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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 9 mai 2001

• 1534

[Traduction]

Le président (M. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.

Bonjour. Nous reprenons aujourd'hui notre étude du projet de loi C-5. Nous avons accompli énormément de progrès, mais il reste encore beaucoup à faire.

Nous souhaitons la bienvenue aux groupes qui comparaissent devant nous cet après-midi. Il nous tarde de connaître vos vues sur la question.

Nous désirons également souligner le retour de M. Herron, qui a été absent pendant un bon moment.

Le comité s'enrichit d'un nouveau membre, M. Bigras, qui représente le Parti libéral.

• 1535

Nous allons commencer sans plus tarder. Je vous demanderais d'écourter un peu vos exposés pour que nous puissions avoir le temps de procéder à un échange de vues. Cela permet habituellement aux membres d'obtenir des renseignements qu'ils jugent fort utiles.

J'aimerais souhaiter la bienvenue à un vieil ami et collègue, l'honorable Jack Horner. Je suis content de le revoir. Nous gardons de lui un bon souvenir. Il a joué un rôle efficace d'abord au sein de l'opposition, et ensuite au sein du parti ministériel. Il a également contribué, de façon déterminante, à promouvoir les intérêts des collectivités rurales et l'importance du secteur agricole dans notre économie. Il est non seulement un grand parlementaire, mais également une personne remarquable. Je suis très heureux de vous revoir et nous vous souhaitons la bienvenue.

Je vais, sans plus tarder, céder la parole à M. Turner, qui va parler au nom de la Canadian Cattlemen's Association. Pouvez-vous être bref, s'il vous plaît? La parole est à vous.

M. Jim Turner (coprésident, CCA Environment and Animal Care Committee, Canadian Cattlemen's Association): Merci beaucoup, monsieur le président.

Bonjour, mesdames et messieurs, honorables membres du comité. Nous tenons à vous remercier de nous donner l'occasion d'exposer de nos vues sur le projet de loi concernant les espèces en péril.

La Canadian Cattlemen's Association, la CCA, agit comme organisme national de coordination pour les éleveurs de bovins. Nous en représentons plus de 100 000 à l'échelle nationale. Nous possédons d'importants fonds de terres qui renferment des habitats, de sorte que nous pourrions être grandement touchés par cette mesure législative. Nos activités pourraient également avoir un impact considérable sur les espèces en péril.

Notre exposé, aujourd'hui, est présenté conjointement avec l'Association des éleveurs de bétail du Manitoba. Cela va nous donner un peu plus de latitude, puisque notre temps est limité.

Je préside le comité de l'environnement de la Canadian Cattlemen's Association, et ce, depuis plusieurs années. En fait, monsieur Caccia, j'ai déjà comparu devant vous en 1997, si je ne m'abuse, pour discuter d'autres projets de loi portant sur la question. Nous avons donc pris part de façon active au processus.

Nous exploitons une ferme familiale au nord-ouest de Calgary, dans les contreforts, de même qu'un centre d'orientation et une pourvoirie aux abords du parc national Banff.

Le mémoire sera présenté conjointement par Hugh Lynch-Staunton, de la CCA, et Garth Routledge, de l'Association des éleveurs de bétail du Manitoba.

Hugh.

M. Hugh Lynch-Staunton (membre, Comité de l'environnement, Canadian Cattlemen's Association): Bonjour.

J'exploite une ferme familiale sur des terres à faible rendement situées sur le chaînon frontal des Rocheuses. Nous pratiquons essentiellement le pacage sur des terres privées et publiques où les espèces sauvages abondent. Cette zone est fréquentée par de gros prédateurs.

M. Garth Routledge (président, Association des éleveurs de bétail du Manitoba): Bonjour. Je m'appelle Garth Routledge, et je suis le président de l'Association des éleveurs de bétail du Manitoba. Je fais partie de l'exécutif de la CCA.

Ma famille exploite une entreprise vache-veau de même qu'un parc d'engraissement dans le sud-ouest du Manitoba, une région où l'on pratique essentiellement la polyculture. Nous participons depuis des années à de nombreux programmes de protection de la faune.

M. Jim Turner: Je crois comprendre que le comité a eu l'occasion de jeter un coup d'oeil sur les mémoires que la CCA et l'Association des éleveurs de bétail du Manitoba ont soumis au comité permanent l'an dernier. Notre position est plus ou moins la même, sauf que nous avons exploré plus à fond la question de l'indemnisation.

Vous auriez dû recevoir le document justificatif intitulé «Principes d'une indemnisation équitable dans le cadre du projet de loi sur les espèces en péril», qui a été préparé par M. Glenn Fox, de l'université Guelph.

Pour commencer, nous aimerions vous donner un bref aperçu de l'état du secteur de l'élevage bovin pour aider les membres du comité à comprendre qui nous sommes et ce que nous faisons. Nous parlerons ensuite de certains de nos projets de conservation, et aborderons enfin les changements importants que nous souhaiterions voir apportés au projet de loi sur les espèces en péril.

M. Hugh Lynch-Staunton: Un des graves problèmes que la question des espèces en péril met en évidence est le fait que les milieux urbain et rural ont une conception différente du monde. J'espère que cet exposé contribuera à rapprocher ces vues divergentes. Et ce que j'aimerais faire, très brièvement, c'est vous convaincre que le secteur de l'élevage bovin est un secteur à la fois important et dynamique, non pas seulement dans notre esprit, mais dans le vôtre et dans celui du pays.

• 1540

Nous représentons environ 103 000 éleveurs de bovins. Notre industrie est cyclique. Elle jouit, pour l'instant, d'une certaine prospérité, mais en règle générale, elle est à peine viable. Il est très difficile d'y gagner sa vie.

Le Canada compte environ 169 millions d'acres de terres agricoles. D'après un des membres du personnel, cette superficie est légèrement supérieure à celle de la Saskatchewan. Le tiers environ sert de pâturage, qu'il soit naturel ou non. Cela a donc un impact important sur l'efficacité du projet de loi.

Par ailleurs, l'agriculture et l'élevage bovin représentent depuis toujours une activité à faible rendement. Or, si nous pratiquons cette activité et que nous en tolérons tous les aspects négatifs, c'est probablement parce que nous sommes conscients de l'importance que revêtent les systèmes naturels.

Nous avons un système de valeurs qui, par nature, est très respectueux de l'environnement. Toutefois, nous estimons avoir assumé la plupart des coûts négatifs associés à la protection de la faune, de sorte que nous craignons les initiatives rurales ou celles que lance le gouvernement quand nous nous sentons menacés.

Garth, je vous cède la parole.

M. Garth Routledge: Merci.

Les éleveurs de bovins participent depuis de nombreuses années à des programmes de conservation, et ce, volontairement. Travailler sur la terre fait partie de nos traditions. J'aimerais vous parler de certains de ces programmes.

L'Association des éleveurs de bétail du Manitoba participe de plein gré à des activités d'intendance. Elle collabore avec des organismes comme la Manitoba Habitat Heritage Corporation, qui a mis sur pied un programme visant à modifier les pratiques de pacage et de gestion dans les zones riveraines.

L'Association participe également de façon active au projet d'intendance relatif à la prairie mixte et au programme visant l'amélioration du milieu riverain, mis sur pied par le Manitoba. Ces groupes d'intendance diversifiés ont pour objet de protéger les prairies naturelles et la qualité de l'eau.

Le groupe de lutte contre l'euphorbe ésule cherche à éliminer cette mauvaise herbe par le biais de programmes de collaboration, de recherche et d'innovation. L'euphorbe ésule se répand rapidement le long des réseaux fluviaux, de la Transcanadienne et des lignes de chemin de fer. Elle menace non seulement la production agricole, mais également la biodiversité.

Les éleveurs de bovins participent, à l'échelle nationale, à divers programmes de gestion des habitats riverains, comme par exemple le programme de protection du bétail et du poisson, mis sur pied par l'Alberta. En Colombie-Britannique, le ministère des Pêches et des Océans et la B.C. Cattlemen's Association parrainent un coordonnateur de la gérance qui aide les producteurs à modifier leurs pratiques de gestion dans les zones vertes le long des cours d'eau. L'Ontario est en train de préparer un guide pour aider les éleveurs à choisir les pratiques de gestion qui conviennent le mieux aux zones riveraines.

La CCA, l'Association des éleveurs de bétail du Manitoba et l'OCA participent de façon active à la stratégie de rétablissement de la pie-grièche migratrice de l'est. La CCA fait partie depuis plusieurs années de l'équipe chargée du rétablissement de la chevêche des terriers. Nous faisons également partie du comité mixte sur l'utilisation des terres et des habitats des prairies. Nous comptons participer de façon active au nouveau projet de conservation des oiseaux mis sur pied par les Américains.

Il importe de signaler que les éleveurs de bovins participent à diverses activités de conservation. Notre association participe à des programmes et à des initiatives de planification à l'échelle aussi bien fédérale que provinciale. Certains éleveurs collaborent volontairement, de concert avec des groupes de conservation provinciaux et locaux, à des initiatives qui visent à protéger les espèces en péril et la biodiversité en général.

• 1545

S'il y a un aspect de la contribution des éleveurs de bovins qui demeure sous-estimé, c'est le fait qu'ils partagent sans réserve les ressources de la terre. Les ongulés et les bovins partagent les mêmes pâturages. Divers oiseaux y nichent, en plus de s'y alimenter. Les chevreuils aussi bien que les antilopes vont paître dans nos prairies artificielles et champs de foin. La sauvagine utilise les points d'eau artificiels. Les chevreuils s'installent pour la nuit sur nos terres. Les espèces sauvages se nourrissent des grains entreposés et du fourrage d'hiver. Il est tout à fait naturel pour nous de partager ces ressources avec elles. Nous coexistons de façon pacifique, et ce, depuis plus de cent ans.

Toutefois, nous devons reconnaître que cela entraîne des coûts énormes pour les exploitations agricoles familiales. Par exemple, les dommages causés par la faune ont coûté aux agriculteurs de l'Ontario plus de 40 millions de dollars en 1998, d'après une étude réalisée par l'Ontario Soil and Crop Improvement Association. Si nous transposons cela à l'échelle nationale, il devient évident que les producteurs agricoles consacrent beaucoup de temps et d'argent aux habitats destinés à la faune.

Jim Turner: Nous en arrivons maintenant à la raison principale pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui, c'est-à-dire les changements qui, à notre avis, s'imposent pour faire de ce projet de loi un outil efficace et positif, un outil qui contribuera à assurer une meilleure protection des espèces en péril, et à appuyer aussi les efforts des éleveurs de bétail.

Ces derniers ont participé de façon active, au cours des six dernières années, aux consultations qui ont mené au dépôt du projet de loi. L'impact potentiel de ce projet de loi cause beaucoup de souci aux collectivités rurales. Certaines régions craignent carrément l'impact qu'aura le projet de loi. Il est très difficile de prendre des décisions éclairées dans un climat d'incertitude. Le secteur agricole connaît des moments difficiles. On impose aux gens des décisions très difficiles. Or, ce projet de loi ne devrait pas constituer un fardeau supplémentaire pour les producteurs agricoles.

Cette mesure législative est fort complexe. Nous proposons des changements dans de nombreux domaines. Nous félicitons le ministre Anderson pour certaines des mesures adoptées, comme la reconnaissance de l'importance des activités d'intendance visant la conservation des espèces sauvages et du fait qu'elles devraient bénéficier d'un appui, et l'élimination de la disposition sur les poursuites civiles.

Côté intendance, nous sommes très heureux de constater que le projet de loi prévoit des accords sur la conservation des espèces en péril et des autres espèces, et des accords de financement dans le cas de programmes à frais partagés. On se servira des fonds publics pour aider les producteurs à modifier leurs pratiques de gestion et mieux protéger les espèces.

À notre avis, un appui financier adéquat est également nécessaire pour empêcher que les espèces ne deviennent en péril. Ces ressources doivent s'ajouter à celles qui sont consacrées à la protection des espèces menacées. Un tel appui est nécessaire non seulement à l'échelle de l'administration gouvernementale, mais encore à la base même, c'est-à-dire celui des groupes locaux de conservation, des propriétaires fonciers et des détenteurs de parcelles. Il faudra des ressources et un effort national considérable pour modifier les habitudes de gestion et les attitudes.

M. Hugh Lynch-Staunton: Pour ce qui est du processus d'inscription des espèces sauvages, la science doit manifestement jouer un rôle déterminant à ce chapitre. Le milieu scientifique doit, à cet égard, demeurer objectif. Toutefois, nous estimons qu'il faut évoluer les divers facteurs en cause, pas seulement les données scientifiques. Il est donc très important que le processus aboutisse à des décisions politiques, pour la simple raison que les politiques doivent rendre des comptes. Par exemple, nous avons vu des scientifiques hautement qualifiés se contredire les uns les autres. Les scientifiques semblent être capables de défendre des causes, comme tout le monde. Cela peut vous sembler étrange, mais nous pensons que nous devons, au bout du compte, modérer l'influence des politiques.

Pour ce qui est des interdictions générales, autre sujet de préoccupation, selon les avis juridiques que nous avons reçus, il revient au propriétaire foncier ou à l'exploitant à démontrer qu'il a fait preuve de diligence raisonnable. La seule façon pour eux d'y arriver, c'est par le biais d'un programme d'évaluation environnementale, un programme tellement coûteux que la plupart des éleveurs ne peuvent se le permettre. Que ce soit volontaire ou obligatoire, la tâche est impossible. Un changement s'impose donc à ce niveau.

• 1550

Je propose qu'on ajoute les termes «sciemment» ou «en connaissance de cause» à l'interdiction. Cette modification rassurerait les éleveurs et servirait les intérêts de tous.

M. Garth Routledge: En ce qui a trait aux stratégies de rétablissement, dont il est question au paragraphe 39(1), afin de confirmer aux propriétaires fonciers et aux détenteurs de parcelles que leur participation est vraiment précieuse et reconnue, nous vous proposons de retirer l'expression «dans la mesure du possible». Nous croyons que le ministre doit faire preuve d'une certaine souplesse dans son approche. Toutefois, il a déclaré clairement, d'après nous, son intention d'engager les propriétaires fonciers et les détenteurs de parcelles dans la planification du rétablissement. Le libellé de la loi doit refléter cette intention.

M. Jim Turner: L'indemnisation constitue une de nos principales préoccupations. Le paragraphe 64(1) dispose que le ministre peut, en conformité avec les règlements, indemniser toute personne des pertes subies en raison des conséquences extraordinaires que pourrait avoir l'application des articles 58, 60 ou 61, ou d'un décret d'urgence. Nous louons le gouvernement d'avoir pris la décision de reconnaître le principe de l'indemnisation et d'inclure une disposition habilitante à ce sujet dans le projet de loi C-5. Toutefois, ce principe est essentiel au succès des efforts de protection des espèces en péril qui se trouvent sur des terres privées. À cause de l'importance de l'indemnisation pour les éleveurs, nous demandons que le verbe «peut» soit remplacé par le verbe «doit». Nous préconisons fortement la suppression du terme «extraordinaires». Nous recommandons que toutes les pertes pour renoncement aux utilisations normales prévues et la perte de la valeur marchande consécutive à la mise en application de la loi soient admissibles.

Nous maintenons également que si les programmes d'intendance et d'encouragement à l'intendance sont convenablement soutenus, l'indemnisation ne sera guère nécessaire. Il y a lieu de penser que les restrictions que la LEP risque d'imposer aux éleveurs et aux agriculteurs empêcheront l'utilisation agricole ou toute autre utilisation économique de la terre. Si c'est le cas, les propriétaires vont perdre pratiquement tous les droits associés à leurs intérêts et leur terre n'aura plus aucune valeur. Il s'agit là d'un fardeau trop lourd pour les éleveurs et les propriétaires fonciers. Quarante-cinq sous sur un dollar, comme le propose M. Pearse, acculerait la plupart des éleveurs à la faillite. Nous devons avoir droit à une indemnisation juste et équitable si nous voulons être en mesure de protéger les espèces en péril.

M. Hugh Lynch-Staunton: La question des terres publiques est complexe. Encore une fois, nous voulons vous faire comprendre à quel point ces terres sont importantes pour l'industrie. Elles ont une incidence sur nos activités, dans bien des cas parce qu'elles sont interreliées à celles-ci. Même si les terres publiques, pour la plupart, sont regroupées en bloc, dans le nord, ou qu'elles s'avèrent autrement inutilisables, bon nombre d'entre elles sont morcelées. Les terres publiques et privées sont intercalées. C'est assez complexe. Dans notre cas, une partie de nos terres sont louées. La valeur de ce bail est supérieure à la valeur foncière de notre exploitation.

Par ailleurs, il existe, bien sûr, des conflits de compétence entre les gouvernements fédéral et provinciaux, et nous sommes conscients du fait que cette question doit être réglée. Voici ce que nous aimerions avoir en guise d'indemnisation pour nos droits. Nous possédons peut-être moins de droits à l'égard des terres publiques qu'à l'égard des terres privées, mais il reste que des contrats de bail ont été conclus en bonne et due forme et que ceux-ci doivent être respectés. S'ils ne le sont pas, nous serons confrontés à des problèmes, ce que nous vous demandons de reconnaître.

Le président: Il serait utile que vous puissiez résumer vos observations, parce qu'il y a d'autres groupes qui aimeraient avoir la parole.

• 1555

M. Jim Turner: Nous avons certaines préoccupations au sujet des délits et des peines. Nous trouvons certaines des amendes excessives. Nous voudrions bien que ces amendes correspondent de près à la gravité du délit. Comme je l'ai dit, la plupart des fermes familiales sont incorporées, et je pense qu'il y a une bonne différence entre l'imposition d'une forte amende à Daishowa et à une ferme familiale. Nous sommes, ici, préoccupés par la partie de la loi qui porte sur la diligence raisonnable, à l'article 100.

Pour résumer les principaux éléments de notre présentation, je pense qu'il faudrait apporter les changements suivants à la loi. Il faut la pleine indemnisation des pertes sur l'espérance d'utilité normale et de la perte de valeur marchande: c'est essentiel pour obtenir la coopération des propriétaires fonciers, et nous devons être sûrs de pouvoir encore assurer la subsistance de nos familles sur ces terres. Le deuxième grand facteur est qu'il nous faut ajouter «sciemment et en connaissance de cause» à l'interdiction de tuer, de blesser et de harceler, de capturer ou de prendre les membres qui figurent sur la liste. Troisièmement, il nous faut un processus de notification sur les espèces avant la mise en accusation potentielle. Quatrièmement, il faudrait réduire le montant des amendes de manière à ce qu'elles correspondent à la gravité du délit.

Pour terminer, nous apprécions grandement cette occasion qui nous est donnée de faire une présentation devant votre comité au nom de quelque 100 000 producteurs de bétail de tout le Canada. Il ne fait pas de doute qu'il est important que la loi soit rédigée de manière à protéger efficacement les espèces en péril, mais elle devrait aussi être formulée de manière à ne pas menacer les industries légitimes comme celle de l'élevage du bétail. Les éleveurs de bétail vont certainement collaborer à la protection des espèces, mais il nous faut de l'aide. On ne peut attendre des familles rurales qu'elles assument seules ce fardeau. Si la sauvegarde des espèces en péril est dans l'intérêt public, le public devrait assumer certains des coûts, puisque les familles rurales ne peuvent le faire seules.

Nous avons effectivement une grande part des terres où se trouve l'habitat, et dans de nombreuses régions, nous assurons l'intendance de ces terres depuis plus d'un siècle. Avec les changements que nous avons exposés aujourd'hui et décrits dans nos mémoires sur le projet de loi C-5, je pense que vous pourriez obtenir la coopération des propriétaires ruraux et fonciers, et vous pourriez formuler une loi qui assure réellement la protection des espèces en péril. Nous devons veiller, par ces amendements à la loi, à faire en sorte que le fait d'avoir ces espèces en péril et leur habitat sur nos terres est un avantage et non un inconvénient.

Nous vous remercions de cette occasion et serons heureux de répondre à vos questions plus tard. Merci beaucoup, monsieur le président.

Le président: Merci, M. Turner, M. Lynch-Staunton et M. Routledge pour votre exposé.

C'est au tour de M. Friesen. Veuillez être très concis, s'il vous plaît.

M. Bob Friesen (président, Fédération canadienne de l'agriculture): Merci, monsieur le président, et merci au comité pour cette invitation. J'aimerais aussi exprimer mon appréciation pour la présentation de la CCA qui, à mon avis, illustre la délicatesse de cette question et les énormes répercussions que peut avoir cette loi sur l'industrie agricole dans tout le Canada.

La Fédération canadienne de l'agriculture représente plus de 200 000 agriculteurs dans tout le pays. C'est, de toute évidence, une grande diversité géographique et aussi une grande variété de produits agricoles.

Je dirais, aux fins de brièveté de cette présentation, qu'il est clair que l'enjeu des incitatifs est très important. Il est très important que les recommandations qui sont faites aient un fondement scientifique. La question d'indemnisation est extrêmement importante. À mon avis, les agriculteurs sont le groupe de gens, de citoyens, qui peut être le plus touché par cette loi, en raison de la nature même de l'activité agricole, du fait qu'ils possèdent de grandes portions de terre où ils font ce qu'ils savent faire le mieux, c'est-à-dire produire des aliments de très grande qualité et sécuritaires pour les consommateurs du Canada et du reste du monde.

Nous sommes très inquiets. Bien que nous appuyions cette loi, nous sommes aussi inquiets de certains éléments qu'elle renferme. Je crois que la volonté existe de remplacer ce qu'on pourrait appeler la mosaïque constituée par les différentes lois provinciales sur les espèces en péril. Nous devons remplacer cette mosaïque par un cadre uniforme.

Je peux vous dire que les agriculteurs souhaitent contribuer à trouver des solutions qui correspondent à leur engagement de produire des aliments sains et sécuritaires en abondance. C'est pourquoi nous devons mettre en place des mesures de traitement fiscal et des mesures prévoyant le versement d'indemnités dans le but d'encourager la participation et le partenariat pour obtenir l'engagement des agriculteurs sans qu'ils craignent pour leur subsistance. On l'a déjà dit, ils ont clairement démontré leur volonté et leur engagement à être proactifs et à protéger et rétablir l'habitat, et à protéger les espèces en péril.

• 1600

Cependant, les agriculteurs sont conscients de la nécessité d'être bien informés sur les dangers que l'agriculture peut présenter pour les espèces en péril et sur les mesures qu'ils peuvent prendre pour protéger ces espèces. Ils sont prêts à participer, à s'engager, particulièrement si le processus est transparent et que l'approche est tout à fait scientifique.

À notre avis, la Loi sur les espèces en péril doit encourager la création de programmes économiques, réalistes, qui doivent traiter des priorités et des problèmes; prévoir que tous les éléments de solution sont pris en considération; prévoir des mesures de sensibilisation et d'incitation; encourager la création de partenariats; fournir des moyens visant à protéger les espèces sans perturber les moyens de subsistance des agriculteurs; favoriser le développement d'attitudes positives à l'égard de la protection de la biodiversité.

Nous pensons que la Loi sur les espèces en péril doit prévoir la mise en place et la gestion de programmes incitatifs et de mesures favorisant la création de partenariats et la mise en place de mesures alternatives aux poursuites civiles. Nous sommes heureux de voir combien cet aspect de la loi a changé depuis ses débuts. Nous pensons aussi que les amendes doivent être raisonnables et qu'il faut prévoir des mesures pour protéger les propriétaires terriens contre l'imposition discrétionnaire de redevances sans qu'ils aient la possibilité de se défendre.

Nous croyons en l'adoption d'approches holistiques et écologiques axées sur l'ensemble des espèces plutôt que d'approches centrées sur une seule espèce à la fois. Il doit y avoir un soutien à la mise en place de mesures préventives. Nous sommes tous conscients du fait que la prévention est beaucoup plus économique que la correction du problème lorsqu'il survient, plus tard. Il est aussi très important que les décisions adoptées en vertu de la loi soient des décisions scientifiques logiques. Il faut la mise en place de mesures financières adéquates afin que cette loi et les règlements connexes puissent être appliqués correctement et que ce soit fait avec le plus haut degré possible de coopération, et en partenariat.

Il faut, dans la loi, des dispositions selon lesquelles les terres peuvent être exploitées et utilisées de façon compatible avec la diversité des espèces. Il faut des dispositions selon lesquelles des activités visant à protéger la santé des humains, des animaux et des plantes ne peuvent être interdites. Autrement dit, la protection des espèces en péril ne devrait pas se faire—et ne devrait pas en venir à se faire—aux dépens de la santé des humains, des animaux et des plantes.

Il faut mettre en place de procédures d'urgence qui ne peuvent être utilisées dans le but de contourner les procédures régulières d'élaboration des plans de listage et de rétablissement; il faut des dispositions d'indemnisation par l'État; et bien entendu, il faut des dispositions précises sur les ententes avec les propriétaires terriens et fonciers du secteur privé.

Dans l'ensemble, il y a beaucoup d'aspects positifs à cette loi, mais nous avons certaines préoccupations bien spécifiques. Le préambule stipule que «... s'il existe une menace d'atteinte grave ou irréversible à une espèce sauvage, le manque de certitude scientifique ne peut être prétexte à retarder la prise de mesures efficientes pour prévenir sa disparition ou sa décroissance». Les agriculteurs sont, c'est certain, tous en faveur de la bonne gestion financière; nous pensons que les mentions d'efficience doivent demeurer. Cependant, l'expression «certitude scientifique» peut être vague et ouverte à de vastes interprétations. Nous voudrions avoir l'assurance que ce «manque de certitude scientifique» sera fondé sur des critères acceptables pour le milieu scientifique et pour la communauté dans son ensemble. Si un «manque de certitude scientifique» est déclaré, nous sommes d'avis que toute preuve sur laquelle est fondée la décision doit, elle aussi, être fondée scientifiquement.

En ce qui concerne l'inscription d'une espèce à la liste des espèces en péril, la FCA appuie le processus que décrit le projet de loi. La FCA est d'avis que toute inscription à cette liste doit être établie sur une base scientifique mais que le gouvernement doit en prendre la responsabilité. Les recommandations doivent être fondées sur la certitude scientifique—elles devraient venir des communautés scientifiques et environnementales. Cependant, la décision finale relève de ceux qui sont le plus responsables des répercussions socio-économiques des décisions qui sont prises.

Aux articles 37 à 46, sur les programmes de rétablissement, et aussi sur les plans d'action, nous appuyons le processus de rétablissement énoncé dans le projet de loi et expliqué en détail dans la fiche d'information intitulée «Processus nationaux de rétablissement et de gestion des espèces en péril». Ce processus comprend quatre étapes, soit l'inscription d'une espèce, la prise de contact avec le propriétaire terrien, l'élaboration de stratégies de rétablissement et la mise en place de plans d'action. Cette façon de faire est logique et conforme aux principes des projets d'intendance. Nous sommes d'avis que ce processus a de fortes chances de succès si on s'assure de la collaboration des propriétaires terriens sur qui se répercuteront ces plans.

• 1605

Je vais parler très brièvement du contrôle d'application, monsieur le président, avant de terminer, aux articles 93 à 96. La FCA appuie l'exclusion de la loi des poursuites civiles. Néanmoins, on doit établir des critères à partir desquels une enquête ou une évaluation peut être entreprise afin que les ressources gouvernementales ne soient pas vainement utilisées pour des plaintes sans fondement.

En vertu du projet de loi C-5, le ministre responsable peut nommer des agents chargés de l'application de la loi. Ces agents auront des pouvoirs considérables. Nous lisons dans la loi qu'un agent peut en tout temps «raisonnable» pénétrer en tout lieu, lorsque les dispositions de la loi s'appliquent, et l'inspecter. À cet article, la FCA est d'avis que le terme «raisonnable» doit être défini et précisé. Par exemple, s'appliquera-t-il uniquement une fois que l'enquête aura été déclenché? Nous exposera-t-il, encore une fois, aux plaintes sans fondement?

La CCA a mentionné un sujet—peut-être celui qui nous préoccupe tous le plus—celui des indemnités. Très clairement, 50 p. 100 d'indemnité ou un seuil de 10 p. 100, puis 50 p. 100 de l'indemnité de 90 p. 100, c'est absolument insuffisant. Les agriculteurs se sentent responsables et imputables. Ils veulent contribuer à la solution. Ils veulent s'engager. Ils veulent un partenariat et ils veulent tenter les mesures préventives.

Cependant, lorsqu'il est question d'indemnité, je pense que le succès d'une loi efficace sur la protection des espèces en péril dépend de ce que les agriculteurs ne se sentent pas menacés par elle. Les agriculteurs sentiront—parce qu'ils agissent ainsi pour le bien public et par le biais de partenariats—que leur engagement volontaire et déterminé nécessite une pleine indemnisation. Il s'agit ici d'une loi qui traite de protection des espèces en péril pour le bien public et les agriculteurs, bien que disposés à agir pour appliquer la loi, doivent nettement être indemnisés.

La loi doit inclure le principe de versement d'une pleine indemnité aux agriculteurs et aux propriétaires terriens. Les lignes directrices doivent tenir compte des différents types de terres et de leurs différentes utilisations. Il faut des règles précises sur ce qu'une indemnité compensera ou ne compensera pas. L'indemnité doit être envisagée pour la perte immédiate de revenu à la non-utilisation actuelle; des actifs utilisés au cours de la présente année; des pertes futures de revenu si les terres sont vouées en permanence à la non-production; et des modifications à l'utilisation des terres. Il doit y avoir des règles précises sur le troc des terres. Il existe des précédents sur les indemnités versées dans des cas d'expropriation, dans le cadre des lois provinciales et fédérales; il convient de les examiner.

Bien entendu, la médiation, les incitatifs et les solutions de partenariat sont toujours le premier choix. Mais si toutes ces solutions échouent, les agriculteurs seront pleinement engagés dans la protection des espèces en péril s'ils sont pleinement indemnisés. Permettez-moi de vous rappeler les répercussions socio-économiques de cette loi si elle devait échouer. À notre avis, il vaudrait la peine de l'examiner de telle manière que les agriculteurs se sentiront partie intégrante de ce partenariat, qu'ensemble, avec le public canadien, ils protègent notre biodiversité et les espèces en péril.

Merci beaucoup, monsieur le président.

Le président: Merci de votre collaboration, monsieur Friesen.

Monsieur Horner, vous avez la parole.

M. Jack Horner (président, Alberta Grazing Lease Holders Association): Merci, monsieur le président.

C'est avec plaisir que je présente un mémoire à votre comité. Je suis président de l'Alberta Grazing Leaseholders Association. Tim Andrew en est le trésorier.

Un grand éleveur est quelqu'un qui aime les animaux. Il connaît la différente personnalité de ses chevaux et de son bétail. Il adore voir des animaux sauvages sur ses terres. Il les apprécie chaque fois qu'il les aperçoit. L'exploitation de ranch se fait dans le respect de l'habitat des espèces en péril. Les villes le détruisent. Les grands éleveurs le préservent. Il est de l'intérêt de leur subsistance de le protéger.

Ceci dit, je vous présente Tim Andrew, qui commencera la lecture de notre mémoire.

M. Tim Andrew (trésorier, Alberta Grazing Lease Holders Association): Merci, monsieur le président.

• 1610

L'Alberta Grazing Leaseholders Association est un organisme qui regroupe plus de 1 200 grands éleveurs albertins qui exploitent des pâturages cédés à bail à long terme par le gouvernement de l'Alberta. Les surfaces pastorales prises à bail représentent 10 millions d'acres, soit environ 6 p. 100 des terres arables de la province. La location à bail de pâturages aura été le premier outil de la colonisation de l'Ouest. Avant que l'Alberta devienne une province, le gouvernement fédéral avait découvert les vastes richesses pastorales qu'offrent les Prairies. Le déclin de la population de bisons, la marche vers l'Ouest de la Police à cheval du Nord-Ouest et la signature du Traité no 7 ont donné aux Pères de la Fédération un immense empire à peupler et à gérer de manière responsable s'ils ne voulaient pas risquer de le voir passer aux mains des intérêts américains, toujours prêts à s'en emparer.

À la lumière des erreurs commises lors de la colonisation de l'Ouest américain, le gouvernement de l'époque a pris conscience de la tragédie de la propriété commune, où le bétail de tout le monde avait libre accès à l'ensemble des terres domaniales, ce qui a provoqué leur surpâturage. La ressource herbagère américaine en a réellement souffert. Macdonald a opté pour une colonisation plus dirigée. L'État a donc octroyé aux candidats qui convenaient des baux à long terme présentant un intérêt pécuniaire et faisant l'affaire des deux parties. Il a entrepris de coloniser l'Ouest, en le peuplant de gardiens qui devaient gérer la ressource pastorale au profit de leurs cheptels. En contrepartie de l'accès garanti à une ressource pastorale vierge moyennant un paiement en argent, l'exploitant d'un ranch était tenu de préserver l'intégrité environnementale du domaine public.

La vague suivante de colonisation a amené les homesteaders, qui sont parvenus à obtenir le plus grand nombre de terres arables réquisitionnées des grands éleveurs, mais la stabilité de la jeune industrie agricole n'en est pas moins demeurée intimement liée à la location en bail à long terme. Bon nombre d'exploitants agricoles ont constaté la possibilité de maintenir un juste milieu en conjuguant élevage et cultures céréalières pour faire prospérer leur entreprise. Par ailleurs, bien que les homesteaders aient choisi de rétrocéder les mauvaises terres à l'État à cause de leur nature irrégulière—trop rocailleuses, trop exposées à la sécheresse ou aux inondations, trop accidentées, trop arides ou infertiles. Ces terres font maintenant partie du domaine des grands éleveurs et, si le sol ne se prête pas à une agriculture active, la longue durée et le caractère ferme des baux laissent tout de même à nos pionniers le loisir de combiner l'élevage et l'agriculture.

Les principes même que Macdonald a instauré sont le fondement du contrat de bail d'aujourd'hui. En contrepartie de l'accès aux pâturages, l'exploitant d'un ranch paie une redevance, des droits de pâturage annuels qui s'ajoutent au prix d'achat prévu dans le contrat de bail. Toutes les autres terres publiques disponibles ayant été données à bail, les exploitants de ranch qui désirent étendre leurs activités doivent chercher activement à acquérir les baux d'autres titulaires de domaines à bail. Comme pour tout autre actif immobilier, l'état de la propriété, la qualité des pratiques de gestion des parcours, les améliorations apportées aux clôtures et les aménagements hydrauliques sont autant de facteurs qui contribuent à faire hausser le prix de vente finale du contrat. Étant donné la grande importance des terres affermées pour l'entité économique du ranch, les institutions financières prêtent leur concours en consentant des hypothèques sur le bien-fonds pris en location mais exigent habituellement qu'on leur fournisse en garantie les titres de certains biens-fonds cédés.

Non seulement les exploitants de ranch ont-il beaucoup d'attachement pour l'immensité de leurs pâturages, mais encore veillent-ils jalousement à la qualité des forages et au bon état de leurs parcours, car ils savent tous que leur subsistance dépend de la facilité d'accès et de la richesse des herbages dont se nourrissent leur cheptel. Les titulaires de domaines à bail apprécient également les énormes trésors écologiques dont regorge leur ranch. Ils ont le privilège de partager l'abondance et la nature avec le chevreuil, l'orignal, le wapiti et l'antilope qui fréquentent librement leurs domaines. Ils ont conscience de détenir en fiducie quelques-uns des derniers grands pâturages libres pour leurs familles et pour l'ensemble de la population canadienne. Ils reconnaissent en outre volontiers qu'ils partagent leurs pâturages avec certaines des espèces les plus vulnérables de la flore et de la faune planétaires et qu'il leur faut prendre une part active à la préservation de toutes les richesses naturelles.

Là-dessus, je céderai la parole à mon très estimé collègue, M. Horner.

M. Jack Horner: Nous sommes conscients que la législation sur les espèces en péril répond à un impératif de la Convention des Nations Unies sur la biodiversité. Nous sommes en faveur de la sauvegarde de nos espèces en péril et de la protection de la part canadienne de la flore et de la faune mondiales, mais les coûts devraient en être partagés par l'ensemble des citoyens, et non pas être à la charge des seuls propriétaires.

La législation canadienne privilégie la coopération et les mesures volontaires destinées à l'habitat essentiel en offrant des récompenses, et vise à assurer une certaine équité en prévoyant une indemnisation. On y fait une large place aux termes «équité» et «indemnité». À notre avis, l'indemnisation ne devrait pas être établie uniquement en fonction du coût associé à l'utilisation normale du sol, mais également d'après la dépréciation des propriétés.

• 1615

Nous pensons que l'indemnité devrait aussi englober les terres à bail. Comment peut-elle être équitable si l'on exclut les pertes ou les frais à l'égard des terres louées à bail? Si l'exploitant de ranch perd des terres prises à bail, la valeur totale de son entité d'exploitation s'en trouve diminuée.

M. Pearse devait se pencher sur la question d'indemnisation. Il fait souvent allusion au principe de «la carotte» et du «bâton». La carotte, c'est l'agriculteur et l'éleveur qui doit assumer les premiers 10 p. 100 du coût, plus la moitié du reste, et il n'y a aucune indemnisation prévue pour ce qui est des terres louées à bail. Pourtant, c'est en faisant paître le bétail sur ces terres qu'on préservera une bonne part de la diversité de notre flore et de notre faune. Bien entendu, c'est là que se trouve la majeure partie de l'habitat naturel ou des espèces en péril de nos jours. Avec ce genre de carotte, M. Pearse ne peut sérieusement espérer une grande collaboration. Les initiatives fédérales, nous le savons maintenant, seront suivies de l'adoption de lois complémentaires par les assemblées législatives provinciales et territoriales. Si l'administration fédérale refuse toute indemnisation relativement aux terres louées à bail, les provinces ne feront qu'en suivre l'exemple. Autant dire que le locataire à bail serait une bonne espèce à faire disparaître!

Dans son rapport, M. Pearse examine la question des mesures incitatives par rapport à l'indemnisation, mais il en vient à la conclusion qu'il ne devrait pas y avoir indemnisation pour les terres louées ou les terres domaniales. À la page 18, il admet que l'État pourrait acheter ces baux ou ces droits au prix du marché. Un locataire à bail aurait-il droit à une prime d'encouragement? Je n'en suis pas sûr. M. Pearse fait remarquer que la prime est destinée à encourager la personne qui accepte de collaborer à un effort volontaire de bonne intendance pour protéger ou rétablir une espèce en voie de disparition.

L'indemnité, elle, est une somme versée à quiconque a subi des pertes découlant des restrictions apportées par l'État aux méthodes de gestion du domaine loué à bail. Surtout quand les restrictions sont imposées unilatéralement par l'État. M. Pearse précise que l'indemnisation est destinée à jouer un rôle secondaire et nous convenons qu'elle interviendrait dans des circonstances très limitées, mais toute la loi est fondée sur l'équité de même que sur le partage équitable de la responsabilité et des coûts. M. Pearse dit que si la politique fonctionne bien, rares seront les cas d'indemnisation. Plus la politique sera fructueuse, moins il y aura de cas. C'est bien possible, mais comment M. Pearse pourrait-il s'attendre à ce que cette condition se réalise alors qu'il n'est même pas prêt à tenir compte des titulaires de domaine à bail, où se trouvent peut-être la plupart des espèces en voie de disparition?

M. Pearse souligne la nécessité d'apporter le plus grand soin à l'élaboration des accords d'indemnisation parce que l'empiétement réglementaire sur la propriété ne justifie habituellement une indemnisation. Je ne sais pas d'où lui vient cette idée. La convention d'indemnisation à établir en l'occurrence suppose un important changement de politique. Il n'en va pas ainsi en Alberta. Si, à quelque fin que ce soit, quelqu'un empiète sur des terres prises à bail, le locataire s'en fera indemniser et en cas de litige, il soumettra l'affaire à l'arbitrage de la commission des droits de surface de l'Alberta, laquelle rendra une décision formelle et exécutoire.

Au Canada, ajoute M. Pearse, nous ne voulons pas faire les mêmes erreurs que celles qui ont été commises dans la législation américaine sur les espèces en voie de disparition. Mais il est bien possible que nous ayons pris le même chemin et que les grands éleveurs se donnent comme nouvelle consigne de tirer, d'effacer toute trace, puis bouche-cousue! La loi autorise le ministre à indemniser quiconque pour pertes subies. M. Pearse propose une formule d'indemnisation à 50 p. 100, une fois que le propriétaire aura absorbé les premiers 10 p. 100 de ses pertes. En quoi, je le répète, cela est-il équitable? Pourquoi une personne aurait-elle à payer les premiers 10 p. 100 du coût, puis la moitié de ce qui reste, l'autre moitié devant être prise en charge par l'ensemble de la population canadienne? Qui juge cela équitable? Il faut indemniser tout le monde à 100 p. 100. En tant que titulaires de domaine à bail, nous ne sommes pas sans savoir que la propriété que nous exploitons fait partie des dernières grandes surfaces pastorales vierges. S'il y a des espèces en péril, c'est grâce aux bons soins des propriétaires de ranch. Refuser toute indemnisation aux titulaires de domaine à bail en vertu de cette loi, c'est leur faire injure et les décourager de participer à tout effort de coopération.

• 1620

En terminant, un mot sur le bâton. Les sanctions prévues sont un scandale quand on pense à celles rattachées aux autres méfaits qui se commettent dans la société (incendie criminel, viol, meurtre). Le changement conceptuel faisant de ces infractions environnementales des infractions de responsabilité stricte—une inversion du fardeau de la preuve, à l'opposé de ce que prévoient les autres dispositions du droit pénal—est inacceptable. Nous sommes de simples entrepreneurs qui, par notre travail manuel, prenons quotidiennement soin de nos terres et de notre bétail. Nous faire encourir chaque jour des amendes allant de 50 milliers à 1 million de dollars avec des peines d'un à cinq ans de prison ne va certainement pas créer un climat propice à la coopération spontanée.

Il en résultera, monsieur le président, que les propriétaires de ranch feront la grève du zèle et, tous ceux qui ont eu affaire avec le mouvement syndical ou les dupes savent que la grève du zèle n'aide pas vraiment. Qui en subira les conséquences? Les espèces en péril et non pas les propriétaires de ranch. Quelques hauts fonctionnaires pourraient en souffrir mais ce sont les espèces en péril qui seront le plus touchées. J'exhorte le comité, dans le cadre de son étude du projet de loi, à examiner de près le rapport de M. Pearse en ce qui a trait à ce projet de loi. Il n'a pas traité de façon très exhaustive de la question de l'indemnisation.

Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Horner.

Monsieur Pope.

M. David Pope (Vice-président, Western Stock Growers' Association): Oui, monsieur le président. Notre premier conférencier sera M. Norman Ward, président sortant de la Western Stock Grower's Association.

Le président: Allez-y.

M. Norman Ward (Président sortant, Western Stock Growers' Association): Bon après-midi, monsieur le président ainsi qu'à tous les membres du comité.

Je lirai notre mémoire qui a reçu une large diffusion depuis l'automne dernier. Nous avons comparu devant le comité il y a à peu près cinq ans et, trois projets de loi plus tard, nous y présentons de nouveau un mémoire. Je vais simplement vous parler des points principaux de notre mémoire et je suis impatient de répondre à vos questions plus tard cet après-midi.

Nous sommes un organisme bénévole représentant des membres qui possèdent et gèrent 500 000 têtes de bétail, sur une superficie de quelque 3 millions d'âcres de terres privées et publiques—500 000 têtes de bétail, c'est bien cela. Nous sommes impliqués dans tout l'éventail de la production de viande bovine et nous sommes régis par notre devise «The Voice of Free Market Environmentalism Since 1896». Nous estimons que le libre marché offre l'instrument qui permet de conserver, d'accroître et d'utiliser économiquement les ressources à long terme pour l'ensemble de la société.

Cependant, les droits de propriété ne contestent pas au gouvernement le pouvoir d'empiéter sur ces droits lorsque cela est considéré dans l'intérêt public. Le pouvoir d'expropriation donne au gouvernement le droit d'exproprier pour le bien commun. De ce droit découle la responsabilité d'indemniser ses citoyens. Le principe directeur doit être le suivant: si c'est le public qui en bénéficiera, alors c'est le public qui doit payer pour cet avantage. Ce principe, le droit de posséder des biens, est valable même pour le sujet auquel nous sommes confrontés et je vais vous en dire plus sur ces questions des droits de propriété lorsque j'aborderai la question de l'indemnisation.

La Western Stock Growers' Association constate un certain adoucissement du langage dans le projet de loi C-5 par rapport au libellé du projet de loi précédent et reconnaît les idéaux comme le partenariat et la collaboration qui se retrouvent dans la nouvelle mesure législative. Nous sommes toutefois très préoccupés par l'absence d'une indemnité équitable pour les biens ou les revenus expropriés ou modifiés en raison des prises effectuées au nom de programmes de rétablissement et nous sommes extrêmement préoccupés par les mesures draconiennes utilisées pour réglementer et faire appliquer la loi. Ces deux points, la façon dont ils sont abordés dans la loi et la façon dont ils interviendront dans les années futures, décideront au bout du compte de la façon dont les espèces en péril survivront dans notre habitat. Notre objectif c'est que les espèces en péril soient un élément précieux pour nos exploitations et notre habitat, non une menace.

Nous estimons que tout projet de loi qui cherche vraiment à protéger les espèces en voie de disparition, doit favoriser les programmes de conservation qui reposent sur une démarche de collaboration et de partenariat. Vous avez entendu des représentants de Land and Resource Partnership il y a environ un mois. La Western Stock Growers' Association a fondé le LRP. Nous avons proposé le concept de coopération, de partenariat et d'indemnisation lorsque c'est nécessaire et nous croyons à ces trois principes. Comme vous le constatez, Land and Resource Partnership regroupe maintenant quelque 95 p. 100 des utilisateurs de ressources en Alberta, des gens qui poursuivent ces trois objectifs.

• 1625

La plupart de nos membres ont des terrains qui servent d'habitat à des espèces à risque. C'est la raison pour laquelle ils se sentent grandement menacés par cette mesure législative. Nous possédons le dernier habitat qui reste pour un grand nombre d'espèces à risque en Alberta.

Nous voulons proposer certaines solutions en ce qui a trait au projet de loi C-5 et à la question de l'indemnisation. La solution que nous aimerions proposer—et M. Horner en a aussi parlé dans son mémoire—c'est le recours au genre d'arbitrage prévu dans la Alberta Surface Rights Act. L'Alberta a mis au point un processus d'expropriation en vertu de cette loi. Dans le cadre de cette loi une entité privée est capable d'exproprier temporairement les droits d'une autre entité privée, par exemple pour l'extraction minière en Alberta où interviennent un droit de superficie et un droit minier.

Nous croyons qu'il est possible d'appliquer le même concept pour l'indemnisation dans le cas des espèces en péril. Ce processus tiendrait compte de la superficie accordée, de la perturbation générale, de la perte de l'utilisation du terrain, de l'effet négatif du programme de rétablissement de l'espèce en péril, des dommages accessoires et du préjudice causé aux biens aux alentours.

L'imposition d'un programme de rétablissement doit tenir compte du coût du programme véritable pour le propriétaire foncier et le processus doit être jugé transparent. Une entente commerciale directe, qui reconnaît le véritable coût de l'habitat et la protection de l'espèce, aboutira à une gestion durable à long terme. Ce n'est que lorsque le véritable coût d'un programme est défini que la créativité humaine produit la démarche coopérative nécessaire et méritée.

Il existe littéralement des milliers de façons de rehausser la biodiversité de l'environnement canadien. Chaque écosystème doit être examiné individuellement et une approche de gestion personnalisée doit être déterminée pour chaque région.

L'Alberta a actuellement quelque 33 000 agriculteurs et grands éleveurs. Il vaut mieux avoir 33 000 personnes gérant chacune volontairement leur propre écosystème complexe pour sauver des espèces en péril que d'avoir une couche superficielle de mesures législatives d'un bout à l'autre du pays qui oblige les gens à le faire.

Nous souhaitons faire partie de la solution, et nous croyons savoir comment nous y prendre. Nous sommes de bons intendants des terres. Pour nous, l'intendance n'est pas que la réalisation des objectifs du programme axés sur les personnes, sur les terres et sur l'environnement. Elle comprend aussi des objectifs pécuniaires dont la réalisation permet de financer l'atteinte des autres. Le projet de loi C-5 n'intègre pas les objectifs pécuniaires. Il ne représente donc pas un tout intégré, une approche holistique.

Nous aimerions l'améliorer. Bien souvent, nous avons des capacités d'intendance que nous pouvons offrir. Nous aimerions que l'indemnisation soit sensiblement bonifiée dans ce cadre.

Pour résumer la première moitié de notre exposé, la Western Stock Growers' Association estime que l'indemnisation n'est pas une question de dollars, mais bien de principe. Avant tout, il s'agit d'une question d'équité. C'est toute la société qui devrait payer pour la préservation de ses valeurs, par exemple de la biodiversité.

De plus, c'est aussi une question de responsabilisation. Il faut que ceux qui proposent un plan d'action assument la responsabilité du coût du programme, qu'ils ne supposent pas simplement qu'une solution de rechange très coûteuse sera acceptée aux dépens d'un autre.

Troisième point, et de loin le plus important, l'indemnisation est un régulateur. Elle exerce un contrôle sur la gamme d'options disponibles en vertu d'un programme de rétablissement. Nous espérons que la plupart des solutions convenables à la gestion de l'habitat ne seront pas les plus coûteuses. La meilleure solution sera plutôt celle qui s'appuie sur de solides données scientifiques et qui tient compte des besoins des divers intéressés. Elle ne sera pas concoctée par des personnes portant des oeillères qui cherchent à ne satisfaire qu'à une seule valeur sociale. Les meilleures solutions prouveront que l'utilisation des terres par l'homme est aussi compatible avec la préservation de l'habitat.

Sur ce, monsieur le président, je cède maintenant la parole à M. Pope.

M. David Pope: Je vous remercie, monsieur le président.

J'aimerais vous parler de certaines préoccupations qu'ont les membres de la Western Stock Growers' Association au sujet des peines sévères que prévoit le projet de loi à l'étude et de l'atteinte qu'il représente aux droits et libertés civils.

• 1630

Les infractions et les peines prévues à l'égard de plantes, d'animaux et d'organismes et des terres qui composent leur habitat ne se retrouvent nulle part ailleurs dans le droit criminel canadien. Les peines varient de 50 000 $, d'un an d'emprisonnement ou encore des deux à la fois à un million de dollars, à cinq ans d'emprisonnement ou encore aux deux pour chaque infraction—la peine est doublée s'il y a récidive.

Ce sont là des infractions de responsabilité stricte. Qualifier d'infractions des actes faits par inadvertance dans le cadre d'activité habituel d'une entreprise agricole et d'une entreprise d'élevage—construire un corral ou débroussailler en vue d'installer une clôture ou, encore, simplement construire une maison ou mettre du bétail au pacage—ce genre d'«infraction» est tout simplement déraisonnable et inacceptable. Il ne faudrait pas que le gouvernement du Canada crée une nouvelle catégorie de criminels qui inclurait les agriculteurs, les éleveurs de bétail et les autres qui sont assis à cette table aujourd'hui.

Ces peines sont tout simplement beaucoup trop strictes quand on les compare à d'autres peines sévères prévues par le Code criminel. Par ailleurs, elles pourraient fort bien être une atteinte à certains des droits et libertés que confère notre Charte aux citoyens canadiens.

Nous estimons également que le projet de loi C-5 est un empiétement grossier dans un champ de compétence provincial. En vertu de la vieille Loi sur l'Amérique du Nord britannique, la propriété et les ressources naturelles ont toujours relevé des provinces. À notre avis, c'est la province qui devrait avoir compétence exclusive en matière de préservation des espèces en péril. Leur habitat a été plus qu'adéquatement conservé au fil des ans grâce à d'excellents programmes comme celui qu'ont appliqué Canards Illimités à la chevêche des terriers dans la partie est de la province et à d'autres programmes comme Opération chouette des terriers, dans la partie est de la province, et Opération Swift Fox. Il existe de nombreux bons programmes facultatifs qui ont fort bien réussi, d'après nous, à préserver le genre de biodiversité qui nous intéresse tous au Canada.

De plus, certains droits civils qui semblent menacés par le projet de loi C-5—plus particulièrement, par les dispositions de perquisition et de saisie dans un domicile qui n'ont rien en commun avec les dispositions habituelles du droit pénal—donnent lieu à de très graves préoccupations. Elles seraient beaucoup plus faciles à exécuter si l'agent obtenait au préalable un mandat de perquisition et de saisie.

D'autres dispositions portent gravement atteinte au droit, prévu par le common law, de garder le silence lorsqu'on est interrogé au sujet d'une certaine infraction. L'article du projet de loi dispose qu'il faut prêter à l'agent de l'autorité «toute l'assistance possible». Lors d'une infraction habituelle au droit criminel—un meurtre, un incendie criminel, une accusation de viol—vous n'êtes pas obligé de vous incriminer. Ce principe risque beaucoup d'être compromis dans cette mesure législative particulière—car il s'agit d'une loi, qui primerait sur le common law.

Nous sommes également très préoccupés par les infractions de responsabilité stricte, comme je l'ai déjà mentionné. Il y a donc inversion du fardeau de la preuve. Plutôt que de prouver la culpabilité au-delà de tout doute raisonnable—ce que prévoit habituellement le droit criminel, c'est le critère... Nous avons certes une approche similaire dans des situations quasi criminelles, comme les contraventions pour infraction aux règlements de stationnement et pour traversée illégale, mais ce n'est pas le cas quand les peines sont aussi lourdes que celles auxquelles on s'expose pour chaque infraction—par exemple de passer à dos de cheval ou sur un tracteur au-dessus de l'habitat ou le nid d'une chevêche des terriers—qui nous rendent passibles d'amendes phénoménales et d'emprisonnement.

En résumé, nous estimons que le projet de loi C-5 représente une mesure législative de style américain qui mise énormément sur le commandement et le contrôle et sur l'imposition de mesures du haut vers le bas. Ce genre de loi n'a pas donné de résultat utile aux États-Unis au cours des 28 dernières années. J'ai rencontré de nombreux Américains et les avocats qui les ont défendus. Il ne faudrait pas reproduire ici le genre de problèmes survenus là-bas. Avec un peu de chance, nous serons capables de trouver une solution canadienne misant sur la coopération et le partenariat. De plus, lorsque des terres doivent être retirées de la production pour protéger l'habitat d'espèces en péril, ce serait fait en versant une indemnité représentant la juste valeur marchande. Nous pouvons y arriver.

• 1635

Je vois que Norman Ward a d'autres observations à faire.

Le président: Je vous demanderais de bien vouloir terminer votre exposé, car il faut passer au prochain... Je vous demanderais d'être très bref.

M. Norman Ward: Oui. Je vous remercie, monsieur le président.

Je vous donne un résumé très concis: la Western Stock Growers' Association a envoyé 25 000 lettres aux éleveurs de bétail de l'Alberta. Quelque 600 d'entre eux nous ont répondu, précisant qu'ils étaient très préoccupés. Si vous me le permettez, j'aimerais vous laisser ce document. Ce sont les personnes qui ont la conviction profonde de s'occuper d'espèces en péril; elles souhaitent faire partie du processus, et elles sont très préoccupées.

Je vous remercie.

Le président: C'est nous qui vous remercions beaucoup. Nous prenons certes bonne note des documents que vous nous laissez. Je vous remercie, monsieur Pope.

Monsieur Menzies et madame Treslan, je vous souhaite la bienvenue. Qui prendra la parole?

M. Ted Menzies (président, Western Canadian Wheat Growers Association): Je suis le premier à le faire, monsieur le président.

Le président: Pourriez-vous résumer votre exposé pour que les députés aient le temps de poser des questions?

M. Ted Menzies: Je serai bref. Faites-moi confiance, ce sera très bref.

Vous avez effectivement reçu notre mémoire, je suppose, et si quelqu'un ne l'a pas, nous en avons des exemplaires ici.

Nous nous excusons de notre léger retard. Nous avions une autre rencontre avec un des ministres.

Histoire de faire les présentations, je m'appelle Ted Menzies. Je suis un céréaliculteur du sud de l'Alberta. Sans vouloir vous manquer de respect, je préférerais de loin être chez moi en train de semer, mais la question à l'étude est trop importante et je tiens beaucoup à ce que les agriculteurs, les céréaliculteurs, les producteurs de grain et d'oléagineux soient représentés à la table.

J'aimerais aussi vous présenter Denise Treslan, notre directrice exécutive. Denise et son époux ont une ferme à Beechy, en Saskatchewan.

La Western Canadian Wheat Growers' Association représente quelque 6 000 agriculteurs de toutes les provinces des Prairies qui se sont dit préoccupés par certaines parties du projet de loi, alors qu'ils jugent d'autres parties encourageantes. Toutefois, ils tenaient à ce que nous vous fassions part maintenant de leurs préoccupations. Comme vous avez des exemplaires de notre exposé, je ne vous en ferai pas la lecture. Je vais me contenter de faire ressortir certains points.

Nous aimerions féliciter le ministre et son ministère pour la volonté qu'ils ont manifestée jusqu'ici d'inclure dans le processus tous ceux qui seront touchés par la loi. Cela étant dit, il y a moyen de faire plus. La coopération entre les différents ordres de gouvernement et les propriétaires fonciers sera la clé du succès de cette mesure.

Les propriétaires fonciers et les titulaires de domaine à bail sont très conscients des espèces qui habitent sur leurs terres et ils souhaitent vivement les protéger. Vous serez peut-être intéressés d'apprendre qu'il y a deux jours seulement, j'ai éteint le moteur d'un tracteur de 400 chevaux-vapeur et une perforatrice pneumatique de 60 pieds pour déplacer le nid d'un hibou des marais. Les agriculteurs en tiennent compte. Le hibou des marais n'est pas une espèce en péril, mais j'ai quand même déplacé le nid, et les agriculteurs le font régulièrement—des nids de canards, et je ne sais quoi encore. Nous sommes des intendants des terres que nous habitons.

Les producteurs de blé et d'autres groupes qui comparaissent devant vous aujourd'hui sont tous d'accord pour dire que nous avons besoin d'être représentés à la table du COSEPAC. Il faut que nous puissions nous aussi nous faire entendre. Les producteurs de blé et les agriculteurs en général s'adaptent rapidement aux nouvelles technologies. Nous avons adopté des pratiques comme le travail réduit du sol qui sont très avantageuses parce qu'elles réduisent l'activité et créent de meilleurs habitats pour les espèces. Nous avons aussi opté pour les herbicides et les engrais propres à l'emplacement, ce qui réduit la contamination éventuelle des sols et de l'eau. Ces pratiques ont aussi entraîné une réduction globale de la dépendance à l'égard des pesticides. Nous avons encouragé l'élaboration et l'utilisation de méthodes biologiques de contrôle des mauvaises herbes et des insectes nuisibles ainsi que l'implantation de plantations brise-vent pour protéger les habitats et réduire l'érosion des sols.

L'indemnisation actuellement projetée est tout à fait inadéquate. Il faudrait qu'elle compense à 100 p. 100. Si les agriculteurs doivent faire partie de la solution, vous ne pouvez pas vous attendre qu'ils en assumeront seuls tout le fardeau financier.

La disposition, à l'article 62 du projet de loi, qui permet l'achat de terres pour protéger des espèces en péril et leur habitat nous encourage. C'est l'approche adoptée par Nature Conservancy, et elle garantit la protection.

Quant au partage des compétences, la plupart des provinces ont déjà une loi en vigueur. Sommes-nous en train de réinventer la roue? Que nous sachions, la seule raison pour laquelle une loi fédérale est envisagée, c'est d'y inclure des infractions prévues dans le Code criminel.

• 1640

L'institution des amendes mentionnées est beaucoup trop onéreuse lorsque le dommage ou la destruction était accidentel. Pour illustrer mon propos, j'aurai recours à l'analogie d'un accident d'auto. Si vous roulez sur la route et que vous êtes impliqué dans une collision qui cause une mort, êtes-vous, du fait que vous conduisiez votre auto sur la route, responsable de la mort de cette personne? Faudrait-il vous mettre à l'amende? Faudrait-il vous envoyer en prison simplement parce que vous rouliez sur cette route? Il n'y a pas beaucoup de différence entre ce que propose le projet de loi et mon analogie.

Je vous remercie de nous avoir invités à témoigner ici aujourd'hui. Je demeure à votre disposition pour répondre aux questions. En fait, vous disposerez de temps supplémentaire pour les poser car nous arrêtons ici notre exposé.

Le président: Monsieur Menzies, je vous remercie de votre coopération.

Avant de céder la parole à un membre de l'opposition officielle, je tiens à souligner la présence dans la salle de M. Hill, distingué parlementaire de l'Alberta et leader adjoint de l'Alliance.

Monsieur Mills, vous êtes le premier. Vous disposez de cinq minutes.

M. Bob Mills (Red Deer, AC): Merci, monsieur le président.

Je tiens à remercier tous ceux qui sont venus ici aujourd'hui. Vous êtes exactement le genre de personnes que j'ai rencontrées lors de rencontres de discussion ouverte dans ma circonscription et dans les circonscriptions voisines de l'ouest du Canada et de l'Ontario rural. Votre message est exactement celui qu'il faut livrer ici et que tous ceux qui travaillent à cette question comprennent.

J'ai quelques questions. Tout d'abord, en ce qui concerne l'indemnisation, nous sommes entièrement d'accord avec vous qu'il en faut une et qu'elle doit représenter la juste valeur marchande. Un indice vraiment bon est les droits de superficie et la manière dont l'Alberta règle la question depuis quelque 30 ans.

Comment vous sentez-vous d'être inclus dans le règlement, mais pas dans la loi? Je sais ce que j'aimerais vous entendre répondre, mais j'ignore ce que vous allez dire. Je vous pose donc la question.

Ensuite, j'aimerais entendre d'autres points de vue. Votre cri de ralliement semble être le rapport Pearse. On peut espérer que le gouvernement a maintenant entendu et compris le message, soit que ce n'est pas acceptable. Le ministre a certes indiqué que cela ne l'était pas. J'ai entendu dire que la loi des États-Unis—je l'ai entendu fois après fois, des milliers de fois...

J'étais à un salon professionnel, la semaine dernière, à Rocky Mountain House. J'y suis demeuré pendant sept heures, et les gens faisaient la queue pour me parler du rapport Pearse, entre autres. Beaucoup d'entre eux mentionnaient la loi américaine. Combien d'entre vous croient que c'est l'opinion de tout le monde? Comment réagissez-vous? Est-il vrai que l'on pourrait fort bien se mettre à tirer sur les espèces, les enterrer et se taire si l'on n'obtient pas cette indemnisation? Nous avons besoin de coopération, de consultation et d'indemnisation.

J'ignore qui veut répondre, mais vous pouvez tous vous essayer.

M. Hugh Lynch-Staunton: Je serai peut-être le premier.

Pour ce qui est de l'indemnisation prévue dans la loi par rapport au règlement, le hic, c'est que nous avons déjà entendu cela, même de la part d'un gouvernement bénin comme celui de l'Alberta. On nous a dit de ne pas nous en faire. Puis vient le règlement, qui est loin de ressembler à ce que nous attendions. Par le temps que le règlement est rendu public, il nous est très difficile d'en traiter. Il nous laisse indifférents en ce sens que l'effet est celui que nous souhaitons, mais nous serions certes plus à l'aise si tout était épelé dans la loi.

J'avoue que je suis tout autant que les autres insulté par cette histoire de tirer sur l'animal, de l'enfouir et de se taire. La plupart de nos producteurs réagissent de la même façon. C'est peut-être plus vrai qu'on aimerait le croire, et cela m'attriste. Ne serait-ce pas un triste constat si notre industrie et certains de ses membres estimaient être obligés de le faire pour demeurer sur leurs terres?

• 1645

M. Jack Horner: J'aimerais simplement renchérir, monsieur le président. Il serait certes nettement préférable que les dispositions établissant un organe comme l'office albertain se trouvent dans la loi. Il n'est pas nécessaire de l'appeler un office des droits de service, mais il faudrait prévoir dans la loi un organe d'arbitrage, particulièrement quand on impose des amendes aussi sévères à un éleveur de bétail ou un agriculteur qui a accidentellement endommagé l'habitat d'une espèce en péril.

Le président: Monsieur Ward, aimeriez-vous répondre?

M. Norman Ward: Oui, monsieur le président, j'aimerais bien. C'est là un sujet très délicat pour bien des gens qui habitent les terres. Bien des gens ne s'intéressent jamais à ce qui se passe; ils ne font pas partie du problème tant que l'argent ne sort pas de leurs poches. Dans ce cas-ci, quand vous expliquez aux gens ce qui pourrait se produire, ils voient que l'argent sort de leurs poches, de sorte que la question les intéresse au plus haut point et les inquiète beaucoup. Ils aimeraient que la question soit réglée dans la loi. Cela les rassurerait beaucoup.

Si le fait de prévoir cela dans la loi les rassure, on peut ensuite promouvoir la coopération et le partenariat. On peut promouvoir l'intendance requise pour qu'on puisse alors réduire le montant de l'indemnité à verser en bout de ligne. Il est toujours préférable de commencer par l'intendance. Et c'est ce que nous allons faire. La seule façon de le faire est de ne pas laisser planer au-dessus de la tête des gens cette menace de l'indemnisation.

Qu'ils le fassent délibérément ou non, les éleveurs de bétail et les agriculteurs participent activement à la gestion de l'écosystème. Ils peuvent très facilement le manipuler pour le mieux ou pour le pire, que ce soit délibérément ou pas. S'ils se sentent menacés ou acculés, ils peuvent s'organiser pour que, sans tuer des animaux ou détruire leur habitat, cet habitat change légèrement. Vous vous levez un bon matin, et la chevêche des terriers n'est plus là. L'avez-vous tué? Avez-vous détruit son habitat? Non, mais l'habitat a changé. Nous aimerions pouvoir compter sur la bonne volonté des gens.

Le président: Monsieur Turner, si vous voulez bien répondre brièvement, je vous prie.

M. Jim Turner: Brièvement, la formule consistant à tuer, à enterrer et à se taire me pose vraiment problème. Néanmoins, je crois plus probable qu'il y ait un manque de coopération dont les répercussions seraient plus graves à long terme que le fait de tuer et d'enterrer. J'estime que la modification de l'habitat... et, peut-être, le simple fait de ne pas coopérer, de ne pas indiquer au biologiste l'endroit précis, peuvent avoir des conséquences néfastes. C'est ce que je crains. Je pense que la coopération pourrait certainement contribuer de façon significative à prévenir ces difficultés.

Le président: M. Friesen, très brièvement, sil vous plaît.

M. Bob Friesen: Je réponds très rapidement. Bien sûr, le fait de tuer, d'enterrer et de se taire s'avère très choquant, mais, en toute franchise, les agriculteurs ne peuvent même pas se permettre d'assumer une part de responsabilité de 10 p. 100, et encore moins de 45 ou de 55 p. 100.

Par exemple, il y a un précédent, un peu différent, mais qui comporte certaines similitudes. Les règlements de l'Agence canadienne d'inspection des aliments exigent que les éleveurs de bétail signalent aux autorités toute maladie à déclaration obligatoire. Il y a quelques années, les autorités ont constaté que l'indemnisation n'était pas satisfaisante et l'ont accrue lorsque le bétail est affecté par une maladie à déclaration obligatoire de façon que les éleveurs reçoivent une indemnité correspondant à la valeur du marché. Ces mesures ont été prises surtout pour que les agriculteurs signalent honnêtement et sans délai toute maladie à déclaration obligatoire et ne craignent pas d'être tenus entièrement responsables.

Le président: Merci, M. Mills.

M. Bigras, suivi de M. Herron.

[Français]

Cinq minutes.

M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Merci, monsieur le président. Ma question va s'adresser à M. Friesen de la Fédération canadienne de l'agriculture.

À la lecture de votre mémoire, naturellement, il y a une chose qui est claire, c'est que vous êtes très critique envers la méthode Pearse que vous estimez ne pas être très équitable pour les agriculteurs. D'ailleurs, vous indiquez même, dans vos commentaires, que vous souhaiteriez que le projet de loi, qui va inévitablement ou fort probablement devenir une loi, inclue le principe de versement d'une pleine indemnité. À cet égard, je pense que votre message a très bien passé, qu'il a été entendu. Ma question va surtout porter sur la question du règlement des différends.

À la dernière page de votre mémoire, vous en restez au principe. Vous dites: «La médiation est la façon préférable de régler les différends.» Vous n'énoncez que le principe alors que d'autres groupes, dont celui de M. Menzies et de Mme Treslan, indiquent plutôt qu'ils souhaiteraient fortement avoir un processus d'arbitrage pour les cas où l'État et les propriétaires fonciers n'arriveraient pas à s'entendre, non seulement au niveau des programmes de rétablissement, mais aussi au niveau de l'indemnisation.

• 1650

Donc, ma question est la suivante: au-delà du principe que vous énoncez, êtes-vous en faveur d'un mécanisme de règlement des différends d'une part et, si oui, quelle forme devrait prendre ce mécanisme? Est-ce qu'il doit plutôt mettre l'accent sur la médiation ou sur l'arbitrage?

[Traduction]

M. Bob Friesen: En premier lieu, nous tenons à ce que les agriculteurs respectent la loi parce que nous les y incitons et parce qu'ils veulent participer à la protection de la biodiversité.

En second lieu, si cela est impossible et qu'il faut un délai pour la récolte, si les agriculteurs doivent abandonner la propriété, accuser des pertes financières, alors bien sûr, une indemnité s'impose. Évidemment, plutôt que d'imposer des amendes et de susciter énormément d'acrimonie, nous préférerions un partenariat, la facilitation et la médiation, pour tirer profit des meilleurs éléments de cette éventuelle mesure législative. Ainsi, d'abord la facilitation, puis la médiation, et, en dernier recours, l'arbitrage, si cela s'avère l'unique possibilité. Si, au terme de l'arbitrage, l'agriculteur doit accuser des pertes financières, l'indemnité doit être totale.

[Français]

Le président: C'est tout? Merci, monsieur Bigras.

[Traduction]

Monsieur Herron.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Merci, monsieur le Président.

D'entrée de jeu, je signale que nous reconnaissons que les aliments ne proviennent pas d'un supermarché, mais bien des agriculteurs. Nous savons également, que les régions rurales du Canada se sentent souvent isolées et estiment que la communication avec le gouvernement fédéral laisse grandement à désirer. Je comprends pourquoi cette initiative peut susciter de l'appréhension.

J'aimerais aborder deux éléments. En premier lieu, je suis très sympathique à la question de la compétence provinciale que vous avez soulevée. Nous avons toujours estimé que si l'application d'une mesure législative provinciale, au moins équivalente, respecte les dispositions de l'accord conclu en 1996, alors la loi fédérale ne s'applique pas. Néanmoins, en vertu de la loi, il est possible d'exiger d'une province ou d'un propriétaire foncier de s'engager, à défaut de quoi, la loi fédérale sera appliquée. Toutefois, cela n'est pas obligatoire dans les territoires domanials. Je trouve cet aspect plutôt hypocrite.

Les progressistes conservateurs, les alliancistes et les néo-démocrates prônent l'établissement de listes scientifiques et estiment que le COSEPAC devrait se charger de cette tâche. Cet exercice reposerait sur des principes scientifiques éprouvés. Nous estimons véritablement que comme ce sont les intervenants qui risquent le plus et sont susceptibles de faire des frais, ce sont eux qui doivent diriger le mouvement. Ils doivent pouvoir participer à n'importe quel genre de plan de rétablissement. C'est précisément là où je veux en venir, parce que s'ils ne participent pas, le système ne fonctionnera pas. Nous prônons une approche progressive, l'intendance environnementale et l'examen de solutions de rechange avant d'en arriver à l'indemnisation.

Le président: Aimeriez-vous poser une question?

M. John Herron: Je dispose de cinq minutes; je me suis absenté pendant un moment.

Le président: Il faut prévoir du temps pour la réponse, M. Herron.

M. John Herron: Si, en fin de compte, il n'y a pas d'indemnisation, nous savons que le système ne fonctionnera pas parce que les Canadiens, dans une bonne partie du pays, se montreront plutôt craintifs.

Je suggère donc, que compte tenu de l'absence de clarté au sujet du régime d'indemnisation éventuel et du fait que le rapport Pearse ne traite pas suffisamment de la question... Je ne vois pas d'inconvénient à ce que les agriculteurs bénéficient d'un traitement spécial, parce qu'en général, ils semblent toujours se retrouver perdants. Si le régime d'indemnisation n'est pas clair, nous recommanderiez-vous de ne pas l'appuyer? Ma question s'adresse à M. Menzies, je crois. Je voulais voir si vous écoutiez.

M. Ted Menzies: Merci, John.

M. John Herron: Je comprendrais que vous n'écoutiez pas.

M. Ted Menzies: Oui, j'écoutais.

• 1655

Je conviens que les intervenants doivent participer au processus dans son ensemble. Nous en avons fait mention dans nos interventions orales et écrites. Je crois que tous les groupes ici présents ont soulevé la question de l'indemnisation et qu'ils sont tous d'avis que ce qui suit est proposé est insuffisant.

Je suggère donc de ne pas appuyer ce projet de loi dans sa forme actuelle car il faut améliorer ou modifier les dispositions relatives à l'indemnisation.

M. John Herron: Je ne crois pas avoir le temps de poser une deuxième question.

Le président: Vous avez le temps.

M. John Herron: J'ai le temps? Merci

Je sais que la question des listes scientifiques suscite la controverse chez certains de nos membres. Nous croyons dans la validité des listes scientifiques parce qu'aussitôt que des politiciens se mêlent de la question, ils peuvent s'orienter dans une direction ou dans une autre, mais, de toute évidence, les propriétaires fonciers... La plupart des partis politiques conviennent que les listes scientifiques s'avèrent maintenant la meilleure solution. Il faut peut-être considérer le plan de rétablissement d'un point de vue politique, dans les rares cas où il s'avère vraiment impossible d'intervenir.

Croyez-vous que les questions politiques et les répercussions socio-économiques puissent être abordées dans le plan de rétablissement, mais ne doivent pas faire l'objet d'un débat pour déterminer les risques ou la nécessité de consacrer davantage d'efforts scientifiques? Néanmoins, je comprends votre argument au sujet de la question socio-économique.

M. Pope, vous et moi avons discuté de cette question pendant un moment.

M. David Pope: Oui, merci.

J'ai notamment touché à la Endangered Species Act de l'Alberta, j'ai participé à l'ajout, il y a quelques années, de cinq clauses à la Wildlife Act et, au fil des ans, j'ai lu les articles publiés dans le Globe and Mail. J'ai constaté que les scientifiques n'étaient pas plus à l'abri des objectifs préétablis et des préjugés que les autres groupes. Depuis des années, nous demandons la participation des intervenants au COSEPAC, et à défaut de cela, un contrôle aveugle par les pairs. Dans d'autres entreprises scientifiques, avant que quelque chose soit prouvé et fasse l'objet d'une politique, qu'il s'agisse de l'invention du vaccin Salk ou d'autre chose, les pairs effectuent toujours un contrôle aveugle et les intervenants sont appelés à participer au processus.

Ceci dit, nous n'en sommes évidemment pas encore là parce que le gouvernement fédéral n'a pas accepté cette pratique. Entre-temps, nous estimons que ce sont les politiciens qui doivent prendre les décisions liées aux conséquences des listes et des opinions scientifiques. Dans notre univers, il est possible de communiquer avec un politicien, même s'il faut parfois prendre l'avion et aller assez loin, mais il est virtuellement impossible de joindre le titulaire d'un doctorat dans le monde universitaire.

Ainsi, je réponds dans l'affirmative à votre question. Nous croyons que les politiciens doivent régler les deux grandes questions de l'économie et des répercussions sociales qui touchent les citoyens comme nous qui avons mis les mains à la pâte. Ma réponse semble peut-être alambiquée, mais c'est notre point de vue.

Le président: Le temps qui vous était alloué est écoulé; je regrette.

M. Comartin suivi du président.

M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): M. Horner, vous avez fait un commentaire, en fait, vous avez répété à deux reprises, que la plupart des espèces en péril se trouvent sur des terres cédées à bail. C'est la première fois que j'entends parler de cela. Pour en revenir aux fondements scientifiques, y a-t-il une base scientifique quelconque à cette affirmation?

M. Jack Horner: Non, à ma connaissance il n'y a aucune étude scientifique qui prouve cela. Toutefois, il faut envisager l'application pratique. Une grande partie des terres cédées à bail demeurent non perturbées. Le fait de perturber ces terres contrevient à la loi et enfreint les dispositions du bail. C'est précisément sur ces terres non perturbées que les espèces en péril se sont établies. Bien sûr, à une certaine époque, certaines espèces sauvages en péril vivaient sur le territoire actuel de Calgary, notamment des ours et des félins, mais le développement urbain les en a chassées.

Le même traitement est réservé aux agriculteurs de ma région. On leur dit qu'ils ont cultivé la terre et détruit de nombreux habitats fauniques. Alors où se retrouvent les habitats? Il ne leur reste que les terres non cultivées. Les 10 millions d'acres de terres albertaines dont j'ai parlé sont données à bail. C'est là que se retrouvent les espèces en péril, notamment la chouette des terriers.

• 1700

Voilà sur quoi repose cette affirmation. C'est une explication logique et facile à accepter. Les villes détruisent l'habitat, les agriculteurs laissent des tourbières mais cultivent la terre alors que l'éleveur préserve l'habitat. En outre, nous voulons aller dans le sens de la législation.

M. Joe Comartin: Je dois admettre que, d'après ma logique, j'ai fait le raisonnement inverse. Je suis d'accord avec vous au sujet des répercussions du développement sur les espèces indigènes parce qu'étant originaire du sud-ouest de l'Ontario, je connais certainement cette situation. Aussi négative soit-elle, elle n'en demeure pas moins évidente. Toutefois, à mon avis, la réalité est autre, c'est-à-dire que les espèces menacées se retrouvent plutôt dans des pâturages et, vraisemblablement, dans les environs immédiats des grandes villes, voire des petites localités, mais toujours à proximité d'un développement humain.

J'imagine que je vous contredis sur ce point, mais ce n'est pas le but que je vise.

M. Turner, vous avez fait une observation sur une question que nous aimerions éventuellement examiner en comité. Vous avez parlé de processus de signalement des espèces, mais je ne sais pas exactement ce que vous voulez dire. J'ai l'impression que c'est lié à la grande question de l'esprit de la loi par opposition aux dispositions de diligence raisonnable qu'elle contient.

Dois-je comprendre que, d'après vous, c'est au moment où un fermier apprend qu'il y a sur ses terres une espèce en péril, que le mécanisme d'exécution devrait s'enclencher?

M. Jim Turner: Oui, c'est exactement cela. Je crois que votre préoccupation vient du fait que dans nos activités quotidiennes, seules certaines personnes savent que des espèces sont en péril. Toutefois, il y a également des plantes menacées. La plupart des gens ne connaissent pas le contenu des listes sur les espèces en péril. Pour imposer des interdictions, des amendes ou quelque mécanisme que ce soit, il faut d'abord que les gens soient au courant de la présence de l'espèce visée. J'estime qu'il serait important qu'il y ait d'abord une notification avant qu'une mesure quelconque ne soit prise.

M. Joe Comartin: D'accord.

Nous entendons toujours parler de la pratique qui consiste à tirer, à enterrer et à se taire. J'ai signalé à plusieurs groupes environnementaux qui se sont présentés ici, que de nombreuses anecdotes, M. Mills et moi-même sommes en désaccord sur cette question, confirment l'existence de cette pratique. Je demande toujours si quelqu'un s'est penché sur la question, s'il y a des fondements scientifiques pour déterminer les répercussions éventuelles?

M. David Pope: Le document intitulé The Endangered Species Act: Time For Change, réalisé par Thomas Lambert et Robert J. Smith, publié aux États-Unis, en 1994, par la Washington University de St. Louis au Missouri, rapporte plusieurs histoires bien documentées sur cette question. Elles m'ont fait dresser les cheveux sur la tête. Je peux vous fournir un exemplaire de ce document.

M. Joe Comartin: Si vous pouvez, j'apprécierais.

M. David Pope: Aimeriez-vous avoir des noms, des adresses et des numéros de téléphone?

M. Joe Comartin: Si vous pouvez me donner un exemplaire du document après la réunion, je me charge du reste. Merci.

M. David Pope: Certainement.

Le président: Merci, monsieur Comartin.

Madame Redman, suivie du président.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le Président.

J'apprécie le fait que vous soyez tous venus présenter votre témoignage.

Le ministre a déclaré très souvent que le rapport Pearse constituait un bon point de départ, et que l'indemnisation crée jusqu'à un certain point un précédent. Il a toujours été d'avis que c'était un sujet intéressant de discussion.

J'ai noté avec intérêt, monsieur Turner, que vous avez entre autres abordé le caractère exceptionnel du point critique pour l'indemnisation que le rapport Pearse recommande de supprimer. Nous avons tous parlé de la participation volontaire et du fait que les espèces en péril sont toujours en vie parce que des gens comme vous les protègent dans leur habitat. Or, un des points d'équilibre est que cela ne devienne pas une désincitation. Plusieurs intervenants entendus ici ont parlé de pleine indemnisation. Vous avez laissé entendre qu'il n'y avait pas de répercussions extraordinaires sur vos terres. Nous ne parlons pas ici d'expropriation, nous parlons de modification ou de limitation eu égard à l'utilisation des terres.

J'aimerais que vous abordiez cet aspect de la question. Comment pouvons-nous tenir compte de vos affirmations sans que l'indemnisation ne devienne une désincitation à la participation volontaire sur laquelle est fondé ce projet de loi?

M. Jim Turner: La définition de caractère exceptionnel constitue l'élément clé sur lequel repose le processus. Je vais faire une analogie basée sur mes activités. Si j'ai utilisé 160 acres de terres comme pâturage et que j'en ai tiré un certain profit économique, même si j'ai eu à attendre pour faire paître mon bétail ou à reporter la date de la récolte de foin, je n'ai accusé une perte qu'en termes de qualité que j'ai pu absorber en partie. Toutefois, si je n'ai pas du tout pu utiliser mes pâturages, j'ai enregistré une perte totale.

• 1705

Je crois qu'il y a un niveau où il doit y avoir indemnisation. Si nos activités sont affectées et que cela entraîne des pertes économiques, une pleine indemnisation s'impose. Si on opte pour une formule de participation volontaire, je parlerais alors de programme incitatif. Néanmoins, si le fait de nous empêcher d'utiliser cette parcelle de terrain menace la viabilité de notre entreprise, j'estime alors qu'il doit y avoir une indemnisation pleine et entière. En un mot, il faut pouvoir gagner sa vie.

M. Tim Andrew: J'ajoute que je me demande si les membres du comité et le grand public se rendent compte de l'étroite interaction que nous entretenons avec les espèces en péril. Il y avait chez moi une pie-grièche migratrice et, à moins d'un mille de distance, l'habitat de la chouette des terriers.

Nous n'avons pas une très grosse entreprise. C'est plutôt une petite entreprise familiale. Comment pouvons-nous nous permettre de soutenir le mouvement environnemental du pays? C'est la position qui a été adoptée dans notre collectivité. Il est entendu que nous devons prendre soin de ces bêtes, mais ces chouettes se trouvent sur des terres cédées à bail. D'après le rapport Pearse, je ne suis pas admissible à une indemnisation; je suis tout à fait exclu du tableau. Pour ce qui concerne les incitatifs, comme ils ne sont pas sur des terres louées, je ne sais pas non plus si j'y ai droit. Ce projet de loi ne pourra atteindre son objectif que moyennant la coopération. Si vous nous présentez ces deux formules, comment est-il possible de compter sur notre coopération?

Mme Karen Redman: Lorsqu'il était ici, j'ai demandé au Dr Pearse comment il en était venu à suggérer un point critique de 10 p. 100 et une indemnisation de 50 p. 100. D'après lui, ces deux éléments vont de pair et doivent être traités comme un tout. Il n'est pas possible de les dissocier et de se limiter au point critique sans envisager une indemnisation satisfaisante.

J'aimerais simplement souligner que le ministre a toujours estimé que c'est un point de départ.

M. Hugh Lynch-Staunton: Je ne partage pas l'opinion du Dr Pearse car je ne crois pas que la plupart d'entre nous agirions ainsi. Nous considérons l'indemnisation comme un dernier recours. J'estime que si nous pouvions coopérer et améliorer la situation, c'est le choix que nous ferions. Il a sûrement des gens qui ne verront pas les choses ainsi, mais à mon avis, l'indemnisation donne à l'industrie la marge de man«uvre dont elle a besoin pour procéder comme elle l'entend.

M. Jim Turner: J'ajoute également que 10 p. 100 représente un seuil. Ces entreprises agricoles ne réalisent peut-être même pas un bénéfice de 10 p. 100. Leur seuil peut alors se situer à 2, 3 ou 4 p. 100. Voilà notre principale préoccupation. S'il y avait obligatoirement une absorption de 10 p. 100, cela pourrait égorger nombre d'agriculteurs et d'éleveurs.

M. Bob Friesen: Je crois que les agriculteurs ont fait preuve de leur engagement eu égard à la protection de la biodiversité. La question de l'indemnisation constitue une protection, une solution de dernier recours. De toute évidence, les agriculteurs ne peuvent pas se permettre d'absorber même une partie des coûts. S'ils n'ont pas le sentiment que le public canadien appuie fermement l'idée de leur accorder une indemnisation satisfaisante alors qu'ils consentent des sacrifices dans l'intérêt national, cela nuira nettement davantage aux chances de succès de ce projet de loi.

Le président: Merci, Mme Redman.

M. Friesen, vous pouvez peut-être répondre à la question suivante. Comme vous le savez déjà, dans quatre provinces ayant un secteur agricole assez développé, la législation provinciale prévoit la protection obligatoire de l'habitat des espèces en péril. Ces mesures législatives ont été mises en oeuvre depuis un certain temps déjà. Toutefois, aucune de ces législations provinciales ne comporte de dispositions sur l'indemnisation. Pouvez-vous nous dire si les agriculteurs ont eu à faire face à certaines difficultés à cause de ces législations provinciales, particulièrement compte tenu de la déclaration de M. Lynch-Staunton selon laquelle ce sont les agriculteurs qui assument le coût de la protection des espèces sauvages? De toute évidence, même si les lois provinciales s'appliquaient, les agriculteurs ont pu exploiter leurs entreprises. Y a-t-il des éléments de ces législations provinciales que vous aimeriez souligner?

• 1710

M. Bob Friesen: Je ne peux répondre à cette question, monsieur le Président. Je ne connais pas bien les lois provinciales. Je ne peux parler que d'anecdotes concernant le Manitoba, où existe le programme de protection des habitats fauniques, notamment Canards Illimités, qui a collaboré avec les agriculteurs. Il y a eu des partenariats. Toutefois, je ne peux parler de l'aspect obligatoire des lois provinciales.

Le président: Des dispositions concernant la protection obligatoire de l'habitat ont été intégrées dans la législation de quatre provinces.

M. Ward.

M. Norman Ward: Si vous me le permettez, je signale qu'en Alberta, des mesures législatives sont en application depuis environ trois ans en vertu de la Wildlife Act. On élabore actuellement la liste de la flore et, au cours des deux dernières années, on a établi une liste de la faune.

À chaque comité provincial, la question de l'indemnisation est invariablement soulevée.

Le processus de plan de rétablissement pour plusieurs espèces en péril débute à peine cette année, au printemps. Une des espèces visées est la gélinotte des armoises, dans le sud-est de l'Alberta.

La question de l'indemnisation n'a pas été abordée, et je peux vous assurer qu'il y a des réunions. En fait, à la réunion de lundi prochain, les représentants de l'industrie vont aborder le sujet avec le ministre du développement durable. Donc, la question n'a pas été réglée; elle n'a fait que languir. J'ose espérer qu'elle sera réglée au cours de l'année.

Le président: Merci.

M. Friesen, à la page 4 de votre mémoire, figure un énoncé fort rassurant et certainement très pertinent à la discussion de cet après-midi. Au paragraphe 3, vous indiquez ce qui suit:

    Ce processus comprend quatre étapes, soit l'inscription d'une espèce, la prise de contact avec le propriétaire terrien, l'élaboration de stratégies de rétablissement et la mise en place de plans d'action. Cette façon de faire est logique et conforme aux principes directeurs des projets d'intendance.

J'estime cette déclaration très bien formulée et fort encourageante.

Dans son rapport, le Dr Pearse a indiqué que l'indemnisation ne devrait être accordée qu'aux personnes non désireuses ou incapables de participer aux projets d'intendance. Pourriez-vous nous donner des éclaircissements sur le fonctionnement de ce processus? Il semble, d'après les propos du Dr Pearse qu'un régime d'indemnisation ne s'appliquerait que dans les cas où un propriétaire foncier refuse de participer à un projet d'intendance.

M. Bob Friesen: Je pense qu'une des responsabilités des agriculteurs est d'essayer de participer à ces projets.

Dans l'extrait de notre mémoire que vous venez de citer, nous parlons bien de «la prise de contact avec le propriétaire terrien, l'élaboration de stratégies de rétablissement». Néanmoins, nous précisons ce qui suit: «Nous sommes d'avis que ce processus a de fortes chances de succès si l'on s'assure de la collaboration des propriétaires terriens sur lesquels ces plans auront des conséquences.»

Nous n'estimons pas que l'indemnité doive être accordée en fonction du désir ou du refus de participer. Nous sommes plutôt d'avis que l'indemnisation doit reposer sur des incitatifs et des partenariats et qu'il faut retenir une approche gagnante. Si toutes les autres options échouent et si, en fait, il en résulte des frais pour le propriétaire foncier, il devrait y avoir indemnisation. De toute évidence, les autres stratégies mentionnées dans ce document sont les options privilégiées.

Le président: Comme nous le concluons à la lecture du rapport Pearse, les projets d'intendance s'avèrent la formule à adopter, à condition d'être mis en «uvre et d'attirer la participation. L'indemnisation ne serait envisagée que si le propriétaire foncier n'était pas disposé ou était incapable de participer.

• 1715

M. Bob Friesen: Cela doit alors être une pleine indemnisation. À l'instar de M. Menzies, j'estime que si les agriculteurs doivent assumer la plus grande part des coûts dans l'intérêt public, nous ne pouvons appuyer le projet de loi. Toutefois, vous pouvez certainement conclure, d'après notre intervention, que nous estimons cela réalisable, si le projet est bien structuré et que nous pouvons adopter une approche susceptible d'être couronné de succès, à laquelle s'ajouterait une indemnisation satisfaisante.

Le président: À condition que vous compreniez clairement la position du Dr Pearse. C'est la raison pour laquelle j'ai posé cette question.

M. Bob Friesen: Je regrette, monsieur le Président, je ne suis pas ici pour répondre au Dr Pearse. Je dis simplement que les éléments du projet de loi que nous appuyons figurent dans ce document. Nous croyons que cela est réalisable. Nous estimons que les agriculteurs assurent bien l'intendance de la terre et de l'environnement.

Le président: C'est la même considération générale dont il est question à la page quatre de votre mémoire.

M. Bob Friesen: Nous devrions faire l'essai des stratégies qui sont suggérées, mais n'oublions pas que l'appui est conditionnel à une indemnisation pleine et entière.

Le président: «Pour ceux qui ne le désireraient pas ou qui ne pourraient pas coopérer», voilà où se trouve la distinction. De toute évidence, les participants aux projets d'intendance vont être engagés dans le programme d'intendance et une entente sera conclue.

M. Bob Friesen: Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le Président, un agriculteur peut participer à un bon programme d'intendance, mais il peut quand même devoir arrêter sa moissonneuse-batteuse. Si cela entraîne une diminution de la qualité de sa récolte et des pertes financières, il devrait alors faire l'objet d'une indemnisation.

Le président: L'arrêt de toutes les moissonneuses-batteuses sera probablement pris en compte.

M. Horner.

M. Jack Horner: Monsieur le Président, j'aimerais simplement faire des observations sur le rapport Pearse, concernant votre question et celle de Mme Redman. À mon avis, le Dr Pearse suggère un point critique de 10 p. 100 dans son rapport pour éviter que les agriculteurs et les éleveurs n'abusent de l'indemnisation et, autrement dit, comptent là-dessus pour vivre. C'est tout à fait la mauvaise attitude à prendre.

En fait, l'objectif du projet de loi est d'assurer la protection des espèces en péril.

Le président: En plus, M. Horner, de favoriser l'intendance et toutes les mesures positives.

M. Jack Horner: Oui, mais l'objectif est d'assurer la protection des espèces en péril. Si vous estimez avoir besoin de la coopération des éleveurs et des agriculteurs pour protéger les espèces en péril, alors le degré de coopération sera directement fonction de l'indemnisation. Que cette réalité nous plaise ou non, c'est celle à laquelle nous sommes confrontés. Nous en sommes conscients. Nous savons que c'est un fait établi. La nature humaine étant ce qu'elle est, le degré de coopération variera. S'il y a un problème au sujet de la coopération, si on veut déterminer si Jack Horner compte sur l'indemnisation pour vivre, alors il faut s'en remettre à un organisme neutre.

Le président: Vous pourriez me présenter des milliers de cas, M. Horner, où la coopération ne s'achète pas. Il y a énormément de coopération pour laquelle il n'est pas possible de payer, et vous êtes le premier à en faire la preuve.

M. Jack Horner: En Alberta, 7 000 puits ont été creusés sur des terres cédées à bail. C'est le conseil d'arbitrage qui règle les différends concernant les dommages ainsi causés. Ce conseil d'arbitrage est nommé par le gouvernement de l'Alberta et les éleveurs considèrent ses décisions exécutoires. Je ne vois pas pourquoi, un conseil neutre ne pourrait être nommé ici. Les éleveurs et les agriculteurs seraient tenus d'accepter les décisions rendues. Si le conseil estime que les dommages représentent 10 p. 100 ou 90 p. 100, l'indemnisation est accordée et la protection des espèces en péril est assurée. Voilà l'objectif de l'exercice. Il s'agit de protéger les espèces en péril, non de faire en sorte que les éleveurs conservent leur gagne-pain. Les éleveurs ne vont pas gagner leur vie aux dépens des espèces en péril.

Le président: L'objectif est également d'éviter toute confrontation et d'encourager la coopération.

M. Jack Horner: C'est bien cela. Voilà le degré de coopération.

Le président: Bien.

M. Benoît, s'il vous plaît.

M. Léon Benoît (Lakeland, AC): Merci, monsieur le président.

La question revêt beaucoup d'importance pour les agriculteurs et les éleveurs, comme vous n'êtes pas sans le savoir. Nombre des personnes ici présentes ont interrompu leurs activités agricoles et d'élevage pour venir témoigner aujourd'hui. Je les remercie de leur intervention et je les félicite du bon travail réalisé jusqu'ici. Beaucoup d'entre vous ont participé dans le passé à la suppression de deux très mauvaises mesures législatives et j'ose espérer que vous aurez assez d'influence pour que le présent projet de loi soit modifié de façon à donner les résultats visés.

C'est ce qu'a laissé présager l'assemblée publique qui a eu lieu il y a environ deux semaines, à St. Paul, en Alberta. Soixante-dix personnes avaient été invitées, mais en tout quatre-vingt-dix étaient présentes. L'assemblée avait été organisée par Stan Harder, je crois qu'il fait partie de l'association agricole. Il y avait également des représentants de groupes d'agriculteurs, de municipalités et d'associations de chasse et de pêche ainsi que des producteurs de bétail. La discussion s'est avérée fort intéressante. Ce n'était pas une discussion anarchique. C'était vraiment excellent.

• 1720

Deux des principaux points soulevés, qui doivent être inclus dans le projet de loi, sont l'approche coopérative, notamment au moyen de partenariats et de régimes d'incitatifs. En outre, comme nombre d'intervenants l'ont mentionné, l'approche coopérative n'est pas possible sans indemnisation équitable, établie en fonction de la valeur du marché. Ces deux conditions sont interdépendantes.

J'ai deux questions à ce sujet. En premier lieu, si ces éléments ne sont pas inclus dans le projet de loi, pensez-vous vraiment qu'il assurera la protection des espèces en péril tel que son objet l'énonce? Ou, comme certains intervenants le craignent, pourrait-il avoir une incidence négative?

La seconde question s'adresse à M. Menzies et au représentant des éleveurs de bétail, mais un seul d'entre eux peut répondre. C'est une question que beaucoup des gens se posent. Cette mesure législative fédérale s'avère-t-elle vraiment indispensable? Contribuera-t-elle à la sauvegarde des espèces en péril? Est-elle vraiment nécessaire compte tenu des lois provinciales qui existent déjà?

Ma question s'adresse à vous deux parce que, M. Menzies, vous avez laissé entendre que la mise en «uvre d'une mesure législative fédérale se justifiait uniquement par la possibilité d'appliquer le Code criminel. De plus, les éleveurs de bétail déclarent, dans leur mémoire, que leur devise est «La voix de l'environnementalisme du libre-échange depuis 1896». Or, vous soutenez que votre groupe croit que «la libéralisation des marchés offre, à l'ensemble de la société, à long terme, le moyen de conserver et d'accroître les ressources, en plus d'en tirer des avantages économiques.»

Voici la question que je vous adresse à tous deux: Cette mesure législative s'avère-t-elle nécessaire, au niveau fédéral, compte tenu de la façon dont vous envisagez la situation?

Le président: Merci, M. Benoît.

Aimeriez-vous répondre? M. Menzies, s'il vous plaît.

M. Ted Menzies: Monsieur le Président, la question s'adresse à moi.

Nous croyons certainement qu'il est presque redondant d'envisager une telle mesure législative au palier fédéral, alors qu'il y a déjà des lois en place, pas dans toutes les provinces, mais dans plusieurs provinces et que les précédents indiquent que cette formule fonctionne. M. Ward a affirmé que la loi était appliquée avec succès, mais qu'on la met de côté. Pourquoi les provinces cèdent-elles cette responsabilité au gouvernement fédéral alors qu'elles peuvent elles-mêmes l'assumer?

Le président: M. Pope

M. David Pope: Je siège au comité albertain sur les espèces en péril. Nous nous penchons sur la question depuis trois ans. C'est un groupe très équilibré où tous les grands intervenants sont représentés. Nous avons eu des discussions très franches, mais nous demeurons à l'écoute et élaborons des budgets pour intervenir en Alberta.

Pour répondre à votre question, l'Institut Fraser a publié, en 1999, dans le Critical Issues Bulletin, une étude réalisée de Mme Laura Jones, intitulée «Crying Wolf? Public Policy on Endangered Species». À notre avis, nous n'avons pas vraiment besoin de ce genre de mesure législative au palier fédéral. C'est ce qu'on constate quand des citoyens du Montana et du Wyoming, viennent en Alberta et en Colombie-Britannique chercher des spécimens de ces soi-disant espèces menacées d'après leur loi sur la protection des espèces en péril, comme le loup et le grizzli.

Je pense simplement qu'on en tue trop. Nous allons proposer de très bons programmes en Alberta, et je pense que le projet de loi n'est pas nécessaire.

Le président: Merci.

M. Herron suivi de Mme Redman.

M. John Herron: J'étais très intéressé par la question des détenteurs de baux pour les terres agricoles. Avez-vous songé à une formulation précise pour une modification éventuelle sur cette question?

M. Bob Friesen: Je ne l'ai pas ici. Puis-je recommuniquer avec vous à ce sujet?

M. John Herron: Si vous l'avez, j'aimerais bien en prendre connaissance.

• 1725

La Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs et la Loi sur les pêches sont en place depuis de nombreuses années et il y a évidemment nombre d'interdictions qui entrent en jeu. Y a-t-il des cas où les interdictions prévues par ces deux lois fédérales ont entraîné des poursuites judiciaires frivoles et des difficultés particulières ou ordinaires pour les agriculteurs?

M. Jim Turner: Le moins que je puisse dire quant à l'indemnisation c'est qu'avec le Plan nord-américain de gestion de la sauvagine, malgré une abondance de canards et d'oies dans certains secteurs, il est possible d'intervenir et de terminer les récoltes. Souvent, il y a indemnisation pour les pertes liées aux récoltes à cause de la sauvagine.

M. Tim Andrew: Si nous parlons de la Convention concernant les oiseaux migrateurs et en quoi elle affecte la Loi sur les espèces en péril, et comment elle s'y compare, rien ne prendra forme. Tout le monde sait que Canards Illimités reçoit, en vertu de la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, un financement pour élaborer ses programmes et que cela s'avère avantageux pour les agriculteurs. Présentement, je suis un des bienfaiteurs du programme de Canards Illimités. Il y a sur mon bail, un énorme projet d'arrosage duquel je peux tirer profit dans cette période de sécheresse que connaît le Sud de l'Alberta.

Les gens ne savent pas que c'est grâce à la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs. Ils constatent simplement que le projet de Canards Illimités comporte des avantages pour la collectivité. Pour l'instant, nous estimons que la Loi sur les espèces en péril constitue une entrave et une menace à l'industrie agricole à cause de la perte de terres et des énormes amendes prévues. Nous n'entrevoyons pas l'arrivée des programmes incitatifs nécessaires pour assurer les intérêts de nos collectivités et nous faire participer à la solution. Nous voyons les amendes et les piètres résultats de la loi américaine. Dans le secteur agricole canadien, les agriculteurs et les éleveurs ont véritablement ressenti les effets de la loi américaine. Nous attendons toujours les incitatifs. Cette question nous préoccupe sérieusement.

M. John Herron: Monsieur Pope.

M. David Pope: Monsieur Herron, pour répondre à votre question concernant la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, je crois que la distinction dont nous devons être conscients c'est qu'elle s'applique au corpus, à l'oiseau lui-même. Dans la Loi sur la protection des espèces en péril, nous nous préoccupons de l'habitat, des terres sur lesquelles l'oiseau peut se poser et je crois qu'il s'agit là de la distinction.

En ce qui concerne le libellé utilisé pour l'indemnisation du titulaire de domaine à bail, il s'agit simplement d'un concept, mais la position des éleveurs de bétail en ce qui a trait au titulaire de domaine à bail est la suivante: si le gouvernement fédéral, par l'entremise de son filet de sécurité, en vertu du pouvoir qui lui serait conféré dans le projet de loi, intervenait et modifiait la convention de bail, le contrat conclu entre le cheptelier et la province d'Alberta, quelque préjudice qui pourrait être causé par ces changements ferait l'objet d'une demande d'indemnisation en vertu de notre droit de servitude par le cheptelier, le propriétaire du pâturage—ainsi que du bailleur, dans ce cas la province d'Alberta, qui, selon ce que semble penser M. Pearse ne devrait pas être indemnisée pour la perte de ces redevances. Il ne croit pas que notre province devrait recevoir une indemnisation de ce genre.

M. John Herron: Un scénario final très court...

Le président: C'est au détriment de Mme Redman, parce que nous entendrons très bientôt la sonnerie pour un vote.

M. John Herron: Je serai très bref, Karen.

En ce qui concerne cette mesure législative, je suis d'accord pour dire que le modèle américain ne fonctionnera pas. M. Andrew a mentionné le fait que nous devions vraiment expliquer les mesures incitatives qui sont déjà en place. C'est la raison pour laquelle nous croyons à une approche progressive. Voire même à donner le crédit au ministre à cet égard. Ils ont en fait parlé un peu d'initiatives en matière d'intendance avant que nous devions en venir au régime d'indemnisation.

Ne voyez-vous pas messieurs que cela est légèrement différent du modèle américain à cet égard? N'en fait-on pas un petit peu plus au Canada?

M. Norman Ward: Nous nous dirigeons certainement vers la loi «faite au Canada». J'étais assis ici devant les membres de ce comité il y a cinq ans. Le mot Canada ne figurait pas alors dans la mesure législative ce qui n'est pas le cas dans le nouveau projet de loi. Il nous faut simplement définir le mot Canada. Quand nous l'aurons fait, toutefois, je crois que la coopération, l'intendance, et le partenariat couleront de source.

• 1730

Si nous voulons vraiment sauver les espèces en péril, si tel est notre objectif, tout le monde doit alors être sur la même longueur d'onde en ce qui a trait à l'habitat. Sans cette unanimité, ce projet de loi n'atteindra pas son objectif.

Je suis un environnementaliste. Je veux que ça marche en ce qui a trait à l'habitat et aux espèces en péril. Il faut que le mot Canada figure dans le titre et que cela signifie quelque chose.

Le président: Madame Redman.

Mme Karen Redman: Merci. Je vais être brève pour l'amour de M. Herron.

Monsieur Turner, je vais revenir à vous en raison d'une préoccupation qui a été soulevée par beaucoup de monde. Fondamentalement, vous parliez de la mesure de dernier recours dont fait état la mesure législative, les amendes et les sanctions en vérité, qui n'interviennent en fait que si quelqu'un en toute connaissance de cause détruit l'habitat ou cause des dommages à une espèce en péril.

Ce sont les tribunaux qui détermineraient les peines maximales. Il n'y a ni amende ni peine d'emprisonnement automatique. Il me semble que tout le monde suppose que tout s'enclencherait automatiquement. Il s'agit d'une pratique assez courante selon laquelle les tribunaux décideraient de l'importance de la destruction et détermineraient si elle était volontaire. Je me demande pourquoi tout le monde trouve à redire de cela alors qu'il faudra démontrer l'intention manifeste.

M. Jim Turner: La plus grande crainte porte sur les amendes élevées imposées aux personnes morales. La plupart des exploitations agricoles sont constituées en société. Les producteurs agricoles craignent de se voir imposer ces amendes maximales. Cela n'est vraiment pas très encourageant. C'est peut-être exagéré, mais c'est assurément ce que les gens craignent.

C'est ce qui me préoccupe au sujet de ce projet de loi, qu'il nous faille tenir compte de toutes ces craintes. Je pense que pour obtenir la coopération des propriétaires fonciers et les rallier à la cause, il nous faut comme renfort l'indemnisation. Je ne crois pas qu'il faudra y recourir. Je crois qu'il faut donner des assurances qu'il n'y aura pas d'amende aussi extrême de manière rallier à la cause les familles rurales et les propriétaires fonciers. Je crois qu'il s'agit là du point le plus important.

C'est peut-être une question d'éducation. Mais il s'agit assurément des craintes qui sont éprouvées et elles sont très réelles.

Le président: Madame Treslan.

Mme Denise Treslan (directrice exécutive, Western Canadian Wheat Growers Association): Comme Ted l'a mentionné dans notre exposé, je crois que la question est de savoir qui décidera si cet habitat a été détruit, endommagé ou modifié accidentellement ou par inadvertance ou à dessein.

C'est là où nous demandons que les intervenants et les groupes d'agriculteurs participent au processus du COSEPAC de manière à ce que les régions et les groupes d'agriculteurs soient largement représentés.

Une autre crainte exprimée par les milieux agricoles c'est que quelqu'un, peut-être des scientifiques... Nous avons tous, comme l'a dit M. Pope, nos propres emplois du temps, nos propres idées sur ce que nous voulons protéger. Je ne veux pas que quelqu'un se présente sur mes terres pour me dire que je ne peux utiliser ma moissonneuse-batteuse un certain jour, que je ne peux semer un certain jour, que je ne peux pulvériser des insecticides un certain jour, que je ne peux faire ces choses sous prétexte d'un danger perçu, ce qui est arbitraire.

Par conséquent, qui va décider pour moi si je gère ou non mes terres de façon responsable? Est-ce que quelqu'un va venir me dire que je ne suis pas un bon intendant alors que je crois au fond de moi-même et avec les meilleures intentions que je suis les meilleures pratiques culturales possibles?

Le président: Monsieur Pope, vous avez 60 secondes.

M. David Pope: Pour répondre à votre question, de la façon dont les choses sont structurées à l'heure actuelle, la réponse ne se sera donnée que par un tribunal après des litiges coûteux que peu d'entre nous pouvons vraiment se permettent.

Le président: C'est ce que vous supposer, monsieur Pope.

M. David Pope: Oui.

Le président: Vous avez droit à votre opinion, mais il se peut que vous vous trompiez carrément.

Je ne voudrais pas permettre à Mme Treslan de rentrer chez elle avec ce genre de réponse et l'empêcher de jouir de ses terres.

Comme nous devons aller voter dans quelques minutes, nous devons nous quitter maintenant.

Au nom des membres du comité j'aimerais vous remercier de nous avoir fait part de vos craintes, vos préoccupations, vos conseils ainsi que de vos expériences pratiques qui sont certes variés et très valables.

Quant à la raison pour laquelle cette loi s'impose, je dirais en ce qui a trait aux propos qu'a tenus le Fraser Institute que nous connaissons tous son inclination politique et je ne crois pas que nous devrions le prendre au sérieux. Par contre, nous prenons au sérieux le fait que le nombre d'espèces en péril soit en hausse et, par conséquent, il faut absolument faire quelque chose. Quant à savoir comment nous nous y prendrons, bien sûr, c'est la question que nous nous posons tous et c'est la raison pour laquelle nous nous débattons pour la troisième fois avec ce genre de mesure législative.

• 1735

Je le répète, je trouve très réconfortant le paragraphe qui se trouve à la page 4 du mémoire de M. Friesen. Je crois que c'est celui auquel nous souscrirons pour ce qui est des programmes de rétablissement et la manière dont nous nous y prendrons dans un esprit de collaboration.

Il est légitime de mentionner les craintes. Il faudra les apaiser. Nous devrons nous assurer que la loi tient compte de la pratique du monde. Dans ce sens, votre présence ici aujourd'hui a été très valable et nous tiendrons compte de ce que vous et d'autres témoins nous ont dit. Il arrive parfois que les opinions convergent. C'est l'art de la politique et nous essayerons à tout le moins, dans la mesure du possible, d'en arriver à une convergence.

Monsieur Horner, à vous le dernier mot.

M. Jack Horner: J'aimerais donner à Mme Redman un exemple de coopération.

Nous voulons coopérer. Il y a quelques années j'avais un terrain situé près d'un plan d'eau. Je voulais couper du foin. Des gens de Canards Illimités sont venus me voir et m'ont dit: «Monsieur Horner, pourriez-vous attendre après l'éclosion des oeufs des canards?» J'ai répondu: «Combien de temps cela prendra-t-il?» Ils m'ont répondu: «Deux semaines. N'ayez crainte, nous vous indemniserons pour les dommages causés.»

J'ai coopéré entièrement et j'ai été indemnisé adéquatement. Je vous donne simplement un exemple de coopération. Les canards ne sont pas une espèce en péril, bien qu'on ait craint que cela puisse être le cas.

C'est ce l'objectif de cette mesure législative.

Merci, monsieur le président. C'est ce que j'ai aimé...

Le président: Monsieur Horner, ce ne serait pas la dernière fois où vous avez le dernier mot et je suis heureux que vous l'ayez eu.

M. Jack Horner: Merci.

Le président: La séance est levée jusqu'à nouvelle convocation de la présidence.

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