FINA Rapport du Comité
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
En octobre 2002, le ministre des Finances et le secrétaire d’État (Institutions financières internationales) ont fait parvenir au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et au Comité permanent des finances de la Chambre des communes une lettre leur demandant de se prononcer sur les éléments à prendre en compte pour déterminer si une fusion de grandes banques sert ou non l’intérêt public. Ils y affirmaient que, depuis la publication des Lignes directrices relatives à l’examen des projets de fusion, applicables aux banques ayant des capitaux propres de plus de 5 milliards de dollars, certains intervenants avaient laissé entendre que les critères relatifs à l’intérêt public méritaient d’être précisés. La lettre invitait les comités à réfléchir plus précisément aux répercussions des fusions sur :
C’est ainsi que le Comité permanent des finances de la Chambre des communes a tenu des audiences publiques sur le sens que les Canadiens donnent à l’expression « intérêt public ». D’entrée de jeu, le Comité a reconnu que les fusions de grandes banques canadiennes étaient « des stratégies commerciales légitimes assurant la croissance et le succès1 ». Par conséquent, nous nous sommes demandé non pas si les fusions devaient oui ou non être autorisées, mais plutôt quelles étaient les considérations relatives à l’« intérêt public » qui devaient être prises en compte. Le présent rapport résume les témoignages que nous avons entendus à ce sujet et expose notre avis sur les critères à considérer lorsqu’il s’agit d’évaluer si un projet de fusion entre grandes banques sert ou non l’intérêt public. L’intérêt public dans LE PROCESSUS D’EXAMEN DES FUSIONS L’actuel processus d’examen des fusions de grandes banques ou sociétés de portefeuille bancaires celles dont les capitaux propres dépassent 5 milliards de dollars découle largement des conclusions du Groupe de travail sur l’avenir du secteur des services financiers canadien. Dans son rapport provisoire de 1997, celui-ci recommandait au gouvernement fédéral d’abandonner sa politique implicite interdisant les rachats entre grandes institutions et d’examiner plutôt les transactions envisagées selon leurs mérites. Il recommandait également que :
À la suite du rapport final du Groupe de travail, le ministère des Finances a publié ses Lignes directrices relatives à l’examen des projets de fusion. Celles-ci en définissent les trois étapes l’étape de l’examen, celle de la décision et, au besoin, celle des correctifs et elles distinguent trois parties pour l’étape de l’examen :
À l’étape de la décision, le ministre des Finances se sert des rapports du Bureau de la concurrence, du BSIF et des comités parlementaires pour décider si les questions d’intérêt public, les questions prudentielles et les préoccupations sur le plan de la concurrence peuvent être réglées. Dans la négative, la transaction est refusée. Si les préoccupations peuvent être réglées, l’étape des correctifs s’amorce, aux fins de résoudre les problèmes soulevés dans le processus d’examen. Le Bureau de la concurrence et le BSIF négocient les correctifs à prendre en matière de concurrence et en matière prudentielle avec les candidats à la fusion et, de concert avec le ministère des Finances, ils coordonnent un ensemble de mesures d’intérêt public. Si la négociation est fructueuse, le Ministre des Finances approuve la transaction, sous condition de certaines modalités qui tiennent compte de ces correctifs. Si les modalités ne sont pas respectées, le Ministre peut s’adresser à un tribunal pour demander une ordonnance obligeant les intéressés à le faire. Sur demande, le tribunal peut prendre cette ordonnance et prendre toute autre ordonnance qu’il juge appropriée2. Les Lignes directrices relatives à l’examen des projets de fusion qui ne font pas partie de la Loi sur les banques affirment clairement que, sous réserve des prérogatives du Parlement, le gouvernement fédéral cherchera à terminer l’étape de décision de son examen dans les cinq mois de la réception d’une demande complète et des documents à l’appui de la part des demandeurs. Ce processus d’examen diffère de celui qui est généralement appliqué aux autres entreprises du secteur privé. Pourquoi les grandes banques sont-elles traitées différemment? Ci-dessous une réflexion à ce sujet et une description plus détaillée de l’analyse des projets de fusion de grandes banques. A. Le bien-fondé de l’application d’un traitement différencié au secteur bancaire Depuis que les premières chartes bancaires ont été octroyées à la Bank of New Brunswick en 1820 et à la Banque de Montréal en 1822, le secteur bancaire canadien est assujetti à une réglementation relativement lourde3. À l’heure actuelle, quatre institutions gouvernementales sont chargées de le réglementer ou de résoudre les problèmes le concernant : la Banque du Canada, qui agit comme prêteur de dernier recours en cas de crise financière majeure; la Société d’assurance-dépôts du Canada, qui garantit les dépôts admissibles faits dans les établissements membres (jusqu’à concurrence de 60 000 $ par déposant); le Bureau du surintendant des institutions financières, qui surveille la stabilité du secteur des services financiers; et l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, qui est chargée de protéger et de sensibiliser les clients des banques. Les banques jouent un rôle capital dans la vie économique des particuliers et des entreprises. En vertu de leurs chartes, elles ont le droit de créer de l’argent au moyen de prêts et de lignes de crédit. Comme l’a dit M. Bernard Sieger au Comité, « la banque est au cœur de notre vie financière ». La plupart des gens estiment nécessaire de réglementer le secteur bancaire. Les avis divergent toutefois quant à la portée souhaitable de cette réglementation. M. Harold MacKay, ancien président du Groupe de travail sur l’avenir du secteur des services financiers canadien, considère les grandes banques comme les plus importants intermédiaires financiers du Canada. Selon lui, un secteur bancaire canadien fort et concurrentiel est essentiel à l’avenir du pays. Teamsters Canada a exhorté le Comité à « considérer la fonction bancaire comme un bien collectif et à créer des politiques qui soient au service des banques et des consommateurs. Si l’on oublie que les services bancaires constituent un bien collectif, on risque de prendre des décisions qui ne servent que les banques et leurs actionnaires ». Pour leur part, les grandes banques admettent également la nécessité d’une réglementation. Par exemple, le Groupe financier de la Banque de Montréal a déclaré au Comité : « le secteur bancaire est très réglementé en raison de son rôle délicat d’intermédiaire, et nous reconnaissons que la façon dont le secteur est organisé touche effectivement l’intérêt public, de même que les résultats qu’il obtient pour les individus, les entreprises petites et grandes et l’ensemble de l’économie ». Selon les témoignages reçus, le Comité se rend compte que certains considèrent les banques comme un service public et l’accès aux services bancaires comme un droit fondamental et estiment que les banques jouent un rôle essentiel dans notre contexte socioéconomique. Nous estimons qu’une réglementation du secteur bancaire est à la fois appropriée et nécessaire, mais qu’elle doit néanmoins être une réglementation de niveau et de type adéquats. De même, à notre avis, il est tout à fait souhaitable que les fusions projetées par de grandes banques soient assujetties à un processus d’examen différent de celui qui s’applique généralement aux autres secteurs. Le Comité recommande donc : Le Comité est d’accord avec les témoins qui considèrent les banques comme un service public et l’accès aux services bancaires comme un droit fondamental et estiment que les banques jouent un rôle essentiel dans notre contexte socioéconomique. Nous estimons qu’une réglementation du secteur bancaire est à la fois appropriée et nécessaire, mais qu’elle doit néanmoins être une réglementation de niveau et de type adéquats. De même, à notre avis, il est tout à fait souhaitable que les fusions projetées par de grandes banques soient assujetties à un processus d’examen différent de celui qui s’applique généralement aux autres secteurs. Le Comité recommande donc : RECOMMANDATION 1 Que les fusions projetées par des banques et des sociétés de portefeuille bancaires ayant des capitaux propres supérieurs à 5 milliards de dollars restent assujetties à des examens du Bureau de la concurrence, qui les étudiera du point de vue de la concurrence, du Bureau du surintendant des institutions financières, qui les étudiera du point de vue de la réglementation prudentielle, et du Comité permanent des finances de la Chambre des communes, qui les examinera du point de vue de l’intérêt public. Pour que l’examen puisse se faire sur la base de tous les renseignements utiles, il faudrait que le Bureau de la concurrence et le Bureau du surintendant des institutions financières réalisent leurs études aussi rapidement et complètement que possible, de sorte que leurs analyses puissent servir d’appui lors des audiences publiques. Le Comité a décidé de ne pas commenter le rôle du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce estimant que c’est à celui-ci de déterminer la nature de son engagement dans les audiences concernant l’évaluation de l’intérêt public dans le processus de fusion de grandes banques. B. L’Évaluation de l’incidence sur l’intérêt public Comme nous l’avons dit plus haut, les parties à une fusion projetée sont tenues de préparer une Évaluation de l’incidence sur l’intérêt public (EIIP), qui est l’un des éléments dont se serviront les comités parlementaires pour soupeser les grands problèmes d’intérêt public liés au projet de fusion. Dans l’EIIP, les demandeurs doivent expliquer le bien-fondé de la fusion envisagée ainsi que les mesures qu’ils pourraient prendre pour réduire les coûts ou problèmes susceptibles d’en découler. Les Lignes directrices relatives à l’examen des projets de fusion énumèrent les renseignements que les demandeurs doivent fournir :
L’EIIP couvre en outre toute autre question que le ministre des Finances ou les parties intéressées jugent pertinentes dans le contexte de tel ou tel projet. Les témoins qui ont parlé de l’Évaluation de l’incidence sur l’intérêt public sont en général d’avis que son élaboration et les éléments qu’elle contient est utile, en particulier pour faire en sorte que les intéressés s’engagent raisonnablement à protéger l’intérêt public. Toutefois, certains ont exprimé des réserves. Par exemple, aux yeux du Centre pour la défense de l’intérêt public, « cela laisse entendre que les fermetures de succursales sont inévitables, et qu’il faut s’intéresser uniquement au moment et aux conséquences de ces fermetures, ainsi qu’à l’existence de "mécanismes de diversification des modes de prestation de services", mais cette expression n’est pas définie. Parle-t-on ici d’une banque offrant tous les services ou d’un guichet automatique? » Le professeur Jean Roy a proposé au Comité, comme éventuel moyen de rendre moins vagues les critères de l’EIIP, que le gouvernement déclare, par exemple, « que toute opération acceptable pour le Bureau du surintendant des institutions financières et le Bureau de la concurrence sera acceptée, à condition que des engagements raisonnables soient pris pour protéger l’intérêt public ». Selon lui, toutefois, le gouvernement devrait conserver « la responsabilité de contrôler les impacts négatifs que ces transactions pourraient avoir, à court terme, sur les clientèles vulnérables. Le volet des examens d’impact sur l’intérêt public doit être conservé dans le but d’exiger de la part des banques candidates à une fusion qu’elles prennent des engagements raisonnables pour protéger l’intérêt public ». Le Groupe financier de la BMO a proposé quelques éléments susceptibles d’être ajoutés à l’EIIP. Ainsi suggère-t-il au Comité de recommander que les candidats à la fusion précisent :
Le Comité remarque que certaines questions, notamment la disponibilité du financement, les tarifs et les effets sur l’emploi font déjà partie explicitement des composantes de l’EIIP évoquées dans les Lignes directrices relatives à l’examen des projets de fusion, tandis que la question du service aux collectivités rurales y est implicite. Les représentants des grandes banques canadiennes estiment important que le processus soit prévisible. Selon la Banque Canadienne Impériale de Commerce, les mécanismes du BSIF et du Bureau de la concurrence sont clairs. Ce qu’il faut, estime-t-elle, c’est « une prévisibilité analogue dans la détermination des critères qui répondent à l’« intérêt public ». RBC Groupe financier a déclaré au Comité que « le fait qu’il existe déjà des lignes directrices portant sur des questions comme l’accès aux services, les fermetures de succursales et les problèmes liés à la transition, par exemple l’emploi, entraîne une ambiguïté supplémentaire et force l’industrie à se débattre avec la définition des problèmes d’intérêt public. Par conséquent, il est impératif non seulement que le gouvernement précise la notion d’“intérêt public”, mais qu’il publie des directives expresses concernant l’Évaluation de l’incidence pour l’intérêt public ». M. Harold MacKay est d’avis que les précisions sur tel ou tel point ne devraient pas comporter de critères numériques fixes. Selon lui, une trop grande précision pourrait empêcher le Ministre de choisir la meilleure voie pour l’intérêt public, dans le contexte d’un projet de fusion particulier. M. MacKay recommande plutôt que les Lignes directrices affirment explicitement que le Ministre, au moment de la décision finale, doit trouver le point d’équilibre entre les avantages et les inconvénients pour l’intérêt public, et non pas s’attacher à des règles portant sur des éléments précis. Option Consommateurs est du même avis. Selon cet organisme, s’il est vrai que les Lignes directrices peuvent être améliorées, chaque fusion doit être traitée séparément, et les seuils chiffrés pourraient s’avérer « encombrants et inflexibles ». TG International et la Coalition canadienne pour le réinvestissement communautaire pensent qu’il faudrait fournir des données plus nombreuses et plus consistantes sur les problèmes d’intérêt public liés aux banques. Ces témoins ont fait directement allusion aux déclarations sur les responsabilités envers la collectivité et à la loi américaine intitulée Community Reinvestment Act. Le Comité souligne que, pour l’instant, les banques dont les capitaux propres sont de un milliard de dollars ou plus sont tenues de déposer annuellement des déclarations sur leurs responsabilités envers la collectivité, qui doivent contenir toute une série de renseignements. Selon le Comité, les actuelles exigences de l’Évaluation de l’incidence sur l’intérêt public sont fort étendues. Aussi, ne voyons-nous pas la nécessité de définir d’autres sujets susceptibles d’y figurer. Nous sommes favorables à ce que le Ministre puisse exiger la fourniture de renseignements supplémentaires dans l’EIIP peut-être en fonction des circonstances que revêt tel ou tel projet particulier de fusion et à ce que les candidats à une fusion puissent fournir tous les renseignements supplémentaires qu’ils jugent utiles. En conséquence, le Comité recommande : RECOMMANDATION 2 Que la liste des éléments à inclure dans l’Évaluation de l’incidence sur l’intérêt public, tels que définis dans les Lignes directrices relatives à l’examen des projets de fusion, reste telle quelle. Lorsqu’ils remplissent l’évaluation, les auteurs de la demande devraient prendre dûment en compte les précisions fournies par le Comité permanent des finances de la Chambre des communes dans les domaines de l’accès et de la croissance à long terme pour le Canada. De plus, il y a lieu de maintenir l’habilitation du ministre des Finances à exiger des renseignements supplémentaires, et la possibilité pour les candidats à la fusion d’en fournir. Il importe toutefois de préciser ce qui est attendu, dans plusieurs domaines, pour protéger l’intérêt public, et le Comité fournit cette précision d’une manière non prescriptive dans les recommandations 3 à 10. Dans une économie de marché comme celle du Canada, l’accès au secteur des services financiers est essentiel. Les besoins en services bancaires varient selon la situation de chaque client. Les petites et les moyennes entreprises (PME) ont besoin d’avoir accès à des prêts ou à des marges de crédit afin de pouvoir financer leurs coûts permanents, tandis que les étudiants ont besoin de prêts pour financer leurs études, et les candidats à la propriété ont habituellement besoin d’une hypothèque pour acheter une maison. De plus, les employés ont besoin d’un compte de banque pour pouvoir encaisser leurs chèques ou recevoir le dépôt électronique de leur salaire, tandis que les consommateurs peuvent avoir besoin de cartes de crédit pour acheter en ligne, par téléphone ou en personne. La participation active à la société sur le plan économique est tributaire d’une relation entre le secteur des services financiers et les citoyens et leurs affaires. Il est donc question ci-après de toute une gamme de questions d’accès : l’accès, pour tous les Canadiens et les entreprises canadiennes, à des services à prix raisonnables, dans toutes les régions du pays, à un bon éventail de fournisseurs offrant une variété de services, à des mesures de transition pour les employés et à des emplois de haute qualité. A. L’accès pour tous les Canadiens Pendant les audiences du Comité, certains témoins ont exprimé la crainte que la fusion de banques ne porte préjudice à certains groupes vulnérables de la société, dont les personnes handicapées, les personnes âgées et les particuliers à faible revenu. Ces groupes dépendent souvent davantage que d’autres segments de la population des succursales pour leurs services bancaires, et ils ne peuvent généralement pas utiliser les services bancaires offerts par téléphone ou par Internet. Ainsi, les personnes ayant des déficiences cognitives ou physiques peuvent trouver difficile, voire impossible, d’utiliser les services bancaires téléphoniques ou électroniques s’ils ont de la difficulté à se souvenir de leur numéro d’identification personnel, à utiliser des codes d’accès ou à traverser les multiples étapes de vérification de l’information. Il peut être difficile aussi d’utiliser ce type de services quand on est faiblement alphabétisé ou que les coûts sont prohibitifs. En outre, même si la plupart des grandes banques du Canada offrent des comptes de banque à frais modiques4, l’ouverture de tels comptes peut néanmoins s’avérer trop coûteuse pour les personnes à revenu modeste, comme l’a signalé au Comité la Coalition canadienne pour le réinvestissement communautaire. La figure 1 donne un résumé des comptes à frais modiques qu’offraient les grandes banques canadiennes en date de février 2001.
Le Comité constate que le gouvernement fédéral a préparé un règlement figurant pour examen en ce moment dans la Gazette du Canada qui codifie essentiellement le code volontaire actuel du secteur bancaire, à quelques petites différences près. Ainsi, le règlement prévoit qu’une personne doit être autorisée à ouvrir un compte, quels que soient ses antécédents financiers5, à condition de pouvoir produire :
Une banque qui refuse à une personne l’ouverture d’un compte en raison de questions liées à son identité doit fournir un avis écrit de son refus et une déclaration informant le client que celui-ci peut porter plainte auprès de l’Agence de la consommation en matière financière du Canada. Dans son rapport de 1998, le Groupe de travail sur l’avenir du secteur des services financiers canadien a souligné que « Les fermetures de succursales n’ont pas le même effet sur tous les groupes composant la société canadienne. […] elles ont été un sujet de préoccupation principalement pour les résidents des petites localités rurales ou des quartiers défavorisés des villes8 ». Les banques ont promis de prendre des mesures pour répondre à ces préoccupations. La Banque Canadienne Impériale de Commerce, par exemple, affirme qu’elle a pour principe de fournir l’accès aux services bancaires aux personnes ayant des besoins particuliers quand il est possible de le faire et, à son avis, toute entité issue de fusions doit aussi appliquer ce principe. D’autres banques partagent ces points de vue. Ainsi, la Banque de Nouvelle-Écosse a expliqué au Comité que les comptes à frais modiques, les succursales rurales et le régime de fermeture d’une succursale avec période d’avis officiel et consultation de la collectivité , l’accès pour les personnes handicapées et l’accès aux guichets automatiques ou grâce aux nouvelles technologies électroniques, téléphoniques et autres, sont autant d’éléments essentiels aux yeux des consommateurs. Le Groupe financier de la Banque de Montréal a précisé que les nouveaux modes d’accès, comme les services bancaires téléphoniques, les guichets automatiques et les services par Internet, se multiplient, mais que certains Canadiens et en particulier certaines personnes âgées n’osent pas les utiliser. Pour eux, la fermeture d’une succursale représente une perte importante. Les témoins n’en ont pas fait mention, mais le Comité estime néanmoins que d’autres groupes vulnérables, comme les Autochtones et les néo-Canadiens, éprouvent peut-être aussi des difficultés à obtenir du crédit et d’autres services financiers. Nous constatons toutefois que certaines institutions financières fournissent des services bancaires axés spécialement sur les besoins des Autochtones et estimons que ce genre de mesures doit continuer. L’incidence possible de la fusion de grandes banques sur les dons de charité est une autre source d’inquiétude. En effet, les représentants de Fondations communautaires du Canada ont déclaré au Comité que d’après certaines données, qui font d’ailleurs l’objet d’études visant à les confirmer, quand deux entreprises fusionnent, leur participation à la collectivité tend à diminuer jusqu’à correspondre au niveau de participation de seulement l’une d’entre elles. Ils craignent donc que cela se produise avec la fusion des banques. Le Comité fait siennes les préoccupations des témoins concernant l’accès aux services financiers pour tous les Canadiens, particulièrement les personnes handicapées, âgées ou à faible revenu et les autres groupes vulnérables, et concernant l’incidence d’une fusion sur les dons de charité et les autres formes de participation communautaire des banques. Par contre, nous sommes sensibles aussi aux mesures prises par les banques pour offrir des comptes à frais modiques, recourir à des technologies utiles et contribuer au tissu social du pays. À notre avis, les difficultés financières que doivent relever certains groupes et particuliers peuvent entraîner un déficit social; or, il incombe aux grandes banques, qu’elles fusionnent ou non, d’aider à remédier aux éventuels déficits sociaux découlant de telles difficultés. Voilà pourquoi le Comité recommande : RECOMMANDATION 3 Que les parties à un projet de fusion s’engagent à offrir à tous les Canadiens un niveau et un éventail de services au moins équivalents à ceux offerts avant la fusion, compte tenu des progrès technologiques et de l’évolution des besoins des consommateurs. De plus, l’entité issue de la fusion doit veiller tout particulièrement à assurer l’accès aux services aux personnes handicapées, aux personnes âgées, aux personnes à faible revenu et aux Autochtones, ainsi qu’à poursuivre ses activités communautaires et charitables. B. L’accès pour les entreprises L’accès est aussi une question importante pour les PME9, principalement l’accès au financement, surtout les marges de crédit et les prêts. Dans la première moitié des années 1990, de nombreuses PME avaient l’impression que les grandes banques à charte limitaient indûment le crédit. Les banques, pour leur part, jugeaient qu’à la suite de la récession de 1990-1991, de nombreuses entreprises avaient été acculées à la faillite ou étaient devenues pratiquement insolvables, et qu’il était peu sage de prêter dans de telles conditions. La figure 2, qui présente les prêts autorisés par les banques à charte pendant la période 1981-2002, montre une baisse des autorisations de prêts de 200 000 dollars ou moins au début des années 1990. La figure montre aussi que les autorisations de prêts de ce montant ont piétiné pendant les années 1990, malgré une forte croissance économique dans les cinq dernières années de la décennie. Par comparaison, les autorisations de prêts valant entre 200 000 et 500 000 dollars et ceux de 500 000 à 1 million de dollars ont repris depuis la récession du début des années 1990. Les besoins en crédit de la plupart des PME sont assez faibles. En effet, selon certaines sources, le prêt moyen consenti à une PME n’atteint même pas 50 000 $10. En outre, la Banque Canadienne Impériale de Commerce a signalé que 70 % de tous les prêts aux petites entreprises sont inférieurs à 250 000 $. De plus, selon Industrie Canada, 23 % des PME ont déposé une demande de prêt en 2000, et 82 % de ces demandes ont été approuvées11. Par ailleurs, d’après une enquête réalisée en 1998 par l’Association des banquiers canadiens, 38 % des PME ont fait des demandes de prêt, et 93 % de ces demandes ont été approuvées12. Une bonne partie de ces chiffres provient des données générales de l’industrie, y compris l’ensemble des banques à charte, et non seulement des cinq grandes banques. Or, certaines des grandes banques ont affirmé avoir accru leurs prêts aux petites entreprises au cours des années 1990 et depuis le début du millénaire, et qu’à leur avis, le crédit sur ce marché est extrêmement compétitif. Selon les représentants de la Banque TD, toutes les banques ont à cœur les services bancaires aux petites entreprises et la concurrence interbancaire est féroce dans ce secteur, puisque les PME forment l’épine dorsale de l’économie canadienne. Les données de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante montrent que, globalement, la part du marché des prêts aux petites entreprises détenue par les cinq grandes banques est passée de 75,5 % en 1989 à 66,7 % en 200213. Les caisses d’épargne et de crédit et les caisses populaires sont celles qui ont le plus accru leur part du marché, puisque celle-ci est passée de 13,4 % de tout le crédit consenti aux petites entreprises en 1989 à 20,7 % en 2002. Le Comité note que les prêts aux petites entreprises sont généralement plus risqués que les prêts plus importants. Les données de Statistique Canada indiquent qu’en 2000, le taux de perte pour les montants autorisés inférieurs à 50 000 $ était de 1,5 %, de 0,9 % pour les montants autorisés de 50 000 $ à 249 999 $, de 0,5 % pour les montants de 250 000 $ à 999 999 $ et de 0,3 % pour les montants de 1 million de dollars et plus14. Même si la part du marché des caisses d’épargne et de crédit et des caisses populaires s’est accrue et si certains éléments tendent à démontrer qu’elles offrent un meilleur service à leur clientèle de PME15, le Comité a appris que les grandes banques continuent de jouer un rôle important dans le financement des PME en raison de leur réseau de succursales et de guichets automatiques et parce qu’elles tendent à offrir un plus grand éventail de services bancaires et sont mieux placées pour aider le secteur des PME en expansion. Les fermetures de succursales pourraient néanmoins réduire l’accès à ces services, et la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a indiqué au Comité que « malgré quelques incursions limitées d’autres acteurs au cours des dernières années, ceux-ci ne peuvent tout simplement pas offrir la gamme complète de services financiers dont la moyenne des petites entreprises a besoin ». La Fédération a aussi souligné que même si « selon les partisans [des fusions bancaires], les caisses de crédit et les sociétés de fiducie combleront le vide. C’est tout à fait improbable. Alors qu’il est vrai que certaines caisses de crédit offrent un bon service, [ …] il faut dire que les caisses de crédit et les sociétés de fiducie ont une présence et un pouvoir infimes sur le marché national. Leurs connaissances en matière de prêts commerciaux sont peu développées, et elles ne sont pas outillées pour croître avec les entreprises au fur et à mesure qu’elles prennent de l’expansion et se spécialisent ». Le Comité note que, d’après des données de Statistique Canada pour 2000, les caisses d’épargne et de crédit et les caisses populaires occupent une part disproportionnée du marché des prêts aux PME, avec 38 % du marché des prêts de moins de 50 000 $ et 26 % du marché des prêts dont le montant se situe entre 50 000 $ et 249 999 $, comparativement à 51 % et 57 % respectivement pour les grandes banques. Les caisses d’épargne et de crédit et les caisses populaires semblent impatientes d’accroître leur présence auprès des PME. La Centrale des caisses de crédit du Canada a informé le Comité du fait qu’« advenant une fusion des grandes banques, il faut s’attendre à ce que bon nombre de Canadiens se tournent vers […] les caisses d’épargne et de crédit pour leur offrir un plus grand choix de services financiers au détail et un meilleur accès à ces services, notamment en ce qui concerne les prêts aux PME ». Pour sa part, la Banque nationale du Canada est, elle aussi d’avis que, si fusion il y a, les banques qui fusionnent devraient être obligées de vendre un nombre suffisant de succursales pour maintenir une certaine concurrence dans les services bancaires offerts aux PME. Le Comité a également recueilli le témoignage des femmes entrepreneures qui trouvent particulièrement difficile parfois d’obtenir du financement bancaire. L’association Les femmes chefs d’entreprise du Canada nous a dit qu’à cet égard elle trouvait « préoccupant de constater que les petites et moyennes entreprises dirigées par des femmes n’ont pas le même accès au crédit et aux services que les entreprises dirigées par des hommes. Il faut soutenir l’accès au crédit des entreprises dirigées par des femmes pour que les fusions de banques n’aient pas pour effet de le réduire encore 16 ». Le Comité est d’avis que nos grandes banques jouent un rôle déterminant dans la prestation d’une gamme de services particulièrement l’accès aux capitaux aux petites et moyennes entreprises canadiennes, et il importe que tous les secteurs et toutes les régions du pays y aient accès. Les petites et moyennes entreprises sont un rouage essentiel de notre croissance économique. Par conséquent, nous estimons qu’elles doivent continuer d’avoir accès aux services, en particulier si d’autres concurrents les caisses d’épargne et de crédit, les caisses populaires et d’autres réussissent à se tailler une place sur le marché et à prospérer. À cet égard, le Comité recommande : RECOMMANDATION 4 Que les parties à un projet de fusion indiquent en quoi l’entité issue de la fusion améliorera l’accès des petites et moyennes entreprises à du capital. C. Accès à des services à prix abordable Le Comité a aussi entendu des témoins lui faire part de leurs inquiétudes concernant les répercussions possibles de fusions de grandes banques sur les prix. De l’avis de l’Association des consommateurs du Canada, « les prix augmentent invariablement lorsque la concurrence diminue. Certains initiateurs de projets de fusion, qui croient fermement dans l’existence d’économies d’échelle, ne peuvent expliquer comment la réduction de la concurrence augmentera les prêts aux petites entreprises, ni comment elle se traduira par des services plus attentifs ou des frais bancaires moins élevés ». Le Comité partage les préoccupations exprimées par les témoins concernant l’accès à des services financiers à prix raisonnable corrigés en fonction de l’inflation pour tous les Canadiens et toutes les entreprises canadiennes, ainsi que dans toutes les régions du pays et dans tous les secteurs de l’économie canadienne. Par conséquent, le Comité recommande : RECOMMANDATION 5 Que les parties à un projet de fusion indiquent comment l’entité issue de la fusion s’y prendra pour offrir des services financiers de détail à des prix dans l’ensemble analogues ou inférieurs à ceux qui étaient pratiqués au moment de la demande de fusion et ce, pendant une période de transition d’au plus trois ans. D. Accès dans toutes les régions Les données du recensement de 2001 montrent que les régions rurales et les petites villes, c’est-à-dire les régions situées à l’extérieur des centres urbains de 10 000 habitants ou plus, ont enregistré une diminution de population de 0,4 % entre 1996 et 2001. En 2001, 20,3 % des Canadiens vivaient en région rurale ou dans une petite ville, en baisse par rapport à 21,5 % en 1996. La population dans ces agglomérations a baissé dans toutes les provinces, sauf en Ontario, au Manitoba et en Alberta17. Exception faite de quelques régions éloignées, les régions rurales et les petites villes ont connu une diminution de population causée par la migration. De plus, en raison de leur population vieillissante, leur taux d’accroissement naturel était faible et, dans certains cas, négatif18. Ces tendances ont des conséquences particulières pour les municipalités rurales et éloignées, les entreprises, les particuliers et les fournisseurs de services financiers. Pour les municipalités, la diminution de la population entraîne une baisse de la valeur des propriétés, qui elle-même réduit l’assiette fiscale, les recettes fiscales et l’éventail des services municipaux offerts ou en augmente le coût. Pour les entreprises, la diminution de la population a un effet à la baisse sur les ventes et les bénéfices. Pour les particuliers, ce peut être les emplois qui disparaissent. Pour les fournisseurs de services financiers, la faible valeur des propriétés fait que les entreprises et les particuliers ont moins de biens à offrir en garantie d’un nouveau prêt, et la crainte d’une nouvelle baisse de la valeur des propriétés dans l’avenir peut obliger les banques à hausser leurs taux d’intérêt sur les nouveaux prêts ou à refuser purement et simplement de prêter, ce qui est également préjudiciable à l’activité économique locale. Des faillites personnelles ou d’entreprises peuvent également se produire, ce qui est également mauvais pour les banques. Même sans fusions, certaines banques ont déjà vendu des succursales dans les régions rurales et éloignées et ont concentré leurs activités dans les centres urbains. La Fédération canadienne des municipalités a affirmé au Comité que le Canada ne peut se permettre de laisser le secteur des services financiers abandonner les collectivités rurales et éloignées étant donné que, dans ces collectivités, « la présence physique d’une succursale bancaire peut être extrêmement importante pour le moral de toute la collectivité. Lorsqu’un commerce ferme ses portes, tous les autres s’en ressentent ». Le Comité s’est fait dire que, dans certains cas, des caisses d’épargne et de crédit et des banques de taille moyenne ont acheté des succursales qui autrement auraient été fermées par les grandes banques. En Alberta, ATB Financial une société d’État provinciale agit comme « fournisseur de services dans toutes les régions de la province » et a continué à desservir les régions rurales et éloignées. Ses succursales sont en grande partie concentrées dans les régions rurales et éloignées, puisque 104 sur 145 sont situées en dehors des régions métropolitaines d’Edmonton et de Calgary. Outre ses succursales, ATB distribue ses services par le truchement de 132 bureaux administrés entre autres par des courtiers d’assurance, des épiceries et des agences de voyages, dont le rôle consiste principalement à accepter des dépôts, à encaisser des chèques et à traiter des demandes de prêts. De plus, la Centrale des caisses de crédit du Canada a acheté environ 72 succursales de banques à charte depuis 2000 et les a revendues à des caisses d’épargne et de crédit en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan, au Manitoba, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. Elle a affirmé au Comité que « plutôt que de fermer [leurs succursales, les banques] cherchent un acheteur et [les caisses d’épargne et de crédit] sont là, [elles] sont capables de reprendre les succursales […] les employés, [… et] les installations pour que la collectivité ait accès à un service financier sur place. Je pense […] que dans les régions rurales du Canada, la fusion des banques n’aura pas d’effet négatif parce qu’il y aura quelqu’un d’autre pour prendre leur place ». Selon la Centrale des caisses de crédit du Canada, environ 330 collectivités ont une caisse d’épargne et de crédit pour seule et unique institution financière. Ce chiffre exclut le Québec, qui a un réseau distinct de caisses populaires, et Terre-Neuve, pour laquelle il n’existe pas de données. La figure 3 donne une idée de la répartition provinciale des caisses d’épargne et de crédit dans les 330 collectivités en question. Le Comité croit que les succursales bancaires font partie intégrante de bon nombre de collectivités urbaines, rurales et éloignées d’un bout à l’autre du Canada et dans toutes les régions du pays. Nous sommes néanmoins particulièrement préoccupés par l’importance des succursales installées dans les collectivités rurales et éloignées, où leur présence peut attirer d’autres entreprises et contribuer ainsi au développement économique. Nous comprenons très bien le point de vue selon lequel une entité fusionnée peut vouloir se départir de succursales et savons parfaitement que le Bureau de la concurrence peut, en fait, proposer ces dessaisissements en guise de mesures correctives. De plus, nous sommes persuadés que d’autres fournisseurs de services financiers comme les caisses d’épargne et de crédit, les caisses populaires, les banques de taille moyenne et les banques étrangères seront intéressés à acheter les succursales dont on se départit et à s’installer dans les régions du Canada qui sont actuellement mal pourvues, dans la mesure où le cadre législatif, réglementaire et stratégique leur est favorable. Néanmoins, nous craignons que la fermeture d’une succursale locale n’ait des répercussions fâcheuses sur certaines collectivités. C’est la raison pour laquelle le Comité recommande : RECOMMANDATION 6 Que les parties à un projet de fusion indiquent comment l’entité issue de la fusion desservira les collectivités rurales et isolées où elles offraient des services financiers au moment de la demande de fusion. E. Accès à un bon éventail de fournisseurs de services offrant une variété de services Certains témoins ont dit au Comité que les caisses d’épargne et de crédit, de même que les banques canadiennes et étrangères de taille moyenne, sont impatientes de prendre de l’expansion et sont intéressées à acheter des succursales dont des grandes banques se dessaisiraient par suite d’une fusion. Par exemple, la CS CO-OP a affirmé au Comité qu’« il est raisonnable de s’attendre à ce que la fusion de deux ou plusieurs grandes banques canadiennes profite en fait aux caisses d’épargne et de crédit à deux égards : a) acquérir des clients et b) acquérir des actifs. […] Certains clients d’une banque nouvellement fusionnée pourraient désirer transférer leurs comptes à une caisse d’épargne et de crédit. […] Des occasions d’acquérir des succursales ou d’autres divisions commerciales de banques qui fusionnent pourront aussi s’offrir aux caisses d’épargne et de crédit et aux autres concurrents ». De même, ATB Financial a dit au Comité qu’elle « verrait dans l’agrément d’un projet de fusion l’occasion d’accroître sa pénétration du marché par l’achat de succursales et d’attirer du personnel et des clients, soit par la voie de transactions négociées, soit du simple fait de l’insatisfaction que pourrait susciter une fusion de grande envergure ». La façon dont les banques se dessaisissent de leurs succursales en inquiète certains. Par exemple, la Banque nationale du Canada a dit au Comité que « le dessaisissement des réseaux locaux de points de services au détail et de services aux PME devra être structuré de façon à faciliter l’arrivée de nouveaux concurrents. […] Dans un territoire donné, une telle vente devrait prévoir la présence de groupements de succursales ou de bureaux de prêts aux PME d’une seule des deux banques, et non pas d’un amalgame de points de services souvent les moins importants ou rentables de l’une ou l’autre des deux banques pour favoriser la fidélisation du client par l’acquéreur; pour réduire la confusion chez la clientèle; pour faciliter la préservation de la structure de gestion en place à l’échelle locale et pour préserver les emplois de soutien à l’extérieur des succursales centres d’aide et d’appels qui comptent un important segment d’employés affectés au service de particuliers et de PME ». Présentant le point de vue d’une banque, le BMO Groupe financier a mentionné au Comité qu’« une banque issue d’une fusion devrait procéder à une restructuration pour éliminer les chevauchements qui constituent un gaspillage, par exemple dans le cas de deux succursales situées littéralement côte à côte. Toutefois, il n’est pas obligatoire que cette restructuration mène à une réduction du nombre de succursales à l’intérieur d’un marché. Plutôt que de régler les problèmes de chevauchements par des fermetures, la nouvelle institution pourrait chercher à vendre les succursales en question à des concurrents. Le vendeur et l’acquéreur y trouveraient tous deux leur compte ». RBC Groupe financier a par ailleurs indiqué que « les fusions feraient diminuer le nombre de banques canadiennes au service des petites entreprises, mais elles élargiraient aussi les possibilités pour les autres fournisseurs y compris les banques étrangères de s’implanter sur le marché ou d’augmenter leur part du marché. La Banque nationale du Canada, HSBC, les caisses d’épargne et de crédit et d’autres institutions ont déjà confirmé leur intérêt pour l’achat de succursales bancaires et l’acquisition d’une plus grande part du marché des services bancaires aux petites entreprises ». L’exigence relative au maintien d’une présence physique est un exemple de ce qui peut être considéré comme un obstacle à l’accès au secteur des services financiers. Les obstacles à l’accès ou à l’expansion rendent difficile l’émergence de concurrents dans une industrie et nuisent à leur rayonnement. Le maintien d’un niveau élevé de concurrence est le meilleur moyen de faire en sorte que les prix soient concurrentiels, que le service soit de qualité supérieure et que les consommateurs aient accès à une variété de produits. Comme l’a souligné le professeur Robert Brown au Comité, « la meilleure façon de contrer les effets d’une trop grande concentration de l’industrie sur les prix et l’accessibilité des services est de permettre que de nouveaux intervenants de l’extérieur puissent concurrencer les institutions en place. Cette solution garantit des prix plus bas et davantage de services ». Dans le contexte du secteur bancaire, l’exigence concernant le maintien en place d’une succursale locale peut constituer un tel obstacle. De ce point de vue, l’obligation de se dessaisir de succursales advenant une fusion de grandes banques serait perçue positivement, puisqu’elle atténuerait l’un des obstacles à l’accès ou à l’expansion. Il y a toutefois d’autres obstacles à l’accès au secteur bancaire et à l’expansion des institutions qui en font déjà partie que le gouvernement fédéral doit prendre en considération s’il souhaite faciliter l’émergence d’un nouveau concurrent et la croissance des intervenants déjà présents, comme l’importance d’acquérir non seulement les biens matériels d’une succursale dont on s’est dessaisi, mais aussi sa clientèle et ses employés, et l’accès au réseau de guichets automatiques des grandes banques. Les obstacles actuels à l’accès au secteur bancaire et à l’expansion des institutions qui en font déjà partie prennent diverses formes :
La Centrale des caisses de crédit du Canada a relevé un certain nombre de changements à apporter à la loi fédérale, qui pourraient faciliter la croissance des caisses d’épargne et de crédit. Par exemple, la Centrale des caisses de crédit de la Colombie-Britannique et la Centrale des caisses de crédit de l’Ontario participent à des discussions avec le ministère des Finances pour trouver des modifications à apporter à la législation fédérale afin de faciliter la mise en œuvre de leur projet de fusion. De l’avis de cet organisme, « les gains en efficience réalisés grâce à la fusion aideront les caisses d’épargne et de crédit de la Colombie-Britannique et de l’Ontario à concurrencer efficacement les grandes banques canadiennes ». Le Mouvement des Caisses Desjardins est d’avis que « le gouvernement pourrait montrer son appui à l’égard des valeurs et des formules coopératives et reconnaître l’importance de ces institutions de façon à leur permettre de mieux répondre aux réalités du marché et de se mesurer à leurs concurrents sur un pied d’égalité ». D’autres mesures pourraient être prises par le gouvernement fédéral pour réduire ou éliminer les obstacles à l’accès ou à l’expansion. Même si on espère que les récentes modifications législatives apportées à la Loi sur les banques stimuleront la concurrence dans le secteur des services financiers, les résultats ont été moins importants que certains l’avaient espéré. La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a dit au Comité que la situation avait très peu changé au cours des cinq dernières années, et a fait valoir que « malgré […] ces changements positifs apportés au cadre réglementaire, la concurrence ne s’est pas accrue. À vrai dire, la poursuite des fermetures de succursales et l’acquisition de Canada Trust par la Banque TD ont fait que le nombre d’acteurs d’importance a plutôt diminué par rapport à 1998. Par conséquent, comme on a déjà établi que les fusions entre grandes banques ne serviraient pas l’intérêt du public en 1998, il est difficile de voir en quoi cette proposition serait plus acceptable aujourd’hui ». La théorie économique veut qu’une concurrence accrue fasse baisser les prix et augmenter la qualité du service. De ce point de vue, si la fusion des grandes banques a pour effet de réduire la concurrence, il faut s’attendre alors à ce que les prix augmentent et à ce que la qualité des services diminue puisque le secteur bancaire devient de plus en plus concentré, et les banques restantes sont en meilleure position pour exiger des prix plus élevés. Comme nous l’avons mentionné précédemment, c’est là la position adoptée par l’Association des consommateurs du Canada. Ce point de vue est également partagé par l’honorable Douglas Peters et par le professeur Arthur Donner, qui ont affirmé au Comité que « les fusions bancaires entraînent des hausses de prix et des réductions des services offerts au public et concentrent le pouvoir économique entre les mains d’une poignée de personnes » et par le Centre pour la défense de l’intérêt public selon lequel « les fusions se traduisent par des hausses des frais bancaires d’ensemble, puisque les services bancaires électroniques qui sont proposés sont plus coûteux pour les consommateurs. Déjà, le montant des frais bancaires n’est pas réglementé. Nous ne voyons pas vraiment comment les fusions vont mettre les consommateurs à l’abri de nouvelles hausses des coûts si les guichets automatiques sont considérés comme des formules acceptables de remplacement des succursales bancaires ». Il est néanmoins possible qu’une fusion des grandes banques puisse entraîner une croissance du secteur des services financiers, puisque de nouveaux concurrents et/ou les intervenants déjà présents acquérront les succursales dont elles se dessaisissent. La concurrence accrue devrait faire baisser les prix et accroître la qualité des services. Le Bureau d’assurance du Canada a informé le Comité que « la concurrence et le choix ont pour effet d’accroître la responsabilité envers les consommateurs puisque la possibilité de faire affaire avec des concurrents pour obtenir des services financiers constitue un puissant facteur incitatif pour les institutions financières concernées. Le choix dont disposent les consommateurs est la meilleure garantie de la qualité du service et de l’innovation en matière de produits ». Le Comité s’est également fait dire que les fusions peuvent être avantageuses même si une diminution de la concurrence toujours possible si les caisses d’épargne et de crédit et d’autres concurrents ne réussissent pas à se tailler une place entraîne une hausse des prix. Ainsi, le professeur James McIntosh a soutenu que « les fusions peuvent être avantageuses, même si la diminution de la concurrence entraîne une hausse du prix des produits, si l’augmentation […] des profits des banques compense la perte […] subie par les consommateurs en raison de la hausse des prix ». Le Comité note que les Lignes directrices pour l’application de la Loi : Fusionnements de banques du Bureau de la concurrence reconnaissent cette possibilité, puisque les fusions peuvent avoir lieu même si elles entraînent une certaine augmentation des prix ou une baisse de la qualité des services, si dans l’ensemble elles sont profitables pour la société. Le professeur James McIntosh a dit aussi que la fusion de grandes banques pourrait être globalement avantageuse pour les banques, par l’amélioration des bénéfices, et pour les consommateurs, par des prix plus bas, à la condition que les parties à la fusion aient à leur disposition des technologies leur permettant de maintenir la même production, mais à un moindre coût. En fait, ses travaux donnent à penser que ce serait là un résultat probable de la fusion de banques. Il faut tenir compte enfin de la propension actuelle des consommateurs à se prévaloir des modes de distribution des services bancaires autres que les succursales bancaires. Le professeur Robert Brown a dit au Comité que le gouvernement se souciait peut-être trop des fermetures éventuelles de succursales bancaires, car les opérations par téléphone, par télécopieur et par Internet remplacent de plus en plus les échanges en personne. Pour lui, le stock actuel de biens immobiliers des banques ajoute inutilement aux coûts des services bancaires, car il existe de meilleures méthodes d’accès aux services à partir d’endroits éloignés que les succursales bancaires, et l’on continue d’en développer de nouvelles. BMO Groupe financier a fait la même observation, disant au Comité que « [l]a plupart des gens qui ont des opérations courantes à faire optent pour les guichets automatiques. Les Canadiens ont accès à plus de 18 000 guichets automatiques grâce auxquels ils peuvent effectuer les transactions bancaires les plus courantes dépôts, retraits, paiements de factures, demandes de renseignements sur les comptes, virements, etc. Et la plupart du temps, ces guichets sont accessibles 24 heures sur 24. » La présence d’ING Direct sur le marché canadien est un bon exemple d’entité virtuelle bien implantée. Il reste que, malgré l’innovation technologique, les succursales bancaires demeurent indispensables pour les petites entreprises et pour certaines opérations. Lorsqu’il a étudié le projet de fusion de deux grandes banques en 1998, le Bureau de la concurrence avait conclu que la technologie n’était pas en train de créer un substitut aux succursales, et que cela ne risquait pas d’arriver non plus dans les dix années à venir. Il a indiqué que, « [s]elon un des experts en technologie retenu par l’une des deux banques voulant se fusionner, cette nouvelle technologie ne remplacera pas le besoin d’une présence physique d’ici cinq à dix ans. Un autre expert que le Bureau a interrogé évalue ce délai à une période variant entre dix et quinze ans19. » La Banque HSBC Canada a dit au Comité que beaucoup de guichets automatiques n’offraient pas la gamme complète des services et ne pouvaient donc pas remplir toutes les fonctions d’une succursale. Par ailleurs, si la technologie peut effectivement faciliter dans une certaine mesure l’accès au marché des nouveaux établissements qui souhaitent s’y établir, elle peut aussi avoir l’effet contraire si, comme on l’a dit au Comité, les nouveaux venus et les institutions établies qui souhaitent prendre de l’expansion sont forcés d’offrir à la fois les services de succursales à service complet et les services électroniques auxquels s’attendent maintenant les consommateurs. Selon la CS CO-OP, « l’un des facteurs qui motive la recherche d’économies de taille et de gamme est le souci de disposer d’une capacité suffisante pour investir dans les nouvelles technologies coûteuses que les Canadiens attendent maintenant de leurs fournisseurs de services financiers. Les Canadiens sont des consommateurs de plus en plus avertis conscients des avantages qu’il y a à avoir accès à des services bancaires 24 heures sur 24, sept jours sur sept. L’exploitation en parallèle de plusieurs réseaux électroniques et d’un système de succursales bancaires revient extrêmement cher. » Certains témoins ont dit que les modifications apportées récemment à la Loi sur les banques relativement aux règles visant les banques fermées, à l’accès au système de paiements et à l’entrée des banques étrangères sur le marché n’avaient pas eu beaucoup d’effet sur la concurrence. Néanmoins, le ministère des Finances planche maintenant sur une structure de coopératives bancaires qui pourraient concurrencer les banques. L’idée d’instituer un réseau national de coopératives bancaires de régie fédérale qui permettrait aux caisses de crédit de régie provinciale de réaliser des économies d’échelle par l’adhésion à une structure bancaire nationale fait son chemin. Le Comité est convaincu que, avec ou sans fusions, l’on verra arriver sur le marché des concurrents des grandes banques, à la condition d’instituer un climat favorable au moyen de mesures législatives et réglementaires et de politiques appropriées. Il importe d’après nous de prendre des mesures propres à encourager le type et l’intensité de la concurrence que les modifications récentes de la Loi sur les banques devaient susciter. Nous estimons qu’une saine concurrence dans le secteur des services financiers donnera aux particuliers et aux entreprises la possibilité de choisir entre plusieurs fournisseurs de services financiers offrant la gamme des services dont ils ont besoin à un prix qui leur convient. Dans cette optique, le Comité recommande : RECOMMANDATION 7 Que, dans les limites de ses compétences, le gouvernement fédéral intervienne immédiatement pour faire disparaître, le cas échéant, les obstacles qui entravent le développement et l’essor des caisses d’épargne et de crédit. F. Accès à des mesures de transition pour les employés Les fusions et acquisitions d’entreprises entraînent presque inévitablement des pertes d’emplois, du fait de l’élimination des activités faisant double emploi et de la rationalisation d’autres aspects du fonctionnement de l’entreprise. Il y a donc fort à parier que la fusion de grandes banques se solderait par des réductions d’effectifs. Les pertes d’emplois sont évidemment un enjeu important de l’intérêt public pour les collectivités et les salariés touchés. Un certain nombre de banques ont parlé au Comité de l’ordre de grandeur possible des pertes d’emplois que pourrait entraîner la fusion de grandes banques et de la manière dont le problème pourrait être abordé. Apparemment, le gros des réductions d’effectifs sinon la totalité pourrait probablement être absorbé par l’érosion normale des effectifs, des retraites anticipées ou la mutation des employés dans d’autres postes au sein de la nouvelle organisation. Par exemple, pour la Banque Canadienne Impériale de Commerce, tout projet de fusion de banques doit contenir la promesse « de traiter les employés de manière équitable et respectueuse, dans le respect de leur dignité, dans les cas où des postes du siège social seraient affectés. Les parties à la fusion devraient s’engager à aider dans la mesure du possible les employés dont le poste est éliminé à trouver un autre emploi ailleurs dans la nouvelle organisation. Elles devraient aussi s’efforcer d’exploiter l’érosion normale des effectifs pour atteindre les cibles de réduction des effectifs fixées. En outre, lorsqu’il est impossible de trouver un autre emploi à un employé dont le poste est devenu excédentaire, il serait préférable d’accorder une indemnité de licenciement supérieure au montant normalement prévu. » La Banque Scotia a indiqué qu’elle avait un roulement annuel des effectifs de 3 500 personnes, chiffre qu’elle affirme être bien supérieur aux réductions d’effectifs que pourrait entraîner une fusion. BMO Groupe financier propose que les banques prennent des engagements quant à la période durant laquelle elles conserveront à leur emploi les salariés dont le poste deviendrait excédentaire à la suite d’une fusion. Comme beaucoup de témoins, le Comité est préoccupé par les pertes d’emplois qui pourraient résulter de la fusion de grandes banques et les répercussions qu’elles auraient sur les salariés et les collectivités concernés, en particulier immédiatement après l’approbation d’un projet de fusion. À notre avis, les parties à un projet de fusion devraient s’engager à minimiser les pertes d’emplois et à offrir aux employés concernés des services de relocalisation, de formation et d’aide au replacement. Nous pensons cependant comme les grandes banques que l’érosion normale des effectifs et des programmes de retraite anticipée pourraient suffire à réaliser les compressions d’effectifs limitées qui seraient nécessaires. Dans les cas où ils ne suffiraient pas, cependant, nous pensons que l’indemnisation des salariés concernés devrait être sensiblement supérieure au minimum prévu dans la législation et devrait correspondre à ce qu’offrent les autres fournisseurs de services financiers dans des circonstances analogues. En conséquence, le Comité recommande : RECOMMANDATION 8 Que les parties à un projet de fusion s’efforcent de minimiser le plus possible les pertes d’emplois. En outre, la nouvelle entité issue de la fusion devrait offrir des services de relocalisation, de formation et d’aide au replacement et réaliser les compressions d’effectifs nécessaires par la voie de l’érosion normale des effectifs et de programmes d’encouragement à la retraite anticipée. Dans l’éventualité où il faudrait licencier du personnel, l’indemnité versée aux employés concernés devrait correspondre à ce qu’offrent les autres institutions financières dans des circonstances analogues. G. Accès à des emplois de haute qualité D’après les chiffres de l’Association des banquiers canadiens, les banques à charte du Canada employaient 235 000 salariés au 31 juillet 2000, dont 173 300 occupaient des postes à temps plein. Les données de Statistique Canada pour novembre 2002 indiquent que les salariés du secteur des services financiers et de l’assurance touchaient un salaire horaire de 24,86 $, comparativement à une moyenne nationale de 23,47 $ pour l’ensemble des travailleurs salariés20. Les travailleurs rémunérés à l’heure du secteur des services financiers et de l’assurance touchaient 16,45 $ l’heure, soit légèrement moins que la moyenne nationale de 16,61 $. Lorsqu’ils ont comparu devant le Comité, M. Douglas Peters et le professeur Arthur Donner ont affirmé que la fusion de grandes banques entraînerait de lourdes pertes d’emplois qui toucheraient un grand nombre des emplois bien rémunérés du secteur bancaire. À leur avis, les emplois perdus ne seraient pas tous des emplois subalternes, car la nouvelle entité n’aurait besoin que d’un seul des services du contentieux, des ressources humaines, des finances, des affaires fiscales ou de l’économie et d’une seule division et d’un seul bureau du crédit dans chaque région géographique. Certains témoins sont convaincus que la croissance des emplois dans les grandes banques canadiennes pâtit du fait que celles-ci ont du mal à soutenir la concurrence et à répondre aux besoins financiers considérables et complexes de leurs grands clients canadiens. Le professeur James McIntosh a dit au Comité que les contraintes de la réglementation forçaient les Canadiens à importer des services bancaires au lieu d’en exporter, et que les emplois très spécialisés et lucratifs relevant des activités des sièges sociaux se retrouvaient donc à San Francisco et Amsterdam plutôt qu’à Toronto. De ce point de vue, la fusion de grandes banques bénéficiant éventuellement d’une meilleure présence sur la scène mondiale pourrait présenter certains avantages sur le plan de l’emploi. BMO Groupe financier est d’avis que l’expansion des activités à l’étranger accroît les activités au siège social au lieu de les réduire, car « les banques canadiennes ont recours aux fonctions de leur siège social et à leurs fonctions de soutien pour appuyer leurs efforts d’expansion. [...] l’information existante indique que nous allons continuer de faire fortement appel aux effectifs canadiens, et ce, de manière disproportionnée, pour les fonctions de siège social et autres fonctions de soutien de haut niveau. » C’est aussi l’avis de M. Harold MacKay, qui a dit au Comité qu’« un secteur bancaire plus compétitif au niveau international présente de meilleures garanties de la présence d’emplois de siège social de haute qualité au Canada et que le secteur bancaire canadien ne sera pas composé d’une série de succursales se contentant d’administrer des politiques établies par des sociétés basées à l’étranger ». Par ailleurs, l’Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières pense que le développement des affaires internationales des nouvelles entités issues de fusions multipliera les postes de gestion à valeur ajoutée au Canada. Le Comité estime important que les emplois dans le secteur bancaire au Canada soient des emplois de haute qualité. Or, si l’amélioration de la compétitivité internationale qui pourrait résulter de la fusion de grandes banques pourrait susciter la création d’emplois de haute qualité au Canada, rien ne garantit que des emplois de ce genre seront effectivement créés ni, le cas échéant, qu’ils seront situés au Canada, bien que l’article 237 de la Loi sur les banques force les banques canadiennes à établir un siège social au Canada. Il peut être difficile de garantir l’existence d’emplois de haute qualité au Canada, mais nous estimons que les grandes banques doivent faire en sorte de stimuler l’emploi au Canada en général et en particulier après une fusion surtout au niveau des emplois lucratifs. Dans cet esprit, le Comité recommande : RECOMMANDATION 9 Que les parties à un projet de fusion optimisent les activités de siège social et de bureau administratif au Canada et les possibilités d'emplois de haute qualité que celles-ci présentent. CROISSANCE À LONG TERME POUR LE CANADA Les motifs qui poussent des entreprises à envisager une fusion sont multiples. Le fusionnement peut par exemple présenter des possibilités d’économies d’échelle (par la distribution des coûts sur une base plus large) et de gamme (par la réduction des coûts résultant du partage des frais généraux et de la technologie nécessaires à la production de services différents mais connexes). Il peut aussi être vu comme un moyen de mieux se défendre contre un rachat. Il existe bien d’autres raisons d’envisager une fusion, mais la volonté de stimuler l’essor et la prospérité de l’entreprise est courante. En général, ce qui concourt à la prospérité de l’économie sert l’intérêt public au sens large. Or, notre prospérité est de plus liée en partie à notre aptitude à soutenir la concurrence internationale. Dans le contexte de la fusion de grandes banques, il est donc logique de tenter de déterminer si la présence au Canada de très grands établissements bancaires capables de soutenir la concurrence internationale aurait un effet durable sur la croissance économique. L’aptitude de nos grandes banques à soutenir la concurrence internationale, les effets potentiels de la fusion de grandes banques sur la valeur pour les actionnaires et les répercussions éventuelles de la fusion de grandes banques sur la santé du système financier canadien sont examinés ci-dessous. A. Compétitivité à l’échelle internationale Dans l’EIIP, les parties à un projet de fusion doivent préciser en quoi leur fusion contribuera à la compétitivité du secteur des services financiers à l’échelle internationale. Les témoins que le Comité a entendus lui ont présenté des opinions variées sur la question. Certains témoins, notamment les banques, sont d’avis que les grandes banques canadiennes ont déjà réalisé presque toutes les économies d’échelle et de gamme dont il leur est possible de profiter sur le marché intérieur. On peut alors se demander pourquoi de grandes banques chercheraient à fusionner. Des témoins, qui représentaient surtout des grandes banques, ont affirmé que la taille d’un établissement, de l’ordre de celle que l’on atteindrait par la fusion de grandes banques canadiennes, est un facteur indispensable de la compétitivité internationale des banques canadiennes. La Banque Scotia, convaincue que les banques peuvent prendre de l’expansion sur les marchés internationaux même en l’absence de fusion, « mais pas autant, ni aussi rapidement », a néanmoins dit aussi au Comité qu’une fusion « est envisagée pour une seule et unique raison [...] à savoir l’expansion et la diversification des activités à l’étranger ». La Banque TD pense que « [l]e secteur des services financiers est en train de se consolider au niveau mondial. Nous craignons que, si nous n’atteignons pas la taille nécessaire pour faire des acquisitions plus importantes aux États-Unis, nous ne pourrons pas jouer un rôle important sur le marché en dehors de nos frontières. » Le professeur Jean Roy nous a dit que, compte tenu de la taille de notre économie, le Canada était sous-représenté parmi les 51 premières banques du monde, mais que, si nos banques passaient de 5 à 3 par la voie de fusions, nous grimperions au huitième rang dans le monde pour ce qui est de l’avoir propre des banques en pourcentage du produit intérieur brut. Certaines personnes ont fait valoir que le fait que des banques canadiennes soient actives sur le marché mondial serait avantageux pour les entreprises canadiennes qui opèrent à l’étranger, stimulerait la croissance de l’emploi au Canada et présenterait des avantages pour les particuliers et les entreprises du Canada. Par exemple, le Groupe financier Banque Royale a indiqué que des industries compétitives dans le monde génèrent « le capital et les emplois qui soutiennent de manière durable la vitalité de l’économie; [...] des revenus et des pensions appréciables pour les Canadiens; et [...] un surcroît de recettes fiscales. On a absolument besoin de sociétés d’envergure internationale dont le siège social est au Canada pour maintenir un niveau d’investissement et d’innovation propre à retenir au Canada les jeunes cerveaux et susciter le degré de création d’emplois dont tout pays a besoin. » M. Harold MacKay a dit au Comité que des banques d’envergure internationale permettraient éventuellement de faire bénéficier les Canadiens du produit d’une « plus grande efficacité sous la forme de meilleurs prix, de nouveaux produits et d’une amélioration des techniques de prestation des services [...]. » Pour sa part, la Banque nationale du Canada n’est pas convaincue que la taille est garante de compétitivité internationale et estime que « la fusion de grandes banques canadiennes ne garantit pas en soi la compétitivité du secteur bancaire canadien au niveau international et encore moins le succès des opérations internationales des banques canadiennes. D’un autre côté, il est clair qu’une banque plus importante disposant d’un capital plus considérable sera mieux en mesure de se développer au-delà de nos frontières et ainsi d’atteindre la masse critique que la présence sur ces marchés exige. » D’autres témoins pensent que la compétitivité n’est pas affaire de taille. Certains ont signalé par exemple que rien dans le cadre législatif, réglementaire ou stratégique actuel n’empêche les banques canadiennes de s’associer sans fusion ni acquisition pour se tailler une place sur les marchés internationaux. Selon le Conseil du régime de retraite des enseignantes et enseignants de l’Ontario, pour leurs opérations internationales, les banques pourraient concentrer des investissements limités « à une catégorie d’opérations ou à une région géographique où elles jouissent d’un avantage concurrentiel » ou combiner « leurs activités à l’étranger. Au lieu d’exploiter chacune des succursales partout dans le monde pour offrir des devises et du crédit, ces fonctions pourraient être assurées en coentreprise, ce qui libérerait des ressources au profit de la commercialisation auprès de la clientèle et des services d’appui. Si nos banques pensent qu’elles sont trop petites individuellement pour participer à de grands syndicats de prêt, elles pourraient peut-être combiner leurs forces sur les marchés étrangers. » Par ailleurs, certains témoins craignent que la banque résultant d’une fusion ne se concentre trop sur ses activités internationales au détriment du marché canadien. Le Parti action canadienne pense inévitable que les banques issues d’une fusion multiplient leurs opérations à l’étranger au détriment des priorités canadiennes et que leurs prêts à l’étranger financeront l’emploi, la croissance et le développement à l’étranger au lieu d’ici, ce qui devrait pourtant être leur priorité du fait des sommes qui leur sont confiées. La Fédération canadienne des municipalités a exprimé des vues analogues lorsqu’elle a dit au Comité qu’en mettant l’accent sur la compétitivité internationale « on risque de négliger les services financiers et la concurrence au niveau intérieur. Or, une diminution de la concurrence sur le marché canadien des services financiers entraînera vraisemblablement une réduction des services, une augmentation des coûts des services et la fermeture de succursales bancaires. » Certains craignent aussi des pertes financières. Le Congrès du travail du Canada a dit par exemple au Comité qu’il est « loin d’être certain que de telles sorties de capitaux soient dans l’intérêt public. Comme on le note dans le récent rapport [du Fonds monétaire international] sur le Canada, les fortes pertes sur prêts enregistrées dernièrement par les banques canadiennes sont imputables presque en totalité à des prêts consentis aux États-Unis. Ce sont les opérations étrangères et non les opérations canadiennes qui sont responsables des maigres profits des banques cette année. » De plus, l’organisation Les femmes chefs d’entreprise du Canada a dit au Comité que, dans l’éventualité de la fusion de grandes banques, le gouvernement fédéral devrait prendre des mesures pour faire en sorte que celles-ci ne délaissent pas le marché canadien. À leur avis, il faudrait pour cela « fixer des objectifs de crédit aux PME et en surveiller le respect. Il faudrait aussi prévoir des critères d’ordre géographique relativement au crédit consenti dans les collectivités rurales. » Le professeur Jean Roy a bien fait ressortir le type d’analyse coûts-avantages sur lequel repose implicitement ou explicitement pratiquement toute prise de décisions, y compris les décisions concernant la fusion de grandes entreprises et la compétitivité internationale : « La question de la fusion des grandes banques canadiennes peut être posée dans les termes suivants: les bénéfices potentiels de l’expansion internationale accrue liée à une ou des fusions de banques excéderaient-ils les coûts possibles liés aux impacts sur le marché national? » Le Comité est conscient des divergences de vues qui existent sur la question de savoir si les fusions de banques sont nécessaires pour améliorer la compétitivité au niveau international et s’il est même souhaitable de le faire, s’il en résulterait une baisse de service sur le marché intérieur et si les pertes financières deviendraient plus importantes. À notre avis, il n’est possible de faire un bilan valable des avantages et des inconvénients des fusions de banques que dans le contexte d’un projet de fusion donné et par la voie de l’étude de l’incidence sur l’intérêt public qui y serait associée. Nous croyons néanmoins que le marché intérieur ne doit pas être exposé à un risque plus grand du fait d’une concentration accrue de nos grandes banques sur leurs activités internationales. En conséquence, le Comité recommande : RECOMMANDATION 10 Que, dans le plan d’entreprise qu’elles doivent soumettre pour les fins de l’évaluation de l’incidence sur l’intérêt public, les parties à un projet de fusion précisent en quoi la fusion aurait des retombées avantageuses sur le marché canadien et améliorerait leur compétitivité internationale. B. Valeur pour les actionnaires Certains des témoins qui ont comparu devant le Comité se sont prononcés pour la fusion de grandes banques parce qu’ils sont convaincus que les nombreux Canadiens qui détiennent des actions de banques en profiteraient. Le professeur James McIntosh a dit au Comité que « [l]es deux principaux types d’institutions actionnaires des banques sont les fonds mutuels et les régimes de pensions, lesquels concernent une forte proportion de la population canadienne. » La Banque Scotia a dit au Comité que « des banques fortes au niveau international seront une source de richesse pour les Canadiens du fait que la moitié des travailleurs canadiens possèdent des actions des banques canadiennes, directement ou indirectement. » L’Association des consommateurs du Canada avait à ce sujet un point de vue différent. Elle a dit au Comité que la plupart des fusions échouent et finissent par coûter très cher aux actionnaires. Les observations de l’Association ne portaient pas expressément sur le secteur des services financiers ou sur le Canada, mais pour elle, « la plupart des fusions échouent sur le marché [...] Il arrive que ce soit l’agile et le rapide qui gagne la course de la concurrence et pas nécessairement le plus gros. La fusion de deux cultures d’entreprise aboutit parfois à un Tyrannosaure de mauvais poil. » Mis à part la valeur pour les actionnaires, il y a la question de la création de richesse en général. La Banque Canadienne Impériale de Commerce a fait valoir au Comité l’importance d’un secteur des services financiers solide pour les autres secteurs d’activité à valeur ajoutée comme le droit, l’informatique, la comptabilité, la consultation en gestion, la publicité, la technologie, les études de marché et les nouveaux médias. Elle estime que le fait d’encourager un secteur des services financiers compétitif au niveau international dirigé par des établissements canadiens solides est bon pour la création de richesse au Canada. Le Comité a obtenu relativement peu d’informations sur la question de la valeur pour les actionnaires. Il est cependant conscient du fait que les fusions ne donnent pas toujours des résultats immédiats et peuvent exiger une période de transition et que beaucoup de Canadiens possèdent, directement ou indirectement, des actions des grandes banques. L’amélioration de la valeur pour les actionnaires est dans l’intérêt des actionnaires, mais aussi dans l’intérêt public. Nous préférons être optimistes et nous sommes convaincus que toute fusion de grandes banques canadiennes s’accompagnerait des mesures voulues sur le plan de la culture d’entreprise, des ressources humaines et d’autres plans pour en maximiser les chances de succès. C. La santé du secteur des services financiers Sur le plan de l’intérêt public, beaucoup de Canadiens considèrent important de savoir si la fusion de grandes banques va contribuer à renforcer le système financier canadien ou lui nuire. Des vues très diverses ont été présentées au Comité à ce sujet. M. Douglas Peters et le professeur Arthur Donner sont d’avis que la faillite d’une banque issue d’une fusion pourrait avoir de graves répercussions sur notre système financier, et qu’une banque qui devient trop importante pour qu’on en admette la faillite exigerait un resserrement de la réglementation. À leur avis, « si l’on avait deux très grosses banques [...] elles seraient effectivement trop grosses pour qu’on en tolère la faillite. [...] Si l’on considère la situation du point de vue de la réglementation, il importe de se demander quel type de réglementation deviendrait alors nécessaire pour composer avec ce type d’institution financière, et la réponse est une réglementation bien plus exigeante, bien plus détaillée et bien plus intrusive que les banques l’imaginent. » Dans la même veine, l’Association des consommateurs du Canada est d’avis que les banques sont en train de transférer les responsabilités ou le risque, des épaules des actionnaires à celles des contribuables, ce qui n’est pas nécessairement une bonne chose selon elle. Pour sa part, la Banque Canadienne Impériale de Commerce voit les choses différemment. Pour elle, la réglementation est déjà suffisamment stricte pour parer au risque que les banques éprouvent de graves difficultés financières. Enfin, pour de nombreux Canadiens, la santé du système financier exige que celui-ci soit contrôlé par des intérêts canadiens et, par voie de conséquence, qu’on y limite la participation étrangère. À l’heure actuelle, les grandes banques canadiennes ne peuvent pas être contrôlées par des intérêts étrangers puisque la Loi sur les banques plafonne à 20 % le pourcentage des actions donnant droit de vote d’une grande banque pouvant être détenu par un actionnaire, canadien ou étranger, proportion qui passe à 30 % dans le cas des actions sans droit de vote, et interdit par ailleurs l’exercice d’un contrôle de fait par un groupe d’actionnaires. Il reste que certains témoins pensent qu’il pourrait être salutaire d’encourager une plus grande concurrence de la part des banques étrangères pour contrebalancer la puissance commerciale des cinq grandes banques du Canada. Le groupe Les femmes chefs d’entreprise du Canada estime que le mouvement de fusion ou de consolidation des banques canadiennes appelle un assouplissement des obstacles à l’entrée des banques étrangères ou d’autres établissements financiers sur le marché de manière à promouvoir une multiplicité de choix. Le Comité note qu’il est sans doute encore trop tôt pour cerner le plein effet des modifications apportées récemment à la Loi sur les banques, mais que l’abaissement des obstacles réglementaires à l’entrée de succursales de banques étrangères dans le secteur des services financiers aurait probablement pour effet d’accroître la concurrence étrangère. ATB Financial a dit au Comité qu’on ne verra sans doute pas vraiment de concurrence de la part des institutions étrangères en l’absence d’un assouplissement des restrictions quant à la propriété. « Il serait peut-être politiquement difficile de faire accepter la vente d’une des grandes banques à une banque étrangère, mais si de grandes banques étrangères se portaient acquéreur d’une part importante du réseau de succursales d’une banque donnée, il serait alors possible de maintenir le niveau de concurrence actuel, voire de l’accroître. » Dans un document de travail préparé pour le Groupe de travail sur l’avenir du secteur des services financiers canadien, on notait les questions de réglementation et de normes prudentielles que soulève l’établissement de succursales de banques étrangères et l’on indiquait que « [l]e Canada ne fait pas bande à part en imposant des règles prudentielles plus strictes aux banques étrangères qui veulent recueillir des dépôts sur le marché de détail dans notre pays21 ». La Banque Canadienne Impériale de Commerce a dit au Comité : « L’histoire montre que les banques étrangères s’intéressent aux marchés étrangers quand leur bilan montre un sous-endettement, mais retirent rapidement leur portefeuille de prêts quand l’économie canadienne se porte mal. » L’expérience passée et actuelle indique que les banques étrangères ne sont pas particulièrement intéressées à s’établir sur le marché canadien, sauf peut-être dans certains créneaux précis. ING Direct, par exemple, représente une faible proportion des dépôts de particuliers en dépit du fait que cette banque offre un taux d’intérêt relativement élevé sur les comptes d’épargne. En outre, le Centre pour la défense de l’intérêt public craint lui aussi que le dessaisissement de services bancaires centraux ou de succursales au profit d’autres entités comme des institutions étrangères ou des institutions n’acceptant pas de dépôts ne compromette l’efficacité de la réglementation sur l’accès aux services censée protéger les clients vulnérables puisqu’elle ne s’appliquera pas à ces institutions. À l’instar de nombreux témoins et, d’ailleurs, beaucoup de Canadiens le Comité a confiance dans la santé du système financier canadien et dans le contrôle canadien de ce système. Nous sommes persuadés que le BSIF saura protéger la santé du système, en temps normal et dans l’éventualité d’un projet de fusion de grandes banques. Nous pensons aussi que le système canadien doit appartenir essentiellement à des Canadiens, mais que les banques étrangères peuvent néanmoins contribuer à établir un niveau de concurrence qui garantira l’offre de services de qualité à des prix raisonnables. Le secteur des services financiers est en constante évolution. Il importe donc de procéder à des examens réguliers des cadres législatif, réglementaire et stratégique (abstraction faite de l’examen résultant de l’article 21 de la Loi sur les banques) pour veiller à ce que la concurrence dans le secteur des services financiers et le rôle des banques étrangères dans ce secteur répondent aux attentes. En conséquence, le Comité recommande : RECOMMANDATION 11 Que le gouvernement fédéral procède à un examen permanent des cadres législatif, réglementaire et stratégique du secteur des services financiers pour veiller à ce que les obstacles à l’entrée de nouvelles institutions et à l’expansion des institutions établies soient réduits ou éliminés, que les règles relatives à la propriété qui empêchent la prise de contrôle des institutions par des intérêts étrangers soient maintenues et que la concurrence dans le secteur soit suffisante pour continuer d’offrir aux particuliers et aux entreprises du Canada des services de qualité à bon prix. LE PROCESSUS D’EXAMEN DES PROJETS DE FUSION DE GRANDES BANQUES Comme on l’a dit précédemment, les Lignes directrices relatives à l’examen des projets de fusion portent que le Bureau de la concurrence, le Bureau du surintendant des institutions financières, le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et le Comité permanent des finances de la Chambre des communes doivent examiner tout projet de fusion de grandes banques canadiennes du point de vue de son incidence sur la concurrence, du point de vue de la réglementation prudentielle et du point de vue de l’intérêt public. On trouvera ci-dessous un aperçu des éléments sur lesquels portent ces examens et du rôle du ministre des Finances. A. Les rôles du Bureau de la concurrence et du Bureau du surintendant des institutions financières Le Bureau de la concurrence a pour mission de déterminer les effets des projets de fusion sur la concurrence du marché. Son étude comporte trois étapes : une étape d’examen; une étape de décision et, au besoin, une étape de mesures correctives. Même si le Bureau n’est pas habilité à approuver et à rejeter les fusions, il peut négocier des mesures correctives lorsqu’un fusionnement envisagé empêche ou diminue sensiblement la concurrence ou risque d’avoir cet effet. Le mécanisme que le Bureau utilise pour étudier les fusions de grandes banques ressemble à celui qu’il applique dans d’autres secteurs. Ses Lignes directrices pour l’application de la Loi : Fusionnements de banques affirment que l’objectif du processus d’examen est « de préserver et de favoriser la concurrence dans l’économie canadienne, afin de fournir aux consommateurs un large éventail de produits de grande qualité à des prix concurrentiels ». Pour cela, le Bureau utilise les renseignements que lui fournissent les demandeurs et consulte les concurrents, les clients et les experts du secteur. Pour les besoins de son examen, il se demande quel serait le niveau de concurrence susceptible d’apparaître dans un délai de deux ans. Pour déterminer les effets d’une fusion envisagée sur la concurrence, le Bureau examine le marché sous l’angle géographique et sous l’angle des produits. Les banques fournissent toute une série de produits (dépôts, prêts, hypothèques, cartes de crédit, services de courtage et autres) à différents types de clients (particuliers, petites et moyennes entreprises et grandes sociétés) qu’elles assurent par divers moyens (succursales locales et Internet, par exemple). De plus, selon le client, le type de produit et le moyen de prestation, les marchés peuvent être locaux, régionaux ou nationaux. Étant donné que la portée nationale et la diversité des produits offerts par les banques rendent encore plus complexe l’analyse des effets d’un projet de fusion sur la concurrence, le Bureau doit d’abord définir, puis mener, des analyses distinctes pour chaque marché. Il examine également si les gains en efficience découlant d’une fusion ont des chances de compenser les effets négatifs d’une concurrence réduite. Lorsqu’il analyse les effets potentiels d’une fusion, le Bureau prend en compte les entraves à l’accès, comme la fidélité envers les succursales, les contraintes réglementaires, les économies d’échelle et de gamme, les avantages sur le plan des coûts et les coûts irrécupérables, ainsi que la réaction des concurrents existants à la fusion comme des changements au niveau des prix ou des parts de marché. À l’étape de la décision, le Bureau fait connaître son avis sur les effets du projet de fusion dans une lettre adressée au ministre des Finances et aux candidats à la fusion. Tout en respectant le caractère confidentiel de certains renseignements sensibles sur le plan commercial, le Ministre publie la lettre, laquelle peut être utilisée par les comités parlementaires lors de leur évaluation de l’intérêt public, si elle est reçue à l’intérieur du délai de cinq mois prévu par les Lignes directrices relatives à l’examen des projets de fusion. Si le Ministre estime que des mesures correctives sont nécessaires, le Bureau négocie à ce sujet avec les parties, à l’étape des mesures correctives, et recommande des solutions aux problèmes anticoncurrentiels. Quelques témoins ont commenté le rôle du Bureau dans l’examen des projets de fusion de grandes banques. La plupart se sont dits favorables au Bureau et au rôle qu’il joue dans le processus, mais le Parti action canadienne estime qu’il est « probablement la plus inutile des institutions gouvernementales. C’est lui qui a permis à Chapters d’acheter Coles et Smithbooks, ce qui a entraîné la disparition de l’industrie canadienne de l’édition de livres. C’est lui qui a permis à Air Canada d’acheter les lignes aériennes Canadien International et, lorsque par suite de cette fusion, Air Canada s’est retrouvé avec une part de marché trop importante, il n’a rien trouvé de mieux que d’autoriser la concurrence étrangère ». Le Centre pour la défense de l’intérêt public trouve que les Lignes directrices pour l’application de la Loi du Bureau manquent de cohérence et ne garantissent pas aux consommateurs que l’intérêt public sera bien protégé. Les avis divergent toutefois. La Banque nationale du Canada, par exemple, a déclaré : « le Bureau de la concurrence est le principal protagoniste de cet aspect de l’examen du projet de fusion, et c’est bien ainsi ». Comme la plupart des témoins, le Comité est d’avis que le Bureau de la concurrence joue un rôle utile dans le processus d’examen des fusions de grandes banques et qu’il est l’organisme approprié pour évaluer les aspects concurrentiels de tout projet de ce type. Toutefois, nous avons des réserves en ce qui concerne l’échéancier. Le Bureau de la concurrence estime avoir besoin de cinq mois pour mener son enquête, à partir du moment où il reçoit une demande complète, avec la documentation à l’appui de la part des candidats à la fusion22. Or, l’utilisation de toute la période de cinq mois signifierait probablement que la lettre envoyée par le Bureau au ministre des Finances ne serait pas à la disposition des comités parlementaires et de leurs témoins pendant l’évaluation de l’intérêt public. Le Comité estime avoir besoin de tous les renseignements utiles y compris la lettre émanant du Bureau de la concurrence au moment où il commence ses audiences sur l’intérêt public. La lettre du Bureau devrait constituer un élément important de l’évaluation, en particulier si elle contient des commentaires sur des questions d’intérêt public, comme le dessaisissement de succursales. Par conséquent, nous exhortons les candidats aux fusions à soumettre tous les documents nécessaires dès que possible et, dans l’idéal, dès le moment où ils font leur demande. Le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) est chargé au premier chef de réglementer et de surveiller toutes les institutions financières fédérales. Dans le cadre de l’examen des projets de fusion des grandes banques canadiennes, le BSIF évalue les fusions envisagées du point de vue de la prudence, c’est-à-dire en tenant compte de l’incidence de la fusion sur la stabilité et la bonne santé financières des demandeurs et sur le système financier canadien. En plus d’évaluer l’incidence du projet de fusion sur la stabilité du système financier canadien, le BSIF cerne et étudie toute question pouvant porter préjudice à l’entité issue de la fusion, si la demande de fusion était approuvée. L’évaluation comprend un examen des plans de mise en œuvre et d’intégration des demandeurs, et cherche aussi à déterminer si ces plans sont complets et raisonnables et à déceler les problèmes éventuels. Le BSIF détermine aussi le caractère raisonnable des projections financières, notamment le plan d’affaires et les hypothèses de profit, ainsi que l’effet de la fusion envisagée sur la situation du capital de la nouvelle entité. Enfin, le BSIF examine aussi les changements que pourraient subir les profils de risque et la capacité des systèmes de gestion du risque des demandeurs, particulièrement les mutations du risque suite à la fusion et la capacité de l’entité issue de la fusion de mesurer, de surveiller et de gérer ces risques23. Une fois qu’il a terminé son analyse de la fusion envisagée, le BSIF communique au ministre des Finances et aux parties au projet de fusion son point de vue sur les aspects prudentiels du projet. Le Ministre publie ensuite la lettre, en tenant dûment compte de la confidentialité de l’information qui peut influer sur la stabilité du système financier canadien. Les comités parlementaires peuvent consulter aussi cette lettre lors de leur évaluation des questions d’intérêt public que présente la fusion envisagée, pourvu qu’ils soient à même de le faire dans les délais prévus par les Lignes directrices relatives à l’examen des projets de fusion. Le Comité a fait part précédemment de sa crainte de ne pas disposer de la lettre du Bureau de la concurrence pour effectuer son évaluation de l’intérêt public, en raison de la limite de cinq mois imposée. Or, il entretient les mêmes préoccupations en ce qui concerne la lettre du Bureau du surintendant des institutions financières, et nous réitérons notre volonté de recevoir dès que possible toute l’information nécessaire afin que l’examen puisse se faire dans des délais permettant aux comités parlementaires de se servir des analyses effectuées par d’autres intervenants participant à l’examen des projets de fusion de grandes banques. B. Le rôle des comités parlementaires D’après les Lignes directrices relatives à l’examen des projets de fusion, le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et le Comité permanent des finances de la Chambre des communes seront priés de tenir des audiences publiques sur les questions générales d’intérêt public que soulève le projet de fusion, en même temps que le Bureau de la concurrence et le BSIF examineront ce projet. De plus, les Lignes directrices indiquent que les comités parlementaires pourront consulter les rapports du Bureau de la concurrence et du BSIF, une fois que le ministre des Finances les aura publiés, en plus de l’Évaluation de l’incidence sur l’intérêt public (EIIP) que les demandeurs de fusion sont tenus de remplir. Dans son rapport final, le Groupe de travail sur l’avenir du secteur des services financiers canadien n’a pas recommandé que les comités parlementaires jouent un rôle dans le processus d’examen des projets de fusion des grandes banques, mais il a préconisé qu’un « délai raisonnable [soit] prévu pour permettre au public de communiquer par écrit au ministre des Finances ses commentaires sur l’Évaluation [de l’incidence sur l’intérêt public]. Ces commentaires devraient eux aussi pouvoir être consultés par le public de façon ouverte et transparente24 ». Néanmoins, les Lignes directrices relatives à l’examen des projets de fusion du ministère des Finances accordent un rôle précis à deux comités parlementaires en particulier soit le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et le Comité permanent des finances de la Chambre des communes dans le processus d’examen des projets de fusion, puisqu’ils sont appelés à évaluer les questions générales d’intérêt public qui découlent d’une éventuelle fusion. Les témoins avaient des vues très diverses quant au rôle que les comités parlementaires devraient jouer dans l’examen des projets de fusion de grandes banques. Certains ont suggéré que les comités parlementaires se retirent du processus. La Banque nationale du Canada, par exemple, a proposé que l’examen soit réalisé exclusivement par le BSIF et le Bureau de la concurrence, en tenant compte uniquement des questions de prudence et de concurrence, bien qu’elle accepte que ces deux organismes tiennent des audiences publiques et que le ministre des Finances donne des lignes directrices au Bureau de la concurrence. En outre, le Conseil canadien du commerce de détail a suggéré que l’on confie au Bureau de la concurrence l’évaluation de l’intérêt public. À son avis, les dernières modifications législatives autorisent le Bureau à partager des renseignements avec le ministère des Finances sous réserve de certaines conditions, ce qui devrait permettre aux deux organismes d’intégrer l’information descendante et ascendante dans une seule perspective cohérente et d’élaborer des recommandations qui tiennent compte des deux ensembles de préoccupations. Selon d’autres témoins, il est contre-indiqué de retirer les comités parlementaires du processus. Selon le Parti action canadienne, un tel changement représenterait une abdication de devoirs et de responsabilités sans précédent. En outre, de l’avis de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, il est clair que les banques considèrent que les fusions à grande échelle sont dans leur intérêt, mais il incombe au Comité permanent des finances de déterminer ce qui est bon pour le Canada. L’honorable Henry Jackman a déclaré que les fusions de banques constituaient principalement un enjeu politique et que le gouvernement ne pouvait pas se soustraire à ses responsabilités. De plus, un grand nombre de témoins se sont exprimés en faveur d’un examen de l’intérêt public, sans préciser la tribune où cet examen doit s’effectuer. Selon le Congrès du travail du Canada, étant donné l’extrême concentration de pouvoir économique entre les mains des grandes banques canadiennes, toute question d’accroissement de la concentration doit absolument faire l’objet d’un examen élargi, ouvert et transparent des questions d’intérêt public. En effet, le Congrès a fait valoir que les examens qu’effectuent le Bureau de la concurrence et le BSIF ne couvrent pas tous les aspects de l’intérêt public et il cite à titre d’exemples les questions d’emploi et les questions générales touchant la concentration exagérée de pouvoir économique. De plus, Option Consommateurs a affirmé au Comité qu’il est clair que l’examen de projets de fusion à une telle échelle ne saurait être confié aux seuls organismes spécialisés comme le Bureau de la concurrence ou le Bureau du surintendant des institutions financières : « De nombreuses questions essentielles échappent au mandat de ces bureaux, lesquels ne peuvent non plus tenir de grandes consultations publiques. L’intérêt public canadien est beaucoup plus vaste que les champs de compétence de ces organismes ». Le Comité est en faveur des examens que réalisent le Bureau de la concurrence et le Bureau du surintendant des institutions financières sur les questions de concurrence et de prudence respectivement que soulève un projet de fusion de grandes banques. Cependant, comme bon nombre de nos témoins, nous estimons que ces examens ne couvrent pas toute la gamme des considérations d’intérêt public. Soulignons à titre d’exemple une question importante tant pour le secteur bancaire que pour les particuliers et les entreprises du Canada mais qui échappe aux mandats du Bureau de la concurrence et du BSIF soit la nécessité d’un secteur de services financiers concurrentiel sur la scène internationale. C. Le rôle du ministre des Finances Une fois qu’il a reçu les lettres du Bureau de la concurrence et du Bureau du surintendant des institutions financières, ainsi que les rapports des comités parlementaires, le ministre des Finances doit décider s’il est possible de régler les questions que soulève le projet sur le plan de la concurrence, de la prudence et de l’intérêt public. S’il est impossible de les régler, la demande de fusion est rejetée. Mais s’il est possible d’apporter des solutions, le Bureau de la concurrence, le BSIF et le ministère des Finances négocieront des mesures correctrices sur ces trois plans, et le Ministre approuvera l’opération, sous réserve de conditions reflétant ces mesures. Plusieurs témoins ont parlé du rôle que joue le ministre des Finances dans le processus d’examen des projets de fusion de grandes banques. Si certains notamment les grandes banques sont d’avis que le Ministre devrait signaler clairement si le gouvernement fédéral est susceptible d’approuver les demandes, d’autres s’intéressent davantage au rôle particulier du Ministre dans le processus. M. Harold MacKay a souligné au Comité le rôle clé que joue le ministre des Finances, puisqu’il est « finalement, le gardien de l’intérêt public; il incombe au Ministre, chargé d’atteindre un juste équilibre entre les coûts et les avantages, d’évaluer les risques et les possibilités d’un projet particulier ainsi que les attentes du pays à l’égard du secteur financier en général et des banques en particulier; le Ministre doit en venir à une décision après avoir mis tous les éléments dans la balance. Il n’y a pas de formule magique pour en venir à cette décision, mais il faut laisser place à la discrétion ministérielle afin que toute fusion soit à l’avantage du Canada et ne compromette pas l’intérêt public; il faut faire en sorte que le Ministre soit bien informé quand il décide d’approuver ou de rejeter une fusion ou qu’il conçoit les conditions d’une approbation qui respectent l’intérêt public ». Le Comité sait fort bien que certaines des banques qui ont comparu devant lui souhaitaient obtenir des éclaircissements sur un certain nombre de questions, notamment sur le moment le plus opportun pour soumettre un projet de fusion au gouvernement fédéral. Nous nous rendons compte que le secteur des services financiers apprécierait une déclaration faite par le ministre des Finances au nom du gouvernement relativement au calendrier potentiel des fusions de grandes banques. D. Conclusions au sujet du processus et de l’échéancier Le Comité appuie l’actuel processus d’examen de projets de fusion des grandes banques qui exige que le Bureau de la concurrence évalue les questions de concurrence, que le Bureau du surintendant des institutions financières examine les questions prudentielles et que le Comité permanent des finances de la Chambre des communes étudie les considérations d’intérêt public. Comme nous l’avons dit précédemment, nous ne formulons pas de commentaires concernant le rôle du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, estimant que c’est à lui qu’il revient de déterminer la nature de sa participation à l’évaluation de l’intérêt public dans le cadre du processus susmentionné. Bien que, selon certains témoins, les examens du Bureau de la concurrence et du BSIF tiennent compte de toutes les considérations d’intérêt public, nous pensons, comme certains autres témoins, qu’il existe des questions d’intérêt public qui échappent à l’examen de ces deux organismes. Il est clair qu’il faut une tribune pour examiner l’intérêt public, et les audiences publiques que tient un comité parlementaire constituent la meilleure formule. Ce processus fournit la transparence nécessaire à un examen public de cette nature. Il offre par ailleurs aux promoteurs d’un projet de fusion une tribune publique où exposer leurs arguments. En outre, le Comité est d’avis que la décision finale au sujet d’une demande de fusion revient au ministre des Finances, et que celui-ci doit continuer de s’appuyer sur les analyses du Bureau de la concurrence, du BSIF et des comités parlementaires pour rendre sa décision. En dernier lieu, le Comité estime qu’il faut un échéancier afin que l’examen d’un projet de fusion de grandes banques soit terminé en temps utile. Certains témoins ont recommandé un délai plus court comptant une centaine de jours, tandis que d’autres ont suggéré d’ajouter deux semaines aux cinq mois actuels, mais nous estimons qu’un échéancier de cinq mois convient tout à fait. Nous tenons compte toutefois de l’argument formulé par M. Harold MacKay à l’effet qu’« un projet de fusion doit faire l’objet d’un processus efficace et ciblé; pour l’instant, les partisans et les opposants d’un projet doivent exposer leurs vues sur cinq tribunes, soit devant le Bureau de la concurrence, le BSIF, le Comité permanent des finances, le Comité sénatorial des banques et du commerce et le ministre des Finances ». Or, d’après M. Harold MacKay, « ce processus est beaucoup trop lourd et les intervenants sont trop nombreux, ce qui fait subir à notre système financier et aux marchés financiers des retards et une incertitude inutiles. Il faudrait revoir l’idée d’un processus prévoyant le prompt affichage, sur un site Web bien annoncé, des arguments des banques, des autres joueurs, des entreprises et des organisations, afin de nourrir un vif débat auquel tous les Canadiens pourraient avoir accès et participer pleinement ». M. MacKay a aussi suggéré l’idée d’un petit groupe de travail chargé de faire enquête sur un aspect donné d’un projet de fusion dans une région particulière, si la fusion envisagée suscite des préoccupations d’ordre régional. Le Comité, ayant souligné combien il importe que le Bureau de la concurrence et le BSIF terminent rapidement leurs examens afin que leurs lettres au ministre des Finances et aux demandeurs puissent servir aux comités parlementaires, est convaincu que les demandeurs de fusion qui tiennent à ce que le processus se déroule dans les meilleurs délais présenteront tous les documents nécessaires aussi rapidement que possible. Compte tenu du rôle du système bancaire dans l’économie canadienne et de son importance pour les Canadiens et les entreprises du pays, il doit exister un processus d’examen des projets de fusion des grandes banques. Il est essentiel pour l’intérêt public de veiller à ce que le marché soit concurrentiel, de sorte que le Bureau de la concurrence a un rôle crucial à jouer à cet égard. De même, comme il est dans l’intérêt public de veiller à la protection et à la solidité du système financier canadien, le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) a lui aussi un rôle de premier plan à jouer. Enfin, il va de soi qu’il est dans l’intérêt public de sauvegarder l’intérêt public; par conséquent les comités parlementaires qui sont des créations du Parlement et qui sont eux-mêmes représentatifs du public ont une responsabilité fondamentale dans l’examen des projets de fusion des grandes banques. Le ministre des Finances et le secrétaire d’État (Institutions financières internationales) ont demandé au Comité d’examiner les implications des fusions de grandes banques sur l’intérêt public, et ce de quatre points de vue :
Le Comité part du principe que les fusions constituent une stratégie commerciale légitime, puis il examine de quelle manière l’intérêt public peut être préservé dans ce contexte. Maintenant qu’il a formulé les considérations liées à l’intérêt public, il espère que les grandes banques du Canada seront mieux en mesure d’anticiper les exigences des parlementaires chargés d’évaluer les implications d’une proposition précise de fusion du point de vue de cet intérêt. Le Comité est également d’avis qu’il appartient aux candidats à la fusion de démontrer qu’elle serait dans l’intérêt public. En définitive, c’est sur eux que repose le fardeau de la preuve à cet égard. Nous prévoyons que les candidats seront invités à comparaître aux audiences publiques du Comité et qu’ils pourront à ce moment donner des précisions sur les avantages de la fusion proposée et la manière dont l’intérêt public sera sauvegardé. De toute évidence, l’intérêt public est sauvegardé lorsque, par suite d’une fusion de grandes banques, tous les Canadiens et les entreprises canadiennes, peu importe la taille et le secteur d’activité de ces dernières, dans toutes les régions du Canada, ont accès à un éventail comparable de services en déployant des efforts semblables, et ce à un prix comparable ou plus bas et avec une qualité égale ou supérieure. Il y aura des préoccupations quant à l’incidence d’éventuelles fermetures de succursales, en particulier dans les régions rurales et éloignées, sur les Canadiens (notamment les personnes handicapées, âgées ou à faible revenu ainsi que les résidents des régions rurales et éloignées) et sur les entreprises (les petites entreprises et peut-être dans certains secteurs). Il est aussi probable qu’il y ait des préoccupations quant à l’éventail des services et à la possibilité de choisir parmi différents fournisseurs dans toutes les régions du Canada, ainsi que des problèmes touchant la disponibilité des fonds. La perte d’emplois, la disponibilité d’emplois de haute qualité et la localisation des sièges sociaux au Canada ressortent également à l’intérêt public, tout comme la manière dont des banques plus importantes et plus concurrentielles sur la scène internationale peuvent contribuer à la croissance à long terme du pays, à l’accroissement de la valeur pour l’actionnaire et à la vigueur du secteur des services financiers. Au moment de rendre la décision finale concernant une demande de fusion, le ministre des Finances devra concilier toute une panoplie d’intérêts divergents. Le Comité estime que tous les éléments recensés au titre de l’Évaluation de l’incidence sur l’intérêt public ainsi que les autres préoccupations définies dans le présent rapport sont liés à l’intérêt public. Nous croyons qu’au moment d’évaluer une proposition particulière de fusion, l’intérêt public commande d’examiner un éventail complet de questions touchant l’accès ainsi que les retombées sur la croissance du pays à long terme. Dans l’éventualité de l’approbation d’une demande de fusion, le succès sera tributaire d’une transition sans discontinuité pour les clients à titre individuel, les petites et moyennes entreprises, les collectivités, les actionnaires et les banques elles-mêmes. Les mesures correctives et les modalités connexes constituent un outil important que tous peuvent utiliser pour faire en sorte que les perturbations soient réduites au minimum au moment de la transition et que les parties prenantes se retrouvent à tout le moins en aussi bonne position qu’avant la fusion.
|