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SCYR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Sous-comité des enfants et jeunes à risque du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 28 octobre 2003




¹ 1520
V         Le président (M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.))
V         L'hon. Stephen Owen (secrétaire d'État (Diversification économique de l'Ouest canadien) (Affaires indiennes et du Nord canadien))

¹ 1525

¹ 1530

¹ 1535

¹ 1540
V         Le président
V         M. Andy Siggner (conseiller principal, Statistiques sur les autochtones, Statistique Canada)
V         Le président
V         M. Andy Siggner

¹ 1545
V         Le président
V         M. Andy Siggner

¹ 1550
V         Le président
V         M. Andy Siggner
V         Le président
V         M. Andy Siggner
V         Le président
V         M. Andy Siggner

¹ 1555
V         Le président

º 1600
V         M. Sébastien Gagnon (Lac-Saint-Jean—Saguenay, BQ)
V         Le président
V         L'hon. Stephen Owen
V         Le président
V         M. Sébastien Gagnon

º 1605
V         L'hon. Stephen Owen
V         Le président
V         Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD)
V         L'hon. Stephen Owen
V         Mme Joan Atkinson (sous-ministre adjoint, Secteur des programmes et des politiques socio-économiques, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien)

º 1610
V         Mme Wendy Lill
V         M. Andy Siggner
V         Mme Wendy Lill
V         M. Andy Siggner
V         Mme Wendy Lill
V         M. Andy Siggner
V         Le président
V         M. Ovid Jackson (Bruce—Grey—Owen Sound, Lib.)

º 1615
V         L'hon. Stephen Owen
V         Le président
V         M. John Finlay (Oxford, Lib.)

º 1620
V         M. Andy Siggner
V         M. John Finlay
V         Le président
V         L'hon. Stephen Owen
V         Le président
V         L'hon. Stephen Owen
V         Le président
V         L'hon. Stephen Owen

º 1625
V         Le président
V         L'hon. Stephen Owen
V         Le président
V         L'hon. Stephen Owen
V         Le président
V         M. Andy Siggner
V         Le président
V         M. Andy Siggner

º 1630
V         Le président
V         M. Ovid Jackson
V         Mme Joan Atkinson
V         Le président

º 1635
V         Mme Wendy Lill
V         Le président
V         Mme Wendy Lill
V         Le président










CANADA

Sous-comité des enfants et jeunes à risque du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 020 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 28 octobre 2003

[Enregistrement électronique]

¹  +(1520)  

[Traduction]

+

    Le président (M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.)): La séance est ouverte.

    Vous me permettrez de saluer le retour de Wendy Lill, qui a joué un rôle si important au sein de notre comité. Nous sommes heureux de vous voir parmi nous.

    Voici comment la séance se déroulera. Monsieur le ministre, nous sommes heureux de vous accueillir. Nous savons que vous devrez partir avant 16 h 30. Nous entendrons donc la déclaration préliminaire du ministre, puis celle du représentant de Statistique Canada. Ces déclarations seront relativement courtes; par la suite, nous pourrons réellement entamer la discussion générale.

    J'espère que les membres pourront rester sur place après 16 h 30. Je le leur demanderais, car nous avons plusieurs détails à régler concernant les travaux de la semaine prochaine et des semaines ultérieures. Vous n'êtes pas sans savoir que nous ignorons un peu à quoi nous en tenir. C'est pourquoi j'ai besoin de votre avis au sujet des diverses possibilités de scénario.

    Je voudrais commencer par souhaiter la bienvenue à nos témoins. M. Stephen Owen est secrétaire d'État, Diversification économique de l'Ouest canadien et Affaires indiennes et du Nord canadien. Il est accompagné de Joan Atkinson, sous-ministre adjointe, Secteur des programmes et des politiques socio-économiques. Nous accueillons également Andy Siggner qui est conseiller principal, Statistiques sur les Autochtones, Statistique Canada.

    Je souhaiterais vous rappeler que c'est la troisième séance sur les enfants autochtones. La présente porte sur ceux de 6 à 12 ans vivant dans les réserves, même si nous savons qu'il y a une certaine souplesse permettant de déborder le cadre des réserves et du groupe d'âge dont il est question.

    Nous vous souhaitons donc la bienvenue, et nous invitons le ministre à faire sa déclaration préliminaire.

+-

    L'hon. Stephen Owen (secrétaire d'État (Diversification économique de l'Ouest canadien) (Affaires indiennes et du Nord canadien)): Je vous remercie infiniment, monsieur le président ainsi que mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis très heureux de comparaître aujourd'hui.

    Malgré tous mes efforts, je dois dire franchement que je n'arrive pas à penser que la Chambre a un sous-comité plus important qui examine des questions sociales, plus particulièrement celles touchant les enfants. La présente série d'audiences sur les enfants autochtones touchent au coeur même de notre essence comme pays.

    Je songe particulièrement aux coutumes et aux traditions autochtones ainsi qu'aux exemples courageux et significatifs que la culture autochtone a transmis aux jeunes, aux vieux et, souvent, à ceux qui sont marginalisés dans notre société. Selon moi, une grande part de ce que nous continuons à apprendre comme société émane de la sagesse de cette approche. Nous pourrons certes examiner ce qui nous définit réellement comme société en nous penchant sur les questions concernant les enfants autochtones, particulièrement l'aide à l'enfance et à la famille ainsi que l'éducation.

    Naturellement, nous sommes tous au courant—et M. Siggner nous donnera plus de détails à cet égard—des difficultés auxquelles font face les collectivités autochtones, qu'il s'agisse des résultats scolaires inférieurs à ceux de la population en général ou des autres indicateurs de désespoir, si je peux m'exprimer ainsi. Nous en avons beaucoup entendu parler, et je crois que, comme société, nous devons accorder beaucoup d'attention à cet enjeu. Cependant, je ne suis pas certain que nous y ayons accordé toute l'attention nécessaire.

    Cependant, il y a eu également beaucoup de réalisations. En songeant aux défis à venir, nous devons, à mon avis, continuer à nous rappeler les magnifiques réalisations dans notre pays. Les résultats scolaires des Autochtones s'améliorent constamment. Le nombre d'étudiants du niveau postsecondaire avoisine 30 000, alors qu'il y a 10 ou 15 ans, il s'établissait peut-être à quelques centaines. Les collectivités autochtones accomplissent de véritables progrès. Nous comptons 101 agences autochtones d'aide à l'enfance et à la famille, et 16 autres sont en voie d'être créées. C'est un grand projet.

    En pensant à l'éducation et à la politique sociale, nous devons nous rappeler que notre gouvernement a reconnu expressément le droit à l'autonomie gouvernementale dans une politique qui a été établie en 1995, mais qui a été le fruit d'un travail de plusieurs décennies. Si nous examinons la situation des enfants et les résultats scolaires, je pense que nous comprendrons qu'ils sont indissociables de l'estime de soi qui entraîne l'indépendance, qui débouche sur l'autodétermination et l'autonomie gouvernementale, ce qui est l'objectif visé par notre gouvernement et, je pense, la population canadienne. Concentrons-nous donc sur les réalisations actuelles, et je pourrai en mentionner quelques-unes au cours de ma brève déclaration préliminaire.

    J'aimerais survoler la question de l'intérêt des enfants dans les politiques sur l'aide à l'enfance et aux familles ainsi que sur l'éducation, tout d'abord sur le plan des compétences, puis sur celui des conséquences pendant toute la durée d'une vie. Monsieur le président, vous m'excuserez d'aborder des questions ne concernant pas les enfants de 6 à 12 ans vivant dans les réserves, mais je pense que nous touchons là à une question très globale, que j'aborderai brièvement.

    Examinons la question des compétences, nous connaissons parfaitement la complexité des questions d'intérêt public dans notre pays, et je fais abstraction des problèmes constitutionnels, de la répartition des pouvoirs fédéraux et provinciaux, et des questions liées aux Métis et aux Autochtones inscrits vivant dans les réserves ou ailleurs. Nous avons aussi des relations très différentes avec les territoires et leur population. La confusion règne, mais fournir efficacement des services sociaux, de l'aide à l'enfance et à la famille ainsi que des services éducatifs nécessite que les trois ordres de gouvernement non seulement collaborent entre eux mais travaillent de concert avec les collectivités en cause, comme c'est le cas pour toute autre grande question politique. En somme, les pouvoirs légaux et la répartition constitutionnelle des pouvoirs ne peuvent pas être invoqués comme excuse pour justifier de ne pas s'attaquer exhaustivement à ces questions. Je pense que de nombreuses étapes ont été franchies sur ces deux plans.

¹  +-(1525)  

    Certes, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux responsables des affaires autochtones se réunissent tous les ans pour aborder le dossier de l'éducation avec les dirigeants nationaux des organisations politiques autochtones. L'éducation et le logement constituent les deux principales questions à l'ordre du jour d'une réunion qui se tiendra cet automne. Elles sont étroitement liées à l'objet de votre étude.

    J'ai parcouru le compte rendu d'une de votre séance au cours de laquelle ont comparu les coprésidentes du Groupe de travail national du ministre sur l'éducation, qui a présenté son rapport plus tôt cette année. Deborah Jeffrey et sa fille Amy avaient alors comparu, et j'ai été très heureux de voir comment vous l'avez accueillies. Les 27 recommandations cruciales du rapport sont mises en oeuvre—si ce dernier terme n'est pas trop fort—, c'est-à-dire que nous travaillons avec l'APN et le Conseil national indien de l'éducation à l'échelle fédérale ainsi qu'avec les gouvernements provinciaux et les organisations autochtones—bandes assujetties à un traité ou Premières nations individuelles. Ces recommandations sont prises très au sérieux.

    Ces recommandations mettent à contribution divers niveaux de compétences: c'est essentiel. Nous avons signé un protocole d'entente avec le ministre de l'Éducation de la Colombie-Britannique, le Comité directeur de l'éducation des Premières nations et le Sommet des Premières nations de Colombie-Britannique, afin de mettre en application le principe de la politique adoptée en 1972 et préconisant le contrôle de l'enseignement aux Autochtones par les Autochtones. Nous y travaillerons de concert, les gouvernements provincial et fédéral offrant aux Premières nations de la Colombie-Britannique les compétences leur permettant de créer des conseils régionaux de l'éducation et un conseil provincial. C'est très important et, à certains égards, symbolique. C'est également très concret. C'est une première étape du transfert des compétences.

    Dans les autres provinces, les Premières nations visées par le traité numéro 6 de l'Alberta ont signé un protocole d'entente avec le gouvernement fédéral sur le transfert des compétences en matière d'éducation à 19 bandes, et le ministre de l'Apprentissage de l'Alberta approuve sans réserve cette initiative. On cherche à offrir la même possibilité aux Premières nations visées par le traité numéro 8. La Fédération des nations indiennes de la Saskatchewan négocie une entente provinciale avec le fédéral. Le Centre de ressources éducationnelles des Premières nations du Manitoba cherche à obtenir une entente provinciale analogue à celle du Comité directeur de l'éducation des Premières nations de la Colombie-Britannique en matière de compétences et d'application.

    Le niveau d'application des compétences est crucial. Les intérêts doivent être suffisamment convergents pour offrir l'infrastructure, les compétences, les fonds et la capacité d'appuyer véritablement les enseignants et les écoles dans les collectivités. Qu'il s'agisse d'écoles dans les réserves ou d'écoles publiques provinciales, il faut leur procurer les moyens qui leur permettront de donner aux étudiants autochtones l'instruction dont ils ont besoin, une instruction adaptée à leur culture. L'objectif consiste également—et j'aimerais insister réellement sur l'importance de cet aspect—à faire comprendre aux étudiants la richesse de l'histoire autochtone, afin qu'ils en soient légitimement fiers, ce qui peut éliminer les stéréotypes et le sectarisme dans notre société. De toute évidence, c'est ainsi qu'il faut commencer.

    Le gouvernement fédéral, l'APN et les directeurs des services autochtones à l'enfance et à la famille négocient une entente nationale sur ces services. Comme vous le savez, ces négociations doivent porter également sur un aspect horizontal. DRHC doit jouer un rôle important, qu'il s'agisse de l'éducation de la petite enfance ou du développement social, mais aussi du perfectionnement des compétences en éducation. Naturellement, Santé Canada a également un rôle essentiel à jouer par l'intermédiaire de ses programmes d'aide préscolaire.

¹  +-(1530)  

    Il faut s'attaquer à la complexité des compétences. La situation s'est déjà produite, et je ne peux pas m'imaginer... en fait, je peux malheureusement m'imaginer que nous puissions prétexter que cette question ne relève pas de nos responsabilités. Elle nous concerne tous. Nos efforts intergouvernementaux et interministériels doivent constituer la mesure de notre succès.

    La question des répercussions permanentes est essentielle à... Nous pouvons peut-être nous en rendre compte plus facilement avec l'éducation, mais même là, je pense que nous l'oublions souvent. Des syndromes peuvent même être prévenus au stade prénatal... Un député néo-démocrate a posé une question à la Chambre aujourd'hui à propos des mises en garde sur les contenants de boissons alcoolisées au sujet du syndrome d'alcoolisme foetal. Il faut absolument nous pencher sur ce syndrome tout à fait évitable. Naître en santé constitue naturellement le point de départ permettant à chacun de jouer pleinement son rôle dans la société.

    Je le répète, les mesures prises par DRHC en matière d'aide à la petite enfance et les programmes d'aide préscolaire de Santé Canada sont importants. Ils visent la période entre la maternelle et la fin du secondaire, mais également celle des études postsecondaires.

    Les niveaux de financement sont réellement contestés. Nous savons qu'ils ne sont pas suffisants, non seulement en raison des réalités démographiques des Autochtones, et nous savons que leur âge moyen diminue, contrairement à celui de la population canadienne. Il faut aussi tenir compte des pressions exercées sur tous les établissements postsecondaires, parce qu'il est de plus en plus évident qu'il faut davantage d'instruction pour réussir dans la société d'aujourd'hui.

    Un autre aspect, que nous négligeons souvent, m'apparaît également des plus essentiels: l'importance de l'éducation des adultes. Dans nos collectivités autochtones, beaucoup d'adultes et, très malheureusement, beaucoup de personnes âgées ont dû interrompre leurs études, peut-être en raison de mauvais traitements subis dans les pensionnats ou d'autres conditions socio-économiques. Il n'en demeure pas moins qu'ils ont dû interrompre leurs études. Il est particulièrement important de leur permettre de reprendre leurs études pour qu'ils puissent obtenir une reconnaissance plus officielle de ce qui constitue à bien des égards la plus riche expérience de la vie et pouvoir se réaliser pleinement.

    Je voudrais aborder un troisième aspect, monsieur le président. Je sais que je dépasse peut-être le temps qui m'a été imparti mais, si nous examinons ces deux questions globalement, nous pouvons dire que même les meilleures écoles, les enseignants les mieux formés et les programmes d'études les plus efficaces au monde n'équivaudront à rien si les enfants ne déjeunent pas avant de venir en classe, s'ils dorment dans des logements surpeuplés ou s'ils ont une difficulté d'apprentissage causée par une invalidité ou une maladie mentale évitable. Ils ne pourront ni apprendre ni se réaliser.

    Nous devons donc envisager toutes les conditions socio-économiques. C'est pourquoi il est si important, je pense, que votre comité se penche sur les services à l'enfance et à la famille ainsi que sur l'éducation, parce que ces deux questions sont indissociables.

    Je pourrais simplement vous citer un exemple qui est, selon moi, assez touchant. Un projet pilote a été mis en oeuvre récemment dans le centre-ville est de Vancouver. Il prouve ce que j'avance dans une certaine mesure. Le projet pilote a été financé par l'intermédiaire de l'Accord de Vancouver, qui consiste en un partenariat entre les trois ordres de gouvernement en vue de se pencher sur les questions socio-économiques dans ce secteur de Vancouver. Il a permis de financer une clinique dentaire destinée aux jeunes Autochtones, démontrant le lien très étroit entre la santé dentaire—qui serait impossible sans cette clinique dentaire—et l'état général de santé, l'estime de soi et la capacité de participer activement aux activités scolaires. Par la suite, il est possible d'acquérir une confiance en soi et d'avoir une belle image de soi pour faciliter l'obtention d'un emploi. C'est une solution qui nous apparaît si évidente une fois son efficacité éprouvée, mais qui nous fait cruellement défaut à bien des égards.

¹  +-(1535)  

    Monsieur le président, je terminerai par les services à l'enfance et à la famille. J'en suis à mon premier mandat, mais l'expérience acquise au cours des dernières années m'a fait parfaitement comprendre que le dollar le plus difficile à dépenser par un gouvernement est celui qui sert à la prévention, et ce pour plusieurs raisons évidentes. Premièrement, vous n'êtes aux prises avec aucune urgence. Vous ne devez pas composer avec la nécessité qu'entraîne une urgence. De plus, il est vraiment difficile de mesurer le résultat des dépenses. Le résultat n'est pas aussi évident que lorsque survient une catastrophe. Une politique fiscale efficace et, ce qui est plus important, une politique sociale pertinente exigent avant tout que nous nous prévenions le problème d'une façon pertinente, généreuse et perspicace.

    En examinant les services à l'enfance et à la famille ainsi que la protection des enfants autochtones, je pense que nous devons nous pencher sur ces aspects... Nous le faisons et nous disposons du rapport qui contient des recommandations valables. Nous envisageons des formules de financement, mais nous devons réaffecter certains montants efficacement en faisant preuve de souplesse afin de ne pas enlever des enfants de leur foyer à moins d'une nécessité absolue.

    Nous devons nous efforcer d'agir sans tarder, mais je pense que nous devons aussi faire preuve de vigilance pour l'ensemble de notre réseau. À cet égard, nous pouvons compter sur le concours des enseignants, des professionnels de la santé ou des intervenants en services d'aide sociale à l'enfance, qui devraient chercher non seulement les ecchymoses sur les enfants, mais également les signes de stress qui conduisent à la négligence et à la violence envers les enfants.

    C'est la première ligne de défense. Sur les plans professionnel et communautaire, il faut prendre soin les uns des autres et, pour prévenir la négligence et la violence envers les enfants, il faut aussi fournir aux familles en difficulté l'aide dont elles ont besoin. Le cas échéant, nous ne serions peut-être pas tenus de sortir l'enfant de son foyer. Pourquoi ne pas sortir du milieu familial le responsable de la négligence ou de la violence si nous ne pouvons pas nous attaquer aux causes de stress dans la famille? Pouvons-vous nous sortir du foyer le responsable de la violence et non pas l'enfant? Et si nous sortons l'enfant, il serait préférable d'avoir des familles d'accueil et d'autres services de soutien, avec vérifications et formation pertinentes ainsi que ressources et supervision nécessaires, car nous sommes tous au courant des nombreuses tragédies qui sont survenues au pays en raison de lacunes dans certains de ces aspects.

    Quelles que soient les décisions rendues par les tribunaux—et elles varient considérablement—, il incombe au public et au gouvernement de s'assurer que ces ressources et ces programmes sont offerts. Je pense que c'est la direction que nous empruntons. Je crois également que la priorité que votre comité a accordée à ces questions constitue une étape très importante.

    Je vous remercie de votre attention.

¹  +-(1540)  

+-

    Le président: Je vous remercie infiniment, monsieur le ministre.

    Nous entendrons maintenant le représentant de Statistique Canada. Nous vous souhaitons la bienvenue, monsieur Siggner.

+-

    M. Andy Siggner (conseiller principal, Statistiques sur les autochtones, Statistique Canada): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

    Je suis très heureux de comparaître aujourd'hui et de vous faire part des nouvelles données qui viennent d'être tirées de notre Enquête auprès des peuples autochtones de 2001.

+-

    Le président: Je pense que les membres du comité ont un exemplaire du dossier de présentation.

+-

    M. Andy Siggner: J'aborderai également les données du dernier recensement, celui de 2001. Nous nous attarderons à plusieurs dimensions des conditions socio-économiques et de l'état de santé des enfants autochtones de 6 à 12 ans vivant dans les réserves. Nous examinerons également des données repères d'une autre de nos enquêtes portant sur tous les enfants canadiens.

    Je commencerai peut-être par les graphiques. Voici le premier. Comme le ministre Owen l'a signalé, il est bien établi que la population autochtone canadienne est très jeune, tout comme l'est celle vivant dans les réserves, par rapport à l'ensemble de la population canadienne.

    Selon le Registre des Indiens d'Affaires indiennes et du Nord Canada, il y avait environ 69 000 enfants de 6 à 12 ans dans les réserves en 2001. Un Autochtone sur cinq appartient à ce groupe d'âge dans les réserves, ce qui est une proportion assez importante. Dans l'ensemble de la population canadienne, c'est un enfant sur dix.

    Le tout figure sur le premier graphique, à la page 2. Vous pouvez constater que près de 20 p. 100 de la population autochtone a de 6 à 12 ans, comparativement à 10 p. 100 pour la population totale canadienne. La majorité de la population autochtone a moins de 25 ans. En fait, c'est plus de 50 p. 100. La situation n'est pas tout à fait la même dans la population totale canadienne, qui est beaucoup plus vieille, comme nous le savons bien.

    En passant au graphique suivant, nous devons nous rappeler que les enfants autochtones de 6 à 12 ans vivant dans les réserves ne représentent que le tiers de la population autochtone de ce groupe d'âge. C'est donc dire que les deux tiers vivent à l'extérieur des réserves. Le graphique 3 révèle cependant que les enfants autochtones de 6 à 12 ans vivant dans les réserves constituent environ 2 p. 100 de tous les enfants canadiens de ce groupe d'âge.

    Bien que ces enfants vivant dans les réserves habitent dans les diverses parties du pays, ils forment une proportion particulièrement importante des enfants au Manitoba et en Saskatchewan. Nous voyons notamment que les enfants vivant dans les réserves du Manitoba et de la Saskatchewan représentent environ 10 p. 100 de tous les enfants de ces deux provinces, ce qui constitue une proportion importante.

    Le prochain graphique offre un survol de la situation domestique des enfants autochtones. Vous vous souviendrez que nous vous avons présenté la version de 1996 de ce graphique il y a un an et demi, lorsque nous avions comparu. Nous disposons aujourd'hui des dernières données qui portent essentiellement sur tous les enfants de moins de 15 ans.

    Nous voyons notamment que les deux tiers des enfants vivent avec deux parents alors que le tiers habitent avec un seul. De plus, environ 3 p. 100 des enfants autochtones vivant dans les réserves habitent avec des personnes autres que leurs parents, en l'occurrence des grands-parents ou des personnes non apparentées. Vous pouvez constater que l'écart est assez grand par rapport aux enfants non autochtones, dont environ seulement 17 p. 100 vivent avec un parent seul.

    Les prochains graphiques contiennent certaines des dernières données de l'Enquête auprès des peuples autochtones et des données de l'Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes. Nous pouvons voir quelle est la situation de tous les enfants canadiens par rapport aux enfants autochtones vivant dans les réserves.

¹  +-(1545)  

    Le premier graphique donne la proportion d'enfants ayant déclaré avoir une excellente ou une très bonne santé. Dans l'ensemble, environ les trois quarts des enfants autochtones appartenaient à cette catégorie, comparativement à un peu plus de 80 p. 100 pour l'ensemble des enfants canadiens.

+-

    Le président: Puis-je vous demander si ce sont les enfants qui l'ont déclaré?

+-

    M. Andy Siggner: C'est effectivement le cas, mais il faut se rappeler qu'il s'agit d'enfants, ce qui signifie que, souvent, ce sont les parents qui ont fait cette déclaration, particulièrement dans le cas des très jeunes enfants.

    Nous pouvons constater que les écarts régionaux ne sont pas si importants.

    Le prochain graphique donne le nombre de maladies chroniques pour les enfants de ce groupe d'âge vivant dans les réserves, par rapport à tous les enfants canadiens. Les barres grises représentent tous les enfants canadiens et les barres bleues les enfants autochtones. Vous remarquerez l'absence de barre grise pour certaines maladies signalées dans l'enquête auprès des Autochtones. C'est parce que l'autre enquête ne collectait les données sur ce groupe d'âge particulier ou ne posait pas des questions se rapportant directement à ces maladies.

    Cependant, nous voyons notamment que l'asthme, les allergies et les problèmes de l'oreille comptent parmi les maladies les plus signalées à l'égard des enfants autochtones de 6 à 12 ans vivant dans les réserves. Essentiellement, environ 10 p. 100 de ces enfants sont atteints de ces maladies ou troubles. Il est intéressant de remarquer que les proportions sont supérieures pour tous les enfants canadiens : entre 16 et 17 p. 100 pour au moins deux des trois infections pour lesquelles nous possédons des données. Il existe certaines différences en ce qui concerne d'autres maladies, particulièrement la bronchite. Même si le pourcentage est faible, il est légèrement supérieur chez les enfants autochtones. Il y a des conclusions intéressantes.

    Le prochain graphique nous montre la fréquence de consommation des déjeuners, qui est une mesure importante de la nutrition. Il nous indique qu'environ 77 p. 100 des enfants de 6 à 12 ans vivant dans les réserves déclarent déjeuner tous les matins, ce qui est un assez bon résultat. Environ 18 p. 100 déjeuneraient entre trois et six jours par semaine. Environ 5 p. 100 ne déjeunent que deux fois ou moins par semaine. Approximativement un enfant sur vingt signale ne pas déjeuner du tout ou pas très souvent pendant une semaine.

¹  +-(1550)  

+-

    Le président: Existe-t-il des chiffres comparatifs pour les enfants de ce groupe d'âge dans la population générale?

+-

    M. Andy Siggner: Nous n'avons pas de chiffres comparatifs à cet égard. L'ELNEJ portait sur les enfants de 12 ans et plus. Nous manquons donc de données pour ce groupe d'âge particulier.

    Le prochain graphique montre les enfants ayant vécu une situation qui leur a causé du souci ou de la peine. Cette question a été posée dans les deux enquêtes. Nous pouvons constater qu'environ 37 p. 100 des enfants autochtones ont signalé avoir vécu une telle situation, par rapport à approximativement le tiers pour tous les enfants canadiens. Les résultats semblent varier un peu d'une région à l'autre. La Colombie-Britannique et les provinces atlantiques afficheraient des proportions légèrement supérieures que les autres provinces. Celles de l'Ontario sont un peu inférieures. Nous n'avons pas pu examiner réellement les causes expliquant ces résultats, mais il est intéressant d'avoir de tels écarts.

    Nous avons demandé aux enfants ayant vécu une situation qui leur a causé du souci ou de la peine quelle en était la cause, ce que nous montre le prochain graphique. Manifestement, un décès dans la famille constitue la raison la plus fréquemment évoquée par les enfants autochtones vivant dans les réserves. C'est le cas de près du tiers des enfants ayant déclaré un souci.

    Les autres principales causes sont liées aux parents, notamment à un divorce ou à une séparation. La proportion est de 22 p. 100 pour les enfants autochtones, comparativement à 15 p. 100 pour tous les enfants canadiens. Pour les conflits entre les parents, c'est 11 p. 100 contre 3 p. 100. Pour l'autre genre de séparation d'avec les parents, c'est 9 p. 100 comparativement à 4 p. 100. Il y a donc des résultats intéressants.

    Je me dois de vous signaler que ces chiffres ne portent pas sur tous les enfants autochtones vivant dans les réserves, mais uniquement sur ceux ayant vécu une telle situation. Vous devez vous rappeler que près de 40 p. 100 ont déclaré avoir vécu une situation qui leur a causé du souci.

+-

    Le président: J'aurais une question. J'ai remarqué que le graphique précédent ne semblait donner aucun chiffre pour le Québec. Est-ce simplement parce que la population y est rare?

+-

    M. Andy Siggner: C'est une observation pertinente.

+-

    Le président: Elle émane en fait de mon collègue. Je dois rendre à César ce qui appartient à César.

+-

    M. Andy Siggner: Nous n'avons pas indiqué les données sur le Québec parce que, à l'exception des collectivités cries, les autres Premières nations du Québec ont refusé de répondre à l'Enquête auprès des peuples autochtones. Elles ne voulaient pas participé à cette enquête facultative. Nous n'aurions pas trouvé pertinent de montrer ces données puisqu'elles ne concernaient qu'un nombre très restreint de réserves qui avaient répondu à l'enquête au Québec.

    Le prochain graphique nous permet de commencer, je l'espère, à faire état de meilleurs résultats. Il porte sur le nombre d'enfants ayant suivi un programme de développement de la petite enfance. Comme vous pouvez le constater, près de 60 p. 100 des enfants de 6 à 12 ans vivant dans les réserves ont déclaré avoir suivi—ou ce sont leurs parents qui l'ont déclaré—un programme de développement de la petite enfance. Les résultats varient d'une région à l'autre. La Colombie-Britannique semble obtenir les meilleurs résultats. Elle est suivie des provinces atlantiques et des autres provinces.

    Il y a d'autres bonnes nouvelles. Examinons le graphique suivant. Il montre que les deux tiers des enfants de 6 à 12 ans vivant dans les réserves déclarent lire chaque jour ou quelques fois par semaine, ce qui se compare avantageusement aux statistiques pour l'ensemble des enfants canadiens. Vous pouvez constater que les écarts sont encore inférieures pour ceux qui déclarent lire moins souvent. Il s'agit là de bonnes nouvelles.

    Par contre, nous avons demandé le nombre d'heures d'écoute quotidienne de la télévision. Nous constatons que 42 p. 100 des enfants autochtones signalent écouter la télévision de trois à quatre heures par jour, par rapport à 22 p. 100 pour tous les enfants canadiens. Le graphique indique également que 10 p. 100 des enfants autochtones écoutent la télévision cinq heures et plus par jour, comparativement à 6 p. 100 pour tous les enfants canadiens. Il semble que les enfants autochtones vivant dans les réserves écoutent beaucoup la télévision.

    Le graphique suivant porte sur le nombre d'heures consacrées aux jeux vidéo ou électroniques. Encore une fois, nous ne possédons pas de données pour l'ensemble des enfants canadiens. Environ 56 p. 100 des enfants autochtones vivant dans les réserves déclarent s'y adonner de une à deux heures par jour.

    Je devrais vous signaler que l'Enquête ne demandait pas aux enfants où ils écoutaient la télévision. Ils l'écoutent peut-être à l'école, dans le cadre de leur apprentissage, mais nous n'avons pas examiné cet aspect en détails dans l'Enquête.

    Le prochain graphique indique le nombre d'enfants de 6 à 12 ans qui ont doublé une année scolaire. Je pense que vous pouvez constater des écarts assez importants entre les résultats pour tous les enfants canadiens et ceux pour les enfants autochtones vivant dans les réserves. Essentiellement, un enfant autochtone sur cinq déclarait avoir doublé une année scolaire, comparé à 4 p. 100 pour l'ensemble des enfants canadiens. Les résultats varient d'une région à l'autre. Encore une fois, les résultats semblent un peu meilleurs en Colombie-Britannique. Je dois admettre cependant que nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour réellement examiner ces différences, mais celles-ci sont manifestes.

    Relativement au commentaire formulé par le ministre Owen sur les résultats scolaires et les conditions dans lesquelles vivent ces enfants, notamment dans des logements surpeuplés, nous constatons un pourcentage très élevé de logements surpeuplés dans lesquels habitent des enfants de ce groupe d'âge. Dans les réserves, c'est plus de un logement sur quatre, comparativement à un sur vingt dans l'ensemble du canada.

¹  +-(1555)  

    Voilà qui conclut notre bref aperçu de la situation des enfants autochtones de 6 à 12 ans vivant dans une réserve. Je suis prêt à répondre à toutes vos questions.

    Merci beaucoup.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Nous sommes heureux de vous accueillir de nouveau; nous sommes maintenant mieux au fait des conditions de vie de ces enfants. Je crois qu'il est primordial que nous puissions suivre les progrès réalisés.

    Il serait intéressant de comparer les tendances qui se dessinent au fil des ans. Nous pourrions nous pencher sur la question afin de cibler les facteurs déterminants, qu'ils soient démographiques ou autres, et établir un parallèle avec la situation qui prévalait lors de votre dernière comparution.

    Nous disposons d'environ 35  minutes. Je sais que le ministre ne peut pas rester.

    Je veux également souligner aux membres du comité qui sont arrivés en retard que nous aimerions prendre quelques instants à la fin de la séance pour discuter de la suite des événements pour nous. Ce sera très court; nous devrions en avoir terminé bien avant cinq heures.

    Monsieur Gagnon, allez-y.

º  +-(1600)  

[Français]

+-

    M. Sébastien Gagnon (Lac-Saint-Jean—Saguenay, BQ): Je vous remercie d'être présents aujourd'hui; c'est un plaisir de vous voir. Je vais profiter de l'occasion pour revenir aux propos des panélistes que nous avons entendus pendant la durée du comité.

    Votre présence me porte à croire qu'une certaine sensibilisation s'est développée, et c'est apprécié. Il est souvent difficile, à l'intérieur des structures gouvernementales existantes, de prendre contact avec une certaine réalité. Ma question est reliée à cela.

    En vertu des politiques gouvernementales, on se trouve bien souvent en présence de programmes qui sont appliqués uniformément à travers le pays. Or, les divers groupes communautaires rencontrés ont mentionné que d'un groupe communautaire à l'autre, les besoins et les préoccupations variaient. Cela fait appel à une certaine flexibilité.

    Pour ma part, j'ai déjà géré un fonds de 240 millions de dollars qui s'adressait à la jeunesse québécoise. On s'était donné le défi de décloisonner ce fonds et de sortir des sentiers battus pour saisir de façon tangible les problèmes que pouvaient connaître les jeunes. Ce que nous ont dit les panélistes pourrait nous sensibiliser à leurs revendications et à leur réalité.

    Il y a souvent beaucoup de besoins mais peu de ressources disponibles. Pourtant, le message qu'ils ont transmis est clair: il y a des problèmes et il faut agir. Je reviens à la question de l'efficacité. Interagir signifierait ici écouter ces gens et comprendre que d'une réserve à l'autre, les problèmes peuvent varier. Il faudrait alors faire preuve de flexibilité, de façon à ce que les investissements réalisés soient dépensés adéquatement et de manière efficace.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur le ministre.

+-

    L'hon. Stephen Owen: Merci, monsieur Gagnon.

    Vous soulevez une question très importante.

    Je vais d'abord traiter brièvement de la situation en éducation. Il faut agir du sommet vers la base et vice versa. L'entente a été conclue avec les groupes tribaux, les regroupements provinciaux des Premières nations, l'Assemblée des Premières nations à l'échelle nationale et les gouvernements provinciaux. Nous sommes conscients qu'il faut régler les questions de compétence, d'infrastructure et de renforcement des capacités de manière assez globale pour nous assurer les ressources suffisantes afin d'appuyer ces écoles qui pourraient sans cela se retrouver isolées au sein de leur communauté autochtone. Par ailleurs, pour offrir des services appropriés, pertinents et efficaces, il faut aussi intervenir à partir de la base en s'intéressant non seulement à la formation des enseignants, mais aussi à leur recrutement et à leur maintien en poste tout en veillant, ce qui est peut-être encore plus important, à assurer un soutien continu au perfectionnement professionnel des enseignants en situation d'isolement.

    Il faut aussi considérer la conception des programmes d'études. J'ai été particulièrement impressionné par le lien étroit que l'on peut établir entre les résultats scolaires et le contenu culturel et linguistique du programme, lequel est presque inévitablement établi à l'échelon communautaire. Il faut intervenir aux deux extrémités du spectre, mais il ne fait aucun doute que la pertinence locale et l'initiative communautaire sont essentielles pour inciter les parents et les aînés de la communauté à contribuer au processus d'éducation.

    Pour ce qui est des services à l'enfance et à la famille, je sais que les mécanismes de financement nous posent de véritables problèmes. Les formules utilisées font d'ailleurs l'objet d'un examen. La principale lacune, comme je l'ai mentionné dans mon mot d'ouverture, réside dans l'incapacité de cerner les problèmes et les risques suffisamment tôt pour offrir le soutien nécessaire aux familles et aux enfants, plutôt que de simplement attendre qu'il y ait eu négligence ou abus pour se retrouver devant l'obligation de retirer l'enfant du foyer. On discute actuellement de modalités de financement global qui pourraient offrir une plus grande souplesse aux fins de l'adaptation aux circonstances locales.

+-

    Le président: Monsieur Gagnon.

[Français]

+-

    M. Sébastien Gagnon: Un phénomène intéressant se produit lorsqu'un ministère doit aller sur le terrain pour choisir les promoteurs des projets. Lors des dernières audiences, on a observé certains conflits ou désaccords entre les conseils de bande et les centres d'amitié, par exemple. J'ai suggéré, dans le dernier rapport, qu'on soit sensible à ce phénomène et qu'on se demande qui serait le plus apte à diriger un programme donné sur le territoire. Je suis sûr que dans certains cas, ce serait le conseil de bande, alors que dans d'autres, ce seraient les centres d'amitié. À cet égard, je crois que nous ne devrions pas adopter une politique rigide.

    Je voulais aussi attirer votre attention sur l'éducation. La semaine dernière, une professeure nous a mentionné que les programmes d'éducation devaient tenir compte d'une certaine différence. Il s'agit de communautés à part entière qui ont une histoire au plan culturel.

    Étant originaire du Québec, je défends ce caractère distinctif. Je suis donc du même avis que cette personne. Ces gens ont une culture et une histoire qui doivent se perpétuer dans le temps. On tente toujours de définir la nation canadienne comme étant composée de Canadiens mais aussi d'autochtones, de Québécois et de Québécoises.

º  +-(1605)  

[Traduction]

+-

    L'hon. Stephen Owen: Merci.

    Je ne pourrais pas exprimer les besoins existants mieux que vous venez de le faire. Je suis d'accord avec vous : nous devons être suffisamment flexibles pour pouvoir nous adapter aux approches d'initiative communautaire et répondre aux besoins cernés par la collectivité.

+-

    Le président: Madame Lill, avez-vous des questions?

+-

    Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Merci beaucoup pour vos témoignages.

    J'aimerais poser quelques questions au ministre, puis une à M. Siggner.

    Les statistiques m'intéressent beaucoup. Elles nous aident à déterminer quel genre de politiques nous pouvons mettre en place et, bien évidemment, elles nous permettent d'étayer nos arguments.

    Pouvez-vous nous dire dans quelle mesure le nombre d'enseignants autochtones a augmenté dans les réserves? Je sais qu'il s'agit d'un objectif prioritaire, et j'aimerais savoir s'il est possible d'avoir un tableau indiquant les progrès réalisés. J'apprécierais beaucoup avoir des données à ce sujet.

    Je m'intéresse aussi à l'alphabétisation; un important événement a d'ailleurs été tenu ici la semaine dernière. On nous dit encore que plus de 40 p. 100 des Canadiens ont des problèmes avec la lecture, l'écriture et le calcul. Cette proportion est absolument ahurissante. C'est le gouvernement fédéral qui est responsable de l'alphabétisation, je crois; je vous pose la question.

    Je voudrais savoir quels programmes d'alphabétisation sont offerts dans les réserves. Combien d'argent est investi dans ces programmes et quels en sont les résultats? Il est important pour nous de mieux comprendre la situation si nous voulons agir pour améliorer les résultats.

+-

    L'hon. Stephen Owen: Merci.

    Ce sont des questions qui m'intéressent beaucoup également; je vais donc demander à Joan Atkinson d'éclairer notre lanterne.

+-

    Mme Joan Atkinson (sous-ministre adjoint, Secteur des programmes et des politiques socio-économiques, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Merci beaucoup.

    Je crois que la question de l'alphabétisation illustre bien les propos du ministre Owen concernant les dossiers dont la responsabilité est partagée par plusieurs ministères fédéraux dans le cadre dans leurs mandats respectifs. Au ministère des Affaires indiennes et du Nord, nous sommes responsables des enfants autochtones de la maternelle jusqu'à la fin du secondaire ainsi que de ceux qui vivent dans une réserve. Notre mandat prévoit également des responsabilités en matière d'éducation postsecondaire, surtout pour les étudiants autochtones qui fréquentent des établissements à ce niveau.

    Je suis tout à fait d'accord : l'alphabétisation et la formation des adultes, dont le ministre Owen nous a parlé, doivent faire partie intégrante d'un continuum d'apprentissage débutant à la naissance pour se poursuivre à l'âge adulte. C'est surtout Développement des ressources humaines Canada (DRHC), notamment dans le cadre des Ententes sur le développement des ressources humaines autochtones (EDRHA), qui est responsable de la formation des adultes, de l'alphabétisation et de la formation préparatoire à l'emploi, laquelle est également reliée à l'alphabétisation.

    Ceci dit, étant donné que nous devons travailler de concert avec les autres ministères fédéraux et adopter une approche globale, nous collaborons avec DRHC pour essayer d'offrir un véritable continuum de programmes en évitant de fonctionner en vase clos. Notre mandat en matière de services sociaux reflète bien cette approche. Le cabinet vient de nous accorder les pouvoirs stratégiques nécessaires pour mettre en oeuvre ce que nous appelons des mesures actives à l'intention des bénéficiaires des services sociaux vivant dans les réserves. Nous pouvons donc maintenant y offrir certains types de formation préparatoire à l'emploi, y compris l'éducation des adultes, l'apprentissage de l'autonomie fonctionnelle et certains programmes d'alphabétisation, en partenariat avec DRHC. Nous essayons ainsi de prendre les moyens nécessaires pour que tous les apprenants adultes aient accès à un ensemble équivalent de programmes.

º  +-(1610)  

+-

    Mme Wendy Lill: C'est très bien.

    Pour en revenir aux statistiques, je me demandais s'il était possible d'obtenir un genre de tableau illustrant les investissements que nous avons consentis pour les programmes d'alphabétisation dans les réserves. Je comprends que ce soit difficile, mais j'aimerais savoir si la situation s'est améliorée. En offrons-nous davantage?

    J'entends toujours parler de ces programmes pilotes qui produisent des résultats incroyables, mais qui restent sans suite faute de fonds suffisants. Existe-t-il des sources de financement durable pouvant être utilisées pour l'alphabétisation?

    Monsieur Siggner, vos statistiques sont intéressantes mais, encore là, j'aimerais en savoir plus. Je voudrais qu'il y ait des données sur la condition physique des enfants. Je suppose qu'il n'y avait pas de question à ce sujet pour déterminer s'ils estiment être en bonne forme et s'ils le sont vraiment. Ou peut-être ne le savez-vous tout simplement pas...

+-

    M. Andy Siggner: En fait, je crois qu'il y a des questions concernant l'activité physique dans la partie de l'enquête auprès des peuples autochtones qui traite des enfants. Je n'en ai tout simplement pas parlé aujourd'hui.

+-

    Mme Wendy Lill: C'est merveilleux. J'aimerais bien voir ces données.

    Il y a aussi la question de l'invalidité dont vous avez traité, mais pour laquelle je n'ai pas eu de détails. Vous avez parlé des maladies chroniques. Si des recherches sur l'invalidité ont été réalisées en parallèle avec l'étude portant sur la population en général, nous serions également intéressés à obtenir ces données pour faire avancer le dossier.

+-

    M. Andy Siggner: L'enquête comporte quelques questions d'ordre général sur les activités quotidiennes. Notre enquête n'était pas aussi approfondie que l'étude portant sur l'ensemble de la population, mais nous pouvons dresser un tableau global de la situation pour les enfants autochtones. Je crois même que dans l'un des graphiques que nous vous avons remis, il est question des difficultés d'apprentissage comme problème chronique pour les enfants.

+-

    Mme Wendy Lill: À la page 6, vous parlez des maladies chroniques.

+-

    M. Andy Siggner: Il y a donc quelques endroits où vous pouvez trouver des données.

    J'aimerais seulement revenir à votre observation de tout à l'heure concernant les enseignants autochtones. Je n'ai pas les chiffres en main, mais il est possible de connaître le nombre d'enseignants qui sont autochtones, et même de déterminer combien d'entre eux vivent dans une réserve. Nous pourrions probablement établir une comparaison au fil des ans, ce qui vous donnerait au moins un aperçu de l'ampleur de la croissance depuis le recensement de 1996, par exemple.

    Je peux toutefois vous dire qu'on remarque, comme le ministre Owen l'a mentionné, une forte croissance du nombre d'Autochtones qui terminent des études postsecondaires dans l'ensemble des domaines. Il ne fait aucun doute qu'il s'ensuit une augmentation du nombre d'Autochtones dans le secteur de l'enseignement. Je n'ai pas les chiffres exacts, mais je suis à peu près sûr que cette tendance se confirme.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Jackson.

+-

    M. Ovid Jackson (Bruce—Grey—Owen Sound, Lib.): Ma question s'inscrit probablement dans la même veine que celles de Mme Lill. La population canadienne compte son lot d'analphabètes, et je suppose qu'il y en a dans toutes les sphères de la société. Dans le cas des Autochtones, je crois qu'il faut les inciter à agir sans tarder pour faire changer les choses. J'aimerais savoir si des mesures sont prises pour leur insuffler la motivation nécessaire et leur donner l'estime d'eux-mêmes dont ils ont besoin pour passer rapidement à l'action.

    Selon moi, c'est un facteur essentiel. Il est primordial que tous ces jeunes qui vivent en Saskatchewan, au Manitoba ou ailleurs prennent conscience de toute la richesse de leur culture. Il est important de leur transmettre toutes ces merveilleuses histoires et tout ce patrimoine culturel de manière à ce qu'ils se rendent bien compte qu'ils n'ont rien à envier à personne. C'est dans ce bassin de connaissances qu'ils pourront puiser la motivation nécessaire pour se prendre en main.

    Mon analyse de la situation est peut-être différente. Je crois simplement que notre pays compte un grand nombre de citoyens qui, pour une raison ou une autre, ne contribuent pas à la société. Les collectivités autochtones en particulier disposent d'une grande quantité de ressources, tant naturelles qu'humaines, qui se concrétisent notamment dans des oeuvres d'art et des apports culturels que nous connaissons bien. Selon moi, il faut absolument mobiliser les Autochtones et leur faire comprendre qu'ils sont des citoyens à part entière. Ils peuvent se comparer à n'importe qui dans à peu près tous les domaines; il suffit de les motiver suffisamment pour qu'ils prennent confiance en leurs moyens.

    Bien évidemment, il faut offrir aux familles l'encadrement et les mesures de soutien nécessaires pour qu'elles adoptent des comportements sains, même avant la naissance, de manière à éviter le syndrome d'alcoolisation foetale et les autres problèmes du genre.

    Pour le peu que j'ai pu constater, les consultants arrivent souvent du sud pour s'installer dans une collectivité, produire un rapport formidable, puis s'en aller. Il faut que cela cesse. Rien de concret n'est fait. Ces consultants profitent seulement des fonds disponibles, sans rien changer à la situation.

    J'aimerais voir les Autochtones améliorer leur sort le plus rapidement possible. Je sais qu'ils ont beaucoup de potentiel et je crois qu'ils devraient mener une vie meilleure dans des conditions plus favorables.

º  +-(1615)  

+-

    L'hon. Stephen Owen: Merci beaucoup pour vos observations.

    Voici quelques commentaires qui vont dans le même sens. Il existe quelques programmes qui sont permanents, mais qui sont assimilés à des projets pilote uniquement parce qu'ils ont été repris par suffisamment d'intervenants. En Colombie-Britannique, le First Nations Education Steering Committee, qui est coprésidé par Deborah Jeffrey et dont je vous ai déjà parlé, organise des clubs pour les écoliers dans les réserves de toute la province. Ces clubs se réunissent périodiquement, ont des activités communes et s'encouragent mutuellement. J'y vois un important facteur de motivation pour ces enfants qui prennent conscience que, malgré leur isolement, ils peuvent profiter d'un programme local très particulier et d'une éducation fondée sur un important contenu culturel.

    Il y a aussi un projet pilote en Alberta qui bénéficie du financement offert par Diversification économique de l'Ouest. Il s'agit d'un programme de formation d'apprentis administré par des mentors autochtones en collaboration avec différentes entreprises du secteur des ressources dans trois localités. On se rend directement dans les écoles pour parler aux jeunes—pas seulement ceux qui terminent leur secondaire, mais ceux qui le débutent également—de l'importance d'obtenir un diplôme ainsi que des différentes possibilités d'apprentissage qui s'offrent à eux auprès des entreprises participantes.

    Par ailleurs, la Fédération des nations indiennes de la Saskatchewan offre un programme de «Super samedis» qui permet aux enfants autochtones de toute la province de se réunir pour mettre en commun leurs expériences, participer à des activités stimulantes et prendre ainsi confiance en leurs moyens. En Ontario, un programme estival de sciences est offert aux étudiants autochtones à Thunder Bay. Pendant deux semaines, on réunit des jeunes des différentes régions de la province en vue de les sensibiliser à l'importance des mathématiques et des sciences pour conserver une place de choix au sein de la société.

    Vous avez donc tout à fait raison de parler de motivation. C'est parce que nous en sommes conscients que nous avons tenté de multiplier les possibilités en ce sens.

+-

    Le président: Monsieur  Finlay.

+-

    M. John Finlay (Oxford, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je vous prie de m'excuser de n'avoir pu être présent pour votre exposé qui a sans doute été fort intéressant.

    Monsieur Siggner, j'ai des questions concernant les pages 11, 12 et 13 de votre présentation. Selon le graphique de la page 11, les enfants autochtones liraient aussi souvent que les autres. Je crois que c'est une très bonne chose. Lorsqu'on passe à la page 12, la situation apparaît encore assez bonne pour ce qui est de l'écoute de la télé. Je ne comprends pas pourquoi l'écart est si grand entre les résultats pour une ou deux heures d'écoute et ceux pour trois ou quatre heures. J'aurais cru que les enfants autochtones passaient au total un peu moins d'heures devant la télé que les autres, mais il semble que ce ne soit pas le cas.

    Puis, à la page 13, on présente seulement des données sur les enfants autochtones, sans aucune base de comparaison. Peut-être pouvez-vous m'expliquer pourquoi car je trouve qu'il serait bon de pouvoir comparer.

º  +-(1620)  

+-

    M. Andy Siggner: Comme je l'ai mentionné, les données comparatives que nous avons utilisées pour l'ensemble des enfants canadiens provenaient de l'Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes. Pour ce groupe d'âge, l'enquête ne devait pas comporter de questions portant sur les jeux vidéos, ou alors les groupes d'âge utilisés ne permettaient pas d'établir de comparaison. C'est probablement pour cela que ces données sont absentes de notre présentation.

+-

    M. John Finlay: Merci beaucoup.

+-

    Le président: Monsieur le ministre.

+-

    L'hon. Stephen Owen: Je voulais seulement préciser que je ne dois pas partir à 4 h 30, mais bien être rendu à l'autre endroit à 4 h 30—et ce n'est pas le Sénat.

+-

    Le président: Pourquoi ne pas profiter de l'occasion, si nous pouvons nous permettre de garder M. Siggner avec nous pour lui soutirer encore de l'information—on dirait un véritable interrogatoire de police—,pour inviter le ministre à se pencher sur...?

    Je vais formuler cela sous forme de question. Il me semble que l'on perde de vue, d'une certaine façon, dans toutes ces statistiques—bien qu'il en ressorte quand même des constatations assez frappantes comme nous pourrons en discuter encore avec M. Siggner—les facteurs qui sont à l'origine de cette morosité. Par exemple, pourquoi les gens regardent-ils plus la télévision? On pourrait conclure qu'il n'y a pas grand chose d'autre à faire, ce qui laisse une impression générale d'ennui attribuable à un manque de possibilités.

    Vous avez parlé de deux secteurs précis pour lesquels des rapports viennent d'être produits : l'éducation et la protection de l'enfance. Il faut penser à tous les besoins des enfants de ce groupe d'âge dont le développement passe en grande partie par l'établissement de liens avec des personnes autres que leurs parents—d'autres adultes auxquels ils peuvent se fier—et la nécessité de prendre confiance en soi au moment d'aborder tous les défis inhérents à l'adolescence. Les programmes de loisirs en sont une illustration.

    Je me demandais si vous pouviez simplement aller au-delà des concepts de base pour nous présenter le genre de vision que vous pourriez avoir si vous vous permettiez de rêver en couleur; une formule qui répondrait à tous les besoins en développement des enfants de six à douze ans, mais qui tiendrait également compte des spécificités culturelles et des caractéristiques particulières aux différentes collectivités autochtones. Avant que nous vous laissions partir, peut-être pourriez-vous mettre de côté un instant votre réserve ministérielle pour nous transporter dans un monde meilleur.

+-

    L'hon. Stephen Owen: C'est gentil d'avoir attendu jusqu'à deux minutes avant mon départ pour me poser une question demandant une réponse si succincte.

+-

    Le président: Je vous laisse le champ libre. Vous savez à quel moment vous devrez partir.

+-

    L'hon. Stephen Owen: Sans aucune réserve, je peux vous dire que les enfants de six à douze ans, mais aussi ceux qui sont beaucoup plus grands, doivent pouvoir compter sur deux caractéristiques essentielles, dans n'importe quelle situation. Ils doivent posséder une connaissance suffisante du monde qui les entoure pour pouvoir interagir avec lui d'une manière significative et toujours plus éclairée et efficace. Ils doivent également être profondément enracinés, non seulement au sein de leur cellule familiale, avec toute la gamme des enjeux socioéconomiques qui en découlent, mais également au coeur même de leur patrimoine culturel, sans se limiter au bagage général de notre pays, mais en tenant compte également de la grande diversité qui nous caractérise.

    Certaines des statistiques que nous vous avons présentées pourraient trouver leur équivalent dans l'ensemble des collectivités éloignées du Canada et ne reflètent donc pas uniquement la situation des communautés autochtones. Ce sont les conditions avec lesquelles doivent composer les collectivités isolées. La vie dans une région très rurale présente des avantages extraordinaires, mais aussi certaines restrictions. La déruralisation est l'un des défis qui se posent à notre pays, comme en témoigne fort éloquemment l'exode que vivent les réserves.

    Au chapitre des perspectives d'éducation des enfants, la formation à distance constitue une avenue extraordinaire. Le programme Rescol vise à faire en sorte que les écoliers autochtones de tout le pays aient accès à toutes les ressources informatiques voulues. Nous obtenons un taux de participation dépassant les 80 p. 100, ce qui est excellent. Dans bien des cas, nous ne pouvons pas offrir l'accès à grande vitesse, mais les résultats sont tout de même là.

    Les interactions entre les écoles autochtones du pays—et même du monde entier—apportent certains résultats très encourageants. Il est bon de pouvoir apprendre efficacement même devant un écran vidéo et d'être capable de s'enorgueillir de sa propre culture et de la connaître suffisamment pour pouvoir la partager avec d'autres.

    Si j'avais à m'en tenir à un seul souhait, ce serait l'accès haute vitesse à large bande qui servirait de ciment entre tous les jeunes de toutes les collectivités éloignées de notre pays.

º  +-(1625)  

+-

    Le président: Quel beau souhait pour conclure.

+-

    L'hon. Stephen Owen: Bien sûr, si nous avions la chirurgie à distance, les soins de santé à distance et le commerce électronique, alors nous vivrions vraiment dans le meilleur des mondes.

+-

    Le président: Je vais maintenant mettre un terme à cette partie de la séance en remerciant le ministre pour sa première comparution devant nous. Nous espérons que ce ne sera pas la dernière.

    Merci pour tous vos commentaires, y compris ceux de la fin, que je vous ai un peu soutirés. Nous souhaitons avoir l'occasion de collaborer avec vous. Nous vous considérons comme l'un de nos alliés au sein du gouvernement et nous voulons vous appuyer dans vos efforts. Nous sommes préoccupés par les mêmes questions et nous pourrons, espérons-le, continuer à travailler dans l'harmonie. Merci de votre présence.

+-

    L'hon. Stephen Owen: Merci je l'apprécie vraiment.

+-

    Le président: Monsieur Siggner, j'ai une question concernant ces tableaux très évocateurs. Je pense plus particulièrement à celui de la page 9 qui traite des situations causant du souci ou de la peine.

    Par exemple, lorsqu'on regarde les données touchant les décès dans la famille et la mort d'un parent, on pourrait être tenté de penser que ces résultats cachent d'autres problèmes. Autrement dit, en présumant que tous les enfants, autochtones ou non, réagissent de la même façon au même genre d'événements, on pourrait conclure que les taux de mortalité sont supérieurs chez les parents et les autres membres des familles autochtones.

    Mais il y a une autre façon d'interpréter ces résultats. Je ne sais pas comment on pourrait confirmer cette théorie; peut-être avec l'aide de certaines statistiques sur les taux de mortalité. On pourrait conclure, par exemple, que la prépondérance des soucis faisant suite à un décès dans la famille ne signifie pas simplement que le taux de mortalité est plus élevé, mais bien que la mort est plus profondément ressentie. Les communautés sont plus unies, ce qui fait que la mort d'un des membres de la famille élargie a des répercussions plus senties que dans le reste du Canada, où les citoyens sont plus mobiles et où un parent peut très bien se retrouver dans une région éloignée.

    On pourrait faire le même raisonnement pour toutes les causes énumérées. Faudrait-il ainsi conclure que le taux de divorce ou de séparation est plus élevé chez les Autochtones, ce que semblent indiquer vos autres données sur les parents seuls, ou est-ce que cela dépend encore là de la façon dont les événements sont ressentis?

    Est-ce que vous voyez où je veux en venir? Comment puis-je prétendre être capable d'interpréter ces réactions?

+-

    M. Andy Siggner: C'est une très bonne question, mais je ne suis pas sûr que ma réponse soit à la hauteur. Je conviens avec vous que les collectivités vivant dans les réserves sont généralement plus petites. On peut donc présumer qu'elles ont tendance à être plus unies; tous les gens se connaissent très bien et un décès dans la famille peut prendre des proportions dramatiques. Cette réalité contribue certes au phénomène, mais les Autochtones ont des taux de mortalité plus élevés, ce qui entre également en ligne de compte.

    Comment pouvons-nous en apprendre davantage? Je ne sais pas vraiment. Je ne suis pas certain que le sondage nous apporte assez de données pour en arriver là, mais c'est assurément un bon sujet d'enquête.

    Je savais bien qu'on me poserait des questions comme celles-là, monsieur le président.

+-

    Le président: Je remplis simplement mon rôle.

+-

    M. Andy Siggner: Cet ensemble de données est tout nouveau pour nous; il ne fait aucun doute que nous avons beaucoup de travail de recherche à faire si nous voulons trouver réponse à toutes les questions qui se posent aujourd'hui. Mais ce sont des interrogations fort pertinentes qui pourraient mener à de nouvelles études plus ciblées.

º  +-(1630)  

+-

    Le président: Il faudrait presque organiser des groupes de discussion pour approfondir certains de ces sujets. Ces données ouvrent la voie à bien des questions.

    Je ne sais pas si mes collègues ont d'autres questions pour Mme Atkinson ou M. Siggner.

    Oui, allez-y, monsieur Jackson.

+-

    M. Ovid Jackson: Ma question va un peu dans le même sens. Les jeunes ont des comportement suicidaires qui sont notamment attribuables au chômage chronique. Les taux élevés enregistrés à ce chapitre sont attribuables, je suppose, aux liens étroits qui unissent la communauté, mais, pour les raisons que vous avez données, ces statistiques ne trouvent pas écho dans le reste du Canada. Il serait intéressant de voir comment nous pourrions limiter ce phénomène et quelles mesures nous pourrions prendre à cet égard.

+-

    Mme Joan Atkinson: Si vous permettez, je vais répondre. Comme l'a indiqué M. Siggner, tous ces éléments nous mettent sur la piste de recherches futures qui pourront peut-être nous permettre de mieux comprendre la situation et d'apporter les correctifs qui s'imposent.

    Nous savons, bien sûr, que le taux de suicide est plus élevé au sein des collectivités autochtones. Encore là, comme le ministre Owen le disait, il nous faut analyser cette tragique constatation à partir d'une perspective très globale parce que c'est le résultat de nombreux facteurs différents. Vous avez parlé du manque de perspectives d'emploi, du chômage endémique et du sentiment de désespoir qui incite parfois les gens de ces collectivités autochtones à vouloir s'enlever la vie.

    Pour ce qui est des divers programmes offerts par les ministères fédéraux, il faut bien examiner tous les facteurs en cause afin de pouvoir aider les collectivités à se développer sainement en trouvant elles-mêmes les solutions qui leur convient. Il ne s'agit pas seulement de créer des possibilités de développement économique; il faut aussi permettre l'accès à l'éducation et offrir des programmes sociaux qui font réellement changer les choses, de même que ces autres programmes dont le président a parlé, au chapitre des loisirs notamment. Il faut donc réellement exploiter tout l'éventail des programmes et des initiatives que le gouvernement fédéral peut offrir à ces collectivités pour leur donner les moyens d'établir leurs priorités et, espérons-le, de se développer comme il se doit en redonnant espoir à leurs citoyens.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Nous n'allons dévoiler aucun secret d'État, alors vous pouvez tous rester si vous le désirez.

    Je veux d'abord remercier les deux derniers témoins avant qu'ils nous quittent. Je crois que la juxtaposition des différents points de vue nous a permis d'y voir plus clair. L'exercice fut très révélateur.

    Je vais être très bref. En raison des circonstances particulières que nous vivons—est-ce une bonne façon de dire poliment les choses?—en cette période transition et d'incertitude, nous avions pensé que la semaine prochaine pourrait être un bon moment pour préparer un document provisoire. Je suis porté à croire que nous n'avons pas entendu suffisamment de témoignages pour pouvoir tirer des conclusions utiles, ou quelque chose qui pourrait y ressembler.

    Nous pourrions plutôt simplement écrire au gouvernement pour lui dire que nous avons examiné les recommandations des deux rapports—les 27 recommandations sur l'éducation et les 17 sur la protection de l'enfance—et que nous lui demandons d'y donner suite. Cela ne ferait pas de tort à personne, mais je ne suis pas certain que cela apporterait quelque chose à qui que ce soit. Je n'ai rien contre cette solution, et si elle vous convient, nous pourrions procéder ainsi.

    Par ailleurs, je suggère que nous ne nous réunissions pas la semaine prochaine. Nous essayons de préparer un plan B pour le cas où le Parlement poursuivrait la session. Si nous nous retrouvons ici, le premier point à l'ordre du jour après la semaine du 11 novembre serait l'examen de la réponse du gouvernement à notre second rapport. Il s'agit du rapport sur les enfants autochtones de 12 ans et moins en milieu urbain. Le gouvernement ne présentera malheureusement pas sa réponse à temps pour que nous puissions tenir une réunion à ce sujet la semaine prochaine. Il ne le fera que le 6 novembre, soit tout juste dans les délais qui lui sont impartis. Je crois donc que nous devrions d'abord étudier la réponse du gouvernement à notre rapport précédent et interroger les gens qui sont chargés de sa rédaction. Ce serait ma première proposition.

    Julie Cool, notre attachée de recherche, a dressé une liste de témoins qui peuvent être convoqués si nous voulons poursuivre notre travail. En raison de l'incertitude qui règne, nous ne voulons pas inviter toute une série de témoins pour annuler le tout par la suite, d'autant plus que certains d'entre eux habitent assez loin d'ici. Il y a des témoins à Ottawa qui pourraient être convoqués au besoin.

    Je m'efforce simplement de dégager un consensus. Je n'essaie pas de lire dans vos pensées, mais je vois des gens qui hochent la tête et font des signes du genre.

    Je présume qu'il ne vaut pas la peine que nous préparions un rapport provisoire. Il me semble que ce serait plutôt prématuré; je ne suis même pas sûr qu'on devrait rédiger une lettre... À moins que vous vouliez vraiment que j'écrive au ministre pour lui dire de suivre les recommandations des deux rapports que nous avons examinés. Si quelqu'un croit que cette démarche peut apporter quelque chose, pas de problème; mais je ne vois pas personnellement en quoi cela peut être utile.

    Alors, si vous êtes d'accord, nous allons continuer à préparer nos plans en présumant que nous serons de retour. Nous ne tiendrons pas de séance la semaine prochaine.

    Je veux vous rappeler que le 30 octobre, soit après-demain, nous sommes tous invités à assister à une réunion du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Ce comité tiendra alors une conférence de presse pour lancer son rapport sur les jeunes Autochtones de 12 ans et plus vivant en milieu urbain. C'est donc un rendez-vous jeudi à 15 h 45 à la Salle des peuples autochtones du Sénat.

    Est-ce que quelqu'un voudrait ajouter quelque chose?

    Oui, allez-y.

º  -(1635)  

+-

    Mme Wendy Lill: En supposant que nous ne nous réunissions pas la semaine prochaine et que nous attendions la suite des événements, je ne vois pas très bien où nous en sommes. Cela revient à dire que nous ne pouvons faire aucun plan ni conclure nos travaux d'aucune façon.

+-

    Le président: Nous avons des plans d'urgence.

+-

    Mme Wendy Lill: Quel est notre plan d'urgence? Je ne suis pas certaine de savoir en quoi il consiste.

-

    Le président: Quelles sont les différentes options? Selon l'un des scénarios, la session serait suspendue ou ajournée d'une manière ou d'une autre et diverses technicalités nous amèneraient au point où nous ne reprendrions essentiellement nos travaux qu'après une nouvelle convocation. Il y a également des possibilités de prorogation, mais elles me semblent fort minces; le gouvernement ne veut pas en arriver là parce qu'il veut être capable de convoquer la Chambre, sans qu'il y ait un nouveau discours du Trône, en cas d'urgence nationale. Quoi qu'il en soit, il n'y aura pas prorogation. L'hypothèse A veut donc que nos travaux soient suspendus jusqu'à l'arrivée du nouveau premier ministre, et je ne crois pas que le comité puisse se réunir dans ces circonstances.

    Suivant le scénario B, nous allons revenir après le 15 novembre et la session parlementaire va se poursuivre jusqu'à Noël. Nous tenterions alors de nous en tenir à notre plan de travail. C'est pourquoi nous voulons nous assurer d'être bien prêts.

    S'il y a prorogation et que la Chambre ne siège pas avant un nouveau discours du Trône, la constitution de nouveaux comités et tout ce qui s'ensuit, je ne sais pas vraiment où nous en sommes. Bien des facteurs entrent en jeu; il est très difficile de planifier.

    Ma réponse n'est peut-être pas très satisfaisante, mais je crois que la seule façon de s'en sortir, c'est d'avoir un plan en réserve. Est-ce que cela vous convient? Rien n'est parfait en ce bas monde, madame Lill.

    Sur ce, je vous remercie beaucoup de votre présence.

    La séance est levée.