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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CITIZENSHIP AND IMMIGRATION

COMITÉ PERMANENT DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 31 mai 2000

• 1535

[Traduction]

Le président (M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.)): Bonjour, collègues.

Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous examinons aujourd'hui le chapitre 3, Citoyenneté et Immigration Canada, le volet économique du Programme canadien d'immigration, du rapport du vérificateur général du Canada d'avril 2000.

Nous avons le plaisir de recevoir M. Desautels, vérificateur général du Canada, et ses collègues. Peut-être, M. Desautels, souhaiterez-vous les présenter au début.

Je pense que vous avez une déclaration liminaire. Si vous y passez dix à quinze minutes, je suis sûr qu'ensuite les députés poseront beaucoup de questions. Bienvenue et merci beaucoup d'avoir accepté de comparaître pour que nous puissions traiter de cette question.

Monsieur Desautels.

M. L. Denis Desautels (vérificateur général du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président.

J'ai une déclaration liminaire qui devrait me prendre moins de dix minutes, puis mes collègues et moi-même nous ferons un plaisir de répondre aux questions du comité.

Je suis accompagné aujourd'hui par Serge Gaudet et Richard Flageole. M. Flageole et M. Gaudet se sont chargés de la rédaction de ce chapitre et de tout le travail qui a mené à ce chapitre.

Comme les membres du comité le savent très bien, le volet économique vise à recruter des travailleurs qualifiés, des entrepreneurs, des investisseurs et des travailleurs autonomes. En 1999, sur quelque 190 000 immigrants admis au Canada, plus de la moitié étaient des immigrants du volet économique.

Nous avons mené une vérification exhaustive afin de faire une analyse approfondie des problèmes liés à la sélection des immigrants du volet économique dans son ensemble. Nous avons visité un bon nombre de bureaux à l'étranger. Nos observations et nos conclusions ont surtout trait à Citoyenneté et Immigration Canada.

Toutefois, d'autres partenaires fédéraux participent à l'atteinte des objectifs du volet économique. Ce sont le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, le Service canadien du renseignement de sécurité, La Gendarmerie royale du Canada et Santé Canada. Par conséquent, certaines de nos recommandations leur sont également adressées.

Notre dernière vérification de la prestation à l'étranger des services d'immigration a fait l'objet d'un rapport en 1990. Depuis, plusieurs changements importants se sont produits au ministère, tant au niveau organisationnel qu'au niveau budgétaire, et des initiatives ont été lancées pour corriger certaines situations. Toutefois, il est décevant de constater la similitude entre plusieurs des problèmes soulevés dans ce rapport et ceux dont nous avons fait état en 1990. À mon avis, le ministère devra donc s'attaquer énergiquement à ces problèmes de longue date.

[Français]

Présentement, monsieur le président, les bureaux d'immigration à l'étranger ne suffisent pas à la tâche. Tout d'abord, les niveaux d'immigration n'ont pas été atteints au cours des deux dernières années. De plus, à la fin de 1999, il y avait près de 175 000 demandes à différentes étapes du processus de traitement, soit 38 p. 100 de plus qu'il y a trois ans. Les délais moyens de traitement d'une demande ont doublé pendant la même période. Dans certains bureaux, les travailleurs qualifiés doivent attendre environ trois ans pour que leur demande soit finalisée. Ces longs délais peuvent compromettre l'arrivée au Canada d'immigrants hautement qualifiés.

Les agents responsables du traitement des demandes sont très inquiets de la situation actuelle et je partage leur inquiétude. Lors de nos visites dans les bureaux à l'étranger, nous avons eu l'occasion d'interviewer un certain nombre d'agents des visas et de gestionnaires de programme. Nous avons également effectué un sondage auprès de ces employés dans les bureaux à l'étranger. Nous tirons des conclusions très favorables sur leur calibre et leur engagement. Toutefois, ce qu'ils nous ont révélé nous préoccupe au plus haut point. Ainsi, ils ont beaucoup de difficulté à assumer la charge de travail et les responsabilités qui leur sont assignées. Ils ont également le sentiment de prendre des décisions qui pourraient comporter des risques trop élevés et entraîner des coûts importants pour la société canadienne.

• 1540

Dans l'ensemble, nous sommes d'avis que le ministère ne possède pas les ressources et la capacité opérationnelle requises pour traiter le nombre de demandes nécessaire à l'atteinte des niveaux d'immigration fixés par le gouvernement. Nous avons noté que le ministère devra se doter d'une meilleure information pour établir avec rigueur le niveau de ressources requis pour le traitement des demandes dans les bureaux à l'étranger.

[Traduction]

En outre, nous avons noté des problèmes d'efficience et d'efficacité et des manques de rigueur qui ont une incidence sur la capacité du système à répondre aux attentes dans quatre principaux secteurs.

Premièrement, certaines lacunes exposent Citoyenneté et Immigration Canada à des critiques quant à la qualité et à l'uniformité des décisions prises dans le cadre des activités de sélection des immigrants. Les agents des visas ont besoin de meilleurs critères de sélection, d'une meilleure formation et de meilleurs outils et la qualité de leurs décisions ne fait pas l'objet d'une surveillance suffisante de la part du ministère. Il importe aussi de minimiser les répercussions négatives des demandes hors territoire.

Deuxièmement, nous avons cerné des faiblesses importantes dans la gestion des évaluations médicales des immigrants éventuels. Ainsi, nous avons constaté que les notions de menace à la santé et à la sécurité publique et de fardeau excessif n'avaient pas été définies, bien que nous ayons souligné l'importance de le faire en 1990. Nous sommes aussi très préoccupés par le manque de rigueur et d'uniformité en ce qui a trait à la gestion globale des activités liées à l'admissibilité médicale.

Troisièmement, il y a de sérieuses entraves à la détermination de l'admissibilité des immigrants éventuels sur le plan de la criminalité et de la sécurité. Les agents des visas disposent de peu d'information et de soutien pour s'assurer que les demandeurs ne sont pas des personnes susceptibles de s'engager dans des activités criminelles ou de menacer la sécurité des Canadiens.

Enfin, nous avons constaté que le ministère est très vulnérable à la fraude et à l'abus. Il n'y a aucune mesure efficace en place pour décourager les personnes de soumettre des demandes frauduleuses, et les méthodes de détection qu'utilisent les agents des visas sont coûteuses. De plus, nous avons constaté que les contrôles des recettes, des formulaires de visa et des systèmes informatiques sont insuffisants.

[Français]

Dans l'ensemble, les services d'immigration à l'étranger éprouvent de graves difficultés. Les lacunes que nous avons constatées limitent la capacité de notre pays à bénéficier des avantages économiques et sociaux que procure l'immigration. Ces lacunes compromettent aussi le niveau de protection des Canadiens que prévoit la Loi sur l'immigration.

Le 6 avril dernier, la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a déposé le projet de loi C-31 en vue de modifier la Loi sur l'immigration. Si le projet de loi était adopté, il pourrait permettre de répondre à certaines de nos préoccupations. Votre comité, monsieur le président, a un rôle clé à jouer pour faire en sorte que les modifications législatives nécessaires soient effectuées en temps opportun. Toutefois, la plupart des problèmes que nous avons soulevés ne peuvent pas être corrigés par des changements législatifs. Des fonds supplémentaires sont aussi prévus aux fins de l'amélioration de certains secteurs liés à la gestion du volet économique du programme d'immigration, notamment une augmentation de l'effectif des agents des visas à l'étranger et la mise en place d'un système global de gestion des cas. Ces investissements pourront sans doute aider le ministère à réduire les délais de traitement des demandes et à améliorer sensiblement l'efficience à plus long terme. Toutefois, des mesures administratives sont également requises pour régler les problèmes actuels.

[Traduction]

Tout d'abord, il est essentiel de maintenir un équilibre approprié entre les ressources allouées au ministère, ainsi qu'à ses partenaires fédéraux, et la charge de travail nécessaire à l'atteinte des niveaux d'immigration annuels fixés par le gouvernement, tout en assurant l'intégrité du programme. Votre comité voudra peut-être revoir le plan annuel d'immigration pour s'assurer qu'il y ait un juste équilibre entre les niveaux d'immigration établis et la capacité du ministère à les atteindre.

En outre, le ministère doit gérer avec plus de rigueur ses activités à l'étranger. Ainsi, il devra prendre des mesures efficaces pour assurer une scène gestion des risques, particulièrement en matière de santé, de criminalité et de sécurité. Il devra mieux surveiller la qualité des décisions et mieux contrôler les recettes, les formulaires de visa et les systèmes informatiques.

Enfin, il devra clarifier les rôles et les responsabilités au sein du ministère et à l'égard de ses partenaires fédéraux, tels que Santé Canada, la GRC, le SCRS et le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, pour permettre d'établir des attentes, d'assurer une direction et une surveillance adéquates des activités d'immigration à l'étranger et de fournir un rapport complet sur les résultats obtenus. Des mesures administratives doivent être prises par le ministère sans tarder.

• 1545

Pour conclure, monsieur le président, le défi est énorme et la tâche, complexe. Le ministère a récemment publié sur son site Internet un plan pour répondre à nos 14 recommandations. Nous croyons que le ministère aurait avantage à ce que son plan d'action soit authentique, précise les principales étapes, les échéanciers et les besoins en ressources et établisse clairement les responsabilités en matière de résultats, tant au sein du ministère que de ses différents partenaires. Votre comité voudra peut-être suivre de près la situation et les progrès réalisés.

Monsieur le président, voilà qui conclut ma déclaration d'ouverture. Mes collègues et moi-même serons heureux de répondre aux questions du comité.

Le président: Merci, monsieur Desautels, pour ce rapport très complet. Je suis sûr que nous voudrons explorer davantage certaines des questions que vous soulevez et vous demander des conseils sur les recommandations que nous devrions faire, non seulement au sujet du nouveau projet de loi, mais par suite des rencontres que nous avons ici aujourd'hui.

Je vais passer à M. Benoit pour la première série de questions.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Merci beaucoup, monsieur le président.

Bonjour, messieurs.

J'aimerais commencer par vous poser des questions au sujet du paragraphe 3.54 du rapport d'introduction. On peut y lire ce qui suit:

    [...] la haute direction du ministère était consciente des défis que posait le traitement des demandes à l'aide des ressources mises à sa disposition. Par exemple, lors de la planification des niveaux d'immigration pour 1999, le ministère avait indiqué qu'il serait très difficile de les maintenir entre 200 000 et 225 000 en raison des ressources dont il dispose en ce moment et de son réseau actuel de services, et que des pressions s'exerceraient sur l'intégrité du programme et le processus de sélection.

Le paragraphe se termine en indiquant que les efforts du ministère en vue d'obtenir des ressources supplémentaires et d'examiner ses modes de fonctionnement n'ont pas donné les résultats escomptés.

Ce rapport a été qualifié comme l'un des plus accablants que le vérificateur général ait jamais produit, et des déclarations comme celle que je viens de lire, montrent très clairement qu'il n'est pas difficile de voir pourquoi.

Je me trouvais récemment au Comité des comptes publics pour débattre de ce rapport. Vous vous souvenez peut-être que lorsque j'ai posé des questions à la sous-ministre au sujet de ses recommandations sur les niveaux annuels d'immigration, elle a déclaré qu'en fait les niveaux de risque pour la sécurité des Canadiens variaient en fonction de certains niveaux d'immigration. Je demandais à la sous-ministre à ce moment-là si les ressources actuelles permettaient d'atteindre ces objectifs de 200 000 à 225 000. Je crois qu'elle a dit—c'est vraiment l'impression que j'ai eue—que la sous-ministre recommanderait probablement au gouvernement de fixer des objectifs d'immigration plus bas afin de ne pas perdre de vue les meilleurs intérêts des Canadiens, mais que le ministère donne bien sûr suite aux indications du gouvernement et de la ministre. C'est son travail.

Je sais qu'il n'appartient pas au vérificateur général de faire des observations sur la politique gouvernementale, et je ne vous demande pas de le faire. Ce que j'aimerais savoir, compte tenu de votre examen approfondi de ce volet de l'immigration, c'est si, d'après vous, la sécurité des Canadiens est compromise en regard des niveaux d'immigration actuels de 200 00 à 225 000 qui ont été fixés pour cette année?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, je me souviens parfaitement bien de l'échange entre M. Benoit et la sous-ministre à ce moment-là et M. Benoit a parfaitement raison, ce n'est pas notre rôle de mettre en doute la politique gouvernementale—et ce n'est pas ce que nous cherchons à faire dans ce chapitre.

M. Leon Benoit: Je ne vous demande pas de le faire.

M. Denis Desautels: Ce chapitre examine essentiellement la capacité du gouvernement dans ce cas précis d'atteindre les objectifs fixés et je crois que ce que nous avons voulu dire est très clair à cet égard.

Les conséquences de ce manque de capacité sont très bien expliquées dans le rapport et nous citons des agents que nous avons rencontrés et qui ne pensent pas que les décisions qu'ils prennent s'inscrivent toujours dans le cadre du risque acceptable. C'est l'une des conséquences de ce manque de capacité.

• 1550

Une autre conséquence, c'est bien sûr le fait qu'il y a un arriéré de demandes et que le traitement des demandes prend trop de temps. De cette façon, le Canada se retrouve également perdant, car certains immigrants dont les compétences sont recherchées au Canada ne sont probablement pas prêts à attendre aussi longtemps et risquent donc d'aller ailleurs.

Ce sont donc les divers genres de conséquences du manque de capacité du ministère que nous avons identifiées.

M. Leon Benoit: Oui, et je conviens que cela apparaît clairement dans votre rapport. Je voulais simplement que vous disiez de nouveau si, de votre point de vue, sans pour autant faire de commentaires sur la politique elle-même, le niveau d'immigration fixé cette année à 200 000 ou à 225 000 présente un risque de sécurité pour les Canadiens.

M. Denis Desautels: Le manque de capacité signifie que nous prenons des risques inutiles en matière de sécurité. C'est quelque chose que nous disons très clairement dans notre rapport.

Je veux simplement préciser cependant, comme je l'ai d'ailleurs dit dans ma déclaration liminaire, que les agents que nous avons rencontrés dans les divers bureaux à l'étranger sont très dévoués, travaillent très consciencieusement et très fort. J'imagine donc que cela atténue le risque dans une certaine mesure, mais les agents eux-mêmes ne se sentent pas à l'aise.

M. Leon Benoit: Oui, et je suis heureux que vous le disiez. C'est quelque chose que vous dites dans le rapport et je pense qu'il est important de le dire. Il y a beaucoup de bons employés qui font beaucoup de bon travail. Nous ne pointons certainement pas du doigt les employés du ministère à l'étranger, mais s'il y a un risque, quelqu'un doit être tenu responsable d'exposer notre pays à un niveau de risque inacceptable.

En ce qui concerne les risques réels, pourriez-vous isoler un type particulier de risque et dire que c'est celui qui présente la plus grande menace? Serait-ce du côté de la criminalité ou de la maladie ou quel type de risque serait d'après vous le plus préjudiciable?

M. Denis Desautels: Je ne pense pas pouvoir répondre à cette question de cette façon.

Nous avons remarqué que le manque de capacité pousse effectivement le ministère à prendre des risques au-delà de ce qu'il trouverait normalement acceptable. Cela s'applique aux questions de santé, à la criminalité, à d'autres vérifications d'antécédents qu'il faut faire, ainsi que, comme je l'ai dit plus tôt, à la perte d'occasions à cause de l'arriéré qui s'ensuit.

Je crois que le principal problème ici—et le comité pourrait très certainement donner de très bons conseils à ce sujet—c'est de savoir comment assurer un équilibre entre les objectifs en matière de niveaux annuels d'immigration et la capacité du ministère. C'est une importante question de gestion et, en même temps, je conviens qu'il s'agit aussi d'une question de politique. Il faut parvenir à un équilibre entre ces deux éléments.

M. Leon Benoit: Exactement.

Je conviens que, tout d'abord, le système ne fait pas ce qu'il est censé faire. Il n'encourage pas les immigrants ou ne traite pas suffisamment rapidement les demandes de ceux qui ont manifesté l'intérêt de venir dans notre pays dans les catégories d'immigrants indépendants ou économiques. Si vous pouviez indiquer une façon dont le système pourrait améliorer les choses ou permettre d'atteindre cet objectif—mieux traiter les immigrants économiques—quel serait-il? Quelle amélioration unique pourrait être apportée par le ministère à cet égard?

• 1555

M. Denis Desautels: Là encore, c'est une question à laquelle il est difficile de répondre, car nous avons indiqué très clairement dans notre rapport qu'il n'y a pas de solution magique à ces problèmes.

Le ministère et le gouvernement doivent travailler sur trois fronts pour résoudre ces problèmes. Le premier, c'est la législation; le deuxième, le financement. Il faut régler le problème de financement et je crois que, dans une certaine mesure, il est en voie de l'être. Le troisième élément, le troisième niveau, ce sont les changements administratifs qui doivent intervenir immédiatement, y compris un meilleur système informatique, une meilleure formation des employés, une meilleure orientation quant aux questions de sécurité et de vérification de santé, etc. En ce qui me concerne, ce troisième élément peut être réglé assez rapidement; en effet, il n'est pas vraiment nécessaire d'attendre trop longtemps que des changements législatifs interviennent, d'une part, et d'attendre un financement supplémentaire, d'autre part.

Je crois qu'il faut travailler simultanément sur ces trois fronts pour véritablement régler le problème que nous soulevons dans ce chapitre.

Le président: Jean... en attendant Sophia.

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'aimerais souhaiter la bienvenue à M. Desautels et à ses collègues cet après-midi.

Vous soulevez bon nombre de questions auxquelles le public canadien s'intéresse vraiment, l'amélioration possible du système étant ce qui nous motive tous en général.

Il me semble que dans votre conclusion, vous indiquez que pour l'instant, la réponse du ministère est insuffisante et ne permet pas de donner suite aux suggestions ou à la mise en oeuvre de certains points que vous avez soulevés dans vos recommandations.

J'aimerais vous demander si vous pouvez parler de façon plus limpide de la réponse du ministère aujourd'hui et préciser ce que vous aimeriez vraiment qu'elle soit.

M. Denis Desautels: Oui, je peux préciser mes remarques à ce sujet.

Permettez-moi de dire tout d'abord qu'en règle générale, la réponse du ministère à nos observations a été très positive. Il ne rejette pas nos observations; il les accepte. Nous ne sommes donc pas en désaccord au sujet des conclusions fondamentales de ce chapitre.

Le ministère répond également en disant qu'il recherche des modifications législatives, un financement supplémentaire et qu'il va s'attaquer à plusieurs points, dont l'introduction d'un nouveau système informatique. Comme nous l'avons dit, il a publié sur son site Internet une réponse à nos observations, mais selon nous, cette réponse n'est pas nécessairement un plan d'action en tant que tel, plan qui définirait la responsabilité en matière de certaines mesures à prendre, d'échéanciers, des ressources nécessaires pour régler le problème, etc. Nous espérons que le ministère publiera sous peu un plan d'action plus détaillé afin de traiter de toutes les questions et que ce plan d'action détaillé pourra être utilisé par votre comité ou par celui des comptes publics afin que vous puissiez suivre de près les progrès réalisés par le ministère pour régler les questions qui, il en a convenu, doivent être réglées.

Mme Jean Augustine: Avez-vous un rôle à jouer et pouvez-vous aider le ministère à répondre à ce que vous considérez être certaines exigences?

M. Denis Desautels: Nous pouvons aider le ministère à transposer ses intentions dans un plan d'action plus précis. Nous pouvons offrir des propositions sur des projets de plans d'action, d'une part. Nous pouvons même donner notre point de vue quant à l'opportunité de son plan d'action, s'il le souhaite, et nous sommes tout à fait prêts à le faire.

En plus, dans l'intérêt des députés, nous allons réexaminer ces questions dans environ deux ans. Par conséquent, que le ministère ait un plan d'action ou non, nous allons faire rapport au Parlement des progrès réalisés entre-temps.

Nous pouvons donc travailler avec le ministère et mettre à profit les connaissances que nous avons acquises au cours de ce travail, car beaucoup de nos propres employés ont appris à mieux comprendre ces problèmes et pourront mettre leurs connaissances à la disposition du ministère, si ce dernier le souhaite, pour améliorer son plan d'action. Nous reviendrons toutefois d'ici deux ans.

• 1600

Mme Jean Augustine: Monsieur le président, j'aimerais également poser une question au sujet de la recommandation 3.80:

    Le ministère devrait revoir l'ensemble de sa stratégie de formation et prendre les mesures nécessaires pour que toutes les personnes responsables [...] reçoivent une formation appropriée.

Comment faites-vous pour évaluer pareille situation et comment arrivez-vous à dire que les gens ne semblent pas avoir la formation appropriée? Examinez-vous un ensemble de compétences ou s'agit-il d'un questionnaire? Comment l'évaluez-vous?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, je vais demander à M. Flageole de répondre à cette question.

M. Richard Flageole (vérificateur général adjoint, Bureau du vérificateur général du Canada): Monsieur le président, cette observation s'appuie essentiellement sur les discussions que nous avons eues avec les employés des bureaux d'immigration à l'étranger. Comme nous l'indiquons dans le rapport, nous avons également fait un sondage parmi tous les employés qui travaillent dans toutes les missions du gouvernement canadien. Cette nécessité de formation est ce qui est vraiment ressorti de leurs observations et des résultats du sondage. Nous avons également observé certaines faiblesses que, j'imagine, nous pouvons probablement relier à un besoin de meilleure formation des employés, mais cette réponse provient essentiellement d'eux.

Mme Jean Augustine: J'essaye simplement, monsieur le président, d'arriver à... Lorsque l'on parle de «formation», parlons-nous d'une formation dans le domaine de la loi, dans le domaine du travail quotidien avec les personnes qui se présentent au bureau, dans l'évaluation de la documentation? Que voulons-nous dire exactement par «formation»?

M. Richard Flageole: Je crois que nous parlons en fait d'une formation dans deux domaines. La plupart des agents d'immigration ont une formation variée. Ils sont en général titulaires d'une maîtrise universitaire dans divers types de programmes. Ils n'arrivent pas avec une connaissance de l'immigration. Ils doivent l'acquérir à partir de leurs compétences de base. L'aspect législatif est très important et ils doivent parfaitement être au courant de toutes les exigences législatives, mais ils doivent également avoir de la formation pour évaluer la qualité d'une demande.

Je vais vous donner un exemple très précis—les gens d'affaires. Les agents d'immigration doivent avoir une bonne compréhension, par exemple, d'un plan d'affaires que l'immigrant éventuel va proposer au gouvernement, si bien qu'ils doivent vraiment s'y connaître dans ce domaine. Ils ont également besoin de formation leur permettant d'identifier les faux documents. Ils ont besoin de très bien comprendre la situation locale du pays dans lequel ils se trouvent. Nous parlons donc d'une formation assez globale.

Mme Jean Augustine: Merci, monsieur le président.

Le président: Monsieur Sekora, dans le temps qui reste, deux minutes et demie, allez-y.

M. Lou Sekora (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis nouveau au comité aujourd'hui, mais j'aimerais poser quelques questions.

Lorsque vous préparez votre rapport, indiquez-vous si, pour être plus efficace, le ministère aurait besoin de 50 p. 100, 25 p. 100, 15 p. 100 ou 10 p. 100 de plus de ressources? Cela permettrait au comité d'avoir des données concrètes.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, nous n'avons pas, dans ce cas précis, quantifié le financement ou les ressources supplémentaires dont le ministère aurait besoin. Par contre, nous avons dit que le ministère doit faire plus de travail d'analyse en ce qui concerne la charge de travail de ses diverses missions et donc présenter un plan plus précis sur les ressources dont elles ont besoin pour assumer la charge de travail qui leur est demandée.

Nous ne l'avons donc pas quantifié, mais nous avons recommandé que le ministère lui-même suive un certain processus afin d'en arriver à une évaluation bien éclairée de ce dont elles ont véritablement besoin. Je ne crois pas que l'on puisse résoudre ce problème en se contentant d'y affecter beaucoup d'argent. Je crois qu'il faut le cibler et qu'il faut savoir où les ressources sont nécessaires et combien sont nécessaires.

M. Lou Sekora: Avez-vous jamais recommandé une étude d'efficience dans un ministère depuis que vous êtes vérificateur général?

• 1605

M. Denis Desautels: Nous faisons constamment des recommandations sur l'efficience. Une partie de notre mandat consiste à examiner l'économie, l'efficience et l'efficacité. Nous ne recommandons pas nécessairement d'études d'efficience, comme le dit M. Sekora, mais nous faisons en fait des recommandations qui portent sur l'efficience, d'année en année.

M. Lou Sekora: J'ai une dernière question. Beaucoup de ceux qui travaillent dans les divers bureaux d'immigration sont des consultants, n'est-ce pas? Ce ne sont pas des employés du gouvernement fédéral. Ils travaillent comme consultants, n'est-ce pas?

M. Denis Desautels: Tous les agents d'immigration sont des employés du gouvernement canadien. Certains sont Canadiens. D'autres sont des employés engagés sur place. Peut-être que le député veut parler des divers consultants qui aident les requérants...

M. Lou Sekora: Oui.

M. Denis Desautels: ... à préparer leur demande. Le ministère traite avec les consultants, mais je le répète, tous les employés sont des employés du gouvernement canadien.

M. Lou Sekora: Merci beaucoup.

Le président: Merci.

Bernard.

[Français]

M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Je voudrais me joindre à mes collègues pour vous souhaiter la bienvenue au comité. Vous savez probablement que le Québec se fixe des objectifs de plus en plus élevés en matière d'immigration. Il a l'intention d'attirer plus de 35 000 nouveaux arrivants sur son territoire. On se bute cependant toujours aux mêmes problèmes et contraintes au niveau du délai de traitement, que vous avez d'ailleurs énoncés assez clairement dans votre rapport. Nous avons constaté que les délais de traitement étaient très longs, entre autres dans les bureaux à l'étranger qui traitent des demandes des immigrants éventuels provenant de pays francophones. Ces longs délais sont une réalité à Montréal, au Québec et plus particulièrement au bureau de Paris, que vous avez eu la chance de visiter et qui a également fait l'objet de votre étude.

Au fond, ma question est très simple. Je voudrais savoir où ça bloque dans le processus. Est-ce au niveau des examens médicaux ou des enquêtes de sécurité? Qu'est-ce qui bloque au bureau de Paris, là où on traite en grande partie les demandes d'immigrants éventuels provenant de pays francophones?

M. Richard Flageole: Monsieur le président, on trouve à la pièce 3.6 de notre rapport un tableau indiquant le délai moyen de traitement des demandes d'immigration dans les différents bureaux, dont le bureau de Paris. On constate que dans ce bureau, le délai de traitement des demandes des gens d'affaires se situe à peu près dans la moyenne, tandis que le délai est un peu plus court dans le cas des travailleurs qualifiés. Il est difficile d'en identifier la cause de façon très précise. On affirme cependant qu'il y a un déséquilibre entre les ressources disponibles et la charge de travail. Les délais peuvent grandement varier. Si l'on décide de convoquer un immigrant éventuel à une entrevue, cela peut dans certains cas prendre de six à huit mois. Il y a également des délais en raison des examens médicaux et des examens de sécurité. Ce sont tous ces facteurs qui engendrent des délais de cette envergure.

M. Bernard Bigras: Je comprends que le délai moyen que vous avez établi couvre toute la période requise pour le traitement de la demande, jusqu'à la fin du processus. Est-ce qu'il y a à ce bureau de Paris des problèmes importants ou des étapes particulières, parce que la réalité y est très différente de celle qui existe dans les autres bureaux?

M. Serge Gaudet (directeur principal, Opérations de vérification, Bureau du vérificateur général): Je ne crois pas qu'il y ait d'étape particulière à ce bureau. Il faut cependant souligner qu'en vertu de l'Accord Canada-Québec, les demandes présentées par ceux qui veulent s'établir au Québec dans le cadre du volet économique sont examinées par des fonctionnaires du Service d'immigration du Québec.

M. Bernard Bigras: Oui, je le sais, mais il arrive souvent que le certificat de sélection soit émis par le gouvernement du Québec et que la demande bloque.

M. Serge Gaudet: Dans la plupart des cas, c'est le temps d'attente pour les entrevues qui en est la cause. Ces bureaux doivent trouver un équilibre entre leurs ressources, d'une part, et le nombre de demandes qui sont présentées par des visiteurs et celles qui le sont par des immigrants éventuels dans le cadre du volet économique, d'autre part. Ils traitent d'abord les demandes émanant des visiteurs, puis celles des immigrants éventuels de la catégorie famille. Naturellement, il est possible que ces bureaux traitent de nombreuses demandes de requérants de la catégorie famille auxquelles on accorde une plus grande priorité qu'aux demandes de la catégorie économique.

• 1610

La pièce 3.6 de notre rapport indique qu'au bureau de Paris, le délai moyen de traitement des demandes d'immigration émanant de travailleurs qualifiés est de 14 mois, alors qu'il est de 24 mois pour les gens d'affaires. Je ne crois pas qu'on puisse dire que ces délais sont plus longs que dans les autres bureaux. Ces délais sont attribuables, à mon avis, à de ressources insuffisantes et à la priorité qu'on accorde aux différentes catégories de demandes.

M. Bernard Bigras: Merci.

Il ne me fait pas plaisir d'aborder ce sujet, mais je dois avouer que les questions de M. Benoit étaient très pertinentes. On lit au point 5 de votre allocution que les agents des visas ont le sentiment de prendre des décisions qui pourraient comporter des risques trop élevés. Si vous faites une telle affirmation, c'est sans doute parce que c'est ce que vous ont dit les agents ou d'autres personnes. Selon vous et selon les agents, qu'est-ce qui représente un risque trop élevé?

M. Richard Flageole: Monsieur le président, nous avons eu de nombreuses discussions avec les agents et nous avons fait un sondage auprès d'eux. Plusieurs agents nous ont révélé qu'ils avaient pris la décision d'accepter une personne comme immigrant au Canada sans avoir une assurance raisonnable que cette personne satisfaisait aux critères de sélection du programme, dont les exigences en matière de santé ou de sécurité. Les agents sont très mal à l'aise face à cette situation.

M. Bernard Bigras: Au point 10 de votre allocution, vous dites:

    Les agents des visas disposent de peu d'information et de soutien pour s'assurer que les demandeurs ne sont pas des personnes susceptibles de s'engager dans des activités criminelles ou de menacer la sécurité des Canadiens.

Sur la base de cette affirmation et à la lumière des témoignages que vous avez reçus, craignez-vous que la sécurité nationale soit dans une certaine mesure menacée? Je ne veux pas faire d'extrapolation; ce n'est pas mon intention.

M. Richard Flageole: Monsieur le président, il y a deux problèmes très importants au chapitre de la sécurité et nous en traitons aux paragraphes 3.96 et suivants. Dans certains cas, il est impossible d'obtenir l'information voulue. Par exemple, on exige que les immigrants éventuels de plusieurs pays nous fournissent un certificat de police, tandis qu'on n'impose pas cette exigence aux demandeurs d'autres pays en raison des difficultés qui sont inhérentes à leur environnement. Je crois me souvenir que 23 p. 100 des immigrants sont admis sans qu'on ait préalablement obtenu un certificat de police. On a donc de la difficulté à obtenir de l'information.

Dans d'autres cas, on peut avoir obtenu de l'information, mais on est dans l'impossibilité de l'utiliser parce que le ministère pourrait avoir de la difficulté à justifier sa décision à la lumière des renseignements reçus. À ce moment-là, il peut se voir dans l'obligation d'accepter une personne malgré le fait que l'information reçue puisse nous amener à avoir des doutes sérieux.

Le président: Merci.

[Traduction]

Monsieur Anders.

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Merci beaucoup, monsieur le président.

J'aimerais tout d'abord poser une question au sujet du paragraphe 3.92 où il est indiqué:

    Le fait de présenter de faux renseignements entraîne au pis aller le refus de la demande et rien n'empêche le demandeur d'en soumettre une autre dès le lendemain.

Si je comprends bien, le ministère de l'Immigration devrait pouvoir avoir des périodes de refus si bien que lorsque quelqu'un présente de faux documents, il ne peut revenir dès le lendemain pour représenter de documents, qu'il s'agisse de documents authentiques ou de faux.

Vous remarquez ici qu'il n'y a rien de «pratiquement» applicable en pays étranger, si bien que nos agents d'immigration doivent au moins pouvoir refuser aux gens le droit de faire de nouveau une demande s'ils ont remis un faux document. Est-ce bien ce que veut dire le paragraphe 3.92?

M. Serge Gaudet: Oui, c'est une assez bonne interprétation.

• 1615

J'aimerais ajouter que dans le nouveau projet de loi, le projet de loi C-31, il est prévu une peine pour ceux qui présentent de fausses demandes. C'est un pas dans la bonne direction. Le fait d'avoir une mesure législative à ce sujet est un bon exercice, mais en plus, il faut disposer de l'information. Vous devez savoir que la personne a fait une demande ailleurs. Si elle essaie de faire une demande à Paris, par exemple, et que sa première demande a été faite à Beijing, vous voulez le savoir. Il ne s'agit pas donc simplement de refuser une nouvelle demande, mais aussi de pouvoir détecter pareille situation.

M. Rob Anders: Si je comprends bien, cela s'applique seulement aux réfugiés et non aux autres catégories d'immigrants.

Le président: J'aimerais vous reprendre, le projet de loi C-31 vise tous les immigrants et les réfugiés.

M. Rob Anders: Eh bien, je pense que nous devrons le vérifier, mais c'est ce que je comprends.

Le président: Faites-moi confiance, ce n'est pas un problème.

M. Rob Anders: Oh, pourquoi n'en suis-je pas si sûr?

Des voix: Oh, oh!

M. Rob Anders: Le paragraphe 3.96 est une condamnation très intéressante du système. Il est indiqué qu'en 1998, 153 permis ont été délivrés à des personnes non admissibles pour des raisons médicales et 1 352 permis, à des personnes ayant fait l'objet de condamnations criminelles pour des crimes dont la gravité variait.

Au paragraphe 3.98, vous soulignez également que depuis 1994, moins de 2 p. 100 des requérants ont été refusés pour des raisons de santé, de criminalité et ou de sécurité. J'imagine que cela signifie qu'ils ne sont pas refusés, parce qu'ils sont tout simplement acceptés. Il ne semble pas y avoir de barrière.

M. Richard Flageole: Monsieur le président, comme l'indique le paragraphe 3.98, il est un fait que seuls 2 p. 100 des requérants ont été refusés. Ce n'est pas beaucoup. Nous avons relevé certaines faiblesses dans le processus, et des améliorations peuvent certainement y être apportées. Il est impossible de savoir si ce chiffre devrait être plus élevé. Ce sont les résultats que nous avons recueillis.

Pour ce qui est des permis qui ont été délivrés, il y a différentes façons d'aborder la question. Permettez-moi de vous donner un exemple. Un permis peut parfois être délivré à un enfant pour qu'il puisse venir au Canada et subir un traitement spécial. Cette permission est accordée au cas par cas, car le ministère a le pouvoir, en vertu de la loi, de laisser...

[Français]

Une voix: Pour des motifs humanitaires.

[Traduction]

M. Richard Flageole: Oui, pour des motifs humanitaires. Ces permis sont délivrés pour diverses raisons.

M. Rob Anders: J'aimerais attirer votre attention sur certains paragraphes que je trouve inquiétants. Il est question, aux paragraphes 3.103, 3.105, 3.106 et 3.107, des examens médicaux qui sont effectués ou qui ne le sont pas.

Au paragraphe 3.103, il est question de la surveillance médicale qui est effectuée après l'arrivée des immigrants au Canada. Cela se rattache à ce que disait l'opposition au sujet de la création de centres de surveillance ou autre chose du genre, car il n'existe actuellement aucun mécanisme qui nous permette d'assurer une telle surveillance.

Au paragraphe 3.105, on précise que les examens médicaux sont effectués par des médecins locaux désignés. Or, on ajoute plus loin que la supervision des médecins locaux désignés est insuffisante. Donc, on pourrait littéralement avoir des médecins à l'étranger qui maquillent leurs rapports, puisqu'il n'existe aucun moyen de vérifier si ces rapports sont exacts.

Au paragraphe 3.106, on précise que même s'il est possible, aujourd'hui, d'identifier des maladies comme le VIH et les hépatites B et C, celles-ci ne font l'objet d'aucun test. Nous appliquons les mêmes critères depuis 40 ans, de sorte que ces maladies présentent un danger pour la santé publique et risquent d'engendrer des coûts énormes pour le régime de soins de santé. Savez-vous combien il en coûterait pour modifier ces critères et faire subir des tests de dépistage du VIH et des hépatites B et C?

M. Richard Flageole: Nous n'avons pas de renseignements là-dessus. Pour ce qui est de savoir si ces maladies feront l'objet de tests, cette décision revient au ministère.

• 1620

Comme nous l'indiquons dans cette partie, nous avons de sérieuses inquiétudes au sujet des examens médicaux. D'abord, pour ce qui est des normes relatives aux tests, il y a longtemps que le ministère et Santé Canada auraient dû apporter des changements aux examens de routine.

Ensuite, en ce qui a trait aux ressources qui sont consacrées à la surveillance des examens médicaux effectués à l'étranger, comme vous l'avez mentionné, ces examens sont effectués par des médecins locaux désignés. Au cours des dix dernières années, le ministère a réduit le nombre de médecins de moitié. Nous précisons au paragraphe 3.110 qu'il y a onze médecins à l'étranger qui effectuent 200 000 évaluations médicales et assurent la supervision de 800 médecins répartis dans 160 pays.

Le président: Ils passent donc la plupart de leur temps dans des avions.

Sophia.

Mme Sophia Leung (Vancouver—Kingsway, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie pour ce rapport, que je trouve très utile. Je me suis rendue, le mois dernier, en Australie, en Chine et à Hong Kong avec la ministre Caplan, et on a pu constater certains des problèmes que vous soulevez dans votre rapport.

Je tiens toutefois à faire un commentaire. En Chine, par exemple, les demandes ont triplé. Je n'essaie pas de défendre le ministère, mais seulement de présenter les faits. Ils ont été obligés de recruter du personnel additionnel pour répondre à la demande. Ils sont en train d'essayer d'emménager dans un bureau plus grand à Beijing, et d'agrandir celui qui se trouve à Shanghai. Ce sont là de bonnes nouvelles.

Par ailleurs, ils prévoient aménager, à Beijing, une clinique qui appliquera les normes en vigueur au Canada. C'est très important.

Ma question est la suivante. Vous avez fait état des nombreuses difficultés que présente le traitement des demandes hors territoire. Devrait-on, peut-être, centraliser le traitement des demandes au Canada? Voilà pour la première question.

Ensuite, quelles mesures proposez-vous pour réduire au minimum les abus? On ne connaît pas bien les pratiques commerciales, les systèmes d'éducation, les différences culturelles...

Il y a aussi, pour répondre à la question de mon collègue, d'importants problèmes sur le plan médical. Avez-vous des suggestions à formuler? Vous avez bien dit que la situation est inquiétante. Pouvez-vous nous donner des précisions au sujet des problèmes observés au chapitre des évaluations médicales?

Merci.

M. Richard Flageole: Pour ce qui est de la première question, le ministère examine présentement divers scénarios pour le traitement des demandes. On a lancé un projet pilote pour voir quelles demandes peuvent être traitées au Canada.

Les solutions de rechange ne manquent pas. Ce que nous faisons valoir ici, c'est qu'il est important de connaître les conditions qui existent dans un pays donné pour pouvoir effectuer ces évaluations et assurer l'intégrité du programme. Or, il est difficile de trouver un juste équilibre entre cette exigence fondamentale et le traitement des demandes au Canada. Les systèmes d'information jouent ici un rôle clé. Nous avons insisté sur le fait que des modifications majeures doivent être apportées à ces systèmes, et je pense que le ministère entend suivre notre conseil. Ces deux choses sont étroitement liées.

• 1625

Sur le plan médical, comme je l'ai déjà mentionné, il est important que le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration de même que Santé Canada s'entendent sur la question de savoir si des changements devraient être apportés aux examens de routine. Nous précisions dans le rapport que les gens subissent les mêmes tests depuis 40 ans, et que des changements importants sont survenus au fil des ans dans le domaine médical. Le ministère doit réexaminer les ressources qu'il consacre à la gestion des évaluations médicales effectuées à l'étranger.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, pouvons-nous ajouter un autre commentaire au sujet du traitement des demandes hors territoire?

Le président: Oui, allez-y.

M. Serge Gaudet: Notre rapport relève plusieurs difficultés à ce chapitre. Le sondage que nous avons effectué auprès des agents du ministère révèle que 90 p. 100 d'entre eux considèrent que ces demandes ont un impact négatif important sur la qualité de leurs décisions et sur leur charge travail.

Nous avons vu, quand nous étions à Beijing, qu'ils étaient en train de construire un nouveau bureau. Ils en ont besoin. Mais malgré tout cela, on peut voir, quand on jette un coup d'oeil au tableau 3.10, qui indique où sont situés les divers bureaux à l'étranger, que les demandes hors territoire proviennent essentiellement de la Chine.

Donc, il va falloir doubler d'efforts là-bas, même s'ils ont un gros bureau. Il faut examiner le processus dans son ensemble. Combien de demandes peuvent être traitées par ce bureau? La décision peut peut-être être prise à l'étranger. Divers scénarios sont envisagés, mais le traitement des demandes hors territoire pose beaucoup de problèmes pour ce qui est de la charge de travail, de la qualité des décisions, de l'uniformité de celles-ci, du contrôle exercé là-dessus.

C'est tout ce que je voulais ajouter.

Le président: Monsieur Benoit.

M. Leon Benoit: Messieurs, je vais essayer de poser des questions un peu plus précises, ce que je n'ai pas fait la dernière fois.

Vous avez parlé des ressources supplémentaires, des modifications législatives et des changements administratifs qui s'imposent. Vous en avez déjà discuté, mais je voudrais que vous répondiez à la question. Est-il juste de dire que c'est du côté administratif que les changements les plus rapides et les plus efficaces peuvent être apportés, et aussi que ces changements ne seraient pas nécessairement coûteux?

M. Denis Desautels: Il est vrai, monsieur le président, que j'ai dit que le ministère pourrait s'attaquer très rapidement aux problèmes administratifs qui doivent être réglés, sans attendre que des changements législatifs soient apportés ou que des ressources supplémentaires soient allouées. Il est vrai qu'on pourrait régler plusieurs problèmes administratifs si l'on avait des ressources additionnelles, mais pas tous. Donc, oui, il pourrait résoudre certains de ces problèmes très rapidement, sans attendre les autres changements.

M. Leon Benoit: Monsieur Gaudet, vous avez parlé du projet de loi C-31. L'avez-vous analysé en profondeur et pensez-vous qu'il pourrait contribuer à solutionner ces problèmes?

M. Serge Gaudet: Nous avons analysé le projet de loi C-31.

M. Leon Benoit: Quelle est votre conclusion? Va-t-il nous permettre de régler la plupart des problèmes ou seulement certains de ceux-ci, ou va-t-il uniquement avoir un impact limité?

M. Serge Gaudet: Il va avoir un impact limité pour ce qui est des questions abordées dans ce chapitre-ci. Comme nous l'avons déjà mentionné, la plupart des problèmes concernent les mesures administratives et les ressources. Nous avons été en mesure de cerner deux domaines où le nouveau projet de loi serait d'une grande utilité.

Il y a d'abord... Je vais m'exprimer en français, puisqu'il s'agit d'une question d'ordre technique.

[Français]

L'information obtenue sous le sceau du secret par des sources canadiennes doit être protégée. Des problèmes surgiront si on ne peut divulguer à la Cour fédérale des renseignements ou la source des renseignements qu'on a obtenus et qui lui permettraient de juger une personne qui a des antécédents criminels ou qui pose des risques pour notre sécurité. C'est une des questions dont traite le projet de loi C-31.

[Traduction]

Pour ce qui est du deuxième domaine, j'en ai discuté plus tôt. Il s'agit des fausses déclarations que présentent les demandeurs. Le projet de loi va nous être utile à ce chapitre.

• 1630

Par ailleurs, il est question dans le projet de loi des demandes d'autorisation qui sont déposées en vue d'avoir accès à la Cour fédérale. Le nombre de personnes qui s'adressent à la Cour fédérale augmente. Il s'agit là d'un autre point qu'aborde le nouveau projet de loi.

M. Leon Benoit: Donc, vous pensez que cela va contribuer à réduire le nombre de personnes qui s'adressent à la Cour fédérale?

M. Serge Gaudet: Je ne suis pas sûr de l'impact que cette mesure va avoir. Le problème a une portée peut-être plus vaste. Le ministère doit se doter d'un système de contrôle de qualité qui lui permettra de conclure que les décisions peuvent être défendues devant la Cour fédérale. Si votre défense semble faible, alors les gens vont évidemment essayer de contester votre décision par tous les moyens possibles.

M. Leon Benoit: Pour ce qui est du deuxième point, nous avons parlé un peu du volet administration et de l'impact du projet de loi. Il nous reste la question des ressources. Vous dites dans votre rapport que le fait d'avoir des ressources supplémentaires contribuerait à régler le problème. Si on doublait le budget du ministère l'année prochaine, est-ce que cela permettrait de solutionner la plupart des problèmes que vous avez relevés dans votre rapport?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, je pense avoir dit plus tôt qu'on ne peut pas tout régler avec l'argent. Les fonds additionnels qui seront versés au ministère doivent être bien ciblés. Le ministère lui-même doit prendre des mesures pour rendre compte de l'utilisation des fonds. Il doit savoir exactement où des ressources additionnelles s'imposent, dans quels bureaux, et à quelles fins. Il doit établir un plan d'action suffisamment détaillé qui permette au comité, entre autres, de voir que les fonds additionnels ont été affectés à des tâches précises. Nous saurons ensuite que les fonds ont été utilisés à bon escient pour régler les problèmes qui ont été cernés.

Le président: Bernard.

[Français]

M. Bernard Bigras: Dans votre présentation, lorsqu'il est question de fraude, au paragraphe 11, vous semblez faire peser la charge directement sur les demandeurs. Vous semblez beaucoup plus discrets ou beaucoup plus nuancés envers ceux ou celles qui offrent des services ou qui ont la responsabilité de gérer un certain nombre de pièces de voyage. Pourtant, on sait que la réalité est tout autre.

Il y a, bien sûr, de la fraude de la part des demandeurs, mais il y a aussi, à certains égards, de la fraude qui pourrait être commise par ceux et celles qui sont responsables dans les bureaux à l'étranger. Est-ce que vous êtes plus nuancés parce que vous avez vu des irrégularités, entre autres dans les bureaux de Beijing, en ce qui a trait à la gestion des passeports ou des visas? On disait même que 2 000 visas étaient disparus au bureau de Beijing. Est-ce que vous avez vu des irrégularités ou si ce sont des légendes urbaines, comme on dit?

M. Serge Gaudet: Ce qu'on dit est quand même assez sévère. À partir du point 3.170, on dit que le contrôle des recettes est insuffisant. Pour découvrir une fraude, il faut une vérification assez détaillée, que nous n'avons pas faite. Cependant, on a examiné les rapports de vérification interne. On a vu ce qui avait été déclaré dans les médias et on a regardé les contrôles de base qui existaient dans les bureaux à l'étranger.

On dit ici qu'ils ont, à certains moments, des problèmes d'accès au système d'encaisse, par exemple. Ceux qui sont responsables de l'encaisse ont des problèmes de coordination et de contrôle parce qu'ils n'ont pas toute la formation requise pour détecter la fraude. Nous disons donc qu'ils sont très à risque quant à la fraude et que ce genre de fraude se produit à l'occasion.

• 1635

On connaît ce qui paraît dans les journaux ou ce qui paraît de temps à autre à la suite à leurs enquêtes. Ce qui est inquiétant, c'est qu'il n'y a pas assez de vérification interne qui est faite, comme on l'a dit. On réduit énormément le nombre de vérificateurs internes. En fait, je pense qu'on a cinq vérificateurs internes pour couvrir tout cet arsenal d'activités, de bureaux à l'étranger et de personnes aux postes frontaliers. S'il n'y a pas des éléments et des points de contrôle non seulement pour détecter la fraude mais aussi pour la prévenir, cela doit nous rendre très craintifs.

M. Bernard Bigras: Donc, si je comprends bien, sur la base de votre vérification, vous ne pouvez pas conclure qu'il y a actuellement de la fraude dans certains bureaux à l'étranger. Est-ce bien ce que je dois comprendre?

M. Serge Gaudet: Notre vérification n'a pas décelé de cas de fraude, mais en se basant sur des rapports internes, on a vu qu'ils en avaient identifié. On fait allusion au fait qu'ils ont un bureau d'éthique ou de conduite professionnelles qui enquête sur les allégations et les plaintes, et que ce bureau découvre chaque année des cas de fraude, de visas ou d'argent qui disparaissent.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, je crois que les cas de fraude dont parle M. Bigras sont bien documentés dans le ministère et que le ministère lui-même en identifie régulièrement. Nous n'avons pas tout refait le travail des vérificateurs internes parce que nous pensons que l'information rendue disponible par la vérification interne était quand même assez concluante à ce sujet.

Donc, il y a des problèmes de contrôle, de systèmes déficients et de pratiques, par exemple le manque de contrôle sur les formulaires de visa, qui rendent le ministère plus vulnérable qu'il ne devrait l'être. Donc, pour revenir à votre déclaration de tout à l'heure, il faut être aussi sévère quant aux possibilités de fraude interne que quant aux possibilités de fraude par les demandeurs.

[Traduction]

Le président: Steve Mahoney.

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Desautels, vous avez fait quelque chose que vous ne faites pas très souvent. Vous vous êtes écarté un peu de votre texte, et vous avez ajouté un mot que j'ai trouvé important. Vous avez ajouté le mot «authentique». Votre avez dit, et je cite: «Nous croyons que le ministère aurait avantage à ce que son plan d'action...» et vous avez ajouté «soit authentique».

Je m'excuse d'insister là-dessus, mais j'ai l'impression que vous n'êtes pas satisfait du plan d'action que le ministère a publié sur son site Intranet, ou encore du plan d'action que nous avons devant nous, qui comporte à tout le moins un échéancier. Ai-je raison? Est-ce pour cela que vous avez ajouté ce mot, ou souhaitez-vous le retirer?

M. Denis Desautels: Non. Je ne l'ai pas ajouté par hasard. Je voulais faire en sorte que le ministère établisse un plan d'action suffisamment détaillé qui décrive clairement les responsabilités en matière de résultats, les principales étapes, les échéanciers et les besoins en ressources. Je faisais surtout allusion au document que le ministère avait publié sur son site Intranet. Je ne pense pas que cela corresponde vraiment à un plan d'action détaillé. Voilà pourquoi j'ai insisté là-dessus.

M. Steve Mahoney: Le document que j'ai et qui est daté du 11 avril est celui qui figure sur l'Intranet?

M. Denis Desautels: Oui.

M. Steve Mahoney: D'accord.

Vous dites également au paragraphe 2 de votre déclaration que d'autres partenaires fédéraux participent à l'atteinte des objectifs du volet économique. Ce sont le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, le SCRS, la GRC et Santé Canada. Ont-ils répondu à vos recommandations pour ce qui est du plan d'action, ou est-ce que tout cela relève de la responsabilité de CIC?

• 1640

M. Denis Desautels: Jusqu'ici, seul le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration a répondu à nos recommandations. Nous nous attendons à ce qu'il coordonne sa réponse avec celles des autres ministères et organismes concernés.

M. Steve Mahoney: Souhaitez-vous ajouter quelque chose?

M. Richard Flageole: Nous avons reçu des réponses à certains des commentaires que nous avons formulés dans le chapitre. Mais comme l'a dit le vérificateur général, nous nous attendons à ce que les ministères coordonnent leurs plans d'action. Ce sont eux qui sont responsables du programme.

M. Steve Mahoney: Il serait toutefois normal que le comité rencontre un représentant de ces ministères pour discuter des mesures qu'ils ont prises pour donner suite aux recommandations.

Il est évident aussi que le SCRS a un rôle majeur à jouer sur le plan de la sécurité. J'ai vu que le SCRS était présent dans les bureaux que j'ai visités à l'étranger. On ne pas vraiment s'attendre à ce qu'un agent des visas intervienne comme le ferait quelqu'un du SCRS si une infraction grave à la sécurité était commise.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, je suis d'accord avec M. Mahoney. Il serait bien que le comité convoque des représentants de ces autres organismes, y compris du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.

Le président: Ce pourrait être utile. Je vous remercie tous les deux de la suggestion.

M. Steve Mahoney: Vous présumez que j'ai terminé?

Le président: Non. Je précise tout simplement que le comité doit rencontrer non seulement des représentants du ministère, mais d'autres témoins—en fait, le 14 juin, peut-être même avec votre aide—pour discuter de ce point, car le comité tient vraiment à ce que le plan d'action soit mis en place et fasse l'objet d'un suivi. Il se peut, Steve, qu'on décide de convoquer des représentants du SCRS et de la GRC pour avoir une idée des ressources ou autres dont ils ont besoin pour appuyer les efforts du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.

M. Steve Mahoney: Merci, monsieur le président.

Je tiens à ajouter que je suis d'accord avec ce que vous dites au sujet du calibre et de l'engagement du personnel affecté à l'étranger. Mais quelque chose d'aussi grave—et certaines de vos observations sont en fait très sérieuses—que les menaces à la sécurité publique et autre chose du genre—il n'est pas réaliste de penser qu'on puisse fournir ce genre de formation à quelqu'un qui travaille littéralement avec des centaines de demandeurs à l'intérieur de délais précis souvent difficiles à respecter. Ils n'ont pas nécessairement obtenu une formation en sécurité.

Est-ce que les observations que vous avez faites concernant la menace à la santé et à la sécurité publiques se fondent sur des exemples concrets de cas de personnes qui ont été admises au Canada et qui ont été la source de problèmes parce qu'elles étaient porteuses d'une maladie infectieuse ou parce qu'elles étaient engagées dans des activités criminelles? Ou vous fondez-vous—et je parle encore une fois de cas que vous avez vus—sur ce que vous a dit le personnel à l'étranger?

M. Richard Flageole: Nous avons analysé la façon dont le ministère gère ces risques, puisqu'il est vraiment question ici de gestion des risques. Le processus suivi par le ministère présente des lacunes et ne lui permet pas d'obtenir le niveau d'assurance requis.

Comme nous l'avons déjà mentionné, les résultats du sondage que nous avons effectué auprès des agents d'immigration montrent clairement que les personnes chargées de prendre des décisions ont de sérieuses préoccupations au sujet des risques que celles-ci présentent sur le plan et médical, et aussi sur le plan de la criminalité et de la sécurité.

M. Steve Mahoney: Pour ce qui est du plan médical, est-ce que leurs préoccupations sont fondées sur la qualité des examens effectués ou leur nombre? Est-ce qu'elles ont l'impression qu'elles n'examinent pas suffisamment de personnes, de cas? Ont-elles l'impression, par exemple, que les tests de dépistage du SIDA devraient être obligatoires pour les personnes qui proviennent de certains pays d'Afrique ou d'un autre pays? Quelles sont leurs véritables préoccupations?

• 1645

M. Richard Flageole: Monsieur le président, leurs préoccupations portent aussi bien sur la qualité des examens que sur leur nombre. La Loi de l'immigration insiste beaucoup sur les notions de fardeau excessif ou de menace à la sécurité des Canadiens. Je pense que les gens veulent que ces notions soient clairement définies. Une fois qu'elles le seront, nous saurons quels examens doivent être exigés.

Nous avons formulé exactement la même recommandation au ministère en 1990. Dix ans plus tard, les résultats se font toujours attendre. Nous avions certaines attentes. Il y a aussi la question de la surveillance de la qualité des examens. Encore une fois, les médecins canadiens considèrent qu'ils n'ont pas le temps ou les ressources voulues pour vérifier la qualité des examens qui sont effectués par des médecins locaux désignés.

Le président: Merci.

Rob.

M. Rob Anders: Merci, monsieur le président.

Au paragraphe 3.82 de votre rapport, page 3-21, vous parlez de l'utilisation de tests linguistiques uniformisés. Vous précisez qu'à l'heure actuelle, les agents évaluent, selon leurs propres barèmes, les habiletés du demandeur à communiquer en anglais ou en français.

Je sais que l'Australie vient de mettre en place un test qui permet d'évaluer les habiletés des demandeurs à lire, à écrire, à parler et à comprendre la langue officielle de l'Australie. Si nous mettions en place un test de ce genre, nous pourrions sans doute réaliser des économies importantes du côté des services d'interprétation, parce que nous fournissons des interprètes à diverses étapes du processus, ce qui nous oblige à engager toutes sortes de dépenses supplémentaires.

Si nous avions un système comme celui qui existe en Australie, où on évalue les habiletés des demandeurs à lire, à écrire, à parler et à comprendre une des deux langues officielles, nous n'aurions pas à recruter des interprètes. Cela nous permettrait aussi de régler le problème que pose l'absence de tests linguistiques uniformisés.

M. Richard Flageole: Vous pourrez peut-être en discuter davantage demain avec le ministère. Je crois comprendre qu'il est en train d'apporter des changements très importants à la façon dont il s'acquitte de cette tâche. Ils ont communiqué avec leurs homologues australiens. Ils travaillent aussi à divers projets avec l'ambassade de Grande-Bretagne pour ce qui est des tests linguistiques. Il s'agit donc là d'un point intéressant que vous pourriez aborder avec eux demain.

M. Rob Anders: Monsieur le président, je m'excuse, mais je dois partir, car je dois prendre l'avion. M. Benoit pourrait peut-être poursuivre la discussion.

Le président: D'accord.

M. Leon Benoit: Merci, Rob et monsieur le président.

J'aimerais poursuivre mes questions dans le même ordre d'idées que tout à l'heure, soit l'importance relative d'avoir plus de ressources et de procéder à des changements législatifs et administratifs. Je sais qu'il est très difficile de donner là-dessus une réponse succincte, mais on m'a déjà répondu que cette nouvelle loi ne résoudra certainement pas beaucoup de ces problèmes. Les changements d'ordre administratif et dans le mode de gestion pourraient entrer en vigueur assez rapidement. Mais vous avez déjà dit très clairement qu'il nous faut plus de ressources, bien que vous ayez précisé dans votre dernière réponse qu'il est important, aussi, que le ministère cible ces ressources.

J'aimerais souligner quelque chose d'assez évident. Il n'y a qu'à voir ce qui est arrivé depuis cinq ans. Le ministère augmenté ses dépenses de 52 p. 100—dont 36 p. 100 rien que dans les trois dernières années. Ces fortes hausses du financement et des ressources n'ont pas réglé les problèmes.

La question que je vous pose sur ce qui arriverait si vous pouviez doubler vos dépenses immédiatement est un peu excessive, mais il y a eu augmentation de 50 p. 100 des dépenses depuis cinq ans—ce qui n'est pas mince. Je me demande seulement si le fait d'investir d'autres fonds dans le problème y fera vraiment grand-chose.

M. Richard Flageole: Je pense que nous avons clairement cerné les besoins de ressources. Un exemple est celui du nouveau système informatique. Il représente d'énormes investissements dans la technologie. Nous parlons, dans une section de notre rapport, des notions d'efficience. L'organisation croule littéralement sous la paperasse. J'ai eu l'occasion de rendre visite à certains bureaux à l'étranger, et il est incroyable de voir ce genre de situation subsister en l'an 2000.

• 1650

Le ministère a énormément investi dans la technologie. Nous parlons probablement de centaines de millions de dollars attribués à ces projets, qui s'étaleront sûrement sur deux à trois ans.

Si je peux me permettre d'ajouter quelque chose, le ministère devra prendre des décisions fondamentales sur l'organisation de son réseau. Par exemple, où installerons-nous ces bureaux, en tenant compte d'autres projets, comme le traitement possible de certains dossiers au Canada? C'est pourquoi il est si important pour eux d'avoir une vision très claire de leur objectif. Nous pourrions risquer, par exemple, de faire de gros investissements dans un pays particulier, puis de décider par la suite d'appliquer une démarche différente pour le traitement.

C'est pourquoi tout doit être très bien coordonné, et qu'il faut avoir des visions claires à moyen et à long terme sur la manière dont nous, en tant que pays, traiterons les dossiers de demande d'immigration.

M. Leon Benoit: C'est un argument intéressant. Il me semble cependant prôner le ciblage, plutôt que l'augmentation, des dépenses. Même si un nouveau réseau informatique coûte 500 millions de dollars, si l'on compare cela à l'augmentation des dépenses survenue depuis cinq ans, qui se chiffrait à 300 millions de dollars, ça me semble un assez bon investissement. Alors est-ce que ce n'est pas une question de réaffectation des ressources plutôt que d'augmentation de celles-ci?

Si les ressources étaient mieux réparties de façon générale entre les fonctionnaires de première ligne à l'étranger qui prennent des décisions, ceux qui veillent à l'application des règles ici et ceux qui pourraient nous épargner bien des problèmes de la construction, est-ce que ça ne serait pas plus valable que d'augmenter les dépenses en tant que tel?

M. Richard Flageole: Comme vous le savez, le ministère a plusieurs programmes. Nous n'avons pas examiné la possibilité de la répartition des ressources à l'échelle du ministère. Lorsque nous avons fait la vérification de la sélection à l'étranger, nous nous sommes vraiment concentrés là-dessus. Je ne peux vraiment pas commenter la possibilité d'une nouvelle répartition des ressources d'autres secteurs du ministère. C'est une question que vous devriez peut-être poser au ministère demain.

Le président: Jean.

Mme Jean Augustine: J'ai une dernière question à poser, monsieur le président.

Vous avez dit que le personnel vous a fait part de ses préoccupations, a répondu à votre questionnaire, etc. Existe-t-il un mécanisme par lequel il peut vous transmettre ses préoccupations, pour que celles-ci se rendent à Ottawa jusqu'aux gens qui prennent les décisions et font les politiques qui les concernent, ou qui concernent leur volume de travail?

M. Denis Desautels: La conduite de ce sondage était quelque chose d'assez inhabituel. Nous ne faisons pas ce genre de chose à chaque vérification. Je ne pense pas que le ministère lui-même le fasse de façon régulière.

De toute évidence, le ministère a ses propres systèmes d'information. Il a ses propres mécanismes pour savoir ce que les gestionnaires à l'étranger connaissent comme difficultés. À ce que je sache, rien n'est prévu pour permettre aux employés de tous les niveaux d'exprimer leurs frustrations, si vous voulez, ou leurs préoccupations, comme ils ont pu le faire à l'occasion de notre sondage.

Mme Jean Augustine: Alors ils attendent qu'il y ait une vérification, et ils en parlent aux vérificateurs.

M. Denis Desautels: J'espère que ce n'est pas le cas. Je pense qu'il est possible pour les organisations d'avoir leur propre mécanisme, et certaines en ont un—certains ministères. Disons seulement que nous n'étions pas au courant qu'un exercice de ce genre ait eu lieu au ministère.

Le président: J'aimerais, monsieur Desautels, vous poser deux ou trois questions.

De toute évidence, votre rapport fait ressortir la nécessité pour le ministère de régler certains de ces problèmes, comme vous le dites, surtout à la lumière du fait qu'il y a eu très peu d'améliorations depuis une dizaine d'années. Cela me préoccupe, et je ne doute pas que ça préoccupe aussi le comité et la ministre. La démarche entreprise vise manifestement à corriger la situation.

J'essaie seulement de parvenir au noyau du problème. Si le problème ne vient probablement pas des mesures législatives, selon vous, et si le projet de loi C-31 et certaines autres mesures que nous allons entreprendre doivent contribuer à améliorer la situation, alors comme vous le dites, il faudra attribuer plus de ressources et mettre en oeuvre certaines fonctions administratives et de gestion.

• 1655

Si tout cela constitue 80 p. 100 du problème, et qu'en tant que vérificateurs vous tentiez de concevoir un moyen de traiter ces dossiers provenant de tout un éventail de bureaux situés partout dans le monde et aussi au Canada... Avez-vous réfléchi à cela vraiment en profondeur? Je crois que vous avez dit que vous pensez probablement creuser le sujet d'ici un an ou deux. Nous essayons de cerner comment régler le problème en vue de donner les meilleurs conseils possibles à la ministre. Pourriez-vous segmenter pour nous certaines de ces mesures administratives qui sont nécessaires et en indiquer l'ordre de priorité, et aussi le montant qu'il faudrait envisager? Quel genre de ressources devons-nous envisager? Plus précisément, pouvez-vous indiquer certaines de ces priorités administratives?

Je vais vous donner un exemple. Vous parlez tout au long de votre rapport du problème des demandes hors territoire. À la lecture du document, je constate que les demandes provenant de la Russie doivent être traitées en Pologne, bien que nous ayons un bureau en Russie. Est-ce que les consultants détournent toutes sortes de demandes vers Buffalo parce qu'il pourrait être plus facile ou plus rapide d'obtenir une décision de Buffalo plutôt que de la Pologne ou de la Russie? Si l'on regarde l'origine de ces demandes, elles proviennent de tous les coins du globe. Cela semble une façon assez bizarre d'exploiter un système. Je suis dans les affaires, mais je ne commencerai pas à accepter des demandes en Pologne émanant de Russes si, en fait, il y a un bureau en Russie, ou à Buffalo, quant à y être.

Si le problème des demandes hors territoire est d'une telle ampleur, est-ce que l'une des décisions administratives à prendre—et je pense que la ministre examine actuellement cette question—serait de traiter ce genre de dossiers centralement? Est-ce qu'on pourrait faire d'importants gains d'efficience, en fait, en centralisant une bonne partie de ces services?

M. Denis Desautels: Je vais essayer de répondre à vos questions, et peut-être mes collègues pourront-ils m'y aider. Vous avez soulevé plusieurs questions de très grande importance.

Tout d'abord, à propos des demandes hors territoire, je ne pense pas que ce soit strictement une décision d'ordre administratif qui relève du ministère. Je pense qu'il y a là-dessous un dessein de politique fondamental. Tout cela a été créé il y a quelques années parce qu'il y avait beaucoup de retard dans le traitement des dossiers, dans certains pays, et en fait, on s'est fait accuser de contrôler le flux d'immigrants provenant de certains pays en favorisant le retard du traitement des dossiers dans ces pays. Cette approche particulière découle donc d'un dessein de politique fondamental.

Pour en revenir à vos questions plus fondamentales sur ce qui peut être fait et ce que sont les priorités, permettez-moi de dire que ce chapitre particulier du rapport est assez sévère. Parmi les rapports du vérificateur général, je pense que celui-ci peut être qualifié de l'un des plus critiques que nous ayons émis depuis quelque temps. C'est pourquoi je crois que les conclusions qui s'y trouvent doivent être prises très au sérieux.

Je pense que tout au long du chapitre, nous avons cité plusieurs améliorations qui pourraient être faites dans la gestion et l'administration des dossiers. Je crois que vous avez dit vous-même, après nous avoir entendus, que la solution pourrait résider à 80 p. 100 dans les améliorations d'ordre administratif et dans la gestion, et le reste dans des améliorations sur le plan du financement et de la loi. Je pense, dans l'ensemble, que c'est une évaluation assez juste de la situation. Je crois que le ministère pourrait mettre en oeuvre assez rapidement les améliorations d'ordre administratif et de gestion relatives à ces questions, sans avoir à attendre que tout le reste soit en place.

En ce qui concerne les priorités, il m'est difficile de répondre à cette question au pied levé. Si vous voulez, nous pourrions y réfléchir et, peut-être, vous remettre un communiqué additionnel pour vous suggérer, en fait, de quoi il conviendrait de traiter en premier lieu. Nous espérons que cela pourra être utile au comité. J'hésite à vous donner une réponse détaillée sur-le-champ, la liste des problèmes à régler étant assez longue. Si vous le permettez, nous pourrons y réfléchir et vous donner une réponse plus tard.

• 1700

Le président: Je vous remercie de cette offre, et nous l'acceptons.

M. Leon Benoit: Merci.

Dans le même ordre d'idées, le fait est qu'entre 1992 et 1998, le nombre de demandes hors territoire est passé de 7 600 à 39 000; c'est donc une augmentation de 48 p. 100, en 1998, du nombre de demandes d'immigration reçues. Par conséquent, le sujet est très important. À quoi, à votre avis, peut-on attribuer cette augmentation?

M. Richard Flageole: Je pense qu'il y a deux principales raisons, et nous y avons déjà fait allusion. Premièrement, certaines personnes font leur demande à d'autres bureaux parce que la période d'attente est plus courte. Un résident de la Russie peut faire sa demande à Buffalo, parce qu'elle y sera traitée plus rapidement. Je pense que l'autre principale raison est que, probablement, certains de ces requérants souhaitent éviter qu'un agent qui connaît très bien leur pays fasse un examen très approfondi de leur demande.

M. Leon Benoit: Ne serait-il pas logique, dans ce genre de situation, d'exiger que ces demandes soient traitées dans des bureaux spécifiques, soit le bureau du pays de résidence ou un bureau particulier auquel seraient attribuées les demandes provenant de ce pays? Est-ce que cela ne contribuerait pas beaucoup à régler le problème du retard? Il est énorme.

M. Richard Flageole: Je pense que c'est une question fondamentale à laquelle le ministère devra répondre. Si je ne me trompe pas, la ministre a le pouvoir de décider que les demandes doivent être traitées dans un bureau particulier. Elle en a fait usage au sujet des requérants de la catégorie des gens d'affaires. Le ministère a ce qu'on appelle des centres d'affaires, et les requérants peuvent s'adresser à eux. Cela règle donc le problème en partie mais c'est néanmoins une question fondamentale à laquelle il faudra trouver réponse.

M. Leon Benoit: Beaucoup de gens, et particulièrement les immigrants indépendants, ont recours aux consultants en immigration. Ceux qui valent quelque chose font le tour du marché, non seulement pour voir quels bureaux ont un gros retard mais pour trouver ceux qui sont plus susceptibles d'accepter un requérant de la catégorie particulière de leur client. C'est donc peut-être plus que la question de l'arriéré du traitement. Il y a aussi les facteurs des décisions, du pourcentage des acceptations ou du processus en vigueur dans un bureau particulier.

M. Richard Flageole: Je suis d'accord avec vous, et je pense que c'est lié à la rigueur de la demande déposée. Nous nous intéressons notamment, ici, au fait que nous avons remarqué des écarts très importants dans les taux d'acceptation entre divers bureaux, relativement aux requérants d'un même pays. Je pense que l'écart allait jusqu'à 40 p. 100. Cela pourrait donc effectivement expliquer le genre de situation dont vous parlez.

M. Leon Benoit: Une solution possible au problème serait de plus centraliser le traitement des demandes, comme le suggère le président. Une autre solution serait de désigner les bureaux auxquels peuvent s'adresser les demandeurs. Il me semble que cela devrait être fait avant l'entrée en vigueur de la loi puisque, surtout, cette loi n'en traitera pas. Peut-être certains règlements le feront-ils. Comment pouvons-nous en être sûrs? Beaucoup est laissé à la réglementation, mais la loi ne traitera pas de cela.

M. Richard Flageole: Monsieur le président, je ne suis pas sûr qu'il soit vraiment nécessaire de faire des changements législatifs pour cela. Peut-être devriez-vous approfondir la question.

Si je peux répondre à votre observation, je crois qu'il est extrêmement important que ces décisions soient prises avant que nous fassions un investissement important de ressources. Il y a des choses qui doivent passer en premier.

M. Leon Benoit: D'accord. Merci beaucoup. Je n'ai rien à ajouter.

Le président: Merci.

En ce qui concerne l'arriéré du traitement des demandes, je suis d'accord avec vous pour dire que, peut-être qu'avant d'attribuer des ressources importantes... Je pense que la loi sera utile sur le plan de la prévisibilité et pour arriver à certaines fins. Nous parlerons probablement de la loi à l'automne. De fait, nous traiterons de certains règlements, ce qui en fait contribuera à standardiser, je crois, le mécanisme de prise de décisions de manière à ce qu'il n'y ait plus de place pour la subjectivité et qu'il y en ait plus pour l'objectivité, afin que les règlements semblent tout à fait clairs sur ce genre de choses. Nous espérons obtenir certaines réponses en ce qui concerne l'admissibilité médicale, la sécurité et la criminalité, qui manifestement seront des éléments du nouveau système que le projet de loi s'efforce de mettre en place.

• 1705

Peut-être puis-je vous poser une question sur l'arriéré du traitement. Voyez-vous, certaines personnes pourraient être assez cyniques pour penser qu'il entre dans notre pays tout un tas de criminels ou de gens en mauvaise santé. Mais si on regarde les statistiques...

Je conviens que la vigilance s'impose et qu'il faut bien vérifier ces données mais, selon les statistiques, nous autorisons 180 à 190 000 immigrants à entrer au pays, et le fait est que nous en déportons environ un millier pour des motifs de criminalité. Cela revient donc à moins de 0,5 p. 100.

Je comprends qu'il faille porter une attention minutieuse à l'élément de sécurité et de criminalité pour veiller à la sécurité des Canadiens, mais le fait reste que, bien que ce soit une préoccupation, je ne voudrais pas vous laisser l'impression, après cette réunion, que notre pays est vulnérable aux yeux de bien des gens en mauvaise santé ou que beaucoup de criminels entrent au Canada. Il semble y avoir là un certain équilibre, avec ces vérifications de sécurité. Bien que je comprenne que vous vous en préoccupiez... et comme certaines questions portaient là-dessus, elles semblaient y attribuer une importance, je pense, disproportionnée.

Aurais-je peut-être raison de suggérer que l'accent n'est pas tant mis sur l'admissibilité en regard de la criminalité de la sécurité ou de la santé...? Les statistiques, d'un autre côté, n'indiquent pas que nous soyons si vulnérables. Mais il nous faut être vigilants, et nous devons donc nous améliorer sur ce plan.

Alors peut-être pourriez-vous commenter cela. Je ne veux pas laisser aux Canadiens l'impression que le système est si faible et vulnérable qu'ils devraient craindre pour leur sécurité.

Ensuite, monsieur Desautels, vous avez indiqué dans vos déclarations préliminaires que le fait que notre système ne fonctionne pas, qu'il est fragmenté, nous coûte beaucoup. En fait, nous ne sommes pas en mesure d'atteindre nos objectifs—et les chiffres que nous avons vus démontrent que les requérants doivent attendre six, huit mois, et même, pour certains travailleurs qualifiés, trois ans—cela se répercute sur le pays puisque nous n'attirons probablement pas ou ne faisons pas entrer les gens qu'il nous faut pour stimuler notre économie.

Cela me préoccupe plus, peut-être, pour vous dire la vérité, que le facteur de risque que présente la criminalité. Je suis plus inquiet du fait que nous n'attirons pas... Nous devrions, nous avons besoin de traiter les demandes beaucoup plus rapidement pour que les entreprises et les communautés... Nous avons besoin de ces gens-là.

Par conséquent, je me demande si je peux simplement parler des coûts économiques d'un système à ce point surchargé qu'il ne permet pas de traiter les demandes, j'aimerais aussi aborder la question des conséquences que cela peut avoir sur l'économie, si vous avez quelque idée à cet égard, de même que sur les facteurs de risque, comme je l'ai signalé, en matière de criminalité et de santé.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, en ce qui a trait à votre première question, il est difficile d'essayer de mettre en perspective les questions relatives à la sécurité et à la santé.

Je veux dire par là, je crois qu'il est essentiel de faire appel pour tous les programmes gouvernementaux à ce que nous appellerions une gestion des risques «intelligente». Il est impossible de prévoir tous les incidents. Il faut, je crois, un certain niveau de tolérance et déterminer ce qu'il pourrait être.

En ce qui concerne l'immigration, je pense que c'est un secteur où toutes les conditions sont réunies pour un bon système de gestion des risques. Je crois que le ministère devrait préciser ce qu'est son système de gestion des risques et son niveau de tolérance ou le niveau qu'il est prêt à accepter.

À l'heure qu'il est, comme nous l'avons dit, les dirigeants ne sont pas à l'aise avec ce qui se passe. Ils aimeraient, d'une part, mieux connaître les risques qu'ils sont censés prendre. Ils montrent aussi du doigt les secteurs où nous ne réussissons pas aussi bien que nous le devrions. Par exemple, la surveillance des évaluations médicales laisse à désirer.

• 1710

Quelles en sont les conséquences? Personne ne comprend le problème. Nous pouvons dire que, même si les gens sont très vigilants et dévoués, ils ne sont pas convaincus qu'ils repèrent tous les cas. Je crois donc qu'il nous faut colmater certaines de ces brèches le plus rapidement possible mais aussi mettre au point un système efficace de gestion des risques.

Pour ce qui est de votre deuxième question, en fait, il est entre autre question dans ce chapitre de l'importance que l'immigration revêt pour le Canada. Le maintien de notre croissance repose sur l'immigration. Ainsi, il est important que ce ministère puisse traiter les demandes le plus efficacement possible pour que les personnes qui désirent venir ici et celles que nous voulons accueillir comme immigrants soient acceptées le plus rapidement possible. L'arriéré que nous avons comporte un coût économique.

Il y a en outre le fait qu'il y a peut-être des gens qui ne se sont tout simplement pas donné la peine de présenter une demande sachant que la période d'attente est longue. Il pourrait s'agir de gens possédant les compétences dont nous avons besoin ici.

L'immigration est importante. L'inefficacité dans ce domaine nuit donc énormément, selon moi, à notre croissance économique.

Le président: Merci.

Leon, une dernière question.

M. Leon Benoit: Oui.

Dans votre rapport vous parlez de la responsabilité envers les parlementaires et la collaboration avec ces derniers, y compris ce comité. Cela m'inquiète également.

Vous dites dans votre déclaration liminaire:

    En 1999, sur quelque 190 000 immigrants admis au Canada, plus de la moitié était des immigrants du volet économique.

Pourtant nous savons—et le sous-ministre, je crois, l'a confirmé—qu'en fait seulement environ 20 p. 100 de tous les immigrants doivent satisfaire certains critères de sélection qui permettent d'établir leur apport éventuel à l'économie canadienne. Cela signifie que le chiffre que vous avez utilisé, «plus de la moitié» d'environ 190 000, est trompeur parce que l'apport à l'économie ne fait l'objet d'une évaluation que pour seulement 20 p. 100 d'entre eux.

Cela me semble le genre de chose qui doit changer. Les rapports que produit le ministère sont, je crois, trompeurs dans ce cas et cela doit changer si l'on doit accroître la responsabilité envers le Parlement et améliorer les relations de travail avec ce comité et le Parlement.

J'aimerais que vous me disiez, en général, si ce type de rapport ou de plan d'action vous porte à vous interroger au sujet du lien entre le Parlement et le ministère.

M. Denis Desautels: Le chiffre que nous citons dans notre premier paragraphe est en fait le nombre officiel de personnes qui passent par ce volet économique du programme d'immigration.

M. Leon Benoit: Très bien.

M. Denis Desautels: Il s'agit donc des chiffres officiels du ministère. Mais, au paragraphe 3.190, nous abordons la question de la nécessité de communiquer l'information aux parlementaires. Nous proposons des indicateurs supplémentaires que pourrait publier le ministère, y compris, l'intégration éventuelle à la société canadienne et la mesure dans laquelle ces immigrants soi-disant économiques occupent rapidement des emplois.

Je crois qu'il serait très facile d'ajouter, dans l'information communiquée au Parlement, des indicateurs de ce genre qui donnent un meilleur aperçu du succès du programme.

Le président: Monsieur Desautels, monsieur Flageole et monsieur Gaudet nous vous remercions d'un si bon rapport. Vous nous donnez là de toute évidence une bonne base de réflexion. Notre comité, au cours de la prochaine semaine et demie, a l'intention de prendre votre rapport très au sérieux. En fait, nous recevons des gens du ministère demain et nous allons entendre, la semaine prochaine, un certain nombre de personnes qui vont nous donner un autre aperçu de la question.

• 1715

Je vous remercie de l'offre que vous nous avez faite d'établir peut-être une liste de priorités de certaines de ces questions administratives que nous pourrions examiner. L'une des choses que nous aimerions faire avant de partir d'ici le 14 juin ou quelle que soit la date, c'est de discuter un peu de ce plan d'action et du système de repérage. Il se peut donc très bien que le comité ait à vous poser des questions en bonne et due forme.

C'est avec sérieux que ce comité essaie d'aider les gens de l'immigration à faire leur travail. Comme nous l'avons tous dit, nous devons absolument améliorer le système non seulement pour des raisons économiques et sociales mais aussi pour des raisons de sécurité et de santé. Nous espérons pouvoir compter sur vous pour nous faire part d'autres points de vue que nous pourrons peut-être intégrer dans certains travaux futurs que nous avons l'intention d'amorcer non seulement en ce qui a trait au projet de loi C-31, mais aussi relativement à une étude que nous effectuons sur l'immigration, l'histoire sur laquelle repose les chiffres, à proprement parler. Je crois que cela pourrait être très utile.

Une fois de plus, je vous remercie de votre contribution.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, c'est avec plaisir que je vous ferai parvenir cette information supplémentaire. Si le personnel de recherche du comité veut bien parler aux gens de chez nous, qui ont beaucoup d'information, nous serions heureux de la partager avec vous.

Le président: C'est formidable. Je vous remercie.

Le comité se réunira demain à 9 heures.