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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 028 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 22 avril 2021

[Enregistrement électronique]

  (1830)  

[Traduction]

     Bienvenue à la 28e séance du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.
    De formule hybride, cette séance a lieu conformément à l'ordre de la Chambre du 25 janvier 2021. Le compte rendu sera publié sur le site Web de la Chambre des communes, et l'affichage montrera toujours la personne qui parle plutôt que la totalité du Comité.
    Nous poursuivons aujourd'hui notre étude sur l'inconduite sexuelle au sein des Forces armées canadiennes.
     Pour nos témoins, les commentaires doivent être adressés par l'intermédiaire de la présidence, et si vous souhaitez entendre l'interprétation, un bouton au bas de votre écran par lequel choisir l'anglais ou le français.
     Lorsque vous parlez, veuillez parler lentement et clairement pour nos interprètes, et lorsque vous ne parlez pas, votre micro doit être en mode silencieux.
    Je souhaite maintenant la bienvenue à nos témoins, qui entameront nos discussions par leurs déclarations liminaires de cinq minutes, suivies de questions.
     Tout d'abord, nous accueillons le major-général Steven Whelan, qui est le commandant par intérim du Commandement du personnel militaire et chef du personnel militaire, et nous accueillons également M. Kin Choi, le sous-ministre adjoint des Ressources humaines.
     Nous allons commencer par M. Choi. Vous disposez de cinq minutes, monsieur, et vous pouvez commencer.

[Français]

    Madame la présidente, membres du Comité, bonsoir. Je vous remercie de m'avoir invité à participer à cette discussion en tant que sous-ministre adjoint des ressources humaines civiles du ministère de la Défense nationale.
    Je suis membre de la fonction publique depuis plus de 29 ans, ayant occupé un certain nombre de postes dans divers ministères. L'équipe de la Défense nationale est une grande organisation complexe qui comprend des employés de la fonction publique et des militaires et qui s'étend à l'échelle du Canada et à l'étranger. Elle compte 18 conventions collectives différentes qui englobent près de 70 groupes de professionnels, allant du soutien administratif aux métiers techniques, en passant par la recherche en matière de défense et les scientifiques, dont la majorité est représentée par 10 différents syndicats avec lesquels nous travaillons.
    Dans mon rôle de sous-ministre adjoint des ressources humaines civiles, je suis en grande partie responsable de quatre fonctions essentielles: la gestion de la rémunération; le maintien d'un milieu de travail sain, la promotion de la diversité et de l'inclusion et gérer les relations de travail, qui touchent environ 26 000 employés de la fonction publique.

[Traduction]

    Mon équipe supervise un certain nombre de domaines liés à la gestion du personnel, notamment la dotation, l'apprentissage et le développement, la classification et la conception organisationnelle, les relations de travail et la rémunération. De plus, nous sommes chargés d'élaborer et de mettre en oeuvre des plans, des politiques et des programmes visant à recruter, à perfectionner et à maintenir en poste un personnel diversifié afin de nous assurer que les Forces armées canadiennes soient soutenues au pays et à l'étranger. Dans tous les aspects de notre travail, nous sommes déterminés à respecter les valeurs d'éthique, d'intégrité et de bien-être de nos employés de l'équipe de la Défense.
    Bien que des mesures importantes aient été prises pour assurer la santé globale et le bien-être de l'équipe de la Défense, nous avons manifestement encore du travail à faire pour apporter un changement de culture durable. Il est impératif que nous continuions ce changement afin de rebâtir un environnement de confiance, de respect et de responsabilisation qui reflète les Canadiens que nous servons. Nous écouterons tous les points de vue et prendrons des décisions éclairées pour nous assurer que nos valeurs fondamentales mènent à ce changement significatif.
     Enfin, en ma qualité de chef des Ressources humaines pour nos employés de la fonction publique, je prends très au sérieux mes responsabilités à titre d'autorité fonctionnelle en matière de harcèlement en milieu de travail, de discrimination et de mise en oeuvre du projet de loi C-65 afin d'assurer l'équité et l'application régulière de la loi, quel que soit le grade ou le poste.
    Je reconnais qu'il peut y avoir des questions précises liées à des plaintes en cours; cependant, je ne pourrai pas aborder la nature précise de ces cas, car ils relèvent du processus indépendant et du mécanisme de recours dont disposent actuellement les plaignants.
     Je vous remercie. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
    C'est très bien.
     Nous allons maintenant entendre le major-général Whelan pendant cinq minutes.
     Madame la présidente et membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui à participer aux discussions du Comité en ma qualité de commandant par intérim du Commandement du personnel militaire, poste que j'occupe depuis à peine un mois.
     Le Commandement du personnel militaire a la responsabilité de la gestion de nombreuses politiques relatives au personnel qui appuieront tous les membres des FAC, à temps plein et à temps partiel, ainsi que leurs familles. Cela comprend: le recrutement, l'instruction de base, la formation militaire professionnelle, les services de santé, la gestion de carrière, les avantages sociaux, le soutien aux familles, les services de transition, l'histoire et le patrimoine, les distinctions honorifiques et la reconnaissance.
    En substance, le rôle du Commandement du personnel militaire est celui d'un important facilitateur des FAC — nous recrutons, développons et soutenons tous nos membres afin qu'ils puissent être au meilleur de leur forme au service au Canada.
     Comme bon nombre de mes collègues qui ont comparu devant ce comité, j'ai plus de 30 ans de service et, pendant cette période, j'ai observé l'évolution de notre organisation.
     Les FAC d'aujourd'hui ne sont pas ce qu'elles étaient lorsque j'ai rejoint leurs rangs. Je vois des forces plus diversifiées à tous les niveaux, et elles nous ont rendus meilleurs. Nos différences rendent notre équipe et notre culture plus fortes, plus efficaces et plus résilientes, tant au pays qu'à l'étranger. Bien qu'il y ait eu tant de changements positifs, je sais qu'il reste encore beaucoup à faire pour créer un environnement plus accueillant et plus sûr pour tous nos membres. Et je sais que nous avons des gens formidables et de grands dirigeants à tous les niveaux qui sont déterminés à améliorer les forces, et je suis l'un d'entre eux.
     Tous les membres doivent pouvoir avoir confiance que les FAC seront là pour eux tout au long de leur carrière — de recrue à vétéran, du berceau à la tombe. Les membres des FAC doivent savoir que l'organisation est là pour les soutenir: au début de leur carrière, en cours d'instruction de base et dans nos collèges militaires. Les FAC doivent être là pour eux, les soutenir tout au long de leur carrière, au cours de la promotion au mérite favorisant les aspirations professionnelles, et jusqu'à la fin de leur carrière, quand nos services de transition leur assurent un ajustement positif de l'uniforme à la vie civile. Chaque personne doit sentir la bienvenue et faire partie de notre équipe à chaque étape de sa carrière.
     Je sais que notre culture doit continuer de changer si nous voulons atteindre notre potentiel en tant qu'institution au service du Canada et continuer de refléter la société canadienne et ses valeurs. Pour dynamiser ce changement de culture, tous les niveaux de l'équipe de la Défense — militaire ou civil — doivent traiter leurs coéquipiers avec respect, dignité et honneur.
     Nous convenons tous que nous devons nous efforcer d'être une force plus équitable, plus diversifiée et plus inclusive. Nous devons également travailler pour regagner la confiance perdue de certains de nos coéquipiers. Pour ce faire, il nous faut d'abord écouter et apprendre, puis donner suite aux recommandations que nous entendons. Ces problèmes ne touchent pas seulement certaines personnes; ils exercent un impact sur l'ensemble de l'équipe de la Défense. Nous reconnaissons que notre culture doit changer et nous sommes déterminés à réaliser cela.
    Madame la présidente, je vous remercie de votre temps. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

  (1835)  

    Merci beaucoup.
     Nous allons commencer notre premier tour de questions, avec Mme Sahota, pendant six minutes.
    Merci, madame la présidente, et merci aux témoins d'être ici aujourd'hui.
     Major-général Whelan, vous venez de dire que vous occupez ce poste depuis environ un mois. Pourriez-vous nous donner des détails sur les circonstances dans lesquelles votre prédécesseur a été démis de ses fonctions, et sur la façon dont vous êtes devenu le commandant intérimaire à ce poste?
    Mon poste précédent était celui de commandant adjoint du Commandement du personnel militaire. Au sein de la structure militaire, lorsqu'un chef est incapable de s'acquitter de ses fonctions ou est absent, le commandant adjoint le remplace.
     Dans le cas de mon superviseur, je ne suis pas en mesure de commenter le statut actuel de l'amiral Edmundson, car je ne suis pas au courant de ces détails. Ce que je peux dire, c'est que l'inconduite sexuelle n'a pas sa place dans les Forces armées canadiennes et que lorsqu'une allégation est faite, quel que soit le grade, il y a un processus à suivre qui doit respecter toutes les parties prenantes.
    Pour l'instant, je ne suis pas en mesure de vous donner d'autres détails, si ce n'est que j'ai été nommé par le chef d'état-major de la Défense et que j'ai accepté de prendre le commandement de l'organisation en ce moment-là.

  (1840)  

    Vous avez également dit dans votre exposé que les Forces armées canadiennes sont meilleures qu'elles ne l'étaient auparavant. Nous avons eu des cas d'inconduite sexuelle dans les années 1990 et nous en voyons aujourd'hui. Des témoins se sont présentés devant nous à maintes reprises pour nous raconter leur histoire. Ils nous disent que des enquêtes n'ont pas été menées et que des preuves ont été égarées. Nous n'avons toujours pas une représentation féminine de 25 % dans les Forces armées canadiennes.
     Qu'est-ce qui vous fait penser que c'est mieux maintenant qu'avant?
    Les mots que j'ai utilisés sont que les Forces canadiennes sont meilleures aujourd'hui que lorsque je me suis engagé en 1990. À ce moment-là, la diversité n'existait pas. Il n'y avait pas de politique sur les gens. Il n'y avait pas de politique sur la famille. Il y avait une blague récurrente: « Si nous voulions que vous ayez une famille, nous vous en aurions donné une ». Il n'y avait pas de réseau de soutien des familles. Il n'y avait pas de soutien en matière de santé mentale. Il n'y avait pas de discussion sur l'inclusivité. Nous n'avions pas de politique sur le harcèlement lorsque je me suis engagé dans les Forces canadiennes, soit un an après que les femmes aient été autorisées à s'engager dans n'importe quel métier des Forces canadiennes.
     De mon point de vue, même si nous avons ces problèmes, les forces sont encore meilleures aujourd'hui que lorsque j'ai commencé en 1990, il y a 30 ans.
    Vous dites qu'il n'y a pas de place pour l'inconduite sexuelle dans les Forces armées canadiennes. Nous sommes d'accord avec vous. C'est pourquoi nous sommes ici pour parler de la façon de changer la culture afin que cela n'arrive plus aux femmes.
     En tant que membre militaire le plus haut placé responsable du personnel militaire, comment pouvez-vous rassurer tous ceux qui portent l'uniforme que les généraux et les amiraux qui dirigent les Forces canadiennes agiront avec honneur et intégrité, incarnant le plus haut niveau de conduite professionnelle militaire, alors que les anciens chefs d'état-major de la Défense, le général Vance et l'amiral McDonald, ainsi que votre prédécesseur, l'amiral Edmundson, font tous actuellement l'objet d'une enquête pour un comportement qui est diamétralement opposé et qui va à l'encontre de tout ce qu'ils ont prêté serment de défendre?
    C'est une excellente question, et une question difficile. C'est pourquoi nous avons de telles conversations en ce moment. Nous devons déterminer ce que nous devons faire pour que la profession soit meilleure qu'elle ne l'est et pour créer l'institution que les Canadiens souhaitent, à mon avis.
     Je vais faire un commentaire sur ce qu'est la culture et sur la façon dont je vois les choses en fonction de la façon dont vous avez formulé la question.
     Quand nous parlons de culture, nous parlons vraiment de nos valeurs et de notre façon de les entretenir dans les Forces canadiennes. J'accepte la critique selon laquelle des dirigeants supérieurs auraient agi à l'encontre des comportements qu'ils rejetaient tandis qu'ils portaient l'uniforme — et certains le portent encore —, mais le fait est que cette culture est ce que nous valorisons, et il n'y a donc pas de solution facile pour le moment.
     Je vais m'approprier la phrase d'une de mes cheffes, qui est responsable du recrutement et de la formation. Elle m'a dit: « Général Whelan, nous ne sommes pas à la hauteur des meilleures valeurs de notre profession », et je pense qu'elle a tout à fait raison. Notre culture...
    Peut-il y avoir un changement de culture si les hauts dirigeants que j'ai mentionnés ne sont pas tenus responsables?
    Toute personne, quel que soit son rang, doit absolument être tenue responsable. Il y a un processus en place qui se déclenche et s'applique lorsque de telles allégations sont prononcées, et ce processus est en cours en ce moment.
    Comment changeriez-vous la culture, alors? L'opération Honour a été un échec. Que feriez-vous différemment?
    C'est difficile à dire en 30 secondes, mais ce que je peux dire du point de vue du personnel militaire, c'est que je peux au moins entreprendre des changements aux choses et aux processus qui relèvent de moi.
     Pour moi, cela commence par les gens. Il faut d'abord s'assurer que les gens commencent par se respecter eux-mêmes. Je n'ai pas besoin de cours de formation et de programmes de perfectionnement professionnel pour dire ceci aux gens et pour faire appliquer les règles afin qu'ils se respectent les uns les autres. Cependant, ce que je peux changer dans les Forces canadiennes, ce sont certaines des fonctions dont je suis responsable. Nous devons changer le visage du recrutement des Forces canadiennes, à la fois les personnes qui le font et la façon dont nous le faisons, parce que les Canadiens doivent se voir dans le visage des recruteurs et le vécu de ces recruteurs s'ils pensent qu'ils veulent se joindre aux Forces canadiennes.

  (1845)  

    C'est très bien.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Monsieur Serré, vous avez la parole pour les six prochaines minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Major-général Whelan, je vous remercie de votre service. Je remercie également M. Choi de s'être engagé à trouver des solutions.
    Ma première question s'adresse aux deux témoins. Je veux me concentrer sur les victimes et les survivantes. Considérant le grand nombre de personnes avec qui vous devez travailler, que ce soit dans les Forces armées canadiennes ou au ministère de la Défense nationale, quelles démarches avez-vous entreprises pour accroître la confiance des survivantes et vous assurer que chaque milieu de travail est respectueux et sécuritaire?
    Major-général Whelan, vous pouvez commencer, et M. Choi pourra répondre après vous.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
     Je vais faire une remarque générale concernant la confiance, puis, si nous voulons aller plus loin, nous pourrons le faire.
     Comment puis-je regagner la confiance des survivants, des victimes, de nos camarades qui se demandent si la direction est sérieuse dans son intention de diriger les Forces canadiennes? J'ai appris au cours de mes 30 années d'expérience qu'il est très difficile de gagner la confiance des gens, mais j'ai aussi appris qu'il suffit d'une seconde pour perdre la confiance de nos camarades. Je sais que cette confiance a été anéantie chez nos camarades, et cette perte est dévastatrice pour moi, et cela a été renforcé à mes yeux lorsque j'ai écouté le témoignage de mardi. J'ai une fille qui a 22 ans et qui envisage de s'engager dans les Forces canadiennes. C'était comme un coup de poing dans les tripes, et je le ressens encore en ce moment même, pendant que je vous parle.
     Toute notre équipe nous observe pour voir ce que nous allons faire, et c'est ce que nous faisons. Je prends cette responsabilité très au sérieux. Nous sommes à l'écoute, et je pense que c'est ce que nous devons faire au départ, écouter nos membres, parce que je ne crois pas que nous leur ayons donné la voix qu'ils ont demandée. J'ai écouté, et je peux vous dire que certaines des choses que j'entends sont laides et perturbantes. Je suis encore en train de l'analyser, mais je m'engage à essayer de changer les choses au fur et à mesure que nous avançons.
    Monsieur Choi, voulez-vous commenter?
    Madame la présidente, je pense que le général Whelan a soulevé un point vraiment important, à savoir que nous avons du travail à faire pour gagner la confiance.
     Bien que nous ayons déjà une myriade de programmes dans l'ensemble de la fonction publique, et que les fonctionnaires de la Défense nationale en font partie, je pense que le ton doit être donné au sommet. Nous devons nous pencher sur la façon dont nous formons notre direction, nos cadres supérieurs, la façon dont nous leur offrons un soutien et une formation, la façon dont nous leur donnons la bonne boussole et la bonne orientation quant à ce que nous attendons d'eux en tant que dirigeants. Je pense que nous sommes sur cette voie pour le moment, mais il reste beaucoup de travail à faire.
     Je vous remercie.
    Je vous remercie.
     Général Whelan, vous y avez fait allusion un peu. Nous avons entendu à maintes reprises à quel point la peur de représailles est un obstacle pour les victimes qui veulent se manifester. Comment pouvons-nous mieux protéger les personnes qui se manifestent tout en respectant leur confidentialité?
    Tout d'abord, les représailles vont à l'encontre de tout ce que nous sommes dans les Forces canadiennes. Jamais un membre de l'équipe de la Défense ne devrait se sentir en danger ou seul dans une organisation qui parle de travail d'équipe comme nous le faisons. J'ai vu les reportages hier soir, j'ai écouté et je suis désolé que mon camarade qui a été cité dans un des articles des médias ait eu peur d'être nommé.
     Les représailles n'ont pas leur place dans les Forces canadiennes. Les chefs qui ont exercé des représailles n'ont pas leur place dans les Forces canadiennes. Nous devons ce soutien et ce respect à ceux qui nous font confiance, aux familles et aux membres qui nous font confiance pour leur propre sécurité. Essentiellement, les représailles représentent un abus de pouvoir et non pas une utilisation de celui-ci.
     L'une des choses que nous devons faire est de nous concentrer sur ce que les dirigeants comprennent comme étant leurs limites et s'ils comprennent leurs responsabilités. Je suis un officier d'infanterie et j'ai été élevé dans la conviction que le leadership est un privilège qui doit être maîtrisé.
     Merci.

  (1850)  

    Merci, général.
     Monsieur Choi, avez-vous quelque chose à ajouter concernant les représailles?
    Vous êtes en mode silencieux, monsieur Choi.
    Je suis désolé, madame la présidente. J'ai eu des difficultés techniques avec l'interprétation. Je ne pouvais pas entendre. J'essayais de commuter entre les modes. Est-ce que la question peut être répétée, s'il vous plaît?
    Monsieur Choi, je vous demande simplement si les gens ont peur des représailles. Que pensez-vous de la protection de la confidentialité des personnes qui se manifestent afin qu'elles sentent que celle-ci est respectée?
    Il ne me reste plus qu'une dizaine de secondes.
    Je vous remercie. Je vais être très bref.
     Je pense que, dans l'ensemble, cette crainte est une conséquence naturelle, surtout dans les grandes organisations. Il y a là une occasion de repenser la façon dont nous menons les relations de travail, de créer cette confiance et de fournir ce soutien afin que les aspects confidentialité, protection de la vie privée et équité procédurale soient fermement ancrés dans le système.
     Je m'excuse des difficultés techniques.

[Français]

     Ce n'est pas un problème. Merci beaucoup.
     Madame Larouche, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     Je tiens d'abord à vous féliciter, messieurs Choi et Whelan, pour votre témoignage et pour le travail que vous accomplissez au sein des Forces armées canadiennes.
    Monsieur Choi, j'aimerais d'abord savoir ce que vous savez du Bureau du Conseil privé. En effet, il s'agit ici de comprendre ce que peut faire le Bureau du Conseil privé, même dans les cas d'agressions sexuelles. Est-ce que cela fait partie de son mandat? Comme nous le savons, l'ombudsman a fait transférer la responsabilité de l'enquête au Bureau du Conseil privé.
    Pouvez-vous nous en dire davantage sur cet organisme?

[Traduction]

    Madame la présidente, je ne suis pas un expert du fonctionnement du BCP. J'ai travaillé avec des cadres supérieurs du BCP, mais je m'abstiendrais de tout commentaire d'expert à ce sujet.

[Français]

    Vous ne pouvez donc pas nous dire de quelles informations le Bureau du Conseil privé ou le ministre ont manqué pour procéder à l'enquête.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
     Ce n'est pas une chose à laquelle j'ai participé personnellement, alors je n'ai rien à dire.

[Français]

    Ma question s'adresse à M. Whelan ou à M. Choi.
    Que pensez-vous de la stratégie intitulée « La voie vers la dignité et le respect : La stratégie d’intervention des Forces armées canadiennes en matière d’inconduite sexuelle » et à quel point avez-vous confiance en son efficacité?
    Pouvez-vous dire quelques mots là-dessus, monsieur Choi ou monsieur Whelan?

[Traduction]

    Nous allons commencer par M. Choi, puis nous passerons au général.
    Merci, madame la présidente.
     Je suis optimiste et j'ai bon espoir que nous sommes à un point d'inflexion dans le temps où le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes peuvent apporter des changements importants.
    Général?
     Général, vous êtes en mode silencieux, ou nous ne vous entendons pas très bien.
     Pouvons-nous suspendre brièvement la séance pendant que la greffière examine le problème technique avec le général?

  (1855)  

    Madame la présidente, est-ce que vous m'entendez?
    Oui. Nous vous entendons maintenant.
    Je vais essayer de répondre rapidement à la question.
    Pourquoi suis-je confiant? Voici pourquoi je suis confiant et encouragé. Nous menons actuellement un débat important sur le changement culturel. Nous écoutons les gens à tous les niveaux, de haut en bas, latéralement et de bas en haut dans les Forces canadiennes. Nous avons accepté les défauts de l'opération Honour et nous allons de l'avant avec des points de réussite.
     Il y a une conversation incroyable qui se déroule en ce moment sur le soutien aux victimes. Je suis encouragé par la conversation qui a lieu à l'échelle de la Défense et à l'échelle nationale sur la façon dont nous pouvons améliorer notre profession. Je suis encouragé. Une voie s'ouvre devant nous.

[Français]

     Je vous remercie.
    Nous avons appris que le lieutenant-général Wayne D. Eyre, chef d'état-major par intérim, avait demandé un aide-mémoire sur la façon de traiter les plaintes contre les dirigeants des Forces armées canadiennes.
    En tant qu'officier, pouvez-vous nous parler de la façon dont sont traitées les plaintes émises contre les dirigeants des Forces armées canadiennes? Vous en avez déjà parlé brièvement, mais j'aimerais que vous nous décriviez de nouveau le processus suivi pour signaler au Service national des enquêtes des Forces canadiennes une agression sexuelle ou un cas d'inconduite sexuelle.
    Que savent les victimes à ce sujet? Peut-être y a-t-il des choses à améliorer pour qu'elles sachent davantage en quoi consiste le processus et ce qu'elles peuvent faire.

[Traduction]

    Je ne suis pas un expert dans le domaine de la police militaire ou du signalement de cas d'inconduite sexuelle, mais pour répondre à votre question concernant les allégations relatives aux cadres supérieurs, le système est fondé sur un processus qui est appliqué uniformément à tous les membres des Forces canadiennes, quel que soit leur grade. La question de ce que le général Eyre avait demandé était essentiellement un aide-mémoire ou quelque chose qu'il pouvait avoir afin de s'assurer qu'il comprenait bien le processus. Je crois que, manifestement, nous n'avions pas vu ce genre d'allégations par le passé, et nous voulions donc nous assurer qu'il n'y avait pas l'impression qu'un processus spécial était appliqué aux hauts dirigeants.
     En ce qui concerne le signalement et le soutien aux victimes, si une allégation m'est adressée, j'ai le choix de la porter à la police militaire. Je peux choisir, en fonction de la gravité de l'allégation, de faire une évaluation et de faire faire une enquête au niveau de l'unité. J'ai toujours la possibilité de consulter nos conseillers juridiques. Au besoin, je peux consulter le Centre d'intervention sur les conduites sexuelles et le Dr Preston pour m'aider dans mon processus décisionnel.
    Très bien.
     Nous passons à Mme Mathyssen pendant six minutes.
    Merci, madame la présidente. Merci aux deux témoins.
     Je suis vraiment pleine d'espoir après vous avoir entendu, M. Whelan, et plus particulièrement après vous avoir entendu dire que « le leadership est un privilège qui doit être maîtrisé ». Vous parlez d'accepter cette responsabilité, de l'assumer et de vraiment écouter. Je crois que c'est essentiel.
     J'aimerais vous demander à tous les deux, cependant, ce qu'il en est de la bureaucratie au sein du ministère de la Défense nationale et des forces armées, des FAC elles-mêmes, lorsque nous parlons de la reconnaissance de ce leadership et de la nécessité de demander des comptes aux gens à tous les niveaux, des grades les plus bas jusqu'aux plus hauts dirigeants, et de cette responsabilité. Est-il également vrai que dans le cadre de cette responsabilité, nous ne pouvons ignorer certaines de ces histoires, et que le fait de ne pas écouter, de ne pas entendre et de refuser d'entendre est également à l'origine de nombreux problèmes?
    Je vais essayer de voir si je peux répondre. C'est une question vraiment compliquée sur le leadership et la façon dont nous intégrons le processus dans la profession.
     La profession est une... C'est difficile à saisir, car nous fonctionnons selon des valeurs et un cadre éthique. Bien sûr, nous semblons avoir ici des dirigeants qui sont censés représenter ce cadre et ces valeurs et qui ne le font pas. À juste titre, les victimes interpellent ces dirigeants. Le processus est pleinement enclenché pour tenir tous les dirigeants responsables d'enquêter sur ce type d'allégations. Je pense qu'en temps voulu, au fur et à mesure que ces enquêtes progressent, nous verrons comment le processus se déroule lorsque de telles allégations sont présentées.
     Du point de vue du commandement du personnel militaire, l'un des autres processus est le processus d'examen administratif, dont je suis responsable. C'est aussi un autre mécanisme permettant de déterminer le résultat des conflits et des problèmes interpersonnels. Les Forces canadiennes disposent de multiples mécanismes pour rendre justice aux victimes présentant des allégations.

  (1900)  

    Madame la présidente, je vais essayer de prendre appui sur les commentaires du général Whelan.
     Je crois que dans l'ensemble de la fonction publique et là où nous nous trouvons en 2021, il se présente une véritable occasion d'examiner comment les relations de travail sont bâties. Je pense que le modèle est encore très proche de l'ère des relations industrielles et qu'il est donc un peu contradictoire. Nous avons apporté des améliorations en travaillant avec nos syndicats sur ce sujet. Je pense qu'il est temps pour nous d'inverser la vapeur afin que les gens soient au cœur de la résolution des problèmes et que nous leur offrions un sentiment personnalisé de bien-être tout au long du processus, au lieu d'un processus contradictoire dans lequel nous gravissons les échelons au gré de griefs.
     Je crois qu'il nous est possible de faire cela afin de soutenir les gens, peu importe le niveau ou la partie de l'organisation dans laquelle ils se trouvent.
    Nous avons certainement entendu que la hiérarchie et la structure de commandement empêchent souvent les gens de se sentir suffisamment en confiance pour contester et dénoncer ce qui s'est passé. Nous avons également appris au sein de ce comité — je l'ai déjà mentionné — l'existence d'un décalage entre ceux qui, au sommet, disent que les choses vont bien, s'améliorent ou vont dans un certain sens, et les histoires que nous avons entendues. Vous y avez fait référence à nouveau. Les histoires que nous avons entendues, même il y a deux jours au Comité... Quelqu'un m'a envoyé un courriel après que nous ayons entendu le grand prévôt. D'après l'auteur, tant que les enquêteurs ont un grade militaire, ils peuvent pousser dans le sens des messages directs et de l'obstruction, et plus le grade de cette personne est élevé, plus cela entre en jeu.
     Nous avons beaucoup parlé de structures indépendantes. Croyez-vous que ces structures indépendantes soient essentielles à l'enquête pour garantir que les gens sont traités équitablement dans les forces armées et dans l'armée en général?
    Madame la présidente, je vais tenter ma chance.
     Il y a de la valeur dans une structure indépendante. Qu'il s'agisse d'une structure au moyen de laquelle faire rapport ou d'une structure servant à examiner les Forces canadiennes, je pense que toutes ces options doivent être accessibles.
     En ce qui concerne l'impression qu'il y a peut-être obstruction de la part des dirigeants des Forces canadiennes portant l'uniforme, ou de la chaîne de commandement, je crois que c'est un rôle que je vais assumer en essayant d'apporter plus d'attributs humains dans le développement du leadership que la bureaucratie ou les aspects techniques ou théoriques de ce que nous avons comme modèles de leadership. Nous devons en fait ramener les qualités humaines chez les dirigeants, encourager leur empathie et faire en sorte qu'ils comprennent ce que l'autre personne a vécu lorsqu'ils tentent de diriger des gens.
     Je reviens à la première règle que j'ai apprise dès le premier jour, à savoir que le leadership est un privilège. Pour moi en particulier, les options sont sur la table pour les structures indépendantes, mais je pense qu'il s'agit de se concentrer sur la formation de meilleurs dirigeants et de les faire progresser plus tôt dans leur carrière afin qu'ils puissent être ce que nous voulons qu'ils soient lorsqu'ils deviennent des hauts dirigeants.
     Je vous remercie, madame la présidente.
    Nous passons maintenant au deuxième tour.
     Madame Alleslev, vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     Monsieur Choi, vous avez dit que les représailles sont un phénomène naturel, mais que l'équité procédurale est indispensable s'il faut que cette culture change. Cependant, c'est chez vous qu'un membre de votre chaîne de commandement a déposé une plainte au nom d'une personne qui lui rendait des comptes et a ensuite subi des représailles à cause de cela. Il a lui-même déposé une plainte de harcèlement en raison de ces représailles et a ensuite été blâmé à l'extérieur pour le harcèlement de son subordonné, alors qu'il n'en était pas l'auteur. Il a passé cinq années pénibles à essayer de se frayer un chemin dans la procédure.
     Est-ce ainsi que vous caractériseriez l'équité procédurale?

  (1905)  

    Madame la présidente, je n'ai pas entendu la première partie de la question, seulement la fin. Je suppose qu'elle m'était adressée. Je crois que la question porte sur M. Boland, si j'ai bien compris.
     Comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, je ne peux pas parler de cas précis. Du point de vue de l'équité procédurale, je peux dire que, lorsque nous recevons des plaintes concernant la fonction publique, les employés sont représentés par leur syndicat. Il existe des processus précis que nous suivons pour examiner la nature et la gravité de la plainte. Nous procédons à des évaluations de la situation qui sont effectuées par les relations de travail. Si elle répond à certains critères, qui sont bien établis par les lignes directrices du Conseil du Trésor, une enquête peut alors être menée.
    Merci, monsieur Choi.
     De qui relevez-vous, monsieur Choi?
     Je relève du sous-ministre.
    Qui vous a confié la tâche d'évaluer la plainte de M. Boland contre le sous-ministre?
    Le sous-ministre a reçu la plainte et j'ai été chargé de l'examiner.
    Par qui?
    Une fois que je l'ai reçue, cela fait partie de mon devoir, donc j'ai examiné la nature de la plainte. J'ai vérifié auprès de notre conseiller juridique et j'ai proposé des options pour la suite des événements.
    Merci.
    Par la suite, vous avez rejeté la plainte contre votre patron, le sous-ministre, le 19 février 2021. Est-ce bien cela?
    Après avoir passé en revue le processus et...
    C'est oui ou non, monsieur Choi. Avez-vous rejeté la plainte contre votre patron?
    Je crois que techniquement, la question n'est pas de savoir si elle a été rejetée ou non; c'est de savoir si elle était fondée ou non, et dans ce cas-ci, elle n'était pas fondée.
    Mais vous avez pris cette décision au sujet de votre patron. En tant qu'autorité fonctionnelle des ressources humaines civiles, vos responsabilités sont d'examiner au nom du sous-ministre tous les écarts de conduite liés à la procédure et au comportement, alors vous dites que cela comprend examiner le comportement du sous-ministre. Est-ce exact?
    Bien que je détienne l'autorité fonctionnelle, j'exerce cette autorité avec l'appui de mes employés, qui sont des professionnels des relations de travail, et de conseillers juridiques.
    Oui, mais en fin de compte, vous exercez l'autorité et vous avez rejeté une plainte contre votre patron. N'est-ce pas?
    Encore une fois, je ne peux pas parler d'un cas précis. Si nous cherchons...
    Je n'ai pas dit de quel cas il s'agissait. J'ai dit simplement en général.
     Pourriez-vous déposer au Comité le document qui dit qu'un subordonné a le pouvoir légal d'examiner, d'enquêter ou de rejeter une plainte contre un supérieur ou un pair au sein de la même chaîne de commandement?
    Comme je l'ai dit, dans le cadre de l'exercice du pouvoir en tant qu'autorité fonctionnelle, je prends connaissance de tous les renseignements concernant une plainte, sa nature et je demande l'avis d'un conseiller juridique...
    Existe-t-il un document qui dit qu'un subordonné a le pouvoir de blanchir un supérieur?
    Mes pouvoirs délégués me sont accordés par une délégation fonctionnelle pour laquelle j'ai été désigné.
    Mais ma question était la suivante: un supérieur peut-il vous déléguer les pouvoirs d'exonérer un supérieur de quoi que ce soit?
    Dans le cadre de mes fonctions, je détiens les pouvoirs délégués généraux liés aux activités, aux programmes et aux services des ressources humaines civiles du ministère de la Défense nationale. J'ai le pouvoir d'examiner les problèmes au fur et à mesure qu'ils se présentent, et nous examinons tous les problèmes sans égard au grade ou au poste en donnant des conseils et en établissant s'il y a eu ou non du harcèlement.

  (1910)  

    Pouvez-vous confirmer que...
    Je suis désolée, votre temps est écoulé.
    Je vous remercie beaucoup.
    Nous passons maintenant à Mme Zahid, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Merci au général Whelan et à M. Choi de comparaître devant le Comité aujourd'hui.
     Monsieur Choi, lors d'un témoignage précédent, un témoin a allégué que le sous-ministre de la Défense nationale avait enfreint la loi. Le sous-ministre a-t-il enfreint la loi?
    Selon mon avis professionnel et en considérant divers cas et l'avis du conseiller juridique, le sous-ministre n'a, à ma connaissance, enfreint aucune loi.
    Merci, monsieur Choi.
     Général Whelan, puisque l'éducation, la formation, les services de santé, le rétablissement, la réadaptation et la réinsertion et les centres de soutien pour trauma et stress opérationnels — pour n'en nommer que quelques-uns —, relèvent de votre compétence, pourriez-vous nous parler des lacunes actuelles et des mesures que vous prenez pour les combler?
    Cet exercice est en cours, de sorte qu'au moins au sein du Commandement du personnel militaire, nous examinons tous les cadres systémiques et institutionnels qui offrent du soutien aux membres des Forces canadiennes dans le but d'identifier simultanément les forces et les lacunes, et de pouvoir ensuite renforcer nos points forts et corriger nos points faibles.
     Nous examinons plusieurs domaines. Je peux vous en citer deux qui me viennent à l'esprit.
    En dépit de l'excellent travail qu'ils font pour les Canadiens partout au pays, lorsque les services de santé peuvent faire autre chose, ils essaient de trouver des façons de reconstruire et de moderniser les services de santé des Forces canadiennes pour l'avenir, ce qui représente une tâche colossale. Nous savons à quel point les soins de santé sont difficiles au Canada.
     Ensuite, je parlerais probablement du groupe de transition qui a été mis sur pied en décembre 2018 pour s'occuper de nos malades et de nos blessés, mais qui assume maintenant de plus en plus de responsabilités additionnelles. Au cours des quatre prochaines années, ce groupe assumera les responsabilités liées à la libération, au soutien et à la transition de tous les membres des Forces canadiennes. Il s'agit d'un travail en cours.
    Certaines personnes qui ont témoigné devant notre comité ont mentionné que dans les cas d'inconduite sexuelle, il y avait beaucoup de conséquences négatives sur la santé mentale et le bien-être physique des personnes survivantes. Qu'avez-vous fait pour vous assurer que des services adaptés aux traumatismes sont offerts aux membres des Forces armées canadiennes?
    C'est une question qui arrive à point nommé, madame la présidente.
     Nous discutons actuellement de la façon dont nous pouvons mieux répondre aux besoins des victimes d'inconduite sexuelle pendant le service. Ces conversations progressent. J'ai une très grande confiance en nos services de santé. Implicitement, leur travail est d'établir un programme de soins pour tous les types de blessures.
     Je suis convaincu que nous avons les mécanismes pour répondre à leurs préoccupations et à leurs blessures, mais nous avons des conversations et des discussions pour établir comment nous pourrions mieux soutenir les victimes de traumatismes sexuels.
    Des données sont maintenant disponibles sur les membres des Forces armées canadiennes qui signalent une inconduite sexuelle. Comment utiliserez-vous ces données à l'avenir, à mesure que les changements sont mis en oeuvre?
    Si je me souviens bien — et je n'ai pas les statistiques en tête —, l'une des statistiques porte sur les agressions sexuelles pendant la formation de base. Tous les membres ont le droit de se sentir en sécurité pendant la formation de base ou tout autre entraînement. C'est ce que nous devons à toutes les personnes qui servent leur pays. Nous devons nous pencher sur cette question.
     J'ai eu une discussion aujourd'hui alors que je me préparais à comparaître. J'ai parlé aux commandants de l'École des recrues et de deux collèges militaires, et j'ai ici certains de leurs commentaires.
     Il faut d'abord que les dirigeants des Forces armées canadiennes aient une tolérance zéro à cet égard. Nous devons veiller à ce que les dirigeants fassent passer le message, à ce qu'ils donnent l'exemple des comportements que nous voulons voir chez nos membres, qu'ils soient en uniforme ou non. Nous devons nous assurer que les dirigeants, les formateurs et les recrues comprennent mieux ce qu'est une agression sexuelle.

  (1915)  

[Français]

     Merci beaucoup. Votre temps de parole est écoulé.
    Madame Larouche, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Messieurs Whelan et Choi, je ne sais pas si vous serez en mesure de répondre à ma question, mais pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les conséquences que subirait un militaire ayant été reconnu coupable d'agression sexuelle par le tribunal militaire?

[Traduction]

    Je regrette de ne pouvoir répondre à cette question avec certitude. C'est une question à laquelle pourrait répondre le juge-avocat général. C'est une question juridique qui dépend probablement beaucoup de la situation. J'aimerais pouvoir vous en dire plus.

[Français]

    Qu'en est-il de vous, monsieur Choi?

[Traduction]

    Ma réponse ressemblerait beaucoup à celle du major-général Whelan. Ce n'est pas mon domaine d'expertise. Je crois que le juge-avocat général serait mieux placé pour répondre à cette question.

[Français]

    À votre avis, à quels problèmes le Comité devrait-il s'attaquer dans le cadre de cette étude? Quels changements devraient être apportés pour régler le problème?
    Pouvez-vous décrire au Comité le problème que constituent les agressions sexuelles et nous donner un aperçu des changements qui, selon vous, doivent être apportés?

[Traduction]

    C'est dans la compréhension des gens que les choses doivent changer. Leurs connaissances, leur éducation et leur capacité à comprendre le problème doivent changer.
     Je parlais tout à l'heure de veiller à ce que les dirigeants, les formateurs et les recrues comprennent vraiment ce qu'est une agression sexuelle. Je ne suis pas certain que les gens comprennent cela. C'est probablement l'une des premières choses à faire.
     L'autre chose, c'est que nous avons besoin de plus de données et de plus de recherches. Les Forces armées canadiennes ont les mécanismes nécessaires pour obtenir des données, la compréhension et l'aspect théorique, mais nous serions certainement heureux de recevoir des conseils de l'extérieur pour faire avancer ce dossier en particulier.
    C'est très bien.
     Madame Mathyssen, vous avez deux minutes et demie.
    Merci, madame la présidente.
    Au cours de nos réunions précédentes, plusieurs témoins ont attiré notre attention sur le fait que beaucoup de mesures de soutien n'étaient pas disponibles en raison de leur langue, de leur emplacement ou de leur affectation. Une femme se trouvait à bord d'un navire où, évidemment, les ressources et le personnel sont limités, mais certaines personnes ont aussi précisément mentionné l'absence de services de garde adéquats et l'énorme obstacle qu'elles doivent surmonter parce que ces services ne sont pas fournis au personnel militaire.
     Pourriez-vous tous les deux nous expliquer ce que vous faites activement pour vous assurer que les femmes membres des forces armées puissent servir de manière égale en ayant accès aux services dont elles ont besoin, et plus précisément aux services de garde d'enfants?
    Je suis d'accord avec vous. Nous savons très bien que la garde d'enfants est un facteur qui joue dans le service des femmes au sein des Forces canadiennes. En fait, 34 % des femmes ont indiqué que la garde d'enfants est un des facteurs. Ce n'est pas le seul, c'est l'un d'entre eux, et un des plus importants.
     Nous avons récemment commencé à examiner comment nous pourrions offrir des services de garde dans les Forces armées canadiennes. Ce travail est en cours; je ne pense pas qu'il soit suffisamment avancé pour être présenté actuellement, mais c'est un aspect sur lequel nous travaillons.
     Je pense que l'avantage ici — s'il y a quelque chose, un aspect qui soit positif — c'est que la COVID a clairement montré les défis auxquels les femmes font face dans un contexte de pandémie. Ce que nous essayons de faire, c'est de tirer parti de ces leçons pour nous aider à établir certaines de ces capacités pour nos membres actifs qui en ont besoin...

  (1920)  

    Excusez-moi, mais avant que vous poursuiviez, serait-il juste de demander si, lorsque vous serez suffisamment avancé pour être en mesure de faire rapport, vous pourriez transmettre ces données et ces renseignements à notre comité?
    Ce ne sera pas à moi de déterminer jusqu'où le travail ira, mais nous allons certainement prendre note de votre demande et y répondre dans la mesure du possible.
    Excellent.
     Nous allons maintenant passer à Mme Sahota, qui partage son temps avec Mme Shin.
    Merci, madame la présidente.
     Major-général, il semble que les « grands garçons » haut placés se serrent les coudes et tentent de se protéger mutuellement, alors je vais vous poser la question suivante: pour changer la culture d'inconduite sexuelle qui existe dans l'armée et qui — d'après ce que nous avons vu —, peut se manifester tant à la base comme au Collège militaire royal qu'au niveau du chef d'état-major de la Défense, croyez-vous que nous devrions attaquer ce problème du haut vers le bas, donc en commençant aux niveaux supérieurs de la hiérarchie, ou plutôt tenter d'intervenir aux échelons inférieurs et laisser les hauts gradés s'en tirer?
    C'est une excellente question, madame la présidente.
    Je vais vous donner la réponse d'un officier d'infanterie: nous devons intervenir simultanément sur tous les fronts.
     Cependant, comme je crois l'avoir dit plus tôt, le début d'une carrière est important et nous devons former de bonnes personnes — de bons dirigeants, de bons membres — dès le départ. Cela ne signifie certainement pas de cesser de surveiller les dirigeants actifs qui ont besoin de ce perfectionnement professionnel et de cette responsabilisation. L'une des choses que nos membres mentionnent lors de nos séances d'écoute, c'est qu'ils veulent que les dirigeants rendent des comptes.
    Les dirigeants doivent donc assumer la responsabilité?
    Absolument.
    Allez-y, madame Shin.
    J'aimerais remercier le major-général Whelan et M. Choi d'être ici aujourd'hui. Je comprends que nous discutons d'un enjeu très complexe et que le fait de comparaître devant un comité ayant une exposition publique comporte un certain niveau de risque et exige du courage, mais ceux d'entre nous qui sont nommés à des postes importants sont soumis à une reddition de comptes plus élevée et à des examens plus minutieux que le citoyen ordinaire, alors je vous remercie d'être ici.
     J'ai écouté les différents témoins qui ont pris la parole pendant les réunions du Comité, et j'ai constaté qu'il y avait divers filtres entourant l'inconduite sexuelle dans les Forces canadiennes. Nous avons entendu des témoignages très émouvants de victimes, de femmes qui ont essentiellement appris à naviguer dans cette culture toxique pour réaliser leurs rêves, et le ministre lui-même a continué de prétendre qu'un changement de culture est nécessaire. Pourtant, un changement de culture ne peut se produire sans qu'il y ait une responsabilisation personnelle, et c'est à ce sujet que j'aimerais vous poser des questions aujourd'hui.
     Je sais que la loyauté est très importante, surtout dans l'armée, mais il arrive que la loyauté sous pression amène les gens à agir contre leur conscience ou contre leur bon jugement. Avant que les processus puissent être efficaces, nous devons comprendre la condition humaine qui pousse les gens à faire ce qui est bien ou ce qui est mal. Donc, sans divulguer de détails précis sur des incidents, pourriez-vous nous dire si vous avez déjà été forcé d'agir contre votre conscience? Commençons par M. Choi?
    Je vous remercie de cette question.
     L'environnement est très complexe, comme nous l'avons dit. Je crois qu'en tant que dirigeants, nous explorer les zones grises et être prêts à prendre les choses en main.
     Je peux vous dire que pendant toute cette situation difficile, je suis intervenu personnellement et j'ai aidé des personnes à dire ouvertement ce qu'elles pensent et à raconter leur histoire. Je pense que c'est ce que les dirigeants à tous les niveaux doivent être prêts à faire. Quel que soit le système ou le processus, nous devons faire preuve de leadership en agissant et en dirigeant aussi avec notre coeur.

  (1925)  

    Y a-t-il eu un moment où vous avez dû agir à l'encontre de ce que vous pensiez être juste?
    Je pense que nous avons beaucoup discuté pendant notre processus de gouvernance. J'ai dit ce que j'avais à dire sur les domaines dans lesquels je croyais que nous devions apporter des changements, et nous avons eu des discussions intéressantes en vue d'apporter des changements.
    Excusez-moi parce que je n'ai pas beaucoup de temps. Avez-vous l'impression qu'elles étaient efficaces ou que d'autres mécanismes pourraient être plus appropriés pour permettre aux gens, surtout aux fonctionnaires civils comme vous, de pouvoir faire ce qu'il faut sans crainte de représailles? Certains processus pourraient-ils être mis en place pour vous aider à faire ce qui est juste?
    C'est une question très complexe et très pertinente.
     Je pense que plusieurs mécanismes sont déjà à la disposition des fonctionnaires, pensons seulement à l'ombudsman, au commissaire à l'intégrité du secteur public, à la divulgation au sein de la fonction publique, à la sous-ministre adjointe (Services d'examen) et à plusieurs autres dans le cadre des mesures de dotation, etc. Je pense qu'à bien des égards, cela peut prêter à confusion et compliquer les choix. Je crois que nous devons en fait simplifier les choses pour les plaignants.
    Excusez-moi, vous dites souvent « compliqué »...
    Je suis désolée. Votre temps est écoulé.
     Nous allons maintenant passer à Mme Vandenbeld pour les dernières minutes.
     Mes questions vont surtout s'adresser au général Whelan.
     Merci beaucoup d'être avec nous ce soir.
     Nous avons beaucoup parlé, et vous l'avez mentionné également aujourd'hui, qu'il est essentiel d'offrir aux personnes qui ont été victimes d'inconduite sexuelle des mesures de soutien adaptées à ces traumatismes. Il faut ensuite s'assurer de prévenir le problème. C'est à cette étape que nous parlons de changer la culture et d'éliminer la masculinité toxique, et des processus qui sont en place pour tenter de prévenir les expériences négatives que les hommes, les femmes et les personnes transgenres et non binaires peuvent vivre.
     Cependant, cela va plus loin que cela. Votre travail est également de créer un environnement accueillant, inclusif et positif dans lequel chaque personne, y compris les femmes qui s'enrôlent dans les Forces armées canadiennes, peut s'épanouir.
     Le sujet des garderies a été mentionné. Je comprends qu'elles représentent un très important soutien pour les familles. Je sais que l'initiative Canada Sans Faille s'intéresse à la santé et au bien-être dans leur ensemble, notamment au genre de formations qui sont offertes, au mentorat des femmes à toutes les étapes de la carrière et à la façon de veiller à ce qu'elles obtiennent ce mentorat, et à ce qui est fait sur le plan du recrutement et du maintien de l'effectif. Je comprends que c'est un enjeu très important.
     Il ne suffit pas d'éliminer les problèmes; il faut aussi s'assurer de créer un meilleur environnement et de trouver une solution positive.
     Vous pourriez peut-être nous parler un peu des travaux en cours et de ce qui se fait depuis un certain temps, dans ces domaines.
    Je vais essayer d'en résumer quelques-uns. Je vais commencer par Canada Sans Faille.
     Canada Sans Faille est une organisation ou une entité formidable des Forces armées canadiennes qui travaille en collaboration avec les provinces et les territoires afin d'aider les familles qui doivent déménager partout au pays à surmonter les obstacles associés au fait que les membres des Forces canadiennes sont appelés à se déraciner tous les deux ou trois ans. Nous avons d'excellentes relations avec les provinces, et elles travaillent très fort pour aider les familles à s'y retrouver dans les organismes de soutien provinciaux et territoriaux lorsque des membres des Forces canadiennes s'y installent. Je pense que ce travail est très positif.
     En ce qui concerne les stratégies, la création d'une stratégie sur le maintien de l'effectif des Forces armées canadiennes sera annoncée à l'automne 2021. Nous n'avons pas eu de stratégie de maintien de l'effectif depuis quelques années. Je pense qu'il est important de comprendre que cette stratégie ne ménagera aucun effort pour veiller à ce que les personnes qui ne se sentent pas bien représentées puissent se reconnaître dans tous les mécanismes de soutien offerts par les Forces canadiennes.
     Nous parlons de la santé des femmes. Il y aura des discussions sur la garde des enfants. Il sera question de la fourniture d'uniformes et de vêtements appropriés pour les femmes. Nous recueillerons des données qui nous aideront à comprendre comment nous pouvons davantage soutenir les femmes. Cela implique aussi le comité sur la tenue vestimentaire. Même s'il peut sembler banal de parler de cheveux et du maquillage, cela ne concerne pas uniquement les femmes, mais aussi pour les membres des Forces armées canadiennes pour lesquels ces sujets sont importants pour leur identité.
     Il y a énormément de... Je ne touche qu'à la pointe de l'iceberg.

  (1930)  

    Combien de temps me reste-t-il?
    Nous en sommes presque à la fin du temps qui nous était alloué. Restons-en là.
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement. Je tiens à confirmer que M. Choi déposera le document qui lui accorde le pouvoir d'examiner, d'enquêter ou de rejeter une plainte contre le sous-ministre ou un pair de la même chaîne de commandement.
     Merci.
    Monsieur Choi, si vous pouviez envoyer ce document à la greffière, ce serait formidable.
     Je tiens à remercier nos témoins pour leurs excellents et très utiles témoignages.
     Nous allons suspendre brièvement la séance pendant que nous vérifions le son du prochain groupe de témoins

  (1930)  


  (1930)  

    Je souhaite la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins. Nous accueillons la lieutenante-générale à la retraite Christine Whitecross et la majore Kellie Brennan.Vous aurez chacune cinq minutes pour saluer le Comité et faire votre déclaration préliminaire.
     Nous allons d'abord entendre la lieutenante-générale Whitecross.
     Je m'appelle Chris Whitecross, et j'ai récemment pris ma retraite des Forces armées canadiennes en décembre 2020 au grade de lieutenante-générale.
     Je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui de ce que je crois être un enjeu important pour les Forces armées canadiennes d'aujourd'hui et de demain. C'est important, je crois, parce que la façon dont nous traitons les personnes ne représente pas seulement nos valeurs, mais aussi notre efficacité opérationnelle en tant que force militaire.
     Puisque j'ai passé plus de 38 ans dans les Forces armées canadiennes, on peut dire que j'ai grandi en portant l'uniforme, je me sens découragée et indignée par certains témoignages qui ont été présentés, encore même jusqu'à cette semaine.
     J'ai hâte de répondre à vos questions dans l'espoir que nous puissions collectivement trouver des mesures concrètes qui feront avancer les choses.
     Merci beaucoup. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
    C'est très bien.
     Nous allons maintenant passer à la majore Brennan, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente, de me donner l'occasion de témoigner et merci à tous les membres du Comité.
     J'aimerais d'abord me présenter. Je ne suis qu'une femme qui a servi dans l'infanterie pendant les 30 dernières années, c'est-à-dire depuis 1991, mais je parle au nom de toutes les femmes qui veulent se faire entendre. J'ai été en service, et ce service m'a laissé ce que j'appelle des cicatrices. J'ai connu de nombreuses dynamiques de pouvoir intenses et injustes pendant toute ma carrière.
     J'aimerais énoncer quatre vérités.
     La première vérité, c'est que des violations des droits de la personne se produisent encore dans l'armée. Après 30 ans, ce n'est pas une inattention; je pense que ce sont des atteintes aux droits de la personne dont les femmes sont victimes. Les femmes veulent servir leur pays avec fierté, elles veulent garder la tête haute et participer. Les femmes ne veulent pas être dans un environnement où elles sont questionnées, chahutées, abusées, méprisées et considérées comme des trophées et agressées.
     Je pense que je dois expliquer comment on se sent d'aller travailler tous les jours en ayant l'estomac noué, comment cela change votre façon de marcher dans un couloir, votre façon de percevoir les hommes.
     La deuxième vérité, c'est que les femmes sont souvent pénalisées lorsqu'elles dénoncent. Elles ont peur et se demandent ce qui va se passer, comment cela va se passer, qui va faire quoi. Si elles disent la vérité, les femmes sont souvent méprisées ou affectées rapidement à d'autres postes. La culpabilité qu'elles ressentent devient un confinement dans lequel elles se sentent humiliées par l'institution même qu'elles sont engagées à servir et qu'elles veulent encore servir.
     La troisième vérité, c'est que le système de justice militaire doit être réformé. Il faut réformer la façon dont nous menons les enquêtes militaires et la façon dont les femmes sont de nouveau victimisées lorsqu'elles ont le courage de se manifester. Je mettrais l'accent sur l'éducation et sur la nécessité que la personne qui mène l'enquête puisse porter des accusations, présenter les preuves au tribunal et pas seulement renvoyer l'accusation, ce qui voudrait dire que les personnes responsables d'une enquête sont celles qui peuvent changer les choses. Il faut aussi savoir à quoi cela ressemble pour les femmes: qu'est-ce que la justice pour les femmes?
     La quatrième vérité, c'est que le leadership doit faire partie de la solution à tous les niveaux. Il faut mettre un terme à l'époque où des dirigeants utilisaient ces situations pour exercer des pressions sur une personne qui avait fait quelque chose d'incorrect pour en tirer des avantages. La chaîne de commandement doit accepter qu'elle a échoué. Pendant 30 ans, j'ai servi son échec, et cet échec est un aveu très difficile à faire.
     En terminant, j'aimerais réaffirmer le point le plus important pour le Comité, à savoir que les femmes ne sont pas des statistiques, ce sont des personnes qui ont été trahies par l'institution à laquelle elles croient. Je vous encourage dans votre rôle de parlementaires à nous donner une voix, comme vous l'avez fait, et à rendre ce changement possible.
     Je remercie sincèrement chaque membre du Comité. Je n'ai jamais été parmi un groupe de femmes comme le vôtre. Dans l'infanterie, je suis toujours seule, alors aujourd'hui est une journée très spéciale pour moi, et je vous remercie tous.

  (1935)  

    Merci beaucoup. Merci à vous deux d'être ici.
     Nous allons commencer notre première série de questions avec Mme Alleslev. Vous avez six minutes.
    Madame la présidente, j'aimerais remercier les témoins, et en particulier la majore Brennan pour le courage dont elle a fait preuve en s'adressant au public et en étant ici aujourd'hui.
     Nous ne pouvons pas régler les problèmes dont nous ignorons l'existence, et sans information nous ne pouvons pas aller de l'avant. Je tiens également à rappeler à la majore Brennan qu'elle jouit du privilège parlementaire. Elle ne devrait pas faire l'objet de représailles à la suite de sa comparution d'aujourd'hui parce que nous l'avons convoquée.
     Le Service national des enquêtes des Forces canadiennes a-t-il communiqué avec vous dans le cadre de l'enquête sur les allégations contre le général Vance?

  (1940)  

    Ma chaîne de commandement a fait rapport à la police militaire et a commencé une enquête. Ce n'était pas le contraire.
    Ont-ils communiqué avec vous pour obtenir votre déclaration dans le cadre de l'enquête?
    J'ai été rencontrée pendant deux jours, six heures par jour, et j'ai fourni des renseignements au Service national des enquêtes à titre de preuve et de témoignage.
    Le général Vance vous a-t-il jamais demandé de mentir au sujet de votre relation?
    Madame la présidente, oui. C'est enregistré, et le Service national des enquêtes possède tous les enregistrements dans lesquels il me dit quoi dire, quoi ne pas dire, comment le dire, quoi exclure, de me parjurer et mentir parce que...
    Vous a-t-il déjà menacé?
    Y a-t-il eu menace de violence physique? Non.
    Je veux parler de ce que vous auriez perçu comme une menace, comme des représailles ou des conséquences...
    Absolument. Il m'a décrit plusieurs conséquences qui se produiraient si je ne respectais pas ses ordres, madame la présidente.
    Pourriez-vous nous donner un exemple?
    L'une des choses que je n'arrivais pas à comprendre, c'est que son épouse, qui est avocate, allait m'interroger à maintes reprises si je ne disais pas les bonnes choses… qu'elle viendrait me voir pour m'interroger. Il a dit que je ne devais pas mentionner certaines choses au sujet de notre relation, de notre vie personnelle. Les conséquences étaient toujours les mêmes: que je devais me taire.
    Croyez-vous que vous n'aviez pas la capacité de dire non? Est-ce bien ça?
    Je ne pouvais pas refuser. C'était des ordres. Il en parlait de long en large jusqu'à ce que je sois d'accord. C'est ce que nous appelons « une discussion à sens unique ».
    Avez-vous des preuves matérielles ou autres de sa relation inappropriée avec vous?
    Madame la présidente, j'ai déposé cela auprès du Service national des enquêtes: enregistrements, courriels, textos et témoignages.
    Dans votre entrevue avec les médias, vous avez dit que d'autres hauts gradés étaient au courant de l'abus d'autorité dont le général Vance faisait preuve à votre égard. Savez-vous si l'un d'entre eux a été contacté dans le cadre de l'enquête sur les allégations contre le général Vance?
    Je n'en sais rien. Depuis que j'ai témoigné deux fois en février, la seule chose que j'ai reçue, ce sont deux courriels de suivi m'informant que l'enquête se poursuivait. Je n'ai reçu aucune autre information.
    Craignez-vous que l'enquête ne soit pas prise au sérieux et qu'elle soit délibérément compromise ou retardée?
    Madame la présidente, j'ai carrément demandé au Service national des enquêtes s'il avait le mandat de faire enquête et s'il avait le pouvoir de porter des accusations, mais il n'a pas voulu me répondre. La réponse était non parce que le chef d'état-major de la Défense était intouchable, comme il me l'a lui-même dit. Il « possédait » le Service national des enquêtes.
    Craignez-vous qu'en dépit de deux jours de témoignage, qu'il est possible que vous n'ayez été entendue, pour ainsi dire, et qu'il ne soit pas tenu responsable?
    J'ai le sentiment que justice ne me sera pas rendue. Et, en toute honnêteté, ce n'est pas grave, car si le fait que je témoigne encourage d'autres femmes à faire de même et entraîne un changement dans nos politiques, cela me va. Après tout, j'ai été la première femme à entrer dans l'infanterie à l'époque où l'on nous a ouvert les portes des FAC, et je savais que je n'empruntais pas le chemin le plus facile.

  (1945)  

    Très bien. Merci.
    Nous allons céder la parole à Mme Hutchings pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à nos deux témoins qui participent aujourd'hui. Merci pour la force que vous avez montrée dans le passé, et pour celle dont vous faites preuve encore aujourd'hui, et plus important encore, merci de votre service.
    Lieutenante-générale Whitecross, vous avez eu une carrière impressionnante, ayant servi tant à l'étranger qu'au pays. Comment était la culture au sein des FAC au début de votre carrière? Comment est-elle maintenant, et comment voyez-vous l'évolution à l'avenir?
    J'ai déjà commenté publiquement la culture qui prévalait dans les Forces armées canadiennes lorsque j'ai joint les rangs... Il faut se rappeler que je suis entrée dans les FAC en 1982, soit il y a près de 39 ans. La culture était un peu différente de ce qu'elle est aujourd'hui. J'ai joint un groupe qui commençait tout juste à accepter la présence de femmes dans ses rangs, et il n'était pas bien préparé, à dire vrai, à accueillir les femmes. Mais je ne peux pas dire que j'ai subi toutes les expériences crève-cœur que la majore Brennan nous a racontées.
    Je ne vous cacherai pas que les premières années furent difficiles. L'introspection que j'ai faite dernièrement me révèle que j'aurais peut-être pu en faire davantage au cours de ces premières années, mais je ne l'ai pas fait. Nous pouvons en parler, si vous êtes intéressée.
    Pendant mes 38 années de service, j'ai constaté un changement dans le nombre croissant d'hommes et de femmes des Forces armées canadiennes qui travaillent aujourd'hui en uniforme d'un bout à l'autre du pays et à l'étranger. Je crois sincèrement que la grande majorité des militaires sont intègres et souhaitent accomplir leur tâche du mieux qu'ils le peuvent. Mais cela n'exclut pas le fait qu'il y a toujours des problèmes. Il faut que ces problèmes soient pris en compte, et il faut qu'ils le soient rapidement, et avec le plus d'efficacité et d'efficience possible. Aussi, nous devons prendre grand soin des personnes qui ont souffert de ces comportements insidieux, et nous devons les écouter attentivement. Je pense que c'est la seule manière d'aller de l'avant.
    Merci.
    Majore Brennan, vous avez évoqué l'éducation. J'ai participé à des discussions d'un bout à l'autre du pays, et d'un océan à l'autre dans le cadre de l'élaboration du plan d'action national pour mettre fin à la violence fondée sur le genre. À chaque réunion — et nous l'avons entendu aussi dans notre comité — nous entendons dire à quel point l'éducation est importante, et plus particulièrement l'éducation des hommes et des garçons. Savez-vous si cela fait partie de la formation de départ dans les FAC?
    Il n'y a pas de formation différente pour les jeunes hommes. Des cours sont donnés, comme tous les autres cours qui sont dispensés à l'ERLFC, où j'étais affectée. On met cet enseignement à leur disposition, comme tous les autres cours. Il n'existe pas de programme particulier pour les garçons ou les filles, ou pour les jeunes hommes ou les jeunes femmes qui se joignent aux FAC.
    Je vous remercie.
    Lieutenante-générale, vous avez abordé brièvement la perspective internationale. Quels facteurs devrions-nous considérer pour les membres des FAC déployés à l'extérieur du Canada? Comment devrions-nous aborder l'inconduite sexuelle et la prévenir dans ce contexte?
    Madame la présidente, je ne pense pas que l'on doive faire la différence concernant le comportement individuel des membres des Forces armées canadiennes selon qu'ils se trouvent au pays ou à l'étranger. Les valeurs que nous défendons, ici au Canada, doivent être défendues de manière distincte, et probablement encore plus sur le théâtre international, parce que je crois sincèrement que les gens s'attendent à ce que le Canada arbore un système de valeurs qui n'est pas nécessairement en place partout où nous nous déployons.
    Cela semble presque contraire à la logique que de dire cela, compte tenu des situations qui nous ont été révélées au cours des derniers mois. La réalité toutefois, c'est que l'on s'attend à ce que les membres des Forces armées canadiennes affichent un sens moral élevé et un respect de l'éthique tout aussi élevé, tant au Canada qu'à l'étranger.

  (1950)  

    Merci.
    Lieutenante-générale, je réside dans une très grande circonscription rurale, comme mes collègues m'entendent souvent le dire. Avez-vous remarqué une quelconque différence entre le comportement des militaires issus du milieu rural et ceux du milieu urbain, ou est-ce que cela n'a aucune incidence? Vous venez tout juste de dire que le comportement de chacun, que ce soit à l'étranger ou au Canada... Voyez-vous une différence quelconque dans les schémas de comportement entre ceux qui viennent d'un milieu rural et ceux qui viennent d'un milieu urbain?
     Je ne pense pas m'être jamais posé la question. C'est pourquoi jamais je n'aurais supposé qu'une personne était issue d'un milieu rural ou urbain en fonction de sa manière de traiter les autres. En fin de compte, il faut traiter tout le monde avec dignité et respect, et ce, peu importe l'endroit d'où vous venez et si vous travaillez dans les confins du Canada ou à l'étranger. Sérieusement, cela ne m'a jamais traversé l'esprit.
    Majore Brennan, pour revenir à ma question précédente concernant la violence fondée sur le genre, est-il vrai qu'il n'y a pas beaucoup de formation sur l'inconduite sexuelle dans les premières étapes de la formation d'un membre des FAC, en début de carrière?
    Il n'existe aucune formation précise sur l'inconduite sexuelle, en effet. C'est une lacune. Nous pourrions tenir des discussions sur la prévention et renseigner les recrues sur des situations potentielles et leur indiquer comment se protéger. Ce serait vraiment utile.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Madame Larouche, vous avez maintenant la parole pour les six prochaines minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je veux remercier nos deux témoins, Mme Brennan et Mme Whitecross.
    Il a été très éclairant de vous entendre parler de vos expériences respectives qui, comme vous l'avez mentionné, sont très différentes, au sein des Forces armées canadiennes.
     J'aimerais commencer par Mme Whitecross.
    Dans vos remarques préliminaires, vous avez mentionné avoir entendu des choses qui vous ont choquée dans les témoignages des dernières semaines; j'aimerais savoir lesquelles vous ont particulièrement choquée.

[Traduction]

    J'ai consulté les délibérations du Comité des dernières semaines, et j'ai été absolument consternée... Ce n'est pas le mot juste. Ça m'a presque rendue malade d'entendre le témoignage de mardi soir de certains membres à la retraite et d'autres toujours en service dans les Forces armées canadiennes.
    La situation dans laquelle nous nous retrouvons depuis février et qui touche nos plus haut gradés dans les Forces armées canadiennes et les allégations contre eux ont été une complète surprise pour moi. J'ai trouvé cela très très décevant.

[Français]

    À vous entendre, vous n'étiez donc pas au courant de tout cela.
    Jugez-vous qu'il y a une forme d'omerta ou de loi du silence au sein des Forces armées canadiennes, en ce qui a trait aux inconduites sexuelles? Selon vous, qu'est-ce qui explique ce silence?

[Traduction]

    Bien sûr, je ne suis pas surprise que l'inconduite sexuelle existe. Comme le Comité le sait probablement, j'ai dirigé l'équipe d'intervention stratégique sur l'inconduite sexuelle après le rapport Deschamps en 2016. Honnêtement, j'ai eu l'honneur de rencontrer des milliers d'hommes et de femmes des Forces armées canadiennes d'un bout à l'autre du pays pour discuter de ce comportement ainsi que du système de valeurs que prônent les Forces armées canadiennes et qu'elles attendent de chacun de leurs membres. Ce faisant, j'ai reçu les confidences de nombreuses personnes et ces récits étaient à fendre le coeur. Bon nombre de ces récits remontaient à longtemps en arrière, je vous l'accorde, mais d'autres étaient récents. Cela a marqué un moment décisif pour moi. Je n'ai peut-être pas été témoin personnellement de tels comportements au cours de ma carrière, mais le simple fait d'entendre certaines confidences était à proprement parler déchirant.
    Oui, je suis surprise de ce qui s'est passé au cours des derniers mois, mais suis-je surprise que ces comportements existent? Non, je ne le suis pas. C'est pourquoi je suis heureuse que nous puissions espérer poursuivre le dialogue et obtenir la mise en place de mesures tangibles pour nous ramener immédiatement sur la bonne voie.

  (1955)  

[Français]

    Madame Brennan, vous avez témoigné de l'agression dont vous avez été victime et vous avez beaucoup parlé d'un problème de dynamique de pouvoir. Vous avez également mentionné qu'il y avait aussi beaucoup de pressions et de menaces à votre égard. Y a-t-il d'autres obstacles auxquels font face des militaires voulant dénoncer une inconduite sexuelle d'un de leurs supérieurs?
     Je vous remercie beaucoup de votre question.
    Pour ce qui est de l'abus de pouvoir et des menaces qui sont faites à l'égard de celles qui servent dans les Forces armées canadiennes, il y a une culture de clique des bons copains. Pour soulever un problème d'inconduite et se faire entendre, il faut passer par la chaîne de commandement. Les femmes arrêtent d'en parler parce qu'elles craignent les répercussions sur leur carrière, sur leur milieu de travail et sur leurs collègues. Elles ne se sentent pas protégées et ne se sentent pas à l'aise d'aller en parler à leur supérieur, car c'est leur patron.
    Cela fait donc partie des failles dans le processus de dénonciation d'inconduites sexuelles dans les Forces armées canadiennes.
    J'imagine qu'il y en a d'autres. Vous avez parlé de l'interrogatoire très serré que vous avez subi pendant deux jours.
    La dénonciation se fait auprès de policiers militaires. Ce n'est pas le contexte idéal pour qu'une femme puisse dire ces mots-là pour la première fois. Il est difficile de prononcer ces mots et les victimes ne sont pas accompagnées d'une personne-ressource qui pourrait être là pour elles.

[Traduction]

    Madame Brennan, j'ignore si quelqu'un est en train de transmettre des données en continu chez vous, mais la connexion Internet que nous avons est inégale. Si vous pouviez demander que l'on cesse la transmission de données, ce serait bien, dans la mesure où quelqu'un est en train de le faire.
    En attendant, nous allons passer à Mme Mathyssen.
    J'ai oublié de le mentionner au début, mais je tiens à vous remercier encore une fois pour le ton respectueux que vous adoptez pour parler de ce sujet délicat.
    Vous disposez de six minutes, madame Mathyssen.
    Merci, madame la présidente.
    J'apprécie vraiment les témoins qui ont accepté de témoigner, qui ont parlé de l'honneur d'être ici. Mais bien franchement, l'honneur est plutôt pour nous de nous entretenir avec vous aujourd'hui, et de vous entendre nous parler de ce que vous souhaitez ajouter sur ce sujet difficile.
    Majore Brennan, vous avez mentionné que vous avez été interrogée pendant deux jours, à raison de six heures par jour. On nous a raconté auparavant que c'était souvent intimidant, et que les femmes qui témoignent ne peuvent pas le faire devant des femmes intervieweuses.
    Vous a-t-on offert cette possibilité ou l'avez-vous demandée?
    Madame la présidente, je pense que je n'ai été interrogée que par des hommes. Et lorsque je leur ai fait remarquer cette particularité, j'ai eu l'impression de revenir 25 ans en arrière, à l'époque où j'étais policière. J'ai dû réfléchir à ce que je devrais leur dire, comme si je devais les encadrer, parce que j'ai dû mentionner beaucoup beaucoup de choses au cours du processus.
    C'était injuste. Parce que s'il s'était agi d'une personne ne connaissant pas le processus, je pense que cela aurait été encore plus difficile pour elle [Difficultés techniques]

  (2000)  

    Donc on ne vous a pas offert cette possibilité. On ne vous a pas dit qu'on allait trouver quelqu'un, une femme, pour travailler avec vous dans cette situation. On n'en a tout simplement pas tenu compte. Est-ce exact?
    Non. Ils ont indiqué que leurs nombreuses années de service les rendaient aptes à le faire.
    Lorsqu'ils m'ont dit que la ressource désignée pour me venir en aide était un homme, je leur ai fait savoir clairement que s'ils avaient nommé l'autre personne derrière le bureau — ils pointaient vers quelque chose — qui était une femme, j'aurais été heureuse de la décision, mais que je n'allais pas aimer avoir à m'expliquer devant un autre homme.
    J'ai entendu souvent que, même pour de simples questions de discipline et les conséquences dans les activités quotidiennes, les femmes sont plus souvent contestées et punies, et que même si elles sont gradées, elles sont constamment contestées.
    Êtes-vous d'accord avec ces affirmations, d'après votre expérience personnelle?
     D'après mon expérience personnelle, quel que soit votre grade, vous n'êtes jamais considérée comme l'égale de... Dans ma profession et d'après mon expérience personnelle, je n'ai jamais été considérée au même titre qu'un homme du même grade que moi. Cela s'exprimait de diverses manières, soit qu'on ne me saluait pas ou que l'on ne respectait pas ce que j'avais à dire. J'ai vécu cela de façon quotidienne.
    Concernant le soutien que vous auriez pu recevoir autour de vous — les haut gradés et vos supérieurs — avez-vous jamais obtenu du soutien en réponse au manque de respect que l'on vous témoignait?
    J'aurais bien aimé avoir un mentor pour m'enseigner comment être une femme forte dans le monde militaire. Malheureusement, il n'y a pas vraiment beaucoup de femmes d'un grade supérieur au mien ou qui ont réussi à obtenir le grade de général, et ce, même dans l'infanterie. Je pense que cela reste à venir.
    Je dirais que vous êtes une femme forte des Forces armées canadiennes.
    Lieutenante-générale Whitecross, vous étiez à la tête de l'équipe d'intervention stratégique de l'opération Honour qui a pris fin. Nous avons entendu beaucoup de commentaires concernant ses réussites ou ses échecs, et finalement, sur l'échec de cette opération. Que pensez-vous que l'on devrait retenir de cela, à l'avenir, maintenant que les FAC sont en train de se restructurer et essaient d'aller de l'avant après l'opération Honour?
    Madame la présidente, je n'irais pas jusqu'à dire que ce fut un échec total. Si nous revenons en 2015, à l'époque où nous avons mené l'opération Honour, il est clair que nous ne savions pas ce que nous ferions aujourd'hui et nous ne comprenons pas... Je pense que nous avons sous-estimé la somme d'efforts, la quantité de travail et les activités détaillées réelles qui sont nécessaires pour changer une culture. Avec le recul, je dirais que nous en aurions retiré des avantages extraordinaires si nous avions invité des spécialistes de la culture organisationnelle pour nous aider à encadrer ce mouvement.
    Une partie du travail qui avait été fait, qu'il s'agisse de politiques ou de formation... Nous avions mentionné le besoin de formation. Peut-être que la majore Brennan n'était pas au courant, mais nous avons institué de la formation pour tous les militaires, peu importe le grade. C'est relativement récent, je vous l'accorde, et cela montre qu'il y a énormément de travail à faire. Il ne s'agit pas seulement de formation individuelle; il s'agit d'éducation militaire professionnelle et de formation à l'intention des haut gradés. Il est question de formation à l'intention des témoins et sur un ensemble d'autres questions.
    Cela mis à part, oui, nous ne pouvons pas rejeter tout le travail de base accompli dans le cadre de l'opération Honour. Nous devons en tirer profit. Ce qu'il faut vraiment faire, à mon humble avis, c'est inviter des spécialistes externes pour aider les FAC à façonner les prochaines étapes de ce processus.
    Nous allons maintenant entamer la deuxième série de questions.
    Madame Alleslev, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     Majore Brennan, dans vos derniers commentaires, vous avez déclaré que le général Vance se considérait lui-même comme intouchable. Pourriez-vous nous expliquer ce qu'il entendait par là? Est-ce que cela comprenait, disons Harjit Sajjan, ministre de la Défense nationale?

  (2005)  

     Madame la présidente, je ne peux vous parler que des choses que je sais. Lorsque j'ai travaillé à Downsview, à Toronto avec le ministre Sajjan, qui était à l'époque le major Sajjan, nous travaillions tous les deux pour le général Vance. La dynamique était différente.
    Par la suite, le général Vance me disait toujours qu'il l'avait toujours eu bien en main. Ces remarques m'ont été faites personnellement. Je ne peux pas parler de leur relation de travail, parce que je n'étais pas dans le secret.
    Merci.
    Aviez-vous une perspective quelconque sur d'autres officiers supérieurs qui auraient été dans son entourage à l'époque? Avait-il l'impression que la loi, dans une certaine mesure, ne s'appliquait pas à lui?
    D'après mon expérience, dans de nombreux domaines différents, la loi ne s'applique pas à lui. Il ne...
    Sur une note personnelle, il est le père de deux de mes enfants. Il n'assume aucune responsabilité financière ou autre quant à ces enfants. Ces responsabilités m'incombent à moi personnellement. Il s'exclut lui-même d'une bonne part de responsabilités qui incombent aux membres de la société canadienne. Je pense que c'est tout simplement devenu une habitude pour lui.
    Seigneur! Ce doit être très difficile pour vous.
    Vous avez déclaré, et j'ai été découragée de vous l'entendre dire, que vous étiez persuadée que justice ne vous serait pas rendue. Néanmoins, je vous remercie de faire ce que vous faites.
    Vous avez aussi indiqué qu'il y avait d'autres personnes présentes au cours de ces six heures de témoignage, pendant deux jours. Ce n'était pas seulement le général Vance. Il y avait d'autres officiers supérieurs qui étaient complices, que ce soit en raison de leur inaction ou de certains gestes qu'ils ont posés contre vous. Êtes-vous préoccupée du fait qu'ils ne seront pas tenus responsables, eux non plus?
    Pour rendre compte de leurs actions, il faudrait qu'ils soient traduits devant un tribunal ou qu'ils soient mis en accusation. Ce n'est pas mon but. Si jamais cela se produit, tant mieux, mais ce n'est pas la raison pour laquelle je fais ceci. Je veux que les gens comprennent l'influence, la dynamique du pouvoir qui entre en jeu dans ces rapports. Je voudrais que l'on comprenne comment les dirigeants se servent de l'information pour acquérir toujours plus de pouvoir. C'est ce dont j'ai fait l'expérience.
    Peut-être pourrait-on voir cela comme une lutte épique entre la culture existante et la culture que nous aimerions voir la remplacer. Pensez-vous que nous pouvons collectivement vaincre le « club réservé aux hommes » si aucun de ces haut gradés n'est tenu responsable de ses actes? Est-ce que cela ne risque pas, en fin de compte, de les inciter à se dire, « Vous voyez? Nous avons gagné, et avons préservé le statu quo »?
    Je pense que chez les militaires, nous gagnons; c'est ce pourquoi on nous entraîne. Je pense que gagner veut dire briser le silence. En toute honnêteté, si chaque femme peut raconter ce qui lui est arrivé, c'est une situation gagnante. Je pense que c'est la justice.
    Pourriez-vous nous dire quel poste occupait le major Sajjan à Downsview lorsque vous travailliez avec lui?
    Si je m'en souviens bien, il était officier des projets spéciaux.
    Et quel était le poste occupé par le général Vance?
    Il était le CEM. Il était le chef d'état-major de...
    Et vous...
    Allez-y, désolée.
    Pardon; nous l'appelons une division maintenant, mais il s'agissait à l'époque du quartier général du SCFT.
    Très bien.

  (2010)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Mme Sidhu, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à nos deux témoins de leur présence, ce soir, ainsi que de leurs nombreuses années de service pour ce pays. Merci de votre courage.
    Je sais que nous parlons d'un sujet difficile et délicat, aussi je tiens à dire aux témoins que si certaines questions les mettent mal à l'aise, elles peuvent choisir de ne pas répondre.
    Mes premières questions s'adressent à la lieutenante-générale Whitecross. Pourriez-vous nous parler de votre expérience au CMR? Auriez-vous des recommandations à faire aux FAC et au MDN pour prévenir l'inconduite sexuelle et le harcèlement?
    Je n'ai pas fréquenté le Collège militaire royal, sauf pour mon programme de maîtrise. Je suis allée à l'Université Queen's, aussi je n'ai pas d'expérience antérieure au début des années 1980, pour ce qui est de vous décrire comment était la situation lorsque j'y étais.
    Je peux vous dire qu'à l'époque où j'étais chef du personnel militaire, avant d'aller à l'OTAN, j'étais responsable du Collège militaire royal et j'ai eu quelques occasions d'examiner comment on y perfectionnait le leadership, de consulter le programme d'études et diverses autres questions. Il s'y accomplissait du bon travail, et il continue de s'en faire, et pas seulement sur la question de l'inconduite sexuelle, mais aussi sur un éventail de questions différentes relatives aux RH, plus précisément, sur la santé mentale, et sur la prestation de services de soutien en matière de santé mentale tant aux officiers qu'aux aspirants de marine. C'est là que se situe mon expérience.
    De quel type de formation, y compris le programme d'études des aspirants, plus particulièrement du point de vue de la santé mentale ou de toute autre formation... ?
    Je suis désolée, madame la présidente. Je ne suis pas à jour sur ce sujet. Je suis persuadée que le major-général Whelan pourrait vous fournir les renseignements que vous cherchez.
    Je peux vous dire qu'au cours des deux ou trois dernières années, des spécialistes en matière de santé mentale ont été affectés directement au collège militaire, si j'ai bien compris, afin de pouvoir fournir des ressources immédiates au personnel ou aux élèves-officiers qui éprouveraient des difficultés à cet égard.
    Est-ce que l'équipe d'intervention sur les inconduites sexuelles, que vous avez dirigée, a formulé des recommandations qui n'ont pas été mises en oeuvre?
    Pour me préparer à cette comparution, j'ai relu certains rapports produits dans le passé. Évidemment, lorsque j'ai travaillé pour l'OTAN, je n'étais pas au courant de manière détaillée de ce qui se passait ici, au Canada. Cependant, j'estime que probablement la majorité, si ce n'est la totalité des recommandations que nous avions formulées à l'époque ont été prises en compte.
    En plus de ces recommandations, les personnes qui ont dirigé l'équipe d'intervention stratégique après mon départ en ont formulé toute une série de nouvelles.
    Quelle recommandation souhaiteriez-vous faire aujourd'hui?
    J'en aurais deux ou trois, pour être franche.
    Tout le travail de base doit être complètement conservé. Nous devons travailler sur les politiques. Nous devons travailler sur la formation, l'éducation et toutes ces choses dont il a déjà été question.
    Je crois aussi que le moment est venu de mettre de côté l'idée que les Forces armées canadiennes pourraient probablement venir à bout de ce problème à l'interne. Elles doivent chercher des ressources ailleurs pour se faire aider. Si cela signifie faire l'objet d'un examen indépendant, si cela nécessite une entité d'enquête indépendante ou un système judiciaire indépendant — peu importe — il faut se pencher là-dessus. Je ne suis pas convaincue que la réponse peut venir de l'intérieur à ce stade-ci, parce que nous avons beaucoup perdu la confiance de nos membres. Donc, je serais très favorable à cette approche.
    Il y a une cohérence entre le fait de traiter les gens avec dignité et respect et celui d'être un combattant. Certains n'y croient pas, et à mon avis, ces gens-là n'ont pas leur place dans les Forces armées canadiennes. Il faut que ce soit très clair. Il faut énoncer clairement quelles sont nos attentes, ce que nous sommes prêts à accepter et ce que nous refuserons d'accepter.
    Il y aurait bien d'autres choses, mais je sais que mon temps est limité.
    Très bien.

[Français]

     Madame Larouche, vous avez maintenant la parole pour deux minutes et demie.

  (2015)  

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je tiens à assurer à nos deux témoins qu'elles ont tout notre respect.
    Je vais poser une question à Mme Whitecross.
    Croyez-vous que le processus d'enquête interne de l'armée est problématique? Je vais m'expliquer, et vous me corrigerez si je me trompe. Dans une entrevue accordée à la CBC, vous invitiez les victimes d'inconduite sexuelle à dénoncer leur agresseur. Vous disiez qu'il y avait un malentendu dans la chaîne de commandement des forces armées relativement au processus de dénonciation et aux personnes à qui les victimes peuvent s'adresser. Vous énumériez aussi quelques options.
    Pouvez-vous nous parler de ces options? Quelle serait la meilleure marche à suivre pour une victime qui souhaite obtenir justice? Quelles sont ses chances de succès?

[Traduction]

    Je crois que le commentaire que j'ai fait lors de mon entrevue avec la CBC était qu'il existe un malentendu parmi le personnel subalterne, au sein des membres mal informés des Forces armées canadiennes, concernant les recours qu'ils ont.
    Il existe un grand nombre de réseaux de soutien disponibles, que ce soit par l'intermédiaire de la chaîne de commandement, de la PM, de la police militaire, du personnel médical, du CIIS ou de l'ombudsman. Il y en a plusieurs. Cependant, je maintiens que la dénonciation est le problème numéro un qu'il faut prendre en compte. Les gens doivent avoir confiance qu'ils peuvent dénoncer une situation et que leurs préoccupations seront prises en compte, non seulement avec dignité et de façon soutenue, mais aussi très rapidement et de façon adaptée aux besoins. Si cela signifie accroître le nombre d'intervenants, peut-être en retenant les services d'une organisation externe quelconque, il faut vraiment envisager une telle solution.

[Français]

    Madame Brennan, lorsque vous vous êtes retrouvée coincée dans cette situation malheureuse et que vous ne pouviez pas dire non à M. Vance, quels recours s'offraient à vous? Y en avait-il?
    Comment pourrait-on prévenir ce genre de situation à l'avenir? Pouvez-vous nous faire quelques recommandations à ce sujet?
     Je vous remercie de votre question.
    J'aimerais proposer quelque chose de nouveau. Présentement, on ne peut pas refuser d'être le supérieur d'un autre membre faisant partie de la chaîne de commandement. Or je pense qu'avec du recul, on devrait être en mesure de refuser d'être le supérieur d'un autre membre.
    Cela permettrait de changer les choses pour beaucoup de personnes. On sait qu'on ne devrait pas être le supérieur d'un membre avec lequel on entretient une relation intime ou avec lequel on a entretenu une telle relation. On sait que cela nuit au jugement de la personne en position d'autorité et que cela l'empêche d'être un bon leader pour l'autre membre.
    Je remercie beaucoup nos témoins.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à Mme Mathyssen pour deux minutes et demie.
    Majore Brennan, nous avons entendu de la part d'autres témoins que des femmes n'étaient pas parvenues à obtenir justice à l'interne, et qu'elles avaient dû recourir à des moyens externes. Vous-même avez déclaré qu'il se pourrait que justice ne vous soit pas rendue. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Est-ce qu'il vous arrive parfois de penser que la seule solution peut provenir de l'extérieur?
    Je constate certainement que s'adresser à des instances extérieures au monde militaire se révèle très souvent beaucoup plus rassurant, plus naturel, parce que l'on ne se sent jamais très à l'aise d'aborder des questions d'ordre personnel avec sa chaîne de commandement. Alors, clairement, j'estime que cette option est... Je pense qu'il devrait exister un organisme indépendant auquel on pourrait s'adresser, si l'on souhaite que des forces policières fassent enquête, parce que ces crimes relèvent du Code criminel du Canada. Ils constituent des atteintes aux droits de la personne; ils ne relèvent pas des forces militaires. Ils ne sont pas mentionnés dans la Loi sur la défense nationale, et l'article 129 de la LDN mentionne seulement le comportement.
    Par conséquent, j'estime résolument que ces crimes ne relèvent pas des forces militaires. Les militaires sont toujours des citoyens canadiens, et ceux qui contreviennent au Code criminel du Canada devraient être poursuivis à ce titre.

  (2020)  

    Fait intéressant, nous entendons constamment cette remise en question de la chaîne de commandement, et rien ne se fait. Dans votre situation personnelle, vous en avez déjà parlé, mais pour ce qui est de cette mainmise, de ce pouvoir, nous en avons beaucoup entendu parler et aussi du fait que les personnes qui le détiennent ne comprennent pas les responsabilités qui l'accompagnent.
    Dans votre contexte personnel, pourriez-vous nous expliquer avec plus de précision quel était le pouvoir du général Vance dans votre unité et le pouvoir qu'il exerçait sur les personnes qui relevaient de son autorité?
    La dynamique du pouvoir, en ce qui me concerne, et ce que je veux faire ressortir, c'est quelque chose dont vous pouvez vous approcher... Parfois on l'appelle « la robe noire » ou « le club réservé aux hommes ». Cela signifie tout simplement qu'il existe un cercle, et que vous n'en faites pas partie. Les membres du cercle possèdent un certain pouvoir, et vous en êtes exclue. Vous êtes impuissante dans ce cercle. Si vous faites quelque chose dans d'autres secteurs de votre carrière, c'est à ce moment-là que vous allez vous en rendre compte — dans votre rapport sur le rendement, votre évaluation — et c'est pourquoi c'est une situation qui vous dépasse.
    C'est pourquoi...
    Très bien.
    Nous allons maintenant céder la parole à Mme Sahota, qui partage son temps avec Mme Alleslev.
    Merci, madame la présidente.
    Merci aux témoins de leur présence aujourd'hui.
    Majore Brennan, vous avez dit tout à l'heure, et je cite: « J'ai le sentiment que justice ne me sera pas rendue. » Ce n'est pas le Canada dont chacun d'entre nous défend les valeurs, et encore moins en ce qui vous concerne, puisque vous avez porté l'uniforme pour nous.
    Je vais vous demander s'il y a quelque chose que vous aimeriez dire au général Vance à cause de tout ce qu'il vous a fait subir, et aussi aux Forces armées canadiennes qui ont toléré que de telles choses se passent et permis qu'une telle culture sévisse?
    En toute honnêteté, je souhaite seulement que la vérité soit connue. Je n'ai pas de but. Je n'ai pas d'objectif. Je veux seulement que la vérité sorte. C'est ce qui me procurerait le plus de satisfaction: la vérité.
    Je vous en prie, madame Alleslev.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Lieutenante-générale Whitecross, vous avez donné l'impression que la présente situation changeait votre perspective de l'ampleur, de la profondeur et de la portée du problème que les Forces armées canadiennes doivent affronter. Je me demande, si vous occupiez votre poste à nouveau, ce que vous feriez différemment. Est-ce qu'un changement de culture ne devrait pas nécessiter davantage que des processus? Est-ce qu'il ne faudrait pas aussi faire en sorte que les personnes qui ne se sont pas conduites de façon appropriée rendent compte de leurs actes, est-ce qu'il ne faudrait pas aussi exercer une certaine surveillance de ces personnes?
    Si j'étais encore active dans le service, je pense que je mettrais toute mon énergie à maintenir l'impulsion qui a été créée au cours des derniers mois pour veiller à ce que les individus qui ont enfreint la loi ou se sont conduits d'une manière contraire à ce que l'on attend des membres des Forces armées canadiennes soient tenus responsables de leurs actes.
     Je ne suis pas entièrement convaincue que cela n'arrivera pas. Je compatis avec la majore Brennan. J'ai de la sympathie pour elle. Je suis désolée pour les situations qu'elle-même et nombre de ses collègues ont vécues. Je ne crois pas que la majorité des femmes des Forces armées canadiennes — ou des hommes, d'ailleurs — participent à ce comportement insidieux ou sont victimes de ce genre de comportement. Je ne devrais peut-être pas utiliser le mot « majorité », mais je dirais avec certitude que tous n'y participent pas. Je répète que nous devons maintenir l'élan qui a été créé au cours des derniers mois. Je pense que nous nous trouvons à un moment charnière.
    Je l'ai déjà dit dans le passé. C'est une situation que l'on ne peut tolérer, et non seulement devons-nous poursuivre le travail de base qui est nécessaire, mais il faut aussi que les responsables rendent des comptes, quel que soit leur grade, et cela inclut les micro-agressions. Lorsque certains laissent échapper des phrases qu'ils trouvent drôles, il faut leur dire que ces paroles ne sont pas drôles, et qu'ils sont en train de dépasser les limites. Il faut s'exprimer beaucoup plus vigoureusement au sujet de ces petites entorses afin d'éviter qu'elles ne prennent plus d'ampleur.
    Comme l'a déclaré Mme Deschamps, on crée une culture sexualisée qui tolère de petites entorses, et petit à petit, ces petites entorses se muent en comportements beaucoup plus graves qui sont complètement répréhensibles. Il faut réagir dès le début.
    Je vous demande pardon pour cette longue réponse.

  (2025)  

    Nous avons entendu d'autres témoins nous dire que la situation est trop grave pour que l'on puisse se permettre de commettre d'autres erreurs. Si nous n'intervenons pas vigoureusement, on doutera encore davantage que les autorités sont capables de faire le nécessaire. C'est pourquoi je vous demandais si vous étiez d'accord avec cela. Comme vous l'avez dit, cela commence par de petites choses, mais toute la situation concerne des individus, leur comportement et la reddition de comptes autant que les processus. Trouvez-vous que c'est une bonne évaluation de la situation?
    C'est tout à fait juste. Il est question de personnes. Les comportements et un milieu de travail respectueux, tout cela se résume à la manière dont on traite les gens. Si certains ne respectent pas les valeurs que nous, les militaires, défendons, alors j'estime qu'ils se sont trompés de carrière. Et cela vise tant le milieu militaire que tout autre milieu de travail. Ce genre de comportement ne devrait être toléré en aucun cas.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Très bien.
    Nous allons maintenant vers les cinq dernières minutes avec Mme Vandenbeld.
    Merci beaucoup.
    Majore Brennan, je tiens à vous remercier pour le courage que vous avez montré en témoignant. Je suis persuadée que votre témoignage et la chaîne d'événements qui ont suivi depuis vont faire une grande différence, et je tenais à vous le dire. Je suis vraiment désolée que vous ayez à revivre tous ces événements en témoignant aujourd'hui. Je comprends que c'est très difficile.
    Il y a juste une chose que vous avez dite dans votre témoignage sur laquelle j'aimerais obtenir des précisions. Vous dites avoir travaillé avec le ministre Sajjan à Downsview, qui, je crois, se trouve à Toronto. En quelle année était-ce? Pourriez-vous préciser votre témoignage sur ce point?
    J'ai été affectée à Downsview en janvier 2006 et j'ai quitté en avril ou mai 2008. C'était durant cette période. Je dirais qu'il est arrivé après moi. Je ne connais pas les dates exactes pendant lesquelles il a été affecté là-bas. Il faudrait que je consulte les dossiers.
     Très bien. C'est seulement pour le compte rendu. Je ne mets pas en doute ce que vous dites. C'est tout simplement que je sais que le ministre Sajjan a lui aussi témoigné et vérifié qu'il n'avait jamais travaillé à Toronto. Il était réserviste à Vancouver et il a fait son entraînement préparatoire à Edmonton. Je ne conteste pas ce que vous dites. Je voulais seulement obtenir des précisions afin que nous puissions déterminer avec exactitude ce qui s'est passé là-bas.
    Mais ce n'est pas la raison pour laquelle nous sommes réunis ici aujourd'hui. En effet, le but de notre réunion est de nous assurer que ce qui vous est arrivé ne se reproduise plus jamais. Pour quiconque.
    Voici mon autre question, majore Brennan et lieutenante-générale Whitecross. Comment empêcher ce genre de chose de se reproduire dans le futur? Y a-t-il des choses que nous pourrions faire différemment dès maintenant afin d'éviter que ce genre de chose arrive encore? Il est important de soutenir les victimes, et nous en avons déjà parlé, mais nous voulons tout d'abord mettre un frein à ce genre de comportement.
    Je vais commencer avec la majore Brennan et j'aimerais aussi entendre la lieutenante-générale Whitecross.
    Si je devais vous citer un seul élément de ce que nous pourrions faire pour que ça change, et une chose qui m'aurait aidée et aurait aussi aidé de nombreuses femmes à qui j'ai parlé, ce serait de dire qu'obéissance ne rime pas avec silence. Si on a fait du mal à une femme et si elle veut parler autrement qu'à son tour, je ne pense pas qu'on devrait lui imposer le silence et que la chaîne de commandement devrait lui dire de cesser d'agir ainsi et de passer à autre chose. On ne devrait pas lui dire: « Vous avez choisi une carrière difficile — adaptez-vous et reprenez-vous ».
    Merci.
    Lieutenante-générale, souhaitez-vous faire un commentaire?
    Il y a deux aspects aux raisons pour lesquelles nous voulons bien traiter les gens. D'abord, c'est un impératif social, pourrais-je dire, et ce n'est que logique et la bonne manière de traiter un être humain. Mais il y a aussi l'impératif opérationnel, selon lequel nous ne pouvons pas mener une opération efficace ou demander à une force militaire d'effectuer un travail très dangereux si tous les membres de l'organisation n'ont pas le sentiment de faire partie de l'équipe, s'ils ne sont pas respectés et capables de donner le meilleur d'eux-mêmes au sein de l'équipe.
    Cela étant dit, j'ajouterais que l'une des choses à faire, et que plusieurs d'entre vous ont déjà mentionnée, c'est de rendre chacun responsable de ses actes. Il faut aussi que l'on puisse signaler un mauvais comportement. Il faut s'assurer de ne pas créer un environnement ou maintenir un environnement où les gens ont peur de témoigner. Il faut au contraire créer un environnement où un milieu de travail digne et respectueux est la norme.
    Merci.

  (2030)  

    Merci beaucoup.
    Très bien.
    Merci à nos témoins. Merci de votre service, de votre bravoure et de faire la différence dans cette étude que nous sommes en train d'effectuer.
    Mesdames et messieurs, je vous rappelle que nous reprenons mardi nos travaux sur les collectivités rurales et le travail non rémunéré et que nous accueillerons le dernier groupe de témoins pour cette étude.
    Plaît-il au Comité de lever la séance?
    Je vois que nous sommes unanimes, bonne soirée tout le monde. Nous nous reverrons mardi.
    La séance est levée.
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