AAND Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
STANDING COMMITTEE ON ABORIGINAL AFFAIRS AND NORTHERN DEVELOPMENT
COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES AUTOCHTONES ET DU DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 26 novembre 1997
[Français]
Le président (M. Guy Saint-Julien (Abitibi, Lib.)): Nous sommes prêts à commencer. Je m'excuse de mon retard.
Selon notre ordre de renvoi et conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous procéderons à l'examen des programmes, dépenses et résultats du ministère des Affaires indiennes et du développement du Grand Nord.
Nous recevons aujourd'hui l'honorable Jane Stewart, ministre des Affaires indiennes et du développement du Grand Nord, et des fonctionnaires de son ministère.
Avant de commencer, messieurs les députés, je soulignerai que la ministre ne dispose que d'une heure et que son programme est très chargé. Je lui demanderai de faire une introduction, après quoi on fera un seul et unique tour de questions lors duquel j'accorderai 10 minutes à chaque député de chaque parti politique.
Monsieur Scott, est-ce que vous êtes d'accord? Monsieur Bachand? Monsieur Keddy? Monsieur Patry? Parfait, nous allons commencer.
À vous, madame la ministre.
L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et développement du Grand Nord, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci à tous pour votre invitation.
[Traduction]
Monsieur le président, membres du comité permanent, je vous remercie de m'avoir invitée à prendre la parole aujourd'hui.
J'aimerais commencer en félicitant chacun de vous pour votre nomination à cet important comité. J'aurai le plaisir de travailler avec vous dans les mois à venir, alors que notre gouvernement façonne une nouvelle relation avec les peuples autochtones et les résidents du Nord.
Permettez-moi de vous présenter rapidement les employés de mon ministère qui m'accompagnent aujourd'hui. Vous aurez rencontré quelques-uns d'entre eux peut-être lors de vos séances d'information. M. Jim Moore est mon sous-ministre adjoint responsable des programmes du Nord. Cynthia Williams est sous- ministre adjointe pour les programmes et les politiques. Mon sous- ministre suppléant est Gary Wouters. Brent Dibartolo est sous- ministre adjoint pour les services ministériels et John Sinclair est sous-ministre adjoint pour les revendications territoriales et le gouvernement indien.
Étant donné qu'il s'agit de notre première rencontre, j'aimerais vous donner un aperçu des problèmes importants auxquels nous serons confrontés au cours des deux prochaines années à la suite des travaux du Ministère.
Commençons avec nos responsabilités dans le Nord.
La priorité de notre gouvernement dans le Nord est la création, en 1999, d'un nouveau territoire appelé le Nunavut. Nous continuons également à promouvoir l'amélioration du développement des responsabilités territoriales. Au Yukon, nous avons fait de bons progrès dans ces transferts, et les discussions vont bon train dans les Territoires du Nord-Ouest.
La nécessité de protéger le fragile environnement nordique tout en encourageant les initiatives de développement économique, comme l'ouverture de la première mine de diamants du Canada, figure également comme une priorité à notre ordre du jour.
La majeure partie des dépenses de mon ministère est, de loin, liée aux programmes des affaires indiennes et inuit. En 1997-1998, nous prévoyons que nos dépenses pour ce programme augmenteront de 2 p. 100, soit environ 81 millions de dollars, pour atteindre 4,1 milliards de dollars environ. Ce financement permettra aux peuples autochtones d'accéder aux nombreux services de base que les autres Canadiens obtiennent de leurs gouvernements provinciaux et municipaux, comme l'enseignement primaire et secondaire, les services sociaux, une régie locale, les infrastructures communautaires telles que les routes et les systèmes d'approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées.
Étant donné cette situation unique, il est difficile de comparer les dépenses de mon ministère avec celles des autres ministères, ou de comparer les dépenses fédérales au prorata du nombre d'Autochtones avec les dépenses au prorata du nombre des non-Autochtones.
J'aimerais souligner que pas moins de 82 p. 100 des fonds du programme des affaires indiennes et inuit servent à la prestation de ces services de base que les autres citoyens reçoivent de leur province et de leurs municipalités, comme je l'ai mentionné. Le reste de l'argent permet d'offrir divers services comme le logement, le développement économique et l'enseignement postsecondaire qui sont, à long terme, autant d'éléments essentiels à l'autosuffisance des Autochtones et à la réduction de leur dépendance envers l'aide sociale.
Dans ces conditions, pour quelle raison les dépenses de mon ministère augmentent-elles, même modestement, alors que celles de tous les autres ministères et organismes fédéraux continuent à être confrontées aux restrictions budgétaires? Une question légitime que j'ai souvent entendue au cours des dernières semaines. Ma réponse comporte deux volets.
D'abord, l'augmentation des dépenses est essentielle si l'on veut assurer la prestation d'un service de base dans les réserves. Les Canadiens n'en demandent pas moins. Aussi, notre gouvernement n'a pas l'intention de réduire son déficit aux dépens des plus vulnérables. Cela ne signifie pas pour autant que les Premières nations n'aient pas fait leur part pour réduire les dépenses fédérales. L'augmentation annuelle des dépenses liées aux programmes pour les Autochtones est passée de 11 p. 100 en 1991- 1992 à 2 p. 100 aujourd'hui. Pour ce faire, les employés du gouvernement et les dirigeants autochtones ont dû faire plusieurs choix difficiles.
La deuxième raison de l'augmentation des dépenses s'explique par le taux de croissance de la population autochtone, qui est environ deux fois plus élevé que celui de la moyenne canadienne. Dans les réserves, ce taux atteint 2,9 p. 100. De plus, la population indienne est très jeune. Près de 35 p. 100 de ceux qui habitent dans les réserves ont moins de 15 ans. Nous sommes témoins d'une explosion démographique autochtone, qui s'accompagne d'une croissance de la demande dans les domaines scolaires, du logement, de l'infrastructure publique, des services sociaux et de l'emploi dans les réserves.
• 1540
Non seulement devons-nous suivre le rythme de ces demandes
croissantes, mais nous devons de plus tenter de combler l'écart
entre la qualité de vie et les services offerts dans les réserves
et ceux dont bénéficient les collectivités non autochtones. Soyons
très clair à ce sujet, cet écart est à la fois important et
inacceptable. Je suis surprise d'apprendre que certains pensent, et
à tort, que les peuples autochtones jouissent de meilleures
conditions de vie que les autres Canadiens, qu'ils sont en quelque
sorte un groupe privilégié de notre société. Rien ne saurait être
plus loin de la vérité. Bien que la situation se soit améliorée au
cours des années, comme le démontrent les divers indicateurs
sociaux et économiques, les Autochtones demeurent encore
aujourd'hui les plus pauvres parmi les pauvres. Les indicateurs
comme la mortalité infantile, la dépendance à l'aide sociale, le
niveau du revenu et le chômage démontrent que les Autochtones
éprouvent plus de difficultés que les autres Canadiens.
Mais aujourd'hui une autre réalité émerge, celle des améliorations constantes et régulières dans ces réserves. Au cours des deux dernières décennies, les Premières nations, de concert avec les gouvernements qui se sont succédés, ont réalisé des progrès au chapitre de l'éducation, du développement économique, des soins de la santé, du logement et selon presque tous les indicateurs de bien-être socio-économique. Par exemple, plus de 96 p. 100 des logements dans les réserves ont maintenant l'eau potable, comparativement à 53 p. 100 en 1977-1978 et 92 p. 100 ont un système de traitement des eaux usées, comparativement à 47 p. 100 en 1997-1998.
D'après moi, une des principales raisons de ces améliorations s'explique par le fait que les Premières nations ont endossé la responsabilité de l'élaboration de leurs programmes à l'échelle communautaire. Environ 83 p. 100 des fonds de mon ministère, accordés aux programmes pour les Indiens, sont administrés par les Premières nations. Aujourd'hui, le travail de mon ministère n'est pas de fournir directement des services à l'intérieur des réserves, mais plutôt de travailler en partenariat avec les premières nations à l'élaboration de programmes et à la création d'ententes financières leur permettant d'offrir leurs propres programmes.
Ce transfert des responsabilités des dépenses soulève la question de la reddition des comptes qui, je le sais bien, intéresse particulièrement le Comité et tous les parlementaires. Nous avons récemment entendu des reportages au sujet de quelques Premières nations qui sont aux prises avec des difficultés financières. Ce qui fait moins souvent la manchette, c'est que la grande majorité des Premières nations administrent leurs finances avec succès.
Nous n'entendons pas assez souvent parler de Premières nations comme celle de la réserve anciennement connue sous le nom de Big Trout Lake. Il y a trois ans, cette collectivité était déficitaire de plus de 2 millions de dollars. Aujourd'hui, elle jouit d'un surplus de plus de 200 000 dollars, grâce à ses efforts pour réorganiser ses opérations et pour rediriger les surplus afin de couvrir son déficit. La Première nation a reçu une opinion sans réserve lors de sa dernière vérification. On ne nous raconte pas les belles histoires de la Première nation de Millbrook de la Nouvelle-Écosse, ou encore des premières nations Alexander et Miskisew, en Alberta, de toutes celles qui ont vécu un revirement heureux de leur situation financière.
Je ne dis pas que les Premières nations n'éprouvent pas de difficultés de temps à autre. Toutefois, nous préférons une démarche pro active axée sur la surveillance continue et la prévention. Dans les cas où le déficit accumulé excède 8 p. 100 des revenus totaux de la Première nation, nous exigeons un plan de redressement pour remédier à la situation. Je devrais mentionner au Comité cependant que plus de 80 p. 100 des Premières nations gèrent leurs finances en-dessous de ce seuil et arrivent à maintenir une position de déficit acceptable ou même disposent d'un excédent. Mais lorsque cela est nécessaire, ce plan peut être administré directement par le concerné, ou être sujet à des processus de cogestion ou encore, dans un cas extrême, il peut requérir la participation d'un tiers administrateur. J'aimerais souligner qu'actuellement, il n'y a que 15 cas pour lesquels le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a dû faire appel à un tiers administrateur pour étudier les problèmes financiers. De nombreux systèmes sont en place pour assurer la reddition des comptes pour les fonds publics, et mon ministère travaille actuellement en partenariat avec les Premières nations pour rehausser cette activité.
Le transfert de la responsabilité des programmes, ainsi que le règlement des revendications territoriales et la mise en oeuvre du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, aident le Canada à rétablir la relation qui existait à l'époque des premiers contacts entre les Européens et les groupes autochtones. Il s'agissait alors d'une relation de gouvernement à gouvernement, fondée sur la confiance et le respect mutuel. Nous devons faire renaître entièrement cette relation afin que les peuples autochtones soient des partenaires égaux du Canada, à l'aube du XXIe siècle.
Je peux vous assurer que la volonté politique y est. Dans le discours du Trône, nous avons classé l'augmentation des possibilités pour les peuples autochtones parmi les priorités de notre gouvernement. De plus, la grande majorité des Canadiens nous appuient. D'après un récent sondage réalisé par la firme Pollara, 80 p. 100 des Canadiens pensent que le gouvernement fédéral devrait faire des questions autochtones une priorité de moyenne ou de haute importance.
• 1545
Je pense également que le rapport de la Commission royale sur
les peuples autochtones peut servir de catalyseur pour les
changements. Le rapport final de la Commission royale représente
une entreprise colossale qui nous sert d'outil remarquable et
significatif alors que nous abordons les enjeux autochtones. Je
pense que sa plus grande valeur, non seulement pour moi en tant que
ministre, mais aussi pour tous les Canadiens, est de recommander
l'adoption d'un nouveau modèle, d'une nouvelle façon de se voir
ainsi que d'une nouvelle relation avec les peuples autochtones.
Grâce à cette nouvelle vision, le gouvernement fédéral peut bâtir l'avenir. Le secteur privé peut aussi bâtir l'avenir. Les provinces et les territoires peuvent bâtir l'avenir. Elle nous met tous au même rang, et nous participons à l'atteinte d'un but commun.
Notre gouvernement étudie très attentivement le rapport de la Commission royale, et nous y répondrons plus concrètement dans un avenir rapproché. Je sais qu'en cela nous dépasserons son premier anniversaire, mais je veux m'assurer de la qualité de notre réponse.
Comme je l'ai mentionné il y a quelques minutes, nous travaillons à combler l'écart entre les conditions socio- économiques des collectivités autochtones et des autres collectivités canadiennes. Mais il nous reste encore beaucoup à faire. Afin de changer de cap, je crois que nous devons concentrer nos efforts dans quatre grands domaines.
D'abord, nous devons consolider notre relation avec les peuples autochtones. L'heure est venue de renouveler notre partenariat en nous fondant sur le respect mutuel et la responsabilité.
Ensuite, nous devons travailler ensemble pour édifier des collectivités autochtones plus fortes. Cela signifie miser sur les besoins fondamentaux comme le logement et les systèmes d'approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées. Cela signifie concentrer nos efforts sur le développement économique, afin que les Autochtones acquièrent la formation et les connaissances pour devenir économiquement autosuffisants. Cela signifie également que nous devons investir dans chaque Autochtone, en particulier les enfants, afin de ne pas courir le risque de perdre la contribution qu'il peut apporter à notre société.
Le troisième domaine sur lequel nous voulons nous attarder est l'exercice des pouvoirs. Tous les gouvernements doivent continuellement améliorer leur capacité à gouverner dans un climat de changement. Cette réalité est également valable pour les gouvernements autochtones, et nous devons aider les peuples autochtones à rehausser leur capacité à gouverner. Nous devons travailler avec les dirigeants des premières nations afin de créer de nouvelles structures et nous devons aider les peuples autochtones à se réunir grâce à des programmes de perfectionnement professionnel.
Finalement, nous devons mettre en place un nouveau cadre financier, fondé sur la reddition des comptes et sur un financement stable qui rehaussera l'autosuffisance des premières nations.
La consolidation d'un partenariat, l'édification de collectivités plus fortes et plus saines, l'édification de la capacité des peuples autochtones à se gouverner eux-mêmes et l'établissement d'une nouvelle relation financière—voilà les éléments clés d'un avenir meilleur.
En ma qualité de ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, je crois que mon rôle est de nous faire progresser vers des objectifs en facilitant et en encourageant des partenariats entre les premières nations, les Inuit, les résidents du Nord, les autres instances gouvernementales et le secteur privé.
Je crois que nous devons tous travailler ensemble pour faire du Canada un meilleur pays pour les peuples autochtones. Je sais que le Comité appuiera cet objectif et je sais que vous avez beaucoup à offrir à cet égard.
J'aimerais vous remercier, monsieur le président, de m'avoir accordé ces quelques minutes pour m'exprimer sur la situation actuelle du Ministère et notre orientation future. Je suis disposé maintenant à répondre aux questions des membres du Comité.
[Français]
Merci.
Le président: Merci beaucoup, madame la ministre. C'est encourageant de vous entendre. En si peu de temps, vous avez su, en votre qualité de ministre des Affaires indiennes, trouver des solutions. Et je pense que nous trouverons d'autre solutions ensemble avec les députés qui sont présents aujourd'hui.
Je passe la parole à M. Scott pour une période de 10 minutes.
[Traduction]
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Madame la ministre, nous aimerions également vous remercier d'avoir pris le temps de comparaître devant le comité.
Il y a bien des choses intéressantes dans votre discours dont j'aurais aimé discuter avec vous aujourd'hui, mais compte tenu des récents documents qui nous ont été remis concernant la responsabilisation au sein du Ministère, je vais faire porter mes questions sur ce sujet, si vous le permettez.
Pensez-vous que l'utilisation abusive de l'aide sociale est aussi répandue que l'indique le document dont nous disposons, le document interne du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien?
Mme Jane Stewart: En effet. Une des premières choses que l'on m'a expliquée lorsque je suis devenue ministre a été le niveau de notre contribution et de notre investissement dans la population autochtone par le biais du programme d'aide sociale.
Le soutien du revenu est très souvent le seul revenu dont disposent de nombreuses familles autochtones et, bien entendu, c'est une manifestation de la réalité à laquelle font face les Autochtones en matière d'emploi.
Mike, vous savez que les niveaux sont très élevés.
M. Mike Scott: Oui.
Mme Jane Stewart: Je crois comprendre qu'à la suite du rapport du Vérificateur général de 1994, dans lequel il mettait l'accent sur l'aide sociale, nous avons pris un certain nombre de mesures pour tenter de répondre à certaines des préoccupations qu'il avait soulevées. Notamment, comme vous le faites remarquer, nous avons demandé un rapport sur le programme d'aide sociale. J'aimerais que vous sachiez que ce rapport, que nous avons reçu en 1996, constitue le fondement de notre réflexion sur les moyens de modifier la dynamique au sein du Ministère.
Plus précisément, en réponse à votre question, nous avons récemment entrepris un examen régional de l'aide sociale. Les chiffres sur les pratiques qui ne respectent pas les politiques se situent entre 3 et 5 p. 100.
M. Brent Dibartolo (Sous-ministre adjoint, Services ministériels, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Les chiffres se situent entre 1 et 3 p. 100.
Mme Jane Stewart: Nous nous sommes donc engagés à étudier le degré de conformité, et nos chiffres indiquent ces pourcentages, Mike. Mais, nous avons également pris un certain nombre d'autres initiatives pour améliorer la responsabilisation.
M. Mike Scott: Merci madame la ministre. J'aimerais qu'il soit bien précisé que personne ne suggère un seul instant que nous voulons réduire des fonds destinés à une aide sociale tout à fait légitime. Ce n'est pas là l'objet de cette question.
J'aimerais indiquer que le ministère lui-même a placé un document sur l'Internet auquel nous avons accédé. Ce document énonce notamment
-
Le cadre actuel de contrôle, de surveillance et de reddition de
comptes du Ministère est vague et insuffisant. Il ne permet pas de
s'assurer que les fonds de l'aide sociale dépensés par les
Premières nations sont utilisés aux fins pour lesquelles ils ont
été affectés par le Parlement.
Madame la ministre, vous parliez de l'augmentation des dépenses dans votre ministère. À nouveau, ce n'est pas que nous ne comprenions pas les besoins réels et les problèmes réels qui existent dans les réserves au Canada, mais étant donné que votre propre analyse des dépenses ministérielles montre que des fonds importants ne sont pas utilisés aux fins prévues, ne serait-il pas prudent, au nom des contribuables canadiens, et juste pour les personnes qui vivent sur ces réserves et qui demandent de l'aide, de colmater ces brèches avant d'augmenter votre budget?
Mme Jane Stewart: Toute la question de la modernisation du cadre de l'aide sociale est particulièrement importante pour moi. J'ai parlé tout à l'heure de la nécessité d'une nouvelle relation culturelle. Il me semble évident que les Canadiens souhaitent que nous réduisions l'écart entre les Autochtones et les non- Autochtones et que nous améliorions leurs conditions. Pour ce faire, il faut examiner les services et les programmes qui existent déjà. Nous devons bien évidemment examiner l'aide sociale. Nous prévoyons dépenser cette année environ 671 millions de dollars en aide sociale, ce qui est un investissement énorme.
Ce que nous comprenons et ce que nous constatons, à la suite je suppose des nouvelles stratégies que les provinces mettent en oeuvre, c'est qu'il existe de meilleurs moyens d'investir cet argent et de briser le cycle de la dépendance.
Si vous avez l'occasion de lire le rapport de la Commission royale, il y a tout un chapitre sur les effets qu'a eu l'État- providence sur les peuples autochtones canadiens. On y demande instamment de prendre de nouveaux engagements et d'adopter des mesures pour mettre fin à la dépendance—le cycle chômage, manque d'expérience, chômage. Nous pouvons effectivement apprendre des provinces et moderniser ces investissements, les rendre plus constructifs et faire en sorte que nous apportions non seulement des éléments de soutien du revenu mais également des stratégies qui soient plus pro actives dans leurs mesures.
M. Mike Scott: Madame la ministre, dans votre propre analyse ministérielle, il est dit que le cadre de contrôle, de surveillance et de reddition des comptes du Ministère est vague et insuffisant et qu'il ne permet pas de s'assurer que les fonds de l'aide sociale dépensés par les Premières nations sont utilisés aux fins pour lesquelles ils ont été affectés par le Parlement.
Je ferais également remarquer que le rapport—qui se trouve sur votre site Internet, madame la ministre, rapport sur le programme d'aide sociale destiné aux Premières nations réalisé par le ministère des Affaires indiennes—dit que les bénéficiaires de l'aide sociale sur les réserves sont en mesure de cumuler les prestations ou de faire plusieurs demandes en vertu du programme de soutien du revenu sans guère risquer de se faire prendre. Le rapport dit que cette pratique est presque impossible à détecter et qu'elle est possible entre les programmes fédéraux et entre les programmes fédéraux et provinciaux.
• 1555
Nous avons entendu dire que les employés des services sociaux
reçoivent de l'aide sociale. En fait, je l'ai entendu dire
directement.
J'aimerais vous demander, madame la ministre, si vous estimez que cela pose un problème et quelles mesures concrètes vous allez prendre pour y remédier?
Mme Jane Stewart: Oui, Mike, nous prenons des mesures. L'information dont vous parlez sur l'Internet provient, je crois, d'une vérification interne effectuée également en 1996.
En réponse à cela et à d'autres indicateurs, comme nous l'avons dit, qui vont dans le sens du changement, de la rationalisation et de la modernisation de la structure de responsabilisation en matière d'aide sociale, nous avons apporté un certain nombre de changements. Il pourrait être utile au comité d'entendre les explications de mon sous-ministre associé sur les stratégies nécessaires pour modifier la structure de responsabilisation ainsi que certains des résultats positifs que nous pouvons constater à la suite de ces changements.
Brent.
M. Brent Dibartolo: À la suite de cette étude, nous avons adopté des mesures importantes pour augmenter le nombre des contrôles. Chaque région a mis au point un plan de conformité et examine les paiements des prestations de l'aide sociale au sein de la région.
Par exemple, le Manitoba a établi un processus qui nous permet de vérifier les bases de données provinciales pour s'assurer qu'il n'y a pas de cumul. Mais même avec cette surveillance et cette attention accrues, on a découvert seulement un taux de 3 p. 100 de non-conformité.
M. Mike Scott: Madame la ministre, j'ai l'impression, en particulier par rapport à des remarques que vous avez faites en public au cours des derniers mois concernant les problèmes de la réserve Stony, de la réserve Hobbema et d'autres, que vos fonctionnaires vous disent que ces problèmes ne sont pas très graves. Ce document montre que les problèmes sont en fait très graves.
Je comprends que le document dont nous parlons aujourd'hui date de 1996, mais il y a un autre rapport sur l'Internet—et nous n'en connaissons pas la date—qui reprend ce qu'il y a dans le rapport dont nous parlons aujourd'hui.
Madame la ministre, ma question est la suivante: pensez-vous que votre ministère est franc avec vous et vous donne l'information dont vous avez besoin? Car nous avons l'impression, en tout cas j'ai cette impression, d'après les remarques que vous avez faites publiquement et ce que nous avons trouvé dans ce rapport, que l'on ne vous a pas donné toute l'information.
Mme Jane Stewart: J'aimerais expliquer un certain nombre de choses, Mike.
Tout d'abord, le rapport sur l'Internet est un rapport de 1996 d'une vérification interne. Voilà donc une première donnée.
D'autre part, je veux qu'il soit bien clair pour le public canadien, et je le répète ici, que la grande majorité des Premières nations—et il y a en plus de 630—gèrent leurs ressources financières de façon responsable. Quatre-vingt-deux pour cent ont reçu des vérifications sans réserve cette année. Nous faisons donc des progrès à cet égard.
Cela ne veut pas dire que certaines Premières nations n'ont pas de problème. Vous avez parlé de Stony et de Hobbema. Il y en a d'autres. On m'a posé une question hier en Chambre sur une Première nation au Nouveau-Brunswick.
Dans mes remarques, j'ai essayé de vous expliquer le processus que nous utilisons. Chaque année, nous exigeons une vérification de chaque Première nation. Nous les étudions. Lorsque nous découvrons qu'il y a un déficit de plus de 8 p. 100, nous insistons sur un plan de redressement.
Cela peut commencer par un plan qui nous est présenté, que nous examinons et que nous acceptons, et qui explique les moyens utilisés pour revenir à une situation d'excédent ou d'équilibre. Si nous ne sommes pas satisfaits, nous pouvons prendre d'autres mesures. Nous pouvons installer un cogestionnaire qui, parallèlement au chef du conseil dûment élu, détermine comment l'argent est dépensé. Si nous découvrons que cela ne fonctionne pas, nous pouvons faire intervenir un tiers, comme nous l'avons fait pour la réserve Stony. Très souvent, une firme comptable reconnue assume la responsabilité des décisions financières de la collectivité.
Par conséquent, le programme existe. Mike, je veux qu'il soit bien clair que nous ne généralisons pas et que nous ne suggérons pas que les Premières nations ne sont pas responsables car elles le sont.
Il y a bien sûr des problèmes, et nous devons y faire face. Nous devons établir des partenariats avec les Premières nations pour trouver des solutions car je crois que le gouvernement fédéral ne peut plus intervenir avec sa baguette magique et dire: « Voilà, tout est réglé ». Cela ne se passe pas de cette façon. Ce que nous devons faire, à tous les niveaux de gouvernement, est d'établir et de mettre en oeuvre une stratégie moderne qui encourage la transparence et la responsabilisation. Si nous voulons une vraie démocratie—et je pense que c'est ce que vous et le député de Wild Rose demandez—si nous voulons que la collectivité participe et soit au courant des décisions, il faut que le processus soit démocratique, soit transparent et responsable.
• 1600
Il y a une grande diversité de Premières nations qui montrent
la voie. Pensez par exemple aux Siksika. Ils se trouvent dans la
réserve Stony et partagent avec eux leur code d'éthique, leur code
de conduite, leur façon de gérer à titre de chef élu et de conseil.
Ce partage des meilleures pratiques commence à se répandre.
Ce n'est pas le gouvernement fédéral qui va trouver des solutions. Nous devons travailler en partenariat et reconnaître qu'aucun palier de gouvernement ne possède la solution en matière de pratiques de responsabilisation. Ensemble, je pense que nous pouvons régler ce problème.
Les temps changent, la technologie change et les besoins changent. À mesure que nous avançons vers l'autonomie gouvernementale, nous constatons, au sein des Premières nations elles-mêmes, les signes d'une démocratie plus réelle et une demande d'information sur la façon de prendre des décisions. J'estime que c'est un aspect très positif. Nous devons tous nous engager à soutenir ce processus et, dans le contexte de notre travail, grâce à notre compréhension et à nos partenariats, je pense que nous pourrons y arriver.
[Français]
Le président: Merci, madame la ministre. Monsieur Scott, votre temps est écoulé.
Monsieur Bachand.
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): J'ai beaucoup de questions à poser à la ministre; j'en ai préparé six. Je sais qu'elle n'aura pas le temps de répondre à toutes ces questions, mais j'apprécierais qu'elle ou ses fonctionnaires me répondent par écrit au sujet de celles qui resteront en suspens.
Le président: C'est une bonne stratégie.
M. Claude Bachand: Qu'en pensez-vous, monsieur le président?
Le président: Vous avez de l'expérience.
M. Claude Bachand: Depuis un bon bout de temps, je vous entends parler de briser la dépendance des autochtones et dire qu'il est important de leur donner un coup de main du côté du développement économique.
Pourtant, à la page 31 du document qui s'intitule «Affaires indiennes et du Nord Canada et Commission canadienne des affaires polaires, Budget des dépenses 1997-1998, Un rapport sur les plans et les priorités, Document pilote», le graphique 2 sur les tranches de votre important budget de quelque cinq milliards de dollars indique que, comme vous le mentionniez plus tôt, 671 millions de dollars vont à l'aide sociale et 57 millions de dollars au développement économique.
Je pose cette question à tous les ministres des Affaires indiennes qui viennent ici à tous les ans: pourquoi n'essayez-vous pas de renverser ces chiffres, afin qu'on accorde 671 millions de dollars au développement économique et quelque 50 millions de dollars à l'aide sociale? Cela m'apparaît être une entorse dans votre argumentation que de dire que le développement économique est important, alors que peu de ressources y sont affectées; les ressources vont plutôt du côté de l'assistance sociale. Il faudrait, d'après moi, hausser les budgets de développement économique.
Deuxièmement, je donnerai suite à la question de mon collègue. Dans ce même document, à la page 27, vous parlez de double responsabilisation pour les fonds investis; le chef et les conseils doivent rendre compte à la fois à leurs membres et au Parlement canadien. Vous venez de dire un peu de quelle façon vous entendez exercer un plus grand contrôle. Vous parlez aussi de l'exercice d'un plus grand contrôle auprès des membres ou d'une plus grande responsabilisation des membres des communautés autochtones. Vous parlez de transparence, de divulgation et de recours. Autrement dit, n'importe quel membre d'une communauté pourrait aller devant son conseil de bande et lui dire qu'il a reçu des fonds du gouvernement fédéral et veut savoir de quelle façon ils sont investis. S'il n'est pas d'accord, il a un recours et peut en appeler de la décision.
Je crois comprendre que la grande majorité des chefs des conseils de bande font cela, mais dans l'éventualité où ils ne le feraient pas, quels sont vos recours pour corriger le tir, étant donné que vous êtes un des bailleurs de fonds des conseils de bande?
Troisièmement, dans ce document, je n'ai trouvé aucune allusion à une indemnisation pour les torts qu'ont subis des autochtones dans les internats. C'est là une question que je vous ai déjà adressée en Chambre.
Quatrièmement, vous avez dit que vous répondriez à la commission royale dans un avenir très rapproché. Quand sera cet avenir pas très lointain? Je croyais vous avoir entendu dire que vous le feriez cet automne, mais peut-être ai-je mal entendu.
Mon avant-dernière question porte sur l'unification des terres à Kanesatake, pour laquelle on avait prévu un budget de 18 millions de dollars. Je voudrais savoir si cette unification est complétée ou s'il y aura d'autres choses à faire.
Finalement, il y a un dossier qui me tient bien à coeur, même si ce n'est pas un dossier du Québec. C'est celui de Davis Inlet, où je suis allé à plusieurs reprises. Les sommes qu'on a prévues et qui figurent à la page 77 sont assez minimales; je crois qu'on a prévu 10 millions de dollars pour cette année et 70 millions pour les exercices futurs.
• 1605
Ces gens doivent déménager immédiatement. Je
sais qu'il y a aussi des discussions avec Voisey's Bay
où se trouve une mine de nickel très importante.
Je voudrais savoir si on ne pourrait pas
prendre une parcelle
des milliards de Voisey's Bay et donner
quelques dizaines de millions de dollars
pour aider ces gens à se
reloger.
J'ai posé mes questions en rafale, monsieur le président. Je les ai défilées toutes les six. Je laisserai maintenant Mme la ministre répondre et j'attendrai le reste de ses réponses par écrit.
[Traduction]
Mme Jane Stewart: Peut-être pourrais-je répondre aux six questions en cinq minutes.
[Français]
Merci pour vos questions.
[Traduction]
Pour ce qui est de la première question, vous avez frappé juste. C'est l'argument que le chef national avance également. Il regarde les dépenses que nous consacrons à l'aide sociale et les fonds de développement économique et il estime que nous devrions les inverser. En fait, il me semble que mon prédécesseur, le ministre Irwin, lorsqu'il a comparu devant le comité, a déclaré que l'objectif serait en fait d'inverser les chiffres.
Je pense que nous sommes en train de découvrir que cela est vrai partout, que l'ancienne stratégie de l'aide sociale était bonne en son temps, mais que nous avons de nouveaux moyens d'action, en particulier le développement économique, sur lesquels nous devons nous concentrer. Nous devons oeuvrer pour changer la relation afin qu'elle soit plus pro active—des mesures concrètes en matière de formation et de développement—et nous devons associer les Premières nations aux leviers économiques et aux ressources et leur donner accès à ces ressources. Cela est essentiel, c'est pourquoi il est important pour nous que les provinces participent.
Quant à la seconde question sur la façon de mieux contrôler la gestion locale des Premières nations, je dirais que ce n'est pas tant que nous voulions assurer un contrôle mais plutôt comprendre notre rôle pour faciliter un exercice du pouvoir transparent et responsable. Dans l'un de ses derniers rapports, le Vérificateur général a sévèrement critiqué le Ministère pour avoir adopté une attitude de facilité en laissant les Premières nations se débrouiller toutes seules dans l'administration des programmes.
Nous nous rendons compte maintenant que nous avons un rôle réel à jouer pour contribuer au processus et encourager la capacité à gouverner et à gérer. Par conséquent, nos stratégies doivent se concentrer sur l'offre de ces services et sur notre présence dans les collectivités où il est approprié de partager les meilleures pratiques et pour encourager le perfectionnement professionnel. Une des mesures que nous pouvons prendre, si les exigences ne sont pas respectées, est de refuser d'accorder des fonds, comme vous l'avez indiqué.
Pour ce qui est des internats, je sais que le député a soulevé cette question en Chambre deux ou trois fois. Je comprends votre intérêt pour cette question. Je la trouve également très difficile. Le chapitre du rapport de la Commission royale qui parle des pensionnats est très convaincant. J'ai moi-même une de ces écoles dans ma circonscription, c'est pourquoi je connais bien la question.
Pour certains, les internats n'ont pas été une mauvaise expérience. Pour d'autres, il y a eu effectivement des abus physiques et sexuels qui ont marqué leur vie et la vie de leur collectivité. J'espère qu'en répondant au rapport de la Commission royale, nous pourrons nous concentrer sur cette question, car, pour moi, c'est un exemple du genre de relation que nous avions par le passé qui nous a empêchés d'établir des partenariats solides et de comprendre la relation de traité originale qui était la nôtre il y a 100 à 150 ans.
Pour ce qui est d'une réponse générale au rapport de la Commission royale, vous avez raison. J'avais espéré pouvoir répondre avant le 21 novembre. Le travail des commissaires a été exhaustif et, lorsqu'on parle avec eux, on se rend très bien compte que leur participation à ce travail a modifié leur vie personnelle car ils en sont venus à comprendre réellement la vie des peuples autochtones du Canada.
Malheureusement, l'échéance du 21 novembre est passée. Le défi que je dois relever c'est de profiter de l'occasion offerte par le fait que les Premières nations, les Inuit, les Métis, les gouvernements provinciaux et territoriaux, et même le secteur privé, disent qu'ils souhaitent un changement, qu'ils souhaitent un changement structurel qui tienne compte des recommandations de la Commission royale. Comment peut-on le faire?
Je tiens à le faire bien, car c'est une occasion unique. Comme je l'ai dit, c'est pour nous un catalyseur que de se servir de la réflexion et de toute l'information qui ont conflué pour nous mettre tous au même rang afin de construire une structure dans laquelle chacun peut voir son rôle et sa façon de contribuer à améliorer la vie des peuples autochtones. C'est un défi, mais un défi qui fait l'objet de toute mon attention depuis que je suis devenue ministre.
Pour ce qui est de Kanesatake, j'ai eu le privilège il y a une semaine et demie de visiter cette collectivité. Je dois vous dire que j'ai été très impressionnée par les changements qui se sont produits depuis les jours sombres du début des années 90. Je crois que le chef et le conseil sont déterminés à apporter des changements réels et à comprendre comment ils peuvent effectivement mieux répondre aux besoins de leur collectivité.
• 1610
J'applaudis au travail de notre négociateur et des autres
présents à la table de négociation. Nous constatons des
améliorations progressives avec l'agrandissement du cimetière ainsi
que le programme linguistique qui permet l'enseignement du mohawk.
Avec certaines difficultés, mais en améliorant les relations avec
les communautés voisines, j'espère que nous pourrons continuer de
progresser. En fait, cela nous tient particulièrement à coeur.
En ce qui concerne Davis Inlet, il s'agit d'une importante initiative, non seulement pour le ministère mais pour toute la population de Davis Inlet. Nous avons fait en sorte qu'un gestionnaire de projet soit sur place pour que l'argent soit dépensé et investi.
Vous avez soulevé la question de Voisey's Bay. J'ai l'impression que nous allons faire des progrès dans cette partie de Terre-Neuve et du Labrador de façon à ce que les Inuit qui y vivent et dont les territoires font maintenant l'objet d'une exploitation intense des ressources, puissent être partie prenante à cette exploitation. Nous demandons que des accords de participation soient signés entre Voisey's Bay, les Premières nations et les Inuit pour que ces derniers puissent bénéficier et participer, non seulement financièrement mais également sur le plan économique et des emplois.
[Français]
Le président: Merci, madame la ministre et monsieur Bachand.
Monsieur Earle.
[Traduction]
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): J'aimerais également remercier la ministre de l'occasion qui nous est donnée de lui poser des questions et je la remercie pour ses remarques.
Premièrement, je note que dans vos remarques, vous avez parlé d'édifier des collectivités autochtones plus fortes, et je conviens que cela est très important. Comme nous le savons, pour édifier des collectivités plus fortes, il faut une base économique et une base territoriale suffisantes. Cela m'amène à ma question sur les revendications territoriales.
Il y a peu de temps, j'ai soulevé une question sur les revendications territoriales de la Première nation de Pic River. Cette Première nation avait une revendication territoriale qui a été présentée au ministère de la Justice afin d'obtenir une opinion juridique. Cette opinion juridique, selon la Première nation, comportait de graves imperfections, et elle en a donné les raisons.
Elle a donc demandé une opinion juridique indépendante. Elle a demandé que le ministère travaille en partenariat avec elle pour obtenir une opinion juridique indépendante plutôt que de devoir passer par les tribunaux. Elle avait entamé des poursuites pour maintenir son droit de le faire, mais elle a indiqué être tout à fait prête à retirer cette poursuite si vous, en tant que ministre, acceptiez de collaborer avec elle pour obtenir un examen juridique indépendant. Pourriez-vous me dire où en est la situation?
Mme Jane Stewart: J'aimerais expliquer une ou deux choses.
Je vais laisser mon sous-ministre adjoint chargé des revendications parler plus précisément de Pic River, mais une des choses qui est très claire pour moi—et je le vois chez moi, dans ma propre collectivité; les Six nations, ont des exigences en matière de revendications territoriales auxquelles nous devons répondre... Un des problèmes du gouvernement a été d'être à la fois juge et partie en matière de revendications territoriales. Nous avons collaboré avec l'Assemblée des premières nations pour établir une commission indépendante, autonome, qui étudierait les revendications territoriales particulières. Nous avons fait beaucoup de progrès avec le groupe de travail technique de notre personnel et de l'Assemblée des premières nations. Le chef national a présenté certaines des premières recommandations à l'Assemblée à Québec, il y a trois semaines, et les responsables viendront bientôt me faire part de leurs réflexions et de leurs préoccupations.
Tout cela pour dire que je crois très fermement que l'avenir des collectivités des Premières nations dépend de notre capacité à régler les revendications territoriales, particulières et globales. Nous devons établir un processus jugé indépendant, mais qui nous permette également d'accélérer les choses et qui soit plus économique. Pour le moment, les Premières nations font leur propre recherche, nous faisons la nôtre. Il y a donc beaucoup de double emploi, ce qui coûte de l'argent. Si nous pouvions établir un organisme indépendant qui ferait la recherche pour nous tous, cela me semblerait beaucoup plus logique.
Je vais passer la parole à John qui vous parlera de Pic River.
M. John Sinclair (Sous-ministre adjoint, Revendications et gouvernement indien, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): À Pic River, la question était de savoir si la Première nation répondait aux critères des revendications globales. Nous estimons que, dans la mesure où elle est partie à un traité, une revendication globale n'est pas admissible.
C'est un de ces cas où lorsque l'on dit que cela ne respecte pas certains critères, les gens font appel. D'après les dernières informations dont je dispose, la cause est devant la Cour fédérale. Une fois que la cause est devant les tribunaux, nous ne pouvons pas en dire beaucoup plus.
M. Gordon Earle: Ce n'est pas exactement la question que j'ai posée. Selon l'information qui m'a été remise, je comprends qu'effectivement la question a été déférée devant la Cour, mais au moment où les parties ont communiqué avec moi, aucune date n'avait encore été fixée.
Les parties ont indiqué qu'elles étaient prêtes à retirer la poursuite, ce qui peut être fait, comme nous le savons tous. Si les deux parties sont d'accord, la question peut être réglée à l'amiable. Ce que ces gens demandaient simplement, c'est ce que vous avez décrit, une opinion juridique indépendante qui ne vous obligerait pas à être juge et partie. C'est ce qu'ils demandaient pour que la cause ne soit pas entendue devant les tribunaux. Je voulais savoir si cette demande avait été accordée et si non pourquoi?
M. John Sinclair: Je devrais sans doute vous répondre par écrit, monsieur.
D'après ce que j'ai compris, la question de l'opinion juridique indépendante me paraissait difficile à établir. Nous avons notre position. Nous l'avons énoncée devant le tribunal. Nous sommes maintenant en appel. En ce sens, je ne pense pas que les choses aient avancé davantage, mais je pourrais vous répondre plus tard pour vous donner une meilleure idée de la situation.
D'après mes informations, la Première nation a fait appel. Je pense donc que nous allons passer par la voie judiciaire. Je communiquerai de nouveau avec vous pour vous donner plus de détails.
M. Gordon Earle: Merci.
Pour terminer, puis-je obtenir cet engagement? Existe-t-il une possibilité de ne pas passer par la voie judiciaire et le Ministère est-il prêt à régler la question à l'amiable?
M. John Sinclair: Nous sommes toujours prêts à régler les questions à l'amiable. Mais en raison de cette question d'opinion indépendante par le ministère de la Justice, je devrais à nouveau le consulter car je ne veux pas parler au nom d'un autre ministère. Mais j'étudierai la question.
M. Gordon Earle: La ministre a parlé d'investir dans les peuples autochtones, en particulier dans les enfants. Je reviens à la question soulevée par mon collègue à ma droite, celle des internats.
D'après ce que vous avez dit, il semble que vous vouliez régler cette question dans le cadre de la Commission royale sur les peuples autochtones. Il me semble qu'il n'est pas nécessaire de traiter cette question particulière de façon à devoir attendre que l'ensemble du rapport ait été analysé.
Je pense que les 50 pages qui traitent de ce sujet sont assez claires et qu'à cette étape, de simples excuses permettraient certainement au processus de guérison de commencer. Il s'agit de quelque chose de particulièrement important pour tous ceux qui ont été victimes d'abus, les adultes qui en souffrent depuis de nombreuses années. Je suis sûr que cette première étape, le fait que le gouvernement du Canada dise officiellement «Nous sommes désolés» ne vous empêchera pas de prendre d'autres mesures éventuellement.
La ministre est-elle prête à aller dans ce sens immédiatement?
Mme Jane Stewart: C'est une très bonne question. J'imagine que le député connaît des exemples de personnes ayant fait face à cette situation.
Une des choses que j'ai trouvées absolument fascinantes lorsque j'essaie de comprendre la dynamique de cette question, c'est qu'il est extrêmement important de comprendre les implications de toute décision que nous allons prendre pour favoriser cette guérison. Dans le rapport de la Commission royale, par exemple, on a proposé de tenir une enquête publique, ce qui est envisageable. Mon opinion personnelle est que nous savons déjà ce qui s'est passé.
Il est devenu évident notamment que lorsqu'il y a des occasions publiques, cela peut être bon, mais cela peut être très préjudiciable lorsque les gens ressortent des choses qu'ils ont évidemment réprimées pendant une bonne partie de leur vie. Si cela devait se produire, il faudra les aider pour que la guérison puisse effectivement commencer.
Il nous a été très difficile d'envisager toutes ces options possibles pour répondre à cette situation. Que ce soit une enquête ou des excuses, une stratégie de guérison ou des programmes linguistiques—il y a beaucoup de possibilités et je reçois des recommandations de toutes sortes de gens.
Le problème est donc de reconnaître que quelles que soient les mesures que nous prendrons, elles auront des effets. Ce n'est pas quelque chose que nous puissions régler une fois pour toute. C'est un processus extrêmement dynamique qui va avoir des effets sur la vie de certaines gens. C'est pourquoi nous devons prendre les bonnes mesures.
• 1620
Tout cela pour dire que j'estime qu'il s'agit d'une des études
humaines les plus émouvantes et les plus intéressantes auxquelles
nous ayons fait face dans ce pays et je crois que tous les
Canadiens aimeraient que nous traitions cette situation de façon
positive car, sinon, ce serait un point noir.
M. Gordon Earle: Merci.
Je ne veux pas parler du point noir par rapport à la façon dont nous agissons souvent dans les cercles des droits de la personne. Je vais passer à la dernière question qui concerne Ipperwash. Là encore, il est question de permettre à la guérison de commencer et d'obtenir des réponses.
Nous sommes tous au courant du meurtre de Dudley George qui a eu lieu en 1995. Les Premières nations ont demandé une enquête publique à ce sujet car il reste encore de nombreuses questions non résolues. Le gouvernement fédéral est-il prêt à appuyer ou à mettre en oeuvre une enquête publique pour répondre aux questions que cet événement tragique a laissé sans réponse?
Mme Jane Stewart: Il s'agit effectivement d'un événement tragique. J'ai rencontré la famille George et il ne fait aucun doute dans mon esprit qu'il subsiste encore des questions très importantes entourant les circonstances du meurtre de Dudley George.
Selon notre compréhension des compétences, il est très clair que toutes les questions qui préoccupent la famille sont de compétence provinciale. C'est donc à ce niveau qu'une enquête publique devrait avoir lieu. J'espère que la province, sachant que les citoyens et les électeurs de la province ont encore d'importantes questions non réglées, jugera opportun de tenir une enquête publique.
[Français]
Le président: Merci beaucoup, madame la ministre.
Monsieur Keddy, vous avez dix minutes.
[Traduction]
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Merci, madame la ministre, de comparaître devant le comité aujourd'hui. Nous l'apprécions beaucoup. Nous sommes nombreux à avoir des questions à poser, je vais donc commencer.
Il y a une question qui me laisse perplexe. Certains pensent qu'elle a été réglée, mais je ne suis pas sûr que ce soit le cas. J'aimerais avoir votre définition de l'autonomie gouvernementale autochtone.
Mme Jane Stewart: Fondamentalement, si vous regardez la Constitution, le gouvernement estime que les droits autochtones sont effectivement reconnus dans les articles 35 et 25. Ce sont des droits que vous et moi avons établis ou créés, mais en fait, ce sont des droits que nous avons la responsabilité de comprendre et dont nous devons tenir compte dans nos structures de gouvernement.
Par le biais de mon prédécesseur, Ron Irwin, notre gouvernement a présenté une politique sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale dans nous estimons qu'elle permet de tenir compte des droits autochtones dans le cadre de la Constitution, de la Charte des droits et du Code criminel. Nous croyons, et c'est également la recommandation des commissaires de la Commission royale, qu'en établissant des gouvernements autochtones autonomes et concrets, nous pourrons non seulement refléter ces droits mais également établir une structure qui permettra d'offrir de meilleurs services, d'assurer des programmes plus adaptés sur le plan culturel, de fournir une meilleure définition de notre mode de collaboration et de préciser la façon dont nous devons travailler ensemble. Pour moi, l'établissement d'un lien de gouvernement à gouvernement est extrêmement important car cela démystifiera les problèmes et peut-être l'incertitude que nous connaissons; et je parle autant des Autochtones que des non- Autochtones.
Dans le cadre de l'autonomie gouvernementale, nous essayons actuellement d'établir des tables de discussion sur les diverses compétences dans des domaines comme l'éducation, la justice et les droits de chasse et de piégeage. En tant que tel, il est important pour nous que les provinces...
M. Gerald Keddy: Excusez-moi de vous interrompre, s'il vous plaît. Je comprends cela. La question que je pose est la suivante. Les peuples autochtones eux-mêmes ne s'accordent guère sur ce qu'est l'autonomie gouvernementale. Et le reste de la population, les non-Autochtones du Canada ne s'entendent pas davantage sur le sujet. Je vous poserai donc une question directe: «Considérez-vous l'autonomie gouvernementale des peuples autochtones du Canada comme un fait accompli?» Je pense que c'est l'opinion de la plupart d'entre nous. Nous allons dans ce sens. Considérez-vous également qu'en fin de compte ils sont encore sous l'égide du gouvernement canadien et qu'on les considère encore comme des citoyens canadiens? Répondez simplement oui ou non, cela suffira.
Mme Jane Stewart: Je ne réponds pas par des oui ou des non; donc, si c'est ce que vous souhaitez, vous m'excuserez.
M. Gerald Keddy: En quelques mots, parce que j'ai beaucoup d'autres questions.
Mme Jane Stewart: Fondamentalement, on peut trouver notre interprétation dans la politique sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Si vous ne l'avez pas lue, vous devriez en obtenir un exemplaire. Je serais heureuse de vous en faire parvenir un.
Nous commençons à nous apercevoir qu'elle se définit elle-même dans les ententes que nous avons rédigées, particulièrement au Yukon, ainsi que dans le renouvellement du processus des traités en Colombie-Britannique. J'ai le sentiment que, comme il se doit, c'est le chemin que nous devons emprunter. Tout cela s'exprimera à la table de négociations. C'est là où les choses se passent.
M. Gerald Keddy: Merci de votre réponse. À mon avis, ce n'est guère précis.
Voici ma deuxième question. Vous avez déclaré que les dépenses du MAINC avaient augmenté de 11 p. 100 en 1992. L'augmentation a été de 2 p. 100 en 1998, ce qui est manifestement une bonne nouvelle. Mais, par contre, notre pays connaît une très forte augmentation de sa population autochtone. En fait, elle est très considérable, soit de 30 p. 100.
Il y a également beaucoup d'autres groupes dans notre pays qui recherchent le statut d'Autochtones. On a logiquement passé sous silence certains d'entre eux. D'autres recherchent le statut d'Autochtones, mais la ministre ou les tribunaux en décideront. Existe-t-il des estimations sur le nombre de groupes qui recherchent le statut d'Autochtones? Combien cela représente-t-il de personnes? Combien cela coûtera-t-il? Quelles seraient les prévisions du MAINC si nous les reconnaissions tous?
Mme Jane Stewart: Je n'ai pas de chiffres; peut-être quelqu'un ici les connaît. Je vous dirai simplement qu'il existe une politique au sein du ministère qui dit que nous ne sommes pas en mesure d'élargir de statut de réserve sauf dans des circonstances où cela n'engage aucun coût.
Cela répond-il à votre question?
M. Gerald Keddy: Je vous remercie.
J'ai quelques questions sur le Nunavut. Plus précisément, je crois que le Nunavut sera créé le 1er avril 1999. Il règne à l'heure actuelle beaucoup d'inquiétudes au sein du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, à savoir si ce processus sera prêt d'ici là. Ils sont dans une situation où le gouvernement devra peut-être entrer en jeu au cours de la période de transition et prêter du personnel ou autre au nouveau territoire du Nunavut. Je pense qu'ils sont très disposés à le faire.
Ce qui les préoccupe, c'est qu'il n'y a pas suffisamment de dialogue direct avec le MAINC à ce sujet. Il semble que tout arrivera d'un seul coup le 1er avril 1999. La situation dans laquelle ils se trouvent au point de vue de leurs exigences en matière de dotation de personnel et de budget est telle qu'ils mettront du personnel à pied vers la fin de 1998. Il y a donc là un temps mort de six mois.
Je suis persuadé que vous êtes bien au courant de cette situation. Avons-nous un plan d'urgence—la réussite de ce nouveau gouvernement revêt une importance critique dans tout ce que nous ferons d'autre à l'avenir au Canada—afin qu'il n'y ait pas ce temps mort et que les gens et le gouvernement ne passent pas entre les mailles du filet?
Mme Jane Stewart: C'est une excellente question. Permettez- mois de vous assurer que l'on a confié dès maintenant au bureau du commissaire intérimaire du Nunavut la responsabilité de s'assurer qu'un cadre de travail suffisant sera en place d'ici avril 1999. Cela a été fait pour qu'au moins les programmes très importants—et je pense ici aux programmes de santé—soient disponibles.
Manifestement, ce que nous ne voulons pas faire, c'est aller trop loin, afin que ceux et celles qui seront élus au nouveau gouvernement ne se retrouvent devant un fait accompli.
M. Gerald Keddy: Non, non.
Mme Jane Stewart: Donc, le défi que nous devons relever, c'est de nous assurer qu'il existe un cadre de travail qui garantisse la prestation des services au fur et à mesure que le nouveau gouvernement se concrétise et commence à prendre forme.
En ce qui concerne les discussions sur les progrès, nous avons eu une séance des leaders. À l'heure du dîner, je viens tout juste de rencontrer le Premier ministre du gouvernement des Territoires du Nord-ouest. Je pense que nous rencontrerons les responsables en janvier pour parler des progrès. Mais le bureau du commissaire intérimaire est en place. Nous faisons des progrès. Il est là pour engager le personnel réduit chargé de la bureaucratie et édifier le cadre de travail de sorte que les exigences minimales soient en place afin d'offrir les services.
. 1630
M. Gerald Keddy: La mise en valeur du diamant dans les Territoires du Nord-ouest est un aspect très passionnant pour la plupart des gens au Canada. Bien des gens, dont moi-même, n'ont vraiment pas bien compris la portée et l'ampleur du sujet, et c'est toujours le cas. Il règne une grande inquiétude dans le Nord à propos du tri et de tout le travail qui s'effectue aux T.N.-O.
Avons-nous pris cela en compte et avons-nous étudié un genre de programme analogue à ce qui se fait en Australie? Là-bas, les Autochtones reçoivent en fait une partie de leurs redevances de la compagnie minière sous forme de diamants non taillés? Ils ont leur propre petite industrie du diamant. Elle est encore jeune, mais c'est une industrie, et ils taillent eux-mêmes les diamants et emploient beaucoup de gens.
Dans le Nord, on s'inquiète beaucoup du fait que cela ne se fera pas ici, alors que ces gens ont désespérément besoin d'emplois. On ne parle pas ici de menue monnaie. Les chiffres volent, mais ceux que j'aime le plus sont 240 milliards de dollars en 25 ans. C'est une industrie importante.
Mme Jane Stewart: C'est une excellente question et il ne fait aucun doute que la mise en valeur des mines de diamant au Canada est une nouvelle et merveilleuse occasion pour les gens du Nord et pour nous tous. Nous voulons nous assurer d'obtenir le maximum de cette ressource. Au sujet des possibilités de valeur ajoutée, j'ai rencontré récemment le ministre des finances responsable du GT.N.-O. John Todd, ainsi que Steve Kakfwi, le ministre responsable des aspects qui ont trait à la mine de diamant. Nous avons un groupe de travail interministériel et intergouvernemental qui étudiera les options possibles pour des emplois à valeur ajoutée au GT.N.-O.
Cependant, je vous ferai remarquer qu'il existe certaines exigences à ce sujet. Les possibilités de valeur ajoutée ne devraient pas nécessiter de soutien gouvernemental. Elles devraient s'autofinancer et ne devraient pas nécessiter d'appui de la part du gouvernement. Par ailleurs, elles ne doivent pas aller à l'encontre de nos engagements envers les accords commerciaux internationaux comme l'ALENA ni les accords commerciaux interprovinciaux. Nous travaillons donc sur ce point. Et vous avez raison, nous voulons nous assurer de bénéficier au maximum de nos diamants.
[Français]
Le président: Merci, monsieur Keddy. Merci, madame la ministre.
C'est toujours une tradition du comité quand on étudie le budget des dépenses. Je sais que votre programme est très chargé. Je vais maintenant passer la parole à la dernière intervenante, Mme Longfield, pour 10 minutes.
[Traduction]
Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Merci. J'apprécie cette occasion.
Les questions et les réponses de l'opposition m'ont intéressée. J'ai plusieurs questions. J'essaierai de les garder aussi brèves que possible. Les deux premières ont trait au financement.
On nous dit que 83 p. 100 du financement va directement aux Premières nations et à d'autres organismes et environ 10 p. 100 aux provinces pour les services de programmes. Il reste donc 7 p. 100 du financement qui est administré par le MAINC en vertu de ses obligations juridiques. Lorsque je m'aperçois que l'on dépense de l'argent dans ce secteur, je remets toujours la chose en question. Pourriez-vous m'aider à ce sujet?
Mme Jane Stewart: Si je ne me trompe pas—et je demanderai à mon personnel de soutien de me corriger si je me trompe—ces dépenses correspondent essentiellement à des choses comme le logement, les études postsecondaires et d'autres exigences que nous estimons nécessaires pour offrir un éventail complet et une stratégie de services aux peuples autochtones du Canada. Nous dépensons environ 3 p. 100 du financement en administration et frais généraux ministériels.
Mme Judi Longfield: D'accord. Donc, il est un peu trompeur de catégoriser cela comme étant juridique.
Mme Jane Stewart: Oui. Nous pouvons être beaucoup plus précis que cela. Ces dépenses vont aux soutiens et aux programmes particuliers comme le logement et les études postsecondaires. Environ 3 p. 100 vont à l'administration et aux frais généraux.
Mme Judi Longfield: D'accord. Nous dépensons environ 39 millions de dollars supplémentaires pour l'autonomie gouvernementale. Pourriez-vous me donner quelques détails supplémentaires à ce sujet?
. 1635
Mme Jane Stewart: Comme nous en avons parlé précédemment, nous nous concentrons et notre gouvernement se concentre sur l'avancement de notre politique relative aux droits inhérents à l'autonomie gouvernementale. Nos tables de négociations oeuvrent dans tout le pays, et nous y parlons de la négociation de l'autonomie gouvernementale. À ces tables, nous parlons de la restauration réelle du ressort territorial. Nous convenons d'abord des compétences territoriales qui nous intéressent, puis nous faisons des progrès, comme nous le ferions à toute table de négociations; mais ce sont là les investissements que nous faisons pour en arriver à la mise en oeuvre de l'autonomie gouvernementale.
Mme Judi Longfield: Une partie de cet argent va-t-elle directement aux divers groupes pour les aider à préparer leurs causes?
Mme Jane Stewart: À vrai dire, le processus que nous avons en place à l'égard de la signature des ententes est intéressant. En fait, l'argent qui est dépensé en recherche et en négociations est, après un certain temps... John, à partir de quel moment l'horloge commence-t-elle à compter l'argent que l'on dépense en négociations?
M. John Sinclair: Si vous me permettez de donner quelques éclaircissements, l'argent de l'autonomie gouvernementale revêt plusieurs aspects. Une partie est consacrée aux accords actuels relatifs à l'autonomie gouvernementale—par exemple, l'accord sechelte. Nous consacrons des fonds à l'accord d'autonomie gouvernementale des Cris et des Naskapis en vertu duquel les Cris fournissent eux-mêmes toute une gamme de services. D'autres sommes sont fournies par le biais de subventions à l'appui des négociations, et, en fait, c'est là que l'on s'entend non seulement sur ce que sont les compétences territoriales et la façon dont on souhaite qu'ils concordent avec les compétences fédérales et provinciales et s'harmonisent avec elles, mais également que l'on élabore les structures de gouvernement que l'on souhaite mettre en place pour s'assurer que l'on a un genre de gouvernement efficace, efficient et transparent. Nous faisons donc toute une gamme d'investissements dans ce domaine.
Il faut distinguer ces sommes des prêts que nous accordons aux groupes de négociations sur les revendications, en ce qu'il s'agit d'un premier règlement, car nous avons une garantie et que cela se fait dans un but différent. Il y a donc toute une gamme d'investissements qui se font tous au titre de l'autonomie gouvernementale.
Mme Judi Longfield: À propos de l'autonomie gouvernementale, j'aimerais savoir ce qui arrive au Manitoba. Nous avons une initiative d'accord relatif à un cadre de travail. Sommes-nous sur la bonne voie? Qu'arrive-t-il dans ce dossier?
Mme Jane Stewart: En fait, c'est l'une des premières et des plus vastes initiatives sur laquelle nous nous sommes penchés pour édifier des stratégies concernant l'autonomie gouvernementale. Le travail se poursuit. Je viens de rencontrer le chef du MKO ainsi que les chefs du Manitoba et nous passons en revue leurs plans de travail. Les examens des investissements passés feront partie des investissements qui continuent en fonction du plan de travail. J'ai le sentiment qu'il existe une grande volonté et un fort intérêt pour aller de l'avant et que les conversations qui ont lieu à l'heure actuelle, une communauté après l'autre, afin d'expliquer les possibilités et la force potentielle du projet de démantèlement au Manitoba, l'accord relatif au cadre de travail, font de l'avant.
C'est un énorme projet, une vaste entreprise, mais je pense qu'il est approprié, car il reflète l'engagement de notre gouvernement d'aller de l'avant vers l'autonomie gouvernementale.
Mme Judi Longfield: Je ne voudrais pas vous mettre sur la sellette, mais avez-vous un calendrier?
Mme Jane Stewart: Selon nos exigences, les plans de travail devraient être examinés chaque année. Nous y travaillons depuis trois ans maintenant, et en ce qui concerne le moment où nous pourrions envisager la mise en oeuvre...
M. John Sinclair: Je pense que ce sera dans deux ou trois ans. Pour comprendre ce dont nous parlons, il faut savoir que nous disons fondamentalement aux 61 Premières nations au Manitoba—je pense qu'il y en a 61—«D'accord, vous prendrez charge de tous les services qu'offrent les Affaires indiennes afin qu'il n'y ait plus trace de nous. Mais vous prendrez également en charge les services des autres ministères fédéraux et vous devrez les harmoniser avec les services provinciaux, par exemple en ce qui concerne la protection de l'enfance et les services familiaux, et tout ce qui s'en suit.»
Je pense que le point important, maintenant, consiste à définir, si nous devons agir ainsi, quel genre d'architecture gouvernementale assurerait la responsabilité, puis comment la répartir. Y aura-t-il une autorité en matière d'immobilisations qui s'occupera de tous les grands travaux, une autorité pour les services sociaux...? Au fur et à mesure que les gens résolvent ce genre d'options de conception, ils commencent à comprendre l'ampleur du travail.
. 1640
Je pense donc qu'il faudra encore deux ou trois ans avant que le plan soit mis en oeuvre, et si c'est nous qui nous le faisions, nous travaillerions probablement sur un secteur, à propos duquel nous dirions: «D'accord, nous avons la structure; maintenant, fournissons les services dans toute la province.» C'est assez passionnant, mais la portée est de taille.
Le président: Dernière question.
Mme Judi Longfield: D'accord, merci.
Madame la ministre, vous avez fait mention du travail qui s'effectue en colombie-britannique; je pense que c'était en répondant aux questions de M. Keddy. Nous avons actuellement une entente de principe avec les Nisga'a. Sommes-nous prêts d'en arriver à un accord définitif?
Mme Jane Stewart: Le travail en Colombie-Britannique est extrêmement important. Pour une raison ou pour une autre, nous avons cessé de rédiger des traités il y a un siècle, lorsque nous sommes arrivés dans la province de la Colombie-Britannique. Je félicite sincèrement les gens de cette province d'avoir lancé cette initiative et d'agir en tant que partenaires avec nous dans le processus de rédaction de traités modernes.
L'entente de principe a été signée, les trois parties travaillent de façon très dynamique de manière à en arriver à un accord final. Je ne puis guère dire quand cela sera fait. Nous parlons d'un certain nombre d'enjeux qui orbitent encore autour de nous, mais la volonté est là. Il ne fait aucun doute que les Nisga'a sont impatients d'en arriver à une conclusion. L'engagement à la fois de la province, de nous-mêmes et de la Première nation des Nisga'a est d'être là à la table, et le travail progresse de façon dynamique.
[Français]
Le président: Merci, madame Stewart. Est-ce que vous êtes en avance sur votre horaire?
L'hon. Jane Stewart: Je suis en retard de 15 minutes.
[Traduction]
Le président: Avez-vous le temps pour une deuxième ronde en donnant cinq minutes à chaque personne qui pose une question?
Mme Jane Stewart: Oh! Non, je suis désolée. J'ai déjà 15 minutes de retard.
Le président: D'accord, merci beaucoup.
[Français]
Nous n'avons vraiment pas assez de temps. Ne tardez pas.
[Traduction]
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): À l'égard d'un rappel au Règlement, j'aimerais beaucoup que la ministre reste quelques instants de plus si cela est possible, mais en tant que membre du gouvernement, j'aurais aimé avoir l'occasion de parler.
Si nous devions avoir une autre ronde, qui commencerait de nouveau avec les députés de l'opposition, pour lesquelles j'éprouve un grand respect et dont j'ai trouvé que les questions étaient excellentes, je ne serais pas en faveur de cela. Plusieurs d'entre nous attendent ici depuis longtemps et nous avons des questions que nous aimerions poser à la ministre, si elle a encore cinq ou six minutes à nous accorder.
Si vous n'avez pas cinq minutes à nous accorder, madame la ministre, c'est bien. Nous nous reverrons et nous aurons alors l'occasion de vous poser des questions.
Mme Jane Stewart: Tout à fait. Je sais gré au comité de sa patience, car j'ai programmé ma journée selon le temps sur lequel nous nous étions entendus et j'ai des engagements que je dois respecter. Mais je serais heureuse de revenir devant le comité car vous avez besoin de renseignements. Je vous remercie de nouveau de l'engagement que vous apportez à cette table.
[Français]
Le président: Merci beaucoup, madame Stewart, de votre visite. Vous faites face à un grand défi. Depuis votre nomination, j'ai pris des notes et j'ai suivi vos démarches dans le but de trouver des solutions à plusieurs dossiers urgents touchant les autochtones au Canada. Je suis sûr que vous avez une grande volonté politique de bâtir une nouvelle relation avec les peuples autochtones, et vous parlez d'ailleurs clairement, à la page 9 de votre mémoire, de «recommander l'adoption de nouveaux modèles». Pour moi, c'est important.
Vous êtes toujours la bienvenue à notre comité et nous attendrons avec impatience une deuxième visite de votre part d'ici quelques semaines. Merci beaucoup.
Je tiens aussi à remercier les députés de leur diligence. Je sais que votre tâche n'est pas toujours facile, mais j'apprécie votre dévouement pour le peuple autochtone.
La séance est levée.