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SRSR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la science et de la recherche


NUMÉRO 055 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 27 septembre 2023

[Enregistrement électronique]

  (1630)  

[Traduction]

    Je vous souhaite la bienvenue à la 55e réunion du Comité permanent de la science et de la recherche.
    Conformément au Règlement, la réunion d'aujourd'hui se déroulera en format hybride. La plupart des députés y participent dans la salle, et un député y participe à distance, sur Zoom.
    Je vais faire quelques remarques à l'intention des témoins et des députés parce qu'un des témoins comparaîtra aussi sur Zoom.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Si vous participez à la réunion en vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour l'activer et parlez lentement et clairement. Lorsque vous ne parlez pas, je vous prie de mettre votre microphone en sourdine. Pour écouter l'interprétation, les participants sur Zoom peuvent choisir le canal audio au bas de leur écran: parquet, anglais ou français. Les participants dans la salle peuvent utiliser leur oreillette et sélectionner le canal désiré.
    Même si la salle est munie d'une chaîne stéréo performante, assurez-vous de ne pas laisser votre oreillette près de votre microphone. Si possible, ne manipulez pas votre oreillette, parce que vous pourriez causer un effet Larsen, ce qui risquerait de blesser nos traducteurs. Les effets Larsen surviennent souvent lorsqu'une oreillette branchée est trop près du microphone, alors j'invite les participants à ne pas rapprocher les deux objets.
    Conformément à notre motion de régie interne sur les tests de connexion des témoins, je vous informe que tous les témoins ont effectué les tests requis avant la réunion.
    Je vous rappelle que vous devez adresser tous vos commentaires à la présidence.
    Conformément à l'article 108(3)i) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 6 juin 2023, le Comité entreprend son étude sur l'utilisation des subventions, fonds et contributions du gouvernement fédéral en matière de recherche et de développement par les universités et les établissements de recherche canadiens dans le cadre de partenariats avec des entités liées à la République populaire de Chine.
    J'ai maintenant le plaisir de souhaiter la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui.
    Nous accueillons Jeffrey Stoff, président du Center for Research Security and Integrity, qui comparaît par vidéoconférence. Nous recevons aussi Philip Landon, président-directeur général par intérim d'Universités Canada.
    Enfin, nous accueillons un habitué de ce comité, Chad Gaffield, de l'organisation U15 Regroupement des universités de recherche du Canada. Il en est le chef de la direction. Ce fut formidable de rencontrer cet été les volets allemand et canadien d'U15 et de participer aux discussions. Nous vous remercions également de cette occasion.
    J'informe les témoins qu'ils disposent de cinq minutes pour leurs déclarations liminaires, après quoi nous passerons aux séries de questions.
    Nous allons d'abord entendre Jeffrey Stoff du Center for Research Security and Integrity.
    Vous avez la parole, monsieur Stoff.
    Merci, monsieur le président et honorables membres du Comité. Je vous remercie de l'invitation à participer à la réunion d'aujourd'hui.
    Certaines de mes observations s'appuient sur mon expérience au sein du gouvernement américain où je travaillais à des dossiers sur la Chine et la sécurité de la recherche: il faut donc situer la majeure partie de ma déclaration dans le contexte américain. Toutefois, après mon passage dans la fonction publique fédérale, j'ai lancé une ONG qui aide les démocraties alliées à protéger leurs recherches. J'ai constaté que bien des défis que connaissent les États-Unis tourmentent aussi nos principaux alliés, en particulier les pays du G7.
    Les nations européennes et du Groupe des cinq formulent des recommandations et des politiques préconisant que les établissements de recherche et les universités appliquent une diligence raisonnable accrue quant aux risques de sécurité — ou qu'ils les repèrent mieux —, surtout pour la recherche financée par le gouvernement. Bien que l'approche semble raisonnable, je doute de son efficacité pour plusieurs raisons.
    Tout d'abord, les établissements de recherche n'ont habituellement pas les ressources, les connaissances sur le sujet ou les motivations pour faire un examen poussé des partenaires de recherche de la République populaire de Chine, ou RPC, et des sources de financement.
    Deuxièmement, il est trop difficile et complexe pour les établissements de recherche de mener eux-mêmes des examens et des évaluations de risques robustes en raison des contraintes de plus en plus strictes que la Chine impose à l'information. Par exemple, elle refuse l'accès à certaines recherches universitaires publiées et elle dissimule les missions, les activités et les associations de certains établissements.
    Troisièmement, les connaissances sur la RPC continuent à faire gravement défaut, ce qui est pertinent pour certains des enjeux plus globaux que ce comité étudie. Les gouvernements et les universités n'en font pas suffisamment pour remédier à ces lacunes. Par exemple, on saisit mal l'ampleur et la complexité de l'appareil étatique chinois pour le transfert de renseignements et on étudie de façon peu prévoyante les activités criminelles telles que le vol de propriété intellectuelle ou l'espionnage. Par conséquent, notre aperçu des menaces plus globales à la sécurité et à l'intégrité de la recherche est déformé. En d'autres mots, la majorité des risques et des menaces que représente la Chine pour nos établissements de recherche ne sont pas liés au vol pur et dur.
    On ignore l'ampleur des programmes de recrutement de la RPC pour trouver des experts à l'étranger et les inviter à se livrer à des activités violant les normes de transparence et d'intégrité. De plus, on en connaît trop peu sur les menaces à la sécurité nationale et économique que représentent souvent ces programmes.
    Voici quelques exemples. On trouve dans les facultés des employés nommés à temps partiel qui sont rattachés à des établissements chinois; leur rôle est de placer des ressortissants chinois précis dans des programmes des cycles supérieurs ou postdoctoraux des établissements étrangers. Cette démarche mine les processus de sélection fondés sur le mérite. On charge parfois ces employés de tirer profit des établissements et des ressources à l'étranger pour avantager des laboratoires fantômes et des projets de recherche clandestins en Chine, ainsi que d'autres activités connexes.
    Le milieu universitaire n'a pas les connaissances ou les motivations pour freiner la recherche qui profite strictement à la Chine. Un témoin ayant comparu à une réunion antérieure a affirmé que le partenariat de Huawei avec de nombreux établissements de recherche canadiens a mené à des centaines de brevets profitant uniquement à l'entreprise.
    Qu'en est‑il des demandes de brevets déposées en dehors des ententes formelles?
    Détail intéressant, il est arrivé que des chercheurs américains aient d'abord déposé des demandes de brevets en Chine ou les y aient déposées sans daigner le faire aux États-Unis, et ce, même après avoir reçu du financement fédéral pour cette recherche. Dans d'autres cas, les bailleurs de fonds de la RPC brouillent les définitions des dons, des contrats et des subventions. À titre d'exemple, un don qui n'est censé être assorti d'aucune condition pourrait en fait exiger que l'établissement bénéficiaire fasse mener des recherches précises par des personnes présélectionnées. Je ne sais pas si les établissements canadiens sont touchés par ces mêmes réalités, mais je recommande l'étude de ces enjeux étant donné que la Chine emploie les mêmes méthodes pour tirer profit de la recherche et du développement dans les pays développés.
    Des centaines, voire des milliers, de sous-divisions et de laboratoires d'universités civiles chinoises et d'instituts de la Chinese Academy of Sciences effectuent de la recherche en défense, mais on s'y intéresse peu si leur mission première n'est pas d'appuyer la recherche en défense et la base industrielle de la Chine. Cette réalité a une incidence directe sur les technologies clés que ce comité étudie, comme l'intelligence artificielle, la physique quantique, la biotechnologie, etc. Je ne suis au courant d'aucune initiative pour examiner systématiquement quels établissements chinois sont des chefs de file en recherche dans ces disciplines et, parmi eux, lesquels semblent chercher des applications en défense dans leurs recherches.
    À ma connaissance, le gouvernement américain et les experts en sécurité nationale ont déployé peu d'efforts — voire aucun — pour remédier à la situation. J'imagine que d'autres gouvernements alliés composent avec des ressources encore plus limitées, ce qui contraint l'acquisition de connaissances à cet égard.
    Nos connaissances font également défaut par rapport aux conglomérats de défense détenus par la RPC. Ces entreprises étatiques contrôlent des centaines de filiales au sein d'instituts de recherche qui jouent le rôle d'établissements universitaires et qui collaborent en recherche sur la scène mondiale. Alors que les chercheurs vivant à l'étranger s'intéressent aux utilisations commerciales et civiles, les entités de la RPC appuient directement les industries de la défense.
    Voilà quelques-uns des enjeux mal compris par les démocraties alliées, ce qui limite notre capacité collective à protéger la sécurité et l'intégrité de notre recherche. La mission de mon organisation consiste à sensibiliser les intervenants à ces égards et à renforcer certaines des connaissances grâce à des partenariats publics et privés.
    Je vous remercie et je suis impatient de répondre à vos questions.

  (1635)  

    Merci. Je vous remercie d'avoir été concis.
    Nous allons maintenant entendre Philip Landon d'Universités Canada.

[Français]

     Je vous remercie de l'invitation à comparaître aujourd'hui devant le Comité pour parler du dossier important de la sécurité de la recherche.
    Je suis heureux d'avoir l'occasion de fournir un compte rendu des mesures prises par les universités canadiennes pour renforcer la sécurité de la recherche, et de discuter de la manière dont le gouvernement peut soutenir la sécurité des travaux de recherche menés dans les établissements.

[Traduction]

    Je m'appelle Philip Landon et je suis le président par intérim d'Universités Canada, une organisation représentant 97 universités de partout au pays.
    Bien qu'il s'agisse de ma première comparution devant le Comité, mon organisation est souvent venue témoigner au fil des années, et j'aimerais prendre un moment pour remercier notre ancien président, Paul Davidson, pour son leadership exceptionnel.

[Français]

    La collaboration internationale en matière de recherche est essentielle pour que le Canada demeure concurrentiel sur la scène mondiale. Elle favorise l’échange d’idées, de talents et de ressources au profit de toutes les parties concernées.

[Traduction]

    Le partage de la recherche et de la technologie se fait dans les deux sens, et la recherche canadienne s'améliore grandement grâce aux avancées réalisées ailleurs dans le monde. Or, les universités reconnaissent également que les partenariats de recherche peuvent parfois représenter des risques ou soulever des enjeux de sécurité nationale. Comme mon collègue qui représente l'organisation U15 le dira, les universités canadiennes accroissent activement leurs capacités en sécurité de la recherche.
    Les universités prennent leurs propres initiatives pour limiter les partenariats avec des entités au cœur de cette étude. Elles créent notamment des bureaux pour la sécurité de la recherche, affermissent leur diligence raisonnable pour l'évaluation des risques, organisent des ateliers sur la sécurité et implantent de strictes mesures pour la sécurité lors des déplacements. Le défi est exacerbé par le fait qu'elles doivent le relever tout en protégeant la recherche et les chercheurs canadiens touchés.
    Je vais décrire les moyens par lesquels le gouvernement peut mieux accompagner les universités aux prises avec ces défis.
    Les mesures pour la sécurité de la recherche doivent être délibérées et très ciblées. Les cibles vagues et ambiguës créent de l'incertitude, au détriment de la clarté, et ralentissent le système. Les chercheurs qui se font demander de couper des ponts se retrouvent face à deux options: réduire leurs recherches pour potentiellement abandonner un projet dans son intégralité, ou poursuivre ces recherches ailleurs qu'au Canada. Ces deux scénarios créent le risque d'un exode de la propriété intellectuelle et du talent à l'étranger.
    À l'heure actuelle, aucune subvention fédérale ne compense la perte soudaine de partenariats. Comme la recherche est très spécialisée, il est difficile de remplacer des partenaires. Les doctorants qui apprennent qu'ils ne recevront plus d'appui pour un projet auquel ils viennent de consacrer des années doivent se résigner à trouver d'autres options, souvent à l'extérieur du Canada. Entretemps, comme le souligne le rapport du comité consultatif du gouvernement — le rapport Bouchard —, les bourses pour étudiants des cycles supérieurs et les subventions fédérales pour la recherche demeurent au même niveau depuis 20 ans. On demande de plus en plus aux chercheurs d'en faire davantage avec moins de ressources.
    Des pays semblables au nôtre ont adopté une approche des plus prudentes. Plus tôt cette année, l'Australie a publié une liste de technologies critiques. Plutôt que de limiter la recherche dans ces domaines, la liste relève les possibilités de partenariats avec d'autres nations aux vues similaires à promouvoir tout en élaborant des pratiques plus fiables d'atténuation des risques. La CHIPS and Science Act des États-Unis crée des restrictions très ciblées et prévoit de colossaux investissements en recherche.
    Dans son examen de recommandations sur cet enjeu important, j'encourage vivement le Comité à étudier des solutions pour que le Canada ne se limite pas à fermer des portes, mais en ouvre de nouvelles. Il importe aussi de veiller à ce que les petites universités ne soient pas oubliées dans des initiatives comme le Fonds de soutien à la recherche; tous les établissements recevront ainsi un appui suffisant pour la sécurité de la recherche.
    En conclusion, je souligne l'importance de ne pas cibler de pays en particulier dans la recherche de solutions pour la sécurité de la recherche. Cette étude est très axée sur la Chine, ce qui, inévitablement, braque les projecteurs sur les étudiants chinois ayant fréquenté des établissements publics en Chine. Cette perspective influence la couverture médiatique de l'enjeu et pourrait involontairement exacerber la discrimination à l'endroit des étudiants d'origine chinoise.
    J'invite instamment le Comité à évaluer les menaces à la sécurité, peu importe le pays d'origine. En s'attaquant ainsi aux défis de sécurité de la recherche, le Canada se dotera d'un cadre renforcé dans le domaine.
    Je vous remercie sincèrement de l'occasion de m'être adressé à vous aujourd'hui. Je serai heureux de répondre à vos questions.

  (1640)  

    Merci beaucoup pour vos commentaires.
    Notre prochain témoin est M. Gaffield, qui représente l'organisation U15.

[Français]

     Monsieur le président, je vous remercie de l'invitation.
    Bonjour à tous les membres du Comité.
    Je suis ravi d'être parmi vous pour discuter de ce dossier tellement important.

  (1645)  

[Traduction]

    Je tiens aussi à vous remercier encore une fois de prendre l'initiative d'axer la discussion publique sur la création d'un avenir meilleur fondé sur la science et la recherche.
    En ce qui concerne le sujet à l'étude aujourd'hui, comme des témoins précédents vous l'ont dit, les universités canadiennes prennent la sécurité de la recherche très au sérieux. La cadence du travail dans ce domaine a accéléré considérablement ces dernières années.
    Les uns après les autres, les gouvernements fédéraux du passé ont poussé les universités canadiennes à accroître la collaboration internationale, spécialement avec la Chine. L'encouragement constant des dernières décennies était fondé sur deux motifs principaux. D'un côté, le Canada cherchait à tirer parti de l'expertise de la Chine dans le secteur de la science et de la recherche. D'un autre côté, le Canada considérait la collaboration internationale comme un moyen de s'attaquer aux problèmes mondiaux complexes, notamment ceux liés aux changements climatiques et à la santé.
    Résultat: le milieu canadien de la recherche est devenu l'un des plus internationalisés, ce qui lui a donné accès au bassin mondial de connaissances. Cette approche a favorisé la réussite de la transition économique, sociale et culturelle du Canada du XXe siècle aux turbulences du XXIe siècle, comme notre capacité de gérer la pandémie de COVID‑19 l'a montré récemment.
    Toutefois, la mondialisation et l'internationalisation peuvent aussi menacer la sécurité de la recherche et, par le fait même, la sécurité nationale, car elles ouvrent la porte à l'ingérence étrangère. Durant les dernières années, les universités ont fait face à diverses nouvelles menaces. Au Canada, le gouvernement fédéral et les universités partagent la responsabilité d'assurer la défense contre de telles menaces. Le rôle du gouvernement fédéral repose sur ses services de renseignement nationaux. De leur côté, les universités doivent veiller à la conduite responsable de la recherche.
    Afin de prendre des mesures pour s'acquitter immédiatement de cette responsabilité partagée, en 2018, des dirigeants du milieu universitaire et du gouvernement fédéral ont mis sur pied le Groupe de travail sur les universités. Ce groupe de travail a pour mandat d'élaborer des politiques et des pratiques dans le but de défendre le principe d'un milieu de la recherche « aussi sécurisé que nécessaire, aussi ouvert que possible ».
    Au fil des années, le groupe de travail s'est réuni régulièrement pour poursuivre cet objectif. En septembre 2020, le gouvernement fédéral s'est fondé sur les discussions du groupe de travail pour lancer le portail en ligne Protégez votre recherche. Ce portail offre aux chercheurs et aux universités des outils et des renseignements visant à protéger la sécurité de la recherche.
    En mars 2021, le gouvernement fédéral a demandé au groupe de travail de participer à l'élaboration de lignes directrices et de processus intégrant la sécurité dans les demandes de financement fédéral pour les partenariats de recherche. Ce travail a mené à la publication, le 12 juillet 2021, des Lignes directrices sur la sécurité nationale pour les partenariats de recherche. Aujourd'hui, tous les bailleurs de fonds fédéraux du milieu de la recherche procèdent systématiquement à des évaluations relatives à la sécurité nationale.
    Par ailleurs, grâce au soutien prévu dans le budget fédéral de 2022, les universités ont continué à engager des agents responsables de la sécurité de la recherche, ainsi qu'à élaborer des cadres avancés de gestion des risques et des politiques et pratiques connexes. Afin de soutenir ce travail, en juin 2023, U15 Canada a publié un document intitulé Protéger la recherche au Canada: Guide des politiques et des pratiques universitaires. Ce guide est un document évolutif: il sera révisé et mis à jour annuellement, en fonction de l'évolution des pratiques.
    Les universités ont recours à des sources publiques pour faire preuve de diligence raisonnable. Cependant, elles attendent également que les services de renseignement canadiens leur indiquent clairement, à partir de leurs propres sources, quelles entités sont jugées inadmissibles à des partenariats de recherche. Nous croyons savoir que de telles listes sont à venir.
    En outre, les universités travaillent fort pour éviter les conséquences non voulues du renforcement des mesures de sécurité de la recherche, en particulier le racisme et la discrimination sur les campus, ainsi que le déclin de la recherche dans des domaines importants et sensibles essentiels à l'avenir du Canada.
    Dans le contexte géopolitique en pleine évolution, d'importants pays comme les États-Unis, le Japon et l'Allemagne augmentent leurs investissements en vue de renforcer leur capacité nationale de recherche. Au XXIe siècle, en cette ère dite mondialisée, il est de plus en plus évident que la sécurité et la souveraineté nationales reposent sur la capacité intérieure de recherche des pays. Les investissements majeurs d'autres pays dans le financement de la recherche exercent une pression énorme sur les universités canadiennes, qui peinent à attirer et à retenir les meilleurs chercheurs et les meilleurs étudiants diplômés.
    Nous devons agir dès maintenant pour renforcer notre capacité nationale de recherche afin de garantir la sécurité et la souveraineté nationales du Canada dans un milieu mondial où la concurrence est de plus en plus vive. Notre avenir en dépend.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie tous les trois pour vos témoignages.
    Avant de passer aux questions des députés, j'aimerais souhaiter la bienvenue à M. John McKay. Il se joint à nous en remplacement de M. Lametti.
    Nous sommes ravis que vous participiez à notre discussion.
    Passons à la première série de questions. Je donne la parole à Mme Michelle Rempel Garner.
    Vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Stoff, selon des témoignages que nous avons reçus précédemment, à l'heure actuelle, les risques d'appliquer des mesures de protection ou des lignes directrices excessivement strictes à la recherche financée par l'État, en particulier pour les travaux de recherche menés en collaboration avec des entités suscitant des préoccupations relatives à la sécurité nationale, ne l'emporteraient pas nécessairement sur les avantages de suivre une politique plus ouverte en matière de recherche au Canada.
    Trouvez-vous ce point de vue étroit, étant donné l'évolution de la situation géopolitique mondiale des 10 dernières années?
    Je vous remercie pour la question.
     D'après moi, les défis et les risques associés à ce que la Chine est devenue, ainsi que les menaces connexes, sont uniques à certains égards, et ils méritent une attention et un traitement particuliers pour plusieurs raisons. Cela étant dit, nous devrions traiter toutes les nations de type autoritaire de la même façon en ce qui concerne l'engagement et la collaboration. Il y a des similarités sur ce plan, mais à mon avis, le problème de la Chine doit... Étant donné l'appareil mis en place par la Chine et les lignes directrices établies par l'État pour faire l'acquisition des connaissances, pour les transférer, les commercialiser et les transformer en armes, je n'appuie pas la proposition visant l'adoption d'une approche qui fait abstraction du pays d'origine.

  (1650)  

    Je dois passer à autre chose puisqu'il ne me reste que quelques minutes.
    Je m'adresse maintenant aux représentants des deux organisations universitaires.
    Certains témoins ont laissé entendre que les universités devraient décider de manière plus indépendante ce qui constitue un risque pour la sécurité nationale ou une menace de vol de propriété intellectuelle. J'ai l'impression que cette suggestion pourrait entraîner un morcellement de l'approche suivie au Canada, ainsi qu'une augmentation considérable des frais administratifs des universités pour la recherche.
    Vos organisations ont-elles exprimé clairement leurs attentes envers le gouvernement fédéral à l'égard des lignes directrices en matière de financement fédéral? Le cas échéant, pouvez-vous les soumettre au Comité?
    Je répondrai volontiers à la question.
    Comme vous le savez peut-être, je suis coprésident du groupe de travail du gouvernement du Canada et des universités. Notre groupe est d'avis qu'il s'agit d'une responsabilité partagée. Nos établissements dépendent des services de renseignement nationaux pour faire leur travail. C'est la raison pour laquelle nous avons...
    Aujourd'hui, la responsabilité partagée avec le gouvernement fédéral est-elle suffisamment bien définie?
    Je dirais que nous avons réalisé des progrès au fil des années. Nous avançons systématiquement...
    Est‑ce suffisant?
    Il en sera question dans le rapport.
    Un des éléments principaux que nous attendons, c'est la liste d'entités jugées a priori inadmissibles...
    D'après vous, cette liste devrait-elle être statique?
    Je pense que toutes nos listes sont évolutives. C'est le terme que nous employons pour décrire nos documents.
    A‑t‑on établi des règles ou des exigences sur la manière dont les listes pourraient être modifiées? Les avez-vous vues?
    Je présume que le groupe de travail participera aux discussions à ce sujet, comme nous l'avons fait dans le passé...
    Elles n'ont pas encore été établies. Faudrait‑il en élaborer?
    Je le répète, nous collaborons étroitement avec nos partenaires pour nous acquitter de la responsabilité partagée...
    Des recommandations précises sont... Je n'envisage pas la question d'un point de vue partisan. Le verbiage... Il est utile d'avoir des recommandations précises.
    Voici où je veux en venir: serait‑il utile d'élaborer des lignes directrices stipulant clairement à quel moment la liste d'entités sera modifiée, une fois qu'elle aura été publiée, afin d'alléger le fardeau administratif des universités et des établissements de recherche canadiens et de leur permettre de planifier leurs activités de recherche avec plus de certitude?
    Nous espérons que dès que les services de renseignement nationaux sauront ou auront des raisons de croire qu'aucun partenariat ne devrait être noué avec une entité donnée, ils l'ajouteront immédiatement à la liste.
    À la lumière du fait que des contrats de recherche peuvent être proposés cinq ans à l'avance dans le cadre des cycles de subventions, dans quelle mesure est‑il important que les listes soient mises à jour rapidement?
    Comme vous le savez, les cycles de subventions se déroulent pendant toute l'année et ils durent plusieurs années. Peut-être plus...
    Il me semble que si les règles étaient clairement définies dès le début du processus de demande, on pourrait éviter certains problèmes que vous avez mentionnés, par exemple le risque que les étudiants perdent leurs fonds de recherche, puis que le gouvernement et les contribuables soient obligés de remplacer ce financement. Cette hypothèse est-elle juste?
    Oui, mais je pense qu'en ce moment, nous sommes tous en train d'apprendre quelle est la meilleure façon de procéder. Nous perfectionnons constamment notre approche, car comme vous l'avez souligné à très juste titre...
    Combien de temps le Canada devrait‑il encore mettre à apprendre et à perfectionner son approche?
    Je pense que nous comptons parmi les meilleurs au monde. Notre approche de responsabilité partagée est reconnue à l'échelle internationale.
    Trouvez-vous raisonnable de le supposer, compte tenu du reportage publié par le Globe and Mail plus tôt cette année?
    Oui, absolument. Nous entretenons des liens étroits avec nos partenaires à l'international, qu'ils soient aux États-Unis, en Australie, en Europe ou ailleurs. D'après moi, l'approche du Canada est exemplaire.
    Très bien. Merci beaucoup pour vos réponses et vos questions.
    Je donne maintenant la parole à Mme Valerie Bradford, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux trois témoins. Vos témoignages m'intéressent vivement.
    Je vais partager mon temps de parole avec M. McKay. Il a des questions pour ce groupe de témoins.
    Bienvenue encore une fois, monsieur Gaffield. Je suis ravie de vous revoir.
    En 2021, Innovation, Sciences et Développement économique Canada a publié les Lignes directrices sur la sécurité nationale pour les partenariats de recherche. Quelles mesures vos établissements prennent-ils pour veiller à ce que les chercheurs connaissent et respectent ces lignes directrices?

  (1655)  

    Tous ont mis sur pied des bureaux ou des services responsables de la sécurité de la recherche. De plus, ils organisent des séances de sensibilisation et des discussions publiques sur leurs campus. Ils envoient aussi de la documentation, et plus encore.
    Le guide devait servir, en quelque sorte, de document d'harmonisation utile à tous, comme mon collègue M. Landon le disait, surtout pour nos 97 établissements. Il a été conçu pour tout le monde. Selon moi, l'objectif est de faire circuler l'information et de veiller à ce que nous puissions éliminer les risques de la collaboration internationale plutôt que de nous en dissocier. À mon avis, nous poursuivons cet objectif avec grand succès.
    Il a beaucoup été question au Comité de tentatives d'ingérence dans la recherche ou dans les travaux de recherche de personnes données, ainsi que de diverses stratégies, etc. Nous sommes très conscients de ces enjeux. Nous sommes ravis que jusqu'à présent, nous ayons réussi à bien les gérer. C'est en partie grâce à l'échange de renseignements, aux efforts de sensibilisation et à tout le reste.
    Très bien.
    Je sais qu'U15 Canada travaille aussi à la conception d'un outil numérique de protection des érudits pour aider les chercheurs et les établissements à répondre aux exigences en matière de sécurité. Pouvez-vous nous fournir plus de détails là‑dessus?
    Oui. C'est une question très importante. Je vous remercie de la soulever.
    Nous avions des préoccupations par rapport au fait que certains outils numériques et bases de données utilisés pour gérer la sécurité de la recherche ont été créés à l'extérieur du Canada. Nous sentions vraiment le besoin d'offrir une solution conçue au Canada pour assurer la gestion des risques sur nos campus. Nous avons donc pris l'initiative de créer le site Web Securescholar.ca, avec le soutien de nos membres partout au Canada. Une version bêta du site sera disponible sous peu. Nous espérons qu'ainsi, nous disposerons d'un outil numérique conçu au Canada qui aidera réellement les établissements à gérer les risques liés à la sécurité de la recherche sur les campus canadiens.
    D'accord.
    Ma dernière question s'adresse à M. Landon. Quelles mesures votre organisation prend-elle, comme d'autres établissements postsecondaires, pour assurer la sécurité des travaux de recherche menés avec des partenaires étrangers? Quelles mesures sont prises en ce sens?
    Mon organisation représente 97 universités. Ces universités suivent les lignes directrices relatives à la sécurité nationale dont M. Gaffield parlait. Elles font preuve de diligence raisonnable à l'égard de toute collaboration internationale dans ce milieu en pleine évolution. Le milieu s'est resserré au fil des années. Les lignes directrices sont très utiles aux universités.
    Merci.
    Je cède la parole à M. McKay.
    Merci, chère collègue.
    Ma question s'adresse à M. Stoff.
    M. Gaffield vient de parler de l'élimination des risques et de la dissociation. D'après vous, existe‑t‑il un système, une application ou un outil de sensibilisation susceptible de réduire suffisamment le risque de vol intellectuel, surtout, pour que nous n'ayons pas à craindre que notre menace géopolitique principale, soit la Chine, mette la main sur nos travaux de recherche?
    Merci.
    Si votre question concerne une solution technique, la réponse est non. Je ne suis au courant d'aucun outil pareil et je doute qu'il soit possible d'en concevoir un étant donné la complexité du modus operandi de la Chine, sa façon de dissimuler ses activités et la manière opaque dont elle intègre les transferts de connaissances et dont elle tente de les influencer et de les détourner. La solution exige beaucoup d'exploration et une approche nuancée. Je ne connais aucun outil susceptible de régler le problème.
    J'ai eu la chance de visiter Taïwan en mai dernier. Bien entendu, le contexte de la menace est très différent là‑bas qu'ici. Cela dit, je n'ai pas eu l'impression que les Taïwanais craignaient que la Chine mette la main sur leurs travaux de recherche, car ils étaient extrêmement conscients de la tentative du gouvernement chinois de s'insinuer dans la société taïwanaise. Ils se préoccupaient constamment du double usage. Même des recherches d'apparence inoffensive qui ne semblent aucunement liées au domaine militaire ou à la sécurité peuvent être utilisées d'une façon qui va à l'encontre de l'intérêt supérieur du pays hôte.
    À la lumière des témoignages de MM. Landon et Gaffield, croyez-vous...

  (1700)  

    Je suis désolé, mais le temps est écoulé. Si vous avez des observations à présenter, je vous prie de nous les soumettre par écrit. Je pense que nous savons où vous vouliez en venir.
    Je donne maintenant la parole à M. Maxime Blanchette-Joncas, pour six minutes.

[Français]

    Je salue les témoins qui se joignent à nous pour cette étude.
    Monsieur Landon, vous vous joignez à nous pour la première fois. Je vous salue. Je veux également vous féliciter pour votre nouveau mandat. Vous êtes en poste depuis maintenant près de trois mois. Je voulais qu'on mette la table: ce n'est pas tous les jours qu'on reçoit le président d'Universités Canada, qui représente 97 universités au Canada.
    Depuis le début de votre mandat, avez-vous pu rencontrer le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie pour lui faire part des préoccupations concernant la recherche?
    Je n'ai pas rencontré personnellement le ministre Champagne, mais les présidents des universités l'ont rencontré une fois.
    D'accord, merci.
    À titre de représentant d'Universités Canada par intérim depuis trois mois, avez-vous pu avoir une rencontre avec des gens du gouvernement pour leur faire part des préoccupations concernant la recherche scientifique au Canada?
    Oui, bien sûr.
    Avec qui avez-vous eu une rencontre?
    J'ai rencontré le Groupe de travail sur les universités, dont M. Gaffield parlait.
    Je parle des membres du gouvernement. Avez-vous rencontré des ministres, des députés ou d'autres parlementaires?
    J'ai parfois rencontré des députés et d'autres parlementaires, oui.
    D'accord, nous sommes heureux de savoir cela. Par contre, je retiens que vous n'avez pas encore rencontré le ministre.
    Non.
    C'est bien. Je vous rassure, nous l'attendons aussi depuis six mois. Prenez votre mal en patience, nous espérons que vous pourrez le rencontrer. Si vous le voyez, saluez-le de notre part et dites-lui que le Comité permanent de la science et de la recherche de la Chambre des communes a adopté à l'unanimité il y a six mois une motion lui demandant de venir témoigner pour expliquer pourquoi le gouvernement n'a pas fait d'investissement supplémentaire en recherche. Si vous pouviez lui transmettre ce message, ce serait grandement apprécié.
    Revenons au sujet qui nous touche aujourd'hui.
    Monsieur Gaffield, c'est un plaisir de vous retrouver parmi nous. Nous sommes toujours reconnaissants de vos témoignages et de votre présence. Dans l'ensemble, quelles sont les préoccupations, les priorités et les revendications de vos membres concernant la sécurité nationale de la recherche et le sujet qui nous touche aujourd'hui?
     Merci beaucoup de votre question, qui va au cœur du dossier que nous abordons aujourd'hui.
    La réalité actuelle, c'est que chaque pays doit avoir une capacité nationale. On a appris que c'était essentiel. Il n'y a pas si longtemps, on parlait de mondialisation et d'un monde avec des réseaux et des transferts, mais on voit maintenant qu'en fait, les frontières géopolitiques comptent beaucoup. Il y a toute une concurrence entre les pays et, malheureusement, il y aura des gagnants et des perdants. C'est de plus en plus évident.
    Aujourd'hui, il ne fait plus aucun doute que la meilleure façon de faire avancer un pays est par la science et la recherche. On le voit un peu partout, surtout dans les grands pays du monde, qui investissent beaucoup là-dedans. C'est pourquoi j'ai tellement peur pour le Canada. Il faut comprendre que c'est un peu comme un jardin: pour aller plus loin, il faut le cultiver tout le temps. Pourquoi? C'est parce qu'il y a une concurrence entre les pays et que, pour se tailler une place solide et stable dans le monde, le Canada doit attirer et garder les talents et compter sur le talent de ses gens. Cela prend des investissements et, d'après moi, c'est la clé. Si nous n'avons pas la capacité de nous défendre dans un contexte où d'autres pays nous menacent, nous serons évidemment plus fragiles.

  (1705)  

    Effectivement, comme vous l'avez mentionné, il faut entretenir le jardin. Je pense que vous conviendrez que les fleurs ne poussent pas très fort dans le jardin, à l'heure actuelle. Nous sommes le seul pays du G7 à avoir réduit ses investissements dans la recherche-développement dans les 20 dernières années. Nous consacrons 1,8 % de notre produit intérieur brut à ces investissements, comparativement à 3,4 % pour les États‑Unis. Je pense que le message est assez clair.
    Si je comprends bien ce que vous dites, le fait que le gouvernement fédéral n'investit pas assez dans la recherche-développement compromet la sécurité nationale de la recherche, parce que les chercheurs sont tentés de faire affaire avec des gens de l'étranger, qui n'ont pas toujours nos intérêts à cœur. J'aimerais entendre votre point de vue à ce sujet.
    Monsieur Landon, je vous inviterai à ajouter vos commentaires par la suite.
    Selon moi, l'élément clé est un certain refroidissement des ardeurs. Si on décide de ne pas toucher à certains domaines de recherche qui sont basés sur des partenariats internationaux, cela va se retourner contre le Canada. Il y a des domaines de recherche très importants où il faut s'impliquer davantage, pas moins. Si on ne compte pas sur des partenariats avec d'autres pays, surtout ceux qui nous menacent de plus en plus, il faut plonger davantage dans ces domaines de recherche, et non s'en retirer.
    Monsieur Landon, je vous passe la...

[Traduction]

    C'est formidable. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Cannings pour six minutes.
    Félicitations encore une fois d'avoir fait adopter votre projet de loi à la Chambre cet après-midi.
    Merci beaucoup. J'en suis ravi.
    J'aimerais remercier tous les témoins d'être ici aujourd'hui. Cette étude continue d'être intéressante.
    Je vais commencer avec M. Landon. Vous avez soulevé une série de points dans votre déclaration. Vous avez parlé du coût de rompre les liens avec des chercheurs à l'étranger et de la stagnation des fonds de recherche ici, puis vous avez mentionné ce que quelques autres pays font. L'Australie a dressé sa liste concernant les restrictions.
    Les États-Unis sont en quelque sorte notre plus grand concurrent. Vous avez mentionné la CHIPS and Science Act, qui renferme une combinaison de restrictions et des investissements massifs.
    Je me demande si vous pouvez nous dire si c'est ce que nous pourrions faire au Canada. Nous avons du mal au Canada à dépenser plus que les États-Unis ou la Chine, mais nous pourrions à tout le moins fournir suffisamment de financement pour la recherche, à mon avis, pour garder nos chercheurs ici et mener des recherches nationales, sans devoir poursuivre ces partenariats et ces ententes avec des entités étrangères — surtout avec la Chine, pour les raisons que nous connaissons tous.
    Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez?
    Je pense que nous devons certainement accroître le financement à la disposition des chercheurs canadiens. Je ne crois pas que nous devons réduire les collaborations internationales que les chercheurs entreprennent au Canada. La recherche est une entreprise internationale, et je pense qu'il est important de maintenir l'avantage que le Canada a eu dans la recherche internationale ces dernières années. Je pense que c'est un avantage très important pour le Canada. Cela étant dit, nos universités et nos chercheurs sont au courant des menaces à la sécurité et prennent des mesures en conséquence, comme M. Gaffield et moi l'avons souligné dans nos déclarations. Nous ne pouvons absolument pas dépenser plus que les États-Unis, mais nous pourrions nous assurer que notre pourcentage atteigne les niveaux observés dans les pays de l'OCDE.

  (1710)  

    Les restrictions qui ont été incluses dans la CHIPS Act ou dans la liste australienne seraient, à mon avis, un bon point de départ pour le Canada lorsqu'il dressera ses listes. Je comprends que ces listes sont en train d'être établies. Je suppose que ces autres listes qui proviennent d'autres pays seraient tout aussi appropriées ici qu'elles le seraient pour nos amis australiens et américains.
    Je crois que le groupe de travail universitaire et les fonctionnaires qui établissent ces listes examinent les comparateurs internationaux et en tiennent compte au moment de dresser leurs listes, qui ne sont pas encore publiques. Je suppose que c'est le cas.
    J'aimerais m'adresser à M. Gaffield pour qu'il nous fasse part de ces commentaires sur ce même sujet. Vous avez dit que les investissements réalisés ailleurs exercent une pression sur les universités canadiennes. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet et nous expliquer ce que le Canada doit faire dès maintenant pour endiguer ce phénomène?
    J'estime que la priorité absolue est ce que nous qualifions de talent hautement qualifié. Nous savons que la majeure partie des meilleures recherches et, en fait, la façon dont les entreprises innovent dépendent de la génération émergente. Cela dépend de ceux qui terminent actuellement leurs études supérieures, de ceux qui font des études postdoctorales, etc. Ce que nous devons être en mesure de faire à l'échelle internationale, c'est de nous assurer que les études, les recherches et les carrières dans tous les secteurs sont financièrement viables. L'un des problèmes — et vous en avez beaucoup entendu parler —, c'est que nous courons un risque énorme au pays si nous ne prenons pas cette question au sérieux.
    Vous m'avez entendu dire qu'à l'heure actuelle, nous occupons le 26e rang dans le classement de l'OCDE sur 37 pays pour ce qui est de la proportion de nos habitants qui détiennent un diplôme d'études supérieures, ce qui, à mon avis, ne correspond pas au profil d'un pays qui va vraiment prospérer au XXIe siècle. Nous devons prendre très au sérieux la question des talents hautement qualifiés dont nous avons besoin dans tous les secteurs pour innover notre société, notre culture, etc., et pour construire le type de société ayant une économie à valeur élevée, qui est vraiment le seul type de société qui réussira au XXIe siècle.
    Si vous parliez à un chercheur dans une université au Canada qui a du mal à trouver suffisamment de financement pour ses recherches ou à trouver un étudiant qui bénéficie d'un financement pour ses recherches, car le chercheur peut ne pas en avoir, et la Chine est une solution évidente pour certains chercheurs, alors cela pourrait aider si nous financions correctement nos étudiants, si nous financions nos chercheurs.
    J'ai l'impression que c'est vraiment au coeur de toute cette question.
    Je vous remercie.
    Merci.
    Merci.
    Pour notre deuxième série de questions, nous commencerons avec Ben Lobb pour cinq minutes, je vous prie.
    C'est formidable. Je vous remercie.
    Je suis reconnaissant de la discussion que nous avons eue aujourd'hui et au cours des dernières réunions.
    Ce que j'aimerais savoir dans un premier temps, c'est si nous avons fait toute la lumière sur cette question. Avez-vous l'impression que nous sommes allés au fond des choses avec nos universités? Ont-elles eu l'occasion au cours des derniers mois d'examiner tous les enjeux et de prendre une décision?
    La parole est à vous, monsieur Gaffield.
    Je suis fermement convaincu qu'il y a cinq ans, en 2018, nous avons commencé à prendre la question très au sérieux. Croyez-moi, il n'était pas évident, au niveau international, de savoir comment passer de la science ouverte à de la science « ouverte autant que possible, sécurisée autant que nécessaire ». C'est le chemin que nous avons parcouru ces cinq dernières années.
    J'ai l'impression, à tout le moins, que nous avons fait d'énormes progrès, de sorte que je pense que nous pouvons tous aujourd'hui avoir la certitude que nos recherches sur nos campus sont menées dans des conditions sécuritaires qui ne nous menacent pas.
    Toutefois, comme je l'ai dit, c'est un enjeu permanent et continu qui évolue. Comme l'ont dit plusieurs témoins, compte tenu des tactiques utilisées par d'autres pays pour nous nuire et des types de stratégies qui vont évoluer, nous devons être constamment attentifs et alertes et apporter des mises à jour en permanence.

  (1715)  

    Je respecte cette réponse, mais j'examine la question de mon point de vue.
    Vous me dites cela et je vous crois, mais comment le vérifier? Qu'utilisons-nous pour dire...? Si nous disons que ceci était le problème et voici les articles parus dans le Globe and Mail et dans le monde entier, et puis que toutes les universités et nous venons ici — vous faites partie de la représentation —, comment pouvons-nous dire voici la preuve que nous avons réellement fait cela? Y en a‑t‑il?
    C'est une excellente question.
    En fait, plus tôt dans la discussion, j'ai aimé qu'on mette l'accent sur l'application de la loi. De mon point de vue, si vous avez des politiques, mais qu'il n'y a pas d'application de la loi, cela ne fonctionnera pas. Nous devons vraiment prendre au sérieux la surveillance, la vérification, etc. Nous intégrons la sécurité de la recherche dans la conduite responsable de la recherche, car dans ce cadre, il y a une vérification continue qui se fait. Des vérifications seront continuellement effectuées. Je pense que c'est ce qu'il faudra avoir.
    Parmi les universités que vous représentez, par exemple, y a‑t‑il un nombre? Les universités vous ont-elles dit qu'elles avaient probablement dépassé les limites dans 20 cas au cours des deux dernières années? Quelqu'un dans les universités que vous représentez est‑il venu vous dire cela, ou n'y a‑t‑il pas de chiffre et devons-nous simplement supposer que tout le monde l'a fait?
    Y a‑t‑il un chiffre?
    J'ai l'impression que nous avons géré cela avec beaucoup de succès. Nous entendons parler de menaces potentielles et de tentatives d'influence, etc., et nous les prenons très au sérieux.
    Je pense que nous pouvons être fiers. Comme je l'ai dit, nous pouvons être fiers au Canada que les mesures que nous prenons fonctionnent jusqu'à présent.
    Ce dont je me souviens entre autres, c'est que quelques représentants ont dit que, si le ministère de la Sécurité publique ne les informe pas, il leur est très difficile de savoir vraiment ce qui se passe. Je pense que c'est une déclaration qui a été faite.
    Est‑ce en place? Est‑ce mis en œuvre, disons, dans les 15 universités que vous représentez? Les fonctionnaires de la sécurité publique et tous les hauts dirigeants viennent-ils pour dire que vous avez soumis une liste, que vous avez coché tous les éléments de la liste et que tout est bon maintenant? Est‑ce le mécanisme qui est en place à l'heure actuelle?
    Vous abordez ce qui, à mon avis, est la principale façon dont nous avons fonctionné et la responsabilité partagée. Les services du renseignement nationaux disposent évidemment de capacités importantes que nous n'avons pas sur nos campus. Nous dépendons de ces capacités. Ils ont maintenant...
    L'Université de Waterloo ou l'Université de Toronto, par exemple, soumettent-elles maintenant une liste de projets proposés au ministère de la Sécurité publique, qui les examine et les approuve? Est‑ce un système qui est en place à l'heure actuelle?
    Les lignes directrices recommandent une vérification effectuée par les organismes subventionnaires. Les projets que les organismes jugent qu'ils méritent d'être examinés de façon plus approfondie sont transmis au ministère de la Sécurité publique. Il y a ensuite l'examen confidentiel.
    J'ai seulement une dernière question rapide.
    Vous avez mentionné la République populaire de Chine. Y a‑t‑il d'autres organisations étrangères dont ce comité devrait s'inquiéter qui pourraient suivre la même voie que la RPC?
    Le président: Répondez très brièvement.
    Notre approche est qu'aucun pays, aucune entreprise ou aucun partenaire n'obtienne de passe-droit. Nos politiques et pratiques relatives à la sécurité de la recherche sont conçues pour tous. De toute évidence, notre attention...
    Je vous remercie. C'est formidable. Je dois vous interrompre ici. Nous avons un horaire à respecter si nous voulons entendre les membres. Je vous en remercie.
    Le prochain intervenant sur ma liste est M. Turnbull, pour cinq minutes, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de la discussion. Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Monsieur Stoff, je vais commencer avec vous.
    Nous avons entendu M. Gaffield dire plus tôt que la sécurité de la recherche au Canada est l'«une des meilleures au monde ». Il n'y pas si longtemps, le Toronto Star vous a cité: « Les politiciens américains commencent à avoir ces conversations, mais le Canada peut légitimement dire qu'il montre la voie. »
    Monsieur Stoff, pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous dites cela?
    Cette déclaration était fondée sur les politiques que j'ai lues concernant les organismes fédéraux de financement au Canada qui déploient des restrictions précises à l'avenir — à savoir que nous allons avoir certaines interdictions générales et refuser le financement s'il y a une collaboration avec des candidats à haut risque. Je me suis basé là‑dessus.
    Le gouvernement américain ne l'a pas fait de manière aussi explicite. Il laisse trop de questions aux institutions à régler par elles-mêmes.

  (1720)  

    Si j'ai bien compris, vous avez fait ces déclarations concernant la liste d'entités et l'interdiction générale imposée à des entités précises qui se manifesteraient. Est‑ce exact?
    Oui.
    D'accord.
    Je crois savoir que d'autres pays ont élaboré des lignes directrices en matière de sécurité nationale, tout comme le Canada l'a fait cette année, en 2023, dont nous avons entendu parler aujourd'hui.
    Je veux interroger M. Landon sur une question de compétence.
    Je crois savoir que de nombreux gouvernements provinciaux ont réduit une partie du financement de base des universités canadiennes, ce qui signifie qu'elles dépendent davantage des frais d'inscription des étudiants étrangers et du financement de la recherche pour se maintenir à flot. Diriez-vous que c'est vrai?
    C'est une bonne question.
    Je dirais que le montant du financement des gouvernements provinciaux a diminué au fil des ans et que les universités ont compensé cette baisse en accueillant des étudiants étrangers dans une certaine mesure. Toutefois, le volet de recherche est distinct. Le financement consacré à la recherche n'est pas inclus dans les budgets de base. Il est destiné à la recherche et aux bureaux de recherche.
    Pour ce qui est de la compétence fédérale, il s'agit des trois conseils et du financement de la recherche. C'est le levier du gouvernement fédéral concernant la sécurité de la recherche. Quels rôles les provinces jouent-elles dans le cadre de responsabilité partagée dont vous avez tous les deux parlé?
    Monsieur Landon, je vais vous céder la parole en premier, puis ce sera au tour de M. Gaffield.
    Je crois savoir que les provinces élaboreront potentiellement leurs propres cadres en se fondant sur le cadre fédéral. Toutefois, ils ne sont pas directement impliqués dans ce cadre.
    M. Gaffield connaît peut-être mieux la question.
    L'histoire du Canada montre que le leadership fédéral est absolument essentiel pour signaler que nous allons bâtir un meilleur pays en matière de recherche et d'innovation. Nous devons tous compter sur le leadership du gouvernement fédéral dans ce domaine. C'est ainsi que nous sommes passés du statut de colonie intellectuelle, dans les années 1950 et 1960, à celui d'acteur sur la scène internationale.
    Je pense que les provinces attendent des signaux de la part du gouvernement fédéral quant à l'importance de cette question. Je dirais que plus il y a de signaux... Si le gouvernement peut dire, « Il s'agit d'une priorité nationale pour notre pays », je pense que nous pouvons espérer un meilleur financement au niveau provincial.
    Pensez-vous que le gouvernement fédéral envoie certains de ces signaux?
    Je pense que ces dernières années ont été déstabilisantes pour nous en ce qui concerne le type de culture du jardin dont nous avons besoin, en particulier dans ce contexte, où nous n'essayons pas de maintenir... Nous ne devrions pas nous contenter d'essayer de maintenir le statu quo. Nous devons avoir une véritable ambition. C'est ce qu'il nous faudra pour garder notre place dans ce XXIe siècle turbulent.
    Merci, monsieur Gaffield.
    Pour ce qui est des domaines de recherche sensibles... Je sais que cela renvoie à des questions antérieures sur les utilisations de rechange ou les doubles utilisations pour la recherche. Je pense qu'une partie de cette question devient un défi.
    Comment faire la part des choses, alors que nous pouvons cerner des domaines? Il existe de nombreux documents sur des domaines précis qui pourraient faire l'objet d'une recherche sensible. Lorsque vous envisagez une utilisation de rechange ou une double utilisation, comment trouver un équilibre? Je crois qu'il y a une tension naturelle dans ce travail.
    C'est très compliqué.
    Toutes les technologies peuvent être utilisées pour le meilleur ou pour le pire. Nous le savons. Notre défi consiste à administrer cela d'une manière qui ne va pas nuire à la recherche dans les domaines dont le Canada a vraiment besoin. C'est pourquoi le travail de sécurité de la recherche est complexe et doit être très sophistiqué. C'est pour ne pas ruiner des domaines de recherche entiers qui sont si importants pour l'avenir du Canada.
    Merci.
    Avec les cinq minutes restantes, nous accorderons deux minutes et demie au NPD et au Bloc.

[Français]

     Monsieur Blanchette‑Joncas, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président. Vous vouliez dire le Bloc, puis le NPD.
    Je vais poursuivre sur la lancée de M. Gaffield, qui nous parlait de l'importance du leadership du gouvernement fédéral.
    En février dernier, le gouvernement fédéral a dit que les demandes de subventions pour des recherches effectuées en partenariat avec une institution représentant un risque pour la sécurité nationale seraient dorénavant refusées. Au mois de mai dernier, dans un article du Journal de Montréal, la ministre de l'Enseignement supérieur du gouvernement du Québec, Mme Pascale Déry, a dit qu'elle attendait des « directives claires » du fédéral, et déclaré: « J'ai fait moi-même des représentations auprès du ministre Champagne. Je n'ai pas eu de réponse à ce niveau-là, j'en attends encore ». Ensuite, le Cabinet a dit qu'il était en train de dresser la liste d'institutions étrangères de recherche présentant des risques. Cela va donc faire près d'un an qu'on a annoncé qu'il n'y aurait pas de financement, mais il n'y a toujours pas de clarification.
    Monsieur Landon, j'aimerais que vous nous précisiez quelque chose. Vous êtes représentant des 97 universités au Canada. Qu'est-ce que vous attendez du gouvernement fédéral concernant les directives manquantes pour la sécurité nationale en relation avec la recherche?

  (1725)  

     Selon moi, la nouvelle liste va être publiée prochainement. Ce sera utile pour notre milieu, car elle va lui permettre de savoir comment avancer.
    D'accord.
    Monsieur Gaffield, en février, le gouvernement fédéral a fait une annonce pour contrer l'espionnage. On nous a dit qu'on allait revenir avec une liste. Nous sommes aujourd'hui le 27 septembre. Avez-vous vu cette liste?

[Traduction]

    Non.

[Français]

     D'accord.
    Je vais poursuivre, parce qu'il s'agit d'un sujet très important.
    Monsieur Stoff, vous avez parlé de votre vision pour le Center for Research Security and Integrity lors de votre comparution du 9 juin 2022 devant la U.S.‑China Economic and Security Review Commission. Vous avez aussi parlé d'un nouveau paradigme, c'est-à-dire d'une nouvelle approche en matière de protection de la recherche. Pouvez-vous nous dire en quoi cette approche diffère de l'approche actuelle? Quels sont les avantages de cette approche?

[Traduction]

    Oui, je pense que le gouvernement canadien déploie autant d'efforts que les autres gouvernements. Il y a un manque de connaissances — d'expertise d'ordre linguistique — pour vraiment construire le savoir qui est nécessaire, en particulier sur la Chine. S'en remettre entièrement aux gouvernements pour ce faire ne fonctionnera pas.
    Merci. S'il y autre chose, nous pourrons demander des renseignements par écrit.
    Il nous reste seulement deux minutes et demie, et je vais céder la parole à M. Cannings, si vous le permettez.

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais qu'on demande à M. Stoff de répondre à ma question par écrit.

[Traduction]

    Oui, je viens de dire cela. Merci.
    Monsieur Cannings, la parole est à vous pour deux minutes et demie, je vous prie.
    Merci.
    J'aimerais revenir sur la question de l'établissement d'un équilibre entre la liberté de recherche, les bons partenariats internationaux et les restrictions nécessaires dans certaines situations, et il y a les discussions entourant les listes.
    La question s'adresse à M. Landon. Quel bâton se cache derrière ces listes? Cela signifie‑t‑il qu'une entité ayant de tels liens n'aurait pas accès au financement des trois conseils? Y a‑t‑il des éléments qui pourraient détourner certains chercheurs du financement canadien et les inciter à se tourner directement vers la Chine? Cela comprend‑il à l'égard des universités des mesures contraignantes qui les empêchent d'obtenir des fonds des trois conseils? Je me demande quel serait le mécanisme à cet égard.
    Nous comprenons qu'après la fusion de liste d'entités restreintes — ou liste d'entités désignées, comme on l'appelle, je pense — et la liste des domaines de recherche sensibles en technologie, le financement fédéral ne sera pas accessible aux chercheurs qui font une demande à cet égard.
    Quant aux modalités précises sur la fin des partenariats actuels dans ces domaines, cela reste à déterminer, mais nous croyons comprendre que c'est ainsi que s'appliqueront les listes.
    Monsieur Gaffield, pouvez-vous commenter? Quels sont vos espoirs et préoccupations par rapport à cette situation?
    Je suis convaincu que toutes nos universités prendront, dans les plus brefs délais, toutes les mesures nécessaires pour se conformer à ces listes dès qu'elles seront publiées.
    N'êtes-vous pas préoccupé par les conséquences que cela pourrait avoir pour les chercheurs qui se verraient refuser du financement du Canada et qui pourraient aller voir ailleurs?
    Tout à fait. Comme je l'ai dit plus tôt, cela pourrait représenter un risque pour certains de nos étudiants, qui jouent évidemment un rôle clé dans nos projets.
    Il m'apparaît dans l'intérêt de tous de veiller à maintenir la recherche aussi ouverte que possible, mais aussi sécurisée que nécessaire. Cela doit être une priorité absolue. Nous prenons cela très au sérieux et je suis convaincu que tous nos établissements feront des pieds et des mains pour appuyer leurs étudiants le mieux possible, mais va sans dire évident que le gouvernement fédéral doit aussi apporter son aide.

  (1730)  

    Merci beaucoup.
    Je remercie les trois témoins d'aujourd'hui, MM. Stoff, Landon et Gaffield, pour leurs témoignages et leurs réponses.
    Je remercie les députés de leurs questions.
    Je sais que quelques interventions ont dû être interrompues. Si vous avez des observations à ajouter ou des précisions à apporter, veuillez les transmettre par écrit à la greffière.
    Nous allons maintenant suspendre la séance brièvement pour permettre aux témoins de se retirer et pour accueillir notre deuxième groupe de témoins. Nous avons deux témoins qui vont se connecter et faire des tests de son. Nous reprendrons dans quelques minutes avec notre deuxième groupe de témoins.

  (1730)  


  (1735)  

    Nous reprenons. Maintenant que les tests sont terminés, nous allons commencer avec notre deuxième groupe de témoins.
    Conformément à l'article 108(3)i) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 5 décembre 2022, le Comité entreprend son étude des répercussions à long terme de l'écart salarial entre les sexes et des groupes en quête d'équité dans le corps professoral des universités canadiennes.
    J'ai maintenant le plaisir d'accueillir nos deux témoins qui se joignent à nous à distance. Premièrement, nous accueillons Mme Catherine Beaudry, professeure à l'École polytechnique de Montréal, qui témoigne à titre personnel. Nous avons aussi, Mme Robin Whitaker, vice-présidente de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université, qui nous parle depuis l'Université Laurier, si j'ai bien compris.
    Vous avez chacune cinq minutes.
    Si nous pouvions commencer par Mme Beaudry, ce serait formidable.

[Français]

    Merci. Je vais faire mon allocution en français.
    Je vous remercie de cette invitation à comparaître devant le Comité permanent de la science et de la recherche. C'est un grand privilège pour moi d'avoir la chance de vous faire part de mes résultats de recherche sur les inégalités salariales.
    Comme spécialiste de la gestion et de l'économie de la science, de la technologie et de l'innovation, je me suis rapidement intéressée aux différences entre les hommes et les femmes en sciences. Je voulais aller au-delà des simples comparaisons de moyenne sur les genres, qui montrent toujours un retard des femmes par rapport aux hommes, pour comprendre les facteurs qui influencent ces écarts. J'ai donc examiné comment le genre, l'âge, le financement, la collaboration et la position dans les réseaux influencent la production et l'impact scientifiques.
    Mes recherches ont montré que, pour un même montant de subvention obtenu, les femmes publient plus que les hommes. En revanche, quand les hommes et les femmes publient dans des revues savantes qui ont le même facteur d'impact, plus la proportion de femmes coauteures est grande, moins l'article a de chances d'être cité. Ces résultats m'ont poussée à investiguer si ces différences en matière de production scientifique avaient une incidence sur la progression professionnelle et le salaire des femmes universitaires.
    Par ailleurs, comme j'ai été trésorière, puis vice-présidente, de l'Association des professeurs de l'École Polytechnique, j'ai aussi été appelée à trouver des moyens pour réduire les barrières auxquelles les femmes professeures font face, qui ralentissent leur carrière et maintiennent le salaire versé en deçà des attentes. Je suis contente de vous dire qu'il y a maintenant une promotion rétroactive à Polytechnique pour ne pas pénaliser les femmes qui prennent des congés de maternité, par exemple.
    La partie principale de mon allocution porte sur des résultats d'enquête. En 2017, j'ai mené une vaste enquête pancanadienne sur les salaires des universitaires et exploré toutes les primes et les honoraires professionnels qui s'ajoutent au salaire de base et qui exacerbent les différences salariales entre les hommes et les femmes en matière de rémunération globale. Cette étude s'est penchée sur les primes au marché et à la performance, les primes associées aux chaires de recherche et les primes administratives.
    Tant les statistiques descriptives de Statistique Canada que celles de mon enquête montrent que les hommes gagnent plus que les femmes, et que l'écart se creuse à mesure qu'on progresse en carrière, de professeur adjoint à professeur titulaire. Il y a de moins en moins de femmes au niveau de professeur titulaire.
    Les données de l'enquête montrent qu'en ce qui concerne les primes administratives, les hommes gagnent 16 000 $ par rapport à 9 000 $ pour les femmes. Du côté des primes au marché, les hommes obtiennent 13 000 $, contre 7 000 $ pour les femmes. C'est du côté des honoraires professionnels qu'on trouve l'écart le plus grand: 25 000 $ pour les hommes et 13 000 $ pour les femmes.
    Alors que l'écart entre les hommes et les femmes au rang de professeur titulaire est de 7 000 $ si on considère juste le salaire de base, il passe à plus de 15 000 $ si on considère la rémunération globale. C'est donc en matière de rémunération globale que l'écart est le plus grand.
    Nous avons aussi fait des modèles de régression pour essayer de comprendre les écarts salariaux que nous étions capables d'expliquer et ceux qu'on pourrait juger comme étant un peu de la discrimination. Nous avons montré que plusieurs facteurs expliquent les différences en matière de rémunération globale, qui oscillent de 4 % à 6 % selon les domaines. En moyenne, ce n'est pas si énorme que cela.
    L'âge, le rang universitaire, la discipline, les interruptions de carrière, une carrière davantage tournée vers la recherche, mais, surtout, les différentes primes et les honoraires professionnels expliquent les écarts de rémunération globale entre les hommes et les femmes. Une fois tous ces facteurs considérés, il reste très peu d'écarts hommes-femmes qui ne sont pas expliqués par toutes les variables que nous avons mises dans le modèle de régression et qui pourraient être considérés comme de la discrimination. Seuls les honoraires et les primes administratives font partie de cette catégorie non expliquée.
    Pour tous les éléments de la rémunération globale enchâssés dans une convention collective — pour les universités qui ont de telles conventions —, comme le salaire de base associé aux différents rangs universitaires et certaines primes associées aux chaires de recherche et à la performance, les écarts de salaire hommes-femmes sont explicables. Nous avons cependant de la difficulté à expliquer le montant des primes.

  (1740)  

     Nous commençons à étudier cela.
    Le président me faisant signe que mon temps est écoulé, je vous remercie. Je peux répondre à vos questions tant en français qu'en anglais.

[Traduction]

    J'ai dû vous interrompre, malheureusement, mais je vous remercie. Vous pourrez bien sûr intégrer certains points que vous n'avez pas abordés dans vos réponses aux questions. Sinon, nous vous invitons à nous les transmettre par écrit. Ce serait formidable. Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Whitaker, de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université, pour cinq minutes.
    Je vous parle depuis St. John's, à l'Université Memorial — et non l'Université Laurier — sur la partie insulaire de Terre-Neuve-et-Labrador, qui est, je tiens à le souligner, le territoire traditionnel non cédé des Béothuks et des Micmacs.
    Je suis vice-présidente de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université, qui représente plus de 72 000 enseignants, chercheurs, bibliothécaires et membres du personnel général des universités, collèges et écoles polytechniques du pays. Je suis également professeure à l'Université Memorial, qui a récemment terminé une étude sur l'écart salarial entre les sexes qui a permis de cerner et de compenser les inégalités salariales chez les femmes, dont moi.
    Je remercie le Comité d'entreprendre cette importante étude. J'aimerais aborder quatre points principaux dans ma déclaration préliminaire, et je serai ravie d'apporter plus de précisions lors des séries de questions.
    Premièrement, pour mieux comprendre les divers facteurs croisés qui contribuent aux inégalités salariales dans les universités et les collèges, il nous faut des données plus solides sur la démographie et la rémunération du corps professoral dans les établissements, tant pour l'effectif à temps plein que les professeurs contractuels. Le gouvernement fédéral peut être un chef de file en appuyant la collecte de telles données en élargissant, pour commencer, l'Enquête de Statistique Canada sur le Système d'information sur le personnel d'enseignement dans les universités et les collèges, ou SIPEUC.
    Deuxièmement, le SIPEUC nous fournit des données assez solides sur l'écart de rémunération entre les hommes et les femmes dans le corps professoral universitaire à temps plein. L'écart de rémunération brut ne tient pas compte des différences dans les caractéristiques observables, mais il s'agit d'une première étape vers la compréhension de l'écart salarial entre les sous-populations.
    Pour ce qui est de la rémunération chez les membres du corps professoral à temps plein dans les universités canadiennes, l'écart brut est en moyenne de 10 % entre les femmes et leurs homologues masculins. Cet écart résulte en grande partie de différences selon la discipline, le rang et l'âge. Même après ajustement de ces facteurs, on constate toujours un écart salarial de rémunération d'environ 4 % entre les hommes et les femmes, et cet écart s'explique fort probablement par le genre de facteurs mentionnés par ma collègue, notamment le salaire de départ — souvent négocié individuellement —, la rémunération au mérite et les différences de primes selon le marché, ainsi que les différences dans le temps nécessaire pour obtenir une promotion.
    Chacun de ces facteurs représente une possibilité de partialité pouvant se traduire par une différence de rémunération. Bref, une analyse plus large et une réforme de la structure salariale dans le milieu universitaire s'imposent.
    À défaut de données institutionnelles sur les salaires liés à des facteurs autres que la notion binaire de genre, nous avons examiné les données de recensement pour le corps professoral universitaire et collégial. Il convient d'interpréter ces données avec prudence, mais nous constatons un important écart de rémunération brute chez le personnel enseignant racisé et autochtone de niveau postsecondaire, et l'écart est encore plus marqué chez les femmes racisées et autochtones. En effet, il est de 10 % pour les professeurs racisés et grimpe à 25 % chez les femmes racisées du corps professoral universitaire.
    Le statut d'emploi est un facteur probable des importants écarts de rémunération observés dans les données du recensement, car les membres des groupes en quête d'équité sont très probablement sous-représentés aux grades universitaires supérieurs et aux postes universitaires à temps plein.
    Troisièmement, les universités et les collèges doivent adopter des pratiques d'embauche destinées à assurer l'équité en matière d'emploi dans les disciplines traditionnellement dominées par les hommes et mener régulièrement des exercices d'équité salariale. Les associations de professeurs d'université se sont employées activement à intégrer ces changements dans les conventions collectives. Elles ont également négocié des dispositions relatives à la communication de renseignements, à la compression des échelles salariales, ainsi qu'à l'« arrêt de l'horloge de la titularisation » afin d'aider les femmes à accéder aux promotions plus rapidement.
    Mon quatrième et dernier point est le suivant: le gouvernement fédéral a un rôle clé à jouer pour soutenir les associations de professeurs d'université afin d'éliminer la discrimination salariale au sein du corps professoral universitaire. Il peut appuyer la collecte de données démographiques plus vastes dans le cadre de l'enquête sur la rémunération dans le SIPEUC, y compris sur la race, l'identité de genre, l'invalidité et l'identité autochtone, et ce, pour l'ensemble de l'effectif, qu'il soit à temps plein ou à temps partiel.
    Cela permettra de cerner et d'évaluer l'incidence de sources de désavantage uniques, doubles ou multiples sur les salaires et d'autres formes de rémunération. Cela contribuera aussi à appuyer les efforts pour éliminer la discrimination par l'intermédiaire d'un programme de contrats fédéraux renforcé afin d'exiger le respect des exigences fédérales en matière d'équité en emploi, de transparence salariale et d'équité salariale.
    Enfin, le gouvernement fédéral peut travailler en collaboration avec les provinces pour renouveler l'effectif universitaire et créer davantage de postes de titulaires à temps plein. Selon les estimations des enquêtes récentes sur la population active, un tiers du corps professoral est employé à l'heure actuelle sous contrat à durée déterminée ou à temps partiel, sans rémunération équitable, y compris l'accès aux avantages sociaux, aux régimes de pension, au perfectionnement professionnel ou aux fonds de recherche. L'absence de renouvellement du corps professoral est un obstacle structurel à l'atteinte de l'équité en emploi et, par conséquent, de l'équité salariale au sein du corps professoral universitaire.
    Je vous remercie. Je suis impatiente de discuter avec vous.

  (1745)  

    C'est excellent. Je vous remercie.
    Nous passons maintenant à notre première série de questions, en commençant par M. Corey Tochor pour six minutes, s'il vous plaît.
    Madame Beaudry, vous avez indiqué que vous ne pénalisez pas les femmes qui prennent des congés de maternité. Comment cela fonctionne‑t‑il? Quelles sont les modalités?
    Comment fonctionne un programme qui permet à quelqu'un de prendre un congé pour avoir un enfant sans que cela ait une incidence sur l'écart salarial?
    Je tiens à préciser que ce n'est pas nouveau au Québec. L'Université Laval a mis cela en place en 1986; c'est donc une pionnière.
    Lorsqu'une femme retourne au travail après un congé de maternité, puis demande éventuellement une promotion au grade suivant et l'obtient, la promotion est accordée rétroactivement pour compenser le congé de maternité. Si elle a pris un congé de maternité d'un an, la promotion est accordée à compter du début du congé de maternité et non de la fin, et elle recevra une compensation pour toute augmentation de salaire perdue durant l'année de congé. En effet, la personne qui passe du poste de professeur adjoint à celui de professeur agrégé a une augmentation de salaire.
    Donc, lorsqu'elle se porterait finalement candidate à la promotion, elle aurait une rémunération rétroactive pour l'année où elle était en congé de maternité. Voilà ce que j'entends par « rétroactive ». Le congé de maternité n'est pas pénalisé.
    Cela a été introduit en 1986. À l'époque, la mesure visait-elle à résoudre certains problèmes? À ce moment‑là, espérait‑on réduire l'écart beaucoup plus qu'il ne l'a été?
    Je suppose que oui. J'étais assez jeune en 1986. Je ne pourrais donc pas vous dire exactement ce que le recteur de l'Université Laval avait en tête à l'époque. Je suppose que l'idée était d'empêcher que les femmes soient pénalisées pour avoir pris un congé de maternité.
    Passons à un autre aspect. Dans un article que vous avez coécrit ce printemps, vous avez établi que les femmes publient en moyenne 1,8 article par année contre 2,6 articles pour les hommes.
    Quels sont les chiffres au Canada et comment se comparent-ils au reste du monde?

  (1750)  

    Je ne saurais dire ce qu'il en est des publications dans le reste du monde, mais si vous lisez n'importe quelle publication de Vincent Larivière, je suis certaine que vous constaterez que les femmes publient moins que les hommes.
    Je pense que c'est une question de choix. Personne ne s'est vraiment penché sur la question. Beaucoup de femmes préféreront suivre des cours de ski ou de natation les fins de semaine au lieu d'écrire un autre article. Je pense que la question du choix est un aspect que nous n'avons pas à l'esprit. Partout dans le monde, les femmes publient moins que les hommes.
    Cela m'intéresserait. Si vous pouviez trouver ce chiffre après la séance, puis l'inclure dans un mémoire, il serait intéressant de voir comment nous nous comparons.
    Vous avez aussi exprimé des préoccupations sur le fait que la recherche en nanotechnologie au Canada est à très forte prédominance masculine. Dans quels autres secteurs de recherche précis au Canada observe‑t‑on la même problématique?
    Je dirais probablement la plupart des domaines du génie et de la physique, les derniers bastions universitaires où les femmes n'occupent pas une place prédominante. On compte en effet plus de femmes diplômées dans la plupart des autres disciplines qu'en génie et en physique.
    Je vous remercie beaucoup de vos réponses.
    Je vais changer de sujet et passer à votre collègue... Encore une fois, je vous remercie de comparaître et de votre témoignage.
    J'ai cru comprendre que vous étiez présidente de l'association des professeures et professeurs de l'université. Vous avez participé à des négociations de la convention collective avec l'administration de l'université. Je constate que la rémunération et l'équité entre les sexes faisaient partie de vos principaux points au cours des négociations en 2019.
    De votre point de vue, les administrations universitaires font-elles preuve d'ouverture à l'égard des questions d'égalité des sexes?
    Vous parlez de ma propre université, n'est‑ce pas?
    De manière générale, les administrations universitaires font-elles preuve d'ouverture à l'égard des questions d'égalité des sexes? Je suppose que oui.
    Oui, je pense que c'est exact. Il y a une ouverture grandissante. Toutefois, comme nous l'avons entendu dans le témoignage de Mme Beaudry, il subsiste encore de nombreux aspects où les préjugés peuvent s'immiscer dans le processus.
    Faisiez-vous référence à l'Université Memorial et aux négociations qui ont mené à la réalisation d'une étude sur l'écart de rémunération entre les hommes et les femmes? Votre question portait-elle là‑dessus, ou est‑ce une question plus générale?
    C'est juste une question d'ordre général. J'essaie de comprendre votre rôle. Je vous remercie du travail que vous faites pour le service public, à tous les points de vue, mais surtout pour réduire cet écart, je l'espère.
    Si vous avez cerné ce problème en 2019, cela fait maintenant quatre ans. J'aimerais savoir ce qui a été fait au cours de quatre années, puisque les administrations universitaires sont prêtes à s'attaquer à ce problème. À votre avis, selon votre expérience, dans quelle mesure a‑t‑on réduit cet écart?
    Nous avons dépassé le temps imparti. Pourriez-vous répondre à cela par écrit? Votre travail semble receler de détails qui seraient utiles à notre comité.
    Nous passons à Mme Lena Metlege Diab pour six minutes, s'il vous plaît.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Beaudry, nous savons que la pandémie a eu des répercussions très importantes sur les femmes en milieu de travail, en particulier les mères d'enfants d'âge scolaire. Pouvez-vous nous en dire plus sur l'effet de la pandémie sur l'écart salarial dans les universités, selon vos recherches?
    Vous avez parlé de l'année 2017, mais avez-vous des données postpandémie?
    Dans le cadre de nos études, nous avons examiné l'incidence de la publication scientifique sur les salaires, et nous avons remarqué que, bien souvent, une orientation de carrière davantage tournée vers la recherche, qui se traduit par une plus grande production scientifique, a une incidence sur le salaire. Pendant la pandémie, les femmes ont publié moins, mais les hommes ont publié plus, parce que les femmes se sont beaucoup occupées des enfants pendant la période scolaire. Moi-même, j'ai fait un peu l'école à la maison avec deux de mes enfants, ce qui m'a pris énormément de temps, en plus de toutes les tâches liées à ma fonction professorale, qui prenaient davantage de temps.
    Je m'attends donc à ce que cet écart entre les genres en matière de publication qu'on a vu en 2020 et en 2021 ait une incidence, mais elle est difficile à mesurer pour l'instant, parce qu'on attend les promotions qui s'en viennent pour avoir assez de données pour connaître l'écart exact. C'est certainement quelque chose qu'on verra dans les données de Statistique Canada.
    Par ailleurs, je réitère ce que ma collègue suggérait. Cela va nous prendre beaucoup plus de données dans ces enquêtes pour bien comprendre le phénomène, et il faudra que ces données soient systématiquement jumelées aux données ayant trait au financement, aux articles et aux citations, par exemple. En fait, il faut documenter la carrière professorale, parce que, pour une chercheuse comme moi, qui passe beaucoup de temps à étudier et jumeler ces données pour s'assurer que le John Smith de l'Université Memorial n'est pas le John Smith de l'Université de Toronto ni celui de l'Université de la Colombie‑Britannique qui aurait changé d'établissement, cela devient très complexe à mesurer.

  (1755)  

    Je suis aussi très curieuse de savoir si vous pensez qu'une des raisons pour lesquelles les femmes publient moins est qu'elles assument plus souvent des fonctions administratives dans les universités que les hommes.
    Dans notre étude, nous avons séparé les postes administratifs tels que ceux de recteur ou de directeur ou directrice de département des autres postes administratifs tels que ceux de directeur de laboratoire ou de responsable de programme de baccalauréat ou de maîtrise. Pour ce qui est des postes administratifs moins prestigieux, les femmes étaient systématiquement moins rémunérées que les hommes, sur le plan des primes administratives.
    Merci.

[Traduction]

    J'ai une question pour vous, madame Whitaker. Je sais que vous êtes ici pour représenter l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université, mais vous êtes aussi de l'Université Memorial — de Terre-Neuve — et je viens aussi du Canada atlantique.
    Ma question est la suivante: dans le cadre des recherches que vous avez faites et dans les renseignements que vous avez collectés, avez-vous constaté des différences entre les petites et les grandes universités? Avez-vous des observations à présenter à ce sujet, ou même au sujet des collèges?
    C'est une excellente question.
    De toute évidence, les établissements et les provinces ont un rôle majeur à jouer en ce qui concerne les iniquités salariales. Nous n'avons pas de données aussi précises sur les établissements. J'hésiterais donc à faire une généralisation à ce sujet. Compte tenu de la nature de ce comité, je crois que ce que je peux faire, c'est attirer votre attention sur certaines des mesures que le gouvernement fédéral pourrait prendre pour soutenir les établissements, les associations des facultés et les syndicats qui tentent de travailler sur ce dossier. J'en ai parlé dans mes remarques liminaires. Le gouvernement fédéral peut aider en fournissant de meilleures données. Cela est essentiel si on veut mener des études permettant d'entamer un travail de correction des iniquités.
    Comme vous le savez d'après nos défis régionaux, il y a un manque de renouvellement de postes de professeurs à temps plein, annuels ou titulaires, surtout à cause de la diminution des fonds publics disponibles. Le gouvernement fédéral a assurément un rôle important à jouer à cet égard. Il doit travailler de concert avec les provinces et les établissements pour offrir de nouvelles possibilités, surtout pour les chercheurs en début de carrière. Il est également essentiel qu'il finance les organismes subventionnaires. Le moment est venu d'ouvrir la porte de verre qui a été...
    Je vous remercie d'avoir évoqué les chercheurs en début de carrière, qui allaient faire l'objet de ma prochaine question. Je suis heureuse que vous en ayez parlé, parce que je vois que le président me fait un signe.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Blanchette-Joncas pendant six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je salue les deux témoins qui se joignent à nous pour la deuxième heure de la réunion.
    Madame Beaudry, j'ai bien écouté votre allocution. J'ai également analysé le sondage que vous avez mené concernant les disparités entre les revenus des hommes et des femmes en milieu universitaire. Plus tôt, vous disiez que les éléments les plus importants où il y avait réellement un écart considérable étaient les primes de marché et les primes d'honoraires.
    Parlez‑moi des autres facteurs. Il est indiqué dans votre enquête que l'âge, le nombre d'enfants et la prise d'un congé sabbatique n'ont pas nécessairement d'effets considérables. Selon vous, qu'est‑ce qui explique cela?

  (1800)  

    En fait, ce n'est pas qu'ils n'ont pas d'effets considérables. C'est que nous sommes capables d'expliquer les écarts salariaux au moyen de l'âge et du nombre d'enfants. Pour vous donner une idée, nous mesurons le pourcentage qui est attribuable à l'âge, lequel, selon certains résultats, contribue à 5,48 % de l'écart. Nous sommes donc capables d'expliquer une portion de l'écart entre les hommes et les femmes, qui est de 4 à 6 %, par une différence d'âge entre les hommes et les femmes.
    Nous sommes capables d'expliquer, par exemple, l'écart de 0,27 % qui vient des primes administratives. Nous sommes capables d'expliquer l'écart de 0,56 % en considérant uniquement le fait d'avoir fait ou non de la consultation pour laquelle on a reçu des honoraires professionnels. Ce n'est pas que ces facteurs n'ont pas d'impact. C'est plutôt que nous sommes capables d'expliquer l'écart de salaire par les différences entre les hommes et les femmes pour chacune de ces variables.
    Cela me fera plaisir de transmettre les résultats des régressions à votre bureau de circonscription.
     C'est bien, merci beaucoup des précisions.
    Je veux entendre vos commentaires concernant une question que j'ai posée aux derniers témoins la semaine dernière sur les données sur l'écart salarial entre les hommes et les femmes dans les universités canadiennes. Ces données montrent que, parmi les 15 plus grandes universités du Canada, celles qui affichaient le plus bas écart salarial entre les sexes étaient deux universités québécoises, l'Université de Montréal et l'Université Laval. Elles se démarquaient quand même de façon importante, puisque l'écart salarial de la troisième université était supérieur de trois points de pourcentage.
    Je voudrais connaître votre point de vue en tant que personne habitant au Québec. Vous êtes québécoise et vous travaillez au sein d'une université québécoise. Qu'est-ce qui pourrait expliquer que les universités québécoises francophones font bonne figure en matière d'équité salariale entre les hommes et les femmes dans leurs corps professoraux?
    Au Québec, si je ne m'abuse, à part l'Université McGill et HEC Montréal, toutes les universités ont des conventions collectives, c'est-à-dire qu'il y a un syndicat pour les professeurs. Nous n'avons pas regardé la question en détail, mais là où il y a une convention collective et un syndicat, les écarts entre les hommes et les femmes sont beaucoup plus faibles que dans les universités où il n'y a pas ce genre d'appui, qui contribue énormément à réduire ces écarts.
     Il est aussi très rare que les hommes vont se négocier des primes au marché quand ils sont recrutés. Quand il y a une convention collective qui le permet ou qui fait en sorte que ces primes au marché disparaissent au fil des années, elles servent de pouvoir d'attraction pour certains professeurs. À Polytechnique, on a voulu se débarrasser de toutes les primes qui existaient et adopter une approche beaucoup plus égalitaire. Si vous regardez dans le reste du Canada, je pense que vous avez une partie de la réponse en remarquant qui est syndiqué et qui ne l'est pas.
    C'est bien précis, merci beaucoup.
    J'aimerais vous entendre parler de pistes de solution. Selon votre expérience, qu'est-ce que le gouvernement du Canada pourrait faire pour mieux soutenir l'équité des membres des corps professoraux universitaires?
    J'ai fait plusieurs études sur l'état des jeunes scientifiques. On parlait du début de carrière tout à l'heure. Là où le bât blesse et où il faut vraiment travailler très fort, c'est chez les jeunes femmes en début de carrière qui ont des enfants. C'est là qu'on accuse un retard vraiment très important, parce qu'on jongle avec la famille, les enfants et le début de carrière, il faut rédiger les demandes de subventions, monter des cours. C'est là qu'il faut aider les femmes à développer leur réseau scientifique, plutôt que de disparaître comme je l'ai fait. Je n'ai fait aucune conférence de 1999 à 2006, parce que je me suis occupée de mes quatre enfants. Il faut vraiment travailler là-dessus, avoir peut-être des nounous qui accompagnent les femmes conférencières qui veulent continuer d'allaiter. Il faut vraiment être très créatif.
    Quand on regarde les hommes qui ont des enfants, les hommes qui n'en ont pas, et les femmes qui ont eu des enfants et dont la carrière est plus avancée, ces trois groupes sont vraiment différents des jeunes femmes en début de carrière qui ont des enfants. C'est là qu'on accuse un retard.

  (1805)  

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci.
    Je dois dire que ce témoignage nous est fort utile. C'est bien d'avoir des données et des exemples, et je sais que nos analystes seront occupés à tenter de compiler le tout. Je vous remercie de cet excellent témoignage.
    Nous allons maintenant passer à M. Cannings pendant six minutes. Allez‑y, je vous prie.
    À nouveau, je tiens à remercier nos deux témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
    J'aimerais d'abord m'adresser à Mme Whitaker de Memorial. J'ai moi-même fait ma maîtrise à Memorial dans les années 1970 sur les oiseaux et je suis heureux de voir les maquereaux derrière vous sur le mur. Je vous en remercie.
    Vous avez dit à quelques reprises que les universités offrent de moins en moins de postes de professeurs titulaires. Je présume que ces postes sont remplacés par des postes contractuels plus axés sur l'enseignement que sur la recherche. Lors d'une séance précédente, nous avons entendu que l'écart salarial est moins important au sein de cette cohorte ou de ce groupe de travailleurs dans les universités. Je parle de ceux qui sont embauchés davantage pour enseigner. Je présume que cela est dû à la structuration et au financement de ces postes.
    Je présume que plus de femmes sont embauchées pour ces postes. Est‑ce le cas? Avez-vous des données à ce sujet? Comment cela s'inscrit‑il dans le portrait global?
    Merci. Cette question est très importante.
    Oui, d'après ce qu'on peut voir, les femmes et les autres groupes dignes d'équité ont davantage tendance à obtenir un poste à temps partiel ou contractuel dans le milieu universitaire. Je pense qu'il est essentiel de se pencher sur cette question.
    Vous avez dit qu'il y a plus d'équité, mais cela se limiterait à ce groupe. Somme toute, l'écart se creuse en matière d'équité. Le manque d'accès aux postes à temps plein ou annuels est de plus en plus préoccupant. On dit souvent que ces postes sont dans la « voie de la titularisation ». Le nombre de postes précaires augmente dans le milieu universitaire.
    Je crois qu'il faudrait également s'inquiéter du fait que de jeunes chercheurs pourraient ne pas développer pleinement leur potentiel s'ils sont de plus en plus orientés vers des postes qui ne leur permettent pas de tirer profit de toute leur formation. Je pense que c'est là que le gouvernement fédéral a un rôle très important à jouer. Il doit travailler de concert avec les provinces afin de stabiliser le financement de l'enseignement supérieur, surtout pour renouveler le corps professoral à temps plein.
    Plus que jamais, on dispose de ce que l'on appelle souvent du personnel hautement qualifié. Il existe un groupe diversifié de titulaires de doctorats qui sont prêts à se lancer dans le milieu universitaire, mais qui ont besoin d'une occasion pour ce faire. Cela signifie qu'il faut créer des postes, leur donner l'occasion d'entrer dans le milieu et leur fournir un financement pour leurs recherches afin de les soutenir.
    Il est évident que nous en bénéficierons tous. Le Canada disposera de meilleures capacités en diversifiant le groupe de talents disponibles. Je crois qu'il est temps d'agir. On a vu le changement se produire. Présentement, des personnes prêtes à entrer dans le milieu ne peuvent pas le faire. Je suis heureuse que vous ayez posé cette question.

  (1810)  

    Merci.
    Je vais maintenant m'adresser à Mme Beaudry.
    Vous avez dit à plusieurs reprises que les femmes ne publiaient pas autant que les hommes, mais je veux m'assurer de vous avoir bien comprise. Je crois que vous avez dit qu'à subvention égale, les femmes ont dû publier plus que les hommes.
    Il semble que non seulement elles n'avaient pas le temps de publier en raison de toutes leurs tâches en dehors du travail, mais qu'elles devaient aussi publier davantage que les hommes pour obtenir le même financement. Vous ai‑je bien comprise?
    C'est probablement le contraire. Pour chaque dollar investi, elles publient davantage. C'est ainsi que je vois les choses. Au lieu de...
    Je suis une optimiste.
    D'accord. Je suis heureux d'entendre du positif, mais j'avais entendu le contraire. On entend beaucoup que les femmes ont dû travailler fort pour être « égales » aux hommes.
    Je pense que c'est quelque chose que nous nous imposons à nous-mêmes. Le syndrome de l'imposteur est très présent. Nous pensons devoir travailler plus dur pour obtenir une promotion et nous pensons devoir la retarder jusqu'à ce que nous soyons vraiment, vraiment bonnes, alors que les hommes demandent normalement une promotion lorsqu'ils croient la mériter. Les choix sont très différents. Les femmes n'agissent pas du tout de la même façon.
    Avant de demander une promotion, les femmes veulent s'assurer de pouvoir l'obtenir. Leur stratégie est différente.
    J'aimerais revenir rapidement sur la situation au Québec, qui est meilleure que dans le reste du Canada. Nous avons entendu des témoignages sur... C'est ce que j'ai cru entendre à propos de l'équité salariale.
    Est‑ce partiellement dû à la disponibilité des services de garde au Québec et aux mesures prises qui permettent aux femmes de travailler davantage?
    Oui, absolument.
    Je suis désolé, monsieur Cannings, mais votre temps est écoulé. Nous avons noté un « absolument ».
    Je vous remercie tous les deux.
    Vous disposez de cinq minutes, monsieur Soroka. Allez‑y, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
    Madame Beaudry, je n'ai pas entendu... Jusqu'à quelle décennie êtes-vous remontée dans votre étude? Jusqu'aux années 1980, 1990 ou 2000? Jusqu'à où êtes-vous remontée dans le temps?
    Avez-vous constaté une différence depuis votre point de départ? Disons que vous êtes remontée aux années 1980 ou 1990 et que vous vous attardez désormais aux années 2000. Qu'en est‑il de l'écart salarial? A‑t‑il baissé ou augmenté? Est‑il demeuré inchangé?
    Je n'ai pas mené d'étude rétrospective sur l'écart salarial. J'en ai mené sur les publications et les subventions, mais pas sur l'écart salarial. Il s'agissait des données de 2017. Je n'ai pas l'historique.
    D'accord, soit. Je me posais simplement la question. Voilà ce que je cherchais à savoir.
    Vous avez également dit que les femmes dominent la recherche dans certains domaines. Sont‑elles payées autant que les hommes dans ces domaines? Sont-elles mieux payées, moins payées?
    Les femmes sont systématiquement moins payées que les hommes. J'ai parlé de dominance, mais cela faisait référence au nombre de diplômés. Il y a plus de femmes diplômées au baccalauréat, à la maîtrise et au doctorat dans la plupart des universités. Le nombre de femmes diplômées est supérieur à celui des hommes. Les hommes dominent en physique et en ingénierie, mais c'est à peu près tout. Cela dit, en ce qui concerne l'écart salarial, les femmes sont systématiquement moins payées.
    Voilà qui est plutôt surprenant. Les universités parlent généralement de l'égalité des chances pour tous, indépendamment de la race, de la couleur ou du sexe, mais on ne cesse de prouver le contraire. Pourquoi pensez-vous qu'elles ne suivent pas leurs propres lignes directrices ou, je présume, la structure existante?
    Je crois qu'elles le font probablement. Si l'on regarde la différence d'âge, dans chaque cohorte, les femmes sont légèrement plus jeunes que les hommes, ce qui explique peut-être une différence de 2 000 ou 3 000 $ qui se répercute sur la cohorte. Statistique Canada classe ses données par groupes. Il y a le salaire médian ou le salaire moyen — je ne suis plus trop certaine — de l'ensemble des professeurs adjoints, des professeurs associés... Si l'on examine les données sur la différence d'âge, on s'aperçoit qu'elle est très souvent d'un ou deux ans. Cela suffit à expliquer une partie de la différence.
    Si l'on ajoute à cela que certains hommes ont demandé des primes de marché lors de leur premier recrutement, on sait que cette prime de marché est conservée tout au long de leur carrière. Si on commence avec un meilleur salaire lorsqu'on est professeur adjoint, cette prime s'accumulera au fur et à mesure qu'on gravit les échelons. Je crois que c'est ce qui influence le plus la situation.
    Dans les universités qui n'ont pas de convention collective, la compensation du congé de maternité retarde la promotion. Nous avons examiné les retards de promotion. Les personnes, hommes et femmes, qui ont des enfants entre le moment où elles sont professeurs adjoints et le moment où elles sont professeurs titulaires seront celles qui...

  (1815)  

    D'accord. Cela me fait penser à une autre question. Je suis désolé, je n'avais pas l'intention de vous interrompre, mais il ne me reste plus beaucoup de temps.
    Simple curiosité: avec ce que vous nous dites, quel est le rôle du gouvernement dans tout cela? Que devrait‑il tenter pour que la situation soit plus égalitaire et juste pour tous?
    Je crois qu'il faudrait que les femmes sachent qu'elles peuvent demander une prime de marché. Bien souvent, elles tombent de leur chaise lorsqu'elles réalisent que certains de leurs collègues en ont, alors qu'une telle chose ne leur avait jamais effleuré l'esprit. Ma collègue parlait de la difficulté de trouver un emploi...
    D'accord. Cela ne répond toujours pas à ma question, mais je vous remercie de cette réponse.
    J'ai une autre question. Vous avez parlé des syndicats et du fait que les facultés syndiquées sont payées plus adéquatement. Vous avez également dit que la présence des syndicats réduit l'écart salarial. Pensez-vous que si les universités ou les collèges étaient davantage syndiqués, les négociations seraient bien meilleures, ou est‑ce un facteur qui n'entre pas en ligne de compte?
    Je crois que la voix de ces établissements se ferait nettement plus entendre s'ils étaient syndiqués. Les employés n'auraient pas à négocier leur salaire individuellement dans le bureau du directeur du département.
    Merci. Je cherchais simplement à vous entendre à ce sujet.
    Combien de temps me reste‑il? Je crois que j'ai terminé pour aujourd'hui.
    Merci. La qualité prime parfois sur la quantité.
    Vous disposez de cinq minutes, madame Bradford. Allez‑y, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais poursuivre la discussion sur le congé parental et ses effets. L'Union des associations des professeurs des universités de l'Ontario a déclaré ce qui suit dans le cadre de l'étude du gouvernement de l'Ontario sur l'écart salarial entre les sexes:
Les dispositions relatives au congé parental qui normalisent une répartition plus équitable de la garde d'enfants et des responsabilités ménagères favoriseraient une plus grande égalité entre les hommes et les femmes au sein du foyer, tout en veillant à ce que l'impact du congé parental sur la carrière soit plus équitablement réparti entre les femmes et les hommes sur le lieu de travail.
    Je m'adresse d'abord à vous, madame Beaudry. Pourriez-vous nous donner des données sur le nombre de congés parentaux pris par sexe parmi le personnel universitaire de votre établissement?
    Mon établissement prévoit un congé parental de cinq semaines pour les hommes. Quant aux femmes, c'est très variable. Je ne suis pas certaine de bien comprendre. La plupart des professeurs prennent le congé parental auquel ils ont droit. Quant à savoir s'ils s'occupent des enfants, je l'ignore.
    J'ai des informations intéressantes à vous donner. Dans le cadre d'autres études, nous avons étudié la répartition des tâches ménagères et de la garde d'enfants entre les hommes et les femmes. Les femmes s'occupent systématiquement de la majorité des tâches liées aux enfants, et cela a une incidence directe sur leurs publications et leurs citations. Cela a des répercussions.
    En ce qui concerne l'assurance-emploi, je crois que les parents disposent d'une certaine flexibilité quant à la manière dont ils souhaitent se partager les prestations. Je me demande si vous aimeriez qu'on apporte d'autres changements au système de congé parental de l'assurance-emploi afin d'encourager une répartition plus équitable du congé parental. La pratique actuelle ne consiste assurément pas à offrir une répartition équitable, mais je crois qu'il y a une certaine flexibilité.
    Non, en effet, pas du tout. La répartition n'est pas équitable. On aurait besoin d'un changement culturel pour que les hommes décident de rester un an à la maison avec leurs enfants et que les femmes fassent de même. On a besoin d'un changement sociétal, pas seulement dans le milieu universitaire. Les universitaires subissent de la pression de performance. Je ne crois pas que... Vous savez, certaines de mes collègues ont pris un congé de maternité de deux semaines. D'autres ont pris un an. Tout dépend de leur choix. Cela dit, s'il y avait un changement culturel, je crois qu'il devrait s'étendre à toute la société, pas seulement au milieu universitaire.

  (1820)  

    Ma prochaine question s'adresse aux deux témoins.
    Votre établissement offre‑t‑il des services de garde supplémentaire ou des prestations parentales afin de promouvoir une répartition plus équitable des responsabilités liées aux enfants entre les parents de différents sexes?
    Je serais intéressée de vous entendre toutes deux à ce sujet.
    Je suppose que je pourrais répondre en premier.
     Je dirai, à propos de la question précédente, qu'il s'agit là d'un autre domaine où les syndicats ont un rôle très important à jouer dans la négociation des prestations de congé parental. Votre question porte toutefois sur les services de garde. Même si, selon moi, les établissements et les associations ou syndicats de professeurs ont un rôle essentiel à jouer pour revendiquer des mesures en faveur de ceux qui œuvrent dans ce milieu, je pense que nous avons pu constater à quel point il est important que les gouvernements jouent leur rôle en garantissant, de façon systémique, la disponibilité de services de garde.
     Nous avons un bon exemple, celui du Québec, et c'est peut-être l'une des raisons pour lesquelles les choses se sont améliorées dans certains établissements au Québec. Le gouvernement fédéral a joué un rôle important à cet égard. Je pense que nous pouvons appliquer le bon modèle des centres de la petite enfance aux établissements postsecondaires aussi. Bien entendu, la prestation de services de garde abordables et accessibles améliore considérablement les choses pour les parents dans tous les secteurs, notamment dans les universités et les collèges. C'est un bon modèle pour le financement public de l'éducation dans son ensemble.
     Nous pouvons certes examiner ce que les établissements peuvent faire, mais je pense que, pour les besoins de votre comité, il est vraiment important de souligner que le gouvernement fédéral a également un rôle clé à jouer. Il y a eu de bons progrès, et nous devons poursuivre sur cette lancée.
    Parlons maintenant de l'initiative Dimensions, qui est administrée par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie pour les trois organismes subventionnaires. Un manuel a été élaboré à l'intention des établissements postsecondaires qui cherchent à accroître l'équité, la diversité et l'inclusion dans leur milieu.
    Je suis désolé, mais je dois vous interrompre.
    L'hon. John McKay: Je sais ce que vous ressentez.
    Un député: Nous le savons tous.
    Le président: Il nous reste cinq minutes, dont deux minutes et demie seront accordées à M. Blanchette-Joncas.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Mesdames Beaudry et Whitaker, je suis heureux que vous ayez beaucoup de données à nous transmettre, mais je veux que nous restions sur les pistes de réflexion concernant les solutions. Quels sont les leviers du gouvernement fédéral pour réellement diminuer l'écart salarial qu'il peut y avoir dans les corps professoraux universitaires? Avez-vous des solutions à nous proposer?
     D'abord, il faut mesurer correctement les écarts salariaux en comparant ce qui est comparable. Dans le cas des personnes qui publient à la même fréquence et qui reçoivent un financement comparable, il n'y a généralement pas d'écart entre les hommes et les femmes. C'est l'accès des jeunes professeurs, notamment les jeunes femmes, à ce financement et à de l'aide pour aller dans des conférences qui explique une partie des écarts, sans oublier l'accès à des places en garderie.
    En Angleterre, je payais 45 livres par jour pour la garde de mes deux jeunes enfants. Je suis revenue au Québec en 2002 parce qu'il y avait des garderies à 5 $. Il m'en coûtait 10 $ par jour pour la garde de mes deux enfants. Faites le calcul, financièrement, la différence est flagrante. Si nous avions des garderies systématiquement établies dans toutes les universités, cela rapprocherait les communautés. Les doctorants et les postdoctorants ont des enfants eux aussi, qui pourraient aller dans les mêmes garderies que les enfants des professeurs. Ces garderies contribueraient alors à souder les communautés parce que nous serions tous dans la même galère. Toutefois, nous nous battons tous pour avoir des places en garderie, et il n'y en a pas. Je n'ose même pas m'imaginer ce qui se passe dans le reste du Canada.
    Je vous remercie, madame Beaudry.
    Madame Whitaker, je vous cède la parole.

  (1825)  

[Traduction]

    Outre la collecte de données et de preuves, dont on a déjà parlé, je répète qu'il faut un programme de contrats fédéraux renforcé. Cela permettrait à un plus grand nombre d'universités et de collèges d'être soumis à la législation fédérale. En 2013, le seuil du Programme de contrats fédéraux a été révisé à la hausse de façon considérable, ce qui a eu pour effet d'exclure un certain nombre d'universités qui relevaient de cette législation.
    À mon avis, l'abaissement du seuil et le renforcement des lois relatives à l'équité en matière d'emploi et à la rémunération seraient des mesures très concrètes que le gouvernement fédéral pourrait prendre.
    Pour revenir à un point que j'ai soulevé plus tôt, la collaboration avec les provinces pour stabiliser le financement des établissements postsecondaires...
    C'est très bien. Je vous remercie. Cette observation figure déjà au compte rendu. Je suis sûr que nous en ferons mention. Merci.
    Passons maintenant à notre dernier intervenant, M. Cannings, qui dispose de deux minutes et demie.
    Merci.
    Je vais m'adresser de nouveau à Mme Whitaker.
    Il me semble que l'un des aspects les plus épineux de cette question tient aux idées préconçues qui, au fond, nous habitent tous. Dans un système comme le nôtre, où les postes de décision sont dominés par les hommes... Cette situation est en train de changer, du moins je l'espère. Si des données révèlent une amélioration à ce chapitre, j'aimerais en prendre connaissance.
    En ce qui concerne la rémunération au mérite, le temps nécessaire pour obtenir une promotion, les salaires de départ, les honoraires professionnels et les primes, toutes ces décisions semblent être prises, pour la plupart, par des personnes haut placées ou par des comités chargés de trancher ces questions.
     Comment contourner ce problème? Comment pouvons-nous y remédier, ou devons-nous simplement attendre que le monde se stabilise et que le nombre de femmes soit égal à celui des hommes?
    Non, je ne pense pas que nous ayons à attendre. J'estime qu'il y a des choses que nous pouvons faire.
     Vous avez raison: nous devons nous attaquer aux problèmes systémiques qui échappent aux négociations individuelles, à la rémunération au mérite, aux différences sur le marché... La négociation collective s'est avérée un mécanisme important pour y parvenir. De plus, la compression des échelles salariales, entre autres, permet aux gens d'être promus en moins de temps, de sorte que l'échelle salariale demeure transparente. Les femmes atteignent ainsi un seuil égal plus rapidement et y restent plus longtemps.
    Par ailleurs, il faut faire preuve d'une plus grande transparence à propos de l'état actuel des choses et combler les écarts d'équité en matière d'emploi dans certains domaines, notamment les sciences, la technologie, l'ingénierie et les mathématiques — soit les domaines des STIM, dont Catherine Beaudry a parlé —, mais aussi l'architecture et d'autres disciplines, qui contribuent généralement aux différences sur le marché... Bref, je pense qu'il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire, si la volonté est là, mais il faut, en somme, éliminer les situations qui ouvrent la porte aux préjugés ou à la discrimination. Des efforts ont été déployés pour les réduire ou pour en atténuer les répercussions, comme le fait de ne pas permettre que les différences sur le marché persistent tout au long d'une carrière et d'autres mesures de ce genre.

  (1830)  

    C'est très bien. Je vous remercie. Je pense que c'est une bonne façon de terminer notre réunion.
     Merci, monsieur Cannings.
    Merci, Catherine Beaudry et Robin Whitaker, de votre témoignage et de votre participation à cette étude. Vous faites un travail remarquable dans votre domaine, en plus de contribuer à notre étude. Je vous en remercie donc. Si vous avez des observations à ajouter, veuillez les transmettre à la greffière.
    À ce propos, conformément à la motion que nous avons adoptée le 18 septembre, la demande de mémoires est maintenant publiée sur notre site Web. Elle sera accessible au cours des trois prochaines semaines. Vous trouverez, sur la page consacrée à l'étude, le lien pour le dépôt des mémoires, ainsi que le texte intégral de la motion et les renseignements administratifs pour communiquer avec la greffière. Donc, consultez notre site Web.
    Par ailleurs, à la lumière de la discussion avec les analystes et les greffiers — si je peux avoir votre attention pendant encore une ou deux minutes, chers collègues — au sujet de la date limite pour proposer des témoins en prévision de l'étude sur l'intégration du savoir traditionnel et des connaissances scientifiques autochtones dans l'élaboration des politiques gouvernementales, nous accepterons les propositions de témoins jusqu'à la fin de la journée du vendredi 13. Veuillez indiquer votre affiliation politique si vous les envoyez par l'entremise de vos bureaux. Si le Comité le souhaite, les analystes pourront préparer une liste de témoins afin que les partis puissent en tenir compte au moment de dresser leur liste.
     Je vous rappelle également que nous ne nous réunirons pas le lundi 2 octobre et que, lors de la réunion du mercredi 4 octobre, nous reprendrons les études sur lesquelles nous nous sommes penchés aujourd'hui et nous poursuivrons notre bon travail.
     Félicitations au Comité pour cette excellente réunion et, encore une fois, merci aux témoins.
     Sur ce, j'aimerais savoir si nous pouvons lever la séance.
    Je vous remercie. La séance est levée.
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