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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 024 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 15 mai 2014

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Chers collègues, bienvenue à la 24e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous donnons suite à notre étude de la finance sociale dans le cadre de la prévention du crime au Canada. Nous accueillons deux groupes de témoins, dont le premier comparaîtra de 15 h 30 à 16 h 30, et le deuxième, par la suite. L'un des groupes témoignera en direct, tandis que l'autre participera à la séance par vidéoconférence.
    Pour le moment, nous recevons Siobhan Harty, directrice générale de la Direction de la politique sociale qui relève de la Division de la politique stratégique et recherche, et Blair McMurren, directeur de l'Innovation sociale et membre de la même division.
    Soyez tous deux les bienvenus parmi nous. Nous avons certainement hâte d'entendre vos observations, et j'espère que nos questions seront raisonnablement amicales lorsque nous passerons à nos séries de questions.
    Chacun de vous est autorisé à faire une déclaration d'une durée maximale de 10 minutes.
    Veuillez continuer
    Bonjour. Je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de m'adresser à vous aujourd'hui. Je comprends que vous souhaiteriez mieux comprendre la finance sociale pour soutenir votre étude sur la façon dont elle pourrait être utilisée dans le domaine de la prévention du crime.

[Français]

    Dans mon allocution, je vais m'employer à expliquer la finance sociale en utilisant des exemples concrets. Je vais aussi définir l'approche du gouvernement en matière de finance sociale.

[Traduction]

    La finance sociale est une approche visant à mobiliser de multiples sources de capitaux générant un dividende social et un rendement économique pour atteindre des objectifs sociaux et environnementaux. Elle donne l'occasion de mobiliser des investissements supplémentaires afin d'augmenter les fonds disponibles pour étendre la portée d'approches éprouvées. Elle fournit aussi aux investisseurs l'occasion de financer des projets qui profitent à la société et donne aux organisations communautaires l'accès à de nouvelles sources de financement.
    La finance sociale présuppose une nouvelle approche en matière d'investissement, appelée investissement d'impact, que le Groupe d'étude canadien sur la finance sociale décrit comme un investissement actif de capitaux dans des entreprises et des fonds qui produisent des résultats sociaux ou environnementaux et au moins un capital symbolique pour l'investisseur. Pour les gouvernements, la finance sociale est un instrument qui leur permet d’atteindre des résultats de façon plus efficace, d'attirer des capitaux du secteur privé pour le bien collectif et de mettre à profit tous les actifs des communautés. Au Canada, l'élan vers la finance sociale provient en grande partie du secteur à but non lucratif, avec le lancement, en 2010, du Groupe d'étude canadien sur la finance sociale, qui a publié des rapports en 2010 et 2011.

[Français]

    L'émergence des initiatives de finance sociale est motivée par la demande d'intervenants du secteur privé et de groupes communautaires sans but lucratif. En effet, un nombre croissant d'organisations cherchent à accéder aux marchés des capitaux pour créer des organisations plus durables et étendre la portée de leur travail.
    La finance sociale est un domaine en émergence à l'échelle internationale, mais d'autres pays ont déjà mis en oeuvre plusieurs initiatives qui, en fait de leçons apprises et de pratiques exemplaires, peuvent servir de modèle au gouvernement du Canada. À l'échelle internationale, plusieurs outils sont utilisés pour faire avancer la finance sociale.

[Traduction]

    Les obligations à impact social ou OIS sont l’un de ces outils. Ce sont des instruments de financement de projets qui prévoient le versement d'un montant d'argent préétabli si les résultats en matière de rendement sont atteints. Les OIS conjuguent le paiement au rendement à une approche fondée sur l'investissement: les investisseurs du secteur privé fournissent le capital initial pour financer des interventions et peuvent s'attendre à récupérer les capitaux investis ainsi qu'un rendement financier si les résultats sont atteints. La présence d'investisseurs est la principale différence entre les OIS et les ententes de paiement au rendement: les investisseurs privés prennent le risque de désigner et de financer les interventions; ce risque est seulement récompensé si, comme je l’ai indiqué, les interventions sont couronnées de succès.

[Français]

    À ce jour, le gouvernement britannique a ouvert la voie en lançant des projets pilotes d'OIS dans une gamme de domaines stratégiques. Environ 15 de ces projets sont en oeuvre actuellement. Comme vous le savez peut-être, les premières OIS ont été mises en oeuvre à Peterborough, en Angleterre. Elles sont axées sur le soutien aux détenus récemment libérés et ont pour objectif de prévenir la récidive.
    Plusieurs projets d'OIS sont également en cours ou en développement aux États-Unis, en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Belgique.

[Traduction]

    Les soutiens aux entreprises sociales sont le deuxième outil. Une entreprise sociale est une entreprise dont l'objectif est de fournir des biens et services tout en avançant une mission sociale. Ce modèle d'entreprise en émergence contribue à accroître la solidité financière des organismes communautaires en fournissant une source alternative de revenus pour s'attaquer à des problèmes sociaux complexes. Les entreprises sociales sont souvent gérées par un organisme de bienfaisance ou sans but lucratif. Les revenus générés par l'exploitation de l'entreprise sont réinvestis dans l'organisme de bienfaisance pour soutenir ses programmes et ses opérations alors que l'entreprise elle-même peut aider les populations à risque à développer des compétences sur le marché du travail. Plusieurs administrations ont créé des soutiens particuliers pour les entreprises sociales, comme des programmes visant à développer les compétences en affaires des entrepreneurs sociaux et à rendre les entreprises sociales prêtes à recevoir des investissements, des formes d'entreprise hybride, et des incitatifs fiscaux qui favorisent l'investissement dans les entreprises sociales.
    Les soutiens aux fonds d’investissement social sont le troisième outil, et ils ont pour but de regrouper des sommes d'argent qui peuvent être utilisées pour investir dans des projets de finance sociale. Leurs investissements peuvent prendre la forme de dettes ou de capitaux propres.

[Français]

    Ils jouent un rôle clé d'intermédiaire financier en reliant des organisations qui sont à la recherche de capitaux à des investisseurs et en réduisant les coûts de transaction sur le marché.
    Plusieurs pays, notamment l'Irlande et l'Australie, soutiennent les fonds d'investissement social existants en injectant des capitaux. Le Royaume-Uni, encore une fois le chef de file dans ce domaine, a mis sur pied un prêteur en gros appelé Big Society Capital, qui joue un rôle semblable à celui d'une banque de la finance sociale. En effet, il prête de l'argent à d'autres fonds qui font des investissements sociaux.

  (1535)  

[Traduction]

    Tous ces outils ont des points communs. Ils mettent l’accent sur les approches novatrices, sur la mobilisation des ressources et du sens des affaires du secteur privé pour répondre à ces défis et sur les résultats.
    Passons maintenant à la finance sociale au Canada. Le gouvernement du Canada a affirmé son intérêt pour la finance sociale dans ses budgets successifs depuis 2010, y compris dans le plus récent. Malgré le solide filet de sécurité du Canada et l'existence de programmes axés sur les communautés, il existe toujours des problèmes sociaux urgents dans notre pays. Le budget de 2014 a souligné que les gouvernements ne sont pas toujours les mieux placés pour résoudre les problèmes sociaux et économiques les plus urgents ou persistants. Il y a des Canadiens qui possèdent des solutions novatrices à ces problèmes et il y en a d'autres qui sont disposés à financer des entrepreneurs sociaux prêts à relever ces défis. C'est pourquoi, dans le plus récent discours du trône, le gouvernement s'est engagé à saisir les occasions présentées par la finance sociale et, dans le budget de 2014, il s'est engagé à aider les Canadiens prêts à répondre à des besoins sociaux et économiques urgents en recourant à des approches novatrices.

[Français]

    Comme dans d'autres pays, le gouvernement fédéral n'est pas le seul acteur intéressé par la finance sociale. Les provinces sont parfois plus près du terrain, détiennent des leviers de politiques qui leur sont propres et peuvent adopter plus rapidement des politiques novatrices. Les provinces et territoires ont adopté de nouvelles mesures et initiatives visant à promouvoir la finance sociale. Voici des exemples.

[Traduction]

    La Colombie-Britannique a créé une nouvelle tribune pour les entreprises sociales; l'Alberta a lancé un Fonds de dotation d'un milliard de dollars pour l'innovation sociale qui servira, en partie, à financer le développement de projets d'OIS; la Saskatchewan a lancé, cette semaine, la première OIS canadienne axée sur le logement de soutien pour les mères monoparentales à risque; l'Ontario a lancé une stratégie qui comprend un fonds pour fournir des subventions et des investissements. La province a également lancé un appel d'idées pour des OIS dans les domaines du logement, des jeunes à risque et des obstacles à l'emploi.

  (1540)  

[Français]

    Le Québec appuie depuis longtemps l'économie sociale, un concept qui est similaire sans être toutefois identique à celui de la finance sociale. Certaines caractéristiques communes comprennent une combinaison de mécanismes de production de revenus, l'investissement et la poursuite du bien social.

[Traduction]

    Bien que ces mesures témoignent toutes de l'intérêt croissant pour la finance sociale au Canada, la construction d'un marché efficient nécessitera une action coordonnée et du leadership à l’échelle nationale. Le gouvernement fédéral est bien placé pour aider à créer les conditions pour que tous les joueurs puissent exploiter le potentiel de la finance sociale et dispose de leviers qui lui sont propres.
    Dans le budget de 2014, le gouvernement s'est engagé à collaborer avec les chefs de file du secteur des organismes à but non lucratif et du secteur privé afin d'explorer le potentiel au chapitre des initiatives de finances sociales et de voir si des obstacles en entravent leur réalisation.
    Enfin, je voudrais dire quelques mots sur le travail sur l'innovation sociale et la finance sociale à Emploi et Développement social Canada.
    Au cours des dernières années, EDSC a pris des mesures par étapes en matière de finance sociale en testant la capacité des organisations communautaires de tirer parti de subventions et contributions fédérales pour obtenir des fonds provenant des secteurs privés. EDSC a également testé des aspects de l'approche du paiement au rendement et, en octobre 2013, a annoncé des initiatives en matière d'alphabétisation et de compétences essentielles, inspirées de certains éléments du modèle de l'OIS.
    En novembre 2012, nous avons lancé l'Appel national d'idées sur la finance sociale pour tester le niveau de connaissance et d'intérêt pour la finance sociale au Canada. Il s'agissait d'une initiative en ligne, ouverte à tous et basée sur l'approche de l’approvisionnement par la foule, le crowdsourcing, qui visait à solliciter des idées novatrices et axées sur la collaboration auprès des Canadiens pour relever les défis sociaux en utilisant la finance sociale. Nous avons publié un rapport — je crois que vous en avez une copie — en mai dernier, qui engageait le gouvernement à franchir quatre prochaines étapes.
    La première étape visait à approfondir la discussion sur la finance sociale. La deuxième étape consistait à établir des liens entre les nouveaux partenaires de différents secteurs. La troisième étape visait à affiner les concepts en créant des occasions et des lieux pour développer des projets pilotes « prêts à l'investissement ». La quatrième étape consistait à élaborer des outils de finance sociale en utilisant les fonds de programme existants pour mettre à l'essai de nouvelles approches.

[Français]

    EDSC a terminé les deux premières étapes et est en train d'avancer les deux dernières.
    Enfin, le gouvernement participe activement au groupe de travail international sur l'investissement à impact social mis en place dans le cadre de la présidence du G8 par le Royaume-Uni en juin 2013. Ce travail se traduira par la publication d'un rapport prévue pour septembre 2014. Ce rapport comprendra des recommandations aux gouvernements en matière de politiques.

[Traduction]

    En conclusion, le travail sur la finance sociale actuellement mené par le gouvernement constitue une approche prudente, progressive, pour faire l'essai de la finance sociale de façon à voir où cette approche fonctionnerait le mieux au Canada et à faire des ajustements sur la base des premières leçons apprises.

[Français]

     Explorer le potentiel de la finance sociale n'empêche pas le gouvernement d'évaluer également d'autres idées ou concepts pour solutionner les problèmes sociaux, pas plus que cela ne nécessite de mettre de côté les approches actuellement en place qui fonctionnent déjà.

[Traduction]

    La finance sociale est un autre outil potentiel dans notre coffre à outils; elle complète les programmes existants qui s'attaquent aux problèmes sociaux. Elle n'est donc pas destinée à remplacer complètement ces programmes, et elle ne conviendrait pas non plus à tous les enjeux sociaux.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Monsieur McMurren, avez-vous des observations à formuler?
    Alors, nous passerons à notre série de questions.
    Nous allons commencer par Mme James.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également nos deux témoins ici présents. Je suis très heureuse que vous ayez été en mesure de comparaître aujourd’hui afin de nous apporter une aide supplémentaire dans notre étude de cet enjeu.
    Je vais maintenant citer des paroles que vous avez prononcées dans votre déclaration préliminaire. Vous avez indiqué que la finance sociale « donne l'occasion de mobiliser des investissements supplémentaires afin d'augmenter les fonds disponibles pour étendre la portée d'approches éprouvées » s'attaquant aux défis sociaux et environnementaux.
    Comment accroît-elle les fonds disponibles? Lorsque nous examinons les sommes que nous dépensons en ce moment pour prévenir la criminalité à l'aide du programme CNPC de Sécurité publique Canada, nous constatons que nous disposons d'un montant fixe d'argent. Ces fonds sont affectés à différentes initiatives, dont le Fonds de lutte contre les activités des gangs de jeunes.
    Comment la finance sociale nous aiderait-elle à augmenter les fonds disponibles et à étendre la portée d'approches éprouvées? Je suis curieuse de le savoir. Je vous prie d'expliquer au comité comment cela fonctionne.
    L'idée consiste à débloquer des capitaux privés. Je présume que les fonds disponibles pour prévenir la criminalité proviennent de l'argent des contribuables. Quelles que soient les sommes dont vous disposez, la finance sociale a pour objectif de trouver d'autres sources d'argent provenant des marchés financiers. Ces capitaux seraient d'origine commerciale et devraient être considérés comme une nouvelle source de fonds, une source supplémentaire de fonds.
    À un moment ou à un autre, le gouvernement ou l'organisation serait tenu de fournir un rendement financier sur l'investissement initial et, dans certains cas, une prime. Je ne sais pas si ce terme est approprié, mais il va de soi que, si les objectifs sont atteints, les investisseurs recevront un montant en sus de ce qu'ils ont investi initialement, n'est-ce pas?
    C'est l'un des concepts de la finance sociale. Il s'applique aux obligations à impact social, mais, comme vous l'avez signalé, j'ai présenté différents outils. Je pense que cette notion est celle qu'on présente le plus souvent dans les discours et celle qui nous est familière. Il faudrait certainement fournir un rendement, en raison du projet pilote de Peterborough. Vous pensez probablement à ce projet. Ce serait l'objectif dans un cas comme celui-là.
    Les économies pourraient augmenter avec le temps. Nous ne le savons pas encore. Cet outil est nouveau et doit être éprouvé; il est de nature préventive. Il s'agit vraiment d'un modèle d'investissement. Dans le domaine des politiques sociales, mon domaine, nous parlons souvent des avantages qu'apportent les approches préventives, par opposition aux mesures correctives, qui peuvent être beaucoup plus coûteuses. Les approches préventives exigent un investissement initial visant à prévenir un événement ultérieur. C'est le fondement de ce genre de modèles. Vous faites un investissement.
    Les économies que vous réaliserez ne se matérialiseront vraisemblablement pas au cours de votre prochain exercice financier. Vous tentez de modifier le comportement d'une personne et, dans le cas de la prévention du crime ou d'autres problèmes sociaux complexes, cela exigera de nombreuses interventions. Cela fait partie de la finance sociale et des investissements à impact social. Ils exigent de nombreuses interventions souvent réalisées par plusieurs ministères ou plusieurs administrations. Le genre d'attention qu'il faudra prêter à ces personnes et à leurs problèmes exigera plusieurs années, et les économies ne seront pas réalisées plus rapidement.

  (1545)  

    Je veux parler des nombreuses interventions. Lorsque nous parlons d'intervenir à plusieurs reprises sans récolter les fruits de notre travail avant longtemps, comment savons-nous si la finance sociale prévient la criminalité, si nos objectifs sont atteints? Comment mesure-t-on les résultats de ce genre d'initiatives?
    Je pense que c'est essentiel. Manifestement, nous investissons de l'argent dans tout ce que nous entreprenons, mais nous devons nous assurer que nous obtenons des résultats. Il va de soi que les contribuables veulent en avoir pour leur argent et que c'est le principal résultat qu'ils recherchent.
    Peut-être pourriez-vous répondre à cette question.
    Il y a différents objectifs.
    Si je vous comprends bien, vous faites allusion aux objectifs qui figurent dans les ententes contractuelles. Les obligations à impact social du Royaume-Uni comportent des ententes contractuelles négociées entre les différents groupes d'intervenants, et ces objectifs sont liés à la personne qui fait l'objet de l'intervention.
    Par exemple — et je connais ce cas un peu mieux —, une obligation à impact social relative aux gens qui dorment à la dure, aux itinérants, a été contractée à Londres. Certains de ses objectifs sont une utilisation réduite des services hospitaliers d'urgence par les gens qui dorment à la dure. Les services que vous rendez à ces personnes ont pour but d'éliminer, avec le temps, la nécessité pour eux de visiter constamment les urgences. Vous allez vraisemblablement leur fournir un abri sécuritaire, un foyer, et leur donner accès à des soins médicaux réguliers. Avec le temps, cela réduira le coût des services publics. L'accès à l'urgence est coûteux comparativement à une visite à un omnipraticien et à l'obtention des genres de soins dont vous avez besoin.
    Voilà le genre d'objectifs que l'on établit, et vous pouvez constater qu'ils ont une double utilité. Par ailleurs, ils servent à soutenir les gens; on tente de les aider à se reprendre en main tout en essayant de réduire certains des coûts que le secteur public doit assumer, en particulier ceux que nous savons être élevés et que nous pourrions réduire tout en venant en aide aux gens. Voilà les objectifs des contrats.
    Me reste-t-il une minute?
    Oui.
    Merci beaucoup.
    Lorsque nous avons parlé des intervenants, vous avez mentionné des intervenants du secteur privé et du secteur sans but lucratif. S'agit-il d'intervenants avec lesquels les ministères entretiennent déjà des dialogues? Savons-nous qui sont ces intervenants? Je veux dire que nous avons entendu parler des sociétés pétrolières et gazières au cours de la dernière séance...
    Dans le secteur privé?
    Nous avons entendu parler des entreprises Canadian Tires, Tim Horton, etc. Y a-t-il une longue liste d'organisations ou de sociétés qui aimeraient participer à la finance sociale dans le cadre de ce genre de programmes?
    Permettez-moi de répondre à cette question sur deux fronts. Le premier front est le secteur sans but lucratif? Oui, nous savons qu'il y a une longue liste d'organisations désireuses d'explorer cette possibilité. Nous le savons parce que nous avons lancé un appel d'idées sur la finance sociale, et nous avons reçu plus de 150 réponses. Nous travaillons continuellement avec ces personnes, mais il y en a d'autres.
    Du côté du secteur privé, les grandes banques canadiennes aimeraient bien à participer à ce genre d'initiatives. La RBC dispose déjà d'un fonds consacré à la finance sociale. La TD met en oeuvre certains projets de ce genre. Comme je l'ai indiqué au cours de ma déclaration préliminaire, les choses prennent une apparence un peu différente au Québec. Les grandes banques et les coopératives envisagent déjà d'investir des sommes importantes dans des projets qui s'inspirent davantage du modèle de financement à impact social. Par conséquent, la réponse est oui.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de Mme Doré Lefebvre.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Harty et monsieur McMurren, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui pour nous parler de la finance sociale, selon votre point de vue.
    Madame Harty, il est écrit ceci à la fin de votre document de présentation:
La finance sociale est potentiellement un autre outil dans la boîte à outils; elle vient en complément aux programmes existants qui s'attaquent aux problèmes sociaux et n'est pas destinée à remplacer complètement ces programmes. Elle ne conviendra pas non plus à tous les enjeux sociaux.
    Selon vous, quelles sont les limites? De quels types de projets sociaux s'agit-il?
     Je sais que c'est une question assez large, mais vous pourriez peut-être nous donner simplement un aperçu de la situation.

  (1550)  

    Je vous remercie. C'est une excellente question, mais il est un peu difficile d'y répondre, étant donné qu'au Canada, on n'a pas beaucoup recours aux OIS. Il s'agit surtout d'autres initiatives.
    Pour ce qui est des programmes qui existent déjà dans d'autres pays, ils s'adressent surtout aux sans-abri, mais certains portent sur la récidive, un sujet que vous étudiez déjà dans l'optique du système carcéral.
    Je dirais que la transition des jeunes du secondaire et du postsecondaire vers le marché du travail constitue aussi un défi dans presque tous les pays d'Europe et, dans une moindre mesure, au Canada et aux États-Unis. Au Royaume-Uni, on étudie beaucoup le potentiel des OIS en vue d'aider les jeunes qui n'ont pas d'emploi et qui ne sont pas aux études. On appelle ces personnes des NEET, acronyme d'origine anglaise qui désigne des personnes ni en emploi, ni aux études, ni en formation. Ce sont des jeunes qui n'ont pas de potentiel. On évalue donc comment il est possible de les aider au moyen des OIS.
    Enfin, certains programmes se concentrent sur les plus jeunes. En Saskatchewan, le programme est axé sur les jeunes parents, sur les familles monoparentales et sur les jeunes mamans, qui risquent de se perdre dans le système. Il s'agit de personnes qui ont eu un enfant quand elles étaient très jeunes, qui ont décroché de l'école, et ainsi de suite.
    Dans certains cas, c'est une question de transition. Ces personnes cherchent à s'établir dans leur communauté, dans leur famille ou dans le marché du travail, mais ont de la difficulté à réaliser cette transition. C'est pourquoi on dit que les problèmes sont complexes.
    On s'entend pour dire que les problèmes liés aux sans-abri, à la récidive et à la transition des jeunes vers le marché du travail sont moins fréquents ici. Par contre, pourriez-vous me dire pourquoi ça ne fonctionnait pas dans les autres pays que vous avez mentionnés? Est-ce parce que les compagnies sélectionnaient d'autres projets peut-être plus attrayants, ou est-ce plutôt parce que les compagnies ont essayé d'investir, mais sans succès?
    Vous parlez de la situation dans les autres pays?
    Il n'y a pas d'autres exemples. Ce sont ceux qui sont en cours présentement.
    Vous avez mentionné que ces programmes ne fonctionnaient pas. Est-ce parce que les compagnies ne voulaient pas investir dans ce domaine ou parce que leurs investissements ne portaient pas leurs fruits?
    Non. Je dirais que le gouvernement a décidé d'emboîter le pas dans le cas des projets que j'ai mentionnés, mais de ne pas le faire dans celui d'autres projets. Rien n'a été fait pour les personnes âgées, par exemple. Pas un seul pays n'a réalisé d'OIS dans ce but. Je ne sais pas pourquoi. La question de l'isolement chez les personnes âgées pourrait être examinée, mais aucun projet de ce genre n'a été soumis à ce jour.
    C'est le cas pour certaines parties de la population. Pourquoi? Il est possible que ce soit plus difficile de mesurer les résultats liés à certaines parties de la population. Ce sont des questions méthodologiques. Dispose-t-on des données ou non? Il est possible que pour certains programmes dans le cadre desquels on ne dépense pas beaucoup d'argent, on considère que ça ne vaut pas la peine d'essayer de réaliser des épargnes. Il s'agit de considérations de ce genre.
    Vous avez étudié un peu ce qui se passe à l'échelle internationale. Je dois vous dire que, pour ma part, je m'inquiète un peu concernant la sélection des projets de finance sociale. En effet, on semble laisser en quelque sorte le programme politique entre les mains des compagnies privées.
     N'y a-t-il pas un risque que les investisseurs trient sur le volet les projets qui semblent plus intéressants et laissent de côté une partie plus marginalisée de la population? Cette dernière aurait alors moins accès à ce genre de financement.
    N'est-ce pas un danger?
    D'après ce que je sais, ce sont les gouvernements qui ont choisi les domaines dans le cas de ces projets.
    Mais si aucune compagnie ne veut investir dans un domaine...
    Ce ne sont pas des compagnies. Il s'agit soit du secteur financier...
    Que va-t-il se passer si le secteur financier décide que ça ne vaut pas la peine d'investir dans ce domaine?
    À ce jour, il n'y a pas eu de problème en ce sens.
    Vraiment? C'est intéressant.
     J'ai beaucoup entendu parler des aspects positifs de la finance sociale, notamment par l'entremise de l'étude que vous avez réalisée et déposée en mai 2013. J'ai eu l'occasion de la lire en partie au cours des dernières semaines. Or je n'ai rien vu là-dedans qui parlait d'inconvénients ou d'effets négatifs.
     En avez-vous constaté quand vous avez réalisé l'étude?

  (1555)  

    Pour le moment, les projets ne sont pas terminés. Le premier, qui a été lancé à Peterborough, au Royaume-Uni, est presque terminé. Nous attendons les résultats. Pour ce qui est des autres, ils ne sont pas encore terminés. Nous n'avons donc pas de résultats. Bien sûr, il est possible que ça échoue, mais on parle ici d'innovation sociale. L'aspect stratégique de tout ça se résume au fait que le gouvernement cherche des innovations pouvant servir à solutionner des problèmes complexes.
     Les innovations dans d'autres secteurs ne sont pas non plus des réussites à 100 %. Certains aspects ne fonctionnent pas, ne sont pas une réussite. C'est un risque qui est couru. Les investisseurs, de leur côté, risquent de ne pas récupérer leur capital.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre M. Richards, s'il vous plaît, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous deux d'être ici aujourd'hui.
    J'ai écouté l'échange que vous avez eu avec la députée d'en face, et les néo-démocrates ne semblent pas bien comprendre. Je pense qu'on a peut-être un peu mal interprété vos observations, car on semblait avoir l'impression que tout allait être confié d'une certaine façon au secteur privé, qui ne souhaiterait pas aider les gens. Bien franchement, je crois que cette description est très injuste. De plus, je vous ai clairement entendu dire dans vos observations que vous considérez cela comme un outil complémentaire. Vous ne pensiez pas qu'il visait à remplacer complètement les programmes existants.
    Je me demandais si vous pouviez nous en dire un peu plus long à ce sujet. Je pense que ce serait dans l'intérêt du comité si vous pouviez nous dire pourquoi vous voyez cela comme un outil complémentaire et un bon ajout pour faire face aux problèmes sociaux.
    Merci.
    Non, le gouvernement n'a indiqué d'aucune façon qu'il a l'intention de remplacer les outils existants par celui-ci. En fait, à ce stade-ci, il serait seulement intéressé par certains projets pilotes. Nous avons pris très peu de mesures jusqu'à maintenant. Dans mon ministère, nous n'avons mis en oeuvre que le projet pilote dont j'ai parlé dans le domaine de la littéracie et des compétences essentielles. D'autres ministères étudient cette possibilité.
    Je dirais que nous sommes très prudents dans ce dossier, entre autres parce que certains de nos instruments fonctionnent très bien et qu'il n'est absolument pas nécessaire de revoir complètement le coffre d'outils. Comme je l'ai dit dans mes observations, je pense que celui-ci est intéressant lorsque les problèmes ont résisté aux mesures prises jusqu'à maintenant. Quand il y a des défis complexes, nous n'avons pas vraiment réussi à composer avec ce qu'on entend. Par contre, nous avons connu beaucoup de succès pour ce qui est, par exemple, de réduire la pauvreté chez les aînés au Canada.
    Nous n'avons peut-être pas réussi à réduire la pauvreté au sein de toutes les populations vulnérables. Est-ce à défaut de connaître la bonne façon d'intervenir? Y a-t-il une approche novatrice quelque part au pays qui nous permettrait de trouver de nouvelles façons de régler un problème social complexe? Je pense que dans ces cas-ci, lorsqu'une approche novatrice permet de s'attaquer à un problème qui résiste aux interventions habituelles, nous devrions envisager de procéder ainsi. Comme je l'ai dit dans ma réponse précédente, il s'agit d'essayer de trouver des solutions plus innovatrices, et le gouvernement n'en a pas nécessairement.
    Bien sûr, et je vous suis reconnaissant d'avoir clarifier un peu cela. Je trouve un peu regrettable la description que nous avons entendue. Je connais beaucoup de personnes, des entrepreneurs, qui ont beaucoup à donner. Ils sont créatifs et innovateurs. Ils se soucient des autres membres de la société et veulent essayer de mettre leurs talents à profit pour les aider. La description que nous avons entendue est regrettable, mais je vous remercie d'avoir clarifié cela et d'avoir expliqué exactement de quelle façon vous voyez les choses progresser et pourquoi vous pensez que c'est complémentaire.
    Dans la première réponse que vous m'avez donnée, vous avez dit qu'il y avait des projets pilotes, et que ce n'était pas le seul domaine où l'on envisageait de mettre cette approche à l'essai pour voir comment elle fonctionne au Canada. Je me demandais si vous pouviez me donner une petite idée de ce qu'il en est. À part la politique sociale, dans quels autres domaines pensez-vous que ce type d'outils financiers pourraient être utilisés?

  (1600)  

    Un des domaines où je pense que c'est envisagé — et nous avons sans aucun doute obtenu des réponses provenant de nombreux secteurs à la suite de l'appel d'idées — est celui de la santé publique. Une fois de plus, c'est un domaine dans lequel certains enjeux très complexes nécessiteraient peut-être des solutions plus novatrices. Nous avons des exemples d'idées innovatrices qui permettent parfois de résoudre ce genre de problèmes.
    Il y a également des enjeux liés à la citoyenneté et à l'immigration. Nos collègues de Citoyenneté et Immigration recherchent donc des moyens de financer divers aspects de leur travail. Pourraient-ils utiliser des modèles — pas nécessairement des obligations à impact social, mais d'autres modèles de financement, par exemple — pour ce qui est de l'intégration et de l'établissement des immigrants?
    Il y a déjà une approche novatrice associée à cela, un programme de microcrédit à l'intention des nouveaux Canadiens qui veulent obtenir une accréditation au pays, mais qui ne peuvent pas nécessairement se permettre de passer les tests qui sont parfois obligatoires. Ils ont une accréditation de leur pays d'origine. Un programme de la sorte existe déjà dans le domaine de la finance social. Il s'agit donc d'un exemple.
    Je pense que certaines Premières Nations s'intéressent déjà au potentiel de la finance sociale pour les aider à développer certains secteurs d'activités dans les réserves, notamment le logement. Ce sont des possibilités que nous examinons.
    Excellent, merci.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Vous avez une minute et demie.
    Très bien, merci. Cela me laisse probablement juste assez de temps pour poser une autre question, ce qui est parfait.
    J'aimerais seulement avoir une idée de ce que vous considéreriez comme des risques potentiels, tant pour le gouvernement que pour les organisations privées et les organismes de bienfaisance ou à but non lucratif qui pourraient recourir à la finance sociale. De quel genre de risques est-il question?
    En plus de ce que j'ai déjà dit, ou seulement pour le rappeler, il y a toujours un risque d'échec, et il faut donc y réfléchir sérieusement quand on s'embarque dans ce genre de projets.
    Dans certains de nos travaux, nous ne cherchons pas à évaluer les résultats de façon si rigoureuse. Quand on fait de la finance sociale et de l'investissement d'impact, il faut être prêt à mesurer les résultats, ce qui veut dire qu'on met la barre très haute pour déterminer si on va réussir. On déploie également beaucoup d'efforts pour démontrer que l'investissement fait avec les deniers publics a un objectif à atteindre. On tente d'évaluer les résultats, et il est donc possible que l'objectif ne soit pas atteint, et c'est la raison pour laquelle j'ai parlé de l'innovation; il faut parfois être prêt à échouer quand on innove.
    Excusez-moi de vous interrompre, mais si je ne m'abuse, je pense que l'idée est que cela soutient vraiment l'atteinte de l'objectif. Pour que le programme fonctionne et donne des résultats, on mise grandement sur le fait qu'il y a un objectif à atteindre.
    Oui, c'est axé sur les résultats, mais il faut utiliser des approches qui fonctionnent déjà à l'échelle locale. C'est ce que j'ai dit dans mes observations. Il faut se servir d'approches qui fonctionnent déjà dans certaines collectivités et se demander si on peut les appliquer à grande échelle dans d'autres collectivités.
    Il est possible que vous ayez un moyen novateur de lutter contre l'itinérance dans votre collectivité. Pourquoi ne pas s'en servir dans tout le pays? Il fonctionne dans votre collectivité, mais vous voulez l'utiliser à grande échelle.
    C'est-à-dire reproduire quelque chose qui donne de bons résultats.
    Oui.
    Merci, monsieur Richards. Votre temps est écoulé.
    Nous allons maintenant passer à M. Easter.
    Merci, monsieur le président.
    Chers témoins, merci de vos exposés.
    Je vais poursuivre dans la même voie en vous demandant si vous avez une idée de ce que coûtent certains de ces projets. Pouvez-vous nous donner quelques exemples? De quel montant parle-t-on?
    Il n'y en a pas eu beaucoup dans le contexte canadien, mais je peux vous dire que notre projet sur la littéracie et les compétences essentielles coûte environ 5 millions de dollars. Nous pouvons confirmer ce chiffre, mais c'est ce qui a été annoncé. Dans d'autres pays, le montant varie beaucoup.
    À propos de mes derniers commentaires sur l'utilisation à grande échelle des approches, cela dépend vraiment dans quelle mesure nous voulons nous engager dans cette voie.
    Au Royaume-Uni, je pense que la plupart des projets ont probablement coûté autour de 5 à 10 millions de dollars. Cela dépend de la collectivité, de la nature de l'intervention.
    Cela dit, je pense que la chose à retenir, c'est qu'on peut les appliquer à grande échelle. Le coût varie selon l'intervention, le nombre de participants et le milieu concerné. S'agit-il d'une petite collectivité ou d'un grand centre urbain? Je pense qu'on peut déterminer toutes ces variables au moment de la conception du projet.

  (1605)  

    Dans le cas du projet de 5 millions de dollars dont vous avez parlé, quelle est la part assumée par le gouvernement et celle qui revient au secteur privé?
    Nous faisons cela dans d'autres domaines — j'oublie le nom du programme —, comme l'emploi chez les jeunes. Le gouvernement du Canada rassemblera des fonds, paiera peut-être 40 % des salaires ou quelque chose du genre, et le secteur privé déboursera un certain montant. Cela ne me pose aucun problème. Quelle part revient à chacun d'eux dans le projet de 5 millions de dollars?
    Il n'y a pas de formule fixe. C'est un contrat. Comme pour tous les contrats, cela fait l'objet de négociations.
    Comme je l'ai dit à la dernière réunion, et je le maintiens, une de mes préoccupations, surtout dans le domaine de la sécurité publique, est que les gouvernements, en particulier le gouvernement fédéral, pourraient se servir de ce modèle pour se soustraire à certaines de ses responsabilités et remettre les fonds associés à ces responsabilités aux entreprises et aux collectivités.
    Vous avez dit une chose qui m'a tracassé, en gros, que le gouvernement n'a pas nécessairement de solutions novatrices. Pourquoi pas?
    J'estime qu'on déploie beaucoup d'efforts pour démoniser le gouvernement et ce qu'il peut faire. Il y a beaucoup de choses qu'il fait bien. Je ne parle pas nécessairement du gouvernement actuel, mais il ne fait pas que de mauvaises choses. Nous avons la Sécurité publique, Ressources humaines et Développement des compétences; nous engageons des gens comme vous en raison de leur expertise. Ils ont des idées novatrices. Pourquoi dites-vous que le gouvernement n'en pas nécessairement? Nous engageons des gens pour cela.
    Nous ne sommes pas les seuls à avoir des idées novatrices.
    Je crois que ce modèle part de l'hypothèse que d'autres personnes en ont aussi. Pourquoi n'établiriez-vous pas de partenariats avec eux pour examiner ces idées ensemble et réfléchir à la façon dont vous pourriez les mettre en pratique dans divers contextes et différentes collectivités?
    Je pense que la différence, c'est que de toute façon, le gouvernement devrait toujours procéder ainsi et mener des consultations auprès des provinces, des particuliers et de l'industrie pour mettre au point ce genre d'innovations. Ce sont les idées novatrices qui me préoccupent. Le gouvernement tente maintenant de trouver des fonds ailleurs, ce qui lui permettrait peut-être de se soustraire à ses propres responsabilités.
    Permettez-moi de me référer à votre rapport sur la finance social. À la page 22, sous le titre « Sécurité publique », on parle du programme d'aide aux jeunes, qui me semble être un très bon projet. Pourriez-vous nous en parler un peu?
    J'aime ce que je vois ici. Le projet sera-t-il mené à terme bientôt, ou vient-on tout juste de le mettre en branle? Quels résultats a-t-il donnés? De quel endroit provient le reste de l'argent, s'il vient d'ailleurs?
    Je vous remercie de vos commentaires.
    Tous les projets dont il est question ici sont des concepts. C'était un appel d'idée auprès des Canadiens, comme je l'ai dit, pour tester leurs connaissances et leur intérêt. Dans un sens, c'était une sorte d'étude de marché, si on peut dire. On voulait savoir si les Canadiens souhaitaient collaborer dans le cadre de projets de finance sociale. Personne n'a reçu de financement, du moins, pas de la part du gouvernement du Canada.
    Donc, le projet dont il est question sous « Sécurité publique », le Youth Reach Program de JVS Toronto, est-il mis en oeuvre grâce au financement de quelqu'un d'autre?
    Peut-être, mais nous n'avons pas financé celui-ci en particulier. C'est une idée qui nous a été soumise.
    Le projet est appliqué à plus grande échelle depuis 2001, mais l'idée était de le développer davantage à l'aide d'un financement fédéral en bonne et due forme.

  (1610)  

    Il vous reste encore 30 secondes, monsieur Easter.
    Peu importe la position du gouvernement fédéral à cet égard, depuis 2001, même si c'est à l'aide d'un fonds communautaire, le projet a-t-il été mis en oeuvre à un moment donné, a-t-il donné des résultats? À mon avis, c'est une excellente idée. C'est la raison pour laquelle je pose la question.
    Nous allons devoir vous revenir là-dessus. On nous a seulement présenté un concept, mais je peux vous dire quelles ont été les réussites de cette organisation au fil du temps.
    Si c'est possible, je vous en serais reconnaissant.
    Merci, monsieur Easter.
    Monsieur Garrison, s'il vous plaît.
    Je regrette que M. Richards n'ait pas pu rester, car j'ai l'impression que nous avons été victimes d'un délit de fuite après le tableau qu'il a dressé et ce qu'il avait à dire au sujet des commentaires de Mme Doré Lefebvre.
    Je tiens à préciser que nous sommes sceptiques de ce côté-ci. Nous ne disons pas que les projets n'ont aucune valeur, ni que les motivations des organismes sans but lucratif ou des entreprises sont mauvaises. Cela dit, je suppose que lorsque nous voyons ce que j'appellerais l'« enthousiasme douteux » à cet égard de la part de gouvernements occupés à faire des compressions dans tous les domaines, il y a de graves questions auxquelles nous devons répondre.
    À mon avis, la première concerne l'équité. J'en ai d'ailleurs parlé la dernière fois. Nous avons visité Calgary et pris connaissance de tous les remarquables programmes de prévention du crime de la ville, qui sont financés par le secteur privé. C'est à Calgary qu'on dirige l'exploitation des sables bitumineux, ce qui veut dire qu'on y trouve de nombreuses sociétés, qui ont les moyens et le besoin d'acheter des relations publiques positives.
    Cela dit, lorsqu'on se rend ailleurs, les collectivités ne sont pas aussi riches. Elles dépendent de la bonne volonté des petites entreprises, qui est bien réelle, je ne le nie pas, mais elles n'ont tout simplement pas les mêmes moyens.
    Doit-on vraiment se préoccuper de la possibilité que l'adoption de ce modèle permette à ceux qui ont déjà des moyens de profiter davantage de ces programmes?
    Je ne sais pas quoi vous répondre. Je n'ai pas eu vent de préoccupations à cet égard. Aussi, il ne s'agit pas seulement de recueillir des fonds localement. C'est un marché mondial. C'est pourquoi le Royaume-Uni, lorsqu'il était à la tête du G-8, a établi un groupe de travail international pour se pencher sur la question. Certains projets au Royaume-Uni reçoivent des fonds d'ailleurs en plus d'être financés par le pays.
    Avec l'Union européenne, c'est quelque peu différent, mais des fournisseurs de services arrivent de l'étranger pour participer à des projets communautaires au Royaume-Uni, et cela peut être des fournisseurs des Pays-Bas qui ont déjà une manière innovatrice de faire telle ou telle chose.
    Jamais je n'ai entendu dire qu'il fallait se concentrer sur la collectivité locale pour obtenir des fonds ou les services d'un fournisseur. C'est un marché. L'idée est de créer un marché. Ces services devraient pouvoir se rendre aux entreprises.
    Que pouvez-vous me dire au sujet de l'orientation du financement? Pour les projets de financement social motivés par les profits, je crains que cela n'incite les investisseurs à choisir des personnes avec qui il sera facile d'atteindre leurs objectifs, donc d'y aller pour la voie facile et d'en faire un profit, plutôt que de collaborer avec celles qui impliquent plus de travail. Est-ce une préoccupation qui a déjà été soulevée?
    C'est effectivement une préoccupation au Royaume-Uni. Il est essentiel de mettre en place le bon processus de conception et de sélection. La rigueur de la conception du projet est cruciale pour éviter les iniquités auxquelles vous faites référence. On peut ainsi recourir à différentes approches pour éviter cet « écrémage », entre autres, comme des contrôles aléatoires et d'autres techniques relatives aux sciences sociales.
    On retrouve le même genre de situation dans d'autres contextes, par exemple pour la mise à l'essai de produits pharmaceutiques. Ce sont des questions d'ordre moral qu'il convient de poser. C'est un aspect qui se retrouve au coeur de la conception des projets.
    C'est aussi pourquoi il est important de procéder à une évaluation appropriée des projets par une tierce partie.
    Une troisième préoccupation à avoir, dans ce cas, concerne la responsabilisation quand il est question de populations vulnérables. Souvent, on vise des sans-abri, des toxicomanes ou des ex-détenus. Lorsque ces projets deviennent des projets du secteur privé, qui assure la responsabilisation des parties concernées?
    Dans le cadre des projets publics, les employés sont soumis à une surveillance et à des vérifications rigoureuses, et des mécanismes de plainte efficaces sont en place. Mais dans les projets privés, souvent, il n'y a rien de tout cela.
    Il ne s'agit pas de projets privés, puisqu'il s'agit de partenariats. Pas vrai? Le gouvernement a encore son mot à dire.
    Mais ce ne sont pas des employés du secteur public.
    Mais ils pourraient être issus du secteur caritatif, non? Les fournisseurs de services viennent du secteur caritatif. C'est le cas dans la plupart des pays. Ce secteur bénéficie déjà de subventions et de contributions des gouvernements et il offre déjà ses services. Cela n'a pas changé; il est toujours aux premières lignes.
    Différents partenaires ont effectivement été mis à contribution. Comme pour tout projet multipartite, il faut en assurer la gouvernance de manière rigoureuse. Cela doit absolument être mis en place. Ce serait dans l'intérêt du gouvernement de veiller à la mise en place d'une telle structure de surveillance.

  (1615)  

    Très bien. Merci beaucoup.
     Pour cinq minutes, monsieur Norlock, nous vous écoutons.
    Par votre entremise, monsieur le président, je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui.
    Vous devinerez au genre de questions qui sont posées que nous n'avons pas tous la même idéologie. Certains ne sont pas convaincus que la prévention du crime puisse être l'affaire de quelqu'un d'autre que le gouvernement. Être sceptique, ce n'est pas nécessairement une mauvaise chose, remarquez bien. Ce n'est pas ce que j'insinue. Je veux tout simplement dire qu'en ce qui a trait à la prévention du crime, on ne peut pas toujours continuer à faire la même chose et s'attendre à obtenir de meilleurs résultats.
    Les résultats ne sont peut-être pas mauvais, mais ai-je raison de dire, madame Harty, qu'en explorant de nouvelles possibilités de financement social, c'est tout ce que nous faisons, de l'exploration? Nous voulons mettre ces idées à l'essai. Nous allons nous assurer de bien faire les choses, en apprenant des bonnes et des mauvaises expériences des autres pays, et nous allons utiliser des outils qui nous permettront d'atteindre les meilleurs résultats possible, sachant que le succès n'est pas garanti. Est-ce exact?
    Oui, un des avantages pour le Canada à ne pas avoir été l'un des précurseurs dans ce domaine, c'est qu'il peut voir ce qui a été fait ailleurs dans le monde et en tirer des leçons. Les autres pays ont pu dégager des pratiques exemplaires, et nous allons pouvoir les examiner et décider si nous voulons aller de l'avant ou non. Nous bénéficions ainsi d'un filet de sécurité.
    Et on nous a dit que c'était très bien de faire des consultations, mais ne pensez-vous pas que la prochaine étape logique serait de passer à l'action? Dans ce cas-ci, passer à l'action signifierait de procéder à l'élaboration d'un contrat social, ou quelque chose du genre. Mais il faudrait s'assurer que cette obligation à impact social s'accompagne de critères de mesure. Autrement dit, il faut pouvoir évaluer si on atteint ou non nos objectifs.
    Diriez-vous également que tout investisseur, y compris le gouvernement — qui n'a pas d'autre argent que celui des contribuables — voudrait s'assurer d'en avoir vraiment pour son argent? Dans ce cas-ci, ce serait les contribuables les investisseurs.
    Comme vous l'avez dit, on parle de partenariats et l'obligation à impact social n'implique pas que... Je vais tâcher d'être poli envers M. Garrison. La rentabilité n'est pas nécessairement mauvaise quand elle permet d'obtenir de bons résultats. Êtes-vous de cet avis?
    Je ne me prononcerai pas sur la rentabilité, mais plutôt sur les résultats. Ce que je peux dire à ce sujet est que le gouvernement et ses partenaires, quels qu'ils soient, ne voudraient pas se lancer dans une telle entreprise si elle ne permettait pas d'améliorer les choses. Nous voulons que tombent les obstacles sociaux et économiques et que l'application d'une solution innovatrice permette d'améliorer la situation.
    Je crois que tous les partenaires devraient s'entendre là-dessus avant de penser à collaborer à un projet et à signer un contrat. Si cela paraissait sans issue pour l'investisseur, le gouvernement et le fournisseur de services, je ne vois pas pourquoi ils accepteraient d'aller de l'avant. Il faut donc que tous les esprits se rencontrent avec l'intention de faire avancer les choses. Autrement, pourquoi s'investir dans un tel projet?
    Il faut que le projet soit annonciateur de bonnes nouvelles pour que des gens y participent.
    Quelqu'un a parlé des régions du Canada qui sont soit-disant plus riches, et qui peuvent se permettre des choses que les collectivités rurales, par exemple, ne peuvent pas. Eh bien, je viens d'une collectivité rurale et vous ne connaissez peut-être pas ce programme, mais un de mes derniers emplois consistait à présenter des programmes pour les forces policières. L'un d'eux était un programme à vocation communautaire pour les services de police.
    Pensez-vous qu'il serait possible de conclure un contrat social avec une organisation policière à vocation communautaire qui veut réduire, disons, le vandalisme au centre-ville? Elle pourrait obtenir une petite subvention de démarrage du gouvernement et peut-être des capitaux auprès d'entreprises locales concernées, et peut-être aussi de l'administration municipale en collaboration avec un autre ordre de gouvernement.

  (1620)  

    Si la communauté pense qu'elle a une solution innovatrice à appliquer et que des partenaires acceptent de prendre part au projet, avec ou sans l'aide du gouvernement, je crois que la décision revient à la communauté.
    Quels seraient les secteurs les plus adéquats ou les partenaires les plus appropriés? Je ne saurais vous dire. Tout dépend du contexte.
    Merci beaucoup, monsieur Norlock.
    Monsieur Rousseau, c'est à vous.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Premièrement, je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
    J'ai quelques questions à poser, entre autres, et elles n'ont pas rapport aux définitions en vue de déterminer ce qu'on considère comme malveillant ou non.
    À Emploi et Développement social Canada, quels sont les paramètres le plus fréquemment utilisés pour savoir si un programme a réussi ou non ou s'il a atteint les objectifs?
    Selon une directive du Conseil du Trésor, chaque ministère a son propre processus d'évaluation. Cela dépend des programmes, mais normalement, après cinq ans, par exemple, un programme est évalué et on établit les critères à l'avance. Il y a toujours un comité au sein du ministère qui se penche sur les différents aspects du programme pour voir quels devraient être les critères. Cela dépendra surtout de l'objectif du programme. À partir de l'objectif, on établira les critères et les façons de mesurer les résultats obtenus.
    Est-ce le ministre de l'Emploi et du Développement social ou le Conseil du Trésor qui a un droit de regard dans ce domaine?
    Je ne peux pas émettre de commentaires là-dessus, puisque les évaluations ne font pas partie de mon mandat. Si vous le désirez, nous pourrions aller chercher la directive du Conseil du Trésor et la politique qui existe au sein de notre ministère.
    D'accord.
    Monsieur McMurren, ma prochaine question s'adresse à vous, puisque vous êtes responsable des innovations sociales à votre ministère.
    Pouvez-vous définir l'expression « innovation sociale » dans l'optique de notre étude?
    Certaines définitions de ce concept sont assez floues. Dans notre rapport, l'innovation sociale correspond aux nouvelles idées pour s'attaquer aux problèmes sociaux en milieu communautaire. Nous faisons une distinction entre l'innovation sociale et la finance sociale, cette dernière étant l'application de l'innovation sociale. C'est un concept parapluie qui regroupe les concepts d'entreprise sociale, de finance sociale et d'investissements sociaux, notamment.
    Nous sommes surtout intéressés par les applications potentielles en matière de prévention du crime.
    Vous avez parlé de financement de projets d'alphabétisation et d'acquisition de compétences essentielles au moyen de la formation, notamment. Or, les provinces sont assez frileuses quand on touche à ces secteurs d'activité.
    Avez-vous discuté avec les gouvernements provinciaux de la façon dont les OIS pourraient être appliquées dans leur champ de compétence?
    Nous n'en avons pas discuté officiellement au sein de nos comités.
    Comme je l'ai déjà mentionné, il y a déjà quelques provinces qui s'y intéressent. Certaines ont lancé des stratégies à cet effet. Cela nous a permis d'échanger avec elles pour connaître leurs expériences, leurs attentes et leurs objectifs. Par contre, nous n'avons pas de partenariat avec les provinces en ce moment.
    Combien de temps me reste-t-il?

[Traduction]

    Il vous reste encore une minute, monsieur Rousseau.

[Français]

    Vous avez dit que des capitaux étrangers pourraient financer des programmes locaux. Est-ce que cela serait soumis aux mêmes traités de libre-échange que ceux que le Canada a conclus avec d'autres pays?
    Absolument. Je ne suis pas experte dans ce domaine, mais je sais que les pays européens doivent toujours respecter les traités de libre-échange conclus par l'Union européenne.
    Je pense que c'est plus facile pour les pays européens, parce que cela fait déjà partie de leur façon de faire des affaires. Au Canada, c'est quelque chose qu'il faudrait examiner de plus près.

  (1625)  

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci, monsieur Rousseau.
    Vous n'avez que deux ou trois minutes, monsieur Payne. Nous allons faire une pause le temps de brancher l'équipement vidéo, mais vous pouvez prendre quelques minutes d'ici là.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici.
    C'est un concept très intéressant qu'on nous présente, mais il est parfois difficile de s'imaginer comment les choses vont s'imbriquer. J'imagine qu'il y aura toujours le doute que certaines organisations pourraient viser les projets faciles pour en tirer profit. Comment les projets beaucoup plus complexes pourraient-ils être rentables? Serait-il possible d'avoir un rendement intéressant en ayant des paramètres beaucoup plus stricts ou des cibles plus difficiles à atteindre?
    C'est une bonne question. Blair et moi n'avons pas beaucoup d'expérience dans la négociation des hautes finances ou des contrats, alors je vais tout simplement vous répéter ce que nos homologues étrangers m'ont dit.
    Évidemment, pour un investisseur, plus les risques sont grands, plus le rendement doit être élevé. Et je signale encore une fois que je ne m'y connais pas vraiment en investissements. On peut comparer cela au capital-risque. Donc, s'ils voient que le projet est risqué, parce que c'est nouveau et pas nécessairement mis à l'essai à grande échelle encore, ils vont vouloir un meilleur rendement financier. Cela a peut-être fonctionné dans une petite collectivité, et ils veulent maintenant en faire l'essai à Londres, en Angleterre. À quoi est-ce que cela va ressembler? Les risques sont élevés, et les investisseurs vont vouloir en avoir pour leur argent. Les gouvernements ne seront probablement pas prêts à payer le gros prix, alors il faudra négocier.
    C'est un concept éprouvé. Le rendement financier sera peut-être moins important parce que les risques seront moins élevés. Les risques perçus vont sans contredit peser lourd dans les négociations.
    Il est possible que plus les risques seront élevés, plus le gouvernement pourra faire des économies aussi.
    Oui, c'est possible.
    Nous pourrions faire toutes sortes d'économies...
    Surtout au niveau des coûts ultérieurs, comme je le disais. Il faut voir les choses à long terme, ce qui est aussi risqué, parce que c'est comme des capitaux patients. Ce serait investir dans un projet qui ne rapporterait que dans sept ans.
    J'ai une autre question rapidement. Vous avez parlé de 150 réponses d'organismes caritatifs à l'échelle du pays. Est-ce que cela couvre uniquement les grands centres ou y en a-t-il aussi dans les petites localités?
    Notre rapport faisait état de plus de 150 concepts. Vous verrez dans le rapport que nous les avons classés selon différentes catégories. Il n'y en avait pas partout. Dans l'ensemble du pays, on constate certaines absences, mais nous n'avons pas la répartition urbaine et rurale des projets. Il est toutefois possible d'avoir une idée en fonction de la description des concepts.
    Je ne peux pas vous donner de chiffres exacts.
    Très rapidement.
    J'en ai remarqué un en Colombie-Britannique, qui vise à offrir de la formation spécialisée aux Autochtones. Cela me semble être un programme formidable qui pourrait avoir d'énormes retombées positives, évidemment pour la province, mais aussi pour les Premières Nations.
    Oui, bon nombre de ces programmes sont pris en charge par les ministères concernés. C'est leur responsabilité. Si des concepts les intéressent, ils peuvent entamer des discussions avec les auteurs. Je sais que le ministère des Affaires autochtones et d'autres le font.
    D'accord, merci beaucoup, monsieur Payne.
    Merci infiniment aux témoins d'avoir été des nôtres aujourd'hui.
    Nous allons faire une pause de quelques minutes pour préparer la vidéoconférence afin d'entendre nos prochains témoins.

    


    

  (1630)  

    La séance reprend. Nous recevons deux nouveaux témoins.
    Bienvenue au Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
    Par vidéoconférence en direct de Washington, D.C., nous avons le grand plaisir de recevoir Mme Elizabeth Lower-Basch, coordonnatrice des politiques et analyste principale en matière de politiques du Center for Law and Social Policy. Nous recevons également Andrew McWhinnie, directeur d'Andrew McWhinnie Consulting.
    Vous avez 10 minutes pour nous présenter votre exposé.
    Nous allons commencer par Mme Lower-Basch. La parole est à vous pour 10 minutes. Nous allons ensuite céder la parole à M. McWhinnie, puis nous passerons aux questions.
    Parfaitement bien, merci. Nous vous écoutons.
    Je suis heureuse de pouvoir me joindre à vous grâce à la technologie.
    Je suis Elizabeth Lower-Basch, coordonnatrice des politiques au CLASP, le Center for Law and Social Policy. Nous cherchons à améliorer la vie des personnes à faible revenu en réalisant des études et en préconisant la mise en oeuvre de pratiques exemplaires et de politiques.
    Au début de l'année, nous avons publié un rapport que j'ai rédigé sur l'évaluation des obligations à impact social, ou OIS, comme moyen d'étendre la portée des services à l'intention des populations désavantagées dont nous nous préoccupons. Le rapport se penche sur un modèle stylisé d'obligation à impact social, il compare les projets en cours aux États-Unis et au Royaume-Uni à ce modèle et il énonce les avantages et inconvénients possibles du recours aux OIS. Il se fonde sur notre examen des ouvrages visant les OIS, ainsi que sur notre connaissance et notre expérience des systèmes de mesure du rendement, sur les contrats axés sur le soutien et, en général, sur des stratégies employées pour faire le lien entre la politique gouvernementale et la mise en oeuvre, et la recherche et les données probantes concernant les programmes qui répondent aux besoins des populations désavantagées, notamment les personnes à faible revenu.
    Je vais commencer par un examen rapide des principales caractéristiques du modèle stylisé afin de m'assurer que nous sommes tous sur la même longueur d'onde. L'OIS se fonde sur les services de prévention ou d'intervention précoce. Une organisation intermédiaire — qui ne fait pas partie du gouvernement — trouve des investisseurs privés qui verseront un financement initial, lequel servira à retenir les services d'organisations chargées d'offrir les services de prévention.
    En même temps, le gouvernement conclut un marché avec cet intermédiaire, dans lequel il promet de verser un certain montant à la fin de la période d'exécution — en général de cinq à sept ans — si certains effets ont été obtenus. Ce montant est suffisant pour permettre à l'investisseur de récupérer son investissement initial et, même, de faire un profit et d'être indemnisé aussi bien pour l'utilisation des fonds que pour le risque qui accompagne le projet.
    Il y a un risque, car si les effets précisés ne se matérialisent pas, l'investisseur privé n'est pas payé et perd son investissement. Dans certains cas, le montant du paiement se fonde aussi sur les économies que le gouvernement s'attend à réaliser si le projet donne les résultats précisés.
    Je vais me concentrer sur deux des affirmations relatives aux OIS. Premièrement, ils vont accroître l'attention portée sur les effets des services, plutôt que sur les intrants. Deuxièmement, ils vont permettre aux gouvernements d'économiser de l'argent.
    Il ne fait aucun doute que, grâce aux OIS, on accroît l'attention portée sur les résultats des services. Ils mettent à l'avant-plan les résultats que nous souhaitons et ce que nous sommes prêts à payer pour les réaliser. Étant donné qu'il y a un contrat selon lequel le paiement est fonction du succès, le gouvernement doit préciser clairement ce que représente le succès.
    Les OIS forcent aussi les gens à bien réfléchir aux effets des programmes — la différente entre ce qui se produit grâce au programme et ce qui se serait produit de toute façon — et non seulement aux résultats. Cela peut comporter une évaluation à répartition aléatoire, mais ce n'est pas absolument nécessaire. Il faut cependant établir des données contrefactuelles qui, d'une certaine façon, se fondent sur un groupe de référence ou sur des tendances sous-jacentes avec contrôles. Je pense que tout le monde conviendra qu'il est bon de se concentrer ainsi sur les effets des programmes. Il est aussi important de veiller à ce que ce qui est encouragé corresponde effectivement à ce que nous souhaitons fondamentalement, et non simplement à quelque chose de facile à quantifier et à mesurer.
    Je ne vais pas entrer dans les détails aujourd'hui, mais dans mon mémoire, je consacre beaucoup de temps aux distorsions possibles, quand on lie de forts incitatifs à des mesures qui répondent partiellement à ce que nous souhaitons vraiment. Qu'est-ce que cela veut dire? Prenons un programme de formation en cours d'emploi pour de jeunes adultes à risque. Vous pourriez constater qu'en plus de promouvoir l'emploi, il entraîne une réduction des taux d'incarcération. Vous pourriez alors envisager d'établir un OIS afin de reproduire ce programme, les paiements étant liés aux taux d'incarcération, mais il pourrait y avoir des conséquences imprévues. Par exemple, on pourrait constater que très peu des femmes du groupe de contrôle aboutissent en prison et, de ce fait, décider de n'inclure que les jeunes hommes. Ou encore, on pourrait décider de ne pas faire porter le programme sur la formation en cours d'emploi du tout, mais plutôt sur le mentorat ou sur d'autres services visant à réduire les taux d'incarcération, si c'est ce à quoi le paiement est lié. Il faut donc bien réfléchir à vos objectifs et à ce qui serait acceptable.

  (1635)  

    L'autre affirmation que les gens font, concernant les OIS, c'est qu'elles vont permettre au gouvernement d'économiser. Il est très important de faire la distinction entre deux aspects bien différents. Premièrement, on affirme que les services axés sur la prévention peuvent entraîner des économies pour le gouvernement. Deuxièmement, les OIS comme telles entraînent des économies.
    Dans la version idéalisée de l'OIS, tout cela se conjugue. Les services permettent au gouvernement d'économiser tellement d'argent que les dépenses du gouvernement peuvent diminuer, même après avoir remboursé les investisseurs. Il y a peut-être des cas où c'est possible, mais on a proposé des OIS dans tout un éventail de secteurs, et ce n'est que dans certains d'entre eux que de telles économies vont vraisemblablement se matérialiser.
    Premièrement, il est important de reconnaître que l'investissement dans la prévention ne représente pas dans tous les cas des économies pour le gouvernement. Cela étant dit, la justice pénale fait probablement partie des cas où les économies sont plus probables à court terme. Mettre des gens en prison coûte très cher, et les possibilités de faire des économies sont considérables, même à court terme.
    Dans de nombreux autres secteur, comme la petite enfance et la formation en cours d'emploi, les services de prévention sont sans nul doute avantageux pour les participants en particulier, et pour la société en général, mais ils ne vont peut-être pas mener directement à des économies pour le gouvernement. S'il y en a, ce pourrait être à très long terme, et les investisseurs ne seraient peut-être pas prêts à attendre aussi longtemps pour être remboursés. C'est la raison une si grande partie des premiers OIS se concentrent sur les clients du système de justice, et en particulier sur les ex-délinquants et la prévention des incarcération.
    Il est toutefois aussi important de comprendre que, peu importe les services ou activités, l'OIS sera plus coûteuse que le recours à un mécanisme plus traditionnel, simplement parce que l'OIS comporte des coûts différentiels. Il y a le rendement pour les investisseurs, les coûts de l'intermédiaire et de l'évaluation, et les coûts initiaux liés à la négociation et à la détermination des données de référence et des dispositions du contrat.
    Je ne vais pas entrer dans tous les détails, mais McKinsey & Company a réalisé, pour les coûts d'une OIS, une analyse pro forma jugée très utile.
    Je souligne que les OIS peuvent donner lieu à des économies si les résultats des programmes ne sont pas atteints, parce que le gouvernement n'a pas à payer l'intermédiaire. Ce n'est manifestement pas souhaitable. Naturellement, dans un marché établi, les investisseurs motivés par le profit exigeront des profits tenant compte de ce risque d'échec. C'est donc intégré dans les coûts d'ensemble du portefeuille.
    Autre risque: si une OIS n'atteint pas sa cible, l'intermédiaire, en toute rationalité, pourrait décider de limiter ses pertes en cessant d'offrir les services. Ça peut aller dans certains cas, mais dans d'autres, le gouvernement devra intervenir pour combler le besoin, ce qui occasionnera des coûts.
    On penserait qu'il serait possible d'économiser davantage en investissant dans les services axés sur la prévention sans l'obligation à impact social. Même en empruntant les fonds, les taux d'intérêt seraient nettement inférieurs aux coûts liés à l'OIS, mais en réalité, dans bien des cas, les décideurs et défenseurs ne réussissent pas à défendre cela avec succès pour accroître l'investissement dans la prévention. Cela semble étrange. Il peut être très frustrant pour ceux qui ont travaillé dans ces secteurs. Par conséquent, si les OIS contribuent à surmonter ce problème de sous-investissement dans la prévention, le coût différentiel en vaut probablement la peine.
    J'ai quelques recommandations.
    Je recommande pour commencer d'être réaliste concernant ce que les OIS peuvent accomplir. Ne faites pas trop valoir ce principe. Reconnaissez que c'est une nouvelle démarche qui est encore en phase expérimentale. Aucune OIS au monde n'est rendue à la phase du paiement, alors il reste beaucoup à apprendre. C'est la raison pour laquelle je dis qu'il ne faut pas déplacer les dépenses actuelles et que vous devez reconnaître qu'il ne s'agit pas d'une panacée au problème du sous-investissement dans les programmes sociaux.

  (1640)  

    Je vous presse également de commencer par l'analyse des résultats souhaités et de ce que vous êtes prêts à payer pour les obtenir, que ce soit en raison des économies qui seront réalisées ou de ce que cela vaut pour la société. Ce cadre est essentiel au succès de l'OIS. Vous ne pouvez avancer sans cela. Mais c'est aussi une importante conversation qui ajoutera de la valeur à l'établissement de votre budget et à votre processus de prise de décision, que vous décidiez d'aller de l'avant ou pas avec les obligations à impact social.
    Merci.
    Madame Lower-Basch, merci infiniment d'avoir pris le temps d'être là pour nous, et merci de cette conversation bilatérale.
    Nous avons un autre invité. Il s'agit de M. Andrew McWhinnie.
    Je signale aux membres du comité que M. McWhinnie nous a transmis divers documents à distribuer aux membres du comité, mais ils ne le seront pas aujourd'hui parce qu'ils n'ont pas été traduits. Ils seront distribués aux membres du comité à une date ultérieure, de toute évidence.
    Bien entendu, nous allons maintenant écouter M. McWhinnie. Il pourra nous parler de certains des documents qu'il a et exposer son point de vue. Après, nous adresserons des questions à nos deux témoins.
    Veuillez rester avec nous, madame Lower-Basch.
    La parole est à vous, monsieur McWhinnie.

  (1645)  

    Merci à vous, monsieur le président, ainsi qu'aux membres du comité.
    Je suis ravi d'être ici pour prendre la parole devant les parlementaires de mon pays au sujet d'une question qui me tient énormément à coeur. Je n'ai malheureusement pas eu le temps de préparer un exposé en bonne et due forme pour l'occasion. J'ai été convoqué par le comité avant hier alors que je participais à une activité de réflexion à la campagne avec les Cercles de soutien et de responsabilité.
    Je vais donc simplement vous faire part de ce que j'ai en tête concernant ce réseau de soutien social. Comme j'en fais partie depuis près de 20 ans, je devrais pouvoir me tirer d'affaire.
    Les Cercles de soutien et de responsabilité s'emploient à répondre aux besoins d'un groupe d'individus qui nous rendent tous un peu nerveux et inquiets et qui nous incitent à rester sur nos gardes. Je vous parle ici des délinquants sexuels présentant un risque élevé — et, soyons bien clairs, il ne s'agit pas d'un risque faible ou moyen — qui retournent dans la collectivité à leur sortie de prison. Personne ne veut travailler avec ces gens-là. Ils nous font peur. Ils ont causé des torts irréparables dans leur communauté. Ils ont posé des gestes dont les victimes ne se remettront jamais dans la plupart des cas, et sont une source d'inquiétude et un problème collectif pour notre société.
    En 1994, ces individus étaient relâchés dans la communauté après avoir purgé leur peine jusqu'à la toute fin, jusqu'au tout dernier jour, et on leur disait simplement de se débrouiller et de ne pas recommencer.
    Un de ces individus s'appelait Charlie Taylor. Il est maintenant décédé. Il a été libéré à Hamilton. Il avait passé la plus grande partie de sa vie en prison ou incarcéré d'une manière ou d'une autre, en commençant par les foyers nourriciers dès l'âge de huit ans. On a estimé qu'il n'avait jamais vécu en liberté plus que quelques mois à la fois.
    Charlie était un délinquant sexuel à risque très élevé. C'était justement le genre d'individu qui faisait peur, d'un type en fait plutôt rare au sein de notre société, croyez-le ou non, mais qui pouvait fort bien lorsqu'il ne se sentait pas bien et avait besoin de se soulager, partir en quête d'une victime. Ses victimes étaient de très jeunes garçons de cinq ou six ans. Je vous fais grâce des détails quant aux sévices qu'il leur faisait subir.
    Il s'est donc retrouvé à Hamilton à sa sortie du pénitencier de Warkworth. Je sais que vous connaissez cet établissement qui est situé dans votre circonscription. La police d'Hamilton était inquiète.Tous, y compris les gens de Service correctionnel Canada, estimaient les risques de récidive à environ 100 %. C'est plutôt rare dans notre société, mais ça arrive.
    Des membres de l'Église mennonite d'Hamilton sous la direction du révérend Harry Nigh avaient rendu visite à Charlie en prison et savaient qu'il serait bientôt de retour dans la communauté. Ils ont jugé bon de faire quelque chose. Ils se sont dits qu'ils pourraient constituer un groupe de bénévoles qui allaient accompagner constamment Charlie tout au long de sa réinsertion. On pourrait ainsi veiller à ce qu'il ait tout ce dont il a besoin mais, plus important encore, on allait voir à lui demander des comptes à l'égard de son comportement en s'assurant qu'il soit bien conscient que tous ses faits et gestes sont surveillés.
    On s'attendait à ce qu'il récidive en moins d'un mois. Charlie est mort 12 ans plus tard sans avoir commis d'autres crimes. Il n'avait jamais vécu de période de liberté aussi longue.
    Depuis 1994, de tels Cercles de soutien et de responsabilité ont vu le jour un peu partout au pays dans bon nombre de nos grandes villes, de St. John's (Terre-Neuve) sur la côte Est jusqu'à Vancouver et la vallée du fleuve Fraser. Ce mois-ci, ce sont pas moins de 152 délinquants sexuels à risque élevé qui sont suivis par quelque 650 à 700 citoyens ordinaires ne possédant pas de compétences particulières qui sont engagés au sein de ces Cercles de soutien et de responsabilité.
    Je dois vous avouer que lorsque nous avons sorti nos premières statistiques, nous avons dû refaire tous nos calculs, car nous doutions nous-mêmes des résultats. Ainsi, un projet pilote réalisé à Toronto a permis de réduire de 70 % le taux de récidive chez les délinquants sexuels pris en charge par un cercle de soutien, comparativement à un échantillon apparié servant de groupe témoin.

  (1650)  

    Nous n'en croyions pas nos yeux. Nous avons répété l'exercice à plusieurs reprises et nous arrivions toujours à ces mêmes résultats que le Service correctionnel du Canada a publiés en 1996, si je ne m'abuse.
    Nous avons jugé bon de procéder à des études semblables partout au pays. Nous l'avons fait pour nos différents projets et nous en sommes arrivés à des résultats qui nous ont stupéfaits: une réduction de 83 % de la récidive; une baisse de 73 % des cas de récidive avec violence, y compris à caractère sexuel; et une diminution de 70 % de tous les types d'infraction.
    Ces chiffres sont stupéfiants. Ils nous ont abasourdis et j'estime que les gens seraient justifiés de se demander s'il n'y a pas un autre élément qui entre en jeu.
    Le regroupement Circles UK a réalisé les mêmes études en Grande-Bretagne. Ils ont obtenu des chiffres très semblables aux nôtres pour ce qui est de la récidive. Aux États-Unis, Grant Dewey, un chercheur du service carcéral du Minnesota, a mené le seul essai clinique aléatoire portant sur les Cercles de soutien et de responsabilité. On ne veut pas vraiment publier les résultats avant d'avoir des données sur une période de cinq ans, mais lorsqu'on jette un coup d'oeil sur ce qui a été accumulé au bout de trois années, ce qui correspond à notre période de suivi, cet essai clinique aléatoire produit des chiffres à peu près identiques aux nôtres.
    Il semble donc bien que l'on tienne quelque chose.
    Par l'entremise du Centre national de prévention du crime (CNPC), nous avons mené une évaluation quinquennale des Cercles de soutien et de responsabilité. Il s'agissait pour le CNPC d'évaluer le travail des cercles de soutien auxquels il avait octroyé le financement nécessaire au Canada. On s'est donc employé à établir des indicateurs de résultats et les objectifs à atteindre pour que ces résultats soient significatifs, notamment au chapitre de la récidive. Les conclusions de cette étude devraient être rendues publiques le 30 septembre ou le 1er octobre prochain.
    Nous procédons pour notre part à une mise à jour des chiffres que je viens tout juste de vous donner, à savoir les taux de réduction de 83 %, 73 % et 70 %. Nous saurons à quoi nous en tenir le 1er octobre. Nous nous rendons compte que l'analyse requise n'est pas chose facile. Cet exercice d'évaluation des taux de récidive est un test pour nous, et il sera très intéressant de voir où ces chiffres se situeront au bout de 8 ou 10 ans.
    Je sais qu'il vous arrive de débattre des choix à faire entre prévention du crime et lutte contre la récidive, ou de la pertinence du recours aux obligations à impact social pour un groupe ou un autre, mais laissez-moi vous assurer que les Cercles de soutien et de responsabilité constituent à la fois un outil de prévention tout à fait stupéfiant pour réduire la victimisation aux mains de récidivistes, et un projet de prévention de la récidive. On joue sur les deux tableaux à la fois. Lorsque vous entendez les chiffres de 83 %, 73 % et 70 % obtenus partout au Canada et ailleurs dans le monde, pensez un peu au nombre de victimes potentielles qui ont été épargnées grâce à ces efforts. Si l'on veut vraiment prévenir le crime et diminuer les taux de récidive en empêchant les agressions sexuelles, les Cercles de soutien et de responsabilité font certes partie des outils à considérer.
    Les Américains ont effectué une analyse de rentabilité qui révèle un taux de rendement de 82 % pour chaque dollar investi dans les cercles de soutien et de responsabilité. Au Royaume-Uni, ce taux se situe à 18 %.
    Le Comité central mennonite de l'Ontario vient tout juste de publier les résultats de son étude sur le rendement social des investissements qui révèle des retombées de 6 $ pour chaque dollar dépensé ou investi dans les Cercles de soutien et de responsabilité. Il est encore tôt pour mesurer les répercussions et les retombées sociales, mais nous commençons à déterminer quels indicateurs pourraient être utilisés à cette fin. La réduction de la victimisation en fait assurément partie. Les coûts des soins en santé mentale également. Le tiers des individus pris en charge par nos Cercles de soutien et de responsabilité ont des problèmes de santé mentale, et 50 % sont aussi aux prises avec des problèmes de toxicomanie.
    Malheureusement, le financement qui a permis aux cercles de soutien d'obtenir de si bons résultats prendra fin le 30 septembre prochain. Nous savions que cela allait arriver un jour. Si nous avons procédé à une étude d'évaluation en partenariat avec le Centre national de prévention du crime, c'était justement pour démontrer l'efficacité des Cercles de soutien et de responsabilité.

  (1655)  

    C'est une situation que vous connaissez sans doute déjà et qui nous laisse extrêmement perplexes. Aux environs du 15 mars dernier, Service correctionnel Canada, un des principaux bailleurs de fonds des cercles de soutien avec le Centre national de prévention du crime, a indiqué qu'il allait mettre fin au financement le 31 mars de cette année. Nous sommes allés au front, et le financement a été rétabli jusqu'au 31 mars 2015, mais j'ai appris hier lors de mon plus récent entretien avec les représentants de Service correctionnel Canada que l'on ne renouvellerait pas par la suite le financement des Cercles de soutien et de responsabilité.
    C'est ainsi que prendra fin le 31 mars 2015 le financement d'un programme offert à l'échelle du pays, une innovation canadienne tant pour la prévention du crime que pour la réduction de la récidive qui mobilise des citoyens ordinaires de toutes les régions pour atténuer les risques et accroître la sécurité dans nos collectivités.
    Merci, monsieur McWhinnie. Vous avez dépassé un peu le temps alloué et nous devrons donc en rester là pour l'instant. Tout cela était extrêmement intéressant. Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant aux questions des membres du comité.
    Monsieur Maguire.
    Merci, monsieur le président, et merci également à nos deux témoins pour les exposés qu'ils nous ont présentés cet après-midi.
    Vos observations m'ont inspiré de nombreuses questions, mais j'aimerais d'abord vous inciter à réfléchir à une réalité soulevée par Mme Harty dans son exposé de tout à l'heure. Elle nous a indiqué que le ministère avait étudié plus de 150 concepts proposés par des organisations prêtes à travailler en partenariat avec le gouvernement pour offrir notamment des obligations à impact social et des fonds d'investissement social.
    Madame Lower-Basch, vous avez souligné qu'il faut parfois attendre assez longtemps pour constater les retombées d'un investissement. Je pense que vous avez parlé de six ou sept ans dans certains cas. N'est-ce pas la même chose pour d'autres investissements majeurs ou d'autres types d'investissements? Plusieurs doivent faire montre de beaucoup de patience avant que leur investissement produise les résultats attendus. Considérez-vous qu'il y a vraiment lieu de s'inquiéter ou que c'est une bonne raison de ne pas aller de l'avant avec le concept d'obligations d'investissement?
    Je pense qu'il faut surtout se demander ce que le marché est prêt à absorber. Les obligations à impact social ne peuvent fonctionner que si les investisseurs privés sont disposés à attendre tout le temps qu'il faudra pour en récolter les bénéfices. Avec les obligations que nous avons vues jusqu'à maintenant, un concept tout nouveau qui a fait l'objet d'un projet pilote, comme nous l'avons indiqué, le délai d'attente était relativement court. Il est possible que des investisseurs, surtout si la philanthropie les motive davantage que le profit, soient disposés à attendre plus longtemps, mais cela reste à voir.
    Nous venons de parler des obligations à impact social. Avez-vous examiné les autres concepts qui ont été proposés, ou en auriez-vous vous-mêmes d'autres qui pourraient s'ajouter à la liste des options possibles pour appuyer le gouvernement dans ses efforts de développement social à ce chapitre?
    Je crois que la notion d'investissement social peut englober de nombreux éléments. Je pense qu'il est bon que certaines entreprises puissent en tirer des revenus, mais il ne faut pas que cet objectif de rentabilité ait préséance sur les buts sociaux visés lorsque vient le temps d'évaluer les résultats. Mes recherches portaient toutefois plus précisément sur...
    J'aurais alors une question pour nos deux témoins. Croyez-vous qu'il peut y avoir des formes d'investissement qui seraient moins semées d'embûches que ces différents concepts dont nous discutons? Y aurait-il de nouvelles avenues à explorer pour éviter toutes ces entraves?
    Comme je l'indiquais, je pense que c'est dans le secteur de la justice que les dividendes peuvent se manifester le plus rapidement étant donné les coûts élevés liés à l'incarcération. Les investissements pour la prévention de l'itinérance peuvent aussi avoir des retombées à court terme. Aux États-Unis, il faut penser aux malades chroniques qui n'ont pas toujours accès aux traitements dont ils ont besoin. Ce sont quelques-uns des secteurs qui apparaissent les plus prometteurs à court terme.

  (1700)  

    Monsieur McWhinnie.
    À mon avis, ce sont les secteurs de la justice sociale et de la justice pénale qui ont le plus de chances de bénéficier à court terme des investissements. Très égoïstement, je recommanderais un programme comme le nôtre en affirmant qu'il est prêt pour des investissements de ce type. Je ne sais toutefois pas qui voudra investir dans notre programme.
    Je dois sans doute aussi préciser qu'il y a un aspect éthique qui entre en jeu. Il y a en effet certaines mesures qu'il incombe au gouvernement de financer et au titre desquelles il se doit de collaborer, peu importe qui sont les investisseurs. On peut sans doute aussi se demander s'il est éthique de faire de l'argent ou de permettre à d'autres d'en faire en capitalisant sur les problèmes sociaux d'autrui.
    Je n'ai pas la réponse à cette question. Je souligne simplement que c'est l'un des éléments à considérer. Comme nous collaborons déjà avec tous les ordres de gouvernement, les instances de justice pénale et les forces de l'ordre, je peux vous dire que c'est un domaine où il faut pouvoir compter sur l'apport du gouvernement et des investisseurs.
    J'ai une dernière question à vous poser.
    Mme Harty a indiqué que le programme du ministère s'articule en quatre étapes. Comme deux d'entre elles sont déjà terminées, on ne peut plus vraiment affirmer qu'il s'agit d'un nouveau concept. C'est dans l'air depuis un moment déjà.
    Comme nous avons pu le voir l'autre jour, et on l'a mentionné également aujourd'hui, le programme Big Society Capital au Royaume-Uni est un chef de file mondial quant au niveau d'acceptation.
    Monsieur McWhinnie, compte tenu des échéanciers et du fait que le processus est déjà enclenché, pourriez-vous nous dire comment vous vous êtes préparés au cours des dernières années en vue d'un éventuel partenariat? Vous avez dit qu'il n'y aura pas nécessairement d'investisseurs intéressés. Avez-vous cherché à trouver des partenaires ou même pensé à des investisseurs qui pourraient se joindre à vous?
    Pas vraiment. Nous n'avons pas approché d'investisseurs en particulier. Nous avons cherché à en apprendre le plus possible au sujet du financement social. Les résultats obtenus en Grande-Bretagne semblent en fait plutôt mitigés pour ce qui est du succès et de l'efficacité, ce que nous devons garder à l'esprit. Pour l'instant, nous considérons toujours que notre financement nous provient principalement de sources gouvernementales — du fédéral jusqu'aux administrations municipales — ainsi que des différents corps policiers. Nous n'avons donc pas fait de démarches en ce sens.
    Et de votre côté, madame Lower-Basch?
    D'une manière générale, ces modèles ne prévoient pas que les gouvernements vont cesser d'être des partenaires et d'offrir du financement. Je pense qu'il s'agit en fait de savoir si les gouvernements vont fournir du financement dès le départ, ou si leur aide se manifestera plus tard dans le processus lorsque des résultats auront été obtenus.
    On nous a dit que c'est un programme qui se veut entièrement complémentaire aux efforts déjà déployés par le gouvernement au chapitre du financement en vue d'en maximiser les résultats. D'après mon expérience des milieux ruraux, je pense que les partenaires efficaces ne se trouvent pas uniquement dans les secteurs densément peuplés où les crimes pullulent. Ce ne sont pas nécessairement les dividendes élevés qui intéressent ce genre de partenaires. Ils peuvent bien sûr en tirer d'autres avantages, ne serait-ce que du fait que leurs actifs sont mieux protégés, par exemple. C'est une autre motivation possible.
    Merci beaucoup, monsieur Maguire.
    Madame Doré Lefebvre.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur McWhinnie et madame Lower-Basch, je vous remercie de prendre part à notre séance d'aujourd'hui. Vos témoignages sont très différents l'un de l'autre, mais extrêmement intéressants.
    Monsieur McWhinnie, vous avez parlé de questions d'éthique s'appliquant à un partenariat de ce genre, entre le secteur privé et le gouvernement.
    Ma première question s'adresse à vous, madame Lower-Basch. Compte tenu de votre expérience à Washington, vous pourrez peut-être nous éclairer sur la question suivante.
     En 2007, le gouvernement du Québec a décidé de mettre sur pied du financement social dans le cadre de ce qui a été nommé « partenariat public-philanthropique ». Le but était plutôt philanthropique que financier.
    Dans ce but, le gouvernement a choisi la Fondation Lucie et André Chagnon. Il s'agissait de deux personnes du secteur privé qui venaient de vendre une grosse compagnie de télécommunication et qui disposaient de beaucoup de dividendes. Une entente a été signée. La fondation devait financer des projets sociaux jusqu'à concurrence de 500 millions de dollars étalés sur 10 ans et, de son côté, le gouvernement devait y investir 350 millions de dollars répartis sur 10 ans.
    Or plusieurs personnes ont constaté avec le temps que la fondation avait énormément d'influence sur les politiques sociales du gouvernement provincial au pouvoir. En ce moment, un regroupement d'environ 350 organismes d'un peu partout dans la province fait pression sur le gouvernement pour qu'une telle entente ne soit pas renouvelée.
    J'aimerais savoir si, à votre connaissance, ce genre de chose s'est déjà produite aux États-Unis.
     Dans de tels cas, les fondations participant à ces programmes auraient-elles une influence plus importante sur le gouvernement des États-Unis?
     Que pensez-vous de la situation à laquelle fait face présentement le gouvernement du Québec?

  (1705)  

[Traduction]

    Aux États-Unis, le programme Social Innovation Fund mise sur un appariement du financement philanthropique et des fonds gouvernementaux. Mais comme je pense que les sommes en cause sont plutôt négligeables par rapport au total des dépenses gouvernementales, je n'ai pas eu vent de plaintes quant à une influence indue sur les politiques.

[Français]

    Monsieur McWhinnie, croyez-vous que ce genre de situation pourrait se produire dans le domaine de la sécurité publique?
    En ce qui vous concerne, vous allez perdre les fonds qui vous sont alloués à compter de mars 2015. On vous a dit que votre financement n'allait pas être renouvelé. Si vous aviez accès à ce genre de financement, auriez-vous peur de l'influence que le secteur privé aurait sur ce que vous faites en tant qu'organisme au sein des cercles de soutien et de responsabilité?

[Traduction]

    Merci. C'est une très bonne question.
    Nous avons un peu l'impression qu'un investisseur privé pourrait avoir certaines hésitations à financer de pair avec le gouvernement les Cercles de soutien et de responsabilité. Il y a d'ailleurs quelqu'un qui a souligné tout à l'heure que les investisseurs ont peut-être tendance à opter pour la voie de la facilité.
    Nous nous occupons de criminels dangereux, d'individus qui présentent un risque élevé. Posons simplement la question: qui donc va vouloir investir dans des services de soutien pour les délinquants sexuels? On peut vraiment se le demander. Et si un investisseur est effectivement intéressé, ne voudra-t-il pas avoir son mot à dire quant aux cibles de nos interventions? On pourrait nous dire que tel ou tel individu fait beaucoup parler de lui et que ce ne serait pas nécessairement bon pour l'entreprise d'être associée aux services de soutien qui lui sont offerts.
    Je pense donc qu'il y a tout lieu de s'inquiéter. On pourrait aussi nous dire qu'on ne veut pas que nous recrutions des bénévoles de tel ou tel groupe en nous indiquant où nous devrions les prendre, ou encore que nous devons éviter de recruter au sein des communautés religieuses — une grande source de bénévoles pour nous — parce que l'organisation est laïque et ne croit pas...
    Bref, j'ai effectivement certaines réserves quant à la nature possible de ces partenariats. Nous devrons choisir des partenaires qui comprennent et partagent notre vision des choses.

[Français]

    Qu'est-ce qui pourrait vous arriver, après mars 2015, étant donné que votre financement sera aboli par Service correctionnel Canada? Avez-vous un plan? Qu'adviendra-t-il de votre organisme?

[Traduction]

    Comme je le disais, j'ai participé la semaine dernière à une activité de réflexion des cercles de soutien. Étant donné que nous nous considérons comme un groupe communautaire, nous nous tournons maintenant vers nos collectivités et nos provinces pour récupérer tout au moins partiellement le financement perdu.
    Certains de nos cercles de soutien vont disparaître. Il sera impossible pour eux de trouver les appuis nécessaires au sein de leur communauté. Le réseau des Cercles de soutien et de responsabilité va donc perdre de l'ampleur au Canada. Mais il ne mourra pas. Les gens sont tout à fait déterminés à continuer et ont vraiment à coeur les services qu'ils offrent. Notre tâche deviendra toutefois plus difficile après le 31 mars 2015.
    Merci.
    Merci.
    Nous passons à Mme James.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie et je souhaite la bienvenue à nos deux témoins.
    J'ai quelques questions à poser à M. McWhinnie. Premièrement, j'aimerais récapituler un peu et rappeler pourquoi nous avons décidé d'examiner le mode de financement actuel, qui passe par le CNPC, comme vous l'avez mentionné, puis aborder le financement social des futurs projets que le gouvernement pourrait appuyer.
    Vous avez dit savoir que ce financement expirerait au bout de cinq ans, parce que le CNPC était pratiquement un projet pilote en soi. Il y a donc divers volets. Il y a d'abord tout ce qui concerne les gangs de jeunes. Il y en a un autre aussi, qui est financé d'une autre source. L'idée était de ne pas se limiter à la prévention du crime, mais de rassembler également des données pour voir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
    Pour ce qui est de votre organisation, Circles of Support, je sais que le Service correctionnel du Canada a dit qu'il allait mettre fin à ce financement et que votre organisation a reçu un fort appui de tous les partis au gouvernement. En fait, le ministre Blaney a communiqué avec le Service correctionnel du Canada pour s'assurer du maintien de ce financement.
    Évidemment, notre gouvernement était très inquiet, compte tenu des résultats que vous nous avez présentés aujourd'hui. J'ai essayé de tout écrire. Je n'étais pas assez vite, mais vous avez parlé d'un rendement de 82 % dans un cas, de 18 % dans un autre et d'un autre projet qui vous permet ultimement d'économiser 6 dollars par dollar investi.
    Avez-vous ces données statistiques? Pouvez-vous nous en remettre copie?

  (1710)  

    Oui.
    Ce serait fantastique, parce que nous aimerions savoir ce qui fonctionne et pourquoi certains programmes semblent plus efficaces que d'autres. Tout cela semble très bien, et je suis évidemment heureuse de vous entendre dire que la prévention du crime et la protection des communautés sont la priorité. Je suis contente que vous offriez ces services. Merci beaucoup.
    Vous avez mentionné vos craintes quant à la participation possible d'investisseurs externes au financement de Circles of Support. Avant de recevoir du financement du CNPC, un financement qui va se terminer en 2015 puisqu'il s'agit d'un projet pilote à durée limitée, receviez-vous des fonds d'autres sources ou vos réseaux d'aide sont-ils nés grâce au financement de ce projet pilote?
    J'ai mentionné que le Service correctionnel du Canada était notre principale source de financement après le Centre national de prévention du crime. Ainsi, avant que le CNPC n'entre en jeu — et votre description de la contribution du CNPC est tout à fait juste —, nous recevions du financement d'autres organisations, dont le Comité Central Mennonite du Canada, le Comité Central Mennonite de l'Ontario, l'Archidiocèse catholique de Vancouver et divers autres petits bailleurs de fonds du pays pour leurs propres projets, comme la Fondation Trillium de l'Ontario et quelques autres petits fonds d'autres régions, dont l'Alberta Foundation de Calgary, et quelques corps policiers. Je pense que le Service de police de Calgary octroie 2 000 $ ou 3 000 $ aux Circles of Support and Accountability.
    Merci.
    Vous venez de dresser une liste d'organisations ou de groupes qui vous appuyaient avant que le CNPC vous finance. Ces investisseurs ont probablement un genre de contrat de finance sociale avec votre organisation par le gouvernement. De toute évidence, il y a un intermédiaire entre les deux et il y a quelqu'un qui évalue le projet en bout de ligne, mais je crois que du point de vue de la prévention du crime, comme ces projets fonctionnent bien, il est important, à la lumière de leurs résultats, de trouver d'autres moyens d'en avoir plus pour notre argent et de faire grossir la cagnotte pour en élargir la portée. Seriez-vous ouvert à envisager cela?
    Je sais que vous avez dit qu'il y a peut-être quelques réseaux de soutien ailleurs qui ne reçoivent pas autant de financement, mais qu'il y a d'autres façons de favoriser la finance sociale. Il y a ce qu'on appelle la rémunération au rendement. Il ne fait aucun doute, compte tenu des résultats que vous nous présentez, que vous auriez une source de revenus permanente s'ils dépendaient de votre rendement.
    Je verrais les organisations que je viens de nommer davantage comme des intermédiaires que comme des investisseurs. Les organisations que je viens de nommer n'ont pas d'argent à investir.
    Mais oui, tout à fait, bien que nous ayons quelques inquiétudes de nature éthique et que nous aurions besoin de certaines réponses à des questions éthiques, nous serions ouverts à l'idée d'au moins discuter de ces possibilités parce que — mon Dieu! —, nous n'avons pas beaucoup plus de 11 mois devant nous avant de sombrer.
    Je pense que nous sommes tous ici pour examiner ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, pour voir comment nous pouvons continuer à prévenir le crime au pays.
    Selon notre modèle actuel, nous investissons dans l'organisation, et elle mène le projet pendant cinq ans, mais nous n'avons aucune idée des résultats du projet avant la fin de la période de cinq ans. Nous en sommes maintenant au point où nous avons enfin l'information et où nous devons investir, je dirais, dans les activités qui ont fait leurs preuves, dans différentes méthodes, pour profiter au maximum de l'argent investi dans la prévention du crime et la sécurité communautaire et en avoir le plus pour l'argent des contribuables, puisque c'est ce dont il s'agit. Nous devons nous assurer d'investir judicieusement.
    Je vous remercie sincèrement de votre exposé, et si vous pouviez nous faire parvenir ces statistiques, je l'apprécierais grandement.

  (1715)  

    Le comité les a déjà.
    Très bien, merci beaucoup. Je l'apprécie beaucoup.
    J'avais une question à poser également à notre autre témoin, Mme Lower-Basch.
    Vous nous avez fait part de vos préoccupations, dont deux concernent la finance sociale, mais vous avez également mentionné qu'il y avait des options. Je pense qu'il ne faut pas oublier que la finance sociale dépend beaucoup du contrat établi en amont. Ainsi, si des organisations ont peur de ne pas récupérer l'argent qu'elles ont investi au départ, cela fait aussi partie du processus contractuel. Je tenais simplement à le préciser.
    Je crois que je vais m'arrêter ici pour l'instant.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Passons maintenant à M. Garrison, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Lower-Basch, j'ai sous les yeux votre document de mars 2014. J'y lis que jusqu'ici, le financement initial des OIS provient surtout de fondations ou d'investisseurs privés bénéficiant d'une garantie de source philanthropique plutôt que d'investisseurs purement motivés par le profit.
    S'agit-il d'une tendance observée ailleurs, se pourrait-il que les organisations à la recherche de profits ne soient pas vraiment les principaux participants à ce genre d'activité?
    Je pense que c'est encore en train de se définir, et les exemples les plus récents aux États-Unis comptent davantage sur l'investissement privé. Goldman Sachs a investi un peu d'argent. Par exemple, le modèle de Rikers Island, dans la ville de New York, se fonde sur du financement privé, mais qui est garanti par les fondations Bloomberg. C'est de ce genre de modèle que je parle.
    Je pense que c'est une toute nouvelle façon de faire. Si l'on veut vraiment réaliser des profits, il faut faire preuve de prudence et essayer de comprendre s'il s'agit ou non d'une bonne affaire.
    Monsieur McWhinnie, je pense que nous devons d'abord vous remercier, vous et le conseil des services, pour votre bon travail. On trouve des statistiques dans divers rapports publiés et divers rapports de Service correctionnel Canada. Quand on arrête ce genre de projet pour des choses qui fonctionnent, c'est d'abord accueilli avec scepticisme, mais je dois dire que nous voyons ici aujourd'hui un exemple d'organisation qui connaît énormément de succès. À mes yeux, il y a très peu de chances, comme vous l'avez dit, que vous puissiez mener le même projet grâce à du financement privé, mais je ne comprends même pas pourquoi nous voudrions y songer. On parle d'un groupe communaitaire de citoyens bien établi. Ce n'est pas un programme du gouvernement, mais un programme communautaire très efficace.
    Je ne comprends tout simplement pas la détermination du gouvernement à mettre fin à son financement. Je sais que vous ne pouvez pas me l'expliquer non plus, mais je sais qu'à mon propre conseil des services communautaires et par mon travail en justice pénale...
    Pouvez-vous nous parler un peu de l'appui que vous recevez de la population?
    L'aide offerte aux gens qui sortent de prison procure de la stabilité, d'abord et avant tout. L'un des plus grands facteurs de protection contre la récidive auquel je puisse penser, c'est la stabilité en termes de logement, de relations, d'endroit où aller pour combattre l'isolement, etc.
    Les gens qui sortent de prison après y avoir passé 15, 20 ans ou plus ne savent pas ce qu'est un guichet automatique. Ils ne savent pas où se trouvent les banques alimentaires. Dans bien des cas, on s'attend à ce qu'ils traversent la ville pour se rendre à plusieurs rendez-vous la même journée. Ils n'ont pas de moyen de transport, pas d'argent, pas de pièces d'identité et ne savent pas comment utiliser le réseau de transport public, ils ont donc besoin de stabilité, de moyens de réduire le stress, d'aide à la prise de médicaments; ils doivent pouvoir se rendre à l'hôpital, voir un médecin, il faut s'assurer qu'ils prennent leurs médicaments, qu'ils ne boivent pas, qu'ils se présentent à leurs rencontres de probation et de libération conditionnelle. Lorsqu'ils sont vraiment de mauvaise humeur, qu'ils sont fâchés, qu'ils en ont marre, qu'ils sont découragés ou succombent à la déprime et se disent: « Ma vie ne vaut rien, je veux retourner en prison », il y a des gens à qui ils peuvent en parler et qui peuvent les conseiller pour les mettre dans un meilleur état esprit.

  (1720)  

    Qui sont les bénévoles prêts à faire ce travail?
    Ce sont vos voisins. Ce sont souvent des gens qui font partie d'une communauté religieuse. Ce sont des mères et des pères de famille.
    Je dois vous dire que quand je regarde les gens assis à la table pendant nos retraites, il y a des gens d'une trentaine d'années qui ont une jeune famille, de jeunes enfants, certains fréquentent l'église, d'autres non, mais ils me disent: « si je ne le fais pas, comment pourrais-je dire à mes enfants que j'ai fait quoi que ce soit pour les protéger le plus possible dans la société? »
    Quel genre d'appui recevez-vous en général de la collectivité? Comment la population réagit-elle en général à l'existence de ce programme? Je suis un peu au courant parce qu'il est présent dans ma communauté.
    Si on s'adresse à une assemblée en disant: « Qu'en pensez-vous? Offrons de l'aide et un réseau de responsabilité aux délinquants sexuels », on va se faire sortir de la pièce à coups de pied. Si vous vous présentez devant vos électeurs avec cet argument, vous ne serez pas réélus. Mais si vous parlez de réduction de la victimisation, de la protection des enfants, de la protection des étudiants, on se rejoint. Les gens vont vous réélire. Quand on présente la chose sous cet angle, les gens sont plus enclins à accepter l'idée, ils comprennent.
    Nous avons fait des évaluations et avons demandé aux gens s'ils croyaient leur ville plus sûre, s'ils se sentaient mieux dans leur communauté en sachant qu'il y existait un réseau de soutien pour ceux qui sortent de prison, les gens nous ont répondu: « Oui, un peu. » Ils pensent tout de même que ces personnes devraient toutes être envoyées en prison, rester là, qu'on devrait jeter la clé, mais ils se sentent mieux lorsqu'ils savent qu'il existe un réseau de soutien pour les personnes qui réintègrent la communauté, que cela leur plaise ou non. Parce qu'au Canada, il n'y a pas d'internement civil, on n'enferme pas les gens à tout jamais, du moins pas encore. Il y a donc des personnes présentant un risque élevé qui réintègrent nos communautés.
    Il y a aussi des citoyens qui prennent des mesures pour faire quelque chose.
    Pouvez-vous trouver un autre exemple de groupe de citoyens, d'organisation qui rassemble des citoyens ordinaires, des électeurs...? Quelle que soit l'allégeance politique, les réseaux de soutien et de responsabilité ont des appuis des deux côtés de la Chambre. Vous venez de me le prouver, dans la dernière série de questions sur notre financement. C'est aussi ce qu'on constate dans les foyers un peu partout au pays. Dans quel autre contexte peut-on trouver un programme qui mobilise les citoyens, qui les font participer eux-mêmes à la réduction des risques dans leur communauté? Il n'y a aucun autre exemple qui me vienne à l'esprit.
    Merci infiniment. Nous n'avons plus de temps.
    Au nom du comité, j'aimerais remercier de tout coeur M. McWhinnie. Je vous remercie sincèrement de nous avoir consacré du temps aujourd'hui.
    Madame Lower-Basch, je vous remercie infiniment de votre participation aujourd'hui. Nous apprécions que vous ayez fait cet effort particulier, et je vous assure que votre témoignage sera consigné au compte rendu pour notre évaluation.
    Encore une fois, merci beaucoup, notre comité l'apprécie énormément.
    Je vous souhaite à tous une bonne journée.
    La séance est levée.
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