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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 1er juin 2000

• 1534

[Traduction]

Le président (M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.)): Mesdames et messieurs, je déclare la séance ouverte. Conformément au paragraphe 32(5) du Règlement, nous examinons le projet de règlements sur le tabac.

Nous accueillons cet après-midi M. Ralph Levine, directeur général de Van Nelle Canada Limited, et MM. Cantin et Joe Spriet, de l'Association canadienne des petits fabricants de tabac.

• 1535

Monsieur Levine, voulez-vous commencer?

M. Ralph Levine (directeur général, Van Nelle Canada Limited): D'accord.

Le président: Merci.

M. Ralph Levine: Merci.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, bon après-midi. Je m'appelle Ralph Levine et je suis directeur général de Van Nelle Canada Limited, une société établie au Canada depuis 1970.

Van Nelle, dont le siège social se trouve à Mississauga, est un petit importateur de produits spécialisés du tabac. Nous importons du tabac à pipe des Pays-Bas et d'Angleterre, du tabac à rouler des Pays-Bas et d'Irlande, du papier à cigarettes de Belgique et du pays de Galles, des cigarettes de France et du tabac sans fumée des États-Unis. Van Nelle compte vingt-trois employés: seize commis-voyageurs et sept employés du siège social. Au cours des douze derniers mois, nos produits ont généré 6,2 millions de dollars en droits et taxes d'accise, et plus de 3 millions de dollars en taxes provinciales sur le tabac.

Je désire faire part au comité de nos inquiétudes et de celles de nos fournisseurs sur certains aspects de la réglementation sur l'étiquetage et les rapports relatifs au tabac. Les points que je désire aborder sont les suivants: la divulgation des additifs, les tests applicables au tabac roulé, les exigences générales relatives aux tests et leurs effets sur de petites entreprises comme la nôtre, les exigences relatives à l'établissement de rapports et leurs effets sur les petites entreprises.

J'aimerais d'abord vous parler du tabac à pipe, qui représente une portion importante de nos activités. Les ventes canadiennes de tabac à pipe ont connu un déclin marqué au cours des dix dernières années. En 1990, le volume de ces ventes était de 300 000 kilogrammes et, d'ici la fin de cette année, il sera de 140 000 kilogrammes, soit un déclin de 54 p. 100. Tout indique que cette chute se poursuivra. Ce sont des hommes âgés, surtout les retraités, qui fument la pipe et il n'existe aucune preuve—et j'insiste là-dessus—que les jeunes Canadiens vont adopter la pipe. Aussi je me demande: pourquoi inclure le tabac à pipe dans la réglementation proposée? Ces changements seront extrêmement coûteux pour notre petit secteur qui, au total, représente moins de 0,3 p. 100 du marché du tabac.

Le point qui me préoccupe avant tout, c'est la divulgation des additifs que contiennent les produits que je vends. Tous mes fournisseurs comprennent le désir d'en savoir plus sur les additifs et ils sont disposés à fournir ce renseignement. Il ne faut pas, toutefois, négliger la question de la propriété commerciale. Ces entreprises, tout comme leurs propres fournisseurs d'arômes, ont investi dans l'élaboration de recettes. Ils aimeraient qu'on leur permette de déclarer, par marque, les additifs les plus importants, comme les agents humectants, mais aussi de déclarer, dans une liste industrielle composite fournie par un tiers, les principaux ingrédients aromatiques utilisés dans les produits, comme on le fait présentement en Europe. De cette façon, on protégerait la recette d'arôme clé mise au point par les fournisseurs. Si jamais Santé Canada avait des préoccupations au sujet d'une substance aromatique ou d'un additif donné, l'entreprise faisant usage de ce produit serait tenue d'en fournir les détails.

Mon deuxième point est le tabac à rouler. Van Nelle est l'unique importateur de tabac à rouler au Canada. Notre tabac est uniquement roulé à la main, dans une feuille de papier et non dans un tube préformé muni d'un filtre. Jusqu'ici, aucune norme n'a été acceptée à l'échelle internationale pour la préparation et la consommation de tels produits. Par exemple, si l'on remettait à 500 personnes du tabac à rouler Drum et du papier, il n'en ressortirait pas deux cigarettes identiques. Comment peut-on donc s'attendre à ce qu'on obtienne des résultats d'analyse uniformes ou même utiles?

D'après M. Kaiserman, directeur de la recherche à Santé Canada, ce sont les caractéristiques du tube préformé qui déterminent essentiellement la teneur en goudron, en nicotine et en monoxyde de carbone. Voici ce qu'il dit, en substance, à ce sujet:

    Par conséquent, les fumeurs peuvent se procurer du tabac à rouler à bas rendement en croyant, à tort, que c'est le tabac qui compte dans la production de composants toxiques. Mais comme l'indiquent les résultats de l'étude, c'est la combinaison tube-filtre, et non le tabac, qui contrôle la transmission de substances toxiques absorbés aux fumeurs. Il faudrait donc recommander à ceux-ci, s'ils veulent réduire le rendement, d'asseoir leur choix sur la combinaison tube-filtre plutôt que sur le tabac.

• 1540

Je tiens à répéter que notre tabac est roulé à la main, et non entubé, et qu'il n'est muni ni d'un filtre ni d'un bout. Les fumeurs qui roulent leurs cigarettes eux-mêmes choisissent la quantité de tabac et le type de papier qu'ils utilisent. Ces deux éléments influent sur le rendement en fumée. Aussi, il est important que la méthode d'essai utilisée aide le consommateur à comprendre les effets de ces choix.

L'Organisation internationale de normalisation, l'ISO, travaille actuellement à l'élaboration d'un système de mesure des émissions présentes dans la fumée des cigarettes roulées à la main, à la suite d'un vaste ensemble d'études menées par CORESTA, l'organisme de normalisation de l'industrie. D'ici à ce que cette méthode d'essai soit mise au point, nous demandons à être exemptés de l'obligation de publier de l'information possiblement trompeuse sur les émissions, comme l'exige la réglementation proposée. Ce n'est que grâce à une méthode valable que la mesure des émissions peut-être effectuée d'une façon qui soit significative pour le consommateur.

Les tests sur les composants et les émissions qui requiert la réglementation proposée constituent une grande source d'inquiétude pour mes fournisseurs. Le fait que Santé Canada exige l'application de normes canadiennes, plutôt qu'internationales, pour la mesure des composants et des émissions pourrait être considéré comme une mesure discriminatoire. Les fournisseurs étrangers peuvent être tenus de se conformer à des règlements équivalents dans d'autres marchés. Cela pourrait créer des barrières au commerce déloyales selon les accords du GATT. Altadis, mon fournisseur français, a déjà informé le ministère français du Commerce extérieur, l'OMC et le ministère du Commerce du Royaume-Uni de ses préoccupations.

Troisièmement, le coût des essais demandé par Santé Canada pourrait forcer Altadis et certains fournisseurs plus petits à mettre fin à leurs ventes au Canada. L'analyse des marques pourrait être extrêmement coûteuse, même s'il y avait assez de laboratoires pour y procéder, et ce coût pèserait probablement plus lourd que les bénéfices réalisés sur la majorité des marques que je vends. La viabilité de notre entreprise au Canada serait compromise. D'autre part, les coûts liés aux exigences relatives à l'établissement de rapports seraient énormes. Mes vingt-trois employés, sans exception, seraient obligés d'y travailler. Voilà encore un fardeau injuste à imposer aux petits entrepreneurs.

En conclusion, les affaires Van Nelle au Canada représentent 0,3 p. 100 de l'ensemble des ventes au Canada. Nous faisons partie du Small Guys Tobacco Group, et nous tentons de trouver un créneau dans le marché et de garder la tête hors de l'eau. Je vous demande, au nom de mon entreprise, de mes employés et des autres petites sociétés, de tenir compte de nos doléances et de modifier la réglementation proposée.

J'aimerais remercier Karen Proud et ses collègues de Santé Canada, qui ont écouté les arguments présentés au nom des petites entreprises, arguments qui sont exposés sous forme détaillée dans nos mémoires. Ceux-ci seront distribués de concert avec le présent exposé. Nous espérons que le dialogue se poursuivra. J'ai aussi joint au document une liste de sujets auxquels j'ai fait référence au cours de mon exposé.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Levine.

Nous allons maintenant entendre l'Association canadienne des petits fabricants de tabac. Qui va prendre la parole en premier?

M. Joe Spriet (membre, Association canadienne des petits fabricants de tabac): Nous avons convenu que j'allais présenter l'exposé. Nous allons toutefois répondre tous les deux à vos questions.

Le président: Merci.

M. Joe Spriet: Mesdames et messieurs les membres du comité, l'Association canadienne des petits fabricants de tabac regroupe les compagnies Bastos du Canada Limitée, de Louisevile, au Québec; Choice Tobacco Inc., de Montague, à l'Île-du-Prince-Édouard; et Tabacs Tremblay Inc., de Québec. Elle a pour mission de faire valoir les points de vue des petits fabricants de tabac dont la part de marché représente moins de 2 p. 100 de l'ensemble des ventes de produits du tabac au Canada.

Aujourd'hui, nous tenons à vous dire que nous comprenons fort bien le désir du gouvernement canadien et de votre comité de mettre en place des règlements qui prennent en considération le bien-être et la santé des Canadiens. Nous voulons aussi porter à votre attention le fait que vous avez la responsabilité d'établir des règlements équitables pour tous les intervenants afin de ne pas mettre en péril la survie des petits fabricants de produits du tabac, au détriment des grands fabricants de produits du tabac.

Nous pensons que les coûts liés à la préparation des différents rapports et aux analyses des constituants et des émissions présentes dans la fumée principale et dans la fumée secondaire, comme le propose le projet de règlement sur les rapports relatifs au tabac, sont trop exorbitants pour les petits fabricants de produits du tabac, dont la part de marché est inférieure à 2 p. 100 de l'ensemble des ventes de produits du tabac au Canada.

• 1545

Permettez-nous d'ajouter que les petits fabricants, membres de l'APFT, produisent de cinq à huit marques de tabac coupé, et une vingtaine de marques de cigarettes privées disponibles en format régulier et en grand format. Cela représente des dépenses de plusieurs centaines de milliers de dollars pour les analyses et la préparation des rapports, même si ces différentes marques sont regroupées sous des marques identiques, comme le précise le projet de règlement sur les rapports relatifs au tabac.

Comme le marché du tabac à coupe fine et des cigarettes de marques privées est complètement différent du marché des produits de marques nationales et que nous sommes soumis à une concurrence souvent très agressive et parfois même douteuse, il nous est presque impossible d'absorber les coûts supplémentaires qu'entraînent les analyses et la préparation des rapports en augmentant nos prix de vente.

Afin de réduire le fardeau économique qu'imposera cette réglementation aux petits fabricants, et afin que tous les intervenants dans le domaine soient assujettis à des règles équitables, nous vous proposons d'apporter les modifications suivantes au projet de règlement sur les rapports relatifs au tabac pour les marques de tabac coupé et les marques de cigarettes dont les parts de marché sont inférieures à 2 p. 100 de l'ensemble des ventes au Canada.

Partie 2, alinéas 11(2)a), b), c), rapports sur les ingrédients, exemption relative à l'établissement de rapports sur les stocks d'ingrédients achetés au cours du trimestre visé, utilisés au cours du trimestre visé, et entreposés à la date du rapport: nous pensons que l'obligation de préparer des rapports sur les stocks d'ingrédients ne donnera pas d'information pertinente au ministre de la Santé et représente un coût de main d'oeuvre important pour les petits fabricants.

Paragraphe 11(4), rapport sur les ingrédients, fréquence de présentation des rapports: quand le procédé de fabrication d'une marque de tabac à coupe fine ou de cigarettes demeure inchangé, les seuls deux facteurs qui influencent les données sur les ingrédients sont le poids moyen du tabac et les moyennes du taux d'humidité. Nous proposons que les fabricants présentent des rapports annuels sur les ingrédients, quand des modifications sont apportées au procédé de fabrication.

L'article 12, constituants: comme le tabac à coupe fine et les cigarettes canadiennes sont fabriqués au moyen de tabacs de Virginie cultivés au Canada et pratiquement identiques, l'analyse des constituants pour les marques dont la part de marché est inférieure à 2 p. 100 de l'ensemble des ventes au Canada ne donnera pas beaucoup plus d'informations pertinentes au ministère de la Santé. Les fabricants de ces marques devraient être exemptés de l'obligation de présenter un rapport d'analyse des constituants.

Partie 3, paragraphe 14(9), émissions des produits de tabac désignés: comme le matériel utilisé par les petits fabricants de tabac pour le contrôle du poids du tabac est beaucoup moins sophistiqué, il est très difficile de respecter les tolérances des émissions. Pour ces raisons, nous proposons que les fabricants de marques dont la part de marché est inférieure à 2 p. 100 de l'ensemble des ventes au Canada soient exemptés de l'obligation de présenter un rapport sur les émissions contenues dans la fumée principale et la fumée latérale des produits du tabac. Le ministre de la Santé devrait toutefois avoir la possibilité de faire des vérifications lorsqu'il a raison de croire qu'il pourrait y avoir abus de confiance. L'obligation de préparer des rapports sur les émissions contenues dans la fumée principale des produits du tabac obligera les petits fabricants à faire l'acquisition de matériel de contrôle coûteux, en plus d'absorber les coûts élevés associés aux analyses des émissions.

Merci de nous avoir donné l'occasion de présenter nos vues sur la question.

Le président: Merci beaucoup. Nous avons pris note des modifications que vous avez demandées.

Première question,

[Français]

Monsieur Ménard, s'il vous plaît.

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le président, puis-je prendre le temps accordé aux deux partis d'opposition?

Vous êtes les premiers témoins à manifester ouvertement une inquiétude quant à la recension des données et à ce qu'il faudra trouver dans les rapports. C'est donc dire que vos préoccupations se situent davantage au niveau de l'administration et des rapports que vous entretiendrez avec Santé Canada qu'à celui de l'impact de la nouvelle identification des paquets de cigarettes. Je voudrais comprendre davantage votre point de vue. Vous dites que vous avez des marques privées. Pouvez-vous me donner des exemples de marques de cigarettes que vous produisez?

• 1550

M. Gilbert Cantin (membre, Association canadienne des petits manufacturiers de tabac): Je vais vous répondre en français, si vous me le permettez.

M. Réal Ménard: Oui, d'accord.

M. Gilbert Cantin: La spécialité de Bastos est la fabrication de différentes marques privées pour des grossistes ou des chaînes d'alimentation telles que Loblaws et Provigo au Québec.

M. Réal Ménard: Vous fabriquez donc des cigarettes.

M. Gilbert Cantin: Oui, des cigarettes pour différents clients.

M. Réal Ménard: D'accord.

M. Gilbert Cantin: Nous fabriquons aussi du tabac coupé.

M. Réal Ménard: Sur le plan du contenu des cigarettes en goudron et des 30 ou 40 composantes, est-ce que c'est assez semblable?

M. Gilbert Cantin: On a différents mélanges. Si on regroupe nos marques selon les catégories qu'a établies la réglementation, on peut dire que nous en fabriquons une douzaine de sortes différentes.

M. Réal Ménard: D'accord. Si j'ai bien compris, Santé Canada cherche à obtenir ce type d'information parce que lors d'une étape ultérieure, il se propose de demander au Comité de la santé de se pencher sur les causes de la dépendance, y compris tout le lien qui existe entre la nicotine, le goudron et différentes substances. Si vos procédés de fabrication font en sorte qu'on trouve ces composantes dans vos produits, pourquoi seriez-vous exemptés de cette exigence? Je cherche à comprendre la rationalité de votre point de vue. Si j'étais votre procureur et que j'avais à plaider en faveur d'une exemption, quels arguments me donneriez-vous, à part le fait que vous n'occupez que 2 p. 100 du marché? Si vous fabriquez le même produit, un produit qui a les mêmes composantes, je suis porté à croire que Santé Canada a besoin de la même information.

M. Gilbert Cantin: Je vous dirai en tout premier lieu que la position des petits manufacturiers n'est pas semblable à celle des grands manufacturiers. Nous devons vendre nos cigarettes à un coût très inférieur à celui des cigarettes de marque nationale. De plus, les coûts liés à la préparation de rapports et aux analyses chimiques seraient à peu près les mêmes. Bien que nous produisions moins de sortes, les coûts seront tout aussi astronomiques.

M. Réal Ménard: Mais qu'est-ce que ça veut dire? Donnez-moi un exemple. Je crois me souvenir que votre collègue a parlé des coûts que vous devriez débourser pour colliger ces données en vue de les transmettre à Santé Canada. Combien de personnes devraient travailler à cette tâche dans une année? Pourriez-vous nous parler de coûts très précis afin que nous puissions les garder en mémoire?

M. Gilbert Cantin: Les coûts reliés à la préparation des rapports seraient de l'ordre de 1 million de dollars par année.

M. Réal Ménard: Un million de dollars par année.

M. Gilbert Cantin: Comme nous l'indiquons dans notre rapport, certaines exigences que prévoit Santé Canada ne sont pas nécessaires. Je pourrais vous donner l'exemple des alinéas 11(2)a), b) et c), qui portent sur les rapports des ingrédients. Une disposition stipule que nous devrons faire un rapport au sujet de nos inventaires. À mon avis, il importe peu que Santé Canada sache que nous avons en stock 2 000 livres ou 500 000 livres de tabac. Cette exigence représente pour nous la préparation d'inventaires à tous les trois mois. Il nous faudra indiquer ce qu'on a acheté et ce qu'on a utilisé. Cet exercice se traduira par un coût de main-d'oeuvre très important afin de donner à Santé Canada des renseignements qui ne sont pas utiles, selon nous.

M. Réal Ménard: Lorsque les fonctionnaires de Santé Canada viendront comparaître à nouveau devant nous à la fin de nos audiences, nous pourrons leur demander si cette information est pertinente. J'aimerais savoir combien d'employés dans chacune des entreprises que vous représentez devront s'affairer à cette tâche.

M. Gilbert Cantin: Nous comptons 30 employés.

M. Réal Ménard: Au total.

M. Gilbert Cantin: Notre association représente environ 80 employés.

M. Réal Ménard: Combien d'eux seront affectés à la cueillette de ces informations dans vos entreprises respectives? J'aimerais simplement que vous nous en donniez une idée.

M. Gilbert Cantin: À l'heure actuelle, toute analyse et cueillette de renseignements est faite par des firmes extérieures.

M. Réal Ménard: D'accord. Vous êtes donc vraiment très, très préoccupés par les coûts liés à la compilation de ces données.

M. Gilbert Cantin: Notre survie est en jeu.

M. Réal Ménard: Votre point de vue mérite notre considération. Encore une fois, je pense que tous les députés sont préoccupés et qu'il ne s'agit pas de mettre la santé publique d'un côté et d'embêter les entreprises de l'autre. Par ailleurs, vous convenez qu'il y a un certain nombre de types de renseignements qui peuvent s'avérer utiles pour Santé Canada si on veut procéder à des expérimentations ultérieures. Vous comprenez cela.

• 1555

M. Gilbert Cantin: Les petits manufacturiers ont pour objectif de fournir de l'information à Santé Canada en fonction de leurs moyens. On devrait supprimer les renseignements qui n'ont pas d'importance. Nous sommes disposés à fournir à Santé Canada des rapports sur les ingrédients ainsi que tout autre renseignement utile. Nous voulons travailler de concert avec Santé Canada, mais le faire en fonction des moyens financiers dont nous disposons. Demain matin, je n'aurai pas les moyens d'engager deux ou trois personnes pour faire des rapports.

Je puis témoigner de notre expérience en Colombie-Britannique, où nous vendons à l'heure actuelle trois sortes de cigarettes. Il me faut une semaine de travail à tous les trois mois pour compiler des rapports. J'ai autre chose à faire. De tels rapports représentent des coûts très importants. On veut collaborer, mais il est important qu'on puisse survivre.

M. Réal Ménard: D'accord. Parfait.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Ménard.

[Traduction]

Y a-t-il d'autres questions?

Monsieur Szabo.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Pouvez-vous nous donner une idée des coûts qu'entraînera l'établissement des rapports? Vous avez dit qu'ils sont trop élevés. Vous devez donc avoir une idée de ceux-ci.

M. Joe Spriet: Gil, je vais d'abord dire quelques mots. J'aimerais vous donner une idée de ce que notre entreprise représente par rapport...

M. Paul Szabo: Vous avez bien dit dans votre exposé que les coûts seraient exorbitants. Vous devez donc avoir une idée des coûts additionnels qu'entraînera la préparation de ces rapports, en tant que pourcentage de vos coûts actuels de production, par exemple.

M. Joe Spriet: J'estime que ça nous coûterait 100 p. 100 ou plus. Si je dis cela, c'est parce que vous voulez savoir combien ces rapports vont coûter. Je n'ai pas effectué une analyse approfondie des coûts liés à la mesure des émissions, aux projets de recherche, aux rapports trimestriels, ainsi de suite. Je n'ai pas les ressources voulues pour faire cela, pour prendre les règlements que vous proposez...

M. Paul Szabo: D'accord.

M. Joe Spriet: Mais il me semble, pour répondre à votre question, monsieur Szabo, que votre réglementation va cibler, en plus de notre entreprise, 99,66 p. 100 ou plus de la production canadienne. Elle va cibler les grands fabricants de tabac, comme Imperial Tobacco, Rothmans et R.J.R. MacDonald, qui ont un chiffre d'affaires énorme, de même que les petits fabricants si elle est adoptée. Vous allez cibler 99 p. 100 de toute la production du tabac. Il est difficile pour moi de comprendre pourquoi vous présentez des règlements qui risquent d'entraîner la fermeture de mon entreprise à l'Île-du-Prince-Édouard. Nous employons tout de même 30 personnes.

M. Paul Szabo: Je sais.

Est-ce que vos produits sont moins néfastes ou plus néfastes que les autres?

M. Joe Spriet: Ils sont à peu près identiques.

M. Paul Szabo: À peu près identiques. Donc, ce que vous dites, c'est que vos produits sont peu néfastes, et que les autres le sont plus.

M. Joe Spriet: Non, ce n'est pas du tout ce que je dis. Vous avez mal interprété mes propos. Il y a des fumeurs au Canada qui achètent ces produits. Ce qui veut dire qu'il y a des fournisseurs. Y a-t-il des gens qui consomment de l'alcool? Il y a des fournisseurs pour cela. Y a-t-il des gens qui consomment le gras de beurre? Il y a des fournisseurs pour cela aussi.

Je ne crois pas que votre remarque soit juste.

M. Paul Szabo: D'accord. Pour ce qui est de la question plus vaste du tabac, le gouvernement compte, dans le cadre de sa stratégie, modifier les messages, avoir recours à des graphiques, ainsi de suite. Avez-vous songé à l'impact que cette stratégie pourrait avoir sur les nouveaux fumeurs? Pensez-vous que cette stratégie va fonctionner?

M. Joe Spriet: Je pense qu'elle va avoir un impact important dans un premier temps, mais qu'ensuite... Si on jette un coup d'oeil à ce qui a été fait au cours des vingt dernières années en matière de réglementation et de mises en garde, à la consommation mondiale, ainsi de suite, j'imagine que, dans cinq ans, vous allez être obligé de faire trois fois plus d'efforts pour arriver aux mêmes résultats.

M. Paul Szabo: C'est une réponse honnête et je suis d'accord avec vous.

Monsieur Levine, votre entreprise appartient à Imperial Tobacco U.K.

M. Ralph Levine: C'est exact. Nous n'avons rien à voir avec Imperial Tobacco Canada.

M. Paul Szabo: Il s'agit d'une entreprise de quelle taille?

M. Ralph Levine: Je suppose qu'on peut la qualifier d'entreprise moyenne.

M. Paul Szabo: Avez-vous des raisons de croire que vos produits ne causent pas le cancer, des maladies du coeur ou l'emphysème?

M. Ralph Levine: En principe, je prends note des exigences de Santé Canada, et nous nous y conformons.

• 1600

M. Paul Szabo: Savez-vous s'il y a des autorités en matière de santé qui ont fait des études qui montrent que vos produits, comme les cigares, le tabac, ainsi de suite, causent également le cancer, des maladies du coeur et l'emphysème?

M. Ralph Levine: Pas à ma connaissance.

M. Ralph Szabo: Même pas le directeur général des services de santé?

M. Ralph Levine: Vous devez comprendre que nous nous occupons essentiellement de ventes et de marketing, pas de fabrication. Nous importons le produit et nous essayons de l'écouler, via nos grossistes, sur le marché de détail.

M. Paul Szabo: Je comprends, et c'est parce que vous faites partie intégrante de l'ensemble du processus.

Vous pourriez peut-être répondre à la même question que j'ai posée aux autres témoins concernant la stratégie générale. Ce que dit essentiellement le gouvernement du Canada, c'est qu'il faut essayer de régler ce problème, de cibler surtout les jeunes, de les sensibiliser aux dangers. Cela veut dire qu'il faudra accorder un peu plus de place sur les emballages aux messages et aux graphiques. Croyez-vous, de manière générale, que cette stratégie va fonctionner?

M. Ralph Levine: Les mises en garde sur les dangers liés à l'usage du tabac existent depuis 40 ou 50 ans. Quand j'étais jeune, elles disaient: «Le tabac est mauvais pour la santé. Il peut vous tuer.» Je sais que les fumeurs meurent de plus en plus jeunes et qu'ils sont beaucoup plus susceptibles d'avoir certaines maladies. Toutefois, je ne vois pas comment la nouvelle réglementation va dissuader les gens de fumer. On sait déjà que l'usage du tabac nuit à la santé.

M. Paul Szabo: Vous savez que Coca-Cola diffuse de la publicité partout dans le monde, et tout le temps.

M. Ralph Levine: Oui.

M. Paul Szabo: Coca-Cola est la marque la plus connue à l'échelle internationale. Or, pourquoi la compagnie ferait-elle de la promotion et gaspillerait-elle tout cet argent en publicité si son produit de marque est le symbole le plus connu à l'échelle mondiale? Pourquoi dépenserait-elle un sou en publicité?

M. Ralph Levine: Pour rester au premier rang.

M. Paul Szabo: Parce que cela fonctionne. Si vous ne faites rien, vous perdez votre part du marché. Est-ce que ce principe de marketing ne s'applique pas également...

M. Ralph Levine: Oui, j'aurais tendance à croire qu'il s'applique. Mais j'ajouterais que les gens sont conscients des méfaits de l'usage du tabac, des mises en garde et pourtant, ils continuent de fumer.

M. Paul Szabo: Oui, mais vous devez continuer à les renseigner, sinon, ils vont commencer à penser que le produit n'est peut-être pas aussi mauvais qu'on le laisse entendre.

Je pense que vous vous trouvez tous les deux dans une situation difficile. Les changements entraînent toujours des conséquences imprévues. Il est difficile de contenter tout le monde, mais vous devez admettre que vous vendez tous les deux des produits qui, d'après les études, causent des problèmes de santé. Vous êtes pris dans le tourbillon.

Si on vous accordait une exemption en raison, par exemple, de la taille de votre entreprise, n'enverrait-on pas un faux message aux utilisateurs de votre produit, du fait qu'on ne retrouverait pas sur l'emballage de celui-ci les mises en garde que les autres sont tenus d'afficher, ou du fait que vous n'auriez pas à soumettre de rapport là-dessus, à l'instar des autres fabricants? Les gens ne commenceraient-ils pas à penser que certains produits sont plus sûrs que d'autres?

M. Ralph Levine: D'abord, nous ne sommes pas contre les messages relatifs à la santé. Nous allons suivre les règles établies à cet égard. Le problème, c'est que nous ne nous occupons pas de fabrication. J'achète des produits de ma propre entreprise à l'étranger, mais j'achète également d'autres entreprises, et les coûts... Santé Canada, par exemple, exige qu'on établisse des rapports sur les ingrédients, les quantités utilisées, et il est question, dans certains cas, d'une goutte d'un arôme particulier qui sert à approvisionner divers pays partout dans le monde. Comment pouvons-nous diviser cette petite goutte d'un arôme particulier et approvisionner le petit marché canadien pour lequel j'agis en qualité d'importateur?

Le rapport sur l'eau qu'on utilise... Je sais qu'on a beaucoup parlé de la qualité de l'eau dernièrement mais... C'est une exigence lourde et fastidieuse pour un importateur et pour un fabricant qui dessert de nombreux pays.

M. Paul Szabo: Je comprends.

M. Joe Spriet: Monsieur Szabo, j'aimerais vous poser une question. Est-ce que le fait que nos petites entreprises soient en mesure de survivre économiquement et de gagner leur vie compte pour vous? Excusez le choix de mots, mais c'est ainsi qu'on gagne notre vie. Est-ce que nous comptons aux yeux du comité?

• 1605

Notre produisons 0,3 p. 100 du tabac à coupe fine. Ce n'est pas beaucoup. Comme vous allez pouvoir obtenir tous les renseignements dont vous avez besoin de 99 p. 100 des fabricants, et comme nous sommes prêts à montrer au public que notre produit est identique aux autres en faisant paraître des messages relatifs à la santé, à publier des rapports sur les constituants... Est-ce que nous comptons à vos yeux? Est-ce que cette question économique n'est pas pertinente?

M. Paul Szabo: Elle l'est, oui. Vous savez sans doute que les imprimeurs, à cause des graphiques qui seront requis, ainsi de suite, seront peut-être obligés de faire des investissements importants ou de transférer leurs activités de production à l'étranger, ce qui entraînera de nombreuses pertes d'emplois. L'impact de cette exigence et les coûts en ressources humaines est une question qui préoccupe au plus haut point le comité.

Toutefois, il ne faut pas oublier que plus de 40 000 personnes meurent chaque année à cause de ce produit. Comment concilier la responsabilité de Santé Canada et, je suppose, du gouvernement du Canada au nom de tous les Canadiens, à l'égard d'un produit qui présente un danger direct pour la santé et qui entraîne des dépenses énormes, avec les intérêts des fabricants qui détiennent une plus petite part du marché?

Pour moi, la question est de savoir si vous croyez-vous, comme moi, que l'usage du tabac ou la consommation de tabac continuera de diminuer de façon radicale et que bientôt, l'action de fumer ne sera plus socialement acceptable, ce qui permettra de régler bon nombre de problèmes. Par conséquent, quels sont vos projets pour l'avenir? Vos jours sont comptés.

M. Joe Spriet: D'abord, mes enfants ne travaillent pas dans ce domaine.

M. Paul Szabo: Bien. Cela fait partie de vos projets.

M. Joe Spriet: Ensuite, vous avez dit que les gens meurent parce qu'ils consomment des produits du tabac. Je suppose que c'est un fait qu'il faut accepter; les gens meurent de bien des choses. Or, la dernière étude réalisée par les Pays-Bas révèle que l'usage du tabac est bon pour les gens qui souffrent de la maladie d'Alzheimer, de la maladie de Parkinson et de nombreuses affections dégénératives. C'est un fait. Mais les médias n'aiment pas entendre parler de ces choses. Donc, ils en parlent peu.

Si le comité acceptait notre recommandation et qu'on nous accordait ces exemptions, cela n'aurait pas beaucoup d'impact sur le nombre de personnes qui meurent du cancer. Vous aurez tous les renseignements dont vous avez besoin. C'est une question d'équité.

M. Ralph Levine: J'aimerais ajouter quelque chose. Si jamais son entreprise faisait faillite, les fumeurs se tourneraient vers d'autres marques.

M. Paul Szabo: Merci.

Le président: Merci beaucoup. Y a-t-il d'autres questions?

Je tiens à remercier les témoins d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.

[Français]

M. Réal Ménard: J'ai une question à votre intention.

Le président: Oui.

[Traduction]

Merci beaucoup.

[Français]

Monsieur Ménard.

M. Réal Ménard: De fait, j'ai deux choses à vous demander, monsieur le président. Est-ce que vous pourriez préciser les travaux que vous prévoyez pour notre comité la semaine prochaine? Est-ce que vous prévoyez nous convoquer lundi, mardi et mercredi?

Deuxièmement, est-ce que vous pouvez demander à la greffière de nous fournir une copie d'un rapport semblable à celui que Santé Canada prévoit demander aux manufacturiers afin que nous puissions en avoir un exemple plus concret et que nous puissions poser des questions aux fonctionnaires de Santé Canada lorsqu'ils reviendront comparaître à la fin de nos audiences?

[Traduction]

Le président: Oui. Pour ce qui est de la deuxième question, nous allons demander à la greffière de s'en occuper. Ensuite, nous allons nous réunir lundi et mardi, et nous espérons terminer nos travaux à ce moment-là.

[Français]

M. Réal Ménard: Lundi et mardi, matin et soir? Pendant toute la journée mardi ou seulement le matin?

[Traduction]

Le président: L'après-midi seulement.

Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): J'aimerais poser une question que j'ai soulevée hier concernant les deux rapports des consultants et l'impact de ce projet sur les emplois et les entreprises. J'ai de la difficulté à dissocier les deux rapports et d'en dégager les renseignements pertinents. Pouvons-nous demander aux fonctionnaires de nous les résumer, ou d'expliquer la différence qui existe entre ces deux rapports pour que nous puissions avoir une bonne idée des pertes d'emplois qu'entraînera le projet de règlement ou de l'impact qu'il aura?

• 1610

Le président: C'est une excellente question, et nous allons demander aux fonctionnaires de Santé Canada de préparer quelque chose pour mardi au plus tard. Vous pourriez peut-être, madame Wasylycia-Leis, en discuter avec Jane après la réunion.

Y a-t-il d'autres questions?

M. Joe Spriet: J'aimerais poser une question au sujet du processus. Quand devez-vous présenter vos recommandations au gouvernement?

Le président: Nous espérons le faire au plus tard mercredi de la semaine prochaine.

La séance est levée.