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HUMA Rapport du Comité

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I.          RECONNAÎTRE LE SECTEUR BÉNÉVOLE, LES EMPLOYEURS, LES REPRÉSENTANTS DES EMPLOYÉS ET LES APPRENANTS

Les membres du Comité sont extrêmement impressionnés par le dévouement et l’engagement démontrés par tous les groupes et particuliers qui ont comparu devant eux pour partager leurs connaissances et exposer leurs points de vue sur les problèmes d’alphabétisation au Canada et les solutions possibles. Nous vouons aussi une grande admiration au vaste réseau de bénévoles à l’œuvre d’un bout à l’autre du pays et dont l’unique raison d’être est d’évaluer les besoins en matière d’alphabétisation et d’accroître le niveau de littératie des Canadiens. Ces intervenants en alphabétisation ont contribué à enrichir le patrimoine social et économique du Canada pendant des décennies. Nous craignons toutefois que cette contribution ne soit souvent prise pour acquis. À notre avis, il importe de reconnaître de façon tangible le précieux travail accompli par le secteur bénévole (en plus d’en accroître le financement) pour remédier au faible niveau de littératie au Canada.

Notre programme d’alphabétisation est pratiquement entièrement offert par des bénévoles […] nous utilisons dans notre agence plus de 800 bénévoles, et nous ne sommes pas les seuls; vous connaissez fort bien l’effet de levier que peut offrir le recours aux bénévoles […] en reliant des centres d’apprentissage permanent situés dans des secteurs à haut risque et à besoins élevés avec le secteur des bénévoles, on obtient deux choses. Cela permet aux bénévoles de travailler efficacement et cela résout le problème mentionné plus tôt de l’accès à ces programmes, aspect pour lequel les organismes de bénévoles obtiennent d’excellents résultats. Nous avons, grâce à nos bénévoles, des ressources humaines très diversifiées. Il nous est très facile de trouver des gens prêts à travailler. Avec un organisme qui réussit à attirer des bénévoles, il est plus facile d’attirer les personnes qui veulent apprendre à lire et à écrire. (Susan Pigott, présidente-directrice générale, St. Christopher House)38

Aujourd’hui, nous [Collège Frontière] continuons notre travail partout au Canada et notre combat contre l’isolement et la pauvreté grâce à l’aphabétisation et à l’apprentissage. Nous avons 6 000 bénévoles dont la plupart sont encore des étudiants. Mais nous travaillons dans ce qui constitue les régions pionnières d’aujourd’hui, c’est-à-dire les prisons, les refuges pour sans-abri et des milieux de travail comme les exploitations agricoles du Canada rural et les usines du Canada
urbain. Nous enseignons beaucoup aux personnes handicapées, et je sais que votre Comité s’intéresse à leur situation, et nous faisons beaucoup de travail auprès des aînés. (John O’Leary, président, Collège Frontière)39

Des milliers de Canadiens et Canadiennes oeuvrent bénévolement dans le domaine de l’alphabétisation […]. [A]insi, il y a 74 programmes de tuteurs bénévoles dans 80 collectivités en Alberta. (Eliane Cairns, vice-présidente, Literacy Alberta)40

Je souligne qu’il y a une foule de bénévoles qui, trop souvent, passent inaperçus. Ils font un travail admirable. Ils sont discrets, mais il faut souligner leurs efforts. (Ian Thorn, Projet national d’alphabétisation, Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, Coalition pour l’alphabétisme du Nouveau-Brunswick)41

Le travail des employeurs et des représentants d’employés qui mettent en place des projets d’alphabétisation dans leur milieu de travail doit aussi être reconnu parce qu’il contribue à améliorer le niveau de littératie dans leur milieu de travail. Ces projets, dont il sera question plus en détail un peu plus loin dans le rapport, peuvent avoir une incidence positive à plusieurs égards, notamment au chapitre de la production, des salaires, de la santé et de la sécurité au travail ainsi que de la participation syndicale. De plus, l’alphabétisation au travail peut avoir une influence bénéfique sur l’alphabétisation intergénérationnelle, les travailleurs qui acquièrent une plus grande capacité de lecture et d’écriture étant mieux en mesure de contribuer à l’alphabétisation de leurs familles.

En 1990, Postes Canada a adopté l’alphabétisation comme principale cause philanthropique. La Société a institué en 1993 un programme national de récompenses et, grâce à la participation de nombreux commanditaires, notamment le Secrétariat national à l’alphabétisation, celui-ci a pris beaucoup d’essor. En 2002, Postes Canada a célébré le dixième anniversaire de ses Prix de l’alphabétisation, en récompensant 34 récipiendaires de toutes les régions du pays dans les catégories Accomplissement personnel, Leadership communautaire, Éducation et Entreprise. Les récipiendaires dans les catégories Accomplissement personnel et Éducation ont reçu un ordinateur, tandis que les récipiendaires dans la catégorie Leadership communautaire ont remporté une somme de 2 000 $42. Le Programme d’excellence pour l’alphabétisation en milieu de travail du Conference Board du Canada, qui est également parrainé par le Secrétariat national à l’alphabétisation, vise quant à lui à sensibiliser les employeurs à l’importance de l’alphabétisation en milieu de travail et à récompenser le succès des initiatives grâce auxquelles les employés ont la possibilité daccroître leur niveau de littératie. Un prix est remis chaque année à une petite, une moyenne et une grande entreprise43.

Le Comité félicite Postes Canada et le Conference Board du Canada pour les programmes de prix d’alphabétisation qu’eux et d’autres organismes ont soutenus au fil des ans. Il reste néanmoins convaincu de la nécessité de faire davantage encore pour mieux sensibiliser la population à l’importance de remédier au faible niveau d’alphabétisation, ainsi que pour alimenter et soutenir la précieuse contribution des défenseurs de l’alphabétisation et les intervenants en alphabétisation. Les apprenants ont eux aussi besoin d’encouragement et de soutien pour entreprendre et poursuivre leur apprentissage.

Recommandation 3

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral alloue suffisamment de ressources pour financer la remise de prix d’alphabétisation à différents moments dans l’année, en particulier à l’occasion de la Journée internationale de l’alphabétisation, afin de récompenser les intervenants en alphabétisation (par exemple, les bénévoles, les employeurs et les autres intervenants) pour leur engagement indéfectible et l’excellence dont ils font preuve dans la promotion et la prestation de programmes d’alphabétisation, et afin de souligner les réussites des apprenants.

II.         LE RÔLE DE L’INSTITUT CANADIEN SUR L’APPRENTISSAGE

Au Sommet national sur l’innovation et l’apprentissage en novembre 2002, le gouvernement a annoncé son intention de créer un nouvel organisme, en l’occurrence l’Institut canadien sur l’apprentissage (ICA), afin d’élargir les connaissances et l’information existantes en matière d’apprentissage. En janvier 2003, la ministre de Développement des ressources humaines Canada a demandé à M. Benjamin Levin, de l’Université du Manitoba, et à Mme Shirley Seward, du Centre syndical et patronal du Canada, de consulter les provinces et les territoires, les organismes d’apprentissage nationaux ainsi que les entreprises et les syndicats, au sujet de la structure, du mandat et du mode de gestion de cet organisme. Ces consultations seraient apparemment terminées et, au moment même où nous préparons notre rapport, la ministre est en train de se pencher sur la question. Dans le budget de février 2003, le gouvernement fédéral a annoncé l’octroi d’une contribution unique de 100 millions de dollars en 2003-2004 pour la création de l’ICA.

Selon l’annonce initiale, le mandat de l’ICA consistera à garantir aux Canadiens l’accès à des études objectives sur l’efficacité des investissements dans le domaine du perfectionnement des compétences. On envisage également de confier à l’ICA la responsabilité d’appuyer l’expérimentation et l’évaluation d’approches novatrices en matière d’apprentissage et de coordonner les renseignements ainsi recueillis sans empiéter sur le travail de gouvernements ou d’organismes tiers. Certains membres du Comité s’inquiètent au sujet du rôle de cet organisme et insistent sur la nécessité d’éviter que son mandat ne déborde sur celui d’entités provinciales ou territoriales semblables. Par exemple, il faut veiller à ce que le programme de recherche de l’ICA ne recoupe pas celui du Conseil des statistiques canadiennes de l’éducation, qui est le fruit d’un partenariat entre Statistique Canada et le Conseil des ministres de l’Éducation (Canada). La même préoccupation s’applique aux études sur l’alphabétisation financées par le gouvernement fédéral. Par exemple, l’alphabétisation chez les jeunes enfants ne devrait pas faire partie du mandat de l’ICA, puisque cette question est déjà au cœur des préoccupations du Réseau canadien de recherche sur le langage et l’alphabétisation, qui fait partie des réseaux de centres d’excellence du gouvernement.

Bon nombre de nos témoins soutiennent que le mandat de l’ICA devrait englober la recherche sur l’alphabétisation. Dans la mesure où les préoccupations que nous avons exprimées ci-dessous sont prises en considération, nous souscrivons à ce point de vue, étant donné que l’alphabétisation est essentielle à tout apprentissage. Pour ce qui est du mandat de l’ICA en matière d’alphabétisation, il faudrait songer à y ajouter la recherche sur l’alphabétisation des adultes qui a une application directe sur les programmes d’alphabétisation, la recherche sur la formation en alphabétisation destinée à des segments de population ou à des secteurs de l’économie précis et la recherche visant à trouver des façons de prévenir ou de réduire l’analphabétisme ou à améliorer les niveaux de littératie des adultes. Plusieurs domaines de recherche ont été mis en évidence au cours des audiences du Comité, comme l’acquisition d’une meilleure compréhension des raisons expliquant le faible niveau d’alphabétisation de certains adultes (en particulier ceux de niveau 1); l’acquisition d’une meilleure compréhension du processus d’apprentissage de la lecture et de l’écriture et du rôle des institutions comme les bibliothèques dans ce processus; l’évaluation des besoins des Autochtones, des personnes handicapées et des détenus en matière d’alphabétisation; l’acquisition d’une meilleure compréhension des raisons pour lesquelles la grande majorité des adultes peu alphabétisés ne font rien pour remédier à la situation.

Dans ma présentation, je vous ai parlé de trois formules ou façons de faire qui ont été utilisées chez les francophones [pour améliorer les capacités de lecture et d’écriture]. […] Dans l’état actuel des choses, avec les ressources dont disposent les intervenants, on peut expérimenter ces formules, mais on peut rarement en faire une évaluation systématique. On a eu […] des discussions sur l’Institut canadien sur l’apprentissage, qui se donne pour mandat de faire un genre de bilan des types d’intervention et de voir ce qui peut être fait. Je souhaite qu’un institut de ce type s’intéresse à des pratiques comme celles-ci, afin qu’il y ait des résultats aussi pratiques, pour les intervenants. (Luce Lapierre, présidente, Fédération canadienne pour l’alphabétisation en français)44

Passons maintenant à l’Institut canadien sur l’apprentissage, dont on a récemment annoncé la création. Nous souhaiterions que vous vous assuriez qu’il consacrera au moins 25 % de ses ressources à analyser des succès démontrés en alphabétisation familiale et des adultes. […] cet institut ne devrait pas se limiter à l’éducation postsecondaire. (Marg Rose, directrice exécutive, Literacy Partners of Manitoba)45

Le nouvel Institut canadien sur l’apprentissage mis sur pied par le gouvernement fédéral est un exemple parfait de cas où l’intégration peut être fructueuse. L’alphabétisation devrait être l’un des grands axes d’intervention de l’Institut. (Sue Folinsbee, codirectrice exécutive, Coalition de l’alphabétisation de l’Ontario)46

La CLA recommande d’inclure dans [le] mandat [de l’Institut canadien sur l’apprentissage] l’acquisition d’une meilleure compréhension du processus d’apprentissage de la lecture et de l’écriture et du rôle des différentes institutions sociales comme les bibliothèques à cet égard. (Madeleine Lefebvre, vice-présidente, Canadian Library Association)47

En 2002-2003, le Secrétariat national à l’alphabétisation (SNA) a consacré environ 11 % de son budget de subventions et contributions à la recherche. Avec la création de l’ICA, le Comité croit qu’au moins une partie de la recherche sur l’alphabétisation menée par l’entremise du SNA (à l’exclusion de celle portant sur l’évaluation des besoins et sur les programmes d’alphabétisation novateurs) pourra être confiée à l’ICA. De plus, il sera ainsi possible de réaffecter une partie du budget de recherche du SNA à l’établissement de nouveaux partenariats stratégiques en matière d’alphabétisation, un domaine où le SNA excelle, comme en témoigne les commentaires recueillis auprès des intervenants en alphabétisation.

Recommandation 4

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral inclue la recherche en alphabétisation dans le mandat de l’Institut canadien sur l’apprentissage. De son point de vue, l’attribution des activités de recherche en alphabétisation à l’Institut canadien sur l’apprentissage ne devrait pas réduire le budget annuel du Secrétariat national à l’alphabétisation au titre des programmes de subventions et de contributions.

III.        ÉVALUER LES ACQUIS ET RAVIVER L’IDÉE D’UN CARNET DE FORMATION

Plusieurs témoins ont insisté sur la nécessité de reconnaître les connaissances et les compétences théoriques et informelles des apprenants et de trouver une façon de consigner ce capital humain. À cet égard, l’une des idées qui a été évoquée est celle d’un dossier de formation numérique.

La reconnaissance des acquis (RDA) sert à déterminer les compétences, les connaissances et les habilités déjà acquises grâce à un programme d’études ou de formation reconnu, au travail, au bénévolat et à une foule d’autres activités. Elle aide aussi les apprenants à prendre conscience de leurs forces et de leurs habilités et à mesurer leurs progrès. Malheureusement, bon nombre des connaissances acquises ne sont pas reconnues. Selon une récente étude, quelque 540 000 travailleurs canadiens perdent entre 8 000 et 12 000 $ en moyenne annuellement parce qu’une partie de leur capital humain (études, formation et expérience) n’est pas reconnu. Ces acquis pourraient être reconnus et rémunérés si nous avions un meilleur système à cette fin48. Ce problème est particulièrement épineux au sens où les titres de compétences étrangers ne sont pas reconnus. Il en avait été abondamment question lors de notre étude de la Loi sur l’équité en matière d’emploi l’an dernier, et le sujet est revenu sur le tapis lors de nos audiences sur l’alphabétisation.

En octobre 2002, plus de 100 personnes ont participé à l’Atelier national sur les pratiques exemplaires visant à renforcer les capacités des collectivités de reconnaître l’apprentissage. Ces participants ont soutenu que pour créer, conserver et appuyer une main-d’œuvre bien formée et hautement qualifiée, les occasions d’apprentissage structurées et non structurées qui se présentent tout au long de la vie doivent être prises en compte. Le trop petit nombre de pratiques d’évaluation et de reconnaissance des acquis (ERA) à coût abordable, l’insuffisance des outils d’évaluation et le manque de connaissance des méthodes comme la constitution de portfolios ont été cités au nombre des facteurs qui nuisent à l’élaboration de programmes d’ERA au Canada49.

Au cours de nos audiences, nous avons eu vent d’un projet d’alphabétisation dans le domaine de l’ERA, qui en est maintenant à sa troisième année d’existence et auquel participent cinq réseaux d’alphabétisation de la région d’Halifax. Dans le cadre de ce projet, on a adapté l’ERA pour faciliter la constitution de portfolios de formation à l’intention des apprenants. Selon les résultats de l’évaluation du Programme de portfolios de formation, le portfolio de formation fait en sorte que les participants sont plus sûrs d’eux et ont une meilleure estime d’eux-mêmes; ce qui élargit du même coup leurs perspectives d’études, de formation et de carrière. Il est également permis de penser que le Programme de portfolios de formation est une motivation à s’inscrire à l’éducation permanente, en particulier dans le cas des participants qui n’ont pas d’études ou de formation antérieures50. Par conséquent, la création d’un portfolio de formation pourrait aider les apprenants à surmonter certains des stigmates associés à leur faible niveau d’alphabétisation et encouragerait un plus grand nombre d’entre eux à apprendre à lire et à écrire.

C’est pourquoi nous parlons ici d’un manque de compétences, de personnes qui ne savent pas lire ni écrire, de personnes qui ne possèdent pas les compétences exigées par certains postes, alors que nous ne savons même pas ce que ces personnes peuvent faire. Il est donc facile de changer d’optique et de décider de faire un inventaire des compétences et des connaissances que possèdent les individus, les collectivités et les secteurs industriels, pour ensuite fonder une action. La méthode qui permet de gérer cela est la compatibilité du capital humain, en utilisant un genre de dossier de formation numérique, ce qui nous donnerait la possibilité de commencer par évaluer la situation actuelle, de planifier notre action et ensuite d’en gérer l’exécution. On pourrait commencer à créer ce dossier de formation à partir de l’enquête EIAA, parce qu’elle décrit un certain nombre de catégories d’alphabétisme. Mais Développement des ressources humaines Canada possède toutes sortes de données concernant les diverses compétences exigées pour toute une série d’emplois. Nous avons ces données-là. (Kathryn Barker, présidente, FuturEd Consulting Education Futurists Inc.)51

Le principe de base de la RA [reconnaissance des acquis] est qu’il importe peu de savoir où et comment vous avez acquis telle ou telle compétence ou connaissance. Si vous pouvez nommer cet acquis, l’articuler, le présenter et joindre des documents ou des preuves à l’appui, c’est un acquis réel et valable. Il devrait être reconnu, respecté et souligné. […] Nous en sommes maintenant à la troisième année d’un important projet d’ERA en alphabétisation en collaboration avec cinq réseaux d’alphabétisation de la région d’Halifax, grâce auquel nous avons offert une formation professionnelle à des animateurs et à des tuteurs, nous avons adapté les documents que nous utilisons pour l’évaluation des acquis et élaboré un portfolio de formation, et nous en sommes maintenant à l’étape de la mise à l’essai auprès de divers participants par l’intermédiaire des réseaux d’alphabétisation. Déjà, les tuteurs remarquent que la confiance des participants et leur facilité à communiquer se sont améliorées de façon marquée et spectaculaire. (Doug Myers, directeur exécutif du Prior Learning Assessment Centre d’Halifax, et directeur de l’évaluation des priorités, Canadian Association for Prior Learning Assessment)52

En 1994, le gouvernement fédéral a proposé la création d’un carnet de formation, en partenariat avec les provinces et territoires53. Ce document devait servir à consigner les expériences de formation des intéressés ainsi que leurs diplôme d’études et leurs titres professionnels, de façon à faciliter les transitions dans un contexte d’apprentissage et au travail. Il faut redonner vie à cette idée et la mettre à exécution.

Recommandation 5

Le Comité recommande que des fonds soient alloués par l’intermédiaire du Secrétariat national à l’alphabétisation pour inciter les intervenants à recourir davantage à la reconnaissance des acquis pour les apprenants peu alphabétisés.

Recommandation 6

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral travaille de concert avec les gouvernements provinciaux et territoriaux ainsi qu’avec les intervenants en alphabétisation pour créer un portfolio de formation où seront consignés les acquis théoriques et autres des apprenants sans porter atteinte à leur droit à la protection des renseignements personnels. Idéalement, ce document devra dresser la liste des points forts et des lacunes des apprenants et servir de point de départ à ceux qui entreprennent de parfaire leur formation. Bien que cette recommandation vise principalement à encourager et à faciliter la formation des personnes peu alphabétisées, il n’y a aucune raison pour limiter l’utilisation de ce document de reconnaissance des acquis théoriques et des titres aux apprenants dont le niveau de littératie est faible. En fait, l’application de cette approche pourrait s’étendre aux acquis que possèdent les nouveaux arrivants au Canada, notamment au niveau de la formation linguistique.

IV.       CONCEVOIR UNE STRATÉGIE D’ALPHABÉTISATION DES AUTOCHTONES

1.      Éducation et alphabétisation dans les communautés autochtones

En matière d’éducation et d’alphabétisation, les peuples autochtones54 au Canada font face à de nombreux défis propres à leur communauté et à leur culture. Les statistiques révèlent chez les Autochtones des niveaux inférieurs de participation aux études et de succès, comparativement au Canadien moyen55. Les Autochtones sont aussi beaucoup moins nombreux à faire partie de la main-d’œuvre active et sont plus susceptibles d’occuper des postes peu spécialisés ou d’être sans emploi.

Toutefois, les peuples autochtones représentent une source de main-d’œuvre potentielle qui sera essentielle pour répondre aux besoins de l’économie canadienne au cours de la prochaine décennie. En effet, une importante cohorte de jeunes autochtones arrivera sur le marché du travail à peu près au moment où est prévue une pénurie générale de main-d’œuvre. D’ici 2006, la population autochtone en âge de travailler devrait compter 920 000 personnes. D’après le Conference Board du Canada, la maximisation de l’emploi chez les Autochtones pourrait aider à pallier les pénuries probables de main-d’œuvre, tout en favorisant la viabilité des programmes de pension de retraite et d’assurance-emploi56. Le Comité estime crucial de privilégier l’alphabétisation des apprenants autochtones de tout âge afin de maximiser l’emploi chez ce groupe.

L’éducation est un facteur essentiel pour hausser le degré d’alphabétisation ainsi que pour doter les jeunes autochtones qui s’ajoutent à la main-d’œuvre des compétences nécessaires pour répondre aux exigences du marché du travail57. Cependant, l’éducation est un problème particulièrement épineux dans les communautés autochtones. Selon un sondage réalisé en 2002 auprès des membres des Premières Nations vivant dans les réserves, «  le manque d’éducation a été jugé le principal problème des jeunes et des enfants autochtones par plus d’un membre des Premières Nations sur trois58  ». Les données du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pour 2001 révèlent que 63 % des membres des Premières Nations de 15 ans et plus vivant dans les réserves n’ont pas terminé leurs études secondaires. D’après le recensement de 2001, 39 % de la population autochtone en âge de travailler n’a pas de diplôme d’études secondaires, une baisse par rapport à la proportion de 45 % en 1996. Le taux de décrochage avant la neuvième année chez les membres des Premières Nations est six fois plus élevé que celui de la population canadienne59. Les taux de décrochage élevés contribuent à la faible proportion de membres des Premières nations dans les réserves ayant au moins un diplôme d’études secondaires, de sorte que peu de ces jeunes ont les compétences et les qualités que recherchent les employeurs. Comme nous l’avons signalé précédemment dans ce rapport, chaque année supplémentaire de scolarité augmente les revenus annuels d’environ 8 %, dont le tiers est attribuable à l’accroissement des capacités de lecture et d’écriture60. Cet aspect est particulièrement important quand on sait que les peuples autochtones ont dans l’ensemble des revenus familiaux inférieurs à la moyenne. De plus, à mesure que l’économie canadienne devient plus axée sur le savoir, les Autochtones qui n’ont pas l’éducation et l’alphabétisation nécessaires pour concurrencer sur le marché du travail seront exclus des nouvelles perspectives économiques et seront refoulés encore plus loin vers les marges de la société. Le Comité estime que cette situation exige une intervention immédiate, appropriée et efficace. De plus, nous pensons que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait, en consultation avec les Premières Nations, prendre des mesures afin que les enfants des Premières Nations reçoivent un enseignement primaire et secondaire de qualité.

2.      Les programmes fédéraux — Éducation et alphabétisation des peuples autochtones

Quatorze ministères et organismes fédéraux61 offrent aux peuples autochtones des programmes auxquels ils consacreront quelque 8,3 milliards de dollars en 2003-2004. Affaires indiennes et du Nord canadien est le principal ministère responsable de la prestation de services aux peuples autochtones, puisque ses responsabilités principales concernent les membres des Premières Nations vivant dans les réserves. De plus, dans le Nord, AINC travaille en collaboration «  avec les Inuits et les autres collectivités autochtones à l’élaboration des structures de gouvernance ainsi qu’à la conclusion et à la mise en œuvre des ententes sur les revendications territoriales et l’autonomie gouvernementale62  ». Le gouvernement fédéral offre aussi à l’intention des membres des Premières Nations dans les réserves des programmes visant l’éducation, le développement du marché du travail, les services culturels, les services correctionnels et les communications.

En ce qui concerne les programmes visant à accroître l’alphabétisation des Autochtones, les principaux intervenants fédéraux sont AINC, le Secrétariat national à l’alphabétisation et le Bureau des relations avec les Autochtones de DRHC ainsi que le ministère du Patrimoine canadien. Affaires indiennes et du Nord canadien prévoit dépenser environ 1,4 milliard de dollars pour les programmes et les services d’éducation à l’intention des membres des Premières Nations vivant dans les réserves en 2003-2004, soit un peu plus d’un milliard de dollars pour l’éducation primaire et secondaire, 304 millions de dollars pour l’éducation postsecondaire et 8,2 millions de dollars pour les centres d’éducation culturels. Environ 120 000 élèves au primaire et au secondaire et environ 26 000 étudiants au postsecondaire tirent parti actuellement de ces services. Presque 60 % des élèves vivant dans les réserves fréquentent plus de 450 écoles primaires et secondaires gérées par les Premières Nations63. Le Secrétariat national à l’alphabétisation (SNA) finance des programmes qui appuient directement des projets d’alphabétisation en anglais et en français pour les Autochtones adultes. En 2002-2003, le SNA a alloué 2 073 742 $ pour appuyer 41 projets d’alphabétisation des Autochtones en cours actuellement d’un bout à l’autre du Canada. Le Bureau des relations avec les Autochtones (BRA) gère la Stratégie de développement des ressources humaines autochtones (SDRHA), un programme quinquennal de 1,6 milliard de dollars conçu pour aider les Autochtones à se préparer au travail, à trouver un emploi et à le conserver. La SDRHA est une stratégie communautaire en partenariat qui confie aux signataires de l’Entente sur le développement des ressources humaines autochtones (EDRHA) la responsabilité de concevoir et de fournir une programmation en vue du marché du travail; en contrepartie, les signataires s’engagent à rendre des comptes et à obtenir des résultats64. Au cours de l’exercice 2001-2002, la SDRHA a dépensé 246,4 millions de dollars pour aider 50 036 clients autochtones. De ce nombre, 5 653 ont repris les études et 18 732 ont trouvé un emploi ou sont devenus travailleurs autonomes, entraînant des économies de 13,8 millions de dollars au titre du compte de l’assurance-emploi 65. Enfin, le ministère du Patrimoine canadien finance un éventail de programmes qui favorisent directement ou indirectement la hausse du degré d’alphabétisation dans les langues autochtones. Ainsi, le ministère a alloué 20 millions de dollars à un projet de quatre ans (1998-2002) pour aider les collectivités autochtones à revitaliser et à conserver leurs langues ancestrales. Ce projet est maintenant à l’étude et des négociations sont en cours afin de le renouveler.

3.      Alphabétisation autochtone : que savons-nous?

Le Comité a entendu de nombreux représentants d’organismes autochtones, fournisseurs de services et enseignants qui ont soulevé de multiples questions liées à l’alphabétisation des collectivités autochtones. Voici ce que nous avons appris :

Il y a eu très peu d’études portant sur les niveaux d’alphabétisation des collectivités autochtones. Néanmoins, il semblerait, d’après les réalisations scolaires des Autochtones et l’expérience directe des fournisseurs de services, qu’une plus forte proportion d’Autochtones sont plus illettrés que le Canadien moyen, d’après les résultats de l’Enquête internationale sur l’alphabétisation des adultes de 1994.
Les actuelles définitions de l’alphabétisme n’ont pas tellement de sens aux yeux de la majorité des Autochtones, pour lesquels, par exemple, l’expression orale est très valorisée, peut-être même plus que l’écriture et la lecture. Pourtant, une communication orale efficace ne figure pas comme élément de la plupart des projets d’alphabétisation.
Les communautés autochtones locales sont mieux placées pour cerner les besoins de leurs résidents et planifier le mode de prestation d’un programme. De nombreux Autochtones estiment que les projets d’alphabétisation devraient être élaborés et régis par les leurs.
L’alphabétisation des Autochtones doit être abordée selon une perspective holistique qui reconnaît et nourrit l’esprit, le cœur, la pensée et le corps des apprenants autochtones.
L’alphabétisation des Autochtones est une question intergénérationnelle qui sera davantage favorisée si l’on adopte une approche communautaire axée sur la famille.
Pour que les programmes d’alphabétisation des Autochtones soient pertinents et utiles pour les apprenants, il faut que les valeurs et la culture des peuples autochtones, leur expérience et leur histoire se reflètent dans les documents utilisés dans les programmes d’éducation de base et d’alphabétisation des adultes.
Pour les apprenants autochtones, il est tout aussi important d’apprendre une langue autochtone que d’apprendre à lire et à écrire l’anglais ou le français. Le Canada compte 50 langues autochtones, mais en 1996, seulement trois (le cri, l’ojibwa et l’inuktitut) constituaient la langue maternelle d’un nombre suffisant de personnes pour être considérées viables à long terme.
Certains Autochtones tiennent énormément à ce que l’anglais soit enseigné comme langue seconde, après la langue maternelle.
Pour réussir, les projets d’alphabétisation des Autochtones doivent pouvoir compter sur un financement suffisant à long terme, puisque l’acquisition de ce type de compétences prend du temps.
Les fournisseurs de services sont obligés de consacrer du temps à la préparation de rapports liés aux accords de financement; or, ce temps serait beaucoup plus utile s’il servait à la prestation de programmes d’alphabétisation.
Les actuelles lignes directrices et mesures d’alphabétisation ne rendent pas compte des réels accomplissements et succès des apprenants autochtones.
Les programmes de formation fédéraux sont axés uniquement sur la préparation à l’emploi plutôt que sur l’acquisition des capacités de lecture et d’écriture essentielles pour permettre à une personne de réussir dans un programme de formation ou un emploi.

Nous ne disposons pas de statistiques pour notre travail de recherche, étant donné que les Autochtones n’étaient pas suffisamment représentés dans la première enquête internationale sur l’alphabétisation des adultes. Il est donc difficile d’extrapoler de manière constructive. Pour ce qui est de la deuxième enquête sur l’alphabétisation, nous sommes en train d’examiner les résultats et nous devrions disposer sous peu de cette information. J’utilise donc les statistiques de l’enquête post-censitaire sur les Autochtones, qui n’a pas porté spécifiquement sur l’alphabétisation, mais plutôt sur le niveau d’instruction. Le niveau d’instruction dans les collectivités autochtones est inférieur de moitié à peu près à celui des collectivités non autochtones. De nombreux facteurs contribuent à cela — par exemple, les enseignants dans les établissements scolaires ne comprennent pas les styles d’apprentissage ou les réalités politiques et socioéconomiques qui affectent les Autochtones. (Priscilla George, coordonnatrice, National Aboriginal Design Committee)66

Nous sommes riches sur le plan des ressources et de la culture, mais en même temps les Territoires du Nord-Ouest ont l’un des plus faibles taux d’alphabétisation au pays. Parmi nos résidents autochtones, 50 % ne sont pas suffisamment alphabétisés pour répondre aux exigences complexes du monde d’aujourd’hui. Au Canada, c’est inacceptable. (Cate Sills, directrice exécutive, Northwest Territories Literacy Council)67

À titre d’éducatrice, j’ai sans cesse martelé et enseigné, défendu et crié sur tous les toits qu’il vaut mieux éduquer un enfant dans sa langue maternelle. J’ai imploré les parents, emprunté et volé de leur temps pour tenter de les en convaincre. […] Après mes années d’enseignement, j’ai toujours été convaincue que, lorsqu’on éduque un enfant dans sa langue maternelle, on n’a pas à lui inculquer ses valeurs, ni ses traditions ni son histoire, parce qu’elles sont incluses incidemment dans le langage. […] Au moyen de tests et de petites études que nous avons réalisés à l’université, je constate que les enfants, lorsqu’on leur enseigne l’anglais, langue seconde, se tirent mieux d’affaire du point de vue de la fierté, de la volubilité et de tout ce que suppose le fait de se tenir debout pour lire à voix haute. (Murdena Marshall, professeure agrégée à la retraite, Mi’kmaw Kina’matnewey)68

Vous avez parlé des atrocités : dans le réseau des pensionnats, une génération toute entière a perdu la capacité de communiquer dans sa propre langue. Maintenant, ces gens ont peur de prendre part à l’éducation de leurs enfants, parce qu’ils ne savent pas comment. De notre point de vue, au Chief Dan George Centre, nous voulons intégrer les parents à l’apprentissage des jeunes pour que les échanges aillent dans les deux sens, pour que nous soyons mieux à même d’alphabétiser nos enfants. Il peut s’agir de choses toutes simples — comment lire des ordonnances, les questions de santé et de sécurité qui s’y rattachent, le problème de la nutrition, la capacité de lire une étiquette. Ce sont des choses que nous tenons pour acquises. (Darrel Mounsey, directeur exécutif, Chief Dan George Centre for Advanced Education, Université Simon Fraser)69

Elles [les personnes apprenantes] savent que leur enfant saura lire si elles savent lire, ce qui signifie que les générations subséquentes apprendront à lire. Dès que la lumière se fait, nous entendons: «  Puis-je amener ma fille? Puis-je amener mon fils?  ». […] Quand, à la porte, je dois dire: «  Désolée, vous ne pouvez pas entrer, je n’ai pas assez d’argent pour embaucher une autre personne...  », je constate ce besoin immense, mais j’ai dû présenter une demande par écrit et la faire parvenir à quelqu’un qui trône dans une tour d’ivoire, sans moyen de comprendre à qui j’ai affaire […]. (Karen McClain, instructeur, Peterborough Native Learning Centre)70

Face à ces questions, de nombreux témoins ont soumis les recommandations suivantes au gouvernement fédéral :

appuyer l’élaboration et la mise en œuvre d’une stratégie ou d’un plan d’action d’alphabétisation des Autochtones qui sera géré et exploité par les peuples autochtones;
appuyer la création d’un organisme autochtone national d’alphabétisation qui fournira un réseau, des études et un appui aux intervenants en alphabétisation autochtones;
fournir des fonds aux collectivités autochtones pour qu’elles évaluent leurs besoins et déterminent leurs propres solutions;
financer des projets d’alphabétisation en langues autochtones;
intégrer des programmes et des pratiques d’alphabétisation adaptés aux politiques et programmes existants pour les peuples autochtones;
modifier les actuels programmes fédéraux de formation (p.ex. la Stratégie de développement des ressources humaines autochtones et les programmes découlant de la partie II de la Loi sur l’assurance-emploi) afin qu’ils soient moins axés sur des résultats immédiats en matière d’emploi. Les lignes directrices s’appliquant au financement devront être plus souples et reconnaître la nécessité de fournir des cours d’alphabétisation avant de passer à des mesures précises de formation et d’emploi;
fournir un financement durable et des ressources à long terme au projet d’alphabétisation des Autochtones, ainsi que l’infrastructure nécessaire à la prestation de programmes (p.ex. prévoir un nouveau mécanisme de financement que le Secrétariat national à l’alphabétisation consacrera aux projets d’alphabétisation des Autochtones).

Je crois comprendre que les ententes sur le développement du marché du travail sont en voie de renégociation ou le seront sous peu. À mon avis, ces ententes illustrent très bien comment nous pouvons intégrer l’alphabétisation dans d’autres programmes et services gouvernementaux. Ces ententes en sont un exemple, mais les ententes du développement des ressources humaines autochtones en sont un autre. De plus, des fonds prévus à la partie II de la Loi sur l’assurance-emploi pourraient assurément servir à financer les activités d’alphabétisation. Différents programmes et services gouvernementaux pourraient servir à financer ces activités pendant que le gouvernement fédéral négocie ces accords avec les provinces et les territoires. (Cate Sills, directrice exécutive, Northwest Territories Literacy Council)71

D’abord, […] je crois que les programmes doivent être conçus localement en fonction de diverses stratégies. Oui, il pourrait y avoir une seule et unique stratégie, mais les besoins de chaque nation et les besoins de chaque collectivité sont uniques. Je crois qu’il est important de le prendre en considération. De même, il est très difficile de dissocier les éléments de l’alphabétisation à différents niveaux. Vous parlez de l’alphabétisation des Autochtones en milieu de travail. Pour que nos gens apprennent à lire et à écrire, nous devons commencer à travailler avec eux avant même qu’ils aillent à l’école. C’est donc tout relié, et je crois qu’il est important de le savoir. Plus il y a de gens qui apprennent à lire et à écrire, plus il y aura en milieu de travail des gens qui savent lire et écrire, au bout du compte. Donc, oui, nous pouvons nous concentrer sur le cas des étudiants adultes, et nous pouvons nous concentrer sur le cas des enfants d’âge préscolaire, et nous pourrons nous concentrer sur les jeunes et sur nos aînés, mais on ne saurait prendre des petits fragments comme cela et travailler ainsi. Je crois qu’il est très important d’adopter une approche holistique face à toute stratégie qui s’inscrit dans une recommandation. (Irene La Pierre, directrice, Piitoayis Family School, Conseil scolaire de Calgary)72

D’abord, utiliser les commentaires des praticiens des programmes avant de créer des initiatives et des lignes directrices. À titre de travailleurs de première ligne appelés à intervenir auprès des apprenants qui s’adressent à nous, nous savons combien de temps il faut et nous sommes fondamentalement au courant des besoins à satisfaire avant qu’ils ne puissent commencer à apprendre. Nous devons nous faire entendre. (Karen McClain, instructeur, Peterborough Native Learning Centre)73

Premièrement, on doit trouver un moyen d’assurer un financement sûr et à long terme pour l’alphabétisation des Autochtones, et les initiatives dans le domaine doivent aller là où sont les Autochtones, et non le contraire. (Edwina Wetzel, directrice de l’éducation, École Ste-Anne, Première Nation de Conne River)74

Les études et les documents produits par les organismes métisses sur l’alphabétisation des Métis et des Indiens non inscrits reprennent les questions et recommandations qui précèdent. Cependant, ces organismes estiment aussi nécessaire une évaluation nationale des besoins en alphabétisation des Métis et des Indiens non inscrits, ainsi que la création d’une coalition nationale d’alphabétisation pour ces groupes.

Le Comité a été informé que des mesures ont été prises pour remédier à bon nombre des questions touchant l’alphabétisation des Autochtones. À la suite d’un rassemblement national sur la question tenu au Canada il y a quelques années, 129 représentants de chaque province et chaque territoire ont créé le Aboriginal Design Committee, qu’ils ont chargé de former un organisme national pour l’alphabétisation des Autochtones et qui est sur le point de se constituer en personne morale75. Des organismes sans but lucratif ont créé des conseils d’alphabétisation qui servent les Autochtones (p.ex. l’Ontario Native Literacy Coalition, le Nunavut Literacy Council et le Northwest Territories Literacy Council). Le Secrétariat national à l’alphabétisation finance aussi un certain nombre de projets. Le Comité sait que l’alphabétisation est un projet de longue haleine et qu’il faudra énormément de travail pour remédier à l’illettrisme de nombreux Autochtones au Canada. Nous estimons que le gouvernement fédéral doit absolument intervenir pour faire en sorte que les membres des Premières nations habitant dans les réserves aient accès à une éducation de qualité et que les Autochtones partout au Canada aient accès à des ressources culturellement significatives afin de hausser les capacités linguistiques et le degré d’alphabétisation des générations actuelles et futures.

Recommandation 7

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral commence dès maintenant à consulter les communautés autochtones et les gouvernements provinciaux et territoriaux afin d’élaborer une stratégie d’alphabétisation des Autochtones qui suit une perspective holistique, qui respecte les langues, les traditions et les valeurs autochtones et qui est financée à un niveau correspondant à la gravité du problème de sous-alphabétisation des Autochtones.

Recommandation 8

Le Comité sait que la mise en œuvre d’une stratégie d’alphabétisation des Autochtones prendra du temps. En attendant, il recommande qu’un nouveau volet de financement soit créé au Secrétariat national à l’alphabétisation, soit le mécanisme de financement autochtone. Le gouvernement devra ajouter 5 millions de dollars au nouveau mécanisme, en sus du montant (environ 2 millions de dollars) que le Secrétariat consacre déjà aux projets d’alphabétisation des Autochtones; la moitié de cet ajout sera confiée à l’organisme national d’alphabétisation des Autochtones que le National Aboriginal Design Committee est en voie de créer, tandis que l’autre moitié sera allouée par le biais des actuels mécanismes de financement, comme cela se fait actuellement.

Recommandation 9

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral affecte 15 millions de dollars à des Ententes supplémentaires sur le développement des ressources humaines autochtones afin de financer les projets d’alphabétisation des Autochtones en milieu de travail76. De plus, une partie des nouveaux fonds (soit 25 millions de dollars au cours des deux prochaines années) versés en vertu du Partenariat autochtone pour l’acquisition de compétences et l’emploi sera réservée à l’alphabétisation et à l’acquisition de capacités au calcul dans le cadre de grands projets d’un bout à l’autre du pays. De plus, toute stratégie fédérale existante visant à accroître la participation des Autochtones sur le marché du travail devra comporter une éducation de base améliorée et des programmes d’alphabétisation de qualité.

V.        RENFORCER LES CAPACITÉS, RESSERRER LES PARTENARIATS ET ÉLABORER DE NOUVELLES APPROCHES

1.      Élargir le mandat et les capacités du Secrétariat national à l’alphabétisation

Le Secrétariat national à l’alphabétisation (SNA) a vu le jour dans la foulée du discours du Trône de 1986 dans lequel le gouvernement fédéral s’était engagé «  à collaborer avec les provinces, le secteur public et les organismes bénévoles à la mise au point de mesures qui permettront aux Canadiens d’acquérir le degré d’alphabétisme nécessaire pour bénéficier pleinement des avantages d’une société avancée  ». Le Cabinet a autorisé la création de l’organisme en 1987. Aux dires des témoins, le SNA a accompli depuis 1988 un excellent travail en établissant et en entretenant des partenariats pour promouvoir l’alphabétisation au Canada.

Le gouvernement fédéral joue un rôle important en finançant le Secrétariat national à l’alphabétisation et d’autres initiatives. Le Secrétariat fait un excellent travail mais est restreint par ses ressources et son mandat limités. (Wendy DesBrisay, directrice générale, Movement for Canadian Literacy)77

J’aimerais tout d’abord remercier […] le Secrétariat national à l’alphabétisation de fournir à des coalitions comme la nôtre les ressources et les conseils dont nous avons besoin pour remplir notre mandat. (Jean Rasmussen, directrice, Alphabétisation familiale, British Columbia Literacy)78

… le Secrétariat national à l’alphabétisation serait le secret de polichinelle du gouvernement. Il est très bien parvenu à établir les types de partenariats et la capacité nécessaires au niveau régional et local, ainsi qu’au niveau provincial et territorial, pour faire bouger les choses dans le domaine de l’alphabétisation. Je pense donc qu’on a déjà l’ébauche d’un système de mise en application. Son mandat doit être élargi, il doit disposer de plus de ressources, mais je pense qu’il a la capacité de faire avancer cette cause. (Cate Sills, directrice exécutive, Northwest Territories Literacy Council)79

Les montants que notre coalition reçoit du SNA sont essentiels à la mise en place d’une infrastructure, ainsi que de programmes et de services d’alphabétisation dans tout le territoire. Sans cela, il n’y aurait pas d’infrastructure d’alphabétisation au Nunavut. (Cayla Chenier, coordonnatrice de développement de l’alphabétisation, Nunavut Literacy Council)80

Le SNA travaille en partenariat avec les provinces, les organismes bénévoles, les entreprises, les syndicats et d’autres intervenants en alphabétisation pour stimuler l’intérêt à l’égard de l’alphabétisation et au savoir lire et écrire. Pour ce faire, on a recours au financement de projets dans cinq secteurs d’activités principaux : (1) élaboration de matériel didactique et d’outils; (2) recherche; (3) amélioration de l’accès et diffusion; (4) coordination et partage de l’information; (5) sensibilisation accrue du public. Le SNA ne participe pas directement à la mise en œuvre des programmes d’alphabétisation destinés aux Canadiens. Cette responsabilité est assumée par le système d’enseignement, les groupes bénévoles, les organismes d’alphabétisation, les syndicats et d’autres groupes spécialisés en la matière. En 2002-2003, environ 16 % des projets financés avaient pour but de sensibiliser le public, une activité que tous les membres du Comité estiment très importante et dont la portée doit être élargie. Environ 27 % des projets visaient l’élaboration de matériel didactique, 33 % portaient sur la coordination et le partage d’information, 11 % avaient trait à la recherche, tandis que 13 % concernaient l’amélioration de l’accès et la diffusion.

Le rôle du SNA en est un de facilitateur, c’est-à-dire qu’il réunit des organismes qui peuvent tirer parti de leurs expériences respectives. Les projets sont financées par la voie de deux types de mécanismes : le mécanisme de financement fédéral-provincial- territorial et le mécanisme de financement national. Grâce au mécanisme de financement fédéral-provincial-territorial, le SNA parraine des projets axés sur les besoins régionaux ou locaux qui, en conséquence, varient en fonction des priorités et des demandes des provinces/territoires81. En vertu de l’entente de financement initial, les gouvernements provinciaux et territoriaux ont été invités à contribuer au financement des projets dans la même proportion que le SNA. Aujourd’hui, les contributions de ces gouvernements dépassent souvent celle du SNA. Par exemple, on nous a dit que les contributions du Manitoba et de l’Ontario étaient maintenant respectivement 3 et 10 fois plus importantes que celle du gouvernement fédéral. Les fonds réservés au Québec sont régis par une entente ministérielle qui précise notamment les groupes devant être financés et les niveaux de financement. À peu près la moitié du budget des subventions et contributions du SNA est alloué par la voie du mécanisme de financement fédéral-provincial-territorial.

Grâce au mécanisme de financement national, le SNA appuie des projets d’alphabétisation en partenariat avec les organismes nationaux d’alphabétisation, les coalitions provinciales-territoriales d’alphabétisation, les entreprises, les syndicats et les organismes non gouvernementaux qui s’intéressent à l’alphabétisation. Le SNA a encouragé le partage d’expertise en matière de pratiques exemplaires afin de prévenir le double emploi et d’accroître l’efficacité. De même, dans son travail auprès des entreprises et des syndicats, il a encouragé la multiplication d’occasions d’apprentissage non traditionnelles et le recours à des méthodes novatrices pour promouvoir l’apprentissage tant en milieu de travail qu’ailleurs.

Le financement offert par l’intermédiaire du SNA et l’établissement de partenariats facilitent la mise en commun des ressources grâce à l’obtention d’engagements financiers de la part d’une vaste gamme de sources gouvernementales et non gouvernementales. Le Comité s’est fait dire à maintes reprises que l’un des secrets du succès de la politique canadienne en matière d’alphabétisation réside dans les partenariats établis avec l’appui du SNA. Il ne fait aucun doute que ces partenariats permettent une concentration des ressources et un échange d’idées. Ils renseignent aussi les intervenants en alphabétisation sur ce qui se fait et, dans un contexte où les ressources sont limitées, il est crucial non seulement de réduire le double emploi mais aussi de reproduire ce qui fonctionne le mieux.

En plus de déplorer le sous-financement du SNA, certains témoins ont exprimé des réserves au sujet de son mandat qui, selon eux, l’empêche d’offrir un financement permanent aux projets d’alphabétisation qui fonctionnent bien. On nous a dit que le financement ne pouvait dépasser trois ans et que cette contrainte limitait la capacité du SNA d’élargir sensiblement l’application de projets fructueux.

… un projet initial du Secrétariat d’un montant de 80 000 $ pour une campagne de sensibilisation sociale aux besoins en alphabétisation a donné un rendement de 7 dollars pour 1. Cette subvention d’amorçage nous a permis d’aller chercher 40 000 $ auprès de la province pour appuyer cette campagne; de recueillir un montant de 58 000 $ auprès du secteur des affaires lors des deux tournois de golf PGI suivants, que nous avons investi dans l’octroi de bourses d’apprentissage et l’achat de nouveau matériel; d’obtenir une subvention de 100 000 $ de la Corporation manitobaine des loteries pour réaliser une série d’émissions télévisées que des milliers de personnes ont pu recevoir par satellite cet hiver; et enfin de nous associer à la Winnipeg Foundation dans la publicité diffusée à la radio et sur des affiches pour annoncer cette campagne. (Marg Rose, directrice exécutive, Partners of Manitoba)82

Depuis sa création, le SNA a travaillé avec plus de 1 400 organismes, notamment avec des organismes d’alphabétisation, des conseils scolaires et des collèges communautaires ainsi que des organismes nationaux oeuvrant dans les domaines de la santé, de la justice pénale, des transports et de la condition féminine. Depuis 1988, il a financé plus de 5 000 projets.

Le graphique 4 donne un aperçu des dépenses du SNA au titre des subventions et contributions depuis 1988-1989. Comme l’illustre le graphique, le niveau des dépenses au titre de l’alphabétisation, en dollars courants et en dollars constants, s’est légèrement accru au cours de cette période. Le niveau des dépenses en 2002-2003 est anormalement gonflé parce qu’il comprend un don unique de 5 millions de dollars fait à la mémoire de Peter Gzowski. En 2003-2004, les dépenses prévues au titre du Programme national d’alphabétisation sont évaluées à 28,2 millions de dollars83.

On peut dire que malheureusement, les francophones accusent un niveau d’alphabétisme beaucoup plus faible que les anglophones. Dans un monde comme le nôtre, on ne peut pas se permettre d’avoir, à cet égard, une sous-population qui serait celle des francophones. Donc, en termes d’intervention, il faudrait peut-être voir à fixer des priorités. (Luce Lapierre, présidente, Fédération canadienne pour l’alphabétisation en français)84

Compte tenu de l’ampleur du problème d’analphabétisme au pays, les niveaux de dépenses indiqués dans le graphique 4 seraient, selon les témoignages recueillis et de l’avis de la plupart des membres du Comité, cruellement insuffisants. Certains d’entre nous s’inquiètent toutefois à l’idée d’allouer d’importantes sommes d’argent au SNA sans vraiment savoir dans quelle mesure les besoins en alphabétisation dépassent notre capacité d’y répondre. De plus, les membres croient qu’il est crucial que le SNA acquière une meilleure compréhension de l’incidence de ces dépenses sur les niveaux d’alphabétisation. Nous sommes tout à fait conscients du fait que le SNA n’est qu’un intervenant parmi tant d’autres dans l’arsenal de moyens mis en œuvre pour hausser le niveau de littératie des Canadiens; il importe néanmoins de trouver une façon de mieux mesurer le succès et l’efficacité du programme puisque, selon une récente évaluation qui en a été faite, cet aspect laisse actuellement à désirer.

GRAPHIQUE 4 - Subventions et contributions du Secrétariat national à l'alphabétisation

Nous ne mesurons pas les résultats de chaque personne. Parce que nous finançons des organismes tiers pour faire ce travail, nous ne comptons pas le nombre de participants, ni le nombre de Canadiens qui profitent de nos programmes. C’est là […] l’un des aspects à améliorer, selon notre récente évaluation du SNA. Nous devons vraiment trouver des façons de conserver ces données. Nous commençons maintenant à avoir à notre disposition des instruments qui permettent d’évaluer les capacités de lecture et d’écriture d’une personne lorsqu’elle s’inscrit à un programme. Il faudrait aussi faire une évaluation à la fin du programme pour voir combien de temps il a fallu et quels progrès ont été accomplis. (Lenore Burton, directrice générale, Direction de l’apprentissage et de l’alphabétisation, Développement des ressources humaines Canada)85

Le Comité est conscient que malgré certaines réserves au sujet de la capacité et du rendement du programme, nous devons commencer à nous attaquer à ce qui semble être un important sous-investissement dans l’alphabétisation. Nous devons trouver, dans le budget fédéral actuel, des fonds qui peuvent être utilisés pour accroître sensiblement nos investissements dans les projets d’alphabétisation financés par le SNA. À notre avis, ce programme devrait être le premier à profiter de l’engagement pris par le gouvernement dans La mise à jour économique et financière d’octobre 2002 quant à la réaffectation des ressources en fonction des priorités. Dans le budget de février 2003, le gouvernement a indiqué son intention de réaffecter un milliard de dollars par année provenant de programmes de dépenses existants, à compter de 2003-200486.

Grâce au Secrétariat national à l’alphabétisation et aux partenaires locaux, comme nous, mais aussi à beaucoup d’autres, nous avons constitué depuis 1988 une base solide partout au pays sans toutefois parvenir à rejoindre suffisamment de gens. Nous touchons entre 5 et 10 % de la population dont on parle et dont il est question ici en comité. C’est donc dire qu’une augmentation du financement […] je comprends qu’il y a des limites. C’est pourquoi nous encourageons le Comité à poursuivre son examen et à collaborer avec nous pour établir un niveau de financement […] qui nous permettra d’avoir un réel impact et de venir en aide à un grand nombre de gens. (John O’Leary, président, Collège Frontière)87

… il faut en effet investir plus d’argent et […] je pense aussi qu’il faut consacrer plus d’argent au Secrétariat national à l’alphabétisation. (Christian Pelletier, coordonnateur, Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec)88

Je dois le dire publiquement, le Secrétariat national en alphabétisation de DRHC, mérite des éloges. Il a offert un important soutien financier et technique au Congrès du travail du Canada, à ses syndicats affiliés ainsi qu’aux fédérations de travailleurs provinciales et territoriales engagées dans des projets d’alphabétisation depuis 1988 et a offert aux syndicats un soutien indispensable pour renforcer leur capacité de faire avancer le dossier de l’alphabétisation au travail et auprès des instances responsables de la politique gouvernementale. Il n’a toutefois plus les ressources pour répondre à la demande actuelle. (Kenneth Georgetti, président, Congrès du travail du Canada)89

Recommandation 10

Le Comité recommande :

que le budget annuel des subventions et contributions du Secrétariat national à l’alphabétisation soit porté de 28,2 à 50 millions de dollars, à l’exclusion des nouveaux fonds destinés au mécanisme de financement autochtone proposé. L’attribution des nouveaux fonds devra continuer de se faire par la voie du mécanisme de financement national et du mécanisme de financement fédéral-provincial-territorial, de même que conformément à l’entente conclue avec le Québec, et devra respecter toutes les autres conditions pouvant découler d’une éventuelle entente relative à la mise en place d’un accord pancanadien sur l’alphabétisation et l’acquisition de capacités au calcul. [La mention d’un accord pancanadien vise à souligner que le gouvernement fédéral doit chercher à obtenir l’accord unanime des provinces et des territoires pour tenter de trouver une solution au grave problème de sous-alphabétisation du pays. S’il n’est pas possible d’obtenir un accord unanime, le Comité invite le gouvernement fédéral à collaborer individuellement avec chaque province et territoire pour parvenir aux mêmes fins. Dans un cas comme dans l’autre, comme cette question relève exclusivement de la compétence des provinces et des territoires, un accord est nécessaire pour officialiser l’aide fédérale.];
que le tiers de l’augmentation soit alloué aux projets admissibles pour plusieurs années afin d’évaluer dans quelle mesure un financement stable influe sur la hausse du niveau d’alphabétisation et sur l’acquisition de capacités au calcul;
que le Secrétariat national à l’alphabétisation se serve de son important réseau de partenariats pour évaluer dans quelle mesure la demande de programmes d’alphabétisation dépasse l’offre;
que le Secrétariat national à l’alphabétisation soit à l’écoute des besoins en alphabétisation des adultes francophones, étant donné les résultats de l’Enquête internationale sur l’alphabétisation des adultes selon lesquels la proportion d’adultes sous-alphabétisés est plus élevée chez les francophones que chez les anglophones;
que le Secrétariat national à l’alphabétisation établisse, de concert avec les intervenants en alphabétisation, des objectifs et des indicateurs de rendement clairs et mesurables afin d’évaluer les compétences en lecture, en écriture et en calcul des apprenants, à partir desquelles les bénéficiaires de l’aide du SNA devront faire rapport. Une fois ces indicateurs de rendement établis, Développement des ressources humaines Canada devra en faire rapport chaque année dans son rapport sur le rendement.

2.      Aider les collectivités et les familles

Toute politique d’alphabétisation doit reconnaître le rôle important de la famille pour ce qui est d’alphabétiser les enfants et de leur faire comprendre la valeur de la lecture et de l’écriture, car l’apprentissage commence à la maison. Les recherches montrent que les premières années, soit la période allant de la conception à six ans, sont les plus importantes pour le cycle de développement du cerveau et l’apprentissage subséquent. Selon une étude, faire la lecture à un enfant et jouer avec lui pendant les 36 premiers mois de la vie favorisent l’acquisition de la capacité verbale90. Malheureusement, les parents peu alphabétisés sont incapables de participer vraiment à l’alphabétisation de leurs enfants. Le Comité estime donc que toute politique cohérente en cette matière doit comporter, parmi ses composantes essentielles, un volet «  alphabétisation des familles  ».

Dans ce type de programme, la famille est considérée comme une unité apprenante. L’un des objectifs en est de valoriser la lecture et l’apprentissage en tant qu’activité familiale. L’alphabétisation des familles vise aussi à rompre le cycle intergénérationnel de l’illettrisme. Il existe des preuves que ce type d’intervention atteint effectivement cet objectif socioéconomique important, mais le Comité estime néanmoins que le Secrétariat national à l’alphabétisation devrait mettre en place des projets pilotes pour évaluer cet aspect de l’alphabétisation des familles. D’après certains témoins, les recherches du National Center for Family Research, situé au Kentucky, ont démontré que lorsque les parents et les enfants participent ensemble à ce type de programme [...] après 10 ans 85 p. 100 des enfants avaient un fonctionnement correspondant ou supérieur à leur degré de scolarisation et 66 p. 100 des parents avaient un emploi rémunéré ou avaient entrepris des études91.

J’aimerais vous citer quelques exemples authentiques des résultats de l’alphabétisation. Dans le nord de la Saskatchewan, le président de l’association Laubach, un bénévole, a enseigné à lire et à écrire à un jeune homme appelé Daniel. Or, celui-ci est aujourd’hui le premier membre de sa famille, depuis cinq générations, qui ne soit pas assisté social. Le cycle familial a donc été rompu et on a vu naître une nouvelle valeur dans cette famille. (Robin Jones, directrice exécutive, Laubach Literacy of Canada)92

… en 1994, ma partenaire Laureen MacKenzie et moi-même avons eu une idée que nous avons soumise aux responsables de ce partenariat fédéral-provincial. Nous avons obtenu une petite subvention qui nous a permis d’approfondir et de perfectionner notre idée. C’est ainsi qu’est né le Literacy and Parenting Skills (LAPS). Il s’agit d’un programme d’alphabétisation en milieu familial qui aide les participants à apprendre à lire, tout en rehaussant leurs aptitudes parentales. Notre programme est maintenant connu à l’échelle nationale, et il a été adapté à diverses clientèles : Premières Nations, francophones, et parents illettrés dont l’anglais est la langue seconde. (Elaine Cairns, vice-présidente, Alberta Literacy)93

Notre programme comporte un volet familial, ce qui fait de nous une école unique: en fait, nous misons sur les parents à titre de partenaires de l’éducation, l’accent étant une fois de plus mis sur l’alphabétisation en famille, les familles saines, les familles et la culture et l’adoption de modes de vie sains. Nous [élaborerons] des programmes, des manifestations et des événements culturels visant à aider les familles à renforcer leurs relations avec l’école et à sensibiliser les familles elles-mêmes. Le volet familial du programme a été rendu possible grâce à des fonds
destinés au développement de la petite enfance. Nous avons eu la chance de toucher une partie de cet argent. (Irene La Pierre, directrice, Piitoayis Family School, Calgary Board of Education)94

Grâce [au programme «  Tools For Community Building  »], Holman, une petite collectivité inuite de la côte Arctique, a pu élaborer son propre plan complet d’alphabétisation familiale en organisant des partenariats avec l’école locale, la garderie, le programme linguistique et culturel, les aînés et les parents. Ainsi est né tout un éventail de programmes qui appuient des activités culturelles et des activités d’alphabétisation en anglais et en langue inuinnaktune, c’est-à-dire qu’on a atteint le double objectif d’un appui à l’alphabétisation par la langue et d’une revitalisation de la culture. (Cate Sills, directrice exécutive, Northwest Territories Literacy Council)95

Il a été question, dans le budget fédéral, de l’adoption de mesures qui contribueraient à améliorer les programmes de formation des Autochtones et à accroître la participation des collectivités et des parents. Ce facteur est très important. Lorsque les parents s’intéressent davantage à l’éducation de leurs enfants, à leurs résultats scolaires, cela a un impact positif sur les jeunes et les étudiants. Donc, il faut se concentrer davantage sur l’alphabétisation des familles, aider les parents et les grands-parents — ce sont souvent eux qui s’occupent des enfants — à maîtriser davantage l’anglais, à collaborer de plus près avec les jeunes écoliers. La participation de la collectivité et des parents est donc essentielle. (Danette Starr-Spaeth, directrice générale du Secrétariat à l’éducation et à la formation, Federation of Saskatchewan Indian Nations)96

Incontestablement, les collectivités axées sur l’apprentissage favorisent l’alphabétisation des familles. La notion d’une «  collectivité apprenante  » s’étend bien au-delà du système scolaire classique et englobe les capacités qui sont disponibles dans l’ensemble des secteurs public et privé (secteur bénévole, bibliothèques, musées, organismes de services de santé et de services sociaux, lieux de travail, écoles, etc.). En créant des partenariats entre tous les intervenants et en intégrant les moyens, les collectivités apprenantes peuvent répondre plus adéquatement aux besoins en capital humain d’une société dont le niveau de connaissance est à la hausse97.

Je pense que ce serait bien de pourvoir aux soins à l’enfance ... Je pense aussi qu’il serait nécessaire de verser plus d’argent aux organisations en alphabétisation pour les assister dans le travail qu’elles font. Ainsi, elles pourraient embaucher plus d’employés et accueillir plus d’apprenants. 98

L’aide à l’apprentissage et la facilité d’accès (tuteurs, copistes, évaluations adaptées, équipement technologique spécial et ainsi de suite) sont essentiels pour les adultes qui éprouvent des troubles d’apprentissage99.

Le Comité a entendu des témoignages sur une initiative d’alphabétisation concernant une collectivité entière. Il s’agit de Birmingham, l’une des villes les plus diversifiées culturellement d’Angleterre. L’initiative a été suscitée par le déclin prolongé de l’industrie de l’automobile, secteur manufacturier traditionnel de cette ville. En 1995, les premières mesures ont été prises pour transformer Birmingham en une attraction touristique européenne. De là est née la décision d’effectuer un investissement important dans le capital humain. Non seulement le taux des études secondaires terminées dans la ville était inférieur à la moyenne nationale, mais une forte proportion des adultes était plus ou moins illettrée. Ainsi a-t-on découvert que les enfants qui entraient à l’école manquaient trop souvent des compétences de base. Il fut décidé de réorienter certains des fonds destinés à l’amélioration des infrastructures matérielles pour les consacrer à l’alphabétisation et à l’acquisition de capacités au calcul dans toutes les régions, tranches d’âge et secteurs de la ville100. Nous avons appris qu’une décennie d’apprentissage inspirée en partie du «  Core Skills Development Partnership  » de Birmingham, avait été mise en branle à Vancouver, en vue de la candidature de cette ville aux Jeux olympiques de 2010.

Nous sommes maintenant prêts à passer à l’étape suivante en instaurant des projets d’apprentissage communautaire qui pourraient servir un double objectif. Premièrement, réaliser les objectifs du gouvernement fédéral en matière d’apprentissage et de compétences [...et accroître] le rôle de l’alphabétisation des familles dans la mise en valeur du capital social et humain. Le deuxième objectif consisterait à appuyer la candidature de Vancouver pour les Jeux olympiques par une décennie d’alphabétisation et d’apprentissage. Cette idée s’inspire de projets comme celui concernant les compétences de base, mené à Birmingham, au Royaume-Uni.(Jean Rasmussen, directrice, Alphabétisation familiale, Literacy British Columbia)101

Comme nous l’avons souligné plus haut, nous estimons que les partenariats communautaires, comme ceux qu’appuie le Secrétariat national à l’alphabétisation, sont indispensables pour réduire l’illettrisme au Canada. Ils permettent le regroupement des moyens et les échanges d’idées, et servent à renseigner les intervenants en alphabétisation de ce qui se fait, de manière à réduire autant que possible les doubles emplois et à reproduire les bonnes pratiques. L’un des partenariats communautaires qui devrait être utilisé davantage est celui du réseau des bibliothèques publiques du Canada. Malheureusement, un certain nombre d’initiatives d’alphabétisation émanant des bibliothèques ont dû cesser par manque de fonds. Parmi les programmes qui fonctionnent toujours, citons le projet vancouverois parents-enfants «  Mother Goose  », qui cherche à toucher les parents de jeunes enfants qui ne font pas souvent appel à la bibliothèque. À Regina, la Albert Library mène deux projets d’alphabétisation. Le premier, le Community Stories Program, amène des pompiers et des aides-bibliothécaires dans les salles de classe pour faire la lecture à des enfants de la 1ère à la 3e année. Le deuxième, le Herchmer Community School Family Literacy Project, soutient et favorise l’alphabétisation des familles. La Bibliothèque publique de Regina réalise aussi un projet informatique sur Internet, Readthis.ca, qui présente des bulletins de nouvelles rédigées en langage simple, ainsi que des questions et réponses, le tout pour aider les gens à digérer l’information. La Bibliothèque publique d’Iqaluit offre un certain nombre d’initiatives liées à l’alphabétisation, notamment la possibilité pour les détenus de l’établissement pour jeunes contrevenants et du Baffin Correction Centre qui font preuve de bonne conduite de venir à la bibliothèque une fois par semaine pour emprunter un maximum de trois livres102.

À notre avis, l’augmentation du nombre d’initiatives comme le Programme d’accès communautaire (PAC), appuyé par Industrie Canada, et le Bureau des technologies d’apprentissage (BTA), de DRHC, favoriserait l’apprentissage dans les collectivités. Lancés dans des régions rurales en 1994, puis étendus à des collectivités urbaines en 1999, le PAC et le BTA assurent aujourd’hui un accès à Internet à de nombreux Canadiens, dont des personnes handicapées, grâce à une technologie informatique spécialisée. Le BTA offre des possibilités novatrices d’apprentissage permanent par divers moyens, notamment par la promotion et le soutien de Réseaux d’apprentissage communautaires, grâce à la technologie.

Certains témoins sont d’avis que la technologie est une arme à double tranchant pour les personnes peu alphabétisées : elle peut, nous l’avons dit, représenter un obstacle à cause du fossé numérique, mais parfois, elle stimule l’intérêt et incite à apprendre, sans compter les possibilités évidentes qu’elle offre dans les régions éloignées (apprentissage à distance).

C’est ce que montre l’étude AlphaRoute. Nous nous sommes demandés : peut-on vraiment faire en sorte qu’une personne ayant peu de compétences puisse fonctionner indépendamment? Il existe des cybertuteurs ainsi que d’autres niveaux de soutien. Nous ne pouvons pas continuer d’espérer que les gens prendront l’initiative d’adhérer aux programmes. Il y a tellement d’obstacles concrets à ce que l’on peut offrir. Je pense que nous devons examiner cela de plus près. (Marg Rose, directrice exécutive, Literacy Partners of Manitoba)103

Il y a trois ou quatre ans, nous avons constaté qu’une partie importante de notre clientèle était sérieusement menacée de «  manquer le bateau  » d’Internet. Vous connaissez sans doute les travaux effectués par le Bureau des technologies d’apprentissage de DRHC, qui a commencé par étudier la fracture numérique et qui examine aujourd’hui la double fracture numérique. Cette expérience, lancée en partenariat avec Industrie Canada, a consisté à mettre des sites du PAC à la disposition de tout le pays. Beaucoup de personnes, dont certaines avaient déjà eu du mal à utiliser Internet auparavant, s’y sont mises et ont réussi à se servir du Web et à en exploiter les possibilités. Il en reste néanmoins un certain nombre, celles qui se trouvent au niveau inférieur de la double fracture numérique, qui n’y arrivent pas. Nous avons la chance d’être l’un des premiers organismes communautaires à avoir obtenu un site du PAC, et nous l’avons installé près des locaux utilisés pour le programme d’alphabétisation. Ce site s’est progressivement intégré à ce qui est devenu le Centre d’apprentissage permanent de St. Christopher House. (Susan Pigott, présidente et directrice générale, St. Christopher House)104

Recommandation 11

Le Comité recommande que le Secrétariat national à l’alphabétisation :

Augmente son appui aux partenariats d’apprentissage communautaire et d’alphabétisation des familles;
Crée du matériel éducatif d’apprentissage à distance et facilite des projets qui rendent l’accès à l’alphabétisation plus équitable pour les personnes qui habitent dans des régions éloignées du pays ou qui préfèrent ne pas recevoir une formation en alphabétisation dans un établissement;
Favorise et appuie d’autres initiatives d’alphabétisation qui comportent une participation des bibliothèques publiques, facteur important qui contribue à la promotion et au développement de l’alphabétisation dans nos collectivités.

Recommandation 12

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral continue de promouvoir et d’appuyer la création et l’élargissement de réseaux qui donnent aux collectivités les moyens de renforcer leurs capacités d’apprentissage en ayant recours à la technologie des réseaux.

3.      Les décrocheurs

Tout le monde sait que l’une des solutions à long terme au problème de l’illettrisme au Canada est un système d’enseignement primaire et secondaire qui fasse en sorte que tous les diplômés quittent l’école munis des connaissances de base nécessaires pour participer entièrement à la société canadienne. L’un des moyens que le gouvernement fédéral peut prendre pour aider les gouvernements provinciaux et territoriaux à atteindre cet objectif réside dans le financement des évaluations du niveau d’alphabétisation des élèves. À l’heure actuelle, le gouvernement fédéral appuie l’évaluation des connaissances des élèves francophones et anglophones au pays, par le truchement du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) de l’OCDE. Cet effort concerté des pays de l’OCDE vise à mesurer, selon des critères uniformes, les compétences des élèves de 15 ans dans trois domaines : la lecture, les mathématiques et les sciences. Le PISA prévoit des cycles pour chacun des domaines. En 2000, l’accent portait surtout sur la lecture; les mathématiques et les connaissances scientifiques seront examinées plus à fond en 2003 et 2006 respectivement. D’après PISA 2000, sur 31 pays, le Canada se classe au deuxième rang en lecture, au cinquième rang en sciences et au sixième rang en mathématiques105.

La diapositive suivante […] illustre la capacité de lecture des jeunes de 15 ans dans les provinces et les pays qui ont participé à l’étude du PISA de l’OCDE. Nous voyons que le Canada n’est dépassé que par la Finlande pour ce qui est de la capacité moyenne de lecture. […] Si l’Alberta était un pays, ce serait le meilleur pays du monde […]. Toutes les provinces se situent au-dessus de la moyenne de l’OCDE. Ainsi, comparativement aux jeunes de nos partenaires commerciaux, nos jeunes de 15 ans font très bonne figure, mais les résultats varient beaucoup d’une province à l’autre. (Scott Murray, directeur général, Statistiques sociales et des institutions, Statistique Canada)106

Un autre moyen important que le gouvernement fédéral peut prendre pour aider les jeunes à hausser leur degré d’alphabétisation est d’encourager les décrocheurs à retourner à l’école. Nous savons que le nombre d’années de scolarité est l’une des variables explicatives les plus révélatrices des résultats des tests de mesure de l’alphabétisme. Les jeunes à faible taux d’alphabétisation qui ont décroché avant la fin de leurs études secondaires ont obtenu des résultats nettement inférieurs à ceux des jeunes qui ont terminé leurs études secondaires, selon le test d’alphabétisation de l’EIAA107. Les faibles compétences en lecture et en écriture des décrocheurs se traduisent également par un grave problème de chômage. En 2002, par exemple, les taux de chômage moyens des jeunes de 15 à 24 ans possédant huit années de scolarité ou quelques années d’études secondaires se situaient à 25,8 % et 20,3 % respectivement108. Cette proportion avoisine le double de celle des jeunes qui ont obtenu un diplôme d’études secondaires et le triple de celle de l’ensemble de la population active.

Selon le Budget des dépenses 2003-2004 de DRHC, la Stratégie emploi jeunesse (SEJ) a été réorientée, conformément à l’annonce contenue dans le discours du Trône du 30 septembre 2002, de manière à ce que les politiques du gouvernement en faveur de l’emploi des jeunes tiennent compte des besoins changeants des jeunes à cet égard. Manifestement, l’un de ces besoins, du moins parmi les décrocheurs, est celui d’une formation en alphabétisation. Toutefois, d’après ce que nous pouvons constater, la réorientation de la SEJ n’a guère tenu compte des jeunes ayant un niveau de littératie peu élevé. Dans l’idéal, le Comité souhaiterait la mise en place d’un programme qui incite d’une façon quelconque les décrocheurs à retourner à l’école et à acquérir au moins une scolarité de niveau secondaire. À ce sujet, nous rappelons l’initiative relativement réussie L’école avant tout qui a existé entre 1989 et 1995. Selon une évaluation, ce programme aurait entraîné une augmentation du taux de maintien des élèves à l’école et de la proportion de ceux qui se sont rendus au bout de l’année (p. ex., plus de 60 % des élèves qui ont participé à ce programme en 1992-1993 ont terminé leur année scolaire grâce au programme), et il aurait affiché un excellent rendement coût-efficacité109.

Le Comité soutient que l’investissement dans l’alphabétisation des jeunes adultes est, pour les contribuables, l’un des plus rentables en matière d’alphabétisation, car les membres de cette tranche d’âge sont associés à la période de récupération la plus longue. De plus, on peut en attendre des avantages sur le plan intergénérationnel, dès lors que ces personnes sont appelées à fonder des familles. C’est pourquoi le Comité est extrêmement étonné que le budget des Équipes d’alphabétisation ait été réduit de 50 % en 2002-2003110. Nous sommes tout à fait opposés à cette décision.

Recommandation 13

Le Comité recommande :

que, dans le cadre d’un accord pancanadien sur l’alphabétisation et l’acquisition de capacités au calcul, le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces et les territoires, songe à réorienter une partie des fonds attribués à la Stratégie emploi jeunesse, de manière à favoriser l’enseignement aux jeunes décrocheurs, grâce à une initiative «  apprendre et gagner  » qui les inciterait au moins à terminer leurs études secondaires [Remarque : L’idée d’un accord pancanadien vise à inciter le gouvernement fédéral à tenter de convaincre l’ensemble des provinces et des territoires de se pencher sur ce grave problème du faible taux d’alphabétisation au pays. Si cela s’avère impossible, le Comité encourage le gouvernement fédéral à tenter de convaincre chaque province et chaque territoire séparément. Dans un cas comme dans l’autre, étant donné que cette question relève de la compétence constitutionnelle des provinces et des territoires, l’aide fédérale doit s’inscrire dans un accord.];
que le Secrétariat national à l’alphabétisation porte de nouveau à 1 million de dollars le budget qu’il consacre aux Équipes d’alphabétisation, à partir de 2004-2005;
que le gouvernement du Canada continue de verser un soutien financier suffisant à l’évaluation pancanadienne des compétences des élèves en lecture et en écriture.

4.      Alphabétisation et personnes handicapées

Des études ont démontré que le niveau d’instruction, de littératie et d’emploi sont plus faibles chez les personnes handicapées que dans le reste de la population canadienne. Selon l’Enquête internationale sur l’alphabétisation et les compétences des adultes (EIACA) de 1994, 77 % des personnes atteintes de troubles d’apprentissage111 et 48 % des personnes atteintes d’un handicap physique avaient une capacité de lecture de textes schématiques inférieure au niveau 3, contre 36 % pour les personnes sans handicap112. De plus, selon les résultats de l’Enquête sur la participation et les limitations d’activités (EPLA), quelque 13 % des adultes handicapés âgés de 15 ans et plus ont déclaré être atteints de troubles d’apprentissage, ce qui représente 1,9 % des Canadiens âgés de 15 ans et plus113. Chez les enfants, le nombre est beaucoup plus élevé. Des troubles d’apprentissage ont été signalés chez quelque 100 000 enfants d’âge scolaire, soit près des deux tiers de tous les enfants d’âge scolaire ayant déclaré un handicap. Les garçons sont plus sujets à des troubles d’apprentissage que les filles (68,9 % contre 58 %)114. D’autres données de l’EPLA sur l’éducation et l’emploi chez les adultes atteints d’handicaps devraient être publiées au milieu de l’été 2003. Selon les dernières données publiées du recensement de 1996, les personnes handicapées ont moins de chances d’avoir terminé le secondaire que les Canadiens sans handicap (50 % contre 70 %) ou d’être diplômées universitaires (7 % contre 17 %). Ces résultats sont particulièrement troublants car il a été démontré que certaines personnes handicapées qui ont eu la chance d’atteindre un niveau de littératie plus élevé sont plus susceptibles de trouver un emploi que les autres adultes handicapés. Chez les adultes handicapés qui ont fait des études universitaires, le taux d’emploi dépasse le double de celui des adultes handicapés qui n’ont fait que des études élémentaires. La probabilité de participer à la main-d’œuvre active rémunérée varie toutefois en fonction de la nature du handicap 115, 116.

L’un des problèmes signalé régulièrement par les centres qui participent au projet «  Affronter la mer  » est qu’une formation et des compétences insuffisantes et un niveau d’alphabétisation peu élevé sont un obstacle additionnel à surmonter pour les nombreux Canadiens handicapés qui souhaitent exercer un emploi ou une activité connexe117.

Les difficultés d’apprentissage sont maintenant reconnues comme un trouble neurologique permanent qui touche au moins 10 % des Canadiens, dont plus de 80 % ont de la difficulté à apprendre à lire. Toutefois, il importe de rappeler que différents types d’handicaps influent différemment sur le degré d’alphabétisation d’une personne. Les troubles d’apprentissage peuvent nuire à l’acquisition et à l’utilisation d’une ou plusieurs des compétences suivantes :

langue parlée (écouter, parler et comprendre);
lecture (décodage, connaissance phonétique, reconnaissance des mots, compréhension);
langue écrite (épellation et expression écrite);
mathématiques (calcul, résolution de problèmes)118.

On évalue à quelque 30 à 80 % le pourcentage d’apprenants adultes inscrits dans des programmes d’alphabétisation et d’éducation de base qui sont atteints de troubles d’apprentissage, dont près de la moitié n’ont pas été diagnostiqués. La cause possible serait que, dans le passé, les troubles d’apprentissage étaient moins connus et très peu évalués chez les très jeunes enfants. Selon certaines études, si les troubles d’apprentissage ne sont pas détectés en bas âge et qu’il n’y a pas d’intervention appropriée avant l’âge de huit ans, il y a une forte probabilité (75 %) que l’apprenant continuera d’éprouver des difficultés à lire au secondaire. À ce stade, 35 % des étudiants chez qui on a diagnostiqué des troubles d’apprentissage abandonneront l’école. À l’âge adulte, nombre d’entre eux s’inscriront dans un programme d’alphabétisation ou d’apprentissage des compétences de base, mais la majorité décrocheront car les programmes d’alphabétisation et de formation de base des adultes (FBA) ne pourront répondre à leurs besoins particuliers119.

Les troubles d’apprentissage sont neurologiques et permanents. Ils affectent un processus sinon plusieurs de l’apprentissage. Quand je parle d’apprentissage, j’entends l’apprentissage dans des contextes très différents : école, lieu de travail, terrain de soccer, en famille et en société. Il y a un net recoupement entre les capacités de lecture et d’écriture et les troubles d’apprentissage. Si on consulte quelques statistiques, on constatera que chez 30 à 50 % de tous les étudiants suivant des cours d’alphabétisation et d’éducation élémentaire, on a diagnostiqué des troubles d’apprentissage. Sur tous les participants des programmes de
formation en milieu de travail, entre 15 et 30 % présentent des troubles d’apprentissage, et entre 25 et 40 % de tous les adultes qui reçoivent des prestations d’aide sociale en ont aussi. (Elizabeth Gayda, présidente sortante, Association canadienne des troubles d’apprentissage)120

Comme il en a été question ailleurs dans le rapport, les personnes atteintes du Syndrome d’alcoolisme fœtal (SAF) et des Effets de l’alcool sur le fœtus (EAF) éprouvent aussi des difficultés d’apprentissage. La recherche actuelle sur le SAF et les EAF indiquent que l’un comme les autres pourraient nuire à la capacité d’apprentissage et pourraient constituer un facteur à prendre en compte dans l’évaluation des besoins des apprenants adultes ayant un niveau peu élevé d’alphabétisation. Le SAF et les EAF sont présents toute la vie. Un enfant d’âge scolaire atteint du SAF peut éprouver des troubles primaires tels que l’hyperactivité, une déficience de l’attention, des difficultés d’apprentissage, des difficultés en calcul, une déficience cognitive, des problèmes de langage et un manque de contrôle sur ses impulsions. À l’adolescence et à l’âge adulte, les difficultés primaires sont : une déficience de la mémoire, des problèmes de jugement et d’abstraction et la difficulté de s’adapter. Il a été démontré qu’il y a un net lien entre le SAF/EAF et une déficience de l’attention assortie ou non d’hyperactivité, les troubles de comportement, ainsi que la délinquance et le crime. Chaque jour au Canada, un enfant naîtrait avec le syndrome d’alcoolisme fœtal. Selon les premières études, le taux de SAF/EAF dans certains groupes autochtones pourrait être très élevé. On évalue à 1,4 millions $ US les coûts additionnels des soins de santé, d’éducation et des services sociaux à prodiguer à une personne atteinte du SAF sa vie durant. En janvier 2000, le gouvernement fédéral a lancé une initiative en SAF/EAF de 11 millions $ pour améliorer diverses activités, notamment la sensibilisation et l’éducation du public, la surveillance, le dépistage, le diagnostic et l’intervention précoces, la formation et le développement des capacités et une aide aux programmes communautaires121. Le Comité est conscient que le SAF/EAF préoccupe grandement les fournisseurs de soins de santé, de services d’éducation, et de services correctionnels et sociaux. Il appuie sans réserve les efforts du gouvernement fédéral visant à prévenir le SAF/EAF, ainsi que les autres initiatives des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux et des organismes sans but lucratif, visant à améliorer la santé des enfants et des familles d’ici qui sont touchés par le SAF/EAF.

Partout au pays, on s’efforce, par l’entremise de quelques programmes d’alphabétisation, de s’attaquer à certains des problèmes susmentionnés en s’assurant que les apprenants adultes atteints d’une incapacité ont accès à un programme d’alphabétisation. Selon un sondage récent de l’Association canadienne des centres de vie autonome (ACCVA), la plupart des fournisseurs de programmes d’alphabétisation qui ont participé au sondage (265 répondants) ont indiqué que leurs installations ont été aménagées pour accueillir les personnes handicapées. Toutefois, un nombre restreint de programmes peuvent répondre aux besoins des apprenants qui sont handicapés visuels, aveugles, handicapés auditifs, ou atteints d’autres troubles plus complexes. En outre, les services offerts par les bibliothèques publiques aux Canadiens incapables de lire les imprimés ne sont ni coordonnés ni uniformisés, et ne sont offerts qu’au compte-gouttes : il y a donc manque de cohérence122. Le Comité, en accord avec les mémoires reçus, est d’avis que tous les Canadiens devraient avoir le droit et le choix d’accès aux programmes d’alphabétisation et aux services de bibliothèque dans leurs collectivités. D’autres formats, tels des documents en braille et en langue parlée, devraient être facilement disponibles pour éliminer autant que possible les obstacles et favoriser au maximum la lecture et la compréhension. Il est essentiel que les besoins d’alphabétisation des Canadiens handicapés reçoivent toute l’attention qu’ils méritent dans une politique d’alphabétisation qui s’appliquera dans l’ensemble du pays.

Les données de la recherche nous démontrent que les besoins des personnes handicapées n’ont pas été satisfaits. Malgré les efforts extraordinaires de certains intervenants en alphabétisation et groupes de personnes handicapées dans l’ensemble du pays, la situation en matière d’alphabétisation des personnes handicapées n’a pas vraiment évolué au cours de la dernière décennie. Il existe des centaines, voire des milliers de programmes d’alphabétisation au Canada. Une étude documentaire a montré qu’il n’y a pas assez de programmes qui répondent aux besoins des personnes handicapées. Le fait que le système d’éducation ne soit pas intégré et la rareté des programmes d’alphabétisation pour les personnes handicapées au Canada ont abouti à un niveau de scolarité plus bas, à une faible litératie et à un taux élevé de chômage123.

Plusieurs politiques et programmes fédéraux visent à éliminer les obstacles à la participation et à l’inclusion des personnes handicapées pour que celles-ci puissent profiter des possibilités d’emploi et d’apprentissage. Ainsi, le Fonds d’intégration pour les personnes handicapées aide celles-ci à rechercher, à trouver et à garder un emploi ou à devenir travailleurs autonomes. Toutefois, le Comité a appris que ce fonds est relativement modeste (23,8 millions de dollars en 2003-2004) et qu’il a pour objet d’aider les gens à obtenir un emploi le plus tôt possible et non d’améliorer leur degré d’alphabétisation nécessaire pourtant pour maintenir un emploi suffisamment rémunéré. Nous avons aussi appris que le processus de demande d’aide financière est complexe sur le plan administratif et devrait être simplifié.

De façon générale, les personnes handicapées ont profité de ce fonds. Toutefois, il y a plusieurs problèmes que j’aimerais souligner. Le fonds est relativement modeste et n’a pas vu d’augmentation depuis quatre ans alors que le coût des locaux, des allocations de formation et de l’équipement spécialisé a augmenté. (Bernadette Beaupré, coprésidente, National Coalition of Community Based Training)124

DRHC entreprendra de reconduire les modalités du Fonds d’intégration des personnes handicapées au cours de l’année financière en cours. Le Comité s’attend que ces modalités refléteront l’importance de hausser le degré d’alphabétisation et permettront aux personnes handicapées d’accéder plus facilement aux services d’évaluation et de développement de leur niveau de littératie. De plus, le programme fédéral-provincial conjoint, Aide à l’employabilité des personnes handicapées (AEPH), aide les personnes handicapées à se préparer en vue d’un travail, à décrocher un emploi et à le conserver. Les ententes actuelles conclues dans le cadre du programme prendront fin en mars 2003, et DRHC collabore avec ses partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux dans le but de définir et de mettre en place des ententes qui viendront remplacer les ententes actuelles125. Le Comité compte que ces ententes feront partie d’un accord pancanadien sur l’alphabétisation et prévoiront des services et un soutien pour les personnes handicapées, car il est convaincu qu’une alphabétisation accrue des personnes handicapées contribuera à accroître leur taux de participation à la main d’œuvre active et à améliorer leur qualité de vie.

Le Comité est heureux de constater que la ministre du Travail prévoit investir 5 millions $ en 2003-2004 pour élaborer des stratégies d’aide en milieu de travail pour les personnes handicapées et les Autochtones, comme il le recommandait dans son rapport Promouvoir l’égalité dans les secteurs de compétence fédérale : Examen de la Loi sur l’équité en matière d’emploi. C’est un bon départ, mais cette loi est de portée limitée et il reste beaucoup à faire. Le Comité insiste : il faut que les besoins d’alphabétisation des personnes handicapées soient pris en compte dans l’entente globale qui fait actuellement l’objet de négociations avec les provinces et les territoires et qui vise à éliminer les obstacles à l’apprentissage des personnes handicapées et à leur participation dans le marché du travail.

Recommandation 14

Le Comité recommande qu’une partie des nouvelles ressources pour un financement stable du Secrétariat national à l’alphabétisation serve à des projets d’alphabétisation pour les personnes ayant des difficultés d’apprentissage, en reconnaissance du fait que nombre de celles-ci ont besoin pour hausser leur degré d’alphabétisation d’une aide à long terme qui exige un financement pendant plusieurs années.

Recommandation 15

Le Comité recommande que l’entente globale qui est en cours de négociation avec les provinces et les territoires en vue d’éliminer les obstacles à l’apprentissage des personnes handicapées et à leur participation au marché du travail prévoie nécessairement le relèvement du degré d’alphabétisation et l’acquisition de capacités au calcul.

Recommandation 16

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral augmente le budget (qui est de 23,8 millions de dollars en 2003-2004) du Fonds d’intégration des personnes handicapées de 5 millions $ et consacre des fonds additionnels au relèvement du degré d’alphabétisation et à l’acquisition de capacités au calcul.

5.      Nouveaux arrivants au Canada

Pour les immigrants hautement qualifiés dont les études et les compétences professionnelles sont reconnues dans notre marché du travail, la transition au mode de vie canadien est relativement douce. Toutefois, comme il a déjà été mentionné dans le rapport, les données de l’EIAA indiquent que cette transition est probablement difficile pour bien des immigrants car les Canadiens nés à l’étranger comptent une part relativement grande de personnes possédant un niveau d’alphabétisation peu élevé. En 1994, quelque 59 % des Canadiens de 16 ans et plus, nés à l’étranger, avaient de la difficulté à lire couramment, contre 45 % des Canadiens du même âge nés ici. Quant à la capacité de lecture de textes schématiques, les pourcentages respectifs étaient de 57 et de 45 % de l’échantillon. De même, 52 % des 16 ans et plus nés à l’étranger avaient une faible capacité de lecture de textes au contenu quantitatif, contre 47 % des Canadiens nés ici126.

Pour que les nouveaux arrivants puissent prospérer et contribuer pleinement à la société canadienne, il est essentiel qu’ils parlent couramment l’anglais ou le français, ou les deux, et possèdent des compétences de base en lecture et en écriture. Le Comité a appris qu’entre 1997 et 2001, il y avait presque autant de nouveaux arrivants ayant déclaré pouvoir parler l’anglais ou le français qu’il y en avait qui ne parlaient ni l’une ni l’autre langue. Par exemple, en 2001, 114 775 (46 %) des répondants ont déclaré avoir la capacité de parler l’anglais, 11 315 (4,5 %), le français, et 13 027 (5 %), les deux, contre 111 229 (44 %) qui ne pouvaient parler ni l’une ni l’autre des deux langues officielles127.

Le gouvernement fédéral consacre chaque année quelque 80 % de son budget d’établissement de 333 millions $ à des programmes linguistiques destinés aux immigrants adultes. Un enseignement de base des langues est offert par l’entremise d’un programme appelé Cours de langues pour les immigrants au Canada (CLIC) dans toutes les régions du pays, sauf au Québec, au Manitoba et en Colombie-Britannique128. Certains témoins ont souligné les besoins des immigrants en matière de langue et d’alphabétisation.

Nous cherchons en priorité à dispenser une formation linguistique aux derniers arrivants plutôt qu’à ceux qui sont déjà sur place depuis quelques années… Les personnes qui sont immigrantes depuis trois ans, qui ont demandé la citoyenneté et qui sont devenues citoyennes tout en ayant encore des difficultés sur le plan linguistique ne peuvent pas bénéficier des programmes linguistiques prévus lors de l’établissement. Nos priorités sont donc les suivante : les immigrants récents, les premiers niveaux de compétence et, dans la mesure du possible et en partenariat, des niveaux plus poussés de compétence linguistique pour les personnes qualifiées qui en ont besoin. Nous nous efforçons aussi de combiner, chaque fois que nous le pouvons, une formation linguistique poussée avec des programmes de transition liés à l’emploi afin de disposer d’un guichet unique permettant d’assurer à la fois une formation linguistique et professionnelle intéressant davantage les employeurs. (Rosaline Frith, directrice générale, Intégration, ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration)129

Selon les témoignages entendus, les efforts actuels pour offrir de l’enseignement en langue seconde aux derniers immigrants sont mal coordonnés, consistent en des interventions à court terme et ne sont pas axés sur les besoins linguistiques des immigrants pour accéder au marché du travail. En 1990, le ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration a révisé ses programmes de langue pour les immigrants, remplaçant ses programmes axés sur l’emploi par de l’enseignement général des langues dans le cadre de CLIC. Le ministère met sans doute moins l’accent sur le marché canadien du travail, en partie parce que les programmes axés sur le marché du travail relèvent de DRHC130. Nous saluons l’engagement, pris dans le budget de février 2003, d’investir 10 millions $ en deux ans dans un programme pilote de formation davantage axé sur le marché du travail que ce n’est le cas actuellement. Toutefois, nous craignons que cette mesure visera surtout les immigrants hautement qualifiés qui ont besoin d’une formation professionnelle précise.

Étant donné le caractère à court terme de l’enseignement des langues aux immigrants aujourd’hui, nous avons l’impression que les besoins en langue seconde des immigrants peu alphabétisés n’ont pas l’attention qu’ils méritent. Comme certaines études ont démontré qu’il faut jusqu’à sept ans pour acquérir de la facilité dans une langue seconde, bien des immigrants peu alphabétisés seront tentés d’abandonner les programmes d’enseignement d’une langue seconde bien avant de pouvoir parler couramment une langue officielle, de sorte qu’il leur sera beaucoup plus difficile d’avoir accès à d’autres cours de formation ou à d’autres programmes de formation de base des adultes131.

Les immigrants et les réfugiés doivent avoir accès à des programmes d’alphabétisation de grande qualité. Il y a en ce moment en Ontario des lacunes dans les services offerts à ces groupes. Ainsi, même s’il est établi que les immigrants et les réfugiés ont besoin de services d’alphabétisation, il arrive souvent que ces services ne soient pas disponibles. On sépare souvent très nettement l’alphabétisation et l’anglais langue seconde à cause du partage des compétences provinciales et fédérales. Dans les programmes d’alphabétisation, on aiguille souvent les nouveaux venus ayant besoin d’alphabétisation vers les classes de CLIC et d’ALS, mais elles ne répondent pas nécessairement aux besoins. On a également coupé le financement des programmes de langues des nouveaux venus ayant des problèmes d’alphabétisation dans leur langue première. (Sue Folinsbee, directrice co-exécutive suppléante, «  Ontario Literacy Coalition  »)132

Pour ce qui est de la question précise de la formation linguistique sur le marché du travail, nous recommandons un redéploiement et une extension des… Cours de langues pour les immigrants au Canada… À l’heure actuelle, ce programme va jusqu’à la troisième année, ce qui ne permet pas aux intéressés d’acquérir pleinement le niveau d’alphabétisation et les compétences linguistiques exigées sur le marché du travail et ce qui ne permet pas non plus à un parent de suivre véritablement les études de son enfant et de communiquer efficacement avec les responsables du réseau scolaire. Ce sont là des éléments indispensables d’intégration économique et sociale. Nous recommandons par conséquent qu’on relève le niveau du CLIC, qu’on oriente davantage ce programme sur le marché de l’emploi et que l’on mette au point des critères de formation propres à chacune des professions. (Elizabeth McIsaac, directrice, Fondation Maytree)133

Je pense que le temps alloué à la formation linguistique est sans doute insuffisant. Il y a une grande différence entre l’immigrant professionnel qui a besoin d’apprendre l’une des deux langues officielles et celui qui est à la fois analphabète et ignorant de l’une ou l’autre langue. Il faut enseigner les deux à la fois. Une autre difficulté s’ajoute : dans certaines provinces, la politique d’alphabétisation exclut les immigrants parce que la province veut que ceux-ci continuent de relever du gouvernement fédéral. Ailleurs, ce n’est pas un problème. (Wendy DesBrisay, directrice générale, «  Movement for Canadian Literacy  »)134

Les lacunes du CLIC, notamment en ce qui a trait aux immigrants qui ont besoin d’acquérir une capacité de lire et d’écrire en langue seconde, inquiètent les membres du Comité étant donné que l’immigration devrait compter pour la totalité de la croissance nette de la main d’œuvre au Canada en 2011. Nous devons être mieux préparés si nous voulons que les immigrants aient accès à des programmes de formation en langue seconde qui offrent un enseignement d’une durée et d’un niveau suffisants pour qu’ils puissent pleinement s’intégrer sur le plan économique au Canada. En outre, même si la question n’est pas directement liée au problème du faible degré d’alphabétisation, les membres du Comité sont aussi convaincus qu’il nous faut faire des progrès importants pour ce qui est d’évaluer et de reconnaître les titres de compétence, tant professionnels qu’universitaires, des immigrants.

Recommandation 17

Le Comité recommande :

que le ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration revoie le budget de ses Cours de langues pour les immigrants au Canada de façon à allouer des fonds suffisants pour aider les immigrants, y compris ceux qui ont besoin d’apprendre une langue seconde, à surmonter les obstacles qui les empêchent d’accéder au marché du travail parce qu’ils n’ont pas de compétences en langues officielles. Tout financement additionnel doit aussi se refléter dans les ententes d’établissement conclues avec le Québec, le Manitoba et la Colombie-Britannique;
que le niveau et la durée de l’enseignement linguistique offert dans les Cours de langues pour les immigrants au Canada soient évalués de façon à répondre aux besoins des immigrants et des réfugiés;
que des fonds soient dégagés pour offrir des services additionnels, tels des services de transport et de garde d’enfants, pour aider les nouveaux arrivants qui ne peuvent avoir accès à un enseignement linguistique parce qu’ils n’ont pas l’aide nécessaire.

6.      Alphabétisation, justice et services correctionnels

A.     L’alphabétisation et le système de justice pénale

D’après ce qu’a entendu le Comité, les personnes qui viennent en contact avec l’appareil de justice pénale et qui ont peu de compétences en lecture et en écriture sont plus sujettes aux erreurs judiciaires en raison de leur incapacité de s’orienter et de communiquer dans un système où une grande adresse à cet égard est de rigueur. Une faible alphabétisation peut nuire à toutes les étapes du processus pénal, à partir de la compréhension de ses droits au moment de l’arrestation jusqu’au prononcé de la sentence, en passant par le témoignage devant le tribunal. De façon générale, les lois, les règlements, les documents judiciaires, les ressources et le matériel d’appui sont rédigés dans un langage qui exige du lecteur de solides compétences en littératie.

Dans la pratique, les tribunaux opèrent dans un cadre qui fait appel à un niveau d’expression très complexe. La langue employée, les notions et même les mots courants ont un sens particulier dans ce cadre. Pour être à son aise et bien comprendre ce qui se passe, une personne a besoin d’être très alphabétisée. Pourtant, la majorité des gens qui comparaissent devant un tribunal — pas seulement les accusés mais aussi les témoins et les victimes — n’ont souvent qu’un très faible niveau d’alphabétisation. Dans ce genre de situation, les tribunaux ont la très lourde charge de s’assurer que la procédure soit juste et équitable afin que les intéressés ne subissent pas un déni de justice. (Graham Stewart, directeur exécutif, Société John Howard du Canada)135

Comme l’ont appris les membres du Comité, le ministère de la Justice a fait un premier pas pour garantir la rédaction des lois et des règlements selon les principes de la lisibilité et pour voir à ce que des programmes d’éducation et d’information juridiques publics soient disponibles dans tout le pays136. Nous savons que la révision des lois et des règlements est un travail extrêmement long et compliqué et nous appuyons chaleureusement toutes les mesures prises par le ministère de la Justice pour s’y attaquer. Au chapitre 2, section II, le Comité recommande que tous les programmes et services (y compris ceux du ministère de la Justice) soient évalués afin de garantir que les personnes faiblement alphabétisées y aient accès et que les objectifs et la politique d’alphabétisation du gouvernement se réalisent. Dans le cas du système de justice pénale, la question en est une de justice fondamentale.

B.     Aptitudes de lecture et d’écriture des délinquants au Canada

D’après les témoignages présentés au Comité ainsi que de nombreuses études, la majorité des délinquants admis dans les établissements correctionnels du Canada ont d’importants déficits au niveau de l’alphabétisation et de l’éducation. Quelque 75 % des détenus sont sous-alphabétisés. Le Service correctionnel du Canada (SCC) utilise des tests d’aptitude standard (p. ex. le test d’habileté scolaire et universitaire (SCAT) ou l’épreuve canadienne de rendement pour adulte (CAAT)) pour évaluer les besoins en alphabétisation et en éducation des délinquants admis dans les installations correctionnelles137. Ces tests sont spécialement conçus pour mesurer le niveau de scolarisation et non pas les capacités de lire et d’écrire comme dans l’Enquête internationale sur l’alphabétisation des adultes (EIAA)138. Selon ces tests normalisés d’équivalence scolaire, 70 % des délinquants admis dans les établissements fédéraux en 1993-1994 se sont classés sous le niveau de la 8e année et 86 %, sous le niveau de la 10e année139.

Des études plus récentes fondées sur le niveau d’instruction déclaré de personnes détenues dans des établissements correctionnels montrent qu’ils affichent toujours d’importants déficits scolaires comparativement à la moyenne canadienne. Selon un profil instantané réalisé le 5 octobre 1996 par le Centre canadien de la statistique juridique sur toute la population au registre dans les installations correctionnelles fédérales-provinciales/territoriales pour adultes au Canada140, 34 % des détenus avaient une 9e année ou moins, comparativement à 19 % des adultes au Canada141. Une proportion même plus grande des personnes détenues dans des établissements fédéraux (46 %) avaient un niveau de scolarisation équivalent à la 9e année ou moins142. Une autre tranche de 29 % des détenus sous responsabilité fédérale avaient une 10e ou 11e année et 25 %, une 12e année ou plus. En général, les délinquants à risque élevé affichaient un niveau d’instruction moindre que les détenus à risque faible ou modéré143. Près de la moitié (49 %) des détenus à risque élevé sous responsabilité fédérale avaient une 9e année ou moins, comparativement à 36 % des détenus à faible risque et à 42 % des détenus à risque modéré144. Dans les installations provinciales/territoriales, 53 % des détenus à risque élevé avaient une 9e année ou moins, comparativement à 39 % des détenus à faible risque et à 40 % des détenus à risque modéré145.

Selon de récentes données fournies par le SCC sur la scolarisation des délinquants sous responsabilité fédérale, une grande partie des détenus des établissements fédéraux avaient, en janvier 2003, un niveau d’instruction moindre que le diplôme d’études secondaires. C’est ce que montrent les graphiques 5 et 6.

GRAPHIQUE 5 - Répartition des détenus des établissements fédéraux par niveau d'éducation et région, janvier 2003

Le Comité a également appris que les détenus ont souvent des troubles d’apprentissage, certains attribués au syndrome d’alcoolisme fœtal et aux effets de l’alcool sur le fœtus (SAF/EAF), ce qui contribue sans aucun doute au faible niveau d’alphabétisme qu’on retrouve chez une forte proportion d’entre eux. Cependant, le nombre de détenus sous-alphabétisés qui éprouvent des problèmes d’apprentissage ou affichent le SAF/EAF n’est pas encore connu, car, le SCC n’évalue pas à l’heure actuelle, les détenus sur ce plan. Le SCC envisage chez un très proche avenir d’appliquer un processus de dépistage des troubles d’apprentissage lors de l’évaluation de l’entrée146.

… le Service correctionnel du Canada envisage de mettre en œuvre un processus de dépistage pour les troubles d’apprentissage lors de l’évaluation. Lorsqu’un nouveau détenu arrive, il fait l’objet d’une évaluation à l’entrée dans différents domaines, notamment en ce qui a trait à son niveau d’éducation et d’alphabétisation. Par ailleurs, nous avons déterminé qu’il nous fallait à l’entrée affiner nos outils d’évaluation afin de déceler les troubles d’apprentissage. Il nous arrive de plus en plus de détenus qui souffrent du syndrome ou des manifestations d’alcoolisme fœtal. Nous devons en tenir compte avant que ces personnes prennent part à d’autres programmes d’éducation ou de prise en charge traditionnelle au sein de notre système correctionnel, pour ce qui est par exemple des programmes en matière de toxicomanie ou de violence familiale. (Don Head, sous-commissaire principal, Service correctionnel du Canada)147

GRAPHIQUE 6 - Répartition des détenus autochtones et non autochtones dans les établissements fédéraux par niveau d'éducation, 1er janvier 2003

Les membres du Comité appuient cette initiative et souhaitent que le SCC continue d’améliorer ses outils d’évaluation afin de pouvoir bien déterminer les besoins en éducation et en alphabétisation de tous les délinquants admis dans un établissement correctionnel et de prendre en considération les éventuels troubles d’apprentissage et autres obstacles (p. ex., SAF/EAF) à leur participation aux programmes d’enseignement. À l’instar des témoins du SCC et de la Société John Howard du Canada, le Comité suggère également que le personnel des établissements correctionnels fédéraux soit formé pour reconnaître et aider les détenus sous-alphabétisés.

C.     Programmes de formation de base des adultes dans les établissements du Service correctionnel du Canada

La Formation de base des adultes (FBA) est l’une des possibilités d’éducation et de formation professionnelle visant à faciliter la réintégration des détenus dans la collectivité et à réduire les risques de récidive. Le Comité s’est réjoui d’apprendre que le SCC offrait des programmes éducatifs dans tous ses établissements et que quelque 30 à 35 % de la population carcérale participaient à ces programmes. Les cours sont dispensés dans des classes traditionnelles, à de petits groupes ou avec encadrement individuel148. Dans un nombre limité d’établissements, des programmes spéciaux de FBA répondent aux besoins des délinquants autochtones. À tout moment, quelque 270 enseignants s’emploient à dispenser des services d’éducation et d’alphabétisation aux détenus sous responsabilité fédérale partout au pays, la majorité étant sous contrat avec le SCC149.

Les membres du Comité savent bien que les détenus qui améliorent leurs aptitudes à lire et à écrire pendant leur incarcération en tirent de nombreux avantages. Ceux qui participent volontairement aux programmes d’éducation dans les établissements y gagnent de la confiance en eux-mêmes, développent le désir de poursuivre leur apprentissage et risquent moins de récidiver150. Les données d’une étude du SCC effectuée en 1998 montrent que «  la participation à la FBA procure d’importants avantages aux délinquants et contribue à une réinsertion sociale sûre151  ». L’étude compare un échantillon de détenus masculins sous responsabilité fédérale, ayant participé à la FBA, à un échantillon national de libérés conditionnels, sur une période de deux ans après leur mise en liberté d’un établissement correctionnel. Les résultats montrent que 718 libérés conditionnels ayant terminé la FBA-8e année enregistraient une réduction de 7,1 % relativement au taux de réadmission. La réduction des taux de réadmission augmente en même temps que le niveau d’éducation. Par exemple, 74 libérés conditionnels ayant terminé la FBA-10e année ont enregistré une réduction de 21,3 % pour le taux de réadmission152. Il y a toutefois une mise en garde : «  Les détenus qui terminent un programme de FBA acquièrent des aptitudes de base en lecture et en écriture, mais un certificat de FBA-8e année ou 10e n’est pas très concurrentiel sur le vrai marché du travail. […] En dernière analyse, les cours d’alphabétisation de base demeureront une condition nécessaire, mais non suffisante, à la réinsertion sociale des délinquants153  ».

Le Comité est d’avis que le SCC devrait continuer de faciliter la participation des détenus au programme d’éducation, et il devrait chercher des moyens d’augmenter le nombre de délinquants participants et d’accroître le nombre de programmes d’éducation et d’alphabétisation offerts dans les établissements correctionnels.

Je me contenterai de dire avant que nous nous quittions que nos études ainsi que le travail que nous avons effectué au sein des établissements correctionnels fédéraux nous ont appris que plus nous consacrons de temps, d’énergie et d’efforts aux problèmes d’alphabétisation et de formation des détenus, plus nos collectivités seront en sécurité une fois que ceux-ci seront réinsérés. (Don Head, sous-commissaire principal, Service correctionnel du Canada)154

Recommandation 18

Le Comité recommande que, dans le cadre d’un accord pancanadien sur l’alphabétisation et l’acquisition de capacités au calcul, le gouvernement fédéral travaille en partenariat avec les autorités provinciales et territoriales afin de garantir qu’il y a suffisamment de ressources pour répondre aux besoins des détenus de tout le pays dans ce domaine. Il faudrait aussi du financement pour permettre aux détenus de faire la transition aux programmes d’alphabétisation populaire après leur libération. [Nota : La référence à un accord pancanadien signifie que le gouvernement fédéral devrait tenter d’en arriver avec les provinces et les territoires à un consensus concernant le grave problème des faibles compétences en littératie au pays. Si l’unanimité n’est pas possible, le Comité encourage le gouvernement fédéral à travailler individuellement avec les provinces et les territoires. Quoi qu’il en soit, puisque la question appartient au domaine constitutionnel des provinces et des territoires, il faut un accord pour officialiser tout soutien fédéral.]

VI.       L’ALPHABÉTISATION EN MILIEU DE TRAVAIL

Les changements survenus au fil des ans dans ce que l’on produit et dans la façon dont on le produit ont eu un profond effet sur le type et la méthode de travail. Les compétences exigées évoluent au rythme des changements apportés à la nature du travail. Il faut par ailleurs s’attendre à ce que les travailleurs ayant des niveaux d’éducation et de compétence supérieurs soient de plus en plus en demande sous l’effet de l’importance accrue de l’industrie du savoir dans l’économie. En 1971, par exemple, 19,2 % de la population active occupaient des emplois très spécialisés. En 1981 et 1986, les emplois à haute spécialisation représentaient respectivement 23,5 % et 26 % du marché du travail155. Et comme il est mentionné au début de notre rapport, on estime que d’ici 2004, plus de 70 % des nouveaux emplois créés au Canada exigeront des études postsecondaires156. Cette tendance n’augure rien de bon pour les travailleurs peu spécialisés/peu alphabétisés, comme en témoigne le fort taux de chômage chez les segments moins scolarisés de la population active.

GRAPHIQUE 7 - Répartition de la sous-alphabétisation par industrie

Le graphique 7 illustre la répartition de la sous-alphabétisation par industrie. En 1994, c’est-à-dire l’année où l’EIIA a été menée, de tous les secteurs énumérés, ceux des services financiers et des services personnels comptaient la plus faible proportion de travailleurs peu alphabétisés, quelle que soit la catégorie de capacité de lecture et d’écriture considérée (compréhension de textes suivis, de textes schématiques et de textes à contenu quantitatif). Si le secteur de la construction et celui de l’agriculture étaient ceux où la proportion de travailleurs peu alphabétisés était la plus élevée pour les trois catégories de capacité, il y a lieu de noter que le pourcentage de travailleurs peu alphabétisés était aussi très élevé dans les secteurs de la fabrication, du commerce et des transports (39 à 50 %, selon la catégorie de capacité considérée).

… l’analyse que nous avons faite avec Statistique Canada, montre que le travailleur canadien moyen commence dès l'âge de 20 ans à perdre son aptitude à la lecture courante, qui constitue une compétence essentielle en milieu de travail, quel que soit le domaine d'activité considéré. On peut prétendre, comme le font sans doute les ministres de l'Éducation, que le réseau de l'enseignement fait son travail jusqu'à la fin de la scolarité officielle, mais que le milieu de travail ne réagit peut-être pas comme il devrait le faire.[…] On constate sans surprise que les Canadiens qui ont fait des études postsecondaires ne perdent leur aptitude à la lecture courante que lentement. Ceux qui n'ont pas fait d'études postsecondaires la perdent très rapidement, beaucoup plus vite que dans la plupart des pays de
l'OCDE.[…] Cela signifie que le travailleur canadien est sérieusement handicapé par rapport à ses homologues des autres pays développés de l'OCDE et que ce handicap se répercute sur la productivité au Canada. (M. Paul Cappon, directeur général, Conseil des ministres de l’Éducation, Canada)157

Il faut s’attendre à ce que la spécialisation des emplois continue de s’accentuer, si la croissance de l’économie canadienne doit dépendre de plus en plus de l’industrie du savoir. Avec le vieillissement de la population active et le ralentissement de la croissance du bassin de main-d’œuvre attendus dans les prochaines années, l’accès à ces compétences spécialisées reposera de plus en plus sur les épaules de ceux qui se trouvent déjà sur le marché du travail. Non seulement l’acquisition continue de compétences et l’éducation permanente gagneront encore en importance, mais il faudra veiller à ce que les travailleurs acquièrent et conservent les compétences en littératie nécessaires pour pouvoir poursuivre leur perfectionnement. Si nous ne parvenons pas à régler le problème de faible alphabétisation du Canada, cela ne fera qu’exacerber les pénuries possibles de main-d’œuvre dans les années à venir, qui préoccupent au plus haut point les observateurs du marché du travail de tout le pays158.

Selon une étude menée par le Conference Board du Canada, les employeurs offrent des cours d’alphabétisation et d’acquisition de compétences essentielles à leurs employés pour bien des raisons, notamment pour améliorer la productivité sur les plans quantitatifs et qualitatifs, pour réduire les coûts, pour améliorer les relations patronales-syndicales et pour accroître la capacité des employés de travailler en équipe et d’atteindre les objectifs organisationnels. Les investissements dans l’alphabétisation profitent aussi aux travailleurs. Ainsi, on estime qu’un homme qui a une capacité élevée de compréhension de textes schématiques peut s’attendre à gagner 1 743 000 dollars en revenus avant impôt tout au long de sa vie professionnelle, soit 585 000 dollars de plus qu’un homme dont la capacité de compréhension est faible à ce chapitre. Une femme qui possède une capacité élevée de compréhension de textes schématiques peut s’attendre à gagner 1 242 000 dollars pendant sa vie professionnelle, comparativement à 559 000 dollars si elle a une capacité de compréhension limitée159.

Il nous apparaît évident que l’accroissement du degré d’alphabétisation contribue à la rentabilité qui, à son tour, a un effet à la hausse sur les revenus des travailleurs. En fait, l’un des secrets de l’amélioration de la productivité et du bien-être économique des Canadiens réside dans la constitution d’une main-d’œuvre plus spécialisée et mieux alphabétisée. Le Comité s’explique donc mal qu’il y ait si peu de formation en milieu de travail au pays, alors que le nombre de travailleurs peu alphabétisés est si élevé et que les possibilités de gains économiques sont si grandes. Les représentants de plusieurs entreprises qui ont reçu des Prix d’excellence pour l’alphabétisation en milieu de travail du Conference Board ont clairement fait mention de certains des avantages économiques et sociaux découlant des investissements faits dans l’alphabétisation en milieu de travail, même s’il y a lieu de mentionner que la majorité de ces entreprises ont reçu une forme quelconque d’appui de l’État pour entreprendre ces projets d’alphabétisation.

C’est la province qui s’est chargée de rémunérer l’enseignant; Avon a fourni les locaux, le cursus, les matériaux et les rafraîchissements; le syndicat a fourni les manuels nécessaires; et enfin, les employés ont consacré du temps en dehors du travail pour participer aux cours. Ce fut véritablement un effort coopératif. Nous avons tout de suite vu une équipe se dessiner […]. Au sein de l’usine, les pairs sont parvenus à se convaincre l’un l’autre à participer, sur une base volontaire, au processus de formation. La direction a joué un rôle actif, en s’attendant à des résultats positifs. […] Avon a profité de cette situation de bien des façons et s’affirme comme un chef de file dans de nombreux volets de l’industrie alimentaire. Il y a eu une diminution des plaintes de la part des clients. Notre réputation en matière de qualité est en progression, et notre chaîne de transformation s’est améliorée pour devenir aujourd’hui une opération extrêmement fiable. Notre service à la clientèle a atteint un niveau de qualité exceptionnel, et la direction et le syndicat se vouent un respect exceptionnel. Aujourd’hui, Avon compte sur une main-d’œuvre souple, pleine de ressources et capable de résoudre des problèmes. Et tout ce qui précède […] garantit à la société Avon un avantage concurrentiel. (Albert Craswell, directeur d’usine, Aliments Avon Inc.)160

On a donc brisé le cycle de l’alphabétisation rudimentaire […] en particulier dans cette entreprise [Durabelt Inc.]. La directrice dit avoir des responsabilités sociales vis-à-vis de la collectivité, de sorte que lorsque des jeunes de l’école secondaire viennent lui demander un emploi — l’école est à quelques pas seulement de Durabelt —, elle les renvoie et leur demande de dire à leurs amis de ne pas venir demander un emploi mais plutôt de retourner à l’école. Les employés qui ont réussi leur test d’équivalence d’études secondaires lui disent aujourd’hui : «  Je vais m’assurer que mes enfants finissent leurs études avant d’aller travailler; je ne veux pas qu’ils aient à faire ce que moi j’ai fait.  » Brancher les jeunes sur les études, c’est extrêmement important. Ils sont tous les artisans de la réussite de l’entreprise. Ils viennent de décrocher leur plus gros contrat et il s’agit bien d’une réalisation collective. Comme je l’ai dit, tout le monde y gagne. (Ruth Rogerson, agente locale, Durabelt Inc.)161

Les avantages ont été extraordinaires pour National Silicates. Nous avons maintenant des compétences transférables, tous les employés peuvent travailler dans n’importe quelle entreprise à titre d’opérateurs de procédé chimique. […] À l’usine, nous avons réduit les heures supplémentaires. Nous avons réduit le coût de l’entretien dans nos usines parce que tous les employés peuvent maintenant travailler n’importe où à l’usine. […] Ainsi, les employés de l’usine ont enrichi leurs compétences. […] Nous sommes une filiale d’une compagnie américaine et nous sommes souvent menacés de fermeture. La productivité de notre usine a garanti notre survie à chaque fois que j’ai publié nos états financiers. Nous sommes le fleuron de la compagnie PQ Corporation, parce que nous sommes reconnus pour notre dynamisme. (Lynda Ryder, directrice, Relations de travail, National Silicates)162

Normalement, les cours ont lieu durant la dernière heure de leur poste, et il reste une heure de plus après cela. Il y a deux classes par semaine toute l’année. Ce programme fonctionne très bien et nous formons environ 400 employés par an de cette manière. Nous voulions cependant rejoindre ceux qui ne participent pas à ces cours. En général, ce sont les femmes qui ont un problème, car leurs obligations familiales les empêchent de rester après les heures de travail. Nous avons donc organisé des mini-séances de tutorat sur place dans l’usine. L’instructeur va trouver les employés, seul ou à deux ou trois, selon leurs compétences linguistiques, et il leur donne le vocabulaire concernant leur emploi. (Valerie Unwin, coordonnatrice de cours de langue, Palliser Furniture)163

Le Comité s’est fait dire à plusieurs reprises que les employeurs n’offrent pas de cours d’alphabétisation en milieu de travail parce qu’ils ont trop d’obstacles à surmonter. En plus de ne pas être conscients du problème et des avantages économiques qu’ils retireraient à y trouver une solution, les employeurs ont tendance à croire que c’est au système d’éducation publique qu’il incombe d’offrir un enseignement de base aux adultes. Plus important encore, bon nombre d’entre eux, en particulier ceux qui exploitent une petite entreprise, soutiennent qu’ils n’ont pas les ressources financières nécessaires pour financer des cours d’alphabétisation en milieu de travail.

Je m’occupe des fermetures et des mises à pied. Cela fait partie de mon travail. Et je peux vous dire que quand je passe en revue, presque automatiquement, la série de questions permettant de dresser le portrait de la main-d’œuvre afin d’avoir une idée des besoins en matière d’adaptation, plus souvent qu’autrement, je demande au comité de travailleurs s’il y a des problèmes d’alphabétisation, et très souvent, on me répond que non, qu’il n’y a aucun problème. Ensuite, quelques semaines plus tard, nous recevons des coups de téléphone de membres du comité, pris de panique, qui nous disent qu’ils ont plein de gens qui sont incapables de remplir leur carte de déclaration du prestataire d’assurance-emploi parce qu’il y a plein de choses qu’ils ne comprennent pas. (Laurell Ritchie, représentante nationale, Organisation du travail et formation, Syndicat des travailleurs unis de l’automobile)164

Ces dernières [les entreprises] se reconnaissent habituellement peu de responsabilités en ce qui concerne l’alphabétisation des personnes à leur emploi. Elles ont plutôt tendance à considérer qu’il s’agit d’une responsabilité sociale, d’une part, et individuelle, d’autre part. […] De plus, l’alphabétisation des personnes au travail ne donne pas de résultats satisfaisants du point de vue de
l’entreprise si elle n’est pas intégrée à une démarche de mise à jour des connaissances nécessaires à l’exécution des tâches et fonctions. (Françoise Grenon, conseillère pédagogique, Service aux entreprises, Commission scolaire de Montréal)165

Nous savons tous que les PME sont les principales créatrices d’emplois au pays et que leur réussite est essentielle au succès de l’économie. Si elles veulent survivre et accroître leur productivité, leurs dirigeants doivent s’assurer que la main-d’œuvre a les compétences de base pour maîtriser les nouvelles technologies et les méthodes de travail exigeantes de la société moderne. (Gerald Brown, président, Association des collèges communautaires du Canada)166

Au début, l’alphabétisation était un outil […] pour former notre unique département d’art ménager aux fins de la certification nationale. J’ai vite appris que l’alphabétisation est à la fois le moyen et l’infrastructure. […] Ce qu’il nous faut, comme petite entreprise, ce sont des programmes, parce que nous ne pouvons pas nous permettre d’embaucher les ressources humaines voulues pour faire la formation comme les grandes entreprises et, souvent, nous devons donc nous en passer. J’ai été chanceux à cause de tout ce que j’ai mentionné, les partenariats dont nous avons bénéficié, car nous avons pu aller de l’avant et obtenir certains succès. […] Je vois beaucoup de mes homologues dans d’autres domaines qui se débattent tant bien que mal parce que nous n’avons pas de service des ressources humaines, de budget pour la formation ou de formation comme telle. (Clarence Neault, directeur général, La Ronge Motor Hotel, Saskatchewan)167

Ce sont le plus souvent les grandes entreprises qui investissent dans la formation et celle-ci est habituellement destinée à des travailleurs déjà très scolarisés. Selon les résultats d’une récente étude sur les déterminants de la formation dans les entreprises canadiennes, la proportion d’employés qui ont suivi une formation structurée et en cours d’emploi en 1999 a été respectivement de 26 % et 24 % dans les entreprises de moins de 20 employés. Ces chiffres sont bien modestes comparativement à la proportion d’employés qui ont suivi une formation structurée et en cours d’emploi dans les entreprises de 100 employés et plus, qui a atteint respectivement 48 % et 32 %. De plus, l’étude montre que la proportion d’employés sans diplôme d’études secondaires qui ont reçu une formation structurée et en cours d’emploi en 1999, s’est élevée respectivement à 21 % et 23 %, comparativement à 49 % et 33 % respectivement pour les employés titulaires d’un diplôme universitaire168. L’étude démontre aussi que là où une convention collective comportant des dispositions relatives à la formation est en vigueur, on offre davantage de formation aux employés que dans les entreprises où les conventions collectives ne comportent pas de dispositions relatives à la formation ou dans les entreprises où il n’y a pas de conventions collectives. Le Comité a appris que les conventions collectives en vigueur chez Daimler-Chrysler, General Motors et Ford renferment des dispositions relatives à l’acquisition de compétences de base. Inspirées du programme Éducation de base pour la formation professionnelle (BEST) de la Fédération du travail de l’Ontario, ces conventions collectives offrent aux employés la possibilité d’améliorer leurs compétences en lecture, en écriture et en mathématiques pendant une période de 37 semaines, à raison de quatre heures par semaine. La moitié des heures passées en classe par les employés sont rémunérées au taux normal, tandis que le reste des heures ne sont pas rémunérées.

Les syndicats ont obtenu par la négociation plusieurs formes de soutien des employeurs à l’égard des efforts d’alphabétisation, notamment des heures rémunérées qui sont consacrées à la formation, à raison d’un certain nombre de cents par heures travaillées qui sont versées dans un fonds, des heures de formation pour les employés, un pourcentage de la masse salariale, des programmes de congés payés, des avances sur les frais de scolarité, etc. Bien souvent, les programmes d’origine syndicale peuvent servir de modèles et élever la norme de formation, ce dont profitent ensuite les milieux de travail non syndiqués. (Kenneth Georgetti, président, Congrès du travail du Canada)169

Le Comité reconnaît le rôle important joué par les représentants syndicaux dans l’établissement et la promotion de programmes d’alphabétisation en milieu de travail, et nous les encourageons à continuer de collaborer avec les employeurs et les employés pour trouver de nouvelles avenues et de nouvelles approches pour offrir aux travailleurs qui en ont besoin une formation en alphabétisation. L’un des moyens utiles pour resserrer la collaboration patronale-syndicale en matière d’alphabétisation en milieu de travail réside dans les conseils sectoriels. En fait, nous avons appris que le perfectionnement des compétences fondamentales était la première priorité du Conseil des ressources humaines de l’industrie du textile depuis 1996170. Nous nous réjouissons du fait que DRHC compte élargir le rayon d’action des conseils sectoriels en doublant la proportion du marché du travail couverte par ces conseils pour la faire passer de 25 % à 50 % d’ici les cinq prochaines années; un plus grand nombre de conseils sectoriels ne signifie toutefois pas nécessairement qu’il se fera plus d’alphabétisation en milieu de travail171.

L’importance d’établir de solides partenariats pour soutenir l’alphabétisation en milieu de travail ne fait aucun doute, mais il nous semble évident que les employeurs ont généralement tendance à ne pas investir suffisamment dans l’alphabétisation faute d’y être encouragés. Puisque la société est convaincue que les retombées externes que procure l’investissement dans l’éducation sont suffisamment importantes pour que les contribuables acceptent d’assumer le coût des études primaires et secondaires, il serait logique, selon le même raisonnement, de conclure que l’État devrait soutenir les entreprises et les travailleurs pour les inciter à investir davantage dans le capital humain de base. Alors que certains témoins trouvent qu’un crédit d’impôt serait une mesure incitative efficace à cette fin, d’autres soulignent que cette approche est limitée dans le cas des entreprises, en particulier les plus petites, qui sont peu assujetties à l’impôt. De plus, les coûts de l’alphabétisation en milieu de travail sont habituellement assumés au moment où la formation est donnée, tandis que le produit du crédit d’impôt ne se réalise qu’une fois les coûts de la formation déboursés. Ce décalage peut occasionner des problèmes de liquidité à certains employeurs; par conséquent, ceux-ci risquent de renoncer à offrir de la formation. Malgré cet inconvénient, la plupart des membres du Comité reconnaissent que les crédits d’impôt peuvent être une mesure d’encouragement efficace dans certains cas. Deux autres propositions-clés ont été formulées au cours de nos audiences pour inciter les employeurs à offrir davantage de programmes d’alphabétisation en milieu de travail. L’une d’elle propose que l’on fasse un plus grand usage des fonds d’assurance-emploi de la partie II, tandis que l’autre propose de rembourser les cotisations à l’assurance-emploi aux employeurs qui offrent des cours d’alphabétisation.

Le Comité a aussi appris que beaucoup de chômeurs ne sont pas admissibles aux prestations d’assurance-emploi de la partie II et qu’étant donné le grand nombre de chômeurs peu alphabétisés, il faudrait envisager d’élargir l’accès à ces prestations. Le Comité reconnaît que cette idée va dans le même sens que les stratégies adoptées par les délégués au Sommet national, qui ont participé au groupe de travail ayant pour thème Doter le pays d’une main-d’œuvre diversifiée et qualifiée, dont la recommandation prioritaire était la suivante : «  viser une plus grande participation des groupes sous-employés (y compris les femmes, les jeunes, les personnes handicapées, les minorités visibles et les Autochtones)  »172.

Le programme de perfectionnement des compétences de DRHC n’est offert qu’aux clients de l’assurance-emploi et aux anciens prestataires réadmissibles. […] Nous pensons que le programme de DRHC doit être accessible à tous les clients, quelle que soit l’aide financière qu’ils reçoivent. En général, nous croyons que DRHC doit revoir son programme de prestations d’emploi et mesures de soutien de façon qu’un plus grand nombre de clients, et particulièrement ceux qui ne touchent pas d’assurance-emploi mais qui ont besoin d’une intervention à long terme, puissent y avoir accès. Encore une fois, il y a des clients qui ne seront pas prêts rapidement à trouver un emploi et qui ne pourront jamais retourner sur le marché du travail si la période d’intervention est plus courte. À l’heure actuelle, le groupe qui a le plus besoin de soutien est celui qui a le moins accès aux services d’emploi ou de préparation à l’emploi au Canada. (Bernadette Beaupré, coprésidente, National Coalition of Community Based Training)173

Nous avons effectivement envisagé le congé de cotisation à l'assurance-emploi. Nous voulons précisément voir avec le gouvernement fédéral s'il serait possible de se servir de l'assurance-emploi pour envisager les mesures incitatives qu'il faudrait proposer. Puisque vous posez la question, j'irai encore un peu plus loin pour dire que les provinces et les territoires ne peuvent pas s'en occuper à elles seules, à cause du fardeau financier que comporte cette formation. Il faut qu'ils agissent en partenariat avec le gouvernement fédéral. Aussi bien dans le domaine fiscal que dans celui de l'assurance-emploi, ce genre de partenariat est indispensable. (M. Paul Cappon, directeur général, Conseil des ministres de l’Éducation (Canada))174

Le milieu des conseils sectoriels envisagerait très favorablement une approche plus coordonnée dans le domaine de l’alphabétisation et des programmes d’acquisition des compétences essentielles. Comme vous le savez parfaitement, cela représente un problème de premier plan dans un pays comme le nôtre dans lequel l’éducation et la formation relèvent de différents ordres de gouvernement, et qui n’a ni vision, ni politique nationale en matière d’éducation, de formation ou d’alphabétisation. [...] [Nous avons besoin d’] un engagement véritablement national à l’égard du maintien à long terme des programmes et du soutien financier pour permettre aux conseils sectoriels et aux autres intervenants de concevoir et de mettre en oeuvre un plus grand nombre de programmes d’alphabétisation en milieu de travail, à l’échelle nationale et sectorielle, et aussi d’en évaluer l’efficacité et les résultats. (Gary Grenman, directeur général, L’Alliance des conseils sectoriels)175

Avec l’adoption de la Loi sur l’assurance-emploi en 1996, l’accès à la formation (et à d’autres mesures actives visant à faciliter l’adaptation du marché du travail) s’est considérablement modifié. L’accès à la formation est devenu plus limité en raison des changements apportés aux conditions d’admissibilité, au financement et aux mécanismes d’exécution. Pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi de la Partie II, que l’on désigne collectivement sous le nom de Prestations d’emploi et mesures de soutien (PEMS), le demandeur doit être actuellement admissible à l’assurance-emploi, avoir reçu des prestations ordinaires au cours des 36 derniers mois ou avoir reçu des prestations de maternité ou parentales au cours des 60 derniers mois. Inutile de dire que, dans ces conditions, bon nombre de chômeurs n’ont pas droit aux PEMS.

Les prestations d’assurance-emploi de la Partie II sont accordées en vertu des Ententes sur le développement du marché du travail (EDMT). Les EDMT sont des ententes bilatérales conclues par le gouvernement fédéral avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, à l’exception de l’Ontario. En vertu des ententes «  de dévolution  » (signées par l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, le Québec, le Nouveau-Brunswick, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut), les fonds d’assurance-emploi de la Partie II sont transférés aux provinces et aux territoires signataires afin de servir à la conception et à la mise en œuvre de programmes semblables aux PEMS. Dans ce cas, DRHC ne peut décider des priorités de dépenses, ni de la façon dont les fonds sont utilisés. En vertu des ententes de cogestion ou de non-dévolution (signées avec la Colombie-Britannique, Terre-Neuve et le Labrador, l’Île-du-Prince-Édouard et le Yukon), les provinces et territoires signataires assument conjointement la responsabilité des PEMS avec DRHC. La Nouvelle-Écosse assume la responsabilité des prestations d’assurance-emploi de la partie II conformément à une entente de «  partenariat stratégique  » avec DRHC.

La limite de financement des PEMS pour une année donnée est déterminée par la Loi sur l’assurance-emploi et est fixée à 0,8 % du revenu assurable total. En 2003-2004, les dépenses prévues au titre des PEMS devraient être de 2,2 milliards de dollars, soit à peu près 872 millions de moins que ce qui est autorisé en vertu de la Loi.

Les conditions applicables aux PEMS ne permettent pas comme tel de financer la formation en alphabétisation, même si l’on croit savoir que certaines instances provinciales ou territoriales signataires d’ententes de cogestion de même que l’Ontario intègrent des cours d’alphabétisation dans leurs programmes. Quoi qu’il en soit, on ne risque pas de se tromper en affirmant que les investissements dans les compétences en lecture et en écriture en vertu des EDMT sont extrêmement rares et sporadiques. Étant donné que ces ententes sont les seuls mécanismes de financement actuellement accessibles, nous croyons qu’il faudrait en élargir considérablement l’application et, en particulier, faciliter l’accès à la formation en alphabétisation. Chaque année, le budget alloué à la mise en œuvre de ces mesures est bien inférieur à ce qui est permis en vertu de la Loi, malgré le fait que le taux de chômage demeure élevé et que le gouvernement a adopté un plan d’action en matière d’apprentissage.

La plupart des membres du Comité croient que l’on pourrait recourir davantage à l’assurance-emploi pour remédier au problème de sous-alphabétisation du pays. Nous croyons que l’accès aux PEMS doit être considérablement accru, de façon que les chômeurs puissent s’en prévaloir, sans égard à leur recours actuel ou passé au régime. Même si certains membres du Comité soutiennent qu’il faudrait obliger les utilisateurs fréquents de l’assurance-emploi qui sont peu alphabétisés à suivre des cours d’alphabétisation pour avoir droit aux prestations, nous sommes conscients de l’opposition suscitée par cette idée au cours de notre étude du système de sécurité sociale au Canada au milieu des années 1990. Par conséquent, la plupart d’entre nous pensons que l’accès aux PEMS doit continuer d’être volontaire.

Nous sommes pleinement conscients du fait que l’élargissement de l’accès à des projets d’alphabétisation financés grâce aux cotisations à l’assurance-emploi constitue une dérogation importante par rapport à la situation actuelle et pourra exiger une modification législative176. On craint aussi que si certaines des provinces et territoires n’acceptent pas d’utiliser les fonds pour financer l’alphabétisation, cela risque de créer des anomalies dans une approche prétendument pancanadienne visant à favoriser l’alphabétisation en milieu de travail. Nous doutons que cela puisse se produire, étant donné que les ministres provinciaux et territoriaux du Travail et de l’Éducation ont déjà demandé au gouvernement fédéral d’investir davantage dans les EDMT en augmentant de 700 millions de dollars les fonds de la partie II et en haussant les dépenses financées grâce au Trésor public afin d’élargir le bassin de personnes qui reçoivent des services177. Comme les deux paliers de gouvernement reconnaissent l’existence du problème, l’idée d’affecter des fonds supplémentaires pour financer l’alphabétisation en milieu de travail devrait à notre avis être bien reçue par les provinces et territoires.

Recommandation 19

Le Comité recommande que le Secrétariat national à l’alphabétisation continue à promouvoir et à établir des partenariats destinés à mettre en commun les ressources et à s’inspirer de pratiques exemplaires pour créer des occasions d’alphabétisation en milieu de travail.

Recommandation 20

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral hausse les dépenses en vertu de la Partie II de la Loi sur l’assurance-emploi de 100 millions de dollars. Sous réserve des conditions d’un accord pancanadien sur l’alphabétisation et l’acquisition de capacités au calcul, le gouvernement devrait négocier des Ententes supplémentaires sur le développement du marché du travail et modifier en conséquence la Loi sur l’assurance-emploi pour pouvoir aider tous les chômeurs et toutes les personnes qui occupent un emploi à acquérir des compétences en littératie, sans égard à leur recours passé au régime d’assurance-emploi. Ces ententes supplémentaires devraient faire en sorte qu’une partie des fonds serve à répondre aux besoins des membres des groupes désignés en matière d’alphabétisation. Soixante-quinze pour cent de l’augmentation des fonds prévus en vertu de la Partie II devrait être affectée au financement des Ententes supplémentaires sur le développement du marché du travail, tandis que les 25 % restants devraient servir à répondre aux besoins recensés par les conseils sectoriels en matière d’alphabétisation en milieu de travail. [La mention d’un accord pancanadien vise à souligner que le gouvernement fédéral doit chercher à obtenir l’accord unanime des provinces et des territoires pour tenter de trouver une solution au grave problème de sous-alphabétisation du pays. S’il n’est pas possible d’obtenir un accord unanime, le Comité invite le gouvernement fédéral à collaborer individuellement avec chaque province et territoire pour parvenir aux mêmes fins. Dans un cas comme dans l’autre, comme cette question relève exclusivement de la compétence des provinces et des territoires, un accord est nécessaire pour officialiser l’aide fédérale.]

Recommandation 21

Sous réserve d’une entente avec les provinces et les territoires, le Comité recommande que le gouvernement fédéral mette en œuvre un projet-pilote de deux ans pour accorder aux petites et moyennes entreprises un remboursement de leurs cotisations à l’assurance-emploi ou les faire profiter d’autres mesures incitatives comme des crédits d’impôt, afin qu’elles soient en mesure d’absorber le coût de la formation en alphabétisation et en calcul offerte à leurs employés au travail. Une évaluation devra être menée à la fin de ce projet-pilote; si ses résultats sont jugés concluants, son application devra être étendue à l’ensemble des employeurs, la priorité devant toutefois continuer d’être accordée aux petites et moyennes entreprises.


38DRHCPH, Témoignages (15:35), séance n11, 6 février 2003.
39DRHCPH, Témoignages (16:15), séance n12, le 11 février 2003.
40DRHCPH, Témoignages (15:25), séance n18, le 20 mars 2003.
41DRHCPH, Témoignages (17:20), séance n19, le 25 mars 2003.
42Voir http://www.kingstonliteracy.com/canada%20post.htm.
43Voir http://www.nald.ca/AWARDS/National/natawrds/excellen.htm.
44DRHCPH, Témoignages (16:55), séance no 12, le 11 février 2003.
45DRHCPH, Témoignages (15:35), séance no 18, le 20 mars 2003.
46DRHCPH, Témoignages (16:05), séance no 19, le 25 mars 2003.
47DRHCPH, Témoignages (15:50), séance no 24, le 10 avril 2003.
48M. Bloom et M. Grant, Brain Gain: The Economic Benefits of Recognizing Learning and Learning Credentials in Canada, Conference Board du Canada, 2001, p. 29.
49Voir http://www.hrdc-drhc.gc.ca/sp-ps/sl-ca/events-activites/summary-resume/apprentissage.shtml.
50Halifax Prior Learning Assessment Centre, The Learning Portfolio Program Impact Evaluation Study, (Résumé), octobre 2002.
51DRHCPH, Témoignages (16:05), séance no 11, le 6 février 2003.
52DRHCPH, Témoignages (15:40), séance no 24, le 10 avril 2003.
53Gouvernement du Canada, La sécurité sociale dans le Canada de demain : document de travail, octobre 1994.
54La Loi constitutionnelle de 1982 reconnaît trois catégories de peuples autochtones : les Indiens, les Inuits et les Métis. De plus, la Loi sur les Indiens définit un Indien inscrit comme étant une personne indienne inscrite au Registre en vertu de la Loi. Le Canada compte 641 collectivités des Premières Nations qui se regroupent en 52 nations ou groupes culturels qui parlent plus de 50 langues. Les Indiens vivant dans les réserves représentent environ 61 % de la population des Indiens inscrits. D'après les projections de 2000 préparées par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (AINC) et la Commission canadienne des affaires polaires, en se fondant sur les données du Système d'inscription des Indiens pour l'année 2003, on dénombre 445 436 Indiens inscrits vivant dans les réserves et 285 139 qui habitent en dehors des réserves. On s'attend à ce que le taux de croissance démographique des Indiens inscrits vivant dans les réserves se chiffre à 57,9 % entre 2003 et 2021, par rapport à une croissance de 12 % dans l'ensemble de la population canadienne. Environ 40,4 % de la population d'Indiens inscrits appartient au groupe des moins de 19 ans, en comparaison de 25,2 % dans la population canadienne (voir Statistique Canada, « Projections démographiques pour le Canada, les provinces et les territoires - 2000-2026 », no 91­520­XPB au catalogue, mars 2001). Les réserves sont rares dans le Nord. Quelque 92 300 résidents sont répartis sur les vastes étendues des Territoires du Nord-Ouest (37 100 personnes), du Nunavut (26 700 personnes) et du Yukon (28 500). Un peu plus de la moitié de la population dans le Nord est autochtone (voir le document d'AINC et de la Commission canadienne des affaires polaires, Budget des dépenses 2003­2004 - Rapport sur les plans et les priorités, à http://www.tbs-sct.gc.ca/est-pre-20032004/pdf/inac-f.pdf). Les Métis représentent 30 % (292 310 personnes) et les Inuits environ 5 % (45 070 personnes) des personnes qui se sont identifiées comme étant Autochtones dans le recensement de 2001. Seulement 7 315 Métis vivaient dans les réserves au moment du recensement (http://www12.statcan.ca/francais/census01/products/analytic/companion/abor/groups2_f.cfm). Dans le présent rapport, le terme « Autochtones » désigne tous les peuples autochtones, y compris les Premières Nations, les Métis, les Inuits et les Indiens inscrits et non inscrits. Dans certains cas, un groupe ethnique particulier est mentionné.
55L’éducation des membres des Premières Nations hors réserve, des Inuits et des Métis relève des gouvernements provinciaux. Les gouvernements territoriaux assument le même genre de responsabilité en matière d’éducation à l’égard des personnes vivant sur leur territoire.
56David Greenall et Stelios Loizides, Aboriginal Digital Opportunities: Addressing Aboriginal Learning Needs Through the Use of Learning Technologies, Conference Board du Canada, 2001, p. 6.
57DRHC, Étude bilan document de référence - Les politiques, programmes et services relatifs à l'emploi, au marché du travail et au développement économique à l'intention des peuples autochtones, Évaluation et développement des données, Politique stratégique, mars 1999. (http://www11.hrdc-drhc.gc.ca/pls/edd/PPSRx.shtml).
58AINC, Automne 2002 - Sondage auprès des Premières nations vivant dans les réserves : Rapport final, sondage réalisé par Ekos Research Associates Inc., au nom d'AINC, octobre 2002 (http://www.ainc-inac.gc.ca/pr/pub/srv/index_f.html).
59Vérificateur général Denis Desautels, 2000 — Rapport du vérificateur général du Canada, chapitre 4 — Affaires indiennes et du Nord Canada — L’enseignement primaire et secondaire, Bureau du vérificateur général du Canada, avril 2000 (http://www.oag-bvg.gc.ca/domino/rapports.nsf/html/00menu_f.html).
60DRHCPH, Témoignages (15:30), séance no 26, le 1 mai 2003.
61Affaires indiennes et du Nord canadien, Santé, Développement des ressources humaines, Société canadienne d’hypothèques et de logement, Pêches et Océans, Solliciteur général, Patrimoine canadien, Résolution des questions des pensionnats indiens Canada, Industrie, Service correctionnel, Ressources naturelles, Bureau du Conseil privé, Justice et Défense nationale.
62AINC et la Commission canadienne des affaires polaires, Budget des dépenses 2003-2004 — Rapport sur les plans et les priorités (http://www.tbs-sct.gc.ca/est-pre/20032004/pdf/inac-f.pdf).
63AINC a délégué aux Premières Nations et aux provinces son pouvoir de conception et de prestation de l'éducation. Pour plus d'information, voir les résultats de la vérification des services d'enseignement primaire et secondaire d'AINC dans le Rapport 2000 du vérificateur général du Canada (http://www.oag-bvg.gc.ca/domino/reports.nsf/html/00menu_f.html).
64Dans le cadre de son système de compte rendu, la SDRH suit les clients, les emplois trouvés et le nombre d’interventions requises avant l’obtention d’un emploi. Il se peut que les clients aient besoin d’un certain nombre d’interventions pour les aider à trouver de l’emploi, mais la SDRHA ne tient pas compte de la nature de ces interventions (alphabétisation, rattrapage scolaire, formation en dynamique de la vie, etc.).
65Développement des ressources humaines Canada, Rapport sur le rendement pour la période se terminant le 31 mars 2002.
66DRHCPH, Témoignages (15:45), séance no 10, le 4 février 2003.
67DRHCPH, Témoignages (15:30), séance no 18, le 20 mars 2003.
68DRHCPH, Témoignages (10:55), séance no 20, le 27 mars 2003.
69DRHCPH, Témoignages (11:35), séance no 20, le 27 mars 2003.
70DRHCPH, Témoignages (11:45), séance no 20, le 27 mars 2003.
71DRHCPH, Témoignages (15:55), séance no 18, le 20 mars 2003.
72DRHCPH, Témoignages (12:55), séance no 20, le 27 mars 2003.
73DRHCPH, Témoignages (11:00), séance no 20, le 27 mars 2003.
74DRHCPH, Témoignages (11:15), séance no 20, le 27 mars 2003.
75DRHCPH, Témoignages (15:45), séance no 10, le 4 février 2003.
76L’augmentation du financement que nous proposons dans le cadre de ces ententes est proportionnelle à l’accroissement proposé en vue des ententes sur le développement du marché du travail.
77DRHCPH, Témoignages (15:45), séance no 12, le 1l février 2003.
78DRHCPH, Témoignages (15:20), séance no 18, le 20 mars 2003.
79DRHCPH, Témoignages (16:30), séance no 18, le 20 mars 2003.
80DRHCPH, Témoignages (15:55), séance no 19, le 25 mars 2003.
81Chaque province ou territoire a un coordonnateur à l’alphabétisation.
82DRHCPH, Témoignages (15:35), séance no 18, le 20 mars 2003.
83Développement des ressources humaines Canada, Budget principal des dépenses 2003-2004, Partie III — Rapport sur les plans et les priorités, 2003, p. 90.
84DRHCPH, Témoignages (16:45), séance no 12, le 11 février 2003.
85DRHCPH, Témoignages (16:15), séance no 26, le 1er mai 2003.
86Ministère des finances, Le plan budgétaire de 2003, le 18 février 2003, p. 29.
87DRHCPH, Témoignages (17:20), séance no 12, le 11 février 2003.
88DRHCPH, Témoignages (17:15), séance no 19, le 25 mars 2003.
89DRHCPH, Témoignages (16:30), séance no 23, le 18 avril 2003.
90Margaret McCain et Fraser Mustard, Inverser la véritable fuite des cerveaux — Étude sur la petite enfance, Rapport final, avril 1999, p. 36.
91DRHCPH, Témoignages (16:05), séance n° 18, le 20 mars 2003.
92DRHCPH, Témoignages (16:25), séance n° 12, le 11 février 2003.
93DRHCPH, Témoignages (15:25), séance n° 18, le 20 mars 2003.
94DRHCPH, Témoignages (10:50), séance n° 20, le 27 mars 2003.
95DRHCPH, Témoignages (15:30), séance n° 18, le 20 mars 2003.
96DRHCPH, Témoignages (15:45), séance n° 21, le 1 avril 2003.
97Comme il en a été question ailleurs dans le rapport, une aide à la formation supplémentaire pourrait selon nous jouer un rôle important pour encourager les personnes concernées à participer, avec succès, à une formation en alphabétisation. Selon la recherche menée par Mme Ellen Long d’Alpha Plus, les facteurs socioéconomiques, dont l’accès aux garderies, sont considérés comme les principaux obstacles à la participation à une formation en alphabétisation. Surmonter ces obstacles exigera sans doute une meilleure approche à l’intégration des ressources d’apprentissage dans nos collectivités.
98Learners Advisory Network for the Movement for Canadian Literacy, mémoire présenté au Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes, avril 2003.
99Ibid.
100En prenant la décision de constituer le «  Core Skills Development Partnership  », entité officielle juridiquement indépendante et vouée à l’amélioration de l’infrastructure de la ville en matière de compétences de base, les responsables ont adopté une vision à long terme. Celle-ci visait plusieurs résultats stratégiques clés, notamment une hausse des compétences de base des enfants au moment d’entrer à l’école; une hausse des résultats scolaires des jeunes de 7 ans, 11 ans, 14 ans et 16 ans; une hausse du niveau d’alphabétisation des adultes; et une augmentation du nombre de bénévoles se consacrant à la formation de base. Pour réaliser cette vision, les responsables ont établi un plan d’entreprise qui contenait un ensemble d’objectifs à atteindre chaque année, lesquels ont été repris dans des ententes sur les activités, qui énuméraient les travaux à réaliser, dont l’avancement devait être suivi trimestriellement. Les initiatives de renouvellement des compétences humaines à Birmingham ont reçu un véritable coup de fouet, au printemps 2001, lorsque le gouvernement britannique a dévoilé sa stratégie nationale (Skills for Life) visant à résoudre le problème du faible niveau des connaissances en lecture, en écriture et en calcul chez les adultes. De fait, certaines des premières activités menées par Birmingham en matière de renouvellement des compétences humaines ont été incorporées dans la stratégie nationale d’alphabétisation. Muni d’un financement supplémentaire, Birmingham s’est fixé comme cible de réduire le nombre d’adultes peu alphabétisés de 25 % avant 2005 et de 50 % en 2010. En 2000, le nombre d’adultes ayant des besoins sur le plan des compétences de base a été évalué à environ 140 000. On a jugé possible de ramener ce chiffre à 70 000 en 2010, à condition que la ville puisse doubler le nombre d’apprenants adultes, doubler le taux de réussite et réduire sensiblement le nombre de jeunes qui quittent l’école mal alphabétisés. Pour cela, les responsables ont décidé qu’il fallait adopter une nouvelle démarche d’alphabétisation en milieu de travail. Sous la direction du «  Learning and Skills Council  » local, une campagne de sensibilisation a été mise en marche pour inciter un nombre important d’employeurs à agir. C’est ainsi qu’on a défini les besoins existants en milieu de travail, qu’on a créé des cédéroms d’auto-évaluation et qu’on a établi des centres d’apprentissage dans les milieux de travail. Le plan d’action à l’horizon 2010 de Birmingham se poursuit. Son déroulement sera sans nul doute influencé par les évaluations périodiques des activités déjà réalisées. De plus, le processus d’évaluation a posteriori permettra d’établir un catalogue des «  leçons apprises  » qui pourront servir dans d’autres projets en cours et à venir. (Voir Moving the Mountain: A Whole-City Approach to Basic Skills Development, où sont réunis les exposés de Geoff Bateson, directeur du Birmingham Core Skills Development Partnership. Ces renseignements ont été fournis par Literacy British Columbia).
101DRHCPH, Témoignages (15:20), séance n° 18, le 20 mars 2003.
102Canadian Library Association, Programmes d’alphabétisation dans les bibliothèques municipales, mémoire soumis au Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes, le 10 avril 2003.
103DRHCPH, Témoignages (16:35), séance n° 18, le 20 mars 2003.
104DRHCPH, Témoignages (15:50), séance n° 11, le 6 février 2003.
105DRHC, Conseil des ministres de l’Éducation, Canada, et Statistique Canada, À la hauteur : La performance des jeunes du Canada en lecture, en mathématique et en sciences, décembre 2001, p. 16.
106DRHCPH, Témoignages (16:00), séance n° 17, le 18 mars 2003.
107J. Willms, Les capacités de lecture des jeunes Canadiens, Statistique Canada, N° 89-552-MFP au catalogue n° 1, p. 26.
108Statistique Canada, Revue chronologique de la population active, 2002 (N° 71F00004XCB au catalogue).
109H. Hackett et D. Baran, Canadian Action on Early School Leaving: A Description of the National Stay-in-School Initiative, 1995 (voir http://icdl.uncg.edu/ft/051799-01.html).
110Les Équipes d’alphabétisation financent des projets qui s’adressent aux jeunes de 15 à 24 ans qui ont abandonné l’école. Les activités admissibles sont : création de matériel d’apprentissage; recherche sur l’alphabétisation chez les jeunes; amélioration de l’accès et de la vulgarisation; amélioration du partage de l’information et de la coordination concernant les services d’alphabétisation chez les jeunes; sensibilisation du public aux questions d’alphabétisation chez les jeunes.
111Selon la définition de Troubles d’apprentissage — Association canadienne, adoptée le 30 janvier 2002, les troubles d’apprentissage s’entendent de troubles pouvant influer sur l’acquisition, l’organisation, la rétention, la compréhension ou l’utilisation d’information verbale ou non verbale.
112DRHC, Rapport technique - Vers l'intégration des personnes handicapées, Chapitre 4, Perfectionnement des compétences, Apprentissage et emploi, 2002 (http://www.hrdcdrhc.gc.ca/hrib/sdddds/odi/documents/VIPH/riph000.shtml).
113À noter que, dans le contexte de cette enquête, un trouble d’apprentissage s’entend d’une difficulté à apprendre en raison d’un état comme des problèmes d’attention, l’hyperactivité ou la dyslexie, que cet état ait ou n’ait pas été diagnostiqué par un enseignant, un médecin ou un autre professionnel de la santé. Les données ne s’appliquent pas au Yukon, aux Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut.
114Statistique Canada, Enquête sur la participation et les limitations d’activités : Profil de l’incapacité au Canada, Le Quotidien, le mardi 3 décembre 2002 (http://www.statcan.ca/Daily/Français/021203/q021203a.htm).
115Selon l’EPLA de 2001, environ un Canadien sur sept âgé de 15 ans et plus, soit 3,4 millions de Canadiens selon les estimations, ont déclaré un handicap quelconque. De ceux-ci, 1,1 million ont déclaré un handicap léger, 855 000 un handicap moyen et 1,4 million un handicap grave à très grave.
116DRHC, Vitre avec une incapacité au Canada : Un portrait économique, 1996 (http://www.hrdcdrhc.gc.ca/hrib/sdd-dds/odi/documents/living_with_disability/).
117Susan Forster, Mémoire présenté au Comité permanent du développement humain et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes, Association canadienne des centres de vie commune, 10 avril 2003, p. 3.
118Saskatchewan Literacy Network, Literacy Matters. Reading the word … Reading the world, Vol. 3, N4, avril 2002, p. 12 (http://www.nald.ca/PROVINCE/SASK/SLN/News/02april/april02.pdf).
119 Movement for Canadian Literacy, Literacy and Learning Disabilities, Fact sheet No. 7 (http://www.literacy.ca/litand/7.htm).
120DRHCPH, Témoignages (15 :35), séance no 10, le 4 février 2003.
121Site Internet de Santé Canada à http://www.hc-sc.gc.ca/english/features/revue/2000_08/saf.htm.
122Institut national canadien pour les aveugles, Draft CNIB Position Statement on Nationwide Accessible Library Service, le 17 mars 2003.
123Amy Tooke Lacey, Intervention et intégration : Le handicap, l’alphabétisation et le renforcement des capacités au Canada, Mémoire présenté au Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes, Réseau d’alphabétisation pour aider les personnes handicapées, le 5 avril 2003.
124DRHCPH, Témoignages (15:55), séance no24, le 10 avril 2003.
125DRHC, Budget des dépenses 2003-2004, Partie III — Rapport sur les plans et priorités, 2003, p. 29-30.
126À noter que les immigrants sont aussi sur-représentés au sommet de l’échelle d’alphabétisation. En fait, parmi les pays ayant participé à l’EIAA, le Canada comptait la plus forte proportion de personnes nées à l’étranger au sommet de l’échelle d’alphabétisation (niveaux 4 et 5).
127R. Frith, directrice générale, Intégration, ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration, Observation liminaire devant le Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées, le 29 avril 2003.
128Il a été convenu avec le gouvernement fédéral que les gouvernements du Québec, du Manitoba et de la Colombie-Britannique s’engageaient à offrir aux immigrants des services d’établissement et d’intégration comparables à ceux offerts ailleurs au Canada, contre indemnisation fédérale.
129DRHCPH, Témoignages (17:10), Séance No 25, le 29 avril 2003.
130N. Alboim et La fondation Maytree, Fulfilling the Promise: Integrating Immigrant Skills into the Canadian Economy, Institut Caledon, avril 2002, p. 34.
131D. Millar, Second Language Students in Canadian Literacy Programs: Current Issues and Current Concerns, préparé pour le Collège communautaire de Red River, janvier 1997, p. 9 (disponible en ligne à http://www.nald.ca/fulltext/slsinclp/page09.htm).
132DRHCPH, Témoignages(16:00), séance no 19, le 25 mars 2003.
133DRHCPH, Témoignages (15:55), séance no 25, le 29 avril 2003.
134DRHCPH, Témoignages (17:15), séance no 12, le 11 février 2003.
135DRHCPH, Témoignages (15:40), séance no 25, le 29 avril 2003.
136Ainsi, le Règlement sur les pièces pyrotechniques à l'usage des consommateurs a été choisi comme sujet d'un projet pilote où l'on s'est employé à réécrire une partie des dispositions et à tester et évaluer le processus. Ce projet, couronné de succès, montre que les règlements peuvent être rédigés lisiblement. Voir Règlement sur les pièces pyrotechniques à l'usage des consommateurs, rapport final (http://canada.justice.gc.ca/fr/ps/rs/rep/wd95-4a-e.html).
137À noter que le CAAT n’est pas utilisé au Québec. Les personnes détenues dans des installations correctionnelles au Québec sont évaluées en fonction des tests standard du ministère de l’Éducation du Québec, qui déterminent le choix du programme de formation de base des adultes.
138Alphabétisation n’est pas synonyme de scolarisation, même si l’EIAA a révélé une relation évidente entre l’éducation et les niveaux d’alphabétisation. Il est néanmoins impossible de comparer les compétences en lecture et en écriture de la population carcérale fédérale à celles des autres Canadiens étant donné que le CAAT est très différent de l’évaluation effectuée dans le cadre de l’EIAA de 1994. Toutefois, une étude américaine découlant de l’enquête nationale sur l’alphabétisation des adultes (NALS) de 1994 et incluant environ 1 100 détenus de prisons fédérales et d’État a conduit à la conclusion que le rendement de sept détenus sur dix se situait dans les deux plus faibles niveaux de littératie. En moyenne, par conséquent, les détenus possédaient dans ce domaine des compétences substantiellement inférieures à celles de la population générale. Ces résultats concordent avec les données du SCC sur le niveau de scolarisation. Voir K. O. Haigler et al., Literacy Behind Prison Walls, National Center for Education Statistics, Washington, D.C., 1994.
139Roger Boe, Étude de suivi après deux ans de liberté de délinquants sous responsabilité fédérale qui ont participé au programme de formation de base des adultes (FBA), Service correctionnel Canada, Direction de la recherche, février 1998, p. 4.
140La population «  au registre  » s’entend du nombre de détenus placés dans l’établissement pour y purger leur peine.
141Cet instantané est unique. C’est la première fois que les détenus des installations correctionnelles fédérales, provinciales et territoriales pour adultes au Canada étaient sondés la même journée, et il n’existe aucune autre donnée comparable. À noter que les chiffres sur l’éducation n’étaient pas disponibles pour la Colombie-Britannique et le Yukon, ni pour 64 % des délinquants incarcérés dans des établissements du SCC. De récentes données concernant les personnes incarcérées dans des établissements fédéraux pour adultes au Canada portent à croire que le profil socio-démographique des détenus, en particulier en ce qui a trait au niveau d’instruction, est resté relativement stable au fil du temps. Nous ne sommes au courant d’aucune étude qui permettrait de croire que ce profil serait substantiellement différent aujourd’hui dans les installations fédérales ou provinciales/territoriales pour adultes.
142Centre canadien de la statistique juridique, Profil instantané d’une journée des détenus dans les établissements correctionnels pour adultes du Canada, Statistique Canada, no 85-601-XIF au cat., mars 1999.
143Dans cette étude, les détenus sous responsabilité provinciale/territoriale ont été classés en fonction de cinq niveaux de risque, de très faible à très élevé. Dans l’ensemble, seulement une petite partie des détenus (3 %) ont été classés comme présentant un très faible risque et une plus grande proportion, un risque faible ou très élevé (14 % chacun). Les groupes à risque modéré (34 %) et à risque élevé (35 %) constituaient les plus importantes portions de la population classée. À des fins de comparaison, les deux catégories de plus faible risque et les deux de risque le plus élevé ont été combinées de façon à simplifier le classement à trois niveaux de risque. À noter qu’il s’agit du risque de récidive et non pas nécessairement de la gravité de l’infraction.
144Centre canadien de la statistique juridique (1999), p. 30.
145Ibid., p. 32.
146DRHCPH, Témoignages (15:25), séance no 25, le 29 avril 2003.
147Ibid.
148Le Collège Frontière fournit des tuteurs individuels aux détenus apprenants classés sous le niveau de la 10e année. Le Collège offre en ce moment des services de tutorat dans cinq établissements fédéraux dans la région de Kingston, soit le pénitencier de Kingston, le Centre régional de traitement, l’établissement Frontenac, l’établissement de Collins Bay et la maison Isabel McNeil. Au cours de la dernière année, 37 détenus ont profité de ces services et le Collège Frontière a une liste d’attente d’environ 20 détenus. Les tuteurs sont pour la plupart recrutés à l’Université Queen’s. En 2002-2003, l’initiative d’alphabétisation dans les prisons a tablé sur le travail bénévole de 40 tuteurs, tous des étudiants de Queen’s sauf pour un membre de la collectivité.
149DRHCPH, Témoignages (15:25), séance no 25, 29 avril 2003.
150De récentes études américaines ont également conclu que les programmes correctionnels, notamment les programmes d’éducation, semblent réduire la récidive et augmenter l’embauche après leur mise en liberté. Voir Education Reduces Crime, Three-State Recidivism Study — Executive Summary, publié en partenariat entre la Correctional Education Association (CEA) et le Management & Training Corporation Institute, février 2003, disponible en ligne à l’adresse http://www.ceanational.org/documents/3StateFinal.pdf.
151 Roger Boe (1998), Étude de suivi après deux ans de liberté de délinquants sous responsabilité fédérale qui ont participé au programme de formation de base des adultes (FBA), Service correctionnel Canada, Direction de la recherche, février 1998, p. ix,
152Comme on l’a déjà dit, il ne faut pas confondre taux de réadmission et taux de récidive. Les taux de réadmission sont ni plus ni moins une mesure sommaire qui ne distingue pas entre la réadmission pour manquement aux conditions de la libération conditionnelle et la réincarcération pour nouvelle infraction.
153Roger Boe (1998), Étude de suivi après deux ans de liberté de délinquants sous responsabilité fédérale qui ont participé au programme de formation de base des adultes (FBA), Service correctionnel Canada, Direction de la recherche, février 1998, p. 63.
154DRHCPH, Témoignages (17:20), séance no 25, 29 avril 2003.
155Conseil économique du Canada, Tertiarisation et polarisation de l'emploi, 1991, p. 104.
156Gouvernement du Canada, Le savoir, clé de notre avenir : le perfectionnement des compétences au Canada 2002, p. 7.
157DRHCPH, Témoignages (15:30), séance n28, le 6 mai 2003.
158Le Comité sait que, selon les estimations du Conference Board du Canada, la pénurie de main-d’œuvre pourrait atteindre un million de travailleurs d’ici 2020. Ce chiffre nous laisse toutefois sceptiques, étant donné qu’il se fonde sur des hypothèses qui excluent toute adaptation du marché du travail à une demande excédentaire de main-d’œuvre et toute baisse du taux de chômage en deçà de 4 %. De plus, l’étude ne tient pas compte du fait qu’une partie de la main-d’œuvre est sous-utilisée (voir Conference Board du Canada, Rendement et potentiel, 2000-2001).
159M. Bloom, M. Burrows, B. Lafleur et R. Squires, Avantages économiques du renforcement de l’alphabétisme en milieu de travail, Conference Board du Canada, le août 1997, p. 12.
160DRHCPH, Témoignages (15:25), séance n° 22, le 3 avril 2003.
161Ibid., (15:40).
162Ibid., (15:50-15:55).
163Ibid., (15:55).
164DRHCPH, Témoignages (16:50), séance n° 23, le 8 avril 2003.
165DRHCPH, Témoignages (15:30), séance n° 22, le 3 avril 2003.
166DRHCPH, Témoignages (15:30), séance n° 24, le 10 avril 2003.
167DRHCPH, Témoignages (15:50), séance n° 22, le 3 avril 2003.
168J. Turcotte, A Léonard et C. Montmarquette, Nouveaux résultats sur les déterminants de la formation dans les emplacements canadiens, Statistique Canada et DRHC, 2003, p. 24-25.
169DRHCPH, Témoignages (16:25), séance n° 23, le 8 avril 2003.
170Conseil des ressources humaines de l’industrie du textile, Mémoire au Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes, avril 2003.
171DRHC, Budget des dépenses 2003-2004, Partie III — Rapport sur les plans et les priorités, 2003, p. 24.
172Le gouvernement du Canada, Sommet national sur l’innovation et l’apprentissage : sommaire, 2002, [annexe : 3], p. 87.
173DRHCPH, Témoignages (15:55), séance n° 24, le 10 avril 2003.
174DRHCPH, Témoignages (15:40), séance n° 28, le 6 mai 2003.
175DRHCPH, Témoignages (16:40), séance n° 23, le 8 avril 2003.
176L’une des façons d’éviter une modification législative à cet égard consisterait peut-être à faire en sorte que le processus d’établissement du taux de cotisation, actuellement à l’étude, prévoit un excédent de fin d’exercice suffisamment important pour financer des cours d’alphabétisation à l’intention des personnes qui ne peuvent satisfaire à la définition actuelle de «  participants  ». Ces fonds pourraient alors être soustraits aux conditions d’application du régime d’assurance-emploi, de la même façon que l’est ce qu’il est convenu d’appeler la réserve de l’assurance-emploi
177Ministres provinciaux et territoriaux du marché du travail et Conseil des ministres de l’Éducation (Canada), Un effort concerté en vue de renforcer l’apprentissage et la formation de la main-d’œuvre, juillet 2002, p. 4.