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AAND Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ABORIGINAL AFFAIRS AND NORTHERN DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES AUTOCHTONES ET DU DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 10 mars 1998

• 1113

[Français]

Le président (M. Guy St-Julien (Abitibi, Lib.)): Commençons notre réunion puisque nous avons le quorum. Je sais que vous devez assister à plusieurs réunions et que vous avez beaucoup de travail.

Aujourd'hui, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudierons la question de la pêche autochtone et entendrons des témoins du ministère des Pêches et des Océans: M. Pat Chamut, sous-ministre adjoint, gestion des pêches, et M. Jim Jones, directeur régional, Gestion des pêches, région des Maritimes (pêches du golfe).

Comme l'indique notre ordre du jour, nous débutons par la présentation des témoins et poursuivons par les déclarations d'ouverture et les questions des membres du comité. Le point 4 n'aurait pas dû figurer à l'ordre du jour; c'est une erreur de ma part. La mention «autres questions» ne doit paraître qu'à l'ordre du jour des réunions du conseil. Nous devrions la biffer et la remplacer par «ajournement». Êtes-vous d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Merci.

Je crois que M. Scott désire déposer une motion.

[Traduction]

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Oui, merci, monsieur le président.

J'ai beaucoup de respect pour mes collègues, mais je m'excuse auprès de mon ami du Bloc et des autres membres du comité qui auraient préféré avoir cette motion en français. Nous ne l'avons pas encore fait traduire en français, mais nous le ferons faire très bientôt.

Monsieur le président, je veux proposer la motion suivante: Que le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien comparaisse devant le comité le plus tôt possible, mais au plus tard le 14 mai 1998, pour discuter du Budget principal des dépenses pour l'exercice 1998-1999.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Scott.

Êtes-vous d'accord, monsieur Patry?

M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Pas de problème.

Le président: Oui, monsieur Bachand.

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le président, je profite de l'occasion qui m'est présentée pour dire à mon ami du Parti réformiste que j'accepte le dépôt de sa proposition.

• 1115

Je voudrais cependant que tout le monde soit sur la même longueur d'ondes. Dorénavant, je n'accepterai que les documents qui auront été traduits. On est encore au Canada et on a encore une loi sur le bilinguisme. J'estime qu'il y a toujours eu deux peuples fondateurs au Canada, dont un francophone. Ceci a toujours été reconnu partout.

Je vous avise donc tous aujourd'hui que je m'opposerai désormais au dépôt de documents qui n'auront pas été traduits en français. C'est une question de principe. J'ai laissé passer beaucoup de choses jusqu'à maintenant. Les députés du Bloc québécois ont discuté de cette question et jugé qu'il s'agissait d'un point important. Nous estimons que les documents doivent être déposés en anglais et en français.

Je demanderais plus particulièrement à mes collègues unilingues anglophones s'ils accepteraient qu'on dépose un document rédigé uniquement en français. Je serais prêt à accepter qu'on refuse le dépôt d'un document présenté uniquement en français. Je demande qu'on me retourne la pareille et qu'on accepte que je puisse dorénavant refuser que les documents soumis uniquement anglais soient déposés. Je pense que l'avertissement est fait pour tout le monde. Je n'avais pas lancé de coup de semonce jusqu'à maintenant, mais je le fais. J'accepte que M. Scott dépose sa proposition aujourd'hui, mais je refuserai dorénavant d'accepter tout document qui n'aura pas été préalablement traduit.

Le président: Merci beaucoup. Vous avez soulevé un bon point. Je pense que le caucus québécois du Parti libéral partage votre point de vue et désire lui aussi qu'on nous soumette des documents rédigés dans les deux langues officielles. Cette résolution vise aussi tous les ministères qui se présenteront devant nous.

M. Claude Bachand: Exactement.

Le président: Monsieur Iftody.

[Traduction]

M. David Iftody (Provencher, Lib.): Je tiens à dire que je suis d'accord avec le député et que je partage ses sentiments. J'appuie certainement son intervention. Je trouve tout à fait normal qu'il incombe au comité de fournir ces documents dans les deux langues officielles.

[Français]

Le président: Merci beaucoup.

M. Claude Bachand: Puis-je ajouter quelque chose?

Le président: Oui, monsieur Bachand.

M. Claude Bachand: Je n'en ferai toutefois pas une règle sine qua non. Je comprendrai que des groupes autochtones puissent arriver par avion sans apporter une traduction de leurs documents. Je trouve que ce serait un peu difficile de ma part de dire que je ne veux pas les écouter et de m'en aller. J'aimerais qu'à chaque fois que la greffière convoque des témoins, elle leur mentionne qu'il serait hautement préférable d'avoir une traduction de leurs documents. Mais j'hésiterais un peu à refuser d'entendre des témoins de la Colombie-Britannique qui seraient arrivés ici le matin, qui n'auraient fini de rédiger leur mémoire que la veille et qui n'en auraient pas la traduction.

Par contre, je comprends mal qu'un ministère ne fasse pas traduire ses documents. Les ministères n'ont pas de raison de ne pas le faire. Ils ont toute une armée de gens qui peuvent faire la traduction pour eux. Je réglerai cette question au cas par cas dorénavant. Je peux déjà vous dire que je n'accepterai pas que les ministères se soustraient à cette tâche. Je n'accepterai pas non plus que mes collègues déposent des motions qui n'auront pas été traduites, parce qu'il y a un service de traduction très très rapide à la Chambre. Pour ce qui est des témoins, je vais juger cela au cas par cas. Autrement dit, je ne voudrais pas que ce soit une règle mur à mur en ce qui me concerne. Je vais faire preuve de souplesse quand viendra le temps d'entendre des témoins.

Le président: Et vous parlez aussi des sociétés d'État?

M. Claude Bachand: Exactement.

Le président: Merci.

Monsieur Scott.

[Traduction]

M. Mike Scott: Mon collègue présente de très bons arguments. Je m'excuse de ne pas avoir de versions anglaise et française aujourd'hui. Je m'engage envers lui et envers les autres membres du comité à ne plus jamais proposer de motion sans en avoir le texte dans les deux langues officielles prêt à être déposé au moment de proposer la motion.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Scott. Vous êtes un grand Canadien.

Avant de reprendre l'ordre du jour, je mettrai aux voix la motion de M. Scott.

(La motion est adoptée à l'unanimité)

Le président: Nous accueillons aujourd'hui M. Pat Chamut et M. Jim Jones. Est-ce que vous avez une déclaration d'ouverture à faire?

[Traduction]

M. Pat Chamut (sous-ministre adjoint, Gestion des pêches, ministère des Pêches et des Océans): Oui, j'en ai une, monsieur le président. J'ai une très brève déclaration à faire au comité. Je tiens à informer le comité que des copies de ma déclaration seront remises au comité dans les deux langues officielles plus tard aujourd'hui ou demain, et je distribuerai donc le texte de ma déclaration aux membres du comité.

• 1120

La pêche a toujours été un élément essentiel de la vie économique et culturelle des Autochtones. Aux endroits où il est responsable de la gestion de la pêche, Pêches et Océans Canada (MPO) a historiquement cherché à servir les intérêts des groupes autochtones et à répondre à leurs besoins. Cela n'a pas été facile, et nos efforts n'ont pas toujours été couronnés de succès. Par le passé, nos rapports avec de nombreux groupes autochtones ont été tendus, et il y a eu, dans certains cas, des conflits. Cela a été particulièrement vrai au cours de la dernière décennie, depuis que les tribunaux ont commencé à définir la nature et la portée des droits des Autochtones en matière de pêche.

À la suite de la décision rendue en 1990 par la Cour suprême dans l'affaire Sparrow, il était devenu évident que de nouvelles approches étaient nécessaires pour la gestion et la réglementation de la pêche autochtone. En 1992, le MPO a lancé la Stratégie relative aux pêches autochtones (SRAPA), une politique conçue pour lui permettre de gérer la pêche, pour faire en sorte que les groupes autochtones puissent pêcher à des fins de subsistance ainsi qu'à des fins sociales et rituelles et pour régler d'autres questions touchant la pêche conformément à la décision Sparrow.

Cette politique reflète l'orientation donnée par la cour et reconnaît la priorité des Autochtones sur tous les autres utilisateurs en ce qui concerne l'accès à la ressource, sous réserve des besoins de conservation de celle-ci. Autrement dit, si des mesures de conservation de la ressource sont nécessaires, les autres utilisateurs—comme les pêcheurs commerciaux et sportifs—doivent d'abord en subir le poids.

Les objectifs de la stratégie sont triples: tout d'abord, elle a pour objet d'établir le pouvoir de réglementer la pêche autochtone; deuxièmement, elle est conçue afin de donner un cadre pour la conservation et la gestion de la pêche; et enfin, elle vise à assurer des avantages économiques aux groupes autochtones.

Conformément à la SRAPA, le ministère établit un cadre de réglementation pour gérer les pêches d'un groupe autochtone en négociant des ententes mutuellement acceptables, de durée limitée. Ces ententes, une fois conclues entre le MPO et le groupe autochtone, donnent lieu à la délivrance d'un permis de pêche communautaire.

Ces ententes sur les pêches négociées dans le cadre de la Stratégie relative aux pêches autochtones comportent plusieurs points, notamment une allocation de récolte au groupe autochtone stipulant combien de saumon ou combien de casiers à homards un groupe particulier peut prendre.

Deuxièmement, elles peuvent comporter l'énoncé des conditions à inclure dans le permis de pêche communautaire, par exemple des dispositions sur la pratique de la pêche, les personnes autorisées, les engins, les lieux et les périodes, ainsi que les dispositions réglementaires. Ces ententes établissent essentiellement le plan de gestion des pêches autochtones.

En plus de ces dispositions concernant les prises, les ententes peuvent inclure des arrangements visant la cogestion de la pêche par le groupe et le ministère des Pêches et des Océans. Elles peuvent inclure par exemple des dispositions prévoyant la cueillette de renseignements sur les niveaux des prises par le groupe autochtone.

Ces ententes peuvent aussi inclure des précisions relatives à des projets de coopération pour améliorer la gestion de la pêche ou accroître l'abondance de poisson. Par exemple, elles peuvent comprendre des éléments concernant la mise en valeur de l'habitat et l'évaluation des stocks. Ces ententes peuvent aussi prévoir l'obtention d'un appui financier aux activités de coopération à la gestion de la pêche par l'organisation autochtone.

• 1125

Des jugements récents, à commencer par l'affaire Sparrow en 1990, ont compliqué de façon assez importante la tâche du ministère. Lorsqu'il s'acquitte de ses obligations, le MPO doit gérer la pêche en respectant les droits des Autochtones. Il ne peut porter atteinte à un droit de pêche autochtone sans que cela soit justifié.

Un élément qui complique souvent la situation pour le ministère, c'est le fait qu'il n'a pas le mandat de déterminer si un groupe autochtone donné a un droit de pêche. En conséquence, les ententes avec les groupes autochtones sont neutres concernant l'existence d'un droit autochtone.

Elles ne confirment ni ne répudient les droits des Autochtones. Le MPO n'exige pas que les groupes autochtones prouvent leur droit de pêcher, avant de négocier une entente ou d'octroyer un permis dans le cadre de la SRAPA. L'octroi d'un permis n'est pas une reconnaissance du droit de pêche d'un groupe autochtone. Il nous fournit les outils nécessaires pour nous assurer d'une gestion saine de la ressource et de sa conservation.

Le permis de pêche communautaire accordé à un groupe autochtone l'autorise à pêcher et, comme je l'ai dit tout à l'heure, fixe les conditions de pratique de cette pêche. Lorsqu'une entente est conclue avec un groupe autochtone et qu'un membre de ce groupe pêche contrairement aux conditions du permis, le permis est le mécanisme légal utilisé pour appliquer la loi.

Il pourrait y avoir infraction, par exemple, si la pêche est pratiquée à un moment ou à un endroit où elle est interdite; si des engins non autorisés sont utilisés; si des poissons ou des homards trop petits sont récoltés; ou si le poisson est vendu. Dans de telles circonstances, et si l'infraction peut être démontrée, des mesures peuvent être prises.

Lorsqu'un membre d'une bande ou d'une organisation autochtone invoque un droit autochtone comme défense et que le tribunal détermine qu'un tel droit a été enfreint, l'entente atteste qu'il y a eu la consultation exigée par la décision Sparrow et l'acceptation par le groupe autochtone des mesures appliquées pour réglementer la pêche.

Dans les cas où nous négocions avec un groupe autochtone, mais où aucune entente n'est conclue quant à la pratique de la pêche, le ministère octroie un permis de pêche communautaire à la lumière des consultations qui ont eu lieu et fixe des conditions qui, à son avis, respectent la décision Sparrow et permettent la prise de mesures pour faire respecter ces conditions, s'il y a lieu.

Une grande partie de nos responsabilités en matière de programmes en ce qui concerne la gestion et la réglementation des pêches autochtones dépend de la négociation et de la conclusion d'accords, et de l'octroi d'un permis communautaire, qui nous donne le pouvoir de réglementer la pratique de la pêche autochtone.

La Stratégie relative aux pêches autochtones, que nous avons mise en oeuvre en 1992, a été financée à raison de 25 millions de dollars. Pendant un cycle annuel, nous négocions normalement environ 125 ententes avec divers groupes autochtones. En 1997-1998, nous avons négocié 74 ententes dans la région du Pacifique, qui comprend la Colombie-Britannique et le Yukon, et 50 dans les provinces de l'Atlantique et au Québec.

Sur les 74 ententes de la région du Pacifique, quatre portent sur des projets pilotes de vente du poisson. Ainsi, grâce à ces ententes, les Autochtones peuvent vendre le poisson qu'ils pêchent. Ces projets ont lieu dans le bas Fraser, la rivière Somass, sur l'île de Vancouver, et la rivière Skeena, près de Prince Rupert. Ils sont à l'origine d'une part très importante de la controverse concernant l'application de la SRAPA.

• 1130

J'ai mentionné tout à l'heure qu'outre des dispositions concernant la récolte du poisson, la SRAPA comprend des mesures visant à améliorer la situation économique des collectivités autochtones. Le Programme de transfert des allocations (PTA) fait partie de la stratégie. Il facilite le retrait volontaire de permis de pêche commerciale et l'attribution de ces permis à des groupes autochtones de façon à ne pas augmenter la pression sur la ressource. Il s'agit essentiellement du transfert au ministère du permis d'un pêcheur commercial qui y renonce volontairement. Ce permis est ensuite remis à une collectivité autochtone pour lui donner la possibilité de pratiquer la pêche commerciale comme d'autres peuvent le faire.

Financé à raison de 2,6 millions de dollars par année, le PTA répond aux objectifs partagés du ministère et des groupes autochtones d'accroître la participation des Autochtones à la pêche commerciale. C'est un moyen de stimuler le développement économique et d'accroître l'expertise des collectivités autochtones dans le domaine de la pêche, tout en encourageant la coopération entre ces collectivités et le secteur de la pêche commerciale.

Des membres des groupes autochtones sont, en outre, formés pour agir comme gardes-pêche et aider à faire appliquer la réglementation établie dans le cadre de la SRAPA. À ce titre, les rôles et responsabilités des gardes-pêche consistent à participer à des patrouilles avec des agents des pêches du ministère, à inspecter des engins de pêche, à donner des avertissements et à fournir au ministère des renseignements sur les prises. Par de telles initiatives, nous aidons à développer les compétences en gestion dans les collectivités autochtones et améliorons notre propre capacité de gérer et de conserver la ressource. Ces efforts ont également favorisé la coopération et l'établissement de rapports constructifs avec ces collectivités.

Le mise en oeuvre de la SRAPA, lancée en 1992, ne s'est pas faite sans problèmes ni controverses. Toutefois, elle a permis d'améliorer à un certain nombre d'égards notre gestion de la pêche autochtone et la conservation de la ressource. La SRAPA a changé nos rapports avec les collectivités autochtones. Les conflits et les confrontations ont été remplacés par la coopération pour une meilleure gestion de la ressource.

La SRAPA nous a permis de mieux réglementer la pêche autochtone à de nombreux endroits, d'obtenir de meilleures données de la récolte et une application réglementaire plus efficace.

En Colombie-Britannique, de nombreuses Premières nations s'appliquent à restaurer l'habitat et à mettre en valeur la ressource, et leurs investissements profitent à tous les utilisateurs de cette ressource. Dans les provinces de l'Atlantique, beaucoup de Premières nations pêchaient auparavant le saumon de l'Atlantique au moyen de filets maillants, mais elles n'utilisent plus cette technique. Elles ont adopté des techniques de récolte sélective pour le saumon, évitant de nuire aux stocks faibles ou au saumon de plus grande taille, dont les stocks sont actuellement en déclin, comme nous le savons.

Enfin, l'investissement de fonds de cogestion et le transfert de permis de pêche commerciale ont été très profitables dans les collectivités autochtones, créant des emplois dont on avait grandement besoin. Ils ont aussi permis le développement de compétences et apporté de grands avantages économiques. Dans l'ensemble, la SRAPA a apporté un certain nombre d'avantages importants tant pour la ressource que pour le ministère et les peuples autochtones.

Si vous le permettez, je vais maintenant dire un dernier mot sur les traités. Le ministère n'est pas responsable de la négociation de traités, mais il participe activement à ces négociations. Les ressources halieutiques constituent fréquemment un élément essentiel de ces discussions, de sorte que des questions comme l'accès aux pêches, l'intégration des peuples autochtones à la gestion des ressources halieutiques, et la négociation de la prise en charge des responsabilités des parties autochtones sont des aspects importants des négociations des traités.

On négocie actuellement avec les Nishgas, en Colombie-Britannique, l'entente finale d'un traité fondé sur l'entente de principe signée en avril 1996. Plusieurs dispositions de cette entente portent sur les pêches. Entre autres, ce traité fournira aux Nishgas des fonds pour acquérir des permis de pêche commerciale. Il leur donnera aussi la certitude d'avoir accès à cette pêche une fois l'entente conclue.

• 1135

Outre les Nishgas une cinquantaine de Premières nations participent au processus de la Commission des traités de la Colombie-Britannique. De plus, des traités sont négociés dans le Nord, sur la côte Est, avec l'Association des Inuits du Labrador, et dans le nord du Québec, dans le secteur du Makivik.

En Colombie-Britannique et ailleurs, il y a une autre question qui a encore ajouté de la complexité et peut-être de la confusion à la question des traités et de la nature des droits autochtones, et c'est la décision rendue en décembre dernier par la Cour suprême dans l'affaire Delgamuukw. Il s'agit d'une décision complexe, que le ministère analyse actuellement. Je dois dire qu'on ne comprend pas encore ses répercussions sur les utilisations des pêches par les Autochtones, mais cela devrait s'éclaircir avec les jugements qui seront rendus dans d'autres cas. Lorsque nous comprendrons mieux sa portée, nous ajusterons nos programmes comme il conviendra pour respecter la décision de la cour et répondre aux besoins de conservation de la ressource. Notre programme doit donc être souple afin que nous puissions l'adapter aux décisions de la cour concernant la nature des droits et leur répercussion sur l'exercice de notre responsabilité de gestion.

Monsieur le président, M. Jones et moi-même serons heureux de répondre aux questions des membres du comité.

[Français]

Le président: Merci. Avant de commencer la période des questions, j'aimerais vous faire remarquer que bien que vous ayez parlé du Makivik et des gens du Labrador, vous n'avez pas fait état de la pêche aux crevettes. Il y a une problématique à l'heure actuelle à cet égard dans l'Est et dans l'Atlantique pour les Inuits du Nunavik, du Labrador et de Terre-Neuve. J'aimerais également vous entendre parler du coût des permis de pêche, qui fait l'objet d'une forte majoration depuis plusieurs années.

[Traduction]

M. Pat Chamut: Merci, monsieur le président.

La question de la crevette nordique est un cas qui est devenu difficile pour le ministère. L'abondance des stocks de crevette nordique s'est accrue considérablement. En conséquence, le ministre des Pêches et des Océans a décidé en 1997 de permettre aux pêcheurs de Terre-Neuve et du Labrador de pêcher la crevette nordique. On a déterminé les allocations de prix en fonction du principe de la contiguïté. Autrement dit, ceux qui sont le plus près de la ressource y auront accès. Il est juste de dire, je pense, que plusieurs groupes différents s'intéressent à cette pêche, voulant profiter des perspectives commerciales qui y sont associées.

Il n'y a encore eu aucune décision sur la pratique de cette pêche en 1998, mais le ministre prendra les décisions concernant l'accès à cette ressource lorsque nous aurons reçu le rapport des spécialistes quant à l'abondance des stocks. Lorsque nous aurons ces prévisions, nous pourrons concevoir un plan d'allocation et préparer un plan de gestion fondé sur les principes de la contiguïté et de la dépendance historique, qui ont souvent guidé nos décisions en matière d'allocation de ressources comme la crevette nordique et le poisson de fond.

Mais je suis d'accord. Un grand nombre de groupes tentent d'avoir accès à cette ressource, puisqu'elle est fort lucrative et que, pour bien des gens, il s'agit d'une occasion économique importante qui peut servir de base à une plus grande stabilité économique pour leur collectivité.

[Français]

Le président: Vous n'avez pas dit quel était le coût des permis de pêche et de quelle majoration il avait fait l'objet depuis trois ans. Combien en coûte-t-il à ces gens, à ces communautés et aux Inuits, pour qui la pêche est importante?

[Traduction]

M. Pat Chamut: En effet, je m'en excuse. Je l'avais noté, mais j'ai omis de répondre.

• 1140

Monsieur le président, le coût du permis a directement rapport à la valeur des privilèges de prise qu'il confère. Plus une ressource devient abondante, plus la valeur du permis augmente. Dans bien des secteurs—et le cas de la crevette nordique en est un bon exemple—l'abondance de la ressource a augmenté, de sorte que la valeur du permis a augmenté également.

L'inverse est vrai dans le cas d'autres espèces pour lesquelles on constate une diminution du nombre. Par exemple, les stocks de poisson de fond sont extrêmement bas dans bien des zones, la pêche est fermée et, par conséquent, la valeur du permis serait beaucoup moindre. Ainsi, les augmentations découlent de l'augmentation de l'abondance des stocks, et nous pouvons prévoir des fluctuations à cet égard, qui pourront se répercuter sur la valeur du permis.

[Français]

Le président: D'accord. Commençons la période des questions. Peut-être que mes confrères vont se diriger dans la même voie, puisque je n'ai toujours pas obtenu de réponse quant au coût du permis.

Monsieur Scott.

[Traduction]

M. Mike Scott: Merci, monsieur le président.

Je connais fort bien M. Chamut. Nous avons souvent discuté de la SRAPA au fil des années. Comme M. Chamut le sait très bien, un juge de la cour provinciale de la Colombie-Britannique a rendu récemment un jugement qui vient confirmer ce que déclare le Parti réformiste depuis déjà cinq ans, à savoir que le ministre n'a pas les pouvoirs aux termes de la Loi sur les pêches de mettre en oeuvre et d'appliquer la SRAPA. En réalité, la politique est ultra vires à l'heure actuelle. Cependant, je sais que M. Chamut ne serait pas d'accord à ce sujet et que le ministre ne serait certainement pas d'accord non plus. Je suppose donc que nous devrons en discuter dans un autre contexte.

Ma question d'aujourd'hui est la suivante. Tout d'abord, pour ce qui est de la pêche au homard sur la côte est, n'est-il pas vrai que les activités de capture des Autochtones peuvent avoir lieu en dehors de la période normale de pêche commerciale au homard? De plus, qu'est-ce qui permet d'établir que les Autochtones dépendent du homard à des fins alimentaires, voire à des fins commerciales?

M. Pat Chamut: Merci, monsieur Scott.

Si vous me le permettez, monsieur le président, j'aimerais tout d'abord commenter le premier aspect soulevé par M. Scott, à savoir le jugement récent dont il a parlé et selon lequel le pouvoir de mise en oeuvre et d'application de la SRAPA par le ministre serait touché. J'estime important de préciser que la décision du juge portait simplement sur la culpabilité ou l'innocence de l'accusé dont il entendait l'affaire. Le juge ne s'est pas prononcé sur la validité de la réglementation sur laquelle se fonde la Stratégie relative aux pêches autochtones.

Il a effectivement formulé dans son jugement des observations qui peuvent refléter son opinion, mais qui n'ont aucune valeur contraignante sur le plan juridique. Rien dans le jugement ne modifie le pouvoir du ministre de gérer la pêche ou de répartir la ressource. Son pouvoir n'est donc aucunement modifié par le jugement dont vous avez parlé.

Pour ce qui est du homard, la capture de homard à des fins alimentaires par les Autochtones est généralement assujettie aux mêmes exigences de conservation que celles qui s'appliquent à la pêche commerciale. Ainsi, les normes relatives à la nature des casiers, à la taille du homard, à la rétention de femelles gravides, etc., sont appliquées à la pêche commerciale de la même manière qu'à la pêche autochtone.

Il peut y avoir une différence pour ce qui est de la saison de capture. Normalement, pour la pêche autochtone, nous limitons le nombre de casiers pouvant être utilisés pour la capture de homard à des fins alimentaires. L'utilisation de ces casiers peut dépasser la période de pêche commerciale. Il ne faut cependant pas perdre de vue que, dans bon nombre de cas, il est question d'un très petit nombre de casiers par rapport au nombre total de casiers qui servent à la pêche commerciale.

• 1145

Une bande, par exemple, peut exploiter quelque 2 000 casiers au cours d'une certaine période. Ce serait l'utilisation autochtone. Comparativement, la pêche commerciale dans le même secteur totaliserait 400 000 casiers. Ainsi, le nombre d'engins utilisés par les Autochtones est minuscule par rapport au nombre total de casiers servant à la pêche commerciale.

Pour ce qui est de la dépendance alimentaire ou commerciale par rapport au homard, il n'existe dans les Maritimes aucune circonstance où la vente de homard capturé en vertu d'un permis visant l'alimentation des Autochtones, est autorisée. Autrement dit, toute vente aux termes d'un tel permis est illégale, et le ministère intervient lorsqu'il constate une infraction.

Pour ce qui est de la dépendance à l'égard du homard, comme je l'ai dit dans mon commentaire, le ministère n'est pas en mesure d'approfondir tous les cas pour déterminer si une bande est en mesure de prouver qu'elle a utilisé le homard à des fins alimentaires.

Nos ententes ne précisent nullement s'il existe un droit ancestral. Elles visent à nous donner un cadre administratif et réglementaire nous permettant de réglementer la pêche autochtone.

[Français]

Le président: Une dernière question, monsieur Scott.

[Traduction]

M. Mike Scott: Je me permets de signaler aux membres du comité que ce que vient de déclarer M. Chamut, en bref, c'est que les peuples autochtones de la côte Est ne dépendaient pas du homard pour se nourrir avant le contact avec les Européens. De plus, d'après les règles actuelles, la capture du homard par les Autochtones se déroule durant des périodes qui ne correspondent pas à la saison normale, cette saison étant établie à des fins de conservation. Il me semble important que les membres du comité le sachent bien.

Deuxièmement, j'aimerais demander à M. Chamut ce qui lui fait croire que la population de la Colombie-Britannique appuie la SRAPA. Ne sait-il pas que la population de la Colombie-Britannique n'appuie pas le volet commercialisation de la SRAPA? Le jugement récent qui a été rendu en Colombie-Britannique enlève toute crédibilité à l'idée que le ministre soit investi de pouvoirs en la matière, ne serait-ce que de celui de diriger cette pêche.

Sa politique, qui n'est pas appuyée par la population selon moi, a pour conséquence logique une escalade et une aggravation des conflits dans le bassin du Fraser, ainsi qu'une diminution continue des stocks de poisson. Nous avons déjà pu constater à quel point les rendements du sockeye ont été désastreux dans le bassin du Fraser, par exemple, depuis la mise en oeuvre de la SRAPA. L'escalade du conflit pourrait bien déboucher sur des affrontements violents dans l'avenir.

M. Pat Chamut: Tout d'abord, monsieur Scott, vous avez formulé un commentaire, et je crois que vous avez également posé une question. Dans le deuxième cas, je ne suis pas tout à fait certain, mais je vais m'efforcer de vous fournir une réponse pertinente.

M. Mike Scott: J'aimerais savoir quel soutien la population accorde à votre politique.

M. Pat Chamut: Au sujet du premier aspect que vous avez soulevé, à savoir la pêche au homard, vous avez déclaré que les pratiques de pêche des Autochtones ont une incidence sur la conservation. Si c'est ce que vous avez compris de ma déclaration, je dois apporter des précisions, étant donné que ce n'était pas du tout ce que je voulais dire. Je croyais avoir dit que la capture de homard par les Autochtones sur une assez longue période, compte tenu de l'intensité de leurs efforts, n'est pas considérée comme étant une menace à la conservation. Je tiens donc à dissiper toute interprétation que vous pourriez avoir selon laquelle j'aurais dit que cela représente une menace sur le plan de la conservation. Ce n'était pas du tout mon intention.

• 1150

Je voulais dire que la réglementation de la pêche au homard vise aussi bien les Autochtones que les pêcheurs commerciaux, de manière à assurer la réalisation de nos objectifs en matière de conservation. Il ne serait pas juste de supposer à partir de mes déclarations que notre façon de réglementer la pêche autochtone constitue une menace pour la conservation.

Pour ce qui est maintenant de l'appui accordé à la commercialisation en Colombie-Britannique, c'est comme pour bien d'autres questions controversées: certaines personnes et certains groupes appuient la politique actuelle et certains autres ne l'appuient pas. Ni moi ni le ministère n'avons fait des sondages pour prendre le pouls exact de l'opinion publique. Il suffit toutefois de dire que bien des gens considèrent que le programme que nous mettons en oeuvre nous fournit un cadre qui permet de mieux réglementer la pêche autochtone. Il est conçu de manière à nous permettre de réglementer l'activité de pêche et de recueillir des renseignements de meilleure qualité sur les captures. C'est pourquoi nous avons l'intention de maintenir le programme en 1998.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Chamut et monsieur Scott.

Monsieur Bachand.

M. Claude Bachand: Je dirai d'abord que j'éprouve beaucoup de sympathie pour M. Chamut lorsque je vois comment le ministère des Pêches et des Océans tente de cerner toute la problématique des pêches autochtones. Je sympathise avec lui et j'admets que son rôle n'est vraiment pas facile.

On est aux prises avec une opinion publique nettement défavorable et je suis obligé d'être d'accord avec mon confrère du Parti réformiste à cet égard. De plus, ce dossier semble comporter de nombreux éléments juridiques. Votre ministère est aux prises avec des décisions de première instance, des décisions de cour d'appel et des décisions de la Cour suprême, lesquelles peuvent toutes avoir une influence sur ses politiques.

Ce n'est vraiment pas facile d'essayer de satisfaire tout le monde, de trouver le dénominateur commun qui sache plaire à tous et de se conformer parfaitement aux décisions des cours actuellement dans le cas des pêcheries.

À mon avis, l'évaluation des pêches autochtones par rapport aux pêches ordinaires doit suivre un certain cheminement. J'aimerais qu'on me confirme que la conservation est le premier point important. C'est ce qu'on semblait soutenir à l'époque. Si les stocks sont menacés, il n'y a ni pêche de subsistance ni pêche commerciale, et forcément pas de pêche de loisir. C'est ainsi qu'on établit normalement le degré de priorité lors de l'octroi des permis.

Je ne crois pas que le problème se situe du côté des pêches de subsistance. Il surgit plutôt lorsqu'on commence à toucher aux pêches commerciales. À ce chapitre, je regarde l'évolution de la jurisprudence. Les décisions de la Cour suprême dans les causes Van der Peet, NTC Smokehouse et Gladstone affirment que les autochtones ont le droit de s'adonner à la pêche commerciale.

Une certaine limitation existe à cet égard, et j'aimerais vous en entendre parler dans un premier temps. On dit qu'il faut que la pêche commerciale fasse partie des traditions de la communauté autochtone. Si la communauté peut prouver qu'elle prenait jadis des poissons et qu'elle les vendait, cela ne devrait pas changer aujourd'hui. Je pense que c'est là que se situe le problème actuellement. Vous avez parlé de quatre projets-pilotes concernant les permis de vente. Sur la côte ouest, il y a actuellement des gens sur les quais et des commerçants qui ne peuvent pas aller pêcher parce qu'on a octroyé des permis de pêche et de vente à des autochtones. Je pense que vous avez suivi l'évolution de la jurisprudence et je conviens que c'est correct qu'il en soit ainsi, même si cela cause des problèmes.

Ma dernière question porte sur la décision Delgamuukw. Vous avez dit que vous étiez en train de l'interpréter. Cette décision va loin; elle remonte jusqu'aux traditions orales. Les cours ont dit que si les communautés autochtones voulaient qu'on leur accorde des permis commerciaux, elle devaient leur présenter une preuve sans faille que la vente du poisson était inscrite dans leurs traditions. Dans cette preuve sans faille, on dit maintenant que la tradition orale aura une grande importance. J'imagine que cela aussi aura une influence sur les politiques du ministère des Pêches et des Océans.

• 1155

Je sais que vous n'êtes pas dans une situation facile. Est-ce que l'évaluation que j'en faisais, en me basant sur la conservation, la pêche de subsistance, la pêche commerciale et la pêche de loisir, tient toujours?

Deuxièmement, est-ce que vos quatre projets-pilotes sur la côte ouest tiennent compte de la décision qui exige que cette pêche soit incluse dans les traditions des communautés? Et comment la décision Delgamuukw pourrait-elle représenter pour vous un problème supplémentaire en vous obligeant de vous conformer aux traditions orales qui vous seront soumises, soit directement par les autochtones, soit par des ordres des cours?

Le président: C'est une bonne question, monsieur Bachand.

Monsieur Chamut.

[Traduction]

M. Pat Chamut: Voilà des questions fort intéressantes. Je vais m'efforcer d'y répondre dans l'ordre.

Pour ce qui est des priorités, nous respectons une hiérarchie très bien définie en matière de gestion des pêches. La première priorité va toujours à la conservation. Vous avez laissé entendre que si les stocks sont à un très bas niveau, nous ne devrions même pas permettre la pêche de subsistance. C'est tout à fait ce que nous préconisons. Lorsque le niveau des stocks est bas et que nous nous inquiétons des perspectives à long terme, nous n'autorisons aucune capture.

Par contre, lorsque l'importance du surplus autorise la capture, nous accordons la première priorité à la capture par les Autochtones à des fins de subsistance. Voilà qui concorde avec l'arrêt Sparrow et d'autres décisions des tribunaux rendues par la suite. Nous n'attribuons des autorisations de pêche commerciale ou sportive, selon la nature de la ressource et de la pêche, que lorsque les besoins de conservation et de subsistance ont été comblés.

Notre échelle de valeurs est donc très bien établie, et j'estime qu'elle va de pair avec les décisions des tribunaux.

Vous avez parlé de certains jugements que nous avons cités, à savoir ceux qui sont relatifs aux affaires Van der Peet, NTC Smokehouse, et Gladstone. Ces affaires sont extrêmement importantes pour nous, puisqu'elles ont rapport à l'existence ou non d'un droit ancestral de vendre du poisson.

Comme vous le savez, dans deux de ces trois affaires, le tribunal a déterminé que le groupe ne répondait pas au critère justifiant l'existence d'un droit ancestral. Le tribunal a toutefois décidé que le Conseil tribal Heiltsuk, un groupe de la côte centrale de la Colombie-Britannique, avait été en mesure de démontrer qu'il jouissait d'un droit ancestral de vendre un produit appelé «oeufs de hareng sur varech». Ce groupe jouit donc d'un droit ancestral, et nous négocions avec ses représentants pour lui donner accès à la ressource et donner suite aux constatations du tribunal.

Je dois dire que la question est extrêmement difficile pour le ministère, étant donné que le tribunal, même s'il a décidé que le groupe avait le droit de capturer et de commercialiser le produit, n'a donné aucune indication de l'ampleur du droit conféré. Par conséquent, nous négocions avec divers groupes en nous efforçant de déboucher sur un consensus et sur une entente, ce que nous avons été en mesure de faire depuis deux ans maintenant. Cependant, il devient de plus en plus difficile de déterminer quelle est ou quelle devrait être l'importance ou la portée du droit.

Dans ces trois affaires, le tribunal nous a déclaré que le critère établissant un droit ancestral avait trait au fait qu'il devait s'agir d'une pratique culturelle distincte et d'une caractéristique culturelle antérieure au contact avec les Européens. Un seul des trois groupes a été en mesure d'établir, preuves à l'appui, que le critère était respecté. Cela a eu pour effet de compliquer notre gestion, du fait qu'il y a un certain flou et que, d'autre part, le ministère n'est pas en mesure d'évaluer la preuve historique ou de mener des recherches en vue de déterminer si telle ou telle bande ou tel ou tel groupe devrait jouir du droit ancestral d'utiliser ou de vendre un produit donné. Voilà donc qui ajoute à la complexité de nos tâches.

• 1200

Pour ce qui est de votre troisième question, portant sur la tradition orale, il devient plus difficile de répondre. Je dois dire que nous n'avons pas encore vraiment réfléchi à cette question. Les tribunaux devront, me semble-t-il, en tenir compte lorsqu'ils aborderont des questions de ce genre. Pour notre part, au ministère des Pêches, nous nous occupons de la gestion du poisson et nous ne sommes pas en mesure de déterminer si un témoignage oral constitue le fondement d'un droit.

Voilà pourquoi nous nous en tenons à la stricte neutralité pour ce qui est de savoir si un droit existe ou non. Ce n'est pas notre tâche de le déterminer. Notre tâche consiste à gérer les pêches et à trouver des formules qui nous permettront d'assumer nos responsabilités en matière de conservation tout en adaptant nos activités aux décisions des tribunaux en matière de droits ancestraux.

Le président: Monsieur Bryden.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Sans être un expert en la matière, je ne manque pas de constater que nous n'entendons parler que des tribunaux. Les tribunaux ne cessent de nous dire quoi faire, semble-t-il. J'en arrive même à me demander si le Parlement et les législateurs ont leur mot à dire. Je me permets de signaler que les juges ne sont pas élus. Ce sont de vieux messieurs, généralement nommés par favoritisme, et rien ne garantit qu'ils ont la compétence voulue pour prendre des décisions dans l'intérêt général.

Ai-je bien raison de supposer que toutes ces décisions des tribunaux qui influent tellement sur vos activités ont rapport à la Charte des droits? C'est dans l'interprétation de la Charte des droits que tous ces processus devant les tribunaux prennent leur origine. Est-ce exact?

M. Pat Chamut: Il s'agit là d'une interprétation assez valable. La Charte a reconnu et affirmé l'existence de droits ancestraux dès 1982, de sorte que les tribunaux ont eu à se pencher sur la question dans bon nombre de situations. Il est évident que, dans le cas des pêches, un certain nombre de jugements ont permis de mieux définir quels étaient les droits ancestraux existants en matière de pêche.

M. John Bryden: J'aimerais maintenant avoir votre avis, puisque vous vous occupez de ces questions depuis longtemps. Le temps n'est-il pas venu pour les législateurs d'agir? Et pourriez-vous nous donner une idée des initiatives à prendre et de ceux qui devraient les prendre? S'agit-il des responsables des pêches? De ceux du ministère de la Justice? Comment nous, membres du comité, pouvons-nous commencer à résoudre le problème comme parlementaires au lieu de laisser aux tribunaux le soin de déterminer la politique?

M. Pat Chamut: Vous me posez là une question bien difficile. J'ai appris depuis fort longtemps... J'ai une expérience considérable de la gestion des pêches autochtones et de la gestion des pêches en général. Cependant, mon expérience m'a appris par ailleurs qu'il était préférable de ne pas donner d'avis. En bon fonctionnaire, j'hésiterais normalement à le faire. Toutefois, vous me permettrez peut-être de faire un commentaire...

M. John Bryden: Je vous en prie.

M. Pat Chamut: ...il me semble que le tribunal a fourni des balises utiles au ministère... Le tribunal a certainement précisé en quoi la loi s'applique à notre gestion et à nos activités. Étant donné qu'il n'est pas possible de modifier les décisions rendues—et je ne suggère nullement qu'elles devraient l'être—le ministère aurait avantage à...

Selon moi, ce qu'il convient de faire, c'est de chercher, dans le cadre de négociations, à aboutir à une entente qui correspondrait aux objectifs de toutes les parties.

Nous devons composer avec un régime de gestion où les droits ont été établis par les tribunaux. Au lieu de chercher à modifier cette situation et de risquer ainsi de nombreux conflits, ce qui, selon moi, ne serait ni opportun, ni productif... J'estime que la meilleure façon d'aborder la question consiste à tenter de négocier des arrangements qui aboutiront à un cadre de réglementation grâce auquel la pêche pourra se dérouler de façon ordonnée et opportune. Nous avons pu nous rendre compte que les recours devant les tribunaux et les conflits n'aboutissent pas à grand-chose et ne sont utiles à personne. Ils ont souvent pour effet de nuire à la ressource et à d'autres intéressés. La meilleure démarche consiste pour nous à négocier une solution qui repose tout d'abord sur la protection et le maintien de la ressource et qui accorde un certain degré de stabilité et de certitude à toutes les parties intéressées.

• 1205

M. John Bryden: Une dernière question alors. Ai-je raison de penser que le ministère est incapable de se doter d'une politique à long terme sur cette question parce qu'il n'y a pas moyen de savoir ce que les tribunaux vont décider? Et nous avons maintenant cette dernière affaire où le ministère va devoir tenir compte des jugements d'un tribunal qui sont fondés sur des traditions orales, et non pas sur des textes. J'ai donc raison de penser que votre ministère doit toujours improviser en matière de politique parce qu'il ne sait jamais dans quel sens les tribunaux vont décider, et c'est ce qui vous empêche d'établir des politiques à long terme.

M. Pat Chamut: Je crois que cela s'applique à presque tout ce que nous faisons ces jours-ci, et je ne parle pas seulement de mon ministère. Il y a toutes sortes de problèmes juridiques qui se posent dans tous les secteurs de la politique gouvernementale. Nos politiques doivent être suffisamment souples pour tenir compte des jugements des tribunaux, et c'est sûrement le cas ici. Le rythme du changement a peut-être été ici un peu plus accéléré que dans d'autres domaines, mais l'adaptation aux décisions judiciaires est une réalité avec laquelle nous devons vivre tous les jours. Cela ne nous empêche pas nécessairement d'articuler une politique à long terme; cela nous oblige seulement à adapter notre politique à long terme selon l'évolution du droit.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Chamut et monsieur Bryden. J'aimerais donner la parole à notre attachée de recherche, Mme Hurley, pour qu'elle puisse nous apporter des précisions quant aux droits autochtones, après quoi je céderai la parole à M. McNally.

[Traduction]

Mme Mary Hurley (recherchiste du comité): Voici une explication, monsieur Bryden. Votre première question portait sur la question de savoir si oui ou non les droits des Autochtones sont reconnus par la Charte des droits et libertés. Ils sont reconnus par la Loi constitutionnelle de 1982, mais en fait l'article 35 ne figure pas dans la Charte des droits et libertés, où les articles vont de 1 à 32. Ce qui veut dire que l'article 35 n'est pas assujetti aux critères de justification de l'article 1 de la Charte; cependant, la Cour suprême a établi un critère de justification à l'intérieur de l'article 35 de la Loi constitutionnelle.

M. John Bryden: Merci. Intervention très utile.

[Français]

Le président: Merci beaucoup, madame Hurley. C'est pour ça qu'on a des attachées de recherche compétentes. Merci beaucoup, madame.

Monsieur McNally.

[Traduction]

M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Merci, monsieur le président.

J'aimerais revenir sur certaines observations que vous avez faites plus tôt. Les tribunaux nous disent certaines choses, et nous devons écouter les tribunaux parce que ce sont eux qui définissent les droits. Vous avez mentionné les jugements du juge Thomas plus tôt, et le fait que lorsqu'il a parlé d'une pêche commerciale—et vous disiez que c'était son opinion et pas nécessairement la loi—, il a dit qu'une pêche commerciale doit être ouverte à tous ou fermée à tous.

Vous avez également dit que les tribunaux ont défini les droits, mais je répondrai à cela que c'est le ministère qui définit souvent les paramètres de ces droits par les mesures qu'il prend, comment ou ce qu'il négocie ou ce qu'il permet de faire. Je suis d'accord avec ce qu'a dit mon collègue, M. Bachand, sur l'aspect commercial des pêches autochtones. Vous avez affirmé, dans votre mémoire et ici même, que vous restez neutres quant à la définition des droits autochtones. En concluant ces accords et en permettant en fait au ministère d'agir ici, cependant, je pense qu'à long terme on pourra faire valoir que le gouvernement a bel et bien consenti ce droit par les mesures qu'il a prises dans le cadre de la Stratégie sur les pêches autochtones. Je me demande si vous êtes d'accord avec cela ou non.

M. Pat Chamut: Encore là, c'est une question qui va droit au coeur de l'action du ministère. En réponse à votre question, je dirai que, franchement, non, le ministère ne confère pas un droit par la négociation de ces accords. Voyez les accords que nous sommes en train de négocier: il y a là des dispositions très précises qui disent bien que ces accords ne sauraient porter préjudice à la position du gouvernement ou de l'organisation autochtone pour ce qui est des droits. Ces accords ne confirment ni ne nient l'existence des droits autochtones. Et ils ont été très soigneusement...

• 1210

M. Grant McNally: Me permettez-vous de vous interrompre un instant?

Voyez ce que le ministère ou un simple particulier du ministère dira de cette mesure. Vous avez exprimé votre opinion. Si les tribunaux en étaient saisis, je pense que les juges examineraient non seulement ce qui a été dit, mais aussi la mesure elle-même. Je crois donc que nous pourrions peut-être nous entendre pour ne pas être d'accord là-dessus.

Je pourrais peut-être vous poser une autre question. Je sais que nous n'avons pas beaucoup de temps. Le ministre le mentionne, et vous le mentionniez aussi au sujet du jugement Thomas. Il est dit dans le mémoire du ministre ici:

    En vertu de la Loi sur les pêches, le ministre délivre des permis et, par extension, a «toute discrétion» pour attribuer les captures.

Donc, pour ce qui est de savoir qui prend la décision, le ministre dit ici qu'il a toute discrétion pour autoriser les projets pilotes de ventes et l'exploitation commerciale des pêches autochtones.

Je ne suis pas un expert dans ce domaine. Le besoin du Fraser couvre une large partie de ma circonscription. Je me demande si vous pouvez m'expliquer en quoi consiste les projets pilotes de ventes. Est-ce que les projets pilotes de ventes constituent l'aspect commercial des pêches autochtones? Si tel est le cas, j'aimerais qu'on m'en précise l'ampleur. Je songe surtout à la Colombie-Britannique. Je sais que nous nous pencherons aussi sur d'autres régions. En quoi consiste cet aspect commercial, quels sont ces projets pilotes de ventes, et combien cela vaut-il?

J'ai une autre question. Les règlements régissant les permis consentis aux pêches autochtones autorisent-ils les transferts de permis, à un Autochtone ou à un non-Autochtone, si le détenteur du permis dans telle ou telle communauté autochtone décide de ne pas pêcher la quantité que lui permet son permis, pour une raison quelconque?

Ce sont là trois ou quatre questions. Je pense que j'ai terminé.

M. Pat Chamut: Je vais tâcher de vous répondre du mieux que je peux. Il se peut que j'oublie des éléments. Il se peut qu'il y ait trois ou six questions ici.

Vous avez mentionné le fait que le ministre a «toute discrétion». C'est entre guillemets parce qu'il s'agit d'une expression empruntée à la Loi sur les pêches.

M. Grant McNally: D'accord.

M. Pat Chamut: Le ministre a toute discrétion pour permettre les ventes. Dans ces domaines, le privilège consenti à ces groupes pour la vente de poisson n'est que cela: un privilège. Cela n'est pas fondé sur l'existence d'un droit; c'est fondé sur l'exercice du pouvoir discrétionnaire du ministre.

M. Grant McNally: D'accord.

M. Pat Chamut: C'est ce que cette expression veut dire.

Pour ce qui est des projets pilotes de ventes, il n'y a que quatre projets pilotes de ventes de poisson en Colombie-Britannique. Il n'y en a pas ailleurs au pays. Il n'y en pas dans les régions du Canada atlantique.

Pour ce qui est de ces quatre projets pilotes de ventes, je ne parlerai que des deux qui existent dans le bassin du Fraser. Il y en a un qui est essentiellement un accord conclu avec les bandes qui sont à l'embouchure du fleuve: les bandes de Musqueam, Tsawassen et Burrard. En vertu de cet accord, ces bandes peuvent pêcher une certaine quantité de poisson. On leur permet aussi de vendre ce poisson.

M. Grant McNally: Savez-vous combien cela vaut?

M. Pat Chamut: Malheureusement, il est difficile de vous donner un montant précis, parce qu'il variera selon le rendement du fleuve Fraser.

M. Grant McNally: Est-ce qu'on a des chiffres pour, disons, les deux dernières années? Ou pouvez-vous vous informer?

M. Pat Chamut: Je peux vous dire que, par le passé, lorsque le fleuve donnait un bon rendement, avant, disons, 1994 à peu près, les pêches exploitées à l'embouchure du fleuve par les bandes de Musqueam, Burrard et Tsawassen rapportaient généralement un peu moins que 200 000 saumons rouges.

Il y a l'autre projet pilote, qui fait intervenir la bande de Sto:lo.

• 1215

M. Grant McNally: Oui, c'est dans ma circonscription.

M. Pat Chamut: C'est dans votre circonscription. Si je me souviens bien, ils ont quelque chose comme 500 000 sockeyes.

M. Grant McNally: Quelle serait la valeur commerciale de ces 500 000 poissons?

M. Pat Chamut: Cela dépend évidemment du prix du poisson. Si le poisson se vend environ 8 $ pièce, ce qui est probablement assez réaliste pour du poisson de cette région, cela pourrait représenter environ 4 millions de dollars qui seraient partagés entre les différents intéressés.

M. Grant McNally: Très bien, merci.

Une dernière question au sujet du transfert des permis.

M. Pat Chamut: En fait, les permis sont délivrés à des communautés. C'est la communauté qui désigne les gens qui peuvent pêcher grâce à ce permis. Une personne seule ne pourrait pas décider: c'est mon voisin ou un tel qui doit pêcher; ce genre de chose doit être approuvée ou décidée par la communauté.

M. Grant McNally: Si une communauté décide de vendre une portion de permis à un groupe autochtone ou non autochtone, est-ce que c'est possible?

M. Pat Chamut: Non.

M. Grant McNally: Cela doit rester dans la communauté.

M. Pat Chamut: Oui.

[Français]

Le président: Merci, monsieur McNally. Monsieur Wilfert, vous serez le dernier intervenant. J'aurai ensuite deux questions pour vous, monsieur Chamut.

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Je suppose que le principe directeur dans votre ministère, c'est la conservation, c'est-à-dire le maintien de la stabilité du secteur des pêches.

M. Scott a apporté tout à l'heure une précision au sujet de la pêche au homard sur la côte est. Par exemple, vous avez dit que dans une période donnée on remet 400 000 permis ou 400 000 casiers aux pêcheurs commerciaux et aux Autochtones, ou bien est-ce seulement aux pêcheurs commerciaux?

M. Pat Chamut: Seulement aux pêcheurs commerciaux.

M. Bryon Wilfert: Et où se trouvent les pêcheurs autochtones?

M. Pat Chamut: Ils reçoivent un permis commun...

M. Bryon Wilfert: Pour la bande ou bien...

M. Pat Chamut: Pour la bande. Grâce à ce permis commun, ils peuvent utiliser un certain nombre de casiers et les déployer dans un secteur bien défini. Ils sont autorisés à utiliser ces casiers pendant une période donnée.

Les casiers qu'ils utilisent doivent être comparables aux casiers commerciaux. Autrement dit, ils doivent comporter des mécanismes qui permettent aux autres espèces de se libérer, et toutes les caractéristiques que nous exigeons pour des raisons de conservation et de bonne gestion. Toutefois, la bande est autorisée à utiliser ces casiers, et, comme je l'ai dit, elle peut les utiliser dans un secteur particulier pour une période donnée.

Je vous ai donné l'exemple d'un secteur où une très grosse bande, une bande qui a une population importante, je le précise, a été autorisée à utiliser 2 000 casiers. Dans le même secteur les pêcheurs commerciaux ont collectivement un total de 400 000 casiers, mais pour une période plus courte.

M. Bryon Wilfert: Pour mon instruction personnelle, vous nous dites donc qu'il y a là une différence. Y a-t-il d'autres différences ou d'autres points communs entre les permis commerciaux et...

M. Pat Chamut: Je peux demander à mon collègue, M. Jones, qui s'occupe plus directement... C'est lui qui est chargé de la gestion et de la réglementation de cette région, et je suis certain qu'il pourra vous donner des détails.

M. Bryon Wilfert: Cela m'amène à ma seconde question; en dehors de la période réservée aux pêcheurs commerciaux, quels sont les critères pour prolonger la période réservée aux Autochtones?

M. Jim Jones (directeur régional, Gestion des pêches, région des Maritimes (pêches du golfe), ministère des Pêches et des Océans): Je peux peut-être compléter ce que M. Chamut a dit. On s'est peut-être mépris sur le contexte de la gestion.

Nous avons fixé des règles de conservation de base, par exemple pour la pêche au homard, et ces règles fixent la taille du homard que l'on peut pêcher, l'espèce, et le genre de casiers qui peuvent être utilisés. Viennent ensuite une série de règles de gestion qui régissent la pêche sur le plan du comportement et de la bonne gestion.

• 1220

Par exemple, vous avez dû entendre beaucoup de pêcheurs commerciaux dire que la saison de la pêche est une mesure de conservation. Ce n'est pas forcément le cas. Par exemple, dans la partie sud du golfe du Saint-Laurent, le secteur que je gère, la saison du homard commence le 1er mai et se poursuit jusqu'à la fin de juin, époque à laquelle commence normalement la période de la mue. Tout le monde n'est pas d'accord pour reconnaître que c'est une mesure de conservation, et ce qui est le plus difficile, c'est de prétendre que la période de huit semaines qui suit le 1er mai est une nécessité absolue en matière de conservation. Il serait particulièrement difficile de prétendre que le 15 avril est préférable au 1er mai pour des raisons de conservation, surtout dans un secteur où les pêcheurs commerciaux posent de 300 000 à 400 000 casiers.

Très souvent, les saisons sont fixées au cours des années pour des raisons de bonne gestion. Beaucoup de communautés autochtones pêchent pour des raisons alimentaires, sociales et rituelles, et nous avons des accords sur le nombre de casiers qui peuvent être déployés pour ces raisons-là. Ils doivent être marqués et respecter toutes nos exigences de conservation, mais ces casiers peuvent être utilisés sur de longues périodes.

Là encore, les règles de conservation de base s'appliquent tout aussi bien à la pêche alimentaire, sociale et rituelle. Elles s'appliquent autant aux communautés autochtones qui font de la pêche commerciale qu'aux pêcheurs commerciaux non autochtones. Il y a des communautés autochtones qui pêchent le homard commercialement, et en règle générale elles doivent observer les mêmes règles que les pêcheurs commerciaux non autochtones. Il y a des exceptions mineures concernant, par exemple, qui peut être désigné pour pêcher, et ce genre de choses.

M. Bryon Wilfert: Comment établissez-vous les critères pour la pêche rituelle, et comment fixez-vous les périodes de pêche dans ces cas-là?

M. Jim Jones: Au cours des six dernières années, nous avons eu des négociations et des discussions avec les bandes. Dans certains cas, nous nous sommes mis d'accord sur le nombre de casiers que la communauté pouvait placer, et ce chiffre dépend de l'importance de la communauté.

[Français]

Le président: Merci. Il n'y a pas d'autres questions? Merci beaucoup. J'ai deux petites questions en terminant, messieurs Chamut et Jones.

Est-ce que le ministère pourrait informer les membres du comité de la problématique actuelle de la pêche commerciale aux crevettes dans l'Atlantique par les Inuits du Labrador, du Nunavik, des Territoires du Nord-Ouest et de Terre-Neuve? Il pourrait le faire en nous fournissant des cartes du territoire des zones de pêche pour la pêche aux crevettes sur la côte est. On aimerait aussi obtenir un tableau indiquant les coûts des permis de pêche. La pêche à la crevette est importante pour les Inuits. On sait que de 1990 à aujourd'hui, il y a eu une escalade des coûts extraordinaire. Nous savons que tandis qu'ici, à Ottawa, un pain du matin coûte 1,12 $, dans le nord du Québec et dans les Territoires du Nord-Ouest, il coûte 3 $, 3,20 $ ou même 3,40 $. Et c'est la même chose pour le prix du gaz; il est trois fois ou quatre fois plus élevé.

Je m'inquiète des grands bateaux de pêche japonais et des grosses compagnies auxquels font face les pêcheurs commerciaux inuits, qui sont des résidants permanents dans le Nord. Cette question revient souvent dans nos discussions avec nos amis inuits de Makivik, des Territoires du Nord-Ouest et de tout le Nord canadien. Il est important de savoir pourquoi il y a eu une escalade des coûts des permis de pêche. Nous aimerions que vous nous fournissiez ces renseignements par écrit.

[Traduction]

M. Pat Chamut: Je vais essayer de répondre à votre question. Je ne sais pas si je peux ajouter beaucoup de choses à ma réponse à votre première question.

À l'heure actuelle, nous avons un total de 17 détenteurs de permis permanents, des gens qui sont autorisés à pêcher la crevette nordique. Ces détenteurs de permis sont des particuliers ou des sociétés de diverses régions des provinces de l'Atlantique. Plusieurs détenteurs sont de Terre-Neuve. Certains permis sont détenus par des intérêts du Labrador, et il y en a également deux ou trois dans le nord du Québec. Je suis désolé de ne pas avoir une liste détaillée, mais je sais que ces permis sont répartis entre différents groupes.

• 1225

Par le passé, les détenteurs de ces permis ont pêché environ 2 000 tonnes de crevettes par permis. Les stocks de crevette nordique ayant augmenté, on a accordé une légère augmentation de quota à ces 17 détenteurs de permis.

En 1997, étant donné l'augmentation importante des stocks de crevette nordique, on a décidé d'allouer une partie de ces quotas à des résidents de Terre-Neuve, du Labrador et d'ailleurs. Je le répète, lorsque les coûts des permis augmentent, c'est parce que la valeur d'un type de pêche augmente de façon significative.

Si j'ai oublié quelque chose, je vous répondrai avec plaisir, mais je ne pense pas pouvoir ajouter grand-chose en réponse à la question que vous avez posée.

[Français]

Le président: J'aimerais vraiment que votre ministère nous fournisse ces renseignements par écrit. Pour moi, il y a une grande différence entre nos résidants inuits qui vivent dans le Nord et les compagnies multinationales. C'est cela qui est important. Nous aimerions aussi avoir un tableau nous indiquant la ventilation complète des coûts de 1990 à aujourd'hui. Ces renseignements nous seront très utiles. Je trouve que cette situation est difficile pour les résidants du Nord qui vivent dans des communautés inuits, pour qui la pêche représente la survie et qui doivent aujourd'hui vraiment payer un prix d'or pour aller à la pêche. C'est pourtant leur coutume à eux autres. On veut savoir ce qui se passe. Il faudrait remédier à cette situation dans les plus brefs délais. On veut avoir ces renseignements par écrit, monsieur Chamut.

Merci beaucoup. Il n'y a d'autres questions?

La séance est levée.