Passer au contenu
;

ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain







CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 010 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 30 janvier 2008

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Nous avons quelque chose à régler juste avant...
    Monsieur Regan, vous serez particulièrement intéressé par ma première annonce. J'ai parlé aux membres du Parti libéral et du Parti conservateur de la possibilité d'inviter nos honorés représentants à la réunion de Bali à venir ici. Tout le monde souhaite les voir. Je propose que nous demandions à notre greffier d'envoyer une lettre d'invitation. Je suggère que cela se fasse juste après la dernière réunion prévue — je crois que c'est le 11 — et qu'on leur demande de comparaître à la réunion suivante. Je pense que tout le monde sera d'accord. Nous allons attendre de recevoir des réponses et de voir s'il faut faire quoi que ce soit de plus, mais je pense que cela satisfera certainement aux demandes que j'ai reçues.
    J'ai rencontré nos invités, et je leur souhaite la bienvenue à cette séance d'étude du projet de loi C-377. Nous procéderons dans l'ordre suivant: M. Rutherford, M. Stone, M. Weaver, puis M. Sauchyn. Ils se sont entendus pour faire leur présentation dans cet ordre.
    Je compte traiter de la motion de M. Scarpaleggia à 17 h 15. Nous aurions donc 15 minutes, et ensuite, vous le savez sûrement, nous devrons aller voter quand la sonnerie nous y appellera, à 17 h 30.
    C'est donc ainsi que se déroulera notre réunion.
    Je demanderais à nos invités d'être aussi brefs que possible. J'ai bien une petite boîte grise que la plupart d'entre vous connaissez déjà, alors je saurai combien de temps vous prendrez. Quoi qu'il en soit, je vous demande de vous en tenir à cinq, sept ou huit minutes, environ, pour qu'il nous reste un maximum de temps pour poser nos questions.
    Nous commençons donc avec M. Rutherford.
    Je vous souhaite bon après-midi et je vous remercie d'avoir invité à comparaître la Société canadienne de météorologie et d'océanographie, que je représente aujourd'hui.
    La SCMO est un regroupement national de personnes et d'organisations qui se consacrent à l'avancement des sciences de l'atmosphère et des océans et des disciplines environnementales connexes. Nous sommes la principale organisation non gouvernementale qui représente les intérêts des météorologues, climatologues, océanographes, limnologues, et de tout un éventail de scientifiques du pays. Nous avons plus de 800 membres qui travaillent dans des centres de recherche, universités, entreprises privées et instituts publics. Bon nombre des scientifiques qui assument des fonctions de leadership dans le processus d'examen du GIEC sont membres du SCMO.
    La Fondation canadienne pour les sciences du climat et de l'atmosphère, qui est associée à la SCMO, distribuera 110 millions de dollars d'ici à 2010, sous forme de subventions de recherche, aux chercheurs universitaires dans les domaines des sciences de l'atmosphère et du climat. Le financement de cette fondation vient à échéance en 2010. Il est certain que nous souhaitons qu'il continue.
    Beaucoup d'entre vous le savez déjà, d'après nos interventions antérieures devant ce comité, la SCMO appuie le processus et les conclusions du GIEC. Nous incitons vivement tous les segments de la société canadienne à suivre les recommandations formulées à la lumière des connaissances scientifiques acquises par ce processus.
    Ce projet de loi semble être un pas dans la bonne direction. La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, que le Canada a ratifiée, demande aux pays d'agir pour éviter ce qui est appelé une perturbation anthropogène dangereuse du système climatique, sans vraiment définir de quoi il s'agit. C'est pourquoi une grande part des travaux du GIEC visait à déterminer la part du rôle des humains dans la perturbation du système climatique et ses conséquences sur les climats locaux, ainsi que les répercussions de ces changements sur les écosystèmes locaux, qu'ils soient naturels ou aménagés. Ceci a raffiné notre entendement des conséquences probables d'un changement climatique provoqué par l'homme et nous a aidés à comprendre lesquelles devraient être jugées dangereuses.
    Le GIEC a aussi raffiné les estimations de la probabilité de divers résultats, ce qui nous a permis de mieux comprendre le risque, qui est défini comme la probabilité multipliée par le résultat. Nous pensons que l'analyse des risques devrait être le fondement de toute politique comportant un risque.
    En 2005, le Royaume-Uni a accueilli une conférence internationale à Exeter sur l'évitement des changements climatiques dangereux. Les documents présentés à cette conférence nous ont rapprochés d'une définition des perturbations dangereuses, en termes de qu'est-ce qui est dangereux pour qui et dans quelle mesure. Au bout du compte, nous avons maintenant une longue liste de résultats, tant mondiaux que locaux, découlant de divers degrés de réchauffement, qui démontrent clairement que même les changements climatiques que nous observons déjà peuvent être qualifiés de dangereux pour au moins certaines personnes, quelque part, sur le globe.
    Certains de ces résultats physiques, comme une interruption de la circulation thermohaline dans le Nord de l'Atlantique ou l'effondrement des glaciers de l'Antarctique ou du Groenland, pourraient très bien avoir des seuils ou des points charnières, tandis que d'autres pourraient tout simplement devenir de plus en plus graves avec le temps qui passe. C'est donc que la détermination de ce qui est dangereux dépend vraiment de ce à quoi on s'intéresse, de qui on est et d'où on est.
    La conférence d'Exeter tout autant que le quatrième rapport récent du GIEC a fourni des preuves convaincantes qu'il faudrait éviter une hausse de la température mondiale de plus d'environ 2 degrés Celsius comparativement aux valeurs de l'ère préindustrielle pour éviter ce que nous appelons la perturbation anthropogène dangereuse. La science fournit un moyen de faire le lien entre cette valeur et une fourchette de valeurs de concentration de CO2 ou, l'équivalent, de faire le lien entre une valeur cible de concentration de CO2 et une fourchette de valeurs de changements de la température, avec des probabilités pour les valeurs se situant dans cette fourchette. Enfin, la science fournit un moyen d'établir un lien entre la valeur cible de concentration avec les cibles d'émissions qui doivent être atteintes.
    Au bout du compte, on s'entend raisonnablement bien sur le fait que pour ne pas dépasser cette limite de deux degrés Celsius, selon une probabilité d'au moins 50 p. 100, il ne faudra pas laisser la concentration de gaz à effet de serre dans l'atmosphère dépasser environ 450 parties par million, sauf peut-être pour une période très temporaire — mais il faudrait qu'elle soit temporaire. Pour nous en assurer, il faut réduire les émissions mondiales — et les estimations vont de 40 à 95 p. 100 — comparativement au niveau où elles étaient en 1990. On sait qu'il faudra d'importantes réductions, mais il reste encore pas mal d'incertitude.
(1540)
    Les pays qu'on dit de l'annexe un — c'est-à-dire les pays développés — d'après le GIEC, devraient réduire leurs émissions d'environ 80 p. 100 d'ici à 2050, et même plus encore par la suite.
    Il est aussi clair que plus tôt les émissions seront réduites à court terme, plus il sera facile d'atteindre les cibles. De fait, le prix d'un report, disons, de 10 ou 15 ans sera l'échec, parce qu'on ne pourra tout simplement plus atteindre la cible. L'atteindre ne sera pas facile. Il va falloir instaurer un bon nombre de mesures différentes. Il n'en n'existe pas qu'une seule pour résoudre le problème. Il faudra déployer plusieurs technologies, nouvelles et existantes.
    Il y en aura pour dire que comme la contribution du Canada aux émissions mondiales n'est actuellement que d'environ 2 p. 100, quoi que nous fassions, cela ne fera pas grande différence. Pourquoi devrions-nous nous sentir tellement obligés de résoudre un problème qui est créé, surtout, par les autres? Et pourtant quand on calcule les émissions par habitant, le Canada a le pire rendement du monde, et il s'aggrave avec chaque hausse de dépense énergétique pour extraire le bitume des sables de l'Alberta et le transformer en pétrole brut synthétique.
    Mais ce n'est pas que notre rendement actuel qui est mauvais. En termes de contribution cumulative par habitant au fardeau actuel depuis le début de la révolution industrielle jusqu'à maintenant, le Canada se situe juste derrière les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Allemagne, et est bien en avance sur la Russie, le Japon et la Chine. Alors nous sommes déjà l'un des plus grands contributeurs au problème actuel, et si nous maintenons cette trajectoire, nous serons bientôt les pire pays du monde en termes de contribution cumulative par habitant. Nous ne sommes pas en position de dire que c'est à d'autres de résoudre le problème. Nous devons faire notre part.
    Merci beaucoup.
(1545)
    Merci, monsieur Rutherford.
    Monsieur Stone.
    Je vous remercie de me donner cette occasion de comparaître une fois de plus devant vous et de vous faire part de certaines données scientifiques qui soulignent l'urgence de plus en plus grande de faire face à la menace des changements climatiques. Mes propos s'inspirent largement du quatrième rapport d'évaluation du GIEC qui vient d'être terminé. Les observations seront centrées sur le long terme, mais aussi sur l'avenir immédiat.
    En général, la prise de décisions au sujet du niveau approprié et de la voie à suivre en ce qui concerne les réductions des émissions de gaz à effet de serre est de nature itérative et, comme Ian l'a dit, c'est un processus de gestion des risques. Un objectif explicite à long terme est considéré comme absolument essentiel. Sans un tel objectif, aucun de nous — ni les particuliers, ni les entreprises ni aucun autre niveau de gouvernement — n'aura de direction claire pour formuler les politiques et décider de l'action. Un tel objectif doit être assez rigoureux pour simuler l'ambition nécessaire.
    Il faut aussi fixer des objectifs à court et à moyen terme à partir desquels il sera encore possible d'atteindre le but souhaitable à long terme. Une fois atteint chacun des objectifs à court terme, des décisions pourront être prises sur la suite de la démarche à la lumière des connaissances acquises, dans un climat de moins grande incertitude.
    Maintenant, idéalement, le choix d'un objectif à long terme s'appuie sur de solides données scientifiques et un processus décisionnel politique judicieux. La science peut éclairer le processus, mais au bout du compte, tout dépend ce à quoi nous attachons de la valeur, et le meilleur moyen de déterminer cela est par un processus politique.
    Pour illustrer mes propos, je vous propose d'examiner un tableau du Résumé à l'intention des décideurs qu'a fait le groupe II du GIEC, que je vous ai fait distribuer. Je vous suis reconnaissant de votre indulgence, pour m'avoir permis de le distribuer en anglais seulement. Je m'en excuse; il existe aussi dans la page Web du GIEC, et j'en donnerai les coordonnées au greffier.
    Le tableau résume ce que nous savons de certains des impacts prévus des changements climatiques sur plusieurs secteurs clés — l'eau, les écosystèmes, les aliments, les côtes, la santé — découlant de la hausse des températures dans le monde. Si vous regardez de gauche à droite, les impacts sont ressentis avec la hausse des températures. Si on s'intéresse à la biodiversité, par exemple, on peut voir qu'une hausse de température de plus d'un degré Celsius pourrait entraîner la disparition d'environ 30 p. 100 des espèces.
    Bien des gens qui ont regardé ce genre de diagrammes et d'autres sont parvenus à la conclusion, fondée, je le répète, sur des jugements de valeur, que nous devrions prévenir une hausse de plus de deux degrés Celsius par rapport au niveau de 1990. C'est l'objectif que s'est fixé l'Union européenne, et qui a fait l'objet de longs débats à Bali récemment.
    Pour comprendre ce qu'il faudrait faire pour parvenir à cet objectif, nous devons réexaminer ce qu'on appelle les scénarios de stabilisation qu'a formulés le groupe II du GIEC. On estime que si nous arrivons à stabiliser les concentrations de tous les gaz à effet de serre dans l'atmosphère à l'équivalent de 445 à 490 parties par million de CO2, nous pourrions limiter les augmentations moyennes des températures mondiales entre deux et 2,4 degrés Celsius. C'est supérieur au niveau antérieur à la révolution industrielle.
    Un tel niveau de stabilisation — c'est-à-dire, grosso modo, comme je l'ai dit, 450 parties par million d'équivalent-CO2 — entend des concentrations de dioxyde de carbone de l'ordre de 350 à 400 parties par million, ce qui peut être comparable au niveau actuel de 380 parties par million.
    Alors il est clair que nous ne pourrons pas atteindre cet objectif sans un certain dépassement qu'il faudra ensuite neutraliser. Pour atteindre ce but de deux degrés Celcius, on estime que les émissions mondiales de gaz à effet de serre devront atteindre leur maximum avant 2015, et être d'au moins 50 p. 100 inférieures au niveau actuel d'ici à 2050, soit le milieu du siècle.
    Maintenant, ce sont des chiffres globaux, et la concrétisation de ces scénarios de faibles émissions exige un effort mondial généralisé d'atténuation.
(1550)
    Le quatrième rapport d'évaluation du GIEC renferme, à un chapitre, des estimations de ce que cela signifierait pour les pays industrialisés. Des pays comme le Canada devraient réaliser d'ici à 2020 des réductions de leurs émissions de l'ordre de 20 à 40 p. 100 en dessous des niveaux de 1990, et en 2050, de 60 à 95 p. 100 sous ces niveaux, un élément qu'aborde le projet de loi à l'étude.
    Les émissions dans les pays en développement, d'un autre côté, devraient elles aussi diminuer. Il faudrait que d'ici à 2020, elles tombent sous les niveaux prévus si le statu quo est maintenu, et être nettement inférieures d'ici à 2050. Les scénarios visant ce genre de cibles de réduction des émissions mondiales de gaz à effet de serre nécessiteront, pour être réalisés, de plus grands progrès au titre de l'intensité énergétique et de l'intensité des émissions de carbone, de l'ordre de deux à trois fois les valeurs historiques.
    Permettez-moi d'aller à l'autre extrême du spectre et de parler de ce qu'il faut faire maintenant. C'est très simple, à mon avis, nous n'avons plus beaucoup de temps. Ce que nous allons faire d'ici une dizaine d'années environ sera déterminant dans la lutte contre la menace à long terme des changements climatiques. Par exemple, les effets bloquants des choix technologiques, pour l'infrastructure et la conception de produit qu'ont fait les pays industrialisés dans la période qui a suivi la Deuxième Guerre mondiale, quand l'énergie était bon marché, sont eux-mêmes responsables des augmentations actuelles des émissions de gaz à effet de serre.
    En retardant les décisions, on ne fera que sérieusement limiter nos chances de réaliser de faibles niveaux d'émissions dans le futur, et augmenter les probabilités d'impacts de plus en plus graves des changements climatiques. On a estimé qu'avec chaque décennie de report des mesures d'atténuation, nous aurons de 0,2 à 0,3 degrés de réchauffement sur une période de 100 à 400 ans.
    Nous avons déjà en banque, maintenant, une hausse de 0,6 degrés de réchauffement à cause de nos activités antérieures, alors toute décision de reporter à plus tard les réductions des émissions serait susceptible d'être plus coûteuse et plus risquée.
    Pour terminer, monsieur le président et membres du comité, permettez-moi de citer un extrait traduit librement d'une allocution du président du GIEC, lors des réunions de cette année à Davos, en Suisse:
Les pays qui restent indifférents au consensus de plus en plus répandu dans le monde sur la nécessité d'effectuer des « coupures profondes » dans les émissions de gaz à effet de serre perdront beaucoup de leur pouvoir et de leur influence politique.
    Merci.
    Merci.
    Nous laissons maintenant la parole à M. Weaver.
    Je crois que vous pouvez m'entendre? Bienvenue. J'espère que le temps est meilleur à Victoria que dans la plus grande partie du reste du pays.
    Oui, on vous entend bien.
    C'est très bien, alors.
    Je vous remercie de m'avoir invité à fournir un témoignage. J'aimerais d'abord situer un peu le contexte d'une déclaration qui a été présentée par des scientifiques à Bali lors de la réunion tenue du 3 au 14 décembre 2007. C'est une déclaration des scientifiques sur le climat, lors de la conférence de Bali de 2007. Je vous en lis une traduction libre.
Le rapport de 2007 du GIEC, qui est l'oeuvre de quelque centaines de scientifiques du climat, a conclu sans équivoque que notre climat se réchauffe rapidement, et que nous avons maintenant la certitude au moins à 90 p. 100 que c'est principalement la conséquence des activités humaines. La concentration de dioxyde de carbone dans notre atmosphère dépasse maintenant de loin le niveau naturel des quelque 650 000 dernières années, et elle augmente très rapidement à cause de l'activité humaine. Si cette tendance n'est pas bientôt réprimée, de nombreux millions de personnes pourraient être exposées à des phénomènes météorologiques extrêmes comme les vagues de chaleur, les sécheresses, les inondations et les tempêtes, nos côtes et nos villes seront menacées par la hausse du niveau de la mer, et bien des écosystèmes, des espèces de plantes et d'animaux seront en danger de disparition.
La prochaine ronde de négociations ciblées en vue d'un nouveau traité mondial sur le changement climatique — dans le cadre du processus de la CCNUCC de 1992 — doit commencer en décembre 2007 et s'achever en 2009. L'objectif premier de ce nouveau régime doit être de limiter le réchauffement global à un maximum de 2 degrés de plus que les températures antérieures à l'aire industrielle, une limite qu'ont déjà officiellement adoptée les pays de l'Union européenne et plusieurs autres pays.
D'après les données scientifiques actuelles, il faudra pour cela, d'ici l'année 2050, réduire les émissions de gaz à effet de serre d'au moins 50 p. 100 en dessous des niveaux de 1990. À long terme, les concentrations de gaz à effet de serre doivent être stabilisées à un niveau bien inférieur à 450 parties par million, mesuré en concentration d'équivalent-CO2. Pour ne pas dépasser les 2 degrés de réchauffement, les émissions mondiales devront avoir atteint leur maximum puis amorcé un retrait d'ici 10 à 15 ans, alors il n'y a pas de temps à perdre.
En tant que scientifiques, nous incitons vivement les négociateurs à s'entendre pour faire de ces cibles une exigence minimale en vue de conclure un accord mondial sur le climat qui soit équitable et efficace.
    Dans toutes mes années d'expérience de la climatologie, depuis les années 1980, je n'ai jamais assisté à un tel rassemblement spontané des scientifiques du monde entier. Cette déclaration a été proposée par plusieurs scientifiques de l'Université de New South Wales de l'Australie, et a été signée par 200 à 250 des climatologues les plus reconnus du monde. Il n'est motivé par aucune pression politique, par aucun groupe d'intérêt spécial. Il est motivé par le voeu de la communauté scientifique d'alimenter le processus en oeuvre à Bali — un processus qui semble ne pas tenir compte de ce que la communauté scientifique dit aux leaders du monde, y compris à ceux du Canada.
    Je m'adresse à vous en ma qualité d'auteur principal de la deuxième, la troisième et la quatrième évaluations qu'a faites le GIEC et qui datent de 1995, 2001 et, plus récemment, de 2007. Je suis aussi l'éditeur en chef du Journal of Climate, le principal journal qui publie les résultats des recherches scientifiques les plus récentes sur tous les aspects de la climatologie.
    Quand on parle du projet de loi C-377, la principale question que vous poserez, c'est à savoir si le chiffre juste c'est 80 p. 100, ou 70 p. 100. Je ne donnerais pas de chiffres précis. Ce que je peux dire, c'est que toute stabilisation des émissions de gaz à effet de serre, à n'importe quel niveau que ce soit, exige une réduction à zéro des émissions mondiales. Il n'y a pas d'autre solution. Pour stabiliser le niveau des émissions de gaz à effet de serre dans l'atmosphère à une concentration favorable à l'existence humaine sur la planète, il nous faut atteindre le seuil d'émissions zéro. La raison à cela, c'est que l'unique mécanisme naturel pour la réduction des concentrations de dioxyde de carbone à plus long terme est par la météorisation des rochers, qui prend des centaines de milliers d'années, et la dissolution des carbonates dans les sédiments de l'océan, ce qui prend des dizaines de milliers d'années.
    Les choses comme la biomasse terrestre est en train de se saturer au cours de ce siècle-ci et ne peut plus absorber de dioxyde de carbone. L'océan, en se réchauffant, commence aussi à perdre son efficacité à absorber le dioxyde de carbone.
    Alors pour stabiliser le tout, il faut que les émissions mondiales retombent à zéro. C'est une tache énorme, et qui exigera du leadership. J'espère, en tant que Canadien, que le Canada pourra montrer ce leadership.
(1555)
    Si on veut regarder cela sous un autre angle, on s'est beaucoup concentrés sur les émissions, sur la stabilisation à un certain niveau des émissions de gaz à effet de serre. Peu importe au système climatique que les émissions datent d'aujourd'hui ou d'hier, ce qui importe, ce sont les émissions cumulatives de dioxyde de carbone depuis l'époque préindustrielle. Nous avons émis quelque 458 milliards de tonnes de carbone dans l'atmosphère depuis cette époque, et il se trouve que si on ne veut pas dépasser le seuil de deux degrés de réchauffement, selon une probabilité de 66 p. 100, nous ne pouvons plus émettre que 484 milliards de tonnes, et ceci d'ici à la fin des temps. Nous émettons plus de 10 milliards de tonnes par année, alors vous pouvez voir l'ampleur du défi.
    Je m'arrêterai ici en insistant vivement pour que vous preniez ce projet de loi au sérieux et que vous fassiez en sorte de mettre en oeuvre des politiques au Canada qui seront un exemple de leadership à l'échelle internationale.
    Merci beaucoup, monsieur Weaver.
    Nous laissons la parole à M. Sauchyn. Je sais que vous êtes venu aujourd'hui d'un endroit où il fait très froid.
    En fait, il faisait moins 37 degrés Celsius ce matin quand j'ai appelé un taxi, et moins 52 Celsius avec le refroidissement éolien. J'apprécie la douceur de la température à Ottawa, alors je tiens à vous remercier de m'offrir cette occasion de revenir à Ottawa, dont je profiterai pour assister à d'autres réunions encore.
    Je représente une organisation appelée Collectif des prairies pour la recherche en adaptation, qui a été créée pour informer les décideurs des provinces des Prairies des conséquences du changement climatique.
    Les invités qui m'ont précédé ont fourni de solides arguments scientifiques en faveur de la stabilisation des émissions de gaz à effet de serre. Je vais parler des autres facteurs qui sous-tendent le projet de loi C-377; c'est-à-dire les énoncés, dans le préambule, faisant état de preuves scientifiques des impacts des niveaux accrus de gaz à effet de serre et de menaces qui pèsent sur la bonne tenue de l'économie, la santé publique, les ressources naturelles et l'environnement du Canada.
    Le groupe de travail II du GIEC fournit un grand nombre de faits et de chiffres à l'appui de ces conclusions scientifiques dans son quatrième rapport d'évaluation. Ce rapport du GIEC définit cependant l'ampleur et la gravité du problème mondial. Pour une perspective canadienne, Ressources naturelles Canada a dirigé, ces deux à trois dernières années, une vaste évaluation scientifique nationale des impacts du changement climatique et de l'adaptation. D'ici quelques semaines, le gouvernement du Canada diffusera cet important rapport scientifique qui fait une synthèse et l'interprétation de plus de 3 000 études qu'ont menées plus de 110 auteurs.
    En ma qualité d'auteur principal de ce rapport, et avec la permission du secrétariat de Ressources naturelles Canada, je peux annoncer aujourd'hui que ce document dit clairement que d'importants impacts sont ressentis dans toutes les régions du Canada et que le nombre et l'ampleur de ces impacts ne feront que croître.
    En plus des mesures qu'il faut adopter d'urgence pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et ralentir les changements climatiques, l'évaluation nationale insiste sur l'importance fondamentale de l'adaptation.
    Permettez-moi de vous donner deux exemples de conséquences des changements climatiques dans les provinces des Prairies sur deux ressources naturelles fondamentales du Canada: les arbres et l'eau.
    Avec le réchauffement récent et inévitable, la forêt boréale du Canada subira des changements radicaux en conséquence des perturbations toujours plus fortes et de la tension hydrique. De fait, le réchauffement climatique a déjà commencé à changer la forêt boréale, ce qui se répercute déjà sur les collectivités et les économies qui en sont tributaires.
    Les institutions du Canada ont probablement les moyens suffisants pour gérer une forêt qui a subi un changement modéré; cependant, sans d'importantes coupures des émissions de gaz à effet de serre, d'après les études scientifiques, la forêt boréale méridionale ne sera plus; elle disparaîtra entièrement, de même que les économies qui dépendent d'elle.
    La plus grande préoccupation, cependant, pour les Canadiens de l'Ouest, c'est la menace que fait peser le réchauffement climatique sur l'approvisionnement en eau. À la suite du réchauffement récent, les réserves ont commencé à diminuer en été, car le ruissellement généré par la fonte de la neige se produit plus tôt dans l'année, et les étés deviennent plus longs et plus chauds.
    Je le répète, certains changements sont gérables. De fait, dans certaines régions de l'Ouest, là où il y a encore des sources d'eau fiables, les fermiers ont commencé à tirer profit des étés plus longs et plus chauds. Cependant, l'augmentation des gaz à effet de serre accentuera le réchauffement dans la région et les répercussions sur les ressources hydriques, ce qui présentera très rapidement d'énormes défis pour la sauvegarde des économies et des collectivités de l'Ouest.
    Avec l'augmentation récente et projetée de la population et de l'activité industrielle, particulièrement en Alberta, la demande d'eau dépassera bientôt l'offre des sources traditionnelles d'eau, comme le ruissellement dû à la fonte des neiges des montagnes de l'Est des Rocheuses en Alberta.
    Le point critique est très proche. Le changement climatique est en train de réduire l'écart entre l'offre et la demande d'eau. De fait, dans certains bassins hydrologiques du Sud de l'Alberta, les réserves d'eau sont maintenant entièrement attribuées.
(1600)
    Le plus grand danger naturel, et le plus coûteux, au Canada, c'est la sécheresse dans les Prairies. Sur les cinq catastrophes climatiques de l'histoire du Canada, quatre ont été des sécheresses dans les Prairies. L'autre, c'est la tempête de verglas de 1998. Le scénario le plus menaçant pour la population, particulièrement dans les Prairies, est une sécheresse prolongée, et tandis que le climat se réchauffe, ce scénario devient de plus en plus probable.
    Certains dirigeants du gouvernement et de l'industrie estiment, ou ont déclaré que l'adoption de mesures vigoureuses pour réduire les émissions de gaz à effet de serre aura un effet dévastateur sur les économies. De fait, nous avons entendu le premier ministre Stelmach dire il y a à peine deux jours que la réduction des émissions en Alberta serait la fin de l'exploitation des sables bitumineux. J'aimerais, ne serait-ce qu'une fois, en voir les preuves scientifiques. J'aimerais voir cet argument étayé par des preuves. Elles me semblent manquer.
    De fait, des estimations ont été faites, dans le cadre d'études approfondies, du coût de la réduction des émissions des gaz à effet de serre. Des études crédibles estiment que le coût de la stabilisation des gaz à effet de serre est de l'ordre de un demi à un et demi pour cent du PIB mondial par année. Je peux vous donner le titre de l'une de ces études, A Cost Curve for Greenhouse Gas Reduction, une étude mondiale sur l'importance et les coûts des mesures qu'il faudrait prendre pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, qu'a faite un groupe d'experts-conseils de la Norvège qui comptent parmi leur clientèle 70 p. 100 des compagnies les plus admirées de la revue Fortune.
    Même si une réduction importante des émissions comporteront des coûts économiques, sociaux et peut-être même politiques, les mesures que propose le projet de loi  C-377sont déterminantes pour prévenir des changements climatiques potentiellement dévastateurs. Le rythme du changement climatique et ses conséquences vont presque certainement accélérer au cours des prochaines décennies. Nous avons besoin de toute urgence de leadership fédéral et de politiques pour que le public, les institutions et les collectivités puissent s'adapter aux impacts du changement climatique parce que, déjà, des effets de plus en plus graves sont inévitables dans un avenir immédiat.
    Il faut une stratégie globale relativement au changement climatique pour prévenir les conséquences néfastes qu'il peut avoir et corriger l'influence de l'activité humaine sur le climat du Canada, faire face aux impacts, aux risques et aux possibilités, et apporter les ajustements nécessaires aux politiques publiques, à la gestion des ressources, aux méthodes d'ingénierie et à la conception des infrastructures.
    Il faudra formuler des politiques publiques pour permettre l'adaptation, contrer l'adaptation maladroite et bâtir la capacité d'adaptation. Déjà, les provinces dressent et publient des plans relatifs aux changements climatiques et annoncent des cibles. Hier à Vancouver, à ce que j'ai lu aujourd'hui, les premiers ministres des provinces de l'Ouest ont signé une entente visant l'adoption de mesures collectives pour composer avec les effets des changements climatiques sur l'eau et les forêts du Canada.
    Aussi, certains gouvernements locaux, l'industrie et des collectivités prennent résolument des mesures. Le gouvernement fédéral doit jouer un rôle capital de coordination et d'habilitation. Sans une action et des politiques nationales décisives, on risque que les politiciens fédéraux prennent beaucoup de retard sur les autres. Les responsables des politiques fédérales risquent de manquer à leur devoir à notre égard à tous les niveaux, soit au niveau régional, national et sur la tribune mondiale, et entre-temps, les gouvernements provinciaux agissent.
    C'est au nom de nombreux scientifiques que j'affirme, en guise de conclusion, que le Canada peut et doit prendre dès maintenant des mesures pour contrer les changements climatiques. Je vous remercie.
(1605)
    C'est bien. Merci beaucoup. Nous passons maintenant aux questions.
    Monsieur Regan.
    Merci beaucoup, monsieur le président et je tiens à remercier les témoins d'aujourd'hui pour leur présence, ici et au bout du fil.
    J'aimerais commencer par demander au Dr Sauchyn de parler au comité des experts-conseils de la Norvège qui se sont penchés sur le coût de la stabilisation des émissions mondiales. Je pense que vous avez dit que ce serait entre un demi et un et demi pour cent du PIB mondial? C'est bien cela?
    Oui, le minimum était en fait six dixièmes d'un pour cent du PIB annuel, et le maximum était d'un et demi pour cent du PIB annuel, et l'étude a été effectuée par McKinsey et Company, une grande société d'experts-conseils.
    Si nous voulons en savoir plus là-dessus, peut-être le greffier pourrait-il vous demander les coordonnées de cette étude après la réunion.
    J'aimerais aussi avoir cela.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais ajouter que plusieurs études ont tiré des conclusions similaires.
    Merci.
    Est-ce que vous pourriez nous décrire le genre de changement qu'il faudrait faire au Canada? Il est évident que je ne m'attends pas à ce que vous me donniez tout en détail, parce qu'il y a des choses que nous ne savons pas et des solutions technologiques qui n'ont pas encore été trouvées, qu'on pourrait espérer pouvoir appliquer pour résoudre certains de ces problèmes, mais si vous voulez bien, et je vous demande ceci à tous, pour pouvoir agir assez rapidement — nous avons entendu parler, par exemple, de la nécessité de stabiliser les émissions d'ici à 2015 — à quoi ressemble le Canada où nous aurons pris toutes les mesures nécessaires pour atteindre cet objectif? Et je ne parlerai pas de ce à quoi devra ressembler le monde, tous les pays, parce que c'est une autre question. Pour l'instant, concentrons-nous sur nos propres responsabilités, ici. Quel genre de Canada cela entend--il?
(1610)
    Peut-être pourrais-je essayer de donner une première réponse.
    Tout d'abord, je voudrais vous parler d'une étude récente qu'a faite la Table ronde sur l'environnement et l'économie, il y a peut-être un an. Ils se sont penchés sur cette question, et d'après ce que j'ai lu, c'est encore un aussi merveilleux pays, qui offre autant de possibilités que maintenant, mais des possibilités différentes, et avec des modes de vie intéressants, mais des modes de vie différents. Il y aura des changements. Il faudra des changements dans les voitures que nous conduisons, dans nos méthodes de construction de nos villes et dans nos façons de voyager. Il y aura des différences pour nos industries et dans la manière dont elles sont dirigées, et il y aura des différences dans les carburants que nous utiliserons. Tout cela est tout à fait possible sans une réduction du niveau de vie, comme le disait le professeur Sauchyn, et selon certaines estimations, nous pouvons y arriver avec d'assez minces réductions annuelles du PIB, plus minces que la marge d'erreur d'arrondi normale de toute estimation des augmentations annuelles du PIB.
    Peut-être d'autres souhaitent-ils répondre et le cas échéant... je vous en laisse maintenant la possibilité.
    Certains de ceux qui, dans le passé, se sont opposés à l'adoption de mesures radicales ont soutenu que les températures allaient augmenter, quoi que nous fassions, et nous ne sommes même pas sûrs de ce qui cause cette hausse. Comment répondez-vous à ce type d'arguments qui me semblent tout à fait spécieux? J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Je répondrai avec plaisir, si vous voulez.
    Allez-y.
    Ces arguments sont tout simplement incompatibles avec notre entendement scientifique de la situation. Les gens peuvent dire ce qu'ils veulent, malheureusement les faits scientifiques disent autre chose. La science est très claire. Il n'y a aucun doute, au sein de la communauté scientifique, sur ce qui a causé le réchauffement; il n'y a aucun débat, dans le milieu scientifique, sur l'ampleur des réductions qu'il faut faire pour stabiliser les températures, et c'est qu'il faut parvenir à zéro émission pour stabiliser la situation, parce que les effets prendront tellement de temps à s'estomper.
    Ces gens peuvent avoir des intérêts spéciaux, et c'est peut-être ce qui motive les arguments qu'ils présentent. Certains répliqueront que les scientifiques ont des intérêts spéciaux, mais je vous mets au défi de me dire ce que seraient les intérêts spéciaux des scientifiques, et ce ne sont pas les subventions de recherche, parce que très franchement, nous n'en sommes pas à demander des hausses de subvention pour la recherche parce que nous ne comprenons pas le problème. Nous disons que nous connaissons la teneur du problème.
    Est-ce que quelqu'un d'autre aurait des commentaires là-dessus?
    Allez-y, monsieur Regan.
    Puisqu'il n'y en a pas, je passe à la question suivante.
    Il semble qu'en allant à la conférence de Bali, le ministre de l'Environnement du Canada, M. Baird, partait du principe que les pays en développement ne font pas assez dans ce dossier, et que nous n'allons rien faire tant qu'ils ne se seront pas mis au pas. Je ne fais que dire l'impression que j'en ai eue. Peut-être d'autres ont-ils vu cela autrement, et c'est tout à fait légitime, c'est la démocratie.
    Comment à votre avis devrions-nous composer avec les pays en développement? Que devrait être notre position, alors que nous essayons de faire progresser cette cause, et de prendre des mesures tout en essayant de pousser à agir des pays comme la Chine et l'Inde, dont l'économie est en plein essor, et qui utilisent le charbon, le feu, l'électricité, etc.?
    Professeur Rutherford.
    Il me semble que c'est un peu comme de dire j'ai ma part du gâteau et vous n'aurez pas droit à la vôtre.
    J'ai déjà proposé de regarder cette question sous l'angle de la contribution au problème par habitant. Vu sous cet angle, il est clair que les pays développés sont les méchants, et les pays sous-développés, qui reconnaissent très clairement que les pays développés sont les méchants, disent « Vous avez fait tout cela, nous voulons en faire autant. Nous allons le faire de façon plus intelligente que vous, mais il est évident que les émissions vont augmenter, parce que c'est encore une phase énergivore du développement économique ».
    Il nous faut trouver un moyen de laisser de côté le postulat voulant qu'il est nécessaire consommer des quantités phénoménales d'énergie pour accomplir quoi que ce soit. Même dans le rapport de la Table ronde sur l'environnement et l'économie, il est clair qu'il y a bien des moyens de réduire à la fois notre consommation d'énergie et les émissions que nous produisons pour créer cette énergie.
    Il n'y a pas de mystère dans tout cela. Il existe des technologies bien connues, et il y en a d'autres que nous n'avons pas encore imaginées, qui nous aideront à atteindre notre but. Mais il nous faut soit décider de nous rendre là, soit adopter des mesures qui nous forceront à nous y rendre, comme celles que recommande la Table ronde nationale — des choses comme la taxe sur le carbone, qui feront simplement que la production de combustibles fossiles énergivores sera bien trop coûteuse. Les gens vont naturellement trouver des méthodes plus économiques, et ainsi, les émissions attribuables à la consommation de combustibles fossiles diminuera.
    Je pense qu'une façon équitable de regarder la situation, c'est de se dire que chaque habitant de la planète doit être traité équitablement. Je ne pense pas qu'il soit juste qu'un citoyen du Canada, de l'Europe ou des États-Unis jouisse d'un mode de vie énergivore qui émet des tonnes et des tonnes de carbone par année, tandis qu'un habitant de l'Afrique n'y est pas autorisé — ou de la Chine, de l'Inde, du Brésil ou de tout autre pays en développement. Pour être équitables, il faudrait que nous essayons tous d'atteindre un faible niveau relativement uniforme d'émission de carbone par unité de bonheur, ou de PIB, ou de quoi que soit d'autre.
(1615)
    Monsieur Stone, je pense que vous vouliez intervenir?
    Merci.
    J'aimerais aborder la question sous un angle légèrement différent. Il y a, comme le disait Ian, ce qu'on pourrait considérer comme des questions morales, le fait qu'une forte proportion de la hausse de température, de nos jours, est attribuable à nos émissions du passé, et que nos émissions par habitant sont simplement plus élevées que celles de presque n'importe où ailleurs.
    Pour répondre à la question de pourquoi nous devrions le faire, c'est que nous le pouvons. Je pense que nous avons de merveilleuses occasions au Canada de nous attaquer à cet irritant, d'essayer d'apporter notre contribution à la réduction des émissions, et de créer le genre d'économie et d'industrie qui nous permettront de voir le futur.
    Ce qui m'inquiète, c'est que si je regarde, par exemple, le Danemark, ce sont maintenant les leaders mondiaux de l'énergie éolienne. Leur gouvernement les a amenés jusque là, et ils ont maintenant un avantage concurrentiel. De même, l'Allemagne est maintenant le leader mondial de l'énergie solaire. Le Royaume-Uni est en train de devenir le leader mondial des instruments financiers. Ce qui m'inquiète, c'est que si nous n'agissons pas rapidement, nous allons être laissés derrière. Nous nous retrouverons du mauvais côté de l'histoire, et ce n'est pas notre place.
    Il vous reste une trentaine de secondes, monsieur Regan.
    Ce n'est pas beaucoup, c'est dommage.
    J'aimerais vous interroger sur une situation dont nous avons entendu parler. Un professeur de l'Université Dalhousie, Anna Metaxa, a dirigé une étude sur le corail des Caraïbes, et qui a conclu qu'en 2005, l'année la plus chaude jamais enregistrée, la moitié du corail des Caraïbes est mort. Je ne sais pas si c'est entièrement attribuable à la chaleur, mais c'est certainement la conclusion qu'on a tendance à en tirer.
    Devant tout cela, pensez-vous que les exemples d'impacts dont fait état le rapport du GIEC sont alarmistes, réalistes, ou en fait, trop prudentes? Quand on entend quelque chose de ce genre, elles semblent trop prudentes.
    J'aimerais répondre à cette question. Je connais Anna fort bien, en fait, puisque nous avons fait nos études de troisième cycle ensemble, durant les années 1980.
    Si l'on examine les évaluations des effets subis par les coraux, il y en a deux. L'un est leur blanchissement dû à l'élévation de la température et l'autre, leur incapacité de croître à cause du taux d'acidité de l'océan.
    La quantité de dioxyde de carbone que nous libérons dans l'atmosphère est telle que les taux d'acidité de l'océan vers le milieu du prochain siècle atteindront des niveaux sans précédent en 300 millions d'années d'existence de la planète. Voilà qui sonne le glas de tous les récifs coralliens de la Terre — et nous n'y pouvons pas grand-chose, à moins d'agir dès maintenant.
    Je soupçonne que, lorsqu'on entend des déclarations comme celle qui vient tout juste d'être faite, elles ne sont pas alarmistes. Ce sont des déclarations très réalistes, et vous n'avez encore rien vu.
    Arrêtons-nous au récif corallien. Il s'agit d'un écosystème voué à l'extinction, et je ne crois pas qu'il y ait grand-chose qu'on puisse faire en raison du réchauffement de la planète et de l'acidification des eaux attribuables à des émissions qui ont déjà été libérées.
    Monsieur Sauchyn.
    Je ne peux pas me prononcer sur cet impact particulier, bien que ma fille travaille pour cette professeure, de sorte que je pourrais lui poser la question.
    J'aimerais revenir à la question que vous avez posée, à savoir s'il y a des énoncés alarmistes dans le rapport du GIEC. Je crois qu'au moins trois membres du groupe d'aujourd'hui ont contribué à cette quatrième évaluation, et il faut savoir qu'elle représente le travail de presque 4 000 scientifiques qui ont dû s'entendre en eux. De plus, les bureaucrates de plus de 130 pays ont dû approuver le rapport. Chaque fois que 4 000 personnes s'entendent sur quelque chose, il faut que ce soit le résultat d'un compromis. La principale critique que j'ai entendue au sujet du rapport est que les énoncés ne sont pas suffisamment alarmistes.
(1620)
    Je vous remercie beaucoup.
    Je rappelle à tous les membres du comité qu'il s'agit d'un groupe de scientifiques et que j'aimerais qu'ils s'en tiennent à ce domaine. Nous accueillerons des économistes plus tard, de sorte que si nous pouvons nous en tenir aux questions scientifiques, c'est selon moi la meilleure façon de profiter de la présence de nos quatre témoins.
    Monsieur Bigras, vous avez la parole.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci d'être venus au comité nous présenter un constat réaliste et non pas alarmiste, comme l'a dit M. Weaver.
    Si nous devons avoir un regret par rapport à la conférence de Bali, c'est probablement de ne pas avoir pu inscrire sur la feuille de route la limite d'augmentation de deux degrés. À partir du moment où cette limite de deux degrés figure en bas de page, il est difficile d'établir un consensus national et international pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
    Au cours de votre présentation, monsieur Sauchyn, vous nous avez dit que le projet de loi C-377 était déterminant pour empêcher que les changements climatiques n'atteignent un niveau qui pourrait s'avérer dévastateur. M. Stone nous a parlé de l'importance de réduire, d'ici 2020, les émissions de gaz à effet de serre dans une fourchette entre 20 et 40 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990. C'est ce que certains pays ont proposé à Bali. Toutefois, la fourchette se situe entre 20 et 40 p. 100, et le projet de loi parle d'une réduction de 25 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre.
     Au fond, l'objectif de réduction de 25 p. 100 des émissions d'ici 2020, par rapport à 1990, n'est pas un objectif conservateur. Certains États, notamment l'Allemagne, dont vous avez parlé, proposent une réduction de 40 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre; l'Europe propose une réduction de 30 p. 100, si les pays industrialisés se joignent à cet effort.
    L'objectif de 25 p. 100 nous permet-il d'éviter ce que M. Sauchyn qualifie de situation potentiellement dévastatrice? Ne devrions-nous pas modifier le projet de loi et prévoir des objectifs plus ambitieux?

[Traduction]

    Qui souhaite répondre?
    Monsieur Stone.

[Français]

    Monsieur Bigras, permettez-moi de répondre en anglais.

[Traduction]

    Je tentais, dans ma déclaration préliminaire, d'affirmer, entre autres, que, quels que soient les niveaux auxquels on choisit de stabiliser les GES, les moyens choisis et la contribution fixée, on se base pour le faire non seulement sur les connaissances scientifiques, mais aussi sur un processus politique. Il y a des décisions politiques à prendre, politiques parce qu'elles dépendent de valeurs, ce à quoi vous accordez une valeur et, parmi ces valeurs, ce que vous ne souhaitez pas voir disparaître à cause des changements climatiques.
    Lorsqu'il est question d'ambition, nos valeurs sont aussi en jeu. Quel niveau d'ambition le Canada souhaite-t-il afficher sur la scène internationale? C'est le résultat du prestige qui nous est accordé sur la place internationale, mais également, comme je l'ai dit tout à l'heure, de ce que nous souhaitons réaliser en tant qu'économie. Donc, bien qu'on puisse, sur la base d'arguments scientifiques, affirmer, comme je crois que les quatre d'entre nous l'ont dit, qu'il est nécessaire de réduire d'au moins la moitié, à l'échelle mondiale, les émissions d'ici 2050, il faut se demander quelle partie de cette moitié le Canada va contribuer. Or, cette décision ne dépend pas uniquement des connaissances scientifiques, mais également, en partie, de la volonté politique.
    Pour ma part, je crois qu'il faut fixer un niveau qui libérera les forces innovatrices des Canadiens et qui représentera un véritable défi. Il faut être ambitieux. Donc, dans ce débat, on pourrait affirmer que plus l'ambition est forte, mieux ce sera.
(1625)
    Monsieur Lussier.

[Français]

    Monsieur Stone, vous avez mentionné une fourchette, en 2050, de 60 à 95 p. 100. Selon moi, l'objectif de 95 p. 100 signifie l'abandon de tous les usages du pétrole. Est-ce exact?

[Traduction]

    Les données que j'ai mentionnées sont tirées du rapport du groupe de travail III du GIEC. Je n'en faisais pas partie, de sorte que je ne connais pas très bien tous les arguments.
    En bout de ligne, le GIEC a choisi de fixer une fourchette. Cela s'explique du fait que les modèles posent toute une série d'hypothèses sur ce que pourrait faire chaque pays. C'est pourquoi la fourchette pour les niveaux les plus élevés varie entre 40 et 95 p. 100 environ.
    Vous avez raison de dire que, si c'est ce que nous voulons faire — je crois que M. Weaver a mentionné quelque chose du même genre —, nous aurons certes besoin de décarboniser notre économie. Il faudra réduire la teneur en carbone des combustibles que nous utilisons, ce qui signifie d'en réduire la consommation et d'avoir moins recours au charbon, au pétrole et au gaz, et de faire appel à de plus en plus de sources d'énergie renouvelable comme les biocombustibles, l'énergie solaire, l'énergie éolienne, l'énergie marémotrice et ainsi de suite, sans oublier les économies d'énergie.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Puis-je ajouter quelque chose?
    Oui, monsieur Weaver, faites, je vous prie.
    J'aimerais préciser que la fourchette varie entre 40 et 95 p. 100 des émissions. Cela ne signifie pas que vous ne pouvez pas utiliser du pétrole, mais plutôt que si vous brûlez du pétrole, les émissions doivent être captées et séquestrées ou stockées. Il existe une différence très importante entre les deux: soit qu'on n'utilise pas du tout de combustible fossile, soit qu'on ne dégage pas d'émissions provenant de combustibles fossiles. C'est cette dernière éventualité qui nous intéresse.

[Français]

    Monsieur Sauchyn, comme vous représentez principalement des organismes de l'Ouest canadien, je suis particulièrement intéressé par la question de l'eau. Dans votre analyse, vous avez mentionné l'eau de surface, mais je pense qu'en Alberta, il y a un autre danger: le forage d'un million de puits pour recueillir le méthane, ce qui va endommager les nappes d'eau souterraines qui viennent alimenter des rivières et des lacs dans l'Ouest canadien.
    Avez-vous considéré dans vos analyses et dans les 3 000 études la problématique des eaux souterraines de l'Ouest?

[Traduction]

    Je peux vous parler des eaux souterraines dans la mesure où elles sont touchées par les changements climatiques. Je ne peux pas, par contre, vous parler avec autorité du problème posé par le méthane parce qu'il ne s'agit pas en réalité d'un problème posé par les changements climatiques. Je suppose que vous parlez du méthane emprisonné dans les couches de charbon et de la contamination des eaux souterraines.
    Les eaux souterraines sont une solution en matière d'approvisionnement en eau, parce qu'actuellement, une proportion relativement faible de l'alimentation en eau dans les Prairies canadiennes vient des eaux souterraines. À mesure que s'épuisent les approvisionnements en eaux de surface, les eaux souterraines représentent une possibilité de rechange. Toutefois, ce que nous savons de la disponibilité des eaux souterraines et de leur qualité est très limité.
    Il est également possible de stocker l'eau dans le sol. Les scénarios de changements climatiques révèlent que nous pouvons nous attendre, dans les Prairies canadiennes, à des sécheresses d'une grande gravité et très longues, mais que nous pouvons aussi prévoir des années de précipitations inhabituelles à mesure que le climat devient plus changeant. À mesure que s'accroît la gamme de conditions climatiques extrêmes, nous recevrons certaines années des quantités de précipitations inhabituelles, y compris durant l'hiver. Il est possible de stocker cet excédent d'eau dans le sol et d'y puiser durant les années plus sèches.
(1630)

[Français]

    Monsieur Sauchyn, étant donné que vous connaissez bien les secrétariats des ressources naturelles, pourriez-vous nous dire si les représentants de Ressources naturelles Canada parlent avec ceux d'Environnement Canada?

[Traduction]

    Désolé, c'est là une question politique que je ne suis pas disposé à aborder, mais je peux vous dire que nous travaillons avec les deux organismes fédéraux.
    Monsieur Rutherford, souhaitez-vous vous aventurer en pareil terrain?
    Non, pas du tout.

[Français]

    Les deux ministères se parlent, c'est évident, mais pas tout le temps et pas suffisamment, selon mon expérience.

[Traduction]

    Monsieur Lussier, je vous remercie. Avec un peu de chance, vous pourrez poser la question à un autre groupe de témoins.
    Monsieur Dewar, si vous voulez bien.
    Merci, monsieur le président, et je remercie également nos invités.
    Avant de passer à mes questions, je tenais simplement à féliciter un membre du groupe, et je ne suis pas sûr des autres, qui a participé au processus du GIEC. Il faut leur lever notre chapeau pour le prix qui leur a été décerné, le prix Nobel, et je tiens à les en féliciter personnellement et au nom de tous les Canadiens, car je crois que nous ne l'avons pas suffisamment dit. Ce travail est le fruit d'une collaboration de chercheurs du monde entier, mais bon nombre d'entre eux étaient canadiens.
    Monsieur Stone, je sais que vous en faisiez partie. J'ignore si les autres membres du groupe en étaient également.
    Monsieur Rutherford, vous semblez dire oui.
    Je n'en faisais pas partie, mais M. Weaver, oui.
    Oh! M. Weaver.
    Monsieur Weaver et monsieur Stone, mes félicitations! Je crois parler au nom de toutes les personnes ici présentes et certes des Canadiens si je dis à quel point nous sommes fiers et l'étions quand on vous a remis le prix.
    J'aimerais d'abord vous interroger au sujet des connaissances scientifiques et des prévisions relatives aux changements climatiques, parce que ce que nous essayons vraiment de faire au moyen du projet de loi à l'étude et ce que propose notre parti, c'est de fixer des objectifs. Comme vous l'avez mentionné, monsieur Stone, nous devons nous doter d'objectifs à long terme, mais il faut également savoir ce que nous allons faire à court terme, si je peux l'exprimer ainsi. Il faut planifier à long terme pour pouvoir prendre des mesures à court terme. C'est ce que certains d'entre nous font, quand ils sont au meilleur de leur forme.
    Donc, j'aimerais commencer par parler des prévisions de changements climatiques. Si l'on se fie à la différence d'atmosphère entre l'hémisphère Nord et l'hémisphère Sud, une grande partie du débat actuel a dérapé. On affirme maintenant, comme il a déjà été mentionné, que les populations du Nord ne sont responsables que de 2 p. 100 des émissions et que, bien que notre production d'émissions par habitant soit peu reluisante, nous habitons dans un climat nordique. J'aimerais simplement, sur le plan scientifique, savoir ce qui est prévu comme changements climatiques. À quelle latitude prévoit-on les plus grands changements, si vous préférez? Les changements vont-ils survenir surtout aux latitudes Nord ou aux latitudes Sud?
    Monsieur Stone, je vais peut-être vous poser la question en premier et, si les autres souhaitent intervenir, qu'ils le fassent, parce que je crois que cela va nous donner une idée du phénomène global. Donc, quelle partie du monde va être le plus affectée et quels changements peut-on prévoir dans le Nord par rapport au Sud?
    Je vous remercie beaucoup.
    Le GIEC, dans sa quatrième évaluation, a effectivement fait certaines affirmations au sujet des régions les plus vulnérables de la planète. Vous les trouverez — et j'en laisserai les coordonnées au greffier — dans le rapport de synthèse, soit le quatrième volume du quatrième rapport. Il y en a quatre ou cinq, mais je ne suis pas sûr de toutes me les rappeler. Toutefois, parmi elles, il était clairement question de l'Arctique. L'Arctique est vulnérable parce que les changements climatiques y surviennent à un rythme accéléré; la température augmente là-bas au moins deux fois plus vite que partout ailleurs sur la planète. La capacité des populations arctiques de s'adapter est faible parce qu'elles n'ont pas les ressources dont nous disposons dans les régions plus au sud et à l'ouest de la planète.
    D'autres régions vulnérables incluent les grands centres urbains, particulièrement ceux qui se trouvent dans les mégadeltas, comme au bord du Brahmapoutre en Asie et ainsi de suite.
    Je ne vous rendrais probablement pas service en essayant de toutes me les rappeler. Cependant, il est sûr que, dans la mesure où le Canada est concerné, c'est la région arctique qui est peut-être la plus vulnérable.
(1635)
    Je vous remercie.
    J'ignore si M. Weaver ou d'autres membres du groupe souhaitent contribuer au débat.
    La raison pour laquelle je pose la question, c'est que, souvent, on en discute en fonction de l'augmentation de deux degrés Celsius, au sujet de laquelle nous répondons alors que nous devons par tous les moyens essayer de respecter cette cible. Mais il est à mon avis utile de savoir ce que cela signifie concrètement pour les différents peuples des différentes régions...
    Je pourrais répondre à cette question.
    Faites, je vous en prie.
    M. Stone a parlé des températures et de la façon dont les températures amplifient le réchauffement aux latitudes élevées de l'Arctique. Un autre élément clé est, bien sûr, l'eau. On connaît plutôt bien ce qui se produira en termes de changements prévus dans le niveau des précipitations.
    Au Canada, cela signifie en réalité une plus grande probabilité globale de précipitations, mais également, en parallèle, une probabilité plus forte de sécheresse. Donc, la pluie tombe en quantités probablement de plus en plus importantes, durant l'hiver, et il y a une probabilité accrue de sécheresse.
    Parallèlement, nous savons que nos voisins américains, dans le Sud des États-Unis, vont recevoir moins de pluie globalement et probablement connaître plus de sécheresses.
    Voilà qui nous met dans une situation fâcheuse en termes de disponibilité d'eau en Amérique du Nord, le Canada en obtenant plus tout au long de l'année et les régions subtropicales, y compris le Sud des États-Unis, moins. Actuellement, c'est un réel problème, bien sûr, parce qu'ils sont en train d'épuiser la nappe aquifère de la région des grandes plaines à un rythme 40 fois plus élevé que son taux de renouvellement.
    Par conséquent, il y aura durant ce siècle-ci, en Amérique du Nord, des crises de l'eau.
    Merci.
    Oui, monsieur, allez-y.
    La vulnérabilité aux changements climatiques est fonction d'à quel point une région y est exposée, et une grande partie du Canada se réchauffe plus rapidement que le reste du monde. Toutefois, la vulnérabilité est également fonction de votre capacité à y réagir. La capacité d'atténuer et de s'adapter exige des ressources humaines, de la technologie, des institutions stables et des ressources financières. Il existe peu d'endroits au monde qui ont plus que ce qu'a le Canada, de sorte que nous sommes certes moins vulnérables simplement en termes de notre capacité d'agir — mais encore, nous avons besoin de leaders en vue de mobiliser cette capacité.
    À cet égard, quand on examine notre capacité de mobiliser la capacité, en fonction de ce que sont nos points repères... et vous avez parlé de la quantité de carbone que nous tentons d'éliminer, je suppose, et assurément de réduire, et de combien nous en libérons dans l'atmosphère.
    Quelques exemples des mesures prises en Europe ont été cités. De fait, j'ai assisté en compagnie de M. Mills à une conférence sur l'énergie tenue en février, l'an dernier, à Washington. Il me semble que quand on examine ce que font tous les pays du monde, le Canada dispose de certains avantages comparatifs sur le plan technologique.
    D'après votre expérience et selon ce que vous avez observé en termes de technologie établie mise au rancart que nous pourrions non seulement utiliser ici, mais également, me semble-t-il, exporter, quelle technologie s'est avérée réussie pour freiner la quantité de carbone dégagé dans l'atmosphère? Par ailleurs, lesquelles sont les plus prometteuses en termes de potentiel, c'est-à-dire qu'elles ne sont pas tout à fait au point mais semblent offrir beaucoup de potentiel si nous y investissons davantage?  
    Monsieur Stone.
    Avec votre permission, j'aimerais répondre à cette question, mais auparavant, j'aimerais répondre à la question précédente. Je tiens tout simplement à souligner un point.
    La façon dont les changements climatiques affectent les autres régions du monde nous touche. Les changements climatiques exacerberont les différences entre les pays riches et les pays pauvres, entre les pays en développement et les pays industrialisés. J'estime que le Canada a un intérêt direct à faire en sorte que les plus faibles, les plus vulnérables, sont protégés le plus possible.
    J'ai le privilège de travailler parfois avec des membres du Centre de recherches pour le développement international à un projet visant à rehausser la capacité d'adaptation en Afrique. Je crois qu'il est dans l'intérêt du Canada de le faire.
    Pour ce qui est maintenant de votre question sur les technologies, je ne les connais pas à fond, et je suppose que vous parliez essentiellement de technologies canadiennes. Toutefois, permettez-moi de mentionner simplement qu'une d'entre elles concerne l'utilisation faite de la biosphère, de ce que vous qualifieriez de biocombustibles.
    Je ne pense pas forcément aux biocombustibles liquides, qui ont reçu beaucoup d'attention de la part des médias, mais simplement aux déchets solides de l'agriculture et de la foresterie dont nous pouvons nous servir pour chauffer les maisons et pour produire de l'électricité. Cette technologie est très prometteuse. Une partie de la recherche s'est faite sous la direction d'un organisme appelé BIOCAP Canada, dont les fonds n'ont malheureusement pas été renouvelés.
    Je pourrais également mentionner, je suppose, la technologie de la construction. Nous avons une capacité immense de construire des bureaux et des maisons économes sur le plan de l'énergie et tout le reste. Je crois que c'est un autre domaine dans lequel nous pouvons exporter.
    Je suis sûr que j'en ai oublié un grand nombre. Il faudra m'excuser, car ce n'est pas vraiment mon domaine de compétence.
(1640)
    Monsieur Rutherford.
    Ce n'est pas non plus mon domaine de compétence, mais il y a un domaine dans lequel le Canada a fait preuve d'un certain leadership, soit la séquestration de carbone dans le sol de la Saskatchewan afin de faciliter l'extraction du pétrole. Je suis conscient qu'il existe également des expériences menées dans d'autres domaines, par exemple les couches de charbon et tout le reste. C'est un domaine où nous pourrions peut-être profiter d'une certaine expertise locale pour nous imposer dans le monde.
    Il existe deux autres domaines qui me frappent toujours. L'un est le fait que notre utilisation de l'énergie est lamentablement inefficace. Nous disposons de technologies pour construire des maisons et des bâtiments mieux isolés, et on commence à en bâtir, mais cela devrait se faire à un rythme beaucoup plus rapide, et nous devrions être des leaders mondiaux dans ce domaine. Nous habitons dans un pays nordique où nous avons vraiment besoin de ce genre de technologie. Pourquoi ne sommes-nous pas des leaders mondiaux sur ce plan? Nous devrions l'être.
    Ensuite, le Canada est passé maître dans le transport d'énergie sur de longues distances. Nul ne veut voir d'éolienne dans sa cour. La présence de ces éoliennes déplaît. J'ignore ce que les populations du Nord en penseraient, mais il me semble qu'on pourrait installer des éoliennes dans des régions éloignées et s'organiser pour transporter l'électricité là où on en a besoin. Nous avons beaucoup d'espaces ouverts, beaucoup de terres impossibles à développer au Canada, de sorte que c'est peut-être un autre domaine où nous pourrions avoir un avantage.
    Puis-je ajouter quelque chose?
    Faites rapidement, s'il vous plaît. Le temps alloué au député est épuisé.
    Il importe d'ajouter que le Canada est un leader dans la technologie des réacteurs CANDU, et je crois qu'il faudrait vraiment l'ajouter aux points de discussion. Le Canada a un avantage stratégique en matière de technologie nucléaire, soit l'absence d'émission de gaz à effet de serre. Il y a aussi l'énergie géothermique, qui n'est pas exploitée comme elle le devrait.
    Monsieur Sauchyn.
    Récemment, je discutais avec un vice-président principal d'une grande société énergétique de l'Ouest canadien qui m'a dit que le programme le plus efficace, de loin, de cette société est le programme d'économies d'énergie. Toutefois, les ingénieurs préfèrent concevoir et construire, de sorte qu'il est difficile de persuader la société de vraiment investir dans des mesures d'économie d'énergie.
    Monsieur Dewar, je vais mentionner également ma propre expérience dans la circonscription que je représente. Notre industrie pétrochimique séquestre depuis longtemps tout son CO2, soit depuis dix ans au moins. C'est donc une technologie produite au Canada.
    Monsieur Warawa.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier les témoins d'être ici aujourd'hui. Nous avons eu des entretiens à de nombreuses reprises, et je suis ravi de revoir chacun d'entre vous.
    Pour pouvoir aller de l'avant, vous devez regarder où vous en êtes et jeter un coup d'oeil sur votre passé, tout en restant concentrés sur l'avenir et l'objectif visé. Nous avons largement dépassé le stade du débat scientifique sur le changement climatique. Partout, on s'entend pour dire que nous avons un problème, un gros problème.
    Le gouvernement actuel a été formé il y a deux ans, et je ne vais pas m'étendre sur le passé, mais nous nous sommes retrouvés dans une direction que nous ne voulions pas emprunter. Alors nous avons établi des cibles au Canada qui sont parmi les plus sévères au monde. Chaque pays se trouve dans une situation, à un point de départ qui lui est propre. Lorsque vous avez un gouvernement qui tient sérieusement à faire quelque chose... Au Canada, le gouvernement actuel s'est engagé à réduire les émissions de gaz à effet de serre: des réductions absolues de 20 p. 100 d'ici 2020 et de 60 à 70 p. 100 d'ici 2050.
    Ce dont nous parlons aujourd'hui, ce sont les données scientifiques à l'appui du projet de loi C-377. Ce dernier, vous le savez sans doute, est un projet de loi d'après 2012, d'après le Protocole de Kyoto. Au cours des deux prochaines années, il y aura des négociations visant à définir ce que sera cet accord d'après 2012.
    Le parrain du projet de loi C-377 est le chef du NPD, M. Jack Layton, qui était ici il y a une semaine pour nous faire part de sa vision sur le sujet. J'aimerais vous en parler dans une minute, mais j'aimerais savoir ce que vous pensez du projet de loi C-377 à titre de scientifiques.
    J'aimerais aussi savoir ce que vous pensez de l'adaptation. Vous avez été nombreux à dire dans vos exposés que nous subissons déjà les retombées du changement climatique et que nous continuerons à les subir, et qu'elles vont augmenter; ce phénomène va se produire. Ce que nous devons faire en tant que citoyens du monde, c'est réduire ensemble les émissions de gaz à effet de serre. Nous devons faire cela. Nous sommes d'accord sur ce point, mais au Canada, que devons-nous faire pour nous préparer à l'adaptation?
    Nous revenons tous d'un congé, et j'ai eu de nombreux entretiens avec des gens de ma circonscription. Une des remarques que j'ai entendues m'est restée en tête. Cela ressemblait à un commentaire de Rex Murphy que j'ai lu avant le congé de Noël. Cet électeur me parlait de l'importance de ce dossier et était d'accord avec le message que le Canada passait à toutes ces conférences internationales et ces séances de remue-méninges, à savoir que tout le monde doit participer aux efforts. Ce ne sont pas 30 p. 100 des gens qui doivent essayer de régler le problème; chacun doit faire sa part. Le Canada se trouve dans une situation particulière, comme tous les pays, et chacun doit faire sa part.
    Monsieur Rutherford, j'ai entendu vos commentaires, et je me suis posé les mêmes questions. Quelqu'un en Inde devrait-il pouvoir avoir de l'électricité? Absolument. Vous avez dit « J'ai eu ma part du gâteau et vous ne pouvez pas avoir la vôtre ». Bien sûr, c'est une question morale, et les gens en Inde, en Chine ou en Afrique doivent être en mesure d'améliorer leur sort et leur qualité de vie, tout en protégeant l'environnement. Cet électeur m'a dit « Mark, pour moi, c'est comme un grand seau d'eau percé de centaines de trous et l'eau fuit de partout. Vous, le gouvernement, vous bouchez un de ces trous. C'est fort louable, c'est bien, il faut le faire, mais chacun doit colmater une brèche pour que nous puissions conserver le seau d'eau et sauver notre planète. »
    J'ai trouvé cette analogie intéressante. Elle m'a rappelé ce que Rex Murray a dit. Voici en substance ses propos:
On ne peut avancer aucun argument sérieux pour que le Canada prenne des engagements fermes si on exempte les grands pollueurs du monde comme la Chine et l'Inde. Ce serait comme colmater une fuite sans se soucier de l'inondation.
    C'est une analogie très semblable.
(1645)
    Lorsque M. Layton est venu parler du projet de loi C-377 — j'en viens maintenant au projet de loi — il a présenté son exposé. Les cibles, les objectifs qu'il a fixés dans le projet de loi C-377 seraient une réduction de 80 p. 100 d'ici 2050. On a posé certains jalons en cours de route: une réduction de 25 p. 100 en 2020 et des cibles intérimaires à des intervalles de cinq ans.
    Il a dit également que ces cibles sont fondées sur le rapport de l'Institut Pembina et de la Fondation David Suzuki intitulé Réduire radicalement les émissions de gaz à effet de serre. Il a dit aussi « Je sais que Matthew Bramley sera votre prochain témoin ... et il vous décrira ses recherches et ce rapport. »
    Lorsque j'ai eu l'occasion de...
(1650)
    Il est temps de poser vos questions, Mark.
    Monsieur le président, je vais demander aux gens de ne pas m'interrompre, parce que j'essaie d'exposer une idée.
    J'ai demandé à M. Layton « Avez-vous calculé les coûts de votre plan? » et il m'a répondu « Il s'agit d'un ensemble de cibles. Ce sera au gouvernement au pouvoir de proposer des plans et de déterminer comment nous allons atteindre ces cibles. »
    Alors ma question est la suivante: Dans quelle mesure est-ce important d'établir le coût de ce plan pour que nous sachions qu'il est réaliste, en gardant à l'esprit que chaque pays se trouve dans une situation particulière? Je crois que nous avons des cibles extrêmement ambitieuses. Le projet de loi C-377 dont nous parlons — et c'est pour cette raison que vous êtes ici — n'a pas été chiffré.
    J'ai posé la même question à M. Bramley, ou quelqu'un d'autre l'a fait. Il a répondu la même chose, que le plan n'avait pas été chiffré. Les deux témoins ont dit qu'ils espéraient que le gouvernement fasse cela.
    Dans quelle mesure est-ce important de chiffrer ce plan pour que les Canadiens, le gouvernement actuel, chacun d'entre nous qui est concerné, s'engagent dans cette voie en toute connaissance de cause? Dans quelle mesure est-ce important d'établir ces coûts?
    Il nous reste environ trois minutes, alors je vous prie de répondre brièvement.
    Je peux répondre.
    Premièrement, le projet de loi C-377 n'est pas bien différent de ce que vous avez dit au début de votre intervention: le gouvernement du Canada s'est engagé à réduire les émissions de 20 p. 100 d'ici 2020 et entre 60 et 70 p. 100 d'ici 2050.
    Le gouvernement du Canada en a-t-il établi les coûts? Je ne le crois pas, parce que je n'ai pas vu ces chiffres non plus.
    À mon avis, l'esprit du projet de loi C-377 est conforme à l'orientation que prend l'Union européenne, en ce sens qu'on établit une cible fondée sur des données scientifiques, pour ce qui est du seuil de deux degrés Celsius. Je crois que c'est ce qui est important, et c'est ce qui manque dans le contexte canadien: établir des cibles qui concordent avec celles d'autres régions.
    Pour ce qui est de votre commentaire sur l'Inde et la Chine, il s'agit, à mon avis, d'un argument très valable et — je l'ai dit tout à l'heure — il existe déjà un cadre qui tient compte de cet aspect. Pareil cadre existait lorsque le Protocole de Montréal a été signé. En fait, le ministre Baird a souligné à Bali que nous devrions avoir un accord très semblable au Protocole de Montréal, pour lequel les pays développés ont fait preuve de leadership.
    Il y a ce qu'on appelle  « Contraction et Convergence », un cadre qui vise un monde sans émission, et c'est dans ce cadre que vous convergez et réduisez pour en arriver à zéro émission per capita. On reconnaîtrait le fait, par exemple, que depuis l'époque pré-industrielle, les émissions cumulatives de gaz à effet de serre dans l'atmosphère sont les mêmes au Canada qu'en Inde. Il est donc très difficile pour nous de dire à l'Inde, dont la population est 34 fois plus nombreuse qu'au Canada, qu'elle est à l'origine du problème, alors que nos émissions cumulatives, avec notre 2 p. 100, sont les mêmes qu'en Inde. Pour l'atmosphère, ce sont les émissions cumulatives qui comptent, non pas les émissions produites annuellement.
    Monsieur Stone.
    Merci beaucoup. Je serai très bref.
    J'ai comparu devant votre comité, sous une forme ou l'autre, quatre fois au cours des 12 derniers mois. J'ai été très encouragé par les propos tenus par le gouvernement actuel, monsieur Warawa, sur son intention de s'attaquer à ce problème. Mais je veux voir la loi, je veux voir le règlement, je veux voir les plafonds imposés aux industries — je veux voir toutes ces choses. Les mots ne sont pas suffisants. Nous devons passer à l'étape suivante. Personnellement, je vous encouragerais, vous et vos collègues, à faire cela.
    Je crois que le projet de loi C-377 est utile. Selon mon interprétation, il vise à fixer des objectifs à moyen et à long terme. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, je crois que c'est absolument essentiel pour que nous ayons tous, y compris l'industrie, une vision à long terme, et ce projet de loi nous met au défi en établissant un niveau d'émissions.
    Évidemment, nous devons établir le coût des plans proposés, peu importe par quel parti, et peu importe de quel pays nous parlons. Ce n'est qu'une question de bonne politique publique. Je vais devoir présumer que les plans présentés au Parlement, au gouvernement du Canada et aux Canadiens sont correctement chiffrés. Je suis d'accord avec vous.
    Monsieur Rutherford, très brièvement, je vous prie.
    Très brièvement, il y a des coûts rattachés tant à l'action qu'à l'inaction, et je ne crois pas qu'ils soient très faciles à calculer.
    Je regarderais ce qui se fait dans le monde et, comme quelqu'un l'a déjà mentionné, je me pencherais sur les pays qui ont réussi le mieux à « décarboniser » leur économie, pour qu'elle soit moins énergivore et qu'elle produise moins de carbone, des pays comme la Norvège, le Danemark et l'Allemagne. Ils ne se sont pas appauvris pour autant. Ils se portent très bien.
    Je crois que nous devrions essayer de nous en inspirer, au lieu de toujours nous plaindre du coût des choses proposées. Bon nombre de ces mesures vont se payer d'elles-mêmes; l'efficacité énergétique en est un bel exemple. Votre comité a entendu des représentants d'industries qui ont agi dans leur propre intérêt pour diminuer leurs coûts en réduisant leur consommation d'énergie. Il faut toujours, évidemment, choisir le bon moment.
(1655)
    En ce qui a trait aux coûts, je serai ravi d'envoyer à M. Weaver une copie de notre plan « Prendre le virage »; il est chiffré.
    Merci beaucoup.
    Nous allons donner la parole à M. Godfrey pour le deuxième tour de table, pour cinq minutes.
    Dans son discours, M. Warawa a affirmé — et c'était intéressant pour nous tous, je crois — que le Canada avait établi des cibles parmi les plus sévères au monde pour 2020 et 2050. Bien sûr, ces cibles sont fondées sur le niveau de 2006, par opposition à 1990.
    J'ai trois questions pour nos quatre témoins. Premièrement, compte tenu des pays dont nous avons parlé, êtes-vous d'accord pour dire que ces cibles sont parmi les plus sévères au monde?
    Ma deuxième question a un caractère scientifique. Vous pouvez tous y répondre. Ou plutôt, commençons simplement par celle-ci. Ces cibles font-elles partie des plus sévères au monde? Vous pouvez répondre simplement par oui ou par non.
    Monsieur Rutherford.
    Eh bien, des chiffres ont été lancés à propos de cibles qui reposent sur différents points de départ. Le niveau de 2006 est, quoi, 32 p. 100 supérieur à celui de 1990? C'est donc un très bon point de départ si vous voulez faire bonne figure, mais ce n'est pas très utile pour l'atmosphère.
    Cela m'amène à la deuxième question, que je vais poser à l'un ou l'autre des témoins. Ces cibles, donc, nous amèneraient-elles là où nous devons aller, d'un point de vue scientifique? Si le Canada faisait sa part, pourrait-on s'en tenir à une hausse de 2 p. 100?
    Si le Canada intégrait ces cibles dans une loi et avait des politiques pour les atteindre, les objectifs de 20 p. 100 et de 60 à 70 p. 100 d'ici 2050 concorderaient avec le niveau de réduction dont vous avez besoin. Le problème, c'est qu'il ne peut s'agir de cibles idéalistes; il faut que ce soit des cibles réelles, et vous devez avoir des politiques réelles définies dans une loi. À vrai dire, je ne vois pas cela.
    Le premier ministre de l'Alberta dit que cette province aura atteint une réduction de 14 p. 100 d'ici 2050. Comment le gouvernement du Canada peut-il s'entendre avec la province qui a la plus forte croissance d'émissions, ce qui est clairement incompatible avec le plan du gouvernement du Canada? Je ne vois pas comment cela peut fonctionner.
    Ma prochaine question serait donc la suivante: si nous ne croyons pas que les cibles du gouvernement actuel, fondées sur le niveau de 2006, sont parmi les plus sévères au monde et qu'elles ne nous mènent pas là où nous devrions aller, êtes-vous plus à l'aise avec le projet de loi C-377, du moins pour ce qui est des mécanismes qu'il vise à mettre en place pour nous aider à fixer une cible plus rigoureuse? Croyez-vous qu'il s'agit d'un ajout utile à l'arsenal de politiques ou au cadre législatif qui nous permettra d'avancer?
    Je vois M. Weaver hocher la tête. Est-ce que quelqu'un d'autre veut faire un commentaire à ce sujet?
    Monsieur Weaver.
    Je crois que le projet de loi C-377 concorde avec les mesures prises sur la scène internationale. Ce qui est intéressant, c'est qu'il fixe précisément l'objectif de deux degrés dans la politique; il fixe un cadre pour y arriver. Je ne vais pas plaider en faveur du 80, du 70 ou du 90 p. 100, parce que, pour dire vrai, nous devons en arriver à zéro émission. C'est le cadre qu'il faut mettre en oeuvre, et il concorde avec les efforts internationaux faits dans ce domaine.
    Quelqu'un d'autre?
    Nous pouvons discuter des niveaux, mais... Allez-y, John.
    Très brièvement, je ne crois pas que le projet de loi C-377 est nécessairement incompatible avec les objectifs du gouvernement actuel, ni avec les déclarations idéalistes faites par les autres partis.
    Je sens que lentement — et je dis bien lentement — les partis au Canada semblent en arriver à un consensus pour dire que nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas nous attaquer à ce problème.
(1700)
    Nous pouvons débattre de niveaux hypothétiques indéfiniment, mais je crois que l'important, c'est que le gouvernement du Canada a besoin d'une politique, d'une certaine crédibilité, parce qu'il doit conclure des ententes avec les provinces et avec d'autres pays. Vous pouvez commencer en ayant une politique raisonnable.
    Nous savons déjà quelles sont les cibles annoncées par le gouvernement de l'Alberta, et j'en fus particulièrement déçu parce que j'ai témoigné devant le ministre pendant deux jours, à ses frais, et rien de cela ne transpire dans leur plan; le plan albertain ne tient compte d'aucune donnée scientifique. Par ailleurs, le gouvernement de la Saskatchewan a fixé des cibles beaucoup plus ambitieuses: 32 p. 100 d'ici 2020. Le nouveau gouvernement a accepté d'imposer ces cibles.
    Monsieur Jean.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais, en fait, avoir certains renseignements concernant la taxe sur le carbone, parce que nous avons entendu différents points de vue à ce sujet ici. Par exemple, M. McGuinty a fait valoir différentes positions sur cette question, de même qu'un député libéral et M. Godfrey. Je me demande quel type de taxe sur le carbone serait nécessaire pour atteindre les cibles visées dans le projet de loi.
    J'ai examiné vos curriculum vitae, messieurs — y compris M. Weaver — et je me demande qui serait le mieux placé pour répondre à cette question. Je ne sais pas si l'un d'entre vous est qualifié pour le faire, mais monsieur Weaver, avez-vous une expertise pour parler d'une taxe quelconque ou d'une taxe sur le carbone qu'il faudrait imposer pour appliquer ce projet de loi?
    Je ne suis pas économiste. J'ai lu beaucoup, mais je ne voudrais pas me prononcer sur une taxe sur le carbone qui serait nécessaire pour mettre en oeuvre le projet de loi, parce que ce ne serait pas dans mon champ de compétence, même si je connais assez bien la méthode et les outils dont le gouvernement dispose.
    D'accord.
    Et je suis tout à fait en faveur d'une taxe sur le carbone.
    Oui, je comprends cela. Merci, monsieur Weaver.
    M. Stone veut faire un commentaire.
    Comme vous l'avez remarqué, je ne suis pas économiste, mais j'ai écouté et j'ai lu bien des choses sur le sujet.
    Personne, je crois, ne peut nier que, peu importe ce que vous faites, vous devez mettre un prix sur le carbone. C'est la façon dont fonctionne le marché. C'est ce que le marché reconnaît.
    Personnellement, je m'inspire de l'expérience de l'Union européenne. L'UE a songé à une taxe sur le carbone. Elle a décidé de ne pas emprunter cette voie. Elle a décidé d'utiliser plutôt un système de plafond et d'échange. La différence entre les deux, c'est qu'avec une taxe sur le carbone, vous fixez essentiellement le prix du carbone et c'est ce prix qui détermine le niveau de réduction des émissions. Le système de plafond et d'échange fixe le niveau de réduction des émissions et c'est lui qui détermine le prix du carbone. À mon avis, ce système comporte certains avantages.
    C'est la direction que l'UE a empruntée. Je crois qu'on devrait y songer sérieusement. Ce système offre, à mon avis, certains avantages.
    Monsieur Jean, je vous souhaite la bienvenue, mais nous accueillons ici un groupe de scientifiques. Nous recevrons plus tard un groupe d'économistes. Je sais que vous êtes un nouveau membre du comité, mais si vous pouviez vous en tenir à la science, ce serait bien.
    C'est ce que je ferai. Merci, monsieur le président.
    J'ai posé ma question d'un point de vue scientifique, parce que j'ai entendu ces messieurs auparavant, comme vous le savez, et je me demandais si, dans le cadre de leur expertise, ils pouvaient nous indiquer quels sont les exemples que l'on trouve sur la scène internationale qui fonctionnent et ceux qui ne fonctionnent pas. Alors d'un point de vue scientifique, c'était tout à fait approprié, malgré la confusion de l'autre côté.
    J'ai entendu beaucoup de témoignages à propos du projet de loi C-30 au comité de l'environnement auparavant, et ceux de trois des quatre témoins ici aujourd'hui. Il est juste de dire que beaucoup de gens veulent des résultats, la réduction des émissions coûte que coûte, et qu'ils sont prêts à faire cela à n'importe quel prix — et nous avons entendu M. Weaver un peu plus tôt. Je crois qu'il est juste de dire qu'un grand nombre de personnes ont adopté cette position, tandis que d'autres veulent examiner le prix et sont prêtes à réduire dans les limites de ce qui est raisonnable.
    Serait-il juste de dire que le gouvernement actuel a en fait adopté une position passablement modérée, un juste milieu, en établissant les cibles les plus ambitieuses au monde, selon moi, des cibles obligatoires, y compris la stratégie écoAUTO et ainsi de suite? Serait-il juste de dire que le gouvernement actuel a adopté une approche intermédiaire par rapport aux deux extrêmes que j'ai présentés comme hypothèses?
    Monsieur Stone.
    Je ne sais pas si je peux répondre à cela.
    Je l'ai déjà dit, et le professeur Weaver l'a mentionné: je suis encouragé par ce que dit le gouvernement actuel sur le niveau des cibles et pareille chose, mais il faut maintenant passer à l'action, traduire cela dans une loi, dans un règlement, dans des plafonds, dans des programmes qu'il faudra mettre en place pour aider ceux qui auront le plus de difficultés. Nous avons attendu. Nous voulons maintenant voir cela.
    Quelqu'un dit oui. Nous avons entendu le signal de départ; c'est commencé. Nous savons ce que sont les objectifs à long terme. Nous avons les outils pour les atteindre. Alors nous commençons. C'est ce que nous attendons tous.
(1705)
    Monsieur Jean, très brièvement.
    Ne serait-il pas juste de dire, et c'est un cliché que nous avons entendu quelques milliers de fois à la Chambre et ici même... mais pendant une période de 10 ans, les libéraux n'ont essentiellement pas fait grand-chose et n'ont même pas pu présenter un plan. En moins de deux années, nous avons établi un plan, nous travaillons sur une réglementation et nous allons de l'avant à la faveur d'une approche gouvernementale que je qualifierais de modérément ambitieuse en vue d'atteindre les objectifs attendus. N'aurions-nous pas droit à un certain répit de manière à avoir le temps nécessaire, quelques mois peut-être, pour mettre en place cette réglementation?
    Vous avez dit vous-même avoir été impressionné par notre position et notre idéologie. Ne seriez-vous pas prêt à admettre...
    Désolé, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai indiqué avoir été encouragé par ce que j'ai entendu en provenance du gouvernement actuel; je n'ai pas dit que j'étais d'accord avec votre idéologie. Je ne crois pas avoir rien affirmé en ce sens.
    Je m'intéresse à ce dossier depuis plus de 15 ans. Je me souviens avoir parlé à des hauts fonctionnaires du ministère des Finances il y a au moins 10 ans, si ce n'est davantage, au sujet d'un système d'échange de droits d'émission au Canada. Nous n'avons toujours pas de tel système. Voilà une bonne dizaine d'années que nous en discutons avec des experts. La situation est devenue plutôt frustrante pour certains d'entre nous. Ne pourrions-nous pas passer à l'action et mettre en place ce système?
    Merci, monsieur Jean.
    Monsieur Bigras.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais poser une brève question, mais avant de le faire, je voudrais dire que j'en ai un peu marre des arguments du gouvernement lorsqu'il dit que le Canada ne doit pas prendre d'engagements tant et aussi longtemps que les pays émergents, comme la Chine et l'Inde, ne s'engagent pas sur le plan international. C'est un peu comme si je disais à ma fille de 10 ans de sortir le bac de recyclage le jour où les voisins l'auront sorti. Sur les plans environnemental et social, je trouve qu'il est un peu irresponsable, de la part des conservateurs, de nous présenter aujourd'hui un tel discours politique, tout comme ils l'ont fait à Bali.
    Cela dit, vous avez lu le projet de loi et son préambule. Vous avez également vu la référence aux deux degrés Celsius et à la stabilisation des émissions. Le rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, ou GIEC, contient-il des éléments qui devraient être intégrés au projet de loi C-377, particulièrement en ce qui a trait au préambule?
    Ma question s'adresse à tous nos témoins.

[Traduction]

    Monsieur Weaver, vous voulez répondre?
    Si vous me le permettez, j'aurais quelque chose à ajouter.
    Je crois que si on fait référence à la déclaration des scientifiques formulée à Bali et signée par 250 experts du monde entier, la même impression de consensus peut s'y retrouver. Bon nombre des éléments alors présents, qu'il s'agisse de la période de 10 à 15 ans, des deux degrés, de l'importante réduction de 50 p. 100 à l'échelle planétaire, se trouvent aussi dans le document que nous avons en main. Je suis donc raisonnablement satisfait de sa teneur.
    Monsieur Stone.
    C'est à la fois une très bonne question et une question très ouverte. Je me vois très bien prendre plusieurs heures pour y répondre, mais je vais me limiter à quelques commentaires.
    Je crois qu'il y a lieu de faire valoir quelques déclarations, conclusions et constatations du quatrième rapport d'évaluation du GIEC. On y dit d'abord textuellement que le réchauffement du système climatique est sans équivoque. On ajoute que le phénomène est fort probablement attribuable à l'activité humaine. On souligne enfin que l'on peut déjà constaté les impacts de ce réchauffement causé par l'homme. Si nous n'arrivons pas à contrôler et à réduire nos émissions, nous allons subir de plus en plus d'impacts nous exposant à des risques de plus en plus importants. Nous ressentons déjà les effets de nos émissions antérieures, ce qui fait que l'adaptation n'est plus simplement une option stratégique; c'est devenu un impératif.
    Bon nombre des études économiques effectuées révèlent que les cibles fixées peuvent être atteintes sans mettre notre situation financière en péril. On a fait état de plusieurs de ces études au début de la présente séance et on parle en fait d'une fluctuation annuelle du PIB pouvant se chiffrer à 0,12 p. 100. C'est donc un autre point à considérer. Il existe actuellement des technologies pouvant nous permettre de tout au moins stabiliser les émissions actuelles pour les 50 prochaines années.
    Voilà donc quelques conclusions du GIEC qui pourraient alimenter ce débat.
    J'espère ne pas avoir pris trop de temps.
(1710)
    Merci.
    Monsieur Sauchyn.
    Je voudrais ajouter que si cela ne retarde pas indûment le traitement de ce projet de loi, je vous encouragerais à le faire, parce que le but de ces évaluations scientifiques, du travail du GIEC, est d'appuyer la prise de décisions.
    D'ici quelques semaines, vous aurez en outre accès à un rapport d'évaluation de 350 pages sur les changements climatiques au Canada; je vous encourage également à vous inspirer de ces renseignements.
    Très brièvement, monsieur Lussier, vous avez environ 20 secondes.

[Français]

    J'aimerais que M. Sauchyn nous parle de la position de l'Alberta, qui n'a nullement tenu compte de ses conseils.
    Vous dites que votre centre de recherche informe les décideurs. Qui sont-ils et quelle est votre stratégie de communication à l'intention de ces décideurs?

[Traduction]

    Nous rencontrons périodiquement des sous-ministres, des ministres et des premiers ministres qui nous en font la demande. Nous avons ainsi comparu devant le ministre de l'Environnement de l'Alberta. En fait, je faisais partie d'un groupe d'experts internationaux qui ont passé deux jours dans un hôtel cinq étoiles avec le ministre pour lui fournir de l'information.
    Au départ, un des experts en provenance des États-Unis a fait valoir que l'exercice allait permettre au ministre de simplement « cocher une case de plus » pour pouvoir soutenir qu'il avait consulté des experts. C'est donc le type de service de consultation que nous offrons.
    Pas plus tard que la semaine dernière, j'ai passé une heure avec une sous-ministre de la Saskatchewan pour la préparer en vue de réunions qui ont lieu à Vancouver cette semaine.
    Merci.
    Monsieur Vellacott.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma question va nous ramener un peu en arrière, mais en ne perdant pas l'avenir de vue. Je signale à nos invités que les revendications de l'industrie ne datent pas d'hier. Voilà en effet treize longues années que les gens de l'industrie se plaignent de ne recevoir aucune orientation dans tout ce secteur. On voulait savoir vers où l'on se dirigeait, mais aucune orientation n'était fournie, ce qui fait qu'aucune mesure concrète n'a été prise pendant cette longue période.
    Et voici que tout récemment, à Bali, en vertu de l'article 71, l'industrie était avisée qu'elle serait réglementée et qu'elle devrait rendre compte de ses émissions de gaz à effet de serre. Les cibles pour les émissions finales devraient être connues d'ici la prochaine année, ce qui constitue un important pas en avant, tout au moins par rapport à ce qui a été fait dans le passé.
    Plus précisément, si on considère les balises établies dans le Protocole de Kyoto, dans quatre ans d'ici, en vertu de ce protocole, nous devrions en être à environ 6 p. 100 sous les niveaux de 1990. Je vous invite à réfléchir un instant à la question. Nous aurions sans doute maintenant une discussion totalement différente si nous nous étions mis à la tâche il y a plusieurs années déjà, si nous étions passés à l'action, mais ce n'est pas ce qui s'est produit.
    Pourriez-vous nous donner une idée de ce que serait la situation comparativement à ce qu'elle est actuellement, tant pour ce qui est de l'évolution de la conjoncture économique, des signaux envoyés à l'industrie que des impacts sur l'économie? Dans quelle mesure la situation aurait-elle été différente, comparativement à la tâche très difficile qui nous attend actuellement?
    Des mesures concrètes sont prises en vue de l'établissement de cibles fermes. L'industrie est mise en garde pour la première fois. On lui offre l'orientation stratégique qu'elle n'a jamais eue auparavant.
    Qui veut répondre d'abord?
    Monsieur Weaver, voudriez-vous... ?
    Oui, je vais répondre avec plaisir.
    D'abord et avant tout, je ne nie pas qu'il y a eu un manque de leadership dans tout ce dossier pendant des années. Cela ne fait aucun doute. Je crois que nous en sommes toujours au stade des discussions. J'espère vraiment que nous verrons bientôt quelque chose de concret.
    Vous avez indiqué que les chefs de file de l'industrie étaient à la recherche d'une orientation. En fait, le 1er octobre dernier, le Conseil canadien des chefs d'entreprise a rendu publique une déclaration réclamant des mesures vigoureuses pour s'attaquer au problème du changement climatique. Le Conseil demandait notamment l'instauration d'une taxe environnementale, ce qui est bien sûr un euphémisme pour parler d'une taxe sur le carbone. En outre, à Bali, 100 des plus grandes entreprises mondiales ont exhorté les gouvernements à passer à l'action. Je crois que le monde des affaires souhaite que les règles du jeu soient établies.
    J'ose espérer que nous pourrons oublier le passé pour nous tourner vers l'avenir. Il est bien certain que rien de bon n'a été fait dans le passé. Je ne crois pas que vous arriverez à trouver quelqu'un qui vous affirmera que nous allons atteindre les cibles de Kyoto. Ce n'est pas le cas.
    Par ailleurs, je ne me réjouirais pas non plus du fait que les entreprises seront tenues de rendre des comptes, car en sa qualité de partie à la CCNUCC, le Canada doit faire rapport de ses émissions de toute manière. Dans une certaine mesure, l'industrie fait déjà état de ses émissions dans le contexte de l'obligation pour notre pays de le faire en vertu de la CCNUCC.
    Encore là, j'ose espérer que nous irons plus loin que les simples discussions sur ce qui a pu se passer auparavant — parce que de toute évidence, il ne s'est rien produit — pour aller de l'avant et faire vraiment quelque chose. L'occasion est belle pour n'importe quel gouvernement qui le souhaite de faire montre de véritable leadership tant au Canada qu'à l'échelle internationale. Peu importe qu'il s'agisse des conservateurs, du NPD, des libéraux, du Bloc québécois ou du Parti vert, pour autant que quelqu'un fasse le nécessaire.
(1715)
    Monsieur Rutherford.
    Si j'étais à la tête d'une industrie, d'une usine ou d'une entreprise qui, malgré la piètre performance globale du Canada, a réussi à réduire considérablement ses émissions de CO2 entre 1990 et 2006, j'aimerais savoir comment ces résultats vont être considérés. Vais-je avoir droit au crédit qui me revient ou serai-je traité sur le même pied que les autres entreprises de mon secteur qui n'ont pas aussi bien fait que la mienne? J'estime que c'est une question importante à régler si l'on veut que ce régime soit équitable. Il faut vraiment se pencher sur la réglementation qui va découler de ce processus afin de bien comprendre comment les choses vont fonctionner.
    Merci.
    Monsieur Vellacott, avez-vous une question de 20 secondes? J'aimerais que nous passions à l'étude de la motion, si cela est possible.
    Je croyais que M. Stone allait pouvoir répondre brièvement.
    D'accord, monsieur Stone, les 20 secondes sont à vous.
    J'ai visité bien des usines; j'ai entendu bien des choses. J'entends encore les mêmes termes aujourd'hui: « Nous allons »; je crois qu'il serait temps qu'on nous dise: « Nous avons ». N'êtes-vous pas d'accord?
    Je pense que M. Lussier a mentionné un point très important. À mon avis, nous n'avons jamais eu dans ce pays un véritable débat au sujet des changements climatiques. Nous avons entendu certains arguments boiteux à propos des coûts associés au Protocole de Kyoto, mais il n'y a pas eu de vrai débat auquel tous les intéressés auraient été conviés. Je crois que si vous pouvez organiser une telle discussion, de manière à exploiter en quelque sorte la capacité novatrice et l'imagination de tous les Canadiens — qu'il s'agisse d'intervenants de l'industrie, de particuliers ou de gouvernements — alors vous aurez accompli quelque chose de véritablement utile. Il faut absolument que ce vrai débat ait lieu.
    Je pense que c'est une excellente façon de conclure, monsieur Stone.
    Je veux remercier tous nos invités, y compris M. Weaver qui a participé via vidéoconférence.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Merci d'avoir été des nôtres. Nous vous sommes reconnaissants pour votre contribution.
    J'invite maintenant les membres du comité à traiter directement de la motion. Selon la procédure établie, M. Scarpaleggia va en faire la proposition. Je sais que nous avons un amendement. Je vous saurais gré de bien vouloir procéder rapidement.
    Monsieur Scarpaleggia.
    J'aimerais présenter cette motion. Je pense qu'elle se passe d'explications. J'estime que les questions connexes de l'exploitation des sables bitumineux et des réserves d'eau sont des sujets d'actualité dont nous n'avons pas une connaissance suffisante, en notre qualité de décideurs. Il y a des lacunes au chapitre de l'information. Je voudrais donc que nous convoquions différents experts et groupes capables de nous fournir les compléments d'information requis et de nous donner un aperçu des problèmes qui se posent et des solutions possibles, notamment.
    Je vais donner la parole à M. Warawa qui sera suivi de M. Dewar, puis de M. Regan.
    Merci, monsieur le président.
    Tout est dans le choix du moment. Lorsque nous avons débuté nos travaux, il y a quelques années je crois, j'ai indiqué que cela pourrait être un sujet d'étude fort intéressant, surtout si on incluait une visite des sites d'exploitation des sables bitumineux. Le comité n'a pas jugé bon qu'on le fasse à ce moment-là. Voilà maintenant que l'on s'intéresse à nouveau aux sables bitumineux. C'est une excellente initiative. Je pense qu'il serait très important dans le cadre de cette étude que nous visitions effectivement les installations. Certains parmi nous sont déjà allés là-bas; d'autres pas. J'y suis allé. Nous pourrions avoir une bien meilleure idée de la situation en nous rendant là-bas, ce qui devrait nous aider, espérons-le, à prendre les bonnes décisions.
    Je vais donc proposer un amendement en ce sens. J'espère qu'il pourra être considéré comme un amendement favorable. Sinon, nous devrons le mettre aux voix. J'ajouterais donc à la motion:
et que le comité inclue dans son étude et organise un voyage dans le Nord de l'Alberta afin de visiter des endroits où il y a des sables bitumineux avant la fin de la présente session.
    M. Scarpaleggia est-il prêt à considérer qu'il s'agit là d'un amendement favorable?
(1720)
    Monsieur Scarpaleggia, êtes-vous disposé à accueillir l'amendement?
    Je ne dis pas que je ne voudrai pas, à un moment donné, visiter ces installations mais, en toute franchise, je ne comprends pas en quoi le fait de voir les sables bitumineux sur place nous permettrait d'acquérir des informations importantes. Je voudrais obtenir des données techniques de gens comme David Schindler qui a consacré beaucoup de temps à l'étude des répercussions des sables bitumineux sur l'eau. Ces gens peuvent venir nous présenter l'information ici même.
    Peut-être pourrions-nous visiter éventuellement les sites d'exploitation des sables bitumineux, mais je voudrais vraiment que l'on procède à cette étude après avoir traité du projet de loi C-377. Je ne pense pas que nous ayons besoin d'engager de dépenses de la sorte pour obtenir le type de renseignements que j'espère retirer de ce processus.
    Je suppose que la démarche viserait à connaître le point de vue de l'industrie sur place, mais quoi qu'il en soit...
    Nous avons un amendement.
    Je vais donc proposer mon amendement et vous en entretenir un instant, monsieur le président. Il n'a pas été accepté à titre d'amendement favorable.
    Il faut des informations de qualité pour pouvoir prendre de bonnes décisions. Si vous n'avez droit qu'à une seule version des faits, vous risquez fort de ne pas prendre la meilleure décision possible. Cette motion de M. Scarpaleggia prévoit un groupe de témoins défendant tous le même point de vue. Je propose que nous essayions de trouver un équilibre plus juste.
    Au fil de mon expérience en politique — et j'ai oeuvré 14 ans à l'échelon local avant de faire de la politique fédérale — j'ai constaté que toute votre perspective peut changer lorsque vous vous rendez sur place pour visiter le site concerné. Il est possible que mon collègue ne soit jamais allé là-bas, mais cela pourrait changer sa façon de voir les choses. Une visite vous procure une perspective concrète, réaliste et équilibrée.
    S'il ne souhaite pas s'y rendre, c'est son droit, mais je pense que cela devrait faire partie de notre étude.
    J'aimerais demander à chacun d'être plus bref encore, sans quoi nous ne pourrons pas régler la question avant notre prochaine réunion.
    J'ai une liste d'intervenants. Nous discutons actuellement de l'amendement que je souhaiterais mettre aux voix le plus rapidement possible.
    Monsieur Dewar, voulez-vous parler de l'amendement?
    Non? D'accord.
    M. McGuinty est le prochain sur ma liste.
    Monsieur le président, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de se rendre visiter les sites d'exploitation des sables bitumineux. Je demanderais respectueusement au ministre de nous présenter un diaporama à ce sujet. Le cabinet du ministre pourrait ainsi nous offrir un très bon aperçu avec l'aide de photographies ou même d'extraits vidéo, notamment. Le ministre peut compter sur une équipe très efficace, passée maître dans l'art de la vidéo et de la rétroprojection.
    Nous pouvons voir toutes ces choses sans nous déplacer. Si M. Warawa souhaitait plutôt, par exemple, proposer d'autres témoins capables de venir nous présenter en toute honnêteté des renseignements complets, y compris des données économiques, je serais le premier à m'en réjouir.
    Nous allons écouter M. Bigras très brièvement avant de revenir à M. Scarpaleggia qui, espérons-le, concluera ce débat au sujet de l'amendement.
    Monsieur Bigras.

[Français]

    Je pense que la motion a tout son sens telle qu'elle est présentée. D'ailleurs, M. Lussier, cet après-midi, avait des questions sur l'impact de l'exploitation des sables bitumineux sur les eaux souterraines. Il n'a naturellement pas pu recevoir de réponses aujourd'hui, et c'est correct. Je pense qu'on doit aller de l'avant. Cependant, en ce qui a trait à un voyage à Fort McMurray, le député sait fort bien, depuis le nombre d'années qu'il est ici et compte tenu du contrôle qui existe au Parti conservateur, qu'on doit d'abord en discuter avec les leaders auparavant.
    Il est possible d'obtenir les informations. C'est le sens de la motion qui nous a été présentée. Donc, je ne suis pas favorable à un voyage à Fort McMurray et j'appuierai le sens de la motion qui nous est présentée.

[Traduction]

    Monsieur Jean.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    À première vue, je dirais qu'il s'agit d'une proposition très intéressante. En ma qualité de député représentant Fort McMurray et 25 p. 100 du Nord de l'Alberta, j'aimerais beaucoup que vous veniez tous dans ma région. En fait, voilà bien cinq ou six fois que j'invite les membres du comité.
    Malheureusement, il vous sera bien sûr impossible de trouver une chambre d'hôtel; il faudra que vous fassiez du camping dans ma cour. Il est donc peut-être préférable d'y renoncer. C'est un peu frisquet — moins 42, ce matin.
    Je m'appuie sur mes 40 années passées à Fort McMurray pour vous dire que nous avons besoin d'un point de vue plus équilibré. J'ai commencé à m'intéresser à la question de l'eau du lac Athabaska il y a déjà deux ans, alors que personne d'autre ne se préoccupait de ce problème.
    J'aimerais souligner quelques points qui ne devraient pas manquer d'intéresser tous les membres du comité. Sur la rive est du lac Athabaska, le plus grand de l'Alberta — même si seulement le tiers de ses eaux sont dans la province — on trouve une mine d'uranium qui existe depuis les années 1940 ou 1950 et qui, selon moi, libère de l'uranium depuis des décennies et des décennies. Je me suis rendu sur place à trois ou quatre reprises.
    En outre, des sables bitumineux s'infiltrent dans les eaux de la rivière Athabaska depuis des milliers, voire des dizaines ou des centaines de milliers d'années. Comme vous êtes nombreux à le savoir, ils se situent à la surface et sur les bords même de la rivière et vous pouvez les voir s'y infiltrer en été, lorsque le mercure dépasse les 30 degrés.
    Voilà donc des facteurs à prendre en considération.
(1725)
    Pourriez-vous vraiment être plus bref? Nous allons bientôt entendre l'appel de la sonnerie.
    Tout à fait, monsieur le président. J'essaie d'être bref.
    Pour terminer, j'aimerais proposer quelques témoins. Je serais en faveur de la motion proposée si nous adoptions une approche différente — ou la même approche, mais avec simplement quelques témoins de plus. J'aimerais voir des gens de Santé Canada, si ce n'est du ministère de la Santé de l'Alberta; je souhaiterais que nous recevions quelques représentants de l'industrie. Vous seriez étonnés de constater à quel point chacun des aspects de la question est étudié. Si ces gens étaient inclus dans la liste des témoins, je pense que vous pourriez trouver une oreille plus favorable de ce côté-ci.
    Pour que tout soit bien clair, nous discutons actuellement d'un amendement concernant un voyage à... Nous ne parlons pas de la motion. Bien évidemment, vous pouvez proposer des ajouts à la liste de témoins, entre autres, mais traitons d'abord de cet amendement en faveur d'un déplacement à Fort McMurray.
    M. Watson et M. Scarpaleggia, après quoi nous passerons au vote.
    Merci, monsieur le président.
    Je pense qu'une visite dans le Nord de l'Alberta serait effectivement bénéfique.
    Vous parlez de témoins additionnels. Si je comprends bien le libellé actuel de la motion, la liste des témoins convoqués est établie de façon très exclusive. Le voyage dans le Nord de l'Alberta pourrait nous donner l'occasion de parler à des gens ne figurant pas sur cette liste. La motion proposée vise une liste limitée de témoins. Elle ne prévoit pas d'ajouts.
    Nous reviendrons plus tard à la motion. N'ouvrons pas...
    Je voulais seulement dire que le voyage nous donnerait la possibilité de parler à des gens qui ont été exclus de la liste.
    Ce n'est pas le moment d'ouvrir cette boîte de Pandore. Nous discutons uniquement de cet amendement.
    Monsieur Scarpaleggia.
    J'aimerais qu'on mette cet amendement aux voix, après quoi je parlerai de ma motion.
    Comme chacun le sait, cet amendement propose que le comité organise un voyage dans le Nord de l'Alberta pour visiter les endroits où il y a des sables bitumineux avant la fin de la présente session. On parle donc du mois de juin, alors ce ne serait pas nécessairement dans la cour de M. Jean, mais une fois le printemps venu. C'est ce qui est proposé.
    (L'amendement est rejeté.)
    Nous revenons donc maintenant à la motion de départ.
    Nous allons proposé un amendement.
    Selon la modification suggérée par M. McGuinty, je crois, on ajouterait quelques témoins à la liste plutôt que de faire un voyage, de manière à en arriver à une liste mieux équilibrée, ce qui est davantage conforme, fort heureusement, à nos façons habituelles de procéder. M. Jean a suggéré des représentants de l'industrie — et je crois que c'est une bonne idée — des secteurs pétrolier et gazier, ainsi que des gens du milieu de la santé. Il s'agirait d'un amendement favorable. Est-ce qu'on serait prêt à l'accepter?
    En vue d'ajouter des témoins supplémentaires...
    Si je puis me permettre de suggérer un libellé, il s'agirait d'ajouter à la liste actuelle des témoins supplémentaires approuvés par le comité directeur. En l'absence d'une telle approbation, on reviendrait au comité principal...
    Quoi qu'il en soit, on nous retournera la liste des témoins pour que nous puissions l'approuver.
    Êtes-vous d'accord?
    J'aimerais simplement tirer les choses au clair. Cela n'est pas aussi partial qu'on pourrait le penser. Nous convoquons des représentants de RNCan — M. Randy Mikula n'est certainement pas un détracteur des sables bitumineux — et du gouvernement albertain.
    J'aimerais que nous mettions de côté toute partisanerie. Bien sûr, nous pouvons inviter un représentant de l'industrie des sables bitumineux. Toutefois, il ne faut pas exagérer et faire comparaître une multitude de gens qui nous feraient perdre de vue l'objet du débat, qui est de...
    Je suis heureux qu'on parle d'impartialité à propos d'une question comme celle-ci... J'aime tous les mots dans ce sens. À mon avis, si nous adoptons ce sous-amendement, si le comité l'accepte, cela ajoutera... Nous pouvons nous entendre sur cette liste, comme nous l'avons fait avec le projet de loi C-377, plutôt que d'en discuter ad nauseam.
    Monsieur le président, si je puis me permettre, il faudrait s'assurer d'inclure Pêches et Océans Canada.
    Nous parlerons également des récifs coralliens.
    Monsieur le président, je pensais que les compagnies pétrolières et gazières, de même que Santé Canada, seraient représentées dans ce dossier.
    Pas les compagnies, mais peut-être un représentant.
(1730)
    Je propose que le comité de direction en discute puis propose une liste, qu'il soumettra ensuite à l'approbation du comité...
    Les députés peuvent proposer des témoins.
    Donnez-nous une liste de témoins le plus rapidement possible et nous nous pencherons là-dessus. Il nous reste encore quelques semaines.
    Monsieur Dewar.
    C'est juste une question. Est-ce que cela sera après le renvoi du projet de loi C-377...
    Lorsque le projet de loi C-377 sera terminé.
    Tous ceux en faveur de la motion?
    (La motion est adoptée [Voir le Procès-verbal].)
    C'est unanime. Merci.
    Monsieur Scarpaleggia, je ne vous ai pas laissé clore le débat, car j'ai supposé que nous en étions là.
    La séance est levée.