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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 4 novembre 1997

• 0904

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.)): La séance est ouverte. Le Comité permanent des finances entend des témoignages dans le cadre de ses consultations prébudgétaires.

Ce matin, nous accueillons les représentants de l'Association canadienne de l'immeuble, Pierre Beauchamp, directeur général; Gordon Taylor, directeur; et Gregory Klump, économiste principal. Soyez les bienvenus.

Les représentants de Héritage Canada sont Brian Anthony, directeur exécutif, et Doug Franklin, directeur des relations gouvernementales. Je vous souhaite la bienvenue, messieurs.

Vous aurez d'abord cinq minutes pour faire des remarques liminaires. Lorsque quatre minutes se seront écoulées, je vous indiquerai qu'il vous reste une minute pour terminer votre exposé, ce que vous ferez, j'espère. Nous passerons ensuite au témoin suivant. Puis les députés vous poseront des questions.

Nous commençons. Monsieur Beauchamp, je crois que c'est vous qui prendrez la parole.

[Français]

M. Pierre J. Beauchamp (directeur général, Association canadienne de l'immeuble): J'aimerais profiter de cette occasion pour vous présenter notre plus récent document de recherche. Nous avons déjà échangé nos suggestions avec nos collègues de la Heritage Canada Foundation.

• 0905

[Traduction]

Madame la présidente, nous représentons des groupes différents, mais je crois que la discussion de ce matin sera néanmoins intéressante et utile pour vous.

L'Association canadienne de l'immeuble représente environ 70 000 membres travaillant dans tous les domaines du secteur de l'immeuble, la vente, le courtage, l'aménagement, l'évaluation et la gestion.

Parce que cela a rapport avec un des principaux points que je soulèverai, j'aimerais attirer votre attention sur notre division commerciale. C'est le Conseil du placement commercial et industriel, qui compte environ 4 000 membres de toutes les régions du Canada et qui dispense des services spécialisés à nos membres qui pratiquent dans les domaines du placement et de l'immobilier commercial et industriel.

Je suis accompagné de Gordon Taylor, qui a été président du Conseil du PCI en 1997, et de Gregory Klump, que vous avez déjà présenté, notre économiste principal.

Madame la présidente, je tenterai de répondre de la façon la plus complète possible à votre demande du 23 octobre et aborderai les différents sujets qui intéressent plus particulièrement le ministre des Finances.

D'abord, nous félicitons le ministre du succès de sa politique financière. En 1984, déjà, notre association préconisait le genre de stratégie amorcée par M. Martin en 1994. À maintes reprises, le ministre a souligné les avantages de taux d'intérêt bas pour les propriétaires. Nous estimons que le rôle fondamental du gouvernement fédéral dans le secteur du logement est de mettre en place des conditions économiques favorables à des faibles taux d'intérêt.

Madame la présidente, nous attribuons au ministre le mérite d'avoir pris les mesures qui s'imposaient. Toutefois, nous ne nous préoccupons pas que du déficit, mais aussi de la dette croissante. Nous encourageons donc le ministre à s'attaquer systématiquement à la dette d'année en année. Tant que la dette n'aura pas été réduite, on ne pourra se permettre d'importantes augmentations des dépenses. Le temps est plutôt venu de prendre des mesures en vue d'accroître la confiance des consommateurs et la solidité de l'économie.

Voilà maintenant trois ans, madame la présidente, que nous faisons valoir que les consommateurs canadiens devraient avoir le droit de payer leur hypothèque par anticipation au prix d'une pénalité juste. Comme vous le savez, l'an dernier, le gouvernement a décidé de ne pas modifier la Loi sur l'intérêt comme nous l'avions proposé. Plutôt, on élabore actuellement un règlement qui, croit-on, permettra de réaliser cet objectif autrement, c'est-à-dire par voie réglementaire.

On compte exiger du prêteur qu'il indique clairement si l'hypothèque peut être remboursée avant l'échéance et, si cela est possible, ce qu'il en coûtera. Nous réclamons plusieurs choses, madame la présidente: premièrement, cette indication doit figurer dans le document hypothécaire même, et non pas dans les documents de promotion; deuxièmement, cette indication devrait être claire et rédigée en termes simples; et, troisièmement, la méthode de calcul du coût doit être suffisamment claire pour que les consommateurs la comprennent. À notre avis, une formule complexe serait inutile.

Avec tout cela, la situation actuelle s'améliorerait grandement; nos membres nous indiquent que, en ce moment, la confusion et l'incertitude règnent chez les consommateurs. Une telle mesure ne coûterait rien au gouvernement, mais contribuerait grandement à rehausser la confiance des consommateurs, qui, bien sûr, est le fondement d'un marché de l'immobilier solide.

Madame la présidente, j'ai eu l'occasion de participer à vos audiences avec le Conseil de l'immobilier de Toronto le 21 octobre, à Toronto. L'exposé du conseil mettait l'accent sur nos préoccupations communes concernant la prestation aux aînés. Aujourd'hui, j'attirerai seulement votre attention sur nos inquiétudes au sujet des REER et de la prestation aux aînés, inquiétudes qui sont expliquées en détail dans notre mémoire.

Nous préconisons l'indexation des cotisations aux REER ainsi que la fin des modifications quasi annuelles des règles sur les REER. Nous craignons que la prestation aux aînés ne soit très injuste pour les contribuables qui ont épargné de l'argent en prévision de leur retraite. Cette prestation sera entièrement récupérée à un niveau de revenu beaucoup plus bas que ce n'est le cas actuellement dans le cadre du régime de la sécurité de la vieillesse. Compte tenu de cette mesure et de l'imposition de tous les autres revenus, bon nombre de contribuables seront doublement désavantagés.

Nous encourageons et appuyons l'idée du gouvernement de tenir des audiences publiques pour permettre à tous les groupes intéressés de faire connaître leur point de vue. Comme vous le savez, nous nous préoccupons surtout du sort des Canadiens dont le revenu est de 26 000 $ et 50 000 $; lorsque je parle de revenu de retraite, je tiens compte de tous les revenus.

Notre mémoire décrit les avantages économiques et sociaux du maintien du Régime d'accession à la propriété comme véhicule permanent de financement résidentiel. Je vous toucherai maintenant quelques mots sur notre nouvelle proposition, qui se fonde sur les principes de ce régime.

[Français]

Vous nous avez demandé de parler des changements au régime fiscal qui permettraient au gouvernement de réaliser ses priorités. Nous croyons qu'il n'y a pas de solution magique.

• 0910

On peut par contre prendre plusieurs mesures progressives afin de stimuler la croissance économique. La proposition qu'on va vous faire dans un moment est un exemple de cette situation.

[Traduction]

Essentiellement, le régime d'accession à la propriété a établi les principes de l'investissement limité de REER dans l'immobilier.

Aujourd'hui, nous vous demandons d'appuyer une nouvelle option qui permettrait aux Canadiens d'investir des fonds provenant de leurs REER dans des petits projets commerciaux et résidentiels. Notre proposition entraînerait une forte augmentation des investissements dans ce secteur et, du coup, la création d'emplois et d'autres retombées économiques. Nous estimons que les règles actuelles sont trop restrictives. Elles ne tiennent pas compte de la capacité de croissance et de création d'emplois de l'immobilier.

Nous avons distribué ce matin une feuille où figurent cinq dessins qui illustrent bien comment fonctionnerait notre proposition. Je vous renvoie à cette feuille.

Le premier tableau montre que des millions de Canadiens cotisent à leurs REER et créent ainsi un bassin de 200 milliards de dollars en immobilisations.

Au deuxième tableau, nous proposons que les détenteurs de REER ou les sociétés d'investissement dans l'immobilier puissent emprunter de leurs REER pour investir dans l'immobilier de location résidentielle ou dans l'immobilier commercial. Le taux d'intérêt du prêt serait fixe, peut-être équivalent au taux d'une hypothèque ordinaire de cinq ans.

Au tableau numéro 3, on voit qu'un formulaire serait exigé; on y indiquerait la valeur marchande de l'immeuble et les sources et le montant de financement, lequel, soit dit en passant, ne peut dépasser 75 p. 100 de la valeur marchande.

Comme le tableau numéro 4 l'indique, le titre et l'hypothèque de l'immeuble seraient définis par le particulier ou la société créée pour investir dans cet immeuble.

Au tableau numéro 5, on voit que le prêt devrait être remboursé au REER sur une période ne dépassant pas 20 ans et, pour respecter les règles actuelles, au plus tard l'année où le détenteur du REER aura 69 ans. Les fonds devraient alors être transférés dans un FERR, ou des impôts devront être versés.

Notre proposition prévoit différentes mesures de protection, madame la présidente, afin de garantir que le REER, qui doit servir de revenu de retraite, n'est pas mis en danger.

[Français]

La présente proposition vise à réduire la discrimination que l'on retrouve dans le présent régime fiscal à l'égard de l'immobilier. Elle mettrait le placement dans l'immobilier sur le même pied que d'autres placements déjà admissibles, qui ont un niveau de risque et de liquidité comparable.

[Traduction]

Surtout, les détenteurs de REER auraient davantage de possibilités d'investissement de leurs fonds au Canada; ainsi, ils pourraient contribuer à la création d'emplois et à la croissance de l'économie au Canada.

Merci beaucoup. Nous sommes maintenant disposés à répondre à vos questions.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Nous entendrons d'abord l'exposé de l'autre groupe. J'espère que les témoins suivants s'en tiendront aux cinq minutes qui leur sont accordées.

Merci beaucoup de vos remarques, monsieur Beauchamp.

Monsieur Anthony.

[Français]

M. Brian Anthony (directeur exécutif, Heritage Canada Foundation): Merci, madame la présidente.

[Traduction]

Je vais tenter de m'en tenir à cinq minutes précises.

Peut-être devrais-je vous présenter brièvement Héritage Canada. Cette fondation a été créée il y a 25 ans par le gouvernement du Canada; c'est une fondation de charité non gouvernementale et à but non lucratif. Comme c'est une fondation, elle jouit de l'autonomie financière et politique. Le ministre qui à l'époque a créé Héritage Canada est aujourd'hui le premier ministre du Canada.

Héritage Canada est dirigée par un conseil d'administration comptant 12 personnes, représentant chacune une province ou un territoire, élues par les membres de la fondation.

Au nom de la fondation, je remercie le comité permanent de nous avoir invités à participer à ses consultations prébudgétaires.

L'an dernier, à la même occasion, nous avons été heureux de constater que le Comité permanent des finances appuyait les questions que nous avions soulevées au nom de tous les Canadiens qui veulent préserver leur patrimoine.

Dans le dernier budget fédéral, le ministre des Finances a cru bon de mettre en oeuvre une de nos recommandations importantes qui avait joui de l'appui de votre comité, à savoir la modification du règlement pertinent de façon à permettre un allégement fiscal sur les gains en capital dans le cas de dons de biens amortissables, y compris les immeubles à valeur patrimoniale, à un organisme de bienfaisance enregistré. Nous applaudissons à cette initiative et vous remercions encore une fois de votre appui.

Toutefois, nous croyons que le gouvernement fédéral pourrait faire plus. Comme nous l'avons dit l'an dernier, nous estimons que, à tout le moins, le gouvernement fédéral devrait éliminer la disposition sur la perte terminale de la Loi de l'impôt sur le revenu qui encourage et récompense la démolition de vieux immeubles. Nous suivons cette question de nouveau dans l'espoir que le ministre des Finances accédera à notre demande.

Le comité nous a demandé quelles hypothèses économiques, y compris les facteurs de prudence, devraient servir de base à la planification budgétaire pour 1998 et 1999.

En réponse à cette question, je dirais que, si on se fie aux déclarations du ministre des Finances, le gouvernement fédéral semble se diriger rapidement vers un budget équilibré. Cela devrait avoir un effet positif sur l'économie.

• 0915

Nous croyons aussi que le secteur privé devrait être disposé à faire de nouveaux investissements au Canada si le gouvernement fédéral continue à prendre les mesures nécessaires pour créer un climat propice. Nous présumons néanmoins que le chômage restera à un niveau trop élevé. Aujourd'hui, nous voudrions aborder cette question de notre point de vue.

Le budget de 1997 prévoit un allégement fiscal sur les gains en capital dans le cas de dons de biens amortissables, ce qui est bien, mais il faut encore s'attaquer à un problème fondamental, à savoir le traitement fiscal, dans la Loi de l'impôt sur le revenu, des biens productifs.

Il est clair que ce sont les gouvernements provinciaux qui ont compétence en matière de biens à valeur patrimoniale privés, mais le gouvernement fédéral peut agir par le biais de la Loi de l'impôt sur le revenu et, par conséquent, peut exercer une influence considérable sur la politique fiscale relative à ces biens. Au Canada, il y a environ 66 000 immeubles reconnus comme ayant une valeur patrimoniale, dont environ 13 000 produisent des revenus et sont donc assujettis à l'impôt.

En réponse à la deuxième question, sur les nouveaux investissements stratégiques et les modifications qu'il faudrait apporter au régime fiscal pour permettre au gouvernement de réaliser ses priorités, Héritage Canada offre une réponse qui profiterait à tous les Canadiens: modifier la Loi de l'impôt sur le revenu de façon à encourager les propriétaires d'immeubles patrimoniaux à restaurer leurs immeubles et ainsi créer des emplois.

Nous faisons valoir depuis de nombreuses années que le gouvernement fédéral devrait reconnaître comme dépense courante le coût du maintien du caractère patrimonial des immeubles reconnus comme tels. Nous croyons qu'une forte croissance des activités de restauration d'immeubles encouragerait les jeunes à acquérir et à mettre en pratique les compétences en demande, ce qui améliorerait grandement la situation des régions urbaines et rurales au Canada. Nous vous proposons le plan d'un projet idéal de fédéralisme coopératif, dans le cadre duquel vous pourriez travailler de concert avec les provinces pour encourager le secteur privé à investir dans un domaine dont on sait qu'il est à forte densité de main-d'oeuvre. Soit dit en passant, et je l'ai déjà mentionné dans le passé à votre comité, la restauration de vieux immeubles crée deux fois plus d'emplois que la construction d'immeubles et nécessite une formation plus poussée et de plus grandes compétences.

Notre plan est simple. Un des objectifs cruciaux de ce plan est de faire modifier la Loi de l'impôt sur le revenu de sorte qu'on y reconnaisse la dynamique de la restauration du caractère original des biens patrimoniaux. Si la situation des propriétaires de tels immeubles était plus prévisible, l'activité économique serait plus soutenue et—et cela répond à votre troisième question—on créerait une vaste gamme de perspectives d'emploi.

Vous avez plus précisément demandé comment le gouvernement peut aider les Canadiens à acquérir les connaissances et les aptitudes nécessaires pour s'épanouir dans une économie fondée sur le savoir, et comment le gouvernement peut promouvoir l'application des connaissances dans toute l'économie. Notre réponse à cette question est aussi simple.

Au cours des trente dernières années—depuis notre centenaire glorieux, en 1967—les Canadiens en savent de plus en plus sur leur histoire et leur patrimoine, qu'ils apprécient aussi bien mieux. On a exploité cette fierté des Canadiens et étudié nos immeubles à valeur patrimoniale. En collaboration avec les provinces et territoires, le gouvernement du Canada a créé une énorme base de données répertoriant plus de 200 000 de nos premiers bâtiments, l'inventaire des bâtiments historiques du Canada. Pendant des années, ce dépôt précieux de l'identité canadienne a été sous- utilisé. Grâce à cette initiative et à d'autres, le gouvernement du Canada a déjà investi dans la création d'un ensemble de connaissances. Le temps est maintenant venu de mettre à profit ces connaissances pour le bien de tous les Canadiens.

Soyons fiers de nos collectivités—et de notre identité canadienne—comme jamais auparavant et chérissons et préservons ces immeubles patrimoniaux. Nous avons des raisons de croire que tous les provinces et territoires sont disposés à collaborer avec le gouvernement fédéral et à adopter des normes de restauration patrimoniale qui seraient justes et raisonnables.

Je devrais peut-être vous mentionner que nous avons récemment, à la mi-octobre, tenu une conférence nationale sur ces questions. Des professionnels du patrimoine de toutes les régions du Canada, d'un océan à l'autre, du secteur privé et des trois paliers de gouvernement, ont assisté à cette conférence. Nous vous ferons parvenir les actes de cette conférence ainsi que les résultats d'un sondage que nous avons mené.

J'ajouterai que cette conférence a confirmé notre mandat, à savoir que nous devons exercer des pressions pour qu'on apporte des changements dans ce domaine. Ce mandat nous a été donné non seulement par les organisations et ministères du Patrimoine des paliers provincial et fédéral, mais aussi par les maires des plus importantes municipalités de tout le pays. Je serais heureux de vous communiquer de la correspondance et des documents d'information à ce sujet.

Mesdames et messieurs les membres du Comité permanent des finances, nous vous avons décrit brièvement notre plan. Nous vous enverrons sous peu une lettre détaillée et d'autres documents y donnant suite. En terminant, je vous encourage à collaborer avec tous les intéressés dans la mise en valeur de notre riche passé pour consolider notre économie et assurer notre avenir. Nous estimons que la préservation du passé est un investissement qui rapporte autant au niveau social qu'au niveau économique, qui rapporte aujourd'hui et qui rapportera dans l'avenir.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Anthony.

Nous passons maintenant aux questions; et j'espère que chacun s'en tiendra à ses cinq minutes.

[Français]

Monsieur Ritz, cinq minutes, s'il vous plaît.

[Traduction]

M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Réf.): Merci, madame la présidente.

Merci, messieurs, de vos exposés.

J'ai une brève question à poser au représentant de l'Association canadienne de l'immeuble. On permet déjà l'utilisation des REER pour l'achat d'une maison. Ceux qui achètent une maison pour la première fois peuvent emprunter des fonds de leur REER. Nous avons entendu un témoin à Winnipeg, je crois, qui a proposé de permettre de tels emprunts pour les grandes rénovations.

• 0920

À votre avis, est-ce que cela serait possible, ou est-ce que ce témoin rêve en couleurs?

M. Pierre Beauchamp: Nous n'avons pas traité d'investissements à grande échelle. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, nous parlons plutôt de petits projets, et ce, pour une raison bien précise.

Je demanderais à M. Taylor, le président du Conseil du PCI, de vous en toucher quelques mots.

M. Gordon Taylor (directeur, Association canadienne de l'immeuble): À l'heure actuelle, les petits investisseurs peuvent investir dans le marché boursier—qui, comme nous l'avons vu récemment, peut être imprévisible—ou dans des CPG ou d'autres genres d'investissement qui rapportent des intérêts.

Nous pensons que c'est une véritable anomalie, le fait qu'on ne les autorise pas à construire ou à acheter des immeubles résidentiels de six ou douze appartements, des immeubles qu'ils peuvent voir de leurs propres yeux, dont le revenu est assuré, qui leur donne une certaine mesure de contrôle. À cause de cela, beaucoup de REER ont été canalisés vers les marchés boursiers, au détriment de l'immobilier commercial.

D'une façon générale, la récession dans le secteur de l'immobilier commercial dure maintenant depuis plus de sept ans. On commence tout juste à en sortir. Nous considérons qu'une telle mesure créerait de nouveaux emplois, et serait une source de taxes et de croissance pour l'ensemble du pays.

M. Gerry Ritz: Je suis tout à fait d'accord avec ce que vous dites. Ayant travaillé dans le secteur de la construction, je comprends aisément que cela créerait beaucoup d'emplois dans le secteur.

Mais ma question, et j'ai dû mal m'exprimer, portait sur les gens qui ont un revenu moyen ou faible, dont monsieur parlait tout à l'heure. Ces gens-là disposent de fonds limités, et ils doivent choisir entre investir dans un REER ou rénover leur maison. Supposons qu'une personne a besoin d'un nouveau toit, de refaire le revêtement extérieur, etc. Elle ne peut pas faire les deux à la fois.

Tout comme on peut utiliser les cotisations au REER comme versement initial sur une nouvelle maison, y a-t-il moyen de faire de genre de chose pour effectuer des rénovations? Est-ce que c'est une situation envisageable? Y verriez-vous un inconvénient? Autrement dit, on pourrait utiliser un REER pour emprunter avec le REER comme garantie, exactement comme cela se fait pour le versement initial sur l'achat d'une maison.

M. Pierre Beauchamp: Il est dangereux d'étendre le système à toutes sortes d'autres domaines, car on s'écarte de la raison d'être des REER, qui sont censés assurer un revenu de retraite. Dans sa grande sagesse, le gouvernement a jugé bon de faire une exception uniquement dans le cas des gens qui achètent une première maison. En ce qui concerne les rénovations ou l'un des nombreux systèmes qui ont été suggérés, je ne sais pas si cela peut se justifier. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous n'avons pas cherché à déterminer si cette option présenterait un énorme avantage. Nous n'avons pas vu non plus la proposition de Winnipeg.

Ce que nous voudrions, c'est qu'on applique aux investissements commerciaux les mêmes règles et principes fondamentaux qu'aux programmes d'accession à la propriété. En fait, avec notre proposition, on rendrait les règles plus sévères. Comme je l'ai dit dans mon exposé, nous voudrions qu'on limite à 75 p. 100 la somme qui peut être empruntée, c'est-à-dire que le particulier ou la société en cause devraient avoir un avoir substantiel pour commencer, ce qui en même temps limiterait les risques pour l'avenir.

Je ne peux donc pas répondre à votre question spécifiquement, car nous n'avons pas étudié cette possibilité. Il est possible qu'elle ait du mérite; c'est peut-être une option pour l'avenir.

M. Gerry Ritz: Merci.

[Français]

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Desrochers, vous n'avez pas de questions? Donc, monsieur Jones.

[Traduction]

Pas de questions? Monsieur Szabo, je vous en prie.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je vous remercie pour vos exposés.

Monsieur Beauchamp, j'aimerais parler de la prestations aux aînés. C'est un sujet auquel vous vous êtes beaucoup intéressés, et dans votre mémoire je vois que vous vous associez à la position d'autres organismes. J'aimerais vous demander un peu d'information.

À l'heure actuelle, la sécurité de la vieillesse est un revenu imposable; par contre, la prestation aux aînés ne le serait pas. Dans ces conditions, pensez-vous que la limite ou le seuil qui déclenche la disposition de récupération devrait être abaissé, puisque ce revenu ne serait plus imposable comme il l'était jadis?

• 0925

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Beauchamp.

M. Pierre Beauchamp: Nous avons déterminé qu'en fin de compte le taux d'imposition avec la prestation aux aînés pour les gens qui ont un revenu de retraite de l'ordre de 26 000 $ à 50 000 $ augmente énormément parce que la disposition de récupération intervient très rapidement en comparaison du programme actuel. C'est un élément qui nous inquiète. Nous reconnaissons avec le gouvernement que...

M. Paul Szabo: J'ai posé une question très simple. Peut-être devrions-nous essayer de... Nous discuterons de tout cela plus tard, mais lorsqu'une disposition de récupération s'applique à partir d'une certaine limite, lorsque d'une part cela est imposable et d'autre part non imposable, ne pensez-vous pas qu'il faudrait garder le même seuil, la même limite, ou encore l'abaisser?

M. Pierre Beauchamp: Ma réponse, et j'aborde toujours la question sous le même angle, c'est que, d'après nos analyses, l'important, c'est le résultat final, c'est-à-dire ce qui se produit après application de tous les impôts et dispositions de récupération. Nous nous sommes aperçus que le revenu total des personnes seules et des couples qui ont des revenus se situant entre 26 000 $ et 50 000 $ diminuait dans tous les cas.

C'est une préoccupation. Dans certains cas, le taux d'imposition marginal peut augmenter de 50 p. 100 à 75 p. 100. L'important, c'est donc le résultat final.

M. Paul Szabo: La raison pour laquelle les taux d'imposition effectifs sont si élevés avec votre calcul, c'est que vous considérez chaque dollar récupéré comme un dollar d'imposition, et, par conséquent, une personne âgée qui touche 100 000 $ par année et qui voit toute sa prestation aux aînés récupérée... Avec ce calcul, vous tenez pour acquis que le taux d'imposition du revenu non imposable sera de 100 p. 100.

M. Pierre Beauchamp: Non, non, pas 100 p. 100. Nous ne voyons pas les choses de cette façon-là. Nous nous contentons de regarder...

M. Paul Szabo: Mais quand on cherche à déterminer la moyenne?

M. Pierre Beauchamp: ... le rapport qui existe entre la SV et une éventuelle prestation aux aînés. En fin de compte, c'est ce qui reste qui est important; c'est aussi simple que cela.

Donc, pour répondre à votre question, effectivement, nous faisons une transposition, et nous inscrivons l'impôt comme étant la somme effective récupérée. En effet, si on prend l'exemple des 18 000 $ pour un couple, et si après récupération il n'en reste que 5 000 $ ou 6000 $, ou encore 2 000 $, ou rien du tout, c'est de l'argent dont le couple ne disposera pas. C'est aussi simple que cela.

M. Paul Szabo: Puisque au niveau fédéral le taux d'imposition maximum est de 29 p. 100, sans parler du taux provincial, disons quÂen tout le maximum d'impôt payable, quels que soient les revenus, est de 50 p. 100. Si la prestation aux aînés devenait imposable, et si on augmentait la somme pour compenser le fait que cela devient imposable, en faisant le même calcul que vous avez fait, quel serait le taux d'imposition maximum de la prestation aux aînés?

M. Pierre Beauchamp: Je dois dire que je ne peux pas répondre à cette question, car il faudrait que je...

M. Paul Szabo: Ce serait 50 p. 100.

M. Pierre Beauchamp: C'est exact, mais il faudrait que je considère...

M. Paul Szabo: Par conséquent, cette idée que le taux d'imposition effectif est de 50 p. 100 à 75 p. 100, c'est une illusion, une déformation des données... le fait que ce soit non imposable.

M. Pierre Beauchamp: Je me permets de vous contredire. Ce n'est certainement pas une illusion pour une personne âgée qui réfléchit à sa situation en l'an 2005 et qui s'aperçoit que son revenu total pour l'année sera diminué de 6 000 $.

M. Paul Szabo: Mais vous reconnaissez que si la prestation aux aînés devenait imposable et si, en même temps, on l'augmentait pour compenser cette imposition...

M. Pierre Beauchamp: Si le résultat final change, je suis d'accord avec vous.

M. Paul Szabo: ... dans ce cas, le taux d'imposition maximum pour n'importe qui sur n'importe quelle autre source de revenu serait de l'ordre de 50 p. 100; cela ne pourrait pas aller plus haut.

M. Pierre Beauchamp: Oui, je suis d'accord avec vous.

M. Paul Szabo: Madame la présidente, j'ai une autre question à poser aux autres témoins.

• 0930

Les représentants d'Héritage Canada m'ont intrigué lorsqu'ils ont recommandé que la disposition pour perte finale ne s'applique pas aux biens du patrimoine qui sont désignés. C'est la première fois que je pense à cela; je vais donc poser une question assez naïve. Puisque la perte finale est liée à la rapidité à laquelle un bien est amorti, ce qui dépend entièrement du propriétaire, il peut utiliser au maximum la déduction pour amortissement, ou encore avoir d'autres raisons de ne pouvoir l'utiliser, ou encore préférer ne pas le faire de crainte de perdre la possibilité de reporter la perte, ou quelque chose de ce genre.

Compte tenu de cela, ne pourrait-on pas imputer une perte finale artificielle aux biens du patrimoine dans le but de rehausser la valeur du don et, par conséquent, de tirer un plus grand profit des dispositions généreuses relatives aux cessions de biens aux oeuvres de charité?

M. Doug Franklin (directeur, Relations gouvernementales, Héritage Canada): S'il s'agit de donner un bien du patrimoine qui est source de revenu à une oeuvre de charité enregistrée, le problème pourrait sans doute se poser. Il s'agit là bien sûr d'une utilisation plus générale de la disposition sur la perte finale qui permet à un propriétaire de biens du patrimoine de profiter d'une énorme défalcation lors de la démolition d'un bien à désignation patrimoniale. À l'heure actuelle, les gens n'y comprennent plus rien, puisque l'identification ou la désignation de ces biens sont effectuées avec le plus grand soin. Les gens ne comprennent pas que la loi de l'impôt puisse, en partant d'un autre angle, permettre la radiation rapide de ces biens, puisqu'il semble qu'un gouvernement accorde de l'importance à ces immeubles alors qu'un autre, par le truchement de la loi sur l'impôt, favorise leur élimination. C'est surtout cela qui nous inquiète.

Mais pour revenir à votre question, cela pourrait être une façon inusitée de voir la chose.

M. Paul Szabo: Que pensez-vous de la résolution 21, qui porte sur la cession de dettes privées et de valeurs mobilières par les entreprises privées?

M. Brian Anthony: Je dois avouer que je ne connais pas du tout la résolution 21. J'en suis désolé.

M. Paul Szabo: D'accord.

M. Brian Anthony: Permettez-moi de faire rapidement une observation en réponse à cette question. Nous savons que la disposition sur la perte finale a été un peu édulcorée avec le temps et que les effets qu'elle a eus sur le stock d'immeubles du patrimoine n'avaient rien d'intentionnel. D'après nos collègues du ministère des Finances, cette disposition n'est plus aussi menaçante que par le passé, mais elle constitue encore une anomalie du fait de son existence. C'est une fausse note dans la politique fédérale. Comme Douglas l'a dit, nous avons d'une part un organisme fédéral qui fait des recherches sur les biens du patrimoine et leur accorde une désignation particulière et, d'autre part, un instrument qui permet au ministère des Finances d'encourager et de récompenser la destruction de ces mêmes biens. Ce que nous réclamons, c'est que le gouvernement fédéral fasse le ménage de sa politique.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Avant que je laisse la parole à M. Ritz, j'aimerais avoir une précision. Il s'agit bien d'immeubles désignés biens du patrimoine par le gouvernement fédéral—ou le problème se pose-t-il parce que c'est le gouvernement provincial ou la municipalité qui accorde la désignation aux immeubles?

M. Brian Anthony: Les deux sont vrais. Compte tenu de ce qu'il s'agit d'une compétence partagée, la désignation des immeubles peut être faite et par le gouvernement fédéral et par les gouvernements des provinces. Le processus est fort semblable et l'enjeu est identique. Si j'ai parlé des immeubles désignés par le gouvernement fédéral, c'est tout simplement pour montrer qu'il y a là une anomalie que nous aimerions voir corrigée. Mais cela touche également les autres ordres de gouvernement.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Les immeubles qui sont désignés par un autre organisme sont-ils enregistrés chez vous ou au gouvernement fédéral de façon à ce que l'on puisse facilement déterminer lesquels ne peuvent être admissibles à une perte finale?

M. Doug Franklin: Oui. En fait, le gouvernement fédéral a fait des progrès dans ce domaine. Il y a cinq ans environ, on a créé un registre du patrimoine canadien en collaboration avec toutes les provinces, de façon à avoir une liste finale. Comme nous l'avons dit dans notre mémoire, voilà près de 30 ans que le gouvernement fédéral a créé l'Inventaire des bâtiments historiques du Canada, en prévision d'un tel effort concerté entre les provinces, puis les municipalités et le gouvernement fédéral.

• 0935

Mais la tendance, au cours des dernières années, a été de protéger un nombre toujours plus grand de biens, y compris des secteurs entiers de biens du patrimoine. Nous croyons donc qu'il est essentiel qu'il y ait une concordance dans la politique si l'on veut que les Canadiens profitent de ce stock de biens du patrimoine.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci.

Il vaudrait peut-être mieux régler la question de savoir s'il s'agit ou non d'un site historique avant de le démolir et de défalquer la perte.

Monsieur Ritz.

M. Gerry Ritz: Merci, madame la présidente.

Ma question s'adresse aux représentants d'Héritage Canada. Vous avez dit dans votre exposé que la restauration des sites historiques est une entreprise à long terme. Ce sont des travaux de construction très spécialisés. D'après vous, pourrait-on en profiter pour augmenter l'emploi chez les jeunes, entre autres, et chez la main-d'oeuvre non spécialisée?

Il s'agit de travaux hautement spécialisés. Cela présente un degré de difficulté supplémentaire, si l'on veut. Même lorsqu'un immeuble est démoli, il faut essayer de tout sauver de façon à pouvoir remettre tous les éléments en place. Comment peut-on mettre en rapport ce type d'emploi et la formation ou les compétences qui sont nécessaires? Incombe-t-il aux constructeurs chargés des travaux de choisir un travailleur non spécialisé et de le former, ou existe-t-il des programmes qui pourraient être ajustés en fonction de ces emplois?

M. Brian Anthony: Merci beaucoup de votre question, madame la présidente.

Je suis heureux que vous l'ayez posée, puisqu'il existe de nombreux programmes et possibilités de formation, tant officiels qu'officieux, pour permettre aux gens qui travaillent dans le domaine de la construction d'acquérir ou de perfectionner ces compétences.

En voici un exemple. Le campus Perth du Collège Algonquin offre un programme de formation spécialisée en restauration et en entretien des vieux immeubles. On y enseigne aux étudiants les anciennes méthodes de construction et les méthodes de restauration. Dans le domaine de la maçonnerie, par exemple, on leur enseigne quelle sorte de mortier utiliser, comment l'appliquer, etc.

Il existe donc des cours de formation. Nous publions chaque année un annuaire du patrimoine; cette année, nous y avons ajouté un chapitre sur les cours de formation au patrimoine, au niveau postsecondaire. Nous serons heureux de vous en envoyer un exemplaire.

Ce que nous disons, en fait, c'est que, compte tenu de l'existence de ces cours de formation et de l'intérêt que manifestent bien des jeunes à acquérir des compétences plus spécialisées, il y a là une occasion de leur créer des emplois si l'on met en place un traitement fiscal approprié à l'égard des coûts de restauration. Nous croyons qu'un tel traitement favoriserait grandement l'investissement dans la restauration des anciens immeubles et permettrait donc de créer de très nombreuses possibilités d'emploi.

Il y a d'ailleurs un précédent dans ce domaine en Nouvelle- Écosse. Avant l'harmonisation récente des taxes de vente, les coûts liés à la restauration des immeubles désignés biens du patrimoine étaient exonérés des taxes de vente. Il en est de même dans le nouveau régime harmonisé. La Nouvelle-Écosse a démontré l'efficacité d'une telle mesure, qui encourage la restauration et l'entretien des vieux immeubles tout en créant des possibilités d'emploi et de formation. Nous estimons que c'est un modèle qui pourrait servir à un groupe d'initiatives nationales fédérales- provinciales.

Doug, vous voulez ajouter quelque chose?

M. Doug Franklin: Oui. Un bref commentaire, madame la présidente.

Nous avons maintenant de nouveaux renseignements à ce sujet. Nous avons fait une étude sur les besoins en formation dans ce domaine, en fonction du chômage chez les jeunes. Nous avons étudié les modèles appliqués dans d'autres pays et nous pourrons vous transmettre ces données. Notre étude nous a permis de déterminer qu'environ 90 p. 100 des enseignants, des gens qui travaillent dans la rénovation immobilière et la construction, les autorités provinciales et bien d'autres seraient d'accord avec cette idée dans tout le pays. Nous aimerions qu'il y ait une augmentation de l'activité dans ce domaine, entre autres, davantage de projets pilotes.

Comme Brian l'a dit, nombreux sont les établissements d'enseignement qui pourraient faire bien davantage à partir de leurs programmes actuels, qui sont à petite échelle. Ces établissements pourraient passer à la vitesse supérieure, si l'on veut, et vraiment contribuer, de façon concertée, à régler le problème du chômage chez les jeunes.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Ritz.

M. Gerry Ritz: C'est tout. Merci.

• 0940

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Avant de donner la parole à Mme Redman, j'ai une question supplémentaire à poser sur ce sujet, parce que j'allais moi-même poser cette question.

Lorsqu'on a restauré cet immeuble-ci, on a certes eu de la difficulté à trouver des maçons compétents et des travailleurs spécialisés. On a d'ailleurs dû aller chercher certains de ces travailleurs à l'étranger.

Avez-vous une banque de données dans laquelle on puisse trouver l'âge de ces travailleurs spécialisés dans le domaine de la restauration? Ces compétences sont-elles transmises à des travailleurs plus jeunes de façon à ce que nous puissions en conserver au Canada?

Les immeubles continueront d'exister, du moins l'espère-t-on, et en vieillissant ils auront besoin d'être réparés. Nous aurons un problème si tous les travailleurs actuels ont plus de 60 ans et qu'il n'y a pas de relève.

M. Brian Anthony: Doug pourra vous répondre de façon plus détaillée, peut-être, mais je crois que vous avez raison; nous assistons à une perte lente et constante de ce type de compétences. Elles sont perdues pour au moins une génération.

Il existe encore toutefois suffisamment de travailleurs spécialisés pour former les plus jeunes. Il y a d'ailleurs davantage de jeunes qui s'inscrivent dans des établissements postsecondaires comme le Collège Algonquin et comme le Holland College, à l'Île-du-Prince-Édouard, par exemple, où les immeubles du patrimoine présentent des caractéristiques particulières et où le climat... C'est un domaine qui intéresse beaucoup de gens. Je ne crois pas que ce soit une cause perdue.

Dans le cas dont vous parlez, l'étendue des travaux de restauration a peut-être exigé que l'on aille chercher des compétences à l'étranger, mais nous croyons que, à long terme, si nous continuons d'encourager nos établissements postsecondaires à fournir de la formation et si nous offrons des possibilités d'emploi à leurs diplômés, nous serons en mesure de conserver un groupe de gens possédant ces compétences fondamentales.

Au Québec, par exemple, le mouvement des économusées a permis d'enseigner des compétences qui étaient perdues dans bien des cas, comme par exemple dans la maçonnerie de la pierre et la quincaillerie de bâtiment. Les jeunes ont découvert une certaine fierté à participer à des projets dans lesquels de vieux immeubles en ruine étaient restaurés et retrouvaient leur splendeur initiale. Ces gens-là ont acquis des compétences en restauration des immeubles du patrimoine; cela a suscité un regain d'intérêt, et ce qui était à l'origine un petit projet de démonstration a suscité la création d'une industrie importante, même si elle est de petite taille. Ces projets ont permis à bien des jeunes de recevoir une formation en cours d'emploi.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): C'est à Halifax, je crois, qu'on a construit un phare dans un immeuble du patrimoine, dans le cadre de Service jeunesse.

M. Doug Franklin: Permettez-moi d'ajouter à la réponse de mon collègue. Nous apprécions le travail qui a été fait et qui continuera de se faire au cours des prochaines années. Il s'agit d'un exemple magnifique de restauration, et nous souhaitons bonne chance au gouvernement dans sa réalisation.

J'ai quelques brèves remarques à faire à ce sujet. En fait, il s'agit d'un des principaux sites historiques au Canada, qui présente des problèmes particuliers, etc. Par exemple, très peu d'immeubles ont une toiture de cuivre, même si je me dois d'ajouter que de nombreuses églises, dans les Maritimes et au Québec, sont maintenant restaurées grâce à ces techniques retrouvées.

Permettez-moi d'aborder maintenant la question de l'échelle des travaux. Nous avons découvert, d'après notre propre expérience dans des projets de démonstration, que la restauration ordinaire d'une façade de magasin, par exemple, d'une vieille façade de magasin dans une localité canadienne, ne coûte qu'environ de 8 000 $ à 10 000 $. Les compétences nécessaires sont très rudimentaires, mais c'est néanmoins du travail spécialisé. Cela signifie que les travailleurs doivent apprendre ce vocabulaire. Les jeunes qui apprennent le métier doivent apprendre à utiliser de tels matériaux, etc. C'est un travail assez spécialisé, mais qui intéresse un grand nombre de gens à l'heure actuelle.

Vous avez raison, malheureusement un grand nombre de travailleurs compétents et bien formés arrivent à l'âge de la retraite. Mais depuis plusieurs années le gouvernement fédéral, par le truchement de Travaux publics, a encouragé la création d'un régime d'apprentissage. Diverses techniques ont été utilisées.

Par exemple, nos voisins des États-Unis ont lancé un projet appelé Youth Build, dans le cadre duquel on offre à des jeunes qui n'ont pas terminé leurs études des cours de formation en matière de conservation en plus des cours qui leur manquent pour terminer leurs études secondaires ou collégiales. Ce projet a remporté un vif succès. Il existe plusieurs modèles dont on peut s'inspirer.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci.

Madame Redman, pour cinq minutes.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci. Ma question s'adresse aux représentants d'Héritage Canada.

Vous avez parlé de modifications à apporter à la Loi de l'impôt sur le revenu. Ai-je bien entendu, dans votre exposé, que vous nous fournirez davantage de détails plus tard? Je me demande quelles modifications vous préconisez.

• 0945

Également, vous avez mentionné en passant que certains biens du patrimoine sont gérés par des organismes de charité ou des organismes à but non lucratif.

Je représente la ville de Kitchener. Il y a dans cette ville le St. Jerome's College, que nous luttons pour conserver. L'un des projets proposés prévoit la restauration de l'immeuble et sa transformation en théâtre du patrimoine—il s'agit en fait de désignation interne—et j'aimerais savoir comment un tel projet pourrait s'intégrer à votre proposition.

Parmi les autres propositions faites pour sauver cet immeuble, on a parlé de créer des locaux de résidence et de travail pour des artistes, ce qui a peu de chance de se réaliser. Je me demande si, dans votre étude à ce sujet, vous avez tenu compte de tels immeubles.

M. Brian Anthony: Permettez-moi de répondre le premier à votre question.

Les deux changements que nous aimerions voir apporter dans le prochain budget portent sur la disposition relative à la perte finale. Nous aimerions que cette disposition soit éliminée. Nos collègues du ministère des Finances disent que cette disposition n'est plus appliquée très souvent, mais si c'est le cas, éliminons-la entièrement. L'autre modification, bien sûr, c'est le traitement fiscal des coûts de restauration des immeubles du patrimoine.

Nous avons tenu d'excellentes discussions avec le ministère des Finances et Revenu Canada au sujet de cette disposition et nous croyons qu'il sera possible d'en arriver prochainement à une solution satisfaisante. Toutefois, il est important que nous puissions continuer d'avoir l'appui de votre comité, puisque cela nous aide à continuer les discussions.

Pour ce qui est de la deuxième question, Doug, vous pourriez peut-être y répondre de façon plus détaillée. Je dirai toutefois que notre raison d'être, c'est de desservir le secteur du patrimoine, et dans des cas problématiques comme celui que vous avez mentionné, dites à ceux qui s'en occupent de communiquer avec nous, puisque nous pouvons les aider.

Doug, voulez-vous répondre au comité?

M. Doug Franklin: Je peux peut-être donner un exemple, que l'on constate de plus en plus souvent, celui du secteur privé, qui est prêt à investir de concert avec des organismes de charité enregistrés dans bon nombre de tels projets. Lorsque les circonstances sont favorables et qu'il est relativement possible de prévoir ce quÂil en est, le secteur privé souhaite de plus en plus participer aux activités de conservation des immeubles.

Quant aux oeuvres de charité, bien sûr, leurs revenus sont extrêmement limités, et il leur est difficile d'entreprendre de grands projets. Toutefois, il y a eu dans tout le pays des projets innovateurs qui ont permis, grâce à des partenariats, entre autres, de créer des centres communautaires et des centres des arts de la scène. Je me souviens de certains projets intéressants et difficiles portant sur de vieux arénas de hockey, par exemple, où l'on essaie de trouver des solutions très innovatrices à l'égard d'immeubles très complexes, de façon à attirer des investissements tout en favorisant l'utilisation par la collectivité.

Je ne sais pas si cela répond à votre question.

Mme Karen Redman: Oui. Dans votre exposé, vous avez parlé d'emplois et vous avez dit que la création de ces emplois était un effet secondaire de la restauration de ces immeubles du patrimoine. Je trouve que c'est très viable.

Je pense aussi m'être trompée en disant: St. Jerome's College. Je ne voudrais surtout pas que quelqu'un dans mon coin de pays ait une attaque d'apoplexie. Il s'agit en fait du St. Jerome's High School. Le collège, lui, est intact.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Le collège n'est pas si vieux que ça. D'ailleurs, j'avais mes doutes. C'était sûrement un autre endroit.

Monsieur Szabo, vous avez le temps de poser une question très courte.

M. Paul Szabo: Pour revenir sur la prestation aux aînés, ce sera une question épineuse pour nous. Vous le savez. Soixante- quinze pour cent des personnes âgées dont le revenu ne dépasse pas 40 000 $ recevront des prestations équivalentes ou supérieures à ce qui existe actuellement en vertu de ce qui est projeté pour elles, n'est-ce pas?

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Beauchamp.

M. Pierre Beauchamp: L'étude qui a été faite par un actuaire—et qui d'ailleurs est corroborée par beaucoup d'autres actuaires canadiens—montre qu'en 2001, lorsque entrerait en vigueur la prestation aux aînés, ceux dont le revenu de retraite varie entre 26 000 $ et 50 000 $ se trouveraient dans une situation plus difficile.

Le chiffre que vous avancez peut ou non concorder avec ce que nous disons, mais nous sommes fondés à croire que nos travaux de recherche sont fiables.

Avant de se perdre dans les chiffres, ce qui nous préoccupe et ce que nous essayons de montrer—et le gouvernement a déjà réagi aux nombreuses pressions exercées par les Canadiens—c'est qu'il faut tenir des audiences publiques pour permettre à divers groupes, comme le nôtre, d'exprimer clairement leurs idées. Je vous remercie d'ailleurs des audiences d'aujourd'hui.

• 0950

On ne sait trop vers où on s'en va. Ce qu'il faut retenir, c'est que les citoyens doivent en apprendre davantage sur le système de retraite au pays. Il comporte trois éléments, et il est très important que les citoyens puissent faire des projets à long terme dans chaque volet.

Je ne veux pas me livrer à une guerre de chiffres. Ce que l'on a entendu jusqu'ici justifie amplement la tenue d'audiences—ce qui va se faire, d'après ce que j'ai compris—pour permettre aux Canadiens de se faire entendre comme il se doit. Comme tous les regroupements au pays, nous tenons à ce que soit créé un régime qui permette aux gens de faire des projets à long terme au lieu de bricoler les REER une année, puis la prestation aux aînés l'année d'après, etc.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, messieurs.

Tout d'abord, je vais m'assurer que vos renseignements sur la prestation aux aînés soient incorporés à ces consultations. Il avait toujours été prévu d'en tenir. Ne pensez donc pas que ce seront vos exhortations d'aujourd'hui qui auront poussé le gouvernement à en organiser. Cela a toujours été dans nos intentions.

Deuxièmement, je vous signale qu'il n'y a pas eu de changements au REER tous les ans. En 1994, nous avons décidé de ne pas augmenter le plafond. Pour les FERR, nous avons ramené l'âge de 71 à 69 ans. Le seul autre changement est survenu en 1997, lorsque nous avons autorisé le report indéfini, ce qui a sans doute été une amélioration pour bien des gens.

Il faut donc être prudent lorsque l'on parle des changements apportés au régime des REER. Il n'y en a pas eu tous les ans, à moins que vous n'ayez des exemples dont je n'ai pas eu connaissance.

M. Pierre Beauchamp: Tout ce que je voulais dire, madame le président...

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Présidente.

M. Pierre Beauchamp: ... c'est que lorsque vous changez les règles, ne serait-ce qu'une fois, ou, dans le cas présent, deux ans de suite, il est beaucoup plus difficile pour les citoyens de faire des projets d'avenir.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci.

Monsieur Valeri, si vous voulez récapituler brièvement.

M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): J'ai une dernière chose à dire à propos de la prestation aux aînés. J'ai eu la chance de participer à des réunions préconsultation sur le sujet. Je pense comme vous que le grand message, que nous avons entendu cinq sur cinq, c'est qu'il faut un dialogue beaucoup plus complet sur le système de revenu de retraite et de ses trois piliers et pour se prononcer sur tout changement à l'avenir.

C'est effectivement le message qui nous est parvenu et c'est ce que compte faire le gouvernement lorsque débuteront les consultations sur la prestation aux aînés.

Je vous remercie de cette intervention.

M. Pierre Beauchamp: Je veux simplement confirmer ce que vous avez dit. Nous appartenons à la Retirement Income Coalition et nous sommes les porte-parole de plus d'un million de citoyens par la voix de cette association. Nous faisons précisément ce que vous suggérez. Nous sommes à la recherche d'un système qui comportera les trois volets pour que les citoyens puissent faire des projets d'avenir.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Je remercie les témoins. Nous discuterons de certains points avec les fonctionnaires du ministère pour qu'ils en calculent le coût. Il est certain qu'il faudra de notre part étudier plus attentivement ce que vous avez proposé à propos des investissements commerciaux.

Je vous remercie de votre témoignage. Bonne journée.

La séance est suspendue jusqu'à 10 h 30.

• 0954




• 1033

Le président: La séance est ouverte. Bienvenue à tous. Conformément à l'article 83.1 du Règlement, le Comité des finances tient des audiences publiques pour solliciter les vues des citoyens. Comme vous le savez, nous avons voyagé à travers le pays et entendu des avis très intéressants sur la façon dont devrait être réparti le dividende budgétaire. On nous a aussi dit beaucoup de choses à propos des priorités et des attentes des Canadiens en ce qui concerne le prochain budget.

Ce matin, nous avons le plaisir d'entendre des représentants de

[Français]

la Fédération des femmes du Québec,

[Traduction]

du Conseil national des femmes du Canada, de l'Association nationale des femmes et du droit, du Congrès canadien pour la promotion des études chez la femme, de

[Français]

l'Association des collaboratrices et partenaires en affaires et le Regroupement des centres de femmes du Québec,

[Traduction]

du Comité canadien d'action sur le statut de la femme et de l'Institut canadien de recherche sur la femme.

Comme vous le savez, vous disposez d'environ cinq minutes pour faire une déclaration, après quoi il y aura une séance de questions. Le premier exposé sera fait par Mme Françoise David et Mme Ruth Rose, de

[Français]

la Fédération des femmes du Québec. Bienvenue.

Mme Françoise David (présidente, Fédération des femmes du Québec): Est-il possible de changer l'ordre des présentations?

[Traduction]

Le président: Oui, c'est possible. Nous sommes très souples.

[Français]

Mme Françoise David: D'accord. On voudrait que Mme Grant-Cummings commence. Je parlerai en dernier.

[Traduction]

Le président: Oui. Allez-y.

• 1035

Mme Joan Grant-Cummings (présidente, Comité canadien d'action sur le statut de la femme): Bonjour. Nous sommes heureuses de comparaître à nouveau. Toutefois, c'est un plaisir teinté d'amertume parce que nous comparaissons ici depuis des années et nous avons le sentiment que les recommandations des groupes de femmes, surtout au cours des quatre dernières années, sont restées lettre morte ou n'ont pas trouvé d'écho dans le budget fédéral.

Nous voulons montrer comment les politiques économiques nationales et internationales ont eu des répercussions sur les Canadiennes et en particulier sur leurs droits socio-économiques. Voilà maintenant quatre ans que le gouvernement nous vante les charmes de la réduction du déficit. Aujourd'hui, il nous dit qu'il est temps d'en toucher le dividende. Mais les femmes, en particulier celles qui vivent dans la misère, les autochtones, les jeunes, les plus âgées, les femmes de couleur, les immigrantes et les réfugiées, les handicapées, n'ont pas vu la couleur de ces dividendes. À toutes les étapes de notre vie, nous sommes le groupe le plus touché par la pauvreté. Sur les 5,25 millions de pauvres au Canada, 70 p. 100 sont des femmes et des enfants.

À notre avis, l'engouement du gouvernement pour l'économie mondiale d'entreprises se caractérise par son sexisme. Cette économie n'a pas servi les femmes aussi bien que les entreprises ou les intérêts politiques du gouvernement. Je vais vous rappeler quelques chiffres et rappeler certaines des recommandations du CCA de cette année.

Le Canada se trouve actuellement au deuxième rang des pays de l'OCDE pour le nombre de femmes occupant des emplois peu rémunérés. Cela montre bien que les Canadiennes ne perçoivent pas le dividende de cette économie mondiale. C'est notamment la réduction du financement des programmes pour les femmes qui les empêche d'exercer leurs droits économiques, sociaux et politiques.

Dans le rapport de la Commission royale d'enquête sur la situation de la femme, il avait été déterminé quatre volets, auxquels le gouvernement a d'ailleurs souscrit, pour faire progresser l'égalité de la femme au Canada. Il fallait entre autres un ministère de la Condition féminine et un organisme de financement des programmes destinés aux femmes. Il nous fallait un groupe de pression national ainsi qu'un organisme indépendant de contrôle, d'évaluation et de recherche. C'était le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme, dont le gouvernement a réduit le budget quelques mois à peine avant la Conférence de Pékin. Aujourd'hui, nous ne disposons même pas d'un organisme chargé de mettre en oeuvre ou de contrôler la mise en oeuvre par le gouvernement de la plate-forme d'action de Pékin.

De plus, le travail non rémunéré des femmes, qui fait tourner l'économie mondiale et celle du Canada, est un phénomène de plus en plus important, que ce soit à la maison, dans la collectivité— puisque c'est nous qui compensons les compressions imposées aux programmes de santé, d'éducation et sociaux—sans parler du travail politique toujours non rémunéré. À cela s'ajoute le sous-emploi. Je veux dire par là que nous sommes surreprésentées dans la population active à temps partiel. C'est nous qui occupons 70,4 p. 100 de ces emplois, même si la majorité de celles qui travaillent à l'extérieur de la maison voudraient occuper un emploi à temps plein. Pour celles qui travaillent à temps plein, la rémunération ne tient pas la comparaison avec celle de nos homologues masculins. De plus, pour conserver notre emploi ou obtenir de l'avancement, nous devons travailler un pourcentage plus élevé d'heures non rémunérées. C'est un pas en arrière, et cela représente une érosion des droits économiques, sociaux et politiques des femmes.

Je vais maintenant vous formuler une recommandation. J'ai dit que l'attachement du gouvernement en faveur de l'égalité de la femme a été relégué au second plan ces quatre dernières années. Nous voulons qu'il revienne au premier plan. Pour ce qui est des dividendes que l'impayable ministre des Finances nous promet, nous voulons que le gouvernement consacre au moins 2 $ par femme ou enfant de sexe féminin au Canada. Nous voulons que le budget des programmes pour la femme passe de la somme pitoyable de 8,1 millions de dollars à 30 millions.

• 1040

Cela revient à environ 50c. par femme ou enfant de sexe féminin. C'est notre droit, c'est notre juste part.

Nous voulons aussi que le gouvernement investisse dans la démocratie et dans la participation des femmes à la vie politique, économique et sociale du pays. En plus des 30 millions, nous voulons voir la couleur du budget de prévention de la criminalité, les 30 millions dont la ministre de la Justice a parlé. Nous voulons que cela soit investi dans les services populaires pour les femmes de lutte contre la violence. C'est une stratégie de prévention du crime.

Pour aider à éliminer la pauvreté chez les femmes et les enfants, le gouvernement doit mettre en oeuvre les recommandations que le Conseil national du bien-être a formulées dans son rapport de 1995, à savoir qu'il dépense 16 milliards de dollars pour atténuer la pauvreté au pays. Ce n'est pas une somme extraordinaire du tout, quand on connaît les sommes que perçoit le gouvernement chaque année. C'est une question de priorité.

Pour ce qui est du respect et du soutien véritables pour les droits des peuples autochtones, en particulier les femmes autochtones, il faut que le ministère du Développement des ressources humaines s'engage à donner aux femmes autochtones la possibilité de participer aux programmes de formation et d'emploi actuels. Jusqu'à l'an dernier, à l'occasion de la marche nationale des femmes contre la pauvreté, cela a été l'une de nos principales revendications. Le gouvernement n'y a toujours pas donné suite, et les femmes autochtones n'ont toujours pas accès à cette source de financement, dont elles ont besoin pour se réaliser.

Au Canada, la stratégie économique, commerciale et d'investissement est carrément de nature sexiste. Pour s'engager dans la voie du non-sexisme, nous suggérons certaines choses. D'abord, de concert avec les ministres des Affaires étrangères et du Commerce international, le ministre des Finances devrait convoquer immédiatement une rencontre avec les associations nationales des femmes et d'autres groupes de femmes pour voir comment le commerce extérieur, les investissements et les politiques économiques du pays font sentir leurs effets sur les femmes, parce que nous sommes convaincues que ces effets se font sentir de façon non discriminatoire. Il faut procéder à une cartographie des sexes dans le domaine du commerce extérieur, de l'économie et des investissements pour que les femmes puissent participer vraiment à l'activité économique et jouissent des bienfaits de cet essor de l'économie au lieu de la porter à bout de bras par leur travail non rémunéré.

Enfin, lorsque le ministre des Finances préparera son budget, il y a une chose que nous ne voulons pas qu'il oublie. Il faut une solution directe, sérieuse et carrément axée sur les femmes. Si dans son budget il n'y a pas de poste pour le développement social, notamment pour faire progresser l'égalité de la femme, il doit comprendre que si son budget ne convient pas aux femmes, il ne convient pas à la population canadienne.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Nous entendrons maintenant Mme Philipps.

Mme Lisa Philipps (membre du comité directeur national, Association nationale des femmes et du droit): Je vous remercie beaucoup de nous avoir invitées ici aujourd'hui.

Pour commencer, je voudrais parler brièvement des hypothèses du budget, puisque c'est l'un des éléments sur lesquels le comité nous a invitées à nous pencher. Le message capital de notre exposé aujourd'hui, c'est que la priorité du gouvernement devrait dorénavant être l'élimination du déficit social au Canada. Par déficit social, j'entends la compression des dépenses sociales qui a contribué à créer une société plus inégale et plus polarisée, une plus grande pauvreté, une plus grande insécurité économique et davantage de misère et de conflits sociaux.

L'immense majorité des économistes qui ont analysé les deux dernières décennies ont conclu que les dépenses sociales n'étaient pas à l'origine du déficit budgétaire. Nous estimons que ces dépenses ont été beaucoup trop réduites dans la lutte contre le déficit budgétaire.

Ce déficit social a été considérablement alourdi par l'abolition du Régime d'assistance publique du Canada, notamment par la perte des moyens de pression dont disposait le gouvernement fédéral pour exiger des programmes sociaux de qualité dans les provinces et les territoires, ainsi que par la perte de fonds consacrés expressément aux services sociaux destinés aux femmes. Comme l'a expliqué Joan Grant-Cummings, ce sont les femmes qui subissent le contrecoup de la limitation des dépenses sociales et en particulier du déficit social.

• 1045

L'ANFD rappelle également que le déficit social est beaucoup plus menaçant pour la prospérité à court et à long terme et la qualité de vie de la population que les charges fiscales et la dette nationale. En effet, la dette nationale se résorbera progressivement d'elle-même par rapport à la taille de l'économie sans qu'il soit nécessaire de faire quoi que ce soit de particulier pour la réduire. De plus, l'ensemble de la fiscalité canadienne est encore peu onéreuse par rapport à ce qui existe dans les autres pays de l'OCDE et ne devrait pas être allégée tant que l'on n'aura pas résolu la crise de la sécurité sociale.

Enfin, pour ce qui est des hypothèses budgétaires, je rappelle que toutes les décisions relatives au budget devraient être évaluées en fonction des effets qu'elles auront sur les femmes. Nous espérons que le budget de 1998 comportera une analyse des répercussions sur les sexes conforme à la promesse faite par le gouvernement fédéral, au pays et à l'étranger, d'évaluer la politique économique du point de vue des femmes.

J'aimerais maintenant parler des investissements stratégiques que, je l'espère, le ministre des Finances fera dans son prochain budget.

Tout d'abord, l'Association de la femme et du droit aimerait que soit rétablis les fonds fédéraux affectés spécialement à l'aide sociale et à des services sociaux spécifiques qui sont essentiels à l'égalité, à la liberté et à la sécurité des femmes. Notre association s'inquiète plus particulièrement de la crise du financement de l'aide juridique en matière civile, c'est-à-dire de l'aide juridique pour les questions non pénales, notamment les questions de droit familial. Par ailleurs, il faudrait affecter des fonds fédéraux aux services de garde d'enfants, aux maisons d'hébergement et à d'autres services pour les femmes qui fuient la violence et les mauvais traitements, et aux services de relève ainsi qu'aux services auxiliaires pour les personnes handicapées et pour ceux qui s'occupent des personnes handicapées.

Contrairement au Régime d'assistance publique du Canada, le programme actuel de Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux ne prévoit absolument aucun fonds réservé à ces services particuliers, services qui sont essentiels à l'autonomie et à la sécurité des femmes.

Nous aimerions également que le gouvernement rétablisse son niveau global de dépenses en matière de santé, d'éducation et de services sociaux au moins au niveau d'avant le budget de 1995, et cela est à notre avis essentiel si le gouvernement fédéral veut reprendre l'influence qu'il a déjà eue sur les programmes nationaux et s'il veut s'assurer que ces programmes respectent des normes minimums décentes.

Notre association se joint également à la recommandation qui a été faite par plusieurs groupes aujourd'hui selon laquelle la Direction des programmes de promotion de la femme de Condition féminine Canada a grandement besoin de fonds additionnels.

Enfin, j'aimerais faire quelques observations au sujet du régime fiscal. En fait, comme j'enseigne le droit fiscal à la Osgoode Hall Law School, je suis tout particulièrement ravie d'avoir la chance d'aborder cette question avec votre comité.

Encore une fois, notre association est fermement convaincue qu'il ne convient pas de réduire le niveau global d'imposition au Canada à ce moment-ci, étant donné le besoin urgent d'injecter de nouveaux fonds dans les services sociaux. Notre association est d'avis que toute réduction d'impôt devrait viser à éliminer les éléments régressifs et inéquitables du régime fiscal actuel.

Pour en nommer quelques-uns, il y a notamment la nécessité d'indexer pleinement la prestation fiscale pour enfants et les crédits pour TPS afin de s'assurer que la valeur de ces prestations ne diminue pas année après année en raison de l'inflation. À l'heure actuelle, chaque année il y a des gens qui perdent ces prestations simplement à cause des effets de l'inflation.

Nous devons par ailleurs améliorer le niveau des prestations découlant de ces crédits d'impôt remboursables, et ce, non seulement pour les familles à faible revenu qui gagnent un revenu marchand. Le fait que l'on mette particulièrement l'accent sur l'élément supplément du revenu gagné de la prestation fiscale pour enfants nous inquiète beaucoup. Le problème, c'est qu'en augmentant cet élément de la prestation on exclut par exemple les femmes seules qui ont des enfants et qui comptent sur la pension alimentaire pour enfants ou sur les transferts du gouvernement pour joindre les deux bouts. Le titre de cette prestation et la façon dont elle est conçue sous-entendent d'une certaine façon que ces femmes ne participent pas à une activité productive.

Les économistes sont unanimes pour reconnaître que le travail non rémunéré des femmes qui dispensent des soins a une valeur économique, et il nous semble pervers d'accorder une prestation supplémentaire qui n'inclut pas ces femmes qui, en dispensant des soins, contribuent énormément à l'économie canadienne.

Enfin, les modifications à l'impôt sur le revenu devraient également viser à élargir l'assiette fiscale et à éliminer les dépenses fiscales qui profitent de façon disproportionnée à ceux qui ont un revenu élevé. Il y en a de nombreux exemples, mais celui qui nous préoccupe plus particulièrement est l'incitatif fiscal actuel pour l'épargne-retraite.

• 1050

Les incitatifs aux régimes de retraite privés sont actuellement conçus de telle sorte qu'ils sont surtout avantageux pour ceux qui gagnent un revenu élevé et profitent davantage aux hommes qu'aux femmes, et ce, parce que la possibilité d'épargne fiscale augmente à mesure qu'augmente le revenu marchand et à mesure qu'augmente le taux marginal d'imposition. C'est pour ces raisons que les femmes risquent moins de participer à un régime de pension agréé, un régime de pension d'employeur. Lorsqu'elles y participent, elles accumulent moins de prestations, car elles ont un salaire moins élevé que les hommes. Elles ont une capacité financière moindre pour contribuer à un REER privé, un régime enregistré d'épargne-retraite, elles reçoivent moins d'économies d'impôt pour chaque dollar versé lorsqu'elles contribuent à un régime parce qu'elles contribuent souvent à un taux marginal moins élevé, et elles profitent moins de l'accumulation de l'investissement provenant du revenu exonéré dans ces régimes.

Donc cette façon d'offrir une aide à la retraite au moyen du régime fiscal ne répond absolument pas aux besoins de sécurité des femmes à la retraite et ne règle pas non plus le niveau très élevé de pauvreté chez les femmes âgées par rapport aux hommes âgés.

Cela est particulièrement inéquitable si on considère qu'on accorde ces incitatifs fiscaux alors que des coupures, des réductions et des récupérations fiscales visent des programmes à plus grande échelle et des régimes d'épargne-retraite comme la SV, le SRG, le RPC, et j'inclurais également la nouvelle prestation aux aînés qui est proposée.

J'aimerais tout simplement conclure en soulignant que l'Association nationale des femmes et du droit s'oppose à toute coupure au taux d'imposition sur le revenu jusqu'à ce que le gouvernement ait éliminé certains des éléments régressifs du régime fiscal actuel.

Merci beaucoup.

Le président: Merci, madame Philipps.

Madame Webb, bienvenue.

Mme Pat Webb (présidente, Congrès canadien pour la promotion des études chez la femme): Bonjour, monsieur Bevilacqua.

Notre organisation est bien le Congrès canadien pour la promotion des études chez la femme. Je voulais faire cette petite correction aux fins du compte rendu.

Je vais répondre aux trois principales questions qui ont été posées par votre comité, en commençant par les hypothèses économiques, notamment les facteurs de prudence. À l'heure actuelle, il est plus important d'investir pour développer les capacités futures du Canada que de réduire notre dette nationale. Augmenter la richesse des salariés à revenu élevé tout en réduisant les ressources dont disposent les Canadiens plus pauvres, comme nous l'avons fait au cours des dernières années, risque d'être désastreux à long terme pour la stabilité de notre société. Cependant, si on augmente le pourcentage d'adultes économiquement indépendants au Canada, cela nous permettra de rétablir la qualité de notre filet de sécurité sociale, en augmentant les recettes fiscales et en diminuant les demandes de services. On pourra alors rembourser la dette extérieure. Le remboursement de la dette intérieure pourra suivre plus lentement. La réduction des impôts pourrait être parallèle à la réduction de la dette.

Après tout, la dette intérieure, c'est les obligations d'épargne du Canada que j'achète. Je ne pense pas que nous soyons pressés de rembourser cette dette; c'est un bon investissement pour les Canadiens. Je pense qu'on devrait s'attaquer surtout à la dette extérieure, de façon à ce que personne ne puisse nous dire que ce sont les banquiers de New York qui influencent notre politique.

Deuxièmement, quels sont les nouveaux investissements stratégiques et les changements appropriés au régime fiscal qui permettraient au gouvernement de respecter ses priorités? Le prochain budget devrait allouer un capital important pour améliorer la capacité des citoyens d'être économiquement indépendants à long terme—investir pour doter un bien plus grand pourcentage de la population canadien de la capacité de faire face à l'économie basée sur l'information. Cela ne veut pas dire que les gens informés seraient mieux informés; il faudrait plutôt augmenter le pourcentage de notre population qui a la capacité.

Une stratégie consisterait à cibler les segments de population qui pourraient contribuer le plus à augmenter le nombre total de citoyens économiquement indépendants. Il est clair que les enfants et les jeunes doivent être visés, mais le gouvernement fédéral, malgré ses annonces récentes concernant les conditions d'accès à l'éducation pour les jeunes, a pratiquement donné le contrôle aux provinces en cette matière.

L'analyse comparative entre les sexes révèle que la plupart des adultes qui ne sont pas économiquement indépendants et autosuffisants sont des femmes et que les pratiques sociales créent des obstacles uniques auxquels les hommes n'ont pas à faire face, comme vous l'ont dit Joan et Lisa. On commence lentement à s'attaquer à ces obstacles qui empêchent les femmes d'être autosuffisantes. La plupart des campagnes de sensibilisation et bon nombre des solutions de politique ont été proposées par des organismes de femmes bénévoles comme ceux qui sont ici aujourd'hui et de nombreux autres.

L'investissement dans l'aide financière aux groupes de femmes qui travaillent pour l'égalité est une force de levier importante. Les obstacles au développement économique des femmes sont notamment la violence, l'isolement, la responsabilité des soins familiaux, des pratiques d'enseignement inappropriées et la discrimination au travail. Si l'on réussit progressivement à abaisser ces obstacles, c'est grâce à l'action revendicatrice et à l'appui pratique des groupes de femmes comme ceux qui sont ici aujourd'hui. Un investissement relativement peu élevé de la part du gouvernement fédéral et des fondations permet de financer un nombre très considérable d'heures de bénévolat. En raison des décisions qui ont été prises à l'égard du budget national, l'investissement public dans le bénévolat a beaucoup diminué.

• 1055

Bien que ce ne soit pas toute la stratégie, naturellement, un investissement solide renouvelé dans de tels groupes permettrait de continuer à aider les femmes à être sur le même pied que les hommes pour ce qui est de l'autosuffisance. À cette fin, nous demandons à Condition féminine Canada d'allouer un montant spécifique de 2 $ pour chaque femme au Canada dans le cadre de son programme de promotion de la femme.

Quelle est la meilleure façon pour le gouvernement de s'assurer qu'il y aura une large gamme de possibilités d'emploi dans la nouvelle économie pour tous les Canadiens? C'est la troisième question. Il y a plus que suffisamment de travail utile et productif pour tout le monde au Canada, mais seulement une partie de ce travail est rémunérée. Les hommes et les femmes accomplissent du travail non rémunéré, mais en raison des valeurs culturelles du Canada, les femmes en font davantage que les hommes. Les soins dispensés aux enfants ou aux invalides deviennent souvent un obstacle à l'indépendance économique.

Nous constatons les résultats de l'hypothèse erronée selon laquelle le travail non rémunéré ne contribue pas à l'économie. Prenez par exemple les lacunes actuelles dans les domaines des soins de santé communautaires et de la garde des enfants. Les adultes se sont joints à la main-d'oeuvre rémunérée et ont réduit l'engagement non rémunéré à la famille et à la collectivité. Cela a créé un écart. Le travail non reconnu qui était accompli auparavant a laissé des écarts au niveau des services. C'est une façon de créer de l'emploi. Est-ce la façon que nous voulons?

Si un gouvernement veut faire la redistribution du revenu, qui est l'une des responsabilités de notre gouvernement, surtout grâce à la création d'emplois, il devra considérer que tout le travail dans les services et tout le travail productif constituent des emplois et s'assurer que ces emplois sont rémunérés. Mais aucun pays n'en a les moyens.

Il serait peut-être possible cependant d'investir des ressources pour financer le travail non rémunéré, le travail bénévole, afin qu'il soit distribué de façon plus équitable. Ce ne sera pas une tâche facile. Il vaut cependant la peine de relever un tel défi de politique. Si le Canada est en mesure d'offrir de telles ressources, les femmes pourront se libérer suffisamment de leur travail non rémunéré pour acquérir et maintenir une capacité de gagner leur vie dans l'économie basée sur l'information; ou elles pourront choisir de continuer à faire un travail non rémunéré et investir leurs ressources jusqu'à ce que leurs responsabilités de garde d'enfants ou autres responsabilités familiales prennent fin.

Le président: Merci, madame Webb.

Madame Saravanamuttoo.

Mme Helen Saravanamuttoo (vice-présidente, Conseil national des femmes du Canada): J'aimerais vous présenter Ruth Brown, qui vous présentera notre exposé sur les personnes âgées; étant donné que je devrai partir tôt, elle prendra la relève pour la dernière partie de notre exposé. Je m'en excuse.

Tout d'abord, j'aimerais dire qu'il est très intéressant de penser qu'hier soir dans l'Ottawa Citizen il y avait un article dans lequel on disait que l'économie est à la hausse tandis que les conditions socio-économiques se détériorent. Je pense que cela en dit très long. Lorsque nous avons examiné les hypothèses économiques qui ont cours actuellement dans la façon dont les médias voient les choses en général, et souvent dans la façon dont le gouvernement voit les choses, nous avons voulu nous aussi les remettre en question. L'indice des conditions socio-économiques diminue depuis les années 70. Les enfants ont été particulièrement touchés.

Notre première hypothèse est qu'un pays fort tient compte de l'équité. La disparité des revenus est très mauvaise pour l'économie, mais elle est encore pire pour les citoyens dans l'économie. En fait, une étude faite au Royaume-Uni révèle qu'à mesure que la disparité des revenus augmente toutes sortes de choses se produisent; il y a notamment une augmentation de la toxicomanie, de l'éclatement familial, des échecs scolaires et des problèmes de santé. Cette étude a été faite à un moment où les niveaux de pauvreté, l'étendue et l'ampleur de la pauvreté au Royaume-Uni, avaient en fait diminué.

Le fait que ce soit la disparité du revenu en dit très long. Je pense qu'il est très important que le ministère des Finances reconnaisse le rôle que les programmes sociaux ont joué pour niveler le revenu.

L'hypothèse suivante que nous aimerions présenter est celle selon laquelle une société équitable reconnaît le travail non rémunéré. Nous savons qu'il y avait des questions concernant les travaux domestiques lors du dernier recensement. On ne sait pas de quelle façon ces données seront intégrées à la politique gouvernementale, et on ne sait pas si le gouvernement est sérieux lorsqu'il parle de mettre en place de nouvelles mesures qui permettront de reconnaître officiellement le travail non rémunéré. Statistique Canada et Développement des ressources humaines Canada y travaillent à l'heure actuelle. Nous vous exhortons, en tant que Comité des finances, à examiner cela de plus près, et à demander comment nous mesurons la croissance. La croissance ne veut pas nécessairement dire une société solide, et une société solide garde le Canada uni.

• 1100

Une troisième hypothèse que nous aimerions présenter est celle selon laquelle les femmes ont besoin d'avoir une forte voix au chapitre afin de parer à l'impact de la concentration des médias, qui à son tour fait partie de la mondialisation. Les voix des femmes ne sont pas entendues. Leur point de vue n'est pas présenté. Il faut que nous puissions nous rencontrer pour ce faire, et nous avons besoin de fonds.

La dernière hypothèse que nous présentons concerne les critères de prudence—la mesure de l'inflation et les taux d'intérêt élevés. Il y a de nombreuses indications qui prouvent que le taux d'inflation est surestimé et que les taux d'intérêt sont inutilement élevés à cause de cela. Comme nous le savons, leur impact sur l'économie a été très grave. Ils ont précipité le Canada dans une récession au début des années 90 et l'y ont maintenu.

La situation financière s'est améliorée depuis que la Banque du Canada a abaissé ses taux d'intérêt, et c'est pourquoi nous vous encourageons vivement à examiner l'impact des taux d'intérêt élevés. Nous vous encourageons à travailler avec la Banque du Canada et le gouverneur Thiessen afin de maintenir le régime de taux d'intérêt plutôt bas—et je dis «plutôt bas», car les taux d'intérêt ne sont pas vraiment bas par rapport à ce qu'ils ont déjà été par le passé. Dans notre mémoire, qui n'est pas tout à fait terminé encore, nous vous donnerons une idée des chiffres réels. Les taux d'intérêt sont peu élevés par rapport aux années 80, mais ils ne sont pas bas dans l'ensemble—ce sont les taux d'intérêt réels.

En ce qui concerne les nouveaux investissements stratégiques et les changements au régime fiscal, nous aimerions tout d'abord recommander qu'en ce qui concerne les familles et les enfants, les familles devraient être la première priorité du gouvernement. On a mentionné un chiffre aujourd'hui, une contribution de 16 milliards de dollars pour sortir les enfants de la pauvreté. Nous applaudissons l'initiative de la prestation fiscale nationale pour enfants, mais nous sommes d'avis que c'est loin d'être suffisant. Il doit y avoir une façon de partager la prestation avec les familles qui reçoivent de l'aide sociale. Nous aimerions par ailleurs souligner que ce qui a été proposé dans le discours du Trône ne ferait en fait que remplacer ce qui a été perdu, puisque la prestation fiscale pour enfants actuelle et l'allocation familiale n'ont pas été pleinement indexées pour tenir compte de l'inflation.

Nous aimerions d'ailleurs souligner la contribution importante des programmes sociaux. Je l'ai déjà mentionné, mais nous croyons qu'il faut rétablir des paiements de transfert adéquats. Ils devraient être ciblés, et il devrait y avoir une certaine imputabilité en ce qui a trait aux provinces. Nous ne sommes pas d'accord avec une simple décentralisation et le fait de laisser les provinces décider comment elles dépenseront cet argent.

En ce qui concerne le régime fiscal, nous nous inquiétons au sujet des contribuables à revenu peu élevé. Les tranches d'imposition n'ont pas été indexées pour tenir compte de l'inflation, et nous croyons que cela devrait être fait immédiatement. Nous sommes d'avis que les prestations du gouvernement comme le crédit pour TPS et la prestation fiscale pour enfants, que j'ai déjà mentionnés, devraient être pleinement indexées. Nous voulons que le travail non rémunéré soit vraiment reconnu. Et nous appuyons pleinement l'idée que les femmes aient une voix plus forte au chapitre au sein du gouvernement. Le financement devrait être augmenté de façon considérable, et nous appuyons un financement de l'ordre de 2$ pour chaque femme au Canada. Par ailleurs, l'analyse comparative entre les sexes est une priorité.

• 1105

Nous avons présenté un exposé au groupe de travail sur les institutions financières. Il est vraiment important d'investir dans les collectivités locales plutôt que de s'occuper des investissements des grandes sociétés.

Toujours sur notre thème du travail non rémunéré, nous aimerions élaborer des initiatives de collaboration pour appuyer ceux qui dispensent des soins à leur famille.

J'aimerais maintenant demander à Ruth de vous parler brièvement de la situation des personnes âgées.

Mme Ruth Brown (présidente, Conseil national des femmes du Canada): Merci.

Nos membres sont fermement convaincus que les revenus des personnes âgées ont déjà subi de graves coupures et que les personnes âgées ont peut-être déjà apporté leur contribution pour combattre une augmentation future des déficits et ne devraient pas être touchées par d'autres coupures.

À l'heure actuelle, les personnes âgées qui ont à peine plus qu'un revenu moyen ont perdu le crédit en raison de l'âge et perdront le crédit pour revenu de pension. Le crédit pour intérêts gagnés a déjà été éliminé, et depuis de nombreuses années il y a récupération fiscale de la sécurité de la vieillesse pour les personnes âgées dont le revenu est moyen à élevé. Ces personnes n'ont aucun moyen de s'ajuster s'il y a d'autres coupures. Même les futures personnes âgées à revenu moyen devront faire face à des coupures par rapport à ce qu'elles avaient prévu et planifié relativement à la prestation aux aînés, et celles qui sont près de la retraite auront très peu de temps pour rajuster leurs projets de retraite.

Par ailleurs, nos membres estiment que le fait de prendre le revenu familial pour calculer l'admissibilité à des prestations aura un effet négatif pour de nombreuses personnes. Voilà environ 25 ans que nous avons adopté des résolutions sur la question: les impôts devraient être calculés à partir du revenu des particuliers, non pas des familles.

Merci.

Le président: Merci, madame Brown et madame Saravanamuttoo.

Madame David.

[Français]

Mme Françoise David: Bonjour. Je suis la présidente de la Fédération des femmes du Québec. Nous sommes quatre ici ce matin, mais nous avons un seul texte de présentation, que vous avez entre les mains, je pense.

Nous allons intervenir sur trois questions: la réforme de l'assurance-emploi, la crise de l'emploi et les politiques fédérales et, finalement, la question du financement du programme Promotion de la femme.

Sur la question de l'assurance-emploi, on voudrait dire en tout premier lieu qu'au moment où la réforme de l'assurance-emploi s'est effectuée, la Fédération des femmes du Québec était intervenue dans ce bâtiment pour dire que ce serait une réforme discriminatoire à l'égard des femmes. On voit maintenant que c'est effectivement le cas. Je vous invite à regarder attentivement les annexes à notre document, particulièrement l'annexe 1.

Vous constaterez que le nombre de femmes qui ont accès à des congés de maternité a diminué depuis l'implantation de la réforme et vous constaterez aussi que les travailleuses à temps partiel, dont les deux tiers sont des femmes, vivent une situation discriminatoire quant à l'accès aux prestations d'assurance-emploi par rapport aux travailleurs, étant donné que maintenant, on calcule les prestations sur le nombre d'heures effectuées et non plus sur le nombre de semaines.

Il y a donc au Canada beaucoup de travailleuses à temps partiel qui cotisent désormais à l'assurance-emploi dès la première heure et à qui il faudra un temps fou pour réussir un jour à toucher peut-être des prestations. Ces prestations seront de toute façon moins élevées que celles des hommes qui auront pourtant travaillé le même nombre d'heures, mais à temps plein.

Si vous voulez des explications là-dessus plus tard, on se fera un plaisir de vous les donner.

• 1110

Donc, cette réforme de l'assurance-emploi, qui est en fait un des principaux instruments de réduction du déficit du gouvernement fédéral—à mon avis, il ne devrait pas s'en réjouir—, est discriminatoire à l'égard des femmes et a déjà des effets concrets sur les conditions de vie des femmes.

Il faut donc revoir de fond en comble ce système, et nous demandons au gouvernement canadien de revenir à un système où l'accès aux prestations d'assurance-emploi est calculé en fonction du nombre de semaines travaillées, en tenant compte de chaque heure passée au travail.

On demande aussi au gouvernement canadien de rétablir à 60 p. 100 le taux de remplacement du salaire et de revenir à une norme de 10 à 14 semaines travaillées, selon le taux régional de chômage, pour avoir droit aux prestations.

Là-dessus, je cède la parole à Mme Irène Marais, qui est présidente de l'Association des collaboratrices et partenaires en affaires et qui va vous dire un mot sur la situation particulière des femmes collaboratrices de leur mari.

Mme Irène Marais (présidente, Association des collaboratrices et partenaires en affaires): À l'Association, cela nous inquiète énormément, parce que l'entreprise familiale au Canada est un joueur majeur dans l'économie canadienne. Dans deux millions d'entreprises familiales au Canada, il y a plus de un million de collaboratrices qui occupent des emplois non rémunérés. Pour les quelques-unes qui ont la possibilité d'être salariées dans l'entreprise, la partie discriminatoire de la loi fait que, dès qu'il y a un lien de parenté, elles sont automatiquement placées sur les tablettes et font face à un refus. C'est ainsi qu'elles sont traitées dans la loi et dans son application par les fonctionnaires.

Près de 90 p. 100 de toutes les femmes collaboratrices qui sont salariées abandonnent avant de faire appel. Elles ont 90 jours, mais le dossier est complexe et elles doivent toujours se battre. Il faut parfois 18 mois pour arriver à avoir un accord, et souvent les collaboratrices qui travaillent dans des entreprises, qu'il s'agisse d'entreprises agricoles ou de PME, en sont déjà à leur deuxième demande d'assurance-emploi avant qu'on procède à une analyse. Cela prend parfois 18 mois, et les quelques malheureuses qui vont en appel, soit 10 p. 100, gagnent leur cause à 99,9 p. 100. Celles qui ne vont pas en appel perdent tout.

Nous avons un cas très précis à vous citer. Une femme travaillait dans une entreprise de meubles dans l'Estrie. Elle avait cotisé pendant 12 ans, et on lui a refusé l'assurance-emploi. À l'assurance-emploi, on lui a dit: Cela ne vous dérange pas, de toute façon, puisqu'on vous rembourse les cotisations. Mais l'assurance-emploi n'a pas remboursé 12 ans de cotisations. Elle ne remboursent que deux ans de cotisations. Si la femme n'avait pas fait appel, elle aurait perdu tous ses droits.

Pour nous, c'est un dossier important. Plus tôt, Mme Helen a beaucoup parlé d'emplois non rémunérés qui ne sont pas reconnus. Dans les entreprises familiales, il y a près de un million de collaboratrices qui ne sont pas rémunérées et qui, pourtant, travaillent donc l'entreprise. Donc, on voudrait que soient modifiées la Loi sur l'assurance-emploi ainsi que son application pour tout ce qui touche les collaboratrices dans l'entreprise familiale, autant les enfants que les collaboratrices.

Mme Françoise David: Je continue sur le deuxième point, qui est la crise de l'emploi et les politiques fédérales. Je ne vous ferai pas de discours sur le haut taux de chômage au Québec et au Canada. Nous connaissons cette triste réalité. Nous savons tous et toutes que la pauvreté, dans l'ensemble des provinces, augmente au lieu de diminuer. Nous savons que la classe moyenne paie beaucoup d'impôts, beaucoup de taxes, et a le sentiment de ne plus recevoir les services publics auxquels elle s'attend. Nous savons aussi que les coupures fédérales dans les transferts aux provinces ont affecté énormément la quantité et la qualité des services sociaux et de santé, ainsi que le filet de sécurité sociale et l'éducation.

• 1115

Il faut aussi savoir que lorsqu'on fait des coupures importantes d'emplois dans les services publics, ce sont largement des femmes qui sont affectées, à la fois comme travailleuses et comme usagères de services et aussi parce que dans les familles, c'est aux femmes qu'on va demander de s'occuper des enfants, des personnes âgées, des personnes malades ou handicapées parce que l'État décide qu'il ne veut plus s'en occuper ou alors beaucoup moins.

Nous demandons donc au gouvernement canadien de restaurer les transferts aux provinces dans les domaines de la santé, de l'éducation postsecondaire et des services sociaux à un niveau qui permette d'assurer aux citoyennes et aux citoyens la qualité de services à laquelle ils et elles ont droit en plus de créer des emplois durables.

On demande au gouvernement de procéder à la réindexation du régime fiscal, de rétablir la valeur de l'exemption personnelle à 7 500 $, soit sa valeur en dollars constants de 1988, de remplacer la surtaxe par de nouveaux paliers d'impôts tels que 32 p. 100 pour les revenus dépassant 100 000 $ et 34 p. 100 pour les revenus dépassant 150 000 $, ce qui apporterait des revenus additionnels de 775 millions de dollars au gouvernement fédéral.

Enfin, on demande de réindexer la prestation pour enfants et le seuil à partir duquel on la récupère. Finalement, je passe la parole à Michèle Asselin, qui est coordonnatrice du Regroupement des centres de femmes du Québec, qui va vous dire un mot sur la question du programme Promotion de la femme.

Mme Michèle Asselin (coordonnatrice, Regroupement des centres de femmes du Québec): Bonjour. J'aimerais attirer votre attention sur un programme minuscule de huit millions de dollars qui rapporte à la société canadienne bien plus qu'il ne lui en coûte. Plus de 400 groupes de femmes à travers le Canada se partagent des miettes tout en accomplissant un travail exemplaire pour venir en aide à des femmes en difficultés, analyser leurs besoins et chercher des pistes de solutions, encourager les gouvernements à adopter des politiques qui répondent aux préoccupations spécifiques des femmes, sensibiliser les communautés aux injustices persistantes à leur égard et les soutenir dans leur démarche d'autonomie.

Mes consoeurs ont bien décrit la situation des femmes canadiennes. Vous êtes sûrement convaincus qu'il y a encore énormément de travail à faire pour l'égalité, la justice et l'équité pour les femmes. Ces groupes travaillent au coeur du quotidien des femmes. J'aimerais attirer votre attention sur un réseau, le nôtre, celui des centres de femmes au Québec. Ce sont 89 centres de femmes qui réussissent à transformer le profond sentiment d'injustice des femmes en action pour la promotion de la citoyenneté et de l'égalité des femmes.

Ce travail quotidien a besoin d'être soutenu financièrement pour se poursuivre. Des centres de femmes, il y en a de nombreux au Québec. Il y en a partout à travers le Canada. J'en connais quelques-uns, puisqu'il y a deux ou trois ans, nous avons essayé de former un réseau de centres à travers le Canada. Malheureusement, faute de financement, ce réseau n'est pas né. C'est très malheureux, parce qu'il m'apparaît important et même prioritaire d'appuyer le développement de tels réseaux à travers le Canada.

À notre avis, c'est inconcevable pour un gouvernement qui a signé la déclaration de Beijing. J'ai eu la chance d'être à Beijing et j'ai pu constater combien le gouvernement canadien était fier des efforts que nous avions accomplis au Canada pour l'égalité des femmes. Je sais que le gouvernement canadien en est fier. Alors, comment comprendre qu'il accorde si peu d'importance au soutien des groupes de femmes? Des coupures répétées ont largement amputé le programme Promotion de la femme, qui a pourtant fait ses preuves depuis de nombreuses années. Il y a des évaluations de ce programme, et les évaluations des retombées de ce programme ont toutes été positives.

Rappelons qu'au Québec seulement, le montant global accordé par le gouvernement au programme Promotion de la femme est passé de 2 034 274 $ en 1986-1987 à 1 316 700 $ en 1997-1998. La situation est sérieuse, d'autant plus que les nouveaux critères du programme Promotion de la femme permettront, dès 1998, à une quantité accrue de groupes d'avoir accès à du financement. Il faut donc de toute urgence lui redonner un budget qui lui permette de soutenir adéquatement l'énorme travail des groupes de femmes.

• 1120

Nous demandons au gouvernement canadien d'accorder au Programme promotion de la femme deux dollars par femme canadienne, c'est-à-dire 28 millions de dollars. Ce montant représente moins de 0,5 p. 100 du total des dépenses militaires au Canada. Les femmes veulent leur juste part, rien de moins. C'est une simple question d'égalité, d'équité et de justice.

Le président: Merci.

[Traduction]

Nous allons maintenant passer à Mme Lise Martin.

Mme Lise Martin (agente de recherche, Institut canadien de recherches sur les femmes): Non, je ne présente pas d'exposé.

Le président: Ah, très bien. Alors je suppose que nous allons passer à la période de questions et réponses. Nous allons commencer par M. Ritz.

M. Gerry Ritz: Merci, monsieur le président. Je n'ai que deux petites questions à poser à ces dames.

Je vous remercie de vos exposés. Vous avez fait un excellent travail pour faire passer votre message.

Je vais d'abord faire une observation générale et voir si quelqu'un voudrait y répondre. Constatez-vous une différence entre les sexes pour ce qui est du chômage chronique ou du sous-emploi chez les jeunes, selon le terme que vous préférez employer? En ce qui concerne la dette des jeunes diplômés d'écoles secondaires, y a-t-il plus de femmes que d'hommes qui sortent des écoles secondaires avec une dette? Y a-t-il une différence entre les sexes à cet égard?

Ensuite, je voudrais poser une question à Mme Webb. Au troisième point de votre exposé, vous parlez de réaffecter des ressources, etc. Songez-vous à un modèle qui existerait quelque part dans le monde et que nous devrions peut-être examiner, ou lancez-vous une toute nouvelle idée avec ce concept?

Merci.

Mme Joan Grant-Cummings: En ce qui concerne les jeunes femmes, c'est certainement le cas. Je ne sais pas si vous avez les mémoires ou les études de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants dans lesquels on souligne clairement que les jeunes femmes en particulier sont désavantagées dans la conjoncture économique actuelle pour ce qui est des coupures dans le domaine de l'éducation. Les jeunes femmes plus que les jeunes hommes choisissent d'abandonner leurs études ou prennent beaucoup plus de temps pour obtenir leur premier diplôme. Elles ne sont pas embauchées de préférence comme les jeunes hommes, et lorsqu'elles sont embauchées, naturellement c'est surtout dans des emplois moins rémunérés: des emplois dans des magasins, etc. Donc, bon nombre de jeunes femmes choisissent dans certains cas de ne pas poursuivre leurs études.

L'autre groupe de jeunes femmes qui sont encore plus désavantagées par les coupures dans le domaine de l'éducation, ce sont les jeunes mères seules. Nous savons que pour les jeunes gens sans attache, le taux de pauvreté est déjà de 83,1 p. 100, selon les dernières statistiques du Conseil national du bien-être. Pour les jeunes mères seules, ce pourcentage est également très élevé.

Nous assistons certainement à une érosion de la stabilité économique des jeunes femmes au Canada et de leur avancement pour ce qui est de l'éducation et de l'équité économique. Dans les années 60 et 70, le mouvement féministe a insisté sur le fait que l'éducation était l'un des moyens par lesquels les femmes pourraient avancer. Si dans notre génération nous voyons déjà des jeunes femmes choisir de ne pas poursuivre des études postsecondaires parce qu'elles n'en ont pas les moyens, il y a certainement quelque chose qui ne va pas.

Dans notre mémoire nous avons demandé au premier ministre, s'il veut réellement laisser un héritage aux générations futures, de mettre en oeuvre le programme du millénaire dès maintenant. D'ici à l'an 2000, nous aurons perdu des milliers de jeunes femmes qui ne seront pas en mesure d'entrer dans des établissements postsecondaires.

Le président: Madame Webb.

Mme Pat Webb: L'une des choses qui nous inquiètent au sujet des adolescents, c'est que leur taux d'abandon scolaire est très élevé. Cela est certainement une préoccupation tant pour les hommes que pour les femmes. À cet égard, il faut surtout travailler au niveau de l'éducation, qui est un domaine qui relève des provinces et des territoires. Je voulais tout simplement souligner que c'est une question qui ne passe pas inaperçue.

En réponse à l'autre question sur la réaffectation des ressources pour le travail non rémunéré, il y a un certain nombre d'initiatives auxquelles on songe à l'heure actuelle, mais il n'y a aucun effort de coordination, du moins pas à ma connaissance, à cet égard. Je parle ici de tout ce qui concerne les femmes au foyer et leur capacité de contribuer à un régime de pensions et de recevoir un revenu qui est leur, même si elles travaillent essentiellement pour leur mari, si elles s'occupent de leurs enfants—et ce genre de choses.

• 1125

Je pense qu'il faut un groupe de travail, et c'est pour cette raison que j'ai dit que cela devait être un défi au niveau de la politique. Cela demande beaucoup de travail. Nous serions certainement prêtes à participer à ce genre de discussions, mais ai-je une réponse? Non.

Mme Lisa Philipps: Je me demande si je peux ajouter quelque chose à cette réponse.

Le président: Nous allons d'abord donner la parole à Mme Saravanamuttoo, puis nous reviendrons à vous, madame Philipps.

Mme Helen Saravanamuttoo: Le fait que nous ne puissions mesurer le travail non rémunéré a des conséquences considérables. Par exemple, il y a des coupures dans les programmes sociaux pour ceux qui dispensent des soins à leur famille, et ces coupures passent inaperçues. Elles ne sont qu'une diminution dans le budget des gouvernements provinciaux, mais nous ne voyons pas de coût. Cela signifie que le travail non rémunéré n'est pas mesuré, et c'est un coût réel, non seulement en matière de revenu pour les familles, mais aussi sur le plan de la santé et de la santé mentale. Un certain nombre d'études faites par Santé Canada révèlent que la santé des dispensateurs de soins diminue considérablement. Je vous exhorte donc à examiner cette question.

J'aimerais par ailleurs appuyer M. Ritz lorsqu'il signale la question du chômage chez les jeunes et de l'enseignement postsecondaire. Dans notre organisme, nous ne sommes pas au courant de l'existence de différences entre les hommes et les femmes, mais cela ne veut pas dire qu'il n'y en a pas. Nous entendons des histoires horribles au sujet de la dette des jeunes lorsqu'ils sortent des écoles postsecondaires. Comme nous le savons, le chômage chez les jeunes est vraiment grave.

Le président: Merci.

Madame Philipps.

Mme Lisa Philipps: Merci. Je voulais tout simplement saisir cette occasion pour souligner que nous connaissons déjà deux façons très claires d'allouer davantage de ressources afin de reconnaître le travail non rémunéré des femmes.

L'une consiste tout simplement à financer le secteur social de façon adéquate, car c'est l'une des principales façons de transformer le travail non rémunéré des femmes qui dispensent des soins en travail rémunéré qui fait partie de l'économie officielle, c'est-à-dire en employant des femmes dans les secteurs des soins de santé, de l'enseignement et des services sociaux.

Une autre façon consiste tout simplement à s'assurer que les prestations du gouvernement sont versées aux dispensateurs de soins qui restent à la maison ainsi qu'à ceux qui ont un revenu marchand très peu élevé. Des programmes comme celui du supplément du revenu gagné ont encore une fois tendance à établir une discrimination contre ceux qui contribuent à l'économie en dispensant des soins, travail qui est non rémunéré.

Le président: Merci.

Madame St-Hilaire.

[Français]

Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Tout d'abord, je voudrais vous remercier d'avoir pris le temps de venir nous parler ce matin. Je pense que c'est intéressant pour nous tous.

Premièrement, je voudrais vous dire de continuer votre combat. Je pense que vous avez encore beaucoup de sensibilisation à faire. Je remercie Mme Marais pour ses renseignements sur les collaboratrices. C'était une donnée que je ne connaissais pas personnellement. Si elle a quelque chose à ajouter, je l'inviterais à le faire.

J'aurais une question plus particulière pour Mme David. Si les autres veulent répondre, il n'y a pas de problème. J'entends souvent dire qu'il y a trop de groupes de femmes et trop d'argent accordé aux femmes. J'aimerais que vous nous disiez ce que vous pensez par rapport à cela.

Mme Françoise David: Trop de groupes de femmes?

Mme Caroline St-Hilaire: Et trop d'argent accordé aux femmes. Vous n'êtes sûrement pas d'accord, mais je veux que vous me disiez pourquoi.

Mme Françoise David: Vous me les présenterez, ces gens-là. Sérieusement, il y a des milliers de groupes de femmes au Canada, et c'est tant mieux parce qu'il y a des milliers de problèmes.

On fait des réformes, comme celle de l'assurance-emploi, et des dizaines et des dizaines de groupes de femmes viennent dire au gouvernement canadien: Attention, vous êtes en train, peut-être sans vous en rendre compte, d'implanter une réforme qui est discriminatoire à l'égard des travailleuses. S'il n'y avait pas ces dizaines de groupes de femmes pour le dire, il n'y aurait personne. Il faut croire qu'il faudrait qu'il y ait encore plus de groupes pour le dire puisque le gouvernement a fait sa réforme quand même, sans tenir compte de ce qu'on a dit.

• 1130

Donc, non seulement il faudra renforcer nos groupes, mais il faudra aussi que nos groupes se fassent entendre un jour, peut-être autrement que dans ces chambres feutrées, calmes et polies où on essaie d'expliquer ce qui est pourtant évident.

Il est très triste que, deux ans après l'implantation de la réforme, on nous apporte la preuve que nous avions raison. Nous avons pris le temps de faire des analyses sérieuses. Nous ne sommes pas toujours contre les gouvernements. Nous essayons de les aider à examiner les projets de loi et les politiques du point de vue de leur impact sur les femmes. Donc, il va falloir renforcer nos groupes pour nous permettre d'aider davantage les gouvernements et pour que nous puissions former des réseaux de femmes dans l'ensemble du Canada.

Il faut aussi permettre aux groupes de femmes de continuer leur travail sur le terrain. Les groupes de femmes sont, dans beaucoup de cas, des groupes communautaires, c'est-à-dire des groupes qui dispensent des services indispensables à des centaines de milliers de femmes qui vivent des difficultés importantes, que ce soit au niveau de la violence, de la santé ou de la difficulté d'accéder au travail. Ils défendent aussi des femmes collaboratrices qui n'ont pas accès aux prestations du chômage, des femmes immigrantes, des mères monoparentales et des femmes autochtones. Il est extrêmement important qu'on puisse faire ce travail sur le terrain tous les jours.

Bien sûr, le jour où il y aura vraiment égalité entre les hommes et les femmes et où on pourra dire que l'ensemble des femmes canadiennes et de la population canadienne vivent dans un système vraiment juste et équitable, cela nous fera plaisir de changer d'emploi, mais ce n'est pas pour demain.

Le président suppléant (M. Paul Szabo): Merci, madame David.

Madame Irène Marais.

Mme Irène Marais: J'aimerais vous donner un renseignement supplémentaire sur l'Association des collaboratrices et partenaires.

Depuis 11 ans, je m'implique très fortement dans l'Association parce que l'entreprise familiale, c'est notre vie à nous, les femmes. Une étude faite par la Banque fédérale de développement révèle que 90 p. 100 de toutes les multinationales, jusqu'à la plus petite PME, sont familiales, que l'entreprise familiale génère 55 p. 100 du produit intérieur brut du Canada, qu'elle représente 50 p. 100 de tous les salaires payés au Canada et que l'entreprise familiale génère plus de 66 p. 100 de toute la création d'emplois.

Dans ce sens, en tant que représentante d'une association qui parle au nom des collaboratrices, je me sens frustrée politiquement quand je vois qu'il faut mettre sur pied une association féminine pour parler des réalités que vivent les collaboratrices dans les entreprises familiales, alors que l'association qui représente nos conjoints, puisque qu'elle est un joueur politique économique majeur au Canada, se trouve assise directement à côté de M. Jean Chrétien. En effet, monsieur est président de la FCEI, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

Si vous allez du côté de l'agriculture, vous avez la même chose. Au Québec, on a l'UPA. Cependant, ce sont des secteurs que nous ne voulons pas concurrencer en tant qu'organisme.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Paul Szabo): Madame Martin.

Mme Lise Martin: J'aimerais remercier la personne qui a dit qu'on avait l'impression qu'il y avait trop de groupements féminins et que les groupements féminins recevaient trop d'argent. Cela n'est certainement qu'une impression.

• 1135

Je ne sais pas si vous avez entendu, mais nous avons dit dans notre exposé que le programme de promotion de la femme versait 50 c. pour chaque femme et jeune fille au pays. Je me demande dans quelle mesure les députés diraient la même chose au sujet des groupes environnementaux ou des groupes sportifs. Avez-vous l'impression qu'il y a trop de groupes environnementaux ou de groupes sportifs et qu'ils reçoivent trop d'argent, et que c'est tout à fait une question de perception?

Mme Lisa Philipps: Puis-je moi aussi intervenir sur cette question du fait qu'il y a trop de groupements féminins, trop d'argent accordé à ces groupes? Je pense qu'il est évident qu'à l'heure actuelle on a tendance à plutôt dénigrer ou à ne pas aimer les organisations de lobbyisme politique en général, et certains ont caractérisé les groupements féminins comme des groupes d'intérêts spéciaux. Je tiens cependant à insister sur le fait que ces organismes politiques de base populaire sont essentiels si on veut que les femmes aient vraiment voix au chapitre dans la démocratie au Canada.

Il est très difficile pour des particuliers, surtout s'ils vivent dans des conditions où ils sont marginalisés sur le plan social ou économique, tout d'abord de déterminer les changements systémiques qui sont nécessaires et de les percevoir, puis de travailler de façon efficace pour les réaliser.

Les organismes féminins ont subi des coupures jusqu'à l'os. Ces coupures commencent vraiment à faire mal. Elles affectent réellement notre capacité de venir faire des exposés devant des comités législatifs et de réagir rapidement et efficacement aux nouvelles initiatives de réforme du droit, au développement judiciaire, etc.; je parle de mon propre organisme.

Toutes les organisations ont essayé d'élargir leur bassin, comme on nous a dit de le faire, mais il se trouve que les activités que nous entreprenons ne sont pas soutenues par le marché privé. C'est la raison pour laquelle l'État a commencé à subventionner les groupes de défense des droits des femmes. Ce financement public est nécessaire.

Le président: Madame Grant-Cummings.

Mme Joan Grant-Cummings: Je ne sais pas; si nous avons tant de groupes, je me demande pourquoi il a été si difficile pour les groupes féminins d'obtenir un entretien avec le premier ministre. Thomas d'Aquino, du CCCE, peut le voir n'importe quand. Nous sommes beaucoup plus nombreuses, mais il ne semble pas que cela nous donne un pouvoir politique quelconque.

Par exemple, dans quelques semaines, nous recevrons 17 pays du bassin du Pacifique et de l'Asie dans le cadre de l'APEC. Jusqu'ici, d'après ce que nous savons, le gouvernement canadien a dépensé au moins 50 millions de dollars pour faciliter la participation des entreprises et chefs d'État.

Nous tiendrons une conférence parallèle des femmes comme nous l'avons fait à Beijing, à Copenhague et au Caire. Nous avons demandé 57 000 $ pour faciliter la venue de ces femmes à Vancouver. Tout a été organisé par des bénévoles. Jusqu'ici, nous n'avons pas eu de réponse du gouvernement canadien à propos de l'aide que nous avons demandée.

Nous avons dit aux femmes que nous supposions que le gouvernement n'était pas favorable à la participation des femmes à l'APEC. Nous avons toutefois un droit démocratique de dire ce que nous pensons des politiques commerciales qui vont nous toucher.

D'après le dernier rapport des Nations Unies à ce sujet, les femmes apportent une contribution de 11 billions de dollars de travail domestique non rémunéré. Cela ne comprend pas le travail de sous-traitance pour les multinationales, l'agriculture, les secteurs non structurés. Il ne s'agit que du travail domestique. Cela ne couvre pas les activités de collecte de fonds que nous menons en Alberta et en Ontario pour acheter des manuels scolaires, des tables et des chaises pour nos écoles. Cela ne couvre pas tout cela. Cela ne couvre que ce que nous faisons à l'heure actuelle au foyer. J'ai donc beaucoup de mal à comprendre où se situe actuellement le pouvoir du CCA.

Beaucoup de députés nous considèrent dangereuses. Même nous adresser à un comité devient pénible. Les réactions des députés à ce que les groupes féminins ont à dire—et je le vois même ici aujourd'hui sur le visage de certains députés—indiquent qu'ils dénigrent les sujets que nous abordons. Ce sont les groupes féminins qui essaient de protéger les femmes contre leurs conjoints violents. D'après la commission de l'ONU sur la condition féminine, le Canada a régressé dans ses efforts visant à éliminer la violence contre les femmes.

• 1140

Pendant ce temps-là, nous arrêtons de financer et nous opérons des coupes sauvages dans les abris pour femmes, les foyers de transition, les centres de secours aux victimes de viol. Nous diminuons les centres de prévention et de santé communautaires réservés aux femmes dans tout le pays. Le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux a donné aux provinces le pouvoir de donner la priorité aux femmes, et c'est la raison pour laquelle dans le rapport de la Commission royale d'enquête sur la condition féminine ces députés très capables ont déclaré qu'il nous fallait financer la participation politique et démocratique des femmes à la vie canadienne. Que si l'on voulait faire quelque chose pour l'égalité des femmes, il fallait que nous puissions contrôler un tant soit peu notre vie.

Nous vivons dans un monde où 99 p. 100 de la planète appartient aux hommes et 1 p. 100 aux femmes. Dix p. 100 de l'économie mondiale sont contrôlés par des femmes alors que 90 p. 100 le sont par des hommes. Nous accomplissons 70 p. 100 du travail non rémunéré. Ce ne sont pas des chiffres inventés par le mouvement féministe. Les Nations Unies ont consacré les fonds nécessaires à la réalisation de ces études. Ce sont leurs chiffres, et on dit que la réalité est pire. Le Canada est membre de l'ONU. Nous acceptons ces chiffres.

Le mouvement féministe a également mis le Canada sur la scène internationale du point de vue genre et développement. Nous sommes à l'avant-garde de la théorie genre et développement. Pour cette conférence de l'APEC, les groupes féminins ont donné au gouvernement canadien un rôle d'expert en la matière.

Nous n'avons pas d'analyste des politiques au CCA. Ce rapport a été terminé à 10 heures hier soir. C'est la présidente du CCA qui a dû le rédiger. C'est tout.

L'égalité n'est donc pas quelque chose que nous sommes prêtes à abandonner. Nous continuerons à nous battre pour l'égalité, quelles que soient les difficultés que nous rencontrons, parce que nous savons que c'est la vie des femmes qui est en jeu. Ce n'est pas un slogan et ce n'est pas théorique pour nous. C'est la réalité que nous connaissons.

Les députés devraient se mettre quelquefois à la place de certaines de ces femmes de l'Est de Vancouver, du centre-ville de Toronto ou de Montréal—ou d'ailleurs—à Terre-Neuve, pour voir ce que représentent tous ces groupes féminins et cet énorme pouvoir caché que nous avons toutes. Mais, après tout, nous ne valons que 50c. la femme ou la petite fille au Canada.

Mme Ruth Brown: J'aimerais également dire quelques mots au sujet de l'abondance de ces groupes féminins.

Notre organisation est essentiellement composée de bénévoles. Aux quatre coins du pays, nous nous intéressons aux enjeux locaux et provinciaux. C'est certainement le genre de groupe qui fait de bons citoyens qui peuvent contribuer réellement à notre société. Mais comme nous avons un pays immense, la seule façon de coordonner et de mettre à profit les efforts de ces milliers de bénévoles, c'est d'avoir un petit bureau. Et voilà que celui-ci ne sera même plus financé. On se demande quelles sont les priorités.

Le président: Monsieur Jones.

M. Jim Jones (Markham, PC): J'ai apprécié tous vos exposés. Il est difficile de savoir quelle question poser.

Dans l'économie moderne, l'économie intelligente, pensez-vous qu'on peut espérer davantage d'égalité et surtout de possibilités économiques pour les femmes? Ou les conditions ne sont-elles pas encore réunies pour cela?

Je crois en effet que dans une société intelligente, l'intelligence ne présente pas de barrières. Peu importe la couleur, la religion, le sexe; tout le monde devra avoir les mêmes chances. Sinon, expliquez-moi pourquoi.

Mme Joan Grant-Cummings: Cela pourrait en fait nous prendre le reste de la journée.

Tout d'abord, c'est présumer quelque chose. C'est présumer l'égalité. À l'heure actuelle, sur le marché mondial, les économistes, notre gouvernement et d'autres autorités politiques s'entendent pour dire que les marchés régleront les problèmes et passeront outre au sexe, à la race, etc. Je crois qu'il est évident que ce n'est pas vrai.

M. Jim Jones: Je parle plutôt du passage à une économie dans laquelle on se sert de son cerveau et...

Mme Joan Grant-Cummings: Oui—et permettez-moi de vous dire que les femmes ne manquent pas d'intelligence.

M. Jim Jones: En effet.

Mme Joan Grant-Cummings: Toutefois, il y a des obstacles à l'égalité.

• 1145

Ce que nous essayons de dire, c'est que la construction de cette nouvelle économie ne repose pas sur une analyse de l'incidence des nouvelles données sur les femmes. Pour les architectes de l'égalité, quelle place occupons-nous? C'est ce que nous disons, et c'est la raison pour laquelle nous estimons...

M. Jim Jones: Parlons simplement de l'«économie intelligente».

Mme Joan Grant-Cummings: Non, on ne peut pas présumer que l'égalité y règne. On ne peut pas présumer que c'est cela le problème. C'est la raison pour laquelle dans le monde entier—non pas seulement au Canada—la pauvreté augmente, la rémunération des femmes baisse, le trafic des femmes et des filles augmente, etc.

Le libre-échange devait permettre aux femmes de rester dans leur pays et d'en tirer des dividendes. Pourquoi y a-t-il eu une augmentation de la migration des femmes recherchant dans d'autres pays une certaine sécurité économique? C'est le genre de discussion qui s'impose et que nous devons avoir avec le premier ministre, le ministre des Finances et Lloyd Axworthy, car nous estimons qu'on néglige certains éléments et que de ce fait cette économie intelligente défavorise déjà les femmes.

Le président: Il y a deux autres personnes qui voudraient intervenir: Mme Rose, puis Mme Philipps.

[Français]

Mme Ruth Rose (économiste, Fédération des femmes du Québec): Il y a quelques années, lorsque j'ai commencé à militer dans le mouvement féministe, on nous posait les mêmes questions. C'était vrai que les femmes avaient souvent moins de formation que les hommes.

Aujourd'hui, les femmes sont majoritaires dans les facultés de médecine, dans les facultés de droit et dans les facultés d'administration. Elles dépassent les hommes en termes d'obtention de baccalauréats, et bientôt ce sera la même chose pour la maîtrise et le doctorat. Les femmes ont fait leur effort pour se scolariser.

Au Québec, le ministère de l'Éducation a fait une étude. Il constate que deux ans après leur sortie de l'université, les femmes ont déjà un salaire inférieur de 10 p. 100 à celui des hommes exerçant la même profession, avec le même diplôme et le même niveau d'expérience. Cela, c'est au début de la carrière. Il y a encore de la discrimination contre les femmes et cela, aux niveaux les plus élevés.

Je veux bien qu'on entre dans la nouvelle économie technologique, mais il ne faut pas oublier qu'on a toujours besoin de travailleurs sociaux, d'infirmières, de gens qui font un métier traditionnel.

C'est un des éléments les plus importants de notre qualité de vie. C'est là que les femmes étaient concentrées majoritairement dans le passé et c'est là qu'elles sont toujours victimes de discrimination au niveau du salaire.

Il s'agit quand même de domaines qui demandent de la formation et de l'intelligence. Il ne faut pas, parce qu'on veut percer dans de nouveaux domaines, oublier ces domaines qu'il faut maintenir, qui sont essentiels à notre qualité de vie et qui ont toujours été sous-rémunérés. C'est là qu'on fait une revendication.

[Traduction]

Mme Lisa Philipps: Vous avez évidemment tout à fait raison. Il n'y a pas de raison pour que les femmes ne participent pas à part entière et de la même façon que les hommes à une économie fondée sur le savoir. Dans la plupart des cas, nos parents et nos enseignants nous ont assuré que nous nous engagions dans une société véritablement fondée sur le mérite et qu'aucun domaine n'était fermé aux femmes. Parlons cependant un instant de l'un des plus grands obstacles à la participation des femmes à la nouvelle économie, soit la pénurie de services de garde de qualité à prix abordable.

Cela me surprend que vos témoins n'aient pas beaucoup abordé cette question. Je crois honnêtement que les groupes de femmes en ont assez de réclamer de ce gouvernement un programme national de services de garde. Nous avons presque abandonné l'espoir qu'un tel programme soit jamais mis en oeuvre. Or, j'estime que la pénurie de services de garde de qualité demeure le plus important obstacle empêchant les femmes de participer au marché du travail ou de poursuivre des études. Il est tout simplement impossible aux femmes de s'intégrer à la nouvelle économie si elles s'occupent des soins aux enfants, un travail non rémunéré, et s'il n'existe pas de services de garde adéquats. Jusqu'à ce qu'on règle ce problème, il est irréaliste de s'attendre à ce que les femmes, aussi intelligentes soient—elles, participent à la nouvelle économie au même titre que les hommes.

Le président: Je vous remercie.

Monsieur Assad.

[Français]

M. Mark Assad (Gatineau, Lib.): J'écoutais les témoins de la Fédération des femmes du Québec et j'en discutais avec Mme Marais. J'aurais une question pour elle. Au cours des consultations, à l'automne 1994, votre Fédération avait présenté un mémoire, si je me souviens bien.

• 1150

Mme Françoise David: Sur la réforme de l'assurance-emploi.

M. Mark Assad: Oui, et je me souviens que vous l'aviez intitulé «Projet de société», je crois.

Mme Ruth Rose: J'en ai une copie ici.

M. Mark Assad: Vous en avez même une copie? La question que je voulais vous poser est celle-ci. Vous avez fait une présentation très claire pour les gens qui veulent savoir quelle sorte de travail vous faites ou comment vous défendez les droits des femmes. Comme vous, madame David, je dis que plus nombreuses vous êtes, mieux vous pourrez défendre les intérêts des femmes et combattre les anomalies dans notre société pour les femmes qui travaillent ou celles qui demeurent à la maison pour élever leurs enfants.

Je disais à Mme Marais qu'à mon bureau de circonscription, j'avais été saisi de beaucoup de cas de femmes qui avaient été collaboratrices de leur mari. Quand venait le temps de recevoir des prestations d'assurance-chômage, le drame commençait. Vous dites que 99 p. 100 de celles qui vont en appel ont gain de cause.

Mme Ruth Rose: Oui. C'est chez nous, cela.

M. Mark Assad: Je trouve ces femmes extraordinaires. Ici, au comité, on pourrait certainement faire une recommandation. Je pense qu'il y aurait moyen de corriger cette lacune avec la Fédération. Je ne pense pas qu'il faudrait des lois spéciales pour constater la réalité des choses.

Mme Françoise David: En fait, ce qui est un peu inconcevable, c'est que la loi permet aux femmes collaboratrices de leur mari ou dans l'entreprise familiale de cotiser. Elles payent durant plusieurs années des cotisations au régime d'assurance-emploi. Il est tout à fait illogique qu'au moment où elles perdent cet emploi, on leur refuse des prestations. C'est tout à fait inconséquent. Il y a une aberration dans l'application de la loi.

Vous avez raison. En fait, c'est l'association de Mme Marais qui lutte depuis bien des années sur cette question. Il faut lui donner le crédit à cet égard. Je pense que le gouvernement canadien pourrait régler très facilement cette question.

M. Mark Assad: Avec tous les changements qu'il y a eu dans les programmes sociaux à travers le pays, y a-t-il eu un recul en ce sens que les femmes qui vont sur le marché du travail ont plus de difficulté à obtenir de l'aide?

Mme Françoise David: La réponse est oui, et je pense qu'on ne le dira jamais assez. Chaque fois que le gouvernement fédéral diminue les montants qu'il accorde aux provinces, il y a évidemment un effet d'entraînement. Donc, au niveau de la province, on fait des coupes forcées dans la santé, dans l'éducation, dans l'aide sociale, dans le système de sécurité du revenu et dans les services sociaux, et toute la population en est affectée. Bien sûr, il n'y a pas que les femmes, mais nous sommes ici ce matin pour en parler. D'autres pourront vous parler d'autres problèmes. Mais c'est évident que cela touche les femmes.

Les femmes sont au coeur de toute la vie des familles. Si un enfant a des difficultés à l'école et qu'à cause des coupures, il n'y a presque plus de services de soutien au personnel enseignant—on manque de psychologues, de travailleuses sociales, d'éducatrices et d'animatrices dans l'école—, eh bien, cet enfant en difficulté se retrouve avec des difficultés plus importantes comme le décrochage scolaire, la délinquance, etc. C'est une conséquence directe de la coupure qui a commencé au fédéral et qui s'est ensuite traduite au niveau provincial par une coupure qui arrive ensuite sur le terrain.

Au niveau de la santé, c'est la même chose: on a des coupures, des coupures, des coupures. Donc, il y a des listes d'attente qui augmentent et cela fait un régime où les femmes sont encore pénalisées. L'égalité n'est pas réalisée dans les familles. Les femmes reçoivent rapidement les gens qui sortent de l'hôpital. Elles s'en occupent. Elles s'occupent des parents âgés tout en continuant de s'occuper, bien sûr, des enfants. Elles s'occupent de la famille élargie, et c'est un fardeau énorme pour elles. Qu'arrive-t-il? Il y a des femmes qui n'en peuvent plus et décident de travailler à temps partiel, de diminuer le nombre d'heures qu'elles passent au travail chaque semaine.

• 1155

Cela a une autre conséquence, soit la perte du pouvoir d'achat. Ces femmes n'accumulent pas le même montant pour leur régime de pension. Si elles deviennent prestataire de l'assurance-emploi, leurs prestations sont moins élevées. C'est comme cela qu'on se retrouve avec un nombre tout à fait disproportionné de femmes qui travaillent à temps partiel et qui ne l'ont pas choisi simplement pour le plaisir. Cela, c'est sans compter que, de nos jours, de nombreuses entreprises offrent seulement des postes à temps partiel. Cela, c'est toute une autre question. Quant aux coupures dans le filet de sécurité sociale, je pourrais vous faire une thèse là-dessus.

Oui, cela touche beaucoup les femmes, leurs familles et leurs enfants. Je suis certaine que c'est pareil à l'échelle du Canada. Je vous dis qu'au Québec, en ce moment, on assiste à un appauvrissement important des femmes et des enfants à l'aide sociale. Pourquoi? À cause de toutes sortes de coupures qui ont eu lieu dans la sécurité du revenu, coupures occasionnées en bonne partie par la réduction des transferts aux provinces.

Oui, ce sont les femmes qui écopent de cela. Je vous donne seulement un chiffre. Au Québec, les trois quarts des mères monoparentales qui ont des jeunes de moins de six ans vivent de l'aide sociale. Elles ont subi de nombreuses coupures depuis deux ans. Évidemment, on revendique aussi une augmentation des prestations auprès du gouvernement du Québec, mais on vient ici pour vous dire d'arrêter de couper, mais aussi, maintenant qu'un déficit zéro s'annonce et que ce déficit zéro a été réalisé en bonne partie sur le dos des chômeurs et des pauvres, de redonner aux chômeurs et aux pauvres ce qui leur revient. Arrêtez de les appauvrir. Essayez d'aider les gens à être moins pauvres, parce que cela n'a plus de sens.

Je termine en disant qu'une bonne façon d'aider les personnes, les femmes et les hommes vivant dans la pauvreté, en particulier les femmes qui sont victimes de beaucoup de discrimination, c'est de soutenir nos groupes pour qu'ils viennent vous redire cela l'année prochaine et les années subséquentes. Deux dollars par femme canadienne, ce n'est pas beaucoup, n'est-ce pas?

Le président: Merci, madame David.

[Traduction]

Monsieur Pillitteri.

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

Pour votre gouverne, je dirige une entreprise familiale et je dirais que ce n'est pas toujours le cas que les femmes sont sous-payées dans ce type d'entreprise. Ce sont mes filles qui ont établi leur salaire, et c'est pourquoi je sais qu'elles sont payées la même chose que les hommes, ou peut-être même un peu plus. Je voulais simplement signaler que les femmes ne sont pas sous-payées dans toutes les entreprises familiales. Dans mon entreprise, ce sont les femmes qui établissent les salaires, et je crois même qu'elles sont un peu mieux payées que les hommes.

Permettez-moi de poser une question à Mme Philipps. Vous avez insisté dans votre exposé sur le fait qu'il y a une pénurie de services de garde. Vous réclamez également que les paiements de transfert soient ramenés au moins au niveau où ils se situaient en 1995, qu'il n'y ait pas de réduction d'impôt et qu'on indexe les prestations pour enfants ainsi que le crédit pour la TPS.

Lorsque le gouvernement de M. Harris est arrivé au pouvoir en Ontario, il a réduit de 20 p. 100 les prestations d'aide sociale versées dans le cadre du RAPC, préférant mettre l'accent sur la réduction du déficit plutôt que sur l'éducation notamment. Je me rappelle aussi que M. Harris s'opposait totalement à un programme de services de garde. En fait, son gouvernement a même réduit les fonds consacrés aux services de garde en Ontario. Si les paiements de transfert remontaient au niveau où ils se situaient en 1995, qu'est-ce qui vous assurerait que cet argent serait investi dans le domaine de l'éducation, de l'aide sociale, et même de l'indexation? Qu'est-ce qui nous garantirait que cet argent serait utilisé en particulier pour aider les familles à faible revenu et les femmes?

• 1200

Mme Lisa Philipps: Je vais d'abord commencer à répondre à la question, et Joan pourra ensuite ajouter quelques mots.

Le gouvernement fédéral doit clairement réaffirmer son engagement envers des normes nationales dans le domaine des programmes sociaux. La grande tragédie en ce qui touche l'abolition du Régime d'assistance publique du Canada, c'est que le gouvernement a décidé de ne plus fixer ni mettre en oeuvre des normes dans le domaine des programmes sociaux.

On peut aussi déplorer le fait qu'on ait cessé de réserver des fonds pour ces programmes. Si le gouvernement disait: nous sommes prêts à vous accorder des fonds pour l'aide sociale et les services de garde, je pense que peu de provinces refuseraient cet argent. Peu de provinces ou de territoires diraient: nous voulons à ce point décider de nos priorités que nous n'accepterons pas cet argent du gouvernement fédéral.

Pour que le gouvernement fédéral continue d'avoir un droit de regard sur la nature et la qualité des services offerts, il faut qu'il soit prêt à rétablir les crédits qui étaient affectés aux programmes sociaux. L'un ne va pas sans l'autre. Certains commencent à réclamer l'adoption d'une loi sur la sécurité sociale au Canada qui établirait des normes nationales pour ce qui est des programmes sociaux, des normes que le gouvernement fédéral serait chargé d'appliquer.

M. Gary Pillitteri: J'aimerais apporter une précision. Il n'existait pas auparavant de normes nationales. Chaque province appliquait ses propres normes dans le cadre du RAPC.

Mme Lisa Philipps: Dans le cadre du Régime d'assistance publique du Canada, le gouvernement fédéral pouvait cesser de verser des fonds aux provinces qui ne respectaient pas certaines conditions. Le gouvernement fédéral exigeait notamment que les provinces versent des prestations d'aide sociale à tous ceux qui en avaient besoin, peu importe la raison invoquée. Tous ceux dont la demande d'aide sociale avait été rejetée jouissaient aussi d'un droit d'appel garanti. Les provinces devaient aussi établir le niveau des prestations d'aide sociale en fonction de certains besoins fondamentaux. L'abolition de ces normes a permis aux provinces de ramener le niveau des prestations sociales à un niveau vraiment inhumain.

Mme Joan Grant-Cummings: J'ajouterai qu'il est très inquiétant pour les femmes de notre pays que le gouvernement fédéral semble prêt à se retirer complètement du domaine des services sociaux. Comme Jim Peterson, l'ancien président du comité, l'a dit l'an dernier, je crois: sans argent, pas d'influence. C'est ce qui se produit avec les provinces.

Quant à l'argument voulant que ce soient les provinces qui s'opposent à la mise sur pied d'un programme national de services de garde, je suppose que nous n'aurions jamais eu le régime d'assurance-maladie dont nous sommes si fiers si cela avait empêché le gouvernement fédéral d'aller de l'avant. Nous perdrons d'ailleurs ce régime si nous ne nous secouons pas. Je ne pense pas que les provinces peuvent s'opposer à ce que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership au Canada et s'acquitte de ses responsabilités envers les Canadiens.

Le président: Madame Rose.

Mme Ruth Rose: Je suis économiste. Je travaille dans ce domaine depuis de nombreuses années. Je crois qu'il est évident que si le gouvernement fédéral devait rétablir des paiements de transfert aux provinces, celles-ci feraient l'objet de telles pressions de la part de l'opinion publique qu'elles seraient contraintes d'investir cet argent dans les programmes sociaux, qui ont fait l'objet de grandes réductions, en particulier dans le domaine de l'éducation et de la santé.

Comme Lisa Philipps l'a signalé, s'il est vrai que le niveau des prestations sociales variait d'une province à l'autre, toutes les provinces assuraient à leurs citoyens un revenu minimal avant que le gouvernement fédéral annonce qu'il était prêt à abolir le Régime d'assistance publique du Canada. Elles y étaient contraintes. Autrement dit, le principe fondamental sur lequel reposait le Régime d'assistance publique du Canada créé en 1967, c'était que les gens devaient pouvoir compter sur un revenu qui leur permettrait de survivre. Dans de nombreuses provinces, les gens ne peuvent plus compter sur un revenu minimal. Dans certaines provinces, ce revenu ne cesse de diminuer.

Pour ce qui est des services de garde, je suis membre du comité consultatif sur les questions techniques de Child Care Visions. J'ai donc suivi de très près les négociations qui ont précédé l'annonce faite par M. Martin d'investir 720 millions de dollars dans les services de garde. Or, il avait d'abord réduit les fonds consacrés par le gouvernement fédéral aux services de garde dans le cadre du Régime d'assistance publique du Canada. Il a ensuite offert aux provinces de leur verser des fonds pendant trois ans sans pouvoir les assurer que ces fonds augmenteraient par la suite si elles étaient prêtes aussi à investir dans le domaine des services de garde. Or, les provinces ont déjà tout le mal au monde à compenser la perte de fonds provenant du gouvernement fédéral. Je crois que le gouvernement fédéral a agi de façon très hypocrite en donnant l'impression qu'il allait finalement faire quelque chose au sujet des services de garde.

• 1205

Je faisais aussi partie du groupe de travail sur les services de garde de Katie Cooke en 1984. On nous avait promis un nouveau programme de services de garde, qui ne s'est jamais concrétisé.

M. Martin a promis d'affecter des fonds aux services de garde, et il ne l'a jamais fait. On ne peut pas s'en prendre aux provinces, parce que les provinces cherchaient à compenser la perte des fonds fédéraux. Si le gouvernement fédéral veut vraiment affecter des fonds aux services de garde, les provinces ne s'y opposeront pas si le versement de ces fonds ne s'accompagne pas de toutes sortes de conditions.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

La table ronde a été fort intéressante. Je vous remercie tous de nous avoir présenté votre point de vue sur les choix budgétaires qui s'offrent à nous. Nous en tiendrons compte dans notre rapport. Je vous remercie également des recommandations que vous nous avez faites et que nous transmettrons au ministre des Finances.

Au nom de tous les membres du comité, je vous remercie encore une fois.

La séance est levée.