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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 048 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 21 février 2017

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Français]

    C'est un plaisir de présider cette 48e réunion aujourd'hui. Je remplace le président du Comité, M. Paradis.
    Conformément au paragraphe 108(3) du Règlement, nous poursuivons notre étude sur les enjeux relatifs au dénombrement des ayants droit en vertu de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.
    Nous avons la chance et l'honneur d'avoir parmi nous à titre personnel M. Mark C. Power, associé et chargé de cours à la Faculté de droit de l'Université d'Ottawa, et M. Marc-André Roy, qui est avocat. Nous recevons aussi des représentants de la Fédération des communautés francophones et acadienne, la FCFA, soit Mme Diane Côté, directrice générale par intérim, de même que Mme Sylviane Lanthier, qui est la présidente de la Fédération. Nous avons aussi M. François Boileau, commissaire aux services en français de l'Ontario, qui comparaîtra devant nous par l'entremise de la vidéoconférence.
    Je vous remercie toutes et tous de votre présence.
    Juste avant de commencer, je vais céder la parole à M. Samson pour quelques secondes.
     Merci, monsieur le président.
    Je veux simplement déclarer que j'ai déjà embauché des membres du cabinet de M. Power, qui est l'un des témoins présents aujourd'hui, pour compléter un contrat de recherche pour mon bureau.
    Merci de nous en avoir informés, monsieur Samson.
    Nous allons commencer par les représentants de la FCFA, qui disposent de 10 minutes.
    Nous vous écoutons.
    Monsieur le président, membres du Comité, je vous remercie d'avoir invité la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada à vous parler ce matin des questions reliées au recensement en tant que mécanisme de dénombrement des ayants droit en vertu de l'article 23 de la Charte.
    Je prendrai comme point de départ une question qui a été posée par le statisticien Jean-Pierre Corbeil, la semaine dernière. Dans sa présentation, M. Corbeil a indiqué que le recensement ne permettait de dénombrer les ayants droit qu'en vertu de l'alinéa 23(1)a) de la Charte, soit de la première langue apprise et encore comprise. Il a ensuite déclaré ce qui suit:
    La question se pose donc de savoir dans quelle mesure cette seule information est pertinente eu égard aux fins visées.
    Pour répondre à cette question, il est utile de nous référer aux projections publiées il y a quelques semaines par Statistique Canada en ce qui a trait à l'évolution de l'immigration et des langues officielles au Canada d'ici 2036. Un des constats qui ressort de cette projection est qu'au fur et à mesure que la part de l'immigration augmente dans la population canadienne, la proportion de Canadiens et Canadiennes dont la langue maternelle est le français ou l'anglais diminue.
     Cette tendance, nous l'observons déjà dans nos communautés. Dans mon réseau de connaissances, chez moi au Manitoba, il y a Lassana, un Malien d'origine dont la langue maternelle n'est pas le français, mais qui utilise cette langue tous les jours. C'est en français qu'il communique avec sa femme, qui est Chilienne et hispanophone. Leur fille fréquente une école de langue française. Techniquement, ce sont des ayants droit, même si ni l'un ni l'autre n'a le français comme langue maternelle.
    Des exemples comme celui de Lassana et de sa conjointe, on en trouve de plus en plus dans toutes les régions du pays. Ce ne sont pas des exceptions; c'est le nouveau visage d'une francophonie qui évolue et qui se diversifie. C'est la réalité qui se vit au quotidien dans plusieurs de nos communautés. Identifier un francophone était sans doute beaucoup plus facile en 1982, lorsque la Charte canadienne des droits et libertés est entrée en vigueur. Ce l'est beaucoup moins aujourd'hui, alors qu'un nombre croissant de personnes qui ne sont pas nées au pays ou qui ont une autre langue maternelle vivent néanmoins en français et alors que les couples exogames ne sont plus simplement francophones et anglophones, mais aussi francophones et d'une autre langue.
     Dans ce contexte, il serait tentant de dire que le recours à la seule question sur la langue maternelle comme indicateur permettant de dénombrer les ayants droit revient en quelque sorte à affirmer que l'intention du législateur a été de figer dans la Charte une définition rigide de ce qu'est un francophone. Bien sûr, telle n'était pas l'intention du législateur, et c'est pourquoi l'article 23 comporte plusieurs alinéas qu'il faut interpréter de façon large, en fonction de l'objectif de la Charte, c'est-à-dire de garantir que ceux et celles qui vivent en français en milieu minoritaire puissent recevoir leur éducation dans cette langue.
    L'article 23 a été formulé avec des conditions d'admissibilité qui permettent d'inclure un grand nombre d'ayants droit, mais après trois décennies, le gouvernement du Canada ne s'est pas encore donné les moyens nécessaires pour identifier ou dénombrer ces individus d'une manière qui les englobe adéquatement. On le remarque maintenant, parce qu'en 2017, le seul recours à la langue maternelle n'est plus tenable.
    Le seul véhicule que nous ayons à notre disposition pour régler cette question problématique demeure le recensement. C'est pourquoi, de recensement en recensement, les communautés francophones et acadienne se mobilisent à ce point pour y répondre. Il est normal, au fur et à mesure que la francophonie canadienne se complexifie, de se pencher occasionnellement sur le recensement et de se demander s'il permet toujours de bien la mesurer.
    Pour revenir à l'article 23, on obtiendrait davantage de renseignements utiles si la formulation des questions linguistiques était autre que celle employée à l'heure actuelle. Par exemple, la combinaison des questions « Dans quelles langues avez-vous reçu votre éducation? » et « Dans quelles langues vos parents ont-ils reçu leur éducation? » permettrait d'identifier non seulement les individus de langue maternelle non officielle qui ont été éduqués en français, entièrement ou en partie, mais aussi ceux et celles qu'on appelle parfois les « francophones de la génération perdue ». Je fais allusion ici aux parents qui ont été éduqués en anglais alors que leurs propres parents avaient reçu leur éducation en français. Dénombrer ces personnes pour leur permettre d'inscrire leurs enfants à une école de langue française serait conforme à l'objectif corollaire de l'article 23 à titre de de réparation, un objectif qui a été reconnu par les tribunaux.
    De manière plus générale, les tendances lourdes au niveau démographique nous appellent à revoir la manière dont on dénombre les francophones au pays.

  (1110)  

     Nous appuyons la recommandation avancée par l'Association canadienne-française de l'Alberta, il y a deux semaines, afin que la question au sujet de la langue maternelle soit clarifiée pour que les Canadiens comprennent qu'ils ne sont pas obligés de choisir entre le français et l'anglais lorsqu'ils y répondent. Cependant, ce n'est là qu'une partie de l'équation. Il y a un appétit pour une définition, un outil de mesure, qui permette vraiment de déterminer qui sont ceux qui vivent réellement en français au Canada, peu importe leur origine ou leur langue maternelle, et dans quelles circonstances ils vivent en français.
    Cet appétit, on le voit dans la définition inclusive de francophone, la DIF, qui a été mise de l'avant par le gouvernement de l'Ontario. Ce n'est pas simple et, n'étant pas statisticiens, nous n'avons pas de solutions magiques à vous présenter aujourd'hui. Cette réflexion doit avoir lieu et elle n'est pas simple parce que la francophonie, en 2017, n'est pas simple.
    Avant de terminer, je me permets une réflexion d'ordre plus général sur l'accès à l'école de langue française. Au cours des dernières années, il est arrivé à au moins deux reprises qu'un litige entre un conseil scolaire et un gouvernement, en ce qui a trait au droit de déterminer l'accès à l'école de langue française, se retrouve devant les tribunaux. Dans le cas des écoles francophones aux Territoires du Nord-Ouest, la Cour d'appel du territoire a statué, il y a deux ans, que les gouvernements sont parfaitement justifiés de contrôler l'admission dans les écoles de la minorité, étant donné les coûts que cela représente. D'autre part, la Cour a affirmé que le droit à l'éducation en français garanti par la Charte vise les citoyens canadiens et exclut donc les immigrants. Mis en oeuvre, ces deux éléments peuvent avoir pour effet de réduire considérablement la population de nos écoles et de nuire à nos communautés.
    Dans un autre jugement sur les droits scolaires au Yukon, la Cour Suprême a confirmé que les gouvernements ont en effet le pouvoir de contrôler l'accès aux écoles de la minorité. Nous en prenons acte. Cela dit, il y a peut-être lieu, pour le gouvernement fédéral, d'encourager les provinces et les territoires à interpréter l'article 23 d'une façon large, généreuse et qui soit conforme à l'objectif et à l'intention du législateur. Considérant que plus de 15 % de la population de nos communautés provient de l'immigration, il serait très dommageable que les gouvernements appliquent une interprétation restreinte et qui interdit l'accès à nos écoles aux résidents permanents ou même temporaires provenant de pays francophones, sous prétexte qu'ils ne sont pas citoyens canadiens.
    Je vous remercie de votre attention et je suis prête à répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, madame Lanthier.
    Nous allons passer immédiatement au prochain intervenant, soit M. François Boileau, commissaire aux services en français de l'Ontario.
    Vous avez la parole.
    Monsieur le président, membres du comité, bonjour.
    Tout d'abord, j'aimerais vous remercier de m'avoir permis de comparaître devant vous aujourd'hui afin de présenter le mémoire du Commissariat sur les enjeux relatifs au dénombrement des ayants droit, en vertu de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. Les données recueillies par le recensement effectué par Statistique Canada permettent aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux de dénombrer leur population...
    Monsieur Boileau, je dois vous interrompre. Pouvez-vous ralentir votre débit, s'il vous plaît?
    D'accord.
    Les données recueillies par le recensement effectué par Statistique Canada permettent aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux de dénombrer leur population et comprend de l'information nécessaire, notamment sur l'âge, l'origine ethnique et la langue. Plus précisément, le recensement peut aussi mesurer la vitalité des communautés minoritaires francophones.

[Traduction]

    Bien que cette vitalité sera mise à l’épreuve dans les prochaines années, les communautés francophones en situation minoritaire possèdent un outil précieux : un réseau pancanadien d’établissements scolaires de la langue de la minorité, qui est protégé, financé par l'État et géré par et pour les membres de la minorité. Les différents ordres de gouvernement ont besoin des données du recensement pour dénombrer les communautés francophones en situation minoritaire et les ayants droit en vertu de l’article 23 pour ensuite planifier les politiques publiques et la prestation de services à ces communautés.
    L’article 23 accorde le droit à l’instruction aux parents francophones en situation minoritaire si ces derniers se retrouvent dans trois catégories d’ayants droit, soit ceux: dont la première langue apprise et encore comprise est le français; ceux qui ont reçu leur instruction au primaire en français en situation minoritaire; et ceux dont un enfant a reçu ou reçoit son instruction en français en situation minoritaire.
    Pour bien planifier et mettre en œuvre les politiques publiques concernant l’instruction en français aux communautés francophones en situation minoritaire, les ministères de l’Éducation ont besoin de données sur les trois catégories d’ayants droit. Toutefois, ce ne sont pas toutes les données qui sont disponibles. Le recensement ne pose pas de questions liées aux deux dernières catégories d’ayants droit et, par conséquent, seuls les parents de la première catégorie sont comptés.

  (1115)  

[Français]

     Cette situation est inquiétante pour le Commissariat aux services en français, et ce, pour trois raisons.
    Les ministères de l'Éducation n'ont pas le nombre exact d'ayants droit et, de ce fait, vont tenir compte d'un nombre moindre d'enfants admissibles lorsqu'ils planifient leurs réseaux d'écoles primaire et secondaire. De plus, la vitalité et le poids démographique des communautés francophones en situation minoritaire sont à la baisse. Un dénombrement plus juste des ayants droit favoriserait l'enrôlement de leurs enfants dans les programmes de la petite enfance et, conséquemment, assurerait un continuum d'apprentissage en français.
    Dans le rapport spécial intitulé: « Quand le plus élémentaire devient secondaire: Des devoirs à compléter », j'ai recommandé à la ministre de l'Éducation de l'Ontario de revoir ses pratiques en matière de calcul des besoins dans le domaine de l'éducation de langue française. Je lui ai suggéré d'utiliser la définition inclusive de francophone, la DIF, qui est la méthode de calcul adoptée officiellement par le gouvernement de l'Ontario pour mieux prendre en compte la réalité diverse de la clientèle des conseils scolaires de langue française et effectuer des prédictions d'inscriptions plus exactes.
    En vertu de l'article 23, si, dans une communauté donnée, le nombre d'ayants droit ne justifie pas la construction d'une école, habituellement, les ministères de l'Éducation ne vont pas en construire. Toutefois, si les ministères de l'Éducation utilisent des données du recensement pour planifier leurs effectifs, ils utilisent des données partielles puisque le recensement ne dénombre pas les ayants droit des deux dernières catégories. Il est donc évident que le nombre d'ayants droit, partout au pays, justifie l'ouverture de plus d'écoles et de plus grandes écoles dans plusieurs communautés francophones en situation minoritaire.
    La décision de la Cour suprême dans la cause Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique c. Colombie-Britannique confirme les dangers découlant de l'utilisation des seules données partielles du recensement par les ministères de l'Éducation lorsqu'ils dénombrent le nombre maximal potentiel d'ayants droit dans une communauté. Il y a des dangers réels que la province ou les territoires aient sous-estimé le nombre d'ayants droit et, conséquemment, effectué une planification d'effectifs qui ne reflète pas la réalité. De plus, les provinces et les territoires pourraient potentiellement utiliser le nombre plus bas d'ayants droit pour justifier le fait de donner moins de ressources nécessaires aux conseils scolaires francophones.
    En somme, Statistique Canada se doit de modifier le recensement et d'y inclure des questions qui visent à dénombrer les parents des deux dernières catégories pour identifier correctement les ayants droit dans une communauté donnée et pour permettre aux ministères de l'Éducation de planifier leurs effectifs selon le nombre réel de ceux-ci.
    Statistique Canada a récemment publié un rapport au sujet de l'immigration et de la vitalité de la francophonie canadienne. Les données sont inquiétantes. Entre 2015 et 2035, la proportion de personnes ayant le français comme langue maternelle dans les autres provinces que le Québec devrait fondre de 3,8 % à 2,7 %, et ce, en faisant abstraction des immigrants qui n'ont pas le français comme langue maternelle, mais qui le maîtrisent.
    On attribue cette diminution à l'immigration, mais aussi à la faible fécondité et au vieillissement des francophones hors Québec. Le rapport intitulé: « Immigration et diversité : projections de la population du Canada et de ses régions, 2011 à 2036 » fait écho à ces conclusions. En 2036, le nombre de gens qui n'ont pas l'une ou l'autre langue officielle comme langue maternelle pourrait augmenter et représenter entre 26 % et 30,6 % de la population canadienne, comparativement à 20 % en 2011.
    La diminution du poids démographique des francophones est préoccupante, surtout que l'Ontario a été incapable d'atteindre son objectif de 5 % d'immigration francophone. Le réseau d'écoles de langue française deviendra de plus en plus important comme moyen de préservation de la langue et de la culture francophones. Conséquemment, les ministères ne peuvent se permettre d'utiliser des données partielles du recensement, qui ne comportent pas de questions qui réussissent à répertorier toutes les catégories d'ayants droit.
    Des programmes préscolaires aux études postsecondaires, en passant par le primaire et le secondaire, le dénombrement conforme des ayants droit est également essentiel pour maintenir un continuum d'apprentissage en français, notamment en Ontario. Le lien est très important entre l'accès à l'éducation dans la langue de la minorité, en vertu de l'article 23, et l'offre de services à la petite enfance. Le rapport intitulé: « La petite enfance : vecteur de vitalité des communautés francophones en situation minoritaire » de mon collègue, l'ex-commissaire aux langues officielles, souligne que non seulement les services offerts en français aux jeunes enfants permettent de soutenir l'apprentissage de la langue, mais favorisent également le développement d'un sentiment d'appartenance à la communauté francophone.
    En Ontario, il est évident que les programmes de la petite enfance financés par le gouvernement provincial jouent un rôle crucial afin de maintenir le lien identitaire à la langue française chez les jeunes enfants, particulièrement les enfants issus des couples exogames.

  (1120)  

[Traduction]

    Les deux ordres de gouvernement devraient ouvrir le dialogue et travailler ensemble afin d'offrir des services à la petite enfance adéquats et équivalents aux services de la petite enfance offerts dans la langue de la majorité.
    Lorsque le ministère de l’Éducation et le ministère des services à l’Enfance et à la Jeunesse planifient le nombre de places dans ces centres, ils devraient le faire en fonction du nombre potentiel d’ayants droit selon les données du recensement modifié. Les enfants qui bénéficieront des programmes de la petite enfance dans la langue de la minorité seront ceux qui fréquenteront les écoles primaires dans cette langue.
    En ajoutant deux questions au recensement pour dénombrer les titulaires de droits des deux dernières catégories, en plus d’utiliser une définition inclusive des francophones, nous estimons qu’il y aura plus d’enfants dans les programmes préscolaires, et conséquemment plus d’étudiants aux niveaux primaire, secondaire et postsecondaire. Ce continuum d’apprentissage crée une masse critique de jeunes francophones, ce qui est vital pour les communautés francophones en situation minoritaire.

[Français]

     Les communautés francophones en situation minoritaire font face à plusieurs défis qui peuvent sembler insurmontables. Compte tenu notamment du faible taux de fécondité, de la baisse du poids démographique et des effets de l'assimilation, maintenant plus que jamais, les ayants droit ont besoin d'un réseau institutionnel d'instruction complet, adéquat et de qualité équivalente.
    Une pénurie d'écoles ou d'écoles de qualité égale signifie souvent un exode d'étudiants francophones vers les écoles de langue anglaise. Le recensement doit poser les questions nécessaires qui permettront de compter les ayants droit de toutes les catégories de la section du formulaire long touchant la scolarité.
    Je propose donc au gouvernement fédéral d'ajouter deux questions au recensement de 2021. Celles-ci viseraient à produire un dénombrement complet et représentatif des ayants droit. Ces deux nouvelles questions devraient pouvoir indiquer combien de parents ont reçu leur instruction au niveau primaire dans la langue officielle de la minorité, conformément à l'alinéa 23(1)b). Demander si les gens ont complété des études primaires en français est une question relativement simple. Il s'agit aussi de savoir combien de parents ont un enfant qui a reçu ou qui reçoit son instruction au niveau primaire ou secondaire dans la langue officielle de la minorité, tel que prévu par le paragraphe 23(2), et s'ils ont un enfant inscrit dans une école de langue française. Effectuer ces changements dans un délai approprié permettrait l'ajout de ces questions au prochain recensement.
     Je vous remercie à nouveau de m'avoir écouté et j'anticipe avec plaisir vos questions auxquelles je vais tenter de répondre au meilleur de mes connaissances.
    Merci beaucoup, monsieur le commissaire. Votre témoignage a été très apprécié. Les membres du Comité auront des questions à vous poser dans quelques minutes.
    Nous allons maintenant passer à M. Power et M. Roy. Tous deux sont ici à titre personnel. Ils disposeront en tout de 20 minutes pour faire leur présentation.
    La parole est à vous.
    Monsieur le secrétaire parlementaire, membres du Comité, bonjour.
    Je vous remercie de votre invitation à témoigner dans le cadre de votre étude. Vous devriez avoir reçu une copie en français et en anglais de notre présentation de neuf pages, incluant deux petites annexes. En tant que bons avocats, nous ne la lirons pas, mais nous allons plutôt y ajouter des éléments. Cependant, sachez qu'il y a au moins une base sur laquelle peuvent s'appuyer ceux et celles qui sont peut-être plus visuels ou qui cherchent des réponses juridiques plus précises à certains points.
    Si vous le permettez, monsieur le président, je vais dire quelques mots et, par la suite, je vais céder la parole à mon collègue, Me Marc-André Roy.
    D'abord, il est peut-être utile de dire un ou deux mots à notre sujet.
    Nous sommes des avocats qui travaillons beaucoup en droit de l'éducation. Nous travaillons beaucoup avec les conseils scolaires ou les commissions scolaires de langue française hors Québec qui utilisent tous les jours le genre de données recueillies par Statistique Canada dans son recensement. Nous avons beaucoup d'expérience sur le terrain relativement aux grandes frustrations et aux grandes limites imposées en ce moment par les données du recensement. Par exemple, nous avons participé à un procès qui a duré 240 jours. C'était l'enfer. Je ne voudrais plus jamais refaire cela de ma vie.
    Nous avons passé 240 jours en Colombie-Britannique pendant lesquels une bonne partie du débat d'experts, qui a duré des semaines, consistait à prouver ce que signifie le fait de ne pas recueillir certaines données dans le recensement. Au nom des avocates et des avocats des conseils scolaires à travers le Canada qui font ce genre de travail, de même qu'au nom de celles et ceux qui représentent les gouvernements, nous vous remercions d'étudier cette question. Nous souhaitons que vous puissiez faire des recommandations qui permettront tant à Statistique Canada qu'à son ministre responsable, l'honorable Navdeep Bains, de régler cette question une fois pour toute.
    Je ne vous le cacherai pas, les communautés demandent essentiellement deux choses. D'abord, pourrait-on, s'il vous plaît, dénombrer dorénavant tous les ayants droit et non pas une seule des trois catégories, mais aussi les deux autres? Ensuite, pourrait-on, s'il vous plaît, recueillir de meilleures données par rapport à la vitalité linguistique des communautés? Cela est particulièrement important à l'heure actuelle étant donné l'annonce du président du Conseil du Trésor, M. Brison, et de la ministre du Patrimoine canadien, Mme Joly, au sujet de la refonte du règlement qui encadre l'offre de services gouvernementaux fédéraux en français ou en anglais. Que ce soit pour la mise en oeuvre de l'article 23 ou de l'article 20, le travail que vous faites est, à mon sens, très important.
    J'ai pris la peine de prendre connaissance des propos de tous les témoins que vous avez entendus. Selon moi, M. Landry vous a essentiellement proposé la structure d'un rapport. L'ACFA vous a déjà expliqué ce que les communautés de langue officielle en situation minoritaire feraient avec les données de Statistique Canada. M. Jean-Pierre Corbeil vous a expliqué qu'il n'était pas trop tard pour agir et que la conjoncture était maintenant favorable . M. Corbeil vous a expliqué également que le Cabinet fédéral avait le pouvoir de décider à cet égard. Statistique Canada est certes responsable de ce dossier mais, au final, c'est le gouvernement qui décide. Je le souligne tout simplement.
    Considérant le peu de temps qu'il me reste, la chose la plus utile serait pour moi de reprendre les quatre raisons données par M. Corbeil pour ne pas modifier le recensement ou du moins ne pas le faire tout de suite. Je ne vous cacherai pas que je pense que ces raisons ne sont pas sérieuses. Je vais les aborder de front de façon distincte.
    D'abord, M. Corbeil a souligné qu'il faudrait 11 questions de plus. Je ne suis pas statisticien. Je n'ai pas de doctorat dans ce domaine. Je vous mentionne tout simplement que M. Landry vous a dit tout de suite après la présentation de M. Corbeil que cela n'était pas nécessaire et qu'on pouvait aller chercher l'essentiel des données en très peu de questions.

  (1125)  

     L'ACFA et la Fédération des conseils scolaires francophones de l'Alberta remettront à votre comité, jeudi prochain, un rapport de 80 pages qui sera cosigné par M. Rodrigue Landry. Ce rapport fait état de questions susceptibles d'être posées.
    Ce que M. Corbeil vous a dit à ce sujet n'est qu'un épouvantail et ce n'est certainement pas une raison pour ne pas agir. Par ailleurs, M. Corbeil a dit que cela allait coûter un peu plus cher. D'une part, est-ce vrai? Le gouvernement du Canada va mener le recensement de toute façon et on parle d'ajouter des questions dans le cadre d'une dépense quinquennale.
    Toutefois, même si c'était vrai, la partie VII de la Loi sur les langues officielles exige que le gouvernement dépense des fonds quand cela aide les communautés de langue officielle en situation minoritaire et quand cela constitue une mesure vraiment positive pour elles. Il n'est pas trop tard pour que le secrétaire parlementaire inclue ces dépenses dans la prochaine feuille de route, si c'est vraiment une dépense importante. Selon moi, ce qui a été dit est encore une fois un épouvantail.
    La troisième raison invoquée par M. Corbeil pour ne pas obtempérer aux demandes des communautés est la suivante. D'une part, M. Corbeil suggère que les provinces peuvent peut-être recueillir elles-mêmes des données fiables. De toute façon, on va consulter les communautés — ce sont les mots de M. Corbeil —, mais on verra ce que cela va donner.

  (1130)  

[Traduction]

    Le processus est important, mais les résultats le sont encore davantage.

[Français]

    On ne veut pas seulement être consultés, on veut que le recensement pose de vraies questions qui vont donner de vraies données.
     De plus, on parle beaucoup, surtout à l'heure actuelle, de fédéralisme coopératif. Cela veut dire que le gouvernement fédéral doit écouter quand les provinces lui demandent quelque chose. Si vous prenez le fascicule que je vous ai remis et que vous consultez l'avant-dernière page, vous verrez une lettre d'une page. Ce n'est pas du génie nucléaire. Notez bien l'en-tête. De la façon la plus claire possible, le gouvernement de la Colombie-Britannique ne demande pas à l'honorable Navdeep Bains s'il est possible d'avoir une enquête postcensitaire ou de recueillir davantage de données dans nos écoles. Au premier paragraphe, à la deuxième ligne, il est mentionné ce qui suit:

[Traduction]

    « dans le but de modifier le recensement canadien ».

[Français]

    Au deuxième paragraphe, on peut lire ce qui suit:

[Traduction]

Je vous écris en appui au CSF. Le ministère de l’Éducation appuie la demande du CSF de recevoir des données complètes et fiables concernant les trois catégories des titulaires de droits à l’éducation dans une langue minoritaire en vertu de l’article 23 de la Charte…

[Français]

    Je vous cite les mots importants:

[Traduction]

... et convient que la façon la plus efficace de recevoir ces informations est par le biais du recensement de Statistique Canada.

[Français]

    La troisième province de la fédération sur le plan de la population demande au gouvernement du Canada de modifier le recensement. Ce n'est pas une réponse acceptable quand Statistique Canada dit que les provinces peuvent peut-être s'en occuper. Arrêtons de niaiser et modifions le recensement!
    J'en viens à mon quatrième et dernier point, monsieur le président. Lors de sa comparution. M. Corbeil a dit essentiellement ces mots que j'ai entendus:
[...] mais quand des gens disent que Statistique Canada ne dénombre qu'une faible partie ou que 50 % des ayants droit, j'aimerais savoir de quelle façon ils s'y prennent pour mesurer ou pour obtenir ce pourcentage.
     Autrement dit, M. Corbeil demande s'il y a vraiment un problème. D'une part, il s'agit de savoir how do I prove a negative?
     On n'a pas les statistiques sur les deux autres catégories d'ayants droit. C'est déjà un problème grave 35 ans après l'entrée en vigueur de la Charte.
     Si ce n'est pas assez pour vous convaincre, écoutez ce qui suit. Les députés Samson, Lefebvre, Arseneault et Vandal savent très bien de quoi je parle. La très grande majorité des ayants droit francophones qui arrivent à la maternelle de langue française ont besoin de francisation. Ils arrivent en classe et ils ont le droit d'être là, mais l'anglais est leur première langue apprise et toujours comprise. On doit donc les franciser. Les pédagogues dans la salle peuvent vous expliquer que cela fonctionne.
    Il y a toutefois un problème. Quand ces enfants deviennent adultes et quand ils remplissent le recensement, ils indiquent que le français n'est pas leur première langue apprise. Le recensement ne les compte donc pas. Pour nous, ce sont des ayants droit en vertu de l'alinéa 23(1)b). Quand les juges nous disent qu'il y a de moins en moins de francophones, quand M. Corbeil nous dit que quelques ayants droit sont dénombrés, on constate que de toutes les catégories, on dénombre celle qui est la moins importante. On ne dénombre pas ces ayants droit en vertu de l'alinéa 23(1)b). Je le sais, parce que dans le dossier en Colombie-Britannique, sauf exception, l'anglais est la première langue apprise pour presque tous les enfants qui arrivent à la maternelle partout dans la province.
     C'est la même chose à North Bay, c'est la même chose à Sudbury, c'est la même chose presque partout au Manitoba et certainement en Nouvelle-Écosse, et le député M. Samson le sait très bien. Cela arrive même ici, à Ottawa. C'est sur un plan personnel et je n'irai pas tout de suite dans les détails.
    De grâce, peut-on compter tous les ayants droits? En ce moment la situation dans laquelle on se trouve avec les données du recensement est ridicule et je termine sur ce point.
    Quand on fait des commandes spéciales auprès de Statistique Canada pour recenser le nombre d'ayants droit à Squamish, à Pemberton, à Sechelt et à Whistler en Colombie-Britannique, on constate qu'il y a plus d'élèves francophones dans les écoles que le recensement ne le montre.
    On pourrait penser que c'est ainsi parce qu'il y a une politique d'admission généreuse. Cela peut faire croire qu'on laisse entrer des non-ayants droit. Ce n'est pas le cas, car la province de la Colombie-Britannique interdit les non-ayants droit dans les écoles de la minorité. Ces données sont donc inutiles. Peut-on agir, s'il vous plaît?
    Merci.

  (1135)  

     Merci, monsieur le président.
    Mesdames et messieurs, membres du comité, je vais faire de mon mieux pour prendre le relais de Me Power. Je vais aborder trois points que M. Corbeil a traités dans le cadre de son témoignage de la semaine dernière. Je vais ensuite dire quelques mots sur notre fascicule.
    Premièrement, M. Corbeil a indiqué que les communautés francophones en situation minoritaire n'étaient pas les seules à demander que des questions spécifiques leur soient consacrées et à présenter cette requête comme une urgence. Je ne sais pas de quel groupe parlait M. Corbeil, mais les communautés de langue officielle en situation minoritaire sont les seules — peut-être  avec les communautés autochtones  — à avoir des droits qui dépendent de leur nombre et à être protégées par la Charte. Il y a tout de même une distinction importante à faire à cet égard.
    Statistique Canada et le gouvernement devraient faire preuve de leadership et nous fournir les données dont nous avons besoin. Ce sont des données très précises qui nous permettent de cerner les titulaires de droits là où ils se trouvent, que ce soit dans de petites communautés ou dans des centres urbains. Les extrapolations basées sur des sondages, le questionnaire long du recensement ou d'autres sondages administrés à des échantillons de la population ne sont tout simplement pas suffisants pour nous.
    Deuxièmement, M. Corbeil a dit qu'il y avait déjà trop de questions sur les langues officielles dans le recensement. La réponse à cela est que le recensement comporte en effet plusieurs questions sur les langues officielles et que nous devrions être fiers, en tant que citoyens de ce pays, de nous assurer de bien connaître les populations de langue officielle en situation minoritaire. Cependant, comme je l'ai mentionné, il n'y a pas de droits liés à la langue fréquemment parlée à la maison, bien que des questions portent sur ce sujet.
    Nos droits sont basés sur la première langue apprise et encore comprise ainsi que sur la langue d'instruction des parents et de leurs enfants. En ignorant deux de ces trois catégories, il pourrait y avoir 20 questions, ce qui n'est pas suffisant. Si le nombre de questions est vraiment l'enjeu, ce dont je doute, il faut remettre dans le questionnaire long les questions portant sur la langue fréquemment parlée à la maison. Avant que le gouvernement précédent ne les retirent, ces questions se trouvaient en effet dans le questionnaire long. Il faut donc utiliser cet espace pour des questions essentielles qui doivent être posées à la totalité des gens et non pas seulement à 25 % de la population.
    Troisièmement, M. Corbeil a dit que Statistique Canada n'avait pas consulté de juristes et n'a pas indiqué qu'il avait l'intention de le faire. Or selon nous, c'est un problème, et ce, pour deux raisons.
     D'abord, la partie VII de la Loi oblige le gouvernement à consulter les minorités et à bien s'informer. Cela implique qu'il doit consulter des spécialistes du domaine de l'éducation et du secteur communautaire, mais aussi des juristes. En outre, le fait de ne pas consulter des juristes peut entraîner des erreurs. Par exemple, lors de sa comparution, M. Corbeil a souligné qu'un des enjeux actuels était que la langue maternelle d'un bon nombre d'immigrants s'établissant au pays n'était ni le français ni l'anglais et que les immigrants francophones s'établissant à l'extérieur du Québec n'étaient pas couverts par l'alinéa 23(1)a) de la Charte. Or c'est faux.
     Par exemple, les d'immigrants qui viennent de pays arabes et qui ont appris l'arabe, le français et l'anglais, dans cet ordre, ont comme première langue officielle parlée le français. Ces gens sont donc des ayants droit dès qu'ils acquièrent la citoyenneté canadienne. En fait, la presque totalité des provinces et des territoires les admettent dans les écoles francophones avant même qu'ils n'obtiennent leur citoyenneté, même s'ils ne sont pas encore officiellement des ayants droit. Il est donc nécessaire de les dénombrer.
    C'était les trois aspects de la comparution de M. Corbeil que je voulais aborder.

  (1140)  

     J'aimerais vous décrire brièvement le document pour qu'il puisse vous être utile après notre passage. Il compte neuf pages, ce qui comprend l'annexe dont Me Power a parlé.
    La première page et demie résume la situation et énonce certains faits de nature juridique qui vous seront sûrement utiles. Les six pages suivantes reproduisent des extraits de lois ou de jurisprudence que nous avons cru bon de porter à votre attention. Chaque paragraphe est précédé d'un sous-titre, qui est un énoncé que viennent appuyer les citations. Il est très facile de bien saisir l'information en parcourant le document.
    Concrètement, ce qui est demandé, c'est qu'on soit en mesure de prendre des décisions basées sur des faits, comme Me Power l'a dit. En anglais, on dirait:

[Traduction]

    la prise de décisions fondée sur des données probantes

[Français]

    C'est tout ce que demandent les communautés de langue officielle en situation minoritaire. C'est très important pour elles.
    Nous recommandons de modifier, dans le recensement, la question sur la langue maternelle et d'ajouter quelques questions — et non pas 11 — visant à connaître la langue d'instruction des parents et de leurs enfants. Une enquête postcensitaire n'est pas suffisante. Je pense qu'assez de choses ont été dites à ce sujet. Ce n'est pas quelque chose que les provinces peuvent faire à moitié. Il faut que ce soit le gouvernement fédéral qui le fasse par le truchement du recensement, qui administre les questions à 100 % de la population. Le respect de l'article 23 et de l'article 20 de la Charte sur les services et les communications gouvernementales en dépend.
    Le Comité va mener son étude et déposer un rapport qui, j'en suis certain, sera très important. Il serait très dommage qu'il soit mis sur une tablette et y accumule la poussière.
    Nous recommandons aussi au Comité de demeurer saisi de la question et de faire comparaître périodiquement, par exemple tous les quatre mois ou six mois, des représentants de Statistique Canada et le ministre Bains, afin qu'ils vous tiennent au courant des progrès réalisés dans la mise en oeuvre de vos recommandations.
     M. Samson sait de quoi je parle. La même chose s'est produite en Nouvelle-Écosse dans l'affaire Doucet-Boudreau où les tribunaux sont demeurés saisis de cette affaire après avoir rendu leur jugement pour s'assurer qu'il est respecté. C'est même devenu un terme connu en droit. On parle de l'ordonnance Boudreau pour désigner le suivi d'une affaire jusqu'à la fin. Je vous recommande fortement de faire cela.
    Pour répéter ce que Me Power a dit, nous sommes en train de préparer avec M. Landry un rapport en collaboration avec plusieurs acteurs du secteur de l'éducation ainsi que du domaine communautaire. La version française de ce rapport vous sera transmise plus tard cette semaine et la version traduite le sera très bientôt.
    Je vous remercie.
    C'est avec plaisir que nous répondrons à vos questions.
    Merci beaucoup, maître Roy.
    Nous passons maintenant aux questions et commentaires.
    Madame Boucher, vous avez la parole.
    Bonjour à tous.
    Je constate que vous êtes des passionnés. Si nous ne sommes pas convaincus, nous pouvons dire que vous l'êtes.
    C'est assez clair.
    D'après ce que je comprends, la comparution devant le Comité de M. Jean-Pierre Corbeil ne vous a pas impressionnés. Lorsque M. Corbeil est venu nous rencontrer, il a indiqué que le recensement comportait 11 questions sur ces enjeux et que, selon lui, ce n'était peut-être pas le meilleur véhicule pour recueillir les données dont il est question.
    Je viens du Québec. Je connais peu ou pas la situation des ayants droit, mais cela fait quand même longtemps que j'étudie la question des langues officielles. J'ai posé des questions à plusieurs témoins qui m'ont dit que beaucoup de personnes, même encore de nos jours, ne savent pas ce qu'est un ayant droit. Le fait que les gens, même les francophones, ne connaissent pas la définition d'un ayant droit peut aussi poser problème. Si ce n'est pas clair pour eux, cela peut l'être difficilement pour les autres. Les témoins nous ont dit que c'était vrai, à savoir que les gens ne savaient pas nécessairement ce qu'était un ayant droit et que c'était confus dans leur esprit.
     M. Corbeil a parlé de 11 questions et vous parlez d'en avoir moins. Vous êtes en milieu minoritaire. Vous assistez tous les jours à cette bataille chez vous. Selon vous, quelles seraient les questions les plus probantes qui pourraient le mieux vous aider à obtenir le décompte exact de francophones hors Québec ou des anglophones au Québec, même s'ils ne sont pas reconnus comme étant des ayants droit?
    Vous nous demandez de vous aider, mais nous aurions peut-être aussi besoin d'aide de votre part puisque vous vivez cette situation tous les jours. Il y a parmi vous des juristes. Madame Lanthier, cela fait longtemps que vous êtes dans le domaine. C'est la même chose pour vous aussi, madame Côté. Quelle serait la meilleure façon pour le Comité de vous aider pour que soient élaborées des questions qui permettraient d'obtenir des réponses pertinentes dans le cadre du recensement?

  (1145)  

    Me permettez-vous de commencer?
    Oui.
    D'abord, je crois qu'il faut laisser les experts s'entretenir avec les experts. M. Landry vous remettra jeudi des propositions hyper concrètes au sujet de questions à proposer à Statistique Canada. Au minimum, cela va lancer le travail des statisticiens. Il est parfois plus facile de travailler à partir d'une première ébauche que d'une page blanche. Je crois aussi qu'il est important, madame Boucher, d'éviter de demander aux gens s'ils sont intéressés par une école de langue française.
    Le seul élément au sujet duquel je suis peut-être d'accord avec M. Corbeil, c'est qu'il n'est pas nécessaire de demander aux gens s'ils sont des ayants droit. Comme vous le dites, la plupart d'entre eux ne le savent peut-être même pas.
    En effet.
    À l'inverse, madame Boucher, il n'est pas non plus nécessaire de demander aux parents s'ils aimeraient inscrire leurs enfants dans une école française, entre autres parce que c'est peut-être une question un peu trop théorique pour un parent qui n'a pas vu cette école et qui n'a pas rencontré les enseignants ou les enseignantes. Je parle ici notamment d'expériences très personnelles.
    Permettez-moi de conclure très rapidement. Je vous invite, madame Boucher, ainsi que les autres membres du Comité, à consulter la page 6 de notre présentation.
    Oui.
    Il y a là le sous-titre 5.1.
    Oui.
    À l'heure actuelle, en vertu de la Constitution, le recensement est une responsabilité fédérale. C'est au fédéral d'agir et, à plus forte raison, quand une ou peut-être d'autres provinces donneront l'exemple et demanderont de l'action.
    C'est actuellement un non-sens que la mise en oeuvre du droit à l'éducation dans la langue de la minorité soit empêchée par le gouvernement du Canada. C'est un non-sens et le fédéral doit agir. Le recensement est une responsabilité fédérale.
    D'accord.
    De plus, c'est un non-sens parce que le paragraphe 16(3) de la Charte encourage le gouvernement du Canada à poser des gestes à cet égard.
    J'ai lu tout le document.
    Et aussi parce que la partie 7 l'exige.
    D'accord.
    Quand nous avons commencé notre étude, nous pensions que ce ne serait pas si complexe que cela et ce ne l'est pas quand les gens veulent bien coopérer. Je reviens aux provinces.
    Les provinces relèvent effectivement du fédéral. J'aimerais vous poser une question à cet égard. Est-ce que les provinces hors Québec ont déjà des données probantes au sujet de chaque communauté de langue officielle?
    Je m'adresse à M. Samson ou à n'importe qui vivant à l'extérieur du Québec.
    Je suis du Québec. Je ne m'occupe pas de cela, parce que chez nous, dans Charlevoix, il y a très peu d'anglophones.
    En ce qui concerne la réalité que vous vivez dans vos provinces respectives, est-ce qu'il existe des données sur ces questions? S'il y en a, sont-elles probantes ou non?
     Permettez-moi d'être aussi concis que possible. Existe-t-il d'autres données probantes qui seraient utiles? La réponse est non. Les communautés en situation minoritaire en arrachent parce que le recensement ne fait pas le travail qu'il est censé faire.
    Merci, monsieur Power. Malheureusement, cette période de temps pour les questions est écoulée.
    Nous allons poursuivre avec M. Lefebvre.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de se joindre à nous ce matin. Il s'agit de la quatrième rencontre du Comité à ce sujet. Nous savons que cette question est ramenée cette année en vue du recensement de 2021 et que les données sont très importantes pour les communautés francophones du Canada. Mes questions vont porter sur plusieurs volets.
    Tout d'abord, la cause qui concerne la Colombie-Britannique a-t-elle été portée en appel devant la Cour suprême?

  (1150)  

    Chacune des parties a porté en appel de petits aspects du jugement de première instance. Cela devrait être entendu par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique cet été ou cet automne.
     Par ailleurs, pour les fins qui nous intéressent davantage, si on retourne au document, au bas de la page 4, vous retrouverez le sous-titre 4 où Me Roy et moi avons indiqué le passage le plus pertinent du jugement.
     Si vous consultez le bas de la page 5, vous voyez le paragraphe 6659. On a souligné les mots: « Je déclare que ». Cela n'a pas été porté en appel. Il s'agit donc d'un jugement définitif. Le gouvernement de la Colombie-Britannique n'a pas porté cet aspect en appel. Nous avons un jugement final et la province vous demande de l'aider à le mettre en oeuvre.
    Merci.
    Si j'ai bien compris, dans l’affaire Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique c. Colombie-Britannique (Éducation), la Cour suprême de cette province a déclaré que le gouvernement provincial était responsable de recueillir des données sur les ayants droit, en vertu de l’article 23 de la Charte. Cependant, vous nous avez montré qu'au paragraphe 91(6)...
    Les problèmes sont graves en Colombie-Britannique. Il y avait toutes sortes doléances et la décision du conseil scolaire et de la fédération des parents avait été de poursuivre le gouvernement provincial. Il aurait fallu poursuivre également Statistique Canada pour obtenir une telle ordonnance. Il faut choisir ses batailles. On ne peut pas tout faire d'un coup.
    Selon moi, ce jugement porte un peu à confusion. Il mentionne que la province est responsable, mais vous venez de nous dire que c'est à Statistique Canada de trouver l'information, d'où l'importance de cette rencontre aujourd'hui.
    Permettez-moi d'ajouter une autre chose.
    On a beau émettre une déclaration, mais il y a aussi l'aspect pratique, ce qui veut dire mettre cela en oeuvre. Il demeure que peu importe le droit, dans les faits, obtenir des données concrètes, suffisantes et fiables nécessiterait essentiellement que la province mène un recensement, mais ce n'est pas efficace. Cette responsabilité incombe donc au gouvernement fédéral.
    Merci.
    Monsieur le commissaire, voulez-vous intervenir à ce sujet?
    Essentiellement, là est la question.
    Premièrement, l'article 8 de la Loi constitutionnelle de 1867 parle de la responsabilité des gouvernements fédéral et provinciaux de tenir régulièrement un recensement. J'ai le document de Me Power. Quand on parle de fédéralisme coopératif et du fait que les provinces ont cette responsabilité, il faut quand même avoir des données brutes par l'entremise du recensement fédéral.
    En réponse à la question de Mme Boucher, toutes les provinces — l'Ontario à tout le moins — utilisent des données brutes du recensement pour établir les chiffres. Les provinces posent des questions et, avec les données brutes, on peut déterminer l'utilisation qu'on peut faire de ces données. Toutefois, il faut aller chercher les bonnes données brutes. C'est le but des questions du recensement.
     Merci, monsieur le commissaire.
    J'arrive au deuxième volet que je veux aborder ce matin.
    On parle beaucoup du besoin d'avoir des données brutes et de ce qui arrivera à nos communautés si on ne les a pas.
    Je prends la question à l'inverse. Supposons que le formulaire du recensement contient les bonnes questions et qu'on a accès aux données dont on a besoin. On parle de la Colombie-Britannique qui a été confrontée à un enjeu. Quelle autre province a connu un enjeu semblable? En Ontario, d'où je viens, il y a plusieurs écoles, mais certaines régions n'en ont pas suffisamment. Les données révèlent aussi qu'il n'y a pas suffisamment d'écoles en Saskatchewan, en Alberta et au Yukon. Qu'est-ce que cela représente pour vous ? Qu'est-ce qu'on va pouvoir faire à cet égard?
    Monsieur Boileau, vous avez dit que ces données vont permettre aux ministères de l'Éducation de planifier leurs effectifs à la lumière du nombre réel d'ayants droit, ce qui est très bien. Toutefois, que pourrons-nous faire avec ces données autrement que d'aller voir le gouvernement pour lui dire qu'on veut de nouvelles écoles? Est-ce la seule utilisation possible de ces données ou peuvent-elles être utilisées à d'autres fins?

  (1155)  

    L'application de l'article 23 dépend du nombre d'ayants droit. Plus le nombre d'ayants droit est élevé, plus la communauté a de droits. Cela va être extrêmement important pour les conseils scolaires et pour les ministères de l'Éducation dans leur planification. S'il semble que le nombre d'ayants droit justifie un plus grand effectif que ce qu'on croyait, cela aura une incidence sur la planification immobilière, sur la construction d'écoles et ainsi de suite. Cela donnera aussi de meilleurs outils juridiques pour les communautés si elles devaient se retrouver devant les tribunaux. Cela revient un peu à faire d'une pierre deux coups. Cela aide sur le plan de la planification stratégique ainsi que sur le plan des droits, parce que cela génère plus de droits.
    Monsieur Lefebvre, vous pourrez peut-être continuer plus tard avec d'autres questions.
    Nous allons prendre une pause de trois minutes, le temps d'aller chercher un café.

  (1155)  


  (1200)  

     Nous reprenons la séance.
    Je me suis inscrit sur la liste pour poser des questions, mais je vais vous laisser tout le reste du temps par la suite.
    Je vais commencer par poser une question à M. Boileau.
    Monsieur le commissaire, vous avez dit que l'Ontario a développé la définition inclusive de francophone, la DIF. D'où venait cette idée ou ce besoin? Était-ce parce que le recensement ne donnait pas à la province toutes les informations nécessaires pour répondre aux besoins de ses ayants droit? En quoi consiste exactement cette définition inclusive de francophone?
    Merci beaucoup de cette question.
    Votre question est intéressante, puisque les ministres Brison et Joly ont entrepris une démarche en vue de réviser le Règlement sur les langues officielles, à savoir les communications avec le public et la prestation des services, dont traite la partie IV de la Loi sur les langues officielles.
    Le Commissariat a entrepris cette démarche en 2005-2006 alors que j'y travaillais en tant qu'avocat. Nous avons fait une tournée canadienne pour revoir cela. Nous voulions présenter un rapport spécial au Parlement sur cette question. Il y a alors eu un changement de commissaire, qui ne considérait pas que c'était une bonne approche.
    Quand je suis devenu commissaire, j'avais ces idées en tête. Ce fut d'ailleurs la première recommandation de mon premier rapport annuel que j'ai déposé au gouvernement de l'Ontario. J'ai recommandé que l'Ontario se dote d'une définition inclusive.
    La DIF permet l'utilisation des mêmes données brutes dont je viens de parler. Les questions sont les mêmes. L'Ontario ne pose pas des questions différentes. C'est la méthode de calcul qui est différente en Ontario. Le gouvernement fédéral peut considérer quelqu'un comme un allophone alors qu'en Ontario, il sera considéré comme un francophone. Je m'explique à cet égard.
    Prenons l'exemple d'une famille maghrébine du Maroc qui immigre ici. La première langue apprise des membres de cette famille est l'arabe. Ils arrivent en Ontario et on leur demande quelle est leur première langue apprise. Ils nous répondent que c'est l'arabe. On passe alors à la question suivante, qui vise à savoir quelle langue ils parlent régulièrement à la maison. S'ils nous répondent que c'est l'arabe et le français ou l'arabe et l'anglais, ils sont considérés comme étant des allophones. Ils parlent le français, mais ils sont considérés comme des allophones. Toutefois, la définition inclusive de l'Ontario fait en sorte que ces gens sont considérés comme étant des francophones.
    Si une famille dit parler l'arabe, le français et l'anglais à la maison, aux fins des statistiques en Ontario, elle sera considérée une fois sur deux comme francophone et une fois sur deux comme anglophone.
    Toutes les familles qui viennent, par exemple, de Roumanie, du Vietnam, du Sénégal, du Mali ou d'Haïti, et dont la première langue apprise est autre que le français, lorsqu'elles arrivent en Ontario, elles vivent en français. Elles participent aux activités de la communauté francophone et elles envoient leurs enfants dans des écoles françaises. Alors, pourquoi ne pas les considérer comme étant des francophones?

  (1205)  

    Merci beaucoup, monsieur le commissaire.
    Je m'adresse maintenant aux représentantes de la FCFA.
    Pour votre organisme, pourquoi est-il aussi important de bien dénombrer les ayants droit? Est-ce une priorité, pour la FCFA, de faire en sorte qu'on dénombre adéquatement les ayants droit? En quoi est-ce un enjeu important pour maintenir ou augmenter la vitalité des communautés francophones?
     Je vous remercie de la question.
    Je vais revenir brièvement sur ce que M. Landry vous a dit au sujet de l'importance de la petite enfance et de l'éducation.
    Si l'on voit cela comme des cercles concentriques, on constate à quel point cela est primordial pour la transmission et la vitalité de la langue. Comme nous le savons, les écoles de langue française et la petite enfance jouent un rôle crucial. Le nombre de ces personnes, dans les communautés, est aussi important. Chaque personne compte. Il importe de pouvoir identifier chaque personne qui est susceptible d'avoir le droit de fréquenter une école de langue française et de participer à l'ensemble des activités qui se déroulent en français dans nos communautés. Dans certaines d'entre elles, l'école de langue française ou le centre scolaire communautaire est l'endroit où se manifeste la vitalité de la langue. Dans certains villages, l'école est pratiquement le seul endroit où l'on peut organiser des activités et vivre en français.
    À mon avis, le pouvoir d'attraction de l'école est important. Il en va de même pour la capacité d'identifier ces gens et d'agir par la suite sur leur volonté de rester francophones, de vivre en français et d'inscrire leurs enfants à une école de langue française. Les juristes expriment cela en termes de droits alors que, de notre côté, nous parlons de développement communautaire et d'activités pouvant être mises en oeuvre pour que le français soit présent sur la place publique et soit vu comme une langue intéressante. Il s'agit de la capacité d'attraction.
     Pour ce qui est de savoir où se trouvent ces gens, cela nous aide à déterminer à quelle clientèle nous nous adressons réellement, où sont les gens qui nous manquent, qui ils sont et comment nous pouvons les rejoindre. D'après ce que nous savons présentement, 50 % des ayants droit n'envoient pas leurs enfants dans une école de langue française.
     Est-ce vrai ou y en a-t-il davantage? Il me semble que nous aurions intérêt à le savoir.
    Merci beaucoup, madame Lanthier.
    Je voudrais répondre...
    Malheureusement, le temps dont je dispose est écoulé. Je ne voudrais pas profiter indûment de la situation.
    Nous allons maintenant passer à M. Samson, qui va disposer de six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Chers amis, c'est toujours un plaisir de vous recevoir pour discuter de questions aussi importantes. Je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui. Notre comité étudie plusieurs questions cruciales concernant les minorités. Dans ce contexte, il est impératif que nous trouvions des solutions et que nous formulions rapidement des recommandations .
    Je vais d'abord féliciter mes collègues conservateurs et néo-démocrates — ce que je ne fais pas souvent —, qui nous appuient beaucoup à cet égard. Ils disent ne pas vivre en milieu minoritaire, ne pas avoir d'expérience sur le terrain ou disposer de toute l'information nécessaire, mais ils ont été de vrais partenaires dans le cadre de cette étude et de celles que nous avons faites depuis le début des travaux du Comité permanent des langues officielles.
    Par ailleurs, je n'étais pas présent quand M. Corbeil a comparu devant le Comité. Comme les questions dont vous nous avez fait part aujourd'hui me font très mal, je n'aurais probablement pas été de bonne humeur lors de sa comparution. Je suis heureux que vous ayez pu réfléchir à ces questions.
     On dit que des droits sont octroyés en fonction du nombre d'élèves, mais on ne pose pas les questions appropriées qui permettraient de donner des résultats. Cela me pose un problème.
    Vous avez parlé plus tôt du nombre d'élèves qui ont besoin de services de francisation. En tant qu'ex-directeur général dans le milieu scolaire, permettez-moi de vous dire qu'environ 80 % des élèves qui s'inscrivent dans les écoles françaises de la Nouvelle-Écosse ont besoin d'appui en matière de francisation. Ce pourcentage reflète probablement la situation de l'ensemble du pays, à l'exception du Nouveau-Brunswick, bien sûr. C'est donc un problème majeur.
     D'après ce qu'a dit M. Roy plus tôt, les enfants qui ont besoin de services de francisation ne sont pas couverts par les questions du recensement. Par conséquent, quand ils deviennent parents à leur tour, ils ne bénéficient pas de ces droits. Nous faisons face à un problème majeur auquel nous devons trouver une solution.
    On dit que pour assurer la cohérence des données, il est important que ces questions soient posées dans le cadre du recensement plutôt que dans un contexte provincial.
    Maître Power et maître Roy, avez-vous des commentaires à formuler à ce sujet?

  (1210)  

    Ce n'est pas du tout la même chose. Quand on se trouve devant un juge, il nous faut de vraies données, des données sérieuses et fiables. Un échantillon d'un échantillon — ce qu'est une enquête postcensitaire — a très peu de valeur devant un tribunal.
     Très bien.
    Je vais poser mes questions rapidement.
    Quel lien peut-on faire entre ces données et les services en français? Je parle ici du règlement faisant l'objet d'un moratoire ainsi que du projet de loi S-209 proposé par le Sénat.
    La Charte protège le droit d'avoir des services dans la langue de la minorité, là où il y a une demande importante. Pour déterminer si la demande est ou non importante, il faut prendre en considération plusieurs choses, principalement la vitalité de la communauté et le nombre de personnes qui pourraient se prévaloir de ce droit, c'est-à-dire qui connaissent suffisamment le français et qui vivent en français. Les mêmes questions que celles visant les titulaires de droits en vertu de l'article 23 pourraient être posées. Elles nous aideraient énormément à mieux comprendre la demande pour les services.
    Donc, du point de vue de la vitalité, depuis 1982, on a perdu 35 ans.
    Le dernier rapport fait état de 2036, soit un autre 20 ans. En somme, on n'ira pas vraiment de l'avant si on n'agit pas rapidement.
    Par ailleurs, j'ai compris que la Colombie-Britannique a envoyé une lettre au gouvernement fédéral. Est-ce que d'autres provinces ont fait de même? Monsieur  Boileau, est-ce que d'autres provinces ont aussi envoyé des lettres au gouvernement fédéral pour lui demander d'agir à cet égard?
    L'Ontario demande régulièrement au gouvernement fédéral de revoir non pas les questions du recensement, mais sa méthode de calcul pour les écoles en Ontario de façon à y intégrer la définition inclusive de francophone — la DIF. Il est certain qu'un échange entre les provinces et le fédéral serait bénéfique à cet égard.
    Ce serait bien de recevoir une lettre officielle de l'Ontario.
    Je m'en occupe.
    Est-ce que vous avez une question concernant d'autres provinces?
    J'ai hâte de lire la lettre de la ministre de l'Éducation de l'Ontario.
    Monsieur Samson, la réponse courte est que je ne le sais pas. Je pense qu'il y a d'autres provinces qui emboîteront le pas à la Colombie-Britannique, tant des provinces de l'Ouest que des provinces maritimes. Il faut s'attendre à ce que le Nouveau-Brunswick, qui est une province officiellement bilingue, envoie une lettre similaire. Nous allons quêter ces lettres, monsieur Samson.

  (1215)  

    Merci beaucoup.
    Je termine avec une question extrêmement importante concernant l'article 23.
    Est-ce qu'on peut trouver dans cet article un moyen d'aider les communautés qui, pendant des années, n'ont pas eu accès à ces données pour favoriser leur vitalité dans le domaine de l'enseignement et dans d'autres domaines?
    Vous avez 30 secondes. C'est malheureusement le temps qui vous reste.
    Si peu de temps, c'est difficile pour un avocat, monsieur le président.
    L'avenir du français hors Québec dépend du gouvernement du Canada. Que ce soit par l'entremise de la fameuse entente stratégique pour les fonds fédéraux-provinciaux — les ententes du Programme des langues officielles en enseignement, le PLOE — ou par de meilleures données du recensement, nous avons besoin de votre aide.
    Il n'est pas logique que le gouvernement du Canada fasse obstacle à l'application de l'article 23. À la limite, je comprends que Victoria et Regina disent « pas tout de suite ». Il n'est toutefois pas acceptable que le gouvernement du Canada soit responsable de notre incapacité de bien gérer l'avenir en matière d'immobilisations. C'est même illégal.
    Monsieur Arseneault, vous avez la parole et vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais continuer sur ce sujet, mais auparavant, je tiens à remercier Mes Boileau, Roy et Power ainsi que Mmes Côté et Lanthier.
    Ce que j'ai entendu aujourd'hui est pour moi l'équivalent de la plus belle poésie en matière de droits linguistiques, surtout en matière d'enseignement.
    Il y a une question qui me brûle les lèvres.
    Je fais mon mea culpa puisque je ne suis pas un constitutionnaliste. J'ai eu la chance de venir au monde au Nouveau-Brunswick où j'ai pu étudier en français de la maternelle jusqu'à la fin de mes études en droit. Je n'ai pas eu à faire des combats comme à d'autres endroits au Canada. Je me considère gâté comme francophone hors Québec.
    En résumé, je comprends à peu près la décision dans l'affaire du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique. On parle beaucoup de Statistique Canada et des obligations du gouvernement fédéral. Je ne veux pas entrer dans cette discussion, car vous avez été suffisamment questionné à cet égard et il y aura d'autres questions qui vous seront posées.
     Je ne vois pas que cette décision implique que les provinces ont l'obligation de dénombrer les ayants droit, peu importe que cela se fasse par Statistique Canada ou par d'autres moyens. Est-ce bien ce qu'il faut comprendre?
    Il faut que cela se fasse. Comme Me Roy l'a expliqué, ce sera mieux fait et d'une façon plus fiable, plus rapide et à moindre coût si c'est Ottawa qui fait l'exercice. Mais quelqu'un doit faire l'exercice.
     Excusez-moi, mais je n'ai que peu de temps à ma disposition.
    Me Power, vous savez de quoi je parle. Je ne veux pas vous poser des questions suggestives. Toutefois, est-ce qu'une province n'est pas mieux placée pour dénombrer elle-même ses ayants droit? Cela fonctionne par région. Il y a des châteaux forts francophones au Manitoba et en Saskatchewan. Il y a aussi des anglophones au Québec. Il y en a en Gaspésie. Il y a des régions qui regroupent des minorités qui, à mon avis, pourraient être encore mieux dénombrées par les provinces si elles utilisaient leurs propres méthodes.
    Je reviens à ma question et je la pose d'une autre façon. La décision dans l'affaire du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique ne vient-elle pas nous dire que les provinces doivent avoir leurs outils et faire ce dénombrement?
     Plus les données sont objectives, plus elles sont fiables. Quand cela vient d'Ottawa, certaines provinces ont quasiment intérêt à ne pas compter ou à mal compter. Ironiquement, il est parfois préférable d'être détaché du terrain. C'est l'un de ces cas.
    Puis-je ajouter quelque chose à ce sujet?
    Oui.
    Je ne pense pas que les provinces dénombrent les ayants droit de la même façon que le recensement. Les provinces utilisent les données du recensement pour savoir quelle sera la clientèle pour les cinq prochaines années. Cela leur permet de savoir comment organiser les écoles, de faire des plans d'infrastructure et ainsi de suite. Les provinces ne font pas de recensement.
    Je comprends, mais...
    Et elles n'en feront pas demain matin non plus.
    Je sais, sauf qu'avec cette décision, cela devient une obligation constitutionnelle qui est hors du champ de compétence des provinces. C'est ce que je comprends à ce sujet.
    Comme juriste, je connais tout le chemin que le fédéral doit parcourir pour respecter la Charte, mais la décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique semble dire que, du point de vue constitutionnel, les provinces ont cette obligation. Si Statistique Canada n'existait pas aujourd'hui, les provinces auraient l'obligation de faire un recensement.
    Est-ce que j'ai bien compris la décision?
    Oui.
    Parfait.
    Je passe à ma prochaine question en faisant suite aux propos de M. Samson.
    Le paragraphe 24(1) de la Charte commence de la façon suivante: « [t]oute personne, victime de violation ou de négation des droits [...] » Restons à « violation », puisque ce mot est suivi de « ou » et non de « et ». Entre juristes, nous nous entendons là-dessus.
    J'ai fait le même calcul que M. Samson. Cela fait 35 ans et il y aura un autre 20 ans supplémentaires. Est-ce qu'il y a des juristes qui ont commencé à étudier la possibilité de demander un recours exceptionnel pour pouvoir remédier à la perte de toutes ces générations de jeunes enfants dans les écoles? Pourrait-on demander un recours « turbo » pour accélérer le processus de scolarisation en français ou en anglais pour les minorités de langue officielle?

  (1220)  

    Vous savez que les avocats adorent les disputes. Sur un certain plan, cela nous fait plaisir. À l'inverse, ce sont surtout les écoles qui comptent. Les communautés ne veulent pas se venger par rapport aux 50 dernières années. Elles veulent plutôt un avenir qui ait du sens et qui permette aux parents de transmettre leur langue et leur culture.
    Pour ce faire, il faut qu'il y ait des écoles. Pour obtenir ces écoles, il faudrait que les gestionnaires interviennent auprès des ministères de l'Éducation et fassent valoir que telle école à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, ou la nouvelle école à Moncton sont déjà pleines et que d'autres ayants droit ne peuvent pas s'y inscrire. Les gestionnaires devraient présenter des données et demander des fonds pour construire des écoles, qu'ils proviennent de la province ou qu'ils soient accordés au titre de l'entente stratégique fédérale-provinciale.
    Est-ce qu'il me reste du temps, monsieur le président?
    Il vous reste une minute.
    C'est le problème au Canada, le plus beau pays du monde — je le pense vraiment. On doit respecter les champs de compétence fédéraux et provinciaux et il est difficile d'empiéter dans un champ de compétence, qu'il soit fédéral ou provincial.
    Je suis fatigant, mais je reviens sur cette question. La décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique au sujet du conseil scolaire francophone semble remédier à cette belle excuse ou à ce beau bouclier que les provinces peuvent utiliser pour demander qu'on ne touche pas à ce qui relève de leurs compétences.
    Je reviens à la charge. Maître Power, vous avez répondu par l'affirmative. Une décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique vient de stipuler que les provinces ont une obligation constitutionnelle de dénombrer les ayants droit et de s'assurer qu'on respecte l'article 23. Or on sait que, pour respecter les droits des minorités, les articles doivent être interprétés de façon non pas restrictive mais très large.
    Au point 2 de la page 4 de notre document, il est mentionné que l'article 23 de la Charte s'applique tant au fédéral qu'au provincial. Il y a eu un jugement où la Colombie-Britannique est partie prenante. Comme Me Power l'a expliqué, puisque le gouvernement fédéral n'était pas partie au litige, il était impossible d'ordonner quelque chose contre lui. Toutefois, cela ne veut pas dire que la Charte ne s'applique pas au gouvernement fédéral. Il ne peut pas poser des gestes qui contreviendraient à l'article 23 de la Charte.
    Allons maintenant à la page 6...
    Veuillez être bref, s'il vous plaît.
    À la page 6, au point 5.1, il est écrit que le paragraphe 91(6) de la Loi constitutionnelle de 1867 précise que le gouvernement fédéral est le gouvernement responsable du recensement.
    Il est le seul.
    Merci, maître Roy.
    Je cède maintenant la parole à M. Généreux pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leur présence parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur Boileau, vous avez parlé de la DIF. Vous avez dit faire l'analyse des données brutes. En Ontario, vous interprétez les données brutes de façon différente qu'ailleurs au Canada. Vous ai-je bien compris à ce sujet?
     C'est la méthode de calcul qui est différente.
    C'est donc la méthode de calcul.
    Les données sont calculées différemment.
    En nous disant cela, ne venez-vous pas de donner raison à M. Corbeil, de Statistique Canada, qui est d'avis que cela ne donne rien de poser des questions différentes ou d'ajouter des questions puisque, en réalité, les provinces vont faire leur propre interprétation suggestive des données, comme vous le faites en Ontario? Ne venez-vous pas de lui donner raison — et je me fais ici l'avocat du diable, soyons bien clairs —, en disant avoir les données brutes et que tout le monde a ces mêmes données, mais qu'elles sont interprétées, dans une certaine mesure, selon vos besoins ou selon des facteurs qui vous sont particuliers comme province. Si on posait d'autres questions, on aurait probablement des données brutes différentes. Cependant, à partir des données que vous recueillez ou que vous interprétez, êtes-vous en mesure de répondre à des besoins de façon différente par rapport à ce qui se fait dans d'autres provinces? Est-ce que je me fais bien comprendre à ce sujet?
    Oui, je comprends votre point de vue, mais encore faut-il que les questions fondamentales soient les bonnes. On ne peut pas inventer une méthode de calcul à partir de questions qui ne vont pas nous donner les réponses à toutes les questions que nous nous posons. En Ontario, la DIF permet de calculer le nombre de francophones. On ne parle pas du nombre d'ayants droit. Il est impossible de le connaître, car il faudrait alors amender des questions du recensement. Les ayants droit et les francophones ne forment pas nécessairement les mêmes groupes en vertu du droit constitutionnel, de l'article 23 et ainsi de suite. Ce qu'on peut démontrer...

  (1225)  

    Excusez-moi, mais faites-vous une interprétation différente quand vous parlez des allophones, par exemple?
    Oui, puisqu'on utilise quand même une méthode de calcul qui permet seulement de savoir qui sont les francophones, mais on ne parle pas de droits scolaires. On ne parle pas des droits de catégories d'ayants droit, soit les trois catégories dont il est question dans l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. L'une des questions touche le sujet, mais pas les deux autres et on ne peut pas, en Ontario, inventer une méthode de calcul qui fasse en sorte qu'on obtienne des réponses à des questions qui ne sont pas posées. On n'est pas si imaginatifs que cela.
     D'accord. Je ne suis pas en train de vous sous-estimer, bien au contraire.
    Monsieur Power et monsieur Roy, votre présentation était très, très intéressante. La réalité, et M. Corbeil l'a exprimée l'autre jour, est que Statistique Canada doit établir des priorités pour ce qui est du recensement. Comme j'en parlais tantôt à Mme Lanthier durant la pause, l'organisme a des choix stratégiques à faire et, si on ajoute des questions sur la langue, je suppose que, quelque part, il va falloir déterminer à quel endroit on enlève d'autres questions. Il y a comme une espèce de bataille en cours au sein même de Statistique Canada pour savoir si des questions seront ajoutées.
    Personnellement, je ne crois pas que ce soit une question de coûts. Je suis imprimeur et je sais qu'on peut écrire plus petit et faire bien des choses pour aménager des éléments sur une feuille de papier. Cependant, en ajoutant des questions, comment peut-on faire pour s'assurer — parce que je crois qu'on est vraiment à un tournant historique — d'avoir les réponses pertinentes? Si on veut véritablement avoir des données plus probantes, il faut qu'on fasse les changements maintenant et non pas dans 5 ans, dans 10 ans ou dans 20 ans. Comment, en tant que membres du Comité, pouvons-nous exercer des pressions sur Statistique Canada pour arriver à avoir des réponses concluantes à des questions dans le but d'améliorer l'ensemble des services dans les communautés?
     D'une part, mettez votre pied à terre et recommandez dans votre rapport que cela se fasse. D'autre part, j'ai l'impression que cette idée de limiter le nombre de questions à poser dans le recensement est un épouvantail. J'ai l'impression que les Canadiennes et les Canadiens sont assez matures pour répondre à davantage de questions.
    Par ailleurs, Me Roy a déjà expliqué que certaines questions linguistiques pourraient être enlevées de certains formulaires. Par exemple, on pose une question par rapport à l'usage régulier ou non du français à la maison. Avant d'explorer cette question, il faut connaître la langue des études primaires des adultes. En ce moment, la hiérarchie des questions est inversée.
    Monsieur Généreux, je vous inviterais à aller à la page 7 de la présentation. Si je ne vous ai pas déjà convaincu et que vous cherchez des arguments à utiliser à l'endroit de Statistique Canada, lisez le point 5.4. Il est indiqué que ce qui distingue les demandes des communautés de langue officielle en situation minoritaire par rapport aux autres groupes, c'est que non seulement elles ont des droits, mais que la Loi sur les langues officielles — une loi fédérale — exige de poser des gestes positifs. Il ne s'agit pas d'une interprétation faite à deux heures du matin après un verre de vin, monsieur Généreux.
    Consultez maintenant le document à la page 8. L'alinéa 43(1)d) stipule que la ministre du Patrimoine canadien, soit l’honorable Mélanie Joly -- et M. Casey est le secrétaire parlementaire de la ministre--, prend les mesures « pour encourager et aider les gouvernements provinciaux à favoriser le développement des minorités francophones et anglophones, et notamment à leur offrir les services provinciaux et municipaux en français et en anglais et à leur permettre de recevoir leur instruction dans leur propre langue ». That's the point.
    Puisque vous représentez une circonscription du Québec, j'anticipe la question portant sur l'empiétement dans les compétences provinciales. Selon le paragraphe 91(6) dont nous avons déjà fait état, la réponse est non.
    D'accord.
    Malheureusement, monsieur Généreux, votre temps est écoulé.
    Je viens pourtant de commencer.
    Je le sais, mais quand on a du plaisir, cela passe rapidement.
    Monsieur Samson, vous avez la parole.
    J'aimerais faire un commentaire, monsieur le président.
    Permettez-moi auparavant de demander à M. Boileau ainsi qu'à Mme Lanthier de répondre à l'intervention précédente.
    Allez-y, monsieur Boileau.

  (1230)  

    J'apprécie beaucoup mes collègues Power et Roy. Je trouve que leur présentation est très bonne, mais il faut faire attention. Je ne voudrais pas que le Comité pense qu'on peut aisément prendre une question dans le recensement court et la mettre dans le recensement long sans qu'il y ait des conséquences. Les questions relatives à la langue d'usage parlée régulièrement ou le plus souvent à la maison sont importantes, notamment pour dénombrer les gens ayant le français comme première langue officielle parlée ou en fonction de la définition inclusive de francophone, soit la DIF chez nous, en Ontario. Il faut donc être prudent à cet égard. C'est là qu'intervient le travail des statisticiens de même que le comité d'experts que vous allez mettre sur pied et les recommandations de M. Landry.
    Je vous donne ce petit avertissement pour les fins de votre analyse.
    Merci, monsieur le commissaire.
    Madame Lanthier, vous avez la parole.
    Je voulais juste faire une remarque pour aller dans le même sens que Me Power.
     La meilleure chose que le Comité pourrait faire serait vraiment d'envoyer le message au gouvernement et à Statistique Canada afin de trouver la façon de faire en sorte de calculer le nombre d'ayants droit.
    Nous ne sommes pas des statisticiens. On ne s'enfargera pas dans les fleurs du tapis. Nous avons compris que c'était complexe, mais nous n'avons pas compris que c'était impossible.
    Les représentants de Statistique Canada nous ont fait part des défis et des difficultés, ce qui est tout à fait correct. Cependant, cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de solutions possibles à envisager. À mon avis, le message qui devrait être envoyé à Statistique Canada serait de travailler sur des solutions.
    Merci, madame Lanthier.
    Nous allons maintenant céder la parole à Mme Lapointe pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je trouve que les discussions de ce matin sont très intéressantes. Je dois vous dire que la semaine dernière, lorsque nous avons rencontré MM. Corbeil et Landry, j'étais atterrée.
    Me Power, plus tôt, vous avez dit que la transmission des langues et de la culture passait par les écoles. Le rapport du commissaire Fraser parlait beaucoup de la petite enfance. Incluriez-vous aussi la petite enfance?
    Tout à fait, madame Lapointe.
    Certaines des provinces...
    Plus tôt, vous parliez de francisation. Peut-être que les ayants droit auraient besoin d'apprendre ou de parler davantage le français.
    Tout à fait, madame Lapointe.
    Au Manitoba, par exemple, la Loi sur les écoles publiques donne le droit aux francophones de construire des garderies qui se greffent aux écoles de langue française. Pour savoir le nombre de places qui sont nécessaires, il faut que les francophones soient dénombrés.
    Je vais vous donner un exemple très concret. Ici, en Ontario, la prématernelle est financée à 100 %, comme c'est le cas maintenant pour les anglophones, mais ce sont les francophones qui ont innové en cette matière. Pour savoir le nombre de places qui sont nécessaires, il faut recenser le nombre d'enfants.
    Vous avez tout à fait raison. Le sujet touche aussi la petite enfance, comme M. Boileau et l'ACFA l'ont mentionné dans leur présentation. Cela est également important pour planifier la fréquentation au niveau postsecondaire. Il faut donc savoir jusqu'à quel point on a besoin d'établissements collégiaux et universitaires en français, que ce soit à Toronto ou ailleurs.
     Merci.
     J'ai une autre question, monsieur Power.
    Un peu plus tôt, vous avez dit que l'avenir du français hors Québec dépendait du fédéral. On comprend qu'il faut qu'il y ait les bonnes questions dans le recensement. Il faut aussi qu'on aille plus loin relativement à l'article 23. Y a-t-il autre chose que le fédéral peut faire, mis à part de modifier les questions du recensement?
    En effet, il peut signer une entente stratégique avec les conseils scolaires pour faire en sorte que les sommes d'argent aillent dans les poches des personnes à qui il doit parvenir et qu'il soit dépensé correctement. Il faut assurer une reddition de comptes totale et empêcher les provinces de dépenser l'argent comme elles le veulent quand il est question de questions qui touchent à la langue et à la culture, sans que nous décidions.
    Ces deux initiatives, plus un programme de contestation judiciaire que vous venez d'annoncer, et ce, avec des fonds suffisants, aideraient les communautés de façon appréciable et mesurable. Ainsi, si dans 20 ans on fête avec un verre de vin, on aura un meilleur recensement qui permettra de transmettre de meilleures données linguistiques et culturelles.
    Merci, c'est très intéressant. Il faut prendre note de ce que l'on peut faire de plus.
    Monsieur Roy, un peu plus tôt, on a beaucoup parlé des questions. La semaine dernière, on nous a dit qu'il y avait trop de questions dans le recensement et qu'il était impossible d'augmenter cela à 11 questions.
     Plus tôt, monsieur Boileau, vous avez dit qu'il n'était pas nécessaire d'enlever des questions. Doit-on en ajouter? Quelles questions enlèveriez-vous pour faire en sorte de se conformer à la Charte canadienne des droits et libertés en matière linguistique?
    Clarifions les choses. Je ne recommande pas de retirer des questions car il devrait y avoir le plus possible de questions. Il faudrait qu'il y ait toutes les questions nécessaires. Le message le plus important est que des droits constitutionnels dépendent de questions que l'on ne retrouve pas dans le recensement. Il faut donc les ajouter. Il faut qu'elles soient dans le formulaire obligatoire. Pour que cela fonctionne, il faut que ces questions soient posées à 100 % de la population.

  (1235)  

    Vous voudriez donc qu'il y ait un formulaire long pour tout le monde.
    Ce n'est pas vraiment ce que je veux dire. Au minimum, on devrait ajouter au formulaire court deux questions qui n'y sont pas encore. Je parle de deux questions, mais les statisticiens nous diront s'il faudra que ce soit deux, trois ou quatre questions. Il faut des questions qui permettent de déterminer la langue d'éducation des parents et de leurs enfants. Cela doit être ajouté au formulaire court pour que 100 % de la population y aient accès.
    Incluez-vous aussi les grands-parents? En effet, si je me fie à M. Samson, en Nouvelle-Écosse, le français a semble-t-il sauté des générations.
    Oui, on pourrait voir cela.
    À certains endroits, le français s'est perdu...
    C'est le cas partout.
    On inclurait donc...
    Madame Lapointe, le simple fait d'ajouter une question pour chaque adulte sur la langue d'instruction — la leur et celle de leurs enfants — permettra aux avocats et aux chercheurs, grâce au croisement des données, d'obtenir des données sur les grands-parents. C'est un bon exemple où on peut obtenir des données pertinentes en ajoutant une question de plus. On n'a pas besoin de 11 questions.
    Pour conclure, les neuf ou dix premières questions du formulaire court et du formulaire long sont les mêmes. Évidemment, quand on parle du formulaire long, cela inclut aussi les questions du formulaire détaillé.
    J'aimerais ajouter une chose à cet égard.
    Je trouve qu'on s'enferme un peu dans le paradigme que nous propose Statistique Canada, c'est-à-dire qu'on semble croire qu'il n'est pas possible d'augmenter le nombre de questions parce qu'un Canadien ne voudra pas répondre à plus de 50 questions. J'aimerais que Statistique Canada fasse une enquête à ce sujet pour vérifier la véracité d'une telle affirmation.
    En effet, est-ce vraiment prouvé?
    Je pense que s'il y a 50 questions et qu'on m'en pose trois de plus, je ne vais pas mourir si j'y réponds. Si on me pose trois ou quatre questions de plus dans le formulaire court, je ne vais pas mourir non plus. J'ai rempli le formulaire court et il m'a fallu moins de 30 secondes pour le faire.
    C'est tellement facile en ligne. Il faut très peu de temps. Il ne faudrait pas s'enfermer dans de faux problèmes. Il faut considérer cet aspect avec beaucoup d'ouverture d'esprit et se demander à quoi sert le recensement, à quoi il doit servir et à quelles fins on va poser ces questions.
    Les questions linguistiques qu'on demande d'ajouter ont des fins extrêmement importantes pour l'avenir des communautés francophones en situation minoritaire. Ces données vont nous permettre de savoir qui nous sommes, où nous sommes et combien nous sommes. Nous pourrons savoir ce que nous devons faire avec les gens qui sont devant nous pour leur offrir des services qui correspondent à leurs besoins.
    Je suis d'accord avec vous. Cela permet de planifier et de savoir où on s'en va.
    Merci beaucoup, madame Lapointe.
    Nous allons passer maintenant à Mme Boucher, qui va partager le temps dont elle dispose avec M. Généreux.
     Merci, monsieur le président.
    Je vais me faire l'avocate du diable. La conservatrice en moi va s'exprimer.
    Je ne suis pas en désaccord avec tout ce qui s'est dit aujourd'hui. Au contraire, je dirais que c'est une nécessité pour les communautés francophones hors Québec d'avoir de bons outils et des données exactes pour aller de l'avant.
    Avec tout le respect que je vous dois, monsieur Boileau, j'ai cependant un peu de difficulté à accepter que certaines des demandes que vous venez de faire engagent les provinces. Certaines provinces, pour ne pas les nommer, sont réfractaires à l'intervention du fédéral. Que fait-on si un certain nombre de gouvernements provinciaux ne veulent pas qu'on négocie directement avec les commissions scolaires? Vous connaissez cette réalité.
    On va parler du Québec, puisque que c'est ma province. Si le fédéral remet de l'argent au Québec, il ne va pas demander à la province où cet argent sera investi, car on lui opposera un refus catégorique de répondre.
    On empiète donc ainsi dans certains champs de compétence provinciaux. Ce n'est pas une bonne idée de se mettre à dos les provinces pour faire avancer le fait français à l'extérieur du Québec.
    En tant que gouvernement fédéral, sans empiéter dans les champs de compétence provinciaux, quelle serait la meilleure façon de faire pour justement ne pas se mettre les provinces à dos, pour aller de l'avant avec elles et les avoir comme partenaires à l'avenir?
    Madame Boucher, vous avez dit que vous vous adressiez à M. Boileau.
    Je suis désolée. Ma question était pour vous, monsieur Power.
    D'accord. Je voulais juste clarifier cela.
    Excusez-moi. La question est pour vous, monsieur Power.
    D'accord.
    Excusez-moi.
    Madame Boucher, je ne crois pas que votre question soit trop inquiétante, malgré le fait que vous vous fassiez l'avocate du diable.
    Le recensement relève du gouvernement fédéral. Le recensement est envoyé dans les foyers des particuliers.

  (1240)  

    Je suis d'accord.
    Quand le gouvernement fédéral compte les ayants droit, qu'ils soient en Ontario ou au Québec, c'est comme lorsqu'il compte les F-38 à Bagotville ou à Cold Lake. Cela relève du palier fédéral. Les provinces n'ont rien à voir avec cela. Compter le nombre d'ayants droit ne signifie pas que le fédéral oblige ensuite un ministère de l'Éducation à construire des écoles. C'est à lui de le faire et, quand il ne le fait pas, un juge ou une juge interviendra peut-être.
    J'ai peut-être manqué le sens de votre question, madame Boucher.
    Oui.
    Plus tôt, vous avez dit à Mme Lapointe que la meilleure façon de faire serait de donner de l'argent directement aux commissions scolaires. Toutefois, lorsque de l'argent est remis aux provinces ou aux commissions scolaires pour des questions relatives à l'éducation, cela relève du palier provincial.
    Je vois.
    Est-ce que je peux répondre à votre question?
    Oui, allez-y.
    Ce qui doit être compris — et M. Power me corrigera si jamais j'ai tort — et ce dont on parle ici spécifiquement, c'est de l'argent du fédéral qui est dirigé vers les provinces pour l'enseignement dans la langue de la minorité.
    C'est ce dont je parle également.
    D'accord.
    Dans certains cas, il y a des provinces qui utilisent cet argent pour...
    Elles l'utilisent à d'autres fins.
    Elles l'utilisent à d'autres fins que celles auxquelles il est destiné.
    Je suis tout à fait d'accord.
    Ce que nous disons, c'est que cela devrait être corrigé. Cela fait partie des outils à considérer. Nous voulons connaître les outils dont nous avons besoin pour avoir un impact. Il est nécessaire de s'assurer que les provinces placent cet argent là où il devrait être utilisé.
    Ma question visait à savoir ce qu'on doit faire si une province ne veut pas entendre raison à cet égard.
    On ne peut évidemment pas forcer les provinces à faire quelque chose qu'elles ne veulent pas faire. Cela étant dit, madame Boucher, tout ce dont je parlais, c'était de la huitième recommandation de votre comité.
    Oui.
    Dans votre rapport de décembre, votre huitième recommandation invite le secrétaire parlementaire...
    Je suis d'accord.
    ... à signer une entente stratégique directement avec les conseils scolaires. Elle serait par la suite sera mise en oeuvre ou non selon la province ou le territoire, et ce, dans le respect des champs de compétence.
    Me reste-t-il du temps, monsieur le président?
    Oui. Il vous reste deux minutes.
    D'accord.
    Il va s'ajouter à cela une autre période de six minutes qui suivra immédiatement par la suite.
     M. Corbeil a dit qu'il ne consultait pas vraiment de spécialistes de l'extérieur. Cela dit, comme vous avez bien analysé ses propos, j'imagine qu'il va au minimum étudier ceux échangés ici aujourd'hui. Je présume que nous sommes d'accord là-dessus.
     Le Comité voudra peut-être savoir quelles sont les intentions du gouvernement. Comme M. Bains va éventuellement prendre une décision, je suggère que nous invitions de nouveau M. Corbeil à comparaître devant le Comité. Il pourrait alors répondre aux affirmations que vous avez mentionnées ce matin, qui correspondent à ce que vous croyez. Vous avez démoli, dans une certaine mesure, les arguments de M. Corbeil. Je pense donc qu'il serait intéressant de l'inviter de nouveau ou, sinon, d'inviter statisticien en chef qui est responsable de Statistique Canada.
    Je pense que nous sommes tous d'accord pour faire avancer la cause. Il ne s'agit pas de prendre qui que ce soit en souricière et de lui taper dessus. Ce n'est pas ce que nous voulons faire. Nous pouvons bien déposer un rapport, mais comme vous l'avez dit plus tôt, nous voulons éviter qu'il soit mis sur une tablette. Ce n'est pas ce que nous voulons.
    Il s'agit de voir comment le Comité peut exercer suffisamment de pression sur le ministre ou le Conseil des ministres pour que lorsque le temps sera venu pour eux de prendre la décision, des questions additionnelles soient incluses, peu importe lesquelles. M. Corbeil nous a bien dit qu'il était responsable de toute la question langagière et que le reste ne le concernait pas. Certaines questions touchent tout de même bien des choses à Statistique Canada. Il nous faut donc déterminer comment nous pouvons exercer de la pression sur le gestionnaire de M. Corbeil pour qu'il affirme, lorsqu'il ira au bureau du ministre, que c'est une priorité absolue au Canada.
    Monsieur Généreux, je pense que la présidente de la FCFA, Mme Lanthier, a tout à fait raison. M. Corbeil n'a pas dit que c'était impossible. Il a évoqué plusieurs raisons pour lesquelles cela pourrait être embêtant et coûteux. Pour reprendre vos propos, on a tenté de démolir ces idées. Il ne faut pas être plus catholique que le pape. Si ce comité recommande à Statistique Canada de faire ce qui est proposé et que M. Bains est d'accord pour le faire, M. Corbeil et les autres agiront en conséquence.
    Savez-vous combien de rapports sont étudiés par des comités, déposés à la Chambre des communes et mis sur une tablette chaque année?
     Les recommandations de l'ensemble des comités ne sont pas retenues. Il faut que ce soit clair. En réalité, il y a des raisons pour lesquelles un parti politique prend des décisions. Nous avons pu le constater par le passé. Il faut donc nous assurer de faire ce qu'il faut pour qu'à l'avenir et lors du prochain recensement, en 2021, après que l'ensemble des témoins auront comparu devant nous, ces questions figurent dans le questionnaire.

  (1245)  

    Effectivement, la mise en oeuvre de la partie VII de la Loi sur les langues officielles est en partie la responsabilité de M. Bains. C'est aussi la responsabilité de Mme Joly et de M. Casey. Je vous recommande, comme le faisait mon collègue Marc-André Roy, d'inviter M. Casey tous les quatre mois pour qu'il rende des comptes sur les progrès — réalisés ou non — dans ce dossier. Je crois que le gouvernement agira en conséquence, d'autant plus que toutes les communautés, anglophones ou francophones d'un bout à l'autre du pays, lui demandent de le faire. Il ne s'agit pas seulement de groupes communautaires ou scolaires, monsieur Généreux, mais ce sont aussi des groupes de la Colombie-Britannique et d'autres provinces. Je suis assuré que le gouvernement agira, mais si vous en doutez, invitez régulièrement le secrétaire parlementaire à vous rendre des comptes.
    Ce n'est pas nécessaire de l'inviter puisqu'il est toujours ici. Nous n'avons qu'à lui en parler.
    Il faudrait le faire témoigner.
    Madame Lanthier, vouliez-vous ajouter quelque chose?
    Oui.
    M. Généreux a utilisé l'expression « prendre en souricière ». Or je ne pense pas que notre but soit le moindrement de prendre M. Corbeil en souricière.
    J'avais compris.
    De notre côté, nous faisons aussi notre travail. À la FCFA, nous connaissons très bien M. Corbeil et il nous connaît très bien également. Chaque fois qu'il y a un recensement, nous nous parlons. Nous discutons régulièrement avec lui. Il va d'ailleurs assister à la prochaine réunion de notre conseil d'administration, au mois de mars, pour discuter avec nous de ces questions. Nous aurons une bonne discussion avec lui. Je veux simplement vous dire que nous faisons tout de même notre travail.
     Je pense que même si certains rapports de comités sont mis sur une tablette, il ne faut pas sous-estimer l'importance de ce que vous faites. Quand vous émettez des recommandations unanimes pour demander au gouvernement de prendre certaines mesures, cela nous indique que le Comité a bien compris la situation et que ses recommandations appuient le développement des communautés francophones. Cela nous aide et nous l'apprécions. Je pense aussi que cela envoie un message.
    Monsieur le commissaire, vouliez-vous intervenir?
     Oui, je vais le faire très rapidement en reprenant succinctement les propos que Mme Lanthier, la présidente de la FCFA, a tenus plus tôt, à savoir qu'un recensement est juste un outil qui aide à l'élaboration de politiques publiques.
    M. Généreux parlait plus tôt d'influer sur le Conseil des ministres. Le gouvernement fédéral est justement en train d'envisager l'élaboration de politiques publiques qui prendront la forme d'un nouveau plan d'action ou d'une nouvelle feuille de route. Dans le cadre de cette initiative, il est tout à fait pertinent d'examiner la façon d'utiliser les meilleurs outils dont nous disposons, comme un recensement, pour élaborer le mieux possible des politiques publiques en fonction des enjeux existants.
    J'ajouterais un dernier commentaire au sujet du recensement. L'an dernier, nous avons constaté à quel point les Canadiens se sont empressés de remplir le formulaire de recensement. C'est tout à fait particulier, et je ne sais pas ce que la population peut vouloir nous dire par ce geste. D'ailleurs, les gens ont été déçus d'avoir reçu le formulaire court, et j'avoue l'avoir été également.
    Pour reprendre les mots de Mme Lanthier, je serais curieux de savoir exactement ce qu'il en coûte aux Canadiens, si nous parlons de temps et d'intérêt, de répondre à deux ou trois questions supplémentaires.
    J'aimerais juste ajouter une chose, monsieur le président.
    J'espère que vous avez bien compris, madame Lanthier, que je n'ai pas dit vouloir prendre qui que ce soit en souricière.
    Je l'ai compris.
    Bien au contraire, nous sommes ici pour travailler de façon très collaborative à l'avancement des communautés en situation minoritaire.
    Merci.
    ll vous reste une minute, monsieur Généreux.
    D'accord.
    Monsieur Power, vous avez mentionné tantôt avoir participé à un procès devant la Cour qui a duré 320 jours, ou 230 jours — je ne me souviens plus du nombre exact et j'ai peut-être inversé les chiffres. Quoi qu'il en soit, de quelle affaire s'agissait-il précisément? Était-ce l'affaire Mahe?
    Il s'agissait du dossier du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique et de la Fédération des parents francophones de Colombie-Britannique.
    Quelles ont été les conclusions de ce procès, qui a duré aussi longtemps? Avez-vous eu l'impression d'avoir fait avancer la cause à tout le moins dans la province ou au fédéral?
    Il ne fait aucun doute, monsieur Généreux, que le Conseil scolaire et la Fédération des parents ont fait avancer la cause en Colombie-Britannique. Des écoles seront implantées un peu partout dans la province. Nous espérons voir des changements sur le plan du recensement, une augmentation du financement en matière de transport scolaire et j'en passe.
    Nous souhaitons aussi que le jugement facilite la mise en vente, par la Société immobilière du Canada, de certains terrains à Vancouver.
    Beaucoup de changements découlent de ce jugement. Je pense que c'est tout à l'honneur de la communauté francophone de cette province d'avoir relevé un défi d'une si grande ampleur.

  (1250)  

    Y a-t-il un lien de cause à effet, ou de quoi que soit d'autre, concernant toute la question de l'enseignement par immersion en langue française? Ma soeur a enseigné à Vancouver pendant près de 30 ans dans des classes d'immersion française, et je sais qu'il y a des listes d'attente partout au Canada concernant l'accès à ces classes. Je dirais qu'il y a une volonté et un désir de mettre en place des écoles d'immersion française dans tout le pays. Beaucoup d'échanges ont aussi lieu entre les provinces. Des représentants de plusieurs écoles viennent au Canada, au Québec, pour...
    Merci beaucoup, monsieur Généreux. Malheureusement, votre temps de parole est écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Vandal.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à MM. Power et Roy.
    Dans nos notes d'information, il est fait référence à l'affaire Mahe, qui a été examinée à la Cour suprême du Canada. Pouvez-vous nous expliquer l'importance de la décision rendue dans cette affaire?
     L'affaire Mahe est la première ayant été conclue par une décision très importante de la Cour suprême du Canada sur l'éducation des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Cette affaire, qui concernait l'article 23 et où la Cour en expliquait l'objet général, a été instruite en 1990, en Alberta, et une école de la région d'Edmonton était l'une des parties en cause.
    Pour vous permettre de bien comprendre l'importance de l'affaire Mahe, je vous renvoie à la page 4 de notre fascicule, au point 3. Vous y trouverez un extrait pertinent des motifs unanimes de la Cour qui ont été rédigés par le juge en chef Dickson. On y aborde notamment la notion de justification par le nombre. Le juge en chef Dickson affirme qu'il est impossible de déterminer ce nombre avec exactitude et ajoute que la justification doit prendre en considération la demande potentielle, à savoir ce que nous cherchons à connaître au moyen du recensement et la demande réelle. Il est important de connaître la demande potentielle. En ce moment, nous évaluons seulement l'une des trois catégories.
    Nous vous recommandons essentiellement de mettre en oeuvre ou de permettre que soient mises en oeuvre les conclusions du jugement prononcé dans l'affaire Mahe.
     La Charte inclut-elle des droits, autres que ceux des ayants droit, que le gouvernement doit justifier par des chiffres et des faits?
    Y a-t-il des exemples à ce sujet?
    Il y en a deux.
    L'article 23 est le premier et le paragraphe 20(1), qui porte sur les communications et les services gouvernementaux offerts par le gouvernement fédéral, est le deuxième.
    L'article 23 parle de « là où le nombre le justifie » et l'article 20 traite de l'importance de la demande de services. Dans les deux cas, les questions aideraient beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse à Mme Lanthier ou à Mme Côté.
    En novembre 2016, on a modernisé le règlement fédéral visant à offrir des services dans la langue officielle de la minorité. Y a-t-il un lien entre cette initiative et ce dont il est question aujourd'hui?
    Je crois que oui.
    Le gouvernement est en train de travailler à la modernisation de la réglementation. Il est question notamment d'aller dans le sens de la définition inclusive qui a cours en Ontario quant au terme « francophone », donc d'inclure davantage les mots « parlant français » dans la définition. On parle aussi de moderniser les services. Il est important de savoir à qui l'on offre ces services et de disposer de données fiables de façon à déterminer qui sont les gens susceptibles de recevoir des services en français et où ils se trouvent. Ce serait également important dans le cadre de cette initiative.
    Madame Côté, aimeriez-vous ajouter quelque chose à ce sujet?
     En ce qui concerne les services et les écoles, je tenais à souligner que nous faisons toujours l'objet d'un sous-dénombrement. Aussitôt qu'une école est construite, elle se remplit. Même quand des estimations sont faites, l'intérêt des gens est sous-estimé. Comme on le dit en anglais, « If you build it, they will come ». Dans nos communautés, c'est tout à fait évident, tant à propos des services fédéraux que des écoles.
    En ce qui a trait aux services fédéraux, quand il y a une offre active — et M. Boileau pourra nous le confirmer —, la clientèle demande ces services. Autrement, elle ne les demande pas.

  (1255)  

    En fait, ce n'est pas nouveau. Ce phénomène existe depuis une trentaine d'années.
     Est-ce que la FCFA a déjà demandé au gouvernement de prendre des mesures à cet égard?
    La FCFA en a fait la demande à partir du début des années 1990 et a continué de le faire jusqu'à ce que Statistique Canada lui signifie une fin de non-recevoir, soit à la suite du recensement de 2001. Présentement, nous réactivons la demande.
    De quelle année parliez-vous?
    Au début des années 1990, nous avons commencé à demander que ces questions soient incluses dans le recensement.
    On vous a ensuite signifié une fin de non-recevoir?
    Madame Boucher, vous n'avez pas encore le droit de prendre la parole.
    Monsieur Vandal, je vais vous allouer une minute et demie.
    Il y a donc 27 ans de cela.
    J'aimerais revenir au document de M. Roy et au fait que le gouvernement fédéral a la responsabilité de recueillir ces données. On parlait plus tôt de la possibilité que les provinces assument cette responsabilité. En 1990, cela a été confié aux provinces, mais il a fallu beaucoup de temps.
    En Nouvelle-Écosse, par exemple, on a dû recourir aux tribunaux pour obtenir le droit d'ouvrir quelques écoles. Même si le droit existait, la responsabilité n'était pas assumée à cet égard. Il est vrai que l'affaire Doucet-Boudreau a fait en sorte que, six mois plus tard, le gouvernement a été obligé d'expliquer ce qu'il avait fait. Selon moi, c'est le gouvernement fédéral qui, au premier chef et en vertu de la Charte — sa charte —, doit s'assurer que les données nécessaires sont disponibles pour les communautés et les provinces.
    On a parlé de mesures positives. Or pour Statistique Canada, le fait d'inclure dans le recensement des questions permettant de recueillir ces données pourrait représenter une excellente mesure positive.
    C'est bien dit.
     Merci beaucoup, monsieur Samson.
    Je remercie les témoins, soit le commissaire Boileau, Me Power, Me Roy, ainsi que Mme Côté et Mme Lanthier, de la FCFA. Ce fut une réunion très instructive. Je pense que cette étude était vraiment pertinente et utile. En vous écoutant, on comprend tout à fait la nécessité d'améliorer les questions du recensement pour obtenir un dénombrement exact des ayants droit.
    Je pense que le Comité va rédiger un rapport fort utile au cours des prochains jours.
    Merci à toutes et à tous.
    La séance est levée.
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