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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 16 novembre 1999

• 1533

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Conformément au mandat que lui confère le paragraphe 108(2) du Règlement, le comité effectue une étude relative à la productivité, à l'innovation et à la compétitivité.

Nous avons aujourd'hui le grand plaisir d'accueillir des représentants du Centre syndical et patronal du Canada, anciennement connu sous le nom de Centre canadien du marché du travail et de la productivité. Nous avons avec nous Mme Arlene Wortsman, directrice, Syndicats, co-chef intérimaire de la direction; et Chris Parsley, économiste principal. Et nous avons aussi le professeur Don Daly de l'université York. Nous sommes ravis que vous ayez pu vous joindre à nous aujourd'hui.

Je suggère que nous entendions d'abord les deux témoins, après quoi nous passerons aux questions. À moins que vous n'ayez une entente différente entre vous, je vais procéder de la sorte, en commençant par le Centre syndical et patronal du Canada, qui figure en premier sur la liste.

Mme Arlene Wortsman (directrice, Syndicats, co-chef intérimaire de la direction, Centre syndical et patronal du Canada): En fait, nous avions demandé au professeur Daly de prendre la parole en premier.

La présidente: Très bien. Nous allons donc commencer par le professeur Daly.

Mme Arlene Wortsman: Je pense qu'il va vous donner une vue d'ensemble, après quoi nous entrerons dans les détails.

La présidente: Très bien. Nous entendrons donc le professeur Daly en premier.

• 1535

M. Don Daly (professeur, Université York): Je vais utiliser le rétroprojecteur.

Je n'ai pas de belles diapositives couleurs comme celles que Serge Nadeau vous a montrées à votre dernière réunion, mais j'ai quand même quelques acétates.

Je voudrais d'abord vous parler des problèmes du Canada en matière de productivité. Je vais en mentionner brièvement deux, après quoi je traiterai surtout d'un troisième.

Je pense qu'il y a en fait trois éléments qui importent pour la performance du Canada dans tout ce domaine. Premièrement, quelle que soit la mesure utilisée, nous avons connu un ralentissement de la productivité depuis les années 70. Entre les années 50 et le milieu des années 70, nous avons eu un taux extraordinairement élevé de croissance et de productivité, comme d'ailleurs la plupart des autres pays industrialisés. Depuis lors, tous les indicateurs montrent qu'il y a eu un très net ralentissement.

Un deuxième problème est que le niveau de vie relatif du Canada a baissé par rapport à celui des États-Unis. Je suis sûr que Serge Nadeau en a parlé dans son exposé. C'est particulièrement apparent en comparaison des États-Unis, mais la plupart des pays européens et le Japon se sont aussi, en un sens, rapprochés des États-Unis. Le Canada est plutôt l'exception.

Le troisième problème se situe dans le secteur manufacturier et porte plus précisément sur le taux de productivité, et c'est ce dont je vais vous parler essentiellement. Je vais donc m'attarder au secteur manufacturier et je vous expliquerai tout à l'heure pourquoi ce point est important. Même si le secteur manufacturier ne représente actuellement que 20 p. 100 de l'économie canadienne et même si cette proportion est à la baisse, ce secteur demeure fort important à un certain nombre d'égards.

Si l'on examine la productivité globale de l'ensemble du secteur manufacturier, le Canada s'est toujours situé très loin derrière les États-Unis en fait de productivité par heure de travail. Si l'on inclut des mesures tenant compte du capital et ainsi de suite, l'écart demeure le même. Mais l'écart s'était refermé quelque peu entre les années 50, époque à laquelle nos données ont commencé à être relativement solides, jusque vers le milieu des années 70. Depuis lors, nous avons recommencé à perdre du terrain par rapport aux États-Unis.

Ce n'est pas ce que les partisans du libre-échange avaient prédit. Nous avions prédit qu'avec le libre-échange, les niveaux de productivité dans le secteur manufacturier se rapprocheraient du niveau des États-Unis, ce qui ne s'est pas produit. Au contraire, l'écart s'est creusé. À mon avis, la question qu'il faut se poser, c'est pourquoi est-ce important?

Je vais m'attarder surtout au secteur de la petite entreprise, et je vais mettre un graphique en rétroprojection dans un instant.

J'ai deux observations à faire. Premièrement, depuis une trentaine d'années, la croissance de l'emploi a été beaucoup plus forte dans les petites entreprises que dans les grandes, mesurées selon les établissements. En fait, depuis 30 ans, il y a eu une baisse en chiffres absolus du nombre d'employés dans les grands établissements de plus de 500 employés. C'est dans le secteur des petites entreprises que l'emploi a connu une forte croissance, et c'est un aspect très important. Cette augmentation de l'emploi dans les petites entreprises est beaucoup plus marquée au Canada qu'aux États-Unis.

Ce graphique montre les niveaux relatifs de valeur ajoutée par employé dans les grandes usines et les petites. Comme on peut le voir, il y a un écart important entre le début de la période, qui se situe au début des années 70, jusqu'au milieu des années 90, dernières années pour lesquelles nous avons des données. Par rapport aux États-Unis, il y a eu un léger gain dans les grandes usines par rapport à la moyenne nationale américaine, mais dans les petites usines, une baisse spectaculaire a été enregistrée. Cette plus faible productivité dans les petits établissements se manifeste aussi par des salaires plus bas, des profits inférieurs en moyenne, etc. Nous avons donc ici un problème dans les petites entreprises pour ce qui concerne le niveau de productivité, surtout quand on songe que le nombre d'emplois a tellement augmenté.

• 1540

Je vais maintenant aborder le troisième point que j'ai mentionné au début. Est-ce important? Ces aspects de la productivité du Canada que j'ai mentionnés ont-ils de l'importance? Je réponds que oui, ils en ont à trois égards. Premièrement, pour ce qui est du niveau de vie. En un sens, on ne peut pas avoir au Canada un niveau de vie élevé pendant une longue période à moins que le niveau de productivité soit élevé. Or, ce n'est pas ce qui se passe, surtout dans le secteur manufacturier.

Par ailleurs, ils ont également de l'importance au chapitre de la compétitivité internationale, parce qu'avec le libre-échange et l'augmentation spectaculaire du commerce des produits manufacturés, la compétitivité internationale de l'ensemble du secteur de la fabrication, surtout dans les petites entreprises, par rapport aux États-Unis, est une question très importante. Bien que l'on ait accordé beaucoup plus d'attention à l'augmentation spectaculaire des exportations de produits manufacturés, qui a bel et bien eu lieu, il y a également eu une forte augmentation des importations de produits manufacturés. Par conséquent, toute la question de la concurrence des importations, pas seulement en provenance des États-Unis, mais aussi de pays asiatiques, du Mexique, etc., est devenue beaucoup plus importante à cause de cette forte augmentation du commerce international. Le rendement sur le plan de la productivité est un élément central de cette performance commerciale.

La troisième raison pour laquelle c'est important, c'est l'emploi. Tant que les niveaux de productivité seront bas, tant que les profits seront bas, les compagnies seront moins encouragées à investir, ce qui pourra influer sur le taux de croissance de l'ensemble du secteur manufacturier. Ce sont donc les trois raisons pour lesquelles la productivité est importante.

Je vais maintenant aborder le dernier point dont je veux vous parler. Y a-t-il place pour une intervention gouvernementale dans ce domaine? C'est une question à laquelle il est difficile de répondre, parce que nous ne connaissons pas aussi bien que nous le voudrions les problèmes qui se posent dans les petites entreprises du secteur de la fabrication. Nous menons actuellement une enquête sur les petites entreprises de l'Ontario. Ce travail n'est pas terminé, mais un certain nombre d'éléments s'en dégagent déjà. D'abord, toute la question de l'imposition des profits des sociétés. De façon générale, le taux d'imposition des sociétés au Canada est bien supérieur à la moyenne de l'OCDE. Les impôts sur les profits des sociétés sont fort élevés. Par contre, l'impôt sur les profits des sociétés est vraiment très différent en ce qui a trait aux petites entreprises, à deux égards.

Premièrement, l'impôt sur les profits des sociétés est beaucoup moins lourd si les profits sont inférieurs à 200 000 $ par année. Deuxièmement, le traitement des dividendes est assez généreux. Le résultat net, c'est-à-dire le traitement différent des petites entreprises au chapitre de la fiscalité, est l'un des facteurs qui ont contribué à mon avis à la croissance plus rapide de l'emploi au Canada qu'aux États-Unis.

Cela a pour effet d'encourager la création de petites entreprises, mais aussi de garantir que celles-ci demeureront petites. Je crois que la fiscalité des sociétés peut causer des distorsions regrettables dans l'ensemble du secteur des entreprises. C'est un domaine où l'intervention gouvernementale peut être importante.

Il y a aussi toute la question du taux de change. Comme vous le savez tous, le dollar canadien s'est beaucoup déprécié par rapport à la devise américaine depuis 15 ou 20 ans, ce qui a atténué en partie l'effet de la concurrence des produits importés et a rendu les exportations plus rentables. Si le dollar canadien devait prendre de la valeur, cela pourrait avoir des effets nuisibles très importants, à la fois en termes d'exportations et de concurrence des importations. Je pense que les secteurs vulnérables sont les petits établissements du secteur de la fabrication, où les niveaux de productivité sont déjà bas, comme on vient de le voir. C'est donc un aspect potentiellement vulnérable de l'ensemble du système.

• 1545

À l'occasion, on évoque la possibilité que le gouvernement tente d'introduire des mesures sélectives, des mesures fiscales, des encouragements, notamment dans le domaine de la R et D. On a évoqué diverses possibilités. Mais je doute beaucoup que de telles mesures puissent être vraiment efficaces pour les petites entreprises du Canada dans le secteur de la fabrication.

Au Canada, nous avons essentiellement 30 000 établissements de moins de 100 employés chacun. Cela fait beaucoup de compagnies et il n'est tout simplement pas possible pour le gouvernement fédéral, ni même pour une banque, de savoir vraiment quelles petites entreprises vont prospérer et lesquelles se retrouveront en difficulté et auront peut-être disparu dans cinq ans. Il est donc très difficile d'avoir des incitatifs différentiels dans un sens ou dans l'autre.

On retrouve les mêmes écarts au chapitre des profits que dans le domaine de la productivité. Le gouvernement n'est tout simplement pas bien renseigné là-dessus. Et d'après l'expérience passée, notamment au Japon, quand on a tenté d'adopter des mesures sélectives en matière de fiscalité et de subvention, le gouvernement s'est retrouvé à renflouer les perdants au lieu de favoriser les gagnants.

Je suis donc très sceptique et je ne pense pas qu'une politique sélective puisse vraiment donner des résultats. Je pense que nous devrions plutôt nous attarder à certains autres domaines plus généraux tels que la formation, l'éducation, la diffusion de la technologie, le régime fiscal, etc.

Voilà les principales observations que je voulais faire, mais si vous avez des questions à poser après l'autre exposé, je me ferai un plaisir de tenter d'y répondre.

La présidente: Merci beaucoup, professeur Daly.

Madame Wortsman.

Mme Arlene Wortsman: Merci beaucoup. Je vous remercie d'avoir invité le Centre syndical et patronal du Canada à comparaître devant vous.

Notre organisation s'intéresse aux niveaux de productivité et aux taux de croissance depuis sa création en 1984.

Le Centre syndical et patronal du Canada, qui était auparavant connu sous le nom de Centre canadien du marché du travail et de la productivité, est une organisation indépendante, nationale, bipartite qui contribue à la croissance économique et au mieux-être social par l'amélioration des pratiques patronales et syndicales au Canada et en donnant des conseils concertés sur les questions de politique publique. Le centre représente à la fois les intérêts du patronat et des syndicats.

Ces dernières années, nous avons vu chez nos clientèles respectives une préoccupation croissante au sujet de la productivité. Cela est bien ressorti du sondage que nous avons mené en 1998 auprès des leaders. En effet, près de 40 p. 100 des dirigeants du monde des affaires et près de 20 p. 100 des dirigeants syndicaux se sont dit préoccupés par le mauvais bilan du Canada en matière de productivité, et ces chiffres représentent une augmentation considérable par rapport au dernier sondage effectué il y a deux ans.

Cette inquiétude peut être considérée comme encore plus vive chez les deux groupes si l'on envisage la productivité non plus isolément, mais plutôt comme un moyen d'obtenir certains avantages tels que la croissance économique, la création d'emplois et la protection des emplois, la répartition des revenus et un niveau de vie plus élevé.

Il faut d'abord faire deux observations essentielles au sujet de la position du Centre syndical et patronal du Canada sur la productivité.

Le premier point, c'est que le Centre n'investit pas énormément de temps et d'énergie pour réfléchir à diverses questions empiriques quant à la façon de mesurer la productivité multifactorielle totale dans un contexte macro-économique. Avec l'importance accrue des immobilisations incorporelles des compagnies, par exemple le savoir et les compétences, il devient plus difficile de mesurer précisément la productivité au niveau macro-économique.

Par conséquent, le Centre s'efforce plutôt et s'est toujours efforcé de mesurer la productivité au niveau micro-économique. Nous croyons que ce sont les lieux de travail du Canada qui sont au coeur de la performance en matière de productivité, particulièrement dans une économie caractérisée par d'incessants changements en profondeur. En fin de compte, c'est là que se joue la performance nationale en matière de productivité.

Nous reconnaissons bien sûr que le lieu de travail ne fonctionne pas en vase clos et que la productivité est fortement influencée par des facteurs extérieurs comme les niveaux nationaux et internationaux. Mais en tant qu'organisation bipartite, nous mettons l'accent sur les éléments sur lesquels le patronat et les syndicats peuvent exercer une influence au niveau des lieux de travail.

On néglige souvent à tort le contexte micro-économique dans le débat sur la productivité au Canada. La hausse de la productivité ne découle pas seulement de l'introduction de nouvelles technologies, mais aussi de la façon dont elle est appliquée et du contexte dans lequel elle l'est.

• 1550

D'autres facteurs sont tout aussi importants: la façon dont le travail est organisé, les habiletés nécessaires pour l'effectuer, et les relations entre la direction et la main-d'oeuvre. Sur ce dernier point, il est essentiel, pour réaliser des gains au chapitre de la productivité, de maintenir de bonnes relations entre la direction et les employés, peu importe à quel niveau, c'est-à-dire au niveau de l'entreprise, au niveau sectoriel, ou bien par l'entremise d'institutions nationales comme la nôtre.

Après tout, ce sont les patrons et les employés qui sont responsables en fin de compte de l'introduction et de la mise en oeuvre d'innovations dans l'organisation du travail, la gestion des ressources humaines et les relations industrielles, innovations qui entraînent des gains au chapitre de la productivité au niveau micro-économique. Il est vrai que les relations patronales-syndicales pourraient être meilleures car tout indique que de mauvaises relations peuvent nuire au rendement. Collectivement, le patronat et les syndicats peuvent agir directement sur la productivité d'une manière qui ne peut pas se faire à un autre niveau.

En réponse aux pressions de la concurrence et à l'évolution du marché qui ont cours présentement, les dirigeants d'entreprise doivent faire des choix stratégiques en matière de production et de technologie et, de concert avec les employés et leur syndicat, les employeurs doivent aussi faire des choix stratégiques en termes de réformes organisationnelles et s'embarquer dans un processus conjoint pour opérer celles-ci.

Autrement dit, le patronat et les syndicats sont les principaux acteurs et, s'ils ne consacrent pas durablement leur attention et leur imagination créatrice aux questions d'organisation, il sera tout simplement impossible de réaliser certains gains évidents en matière de productivité, par exemple en ce qui concerne les technologies de communication et d'information.

Il importe de signaler que ce processus continu dans chaque lieu de travail est facilité au niveau sectoriel également, par exemple par des stratégies de ressources humaines, des programmes de formation et des arrangements pour le financement de la formation qui sont fréquemment établis conjointement à l'échelle du secteur. Toute discussion sur les changements des lieux de travail et leurs répercussions sur la productivité doit avoir une large portée. Il y a effectivement un certain nombre de conseils sectoriels qui permettent aux intervenants d'un secteur donné de se réunir pour élaborer des solutions efficaces applicables à l'ensemble d'un secteur. Ces conseils sectoriels peuvent aussi effectuer des travaux de recherche spécifiques sur des questions ou préoccupations qui intéressent l'ensemble d'une industrie.

Ce débat d'une vaste portée doit aussi prendre en compte la conjoncture locale et nationale en termes de relations patronales-syndicales et notre aptitude collective à résoudre les conflits industriels. Notre sondage de 1998 auprès des leaders, dont nous avons parlé antérieurement, indique que de part et d'autre, on est convaincu que de mauvaises relations patronales-syndicales nuisent à la croissance de la productivité des entreprises. Chose certaine, c'est ce que démontre la récente flambée de grèves d'un bout à l'autre du pays, en dépit du fait que le temps perdu à cause de ces conflits ne représente qu'une fraction extrêmement petite de la durée totale du travail.

Notre organisation s'intéresse depuis de nombreuses années à l'établissement de pratiques conformes à la règle de l'art associées à des stratégies de rendement et de productivité élevées que les employeurs, en collaboration avec leurs employés, peuvent mettre en oeuvre dans les secteurs privé et public du Canada.

Le Centre a notamment étudié ce qui constitue les meilleures pratiques dans les domaines suivants: nouveaux modes d'organisation du travail, formation, rémunération, investissement, participation des employés, prise de décisions conjointes et diffusion de l'information. Les efforts du Centre ont aussi fait appel à une consultation poussée auprès du patronat et des syndicats d'un bout à l'autre du pays, par l'entremise de séminaires locaux et de forums nationaux, et aussi par l'élaboration et la diffusion de ressources susceptibles d'aider à transmettre certaines leçons apprises et à encourager l'adoption de pratiques et de systèmes novateurs dans un plus grand nombre d'entreprises canadiennes.

Au fil des ans, dans le domaine de l'organisation du travail, de la gestion des ressources humaines et des relations patronales-syndicales, on a eu souvent tendance à considérer comme un article de foi l'inévitabilité de la hausse de la productivité. Ce point de vue n'était pas sans fondement, puisqu'il existe une abondante littérature internationale qui atteste que les changements apportés sur les lieux de travail peuvent entraîner des retombées intéressantes, en particulier lorsque ce changement permet de mettre en place un certain nombre de meilleures pratiques complémentaires, notamment un degré plus poussé de dialogue patronal-syndical et la prise de décisions en commun.

Pour élaborer ses critères en matière de meilleures pratiques favorables à la hausse de la productivité, le Centre s'est inspiré fortement de l'analyse des études de cas, en plus des très nombreux exemples qui existent au Canada. Les études de cas sont riches en détails et en interprétation possible, et cette approche était logique, compte tenu de notre objectif fondamental qui était de tirer les leçons de l'expérience et de bien renseigner notre double clientèle, c'est-à-dire le patronat et les syndicats. Les études de cas aident également à isoler l'effet de micro-éléments sur la productivité. Les gestionnaires proposent souvent des innovations aux employés et à leur syndicat, dans le but d'exercer une influence positive sur des facteurs de performance spécifiques comme la qualité des produits, la souplesse des horaires ou encore l'acquisition de compétences. Les syndicats, à leur tour, traduisent ces changements en gains spécifiques pour les effectifs, par exemple en ce qui a trait à la sécurité d'emploi, aux congés familiaux ou aux possibilités de formation.

• 1555

Il faut faire une estimation sur le long terme pour bien saisir le gain de productivité au niveau micro-économique découlant de pratiques habituellement diverses et interdépendantes ayant des effets multiples. C'est un exercice complexe. Cela varie d'un endroit à l'autre, d'un secteur à l'autre, et aussi en fonction des relations patronales-syndicales qui régissent le processus.

L'absence de mécanismes permettant de recueillir des données pour chaque lieu de travail aux fins de l'évaluation pose un défi particulier. Nous avons récemment entrepris de mettre au point un outil plus précis pour mesurer ces coûts et avantages micro-économiques ou ceux qui sont propres au secteur primaire, y compris les résultats en termes de productivité qui ajouteraient aux données existantes des études de cas.

Nous avons mis au point un profil d'impact qui pourrait servir à établir une corrélation entre les innovations sur les lieux de travail et une performance opérationnelle potentiellement plus élevée sur une plus longue période, afin de suivre l'évolution future. L'exercice exige d'abord de faire le point sur les variables contribuant à la productivité, et il faut prendre en compte la diversité des lieux de travail.

Ce profil d'impact est un outil qui permet aux dirigeants et aux employés d'observer les progrès tangibles et les résultats de leurs efforts conjoints au niveau de l'entreprise et du secteur. La mise à l'essai initiale dans quatre entreprises a permis d'obtenir des renseignements pertinents à la fois pour les employeurs et les employés. Le profil d'impact permet aux dirigeants et aux employés de mieux planifier leurs pratiques communes afin d'améliorer le rendement sur le lieu de travail.

À mesure que la concurrence mondiale évolue et que l'économie et la population active du Canada reflètent l'utilisation de plus en plus poussée du savoir, de l'information et de la technologie, les relations patronales-syndicales deviennent de plus en plus cruciales pour l'atteinte de nos objectifs nationaux en matière de gains de productivité. Les travaux du Centre ont permis de constater que la plupart des changements antérieurs et actuels apportés aux organisations de travail, à la gestion des ressources humaines et aux relations patronales-syndicales qui sont susceptibles de faire augmenter la productivité sont mis en place lorsqu'une crise est imminente dans un secteur primaire donné. Ce n'est pas mauvais en soi, mais cela indique que l'on ne saurait tenir pour acquise la diffusion plus poussée des meilleures pratiques dans le reste de l'industrie et du secteur public au Canada.

Nous devons relever le défi et tenter de diffuser ce message, en particulier parmi les petites et moyennes entreprises et les secteurs autres que l'industrie manufacturière. Le gouvernement a un rôle à jouer en compilant et en aidant à diffuser des renseignements sur les meilleures pratiques, en particulier dans le domaine de la gestion des ressources humaines et de la collaboration patronale-syndicale. Par conséquent, dans l'intérêt d'une meilleure performance du Canada en matière de productivité, les intervenants du milieu des affaires publiques ont tout à gagner à continuer de cultiver le dialogue et la collaboration entre le patronat et les syndicats à tous les niveaux, et à tabler sur les stratégies novatrices de changement sur les lieux de travail qui ont été appliquées avec succès ces dernières années.

Merci beaucoup.

La présidente: Merci beaucoup, madame Wortsman. Nous allons maintenant passer aux questions.

Monsieur Penson.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Merci. Je souhaite la bienvenue à tous les membres du panel.

Monsieur Daly, vous avez abordé deux ou trois questions dans votre exposé... Vous avez parlé de la politique gouvernementale et de l'influence qu'elle peut exercer sur la productivité. J'ai remarqué que le professeur Fortin, de McGill, a dit que la politique gouvernementale peut avoir une grande influence. Il propose de rembourser la dette et de baisser les impôts; ce sont à son avis les deux meilleurs moyens de relancer l'investissement dans l'industrie et d'obtenir ainsi une hausse de la productivité. Êtes-vous d'accord avec lui?

M. Don Daly: Oui, il a fait un exposé vraiment très poussé—vous faites allusion à l'exposé de l'Institut C.D. Howe. Il est fort complet. Il se penche depuis de nombreuses années sur les politiques monétaires et fiscales, la dette, etc. Chose certaine, il a absolument raison de dire que la différence clé entre le Canada et les États-Unis, sur le plan fiscal, concerne le fardeau plus lourd que le Canada doit porter en matière d'intérêts et l'incidence de cet état de choses, par exemple, sur la fiscalité des entreprises. Je suis donc d'accord avec bon nombre de ses observations.

Mais il montre, entre autres, que la demande qui résulterait de ces changements, en matière de fiscalité notamment, réduirait l'écart au chapitre de la productivité. Et si je me rappelle bien, il estimait que cela interviendrait pour seulement trois points de pourcentage environ, soit un dixième de la différence. Il a dit que c'était important, mais ce ne serait pas un facteur fondamental pour ce qui est de la productivité.

• 1600

Je pense que la faiblesse de son argumentation tient au fait qu'il ne maîtrisait pas vraiment aussi bien les aspects micro-économiques de la productivité que les grandes questions monétaires et fiscales. De telles mesures aideraient, mais ne résoudraient pas le problème; elles ne feraient pas vraiment de différence entre un écart de productivité minime ou important. Cela a donc aidé, mais seulement marginalement.

M. Charlie Penson: Bien. Vous avez dit être en train de mener une étude qui n'était pas terminée. J'aimerais bien prendre connaissance de cette étude quand elle sera finie. Vous avez parlé des niveaux d'imposition des sociétés et, si j'ai bien compris, vous avez fait allusion à la limite des 200 000 $ qui n'a pas vraiment changé au fil des ans, causant ainsi une augmentation insidieuse de la fiscalité. Vous avez dit que la politique fiscale encourage les petites et moyennes entreprises à rester petites. Pourriez-vous nous expliquer ce que vous entendez par là?

M. Don Daly: Oui, c'est un point très important. L'explication, c'est qu'à cause de l'écart important entre le taux d'imposition plus faible applicable aux profits jusqu'à 200 000 $ et le taux beaucoup plus élevé au-dessus de ce chiffre, les compagnies peuvent dire: «Très bien, nous nous rapprochons du seuil de 200 000 $, alors agissons de telle ou telle manière». Les gens d'affaires négligent alors les efforts de réduction des coûts, parce que dès que les profits dépassent 200 000 $, l'augmentation d'impôt est tellement forte que cela les décourage de franchir le pas—et il en est de même pour le crédit d'impôt pour dividendes.

Jack Mintz et ses collègues ont documenté de façon très solide l'effet de cet écart de traitement fiscal. Bob Brown a aussi été associé à cette étude. L'un des documents que je fais parvenir au comité en traite abondamment. À mon avis, c'est un point très important.

M. Charlie Penson: Un certain nombre de gens ont suggéré que la limite des 200 000 $ soit alignée sur l'inflation. Êtes-vous d'accord avec cette suggestion?

M. Don Daly: Oui. Quand la mesure a été établie, on souhaitait encourager la petite entreprise. Je pense que personne n'avait prévu qu'une si forte proportion des emplois créés serait associée à une faible productivité. Cela n'avait pas été prévu. C'est l'un des éléments que personne n'avait prédits dans le débat sur le libre-échange—moi pas plus que les autres. La différence, c'est que j'ai décelé le problème plus tôt que certains autres.

Je crois comprendre que l'on réfléchit actuellement aux répercussions de la fiscalité des petites entreprises, car le ministre des Finances a demandé à prendre connaissance de certains documents que j'ai rédigés et qui ont également été transmis aux fonctionnaires. Il semble que l'on se penche notamment sur cette question. Quant à savoir ce qu'on va en faire, je n'en sais rien.

M. Charlie Penson: Très bien.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Penson.

Monsieur Malhi.

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Comment peut-on encourager l'épargne et l'investissement au Canada? Quel rôle le gouvernement peut-il jouer pour ce qui est d'encourager l'épargne et l'investissement?

M. Don Daly: Je voudrais d'abord établir le contexte de la question. D'après les données disponibles, nous avons en fait au Canada davantage de capitaux par travailleur qu'aux États-Unis. Autrement dit, nous avons beaucoup de capitaux, investis dans les usines plutôt que dans les machines et l'équipement. Je pense donc qu'on a eu tendance à dire depuis une trentaine d'années, dans la discussion sur la croissance économique, que l'on a probablement eu tendance à exagérer quelque peu antérieurement l'importance de l'épargne et de l'investissement dans les immobilisations, en particulier dans le contexte canadien. Pourtant, ce qui importe encore davantage, c'est l'investissement dans le capital humain, l'éducation et la formation, etc.

• 1605

Après avoir fait ces observations générales, je vais maintenant aborder plus précisément la question que vous soulevez, à savoir toute la question de l'épargne. En fait, nous avons déjà des mesures d'encouragement à l'épargne, notamment le traitement fiscal des régimes enregistrés d'épargne-retraite, pour lesquels la teneur étrangère est limitée à 20 p. 100 de la valeur des actifs. Il y a donc des considérations de ce genre.

Le taux d'épargne au Canada a constamment été plus élevé qu'aux États-Unis. Nous avons un taux d'épargne plus élevé et un taux d'investissement plus élevé. Ce n'est pas aussi élevé qu'au Japon ou dans d'autres pays. Mais dans l'ensemble, je dirais que notre bilan en matière d'épargne et notre réservoir de capitaux sont satisfaisants. Le problème ne tient pas à un manque de capitaux, mais plutôt au fait que nous n'avons pas utilisé tellement efficacement la main-d'oeuvre et le capital.

La présidente: Madame Wortsman, avez-vous quelque chose à ajouter à cet égard?

Mme Arlene Wortsman: Non.

La présidente: Monsieur Malhi.

M. Gurbax Singh Malhi: J'ai une autre question. Elle n'est peut-être pas de votre ressort, quoique vous représentiez le Centre syndical et patronal du Canada. Vous pourrez peut-être y répondre.

C'est un grave problème, pas dans ma circonscription, mais dans la plupart des circonscriptions les gens s'en plaignent. Ces temps-ci, les entreprises, petites et grandes, embauchent leurs employés par l'entremise d'agences de placement temporaire, au lieu de recourir aux services de DRHC. Pouvez-vous suggérer des mesures que le gouvernement pourrait prendre pour encourager les entreprises à s'adresser à DRHC pour embaucher leurs employés?

Mme Arlene Wortsman: Vous voulez dire des mesures d'encouragement à l'embauche d'employés temporaires?

M. Gurbax Singh Malhi: Non, d'employés permanents. Certains employés recrutés par l'entremise d'agences travaillent pour la même compagnie pendant un an ou deux.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Ils sont embauchés par l'entremise d'agences de placement.

Mme Arlene Wortsman: Je suis désolée, quelle est la question?

M. Gurbax Singh Malhi: Bon. Ces temps-ci, la plupart des entreprises embauchent leurs employés par l'entremise d'agences privées de placement temporaire au lieu de recourir aux services de DRHC. Pouvez-vous donner au gouvernement des suggestions quant à des mesures visant à encourager les entreprises à utiliser les services de DRHC, de manière à embaucher des employés directement au lieu de passer par des agences? Certaines personnes embauchées par l'entremise d'agences de placement temporaire occupent leur poste depuis deux ans.

Mme Arlene Wortsman: Je comprends le problème. Je n'ai pas de solution à proposer.

Avez-vous une solution?

M. Don Daly: Non.

Mme Arlene Wortsman: Je suis désolée.

La présidente: Merci, monsieur Malhi.

[Français]

Monsieur Dubé, avez-vous des questions?

M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): J'ai raté la présentation de M. Daly, mais je vais quand même poser une question.

Lorsqu'on parle de productivité, on se compare évidemment à d'autres pays et forcément aux États-Unis, puisque nous en sommes voisins et qu'ils sont un géant économique. Il y a là des données sur la fiscalité, mais on parle aussi du taux de change.

Certains observateurs disent qu'étant donné que le taux de change et la faiblesse du dollar canadien avantagent les sociétés ou les entreprises exportatrices, celles-ci n'ont peut-être pas fait tous les efforts nécessaires. Avez-vous une opinion là-dessus?

[Traduction]

M. Don Daly: Je m'excuse, je vais devoir répondre en anglais. Quand je travaillais au gouvernement, je parlais un assez bon français, mais je n'ai pas eu à m'en servir à Toronto et j'en ai donc perdu.

Je pense que votre préoccupation est fondée. On entend constamment parler de l'incidence du taux de change. C'est l'une des questions que l'on pose aux compagnies dans le sondage; on leur demande quelle en est l'incidence et comment elles seraient touchées par une appréciation du dollar canadien. Même si un petit nombre de compagnies seulement ont répondu jusqu'à maintenant, la réponse est que cela aurait un impact considérable.

• 1610

Toute la question de la valeur du dollar canadien est difficile, car je crois que ce qui a influé sur la valeur de notre dollar, ce n'est pas tellement les échanges commerciaux, mais plutôt la forte baisse de l'entrée de capitaux attribuable au rétrécissement de l'écart entre les taux d'intérêt. On n'a pas accordé beaucoup d'attention à ce point, mais je pense qu'il est assez étroitement lié à la politique de la Banque du Canada.

L'importance du déficit fédéral est l'un des facteurs qui ont contribué à la hausse des taux d'intérêt et à l'appréciation du dollar. Comme nous sommes passés d'un déficit fédéral important à un surplus, la demande de fonds au Canada s'est affaiblie considérablement. Cette situation a contribué à faire baisser les taux d'intérêt au Canada et a eu des répercussions sur le dollar. Mais il est clair que cela a une incidence sur le rendement des compagnies canadiennes, à la fois en termes d'exportation et de concurrence des importations. C'est un domaine de vulnérabilité potentielle qui pourrait avoir des conséquences, en particulier pour les petites entreprises.

[Français]

M. Antoine Dubé: Vous réalisez des études, le gouvernement en réalise et d'autres pays font de même. J'essaie de me faire une idée à partir de la documentation variée que je reçois, mais je ne suis pas un expert. J'ai parfois l'impression qu'il y a un problème de langage. Est-ce que je me trompe en pensant que tout le monde ne parle pas le même langage scientifique et que les concepts utilisés ne sont pas les mêmes pour tout le monde? C'est un problème qui doit vous handicaper, si c'est le cas.

[Traduction]

Mme Arlene Wortsman: Je dirais que c'est juste.

On ne s'entend pas sur la nature exacte du problème. Notre organisation représente deux points de vue différents, si l'on peut dire. Nous avons le point de vue des syndicats et celui du patronat. Je suppose que des représentants de ces deux groupes viendront vous entretenir de leurs solutions et de leurs approches au niveau macro-économique.

Nous sommes par contre convenus que certains problèmes sont apparents au niveau des lieux de travail. Avec l'introduction de plus en plus rapide de nouvelles technologies, on exige sans cesse des compétences de plus en plus grandes, ce qui exige une formation continue. Il y a des pénuries de compétences qui commencent à se faire jour dans divers secteurs, et l'on prévoit que cette situation va se répandre dans d'autres secteurs de l'économie.

Il y a un élément sur lequel on s'entend généralement pour ce qui est de mesurer la productivité, à savoir la nature de l'investissement dans le capital humain. Il faudra investir davantage dans la formation et dans de nouveaux arrangements de travail. Nous sommes d'avis que cette exigence va s'accentuer à court terme. On est d'accord là-dessus de part et d'autre de la clôture, si vous voulez, je veux dire les syndicats et le patronat; les deux s'entendent pour dire qu'il faut s'attaquer à ce problème. Quant aux prescriptions pour remédier au problème au niveau macro-économique, la question reste ouverte.

La présidente: Professeur Daly, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Don Daly: Je suis certainement d'accord avec ce qu'on a dit. On fait relativement moins de formation au Canada qu'aux États-Unis et au Japon. On accorde beaucoup plus d'attention à la formation continue, surtout au Japon, mais aussi aux États-Unis.

Les compagnies invoquent notamment le taux de roulement élevé pour expliquer pourquoi elles font si peu de recyclage. Nous avons généralement un taux de roulement plus élevé au Canada qu'aux États-Unis, c'est-à-dire qu'un plus grand nombre de gens passent d'un emploi à un autre. Les compagnies craignent que si elles investissement dans la formation de leurs effectifs, ceux-ci peuvent aller travailler ailleurs et une autre compagnie bénéficiera de leur investissement. C'est l'une des raisons avancées par les compagnies pour expliquer pourquoi elles font moins de formation. Mais je suis assurément d'accord pour dire que c'est un domaine très important et il a été question de mesures incitatives pour augmenter la formation.

• 1615

Mme Arlene Wortsman: Puis-je ajouter quelque chose?

La présidente: Bien sûr.

Mme Arlene Wortsman: Merci.

Le professeur Daly a absolument raison. Nous avons fait une enquête nationale sur la formation il y a cinq ans, et il en est ressorti que le niveau de formation dans le secteur privé est relativement faible au Canada. L'une des raisons invoquées, c'est que les compagnies craignent qu'un employé s'en aille, emportant avec lui l'investissement consenti par la compagnie.

Les gens n'ont plus la moindre garantie de pouvoir conserver leur emploi. Le taux de roulement est de plus en plus élevé. Les gens s'attendent à occuper plusieurs emplois durant leur carrière, à la fois au sein de leur secteur et d'un secteur à l'autre. L'une des approches qui ont été élaborées consiste à faire de la formation dans une optique sectorielle. Cela donne une formation générale valable dans un secteur donné, sans que l'on ait à s'inquiéter de questions d'exclusivité, mais tout en donnant les compétences de base qui sont nécessaires. À mesure que l'on exige des compétences de plus en plus pointues, les niveaux augmentent et les conseils sectoriels peuvent veiller à maintenir constamment certaines normes dans un secteur donné. C'est une approche qui est de plus en plus populaire.

La présidente: Professeur Daly, avez-vous un dernier commentaire à formuler?

M. Don Daly: Je voudrais vous faire part d'une autre réflexion.

Auparavant, en sortant de l'école secondaire, de l'université ou d'une maison d'enseignement quelconque, on ne retournait plus à l'école pour le reste de sa vie. Ce qui s'est passé, c'est qu'on a pris de plus en plus conscience que l'éducation est un processus continu tout au long de la vie. Le nombre de livres et d'articles publiés double tous les dix ans, ce qui veut dire que cinq ans après être sorti de l'université, la moitié de ce que l'on a appris pourrait être désuet. Je pense qu'il est très important qu'on en fasse plus—par exemple grâce à des tables rondes comme celle-ci—dans le domaine de l'éducation permanente, parce que c'est la tâche de toute une vie. C'est l'une des raisons pour lesquelles les universités donnent des années sabbatiques. Je pense qu'il faudrait en faire davantage dans la fonction publique et dans le secteur privé afin de permettre aux gens de se recycler.

Avec l'importance accrue des ordinateurs, de l'informatique, etc., nous avons affaire à de nouvelles techniques qui n'étaient même pas inventées quand les gens de mon âge allaient à l'école. C'est un domaine nouveau qu'il est important de comprendre. Sinon, il y a risque de graves conflits entre les cadres supérieurs qui n'ont pas été exposés à ces idées et les plus jeunes qui ont une scolarité beaucoup plus poussée et qui sont beaucoup plus versés dans l'informatique et les sciences du comportement. Il y a possibilité de conflit entre le style de gestion des gestionnaires d'un certain âge qui ont été promus en raison de leur expérience et les plus jeunes qui sont embauchés sur la foi de leur diplôme. Cela pourrait être une source de graves conflits dans les entreprises.

Quand je discute de ces questions avec mes étudiants, en particulier avec les étudiants à temps partiel, je leur demande si c'est un problème qu'ils constatent dans leurs propres compagnies. Je leur demande simplement de lever la main, et toutes les mains se lèvent à l'unisson. Ils savent que je parle de problèmes concrets qu'ils ont eux-mêmes vécus. C'est donc une question très importante et je dois dire à mon grand regret qu'elle ne sera pas facile à résoudre.

La présidente: Merci.

Merci, monsieur Dubé.

Monsieur Murray.

M. Ian Murray (Lanark—Carleton, Lib.): Merci, madame la présidente.

Professeur Daly, je me sens déjà mieux, sachant que cet exercice fait partie de notre éducation permanente. J'ai souvent l'impression que nous arrivons au Parlement bardés de connaissances qui s'effritent graduellement au fil des ans.

Je voulais vous interroger au sujet du secteur manufacturier. Je crois comprendre que c'est votre spécialité.

M. Don Daly: Oui.

M. Ian Murray: Vous avez déjà dit que l'on s'attendait à ce que les fabricants soient forcés par les accords de libre-échange à se discipliner, mais cela ne s'est pas nécessairement réalisé. Dans certaines compagnies, oui, dans d'autres non.

Je voudrais revenir sur la question de savoir si le secteur manufacturier a de l'importance. Vous vous rappelez peut-être qu'il y a une dizaine d'années, le président de Sony a prononcé un discours assez célèbre dans lequel il disait que le secteur manufacturier est important pour un pays. À cette époque, l'Association des manufacturiers canadiens avait lancé une petite campagne appelée «La fabrication a son importance».

• 1620

Ce qui me préoccupe, c'est que si les fabricants canadiens ne sont pas disciplinés par, disons, le libre-échange, qu'il soit mondial ou autre, s'ils sont protégés par un dollar plus faible, nous risquons peut-être de subir le contrecoup de toute appréciation du dollar. Alors, le Canada devrait-il demeurer présent dans le secteur manufacturier? Avons-nous peut-être prouvé que nous ne sommes pas vraiment capables d'être compétitifs, que tout cela a été gonflé artificiellement par la baisse du dollar et que nous devrions peut-être nous tourner vers le secteur des services? Sur le plan économique, on pourrait soutenir que l'on n'a pas besoin du secteur manufacturier, pourvu que le PIB soit suffisamment élevé et que l'on crée des emplois et des revenus.

M. Don Daly: Vous soulevez un point important, parce que les services représentent une part croissante de l'économie totale, tandis que le secteur qui était traditionnellement notre point fort au Canada, celui de l'exportation des ressources naturelles, y compris les céréales, le bois d'oeuvre, les métaux de base, les produits forestiers, etc., voit diminuer depuis longtemps la part qu'il occupe dans le commerce mondial. C'est dans le secteur manufacturier qu'il y a eu une forte augmentation du commerce mondial.

Il y a un contraste marqué entre ce qui se passe au Canada, où il y a une forte hausse de l'emploi dans le secteur des services, qui est en pleine croissance, et ce qui se passe sur la scène commerciale internationale, où c'est le secteur manufacturier qui représente une part croissante des échanges mondiaux.

Je viens tout juste de calculer que les exportations de biens représentent près de 80 p. 100 de la production de l'industrie de production de biens au Canada, tandis que l'exportation des services représente seulement 25 p. 100 du secteur des services. Les services sont donc bien davantage produits et consommés très localement. On ne va pas très loin pour acheter un hamburger ou se faire couper les cheveux. C'est donc une distinction importante.

Autrement dit, au chapitre du commerce international, le secteur manufacturier est tout à fait crucial et nous ne pouvons plus compter sur l'exportation des ressources naturelles comme source de nos revenus d'exportation, qui sont tellement importants.

Pour ce qui est du commerce international, ce que nous devons faire, à mon avis, c'est tenter d'améliorer notre performance en termes de productivité, notamment dans le secteur manufacturier, afin de rester compétitifs, de créer des emplois ici, de générer des revenus d'exportation, etc. Nous avons connu une extraordinaire augmentation du volume des exportations, et ce n'est plus seulement dans le secteur de l'automobile; la fabrication autre qu'automobile connaît une très forte augmentation.

C'est donc un secteur très important, mais il n'a pas connu les hausses de productivité ni le rétrécissement de l'écart par rapport aux États-Unis que moi-même et d'autres avions prédits et espérés.

En un sens, c'est l'objet de mes travaux de recherche actuels: quels sont les problèmes particuliers qui se posent dans les petits établissements manufacturiers, et qu'est-ce qu'on pourrait faire, collectivement ou au niveau du gouvernement, et aussi dans le secteur privé—car la solution réside pour beaucoup dans le secteur privé—pour améliorer la performance? Au lieu de laisser tomber le secteur manufacturier, je voudrais plutôt qu'on le rende plus performant, afin que nous puissions continuer à contribuer à cette très forte croissance des échanges mondiaux, même si ce secteur a décliné en termes d'emploi total.

En fait, si l'on prend le total des heures de travail dans le secteur manufacturier, des 14 principaux pays industrialisés étudiés par le Bureau des statistiques du travail, c'est au Canada que l'emploi dans le secteur manufacturier a connu la meilleure performance au cours des 40 dernières années. Cela va donc très bien au Canada au niveau de l'emploi. Mais pour continuer, je pense que nous devrons améliorer notre productivité.

M. Ian Murray: J'ai trouvé intéressants vos commentaires au sujet de la croissance de l'emploi dans les petites entreprises par opposition aux grandes. Chanter les louanges de la petite entreprise est presque devenu une montra pour les politiciens, et l'on ne cesse de répéter que la croissance de l'emploi se fait dans le secteur de la petite entreprise. Mais je voudrais savoir si vous croyez que c'est essentiellement parce que les êtres humains remplacent l'investissement dans les machines ou quelqu'autre facteur susceptible de rendre les entreprises plus productives, alors que ce sont les grandes entreprises qui, en dépit de leur taux d'imposition plus élevé, peuvent se permettre d'investir dans ce matériel.

• 1625

Par ailleurs, des propriétaires de petites entreprises nous disent qu'à cause des charges salariales qu'ils doivent payer, ils embauchent beaucoup moins de gens qu'ils ne le feraient si ces impôts sur les salaires n'étaient pas si élevés.

C'est bien beau d'avoir un plus grand nombre d'emplois, mais y a-t-il un inconvénient à ce que ces emplois soient créés dans les petites entreprises? Je le répète, cela remplace-t-il une autre forme d'investissement qui devrait avoir lieu?

M. Don Daly: C'est bien possible, et quand vous dites que les grandes entreprises investissent relativement plus de capitaux, utilisent de façon plus généralisée les ordinateurs et adoptent plus rapidement les nouvelles technologies, il est certain que les grandes entreprises ont un certain nombre d'avantages, notamment un accès relativement plus facile à un vaste éventail de sources de fonds, à la fois à l'interne et sur le marché: obligations, actions, banques, etc.

Les petites entreprises ont souvent des problèmes à trouver du financement. Je pense que l'on exagère parfois l'élément «finances» des petites entreprises. À mon avis, la qualité de gestion des petites entreprises est tout à fait cruciale, mais aussi fort difficile à étudier, à identifier.

Avez-vous quelque chose à ajouter à cela?

La présidente: Monsieur Parsley.

M. Chris Parsley (économiste principal, Centre syndical et patronal du Canada): Je voudrais seulement ajouter que l'emploi dans les petites entreprises est généralement, du point de vue des travailleurs, beaucoup moins permanent, et certaines personnes trouvent que c'est mauvais. Mais des chercheurs ont publié des articles démontrant qu'en fait, les gens trouvent que c'est une bonne chose. Dans les petites entreprises, ils peuvent passer d'un emploi à un autre. Parfois, les jeunes ne veulent pas s'engager pour la vie. Par conséquent, toute la question de savoir si c'est mieux d'être à l'emploi d'une grande entreprise ou d'une petite entreprise se ramène en définitive à une question de préférence personnelle, du moins dans une certaine mesure.

Pour ce qui est de la création de petites entreprises, nous avons vu beaucoup de petites entreprises créées à même de grandes entreprises et il existe une interdépendance entre les deux. Les petites compagnies dépendent évidemment des grandes qui sont leurs clients. Mais les petites entreprises rendent aussi d'importants services aux grandes entreprises, et c'est un aspect que l'on néglige souvent. On a tendance à croire que les relations entre les deux sont à sens unique, mais en fait, d'après ce que j'ai lu à ce sujet, ce n'est pas le cas.

M. Ian Murray: Merci.

La présidente: Merci.

Monsieur Daly.

M. Don Daly: Je voudrais ajouter, au sujet de l'importance accrue des petites entreprises, que la croissance du secteur des services se situe en partie dans le domaine des services aux entreprises et que les services sont très souvent offerts par de petites compagnies. Les grandes compagnies comptaient parmi leurs effectifs des cadres intermédiaires qu'elles ont mis à pied en tant qu'employés à plein temps, pour les réembaucher par la suite à titre de sous-traitants. Ces travailleurs indépendants sont ensuite comptabilisés dans le secteur des services. Il est très important de le préciser.

L'incertitude est plus grande. L'un des avantages de cet arrangement, du point de vue des grandes compagnies, c'est qu'elles n'ont plus à payer le coût des pensions et de l'assurance-maladie, etc., le travailleur indépendant devant désormais assumer lui-même toutes ces dépenses.

Certains d'entre eux aiment par ailleurs l'autonomie, le choix, etc., dont ils bénéficient dans une petite compagnie par opposition à une plus grande. Je pense que certains d'entre eux sont prêts à rester dans une petite entreprise même en sachant que leurs revenus sont inférieurs à ce qu'ils seraient dans une compagnie plus importante, mais la souplesse et l'autonomie accrue est une compensation suffisante à leurs yeux. Je pense que c'est un facteur dans la croissance des services aux entreprises et l'importance accrue de la sous-traitance, les grandes compagnies faisant appel à de plus petites compagnies qui leur fournissent des services.

La présidente: Monsieur Parsley.

• 1630

M. Chris Parsley: Pour ajouter à ce que le professeur Daly a dit, on a récemment publié les résultats de sondages qui montrent que même dans les micro-compagnies de moins de dix employés, le niveau de satisfaction des employés est beaucoup plus élevé que dans les compagnies de 10 à 50 employés. Cela s'explique en grande partie par ce que le professeur Daly disait au sujet de l'autonomie.

Le degré de satisfaction des employés et la corrélation avec la taille de l'entreprise peuvent être représentés par un graphique en forme de vague. Quand on atteint le niveau des 500 employés et plus, il semble qu'il y a beaucoup d'employés insatisfaits à cause de la nature bureaucratique d'une grande entreprise.

Mais ce n'est pas seulement dans les petites entreprises que l'on trouve le plus fort taux de satisfaction des employés. C'est plus précisément dans les micro-entreprises, celles qui comptent 10 employés et moins, où certains diraient qu'il y a beaucoup plus de dynamisme, où les choses bougent beaucoup plus. La plupart des gens aiment cela, du moins d'après le sondage que l'on vient de publier.

M. Ian Murray: Dans ce domaine, il y a beaucoup de compagnies dont les employés attendent avec impatience la première émission d'actions qui les rendra tous riches. C'est probablement très excitant.

Des voix: Oh, oh!

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Murray.

Monsieur Riis.

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson et Highland Valleys, NPD): Monsieur Daly, dans vos recherches, êtes-vous déjà tombé sur la situation suivante: le propriétaire ou le gestionnaire d'une petite entreprise doit, pour réussir, faire preuve de beaucoup d'imagination et d'ingéniosité et, au lieu de voir le chiffre de 200 000 $ comme une limite infranchissable, il crée une petite entreprise qui est en fait une superposition de cinq ou six petites entreprises, qui sont toutes en deçà de la limite des 200 000 $ et qui peuvent donc bénéficier de l'avantage fiscal? Avez-vous découvert cela dans vos travaux?

M. Don Daly: L'un des cas intéressants qui a été étudié est celui de Magna Corporation. Aujourd'hui, je suis sûr qu'elle est bien au-dessus de la limite des 200 000 $, mais sa philosophie est de constituer en fait une agglomération de compagnies distinctes.

Comme vous le savez, c'est un grand fabricant de pièces automobiles. Dès qu'une compagnie commence à avoir plus de 100 employés, elle crée une autre compagnie distincte et essaie de ne pas dépasser cette limite.

Maintenant, je doute que la limite des 200 000 $ s'applique dans ce cas, mais je ne serais guère étonné d'apprendre que c'est le cas d'autres petites entreprises. Je n'ai pas lu d'ouvrages là-dessus, ou je ne suis pas au courant de cas concrets, mais je le répète, cela ne m'étonnerait pas du tout qu'il y en ait.

M. Nelson Riis: Bien, merci.

Madame Wortsman, quand vous étudiez des entreprises qui sont particulièrement productives, de votre point de vue assez unique qui est celui à la fois des syndicats et du patronat, pouvez-vous mettre le doigt sur un élément qui est manifestement présent dans ces entreprises par opposition à d'autres qui sont moins productives, par exemple quelque chose qui ferait partie de la culture de l'entreprise?

Deuxièmement, vous avez dit que l'on s'est mis d'accord dans votre organisation sur le besoin de faire davantage de formation et d'éducation. Ce n'est guère étonnant, n'est-ce pas? S'il y a quelque chose qui saute aux yeux quand on observe les 20 dernières années, c'est le besoin de recycler et de perfectionner les employés par la formation, etc. Pourquoi nous a-t-il fallu tellement de temps pour le comprendre?

Enfin, je veux dire, nous nous époumonons à parler de l'économie du savoir, nous connaissons les graphiques, nous savons où se situe la croissance, etc., et pourtant, d'après ce que vous dites, nous venons tout juste de nous rendre compte que nous devons former nos employés et les éduquer. Quelle trouvaille! Qu'avons-nous fait depuis 30 ans dans ce dossier, et pourquoi avons-nous la comprenette aussi dure?

Mme Arlene Wortsman: Je vais répondre à votre première question au sujet de la culture de l'entreprise. Dans quelques semaines le Report on Business Magazine va publier sa liste des 100 meilleures compagnies selon les employés. Les auteurs du rapport ont découvert, entre autres, que c'est la qualité des pratiques en fait de ressources humaines qui attire les gens, qui les incite à venir travailler pour ces compagnies.

Ce n'est donc pas simplement la récompense pécuniaire. Ces compagnies ont-elles des pratiques et des politiques qui permettent aux gens d'équilibrer le travail et la famille? Ont-elles des politiques de formation?

M. Nelson Riis: Et ce sont ces compagnies-là qui sont productives?

Mme Arlene Wortsman: Absolument.

M. Nelson Riis: Pas seulement des compagnies contentes, mais bien productives et contentes?

Mme Arlene Wortsman: On suppose que si ce sont les compagnies pour lesquelles les gens préfèrent travailler, ce ne sont pas des compagnies qui sont en difficulté. Ce sont des entreprises productives, couronnées de succès.

• 1635

Le problème auquel les compagnies vont devoir commencer à s'attaquer, c'est la pénurie de main-d'oeuvre, car si ça continue, les employeurs vont devoir rivaliser pour obtenir les employés les plus recherchés, ceux qui ont les compétences et la formation correspondant aux besoins. Dans le passé, les employeurs pouvaient choisir d'embaucher qui ils voulaient. Aujourd'hui, le marché est un peu plus serré.

Ce qui m'amène au deuxième point, à la question de la formation. L'une des raisons pour lesquelles nous aurons des pénuries de main-d'oeuvre, c'est en partie à cause des exigences techniques accrues attribuables à la technologie, mais l'autre facteur qui jouera un rôle encore plus grand, c'est l'impact de la démographie, c'est-à-dire une main-d'oeuvre vieillissante. À mesure que la génération d'après-guerre vieillit, les gens approchent en grand nombre de l'âge de la retraite. Derrière eux, il n'y a pas suffisamment de travailleurs de remplacement pour répondre aux besoins du marché du travail.

Il faudra donc essayer de conserver une partie de la main-d'oeuvre actuelle, en lui permettant de se perfectionner, en offrant une plus grande souplesse, par exemple une retraite progressive, afin que les employés ne partent pas tous en même temps. Cela peut se traduire par une sortie graduelle, ou bien peut-être y a-t-il moyen d'intégrer la planification de la relève à tous les niveaux de l'organisation. Il faudra donc faire preuve de créativité et d'innovation.

La présidente: Professeur Daly.

M. Don Daly: Je voudrais répondre à votre question, quand vous demandez pourquoi nous avons été tellement lents au Canada à reconnaître l'importance de la formation continue, etc.

Je pense que deux choses sont importantes. Premièrement, on nous a inculqué l'importance clé du secteur des ressources naturelles, et nous avons supposé que cela nous donnerait un niveau de vie élevé à perpétuité. Nous avons eu tendance à nous asseoir sur nos lauriers pour ce qui est du secteur du savoir et du secteur manufacturier, etc. Je pense que c'est une considération.

Par ailleurs, les quelques rares études qui ont été effectuées auprès des gestionnaires canadiens indiquent que ceux-ci ont été promus à des postes supérieurs beaucoup plus tard dans leur vie professionnelle qu'aux États-Unis, et le niveau de scolarité moyen est beaucoup plus faible que celui de gestionnaires comparables aux États-Unis. Ces gens-là ont donc tendance à se dire, ma foi, si je suis parvenu au sommet de notre organisation sans faire d'études avancées, à quoi sert la formation plus poussée?

On répugnait énormément à embaucher des diplômés en commerce ou en arts ou en administration des affaires, et je pense que c'est encore un facteur qui explique pourquoi les diplômés universitaires n'obtiennent pas au Canada des revenus aussi élevés qu'aux États-Unis.

C'est un aspect qui a été signalé dans l'exposé de Fortin, mais celui-ci n'y voyait pas une explication.

Je pense donc que c'est un facteur. À mon avis, ce problème pourra persister tant que ces gestionnaires n'auront pas été remplacés par des gens plus instruits et ayant une formation plus scolaire, ce qui est maintenant considéré comme un élément important, ainsi qu'une profonde connaissance des ordinateurs et de leur importance dans le monde des affaires.

Cela correspond-il à votre expérience?

Mme Arlene Wortsman: En partie, mais l'autre facteur est que la plupart des gens n'aiment pas changer à moins d'y être absolument forcés. Tant que les compagnies ou les particuliers pouvaient continuer dans la même voie, ils ne voyaient aucune raison de changer.

M. Nelson Riis: Mais vous avez dit que d'autres pays ont compris beaucoup plus rapidement. Est-ce qu'ils forcent leurs employés à se recycler?

Mme Arlene Wortsman: Non, c'est une exigence. Mais ce qui s'est passé aussi, c'est qu'avec la mondialisation et la concurrence à l'échelle mondiale, les compagnies sont maintenant forcées de le faire. Elles n'affrontent plus seulement la concurrence intérieure, mais aussi celle du monde entier.

Ce qui peut les aider à avoir une longueur d'avance sur leurs concurrents, c'est la qualité de leurs effectifs et des pratiques de ressources humaines. Il est donc devenu une nécessité commerciale d'offrir constamment cette formation et de s'assurer d'avoir une main-d'oeuvre possédant des compétences de pointe.

La présidente: Merci, monsieur Riis.

Monsieur Lastewka.

• 1640

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Merci, madame la présidente.

Monsieur Daly, je suis de l'école qui dit que les compétences et les ressources, l'innovation et la conception, et ensuite le développement des procédés entraînent la qualité totale de la gestion et y contribuent. Si, dans notre pays, nous faisons de l'innovation et de la conception, nous avons des produits et des services qui sont en avance par rapport à ceux d'autres pays, et si l'on ralentit au chapitre de l'innovation et de la conception, nous sommes à la traîne.

Voudriez-vous commenter le fait que nous avons été faibles au chapitre de l'innovation et de la R et D et que cela a nui à notre productivité?

M. Don Daly: Je vais d'abord faire quelques observations sur la R-D.

Depuis une trentaine d'années, dans le cadre du débat sur la science et la politique scientifique au Canada, on a mis l'accent sur le ratio relativement faible de la R-D au Canada, en comparaison d'autres pays industrialisés. À mon avis, cet indice n'est pas vraiment révélateur de l'accès que les compagnies canadiennes peuvent avoir aux nouvelles technologies et ce, pour deux raisons.

Premièrement, les compagnies n'ont pas seulement accès à la R et D qui est faite initialement au Canada; elles peuvent aussi acheter de la R-D. En consultant les statistiques sur la balance des paiements, on peut voir les dépenses consacrées à l'achat de technologie. C'est aussi important, et cela dépasse même un peu le montant consacré à la R-D qui est faite au Canada. On peut donc l'acheter sur le marché libre.

Les petits pays ont généralement des ratios de R et D plus faibles que les grands pays, justement pour cette raison. Par contre, il y a des exceptions à cette règle, par exemple la Suède.

Par ailleurs, dans le secteur manufacturier, la proportion de la fabrication au Canada qui est le fait de filiales d'entreprises multinationales, essentiellement américaines, est de près de 50 p. 100 de l'emploi total. Les filiales ont relativement facilement accès à la technologie, par l'entremise de leurs sociétés mères. De plus, en cas de problème, il suffit de donner un coup de téléphone pour faire venir quelqu'un de Buffalo, de New York ou de la Californie en quelques heures à peine pour les aider à régler leurs problèmes.

Un ministère gouvernemental a déjà fait des recherches qui montraient que si l'on tient compte de l'achat de technologies et du phénomène des filiales, le Canada se situe en fait parmi les pays de tête en termes d'accès à la technologie. Le problème n'est donc pas le manque d'accès, mais plutôt le fait que nous prenons beaucoup de temps à adopter les nouvelles technologies. C'est particulièrement le cas des petites compagnies.

Nous avons fait un sondage auprès de quelques compagnies et seulement l'une d'entre elles obtenait ses nouvelles technologies grâce à un effort interne de R-D. Les six autres compagnies l'obtenaient des fournisseurs de machines et d'équipement ou sur le marché libre ou encore en s'adressant aux universités, etc.

Je crois donc que nous avons été omnibulés par la R-D effectuée au Canada et que nous n'avons pas accordé suffisamment d'attention au problème de l'adoption trop lente de la technologie. C'est là le noeud du problème.

Dans quelques domaines, le Canada a été un chef de file, par exemple pour l'adoption des fourneaux à oxygène et des mini-aciéries dans la sidérurgie. Il y a donc eu quelques exceptions, mais la plupart des études montrent que le Canada a été plus lent que d'autres pays à adopter les nouvelles technologies et que ce problème est relativement plus prononcé dans les petites entreprises.

John Baldwin a effectué une étude là-dessus et il a peut-être fait allusion à cette question dans son exposé devant le comité.

Par conséquent, si j'encourageais le comité à faire quoi que ce soit, ce serait d'accorder plus d'attention à l'importance de l'adoption de la technologie, plutôt qu'à la R-D en tant que telle.

• 1645

M. Walt Lastewka: J'ai deux autres questions. Ai-je le temps?

La présidente: Allez-y.

M. Walt Lastewka: À partir de là, je voudrais remonter aux compétences et aux ressources que nous avons. J'ai déjà travaillé pour une multinationale et, en comparant les ingénieurs d'un pays à l'autre, j'ai constaté que les ingénieurs américains avaient davantage l'esprit d'entreprise, étaient plus dynamiques—comme vous venez de le dire—pour ce qui est d'adapter à leurs procédés la technologie, peu importe où ils pouvaient la trouver. Qu'en pensez-vous?

M. Don Daly: Oui, je pense que c'est vrai. Maintenant, nous avons toujours eu une proportion beaucoup plus basse de notre population active possédant un diplôme universitaire, en comparaison des États-Unis. Nous commençons à faire du rattrapage au niveau des finissants actuels, mais ceux-ci ne représentent qu'environ 2 p. 100 du total, de sorte qu'il faudra du temps avant que l'effort actuel au niveau de l'éducation produise ses effets. Je viens tout juste de terminer des comparaisons entre le Canada et les États-Unis quant à la proportion de diplômés universitaires en sciences et en génie ainsi qu'en informatique, sur une période de quatre ans. Il est intéressant de constater que la proportion est maintenant identique au Canada et aux États-Unis.

La différence, c'est que la proportion de gens qui se spécialisent et obtiennent des diplômes en administration des affaires est encore inférieure au Canada, par rapport aux États-Unis, et c'est justement ce domaine sur lequel vous avez insisté pour ce qui est du développement des ressources humaines. Auparavant, notre production était inférieure de moitié à celle des États-Unis; aujourd'hui, nous en sommes à 60 p. 100. Aux États-Unis, je pense que les écoles de génie réussissaient mieux à combiner les études de génie et les cours d'administration des affaires que nous n'avons pu le faire au Canada.

L'université Queen's est une exception. Queen's possède un très solide département de génie, une solide école d'administration des affaires, et a déployé beaucoup d'efforts pour intégrer les deux programmes. À York, comme nous n'avons pas d'école de génie, nous n'avons donc pas vraiment pu faire cela.

Il est fort important de combiner le génie, les sciences et les affaires et nous n'avons pas aussi bien réussi dans ce domaine que les États-Unis. Je pense que c'est une considération très importante.

La présidente: Ce sera votre dernière question.

M. Walt Lastewka: Madame Wortsman, je vous pose la question suivante: si vous pouviez recommander deux initiatives en vue d'augmenter la productivité du Canada, que recommanderiez-vous?

Mme Arlene Wortsman: Nous nous intéressons essentiellement au marché du travail. Nous sommes déjà présents sur les lieux de travail quotidiennement et nous y constatons ce que j'appellerais la nécessité de la formation continue et d'un quelconque programme d'encouragement, surtout pour aider les petites et moyennes entreprises, parce que ce sont les grandes compagnies qui ont des programmes de formation continue. Il est clair que les gestionnaires et les employés ont constamment besoin de se perfectionner et de renouveler leurs compétences. Compte tenu de l'évolution rapide de la technologie, il faut que ce soit continu. La première recommandation consisterait donc à s'assurer d'offrir des possibilités de formation.

L'autre concerne la possibilité de nouveaux arrangements du travail. La semaine dernière, Statistique Canada a publié une étude dans laquelle il était question du niveau de stress élevé des Canadiens. Eh bien, cela se manifeste de plus en plus et les gens vont devoir trouver un équilibre quelconque. Les entreprises vont rivaliser pour embaucher des travailleurs et elles devront offrir des solutions de rechange et pas seulement des incitatifs pécuniaires.

M. Walt Lastewka: Monsieur Daly, comment répondriez-vous à cette question?

M. Don Daly: Je suis d'accord sur le premier point, l'importance de la formation. Pour ce qui concerne l'importance d'adopter plus rapidement la nouvelle technologie, je n'ai pas de solution à proposer.

Je voudrais vous parler brièvement du Japon. La croissance très rapide de la productivité au Japon a été fondée en très grande partie sur de la technologie achetée. À ce moment-là, les Japonais faisaient très peu de R-D, ce qui ne les a pas empêchés de connaître une hausse spectaculaire de leur productivité. Près de 10 p. 100 par année pendant 10 ou 15 ans.

• 1650

Ils ont adopté un certain nombre de mesures. Ils ont mis en place des équipes de travail organisées par l'agence japonaise de la productivité. Ils ont envoyé des équipes comprenant des travailleurs et des gestionnaires dans les principaux pays industrialisés pour étudier ce qui s'y faisait, et ces groupes ont rédigé des rapports et sont rentrés chez eux pour y diffuser leurs constatations. C'est ainsi que l'agence japonaise de la productivité possède littéralement des centaines de bandes vidéo et audio et une très abondante documentation sur les techniques de gestion, tout à fait dans le sens que vous indiquez.

Par ailleurs, les Japonais ont déployé beaucoup d'efforts pour avoir accès, par l'entremise de leurs ambassades, etc., à l'ensemble de la littérature scientifique la plus récente. Ils envoyaient tout cela par sacs diplomatiques et courrier aérien à Tokyo, où tout était traduit en japonais, et l'on diffusait ensuite, par l'entremise des 165 bureaux régionaux disséminés partout au Japon, un résumé des derniers articles parus. Et les envois étaient taillés sur mesure, c'est-à-dire que l'on envoyait par exemple à une compagnie de textile tout ce qu'il y avait de neuf dans le domaine du textile, et à une compagnie de machines-outils, on envoyait des articles sur les machines. On leur envoyait un résumé d'une page en japonais. S'ils voulaient en savoir plus, ils pouvaient obtenir le texte intégral de l'article traduit en japonais, dans les 24 heures. Leur méthode consistait donc à acheter de la technologie, à la mettre en oeuvre rapidement et à faire beaucoup de formation, et les résultats ont été tout simplement spectaculaires.

Maintenant, je crois que nous nous sommes laissés omnibuler par la R-D, qui donne en fait des emplois aux scientifiques et aux ingénieurs ayant des revenus supérieurs à la moyenne, mais nous n'avons pas accordé suffisamment d'attention à l'adoption de ces idées dans les usines, ce qui est tout à fait crucial, comme vous le soulignez à juste titre. Je crois qu'il y a là une différence d'attitude et, si votre comité pouvait en faire la recommandation, il serait souhaitable à mon avis de signaler que c'est un domaine qui n'a pas eu au Canada toute l'attention qu'il mérite, et cela touche à notre problème.

M. Walt Lastewka: Merci.

La présidente: Merci, monsieur Lastewka.

Monsieur Jones.

M. Jim Jones (Markham, PC): Merci, madame la présidente. Bienvenue à vous, professeur Daly, et aux porte-parole du Centre syndical et patronal du Canada.

Professeur Daly, vous avez dit que nous ne pourrons pas augmenter notre niveau de vie sans augmenter notre productivité. J'ai des questions à poser là-dessus.

À long terme, est-ce bon pour notre pays et notre économie d'avoir un dollar canadien faible? Cela pourrait aider au chapitre du surplus commercial avec les États-Unis, mais est-ce bon à long terme?

M. Don Daly: Il est difficile de répondre à cette question. En un sens, le taux de change est en fait le résultat d'autres politiques, en particulier la politique monétaire. Et je pense que le taux de change a encouragé les exportations et réduit la concurrence des importations, mais qu'il a par ailleurs fait augmenter le coût des produits achetés par les compagnies canadiennes. Nous payons plus cher les fruits et légumes frais à cause de la valeur du dollar canadien. Cela a un certain nombre d'effets négatifs, mais il est très difficile de cerner le résultat net global. Il y a du pour et du contre.

M. Jim Jones: Ces dernières années, il y a eu croissance du PIB mondial parce que beaucoup de pays en développement ont une économie en pleine croissance. Je sais qu'au cours des dernières années, le PIB des États-Unis est passé de 20 p. 100 à 25 p. 100, approximativement. J'ai regardé l'année dernière une émission dans laquelle Bill Clinton disait que son objectif était de tenter d'atteindre 35 p. 100. Pendant ce temps, au Canada, nous avions à une époque 4 p. 100 du PIB mondial, et nous sommes en perte de vitesse. Nous nous situons autour de 2 p. 100.

• 1655

Pourquoi les États-Unis peuvent-ils augmenter leur part pendant que l'ensemble grossit, tandis que nous, nous rapetissons alors même que le tout augmente? Nous ne maintenons pas notre part proportionnellement.

M. Don Daly: Il y a deux choses à signaler.

D'abord, pour diverses raisons, la proportion de la population canadienne qui travaille et qui fait partie de la population active a baissé, en particulier en comparaison des États-Unis. C'est en partie une question de répartition des groupes d'âge. C'est l'un des éléments qui entrent en ligne de compte et il n'est pas négligeable.

Par ailleurs, il y a la performance au chapitre de la productivité, en particulier dans le secteur manufacturier, et j'en ai parlé tout à l'heure. Je dirais que ce sont les deux éléments qui jouent.

Ce manque de convergence du Canada par rapport aux États-Unis a de quoi laisser perplexe, parce que presque tous les autres grands pays industrialisés, les pays d'Europe et le Japon, se sont plutôt rapprochés des États-Unis. Et par rapport au Japon, par exemple, nous avons des avantages: propriété étrangère, langue commune, accès facile à la technologie. Nous avons une foule d'avantages et pourtant nous n'avons pas réussi à les utiliser aussi efficacement que les Japonais, qui déploient beaucoup d'efforts, notamment en fait de traduction, même s'ils n'ont qu'une quantité négligeable d'investissements étrangers directs dans leur pays. Ils ont réussi à se rapprocher des États-Unis, ce que nous n'avons pas réussi à faire.

Les raisons pour lesquelles le Canada fait bande à part dans ce domaine ne sont pas très claires. Certains éléments que nous avons signalés pourraient y contribuer, par exemple la faiblesse de l'éducation permanente, les taux d'imposition plus élevés et la plus forte imposition des profits des sociétés. Mais dans quelle mesure est-ce l'explication? J'avoue ne pas le savoir et, à ma connaissance, personne n'a pu résoudre cette énigme.

Mais vous posez là une question importante.

M. Jim Jones: Mon collègue a évoqué l'économie du savoir. L'économie des États-Unis se situe à environ 40 p. 100, et je pense qu'elle a même atteint 45 p. 100, dans le secteur du savoir ou de la technologie de pointe. Au Canada, ce secteur du savoir ou de la technologie de pointe piétine à environ 19 ou 20 p. 100 de l'économie.

Que devons-nous faire pour progresser à ce chapitre, afin de nous rapprocher davantage des États-Unis? Notre économie est encore en grande partie dans le domaine des ressources.

M. Don Daly: Pour avoir de bons résultats dans les industries axées sur le savoir, le Canada a besoin de trois choses. Je vais d'abord les énumérer, après quoi je donnerai des explications.

Premièrement, il nous faut un bassin de scientifiques, d'ingénieurs et de spécialistes de l'informatique. Deuxièmement, il nous faut des gens qui ont des compétences dans le domaine des affaires et de la gestion; troisièmement, l'industrie exige de nos jours d'acheter énormément de matériel d'autres industries et d'autres compagnies. Nous devons donc pouvoir acheter ce matériel à bas prix.

Si l'on examine l'effectif total, même si nous commençons maintenant à produire autant de scientifiques et d'ingénieurs que les États-Unis, notre effectif est encore inférieur à celui de ce pays. Autrement dit, nous avons relativement moins de scientifiques et d'ingénieurs. La proportion des petites entreprises qui n'ont pas un seul scientifique ou ingénieur parmi leur effectif est vraiment très forte.

Deuxièmement, la proportion des gens qui reçoivent une formation dans le domaine des affaires au Canada atteint maintenant environ 60 p. 100 du niveau des États-Unis, mais pendant longtemps, elle se situait à la moitié par rapport aux États-Unis. Autrement dit, nous avons moins de gens qui ont suivi une formation dans le domaine de la gestion, y compris l'informatique, les sciences du comportement, etc.

• 1700

Le troisième point est le coût du matériel acheté. J'en ai parlé à des dirigeants d'entreprise et il ressort aussi d'études qui ont été faites là-dessus qu'au Canada, les coûts des composantes sont généralement plus élevés. Par exemple, les ordinateurs coûtent plus cher au Canada qu'aux États-Unis, en dollars canadiens, en proportion des salaires, etc.

Donc en un sens, le Canada est relativement désavantagé dans les trois domaines qui comptent vraiment si l'on veut réussir dans les industries axées sur le savoir. Un certain nombre d'études ont fait ressortir l'amélioration assez spectaculaire de la productivité dans les industries américaines dans ce secteur, et le Canada a très peu à offrir à cet égard. Mais ce sont ces trois facteurs qui expliquent cet état de choses et nous devons nous attaquer à tous les trois.

J'ignore ce qu'il faut faire pour le dernier des trois, le coût élevé du matériel, mais il importe de faire davantage d'éducation dans les domaines des sciences, du génie et des affaires, ces compétences qui sont pertinentes au secteur du savoir. Cela fait partie de la politique de l'éducation qui relève des provinces, et le gouvernement fédéral s'est retiré en grande partie du financement des programmes établis, de sorte qu'il injecte moins d'argent dans ce domaine. Les universités ont d'énormes problèmes, devant répartir des ressources de plus en plus rares, et elles doivent transmettre aux étudiants une part plus grande des coûts.

Il est nécessaire d'accorder de l'attention à ces trois domaines. S'attaquer à un seul des trois serait une solution incomplète. Vous me suivez?

M. Jim Jones: Oui.

La présidente: Merci, monsieur Jones.

M. Jim Jones: J'ai une dernière question.

La présidente: Je vous prie d'être bref, monsieur Jones.

M. Jim Jones: Professeur Daly, plusieurs pays réduisent leur taux d'imposition des sociétés afin d'attirer des compagnies de technologie de pointe, dans le secteur de la fabrication, des logiciels ou de la R-D. Ils essaient d'attirer les grandes entreprises pour favoriser leur croissance. À votre avis, qu'est-ce qui est le plus important: réduire l'impôt des sociétés ou réduire l'impôt sur le revenu des particuliers? Disons que notre objectif est d'essayer de faire passer le taux de chômage de 8 p. 100 à 4 p. 100.

Une voix: 7,2 p. 100.

M. Don Daly: Un exemple d'un pays qui a prospéré en abaissant le taux d'imposition des sociétés, c'est l'Irlande. Je m'appelle Daly et je reviens tout juste de ce pays, où j'ai vu de mes yeux, pour avoir fait le tour de ma parenté et avoir aussi fait du tourisme, ce que l'on appelle maintenant le tigre celtique. C'est essentiellement le fruit de bas taux d'imposition des sociétés, d'un encouragement considérable de l'investissement étranger direct et aussi, bien sûr, des avantages de faire partie de l'Union européenne. L'impôt des sociétés est donc important.

En termes de performance globale au chapitre de la productivité, le taux d'imposition des sociétés et le taux d'imposition des petites entreprises sont très importants. Mais en même temps, à long terme, le seul moyen de réduire notre fardeau fiscal total au Canada consiste à réduire le fardeau du service de la dette, en particulier au niveau fédéral. Le remboursement d'une partie de la dette à court terme permettrait donc de réduire à plus long terme le taux d'imposition des particuliers.

Si nous réussissions à obtenir une forte hausse de la productivité, alors les gouvernements auraient des rentrées d'argent considérablement plus élevées. L'une des raisons pour lesquelles ils ont connu des déficits élevés, c'est le degré élevé de mou et de chômage dans l'économie canadienne, comme Pierre Fortin l'a dit dans son exposé à l'Institut C.D. Howe.

À court terme, j'accorderais donc une priorité plus élevée à l'imposition des profits des sociétés, mais les taux d'imposition beaucoup plus élevés des particuliers, ainsi que les bas revenus, qui se situent à 50 000 $ ou 60 000 $ au Canada, en comparaison des États-Unis, sont une considération qui entre en jeu dans l'exode des cerveaux, en particulier parmi les professionnels, ce qui est un élément de notre problème.

• 1705

La présidente: Merci.

Monsieur Cannis.

M. John Cannis: Merci, madame la présidente. Je souhaite moi aussi la bienvenue aux témoins d'aujourd'hui. Professeur Daly, je vois que vous avez présenté ce graphique qui va de 1973 à 1993. Je voudrais d'abord vous demander s'il y a des données ou des statistiques plus récentes. Je vais vous dire où je veux en venir. Dans votre exposé, vous avez notamment posé la question de savoir si la productivité est importante, et vous avez mis l'accent sur trois domaines: le niveau de vie, la compétitivité internationale et l'emploi.

Pour ce qui est du niveau de vie, comment expliquer le fait que le niveau de vie du Canada a été reconnu sur la scène internationale pendant tellement d'années consécutivement? Est-ce parce que le chômage est passé depuis 1993 de 11,45 p. 100 à 7,2 p. 100 à l'échelle nationale? Est-ce parce que le ratio dette-PIB est à la baisse? Est-ce parce que l'on a maintenant éliminé le déficit et que nous avons maintenant un surplus? Est-ce le fait que les cotisations à l'AE versées par les entreprises ont diminué de plusieurs milliards de dollars, ce qui a aidé les employeurs et les employés?

Je voudrais maintenant m'attarder au recyclage que vous avez évoqué dans le domaine du savoir. Si je regarde ce graphique de 1993, vous avez constamment parlé d'automatisation, d'informatique, etc. En 1993, la plupart des entreprises avaient des systèmes 360/20, des systèmes très lourds. La productivité était faible, les temps étaient difficiles et personne à ce moment-là ne parlait d'ordinateurs personnels, d'ordinateurs individuels, de réseaux locaux, de réseaux élargis. On n'entendait même pas parler de cela.

Aujourd'hui, nous avons l'automatisation et nous avons de nouveaux logiciels qui sortent parfois chaque semaine et qui nous rendent plus productifs. Je suis donc curieux de savoir si une étude a été faite depuis, je veux dire depuis que nous sommes passés de cette économie fondée sur les ressources à une économie axée sur l'information ou sur le savoir. Est-ce que vous, votre organisation ou d'autres organisations ont fait une étude plus récente, disons au cours des quatre ou cinq dernières années, pour voir où nous en sommes en termes de productivité? Aujourd'hui, nous avons des outils et du recyclage. Je suis d'accord avec ce qu'Arlene a dit et c'est l'un des principaux problèmes qu'on a évoqué aujourd'hui à mon sens, à savoir le manque de compétences.

Peut-être que DRHC pourrait examiner la question du perfectionnement du personnel, voir quelles compagnies n'investissent malheureusement pas dans ce domaine? Avez-vous par ailleurs mesuré, et je termine là-dessus, madame la présidente, la productivité des travailleurs indépendants. Je dirais que depuis au moins huit ans, il y a eu une très forte augmentation du nombre des experts-conseils indépendants, des entreprises d'une ou deux personnes qui se spécialisent dans la conception de logiciels, des ingénieurs qui se sont lancés à leur compte...

M. Charlie Penson: Vous prononcez un discours, ou quoi?

M. John Cannis: C'est un discours, parce qu'il y a des faits que je veux établir.

La présidente: Venez-en à votre question.

M. John Cannis: Ma question est celle-ci: a-t-on fait une étude au cours des quatre dernières années pour mesurer la productivité?

M. Don Daly: Oui, j'ai remis au personnel du comité une étude à laquelle je travaille et sur laquelle j'ai fondé en partie mon exposé, y compris ce graphique-ci. La prochaine version en sera présentée à l'occasion d'une conférence en janvier et comprendra les résultats de sondage auprès des compagnies. Oui, du travail a été fait. Pierre Fortin a un résumé de cette question dans le contexte du niveau de vie, avec une bonne documentation.

Les documents sur lesquels je me suis fondé, y compris le graphique que vous avez mentionné, sont tirés en partie des données du recensement sur le secteur de la fabrication. Au moment où ce graphique a été établi, 1992 était la dernière année pour laquelle on avait des données; c'était en 1996. John Baldwin, qui a témoigné à votre dernière séance, était la source de ce document. Il va donner une communication à cette conférence de janvier sur la productivité des petites entreprises et j'ai bien hâte de l'entendre. Il aura des données supplémentaires là-dessus.

J'ignore s'il a abordé cette question dans son exposé devant vous, mais il est certain qu'il travaille là-dessus. Il y a donc un certain nombre d'études qui se font sur la productivité.

• 1710

Le problème tient en partie au fait que certaines grandes organisations financées par le gouvernement qui se sont déjà penchées sur la question—le Conseil économique du Canada, où j'ai commencé à m'intéresser à cette question, le Conseil économique de l'Ontario, ainsi que le Conseil des sciences du Canada, ont toutes été abolies il y a environ cinq ans.

Certaines de ces études peuvent seulement se faire grâce à des ressources spéciales permettant de comparer les données des compagnies et celles de Statistique Canada. John Baldwin a beaucoup travaillé dans ce domaine, mais son budget est limité. J'essaie depuis quatre ans d'obtenir des fonds supplémentaires pour financer justement ce domaine d'étude. Nous nous débattons encore pour trouver l'argent nécessaire pour interviewer des chefs de petites entreprises. Nous avons 25 000 $. C'est environ 15 p. 100 de ce dont nous avons besoin et nous n'avons pas encore trouvé le reste.

C'est ainsi que des champs d'étude qui sont très importants à mon avis pour aborder justement les questions que vous soulevez ont dû être abandonnés parce que leurs coûts dépassent les moyens des universitaires.

M. John Cannis: Vous êtes donc d'accord avec moi, professeur Daly, pour dire que le manque de fonds vous nuit et vous empêche de terminer cette étude.

M. Don Daly: Oui.

M. John Cannis: C'est un autre problème qui nuit à la productivité: la possibilité pour les PME d'avoir accès à des capitaux.

M. Don Daly: Oui. Mais je voudrais revenir brièvement à la différence dans les résultats attribués au Canada par l'ONU et des organismes européens qui font ce genre de classement. Le Canada se classe très bien.

Ce qui se passe, c'est que leur classement est influencé par des facteurs non économiques, par exemple la durée de vie et le taux de mortalité infantile. Les indicateurs économiques tracent un tableau beaucoup moins prometteur que certains autres indicateurs.

Il y a à peu près trois mois, Bill Watson a publié dans le National Post un exposé vraiment remarquable sur les limites de ces autres mesures. Il y fait une analyse très solide. Je reproduis souvent des articles à l'intention de mes étudiants, et j'ai gardé celui-là parce que c'est un exposé absolument fascinant des limites de ces autres indices et l'auteur exprime sa préférence envers une mesure économique comme le PIB ou la productivité, et c'est également là-dessus que je mets l'accent.

La présidente: Merci, monsieur Cannis.

Monsieur Pickard.

M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.

J'entends constamment dire que le gouvernement est responsable de l'exode des cerveaux au Canada. Il me semble que ce que l'on me dit, c'est que nous avons besoin de personnes spécialisées dans des domaines spécialisés et probablement dans une multitude de domaines, et non pas un seul domaine de compétences.

J'examine deux ou trois questions qui sont pertinentes à notre productivité et à tous ceux qui s'efforcent sur le terrain de faire progresser nos entreprises.

Si j'examine la profession médicale, c'est bien simple. Nous avons besoin d'un plus grand nombre de médecins. Nous n'avons pas d'installations. Nous n'avons pas d'établissements de formation. Nous n'avons pas le soutien universitaire, les facultés de médecine, et il faudra du temps pour mettre tout cela en place dans les universités. Il est certain que nos projections dans ce domaine étaient fausses il y a 10 ou 15 ans. Cela ne vaut pas seulement pour la profession médicale, mais pour tous les domaines connexes. On n'avait pas envisagé la spécialisation des médecins. On n'a pas tenu compte de certains facteurs.

De mon point de vue, je dirais que le même problème s'est posé dans le cas de la technologie de pointe, à cause de l'évolution rapide, et il est bien possible qu'on n'ait pas réussi à tenir le rythme du côté de la formation. C'est peut-être pourquoi il y a plus de possibilités aux États-Unis et les gens s'en vont là-bas pour la simple raison qu'ils peuvent entrer dans ce secteur au niveau qu'ils souhaitent. C'est un premier point.

• 1715

Deuxièmement, la semaine dernière, un type est venu me voir et m'a décrit cet outil extraordinaire avec lequel son fils travaille en Californie. C'est une proposition pour le secteur immobilier qui utilise un écran en trois dimensions sur lequel on peut voir tout ce qui se trouve dans une pièce. On peut visiter la maison en trois dimensions. Tout est mis sur ordinateur. Autrement dit, c'est encore de la haute technologie. Il a dit que son fils s'est lancé dans cette entreprise, qui est maintenant très importante; elle emploie 150 personnes en Californie et les possibilités de croissance sont illimitées. Il aimerait bien que son fils soit au Canada, mais il n'y avait pas de possibilités ici.

Vous pourriez peut-être m'aider à comprendre un peu mieux ce que nous devons faire ici pour créer de telles possibilités. Peut-être devrions-nous, comme vous l'avez suggéré, adopter et adapter des technologies, les importer au Canada et voir si nous pourrions progresser à un rythme plus rapide. Je n'en sais trop rien, mais j'aimerais bien savoir ce que vous en pensez.

M. Don Daly: Pour ce qui est des médecins et des infirmières, les données indiquent effectivement qu'il y a une très forte migration des Canadiens vers les États-Unis dans ces deux secteurs. C'est devenu un véritable problème. Ivan Fellegi a fait une compilation de tout ce qui s'est publié sur l'exode des cerveaux, et il a signalé qu'il y a une très forte perte dans ce secteur.

Il en coûte cher de former un médecin à même les deniers publics. Le président de l'université Western Ontario a fait le calcul et je cite de mémoire, mais je crois qu'il en coûte quelque 600 000 $ pour former un médecin, en plus des droits de scolarité. Nous subissons donc une lourde perte quand un médecin s'en va aux États-Unis. C'est un grave problème et il faudra du temps pour le résoudre.

Quant à l'exemple que vous donnez de la technologie dans le domaine de l'immobilier, je peux vous en donner un exemple personnel. Mon fils aîné travaillait dans le domaine de l'informatique appliquée à l'immobilier, avec des photographies et tout le reste. Un client pouvait identifier la région, en l'occurrence on faisait l'essai du système à Ottawa, et préciser la fourchette de prix qu'il envisageait de payer pour une maison, et en appuyant sur un bouton, on obtenait sur l'écran en quelque cinq secondes une liste de toutes les maisons inscrites dans cette région et dans la gamme de prix précisée.

Quand la compagnie, qui était l'une des plus importantes compagnies immobilières au Canada, a connu des difficultés financières, c'est ce groupe qu'on a laissé tomber. Ils ont vendu la technologie, de sorte qu'après le départ de ce groupe d'employés, la vente de ce produit et de cette technologie aux États-Unis est devenue une importante source de revenu pour cette compagnie. On a donc créé quelque chose ici, et ensuite...

Il travaille maintenant dans un autre domaine.

M. Jerry Pickard: Mais à partir de là, le gouvernement peut-il faire quelque chose à ce sujet? Faut-il mettre en place des politiques pour progresser dans ce domaine, ou bien est-ce simplement que les marchés plus importants ont plus d'argent et que les entreprises d'une plus grande envergure finissent par en profiter?

M. Don Daly: Eh bien, il est certain que c'est en partie une question de marchés plus importants, qui permettent d'absorber les frais fixes énormes de la mise au point d'une nouvelle technologie. Très souvent, la mise au point coûte énormément cher; les frais fixes sont donc élevés, mais ensuite l'exploitation ne coûte presque rien, c'est-à-dire que les coûts marginaux sont très bas. Il est donc avantageux de disposer d'un marché important qui permet de faire cela. Le libre-échange devrait améliorer notre position relative à cet égard.

C'est un aspect du problème, mais par ailleurs, les États-Unis ont une longue tradition de changement radical et révolutionnaire—la guerre d'indépendance, la guerre civile. Le Canada a tendance à être beaucoup plus conservateur, en ce sens que nous procédons par étape. Il a fallu attendre à 1923 pour que le statut de Westminster nous donne une certaine indépendance. En fait, nous avions déjà depuis longtemps un gouvernement canadien autonome.

• 1720

Le changement est beaucoup plus lent. Les Canadiens manifestent beaucoup moins d'enthousiasme devant le changement et ont tendance à favoriser un changement lent plutôt que rapide. Un sociologue dont le nom m'échappe—cela me reviendra dès que je serai parti—a écrit un livre sur cette question, c'est-à-dire les différences entre le Canada et les États-Unis pour ce qui est de l'attitude face au changement. Aux États-Unis, on est beaucoup plus ouvert au changement qu'au Canada; c'est une tradition américaine.

L'histoire évolue très lentement. Cela a certains avantages, mais tant que nous ne serons pas plus ouverts au changement et que nos chefs de petites entreprises ne feront pas preuve de plus d'audace, comme on l'a dit tout à l'heure, tant que cette tendance ne se manifestera pas au Canada, il pourrait être bien difficile pour nous de renverser la vapeur à ce chapitre.

M. Jerry Pickard: Je n'ai plus de temps. Je voudrais seulement demander à Arlene et à Chris s'ils ont quelque chose à ajouter, si je peux me le permettre. Sinon...

La présidente: Avez-vous quelque chose à ajouter, madame Wortsman ou monsieur Parley?

Madame Wortsman.

Mme Arlene Wortsman: Vous voulez dire au sujet de l'approche culturelle...

M. Jerry Pickard: Les ressources personnelles, l'exode des cerveaux et l'éducation.

Mme Arlene Wortsman: Je vais vous parler de ce que nous voyons sur les lieux de travail, car nous le voyons quotidiennement. On a fait allusion au secteur du savoir et au secteur de la technologie de pointe, mais ce que l'on voit partout, dans tous les secteurs, c'est l'introduction croissante de nouvelles technologies, à tous les niveaux, depuis le premier échelon jusqu'à la haute direction. Cela exige de la formation; tous les effectifs de ces lieux de travail, du haut en bas de l'échelle, doivent acquérir de nouvelles habiletés.

Ce qui nous semble manquer, c'est l'engagement de faire tout cela; on s'y met seulement quand on y est forcé. On n'a pas une approche suffisamment proactive. C'est ce qui manque. Je vais m'en tenir là.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Pickard.

Je veux remercier tous nos témoins de s'être joints à nous aujourd'hui. Ce fut une séance très intéressante qui donne évidemment matière à réflexion pour la suite de notre étude.

Si vous avez d'autres observations... Professeur Daly, quand votre rapport sera achevé, nous aimerions bien le recevoir.

Voulez-vous avoir le mot de la fin, professeur Daly?

M. Don Daly: Je voudrais seulement dire que les questions que l'on a posées aujourd'hui étaient d'un très fort calibre. J'ai subi un interrogatoire de ce genre à l'OCDE et lors de mes examens de doctorat. Vous avez manifestement appris vos leçons et vous posez des questions mûrement réfléchies. J'aimerais que nous puissions donner des réponses plus claires à certaines de ces questions, mais si nous en trouvons, nous vous ferons signe.

La présidente: Merci.

Madame Wortsman.

Mme Arlene Wortsman: Nous tenons à vous remercier beaucoup de nous avoir donné l'occasion de prendre la parole devant vous. Nous sommes d'accord avec le professeur Daly au sujet du calibre des questions, auxquelles nous n'avons pas toujours su répondre.

Il y a un document qui est susceptible de vous intéresser et qui devrait paraître au début du printemps. Nous allons faire une enquête auprès des entreprises et des dirigeants syndicaux d'un bout à l'autre du pays pour connaître leurs perceptions des problèmes économiques auxquels le pays est confronté, et nous allons leur demander ce qu'il faut faire à leur avis sur les lieux de travail. Les résultats devraient paraître en mars.

La présidente: Merci.

Nous vous en sommes reconnaissants et, comme le professeur Daly l'a dit, nous continuons tous d'apprendre à mesure que nous étudions cette question. Nous sommes loin d'en avoir terminé.

Je vais maintenant mettre fin à cette partie de la réunion et nous allons passer à une réunion du comité directeur.

La séance est levée.