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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 011 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 19 avril 2016

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    Je souhaite la bienvenue à M. Mehain de la Colombie-Britannique qui se joint à nous par téléconférence. Étant donné que l'Association canadienne de la police montée professionnelle va témoigner en partie par téléconférence, je propose que vous soyez notre premier témoin. Je crois que M. McKenna se chargera de lancer la discussion.
    Nous allons prendre 10 minutes pour vous écouter tous les deux et nous entendrons ensuite M. Dupuis et M. Duggan pour la deuxième période de 10 minutes, pour le cas où la vidéoconférence s'arrêterait. Nous allons donc accorder 10 minutes à chacun des deux groupes et nous passerons ensuite aux questions des membres du comité.
    Monsieur McKenna.
    Mesdames et messieurs les membres du comité parlementaire, bonjour.
    Je m'appelle Brendan McKenna et je suis le porte-parole de la British Columbia Mounted Police Professional Associatiokn. Je participe aux activités de l'association depuis 22 ans. Je suis un membre fondateur de la British Columbia Mounted Police Professional Association, créée en 1994, ainsi que de l'Association canadienne de la police montée professionnelle, créée en 2010.
    La B.C. MPPA est une association provinciale à but non lucratif. C'est le volet provincial de la MPPAC, l'association nationale.
    J'ai servi pendant 30 ans au sein de la GRC, exclusivement en Colombie-Britannique, principalement dans des détachements — notamment dans le détachement le plus important du pays, celui de Surrey — dans des détachements de petite et moyenne taille dans le Nord. J'ai apporté un soutien à un poste isolé composé de trois personnes où le secours le plus proche était à plus de deux heures de voiture, de sorte que j'apporte un point de vue assez varié à toute cette question.
    Je vais commencer par vous parler des préoccupations que suscite pour moi, l'absence d'éléments essentiels dans le projet de loi C-7. Je vais principalement traiter de deux sujets: les facteurs à prendre en compte dans l'arbitrage des différends et les restrictions concernant les questions susceptibles de faire l'objet de négociations touchant le niveau des effectifs et l'équipement.
    L'année dernière, la Cour suprême du Canada a déclaré que le droit de grève était protégé par la Constitution. Les membres de la GRC ne revendiquent pas le droit de faire la grève. Ils savent qu'ils accomplissent un travail essentiel. Ils revendiquent toutefois une alternative à la grève, à savoir l'arbitrage des différends selon un mécanisme équitable et indépendant.
    Selon les termes actuels de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et du projet de loi C-7, le mécanisme d'arbitrage des différends applicable aux membres de la GRC est bien loin d'être équitable et indépendant. En fait, l'arbitre est tenu d'accorder une importance prépondérante à deux facteurs, notamment à la politique financière officielle du gouvernement. Cela déforme le mécanisme et favorise l'employeur. C'est tout l'opposé d'un organisme équitable et indépendant et cela va à l'encontre des droits que la Charte reconnaît aux membres de la GRC.
    La British Columbia Mounted Police Professional Association invite le comité à amender le projet de loi C-7 pour autoriser l'arbitre à accorder une importance égale à tous les facteurs et pour qu'il ne soit pas tenu de prendre en compte la politique financière officielle du gouvernement.
    Un autre aspect préoccupe la British Columbia Mounted Police Professional Association; ce sont les restrictions apportées au cadre de la négociation, en particulier pour ce qui est du niveau des effectifs et de l'équipement. Ces deux domaines ont un impact direct sur la santé et la sécurité au travail des agents de police de première ligne. Ils ont un effet direct sur la qualité du milieu de travail. Les agents de première ligne sont surchargés de travail, ils disposent de ressources insuffisantes et sont sous-équipés; on ne peut donc, raisonnablement, les obliger à fournir sans aucune interruption, le service de haute qualité qu'exige l'emploi et auquel s'attend la population canadienne.
    On nous compare aux fonctionnaires visés par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Un sondage effectué auprès des employés de la GRC par le gouvernement précédent a permis de constater que plus de 9 000 membres de la GRC voulaient être visés par une loi distincte qui concernerait uniquement la GRC et donc, par le projet de loi C-7.
    Nous savons que le gouvernement libéral s'est engagé à respecter l'arrêt de la Cour suprême du Canada , mais nous craignons que ce projet de loi ne permette pas d'atteindre cet objectif.
    Tel que rédigé, le projet de loi C-7 ne répond ni à l'esprit ni à l'intention de la décision de la Cour suprême du Canada qui reconnaissait le droit des membres de la GRC de négocier collectivement. J'estime que la Cour avait l'intention de déclarer que les membres de la GRC devaient bénéficier des mêmes droits et privilèges que ceux que possèdent tous leurs autres Canadiens et tous leurs collègues policiers dans les différentes agences fédérales, provinciales et municipales.
    Les restrictions que contient le projet de loi C-7 peuvent être comparées à l'idée de garantir à quelqu'un le droit de voter et de placer ensuite les bureaux de scrutin dans des endroits auxquels celui-ci n'a pas accès. Cela revient en réalité à violer ce droit.
    Les restrictions que contient le projet de loi C-7, tel que rédigé actuellement et s'il n'est pas modifié, interdisent aux membres de première ligne de la GRC de participer de façon efficace et véritable à deux domaines essentiels à la santé et la sécurité au travail. Cela vient du fait que le projet de loi C-7 ne contient pas de nombreux éléments fondamentaux que l'on retrouve dans les dispositions relatives aux négociations collectives dans d'autres organismes et qui reconnaissent le droit de se syndiquer au Canada.
    Il y a au pays plusieurs associations de police qui ont conclu des conventions collectives qui touchent les niveaux minimaux d'effectifs, comme la Toronto Police Association, Sudbury, Windsor et la Durham Regional Police Association, pour n'en nommer que quelques-unes.

  (1110)  

    À titre d'exemple, je peux vous parler de ma propre expérience dans les activités de première ligne. Nos détachements ont habituellement un personnel insuffisant. Cela s'explique pour diverses raisons. Je pense que la raison principale est que les personnes qui n'ont pas le gros bout du bâton n'ont rien à dire. Les contrats sont négociés entre le gouvernement fédéral et les provinces ou les municipalités. Les considérations financières semblent être l'élément principal.
    Les services de police sont coûteux. Pour de nombreuses municipalités, c'est le poste le plus important de leur budget; il est donc compréhensible qu'elles souhaitent contrôler le plus possible ces coûts. Cela s'est toutefois traduit par un manque chronique de personnel dans les détachements, ce qui a eu pour effet de laisser aux membres qui travaillent sur le terrain le soin d'assumer ce fardeau.
    En 2009, j'ai été embauché pour travailler à notre quartier général provincial en Colombie-Britannique. Le poste consistait à diriger l'unité qui s'occupait de l'affectation des ressources policières aux détachements situés dans la province. Un des objectifs était d'examiner chaque détachement de la province tous les cinq ans pour veiller à ce qu'ils disposent des ressources nécessaires à la prestation des services de première ligne. Avant mon arrivée, l'unité venait de terminer une étude qui montrait que le détachement de l'île de Vancouver manquait tellement de personnel qu'il aurait fallu lui affecter 26 membres de première ligne pour combler la lacune.
    L'unité des services au client devait comprendre deux sous-officiers chargés d'analyser les données, de préparer et présenter des conclusions et cinq fonctionnaires pour collecter et réunir les données des systèmes informatisés de gestion des dossiers. Un seul des cinq fonctionnaires a été embauché. Les autres postes ont été bloqués et les fonds réaffectés à un autre projet. Il est assez remarquable que l'unité chargée de veiller à ce que les effectifs des détachements soient adéquats manquait elle-même tellement de personnel qu'elle ne pouvait pas exécuter la mission qui lui était confiée. S'il avait eu une convention collective en vigueur, avec des dispositions exigeant des niveaux de dotation minimaux, il est peu probable qu'une telle situation aurait pu se produire.
    Merci. Voilà qui termine mes remarques. Je vais donner la parole à Pat Mehain de la Colombie-Britannique.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Mehain.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, bonjour.
     Je m'appelle Patrick Mehain. Je suis un dirigeant de la British Columbia Mounted Police Professional Association. J'ai participé aux activités de l'association pendant toute ma carrière qui a duré 18 ans. J'ai été le président de la B.C. MPPA pendant huit ans. J'ai également été membre de la direction de CPA et je suis un des membres fondateurs de la MPPAC. Je suis également un des déposants dans la contestation portée devant la Cour suprême.
    Je vous remercie de me donner la possibilité de vous communiquer les préoccupations que suscitent pour moi les graves lacunes du projet de loi C-7. Le gouvernement libéral est certes décidé à respecter l'arrêt de la Cour suprême, mais le projet de loi s'écarte du véritable esprit de la décision: l'absence d'une obligation fondamentale que l'on retrouve dans les documents relatifs aux négociations collectives dans d'autres organismes.
    Les restrictions en matière de négociation que l'on retrouve dans le projet de loi C-7 et dans la LRTFP actuelle sont plus sévères que celles que l'on retrouve dans les autres services de police au Canada. De nombreuses conventions collectives traitent des promotions, de l'équipement, des transferts, des conflits en milieu de travail, etc. Mes collègues de la MPPAC ont déjà abordé ces points, mais je vais parler des ressources et des soins de santé.
    Les ressources ont toujours posé un problème. Nos confrères et consœurs municipaux nous appellent toujours les « policiers Kmart » — nous faisons davantage avec moins. Si l'on compare les villes de Vancouver et de Surrey, on constate qu'il y a à Vancouver près de 1 340 policiers pour desservir 605 000 personnes, alors qu'à Surrey, il y a environ 800 policiers qui offrent leurs services à 500 000 personnes. Le niveau des ressources a un effet direct sur les congés des membres de la GRC, sur le niveau minimal des effectifs, sur les charges de travail et je dirais aussi sur la satisfaction au travail.
    Nos membres souffrent d'épuisement professionnel; cela touche leur santé, physique et mentale. À cause de maladies de longue durée, des postes demeurent vacants, les postes des détachements ne sont pas comblés et les unités sont obligées de fonctionner avec un personnel insuffisant. Le Conseil du Trésor veut transformer quelque 4 000 membres civils en fonctionnaires. Si cela se fait, cela compromettra encore les ressources dont dispose la GRC, puisque nos membres civils exercent des fonctions que les fonctionnaires ne peuvent exercer.
    Les régimes des accidents du travail et des soins de santé provinciaux diffèrent d'une province à l'autre. La GRC est un organisme unique qui exige que ces préoccupations soient réglées de façon uniforme. En C.-B., nous payons nos cotisations médicales de base alors que des membres d'autres divisions ne le font pas. Le Lower Mainland éprouve déjà de la difficulté à combler les postes vacants, mais les coûts supplémentaires associés aux changements apportés à nos prestations médicales ont aggravé la situation.
    Ce n'est pas, bien entendu, l'unique raison pour laquelle il est difficile de combler les postes dans le Lower Mainland, mais cela y contribue certainement: la modification des ordonnances, la réduction des prestations, l'intervention injustifiée des services de santé dans le traitement des membres, ainsi que les atteintes à la vie privée des membres de la GRC commises récemment par la haute direction de la GRC sont des faits alarmants et préoccupants. Il est regrettable que trop souvent nos membres subissent des blessures qui entraînent une invalidité à long terme. Comment les commissions des accidents de travail vont régler ce problème? Faudra-t-il bloquer un transfert en Colombie-Britannique parce que le membre concerné est réputé inadmissible par la commission des accidents de travail de la province ou le contraire? Se contenter de faire relever tous les membres de la GRC des mécanismes en place ne donnera pas de bons résultats.
    Depuis la décision de la Cour suprême du Canada, j'ai éprouvé des sentiments variés. La négociation collective est un des objectifs pour lequel j'ai lutté pendant 18 ans, mais le projet de loi C-7 laisse beaucoup à désirer. Sous sa forme actuelle, il ne fait pas grand-chose pour aménager une véritable négociation collective, qui est protégée par l'alinéa 2d) de la Charte des droits.
    Je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de vous communiquer les préoccupations que soulève le projet de loi C-7, mais si on ne lui apporte pas des changements importants, nous allons continuer à avoir des relations de travail difficiles et nous constaterons une augmentation des contestations judiciaires; la GRC, en tant qu'organisme, continuera à compromettre son efficacité opérationnelle ainsi que le moral de ses troupes.
    Merci.

  (1115)  

    Je vous remercie.
    Monsieur Dupuis et ensuite, monsieur Duggan.

[Français]

     Bonjour, monsieur le président, membres du Comité, mesdames et messieurs.
    Je suis le sergent d'état-major Paul Dupuis. Je suis membre de la GRC depuis 35 ans. J'oeuvre au sein des relations de travail de la GRC depuis 1993, à titre de représentant des membres. Je fais partie de l'Association des membres de la police montée du Québec depuis 1981, et j'ai été élu président de cette association en 2015.
    J'ai vécu des abus et j'ai été témoin d'abus de la part de gestionnaires de la GRC qui nécessitent un contrepoids. La protection contre les abus de pouvoir fait partie des conditions de travail des membres qui devront être régies par la négociation collective. J'ai le mandat de présenter le point de vue des membres de l'AMPMQ concernant le projet de loi C-7.
    Je vais d'abord vous offrir une vue d'ensemble.
    Pendant des décennies, les membres de la GRC ont été activement privés de leur droit à la liberté d'association, c'est-à dire du droit de se syndiquer et de négocier collectivement. La Cour suprême du Canada, dans l'affaire Association de la police montée de l’Ontario c. Canada, a statué que cette violation exigeait une mesure législative corrective. Le projet de loi C-7 crée un processus par lequel une association pourra obtenir le droit de négocier collectivement au nom des membres. Il prévoit aussi des dispositions régissant les négociations collectives. Toutefois, le projet de loi C-7 contient des lacunes à plusieurs égards.
    Je vais maintenant parler du droit à un processus de véritable négociation collective.
    La Cour suprême a décrit ce processus comme étant un processus « qui offre aux employés une liberté de choix et une indépendance suffisantes pour leur permettre de décider de leurs intérêts collectifs et de les défendre ». Elle a rejeté l'actuel régime « qui ne leur permet pas de définir et de faire valoir leurs préoccupations professionnelles ».
     Bien que le projet de loi C-7 fournisse un processus pour accréditer une association et pour avoir accès à un processus de négociation collective, il comporte des lacunes importantes, particulièrement en ce qui a trait aux restrictions sur le contenu de la négociation collective.
     Le projet de loi C-7 exclut de la négociation collective d'importants sujets de préoccupations en matière de travail pour les membres de la GRC et, par conséquent, ne permet pas aux membres de promouvoir leurs intérêts à l'abri de l'influence de la direction. Ces exclusions de la négociation collective touchent directement l'essentiel des préoccupations des membres à l'égard du travail. De plus, on exclut les questions qui font précisément l'objet d'abus de la part de la direction.
    Sur les plans de la santé et de la sécurité au travail, les techniques d'application des lois, y compris le matériel et les équipements de protection adéquats, sont extrêmement importantes pour les membres. Je rappelle les tragédies de Mayerthorpe et de Moncton. À la suite de ces tragédies, les enquêtes ont révélé le même manque d’équipement approprié et le même manque de communications, bien que ces deux tragédies soient survenues à neuf ans d'intervalle. La GRC a laissé tomber le public, les familles des membres et les membres eux-mêmes. Ce n’était pas la première fois qu’elle faillait à ses obligations en santé et sécurité.
    Abordons la question du harcèlement.
    Le harcèlement a toujours été, et demeure, un grave sujet de préoccupation au travail que la direction a été incapable de résoudre, ou réticente à le faire. Malgré les multiples études et rapports, le harcèlement est toujours aussi présent à la GRC. Par exemple, citons l’affaire Lebrasseur, les cas Delisle, Smith, Gosselin et Sulz, ainsi que deux recours collectifs en cours, plusieurs poursuites individuelles et de nombreuses plaintes d’abus à l’interne.
    Passons maintenant aux abus de la direction et à la nécessité d'un équilibre.
    Les tribunaux, incluant la Cour suprême, reconnaissent la longue histoire du recours au système disciplinaire et des pratiques déloyales utilisées par la GRC pour étouffer le mouvement syndical. D’ailleurs, j’ai été victime de l’utilisation du système de discipline de façon abusive par la GRC à cause de mes activités syndicales. J’ai été victime de représailles. La GRC a utilisé des procédures disciplinaires contre moi pendant 7 ans. Comme il a été établi que la cause disciplinaire contre moi était abusive de par sa lenteur et sa nature, le tribunal interne a déclaré un arrêt des procédures. En parallèle, j'ai aussi déposé des griefs. Dix ans plus tard, ces griefs ne sont toujours pas réglés.

  (1120)  

     Cette situation a eu un impact négatif sur ma carrière. En outre, les Canadiens ont perdu le bénéfice de mes compétences d'enquêteur en crimes financiers. Au cours de ma carrière, j'ai été témoin d'abus de la direction qui illustrent clairement la nécessité d'établir un équilibre.
    Les procédures disciplinaires ont été utilisées à maintes reprises pour sanctionner des membres qui avaient exercé leurs droits fondamentaux, y compris la liberté d'association et d'expression. Relativement à plusieurs décisions des tribunaux concernant mon collègue Gaétan Delisle, la GRC a exercé des représailles contre lui. Vous avez entendu jeudi dernier le témoignage de M. Merrifield dont la cause est toujours devant les tribunaux.
    Les rétrogradations, les congédiements, les transferts, les évaluations, les probations et les exigences de base sont tous des éléments de nos conditions de travail que les gestionnaires peuvent utiliser. Or ils le font de façon abusive pour se livrer à des représailles et à des abus d’autorité contre les membres qui font valoir leurs droits. Au cours des années où j'ai été représentant auprès des membres, j’ai vu toutes ces mesures prises contre des membres et les effets dévastateurs qu'elles avaient sur leur carrière. De plus, les rapports de Duxbury, Brown et Robichaud confirment ces abus.
    Aucune preuve crédible n’a jamais été présentée pour justifier l'exclusion de ces préoccupations de la négociation collective et démontrer que les services de police seraient compromis sans ces exclusions. Au contraire, l’inclusion dans les négociations collectives des préoccupations des membres à l’égard de ces questions et l'établissement d'un équilibre seraient plus susceptibles d'améliorer la qualité des services de police. La Cour suprême a déclaré ce qui suit au sujet de la négociation collective pour les membres de la GRC:
[.. ] il n’est pas établi que l’autorisation d’un véritable régime de négociation collective pour les membres de la GRC perturbera la stabilité de cette force policière ou influencera la perception du public quant à sa neutralité.

[...] Le gouvernement n’a produit aucun élément de preuve convaincant à cet égard. La recherche empirique tend plutôt à indiquer le contraire [...]
     Plus récemment, devant ce comité, les promoteurs du projet de loi C-7 ont omis de fournir un argument convaincant quant aux exclusions proposées à la négociation collective. Ils n'ont pas assumé leur responsabilité consistant à justifier la limitation des droits fondamentaux des membres de la GRC.
    J'aborde maintenant la partie de ma présentation où il est question de remédier au déséquilibre dans les relations de travail.
    La Cour suprême a reconnu que les lois et les règlements qui restreignent les sujets susceptibles de faire l’objet de négociation peuvent perturber l'équilibre nécessaire pour assurer la poursuite véritable des objectifs liés au travail.
    La Cour suprême a également reconnu une attitude hostile envers la syndicalisation au sein de la Gendarmerie, tant de la part de la direction de la GRC que des gouvernements qui se sont succédé, et ce, depuis longtemps.
    En excluant de la négociation collective les grands sujets qui préoccupent les membres de la GRC au travail, non seulement le projet de loi C-7 nie aux membres le droit à un véritable processus de négociation collective, mais il perpétue de surcroît le déséquilibre entre les membres et la direction en préservant le pouvoir absolu de cette dernière sur ces questions.
    Dans le passé, la direction n'a pas hésité à abuser du pouvoir absolu qu'elle exerçait sur les membres. Or le projet de loi C-7, en faisant entrave à la négociation collective et en limitant l’accès aux recours contre les abus de la direction, ne parvient pas à assurer que le déséquilibre actuel dans la relation d'emploi sera traité et corrigé adéquatement.
    Nous suggérons que tous les griefs des membres, même ceux qui ne sont pas régis par la convention collective, donnent accès à un arbitrage exécutoire.
    Pour ce qui est de nos membres civils, ils partagent une communauté d'intérêts avec les membres réguliers, mais sont exclus du projet de loi  C-7. On devrait prévoir de les inclure.
    Jeudi dernier, vous avez entendu les débats concernant la Loi sur l'indemnisation des agents de l'État. La réforme des services médicaux des membres de la GRC telle qu'elle est proposée aux articles 40 et 42 du projet de loi C-7 ne devrait pas faire partie de ce projet de loi. Elle devrait plutôt être négociée à la table de négociation.
    J'aborde maintenant la partie de ma présentation touchant ce qui doit être fait.

  (1125)  

    Nous vous demandons de retirer les exclusions de la négociation collective qui concernent des questions importantes liées au travail, soit les articles 238.19 et 238.22 proposés, comme cela a été précédemment mentionné, afin d'établir un véritable équilibre entre la direction de la GRC et ses membres.
    Nous vous demandons d'inclure les membres civils dans le projet de loi C-7 et de supprimer les articles 40 et 42 du projet de loi.
    Merci.
    Je suis prêt à répondre aux questions.
    Merci, monsieur Dupuis.
    Nous allons commencer par M. Erskine-Smith.
    Vous disposez de sept minutes pour des questions et des réponses.

[Traduction]

    Merci à tous pour vos témoignages.
    Ma première question concerne le tableau qui a été distribué au sujet de l'analyse comparative des conventions collectives existantes et des exclusions du projet de loi C-7. Vous pourriez peut-être nous les présenter, plus particulièrement celles qui concernent la santé et la sécurité. Je pense qu'elles touchent les techniques d'application de la loi, mais également, l'uniforme et l'équipement. Vous pourriez peut-être aussi nous parler des provinces et territoires où l'on ne retrouve pas ces exclusions.
    Oui, avec plaisir.
    Ce n'est pas nous, mais notre employeur qui a réparti les différents éléments que l'on retrouve dans le projet de loi C-7. Nous estimons que l'uniforme et l'équipement, ainsi que les techniques de contrôle et certains autres aspects, comme les normes minimales en matière de services de police, font tous partie de la sécurité des agents. Il y a donc ces trois éléments. Si vous examinez la comparaison que nous avons effectuée avec diverses conventions collectives, dont la plupart sont toujours en vigueur et dont certaines ont expiré, vous constaterez qu'elles montrent que ces éléments sont négociables.
    Cela répond à la question qu'a posée, je crois, M. Mendicino, jeudi au sujet des raisons pour lesquelles nous voulions nous comparer aux autres services de police. Est-ce que ces autres services de police peuvent négocier ces éléments?
    Si l'on prend plus particulièrement la question de la santé et de la sécurité, pourriez-vous nous présenter quelques provinces et territoires que nous devrions étudier et dans lesquels la santé et la sécurité sont des questions négociables?
    Premièrement, il y a les techniques de contrôle — je n'ai pas la version anglaise avec moi — dans la deuxième colonne. C'est la façon de mettre en œuvre les activités de police opérationnelles. La dernière colonne concerne l'équipement et l'uniforme ainsi que les compétences de base. Un policier a besoin de ces éléments pour faire son travail correctement et disposer de l'équipement approprié.
    Nous venons de recevoir le tableau, mais je remarque que, dans ce tableau, si nous prenons en particulier les techniques d'application des lois, ces techniques ne sont pas en fait exclues ou — comment dirais-je? Le temps de disponibilité et les patrouilles à deux sont, si l'on prend simplement Calgary comme exemple, des questions très précises qui touchent la sécurité au travail. Si nous proposions un amendement à l'exclusion concernant les techniques d'application des lois, quels sont les aspects que nous devrions, d'après vous, examiner? Devrions-nous étudier le temps de disponibilité, les patrouilles à deux...? Quels sont les éléments précis que nous devrions examiner?

  (1130)  

     En réalité, le projet de loi C-7 limite tous ces éléments. Je pense qu'il faudrait supprimer toutes ces restrictions et laisser aux membres de la GRC le soin de décider quelles sont celles qui sont importantes ou non à la table des négociations.
    Au minimum, si les techniques d'application des lois, l'uniforme et l'équipement demeuraient des exclusions, faudrait-il prévoir une disposition énonçant qu'il y a lieu de prendre en compte les considérations touchant la santé et la sécurité?
    Si vous prenez mon exposé, je dis pour l'essentiel que nos conditions de travail comprennent trois éléments. Il y a la rémunération et les avantages sociaux, mais il y a également les éléments qui touchent la sécurité des agents, et ensuite, les éléments qui nous protègent contre les abus commis par les autorités, ce qui veut dire un milieu de travail approprié. Ces aspects devraient être négociés.
    Très bien. Je pense simplement que vous trouvez acceptable le fait que les techniques d'application des lois, l'uniforme et l'équipement soient des sujets exclus, sauf dans la mesure où ils touchent la santé et la sécurité au travail.
    Non, je conteste vivement que ces sujets soient exclus. Il ne devrait y avoir aucune restriction.
    C'est parce que dans votre exposé vous avez limité vos préoccupations à celles qui touchent la santé et la sécurité au travail. J'essaie tout simplement de comprendre pourquoi nous devrions nous inquiéter de ces exclusions. Si nous disions que les techniques d'application des lois, l'uniforme et l'équipement étaient exclus sauf dans la mesure où ils touchent la santé et la sécurité au travail, cela ne répondrait-il pas à votre préoccupation?
    Non, parce que la formulation du projet de loi C-7 reprend celle du projet de loi C-43 de juin 2010, même avant que la Cour suprême ait rendu sa décision. Je pense que ceci n'est pas une liste et c'est ce que dit également l'AMPMQ... Cette liste ne reflète pas les aspects qui sont importants pour nos membres. Il ne devrait y avoir aucune restriction.
    Passons aux évaluations, aux stages, congédiements et rétrogradations. Vous notez dans votre mémoire que vous vous opposez à ces exclusions parce que la direction, pour reprendre vos termes, peut et effectivement... Vous dites « Ce sont tous des éléments de nos conditions de travail que les gestionnaires peuvent utiliser et utilisent de façon abusive... contre les membres qui font valoir leurs droits ».
    Ces exclusions seraient-elles acceptables si elles ne s'appliquaient pas aux comportements de mauvaise foi? Si la direction agissait de mauvaise foi, alors c'est une question qui pourrait faire l'objet d'un grief, mais autrement elle ne serait pas négociable.

[Français]

     J'aimerais dire quelque chose pour que vous puissiez comprendre un peu mieux.
    Notre objectif est de faire en sorte que tout soit sur la table et que nous ayons l'occasion de négocier sur tous ces sujets. Il ne faut pas oublier que le gouvernement a un double rôle de législateur et d'employeur. Il ne doit pas abuser de son rôle de législateur à des fins de prévention ou de facilitation ni pour s'avantager dans son rôle d'employeur. Le rôle de l'opposition est non seulement de présenter des idéologies, mais également de veiller aux abus que pourrait faire le gouvernement dans son double rôle.
    Comme la Cour suprême l'a décrit, nous voulons que tout ce qui touche le milieu de travail des membres soit ouvert à la négociation. Mettre différentes restrictions très vagues dans des petites boîtes, comme le fait le projet de loi C-7, ne fonctionne pas. On va toujours revenir et dire que si on prend ceci avec cela, on ne pourra pas en parler, alors que le but de la négociation collective est qu'on puisse établir un équilibre entre les deux parties et parler de ces sujets.

[Traduction]

    Il me paraît bon de vous dire que le comité parlementaire ne fait pas partie du gouvernement et que nous allons assumer nos responsabilités de parlementaires, quel que soit le côté de la table où nous siégeons, très sérieusement.
    Merci.
    Monsieur O'Toole.
    Merci, monsieur le président et merci aux témoins qui sont intervenus aujourd'hui et à ceux qui ont témoigné au cours de notre séance précédente et qui se trouvent ici en arrière de la salle pour observer ce qui se passe.
    Je vais commencer par faire un commentaire et je passerai ensuite à quelque chose qui me paraît important. Je respecte bien sûr le service que fournissent toutes les personnes qui sont en uniforme. J'ai porté l'uniforme des Forces armées canadiennes. Jim à côté de moi, mon collègue, a servi plus de 34 ans dans la GRC, de sorte que nous avons beaucoup de respect pour l'uniforme. Je pense qu'avec les commentaires qu'ont fournis les témoins précédents et vos membres, nous allons faire des progrès sur les articles 40 et 42 du projet de loi, en particulier si l'on pense à la situation qui règne en Ontario, en Alberta et au Manitoba, où il est présumé que le lieu de travail des agents d'application de la loi peut être à l'origine de TSPT.
    Cette norme devrait s'appliquer à l'ensemble du pays et non pas aux seules provinces qui ont adopté cette présomption. Il est paradoxal que le comité ait reporté son étude sur le TSPT chez les premiers intervenants pour étudier le projet de loi C-7. Je pense qu'il n'y a rien qui fasse mieux ressortir le défi que posent les articles 40 et 42 du projet de loi que la différence qui existe entre les provinces dans le domaine des blessures causées par le stress opérationnel.
    Je pense que je vais commencer par m'adresser à M. McKenna.
    Vous avez porté l'uniforme pendant plus de 30 ans. Lorsque vous étiez au dépôt, ce qui ressemblait à un camp d'entraînement pour moi, il y a des camarades qui sont devenus de grands amis. Est-ce qu'il y a des amis que vous vous êtes faits au dépôt qui se sont rendus au rang d'inspecteur ou au-dessus?

  (1135)  

    Quelques-uns. Je peux penser à trois d'entre eux.
    Est-ce que les autres témoins aimeraient aussi faire une observation? Parmi les membres de votre équipe au dépôt, est-ce qu'il y en a qui se sont rendus à la haute direction?
    Monsieur Mehain, vous êtes trop jeune, je pense, pour que cela se soit déjà produit.
    M. Dupuis?

[Français]

     Actuellement, je suis le seul de ma troupe qui n'est pas officier. Trois membres de ma troupe sont des surintendants ou des surintendants principaux. Nous sommes les quatre membres qui restent.

[Traduction]

    Donc, vous avez trois bons amis qui ont atteint ces grades.
    Je mentionne ceci parce que ce n'est pas un environnement de gestion habituel. La direction dont vous parlez, le niveau des inspecteurs et au-dessus, qui font partie en général de la direction, porte également l'uniforme. Malheureusement, les frustrations qu'ont ressenties certaines personnes à cause de la direction au cours des années ont fait qu'elles parlent maintenant de la direction comme étant hautaine et arbitraire. Mais je pense que vous savez tous qu'il y a des hommes et des femmes qui portent l'uniforme et qui prennent des décisions concernant l'équipement, les normes de formation, la dotation en personnel et qui font partie tout comme vous de la première ligne de défense.
    En tant qu'ancien militaire, il me semble approprié que, dans une organisation paramilitaire où il existe une chaîne de commandement, il y ait certaines exclusions, parce que vous avez confiance dans vos camarades. Ça ne veut pas dire que tout est parfait, mais cela indique que la nature paramilitaire de cet organisme appelle certaines exclusions.
    Je vais vous laisser un peu de temps pour présenter des commentaires et me dire si cela est justifié ou non. J'entends des gens qui disent qu'ils sont traités comme des fonctionnaires par la LRTFP. Eh bien, c'est sur cet aspect que portait cette affaire judiciaire, l'exclusion de la LRTFP.
    Pourrais-je faire un commentaire à ce sujet.
    Il y a le rapport Duxbury, le rapport Brown, et le rapport Robichaud de la Division C. Tous ces rapports mentionnent qu'il existe une dichotomie au sein de la GRC et que les officiers ont un point de vue différent sur ce qui se passe vraiment au sein de la GRC.

[Français]

    Je veux commenter le rapport Robichaud.
    M. Robichaud est docteur en communications à l'Université de Montréal. Il a interviewé à peu près 600 sous-officiers, ce qui lui a permis de se faire une idée de ce qu'est le cadre officier. Je vous cite ici une seule phrase de son rapport: « [...] c'est incroyable, c'est du monde intelligent quand même, mais ils ne comprennent pas la réalité, y'a une distance entre la réalité et leur réalité. »
    Ce commentaire concernait les officiers de la Division C à cette époque.

  (1140)  

[Traduction]

    Avant le rapport Robichaud, est-ce qu'un d'entre vous a pris en compte la nature paramilitaire de l'organisme, ce qui a, bien sûr, des conséquences assez évidentes...? Supposons qu'il s'agisse d'un milieu de travail habituel et que je ne souhaite pas une affectation. Les affectations, les transferts — est-ce que tout cela devrait faire l'objet d'une négociation collective ou de griefs? Je ne pense pas que l'on pourrait avoir une structure paramilitaire comportant une chaîne de commandement, si tout était matière à négociation. Avez-vous des commentaires sur ce point?
    J'insiste sur ce point parce que j'estime que l'opposition a fait quelques progrès sur les articles 40 et 42 du projet de loi, mais je pense personnellement qu'il devrait y avoir quelques exclusions, en tant qu'ancien militaire et en tant qu'avocat, compte tenu également du fait que la décision de la Cour le permet. Le problème que soulevait le programme de relations de travail était qu'il n'était pas suffisamment indépendant de la direction. Je pense que les frustrations que ressentent bon nombre d'entre vous, puisque vous avez été les premiers défenseurs des membres de la GRC pour les associations, était cette réticence institutionnelle. Cela ne sera pas changé.
    Avez-vous d'autres commentaires sur le fait que le caractère paramilitaire de l'organisme peut entraîner certaines exclusions nécessaires, compte tenu de sa structure?
    Oui. Permettez-moi de vous dire que j'ai représenté des membres de la GRC pendant plus de 30 ans et que j'ai défendu des douzaines, sinon des centaines, de dossiers. J'ai plaidé l'affaire Delisle et l'affaire de la MPAO. L'affaire de la MPAO ne portait pas sur l'exclusion de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Elle portait sur un sujet, le fait qu'on empêchait les membres de la GRC de se syndiquer et d'avoir un régime de négociation collective. L'exclusion n'était qu'un simple mécanisme. C'est là une décision parmi quelques autres dans laquelle la Cour suprême a reconnu que le but du projet de loi était de refuser la syndicalisation et la négociation collective.
    Pour ce qui est de la nature paramilitaire de la GRC, c'est une vieille histoire. Il est possible que cela ait été utile à l'époque de la North West Mounted Police, du commerce du whisky et ce genre de chose, mais toutes les preuves qui ont été apportées devant la Cour suprême établissent que la GRC est un service de police comme les autres. D'une façon générale, il remplit le même genre de rôle.
    Ce qui pose problème au sujet des exclusions c'est qu'elles empêchent la GRC elle-même de s'exprimer, ainsi que les gens qui sont confrontés au rôle de la GRC, la voix des membres qui constituent ce que vous appelez « la première ligne de défense » qui peuvent informer la direction et devraient en fin de compte informer également votre comité, et l'assemblée législative, sur les questions de santé et de sécurité. J'aimerais retourner la question et vous demander: « Qu'est-ce qui justifie d'exclure ce genre de voix? »
    Merci, monsieur Duggan. Je suis désolé, mais je dois vous interrompre.
    Monsieur Blaikie.
    Merci à vous d'être venus et d'avoir témoigné.
    Une partie du problème, et je pense que je vais simplement y faire allusion parce que cela fait partie de la conversation que nous avons l'heure actuelle, consiste à savoir si la Cour suprême a ouvert la possibilité d'aller au-delà de cette réticence institutionnelle à l'endroit de la négociation collective, mais il ne s'agit simplement d'accepter la décision de la Cour. Je pense que le projet de loi C-7 fait courir le risque que cette réticence institutionnelle se traduise par une loi, ce qui rendra plus difficile d'avoir un semblant de négociation, ou une négociation portant simplement sur la rémunération et les avantages sociaux, alors que les préoccupations des membres vont manifestement bien au-delà que la rémunération et les avantages sociaux. Cela ne respecte pas vraiment l'esprit de la décision et je crois que nous devons nous demander si le projet de loi C-7 ne va pas plutôt enfreindre le droit des membres de la GRC de soulever certaines questions touchant leur milieu de travail, compte tenu de la façon dont le projet de loi est formulé à l'heure actuelle.
    Je n'ai pas la crédibilité que donne le fait d'avoir porté l'uniforme, mais, lorsque j'entends des commentaires au sujet du fait qu'on a partagé l'uniforme et que, par conséquent, il faut faire confiance à la direction qui va nécessairement agir de façon équitable pour les autres camarades qui sont en uniforme, cela va des deux côtés. Je pense qu'il faut également que la direction qui a porté cet uniforme fasse confiance aux membres qui siègent à la table de négociation en sachant qu'ils vont présenter des propositions raisonnables, respectueuses de l'intérêt de l'organisation, tout autant que de leur propre intérêt comme employé. Je pense que l'autre côté de cette confiance est l'aspect qui manque au projet de loi C-7. Il comporte plusieurs niveaux de protection pour la direction et très peu pour les employés de la GRC. Ce n'est peut-être pas une coïncidence si les employés de la GRC n'ont guère été consultés avant la présentation de ce projet de loi.
    Je pense que le tableau que vous avez présenté aujourd'hui est vraiment utile. C'était l'élément de la conversation qui a manqué jusqu'ici. J'aimerais mieux comprendre les véritables enjeux de ces exclusions, mais je me demande si vous avez un exemple, disons pour ce qui est des techniques d'application des lois. Il y a dans ce tableau des exemples qui indiquent que les techniques d'application de la loi ont fait l'objet de discussions et d'ententes au cours de négociations. Savez-vous si les normes en matière d'application de la loi appliquées dans ces provinces et territoires sont inférieures à ce qui serait un niveau acceptable, ou si elles ont suscité de la zizanie ou désorganisé les services de police lorsque ces choses ont été abordées à la table de négociation? Quelles ont été les conséquences pour ces services de police? Est-ce que ces services de police n'ont pu remplir leur rôle parce que ces aspects avaient été discutés à la table de négociation?

  (1145)  

    Notre recherche, et plus que la recherche... Les membres de la GRC travaillent avec tous ces autres services de police. C'est tout à fait le contraire. Si on examine soigneusement l'affaire MPAO, on constate que, lorsque le point de vue des membres de la GRC est pris en compte, il est moins probable que les décisions causent des frustrations pour eux. Cette consultation permet également d'améliorer les services de police parce que les membres savent que leurs droits sont respectés, qu'on les écoute, et qu'ils peuvent donc se concentrer sur la prestation des meilleurs services de police possible. Cela est également reconnu dans l'arrêt de la Cour suprême.
    Si cela est vrai pour ce qui est de la discussion des techniques d'application de la loi à la table de négociation, est-ce que cela vaut également lorsqu'il y a eu des discussions au sujet de, disons, des stages à la table de négociation? Y a-t-il des services de police qui ont été par la suite incapables d'offrir les services prévus ou est-ce que le fait que les employés aient soulevé ces questions à la table de négociation a été à l'origine de déchirements internes ou de mauvaise gestion, d'après ce que vous savez?

[Français]

     Oui. Il y a quelques années, une pratique au Québec permettait d'avoir recours à des policiers temporaires. Certaines villes voulaient qu'il y ait une convention collective ou un régime salarial distinct pour les policiers temporaires, comparativement aux policiers permanents. Cela laissait place à une clause de droit acquis. Selon la date où l'on était engagé, on n'avait pas le même salaire qu'un autre ayant été engagé deux mois avant, par exemple. Des gens se sont opposés à cela. Cela a même fait partie d'un recours collectif contre le syndicat et contre la ville.
    Je voulais simplement vous donner une idée de la situation. On parle de normes minimales. Les villes avaient beaucoup recours à des policiers temporaires.

[Traduction]

    Je pense que cette question s'adresse à moi.
    Vraiment?
    Oui.
    Voulez-vous en garder un peu pour plus tard?
    Allez-vous vraiment me le permettre? Cela ne m'ennuie jamais de parler en dernier.
    Je suis toujours très généreux.
    Nous allons maintenant passer à M. Di lorio qui va poser ses questions.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, je vous remercie de vos présentations et des échanges informels que nous avons eus avant; c'est extrêmement utile à notre comité.
    Vous nous avez sensibilisés à certains problèmes, dont nous avions connaissance en partie. Vous étiez présents la semaine dernière quand nous avons discuté des articles 40 et 42 du projet de loi C-7. Nous avons fait preuve d'ouverture à cet égard. Vos commentaires sont grandement appréciés.
    Monsieur Dupuis, je voudrais parler des articles 40 et 42.
    L'article 42 contient un élément corollaire. Vous avez eu l'occasion de faire ce travail, de participer à l'organisation et d'avoir été sensibilisé aux problèmes de relations de travail. On nous a dit que certains agents frontaliers et agents correctionnels travaillent dans des villes limitrophes. Ils peuvent travailler tantôt dans une province, tantôt dans une autre, de sorte qu'ils passent d'un régime à un autre.
    Monsieur Dupuis, pourriez-vous nous dire pourquoi le problème est particulier quand il s'agit de la Gendarmerie royale du Canada? Sentez-vous bien à l'aise d'utiliser des exemples.

  (1150)  

    Cela tombe bien que vous me posiez cette question, parce que j'ai fait partie du comité national de santé et sécurité avec mon collègue M. Brian Sauvé, qui a témoigné jeudi dernier et qui est ici aujourd'hui. Nous avons justement discuté de santé et d'autres choses de ce genre. À un moment donné, la GRC voulait se départir des services de santé de base. Avant cette recherche, les membres étaient traités de façon égale partout au pays et ils recevaient les mêmes services. On ne faisait pas nécessairement de distinction entre un service de base, un service supplémentaire et un service relié au travail. Lorsqu'il y a eu des compressions budgétaires, on a commencé à...
     Je suis désolé de vous interrompre, monsieur Dupuis. J'apprécie ce que vous dites, mais le temps est compté.
    Pouvez-vous nous dire pourquoi votre situation est différente de celle des agents correctionnels et des agents frontaliers, qui rendent des services très importants à la nation et qui le font aussi au péril de leur vie? Pourquoi la situation à la Gendarmerie royale du Canada ferait-elle en sorte qu'ils auraient un traitement différent? J'aimerais connaître votre opinion là-dessus.
    La réponse courte est que ces gens sont presque tous engagés localement et qu'ils travaillent au même endroit où ils ont été engagés.
    Nous, les membres de la GRC, sommes transférés d'une province ou d'un territoire à l'autre, et même à l'extérieur du pays, et les services de santé ne sont pas égaux dans les différents territoires ou provinces. Les provinces ou les territoires n'ont pas affaire aux problèmes particuliers qui existent dans le monde policier, par exemple le trouble de stress post-traumatique ou le TSO, que vous êtes justement en train d'étudier. Ces problèmes sont particulièrement prédominants dans le milieu policier. Or, dans les provinces où la GRC est le seul corps policier, les services de santé n'ont pas l'occasion de traiter de tels cas.
    Tout comme on l'a fait jeudi, nous demandons de négocier les services de santé à la table de négociation pour établir quels seront les barèmes utilisés, et que ceux-ci s'appliquent à tous les membres de la GRC. Nous nous faisons transférer d'endroit aux trois à cinq ans environ. Nous sommes appelés à changer de province de façon régulière.
    Il y a un autre volet.
    Les policiers, les forces de l'ordre, sont les seules personnes et les seuls citoyens de notre pays qui, dans leur travail, sont autorisés à utiliser la force. Cela donne un caractère distinctif à leur travail. Je ne peux pas utiliser la force, mais vous, dans l'exercice de vos fonctions, vous êtes autorisés à le faire.
    J'aimerais souligner que nous sommes aussi payés pour aller vers le danger, contrairement aux autres citoyens, qui courent et qui s'éloignent du danger.
    Dans ce cas, on pourrait aussi parler des pompiers. C'est pour cette raison que j'ai circonscrit le travail que vous faites à cette particularité. Les pompiers n'ont pas le droit d'utiliser la force physique contre une autre personne. Dans ce contexte, je comprends le caractère distinctif du policier.
    Vous avez mentionné quelque chose de très important, à savoir qu'on exclut les membres civils. Pourquoi cette exclusion vous pose-t-elle problème, compte tenu du caractère distinctif de la Gendarmerie royale du Canada? J'aimerais que vous illustriez ce caractère distinctif. En d'autres mots, faites ressortir le caractère distinctif, plus particulièrement à l'égard de ce commentaire que vous avez fait.
    Du point de vue de la santé au travail, étant donné que nous changeons de province, notre situation est différente de celle des policiers de la Police provinciale de l'Ontario, par exemple. Par contre, la PPO fait exactement le même travail que la GRC. Les policiers de la PPO doivent faire du travail policier dans des endroits plus loin des services, entre autres choses. Nous sommes distinctifs parce que nous nous faisons transférer souvent d'une province à l'autre, mais nous ne sommes pas vraiment différents de nos confrères de la PPO.
    Pour ce qui est des membres civils, ils ont été engagés en vertu de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Ils sont régis par le code de déontologie et les mêmes règles de conduite que les membres réguliers. La seule différence est que la grande majorité d'entre eux ne sont pas des agents de la paix et ils n'ont pas à effectuer des arrestations ou à utiliser la force nécessaire contre un contrevenant.

  (1155)  

    Je fais le lien avec ce que mon collègue M. O'Toole indiquait. Le point de départ est un litige qui a été porté jusqu'à la Cour suprême, dans lequel on faisait valoir le fait qu'il y avait l'exclusion du régime de négociation collective. Ces personnes auront maintenant accès à un régime de négociation collective.
    Parlez-vous des membres réguliers?
    Je parle des membres civils. Les dispositions ont été invalidées et il n'y a donc plus d'exclusion. Ils seront assujettis à d'autres dispositions que celles auxquelles vous l'êtes.
    Le projet de loi C-42 aura pour effet de donner au Conseil du Trésor le pouvoir de les intégrer, à partir d'une date ultérieure, à la fonction publique. C'est cet élément qui fait que le projet de loi C-7 contient des dispositions particulières par rapport aux membres civils. On ne connaît d'ailleurs pas l'intention du gouvernement concernant nos membres civils. Selon nous, c'est quelque chose qui doit aussi être discuté à la table de négociation.
     Merci, monsieur Dupuis.

[Traduction]

    Nous allons maintenant poursuivre avec M. Eglinski pendant cinq minutes.
    Je crois que nous allons peut-être pouvoir en avoir deux de plus parce que nous avons commencé un peu en retard.
    Je vais parler un peu rapidement.
    La GRC est une organisation unique. Je dois dire que je ne suis pas d'accord avec un des témoins. Je pense encore que c'est une organisation paramilitaire et que les membres de cet organisme en reconnaissent la structure hiérarchique et que cela est très important pour cette organisation. La plupart des membres qui se joignent à la GRC le font parce que la GRC est unique parmi les autres services de police du Canada et du monde entier. Elle offre la possibilité de fournir des services de police dans de grandes communautés dans le cadre d'un service de police municipal, de se spécialiser dans des enquêtes spéciales et les services d'identification, de devenir pilote, de faire du maintien de la paix international, et de travailler dans des petites communautés rurales isolées.
    Il y a donc une grande diversité et je ne pense pas que l'on puisse regrouper toutes ces activités parce qu'elles sont différentes et c'est vous qui décidez de vous spécialiser au sein de cette organisation, que ce soit dans le service général de police ou les enquêtes spéciales. Vous faites donc des choix, vous faites carrière et vous pouvez progresser au sein de cette structure hiérarchique en passant de gendarme à surintendant de police en chef à commissaire, si c'est ce que vous voulez et il y en a beaucoup qui ont suivi ce chemin.
    Brendan, j'ai servi pendant 34 ans dans la GRC et lorsque je l'ai quittée, j'ai servi encore huit ans comme agent de recrutement en Colombie-Britannique. Je suis maintenant député et il y a huit ou neuf détachements dans ma région et je vois ces gars-là assez régulièrement. Ils me connaissent tous et j'entretiens des relations assez étroites avec eux. Je ne pense pas que les gens avec qui je parle dans cette région rurale de l'Alberta ou même les membres à qui je parle sur la Colline veulent vraiment avoir un syndicat. Je ne pense pas que cet aspect soit très populaire chez eux. Je crois que c'est un mouvement qui n'est appuyé que par une partie des membres de la GRC.
    A-t-on obtenu des statistiques à ce sujet au sein de l'organisme? Que pensez-vous du fait que les membres de la GRC doivent se syndiquer parce que les tribunaux leur ont dit de le faire? Quel est votre sentiment général au sujet de l'image globale de la GRC?
    Merci.
    Je pense qu'une partie de tout cela vient du fait que cette organisation a déployé des efforts importants et constants pour limiter les renseignements transmis à ses membres. Ce que vous mentionnez — un manque d'intérêt pour la syndicalisation — je crois que c'est une idée qui est appuyée par les cadres intermédiaires, les sous-officiers supérieurs qui ont progressé, qui ont commencé en même temps que moi ou peut-être avant, et qui pensent qu'il est déloyal de vouloir syndicaliser cette organisation.
    Lorsque je me suis impliqué dans les activités de l'association et dans la fondation de l'association en Colombie-Britannique, on m'a considéré comme un radical, presque un communiste, et on disait que j'étais contre la direction et que je voulais détruire l'organisation. À cette époque, on décrivait régulièrement un scénario alarmiste selon lequel ce serait le chaos si les membres de la GRC obtenaient la parité avec les autres services de police canadiens qui ont leur mot à dire sur leur rémunération, sur leur pension de retraite, sur leurs avantages sociaux et sur leurs conditions de travail. Bien sûr, c'est beaucoup de palabres.
    Je pense que la grande majorité des membres qui travaillent dans de petits détachements se retrouvent dans un environnement où le fait de ne pas être d'accord avec le sous-officier responsable ou de s'opposer à lui fait courir le risque — que ce risque soit réel ou non — d'être, si c'est un petit détachement qui comprend de cinq à six ou dix personnes, d'être mis à l'écart et de ne pas obtenir son congé au moment où on le souhaite, ou ne pas pouvoir suivre des stages ou ne plus avoir la faveur de la personne qui a un pouvoir direct sur votre vie quotidienne. C'est peut-être une partie de l'explication.
    Je crois qu'après la publication de l'arrêt de la Cour suprême en janvier de l'année dernière, le bureau du commissaire et la haute direction ont déclaré que les membres seraient tenus au courant et qu'ils recevraient beaucoup d'information. Pratiquement aucune information n'a été fournie à qui que ce soit, si ce n'est qu'il était interdit d'utiliser des systèmes d'information, de tenir des réunions sur les lieux de travail sur tout ce qui concerne la syndicalisation.
    Cette organisation compte tellement de membres qu'il est impossible de les réunir tous dans la même salle. C'est une des raisons pour laquelle il a fallu autant de temps pour en arriver au point où nous en sommes. Dans les villes, n'importe quel service de police peut réunir la plus grande partie de ses membres, alors que la police montée est dispersée dans l'ensemble du pays. Comment serait-il possible de rassembler tout le monde dans un même endroit et si cela même pouvait se faire, qui s'occuperait alors du pays; c'est impossible. Vous pouvez seulement constituer petits groupes.

  (1200)  

    Merci, monsieur McKenna.
    La composition diversifiée de la GRC me plaît beaucoup. C'est extraordinaire.
    Monsieur Spengemann, vous avez cinq minutes. Ce sera le dernier tour.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur, de votre participation à ce comité ainsi que des services que vous rendez à la nation.

[Traduction]

    Très brièvement, je tiens d'abord à vous rassurer tous: tout le Comité prend très au sérieux le bien-être des premiers intervenants. Les membres libéraux du Comité ont de sérieuses préoccupations au sujet des articles 40 et 42 et ils ont l'impression que ces dispositions sont peut-être prématurées à ce stade du processus législatif.
    Parce qu'il n'y a pas beaucoup de temps, je pose ma question à M. McKenna seulement. Quel est le nombre de membres de votre association en ce moment?
    Je voudrais vous donner ce chiffre, mais je ne l'ai pas.
    Approximativement? Un ordre de grandeur?
    Je ne saurais vous dire. Je n'ai pas ce renseignement. Même pas quelque chose d'approchant.
    Avez-vous une idée du pourcentage de femmes chez vos membres? Encore une fois de façon approximative.
    Je n'ai pas cette information sous les yeux. Je pourrais vous la communiquer plus tard, aujourd'hui même.
    Comment gardez-vous le contact avec vos membres et comment leur demandez-vous leur opinion sur des initiatives comme le projet de loi C-7?
    Une grande partie du travail s'est fait au moyen du site Web de l'ACPMP, et nous avons bien entendu l'adresse courriel personnelle des membres. Tous ceux qui se sont joints au mouvement de l'association, nous avons leur adresse personnelle et nous envoyons constamment des courriels.
    Diriez-vous que vous avez reçu des observations assez représentatives de vos membres des points de vue de la diversité, du sexe, de la région? Ou avez-vous fait l'analyse...
    Nous n'avons pas fait cette analyse.
    Très bien. Diriez-vous que, actuellement, la force policière qu'est la GRC assure la parité salariale?
    La parité salariale entre les sexes dans l'effectif?
    Oui.
    Probablement, oui.
    Est-ce la politique de la GRC?
    Je crois que c'est la politique du gouvernement fédéral, celle du Conseil du Trésor.
    Vos propres mécanismes vous permettent de vous assurer que c'est bien le cas. Vous êtes convaincu que la situation est à peu près ce qu'elle doit être?
    Les politiques du Conseil du Trésor ne font aucune discrimination. Les décisions ne se prennent pas dans un sens ou dans l'autre selon la personne en cause. C'est la même chose pour tout le monde. C'est le poste qui compte, et non le sexe du titulaire.
    Merci.
    Voici l'autre question. Avez-vous une idée de ce que pensent les femmes membres de votre association — je vais toucher un sujet très précis pour aborder la question du harcèlement — du harcèlement entre employés, non pas entre la direction et les syndiqués, mais plutôt entre collègues? Les femmes membres de votre association vous ont-elles fait part de leur opinion sur les meilleurs moyens de s'attaquer à ce problème?
    Les dirigeants de l'association ont reçu des réactions à ce sujet, mais je n'ai pas eu part à ces échanges.
    Pourriez-vous nous parler de toute analyse des opinions que vous ferez à court terme ou que votre organisation aurait déjà faite?

  (1205)  

    C'est un sujet que nous allons devoir examiner, mais je ne pense pas que nous l'ayons déjà fait.
    C'est tout pour moi, monsieur le président.
    D'accord. Vous respectez très bien les règles, aujourd'hui.
    Merci beaucoup. Comme toujours, je vous remercie des services que vous assurez et du temps que vous avez passé avec nous et notre comité.
    La séance est suspendue pour que le prochain groupe de témoins puisse s'installer. Il suffira de deux minutes. Merci.

  (1205)  


  (1210)  

    Nous allons reprendre avec le deuxième groupe de témoins. Cela nous changera, car nous quittons la GRC et les parties directement touchées par le projet de loi C-7.
    Nous avons invité le Syndicat des Métallos, ainsi que Paul Champ, avocat dans le domaine du travail et de l'emploi, à nous livrer leurs réflexions sur le projet de loi qui, pour la première fois, permettra aux membres de la GRC de se syndiquer s'ils le souhaitent.
    Je propose que nous commencions par M. Rowlinson, qui aura 10 minutes. Il sera suivi par M. Champ, qui aura aussi 10 minutes. Puis, nous poursuivrons, avec les questions.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je m'appelle Mark Rowlinson, et je suis adjoint au directeur général, pour le Canada, du Syndicat des Métallos. J'exerce le droit du travail auprès de ce syndicat depuis une vingtaine d'années.
    Fort de 225 000 membres, le Syndicat des Métallos est un des plus importants syndicats industriels au Canada. Ses membres canadiens font partie d'un syndicat international dont l'effectif rassemble plus de 800 000 membres en Amérique du Nord. Nous représentons un effectif diversifié dans presque tous les éléments du secteur privé ainsi que des milliers de travailleurs du secteur public dans des hôpitaux, des maisons de soins infirmiers et des universités. Nous militons également pour plus de 100 000 membres retraités du syndicat et leurs familles au Canada.
    Bien que bon nombre de ses membres relèvent de régimes provinciaux de droit du travail, le Syndicat des Métallos représente quelque 25 000 membres de compétence fédérale, notamment des travailleurs du transport, de la sécurité aéroportuaire, de l'énergie et des télécommunications.
     La législation du travail dans tous les territoires et provinces au Canada est importante pour notre syndicat, comme pour toutes les organisations syndicales de notre pays. De plus, nous nous opposons à toute loi qui entrave les droits fondamentaux des travailleurs, notamment le droit de se joindre à des syndicats et de négocier collectivement.
    Nous sommes très reconnaissants de pouvoir comparaître aujourd'hui, car nous nous inquiétons de la façon dont le gouvernement du Canada réagit à l'arrêt important que la Cour suprême du Canada a rendu il y a un peu plus d'un an dans l'affaire APMO.
    L'arrêt APMO, qui s'inscrit dans une série de jugements rendus par la plus haute cour du Canada, clarifie la portée de la liberté d'association et des droits de négociation collective que confère la Charte des droits et libertés. Le Syndicat des Métallos était un plaignant dans la cause de la Fédération du travail de la Saskatchewan dont l'issue a été connue une semaine après arrêt APMO, et il s'intéresse depuis longtemps à l'interaction entre la Charte et les régimes de droit du travail au Canada.
    Comme le Comité le sait sans doute, dans l'affaire APMO, la Cour suprême a soutenu que la liberté d'association protège le droit de se joindre à des associations et d'en former, de le faire pour affirmer des droits constitutionnels, et le droit de se joindre à d'autres pour affronter le pouvoir et la force des employeurs à armes un peu plus égales.
    Si je puis me permettre une pause, je vais vous lire un extrait de l'arrêt dans lequel la Cour suprême fait remarquer, et j'y reviendrai:
Les employés, agissant individuellement, ne disposent habituellement pas du pouvoir de négocier et de poursuivre des objectifs relatifs à leurs conditions de travail avec un employeur plus puissant. Seul le regroupement en association en vue de négocier collectivement — qui augmente ainsi leur pouvoir de négociation — permet à des employés de poursuivre véritablement leurs objectifs relatifs à leurs conditions de travail.
    Ce sont précisément ces droits qui sont protégés par l'alinéa 2d) de la Charte.
    La Cour suprême enchaîne: « Le droit a un processus véritable de négociation collective constitue donc un élément nécessaire du droit de poursuivre collectivement et de manière véritable des objectifs relatifs au travail. » Et encore: « le mécanisme », ou la loi, je dirais, « qui porte substantiellement atteinte à un processus véritable de négociation collective en réduisant le pouvoir de négociation des employés ne respecte pas la liberté d’association garantie par l’al. 2d) » de la Charte.
    Nous sommes ici aujourd'hui pour formuler quelques observations sur le projet de loi C-7 et pour exprimer notre crainte que, à certains égards, le projet de loi C-7, tout en accordant aux employés et agents de la GRC le droit de syndicalisation et de négociation collective, ne rogne sur ce droit en limitant le droit d'association et la portée de la négociation
    Je voudrais passer en revue quelques points qui nous inspirent des préoccupations, étant donné la genèse du projet de loi C-7.
    Il y a d'abord la configuration de l'unité de négociation. Le Comité n'est pas sans savoir que, dans sa forme actuelle, le projet de loi exclut de l'unité de négociation les membres civils de la GRC. Selon nous, rien ne justifie cette exclusion d'employés du même employeur, si ce n'est le souci d'affaiblir la position de négociation collective du syndicat. Dans les administrations fédérale et provinciales de tout le Canada, les commissions des relations de travail privilégient depuis des décennies des unités larges qui réunissent tous les groupes d'employés.
    Certes, nous acceptons que le projet de loi écarte les officiers en leur qualité de membres de la direction, mais la liste des rangs dont les membres sont considérés comme des officiers est établie par le gouverneur en conseil. Vu le nombre d'officiers de chaque rang qui sont exclus par le Conseil du Trésor, l'employeur a pour ainsi dire le pouvoir exclusif de décider qui fait partie ou non de l'unité de négociation comme officier. Il s'agit là d'une exception à la règle normale des régimes de relations de travail au Canada, qui veut que les exclusions de postes de direction et autres exclusions de l'unité de négociation soient établies par des commissions des relations de travail qui sont indépendantes.
    Deuxièmement, et c'est peut-être le point sur lequel je veux insister le plus ce matin, le projet de loi C-7 impose des limites très vagues et générales à l'affiliation.

  (1215)  

    Aux termes du projet de loi C-7, pour être accréditée, une organisation d'employés doit, entre autres choses, ne pas « être affiliée à un agent négociateur ou à une autre association n'ayant pas pour mission principale de représenter des officiers de police ».
    Nous respectons et comprenons tout à fait la limite selon laquelle l'agent de négociation lui-même doit être une organisation qui se consacre avant tout à la représentation d'officiers de police, mais nous n'arrivons pas à comprendre cette contrainte très générale et vague selon laquelle l'agent de négociation ne doit avoir aucun lien d'affiliation avec quelque autre organisation. Nous soutenons que c'est là une grave atteinte à la liberté d'association et qu'il existe des façons moins contraignantes de traiter les questions d'indépendance de l'agent négociateur.
    Nous renvoyons le Comité à la Loi sur les services policiers de l'Ontario, qui aborde la question sous un angle différent en ce sens que, pour les syndicats de policiers dans la province, la seule limite à l'affiliation s'applique aux membres à titre individuel et les empêche de se joindre à un autre syndicat sans en avoir reçu l'approbation. Toutefois, la loi ontarienne semble leur permettre, à juste titre, de collaborer avec les membres d'autres syndicats ou d'autres organisations syndicales et de s'y affilier.
    Cela semblerait donc, par exemple, permettre aux membres de l'éventuel syndicat de la GRC qui sont affiliés à d'autres organisations de fournir à ce syndicat des conseils, un soutien, etc., et autoriser le syndicat de policiers à faire partie d'un mouvement plus large et à demander l'aide d'autres organisations. Nous ne croyons pas que cela menace de quelque façon l'indépendance de l'éventuel syndicat de la GRC, et, selon nous, il s'agit d'un droit important pour ces syndiqués. Cela pourrait prendre la forme d'un soutien ponctuel à une campagne ou à une initiative données. Par exemple, les syndicats de policiers de tout le Canada ont été très importants dans la campagne portant sur le projet de loi C-377, présenté par l'ancien gouvernement, et ils ont travaillé dans le cadre d'un large mouvement à des enjeux de cette nature.
    Nous estimons que cette restriction imposée à l'affiliation est, là encore, extrêmement générale et qu'elle sera très difficile à comprendre pour quelqu'un de l'extérieur de l'organisation ou du mouvement syndical plus large.
    Ainsi, notre syndicat a toute une gamme de relations différentes avec divers syndicats. Nous avons des alliances stratégiques avec certains, nous collaborons avec d'autres et nous fournissons des ressources, qu'il s'agisse de l'utilisation de nos immeubles ou de la collaboration ou de la formation avec d'autres organisations. Là encore, nous ne voyons pas en quoi une aussi large restriction est nécessaire.
    Le troisième point que je veux commenter, mais très brièvement, est celui des limites à la portée de la négociation collective prévues dans le projet de loi C-7. Le Comité a déjà beaucoup entendu parler des limites imposées par le projet de loi à la portée de la négociation collective. Je ne vais donc pas insister et je vais me contenter de dire que limiter la portée de la négociation collective comme ce texte le fait, de façon aussi large et envahissante, constitue une atteinte importante, selon nous, aux droits des agents de la GRC garantis par l'alinéa 2d) de la Charte. Pour nous, le projet de loi va trop loin en interdisant de négocier au sujet des mutations, des promotions, des licenciements et des rétrogradations, de la conduite, y compris le harcèlement, des droits fondamentaux à l'égard de l'exercice des fonctions d'un officier et des questions d'équipement.
    De plus, bien sûr, le projet de loi C-7 limite les résultats de l'arbitrage obligatoire. Nous comprenons et appuyons l'idée que les conventions collectives doivent se régler par arbitrage obligatoire, mais, là encore, le fait que l'arbitre ne puisse se saisir d'une large gamme d'enjeux renforce les contraintes et le risque de dérogation à l'alinéa 2d) de la Charte. Nous soutenons que c'est là une atteinte importante aux droits de négociation collective
    La quatrième question que je tiens à signaler est celle des facteurs du régime d'arbitrage obligatoire prévus pour les officiers de la GRC. Ici, le projet de loi C-7 prévoit essentiellement que les facteurs déjà définis dans la LRTFP pour guider le conseil arbitral qui doit imposer une convention collective s'appliqueront aussi à l'éventuel syndicat de la GRC.
    Plus particulièrement, l'article 148 de la LRTFP, qui a été modifié et appliqué par le gouvernement fédéral précédent, exige que le conseil arbitral tienne compte des facteurs suivants:
a) la nécessité d'attirer et de maintenir au sein de la fonction publique des personnes ayant les compétences voulues afin de répondre aux besoins des Canadiens;

b) la situation fiscale du Canada par rapport à ses politiques budgétaires énoncées.
    Ces dispositions de la LRTFP ont été introduites par le gouvernement précédent, je le répète, et le fait que le gouvernement actuel les ait maintenues dans le projet de loi C-7 est inquiétant. Le fait que la loi exige de l'arbitre qu'il accorde une importance prépondérante à ces deux facteurs compromet sensiblement son indépendance et introduit un parti pris intrinsèque dans le processus, essentiellement en exigeant que l'arbitre, au lieu d'agir en toute indépendance, applique ce qui constitue en fait la politique gouvernementale.

  (1220)  

     Le projet de loi C-7 impose une autre contrainte au processus d'arbitrage: le conseil doit tenir compte des « conséquences de la décision sur l'efficacité opérationnelle de la Gendarmerie royale du Canada » en imposant les conditions d'une convention collective.
    Cette exigence est unique au projet de loi C-7 et n'est imposée à aucun autre employé de la fonction publique fédérale. Étant donné que les membres de la GRC n'ont pas le droit de grève et que les impasses en négociation doivent être résolues par l'arbitrage, le nouveau facteur fausse le processus d'arbitrage de façon inutile et inacceptable, selon nous, en faveur de l'employeur.
    Pourriez-vous conclure le plus rapidement possible?
    Il y a deux autres questions que nous avons abordées dans notre mémoire. La première, moins importante, porte sur les restrictions à l'égard des griefs et de l'arbitrage. L'autre concerne l'indemnisation des travailleurs et le fait que, aux termes du projet de loi C-7, les officiers de la GRC peuvent être indemnisés par un ensemble hétéroclite de régimes de prestations. Je vais omettre ces questions.
    Pour conclure, je dirai que, à titre de syndicat international qui a des liens étroits avec d'autres syndicats partout en Amérique du Nord et à l'échelle mondiale, le Syndicat des Métallos est déterminé à défendre la pleine expression du droit à la liberté d'association et à la négociation collective. Dans sa forme actuelle, le projet de loi C-7 limite inutilement, selon nous, ces droits fondamentaux pour les officiers de la GRC.
    Nous demandons au Comité de retirer, quand il en sera à l'étude article par article du projet de loi, les restrictions signalées dans notre mémoire et dans d'autres, et de veiller à ce que l'esprit et l'intention de la décision de la Cour suprême dans l'arrêt APMO soient consacrés dans la loi, en autorisant les officiers de la GRC à exercer leur droit à une négociation collective libre et indépendante.

  (1225)  

    Merci, monsieur Rowlinson.
    À vous, monsieur Champ.
    Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que les membres du Comité. Merci beaucoup de cette occasion de m'adresser à vous et de vous aider...
    Excusez-moi. Je rappelle aux membres du Comité, étant donné qu'ils n'ont pas eu toute l'information qu'ils souhaitaient, que le Syndicat des Métallos a présenté un mémoire.
    Désolé, monsieur Champ.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les membres et le président du Comité de l'occasion qu'ils me donnent d'aider le Comité à examiner ce très important projet de loi qui confère le droit de syndicalisation et de négociation collective aux membres de la GRC. Il constitue, à sa façon, une étape marquante. Depuis plus de 50 ans, des membres de la GRC, hommes et femmes, s'efforcent de se syndiquer, et les gouvernements en place ont toujours refusé. Le moment est venu, pour les officiers de la GRC, d'exercer leurs droits à la liberté d'association. Voilà pourquoi le projet de loi est très important.
    Pour que vous sachiez où je me situe, je dirai que je suis avocat en pratique privée, en droit du travail, et que j'ai eu le grand honneur de représenter au fil des ans de nombreux officiers de la GRC un peu partout au Canada pour des différends dans toutes les provinces, ou divisions, comme on dit à la GRC. Je me suis occupé de questions disciplinaires, d'affaires de promotion, de harcèlement et de dénonciation, d'accidents du travail, de questions d'obligation d'adaptation et d'affaires de discrimination raciale et sexuelle, tout cela dans le contexte de la GRC. Cette expérience me donne une bonne idée, je crois, des recours prévus dans la Loi sur la GRC, qui sont à la disposition de tous les membres. Je voudrais vous donner mon opinion sur ces recours.
    Les principaux problèmes que je veux aborder sont les exclusions, dont vous avez beaucoup entendu parler, mais je vais vous donner mon idée là-dessus également et sur le système de griefs prévu dans le projet de loi. L'acheminement des griefs est une question très complexe en ce moment. Est-ce une question disciplinaire? Une question de convention collective, de promotion? Il faut suivre des avenues différentes, ce qui rend les recours très difficiles.
    Je peux vous dire que, même avant le projet de loi, c'était l'un des régimes de relations de travail les plus complexes dont j'aie eu à m'occuper. Je représente toutes sortes de travailleurs du secteur public fédéral et de partout, de tous les ministères imaginables. Je représente des agents du SCRS, du CSTC... J'ai donc une petite idée, et je peux dire que la Loi sur la GRC est déjà très complexe.
    La dernière question est celle de l'indemnisation des travailleurs. J'ai des opinions à ce sujet et je voudrais vous en faire part. J'allais l'aborder en dernier, mais je vais plutôt commencer par là, puisque les autres témoins ont beaucoup parlé des exclusions.
    En ce moment, comme d'autres exposés vous l'auront appris, les membres de la GRC ont droit à leur pleine rémunération lorsqu'ils sont en congé de maladie, peu importe la cause. Qu'il s'agisse d'un accident en milieu de travail ou d'une maladie quelconque, ils ont leur plein salaire. Le projet de loi C-7 propose, à l'article 40, de confier tous les membres de la GRC aux différends régimes d'indemnisation provinciaux de tout le Canada.
    Disons une chose tout de suite. Si vous apportez des modifications au projet de loi ou recommandez des modifications, c'est à ce sujet qu'il faut le faire. Cela ne tient pas debout, et voici pourquoi.
    J'ai revu ce que les ministres vous ont dit la semaine dernière: les approches des diverses provinces sont raisonnablement uniformes et il n'y a pas de grandes différences entre elles. Ils vous ont dit aussi que ce système semble bien fonctionner pour les fonctionnaires fédéraux, qui sont régis par les régimes provinciaux d'indemnisation en fonction de la province où ils travaillent.
    La GRC est très différente, pour trois raisons.
    Premièrement, les officiers de la GRC ont plus de travail physique à faire que d'autres employés fédéraux de la fonction publique et ils sont plus exposés aux accidents de travail. Nous pouvons tous le comprendre.
    Deuxièmement, la mobilité est inhérente au travail des officiers de la GRC. Ils sont affectés à des postes un peu partout au Canada et sont réaffectés à divers endroits à répétition. Bien des officiers de la GRC, en seulement 20 ou 25 ans de service, ont travaillé dans deux ou trois provinces, parfois plus, au cours de leur carrière. C'est fort différent de la situation des fonctionnaires fédéraux, qui travaillent le plus souvent à un seul endroit toute leur vie et qui, de surcroît, peuvent exercer des choix. Si vous postulez un emploi à Ottawa dans n'importe quel service, par exemple l'ARC, ou au ministère des Pêches et des Océans à Vancouver, vous savez quel sera votre régime d'indemnisation.
    L'officier de la GRC n'a pas le droit de choisir son lieu de travail et il ne sait pas quel sera son régime d'indemnisation. Il peut être déplacé, et c'est le cas d'un grand nombre d'entre eux, dans diverses provinces pendant toute sa carrière. Ce sont des conditions de travail fondamentalement différentes de celles des fonctionnaires fédéraux, et c'est pourquoi la mesure proposée est injuste.

  (1230)  

    Voici la troisième et dernière raison de retirer ces dispositions du projet de loi: la fluctuation de la couverture au Canada. C'est un assemblage hétéroclite. Il n'y a pas d'uniformité raisonnable.
    Les régimes d'indemnisation des accidentés prévoient une couverture maximale. Les travailleurs sont protégés à hauteur d'un certain niveau de revenu, et ce niveau varie beaucoup: de 51 000 $ de revenu annuel à l'Île-du-Prince-Édouard à 119 000 $ au Manitoba.
    Un gendarme au sommet de l'échelle gagne 82 000 $ par année. Seulement trois des 10 provinces couvriraient l'intégralité du revenu de ce gendarme s'il se blesse au travail et doit s'absenter. Un exemple frappant... Comme je suis originaire de la Saskatchewan, j'aime toujours les exemples qu'on peut tirer de cette province. Ils sont très instructifs pour le Canada. Comme vous êtes nombreux à le savoir, Lloydminster est à cheval sur la ligne de démarcation entre l'Alberta et la Saskatchewan. C'est une ville fascinante pour une foule de raisons, mais elle a aussi deux détachements de la GRC, à deux kilomètres l'un de l'autre: l'un sur la 47e avenue, en Saskatchewan, et l'autre sur la 44e rue, en Alberta.
    En Saskatchewan, la couverture maximale pour ce membre de la GRC est de 54 000 $ par année. En Alberta, elle est de plus de 90 000 $. Il pourrait très bien arriver qu'un incident très grave se produise et que des officiers des deux détachements soient appelés à un certain endroit. Un accident terrible se produit et deux agents sont blessés. Si vous faites relever ces agents des régimes provinciaux d'indemnisation, ces deux agents qui travaillent côte à côte, pour le même incident, ne recevront vraiment pas la même chose. Celui qui est affecté au détachement de la Saskatchewan va recevoir, si je calcule approximativement, environ 1 000 $ de moins par mois que son collègue affecté dans l'autre province.
    Je tenais à souligner ce fait. C'est une mauvaise idée, et elle est injuste pour les membres de la GRC. Au strict minimum, c'est une très mauvaise idée d'apporter cette modification au moment où il y aura syndicalisation et où une association voudra discuter de la question avec l'employeur et négocier.
    Je passe aux autres points que je voulais aborder en commençant par les exclusions. On vous en a beaucoup parlé. Je ne vais traiter que des points qui me paraissent les plus importants, soit les promotions et les transferts, et les affaires de harcèlement. Ces exclusions ne sont pas seulement un gros problème à cause de l'absence d'une négociation collective libre et sérieuse, mais aussi parce que les membres sont ainsi poussés vers un système de recours très complexe. Dans de nombreux cas, lorsqu'on exclut ces questions de la négociation collective, les membres n'ont pas droit à un arbitrage indépendant.
    Aux termes de l'article 31 de la Loi sur la GRC, il faut recourir aux mécanismes internes de règlement des griefs. Il y a des arbitres, mais ce sont des officiers brevetés, un surintendant ou un surintendant principal. Lorsque le grief porte sur les actes d'un sous-commissaire ou d'un commissaire — et je m'occupe le plus souvent des affaires assez sérieuses comme celles-là —, il faut s'adresser au surintendant principal et lui demander d'annuler telle décision de tel commissaire. On ne peut pas obtenir gain de cause très souvent.
    Le texte législatif est ainsi conçu que seules les questions relevant de la convention collective seront soumises à la Commission des relations de travail dans la fonction publique. Ajoutons à cela toutes les exclusions et il faut conclure que cette commission ne sera saisie que des questions de rémunération et d'indemnisation. Certaines des conditions de travail les plus importantes pour les membres de la GRC ne feront pas l'objet d'un arbitrage indépendant. C'est là un gros problème, à mon avis.
    À propos des promotions... Les examens et études des 20 dernières années ont conclu les unes après les autres que les membres de la GRC estiment que le système de promotion de la GRC manque de transparence et d'équité. Le rapport Brown de 2007, Rétablir la confiance, disait « qu'on juge presque à l'unanimité (le système de promotion) inefficace, injuste et opaque. »
    Le rapport Brown de 2007 citait l'arrêt que la Cour suprême du Canada a rendu dans l'affaire APMO.
    La GRC a rédigé elle-même un autre rapport récemment, Examen comparatif entre les sexes, publié en 2012. Elle a fait un examen et mené un sondage auprès des membres, qui ont dit que l'un de leurs plus graves problèmes était « un processus de promotion qui manque d'équité et de transparence. » Pourtant, les processus de promotion restent complètement en dehors de la négociation collective ou du système d'arbitrage indépendant des griefs auquel les membres auraient droit auprès de la CRTEFP. Ils doivent continuer de porter leurs griefs plus haut.

  (1235)  

    Les promotions sont perçues, d'après mon expérience qui s'échelonne sur des années, comme des récompenses pour ceux qui appartiennent à un club, à ceux qui sont vus comme loyaux, à ceux qui appartiennent à certaines cliques qui acquièrent de l'influence dans la force. Et je dirai honnêtement que, si vous amenez n'importe quel membre, et même un officier breveté prendre un café ou une consommation et si vous lui posez la question, il dira la même chose: c'est comme ça que ça marche.
    Les promotions dépendent de la loyauté plus que de quoi que ce soit d'autre, et non de l'équité ou du mérite.
    Pourriez-vous conclure, monsieur Champ?
    Oui, merci, monsieur le président.
    Et le harcèlement est l'un des problèmes les plus graves pour la GRC en ce moment. Cela fait partie de la culture. Il y a des fiefs où une conduite arbitraire peut passer inaperçue. Il y a des postes isolés où tout le monde est soumis à un certain sergent, et les personnes coupables sont souvent protégées à cause des relations de loyauté. Si un sergent d'état-major se retrouve en difficulté ou s'il y a une plainte qui remonte la filière jusqu'à un surintendant principal qui était affecté au même endroit que ce sergent, la plainte n'aboutit pas.
    De plus, quand on entre dans la dynamique de la loyauté, quiconque fait une plainte est par définition déloyal. Je suis sûr que vous avez entendu cela à maintes reprises au sujet des recours collectifs de femmes officiers de la GRC. Cela s'applique ailleurs aussi. Si on présente une plainte de harcèlement, on est immédiatement remarqué et on fait l'objet de représailles, et c'est là que réside le problème. Il n'y a pas d'arbitrage indépendant, la négociation collective ne s'applique pas. Lorsque les membres en ont le plus besoin, elles ne peuvent compter sur elle.
    Voilà les questions que je voulais faire ressortir avant tout. J'ai quelques autres points qui seront peut-être abordés pendant la période des questions, mais je ne vois pas pourquoi le gouvernement voudrait protéger ce type de conduite contre les griefs indépendants sur le harcèlement. J'ai entendu le ministre Goodale dire la semaine dernière que le gouvernement va essayer d'apporter des changements, et nous le croyons sur parole, mais le problème est profondément ancré dans la culture. S'il est exposé au grand jour de la négociation de la convention collective, il se réglera.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Champ.
    Ce sera d'abord Mme Damoff.
    Merci.
    Merci beaucoup à vous deux d'être venus pour nous donner davantage d'information sur la question à l'étude.
    L'une des choses qui m'ont réconfortée, depuis que je suis députée et membre du Comité, c'est la façon dont tous les partis ont reconnu qu'il était important de s'occuper de l'ESPT et de la BSO chez les premiers intervenants et les agents de la sécurité publique. Tous se sont entendus pour dire que nous devons nous occuper de ce problème, ce dont témoigne le fait que c'est notre premier sujet d'étude.
    Nous éprouvons tous des difficultés avec les articles 40 et 42 précisément à cause de ce que vous avez dit de la couverture. L'Ontario a maintenant une loi présomptive au sujet de l'ESPT et de la BSO, mais les autres provinces n'en ont pas. Pourriez-vous nous dire comment, selon vous, nous pourrions attaquer au problème. Si chacune des provinces ne s'en occupe pas, avez-vous des idées sur la façon de l'aborder?
    Ma grande question est la suivante: qu'est-ce qui ne va pas? Je n'ai pas entendu d'argumentaire qui montre la nécessité de modifier le système actuel.
    La semaine dernière, le sous-commissaire Dubeau a dit qu'il n'y avait pas eu de consultations auprès de l'ensemble des membres à ce sujet, ni quelque autre consultation, en fait. Je ne sais pas où est le problème. Qu'est-ce qui ne va pas dans le système actuel?
    Je me suis occupé de beaucoup d'officiers qui étaient en congé pour maladie ou accident du travail. Il y a aussi toute la question distincte de parvenir à une décision avec la commission des accidents du travail tout en traitant avec l'employeur. Je m'occupe de cela dans des contextes qui ne sont pas ceux de la GRC, et c'est très complexe et difficile de traiter avec deux régimes. Dans ce cas-ci, il y a un seul guichet. On traite avec l'employeur, à qui on dit: « Voici le problème, voici les restrictions médicales de cette personne, qui sera absente du travail un certain temps. Occupons-nous-en. » Je ne vois vraiment pas pourquoi il faudrait changer quoi que ce soit. Je n'ai entendu aucune démonstration. Il m'est donc difficile de répondre à la question.

  (1240)  

    Étant donné que nous reprendrons notre étude après ces réunions, je crois que nous pourrions tirer profit des recommandations tirées de cette étude.
    Je veux également parler un peu des limites. Vous avez mentionné les limites concernant la portée dans les négociations collectives, et plus précisément, la formulation actuelle dit « conduite et harcèlement ». Le ministre, lors de sa comparution, a parlé d'initiatives en cours, et je vois un nouveau rapport selon lequel les dénonciations de mauvaise conduite sont à la hausse de 158 %, si je ne m'abuse. La direction dit que c'est parce qu'on s'attache aux mauvais comportements au sein de la GRC.
    Y a-t-il des répercussions d'un point de vue juridique — vous êtes un avocat du droit du travail, vous pouvez donc aborder ce sujet d'un point de vue juridique — si la formulation « et harcèlement » était retirée?
    Certains des cas les plus graves finiraient à la Commission des relations de travail dans la fonction publique. L'association négocierait sans doute une disposition dans la convention collective mentionnant un traitement équitable en milieu de travail, ou l'absence de harcèlement au travail, ce type de formulation. Cela n'aurait pas pour effet d'ouvrir les vannes, parce qu'un membre ne pourrait pas soumettre un cas à l'arbitrage par lui-même. Il devrait être approuvé par l'association, donc je crois que seulement les cas les plus graves se retrouveraient en arbitrage.
    Je crois que c'est ce qui arriverait, et c'est ce que l'on voit dans le cas d'autres agents de police. Je représente également l'Association des policiers d'Ottawa, donc je connais ce système. Ils ont droit à l'arbitrage pour ce type de problèmes. Je ne comprends pas pourquoi cela est refusé aux agents de la GRC.
    Est-ce qu'il y aurait un passage à vide entre le moment où la loi serait adoptée et celui où le syndicat serait formé? Qu'est-ce qui se passerait dans l'intervalle?
    On suppose que le système actuel demeurerait en place, et je crois que le problème du passage à vide est très réel. Je crois que vous avez entendu parler la semaine dernière de la façon dont le commissaire de la GRC a littéralement coupé l'herbe sous le pied des responsables du Fonds de recours juridique des membres de la Gendarmerie, qui a représenté ses membres pendant 20 ans dans nombre de causes. Il finance actuellement nombre de causes qui vont tomber en raison de ces changements.
    Je crois que l'on s'inquiète que les membres de la GRC deviennent plus vulnérables que jamais pendant les deux prochaines années, jusqu'à ce que nous ayons un syndicat, si nous ne réfléchissons pas à la période intérimaire.
    Avez-vous des suggestions sur la façon de composer avec cette période intérimaire?
    C'est drôle, en quelque sorte, tellement c'est terrible. En vertu de l'ancien système, il n'y avait déjà pas d'arbitrage. Vous pouviez déposer une plainte ou un grief pour harcèlement, et si cela se réglait en moins de quatre ou cinq ans, vous étiez chanceux; honnêtement, je ne crois pas avoir déjà vu un cas se régler en moins de trois ans.
    C'est terrible, et la Cour fédérale s'y est attaquée, et a critiqué la GRC pour cela. Au bout du compte, s'il fallait seulement deux ans environ, à condition que les griefs puissent cheminer dans le système ou au moins être protégés de la même façon qu'ils l'étaient avant, lorsqu'il y avait une sorte de système de représentants des membres qui peut aider les gens au moins dans le cadre du processus lié à l'article 31 de la Loi sur la GRC, cela serait mieux, mais malheureusement, je crois que cela va être difficile.
    Lorsque nous parlions de harcèlement, il était question de celui d'un dirigeant envers un subalterne. Qu'en est-il du harcèlement entre collègues?
    Vous pouvez aussi déposer un grief pour ceux-là. Vous pourriez déposer un grief pour ceux-là. En matière d'obligation et de responsabilité de l'employeur, il s'agit d'une situation où l'employeur a été mis au courant du problème et où il a pris des mesures efficaces pour gérer le problème... Si l'employeur n'est pas au courant du harcèlement entre collègues, il n'a pas d'obligation en ce sens.
    En cas de plainte pour harcèlement, lorsque le harceleur peut être soumis à des mesures disciplinaires, c'est la même chose, et les procédures disciplinaires sont importantes, et je crois que c'est en partie pour cela qu'elles sont exclues, parce que le harcèlement est perçu comme une mauvaise conduite — nous allons punir quelqu'un — plutôt que de penser à offrir une solution à la personne qui a été harcelée par un dirigeant, qui s'est plainte plusieurs fois, et qui a été ignorée plusieurs fois.
    Il y a ce cas terrible à l'école de police; je participe à ce cas. C'est un cas classique où il faut trouver une solution adéquate pour les membres qui ont été harcelés. Ils ont mentionné le problème à la direction, mais peu de choses ont été faites.

  (1245)  

    Merci, madame Damoff.
    Monsieur O'Toole.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous deux d'avoir témoigné ici aujourd'hui.
    Il est certainement clair, monsieur Champ, que vous avez suivi les travaux du Comité depuis le jour où les ministres ont comparu, et je crois que vous pouvez constater que nous avons déjà quelques préoccupations au sujet des dispositions 40 et 42. Je crois que personne n'a montré d'une façon aussi succincte qu'avec votre exemple de Lloydminster que l'approche morcelée, que ce soit pour un ESPT ou pour des questions de revenu, ne convient pas à un corps policier fédéral, qui présente, comme vous l'avez dit, les trois différences propres à la GRC, cette nature et cette structure unique d'affectation qui signifie que vous êtes un agent de police fédéral, mais qu'un jour vous pouvez être dans le Canada atlantique, et une semaine plus tard, vous pouvez être affecté dans le nord du Canada.
    Je veux vous remercier, parce que je crois que nous faisons des progrès et que cet exemple montre comment, dans une ville, il pourrait y avoir des différences concernant des incidents isolés.
    Monsieur Rowlinson, c'est intéressant que vous ayez choisi de citer une décision à propos d'une véritable négociation collective, ce qui était au centre de l'affaire. La Cour a précisé le processus permettant d'établir une véritable norme qui offre à l'employé une liberté de choix et une indépendance. Sur le plan de la liberté de choix de l'employé, le mouvement ouvrier a tendance à ne pas du tout être en faveur d'un vote secret sur la création d'un syndicat. Avez-vous l'impression que la meilleure manière est de voir le choix des employés concernant l'accréditation d'un syndicat?
    Avant de répondre à la question, avec tout le respect que je vous dois, je ne suis pas d'accord, si je peux me permettre, avec ce que la Cour suprême a dit dans l'affaire de l'Association de la police montée de l'Ontario. Oui, elle s'est attachée principalement aux problèmes relatifs à la liberté de choix des employés et à l'autonomie et l'indépendance de l'agent de négociation, parce que c'était la question qu'elle devait trancher. Elle a fait beaucoup de commentaires sur de véritables ingérences dans les négociations collectives et elle a élaboré une sorte de critère et un certain nombre de principes pour analyser l'alinéa 2d), mais dans la décision de l'Association de la police montée de l'Ontario, il est évident qu'elle n'examinait pas un régime de négociation collective. Elle examinait un système où un groupe d'employés étaient particulièrement exclus d'une négociation collective; c'est donc le problème sur lequel elle s'est concentrée.
    Au sujet de votre question sur les moyens de déterminer la liberté de choix d'un employé, qu'il s'agisse d'un vote secret ou de la signature d'une carte de membre sans être victime d'intimidation ou de coercition, les différentes administrations canadiennes, comme vous le savez, ont des approches différentes pour gérer ce problème. Au Québec, un nombre d'adhésions de « 50 % plus 1 » suffit. Dans l'administration fédérale, jusqu'à très récemment, c'était la façon de déterminer le choix de l'employé. Dans d'autres administrations canadiennes, un vote d'accréditation est obligatoire. Les tribunaux ont dit très clairement que les deux méthodes sont acceptables sur le plan constitutionnel, et la Charte ne privilégie ni l'une ni l'autre.
    Du point de vue du mouvement ouvrier, nous croyons, comme vous devez déjà le savoir, dans ces circonstances particulières où les employés choisissent un agent de négociation pour les représenter, qu'un vote secret a tendance, selon la preuve empirique, à démontrer l'effet d'un vote secret, au fond. Il donne la liberté aux employeurs, pendant la période menant au vote secret, d'agir de façon volontairement intimidante et contraignante envers les employés pendant qu'ils font leur choix. Les votes secrets sont essentiellement une façon de permettre aux employeurs d'intimider et de contraindre les employés, et par conséquent...
    Est-ce que la même approche s'applique dans le contexte du gouvernement, par contre? On peut citer des exemples tirés du secteur privé et des syndicats du secteur privé, mais nous sommes tous ici parce que je crois que tous ont reconnu le droit souligné par la Cour suprême dans la décision de la police montée. Est-ce que les préoccupations au sujet de l'intimidation et de la coercition sont les mêmes dans le contexte du secteur public?
    Je dis cela, parce que, au cours de la séance d'information organisée par le gouvernement à propos de ce projet de loi, des représentants haut placés ont dit que chaque accréditation précédente dans le secteur public avait été faite par vote secret parce que ça remonte à très loin. Est-ce que les préoccupations que vous soulignez sont pertinentes pour le gouvernement?
    Je crois que la préoccupation tient au fait que si votre employeur, peu importe qu'il soit dans le secteur public ou privé — c.-à-d., l'institution qui vous permet de nourrir votre famille — vous indique avec fermeté qu'il a une préférence quant à votre façon de voter sur la question du syndicat, cela devient très difficile de choisir pour un employé, parce que le jour après le vote, votre employeur, et encore une fois, peu importe qu'il soit du secteur public ou privé, demeure votre employeur.

  (1250)  

    L'employeur dans ce cas établit une loi d'habilitation pour ce vote, donc je crois que c'est très clair qu'il y aura un agent de négociation, et la décision liée à l'accréditation devrait vraiment relever des employés.
    Exactement, et je suis d'accord avec vous pour dire que la décision de l'accréditation devrait relever des employés. Et parce que cela devrait être le cas, cela devrait être fait de façon confidentielle et privée. Cela, à notre avis, milite en faveur de la signature de cartes de membres au lieu d'un choix, encore une fois, par vote secret.
    Pour le temps qu'il me reste, je veux parler des exclusions que vous avez mentionnées pour les employés civils, et du fait de s'assurer que l'agent de négociation est propre aux forces policières, c'est-à-dire la GRC. Vous avez utilisé l'exemple de la capacité d'un employé de contrebalancer le déséquilibre du pouvoir d'un employeur au moyen du recours à un agent de négociation, par l'entremise du syndicat.
    Ne serait-il pas juste d'appliquer ce même déséquilibre des pouvoirs au cas où un seul employeur ne souhaite pas de déséquilibre des pouvoirs imputable à un grand syndicat composé de nombreux ministères, de nombreuses sphères de compétences, et d'un grand nombre de besoins et volontés différents? N'y a-t-il pas là un déséquilibre des pouvoirs? Un syndicat aussi grand que le vôtre, avec... Peut-être que le gouvernement fédéral est un mauvais exemple, mais pour certains employeurs, un seul employeur, le déséquilibre des pouvoirs serait causé par un syndicat tel qu'Unifor ou le vôtre.
    Je me demande ce que vous en pensez, et où la jurisprudence pourrait montrer à l'avenir que la collectivisation du mouvement ouvrier peut mener à un déséquilibre des pouvoirs allant dans l'autre sens.
    Je crains que je ne puisse pas vous laisser répondre. La question était très longue, et nous avons dépassé le temps imparti. Vous pouvez lui répondre par écrit si vous le souhaitez.
    Monsieur Blaikie.
    Merci.
    Je crois que je vais continuer un peu sur la question de l'affiliation avec M. Rowlinson. Je me demande si vous pouviez donner un exemple d'une sorte de collaboration ou d'entente entre des organisations qui pourraient avoir du sens et servir les intérêts des membres de la GRC, qui n'entraveraient pas leur indépendance, mais qui pourraient les placer dans l'eau chaude en raison d'une formulation actuellement imprécise.
    Je vais vous donner quelques exemples. Nous avons ce que nous avons tendance à appeler des alliances stratégiques avec d'autres syndicats indépendants. Il n'y a aucune relation financière de quelque forme que ce soit. Par exemple, il y a l'ACTRA. L'ACTRA est un syndicat national, avec des membres partout au pays. Nous avons conclu une alliance stratégique avec lui tout simplement parce qu'il y a des parties du pays où nous avons des ressources, où nous pouvons aider les membres de l'ACTRA et que nous sommes heureux de le faire, et où ce syndicat n'a pas nécessairement les ressources pour s'en charger.
    Si je peux me servir de l'exemple du cas de la GRC, l'une des raisons, en toute franchise, pour lesquelles nous sommes ici est que nous sommes le syndicat prédominant dans le secteur de l'extraction des ressources naturelles. Nous comptons beaucoup de membres dans de petites collectivités dans tout l'Ouest canadien et dans le Nord où, ce qui n'est pas surprenant, on trouve également des détachements de la GRC. Bon nombre de nos membres ont de la famille qui fait partie de la GRC. Si le syndicat de la GRC, peu importe la forme qu'il prendrait, avait besoin d'une salle de réunion ou d'un édifice, d'un endroit ou d'un emplacement, ou encore de services en matière d'éducation, toutes ces choses sont possibles. Notre syndicat réalise ce type de collaboration avec d'autres syndicats. Nous ne voyons pas pourquoi de telles ententes devraient être absolument interdites avec le syndicat de la GRC, si cela se présente, et si cela serait nécessaire pour que ces travailleurs soient bien représentés.
    Je tiens à remercier M. Champ de son exemple concernant l'Alberta et la Saskatchewan. Je crois que cela jette une lumière crue sur certaines modifications touchant les avantages.
    J'aurais aimé que vous en disiez plus, et que vous donniez des détails sur les promotions et les mutations au sein d'une convention collective. Est-ce que cela serait si terrible d'un point de vue organisationnel? Quelle sorte de propositions pensez-vous qu'il serait possible de mettre sur la table et plus précisément, dans le cadre de négociations qui finiraient en arbitrage exécutoire, avec un arbitre qui doit prendre en considération les besoins particuliers de la GRC en tant que la force de police nationale et tout le reste?
    À votre avis, qu'est-ce qui effraie dans la mise de l'avant de ce processus? Qu'est-ce qui pourrait être mis de l'avant dans ce processus qui, au bout du compte, serait mauvais pour la GRC, mais d'une certaine façon, bon pour ses membres?

  (1255)  

    Il est probable que la raison de certaines de ces exclusions, comme celles concernant les mutations, est que la GRC souhaite demeurer une organisation paramilitaire. Si on vous dit que vous êtes en affectation à un poste de première ligne ou dans une collectivité éloignée, c'est là que vous allez. Nous avons besoin d'effectifs à cet endroit-là. Nous ne voulons pas de réplique. Voilà ce qui se passe.
    Je suis d'avis que c'est la raison, mais je ne crois pas que ce processus devrait susciter des craintes au sein de la GRC. Par exemple, voici à quoi pourrait ressembler une clause de convention collective. La GRC pourrait déclarer que, dans le cas d'une affectation d'un membre, elle tiendra compte des intérêts du membre, de ses aspirations professionnelles et des questions touchant sa famille. Toutefois, en raison d'exigences opérationnelles, le membre pourrait être envoyé en affectation à n'importe quel endroit, en fonction des besoins de l'organisation. Dans ce contexte, si vous êtes sur le banc des punitions... Les gens se souviennent d'une des premières remarques du commissaire Paulson concernant le harcèlement.
    C'est pourquoi je soulève ce point. Si les griefs ne peuvent être tranchés par un arbitrage indépendant, ces affectations pourraient être utilisées pour harceler des personnes, finalement. Vous pourriez déposer un grief et refuser en disant il n'y a aucune raison pour vous de rejoindre cette affectation, et demander quelle exigence opérationnelle cela justifie. Ensuite, la GRC devrait fournir des éléments de preuve et montrer à un décideur indépendant qu'il existe des exigences opérationnelles, qu'il n'y a que ce nombre de personnes à tel endroit et il y a ce nombre à tel autre endroit, qu'il manque de personnel à un endroit et que cette personne doit être envoyée en affectation là-bas. Si les responsables peuvent faire cela, tant mieux, ils gagnent le grief. S'ils ne réussissent pas, et si le cas donne à penser d'une certaine façon qu'un officier tente d'exercer un contrôle sur ce membre, de le traiter de façon inéquitable ou de le reléguer au banc des punitions, alors les arbitres en relations de travail peuvent déceler rapidement ce genre de choses. Ils cerneraient la situation et refuseraient; ils diraient qu'il s'agit d'une affectation qui n'est pas équitable et que cette personne ne doit pas être affectée à l'endroit en question.
    Voilà la façon dont je crois que ce type de grief serait réglé. De toute évidence, la prérogative de la direction quant aux affectations et la compréhension des exigences opérationnelles de la GRC seraient essentielles ou de première importance. Je persiste à croire que le droit de déposer des griefs, ou au moins de négocier collectivement les éléments qui y seraient liés, demeure quelque chose que la GRC ne devrait pas craindre.
    Puis-je rapidement ajouter un point à ce sujet?
    Une des choses que notre syndicat fait est de recueillir des données empiriques concernant les raisons pour lesquelles les gens souhaitent se syndiquer — ce n'est peut-être pas surprenant. Une des choses qui ressort de ces données, c'est que, oui, les gens souhaitent avoir plus d'avantages sociaux, de meilleurs salaires et conditions de travail, mais, en fait, l'équité au travail et le fait de pouvoir traiter avec leur employeur de ce genre de questions en particulier figure presque toujours en haut de la liste quand vous demandez aux Canadiens pourquoi ils souhaitent se syndiquer. Les avantages et le salaire ne sont pas les seules raisons, et ce n'est certainement pas pour faire la grève ou quelque chose du genre. L'équité au travail vient presque toujours en tête de liste.
    Sur le plan du processus, les sujets visés par les exclusions sont assez diversifiés, parce que les exclusions sont nombreuses, et les types de recours que les parties pourraient demander à la table de négociation, s'ils en avaient le droit, sont également variés.
    Selon vous, est-il logique, comme législateur, de tenter de prévoir tous les problèmes, fort nombreux, et ensuite d'inclure des exclusions dans les exclusions, en quelque sorte, dans le texte de loi afin de prévoir ces possibilités? Ou croyez-vous qu'il est logique de ne pas faire d'exclusions et de laisser les décisions être prises à la table de négociation?
    Veuillez être très bref, s'il vous plaît.
    Je peux répondre en quelques secondes.
    Au bout du compte, même le fait de retirer les exclusions ne signifie pas que les sujets qu'elles touchent seront nécessairement visés par la convention collective. Ils seront quand même soumis à la négociation collective. Si les responsables de la GRC, à titre d'employeur, ou du Conseil du Trésor — peu importe qui est chargé de la négociation — insistent sur le fait qu'il est nécessaire d'exercer un contrôle absolu sur les affectations, y compris le moment où elles sont effectives, ils peuvent dire: « Nous ne mettons pas cela sur la table, messieurs. Il n'en est pas question. » Ils pourraient faire cela, ou peut-être que, bien des années plus tard, ce ne sera pas aussi important, et ils seront disposés à négocier à ce sujet.
    En fait, ce que je dis, c'est que le simple fait de retirer les dispositions législatives ou les exclusions ne signifie pas que leur contenu fera nécessairement partie d'une convention collective. De toute évidence, la négociation collective reste à faire.
    Merci, monsieur Blaikie.
    Je crois que je vais donner à M. Mendicino une courte période de questions de quatre ou cinq minutes.
    Voulez-vous dire une période éclair, monsieur le président?
    Oui, il s'agit d'une période éclair, afin de s'assurer que vous ayez la possibilité de participer.
    Je vous remercie tous les deux de votre témoignage.
    Voici quelques points au sujet desquels je crois qu'il y a consensus.
    La Cour suprême du Canada a conclu qu'un processus qui entrave substantiellement l'action collective visant la réalisation d'objectifs liés au travail violerait l'alinéa 2d) de la Charte.
    Est-ce exact, Me Champ?
    En fait, ces exclusions pourraient très bien violer ce droit.
    Cela m'amène à ma deuxième question.
    Le projet de loi C-7 est la réponse proposée par le gouvernement, du moins dans sa forme actuelle, mais vous soulignez bon nombre de préoccupations à propos de ce projet de loi, dont certaines sont liées aux exclusions.
    En ce qui concerne le harcèlement, il existe un rapport, qui viendrait d'être publié sur le site Web de la GRC, intitulé Résultats et respect à la GRC. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de le consulter.

  (1300)  

    Ce rapport, oui. Il y a ce rapport, et il y en a un autre, dont le lien figure dans le premier.
    Oui, je l'ai lu.
    On constate que la GRC a fait certains progrès — je crois que cela mérite d'être reconnu — à l'égard des sexes et de la diversité. Est-ce juste de l'affirmer?
    Je vois bien les statistiques, mais je dois admettre que j'ai défendu assez de cas en matière de droits de la personne devant le Tribunal canadien des droits de la personne, et je mets bien souvent en cause la façon dont ces statistiques ont été établies.
    Je dois admettre en toute honnêteté que, lorsque j'ai lu le rapport intitulé Résultats et respect à la GRC, franchement, je n'y ai pas cru.
    À première vue, cependant...
    À première vue...
    ... les chiffres semblent meilleurs qu'ils ne l'étaient, disons, il y a quelques années. Est-ce juste d'affirmer cela?
    Oui.
    D'accord.
    En ce qui concerne la culture du milieu de travail et le harcèlement, nous constatons dans ce rapport qu'il y a une augmentation du nombre de griefs. Ai-je raison de dire cela?
    Oui.
    Certains de ces griefs concernent le harcèlement. Est-ce également exact?
    Oui.
    Maintenant, vous soulignez qu'il existe un important arriéré; que certains de ces cas prennent des années à régler. Je crois que vous nous avez mentionné un délai de quatre ans.
    Oui.
    Cela en dépit de l'existence d'outils internes utilisés par le gouvernement dans son rôle d'employeur de la fonction publique. Je fais allusion au code de conduite qui s'applique à la GRC...
    Oui.
    ... et à d'autres politiques du Conseil du Trésor qui s'appliquent également, comme le Code de valeurs et d'éthique du secteur public.
    Oui.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Vous avez la parole.
    Merci monsieur le président.
    Comme M. Mendicino utilise exclusivement le temps qui lui est alloué pour interroger le témoin à propos d'un rapport que ce dernier a déclaré avoir été publié récemment sur un site Web et dont ne dispose pas le présent comité, je demanderais à M. Mendicino de produire ce rapport, et que le gouvernement ne le diffuse pas en douce sur un site Web. Il devrait être déposé devant notre comité maintenant, en particulier si un interrogatoire est actuellement mené à propos de ce rapport, dont nous n'avons pas pris connaissance et qui n'a pas été déposé.
    Cela perturbe ma période éclair de questions, monsieur O'Toole.
    Des voix: Oh, oh!
    En effet, il s'agit d'un avantage supplémentaire.
    Était-ce le but?
    Me Champ a mentionné ce rapport et a déclaré qu'il doute de l'exactitude des chiffres qu'il contient. Honnêtement, je suis d'avis que le Comité devrait disposer de ce rapport.
    Je vais faire deux suggestions.
    Je ne crois pas qu'il s'agit d'un rappel au Règlement. Je crois qu'il s'agit d'un bon point de discussion.
    Je suis d'avis aussi que ce serait une bonne chose que notre comité reçoive ce rapport, à titre d'information. Je vais demander à notre analyste de nous aider à cet égard. Je crois que le rapport vient tout juste d'être diffusé. Nous l'obtiendrons.
    Puis-je poursuivre pendant une minute, monsieur le président?
    Oui, allez-y.
    Merci beaucoup.
    Je souhaite terminer sur ce point. Il existe des outils dont dispose le gouvernement dans le cadre de son rôle d'employeur afin de traiter de cette question. En dépit de cela, vous affirmez, selon votre expérience comme représentant d'employés de la GRC, qu'il s'agit d'une organisation dysfonctionnelle.
    Complètement et totalement.
    D'accord. C'est une très...
    Je viens de terminer un dossier l'automne dernier, il y a six mois. C'est grotesque. Il s'agit du cas du Collège canadien de police. C'est ridicule, mais j'ai déjà vu cela. Rien ne me surprend maintenant.
    Je crois que nous avons compris. Merci beaucoup.
    En supposant que le harcèlement demeure exclu des sujets traités à la table de négociation, est-ce que les membres de la GRC ont des recours sous le régime de la LRTFP en ce qui concerne la conduite d'un employeur en cas de pratique déloyale?
    Eh bien, j'imagine que si un membre est victime de harcèlement parce qu'il tente de se syndiquer ou parce qu'il est un représentant qui aidait un autre membre et qu'il a fait ensuite l'objet d'un traitement non équitable, vous avez raison, il s'agit d'une situation qui pourrait faire l'objet d'une plainte pour pratique déloyale et ainsi être soumise à la commission. Un gestionnaire aurait la capacité de faire cela, très certainement.
    En terminant, êtes-vous d'avis que si le harcèlement est exclu de la négociation collective cela équivaudrait à une violation de l'alinéa 2d) dont la justification ne pourrait être démontrée, comme l'exige l'article premier?
    Oui, cela est très possible. Cette question n'était pas soulevée dans le cas de l'APMO, mais d'autres cas ont été portés devant la Cour suprême du Canada, comme celui des Services de santé de la Colombie-Britannique. Ce cas touchait certaines conditions dans le milieu de travail imposées de façon unilatérale par l'employeur au titre de la loi du gouvernement de la Colombie-Britannique, et le syndicat s'est vu privé de la possibilité de négocier. Il a été conclu qu'il s'agissait d'une violation de la Charte, et j'estime que la même chose pourrait très bien être dite à propos de ces dispositions.
    Merci de votre patience, monsieur le président.
    Je remercie à nouveau les témoins.
    Merci.
    Merci aux témoins. Il nous a été utile de connaître des opinions qui sont quelque peu différentes de ce que nous avons déjà entendu.
    Je rappelle que nous nous réunirons jeudi à 11 heures. Nous commencerons notre étude article par article jeudi. Comme vous le savez, je crois que tous les partis se sont entendus pour que nous soit présenté un exposé particulier portant sur les articles 40 et 42 au cours de cette réunion. Cela sera effectué dans le cadre de l'étude article par article. Au moment de la réunion, nous déterminerons si nous commencerons par entendre cet exposé ou si nous continuerons les travaux et entendrons l'exposé au moment d'aborder les articles 40 et 42. Nous verrons ce qui est préférable pour les responsables qui présenteront l'exposé.
    Je tiens à vous dire combien j'estime être privilégié de présider ce comité aujourd'hui. J'adore la façon dont le Comité prend au sérieux les préoccupations de la GRC et notre mandat d'étudier rapidement un texte de loi qui nous a été renvoyé par la Cour suprême du Canada. Merci de votre excellent travail.
    La séance est levée.
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