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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent des finances


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 3 février 2003




¹ 1530
V         La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.))
V         M. Gordon Nixon (président et directeur général, RBC Groupe financier)

¹ 1535

¹ 1540

¹ 1545
V         La présidente
V         M. Richard Harris (Prince George—Bulkley Valley, Alliance canadienne)
V         M. Gordon Nixon

¹ 1550
V         M. Richard Harris
V         M. Gordon Nixon
V         La présidente
V         M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.)

¹ 1555
V         M. Gordon Nixon

º 1600
V         La présidente
V         M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.)
V         La présidente
V         M. Gary Pillitteri
V         M. Gordon Nixon

º 1605
V         La présidente
V         M. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD)
V         La présidente
V         M. Lorne Nystrom
V         M. Gordon Nixon
V         M. Lorne Nystrom
V         M. Gordon Nixon
V         M. Lorne Nystrom

º 1610
V         M. Gordon Nixon
V         M. Lorne Nystrom
V         M. Gordon Nixon
V         M. Lorne Nystrom
V         M. Gordon Nixon
V         La présidente
V         Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.)
V         M. Gordon Nixon

º 1615
V         Mme Albina Guarnieri
V         M. Gordon Nixon

º 1620
V         La présidente
V         M. Scott Brison (Kings—Hants, PC)
V         M. Gordon Nixon

º 1625
V         M. Scott Brison
V         M. Gordon Nixon
V         M. Scott Brison
V         M. Gordon Nixon
V         La présidente
V         M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.)

º 1630
V         M. Gordon Nixon
V         La présidente
V         La présidente
V         M. Réal Raymond (président et chef de la direction, Banque Nationale du Canada)

º 1640

º 1645
V         La présidente
V         M. Richard Harris
V         M. Réal Raymond
V         M. Richard Harris
V         M. Réal Raymond
V         M. Richard Harris
V         M. Réal Raymond
V         M. Richard Harris
V         La présidente
V         M. Richard Harris
V         M. Réal Raymond
V         M. Richard Harris

º 1650
V         La présidente
V         M. Réal Raymond
V         La présidente
V         M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.)

º 1655
V         M. Réal Raymond
V         M. Shawn Murphy
V         M. Réal Raymond

» 1700
V         La présidente
V         Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.)
V         M. Réal Raymond
V         Mme Maria Minna

» 1705
V         La présidente
V         M. Réal Raymond
V         La présidente
V         M. Lorne Nystrom
V         M. Réal Raymond
V         M. Lorne Nystrom

» 1710
V         M. Réal Raymond
V         La présidente
V         M. Bryon Wilfert
V         Mr. Réal Raymond

» 1715
V         M. Bryon Wilfert
V         Mr. Réal Raymond
V         La présidente
V         M. Scott Brison
V         M. Réal Raymond
V         M. Scott Brison
V         M. Réal Raymond
V         M. Scott Brison
V         M. Réal Raymond
V         M. Scott Brison

» 1720
V         M. Réal Raymond
V         M. Scott Brison
V         M. Réal Raymond
V         M. Scott Brison
V         M. Réal Raymond
V         La présidente
V         M. Gary Pillitteri
V         M. Scott Brison
V         M. Gary Pillitteri
V         La présidente
V         M. Gary Pillitteri

» 1725
V         M. Réal Raymond
V         La présidente
V         La présidente
V         La présidente
V         M. John Hunkin (président et directeur général, Banque canadienne impériale de commerce)

» 1735

» 1740

» 1745
V         La présidente
V         M. Richard Harris
V         M. John Hunkin
V         M. Richard Harris

» 1750
V         M. John Hunkin
V         La présidente
V         M. Bryon Wilfert

» 1755
V         M. John Hunkin
V         La présidente
V         M. Bryon Wilfert
V         M. John Hunkin

¼ 1800
V         La présidente
V         M. Shawn Murphy
V         M. John Hunkin

¼ 1805
V         M. Shawn Murphy
V         M. John Hunkin
V         M. Shawn Murphy
V         M. John Hunkin
V         La présidente
V         M. Lorne Nystrom
V         M. John Hunkin
V         M. Lorne Nystrom
V         M. John Hunkin
V         M. Lorne Nystrom

¼ 1810
V         M. John Hunkin
V         La présidente
V         Mme Maria Minna

¼ 1815
V         M. John Hunkin
V         Mme Maria Minna

¼ 1820
V         La présidente
V         M. John Hunkin
V         Mme Maria Minna
V         M. John Hunkin
V         La présidente
V         M. John Hunkin
V         La présidente
V         M. Scott Brison
V         M. John Hunkin
V         M. Scott Brison
V         M. John Hunkin
V         M. Scott Brison
V         M. John Hunkin

¼ 1825
V         M. Scott Brison
V         M. John Hunkin
V         M. Scott Brison
V         M. John Hunkin
V         M. Scott Brison
V         La présidente
V         M. John Hunkin
V         M. Scott Brison
V         La présidente










CANADA

Comité permanent des finances


NUMÉRO 036 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 3 février 2003

[Enregistrement électronique]

¹  +(1530)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)): Welcome, everyone. Bienvenue à tous.

    Nous poursuivons, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, l'étude sur les répercussions en matière d'intérêt public de la fusion des grandes banques. J'espère qu'aujourd'hui, nous pourrons poser des questions concernant spécifiquement les aspects liés à l'intérêt public.

    Nos témoins de 15 h 30 à 16 h 30 sont le RBC Groupe financier. Nous avons le grand plaisir d'accueillir Gordon Nixon, président et directeur général; Charles Coffey, vice-président-directeur, Affaires gouvernementales et communautaires et Anne Sutherland, première vice-présidente, Stratégies de segmentation de la clientèle.

    Bienvenue à tous et à toutes.

    Monsieur Nixon, veuillez faire votre exposé. Les micros seront branchés automatiquement.

+-

    M. Gordon Nixon (président et directeur général, RBC Groupe financier): Merci, madame la présidente. Bonjour, mesdames et messieurs.

    Vous nous avez demandé notre opinion sur les principaux points à prendre en considération pour trancher la question de l'intérêt public dans les fusions de grandes banques au Canada. Aux audiences du comité du Sénat, l'an dernier, nous avons exprimé le besoin de plus de clarté autour des critères employés pour évaluer l'incidence sur l'intérêt public. Nous avons aussi demandé des mesures pour éliminer les doubles emplois dans le processus, entre le rôle de l'examen de l'intérêt public et les rôles du Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) et du Bureau de la concurrence. Aujourd'hui, j'aimerais poursuivre dans la lignée de notre précédent mémoire avec quelques réflexions supplémentaires sur l'élaboration d'un processus d'examen des fusions qui résout la question de l'intérêt public, fait avancer la prospérité de notre pays et préserve sa souveraineté financière future.

    Il semble se dégager un consensus croissant autour de l'idée que le processus d'examen des fusions devrait s'attaquer à ces questions d'emblée. D'ailleurs, le gouvernement a lui-même indiqué publiquement qu'il faut clarifier les critères d'intérêt public dans le cadre des fusions de banques. Il est important pour le système financier du Canada que le processus de fusions soit clair, efficace et rapide, et qu'il existe une certaine cohérence entre les objectifs de l'État et ceux du secteur financier.

    Sinon, il se crée une situation qui nuit à notre secteur d'une manière qui n'avantage pas l'intérêt public. Un mauvais processus d'examen n'est pas seulement perturbateur pour les employés, les clients et les investisseurs mais il limite aussi le pouvoir de nos sociétés de services financiers de prendre des décisions en matière d'investissement et d'exploiter tout leur potentiel.

    Le fait que nous ayons déjà en place des lignes directrices qui traitent des questions d'accès au service, de fermeture de succursales et de transition—par exemple, des emplois—crée une ambiguïté supplémentaire. Les entreprises sont livrées à elles-mêmes pour définir l'intérêt public, sans parler des mesures correctives à recommander. Il est impératif que le gouvernement non seulement définisse avec plus de précision la notion d'intérêt public mais établisse aussi des directives et des critères précis pour l'évaluation de l'incidence sur l'intérêt public.

    Vos délibérations ne devraient pas être compromises par des contraintes de temps ou des considérations politiques. Sans un processus clair, transparent et prévisible, la probabilité que des projets de fusion officiels soient déposés et approuvés est mince. Et si des fusions sont proposées, elles courent le risque de s'enliser dans un processus hautement politique. Cela ne servirait l'intérêt de personne et n'est pas propice à l'établissement d'une bonne politique publique.

    Je crois que le processus d'examen de l'intérêt public serait plus productif s'il répondait à un mandat clair, ne faisait pas double emploi avec l'examen du BSIF et du Bureau de la concurrence, et tenait compte des lignes directrices fédérales que les banques doivent déjà respecter dans les domaines clés de l'intérêt public. Je crois aussi que pour être véritablement efficace, il doit faire avancer le débat au-delà d'un simple réexamen de sujets de préoccupation anciens, pour déterminer comment les aspirants à une fusion traitent les questions d'intérêt public.

    Si les critères d'intérêt public du gouvernement ont clairement défini les principaux domaines de préoccupation et si les banques y ont clairement répondu dans leur évaluation de l'incidence sur l'intérêt public, ce Comité pourrait, au nom de l'intérêt public, examiner l'évaluation des parties à une fusion et, au besoin, réclamer que les banques, le Bureau de la concurrence, le BSIF et le ministère des Finances apportent des précisions. En d'autres termes, si les critères d'intérêt public et les objectifs de politique sont clairs, le processus parlementaire peut être centré sur le respect de ces critères dans les fusions.

    En termes généraux, je crois que l'évaluation de l'intérêt public devrait porter sur trois domaines clés qui englobent l'essentiel de ce que vous avez été invités à analyser par l'honorable John Manley et l'honorable Maurizio Bevilacqua.

    Premièrement, il faudrait examiner les fusions sous l'angle de leur incidence à long terme sur la prospérité et le niveau de vie futurs du Canada. L'autorisation de fusions de banques entraînera à mon avis d'importantes restructurations et rationalisations des services financiers, qui se répercuteront non seulement sur les grandes banques canadiennes, mais aussi sur des institutions plus petites, sur les banques étrangères et sur d'autres sociétés financières non bancaires. Elle aura aussi une incidence sur l'aptitude de nos banques à livrer concurrence à l'échelle mondiale et sur l'aptitude d'autres institutions financières à livrer concurrence sur le marché intérieur.

    Les preuves de l'avantage stratégique possible d'une rationalisation du secteur des services financiers pour notre pays ne manquent pas. Une telle rationalisation améliore les possibilités de créer des champions nationaux capables de rivaliser sur un marché mondial. Certes, la taille n'est pas l'unique critère de réussite. Mais si l'on considère les institutions financières du monde qui sont les plus grandes par leur capitalisation boursière, on constate que la plupart ont grandi par des acquisitions et des regroupements d'entreprises sur leur marché intérieur. Notre pays a besoin d'industries concurrentielles à l'échelle internationale. Elles cristallisent le capital et créent les emplois nécessaires pour entretenir la vitalité économique; elles sont une source de revenus et de rentes de retraite plus élevés pour les Canadiens et elles produisent des recettes fiscales supplémentaires.

¹  +-(1535)  

    Les sociétés mondiales qui ont leur siège social au Canada sont cruciales pour maintenir le degré d'investissement et d'innovation nécessaire afin de retenir dans notre pays de jeunes gens brillants. Nous n'avons pas assez de sociétés de calibre international, et je crains fort que la tendance ait été négative. Le Canada a une seule société parmi les 200 premières au monde et se classe loin derrière plusieurs économies plus petites, telles que Hong Kong, l'Espagne, les Pays-Bas, l'Australie, l'Italie et la Suisse, et, en données par habitant, le Canada se classe au 15e rang à l'échelle mondiale.

    Des fusions aideraient le secteur financier du Canada à développer son efficacité et sa rentabilité, ce qui est bon pour les actionnaires, bon pour les clients, bon pour notre rang sur la scène internationale et bon pour notre réputation de partenaires commerciaux solides et stables. Les économies d'échelle et de gamme permettent une augmentation de l'efficacité et une réduction des coûts unitaires. De nombreuses études universitaires abondent dans ce sens en démontrant clairement que les banques canadiennes réaliseraient des économies de coûts si elles pouvaient croître par des regroupements d'entreprises. Il n'y a pas de garantie de succès, mais nous devrions créer un environnement qui stimule les entreprises canadiennes et leur donne la possibilité de viser de nouveaux sommets. Cette rationalisation n'ouvrirait pas seulement des débouchés à nos grandes banques; elle entraînerait aussi une concurrence renouvelée et de nouveaux investissements dans le secteur en donnant des occasions à saisir aux banques canadiennes plus petites, aux banques étrangères et à d'autres institutions financières canadiennes. Cette opinion est corroborée à la fois par le témoignage antérieur et par les activités sur le marché d'autres sociétés financières que les grandes banques. De plus, étant une petite banque aux États-Unis, RBC peut témoigner du fait que la rationalisation par le haut offre d'importantes possibilités d'acquérir des succursales et des clients.

    Deuxièmement, je crois que les fusions doivent être examinées sous l'angle de la souveraineté financière du Canada. En tant que pays, nous devons déterminer s'il est important de contrôler notre propre secteur financier et quelle politique publique permettrait le mieux d'atteindre ce but. Depuis le milieu des années 90, les regroupements de services financiers se sont chiffrés à plus de 3,4 billions de dollars, dont plus d'un billion rien qu'aux États-Unis. Malgré l'objectif de plusieurs banques canadiennes d'étendre leurs activités bancaires de détail aux États-Unis et la solide compétitivité de notre secteur, notre échelle de grandeur et nos évaluations boursières ont limité notre aptitude à participer activement à cette rationalisation. Nous avons toutes les raisons de croire que cette tendance à la rationalisation mondiale se poursuivra, en marginalisant encore davantage les banques canadiennes à la fois en Amérique du Nord et à l'échelle mondiale, et en rendant ainsi l'expansion et les acquisitions internationales futures encore plus difficiles. Nous devons nous demander s'il est plus avantageux pour les Canadiens de contrôler moins de banques, mais des banques plus fortes qui ont l'échelle de grandeur, l'efficacité et le capital nécessaires pour maintenir la compétitivité du Canada sur les marchés financiers mondiaux.

    Je comprends bien que ce sujet soit difficile à l'échelle locale où les avantages concrets de l'investissement et de la croissance des banques canadiennes sur les marchés étrangers sont moins évidents. Mais c'est un élément crucial dans la définition de la politique publique à long terme qui régit notre secteur des services financiers, et je suis fermement convaincu qu'il est essentiel pour la compétitivité économique à long terme de notre pays d'avoir des sociétés solides, basées au Canada, peu importe où elles évoluent dans le monde.

    Beaucoup croient que les obstacles à la prise de contrôle de nos grandes banques par des étrangers devraient être éliminés; d'autres prétendent qu'elles finiront par l'être dans le cadre de négociations commerciales futures. À mon avis, la meilleure défense de la souveraineté financière canadienne est un environnement qui facilite le renforcement de banques sous contrôle canadien, qui seraient moins à la merci d'une offre publique d'achat étrangère si les obstacles actuels étaient éliminés. Restreindre la croissance et les regroupements d'entreprises n'a que des désavantages pour les institutions financières canadiennes à l'heure où les marchés se mondialisent.

    Troisièmement, les fusions devraient être examinées sur la base de l'accès aux services, du choix entre les prestataires de services financiers, des enjeux de la transition, tels que l'incidence pour l'emploi, et les améliorations du service. Je ne prétends pas que les fusions des banques ne doivent pas être gérées attentivement. La mise en oeuvre, les pertes temporaires d'emplois, la diminution du nombre de sièges sociaux, les perturbations du service, l'incidence sur les PME et l'impact sur nos collectivités sont autant de sujets préoccupants. Ce sont de vrais problèmes; mais nous pensons qu'il y a moyen de les gérer d'une manière qui servira l'intérêt public et apportera à long terme l'avantage d'un renforcement du secteur canadien des services financiers.

    Par exemple, les banques pourraient s'engager à maintenir une certaine redondance exprimée en pourcentage dans l'effectif fusionné dans un premier temps, à recourir à l'attrition pour régler une partie des pertes d'emplois et offrir des consultations pour aider ceux qui partent à se trouver un nouvel emploi. Les banques pourraient s'engager à progresser prudemment dans leur intégration, en renonçant notamment à fermer des succursales pendant un délai précis ou en donnant des préavis plus longs. Instaurer l'obligation de distribuer ou de vendre un pourcentage de succursales pourrait être un moyen d'assurer une certaine concurrence et le choix entre plusieurs fournisseurs.

¹  +-(1540)  

    Nous croyons que notre secteur a bien su trouver des manières innovatrices d'assurer l'accès aux services dans les milieux ruraux et éloignés, aux groupes des personnes à faible revenu et aux personnes handicapées. Mais nous continuons d'ajuster nos réseaux pour combler ces besoins et encourageons la discussion avec ce Comité sur des méthodes permettant de respecter les critères d'intérêt public.

    On a beaucoup parlé de l'incidence des fusions de banques sur l'accès des Canadiens aux services financiers et sur la disponibilité du crédit. La question se pose tout particulièrement pour les petites et moyennes entreprises en raison de leur importance capitale sur le plan économique et du rôle critique que jouent les banques pour permettre à certaines PME de croître et de devenir des chefs de file dans leur secteur. C'est pour alimenter le débat sur cette question que RBC Groupe financier a collaboré avec les Manufacturiers et exportateurs canadiens et la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante pour étudier comment le Canada peut aider les petites et moyennes entreprises à prospérer et à croître. Certes, rien n'est parfait, mais les PME sont bien servies par les banques canadiennes, et nous voulons continuer de contribuer à la croissance de cet important secteur.

    L'étude démontre l'existence d'une solide disponibilité du crédit et de tarifs concurrentiels au Canada. Elle révèle que les entrepreneurs ont recours à une grande variété de prestataires de services financiers dont des banques canadiennes, des banques étrangères, des coopératives de crédit, des sociétés de crédit-bail, des sociétés d'État, des assureurs-vie, des sociétés de fiducie, des sociétés hypothécaires et des émetteurs de cartes de crédit. En fait, les banques canadiennes n'occupent que 50 p. 100 du marché canadien du crédit aux entreprises. Les fusions feraient diminuer le nombre de banques canadiennes au service des petites entreprises, mais elles élargiraient aussi les possibilités pour les autres fournisseurs—y compris les banques étrangères—de pénétrer sur le marché ou d'augmenter leur part du marché. La Banque nationale du Canada, HSBC, les coopératives de crédit et d'autres ont déjà confirmé leur intérêt pour l'achat de succursales bancaires et l'acquisition d'une plus grande part du marché des petites entreprises.

    Je ferais aussi remarquer que le secteur des petites entreprises est un secteur de croissance prioritaire pour RBC. Nous essayons vigoureusement d'y accroître notre part de marché. La disponibilité du crédit sera toujours un sujet favori de critique. Pourtant, elle figure loin derrière d'autres entraves à la croissance comme les compétences en gestion, la disponibilité de main-d'oeuvre qualifiée et le capital de risque. RBC Groupe financier déploie de vastes efforts pour relever ces défis par diverses initiatives dont notre soutien aux femmes entrepreneurs, le parrainage d'un organisme national d'investisseurs providentiels, notre collaboration avec le Centre de développement d'entreprises de l'Université Queen's et la mise à la disposition des petites entreprises clientes de ressources en planification gratuites.

    En ce qui concerne l'accès, notre secteur a de solides antécédents dans la recherche de nouvelles manières de servir les clients qui ont des besoins particuliers, comme les personnes handicapées, les Canadiens à revenu modeste et ceux qui habitent dans les régions rurales. Nous sommes déterminés à poursuivre ces initiatives et, dans certains cas, nous sommes obligés par les lignes directrices fédérales, de les offrir. Ces dernières années, nous avons fait montre d'une souplesse considérable pour servir les clients à l'heure et à l'endroit qui leur conviennent le mieux. Les équipes de vente mobiles, les services bancaires par Internet, les services par téléphone et les guichets automatiques aident à assurer le service à des clients pour qui il ne serait pas pratique de se rendre dans une succursale. En fait, près de 95 p. 100 des transactions s'effectuent actuellement en dehors de notre réseau de succursales; nous avons investi et continuerons d'investir dans des modes de prestation de remplacement. Cependant, nous savons aussi que malgré la forte augmentation des nouveaux modes de prestation, 70 p. 100 de nos clients continuent de passer dans nos succursales au moins une fois tous les trois mois pour demander conseil, traiter des opérations plus complexes ou résoudre des problèmes. Là aussi, nous avons fait preuve de souplesse en investissant récemment 35 millions de dollars pour améliorer notre service.

    Un exemple de mode de prestation de services innovateur aux Canadiens à revenu modeste est notre «succursale expresse» dans le quartier Parkdale de Toronto, qui a été créée pour combler ce besoin, en partenariat avec des associations de quartier. Nous avons mis en place des façons innovatrices de servir les collectivités éloignées par des installations partagées, notamment par l'intermédiaire de succursales dans les collectivités autochtones où la banque est dirigée par la collectivité locale alors que nous fournissons la technologie, la formation et une réserve de capitaux pour les prêts.

    Nous comprenons que l'accès à des succursales est important pour les Canadiens et nous croyons que cet accès serait maintenu par le Bureau de la concurrence et les lignes directrices sur l'intérêt public qui pourraient exiger que les banques qui fusionnent vendent un certain nombre de succursales comme entreprises en activité, ce qui assurerait le maintien d'un choix dans la plupart des collectivités. Comme l'a fait remarquer le comité du Sénat dans son rapport, lorsqu'elles sont bien réglementées, les fusions peuvent relancer la concurrence.

    En résumé, nous reconnaissons que les questions d'accès, de service, d'emploi et de crédit doivent être les principaux points à prendre en considération dans toute initiative de fusion. Notre secteur a de solides antécédents. Cependant, je ne crois pas que quiconque dans notre secteur s'opposerait à une discussion constructive autour des recours supplémentaires pour régler ces questions. Je crois qu'il vous appartient de déterminer les problèmes de transition qui doivent être atténués et les seuils à imposer pour assurer le respect de l'intérêt public.

¹  +-(1545)  

    J'aimerais conclure sur une requête que je vous adresse, à vous et à vos collègues du Parlement. Il est temps de donner au secteur des services financiers du Canada des balises claires concernant la politique et les attentes du gouvernement à l'égard des fusions des banques et de la restructuration du paysage des services financiers. Il nous faut un processus qui soit plus prévisible et plus transparent que celui d'aujourd'hui ainsi qu'une politique officielle qui aligne les intérêts du gouvernement et du secteur.

    En qualité de chef de la direction d'une grande institution financière, il m'appartient, de même qu'il appartient au conseil d'administration de la banque, à nos employés, à nos clients et à nos actionnaires, de faire une évaluation réfléchie de notre aptitude à mener à bien une transaction avant de considérer le travail, les perturbations et les risques associés à un projet de fusion.

    Sans critères clairs pour l'Évaluation de l'incidence sur l'intérêt public, et notamment sur la manière dont les coûts et les avantages doivent être pondérés pour parvenir à un résultat global, les banques qui proposent des fusions seront toujours dans l'incertitude en ce qui concerne l'issue de leurs projets. Par conséquent, nous sollicitons plus de clarté autour de la politique du gouvernement, du processus et des critères à appliquer en matière de fusions. En particulier, nous demandons que les critères d'intérêt public ne comprennent pas les questions sur lesquelles se pencheront le BSIF et le Bureau de la concurrence et qu'ils soient à la fois clairs, transparents et appliqués uniformément.

    D'un point de vue fondé sur la prudence, nous ne croyons pas qu'un processus entièrement ouvert dont l'industrie ne peut pas prévoir l'issue soit dans l'intérêt du public ni qu'il soit dans l'intérêt du public que les opérations soient approuvées ou refusées ponctuellement sans prévoir les besoins du secteur de se restructurer et d'améliorer sa compétitivité mondiale.

    Le gouvernement a reconnu que les fusions sont une stratégie légitime pour les banques. Cependant, le processus d'examen des fusions peut avoir un effet dissuasif sur elles. Cette divergence entre la politique et le processus doit être résolue.

    Je demande au gouvernement d'indiquer clairement sur quelle base il est disposé à accepter et à autoriser les fusions, puis à faire en sorte que le processus d'examen de l'incidence sur l'intérêt public soit appliqué également à tous les projets de fusion. Vous avez l'occasion de le faire et j'espère que vous le ferez.

    Nous vous remercions de nous avoir donné la possibilité d'exposer nos opinions. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

+-

    La présidente: Je vous remercie.

    Les tours de questions dureront cinq minutes. Il y a huit noms sur la liste. La liste est complète pour ce tour-ci, mais d'autres tours de questions sont prévus dans le courant de la prochaine heure.

    Monsieur Harris, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Richard Harris (Prince George—Bulkley Valley, Alliance canadienne): Je vous remercie, madame la présidente. Monsieur Nixon, je vous remercie pour votre excellent exposé.

    Si je comprends bien, et je pense que la plupart de mes collègues l'interprètent de cette façon, les banques voudraient qu'on leur indique l'orientation à prendre dans le contexte de ce processus d'examen de l'incidence sur l'intérêt public—c'est-à-dire en ce qui concerne les fusions—si vous désirez emprunter cette voie. Certains commentaires concernant l'intérêt public, qui représentent le point de vue des consommateurs, portent sur l'accès aux services bancaires et sur les prêts aux petites entreprises. Ce sont des sujets qui reviennent constamment.

    Il est en outre important pour l'intérêt public que les banques canadiennes demeurent vigoureuses et aient la capacité de le devenir davantage, étant donné que des millions de Canadiens détiennent des actions de nos banques, que ce soit dans leur portefeuille d'investissement ou dans leur portefeuille de retraite. La capacité des banques d'être compétitives de manière plus équitable sur le marché mondial et de tirer parti des occasions qui se présentent est essentielle si l'on veut qu'elles demeurent vigoureuses et maintiennent leur capacité de croissance. Les fusions de banques font très probablement partie de ce processus.

    Avez-vous une notion des dividendes que représente le secteur bancaire dans les portefeuilles de retraite à l'échelle du Canada?

+-

    M. Gordon Nixon: Je ne peux pas citer de chiffres précis. Je suis certain que ça représente un montant très important. Le pourcentage de la capitalisation des compagnies inscrites à la bourse de Toronto que représente la capitalisation des banques est très élevé. En ce qui concerne les dividendes, le pourcentage est encore plus élevé étant donné que les banques ont tendance à verser des dividendes élevés.

    Ça représente un pourcentage très important, mais nous pourrons certainement vous communiquer des chiffres plus précis plus tard.

¹  +-(1550)  

+-

    M. Richard Harris: Vous avez également mentionné la possibilité de supprimer les restrictions à la prise de contrôle de nos banques par des intérêts étrangers. Un des arguments invoqués est que si nous autorisons les fusions, nos banques appartiendront toutes à des banques américaines ou à quelques autres grosses banques européennes, par exemple. À ce propos, entrevoyez-vous, dans vos prévisions à long terme et même à très long terme, la moindre possibilité que ça se produise?

+-

    M. Gordon Nixon: J'espère que non. C'est un des volets du processus qui pose le plus gros défi sur le plan de la politique gouvernementale. Je pense qu'en ce qui concerne l'accès et les succursales, par exemple, les problèmes de mise en oeuvre sont beaucoup plus faciles à régler de façon à satisfaire l'intérêt public.

    Quand on envisage l'avenir à long terme de notre secteur, il ne fait aucun doute que la propriété étrangère constitue un facteur très important pour notre pays. J'ai à ce sujet un point de vue légèrement différent de celui de mes collègues des autres banques qui ont insisté un peu plus pour qu'on ouvre immédiatement les marchés à la propriété étrangère.

    À long terme, notre secteur et bien d'autres secteurs ont intérêt à ce que le marché soit ouvert, de sorte que les décisions en matière de propriété et dans d'autres domaines soient dictées par le marché. Avant de procéder à cette ouverture, il est toutefois très important de permettre à notre secteur de se regrouper et de se restructurer de sorte qu'il renforce sa position à l'échelle nord-américaine ou à l'échelle mondiale et devienne moins vulnérable aux prises de contrôle. J'ignore si les règlements concernant la propriété étrangère ou le contrôle par des actionnaires étrangers seront modifiés en ce qui concerne le secteur des services financiers mais, dans ce cas, des banques nord-américaines ayant les reins solides seraient de loin préférables à des banques de taille moyenne vulnérables à une prise de contrôle, ce qui est actuellement le cas.

+-

    La présidente: Merci bien.

    Monsieur Wilfert, puis M. Pillitteri et M. Nystrom. Vous avez cinq minutes chacun.

+-

    M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente. Je remercie M. Nixon et ses collègues de participer à nos délibérations.

    Je tiens à signaler que je suis entièrement d'accord en ce qui concerne la question de la souveraineté financière. C'est une question qui me préoccupe au plus haut point. Je ne sais pas très bien comment il faut s'y prendre, mais je tiens à ce que l'on s'assure que les banques canadiennes restent la propriété de Canadiens et Canadiennes et que les intérêts du Canada soient primordiaux.

    À la page 4 de votre mémoire, vous abordez un certain nombre de problèmes, notamment ceux des pertes temporaires d'emplois et de la diminution du nombre de sièges sociaux. Vous mentionnez ensuite diverses possibilités d'atténuer ces problèmes.

    En ce qui concerne la question de l'intérêt public, je conviens que la question de la clarté est importante. La transaction qui s'apparente le plus à une fusion majeure au Canada est celle de Toronto Dominion et de Canada Trust. Une des questions que je poserai aux représentants de ces sociétés portera sur l'évaluation des résultats de cette fusion. Étant donné que vous faites partie du secteur, je me demande si vous ne pourriez pas faire quelques commentaires personnels au sujet des incidences de cette opération parce que des considérations semblables entreront inévitablement en ligne de compte si vous décidiez de fusionner avec une autre banque.

    À la page 6 de votre mémoire, vous abordez la question des engagements des banques en indiquant comment atténuer les principales craintes pour l'intérêt public. Je pense que c'est une question extrêmement importante. Les Canadiens en sont conscients. Je pense que vous avez présenté, à l'instar d'autres témoins, un argument convaincant au sujet de la concurrence internationale. Il s'agit en fait de déterminer quelles seront les incidences sur les Canadiens à l'échelle locale et à l'échelle nationale également.

    Vous abordez aussi la question des parts de marché et diverses autres questions, qui ont également été abordées par d'autres témoins. J'aimerais toutefois que vous donniez quelques précisions à ce sujet. J'ai trouvé les commentaires que vous avez faits dans l'allocution que vous avez prononcée au mois d'octobre à l'Université Queen's très intéressants, surtout ceux qui portaient sur un des principaux problèmes, à savoir celui du maintien de l'accès aux prêts pour les entreprises après une fusion, qui préoccupe les Canadiens.

¹  +-(1555)  

+-

    M. Gordon Nixon: En ce qui concerne la fusion de TD-Canada Trust, mon opinion est qu'elle s'est malheureusement très bien passée. J'emploie le terme «malheureusement» parce que je suis un concurrent. Je pense que d'après les informations données par les intéressés—et ils vous en donneront certainement davantage—, les incidences de cette fusion ont été positives pour leurs clientèles respectives, celle de Canada Trust comme celle de la Banque Toronto Dominion.

    Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, si on s'engage dans les fusions de banques au Canada, les enjeux seront bien plus grands que dans le cas de la fusion de TD-Canada Trust, parce qu'il s'agissait en l'occurrence de la prise de contrôle d'une institution financière de taille moyenne par une grande institution. Je pense qu'un regroupement aura une incidence beaucoup plus forte sur toutes les banques et sur la plupart des plus petites institutions. Les enjeux sont donc beaucoup plus grands. La fusion de TD-Canada Trust est toutefois un cas de fusion qui s'est très bien déroulé, tant du point de vue de l'organisme de réglementation que de celui du gouvernement et des institutions concernées.

    En ce qui concerne les incidences à l'échelle nationale, je rappelle que les principaux sujets de critiques ont tendance à être liés aux incidences sur les succursales, les consommateurs et les petites entreprises. Toutes les entreprises de notre secteur sont maintenant des sociétés de services financiers et je pense qu'il faut examiner la question au niveau de chaque produit et de chaque secteur d'activité parce que les secteurs d'activité sont nombreux et que les enjeux ne se limitent pas aux incidences sur les succursales ou sur les PME. Quand on examine les incidences d'un regroupement éventuel, il faut pratiquement faire un examen systématique portant sur chaque produit en particulier.

    Je pense toutefois qu'il est possible d'atténuer l'impact de ces questions délicates sur les consommateurs canadiens. Il n'y a aucune raison pour qu'un regroupement entraîne automatiquement la fermeture de nombreuses succursales à travers le pays. Les probabilités d'une vente de succursales sont beaucoup plus fortes que celles d'une fermeture, parce que plusieurs institutions cherchent à prendre de l'expansion et à élargir leur réseau de succursales à travers le pays. Je pense que des représentants de plus petites institutions l'ont déjà mentionné devant le comité et que d'autres le feront.

    En ce qui concerne les banques, la nécessité de se défaire d'un certain nombre de succursales sera dictée en grande partie par des critères de concurrence plutôt que par le désir de réduire le nombre de succursales de leur réseau. De nombreux regroupements de succursales nécessaires pour assurer la compétitivité des institutions canadiennes ont été réalisés depuis le milieu des années 90 et l'on peut constater que les fermetures sont actuellement sporadiques. En fait, de nombreuses institutions, y compris la nôtre, ouvrent actuellement de nouvelles succursales.

    Par conséquent, les préoccupations en ce qui concerne les succursales peuvent être atténuées par le biais d'accords ou d'engagements pris par les deux banques qui fusionnent.

    Les préoccupations liées aux consommateurs ont tendance à être les principales sources de critiques. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a signalé notamment que neuf petites entreprises sur dix s'opposent probablement aux fusions de banques. La réponse dépend en grande partie de la façon dont la question est posée. Je suppose que si l'on demandait aux petites entreprises si elles sont en faveur d'une augmentation des taxes ou d'une réglementation plus poussée, elles donneraient le même type de réponse.

    Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, en ce qui concerne le crédit aux petites entreprises, les banques n'occupent actuellement que 50 p. 100 du marché. Les coopératives de crédit, les banques étrangères et d'autres sociétés de services financiers nous livrent une forte concurrence, sans parler de la concurrence acharnée dans notre propre secteur. Diverses études internationales révèlent que notre secteur et que le coût des services financiers sont très concurrentiels par rapport à la plupart des autres pays. Les conclusions d'un examen produit par produit sont très favorables en ce qui concerne les institutions canadiennes.

    Des problèmes se posent effectivement en ce qui concerne les consommateurs. Je pense que les banques reconnaissent qu'il faut les régler et je pense qu'elles sont disposées à envisager de nouvelles solutions pour régler ce type de problèmes. Comme je l'ai mentionné, je pense que nous sommes parvenus à régler assez bien certains de ces problèmes, mais nous sommes prêts à discuter de diverses possibilités d'atténuer l'impact sur les consommateurs.

º  +-(1600)  

+-

    La présidente: Monsieur Pillitteri. Vous avez cinq minutes.

+-

    M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.

    Nous sommes très heureux que vous ayez accepté de faire cet exposé, messieurs.

    Monsieur Nixon, j'ai discuté avec vous il y a quelque temps des opinions qu'ont les Canadiens et Canadiennes au sujet de la qualité des services bancaires. Ayant fait des investissements et ayant voyagé dans d'autres régions du monde, j'ai pu constater que nos institutions bancaires nous ont donné un excellent service. Je tenais à le signaler.

    Par contre, certaines pressions sont exercées sur nous pour que nous facilitions l'accès au capital pour les petites entreprises.

    Je faisais déjà partie de ce comité au cours de la dernière étude sur les fusions de banques, alors que les banques avaient déjà fait quelques transactions en prévision d'une fusion. Le sujet revient maintenant sur le tapis. Alors que certaines propositions ont été faites, vous nous demandez d'établir le fondement du régime qui pourrait être le plus satisfaisant en matière de fusions.

    Monsieur Nixon, est-il possible que l'une des questions auxquelles ont n'a pas donné une réponse complète soit celle de l'accessibilité des petites entreprises au capital? La dernière fois que nous avons abordé le sujet avec l'industrie, elle a proposé de créer une banque supplémentaire pour régler la question d'une plus grande accessibilité au capital et du degré de risque accru qui y est associé. La plupart des banques canadiennes ont adopté un système rigide en matière de service à la clientèle, qui ne permet pas la latitude qu'ont les banques américaines d'appliquer un taux d'intérêt proportionnel au niveau de risque. Ces banques prennent donc le risque pour lequel le client est prêt à payer. Cette latitude n'existe pas au Canada. Je pense que c'est une question que vous devriez régler en faisant savoir ce que vous êtes prêts à faire pour réaliser une fusion. Je pense que vous apaiseriez ainsi certaines craintes. Si un grand nombre de banques fusionnaient, l'accessibilité ne serait pas garantie étant donné que le nombre très réduit de banques limiterait la concurrence.

    Le problème est le suivant. Toutes les entreprises qui imposaient des taux d'intérêt exorbitants de l'ordre de 15 à 20 p. 100 il y a 25 ans ont disparu, parce que la concurrence a été pratiquement éliminée dans le secteur bancaire. Je me demande si l'on ne pourrait pas mettre en place un système consistant par exemple à placer un certain pourcentage des actifs dans une banque qui aurait pour mission de servir ce type de clientèle et qui aurait également une capacité de microcrédit... Je pense que le problème serait alors vu sous un autre angle.

    On affirme que la croissance est la seule possibilité pour les banques de devenir plus concurrentielles mais nous constatons que la position des cinq principales banques n'a pratiquement pas changé au cours des 100 dernières années. Leur croissance a été à peu près égale. Aucune banque n'a jamais pris le contrôle du marché et la seule possibilité que vous envisagez serait...

+-

    La présidente: Veuillez surveiller l'heure.

+-

    M. Gary Pillitteri: Pourriez-vous faire des commentaires à ce sujet?

+-

    M. Gordon Nixon: Certainement.

    En bref, je signale que la croissance est générale dans notre secteur mais que les services à la clientèle ont considérablement changé. Je pense que la gamme des services offerts par les banques canadiennes diffère toujours autant d'une à l'autre.

    Vous avez fait une remarque très pertinente à laquelle je répondrai de deux façons.

    Je pense que depuis 1998, le paysage a beaucoup évolué en ce qui concerne la concurrence au Canada et c'est également vrai en ce qui concerne les petites entreprises. Je pense que les changements sont très positifs. De nombreux nouveaux concurrents ont fait leur apparition sur le marché, ce qui a eu une incidence positive.

    Je signale par ailleurs que, d'après les statistiques concernant notre secteur, 85 p. 100 des demandes de prêts faites par des PME sont approuvées. D'après nos statistiques internes, je pense que le pourcentage est même plus élevé. Par conséquent, je sais que c'est une source de critiques à l'échelle locale, mais notre taux de réussite est très élevé.

    Votre observation est toutefois très pertinente et indique effectivement la différence qui existe entre les banques canadiennes et les banques américaines. Je pense que les banques canadiennes s'efforcent d'accorder davantage d'attention à ce que l'on pourrait considérer comme le marché des prêts aux débiteurs de deuxième ordre qui n'est pas aussi bien établi qu'aux États-Unis.

    La plupart des petites entreprises sont financées de façon plus dynamique au Canada qu'aux États-Unis. La plupart d'entre elles bénéficient de meilleures conditions que celles qu'on leur ferait aux États-Unis. La différence est qu'aux États-Unis, on a mis en place en matière de financement un marché secondaire que l'on pourrait appeler un marché de prêts à risque élevé—associé à des taux d'intérêt élevés—qui est assuré par quelques banques mais surtout par des sociétés de crédit et autres entreprises semblables.

    D'après les statistiques établies grâce à l'enquête que nous avons faite avec la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, avec les Manufacturiers et exportateurs du Canada et avec l'Université Queen's, une des faiblesses de notre secteur par rapport à notre pendant américain concerne les prêts à taux d'intérêt élevés, le marché des prêts aux débiteurs de deuxième ordre, qui n'est pas aussi bien établi au Canada.

    Je ne pense toutefois pas que ce soit un marché dans lequel les banques devraient s'engager ni qu'elles devraient faciliter. De nombreux autres fournisseurs potentiels de services financiers pourraient occuper ce marché des prêts à risque élevé ou des prêts aux débiteurs de deuxième ordre. Le développement de ce marché au Canada serait positif pour les petites entreprises. Je pense que les banques ont un rôle à jouer à cet égard et qu'elles le font.

    Je pense que l'on peut également invoquer l'argument que l'on a déjà entendu au sujet du capital-risque car c'est un secteur où les petites entreprises canadiennes se heurtent à davantage d'obstacles que les petites entreprises américaines. Le capital-risque est beaucoup plus accessible aux États-Unis qu'au Canada. Ce n'est toutefois pas un marché qui concerne les banques.

º  +-(1605)  

+-

    La présidente: Je vous remercie.

    Monsieur Nystrom. Vous disposez de cinq minutes.

    Je recommande à mes collègues de poser des questions plus brèves afin de nous permettre d'en poser un peu plus.

+-

    M. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Avez-vous dit cinq ou dix minutes?

+-

    La présidente: Cinq.

+-

    M. Lorne Nystrom: Bien. Je serai très bref. Soyez les bienvenus.

    J'ai d'abord une question à poser au sujet du processus. Tout projet de fusion de banques déclenche un processus d'examen par le Bureau de la concurrence et par le Bureau du surintendant des institutions financières et, bien entendu, par les comités du Sénat et de la Chambre qui sont chargés des finances et des banques.

    J'ai remarqué que le Comité sénatorial des banques et du commerce a recommandé que le Comité des finances de la Chambre des communes ne tienne pas d'audiences sur un projet de fusion de banques. J'ai également constaté que la Banque nationale a fait la même recommandation dans son mémoire.

    Pensez-vous que notre comité doive tenir des audiences sur un projet de fusion ou approuvez-vous la recommandation de la Banque nationale et du Sénat?

+-

    M. Gordon Nixon: Nous n'approuvons pas entièrement la recommandation du comité sénatorial à ce sujet. Nous considérons en quelque sorte le processus actuel comme un processus d'audiences publiques sur les fusions de banques et nous espérons que c'est ainsi que vous l'envisagez.

    Ce que nous avons suggéré, et que nous avons en fait recommandé dans notre mémoire, c'est d'avoir recours au processus de la Chambre des communes pour examiner le projet et s'assurer que les critères établis par votre comité soient respectés. Autrement dit, nous avons recommandé que votre comité participe au processus de fusion, en faisant intervenir les banques, le ministère des Finances, le BSIF et le Bureau de la concurrence pour s'assurer que les critères que vous avez établis sont respectés.

    Par conséquent, nous ne préconisons pas que vous ne participiez pas au processus, mais nous estimons que si, à la suite de ce processus, des critères précis sont établis en matière d'intérêt public, il ne serait pas nécessaire de tenir des audiences publiques sur des transactions précises. Nous espérons donc que des critères seront établis à la suite du présent processus et que celui-ci servira à protéger l'intérêt public lorsqu'il s'agira d'approuver des demandes de fusions.

+-

    M. Lorne Nystrom: Vous pensez par conséquent qu'il ne serait pas nécessaire que notre comité tienne des audiences publiques sur un projet de fusion en particulier. Autrement dit, si vous nous présentiez un projet de fusion avec la Banque de Montréal d'ici deux ou trois ans, nous ne tiendrions pas d'audiences publiques à ce sujet.

+-

    M. Gordon Nixon: Je pense que la tenue d'audiences publiques à travers le pays ne serait pas utile si vous aviez établi des critères et des règles en ce qui concerne les fusions. Je pense que dans ce cas, les audiences publiques seraient remplacées par un processus auquel vous participeriez et dans lequel interviendraient également le BSIF, le Bureau de la concurrence et le ministère des Finances, pour s'assurer que les critères que vous auriez établis en ce qui concerne l'intérêt public soient respectés.

    C'est en cela que devrait consister, d'après moi, le processus d'audiences publiques.

+-

    M. Lorne Nystrom: Je suis très étonné que la plus grande banque du pays ne soit pas disposée à faire preuve d'une grande transparence, par souci de respecter l'obligation de rendre des comptes à la population et de lui permettre d'exprimer ses opinions sur le projet.

    Votre charte vous a été accordée comme un privilège par le Parlement du Canada. Pourquoi ne seriez-vous donc pas disposés à participer à des audiences publiques de ce même Parlement sur ce projet précis? Je suis étonné. Les Canadiens et les Canadiennes tiennent à ce qu'on leur rende des comptes. Vous rejetez ce processus démocratique.

º  +-(1610)  

+-

    M. Gordon Nixon: Je ne le pense pas. Je recommande plutôt qu'il soit intégré. Les présentes audiences ne constituent-elles pas dans une certaine mesure un processus permettant aux diverses parties concernées d'exprimer leurs opinions sur les fusions, sur la politique gouvernementale applicable et sur les critères en matière d'intérêt public?

    Le gouvernement du Canada a pour but de déterminer en quoi consiste l'intérêt public par le biais de ces audiences. Nous appuyons vigoureusement ce processus.

+-

    M. Lorne Nystrom: Je voudrais vous poser à ce propos une question que me poseront certainement les citoyens de ma circonscription (Regina--Qu'Appelle). La Banque Royale et la Banque de Montréal ont établi depuis environ deux ans un projet de fusion. Quelles seraient les pertes d'emplois que pourrait entraîner un tel projet à l'échelle nationale?

+-

    M. Gordon Nixon: Je pense que les pertes d'emplois seraient très limitées. Elles se situeraient principalement au niveau des sièges sociaux, c'est-à-dire à Toronto, en ce qui concerne les banques canadiennes mais il serait possible de les atténuer.

    Je pense qu'en 1998, on avait recommandé de supprimer au total environ 10 p. 100 des emplois. Je pense que cela aurait représenté alors environ 9 000 emplois.

    Nous recrutons environ 5 000 employés par an pour l'ensemble de nos établissements au Canada. Nous procédons à environ 12 000 mutations entre divers postes. Je pense que cela fait partie des critères d'intérêt public en ce qui concerne les emplois. Les problèmes causés par certaines pertes d'emplois pourraient être réglés par attrition et par divers engagements pris par les banques.

+-

    M. Lorne Nystrom: C'est ce que vous dites maintenant, mais vous ne le pensez peut-être pas en fait. La fusion pourrait avoir lieu dans deux ou trois ans. Les Canadiens n'ont-ils pas le droit d'exiger que vous veniez donner devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes des informations précises sur les pertes d'emplois prévues et sur les incidences de cette fusion? Comment pourrait-on obtenir ces renseignements si ce n'est par l'intermédiaire d'audiences publiques?

+-

    M. Gordon Nixon: Je pense au contraire avoir recommandé de tenir des audiences publiques. J'ai mentionné que si l'on établissait des règles précises en ce qui concerne les emplois par exemple, le processus des audiences publiques devrait permettre de s'assurer que nous y participions et que nous respections ces critères, conformément à nos engagements.

    Ce que nous recommandons, c'est que les critères ne soient pas établis dans le contexte d'audiences publiques qui seraient tenues au cours des étapes finales d'une transaction. Nous recommandons qu'ils soient établis dans le cadre du présent processus, puis que nous soyons ensuite à nouveau convoqués pour vous permettre de vérifier si les critères établis sont respectés.

    Je ne recommande donc pas que nous échappions au processus. Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, je pense que le présent processus devrait être pour nous une occasion de garantir le respect des critères.

+-

    La présidente: Je vous remercie. Le temps dont vous disposiez est écoulé.

    Madame Guarnieri.

+-

    Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.

    Je tiens avant tout à vous féliciter parce que, d'après un sondage Ipsos-Reid, RBC a recouvré son statut d'institution la plus respectée dans le secteur. C'est une nouvelle réconfortante, compte tenu des amendes imposées actuellement pour inconduite à un pourcentage élevé des grandes banques américaines.

    Je voudrais que vous donniez votre opinion sur certaines des restrictions imposées par le gouvernement à votre société. C'est certainement un signe de distinction. Vous êtes au premier plan de ses préoccupations.

    Votre appartenance est soumise à des restrictions. Il a empêché la réalisation de vos plans de fusion avec d'autres banques. Vous n'êtes pas autorisés à utiliser vos actifs ni votre réseau de succursales pour vendre de l'assurance. Vous n'êtes pas autorisés à faire de la location de voitures. Des entreprises étrangères ont été encouragées à occuper ces créneaux à votre détriment.

    Malgré ces restrictions, vous générez des profits et votre croissance est supérieure à une cadence raisonnable. Comment expliquez-vous vos résultats? Est-ce que cela confirme le principe voulant que ce qui ne détruit pas quelqu'un le rend plus vigoureux? Ou serait-ce plutôt parce que les plaies ne sont pas visibles?

+-

    M. Gordon Nixon: Je me demande par quel bout commencer.

    Nous avons bien entendu des opinions précises sur certains des secteurs dans lesquels des restrictions nous ont été imposées. En ce qui concerne les secteurs comme ceux de l'assurance et de la location-bail, nous avons mentionné clairement que nous pensions que ces marchés devraient être ouverts, surtout si l'un des objectifs est de garantir des prix à la consommation concurrentiels. Nous pensons, indépendamment du fait que des restrictions aient été imposées en ce qui concerne ces secteurs, qu'une ouverture présenterait des avantages.

    Le premier commentaire que je ferais—et je pense qu'il est très important parce que notre but n'est pas de nous lamenter sur l'état de notre secteur—est que le Canada peut être très fier que son secteur des services financiers soit l'un des plus vigoureux au monde et que son économie soit l'une des plus robustes. En fait, je pense qu'aucun pays n'atteint un niveau proche de nôtre en matière de rendement. C'est donc davantage une question d'être à la hauteur de son potentiel.

    Nous avons un avantage concurrentiel dans le secteur des services financiers. Cet avantage est dû en partie au contexte historique et à l'environnement réglementaire dans lequel nous sommes actifs depuis plus d'un siècle. Grâce à ces facteurs, les banques canadiennes sont très vigoureuses et ont quelques avantages concurrentiels marqués. Nous sommes en avance sur la plupart des autres pays en matière d'innovation, de tarifs et de coûts. Nous pensons que c'est un avantage concurrentiel que nous devrions être en mesure d'exporter dans l'intérêt des Canadiens. C'est un secteur dans lequel nous pensons que nous devrions être en mesure d'être beaucoup plus dynamiques et de prendre de l'expansion—surtout aux États-Unis, en ce qui nous concerne, parce que c'est notre priorité stratégique. Nous pensons que les fusions ou un regroupement nous permettraient d'être beaucoup plus efficaces à cet égard. Nous poursuivrons toutefois nos objectifs, avec ou sans fusions.

    Compte tenu de notre taille, nous avons incontestablement des défis à relever. Nous sommes notamment vulnérables à une prise de contrôle, mais notre secteur est vigoureux. Notre progression se poursuivra. Il s'agit de déterminer ce que l'on peut faire dans notre secteur pour qu'il réalise son plein potentiel et quelle serait la structure la plus efficace à cet égard. C'est le sujet sur lequel devraient porter les présentes discussions.

    Notre secteur est vigoureux et les sociétés de services financiers canadiennes sont robustes également. Je pense que notre rendement restera assez bon, mais nous pourrions l'améliorer de plus en plus au profit de la nation.

º  +-(1615)  

+-

    Mme Albina Guarnieri: Vous avez manifestement très bien survécu à la tempête qui a éclaté il y a quelques années, mais je voudrais attirer votre attention sur certains secteurs où la situation n'est pas aussi brillante.

    Comme vous le savez, Catherine Swift a témoigné la semaine dernière. Elle a communiqué les résultats d'une série de sondages indiquant que les petites entreprises souffraient d'une contraction marquée du crédit. Il semblerait que ce soit le secteur où l'on constate une croissance soutenue, dans le contexte des fusions. Vous avez mentionné que c'était un sujet favori de critique—je pense que ce sont les termes que vous avez employés.

    Les Canadiens et les Canadiennes ont de nombreuses possibilités de rechange en ce qui concerne les dépôts, les opérations bancaires générales, les cartes de crédit, les hypothèques, mais l'établissement d'une marge de crédit pour les petites entreprises semble être pour ainsi dire le fief des cinq grandes banques. Nous sommes toutefois conscients que les frais administratifs liés aux prêts aux petites entreprises en font un secteur d'investissement moins attrayant pour les banques.

    J'ai posé à peu près la même question à Matthew Barrett il y a environ quatre ans; j'ai demandé s'il serait approprié et si l'on avait les moyens d'envisager de faire une concession en augmentant de façon substantielle le crédit accessible aux petites entreprises, dans le contexte d'une fusion approuvée. J'avoue en toute franchise que nous n'avions pas obtenu de réponse et je suis enchanté que vous ayez mentionné dans votre mémoire que vous seriez heureux de participer à des discussions constructives sur le sujet.

    Pensez-vous qu'une fusion serait assez avantageuse pour les banques concernées pour leur permettre d'offrir des prêts un peu plus élevés, voire beaucoup plus élevés, aux petites entreprises? Serait-ce une considération que vous seriez disposé à appuyer vigoureusement?

+-

    M. Gordon Nixon: Je me permets de rappeler que 50 p. 100 du crédit aux petites entreprises est actuellement assuré par d'autres institutions que les grandes banques, ce qui est très sain pour le secteur. Ce n'est pas le territoire exclusif des banques canadiennes; d'autres types d'établissements sont actifs dans ce secteur et ils se livrent une concurrence acharnée.

    Nous nous efforçons, tout comme nos concurrents, d'accroître le montant du crédit accessible aux petites entreprises. Il a d'ailleurs déjà augmenté et la concurrence d'autres établissements s'est avivée. Par conséquent, je ne pense pas qu'il y ait pénurie de crédit accessible aux petites entreprises au Canada. Nous voudrions effectivement accroître notre part du marché et prêter davantage de capitaux aux petites entreprises, mais il reste à trouver des occasions attrayantes qui répondent aux critères d'un investissement sûr et sain.

    S'il y a manque, c'est plutôt dans le secteur qui a été mentionné tout à l'heure par votre collègue, celui du crédit à risque élevé, parce que c'est un secteur qui a tendance à être plus délicat. En ce qui concerne les prêts à taux élevé, les prêts aux débiteurs de deuxième ordre, le financement secondaire et le capital-risque, le marché canadien n'a pas encore atteint sa pleine maturité. Je pense que les banques pourraient s'engager davantage. Tout notre secteur fait des efforts et est disposé à examiner de nouvelles possibilités et je pense qu'il est important que ce type d'initiative soit prise dans le contexte d'un profit raisonnable sur le capital investi, sinon les chances de survie seraient nulles. C'est effectivement un domaine où l'on pourrait s'investir davantage.

    La pénurie de crédit n'est toutefois pas aussi aiguë qu'on ne le laisse entendre dans les médias ou dans d'autres milieux. À l'occasion des entrevues que nous avons menées auprès des petites entreprises dans le cadre de notre enquête, nous avons constaté que la question du crédit était un problème auquel elles accordaient une moins forte priorité qu'à un bon nombre d'autres problèmes comme la pénurie de main-d'oeuvre spécialisée, les problèmes environnementaux ou les taxes qui sont toujours un sujet explosif. Je pense qu'il est très important de le mentionner.

º  +-(1620)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Merci, madame Guarnieri.

    Monsieur Brison, vous avez cinq minutes, puis M. Murphy disposera des deux ou trois dernières minutes.

+-

    M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Je vous remercie, madame la présidente.

    Je vous remercie également d'avoir accepté de participer à nos audiences, monsieur Nixon.

    En 1993, le Canada était en avance sur les États-Unis dans le domaine de la déréglementation des services financiers. Les derniers vestiges de la loi Glass-Steagall ayant disparu aux États-Unis, l'environnement réglementaire pour les acteurs du secteur des services financiers, pour les banques et les autres entreprises de services financiers du Canada est moins propice à la croissance et à la consolidation des entreprises. Compte tenu de l'assouplissement des règles en matière de propriété au Canada et d'un fardeau réglementaire plus lourd qu'aux États-Unis, est-ce que nous n'ouvrons pas la voie à une prise de contrôle du secteur des services financiers par des entreprises américaines ou étrangères?

+-

    M. Gordon Nixon: C'est un risque bien réel. Je ne suis pas certain que ce soit dû uniquement à la réglementation. La réglementation américaine n'est pas parfaite non plus et présente diverses lacunes, mais je pense que dans un petit pays comme le Canada, de la taille des États-Unis, il est important pour tous les secteurs, y compris celui des services financiers, de remédier à ces lacunes.

    Je pense qu'en ce qui concerne la propriété étrangère, le problème qui se pose est que, si le secteur des services financiers ne bénéficiait d'aucune protection, les banques canadiennes seraient extrêmement vulnérables à une prise de contrôle par une entreprise étrangère et ce, pour plusieurs raisons. Notre secteur est de taille réduite à l'échelle nord-américaine ou mondiale. Les entreprises de notre secteur ont tendance à être moins coûteuses parce que les évaluations ne sont généralement pas aussi élevées que celles des banques américaines, en partie à cause de la réglementation. Nous excellons dans notre domaine et nous sommes très efficaces. Nous avons atteint des niveaux d'innovation et de productivité très élevés. Nous offrons des produits très sophistiqués par rapport à bien des banques étrangères, et en particulier américaines. Compte tenu de toutes ces considérations, nous deviendrions des candidats très attrayants à une prise de contrôle, si les lois et les règlements le permettaient. C'est une perspective qui ne m'enchante guère. Je pense que dans une perspective stratégique, si l'on envisage la possibilité que dans cinq ou dix ans, on ait davantage de difficulté à mettre en application les restrictions en matière de propriété, ce qui est très difficile à prévoir, nous avons intérêt à protéger notre secteur en l'autorisant à prendre des initiatives qui lui permettent de renforcer sa position pour cesser d'être vulnérable. Je pense que c'est le principal enjeu en matière de propriété.

º  +-(1625)  

+-

    M. Scott Brison: Les risques qu'un processus d'examen des incidences publiques soit politisé sont élevés. D'après la théorie de la hiérarchie des besoins, la nourriture et le gîte sont très importants, et les services bancaires aussi. Pourtant, quand une entreprise du secteur de l'épicerie ou de celui de l'alimentation veut fusionner avec une autre, le projet est examiné par le Bureau de la concurrence mais il ne doit pas être soumis à un processus d'examen des incidences publiques. Quand des promoteurs immobiliers ou des propriétaires d'édifices à appartements veulent fusionner, ils ne doivent pas se soumettre non plus à un processus d'examen des incidences publiques. Je pense que le processus dont il est question risque d'être très politisé.

    Dans l'interview que vous avez donnée au National Post en novembre, vous avez mentionné que vous pensiez qu'il y avait un changement de courant d'opinion, mais que les politiciens craignaient les contrecoups éventuels des fusions. Vous ne pensiez pas que des fusions auraient lieu avant la tenue des prochaines élections fédérales. Cet été, deux banques faisaient des projets de fusion et le ministre des Finances était, paraît-il, au courant de ce projet mais lorsque le premier ministre en a pris connaissance, au mois d'octobre, il a dit qu'aucune fusion n'aurait lieu avant qu'il n'ait pris sa retraite. À bien y penser, certaines personnes pourraient trouver qu'il est quelque peu «tordu» de notre part d'assujettir le sort des fusions entre acteurs du secteur des services financiers à la date de la retraite du premier ministre ou à celle de la tenue des prochaines élections fédérales.

+-

    M. Gordon Nixon: Vous pouvez être assuré que je ne vous ferai pas un tel reproche.

    Des voix: Oh, oh!

+-

    M. Scott Brison: Certaines personnes le pourraient cependant.

    Le degré d'incertitude politique qui entoure le secteur des services financiers ne contribue-t-il pas énormément à réduire la qualité du climat du point de vue des investisseurs et ne menace-t-il pas notre souveraineté économique à long terme davantage qu'il ne la renforce? Ce sont en définitive la croissance économique et la prospérité qui garantissent la souveraineté économique et un secteur des services financiers affranchi des obstacles à la croissance et à la prospérité qu'engendre un climat politique instable est probablement un des facteurs de protection de notre souveraineté économique.

+-

    M. Gordon Nixon: Je ne pense pas que le premier ministre ait déclaré qu'aucune fusion n'aurait lieu avant qu'il n'ait pris sa retraite. J'aurais tendance à mettre l'accent sur le fait que le processus actuel est, quels qu'en soient les motifs ou les circonstances, un processus constructif; je pense qu'il sert les intérêts de notre secteur dans une certaine mesure. Je pense que la pire éventualité pour notre secteur serait une succession de fusions. Si un projet de fusion était annoncé, on annoncerait probablement d'autres transactions. Si l'on procédait à des fusions avant la mise en place d'un processus comme celui-ci, permettant d'établir des règles et des critères, je pense que ce serait très préjudiciable pour notre secteur. Je pense qu'on se trouverait dans la même situation qu'en 1998 où les projets de fusion étaient assujettis à un référendum, avec tout le trafic d'influence politique et tous les problèmes que cela implique pour notre secteur et pour le pays. Quels que soient les motifs ou les circonstances à l'origine de ce processus, je pense qu'il est excellent. Votre comité a la possibilité de déterminer avec un degré de certitude élevé si des fusions peuvent avoir lieu. Si à l'issue de ce processus, nous avons déterminé avec précision en quoi consiste l'intérêt public et établi des critères en ce qui le concerne, les banques pourront décider si elles veulent respecter ces critères.

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Je donne maintenant la parole à M. Cullen.

+-

    M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.

    Je remercie également M. Nixon, M. Coffey et Mme Sutherland.

    Je présume qu'une de vos motivations, et peut-être une des nôtres également, est de déterminer avec plus de précision quels sont les critères en matière d'intérêt public. Je pense qu'à un moment donné, le débat portera notamment sur le degré de détail ou de spécificité qui vous convient et qui nous convient. Plus on sera précis et plus la situation sera claire. Une certaine subjectivité interviendra toutefois immanquablement.

    Vous abordez trois questions générales, à savoir celle de la prospérité et du niveau de vie du Canada, celle de la souveraineté financière et celle de l'accès, du choix et de la transition. En dernière analyse, notre comité établira peut-être des critères différents ou des critères supplémentaires, ou il établira peut-être des sous-critères, mais pensez-vous qu'il soit nécessaire que tous les critères soient remplis? À supposer qu'un projet de fusion réponde à deux de vos critères mais pas au troisième, ne conviendrait-il pas de peser le pour et le contre? Avez-vous des suggestions à faire? Quelle approche serait raisonnable?

º  +-(1630)  

+-

    M. Gordon Nixon: J'aurais tendance à dire que cela se situe à deux niveaux. Le premier est lié à la politique gouvernementale et concerne des questions comme la souveraineté financière et la structure du secteur des services financiers. En ce qui me concerne, c'est une question stratégique d'importance majeure et il faut reconnaître que si l'on s'engage dans cette voie, un regroupement important aura lieu au sein du secteur; il faudra alors s'assurer que nous ne le regretterons pas plus tard. Je pense avoir cité quelques raisons pour lesquelles nous estimons que ce serait avantageux pour le pays à long terme mais c'est à mon avis un enjeu stratégique important.

    En ce qui concerne l'autre aspect, qui est davantage lié aux mesures à mettre en oeuvre en matière d'accès, de disponibilité du crédit et de l'emploi, nous voudrions que vous nous donniez des indications plus précises sur ce que nous devrions faire pour qu'une transaction réponde aux critères en matière d'intérêt public. Je pense que nous pourrions vous aider et aider le gouvernement à établir des critères qui permettraient aux banques de profiter des avantages d'un regroupement tout en protégeant l'intérêt public dans des domaines tels que l'emploi, l'accès, etc.

    Je pense que nous serons en mesure de répondre à ces critères dans des proportions raisonnables si l'on peut avoir des discussions constructives à ce sujet. Ce qui serait néfaste pour notre secteur, c'est que ces discussions se déroulent dans le contexte d'audiences publiques sur un projet de fusion précis. Il serait de loin préférable d'établir ces critères dans le cadre du présent processus et de s'assurer que nous avons la possibilité de nous y conformer.

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Le temps prévu pour ce tour de questions est écoulé. Nous aurons encore deux autres périodes de questions et les membres qui n'ont pas eu l'occasion d'intervenir cette fois-ci auront la parole les premiers au cours du prochain tour.

    Au nom de mes collègues, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation et d'avoir répondu à nos questions.

    Je suspens la séance mais j'aimerais que si vous comptez donner des entrevues aux journalistes, vous le fassiez à l'extérieur pour nous permettre d'entamer rapidement la prochaine tranche d'une heure de nos audiences.

    La séance est suspendue pour une ou deux minutes.

º  +-(1632)  


º  +-(1635)  

+-

    La présidente: Bienvenue à tous et à toutes. Nous poursuivons, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, l'étude sur les répercussions en matière d'intérêt public de la fusion des grandes banques.

    Notre deuxième groupe de témoins est constitué de représentants de la Banque nationale du Canada. Je vous présente Réal Raymond, président et chef de la direction. Soyez le bienvenu, monsieur. Welcome. Il est accompagné de Jean-Paul Caron, vice-président des affaires générales et de M. Jean Houde, vice-président principal des affaires générales et membre du comité de direction de la Banque Nationale du Canada.

    Vous pouvez commencer quand vous serez prêt, monsieur Raymond.

[Français]

+-

    M. Réal Raymond (président et chef de la direction, Banque Nationale du Canada):

    Merci, madame la présidente.

    Mesdames et messieurs membres du comité, je tiens d'abord à vous remercier de nous offrir l'occasion de présenter le point de vue de la Banque Nationale du Canada et, ensuite, de dialoguer avec vous sur la problématique des fusions bancaires au Canada.

    La tâche immédiate du comité consiste à clarifier le concept d'intérêt public et le processus par lequel ce dernier peut être considéré pendant l'examen d'un projet de fusion. Il n'est donc pas mon intention de revenir sur l'à-propos des fusions bancaires. En effet, par l'adoption de la loi C-8, le Parlement a, selon nous, clairement indiqué que les fusions entre les grandes banques étaient envisageables, pourvu que certaines conditions soient remplies. Le mémoire de la Banque Nationale et les suggestions qu'il avance portent donc essentiellement sur l'examen des projets de fusions, et non sur leur pertinence.

    Le point de vue de la Banque Nationale est qu'il est possible de concilier la constitution de plus grandes banques à l'échelle internationale et le maintien d'un système financier aussi performant et concurrentiel qu'il l'est actuellement. Pour s'en convaincre, on peut retourner au travail exhaustif du rapport MacKay, où on peut lire les commentaires suivants: «Les écarts de taux d'intérêt sur les prêts aux petites entreprises sont nettement plus faibles au Canada qu'aux États-Unis». De même, «...le montant moyen des frais mensuels facturés à une PME canadienne s'élevait à 18 $, comparativement [...] à 27 $ en moyenne aux États-Unis.» Pour les particuliers: «...au Canada, les frais moyens sont de 10 $ par mois [...] et d'environ 15,50 $ (canadiens) par mois en moyenne aux États-Unis.»

    Ces chiffres, comme je le mentionnais, sont extraits du rapport MacKay.

    Passons maintenant en revue les différentes dimensions de l'intérêt public. Du point de vue des avantages présumés des fusions, on retrouve évidemment la création de groupes bancaires ayant des ressources accrues leur permettant de prendre de l'expansion au niveau international, de mieux servir les grandes entreprises canadiennes sur les marchés des capitaux et d'investir davantage dans une offre de services visant l'ensemble des consommateurs de services financiers. Je n'insisterai pas sur le sujet, étant persuadé que mes collègues des autres banques vous parleront abondamment des avantages potentiels des fusions.

    Du point de vue de l'intérêt public, le dilemme que posent les fusions a trait au prix que le Canada pourrait avoir à payer si la concentration engendrée par les fusions conduisait à un affaiblissement perceptible de la concurrence. De là pourrait découler une offre de services réduite et plus coûteuse pour les utilisateurs du système bancaire canadien, lequel se soucierait moins de la qualité du service. Il est donc crucial que le processus de fusion n'engendre pas ces effets pervers.

    La Banque Nationale croit qu'il est possible d'éviter cet écueil par une approche nettement proactive dans les mesures correctives convenues au préalable. Une telle approche devrait toucher particulièrement les services bancaires aux particuliers et aux PME. Aux yeux de cette clientèle, la concurrence réelle se mesure encore par celle qui est offerte à l'échelle locale par des institutions ayant pignon sur rue au moyen de succursales et de bureaux de prêts, où s'établit la relation privilégiée entre le banquier et le client.

    Dans une région où deux banques fusionnées obtiendraient une part de marché trop importante, nous croyons que le dessaisissement de points de service et de portefeuilles pourrait maintenir une concurrence réelle. La proposition que nous soumettons au comité est que dans une région ainsi vulnérable, la meilleure manière de maintenir une concurrence réelle consiste à susciter le remplacement de l'une ou l'autre des banques par une tierce partie absente de cette région ou, du moins, peu présente.

    Notre proposition concernant les dessaisissements vise précisément à maximiser les possibilités d'apparition d'un nouveau concurrent sur le marché. Cette proposition s'appuie sur la pratique américaine en vertu de laquelle les organismes de réglementation sont intervenus à plusieurs reprises pour prévenir une trop forte concentration à l'échelle locale.

    La proposition de la Banque Nationale est la suivante. Premièrement, dans un territoire donné, un dessaisissement devrait prévoir la présence de groupements de succursales ou de bureaux de prêts aux PME d'une seule des deux banques, et non pas d'un amalgame de points de services, souvent les moins importants ou rentables, de l'une ou l'autre des deux banques.

º  +-(1640)  

    Deuxièmement, le territoire ainsi couvert devrait être assez vaste, soit une province ou, dans les provinces les plus populeuses, une continuité géographique comptant une population de deux à trois millions d'habitants devant correspondre à une réalité socio-économique. Le remplacement de l'une des banques fusionnées par une tierce partie éliminerait les problèmes potentiels en matière d'intérêt public. Dans les régions où le risque de concentration serait plus élevé, les fermetures de succursales seraient réduites au minimum. Le nombre d'institutions au service des particuliers et des PME resterait pratiquement inchangé.

    Les préoccupations en matière d'emploi seraient aussi considérées, car les licenciements en succursale seraient minimisés. On pourrait conserver davantage d'emplois d'encadrement et de soutien hors succursale au niveau régional.

    Enfin, sur le plan global de la concurrence à l'échelle du pays, on créerait les conditions permettant le renforcement des plus petites institutions ou l'émergence d'un concurrent bancaire, ce qui compenserait en partie la disparition d'une grande banque à l'échelle nationale.

    En résumé, plusieurs des dimensions d'intérêt public, en particulier le financement des PME, l'accès aux services bancaires en région rurale et en partie la préservation des emplois, seraient convenablement couvertes par une approche proactive de la part du Bureau de la concurrence. Pour s'assurer du résultat souhaité, le ministre des Finances pourrait donner des directives publiques au Bureau de la concurrence quant au dessaisissement de réseaux de points de services aux particuliers et aux PME.

    Le traitement des employés et les autres modalités d'exécution de la fusion font aussi partie des préoccupations d'intérêt public. À cet égard, la Banque Nationale propose que toute demande d'examen de fusions soit accompagnée de l'engagement relativement aux employés et à certains aspects sensibles, comme la continuité des services et les fusions des succursales. Les aspects qui relèveraient du niveau des services seraient analysés par le Bureau de la concurrence. Les autres le seraient par le Bureau du surintendant des institutions financières.

    Enfin, à l'instar de la Réserve fédérale américaine, l'une et l'autre de ces instances pourraient tenir des audiences publiques permettant aux parties intéressées d'exprimer leur jeu. Comme nous l'avons précisé dans notre mémoire, la Banque Nationale en arrive donc à la conclusion que l'évaluation de l'incidence sur l'intérêt public et son examen par le Parlement n'est pas une étape obligée du processus d'approbation des fusions.

    De notre côté, à la Banque Nationale, nous serions vivement intéressés à acquérir des réseaux locaux viables de services de base aux particuliers et aux PME ou des unités opérationnelles d'envergure nationale faisant l'objet d'un dessaisissement à la suite de la fusion de deux grandes banques canadiennes. Nous avons la volonté, l'expérience et les ressources requises pour jouer un rôle plus important sur le marché financier canadien. Nous croyons que les fusions entre grandes banques peuvent être une occasion de continuer d'assurer notre expansion, principalement hors Québec, et ce faisant de contribuer à maintenir la concurrence à l'échelle canadienne.

    Je vous remercie de l'occasion qui m'a été offerte d'exprimer le point de vue de la Banque Nationale et d'émettre des propositions visant à faire avancer le débat sur la notion d'intérêt public dans le cadre des fusions bancaires. Merci.

º  +-(1645)  

[Traduction]

+-

    La présidente: Je vous remercie.

    Nous entamons un tour de questions de cinq minutes par personne. Allez-y, monsieur Harris.

+-

    M. Richard Harris: Merci, madame la présidente.

    Je vous remercie pour votre exposé, monsieur Raymond.

    Cinq minutes, ce n'est pas beaucoup pour aborder toutes ces questions.

    Je poserai d'abord une question d'ordre général. Beaucoup de personnes pensent que les banques de plus petite taille pourraient attendre que se présentent des occasions à la suite de la fusion de deux ou de plusieurs des grandes banques canadiennes. Ce scénario est probablement plausible en ce qui concerne votre banque.

    Pourriez-vous expliquer si votre banque considère cela comme une opportunité? Est-ce, dans le plan d'affaires de votre banque, une perspective qui vous réjouit?

+-

    M. Réal Raymond: Je vous remercie pour votre question.

    Une expansion de nos activités dans les services bancaires de détail et dans les services bancaires commerciaux nous intéresse beaucoup.

    Il est évident que le marché a atteint un très haut degré de maturité au Canada. Par conséquent, un certain regroupement serait indispensable pour nous permettre de prendre de l'expansion et d'acquérir des parts du marché à l'extérieur de la province de Québec où nous avons des assises solides, comme vous le savez. Nous pensons que nous pourrions alors jouer un rôle important dans le maintien de la concurrence. Nous possédons les capitaux et les connaissances nécessaires et nous faisons déjà partie d'un système de paiement au Canada. Par conséquent, aucun aspect du système canadien et de ses rouages ne nous est étranger et rien ne pourrait nous empêcher d'être un concurrent très sérieux.

    Il faut toutefois que le processus soit en place pour s'assurer que si nous décidons de faire une acquisition, nous pourrons soutenir la concurrence et pour que cette acquisition se fasse dans de bonnes conditions pour l'acquéreur.

+-

    M. Richard Harris: On prévoit, je présume, que si des fusions se concrétisent et que l'on procède à une rationalisation des succursales, des entreprises comme la vôtre, l'Alberta Treasury Board et les coopératives de crédit considéreront cela comme une occasion également.

    Est-il réellement plus avantageux de racheter un réseau établi de succursales bancaires qui sont vacantes que de bâtir une nouvelle structure?

+-

    M. Réal Raymond: Cette façon de procéder offre de nombreux avantages financiers. La clientèle et les relations sont déjà établis. Les employés nécessaires sont déjà en place pour servir cette clientèle. C'est donc un énorme avantage, étant donné que l'on reprend une entreprise déjà établie au lieu d'essayer de voler, si je puis me permettre de m'exprimer ainsi, des clients aux banques déjà en place.

+-

    M. Richard Harris: J'ai encore le temps de poser très rapidement une question, je pense.

    Est-ce qu'à votre avis les fusions de banques entraîneraient immanquablement une diminution de la concurrence ou pensez-vous que les succursales dont on prévoit la fermeture seraient presque à coup sûr rachetées par une entreprise qui veut prendre de l'expansion?

+-

    M. Réal Raymond: C'est ce que nous pensons. Nous en sommes certains.

+-

    M. Richard Harris: Merci beaucoup.

+-

    La présidente: Il vous reste en fait une minute.

+-

    M. Richard Harris: Ah oui? C'est formidable! Il doit être tard.

    Pourriez-vous me donner des explications au sujet du paragraphe de la page 2 de votre mémoire qui commence par «Premièrement», juste après la phrase: «La proposition de la Banque Nationale est la suivante:»?

+-

    M. Réal Raymond: Celle que je viens de présenter?

+-

    M. Richard Harris: Oui, à la page 2 de votre mémoire dans la partie qui commence par: «La proposition de la Banque Nationale est la suivante:», au paragraphe suivant qui commence par «Premièrement, dans un territoire donné, un dessaisissement devrait prévoir la présence de groupements...».

º  +-(1650)  

+-

    La présidente: C'est votre principale recommandation, la première.

+-

    M. Réal Raymond: C'est très simple. Au lieu de permettre aux banques qui ont fusionné de décider quels points de service elles revendront pour que leurs projets soient approuvés par le Bureau de la concurrence, nous recommandons de mettre en place un processus qui permettra à l'acheteur d'acquérir une grappe de succursales dans un territoire géographique assez vaste pour garder les employés, maintenir en place les activités de qualité supérieure dans cette région et trouver un acheteur qui puisse être concurrentiel.

    C'est le type de système qui est en place aux États-Unis. Même si le nombre de banques atteint les 10 000, on procède toujours ainsi et l'on s'assure que les acheteurs potentiels à l'échelle régionale sont concurrentiels à long terme. En outre, une proposition a été faite aux États-Unis en vertu de laquelle les ex-propriétaires ne pourraient pas tenter de récupérer leur clientèle pendant un certain temps. C'est une façon de procéder qui permet de s'assurer que, comme je l'ai mentionné précédemment, un concurrent sérieux remplace le propriétaire précédent.

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Monsieur Murphy. Je m'excuse de ne pas vous avoir donné la parole au cours du tour précédent.

+-

    M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.

    Monsieur Raymond, je voudrais examiner de plus près le problème de l'accès pour les petites entreprises. Je pense que c'est le problème numéro un dans le contexte des présentes discussions. Je reconnais qu'il faut définir l'intérêt public, qu'il faut plus de clarté et qu'il faut établir des règles et éviter le double emploi. En ce qui concerne les fermetures de succursales, il est préférable que la plupart des discussions se fassent au niveau du Bureau de la concurrence.

    Une des principales préoccupations dont on me fait part en ma qualité de député concerne les difficultés d'accès au capital dans le secteur des petites entreprises. Les banques servent bien notre pays. La concurrence est très saine dans le secteur des services de détail. Elle est également très saine dans celui des services aux grandes entreprises bien établies. Cependant, en ce qui concerne les petites entreprises, j'ai déjà eu l'occasion de constater que le retrait des banques à charte de ce secteur avait des conséquences catastrophiques. Les banques prennent des décisions stratégiques fondées principalement sur le rendement sur le capital investi; ces décisions sont prises principalement à Toronto, quoique ce ne soit pas le cas en ce qui vous concerne. On refuse d'accorder des prêts aux entreprises du secteur du tourisme d'accueil dans telle région. On refuse d'accorder des prêts aux entreprises agricoles dans telle autre.

    Les banques parlent d'approbation des demandes. Dans la plupart des cas, les demandes ne sont même pas acceptées et, par conséquent, la question de l'approbation n'entre même pas en ligne de compte.

    Accepteriez-vous que l'on ordonne aux parties à la fusion de présenter un plan détaillé indiquant les mesures qu'elles comptent prendre pour offrir des services à tous les secteurs dans toutes les régions du pays pendant une période d'une durée raisonnable? Les banques se sont déjà retirées de certains secteurs et bientôt, le nombre de banques diminuera de six à trois, par exemple. Toutes les banques procèdent ainsi pour des motifs d'ordre stratégique. Je prévois qu'elles se retireront de tout...

    Elles le font déjà et vous le savez. Elles se retireront du secteur des prêts agricoles dans toutes les provinces situées à l'ouest de Thunder Bay. Elles se retireront du secteur des prêts aux entreprises du secteur du tourisme d'accueil dans toutes les régions situées à l'est de Montréal. Ce sont des décisions qui ont des conséquences catastrophiques. Je voudrais que vous fassiez des commentaires et donniez votre opinion sur les possibilités éventuelles d'enrayer cette tendance.

º  +-(1655)  

+-

    M. Réal Raymond: Mon opinion personnelle est que la seule possibilité d'atteindre cet objectif est d'éviter d'ajouter de nouvelles règles aux règles actuelles. Je pense que l'on a déjà mis en place un nombre suffisant de règles au Canada pour superviser le rôle des banques dans les secteurs des services bancaires de détail ou des services aux PME.

    Les PME ont des choix. La seule façon pour elles d'exercer ces choix consiste à s'assurer que le nombre d'acteurs à l'échelle locale ou dans la région concernée est suffisant pour qu'elles puissent emprunter des fonds à des conditions acceptables pour les banques. La seule possibilité d'atteindre cet objectif est de s'assurer que des intervenants de plus petite taille, comme nous, ont beaucoup d'expertise dans le domaine des services aux PME.

    Vous savez certainement que le montant des prêts accordés par la Banque nationale du Canada aux PME représente le double du montant des prêts accordés à la clientèle qui constitue sa part naturelle de marché dans le pays. Nous connaissons donc le marché des services aux PME. Nous pouvons accroître la concurrence dans des régions où nous ne sommes pas encore établis. En acquérant des actifs existants dans certaines régions comme l'Alberta ou d'autres régions, nous accroîtrons inévitablement la concurrence.

    L'autre point que je voudrais signaler est que les banques n'ont pas toutes les mêmes problèmes en même temps dans certains secteurs en termes de concentration. Ma banque pourrait être active dans le secteur des pâtes et papiers, mais pas dans le secteur pétrolier et gazier. Une coopérative de crédit peut très bien être active dans le secteur agricole mais pas dans un autre. Par conséquent, nous n'intervenons pas tous en même temps ni de la même façon dans les mêmes secteurs. Le risque peut donc être réduit par un accroissement de la concurrence à l'échelle locale.

+-

    M. Shawn Murphy: Je ne comprends pas parfaitement votre réponse. J'ai exposé le problème qui se posait. Vous avez mentionné que vous ne pensiez pas qu'il soit nécessaire d'établir des règles supplémentaires alors que les règles déjà en place n'ont pas été efficaces. Je ne vois pas comment la réduction du nombre de banques de cinq ou six à trois pourrait améliorer la situation.

    Je comprends ce que vous voulez dire au sujet du choix, mais il est préférable de laisser cette responsabilité au Bureau de la concurrence pour s'assurer qu'aucune entité ne détienne une part de marché excessive. La réduction du nombre de banques de cinq ou six à trois ne contribuerait certainement pas à régler le problème du retrait des banques de certains secteurs. C'est une question d'intérêt public qui devrait être examinée par notre comité. Votre réponse ne nous aide pas beaucoup.

+-

    M. Réal Raymond: En ce qui me concerne, le système bancaire canadien est un système très efficace et très concurrentiel. Notre rôle est de prêter des fonds et pas de refuser d'en prêter. L'octroi de prêts fait partie intégrante de nos activités. Lorsque nous refusons d'accorder un prêt, c'est parce que nous pensons que le risque est trop élevé ou que les taux ne répondent pas à nos critères.

    Si l'on établit des règles qui imposent des restrictions aux banques en matière de taux et les forcent à prendre des risques qu'elles ne sont pas en mesure de prendre—pour protéger les déposants, par exemple—, elles devraient alors accroître leur capital. Ce serait coûteux. Par conséquent, l'octroi d'un prêt est assujetti à une évaluation du risque. Le risque est un facteur qui est toujours pris en considération.

    Je reconnais que s'il n'y avait plus que trois acteurs dans une région donnée, cela n'améliorerait pas la situation et pourrait limiter la concurrence et le choix. Ce n'est pas ce que nous proposons. Nous proposons que l'on veille à ce que le ministre des Finances donne des directives précises au Bureau de la concurrence pour s'assurer que la concurrence soit assez forte dans un secteur donné et que tous les secteurs soient couverts. Le comportement des banques ne sera jamais identique à un moment précis, en raison des différences de structure dans leurs bilans.

»  +-(1700)  

+-

    La présidente: Je vous remercie.

    Madame Minna. Vous disposez de cinq minutes.

+-

    Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.

    Dans le contexte d'une réduction éventuelle du nombre de banques, appuyons-nous sur l'hypothèse que deux fusions ont eu lieu. Il y en a eu presque deux la dernière fois. Pour faciliter la discussion, nous présumons que les fusions ont eu lieu. Deux banques ont fusionné et il ne reste donc plus que trois banques.

    Si le nombre de banques a diminué—par exemple, s'il n'en reste que deux ou trois—et que l'une d'entre elles faisait faillite, cette faillite aurait des répercussions catastrophiques sur l'économie et sur le pays. Étant donné que le niveau de risque serait considérablement accru pour le pays, le gouvernement ne devrait-il pas envisager de remanier et de renforcer considérablement le régime réglementaire qui permet d'exercer un contrôle sur les banques et de les évaluer pour s'assurer qu'aucune d'entre elles ne fasse faillite? En cas de faillite, c'est le gouvernement qui est responsable en définitive, parce qu'il est le garant.

    Je ne suis donc pas certaine que le régime réglementaire actuel permette de faire face à une telle situation. Étant donné le niveau de risque accru, ne faudrait-il pas envisager de renforcer le régime réglementaire de sorte que tout risque de faillite soit écarté? Quelle est votre réaction ou quelle suggestion auriez-vous à faire à ce sujet?

+-

    M. Réal Raymond: Je m'attaquerai d'abord au dernier volet de votre question. Je ne pense pas que les déposants aient subi des pertes majeures dans notre pays.

    Vouliez-vous faire un commentaire à ce sujet?

    Mme Maria Minna: Non. Je m'excuse. Allez-y.

    M. Réal Raymond: Notre système est très efficace. La tâche du Bureau du surintendant des institutions financières a été de s'assurer que le système soit bien encadré et bien supervisé et qu'en cas de faillite, on trouve un acquéreur pour les actifs et pour investir les capitaux nécessaires.

    C'est ce qui s'est passé au cours des 15 dernières années dans le secteur des sociétés de fiducie. C'est ce qui s'est passé lors de la prise de contrôle de petites banques par d'autres. Nous avons participé.

    Je suis donc convaincu que le Bureau du surintendant des institutions financières dispose actuellement des outils et des moyens nécessaires pour s'assurer que les Canadiens sont bien protégés. Sa performance est excellente et c'est un des organismes de surveillance les plus efficaces. Je suis persuadé que les outils nécessaires sont déjà en place. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'en ajouter d'autres.

    La présence de banques plus fortes jouant un rôle accru sur le marché international... Il ne faut pas oublier que notre proposition a pour but de s'assurer que les acteurs de moindre envergure puissent profiter de l'occasion et assurer la croissance de leur rayon d'activité et leur propre croissance en termes de capital, de capacité et d'efficacité.

    N'est-ce donc pas une solution qui comporte beaucoup moins de risques que l'autre?

+-

    Mme Maria Minna: Je n'en suis pas certaine.

    Vous mentionnez que si une banque fait faillite ou est sur le point de faire faillite, parce qu'elle a pris trop d'expansion à l'échelle internationale, ou pour d'autres motifs... Si j'ai bien compris, le principal argument en faveur d'une fusion dans le secteur bancaire est que les banques doivent être en mesure d'être plus actives sur les marchés internationaux et que, en dehors d'une fusion, cette possibilité est exclue. Je reconnais que je ne suis pas encore convaincue de la validité de cet argument. C'est toutefois l'argument que l'on invoque.

    À supposer donc qu'une banque ait pris trop d'expansion et qu'elle soit en difficulté. Dans le contexte actuel, le nombre de banques est beaucoup plus élevé mais s'il était réduit à la suite de fusions et qu'il n'en restait plus que deux par exemple, si l'une d'entre elles faisait faillite, les répercussions seraient énormes pour le pays et pour l'économie, même si vous prévoyez que les morceaux seraient récupérés par d'autres institutions. Ne pensez-vous pas qu'il serait nécessaire de renforcer le régime réglementaire actuel pour avoir une garantie absolue qu'une telle éventualité soit totalement exclue et que les investissements faits à l'étranger et les autres décisions soient judicieux? Pensez-vous que le régime actuel soit suffisant et qu'il ne soit pas nécessaire de le renforcer pour éviter de telles éventualités? Ne pensez-vous pas qu'un renforcement du système devrait être l'étape suivante?

»  +-(1705)  

+-

    La présidente: Veuillez répondre brièvement, monsieur Raymond.

+-

    M. Réal Raymond: Je ne vous suis pas parce que vous prenez pour acquis que nous serons mieux protégés et que nous serons plus efficaces que maintenant si la situation ne change pas. Ce n'est pas mon avis.

    Si l'on permet à de petites institutions de prendre de l'expansion, elles seront dans une meilleure position. Un bureau de surveillance efficace doté d'outils efficaces est déjà en place. Il ne devrait pas renoncer au rôle de surveillance qu'il a sur les activités de ces banques à l'étranger. Il devrait les surveiller comme il le fait actuellement.

+-

    La présidente: Je vous remercie.

    Je passe la parole à M. Nystrom qui dispose de cinq minutes.

[Français]

+-

    M. Lorne Nystrom: Merci beaucoup, madame la présidente.

    Bienvenue devant notre comité.

    Il y a quelques semaines, un comité du Sénat a dit que des audiences publiques n'étaient pas du tout nécessaires quand on discutait d'une fusion possible. Dans votre présentation d'aujourd'hui, vous dites être d'accord avec le Sénat. Je suis très préoccupé par les questions d'imputabilité démocratique.

    Pourquoi voulez-vous exclure le Comité des finances d'une étude publique sur une fusion? Il est très important d'avoir l'input des Canadiens sur une telle proposition. Pourquoi êtes-vous d'accord avec le Sénat du Canada sur une telle exclusion? Vous avez une charte du Parlement du Canada, qui est un véritable privilège. En tant que députés, M. Brison, moi et les autres sommes responsables devant le public canadien. Pourquoi ne pas tenir une audience publique comme celle d'aujourd'hui pour étudier un projet de fusion spécifique? Même M. Pillitteri est d'accord sur cela.

+-

    M. Réal Raymond: Nous ne disons pas qu'il ne doit pas y avoir d'audiences publiques. Nous disons que si le ministre des Finances fournit au Bureau du surintendant des institutions financières et au Bureau de la concurrence les règles et l'encadrement nécessaires, qui devraient évidemment être approuvés par les députés du Parlement, donc un encadrement qui soit correct et bien compris par les divers acteurs, les audiences pourront être tenues soit par le Bureau du surintendant des institutions financières, soit par le Bureau de la concurrence. Lors de ces audiences, toutes les parties seraient entendues, comme c'est le cas ici.

    Je ne crois pas qu'on ait besoin de revenir devant des parlementaires si de telles règles et un tel encadrement ont été bien établis par le ministre des Finances au départ. Cela n'enlève pas aux Canadiens la possibilité de s'exprimer au niveau régional ou au niveau des différents organismes qui représentent les intérêts des consommateurs, des PME ou des grandes entreprises. On ne dit pas qu'il faut exclure cela. On dit qu'il faut donner ce pouvoir aux organismes qui sont là pour s'assurer que les règles sont respectées.

    Dans mon esprit à moi, le principal élément de l'intérêt public, c'est de s'assurer qu'il y ait vraiment de la concurrence au niveau local et au niveau régional. Si les règles du jeu établies par le ministère dirigent les organismes de réglementation dans cette voie, je pense que l'intérêt public canadien sera bien servi.

+-

    M. Lorne Nystrom: Mais c'est le Comité des finances qui doit assurer le respect des règles du ministère des Finances. Le Comité des finances est, comme on dit en anglais, le watchdog. Le rôle des parlementaires est d'être les watchdogs de notre société. Le Bureau de la concurrence est plein de fonctionnaires qui ne sont pas élus. Nous sommes les élus et nous sommes responsables devant nos électeurs. Dans une société démocratique, il est très important que le Parlement canadien ait plus de pouvoirs. À mon avis, il y a maintenant trop de décisions qui sont prises par le premier ministre, par deux ou trois ministres ou par deux ou trois bureaucrates. On a besoin d'un système plus démocratique.

    Vous êtes d'accord avec le Sénat, dont les membres ne sont pas élus, qui n'est pas du tout démocratique, qui n'est pas du tout responsable devant les électeurs. Je suis un peu étonné que vous ayez adopté cette position.

»  +-(1710)  

+-

    M. Réal Raymond: Je pense que ce qui est important pour les parlementaires, c'est de donner un encadrement aux secteurs industriels, qu'il s'agisse du système bancaire ou d'autres secteurs industriels. Une fois que l'encadrement a été donné, je ne crois pas qu'il appartienne à des parlementaires de prendre une décision commerciale, de décider si deux banques doivent fusionner.

    Le gouvernement, et donc le Comité des finances, doit donner l'encadrement, s'assurer du respect des règles et s'assurer qu'il y ait de la concurrence pour les Canadiens. Mais je ne suis pas certain qu'il soit approprié ou nécessaire que le Comité des finances décide si telle banque doit fusionner avec telle autre banque--parce c'est ce que ça voudrait dire--si les règles du jeu ont été suivies par les organismes de réglementation qui ont été mis en place par le gouvernement pour justement jouer ce rôle.

    D'ailleurs, vous ne le faites pas dans d'autres secteurs industriels. Plusieurs des grands secteurs industriels canadiens ne viennent pas se présenter à nouveau au Parlement. Il y a eu récemment des fusions dans le monde de l'assurance, et le Comité des finances ne s'est pas penché sur ces fusions. Le Bureau de la concurrence s'assure qu'il y a suffisamment de concurrence dans le secteur. Ces gens-là sont dans le secteur des services financiers, tout comme les banques, et ils n'ont pas eu à vivre cela. Pourquoi le système bancaire devrait-il suivre des règles différentes ou se présenter devant les parlementaires pour faire approuver des transactions commerciales? Il faut s'assurer que les règles sont en place dès le départ, ce qui n'est pas nécessairement le cas aujourd'hui, parce que la notion d'intérêt public n'est pas très bien définie. C'est ce qu'on vous recommande ici, ainsi que des règles qui permettent une meilleure concurrence.

[Traduction]

+-

    La présidente: Je vous remercie.

    Je passe maintenant la parole à M. Wilfert, puis à M. Brison. Vous disposez chacun de cinq minutes.

+-

    M. Bryon Wilfert: Je vous remercie, madame la présidente.

    Messieurs, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation.

    Je voudrais discuter d'un point que vous avez mentionné à la page 10 de votre mémoire. Avant cela, je tiens à signaler que le Canada est à mon avis un des pays les plus performants en matière de maintien d'un système bancaire et financier sûr et vigoureux. Par exemple, notre système d'assurance-dépôts est entièrement financé par les participants; il n'est pas déficitaire.

    Certaines personnes ont dit que les Canadiens, étant donné notre réussite enviable dans le domaine de la gestion, de la surveillance et de la réglementation, auraient besoin que des mesures de contrôle ou de mise en oeuvre beaucoup plus strictes soient mises en place à cause des risques systématiques associés aux fusions.

    Dans votre mémoire, à la page 10, vous mentionnez que vous voulez saisir les occasions, mais j'aimerais que vous soyez un peu plus précis... Vos commentaires, surtout ceux qui concernent les occasions à saisir au Canada, se distinguent de ceux de certaines autres banques qui ont abordé le sujet des occasions à l'échelle internationale. Vous mentionnez qu'il est important de se rendre compte que chaque bloc de règlements et de mesures de contrôle a des conséquences plus lourdes pour des institutions comme la Banque nationale que pour d'autres. Vous mentionnez également que si les fusions transformaient les banques en services publics virtuels dont tous les aspects sont réglementés, elles pourraient en fin de compte affaiblir le système financier au lieu de le renforcer.

    Notre but est de toute évidence de renforcer le système. J'aimerais donc que vous fassiez des commentaires plus précis à ce sujet et au sujet des incidences des fusions dans ce contexte.

+-

    Mr. Réal Raymond: À propos de la taille d'une banque et du fait que plus une institution est réglementée et plus les coûts sont élevés, il est évident que si l'on doit mettre en place de nombreuses lignes directrices internes pour s'assurer que l'on observe tous les règlements—et nous avons déjà de nombreux règlements à respecter—et que l'on en ajoute de nouveaux, c'est plus coûteux pour les petites institutions que pour les grandes. Les coûts sont, de toute évidence, liés à la nature du capital que l'on peut déployer et au nombre de personnes responsables de la conformité aux règlements.

    C'est notamment le message que nous voulons communiquer. Plus on ajoute des règlements et plus on avantage les grandes institutions par rapport aux petites.

    Nous reconnaissons toutefois la nécessité de mettre des règlements en place. Je n'essaie pas de vous convaincre de ne pas établir de règlements parce que je suis entièrement en faveur de règlements stricts. Cependant, il n'est pas utile d'ajouter constamment de nouvelles règles. Par affaiblissement du système bancaire, nous entendons un affaiblissement par rapport à d'autres acteurs du secteur financier qui sont déjà actifs sur ce marché.

    En vertu de la législation actuelle, les compagnies d'assurance ont pratiquement les mêmes possibilités que les banques. Elles ont accès au système de paiement. Elles peuvent fournir les mêmes services que nous. Par conséquent, si l'on établit des règles supplémentaires s'appliquant uniquement au secteur banquier et pas à l'ensemble du secteur financier, on pénalise les banques par rapport aux autres types d'institutions présentes dans le marché.

    Par ailleurs, si l'on permet à des entreprises étrangères de s'établir au Canada—et je ne m'y oppose pas—, il est nécessaire qu'elles soient soumises aux mêmes règles que nous. Si l'on impose des règles supplémentaires aux acteurs locaux dans le seul but d'assurer une protection contre les risques systémiques, et que l'on permet à d'autres secteurs de ne pas observer les mêmes règles, on affaiblit le système bancaire.

»  +-(1715)  

+-

    M. Bryon Wilfert: Madame la présidente, je pense que l'un des aspects de la protection de l'intérêt public consiste à maintenir la souveraineté financière, à s'assurer que les Canadiens gardent le contrôle de leur avenir dans le secteur des services financiers.

    Un des problèmes qui se pose dans le contexte des fusions—et M. Murphy a fait allusion aux incidences dans certaines collectivités—concerne le deuxième palier, c'est-à-dire le vide. Je présume que dans le cadre de vos efforts de planification stratégique, vous avez identifié certaines occasions si des fusions se concrétisaient selon certains scénarios. Je ne vous demande pas de divulguer votre tactique dans le menu détail, mais j'aimerais savoir comment vous et les autres institutions envisagez de régler le problème du vide, compte tenu du fait que le Conseil canadien du commerce de détail et la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante ont signalé que certains des nouveaux venus sur le marché sont tellement spécialisés dans un créneau précis qu'ils n'ont pas offert la gamme complète de services et n'ont pas réglé certains problèmes de vide.

+-

    Mr. Réal Raymond: Je présume que vous faites allusion au problème de la concurrence locale qui n'est pas réglé par les entreprises étrangères. Elles s'établissent dans des secteurs précis ou sont spécialisées dans certains produits.

    En toute sincérité, je pense que la concurrence sera en fait assurée par les acteurs locaux et pas par les entreprises étrangères. Celles-ci s'établiront au Canada pour vendre quelques produits très rentables ou pour couvrir des secteurs géographiques très rentables, comme Toronto, Montréal ou Vancouver. Je ne pense pas qu'elles comptent s'établir ailleurs. Par conséquent, la concurrence locale ne peut être assurée que par des acteurs locaux—des coopératives de crédit, des banques comme la nôtre et divers autres acteurs.

+-

    La présidente: Merci beaucoup, monsieur Wilfert.

    C'est maintenant votre tour, monsieur Brison. Vous avez cinq minutes.

+-

    M. Scott Brison: Je vous remercie, madame la présidente.

    Voici ma première question. Les dernières modifications qui ont été apportées à la Loi sur les banques avaient pour but d'accroître la concurrence. Nous avons constaté quelques changements sur ce plan. Dernièrement, le Western Financial Group a reçu sa charte bancaire. Je pense qu'il s'appelait Hi-Alta et qu'il s'appelle maintenant Western Financial.

+-

    M. Réal Raymond: Il s'agit de Banque Ouest.

+-

    M. Scott Brison: C'est exact, Banque Ouest. Cette institution s'appelait Hi-Alta Capital Inc.

    Pensez-vous à d'autres cas où des entreprises ont tiré parti de certaines des modifications apportées à la Loi sur les banques pour accroître le niveau de concurrence? Constate-t-on un changement concret à cet égard sur le marché ou est-ce seulement occasionnel?

+-

    M. Réal Raymond: On le constate dans le secteur des assurances. Les compagnies d'assurance ont incontestablement tiré parti des avantages de la loi pour fusionner.

    En outre, comme l'a mentionné M. Wilfert, quelques entreprises concurrentes se sont établies dans notre pays mais ces concurrents sont spécialisés dans des secteurs très précis, notamment dans les cartes de crédit. Le nombre d'institutions financières étrangères qui se sont établies au Canada a augmenté depuis trois ans. ING est un exemple connu.

    La concurrence étrangère s'est donc intensifiée en ce qui concerne certains produits précis ou certaines régions, mais ces entreprises n'ont pas la même influence au niveau local que des acteurs locaux accessibles à tous les consommateurs et aux PME de toutes les régions. Dans les grandes villes et en ce qui concerne certains produits, la concurrence s'est toutefois accrue.

+-

    M. Scott Brison: Quel est le pourcentage des transactions bancaires faites par la voie électronique?

+-

    M. Réal Raymond: Quatre-vingt-quatorze pour cent. Par conséquent, 6 p. 100 seulement des transactions sont effectuées dans les succursales.

+-

    M. Scott Brison: Cette évolution ne détruit-elle pas la plupart des arguments liés à l'infrastructure immobilière du secteur bancaire? La semaine dernière, par exemple, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante nous a confirmé que la plupart de ses membres utilisent Internet pour avoir accès aux services bancaires. On invoque pourtant encore des arguments liés au maintien des succursales. Ne sont-ils pas vains, compte tenu de cette tendance?

»  +-(1720)  

+-

    M. Réal Raymond: Une tendance se manifeste. De nombreuses succursales ont disparu depuis quelques années. Cette tendance n'a toutefois aucun rapport avec les fusions.

+-

    M. Scott Brison: Elle a un rapport avec la technologie.

+-

    M. Réal Raymond: Elle est due à l'orientation que prend le marché et au fait que la plupart des opérations qui étaient faites dans les succursales sont maintenant faites par Internet ou par téléphone, par exemple.

    Nous sommes toutefois persuadés que, même si vous avez raison et que cette tendance est bien réelle, une présence locale est importante, pas pour les transactions, mais pour les services consultatifs et les services aux PME. Il est nécessaire d'établir un point de service local. C'est à ce niveau que tout se passe, et pas au niveau du siège social. C'est bien beau de mettre en place un réseau Internet et une infrastructure électronique élaborée, ce que nous le faisons, comme toutes les autres institutions financières, mais nous sommes convaincus de l'importance d'une présence locale reposant sur des prémisses et sur des personnes qui comprennent les besoins spécifiques de leur région.

+-

    M. Scott Brison: Je doute beaucoup qu'il soit possible d'instaurer un processus d'examen des incidences en matière d'intérêt public qui ne soit pas très politisé. Un processus semblable est déjà en place grâce à la présence du BSIF et du Bureau de la concurrence. Le Bureau de la concurrence intervient quand un projet de regroupement dans le secteur des services alimentaires aurait pour conséquence qu'une seule épicerie subsisterait dans une petite localité. Aucun autre processus d'examen des incidences de ce type de projet n'a été prévu à l'extérieur du Bureau de la concurrence. Est-il vraiment utile de réserver un traitement spécial aux banques? D'après la théorie de Maslow sur la hiérarchie des besoins, la nourriture et le gîte sont en tête de liste et les services bancaires sont beaucoup plus bas sur la liste. Ils n'ont pas une importance capitale. Il semble toutefois que l'on réserve un traitement spécial au secteur bancaire. C'est très rentable sur le plan politique de s'en prendre aux banques, mais ce n'est pas ainsi que l'on élabore une politique gouvernementale efficace.

+-

    M. Réal Raymond: Je suis d'accord. C'est pourquoi nous recommandons de réduire l'influence politique sur les décisions concernant les fusions au Canada sans renoncer pour autant à vos responsabilités, mais celles-ci consisteraient à faire au ministre des Finances des recommandations sur les opérations qui servent l'intérêt public. Personnellement, je pense que c'est synonyme de concurrence. On ne renonce pas à l'aspect politique du processus décisionnel quand on met en place un processus adéquat et que le ministre des Finances fait des recommandations pertinentes, mais on réduit l'influence politique.

    Le secteur bancaire a fait l'objet d'une attention toute particulière de la part du Parlement jusqu'à présent. De nombreux secteurs très importants pour le pays ne sont pas soumis à un processus analogue et pourtant, cela ne pose pas de problèmes.

+-

    La présidente: Je vous remercie, monsieur Brison.

    Monsieur Pillitteri.

+-

    M. Gary Pillitteri: Je vous remercie, madame la présidente.

    M. Nystrom a mentionné que lui et M. Brison représentent des citoyens ordinaires. Je voudrais lui rappeler que ce sont plutôt les députés de mon parti qui représentent les citoyens ordinaires.

+-

    M. Scott Brison: Ou les citoyens extraordinaires.

+-

    M. Gary Pillitteri: Je pose ma question.

+-

    La présidente: Le temps passe.

+-

    M. Gary Pillitteri: Je vous remercie pour votre exposé.

    [Note de la rédaction: Difficultés techniques]...ce que ça coûte. Les coûts sont effectivement beaucoup moins élevés ici qu'aux États-Unis.

    Dans votre exposé, vous mentionnez que l'on peut accroître la concurrence dans une région où des banques fusionnent en laissant de la place à une tierce partie. Vous mentionnez également que les dessaisissement de nombreux immeubles dans cette région...puis vous faites une comparaison avec le niveau américain.

    Je me demande si vous seriez disposé à pousser le raisonnement un peu plus loin. Vous ne l'avez peut-être pas mentionné mais dans la plupart des États américains, aucune banque n'aurait une part de marché équivalant à 30 ou 35 p. 100. Iriez-vous jusqu'à dire que cela devrait être précisé dans ce que vous appelez les conditions d'une fusion? Souhaiteriez-vous par ailleurs que ce soit valable à l'échelle du pays? Plusieurs banques ont des concentrations de coopératives de crédit dans quelques provinces. Nous voudrions que le système soit complètement ouvert parce que ce serait peut-être un facteur de concurrence au sein d'une banque et qu'elle n'aurait pas établi son fief dans une province en particulier.

    Pourriez-vous faire des commentaires à ce sujet?

»  +-(1725)  

+-

    M. Réal Raymond: Oui. La Banque nationale serait entièrement en faveur de l'établissement de limites quant à la part du marché que posséderaient les banques fusionnées dans certaines régions. Le Bureau de la concurrence a subdivisé le pays en un millier de régions et il est nécessaire de limiter la part de marché d'une même banque dans une région donnée. Ce sera la base sur laquelle on prendra les décisions en ce qui concerne la cession d'éléments d'actif ou le nombre de points de vente ou de bureaux de service aux PME. C'est la base.

    Ce n'est pas la seule condition qu'il faudrait établir. Il faudrait s'assurer que vous pouvez intervenir, mais en laissant aux vendeurs, c'est-à-dire aux banques fusionnées, la liberté de choisir les succursales dont ils veulent se débarrasser. Si vous les laisser choisir, que feront-ils? Conserveront-ils les moins rentables? Les acheteurs potentiels ne seront pas en mesure d'assurer une concurrence vigoureuse.

    Nous pensons donc qu'il faut établir des limites. Il faut en outre s'assurer que l'on génère une véritable concurrence. Il faut s'assurer que les vendeurs ne pourront pas tenter de récupérer leurs anciens clients par exemple et que les acheteurs pourront acquérir un nombre suffisant de succursales pour avoir la vigueur et la capacité nécessaires pour offrir un bon service à la clientèle. Ce que j'appelle le choix méticuleux par les vendeurs est exclu du processus. Il doit être exclu. C'est pourquoi nous proposons que le ministre des Finances s'assure que ce processus est bien établi dans les lignes directrices concernant le Bureau de la concurrence pour garantir la concurrence. Il faut donc fixer des limites.

+-

    La présidente: Avez-vous d'autres commentaires à faire, madame Guarnieri?

    Mme Albina Guarnieri: Non.

+-

    La présidente: Dans ce cas, je vous remercie au nom de tous mes collègues. Votre témoignage nous aide dans notre processus de protection de l'intérêt public.

    Nous suspendons brièvement la séance pour la reprendre dans moins de cinq minutes.

»  +-(1727)  


»  +-(1733)  

+-

    La présidente: Je vous remercie, chers collègues.

    Le dernier exposé d'aujourd'hui sera présenté par des représentants de la Banque canadienne impériale de commerce (CIBC). Je suis très heureuse d'accueillir M. John Hunkin, président et directeur général.

    Nous poursuivons, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, l'étude sur les répercussions en matière d'intérêt public de la fusion des grandes banques.

    Allez-y, monsieur.

+-

    M. John Hunkin (président et directeur général, Banque canadienne impériale de commerce): J'aimerais avant tout vous remercier, madame la présidente, ainsi que les autres membres du comité, de m'avoir invité à prendre la parole ce soir. Je tiens également à remercier le ministre des Finances et le secrétaire d'État aux Institutions financières internationales qui sont les instigateurs de ces audiences importantes qui tombent à un moment critique pour notre industrie.

    Les banques canadiennes font partie de notre tissu social. À l'instar des chemins de fer qui ont aidé à relier les diverses régions du pays, les banques ont été un moteur de croissance et ont assuré la prospérité du Canada. Aucun pays dont le système bancaire est faible ne peut maintenir sa croissance et sa vitalité économiques. On a pu le constater à maintes et maintes reprises dans divers pays.

    La CIBC s'est engagée à apporter davantage à toutes les parties concernées, à fournir des services de qualité à sa clientèle, à gagner le respect de ses employés, à favoriser le développement de communautés vigoureuses et saines et à s'appliquer à dépasser les attentes de ses actionnaires. Nos activités communautaires sont décrites de façon plus précise dans notre Énoncé de responsabilité envers le public de 2002 que nous vous avons fait parvenir avec notre mémoire.

    Au risque de dire une banalité, le secteur des services financiers revêt une importance capitale pour le Canada. Je voudrais citer quelques exemples. Les cinq principales banques sont les entreprises donatrices les plus importantes au Canada. En 2002, CIBC a versé l'équivalent de plus de 23,9 millions de dollars à des organismes de bienfaisance canadiens. En 2001, le secteur bancaire a versé à l'ensemble des paliers de gouvernement canadiens des impôts dont le montant est évalué à 4,8 milliards de dollars.

    Le secteur des services financiers emploie près de 200 000 personnes dans la région du Grand Toronto et génère 28 p. 100 du produit intérieur brut de la région. Le fait que le secteur ait versé 30 millions de dollars durant la récente campagne de Centraide dans la région du Grand Toronto, soit 39 p. 100 du montant total des fonds recueillis, est un indice de son importance. J'estime par conséquent qu'un débat public sur les politiques liées au bien-être de ce secteur devraient intéresser tous les Canadiens et Canadiennes.

    Dans le mémoire que vous avez en main, j'ai tenté d'aborder les principaux sujets énoncés par le ministre Manley, notamment les questions de l'accès, du choix, des perspectives de croissance et de la concurrence ainsi que les problèmes d'ajustement et de transition. Je compte axer principalement les brefs commentaires que je ferai aujourd'hui sur deux points: d'abord ma perception des changements survenus au cours des cinq à dix dernières années dans notre secteur, puis sur les améliorations qui pourraient, à notre avis, être apportées au processus d'examen des projets de fusions de banques afin de permettre un débat d'intérêt public qui soit plus transparent et plus rapide.

    Je ne suis pas ici pour vous annoncer que la CIBC place la fusion au centre de ses préoccupations stratégiques. Ce n'est pas le cas. Nous adoptons une approche très méthodique et très ciblée axée sur la croissance de nos activités de détail et de gestion des avoirs, notamment en ce qui concerne les services bancaires aux petites entreprises et aux entreprises agricoles, et sur la réduction du capital engagé dans nos services de prêts aux grandes entreprises et nos services de banque d'affaires, surtout aux États-Unis.

    Nous pensons que notre secteur évolue rapidement et qu'une restructuration du secteur canadien des services financiers doit être considérée comme une option légitime et viable.

    Je mentionnerai d'abord les changements survenus dans notre secteur et j'utiliserai le cas de la CIBC comme exemple parce que c'est celui que je connais le mieux. J'ai demandé l'autre jour à mes collaborateurs de dresser une liste de tout ce qui a changé à la CIBC à la suite des ventes, des cessions, des alliances et des acquisitions, au cours des dix dernières années. Cette liste est longue. Elle est surtout instructive parce qu'elle montre que loin d'être des entreprises gigantesques qui offrent une gamme complète de services à tous, les banques canadiennes ont dû se trouver des créneaux en raison de la diminution de leur taille relative et de divers facteurs indépendants de leur volonté.

»  +-(1735)  

    Nous avons par exemple déjà eu une présence internationale nettement plus importante pour servir nos clients canadiens à l'étranger, mais cette approche s'est avérée extrêmement onéreuse à long terme et préjudiciable pour nos actionnaires. Ainsi, au cours des dernières années, la CIBC a baissé pavillon et fermé ses bureaux en Allemagne, en Italie, en France et à Taiwan. Nous avons aussi réduit nos activités à Tokyo, à Singapour et à Hong Kong.

    Dans le secteur des services bancaires aux particuliers à l'étranger, nous avons vendu CIBC Guernsey à Butterfield Bank et CIBC Suisse au Crédit agricole Indosuez. Durant la même période, nous nous sommes intéressés à d'autres secteurs d'activité comme ceux des assurances de biens et des assurances-risques, des services de paye, des services de cartes aux marchands et des services de fiducie et de garde de valeurs et de titres. Nous les avons parfois vendus comme ce fut le cas de l'assurance. Dans le cas de nos services de cartes aux marchands, nous avons vendu nos services canadiens à une entreprise d'envergure nord-américaine, Global Payments Inc., en conservant une participation minoritaire dans cette société plus importante qui a les moyens de faire les investissements nécessaires pour réussir sur le marché continental.

    Étant donné que le coût des investissements dans la technologie, dans les ressources humaines et dans le marketing ne cesse d'augmenter, les alliances et les coentreprises sont souvent les seules options viables qu'une entreprise comme la nôtre, compte tenu de sa taille et de l'étendue de ses services, peut raisonnablement envisager tout en maintenant les risques dans des limites acceptables. Cette stratégie a été très efficace dans notre cas. Par exemple, nous avons formé une coentreprise très réussie dans le secteur des services fiduciaires et de la garde de valeurs et de titres appelée CIBC Mellon, dans le cadre de laquelle nous avons scellé un partenariat avec une entreprise américaine bien établie et respectée du secteur bancaire. Au Canada, nous avons établi un partenariat avec Loblaws pour créer les Services financiers le Choix du Président, qui ont attiré plus d'un million de clients. Dans les Antilles, nous avons conclu une alliance avec Barclays PLC et nous avons regroupé nos opérations avec celles de notre partenaire britannique pour créer la First Caribbean Bank. Dernièrement, nous avons vendu nos services de courtage américains à Fahnestock Holdings, en conservant une participation de 35 p. 100 dans l'entreprise conjointe.

    Nous avons créé ces partenariats parce qu'ils permettent d'atteindre la taille et d'avoir les capacités nécessaires pour assurer une compétitivité et une croissance efficaces. Nous poursuivons la croissance de notre secteur de détail canadien comme le démontre notre acquisition des services de courtage au détail de Merrill Lynch et nos investissements constants dans notre réseau de succursales bancaires, dans les services de cartes et dans notre infrastructure bancaire électronique.

    Les banques canadiennes étaient de taille importante il y a 20 ans et se classaient parmi les 30 principales banques mondiales en termes d'actif. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Est-ce important? Tout dépend de l'avenir que l'on envisage pour le secteur canadien des services financiers. Si l'on veut un secteur concurrentiel à l'échelle mondiale ou à l'échelle américaine, un certain regroupement est nécessaire. Si l'on veut que les grandes entreprises canadiennes continuent d'avoir des possibilités d'accès à du capital dans les institutions financières canadiennes, un certain regroupement s'impose.

    C'est la taille qui détermine le niveau de risque que peut assumer une institution financière. Les fusions réalisées à l'échelle mondiale ont engendré de nombreuses banques de taille colossale par rapport aux banques canadiennes. Ces banques peuvent par conséquent prendre des risques beaucoup plus élevés, que ce soit dans le cadre des services de crédit aux grandes entreprises ou de leurs stratégies de croissance.

    Bien que l'on ait accordé une attention particulière au secteur des petites entreprises et que des progrès notables aient été réalisés, ce sont les grandes entreprises clientes qui sont les plus susceptibles d'être touchées par ces tendances. La croissance de grandes entreprises canadiennes clientes comme Bombardier, Celestica et BCE s'accompagne d'une hausse de leurs besoins de financement. La capacité de crédit des banques canadiennes ne s'est pas accrue aussi rapidement que celle de nos principaux concurrents étrangers.

»  +-(1740)  

    En ce qui nous concerne, nous avons pris la décision de limiter nos risques à des niveaux prudents pour une institution de notre taille. Dans ce contexte, la question qui se pose en ce qui concerne l'intérêt national est: les intérêts du Canada seraient-ils mieux servis par un nombre réduit d'institutions financières plus vigoureuses capables de répondre aux besoins des petites et des grandes entreprises canadiennes? Je pense que la réponse est affirmative.

    Pour déterminer les conséquences du processus de fusion de banques sur l'intérêt public, je pense qu'il faut d'abord redéfinir et clarifier le processus. Ayant été un témoin direct des perturbations causées en 1998, je ne tiens pas à imposer une autre tentative de fusion à nos employés, à nos clients ou à nos actionnaires tant qu'on n'aura pas conçu un processus rapide dont les résultats sont prévisibles. La prévisibilité est d'une importance capitale.

    La prévisibilité signifie que les institutions qui soumettent une proposition au gouvernement connaissent très bien les composantes analytiques du processus d'examen utilisé par les organismes de réglementation et par les autorités gouvernementales. Une telle démarche permettra à la direction et aux conseils d'administration des deux institutions financières de déterminer de façon rationnelle et raisonnable si elles doivent mettre leur projet à exécution.

    Une plus grande prévisibilité ne peut être obtenue qu'en élaborant un processus d'examen des fusions bancaires qui soit transparent et fondé sur des critères clairement définis. Ils devraient être de nature non politique et privilégier les intérêts généraux des consommateurs et des actionnaires. Les exigences analytiques devraient être mesurables et prévisibles. Ils devraient fournir un cadre de travail pour les questions d'intérêt public afin de ne pas chevaucher les activités du Bureau de la concurrence, du Bureau du surintendant des institutions financières et d'autres ministères.

    L'autre point important est la rapidité. Les services bancaires revêtent de nombreux aspects mais constituent surtout un secteur d'activité dynamique. Dans l'intérêt de nos clients, de nos employés et de nos actionnaires, nous ne pouvons pas nous offrir le luxe de différer des décisions importantes en raison d'un long processus décisionnel. Le délai actuellement proposé pour l'examen d'un projet de fusion est de cinq mois. Je pense qu'il serait possible de le raccourcir. Nous aimerions collaborer avec tous les intervenants afin de mettre au point une démarche qui permettrait de le réduire à 100 jours tout au plus. Une telle démarche réduirait considérablement la période d'incertitude, non seulement sur les marchés, mais aussi pour nos employés, nos clients et nos autres intervenants.

    Au moment de préparer cette allocution, j'ai essayé de me mettre à votre place lorsque vous tenterez de répondre aux questions de vos électeurs sur les raisons pour lesquelles vous devriez permettre les fusions. J'espère que mon allocution d'aujourd'hui vous aura fourni au moins quelques possibilités de réponses. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

»  +-(1745)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Je donne d'abord la parole à M. Harris. Vous disposez de cinq minutes.

+-

    M. Richard Harris: Je vous remercie, madame la présidente. Je vous remercie également, monsieur Hunkin.

    J'ai remarqué à la deuxième page de votre exposé, où il est question des entreprises canadiennes qui font les dons les plus importants, qu'à elle seule, la banque CIBC a fait don de plus de 23,9 millions de dollars à des organismes canadiens de bienfaisance. Je vous remercie au nom de Special Olympics Athletes of Prince George (Colombie-Britannique) pour la participation de votre banque à notre tournoi de golf annuel de bienfaisance. Je vous remercie et je remercie également toutes les autres banques qui y participent.

    Votre exposé est très direct. Nous avons pour mandat de déterminer ce qui sert le mieux l'intérêt public. Je voudrais savoir dans quelle mesure, lorsque nous l'aurons déterminé et que nous en ferons part au Parlement, à quel niveau «l'intérêt public supérieur» entre en considération, compte tenu du fait qu'un projet de fusion de banques doit être examiné par le BSIF et par le Bureau de la concurrence. Ce sont deux organismes qui ont un champ de compétence précis. À quel niveau «l'intérêt public supérieur» doit-il entrer en considération, d'après vous? Est-ce au niveau du ministre des Finances ou du secrétaire d'État aux Banques et aux institutions financières? À quel niveau?

+-

    M. John Hunkin: À en juger d'après la législation actuelle, je pense que c'est au niveau du ministre des Finances, après que le Bureau de la concurrence ait pris une décision sur les mesures nécessaires pour que la structure de la fusion soit concurrentielle et après que le BSIF ait décidé s'il est prudent sur le plan financier de mettre ce projet à exécution. J'ai toujours présumé que c'est le ministre des Finances qui prendrait la décision, d'après les conclusions tirées de toutes les discussions entourant ce projet.

+-

    M. Richard Harris: Je pense personnellement, contrairement à mon collègue M. Nystrom, que les audiences publiques actuelles devraient avoir pour but de définir le processus et le cadre dans lequel les projets de fusion de banques seraient examinés. C'est au cours des présentes audiences, et pas plus tard, que nous définirons en quoi consiste l'intérêt public supérieur. Le BSIF et le Bureau de la concurrence ont, bien entendu, leur mot à dire également. Je pense que ces audiences publiques sont d'une importance capitale et définitive pour le processus parce qu'on ne peut pas dire ceci aux banques: «Voici le cadre que vous devez respecter et, même si vous répondez de façon entièrement satisfaisante à toutes les exigences et aux critères liés à l'intérêt public supérieur, vous devrez participer à d'autres audiences publiques».

    Je pense que nous sommes dans l'obligation d'établir des directives précises à l'intention des banques qui veulent opter pour la fusion. Je pense qu'elles devraient pouvoir mettre leurs projets à exécution si elles répondent aux critères. Je suis également d'avis que les considérations politiques ne devraient pas intervenir. Il s'agit d'une décision commerciale qui doit être prise dans l'intérêt de l'avenir économique du pays, étant donné le rôle que jouent les banques.

    Mon opinion personnelle est que lorsque ce cadre concernant l'intérêt public aura été établi, les banques l'intègrent à leur projet et que, si le Bureau de la concurrence et le BSIF estiment qu'il est conforme aux conditions, le ministre des Finances n'aurait pratiquement aucune raison de refuser.

»  +-(1750)  

+-

    M. John Hunkin: Ce que je me suis efforcé de faire comprendre c'est que peu importe le processus, il doit engendrer un degré de prévisibilité très élevé quant à son issue. Je pense que c'est la principale difficulté qui se pose pour la plupart des entreprises de notre secteur. Comme je l'ai mentionné, j'ai participé à la dernière tentative et il est certain que les banques pourraient se considérer en grande partie responsables de la lenteur du processus. Nous préférons probablement oublier cette aventure.

    Ce que nous avons appris, c'est que le processus a été très long et qu'il a été très pénible pour nos employés. Il n'a certainement pas amélioré la qualité de notre service à la clientèle et nos actionnaires n'en ont probablement pas tiré beaucoup d'avantages non plus. Je pense donc que l'expérience n'a pas été très enrichissante, si ce n'est que nous avons peut-être appris quelque chose.

    La prévisibilité est d'une importance capitale pour tous ceux qui sont prêts à recommander de bonne foi une fusion à leur conseil d'administration.

+-

    La présidente: Merci beaucoup. Je vous remercie, monsieur Harris.

    Monsieur Wilfert.

+-

    M. Bryon Wilfert: Je vous remercie, madame la présidente.

    Je tiens à vous remercier d'avoir accepté de participer à nos délibérations. Étant donné certaines difficultés qui se sont posées dans plusieurs pays d'Asie, notamment au Japon, où le renflouement de banques a suscité de vives préoccupations et où le processus politique a été paralysé, je pense que le Canada est doté d'un système bancaire très vigoureux et bien administré. Je ne citerai pas la Nouvelle-Zélande comme un modèle en matière de fusions parce que les fusions qui ont été réalisées dans ce pays dans des circonstances précises n'ont pas été une réussite.

    À propos de notre exposé, je voudrais savoir ce que vous pensez au sujet... Je pense que vous avez exposé clairement la nécessité pour les banques canadiennes d'assurer une présence à l'étranger. Je n'en disconviens pas. Je pense toutefois qu'il est important d'avoir en place un secteur des services financiers vigoureux et sous contrôle canadien.

    Pour ce qui est d'atténuer les principales préoccupations en matière d'intérêt public, surtout en ce qui concerne les premières étapes d'une fusion, vous avez mentionné plusieurs possibilités. Nous pouvons réclamer des engagements ou nous pourrions établir des exigences par le biais d'une loi. Je voudrais savoir ce que vous en pensez.

    Vous avez fait des commentaires concernant un cadre précis. Je suis entièrement d'accord avec vous. Il est inutile d'étirer le processus. Si le projet est justifié... J'aurais tendance à approuver ce qu'a dit mon collègue d'en face. Notre tâche consiste à délimiter cet aspect avec précision. Nous savons le rôle que joue le Bureau de la concurrence et le BSIF. Il ne restera plus qu'à décider si le projet répond aux critères.

    Les préoccupations de mes électeurs et de bien d'autres personnes ne concernent pas principalement... Je pense que les banques ont présenté un argument convaincant en ce qui concerne leur présence à l'étranger. C'est la crainte de la concurrence dans notre pays et les répercussions... Dans plusieurs autres pays, la concurrence a diminué et les nouveaux venus sur le marché n'ont pas donné un bon service aux intervenants, c'est-à-dire aux consommateurs, en l'occurrence.

    J'aimerais que vous répondiez... Merci d'avance.

»  +-(1755)  

+-

    M. John Hunkin: Je pense que ce sont des préoccupations fondées. Je pense que tous les Canadiens devraient être préoccupés. Si l'on réduit la concurrence, le problème peut être bien réel. Je pense toutefois qu'il existe des possibilités d'assurer une concurrence accrue. Le Bureau de la concurrence examinera d'abord le projet et appliquera les mesures applicables à toute fusion, qu'elle concerne le secteur bancaire ou un autre secteur, pour s'assurer que le niveau de concurrence est approprié. Dans certains cas, la concentration engendrée par ce nouveau regroupement dans une région serait l'occasion d'exiger la vente d'un certain nombre de succursales, avec la clientèle, à d'autres entreprises concurrentes plus petites—qui pourraient être des banques étrangères établies au Canada—pour en faire des concurrents plus sérieux. Dans bien des cas, le but de la présence de ces concurrents, surtout des concurrents étrangers, est de livrer une concurrence au Canada pour ce type de clientèle.

    En d'autres termes, je pense qu'on ferait intervenir tous les mécanismes normaux d'examen d'un projet de fusion permettant au Bureau de la concurrence de prendre des décisions. Les services bancaires sont légèrement différents au Canada étant donné le nombre de succursales qui est, d'une manière générale, élevé. Par conséquent, il y a possibilité de redistribution à ce niveau.

    Je commence par la base. Nous sommes une industrie. Je reconnais que c'est une industrie un peu différente des autres et que nous occupons une place spéciale par rapport à d'autres mais nous sommes d'abord et avant tout une industrie. Vous pouvez appliquer les règles et les mesures qui sont en place pour la concurrence. En fait, nous sommes une industrie tellement réglementée que nous produisons beaucoup de statistiques. Il est donc peut-être plus facile d'évaluer la situation en ce qui nous concerne qu'en ce qui concerne d'autres secteurs. De nombreux chiffres ont déjà été publiés à notre sujet.

    Je pense donc que c'est une préoccupation justifiée. Personnellement, c'est une préoccupation dont je serais prêt à tenir compte parce que je pense que nous pourrons réussir le test et trouver des solutions pour la redistribution des succursales et des territoires pour autant que le Bureau de la concurrence examine la situation de façon objective et rationnelle.

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Monsieur Wilfert.

+-

    M. Bryon Wilfert: Je présume que vous avez évalué la situation. Quelles leçons en avez-vous tirées? Je sais que c'est le cas où un projet de fusion a été le plus sur le point de se concrétiser, même s'il s'agissait de la cinquième banque et d'une société de fiducie. Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?

+-

    M. John Hunkin: J'aurais souhaité que nous l'achetions. Nous avons raté l'occasion.

    Des voix: Oh, oh!

    M. John Hunkin: Je pense que TD a fait du très bon travail dans le cadre de sa fusion avec Canada Trust. Elle s'est appliquée à obtenir des renseignements très précis sur les coûts qu'il est absolument indispensable de connaître.

    Je signale qu'il serait préférable de s'abstenir si l'on ne tient pas particulièrement à une fusion parce que c'est une opération extrêmement complexe. Ce n'est pas une décision que l'on prend à la légère pour réaliser des gains à court terme. Il faut être absolument convaincu que c'est une bonne opération à long terme pour l'institution, pour ses employés et pour ses clients. Ce n'est pas une décision que l'on prend à la légère.

¼  +-(1800)  

+-

    La présidente: Je vous remercie.

    Monsieur Murphy.

+-

    M. Shawn Murphy: Je vous remercie, madame la président.

    Monsieur Hunkin, je vous remercie également pour votre exposé.

    Je voudrais vous poser la question que j'ai déjà posée à un autre témoin, qui concerne l'accès au crédit pour les petites entreprises de toutes les régions du Canada. Je pense, moi aussi, qu'il est nécessaire d'établir des règles précises qui soient mesurable et prévisibles parce que je conçois les perturbations que peuvent causer les discussions portant sur une éventuelle fusion avec un de vos concurrents, au cours desquelles il est nécessaire de révéler votre stratégie d'affaires pour constater six mois plus tard que, pour une raison ou une autre, la fusion n'est pas autorisée.

    Avant d'entrer en politique, j'étais associé dans un des grands cabinets d'avocats de la région de l'Atlantique. J'ai pu constater les conséquences du retrait stratégique des banques de certains secteurs de notre économie. En qualité de député, je pense que c'est un intérêt qui doit être protégé par la politique gouvernementale. Je voudrais qu'on aborde le sujet dans le cadre de cette étude.

    Dans le cas de la CIBC, et je me contente de reprendre les propos d'un autre témoin, il semblerait qu'au cours des dix dernières années, elle ait pris la décision stratégique de se retirer de certains secteurs—et j'ignore totalement lesquels—du marché des services aux petites entreprises. D'après les renseignements que nous avons, votre part du marché canadien des services aux petites entreprises était de 19,3 p. 100 en 1989. En 2000, elle n'était plus que de 13,3 p. 100, puis elle avait encore baissé à 11,4 p. 100 en 2002. D'après ce témoin—qui était un organisme de très bonne réputation, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante:

Le système bancaire canadien est tellement concentré que la seule possibilité pour une grande banque de perdre un tiers de sa part de marché des PME consiste à prendre des décisions stratégiques, sans compter sur le hasard.

    Je reviens à ce que je disais. C'est une question d'intérêt public. Je pense qu'il faut le protéger. Avez-vous des recommandations à faire sur la question du crédit que notre comité pourrait transmettre au gouvernement? Je ne préconise pas un système de crédit obligatoire ni un système d'établissement de provisions pour pertes sur prêts car certaines décisions vous appartiennent, mais comment pourrait-on protéger certaines régions et tous les secteurs?

+-

    M. John Hunkin: Je n'ai pas vu les chiffres, mais ils ne concordent pas avec les nôtres. Dans notre Énoncé de responsabilité envers le public, que vous devriez avoir en main, une section entière est consacrée au soutien aux petites entreprises. D'après les chiffres de l'Association des banquiers canadiens, qui sont ceux sur lesquels nous nous appuyons généralement et sur lesquels s'appuie probablement le gouvernement fédéral, notre part de marché s'est améliorée au cours des dernières années. Nous avons par exemple décidé de considérer le secteur des services aux petites entreprises comme un secteur d'activité à la tête duquel nous avons mis un vice-président général. Une de ses responsabilités consiste à faire prendre de l'expansion à ce secteur, plus particulièrement en ce qui concerne les prêts aux entreprises.

    D'autre part, nous sommes une des deux banques canadiennes qui ont un service spécial pour les entreprises agricoles, responsable de ce secteur d'activité qui demeure très important au Canada. C'est un secteur qui a d'ailleurs été très rentable pour nous. En fait, le montant total des prêts autorisés à des clients du secteur agricole se chiffre à 4,5 milliards de dollars.

    Si nous revenions dans cinq ans pour tenir le même type de discussion sur les petites entreprises, je doute que tous les membres du comité soient convaincus que notre banque ou que les banques canadiennes fassent tous les efforts qu'elles devraient faire en ce qui concerne les petites entreprises. Si vous examinez la situation à l'échelle mondiale, vous constaterez que ce secteur des services bancaires pose généralement un problème. Je ne pense pas que ce soit une raison pour l'ignorer, mais tout dépend des personnes auxquelles ont pose la question ou auxquelles on a affaire. Beaucoup de petites entreprises clientes pensent que nous faisons de l'excellent travail. Je reconnais toutefois que certaines ne sont pas de cet avis.

    Je signale que nous accordons une attention particulière à ce secteur parce que nous considérons qu'il est important.

¼  +-(1805)  

+-

    M. Shawn Murphy: Pour revenir à ma question, avez-vous des suggestions à faire sur les recommandations que notre comité parlementaire pourrait faire pour protéger le secteur des petites entreprises des diverses régions du Canada contre des décisions stratégiques de retrait de certains secteurs comme celles qui ont déjà été prises par des banques il y a quelques années?

+-

    M. John Hunkin: Je pense que ce serait une très grosse erreur d'obliger une entreprise à investir un montant précis dans...

+-

    M. Shawn Murphy: J'en conviens.

+-

    M. John Hunkin: Si c'est un secteur intéressant, deux types de considérations entrent en ligne de compte. Les premières sont celles que j'ai déjà mentionnées au sujet de la rationalisation en ce qui concerne les succursales à la suite d'une fusion, pour donner une occasion à d'autres acteurs qui souhaitent se lancer dans ce secteur ou sont prêts à y prendre de l'expansion. J'encourage ce type d'initiative, qu'il s'agisse d'autres petites institutions canadiennes ou institutions étrangères.

    D'autre part, une banque beaucoup plus grande a plus d'endurance dans les secteurs qui sont intéressants qu'une petite institution. La capacité de mettre l'accent sur des secteurs d'activité qui ne sont pas très attrayants mais qui pourraient avoir plus d'importance sur le plan de l'intérêt public est un des avantages liés à la taille. Je présume que si l'on procédait à des fusions, les banques ne cesseraient pas de témoigner devant des comités comme le vôtre et ne seraient pas soustraites à un examen visant à déterminer comment elles se comportent face à ces questions d'intérêt public. Je pense que plus une banque est grande et plus elle aura tendance à porter de l'attention à ces questions. Je pense que ce sera dans une certaine mesure une question de persuasion. J'espère que ce le sera dans une large mesure parce qu'il s'agit d'un secteur très intéressant et que nous sommes disposés à le servir.

+-

    La présidente: Je vous remercie. Je remercie également mon collègue.

    Je passe maintenant la parole à M. Nystrom.

+-

    M. Lorne Nystrom: Soyez le bienvenu, monsieur Hunkin.

    Vous avez mentionné les services aux entreprises agricoles. Je voudrais poser quelques questions à ce sujet. J'ai sous les yeux le mémoire qui a été présenté il y a quelques jours par la Centrale des caisses de crédit. Il y est mentionné que les coopératives de crédit des diverses régions du pays ont consacré au minimum 6,5 p. 100 de leurs bénéfices à des initiatives et à des organismes communautaires. Ce mémoire contient le commentaire qui suit en ce qui concerne les agriculteurs:

... touchés par une des pires sécheresses en 133 ans, de nombreux éleveurs de bétail vendent leur cheptel reproducteur parce qu'ils n'ont pas suffisamment de foin. La Community Savings Credit Union est intervenue et a proposé des prêts-relais sans intérêts à ses membres qui sont touchés par la sécheresse.

    Étant donné qu'elle est une des institutions qui se spécialise dans les services aux entreprises agricoles, la CIBC a-t-elle mis en place un programme analogue à l'intention des agriculteurs qui sont dans une situation désespérée?

+-

    M. John Hunkin: Si nous l'avons fait, je ne m'en souviens plus. Il faudra que je me renseigne.

+-

    M. Lorne Nystrom: Quel pourcentage de vos bénéfices réinvestissez-vous dans les oeuvres de bienfaisance ou à l'échelle locale?

+-

    M. John Hunkin: Nous dépassons de façon presque systématique le plafond prévu, qui est de 1 p. 100. Cette année, nous avons réalisé des bénéfices de 650 millions de dollars et, comme je l'ai mentionné, notre contribution s'élève à près de 24 millions de dollars. Ce n'était pas une bonne année sur le plan des bénéfices—les actionnaires de la société me le rappellent d'ailleurs souvent—mais nous n'avons pas réduit nos engagements vis-à-vis de la collectivité. Nous ne le faisons jamais.

+-

    M. Lorne Nystrom: Bien.

    J'ai ici le mémoire de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante qui contient des informations sur la situation du marché des prêts aux petites entreprises de 1989 à 2002. Il contient une analyse comparative couvrant toutes les banques, les coopératives de crédit et les autres institutions; celle-ci indique que c'est la CIBC qui a enregistré la plus forte baisse en ce qui concerne les prêts aux PME au cours de cette période. La Fédération mentionne qu'en 1989, votre part de ce marché était de 19,3 p. 100 alors qu'elle n'est plus que de 11,4 p. 100 actuellement, ce qui représente une diminution de 7,9 p. 100. L'autre baisse la plus forte concerne la Banque Royale dont la part du marché a diminué de 24,3 p. 100 à 19,6 p. 100, soit de 4,7 p. 100. J'aimerais que vous fassiez des commentaires à ce sujet. Je signale que la part des coopératives de crédit a augmenté au cours de la même période, puisqu'elle est passée de 13,4 p. 100 à 20,7 p. 100, soit une hausse de 7,3 p. 100. Il semblerait par conséquent que la baisse des prêts de la CIBC dans ce secteur soit la plus forte pour l'ensemble du secteur financier canadien.

¼  +-(1810)  

+-

    M. John Hunkin: Les chiffres sur lesquels nous nous basons sont ceux de l'Association canadienne des banquiers, et ceux que vous venez de citer ne concordent pas avec les miens. J'examinerai ces chiffres et je vous signalerai les différences, mais il y a une chose que je voudrais mentionner, parce que je pense que c'est important.

    Je ne pense pas qu'il faille en tirer la conclusion qu'il est dans l'intérêt public d'accepter les fusions parce qu'elles amélioreront le rendement des banques canadiennes dans le secteur des prêts aux petites entreprises ou dans celui des prêts agricoles. Je signale d'emblée que je me demande comment je pourrais y arriver sans prendre des initiatives qui ne seraient probablement pas justifiables aux yeux des actionnaires. Je ne pense pas que l'industrie des institutions financières appartienne un jour aux Canadiens parce qu'à un moment donné, compte tenu de nos activités dans le secteur des échanges commerciaux internationaux, nous aurons beaucoup de difficulté à justifier qu'il est juste et raisonnable de nous autoriser à racheter des banques et d'autres institutions financières quand cela nous convient aux États-Unis, au Royaume-Uni ou dans tout autre grand pays industrialisé tout en refusant d'autoriser les entreprises étrangères à le faire ici. C'est un raisonnement qui ne tiendra pas la route.

    L'autre commentaire que je voudrais faire est que les banques canadiennes ne sont actuellement pas d'une taille qui leur permette de prendre les risques nécessaires pour prendre de l'expansion à l'étranger. Je pense que si on ne leur permet pas de se regrouper dans une certaine mesure au Canada, elles n'auront que des possibilités d'expansion limitées à l'étranger.

    Quant à savoir si les fusions seraient avantageuses pour le Canada et si elles serviraient les intérêts du pays, tout dépend de la perception des Canadiens quant à l'opportunité pour le Canada de se doter de banques et d'institutions financières concurrentielles à l'échelle internationale et, à long terme—je ne dis pas dans trois ou quatre ans—, de maintenir des institutions financières crédibles sous contrôle canadien. Ce n'est peut-être pas important à leurs yeux.

+-

    La présidente: Merci.

    Je donne la parole à Mme Minna, puis à M. Brison.

+-

    Mme Maria Minna: Je vous remercie.

    Quand j'y réfléchis, j'en conclus que ça ressemble à une voie à sens unique parce qu'on ne peut pas revenir en arrière après une fusion. Si la situation tourne mal, on ne peut pas défaire facilement ce qui est fait. C'est une des raisons pour lesquelles nous étudions les incidences de façon extrêmement minutieuse et nous tentons de mettre en place un processus parfait pour éviter de se trouver en difficulté.

    J'ai déjà posé la question à un autre témoin, mais je ne pense pas qu'il y ait vraiment répondu. Il n'y a peut-être pas de réponse à cette question. Vous l'avez peut-être entendue. Une de mes préoccupations est que si l'on autorisait les fusions et que si le nombre de grandes banques diminuait de cinq à deux, par exemple—la dernière fois qu'il en a été question, quatre banques étaient impliquées dans des projets de fusions, ce qui aurait donc réduit considérablement leur nombre—, on serait exposé à de gros risques si l'une des banques avait des difficultés majeures. On m'a dit que ce n'était pas possible mais j'en doute quand je constate que de grandes entreprises comme AOL ont des dettes qui s'élèvent à 100 milliards de dollars. J'ignore quelle banque a prêté des fonds à cette entreprise. Ce sont des risques qui sont pris à l'échelle internationale. Les banques accepteraient-elles un système réglementaire plus strict ou plus vigoureux? Le pays doit se protéger et s'assurer qu'il n'y ait pas de faillites et qu'aucune banque ne soit en difficulté car la faillite de l'une des mégabanques serait catastrophique pour l'économie canadienne. Je pense que c'est une question qu'on ne peut pas prendre à la légère.

¼  +-(1815)  

+-

    M. John Hunkin: J'en conviens. C'est très important et très sérieux.

    Je tiens à signaler que je pense que nous sommes très bien réglementés. Nous sommes non seulement réglementés par des organismes de réglementation canadiens dont le principal est le BSIF, mais aussi par la Federal Reserve et par d'autres organismes de réglementation semblables qui ont leur siège à Londres ou au Japon. La réglementation du secteur bancaire est devenue très stricte et est axée sur la réduction des risques et des possibilités de difficultés comme celles que vous avez mentionnées.

    Je pense que, compte tenu de l'évolution du secteur bancaire, la taille comme telle n'est pas la solution miracle à tous les problèmes, mais c'est un avantage indéniable. En cas de fusion, le BSIF aurait une institution de plus grande taille à surveiller, mais aussi une de moins. En France, alors que c'est un pays beaucoup plus grand que le nôtre, je pense qu'il n'y a plus que trois banques. Ce n'est pas une exception. En fait, c'est le Canada qui est actuellement une exception parce que les regroupements n'ont pas été très nombreux dans le secteur bancaire au cours des dernières années.

    Si le témoin précédent n'a pas répondu de façon très satisfaisante à votre question, c'est probablement parce qu'il n'est pas possible de donner une réponse satisfaisante.

+-

    Mme Maria Minna: Un des autres sujets qui reviennent constamment sur le tapis, et qui est toujours une source de préoccupations, est celui du service à la clientèle et du nombre de succursales. Un des arguments invoqués très souvent est qu'au besoin, certaines succursales seraient revendues et qu'il y aurait regroupement ou redistribution. J'associe toujours une redistribution à une diminution du service, parce qu'elle implique la suppression d'un certain nombre de succursales.

    Je pense à ce que j'ai lu dernièrement au sujet de la fusion de Canada Trust et de TD. Je ne pense pas que cette fusion ait permis aux clients d'économiser de l'argent. En fait, ils ont été obligés de payer des frais plus élevés. Le montant des frais a augmenté au lieu de diminuer et une telle opération ne sert pas nécessairement les intérêts de la clientèle.

    Dans le même ordre d'idées, vous avez également mentionné que d'autres banques étrangères établies au Canada rachèteraient également des succursales; vous pourriez peut-être faire d'autres commentaires à ce sujet. Cela n'a pas encore été le cas, et je pense que c'est notamment parce qu'elles ne peuvent réclamer qu'environ 60 p. 100 des frais en vigueur aux États-Unis. Je pense que les banques étrangères n'ont pas beaucoup de perspectives de profits dans ce secteur et, par conséquent, elles ne s'y aventurent pas. Sinon, est-ce que des banques comme la CIBC vendraient des succursales immédiatement au lieu d'attendre des fusions?

¼  +-(1820)  

+-

    La présidente: Allez-y, monsieur Hunkin. Je donnerai ensuite la parole à M. Brison.

+-

    M. John Hunkin: À propos de la fusion de TD et de Canada Trust, je suis certain qu'il y a eu des mouvements entre les endroits où Canada Trust était établie et ceux où TD était établie. Après la fusion, on constate que certains frais ont probablement augmenté alors que d'autres ont diminué. Je ne suis donc pas certain que tous les frais aient augmenté dans ce cas-là.

    Examinons le cas d'une banque établie au Canada. La Hong Kong Shanghai Bank a très bien réussi au Canada et a fait de l'excellent travail. D'après ce que j'ai pu constater, elle a très bien ciblé son marché et a très bien réussi. Je serais étonné qu'une banque comme celle-là ne soit pas intéressée à acquérir des succursales et des clients supplémentaires à la suite d'une fusion.

    Des rumeurs courent dans les milieux financiers que d'autres banques—certaines banques américaines—seraient intéressées à acquérir des succursales et à agrandir leur réseau de services au détail au Canada. Nous en serions très heureux parce que ce serait une excellente possibilité de s'assurer que ce processus peut se poursuivre et qu'il répond aux exigences du Bureau de la concurrence, dont le but est d'assurer une certaine concurrence.

    Je présume que nous ne le saurons pas avant de nous engager dans la voie des fusions, mais je serais très étonné que d'autres banques ne soient pas intéressées. En fait, je pense que si je n'étais pas en plein processus de fusion, je chercherais à racheter une portion de l'actif et un certain nombre de succursales dans des régions où nous ne sommes pas représentés. Je pense que je serais très intéressé.

+-

    Mme Maria Minna: Quel serait le nombre minimum de banques souhaitable au Canada? Où arrêteriez-vous? Quel serait le strict minimum?

+-

    M. John Hunkin: Je ne pense pas que cela concerne uniquement les banques. Il ne faut pas oublier le regroupement d'institutions financières. Par conséquent, d'autres entreprises que des banques seraient peut-être concernées.

    Je pense que trois grandes institutions et quelques autres institutions de plus petite taille capables d'exploiter des créneaux très précis et très concurrentiels seraient bien pour le Canada. Je doute qu'il soit possible de maintenir un nombre plus élevé d'institutions au Canada tout en maintenant une taille crédible.

+-

    La présidente: Je vous remercie. Je voudrais maintenant accorder quelques minutes à M. Brison.

+-

    M. John Hunkin: Je suis désolé. Je m'excuse.

+-

    La présidente: Excusez-moi de vous avoir interrompu.

    Monsieur Brison.

+-

    M. Scott Brison: Je vous remercie, madame la présidente. Monsieur Hunkin, je vous remercie également d'avoir accepté notre invitation.

    Vous avez mentionné que le processus d'examen des incidences en matière d'intérêt public, ne devrait pas chevaucher les activités des autres processus d'approbation comme ceux du BSIF et du Bureau de la concurrence. Celui du BSIF, lié aux considérations de prudence, et celui du Bureau de la concurrence, en ce qui concerne la concurrence, constituent des obstacles de taille.

    C'est une question que notre comité se doit d'examiner. En ce qui concerne le processus d'examen des incidences en matière d'intérêt public, quels critères seraient appropriés, outre les critères très stricts qui sont déjà appliqués par le BSIF et par le Bureau de la concurrence?

+-

    M. John Hunkin: J'étais aux premières loges lors de la dernière tentative de fusion en date, la nôtre avec TD, et je pense que le Bureau de la concurrence accomplit très consciencieusement sa mission et que, en matière de concurrence, que ce soit dans le secteur des petites entreprises, dans le secteur agricole ou dans d'autres secteurs, les critères sont très clairs. Je n'en suis pas sûr, mais c'est ce que je pense.

+-

    M. Scott Brison: Nous non plus, à vrai dire. C'est précisément le problème. Le Bureau de la concurrence et le BSIF représentent déjà un processus d'examen des incidences publiques; il est déjà en place et il présente en outre l'avantage de ne pas être politisé.

    Votre mission est de maximiser le profit pour vos actionnaires. Étant donné que neuf ou dix millions de Canadiens détiennent directement ou indirectement des actions d'une banque, si un processus d'examen des incidences publiques encourage des activités qui, comme vous l'avez dit, ne sont pas assez lucratives pour les actionnaires, ne pourrait-on pas arguer qu'un processus distinct d'examen des incidences en matière d'intérêt public très politisé ne servirait pas l'intérêt public?

+-

    M. John Hunkin: Certainement.

+-

    M. Scott Brison: Pensez-vous que d'autres projets de fusions seront présentés au Canada avant les prochaines élections fédérales?

+-

    M. John Hunkin: Je ne le sais pas vraiment. Je pense que ça dépendra en grande partie de l'issue des présentes discussions pour ce qui est de permettre aux entreprises de faire des évaluations et d'être assurées que si elles répondent à certains critères en matière de concurrence, leur projet de fusion pourrait être approuvé et les conditions dans lesquelles il se réaliserait seraient suffisamment claires. Je ne pense pas que ce soit possible si la situation n'est pas plus claire qu'elle ne l'a été jusqu'à présent. En ce qui nous concerne, je ne pense pas que nous serions disposés à présenter un projet dans ces conditions.

¼  -(1825)  

+-

    M. Scott Brison: Ne pensez-vous pas que la mise en place d'un processus tellement politisé que la date des prochaines élections fédérales puisse entrer en considération pour la présentation de projets de fusions légitimes dans le secteur des services financiers soit contraire à l'intérêt public et aux intérêts des neufs à dix millions de Canadiens qui détiennent des actions d'une banque et comptent sur vous pour maximiser le rendement de leur fonds de retraite?

+-

    M. John Hunkin: Je pense que ce serait vrai dans tout autre secteur que le secteur bancaire. Le secteur bancaire a toujours fait partie d'une catégorie spéciale au Canada, parce qu'il a des incidences à l'échelle nationale.

    Je ne pense pas que tout projet qui soit intéressant pour les détenteurs d'actions de banques canadiennes et qui réponde aux exigences du Bureau de la concurrence soit nécessairement un projet sain. En fait, je pense que si l'on n'adopte pas une approche rationnelle en matière de regroupement dans le secteur canadien des services financiers, certaines personnes qui tiennent beaucoup à s'assurer que le secteur des services financiers demeure la propriété de Canadiens seront un jour déçues. Je me trompe peut-être, mais c'est ce que je pense.

    Je pense qu'il serait possible de mettre au point une démarche qui garantisse une concurrence suffisance et qui serve par conséquent les intérêts des Canadiens. On pourrait mettre en place des organisations très intéressantes qui auraient un siège social au Canada, qui attireraient beaucoup les jeunes parce qu'ils auraient non seulement l'occasion de travailler au Canada mais aussi celle de travailler à l'étranger, pour une entreprise canadienne. Si nous n'allons pas de l'avant dans ce domaine, je doute que ces possibilités soient accessibles aux jeunes ou qu'elles soient aussi intéressantes.

+-

    M. Scott Brison: J'aimerais faire un commentaire. Un petit entrepreneur de ma circonscription (Windsor—Nouvelle-Écosse) peut parfois trouver irritant de devoir faire affaire avec une banque dont le siège social est à Toronto...mais le client obtient probablement un meilleur service, ou du moins un service qui réponde mieux à ses besoins, quand il a affaire à une banque dont le siège social est à Toronto que lorsqu'il s'agit d'une banque dont le siège social est à New York, Zurich ou Chicago.

    Je crains fort qu'en instaurant un processus très politisé au Canada pour permettre aux banques de prendre des orientations commerciales légitimes, nous risquons de réduire à néant la compétitivité du secteur canadien des services financiers tout en l'exposant à une concurrence plus vive. Quant à la souveraineté économique—question qui a déjà été abordée sous cet angle par M. Wilfert—, je pense que nous la compromettrions considérablement en adoptant une approche mal inspirée à l'égard des fusions bancaires et des autres problèmes touchant les services financiers. En définitive, il est rentable sur le plan politique de s'en prendre aux banques mais ce qui est rentable sur le plan politique ne sert pas toujours l'intérêt public.

+-

    M. John Hunkin: Mais vous devez reconnaître que c'est divertissant.

+-

    M. Scott Brison: Absolument. C'est comme s'en prendre aux libéraux.

+-

    La présidente: Votre participation a été fort appréciée, monsieur Hunkin.

+-

    M. John Hunkin: En ce qui concerne les institutions étrangères, je signale que nous avons acheté les services de courtage au détail de Merrill Lynch à l'occasion de deux périodes de ralentissement économique différentes. C'est tout dire.

+-

    M. Scott Brison: En effet.

-

    La présidente: Au nom de mes collègues, je vous remercie d'avoir accepté de participer à nos délibérations et de répondre à nos questions.

    Je rappelle à mes collègues que plusieurs changements ont été apportés au programme de demain. L'horaire comme tel ne change pas, mais les représentants de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières comparaîtront au cours de la séance de 11 heures au lieu de la séance de l'après-midi. Veuillez lire les avis pour jeudi parce qu'une séance d'une heure a été ajoutée jeudi après-midi.

    Je vous remercie pour votre attention.

    La séance est levée.