnée le 9 avril 2008, Kai Eide, nouveau représentant spécial du secrétaire général (RSSG) pour l’Afghanistan et chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), a mis en évidence ces préoccupations :

La priorité la plus importante est la question de la coordination des efforts internationaux. Nous avons vu, je pense, qu’ils sont trop fragmentés pour avoir l’effet escompté sur le terrain. Nous nous penchons alors sur les structures de coopération et de coordination existantes, dont le Conseil de coordination et de surveillance conjoint [208].

Il est fait état précédemment dans le présent rapport de problèmes de coordination plus généraux. Il y est également fait mention d’une solution possible qui consisterait à nommer un envoyé spécial de haut niveau investi de responsabilités différentes de celles du RSSG et chef de la MANUA.

Bon nombre de préoccupations relatives à l’efficacité de l’aide et de la coordination sont soulevées dans la Stratégie nationale de développement de l’Afghanistan publiée par le gouvernement de l’Afghanistan en avril 2008. Les priorités du pays à cet égard consistent à « réduire les risques de double emploi et de piètres harmonisation et coordination[209] ».

Recommandation 20

De concert avec l’envoyé spécial des Nations Unies, le gouvernement du Canada devrait faire le nécessaire pour renforcer la coordination des priorités en matière d’aide parmi les principaux intervenants, dont le gouvernement afghan.

Des témoins ont aussi fait valoir que d’autres aspects du rôle du Canada dans la reconstruction et le développement de l’Afghanistan méritaient plus d’attention. L’une de ces questions controversées a été particulièrement bien décrite par le professeur Robert Jackson, lorsque celui-ci s’est dit préoccupé par le fait que la communauté internationale n’accordait pas plus d’attention au développement et à la reconstruction du gazoduc de l’Afghanistan. La viabilité de ce projet est débattue, mais il reste que sa réalisation améliorerait considérablement l’infrastructure et les services énergétiques de l’Afghanistan. Il a indiqué à cet effet :

[…] nous devrions discuter de choses telles que le gazoduc construit par la Russie. Il traverse l’Afghanistan et permet de produire de l’électricité dans le pays. […] Le Canada devrait alors contribuer à la reconstruction du gazoduc. C’est la Norvège qui dirige les travaux. Elle a des difficultés avec des pays comme le Canada qui prétendent appuyer le projet sans y affecter assez d’argent et de ressources. À mon avis, la construction d’un gazoduc national est essentielle à l’alimentation du pays en électricité. Ce projet est peut-être plus important que d’autres, réalisés à un niveau inférieur[210].

On a parlé au Comité de la prévalence de la pauvreté et du chômage, de même que du manque de possibilités d’emploi pour la population afghane, en particulier pour les jeunes, et de l’incidence de cette situation sur la stabilité du pays. Seema Patel a affirmé : « La pauvreté alimente la colère à l’égard du gouvernement central et pousse de nombreux jeunes, notamment dans le sud, à reprendre les armes pour rallier la rébellion ou s’allier à divers groupes armés leur versant un salaire[211]. » Selon le Canadien d’origine afghane, Mirwais Nahzat, « le Canada devrait encourager une meilleure participation des jeunes Afghans aux processus sociopolitiques, de gouvernance et de développement[212]. »

Recommandation 21

Pour mieux asseoir les fondations de la gouvernance, de la stabilité et de la productivité économique futures de l’Afghanistan, le gouvernement du Canada devrait orienter ses efforts d’aide vers le développement du capital humain, en particulier au moyen de programmes et de projets qui s’adressent aux jeunes, surtout dans les régions rurales. Ces programmes prévoiraient non seulement des projets de création d’emplois, mais aussi des projets d’acquisition de compétences monnayables et de formation dans divers secteurs qui sont ancrés dans la réalité afghane.

Recommandation 22

Le gouvernement du Canada devrait continuer de contribuer au développement du système d’éducation de l’Afghanistan, aux niveaux primaire, secondaire et postsecondaire.

Recommandation 23

L’aide offerte par le Canada devrait viser à réduire la pauvreté en Afghanistan de façon plus tangible, en favorisant entre autres, et ce en consultation avec le gouvernement et le peuple afghans, le développement du secteur privé et de l’économie locale dans les centres urbains et en particulier dans les régions rurales. À cette fin, il faudrait encourager la communauté internationale à faire un meilleur usage des services, des compétences et des approvisionnements afghans au lieu de s’en remettre à des entrepreneurs et à des consultants de l’étranger.

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Barnett Rubin a mentionné qu’on n’accordait pas suffisamment d’attention aux projets d’infrastructure qui soutiennent la remise en valeur de l’agro-industrie en Afghanistan. Selon lui :

J'ai constaté que ce qui manquait réellement dans le secteur agricole, ce sont les changements institutionnels et d'infrastructure qui sont nécessaires en plus des projets au niveau des villages — par exemple, des aménagements hydrauliques à grande échelle et à moyenne échelle, qui sont tout à fait essentiels, et des mesures qui amélioreraient la commercialisation, notamment des routes, davantage d'information et ce genre de choses. Tout cela est en fait extrêmement important pour lutter contre les stupéfiants aussi, car les gens ont besoin de commercialiser les cultures de rechange et de créer de l'emploi et d'autres types d'activités [213].

La Stratégie nationale de développement de l’Afghanistan de 2008 met aussi l’accent sur le rôle du développement agricole et rural pour « garantir le bien-être socio-économique et politique des collectivités rurales, en particulier chez les populations démunies et vulnérables, et favoriser la participation des collectivités rurales à l’économie nationale ». À cet égard, la Stratégie propose une politique et un cadre stratégique pour ce secteur [214].

L’importance du développement agricole et rural est également soulignée dans la Déclaration de la Conférence internationale de soutien à l’Afghanistan, tenue à Paris, le 12 juin 2008, et dans laquelle il est mentionné que l’investissement dans les infrastructures, en particulier dans le secteur de l’agriculture, est essentiel à la sécurité et à la prospérité du peuple afghan[215].

Recommandation 24

En conformité avec son soutien à la réduction de la pauvreté et l’investissement dans les régions rurales de l’Afghanistan, le gouvernement du Canada devrait, dans ses activités d’aide, être attentif et s’attarder davantage au développement agricole, et ce en particulier dans le contexte de la remise en état des infrastructures, dont le réseau d’aqueduc, les systèmes d’irrigation et le réseau de transport.

L’ambassadeur Samad a affirmé que le gouvernement canadien n’avait pas suffisamment mis à contribution la diaspora afghane au Canada dans ses projets de reconstruction et de développement en Afghanistan :

[…] l'une des façons les plus efficaces de bâtir la capacité et de transférer connaissances et compétences à ce pays en reconstruction, et de bâtir un pont entre la nouvelle patrie et l'ancienne, est de rétablir le lien entre les Afghans, qui ont été contraints de quitter leur pays au cours des 20 à 30 dernières années, et leur mère patrie. J'ai maintes fois discuté avec mes collègues au sein du gouvernement canadien, et notamment à l'ACDI, d'envisager des façons de faciliter le retour de certains Afghans qualifiés qui seraient d'accord pour retourner — et y demeurer pendant le temps qu'ils le souhaiteraient — et pour aider. J'estime qu'une telle aide non seulement ferait beaucoup pour assister l'Afghanistan, mais ferait également beaucoup pour assister le Canada et d'autres pays qui comptent une importante communauté afghane[216].          

Dans le même ordre d’idées, Mirwais Nahzat a fait mention des « Afgans du Canada, en grande partie tenus à l’écart […] des activités de développement du Canada[217] ».

Recommandation 25

Conscient que le talent et les connaissances de la diaspora afghane présente au Canada n’ont pas toujours été mis à profit de façon systématique et efficace dans les activités de développement et de reconstruction du Canada en Afghanistan, le gouvernement du Canada devrait mettre en place des mécanismes lui permettant de consulter la collectivité afghane présente au Canada et de l’amener à prendre part aux activités de reconstruction et de développement de l’Afghanistan.

Notes de la partie II


[123]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 3.

[124]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 1.

[125]       Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 11.

[126]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 2. 

[127]       Témoignages, réunion 21 du  FAAE, 8 avril 2008, p. 11.

[128]       Témoignages, réunion 46 du FAAE, 27 mars 2007, p. 2 et 8.

[129]       Témoignages, réunion 4 du FAAE, 27 novembre 2007, p. 9.

[130]       Témoignages, réunion 46 du FAAE, 27 mars 2007, p. 2 et 8; Témoignages, réunion 4 du FAAE, 27 novembre 2007, p. 1.

[131]       Témoignages, réunion 4 du FAAE, 27 novembre 2007, p. 1.

[132]       Témoignages, réunion 4 du FAAE, 27 novembre 2007, p. 15.

[133]       Témoignages, réunion 46 du FAAE, 27 mars 2007. p. 2 et 8; Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 1.

[134]       Le MISFA est un programme de micro-crédit et d'épargne qui permet d'aider plus de 400 000 adultes à se lancer en affaires, à retrouver un gagne-pain, à nourrir leur famille et à élever des enfants en pleine santé. L’honorable Josée Verner, ministre de la Coopération internationale, Témoignages, réunion 46 du FAAE, 27 mars 2007, p. 2 et 8.

[135]       Témoignages, réunion 46 du FAAE, 27 mars 2007, p. 2 et 8.

[136]       Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 1.

[137]       Témoignages, réunion 28 du FAAE, 8 novembre 2006, p. 9.

[138]       Témoignages, réunion 6 du FAAE, 4 décembre 2007, p. 12.

[139]       Témoignages, réunion 4 du FAAE, 27 novembre 2007, p. 3.

[140]       Témoignages, réunion 46 du FAAE, 27 mars 2007, p. 2 et 8; Témoignages, réunion 62 du FAAE, 6 juin 2007, p. 4. 

[141]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 11.

[142]       Témoignages, réunion 14 du FAAE, 14 février 2008, p. 12.

[143]       Témoignages, réunion 5 du FAAE, 29 novembre 2007, p. 3.

[144]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 10.

[145]       Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 8.

[146]       Témoignages, réunion 18 du FAAE, 11 mars 2008, p. 10.

[147]       Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 3.

[148]       Témoignages, réunion 21 du FAAE, 8 avril 2008, p. 9.

[149]       Témoignages, réunion 5 du FAAE, 29 novembre 2007, p. 3.

[150]       Témoignages, réunion 5 du FAAE, 29 novembre 2007, p. 2.

[151]       Témoignages, réunion 18 du FAAE, 11 mars 2008, p. 12.

[152]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 15 et 16.

[153]       Témoignages, réunion 48 du FAAE, 17 avril 2007, p. 4. 

[154]       Témoignages, réunion 5 du FAAE, 29 novembre 2007, p. 9.

[155]       Journaux, no 66, jeudi 13 mars 2008, p. 595.

[156]       Groupe d’experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan, Ottawa, janvier 2008, p. 32.

[157]       Témoignages, réunion 14 du FAAE, 14 février 2008, p. 17.

[158]       Gouvernement du Canada, « L’engagement du Canada en Afghanistan : Tracer la voie vers 2011 », Rapport au Parlement, juin 2008.

[159]       Témoignages, réunion 18 du FAAE, 11 mars 2008, p. 13.

[160]       Gouvernement du Canada, « L’engagement du Canada en Afghanistan : Tracer la voie vers 2011 », Rapport au Parlement, juin 2008.

[161]       Témoignages, réunion 14 du FAAE, 14 février 2008, p. 17.

[162]       Témoignages, réunion 16 du FAAE, 4 mars 2008, p. 6.

[163]       Nipa Banerjee, « Remember Who We’re Supposed to be Helping », Ottawa Citizen, 12 juin 2008. [Traduction]

[164]       « Afghanistan.Needs Development That is Coordinated, Not Co-Opted : CARE, Oxfam and World Vision Respond to Independent Panel Report », communiqué de presse, 22 janvier 2008. [Traduction]

[165]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 4 mars 2008, p. 6.

[166]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 3.

[167]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 8.

[168]       Matt Waldman, Falling Short: Aid Effectiveness in Afghanistan, mars 2008, http://www.acbar.org/ACBAR%20Publications/ACBAR%20Aid%20Effectiveness%20(25%20Mar%2008).pdf.  

[169]       Témoignages, réunion 22 du FAAE, 8 avril 2008, p. 9.

[170]       République islamique d’Afghanistan, Afghanistan National Development Strategy 2008-2013, p. 160. [Traduction]

[171]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 4.

[172]       Témoignages, réunion 51 du FAAE, 26 avril 2007, p. 12.

[173]       Témoignages, réunion 22 du FAAE, 8 avril 2008, p. 9.

[174]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 4.

[175]       Déclaration de la Conférence internationale de soutien à  l’Afghanistan, 12 juin 2008.

[176]       Voir l’annexe II.

[177]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 3.

[178]       Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 2.  

[179]       Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 6.

[180]       Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 7.

[181]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 4.

[182]       Groupe d’experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan, Ottawa, janvier 2008, p. 21.

[183]       Témoignages, réunion 48 du FAAE, 17 avril 2007, p. 10.

[184]       Témoignages, réunion 22, 8 avril 2008, p. 9.

[185]       Journaux, no 66, jeudi 13 mars 2008, p. 595.

[186]       Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 1.

[187]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 3.

[188]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 3.

[189]       Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 3.

[190]       Témoignages, réunion 8 du FAAE, 11 décembre 2007, p. 2.

[191]       Témoignages, réunion 54 du FAAE, 8 mai 2007, p. 3.

[192]       Témoignages, réunion 21 du FAAE, 8 avril 2008, p. 8-9.

[193]       Témoignages, réunion 17 du FAAE, 6 mars 2008, p. 14.

[194]       Témoignages, FAAE réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 10.

[195]       Témoignages, réunion 6 du FAAE, 4 décembre 2007, p. 14.

[196]       Témoignages, réunion 14 du FAAE, 14 février 2008, p. 17.

[197]       Témoignages, réunion 15 du FAAE, 29 novembre 20.

[198]       Témoignages, réunion 6 du FAAE, 4 décembre 2007, p. 14.

[199]       Groupe d’experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan, Ottawa, janvier 2008, p. 32.

[200]       Témoignages, réunion 18 du FAAE, 11 mars 2008, p.2.

[201]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 7.

[202]       Témoignages, réunion 6 du FAAE, 4 décembre 2007, p. 9.

[203]       Témoignages, réunion 6 du FAAE, 4 décembre 2007, p. 12.

[204]       Témoignages, réunion 48 du FAAE, 17 avril 2007, p. 11.

[205]       Témoignages, réunion 16 du FAAE, 4 mars 2008, p. 7.

[206]       Témoignages, réunion 44 du FAAE, 20 mars 2007, p. 4.

[207]       Témoignages, réunion 5 du FAAE, 29 novembre 2007, p. 10.

[208]       Kai Eide, représentant spécial du secrétaire général pour l’Afghanistan, conférence de presse, Mission des Nations Unies en Afghanistan, 9 avril 2008, http://www.unama-afg.org/news/_pc/_english/2008/08april09-print.html.

[209]       République islamique d’Afghanistan, Afghanistan National Development Strategy 2008-2013, p. 159. [Traduction]

[210]       Témoignages, réunion 19 du FAAE, 13 mars 2008, p. 15-16.

[211]       Témoignages, réunion 54 du FAAE, 8 mai 2007, p. 3.

[212]       Témoignages, réunion 5 du FAAE, 29 novembre 2007, p. 6.

[213]       Témoignages, réunion 47 du FAAE, 29 mars 2007, p. 8 et 16.

[214]       République islamique d’Afghanistan, Afghanistan National Development Strategy 2008-2013, p. 87-93. [Traduction].

[215]       Déclaration de la Conférence internationale de soutien à  l’Afghanistan, 12 juin 2008.

[216]       Témoignages, réunion 6 du FAAE, 4 décembre 2007, p. 10.

[217]       Témoignages, réunion 5 du FAAE, 29 novembre 2007, p. 6.

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