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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 064 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 24 octobre 2017

[Enregistrement électronique]

  (1015)  

[Traduction]

    Je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité permanent de la défense nationale.
    Nous poursuivons aujourd’hui nos débats sur la crise en Ukraine et, dans ce contexte, c’est avec plaisir que nous accueillons Mme  Ivanna Klympush-Tsintsadze.
    Madame, nous ne nous sommes pas revus depuis les jeux Invictus et je suis ravi de vous accueillir à nouveau parmi nous. Merci de vous joindre à nous.
    C’est aujourd’hui la dernière réunion officielle que nous tenons sur ce sujet précis. Après vous avoir entendue, nous allons entamer la rédaction de notre rapport qui, nous l’espérons, comportera des recommandations très pertinentes sur la façon dont le Canada peut améliorer ses relations avec l’Ukraine et vous aider à atteindre les objectifs qui sont les vôtres.
    Je vous remercie encore de comparaître devant nous aujourd’hui. Nous allons commencer par écouter vos remarques préliminaires avant de passer à la période de questions et de réponses.
    La parole est à vous.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, je suis tout à fait reconnaissante et ravie de cette occasion de m’adresser à vous aujourd’hui. J’espère également que nos échanges vous permettront de recueillir toute l’information que vous souhaitez. Je tiens aussi à renouveler mes remerciements à ceux d’entre vous qui se sont rendus en Ukraine récemment et je salue chaleureusement ceux que je rencontre aujourd’hui pour la première fois.
    L’Ukraine et les Ukrainiens savent très bien quel est le prix de la démocratie. Au cours des dernières années, nous avons appris à la dure que la démocratie a besoin d’être protégée, qu’il faut parfois se battre pour elle et qu’il faut en prendre soin.
    Je suis convaincue que, à Ottawa, tout le monde sait précisément l’énergie qu’il faut mettre en œuvre pour assurer la démocratie. C’est exactement ce que nous, les citoyens et les politiciens ukrainiens, avons également appris, et nous essayons d’en apprécier toutes les dimensions depuis que nous avons retrouvé notre indépendance en 1991.
    Malheureusement, pendant toutes les années écoulées depuis que l’Ukraine est redevenue indépendante, l’intrusion de la Fédération de Russie, dans les domaines économiques et politiques du développement intérieur de notre pays, est devenue une habitude. À chaque fois que nous avons fait un pas en avant, la Russie a tenté de nous ramener deux pas en arrière. Son comportement plus agressif depuis 2014 a bien montré que son objectif premier concernant notre pays est, de facto, d’en prendre le contrôle.
    Malheureusement, lorsque Moscou a lancé cette guerre hybride totale contre l’Ukraine, elle voulait que notre pays abandonne sa souveraineté en échange d’un certain type de paix qui ne serait garantie et gérée que par la Fédération de Russie. Je tiens à insister sur le fait que, comme tous les autres pays, l’Ukraine veut la paix sur son territoire, mais pas aux dépens de son intégrité territoriale, de sa souveraineté, de sa démocratie et de son avenir.
    Pendant ces trois années de guerre, les combats contre la Fédération de Russie qui se sont déroulés exclusivement sur notre territoire ont entraîné la mort de plus de 10 000 civils et militaires, fait plus de 25 000 blessés et plus de 1,5 million de déplacés à l’intérieur du pays qui s’efforcent de vivre dans d’autres régions de l’Ukraine. Sept pour cent du territoire ukrainien a été occupé, et nous avons assisté à la destruction ou au simple vol de 20 % de l’économie ukrainienne et de sa production industrielle.
    Depuis que la Russie a lancé ses attaques dans l’Est de l’Ukraine, les combats ont détruit des centaines d’édifices résidentiels, d’installations culturelles, de santé et d’enseignement, nos réseaux d’alimentation en électricité et en eau potable, des routes et d’autres infrastructures. Le ministère ukrainien de la Défense chiffre les dommages, uniquement dans l’Est de notre pays, à environ 50 milliards de dollars.
    L’agression du Kremlin s’accompagne d’une stratégie de communication qui essaie de camoufler la dure réalité du comportement des Russes. Elle est soutenue par une succession ininterrompue de blogues sur les médias sociaux alimentés par les propagandistes russes. Ils mettent de l’avant leurs récits mensongers en empruntant divers canaux, comme Twitter, Facebook, les autres réseaux sociaux, les journaux, des groupes de réflexions et même différents partis politiques dans certains des pays européens.

  (1020)  

    L’objectif de ce vent de désinformation est en vérité de nous isoler de nos partenaires et de nos alliés de la communauté internationale, et de présenter au reste du monde une fausse image de ce qui se passe dans notre pays en prétendant qu’il s’agit d’une guerre civile interne et non pas d’une agression réelle de la Fédération de Russie sur notre territoire. C’est le genre de choses que votre voisin immédiat appelle souvent et, je crois à juste titre, des « fausses nouvelles ».
    Tout au long de 2017, la Russie a resserré sa poigne sur les territoires occupés de l’Est de l’Ukraine. Elle a commencé à reconnaître de faux documents émis par ce qu’elle appelle les autorités locales. Elle a créé dans cette région une zone rouble. Elle a exproprié les entreprises ukrainiennes publiques et privées. Elle a encore accéléré sa promotion de la vision non ukrainienne de l’avenir du Donbass, en commençant par vanter ce qu’elle appelle la Novorossiya, ou Nouvelle Russie, et la Malorossiya, ou Petite Russie, et en allant jusqu’à l’intégration de ces régions dans la Fédération de Russie.
    Des sources indépendantes ont montré à maintes reprises que des trains militaires arment et organisent des formations armées illégales qui combattent les forces régulières ukrainiennes sur la ligne de front. De plus, la Fédération de Russie a intégré ces forces armées illégales dans sa propre chaîne de commandement militaire. Nous savons et pouvons affirmer avec force que non seulement des mercenaires russes et quelques citoyens ukrainiens vivant sur ces territoires participent au combat, mais aussi que des troupes régulières russes dites « en vacances » sont présentes et engagées contre les forces armées ukrainiennes qui se trouvent dans la région.
    Dans la partie occupée du Donbass, la Russie veille à ce que ses hommes de main soient alimentés régulièrement en armes et en équipements militaires. Nous avons déjà vu 69 prétendus convois humanitaires de plusieurs douzaines de camions. Ils n’avaient en vérité rien d’humanitaire, car ils transportaient des armes et des munitions pour permettre à leurs hommes de main de s’attaquer aux troupes ukrainiennes. À chaque fois que nous avons signé un protocole de Minsk, nous avons fait plusieurs tentatives d’instaurer un cessez-le-feu, et à chaque fois que nous nous y sommes essayés, celui-ci a été violé par des milices relevant de la Fédération de Russie et soutenus par elle.
    J’ai quelques exemples récents à vous donner. Depuis le 1er juin 2017, nous avons voulu instaurer un cessez-le-feu à l’occasion de la Journée internationale des enfants. La trêve a été rompue dès le second jour. Ensuite, au milieu de l’été, nous avons voulu faire de même avec ce qu’on appelle la « trêve des récoltes ». Celle-ci a échoué également. Nous avons également tenté de négocier un cessez-le-feu, et nous pensions être parvenus à un accord pour le retour des enfants à l’école, commençant le 31 août, mais celui-ci a ouvertement été rompu par des militants des territoires non contrôlés par Kiev.
    Les questions humanitaires compliquent également la situation dans la région. Malheureusement, nous avons actuellement 405 noms sur la liste des personnes manquantes au Donbass, et nous ne constatons aucune tentative ni aucun intérêt de la Fédération de Russie d’entamer réellement des négociations pour organiser des missions qui nous aideraient à trouver les personnes manquantes dans les territoires que nous ne contrôlons pas. De plus, la Russie et ses hommes de main continuent de bloquer le processus de libération des otages et des personnes détenues de façon illégale, bien que Moscou se soit engagée à les libérer dans le cadre du processus de Minsk. Actuellement, les militants prorusses détiennent 152 otages.

  (1025)  

    Il faut ajouter à cela que la Russie garde sur son territoire au moins 15 prisonniers politiques ukrainiens, et 29 dans la république autonome de Crimée et dans le territoire de Sébastopol qui sont occupés temporairement.
    La Fédération de Russie et ses hommes de main ignorent totalement deux grands principes, la libération immédiate et l’emploi d’une formule du « tout pour tous ». Nous tenons à garantir la paix en Ukraine et à restaurer notre intégrité territoriale par des moyens politiques et diplomatiques. Nous n’économiserons pas nos efforts pour tenir les engagements que nous avons pris dans le cadre des accords de Minsk et nous sommes toujours prêts à mettre en oeuvre un cessez-le-feu complet et durable.
    Nous avons déjà retiré des armes lourdes et garanti l’accès sur le terrain à la Mission de surveillance spéciale de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l’OSCE, pour lui permettre de vérifier que nous respectons nos engagements. Malheureusement, cette mission spéciale n’a pas, comme nous en avions convenu dans l’accord de Minsk, eu accès à l’ensemble des territoires occupés, pas plus qu’aux 400 kilomètres de zone frontalière entre l’Ukraine et la Russie qui ne sont plus sous notre contrôle.
    Nous n’avons eu d’autres choix que de constater que, malgré les efforts de bonne foi de l’Ukraine pour mettre en oeuvre les accords de Minsk, la Fédération de Russie a délibérément et unilatéralement contrevenu aux engagements qu’elle avait pris en paraphant l’accord de Minsk. Au cours de la dernière année, la situation des droits de la personne et celle de leur sécurité dans la Crimée annexée illégalement se sont aussi détériorées. La Russie a transformé la péninsule, qui était auparavant une attraction touristique, en une base militaire. Cela a non seulement fait grimper les tensions pour nous, ici, en Ukraine, mais également dans les petits États avoisinants de la région de la mer Noire.
    L’occupant favorise l’intolérance envers les dissidents. Il impose des règles illégales en exerçant des pressions, pratiquant des persécutions, des détentions et des enlèvements. Dans le rapport le plus récent du Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, qui vient d’être publié le 23 septembre, celui-ci souligne, et je tiens à insister sur ce point, les violations multiples et graves des droits de la personne par la Russie agissant comme puissance occupante. Il relève entre autres des nationalisations à grande échelle de biens privés, communaux et publics, des détentions illégales et arbitraires et des enlèvements, des exécutions sommaires et d’autres violations des droits et des libertés fondamentales de la personne, ainsi que la modification de la composition ethnique de la Crimée par l’imposition, sous la contrainte, de la citoyenneté russe.
    L’un des droits les plus fondamentaux de la personne a été systématiquement limité depuis l’occupation de la Crimée. Il s’agit du droit de se réunir pacifiquement garanti par la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Depuis l’annexion illégale de la Crimée par la Russie, 256 participants à des réunions pacifiques ont fait l’objet de poursuites au titre de ce que les autorités appellent « la responsabilité administrative » en Crimée. Je me ferais un plaisir de vous en donner quelques exemples, peut-être pendant notre période de questions et de réponses, si l’occasion se présente.
    L’un des éléments les plus importants qui, à mon avis, devraient retenir votre attention a été, en 2016, la proscription de l’Assemblée des Tatars de Crimée, ou Mejlis, qui était le plus important organisme de représentation des Tatars de Crimée, un peuple autochtone vivant dans cette région de notre pays. Cette décision a été motivée par l’accusation qui leur était faite, et je cite, « de propagande d’agression et de haine envers la Russie, poussant la société au nationalisme et à l’extrémisme ethniques. »
    Il faut de plus savoir que toutes les écoles ukrainiennes ont été fermées. La Fédération de Russie mène actuellement une politique très rigoureuse de « désukrainisation » de la Crimée.

  (1030)  

    Pour assurer la survie de notre pays, il nous a fallu reconstruire nos forces militaires dans l’urgence. En remontant à 2014, nous avons constaté que nos forces armées avaient, pour l’essentiel, été délibérément détruites, et qu’elles étaient infiltrées par des agents russes. À la même époque, alors que nous combattions l’agression russe, nous avons dû reconstruire nos forces armées à partir de rien pour renforcer notre capacité à nous protéger contre la Fédération de Russie. Pour survivre, il fallait que nous puissions cantonner la Russie à nos portes. En même temps, pour assurer notre développement, il nous fallait entamer la réforme de notre pays. Les changements auxquels nous avons voulu procéder au sein de nos frontières ont nécessité énormément d’efforts humains et intellectuels, beaucoup d’assistance technique et la volonté politique dont nous faisons actuellement la preuve.
    Notre démocratie et notre respect de la primauté du droit ont atteint maintenant des niveaux inconnus par le passé en Ukraine. Après des pronostics de dégradation de notre situation économique en 2014 et en 2015, notre économie s’est enfin stabilisée à la fin de 2016 sous l’effet des mesures énergiques prises par le gouvernement, le Parlement, le président, avec l’appui de la société civile ukrainienne.
    Pour sa politique étrangère, l’Ukraine s’est dotée de deux objectifs primordiaux: son intégration à l’espace politique, économique et juridique européen et son intégration à la communauté transatlantique de sécurité. Dans le cas du premier objectif, nous avons conclu un accord d’association avec l’Union européenne qui vient très récemment, c’est-à-dire le 1er septembre, d’entrer pleinement en vigueur, un accord qui constitue pour nous un guide pour les changements et les réformes que nous devrons appliquer dans notre pays. Nous avons d’ailleurs le soutien inconditionnel de l’ancien gouvernement pour mettre en oeuvre cet accord d’association dans l’intérêt de notre population.
    Je dois également insister auprès de vous sur le fait que les dispositions permettant à nos concitoyens de se rendre dans l’Union européenne sans avoir à demander de visa sont maintenant entrées en vigueur. Nous avons pu obtenir ce régime grâce à toutes les réformes que le Parlement et le gouvernement ukrainien ont mises en place, avec l’aide de la société civile et du président. Nous avons tenu tous les engagements que nous avions pris.
    En juin, notre Parlement a également déclaré sans ambiguïté que nous avions un autre objectif de politique étrangère qui était de nature stratégique pour nous: devenir membre de l’OTAN. Nous savons fort bien que, actuellement, c’est à nous qu’il incombe de réformer nos secteurs de la défense et de la sécurité pour qu’ils respectent les normes de l’OTAN, et c’est pourquoi nous avons adopté des stratégies devant nous permettre de faire évoluer dans la bonne direction nos forces armées et nos systèmes de défense et de sécurité.
    Comment la communauté internationale peut-elle aider l’Ukraine? L’ensemble du monde civilisé commettrait une erreur tragique s’il pensait que les actions de la Russie visent exclusivement l’Ukraine. Il nous faut bien réaliser que cette agression ne touche pas uniquement l’Ukraine. Elle ne vise pas exclusivement notre pays. L’an dernier, le monde a été secoué en apprenant à la suite de rapports de plus en plus précis comment la Russie avait tenté d’influencer les élections américaines de 2016.
     Je suis convaincu que vous avez tous suivi la tentative de coup d’état russe au Monténégro. On a également détecté des traces d’intervention russe lors du référendum organisé aux Pays-Bas pour s’opposer à la ratification de l’accord d’association avec l’Ukraine. Cette stratégie russe plus large vise manifestement à déstabiliser le monde occidental en mettant l’accent sur les différences et les divisions existantes, et en les amplifiant, plutôt qu’en appuyant n’importe quel parti politique.
    Je crois que, pour nous tous, il s’agit avant tout d’une question horizontale de sécurité nationale touchant chacun de nos pays.

  (1035)  

    La Russie va continuer à utiliser diverses tactiques pour miner les démocraties occidentales et pour diviser les nations, y compris en achetant des publicités en ligne destinées à perturber la vie politique.
    Aujourd’hui, la Russie constitue non seulement une menace existentielle pour des pays comme l’Ukraine, la Moldavie ou la Géorgie, mais également une menace bien réelle pour l’Union européenne, en vérité pour l’ensemble de l’Europe, pour l’OTAN et pour des pays d’Amérique du Nord. Il faut bien réaliser qu’elle s’attaque à toutes les valeurs sur lesquelles la civilisation occidentale s’est appuyée au cours des 70 dernières années pour assurer sa prospérité.
    Il est devenu de plus en plus évident depuis 2008, et en particulier depuis 2014, que le régime du Kremlin n’envisage pas un monde dans lequel tous seraient gagnants. Il perçoit l’Occident comme un adversaire. Ce n’est pas que l’Occident fasse ou ait fait quelque chose qu’il n’aurait pas dû faire, mais c’est tout simplement que c’est la logique avec laquelle les dirigeants russes analysent le monde.
    Nous savons tous que la réaction de l’Ukraine aux agressions de la Fédération de Russie permet actuellement aux pays membres de l’OTAN de réfléchir à la situation. Elle leur laisse le temps de consolider l’organisation. Elle leur permet aussi de prendre la mesure de la menace à laquelle ils sont exposés et d’envisager avec précision les mesures qu’ils prendront ultérieurement. Il me paraît donc de la plus haute importance que l’OTAN dispose et ait disposé de temps, et c’est la raison pour laquelle nous voyons d’un bon oeil la présence au cours des années à venir de l’OTAN en Europe, en Lettonie, en Lituanie, en Estonie et en Pologne, ainsi que dans la région de la mer Noire, en fonction de la situation dans ce dernier cas.
    Je tiens à profiter de cette occasion pour remercier tout particulièrement le Canada de nous avoir envoyé 200 formateurs et des effectifs de ses forces armées pour assurer la formation des nôtres. Je sais que c’est là une expérience bilatérale qui profite aux deux parties parce que nos soldats et nos officiers font également part de leur expérience à vos troupes. Nous sommes également reconnaissants envers vous d’avoir stationné 450 soldats canadiens en Lettonie. Nous vous en remercions.
    Le rôle actif que le Canada joue dans l’OTAN, qui s’explique par la conviction que vous avez qu’il faut partager le lourd fardeau de la défense, incarne les caractéristiques et les valeurs qui motivent aujourd’hui le programme de réforme de l’Ukraine. La foi que nous avons dans ces valeurs est le motif spirituel à la base de notre lutte contre les défis posés par M. Poutine à chacun des États, aux alliances internationales et aux règles et aux principes mêmes qui protègent la sécurité internationale.
    La communauté internationale doit bien réaliser que venir aujourd’hui en aide à l’Ukraine est un investissement dans sa propre sécurité. La pierre d’achoppement de l’approche occidentale face aux problèmes de l’Ukraine doit être une stratégie tenace et cohérente, s’inspirant de valeurs démocratiques courantes. Il faut donc une approche unifiée de chaque État démocratique qui s’oppose à l’agression de la Russie. On ne doit donc pas se comporter avec elle comme si de rien n’était. La communauté internationale doit réviser et recadrer ses relations avec la Russie jusqu’à ce que l’Ukraine revienne à l’État d’avant-guerre.
    Les sanctions les plus efficaces contre un agresseur sont les outils et les instruments diplomatiques. Il faut faire explicitement le lien entre ces sanctions et leurs objectifs précis comme le retrait de la Russie de Crimée et de la région du Donbass, le retour à l’intégrité territoriale de l’Ukraine et la réintégration des territoires ukrainiens en un seul État. Concrètement, les sanctions devraient augmenter graduellement en l’absence de progrès et ne pas être levées avant l’atteinte des objectifs.
    À ce sujet, je tiens aussi à remercier les parlementaires canadiens d’avoir appuyé la loi de Sergueï Magnitski. Si les pays occidentaux devaient lever les sanctions contre la Russie, il se peut que quelques-uns d’entre eux enregistrent à court terme une certaine augmentation de leurs échanges bilatéraux, mais l’abandon des sanctions risquerait de signifier pour la Russie que la déstabilisation de la politique étrangère, la violation du droit international, et des règles et des procédures internationales sont parfaitement acceptables.

  (1040)  

    Toute tentative d’apaisement des relations avec la Russie ne ferait qu’inciter celle-ci à poursuivre sur la même voie pour miner les démocraties et les normes internationales.
    Mesdames et messieurs les membres de ce comité, en luttant contre la Russie, nous ne nous battons pas pour notre droit à la démocratie ou pour notre souhait de participer à l’ordre mondial fondé sur des règles qui définit le système international. Nous luttons pour protéger le droit de tous les pays à la démocratie, à la prospérité et au respect des droits de la personne. Nous voulons défendre le droit de chaque pays de pouvoir faire appel en toute honnêteté à la communauté internationale pour obtenir son aide, et bien sûr pour la recevoir. J’espère sincèrement garantir et recevoir l’appui que nous avons eu jusqu’à maintenant du Canada, que vous poursuivrez votre implication dans notre cause et continuerez à faire preuve d’une compréhension claire et objective de la situation sur le terrain.
    Je vous remercie de votre attention.
    Madame la vice-première ministre, nous vous remercions de votre témoignage.
    Chers collègues, avant que nous entamions notre série de questions et de réponses, permettez-moi ce commentaire: tout le monde est intéressé par le sujet dont nous discutons aujourd’hui et je ne veux pas que vous fassiez traîner la discussion au point de réduire le temps de parole de vos collègues. Quand vous me verrez brandir ce morceau de papier, cela signifiera que je vous invite à terminer brièvement. Je pourrai ainsi donner la parole à l’un ou l’une de vos collègues et m’assurer que tout le monde a l’occasion de s’exprimer.
    Madame Alleslev, la parole est à vous. Vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à vous remercier, madame la vice-première ministre, de l’excellente description que vous nous avez donnée des défis et des moyens d’action.
    Vous avez insisté sur les progrès que vous avez réalisés dans les domaines de la politique, de la justice et des forces armées. Je me demande si vous pourriez nous préciser comment vous mesurez lesdits progrès. Pouvez-vous nous dire quels sont les critères de réussite qu’utilise votre gouvernement, et quelles sont les mesures, quantitatives et qualitatives, qui vous permettent de les évaluer?
    Sachez avant tout que, malheureusement, même après 23 ans d’indépendance, nous sentons encore l’influence de la bureaucratie soviétique à l’oeuvre en Ukraine. Nous avons constaté que les procédures et les règles en vigueur manquaient de transparence. Malheureusement, nous avons aussi observé que la corruption était encore présente dans quantité de domaines. C’est la raison pour laquelle, pour évaluer les progrès que nous avons réalisés, nous utilisons avant tout des données macro-financières. Nous savons, par contre, que ces progrès ne se traduisent pas immédiatement par une amélioration du bien-être de la population. Nous avons subi une récession très marquée en 2014 et 2015. Ce n’est qu’à la fin de 2016 que nous avons enregistré une faible croissance de notre PIB, qui a été de 2,3 %.
    Nous utilisons aussi des chiffres concernant les réformes précises que nous mettons en oeuvre. C’est ainsi que nous avons lancé un système électronique de passation de marchés absolument unique, que nous appelons ProZorro. Cela fait maintenant un an que ce système est opérationnel et nous avons pu constater qu’il nous a permis d’économiser près de 10 % du budget affecté aux marchés publics. Cela signifie que nous sommes parvenus à rompre le cercle vicieux de la corruption dans de nombreux cas. Nous venons tout juste de mettre en œuvre des règles transparentes pour l’attribution des marchés publics.
    C’est là une mesure très sérieuse dont les résultats peuvent être chiffrés. Nous continuons néanmoins à travailler à l’amélioration de ce système, qui est enfin devenu obligatoire pour tout le monde. Nous nous sommes heurtés à beaucoup de résistance dans divers domaines. Les gens ne voulaient pas l’utiliser, arguant de divers prétextes pour cela, mais nous avons exprimé notre volonté politique de poursuivre sur cette voie.
    C’est ce que nous avons fait dans quasiment tous les domaines. Même dans la situation économique désastreuse qui était la nôtre, et avec l’obligation de consacrer tous les ans plus de 5 % de notre PIB à la défense et à la sécurité, nous sommes parvenus à gérer une augmentation du salaire minimum des citoyens ukrainiens. C’est là une mesure très claire, en termes quantitatifs et qualitatifs car, même dans une situation économique des plus difficiles, nous tenions à ce que les gens bénéficient d’une meilleure protection sociale.
    De plus, depuis le début de 2017, nous avons commencé à relever les salaires des enseignants et des infirmiers. Nous venons tout juste d’adopter une réforme des pensions. C’était là une tâche énorme à laquelle s’est attaqué le gouvernement ukrainien. Dieu merci, grâce au travail que nous avons tous fait et au Parlement, nous avons pu adopter cette réforme qui, permet aux gens de toucher des pensions plus élevées et plus justes et comporte des mesures pour que, à l’avenir, nous soyons en mesure de financer celles-ci en éliminant progressivement le déficit de leurs sources de financement qui atteint actuellement 50 % des obligations.

  (1045)  

    C’est très bien. Pourriez-vous maintenant nous parler un peu du fonctionnement de la justice? Quelles sont les mesures que vous utilisez pour évaluer son indépendance et la réussite de vos réformes?
    Le système judiciaire n’est en rien isolé des autres dimensions de notre société. Au cours des trois ans qui viennent de s’écouler, nous sommes parvenus à mettre en œuvre un système complètement nouveau d’institutions luttant contre la corruption, en commençant avec le Bureau national de lutte contre la corruption de l’Ukraine et l’Agence nationale anticorruption, en entamant des poursuites dans les cas de corruption et nous essayons actuellement de déterminer la meilleure façon de procéder à la mise en place d’un tribunal anticorruption.
    Au cours de cette année…
    Excellent. Je ne dispose pas de beaucoup de temps et j'aimerais passer à une autre question.
    Comme vous le savez, nous, les parlementaires canadiens, avons pour rôle de gérer des ressources limitées, et il nous faut expliquer à la population ce que nous faisons et pourquoi cela est important. Comment qualifieriez-vous les choses que le Canada a faites et fait pour vous? Quelles sont les choses les plus importantes et quelles sont les mesures que vous voudriez voir renforcer ou prendre à l'avenir, ou quelque chose du genre?
    Comment qualifieriez-vous l'appui que le Canada vous a apporté par rapport aux mesures essentielles que vous souhaitez que nous prenions ou que nous renforcions?

  (1050)  

    Premièrement et surtout, j'aimerais mentionner l'appui politique. Il ne faut pas le minimiser, parce que c'est un appui très fort, tant moral qu'affectif, et qui touche tous les citoyens ukrainiens.
    Le Canada a joué un rôle essentiel dans la reconstruction de nos forces armées. Comme je l'ai déjà mentionné, nous sommes très heureux que le programme de formation ait été prolongé et qu'il continue à être mis en oeuvre.
    Nous avons également eu le plaisir et l'honneur d'obtenir un appui très particulier, celui du Conseil sur la réforme de défense de l'Ukraine, qui travaille sur la réforme du secteur de la sécurité avec notre ministre de la Défense. L'engagement décisif et concret que le Canada a pris à l'égard de la nouvelle réforme de la police qui est en train de prendre forme et de prendre de l'ampleur en Ukraine a joué un rôle absolument essentiel. Je dirais également que le Canada a joué un rôle important pour ce qui est de l'appui fourni au système judiciaire et à la préparation de cette nouvelle commission d'enquête.
    Un autre aspect de la participation canadienne, qui m'est très important personnellement, est que, par le truchement d'UN Women, le Canada appuie nos politiques axées sur l'égalité des sexes. C'est la première fois que le gouvernement ukrainien a décidé de confier un rôle de coordination en matière de politique relative aux sexes au vice-premier ministre. Habituellement, c'est un simple ministère qui est responsable de cet aspect dans le cadre des politiques sociales. Nous travaillons en étroite collaboration avec le Canada par l'intermédiaire d'UN Women pour remplir les engagements que nous avons pris pour la mise en oeuvre de la résolution 1325 des Nations unies et de la CEDAW.
    J'aimerais que vous continuiez votre action.
    Je vous remercie.
    Monsieur Bezan, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie madame la vice-première ministre Klympush-Tsintsadze. Je suis très heureux de vous revoir et de vous accueillir à notre comité.
    Je sais que vous vouliez faire figurer un certain nombre de choses dans notre compte rendu, après les réunions que nous avons eues à Kiev le mois dernier.
    Je vais simplement poursuivre sur les commentaires qu'a faits Mme Alleslev au sujet de la contribution du Canada et des mesures utiles que nous prenons. Pourriez-vous nous dire si nous devrions envisager de faire autre chose? Je sais que le gouvernement canadien précédent a également fourni à l'Ukraine les images du RADARSAT. Cette pratique a été supprimée par l'ancien ministre des Affaires étrangères, M. Dion, et lorsque le président Proroshenko est venu ici au Canada, il y a quatre ou cinq semaines, il a demandé que les images du RADARSAT lui soient à nouveau fournies. Pourriez-vous me confirmer que c'est bien un service dont l'Ukraine a toujours besoin?
    Dans le cadre des travaux du Comité et des recommandations que nous allons présenter au Canada au sujet des mesures que nous pouvons prendre pour aider l'Ukraine, quelles sont celles que le Canada pourrait prendre, en particulier dans le dossier de la défense, pour aider les forces armées ukrainiennes? Également, pour ce qui est du maintien de la paix par l'ONU, il y a la proposition russe et la proposition ukrainienne. Pourriez-vous également commenter ces aspects?
    Je vous remercie.
    Je suis moi aussi heureuse de vous revoir.
    Je vous remercie d'avoir soulevé la question très précise des images satellites, que nous recevions auparavant du Canada. Je sais que nous poursuivons ce dialogue, à la fois par le truchement de notre ambassade et par celui d'autres réseaux, au sujet de la possibilité de rétablir ce transfert et d'obtenir des images claires à haute résolution qui pourraient nous aider à mieux défendre notre pays.
    En outre, même si nous avons reconstruit nos forces armées à partir de zéro et, malgré le fait que nous avons aujourd'hui une armée permanente qui vient au deuxième rang en importance en Europe, notre personnel a encore besoin d'équipement, de formation, de postes de commandement modernes, de contrôle et de procédures de communication, ainsi que de conseils pour ce qui est d'adapter notre armée aux normes de l'OTAN et, enfin, d'armes létales. Il s'agit pour nous d'être mieux en mesure de nous défendre et de veiller à réduire le nombre de victimes que nous avons en raison des bombardements et des violations du cessez-le-feu qui viennent des territoires non contrôlés.
    J'ai quelques chiffres avec moi. Lorsque les États-Unis nous ont fourni des radars de contre-batterie de moyenne portée, le pourcentage des victimes causées par les tirs de mortier est passé de 43 à 17 %, ce qui veut dire que nous avons manifestement sauvé des vies grâce aux armes létales de haute technologie qui nous ont permis également de mettre fin à l'agression et d'augmenter le prix à payer pour les attaques lancées par la Fédération russe contre l'Ukraine.
    L'Ukraine a présenté un projet de mission de maintien de la paix de l'ONU sur le territoire de l'Ukraine en 2015. En outre, le Parlement ukrainien a donné à notre président le droit de faire appel à l'ONU. Malheureusement, le secrétaire général de l'époque n'a pas donné suite à cette initiative ukrainienne.
    Il y a quelques mois, nous avons constaté que Poutine avait décidé de présenter ce qu'il appelle une « suggestion », selon laquelle des forces de maintien de la paix de l'ONU pourraient être présentes en Ukraine. Cette proposition a déclenché un certain nombre d'alertes rouges qui montraient pourquoi nous ne pouvions accepter cette proposition telle que présentée et suggérée. Par exemple, nous pensons que la mission de maintien de la paix de l'ONU doit viser l'ensemble du territoire occupé. Cette mission doit contrôler la frontière incontrôlée entre la Fédération russe et l'Ukraine, et non pas être stationnée dans cette région pour protéger la mission de surveillance spéciale de l'OSCE. En fait, pour viser la réintégration des territoires, il faut que cette mission s'effectue dans le territoire non contrôlé.
    Je ne sais pas pourquoi la Fédération russe a présenté cette proposition de cette façon, mais nous sommes tout à fait disposés à explorer toutes les possibilités dans le cadre d'un dialogue et c'est ce que nous faisons. Cependant, elle contient, de toute évidence, des choses que nous ne pouvons pas accepter. Nous ne pouvons pas non plus accepter que des ressortissants russes participent à cette mission de maintien de la paix. Cela constitue une condition absolument essentielle pour que les forces de maintien de la paix puissent être stationnées ici.

  (1055)  

    Vous avez parlé de la question des armes défensives. Une des choses qu'on nous a dites pendant que nous nous trouvions à Kiev et à Lviv était la possibilité d'une collaboration avec l'industrie de la défense. Je me demande si vous pouvez commenter cet aspect.
    C'est une autre question et une autre possibilité. Je sais que des collègues d'Ukroboronprom, l'industrie de la défense ukrainienne, ont prévu de visiter le Canada à la fin du mois de novembre pour présenter des suggestions très concrètes et, je l'espère, très intéressantes afin d'établir une collaboration industrielle dans le secteur de la défense, mais également dans le secteur aérien, qui pourrait encore une fois être mutuellement avantageuse et intéressante pour les deux parties, l'Ukraine et le Canada.
    Nous utilisons déjà dans nos avions certaines composantes fabriquées au Canada. Nous utilisons ces composantes pour remplacer celles que l'Ukraine importait auparavant de la Fédération russe. Nous nous trouvons dans une situation favorable au renforcement de notre coopération dans le secteur industriel.
    Nous espérons également retirer des bénéfices de l'Accord de libre-échange entre le Canada et l'Ukraine qui a été récemment signé et qui est entré en vigueur cet été. Il pourrait également favoriser la promotion des points forts de nos deux pays.

  (1100)  

    Monsieur Garrison.
    Merci, monsieur le président.
    Madame la vice-première ministre, je vous remercie d'être à nouveau avec nous. J'ai rarement entendu une description aussi éloquente des difficultés auxquelles fait face un pays, que celle que vous nous avez faite ce matin. Je vous remercie de nous l'avoir présentée.
    Je sais qu'on parle souvent de la situation en Ukraine en disant que cela revient à « réparer un avion en vol ». Je crois que l'on pourrait ajouter à la fin de cette expression, « par mauvais temps ».
    Depuis notre visite, je crois savoir que le Parlement a réussi à introduire des réformes dans le secteur des soins de santé et sur la question de l'immunité parlementaire.
    Pourriez-vous brièvement nous en parler?
    En fait, la collaboration entre le gouvernement et le Parlement a permis d'enregistrer d'excellents résultats dans le domaine de la réforme des pensions, de l'éducation et des soins médicaux. Vous pouvez imaginer que ces trois aspects touchent concrètement tous les citoyens et toutes les familles de notre pays. C'est le cadre juridique avec lequel il va falloir maintenant travailler; il faudra que le gouvernement et l'exécutif s'intéressent à ces secteurs et y consacrent des ressources.
    Comme vous l'avez entendu récemment, les parlementaires ont examiné la semaine dernière deux projets de loi qui proposent la suppression de l'immunité des parlementaires en Ukraine. De nombreuses forces politiques demandaient cette mesure. Elle faisait également partie de la promesse qu'avaient faite de nombreuses forces politiques qui siègent au Parlement aujourd'hui. La procédure que nous sommes tenus de suivre, la démarche initiale, lorsqu'il s'agit de modifier la constitution, consiste à approuver par un vote l'envoi des projets de loi au tribunal constitutionnel. Cela a été fait à une majorité impressionnante et selon un vote presque unanime du Parlement, la semaine dernière.
    Cela fait également partie du processus qui aidera, nous l'espérons, l'Ukraine à lutter contre la corruption de façon plus efficace et à mettre en place des méthodes de gouvernance plus transparentes et responsables.
    Merci.
    Lorsque nous vous avons rencontrée en Ukraine, vous avez parlé de l'importance d'un accès sans visa au Canada dans le but de renforcer les relations entre nos peuples. Nous avons entendu ce commentaire également de la part du Congrès ukrainien canadien hier matin au cours de nos séances.
    Y a-t-il des discussions en cours avec le gouvernement canadien au sujet de l'établissement d'un régime sans visa pour l'accès au Canada des Ukrainiens? Nous avons posé la question au Parlement hier, mais nous n'avons pas obtenu une réponse bien claire. De votre côté, ces discussions ont-elles démarré?
    Oui, nous avons commencé ces discussions de notre côté. Nous sommes disposés à examiner des conditions spéciales, par exemple, pour le Canada, pour ce qui est d'accorder un accès sans visa à un autre pays. Si ces conditions ou ces normes ne sont pas respectées pour le moment par l'Ukraine, je crois que nous sommes tout à fait disposés à essayer de le faire, parce qu'il existe une relation traditionnelle entre le Canada et l'Ukraine; nous avons également la possibilité de renforcer des échanges bilatéraux et d'augmenter les rapports entre nos peuples en facilitant les déplacements entre le Canada et l'Ukraine.
    Comme vous le savez, les Canadiens n'ont pas besoin d'un visa pour se rendre en Ukraine et nous sommes heureux d'accueillir tous ceux qui sont prêts à prendre un vol transatlantique. Nous serions heureux d'accueillir davantage de Canadiens, non seulement dans un but commercial, mais également pour des voyages d'agrément pour ceux qui se rendent en Europe.

  (1105)  

    Merci. J'aimerais beaucoup le faire à nouveau.
    Hier, le Comité a entendu un témoignage quelque peu inquiétant selon lequel il semblait que le gouvernement canadien continuerait à financer jusqu'en 2018 seulement les programmes d'aides bilatéraux portant sur des aspects comme la formation militaire et la lutte contre la corruption et que ces programmes ne seraient peut-être pas renouvelés.
    Avez-vous demandé très clairement au gouvernement canadien de poursuivre la mise en oeuvre de ces programmes, et avez-vous obtenu des réponses au sujet du financement futur de ces programmes de formation de la police et de l'armée, et de lutte contre la corruption?
    Nous n'avons pas encore obtenu d'indication claire sur la façon dont ces programmes vont évoluer et se développer. Nous allons toutefois continuer à faire connaître nos arguments et à expliquer le chemin que nous pourrions prendre et ce que nous ferons grâce à cet appui et à cette formation, à la fois dans les institutions chargées de lutter contre la corruption et dans celles qui ont pour objet de former l'armée.
    Malheureusement, nous sommes encore dépendants dans ce domaine. En outre, un de mes principaux messages que j'adresse à tous nos partenaires étrangers consiste à leur demander de préserver ces organismes de lutte contre la corruption que nous avons créés et mis sur pied, pour lesquels nous avons encore besoin de personnel de très haut niveau. Il y a encore dans le pays des forces qui ne sont pas très favorables aux activités de ces organismes. Nous voulons être sûrs que l'action de ces organismes soit très professionnelle et que personne ne puisse remettre en question le bien-fondé de leur mission. Ce n'est qu'en poursuivant une formation spécialisée donnée par des gens qui savent comment le faire que nous y parviendrons.
    Nous espérons que ces actions vont se poursuivre.
    Je vous remercie.
    Merci.
    Monsieur Darren Fisher.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis très heureux de vous revoir, madame la vice-première ministre, même si ce n'est que virtuellement.
     Je vais poser des questions comparables à celles que j'ai posées hier à Paul Grod et vous en avez parlé également. La Russie utilise les médias pour diffuser sa propagande dans toute l'Ukraine. Vous avez utilisé l'expression « un déluge de désinformation » et vous avez mentionné que les Russes présentaient chez eux la situation comme étant une guerre civile interne, non seulement chez eux, mais également dans le Donbass. The Economist, parlant de la région du Donbass, a déclaré « [...] de façon tout à fait absurde, malgré les tirs d'artillerie quotidiens, la plupart des ressortissants pensent que c'est l'Ukraine et non la Russie qui est la cause de leurs souffrances ».
    Cette guerre de l'information est très efficace dans la région du Donbass, mais lorsque nous nous sommes rendus en Ukraine, nous avons constaté que les personnes qui vivaient dans ces secteurs étaient favorables à l'Union européenne. Plaçons-nous à une époque où la situation aurait reçu une solution pacifique, peut-être grâce à une force de maintien de la paix; comment pourrions-nous réintégrer la région du Donbass à l'Ukraine? Je tiens pour acquis que l'appui donné à l'Union européenne se retrouve dans l'ensemble du pays, à l'exception de quelques poches. Comment ramener cette région au sein de l'Ukraine?
    Vous avez raison de dire que les gens qui vivent dans les territoires occupés sont malheureusement continuellement la cible d'attaques dans le domaine de l'information par ce que l'on appelle les médias russes. Je suis heureuse de constater que nous ne sommes pas les seuls à qualifier de propagande les nouvelles fournies par les médias russes. Ces attaques visent non seulement la Fédération russe et la région occupée du Donbass, mais également certains médias russes comme Russa Today et Sputnik. Enfin, le monde comprend de mieux en mieux les nouvelles que nous recevons.
    Je suis certaine qu'il faudra du temps pour que les gens qui vivent dans ces territoires recouvrent leurs esprits. Lorsqu'ils auront accès à différents types d'information, ils seront en mesure de les absorber, de les analyser et de mettre fin au syndrome de Stockholm, de récupérer leur dignité en sachant qu'ils n'ont plus rien à craindre. Il leur faudra toutefois beaucoup de temps, une fois les armes retirées, une fois effectué le retrait des troupes et des mercenaires, pour qu'ils puissent reprendre leur vie quotidienne et recommencer à penser.
    Un autre aspect de ce succès est le territoire qui est contrôlé par les FAC. En 2008, au cours du sommet que l'OTAN a tenu à Bucarest, Poutine a déclaré que l'Ukraine était un État en faillite. C'est exactement ce que souhaite la Russie. Elle veut être sûre que nous n'allons pas réussir. Nos succès la chagrinent.
    En enregistrant des progrès avec nos réformes économiques, nos réformes sociales, et en renforçant la démocratie dans l'ensemble du territoire de l'Ukraine, il sera plus facile à la population du Donbass de revenir à la normalité. Lorsqu'ils constateront que, derrière la ligne de séparation, la vie continue et que la population est prospère, cela aura un effet beaucoup plus fort que n'importe quelle campagne publicitaire ou politique faite dans le territoire du Donbass. C'est en travaillant ensemble et en réussissant que nous réintégrerons le plus facilement cette population.

  (1110)  

    Hier, on nous a parlé des milliers de kilomètres de frontières poreuses qui séparaient la Russie de l'Ukraine. Que fait le gouvernement pour sécuriser cette frontière? On fait du trafic d'armes et du commerce illégal dans ces secteurs. Que pouvez-vous faire? Quelles sont les mesures que vous pouvez prendre pour résoudre ce problème?
    Comme vous le faites très clairement remarquer, comme je l'ai dit plus tôt, nous nous sommes retrouvés 23 ans après l'indépendance avec ces lacunes dans notre développement. Il avait été auparavant décidé consciemment de faire en sorte que l'Ukraine puisse être pénétrée par la Fédération russe, pour qu'elle dépende de la Fédération russe sur le plan de l'économie et de l'énergie. Aujourd'hui encore, plus de 30 % de nos échanges commerciaux s'effectuent avec la Fédération russe.
    Il faut changer tout ceci, y compris le contrôle de la frontière. Nous avons formé nos gardes-frontières et ils ont connu d'excellents résultats dans leurs activités, et nous collaborons également étroitement avec l'Union européenne pour assurer la protection de nos frontières. Grâce à la mise en oeuvre du plan d'action visant la libéralisation du régime des visas, que nous devions respecter pour voyager sans visa dans l'Union européenne, nous avons pris des mesures pour gérer les flux migratoires et protéger nos frontières conformément aux règles et aux procédures qui sont acceptables pour les pays de l'Union européenne.
    Je crois qu'on vous a également présenté au cours de vos audiences des renseignements qui ne sont pas forcément manipulés, mais qui ne sont pas objectifs, selon lesquels la frontière ukrano-russe est transparente. Elle n'est plus transparente.
    Merci.
    Je pense que nous sommes à peu près arrivés à la fin de notre discussion d'aujourd'hui.
    Je vous remercie de nous avoir consacré votre temps.
    Au cours des prochains jours, le Comité va passer à l'étape de la rédaction d'un rapport et nous allons délibérer au sujet des recommandations de fond que nous allons présenter au gouvernement du Canada. Nous savons également — comme de nombreuses personnes l'ont dit — qu'il s'agit bien d'une guerre de l'information. Nous sommes heureux d'avoir pu vous aider, grâce à ce processus et à la visite que nous avons faite en Ukraine, à faire entendre votre voix sur la scène mondiale et à lutter contre la désinformation.
    Si nous pouvons faire autre chose pour vous à l'avenir, n'hésitez pas à prendre contact avec nous.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie. J'ai apprécié cette possibilité et je vous remercie pour tout le travail qu'effectue le Parlement du Canada et le gouvernement du Canada pour appuyer l'Ukraine.
    J'espère qu'il en sera de même à l'avenir et que nous, les Ukrainiens, allons contribuer en qualité de donateurs et de partenaires à la sécurité du monde entier, et aussi à celle du Canada.
    Je vous remercie.

  (1115)  

    Merci.
    La séance est levée.
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