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FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des pêches et des océans


NUMÉRO 017 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 7 avril 2014

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Merci à MM. Hildebrand et Thompson de se joindre à nous aujourd'hui. Je vous présente mes excuses pour les interruptions des deux dernières fois. Je vous suis reconnaissant de votre patience, et les membres du comité ont hâte d'entendre votre exposé. L'autre jour, nous avons commencé par entendre M. Hildebrand.
    Monsieur Cleary.
    Désolé de vous interrompre, monsieur le président.
    Puis-je donner de vive voix un avis de motion avant l'audition des témoins?
    Le président: Bien sûr, allez-y.
    M. Ryan Cleary: Je vais simplement lire la motion, monsieur le président:
Que le Comité entreprenne immédiatement une étude sur les impacts de la réduction des quotas de pêche côtière à la crevette au large de Terre-Neuve-et-Labrador sur les pêcheurs et l’économie locale; que cette étude comprenne un examen des données scientifiques du ministère des Pêches et des Océans sur la pêche à la crevette et de la politique de gestion appelée « dernier entré, premier sorti »; et que les témoins comprennent notamment des responsables du MPO, des scientifiques du MPO, des pêcheurs locaux et des transformateurs locaux.
    La ministre des Pêches et des Océans a comparu devant le comité il y a une quinzaine de jours et j'ai pu l'interroger au sujet des réductions imminentes des quotas de pêche à la crevette. Pendant le week-end, ils ont été réduits: de 10 000 tonnes pour les pêcheurs côtiers et de moins de 1 000 tonnes pour les détenteurs de permis de pêche hauturière. Les réductions ont été faites selon le principe « dernier entré, premier sorti ». Cette politique est essentiellement...
    Désolé...
    Monsieur Kamp.
    S'agit-il d'un avis de motion ou d'un débat sur la motion? Je ne crois pas que nous en ayons vu le texte.
    C'est simplement un avis. C'est ce que j'allais demander à l'instant.
    Monsieur Cleary, vous aviez probablement un avis de motion la semaine dernière. Il s'agit d'un avis de motion différent. Pourrais-je en avoir le texte? Pouvez-vous remettre le texte de la motion?
    Absolument. Si la motion est différente, c'est que le quota a été annoncé.
    M. Cleary a donné un avis de motion. Je vais vous lire le texte de la motion:
Que le Comité [permanent des pêches et des océans] entreprenne immédiatement une étude sur les impacts de la réduction des quotas de pêche côtière à la crevette au large de Terre-Neuve-et-Labrador sur les pêcheurs et l’économie locale; que cette étude comprenne un examen des données scientifiques du ministère des Pêches et des Océans sur la pêche à la crevette et de la politique de gestion appelée « dernier entré, premier sorti »; et que les témoins comprennent notamment des responsables du MPO, des scientifiques du MPO, des pêcheurs locaux et des transformateurs locaux.
    Merci, monsieur Cleary. L'avis a été remis.
    Merci encore de votre patience, messieurs Hildebrand et Thompson.
    M. Ström est ici pour donner des conseils juridiques aux témoins, non pour être interrogé au sujet de l'exposé que les fonctionnaires vont présenter. Je veux simplement vous signaler la présence de M. Ström à la table.
    Monsieur Hildebrand, si vous voulez bien passer à votre exposé, une fois de plus. Merci beaucoup.
    C'est un plaisir de comparaître. Je souhaite un bon après-midi à tous les membres du comité.
    Je m'appelle Marvin Hildebrand et je suis le directeur général de la Direction générale de l'accès aux marchés du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. Cette direction générale appuie le Canada dans le cadre de ses contestations commerciales à l'Organisation mondiale du commerce concernant l'interdiction imposée par l'Union européenne sur les produits du phoque.
    Je suis ici pour faire le point sur cette contestation commerciale. Le MAECD gère le dossier en étroite collaboration avec le ministère des Pêches et des Océans ainsi qu'avec le ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord canadien.
    Je commencerai par donner un peu d'information générale sur la contestation du Canada à l'OMC et sur la réglementation de l'Union européenne visant les produits du phoque. J'aborderai ensuite le processus de règlement des différends de l'OMC.
    En 2009, à la suite d'une campagne concertée de groupes de défense des droits des animaux, l'UE a pris des règlements limitant l'importation et la commercialisation des produits du phoque sur le marché européen. Ces règlements interdisent toute importation et vente de produits du phoque sauf dans trois situations très étroitement définies: d'abord, les produits du phoque provenant de la chasse traditionnelle pratiquée par les Inuits et d'autres collectivités autochtones; deuxièmement, les produits issus d'une chasse réglementée dans le seul objectif d'une gestion durable des ressources marines; enfin, les produits du phoque destinés à un usage personnel par des voyageurs.
    Pour être commercialisés sur le marché européen dans le cadre des deux premières catégories, les produits du phoque doivent être accompagnés d'une attestation émanant d'un organisme reconnu qui confirme que les produits sont visés par une de ces exemptions.
    Les produits du phoque provenant de la chasse commerciale au phoque sur la côte Est du Canada ne sont pas visés par l'une ou l'autre de ces deux premières exemptions. Par ailleurs, l'Inuit Tapiriit Kanatami, la Nunavut Tunngavik Incorporated et le gouvernement du Nunavut se sont opposés à l'obtention de l'accès au marché européen dans le cadre de l'exemption autochtone. Selon eux, cette exemption est inutile, étant donné qu'il serait très coûteux et très lourd administrativement de demander cette exemption qui n'apporte pas la promesse d'un gain commercial clair. Ils ont en outre indiqué qu'ils dépendaient des circuits de transformation et de distribution commerciales du Sud, puisque l'isolement des collectivités inuites et l'échelle restreinte à laquelle la chasse est pratiquée par les Inuits signifient qu'ils ne disposent pas des moyens économiques d'établir leurs propres canaux de transformation et de distribution.
    La chasse au phoque pratiquée sur la côte atlantique et dans le nord du Canada est une activité légale, sans cruauté et durable qui constitue une importante source de nourriture et de revenu pour des milliers de chasseurs et leur communauté. Le Canada estime que l'interdiction de l'UE sur les produits du phoque canadiens va à l'encontre de ses obligations commerciales internationales. Nous avons tout d'abord tenté de résoudre la question par la consultation. Devant l'échec, le Canada et son coplaignant, la Norvège, ont demandé l'établissement d'un groupe spécial de règlement des différends de l'OMC. Devant ce groupe spécial, le Canada a avancé que les règlements de l'UE concernant les produits du phoque vont à l'encontre de certaines des obligations de celle-ci aux termes du GATT de 1994, à savoir le traitement national, le traitement de la nation la plus favorisée, ou NPF et les restrictions sur les importations.
    Le traitement national signifie qu'un produit importé ne peut pas être traité de façon moins favorable que le produit national équivalent. Le traitement de la NPF signifie qu'un produit importé d'un pays membre de l'OMC ne peut pas être traité de façon moins favorable que le même produit d'un autre pays membre de l'OMC. Le Canada s'est également appuyé sur un autre accord de l'OMC, l'Accord sur les obstacles techniques au commerce, qui traite de la non-discrimination et des obstacles injustifiés au commerce.
    Le groupe spécial a tenu ses audiences au début de 2013 et a publié son rapport final le 25 novembre 2013. Dans son rapport final, le groupe spécial a conclu que les règlements de l'UE concernant les produits du phoque allaient à l'encontre des obligations de celle-ci en ce qui a trait aux dispositions du GATT de 1994 sur le traitement national et sur le traitement de la NPF, compte tenu du fait que ces règlements permettent aux produits du phoque du Groenland et de l'UE d'être vendus sur le marché européen tout en interdisant la vente de ces mêmes produits en provenance du Canada. Toutefois, le groupe spécial s'est également demandé si les règlements de l'UE pouvaient bénéficier de l'une des exceptions générales prévues par l'article XX du GATT qui permettent aux pays membres de l'OMC de justifier l'adoption de lois qui seraient autrement discriminatoires.

  (1540)  

    L'UE a cherché à justifier ses règlements sur les produits du phoque comme étant nécessaires pour protéger la moralité publique, compte tenu des préoccupations exprimées par les Européens à l'égard du caractère cruel de la chasse au phoque. Le groupe spécial a accepté l'argument de l'UE reposant sur la moralité publique, mais, au bout du compte, a tout de même conclu que l'UE appliquait les exemptions, c'est-à-dire l'exemption autochtone et celle sur la gestion des ressources marines, d'une façon arbitrairement discriminatoire envers les produits du phoque canadiens.
    De même, le groupe spécial a conclu que les règlements de l'UE concernant les produits du phoque allaient à l'encontre de l'Accord sur les OTC puisqu'ils défavorisaient les produits canadiens par rapport aux produits nationaux du Groenland et de l'UE. Bien que le groupe spécial ait conclu que les règlements de l'UE allaient à l'encontre des obligations de celle-ci dans le cadre de l'OMC, le fondement juridique de cette décision repose sur la manière dont l'UE applique les exemptions à l'interdiction, et non sur l'interdiction même.
    Étant donné que cette décision de portée limitée ne conduirait pas à la réouverture du marché européen pour tous les produits du phoque, le Canada et la Norvège ont porté en appel la décision du groupe spécial le 24 janvier 2014. L'audience de l'organe d'appel de l'OMC a eu lieu du 17 au 19 mars 2014. La délégation du Canada a été dirigée par l'honorable Leona Aglukkaq, ministre de l'Environnement, ministre de l'Agence canadienne de développement économique du Nord et ministre du Conseil de l'Arctique.
    Dans son appel, le Canada a déclaré que le groupe spécial avait commis une erreur quant à la partie de sa décision reposant sur l'Accord sur les OTC et sur l'article XX du GATT. Selon le Canada, le groupe spécial a commis de nombreuses erreurs de droit, notamment en ce qui concerne l'interprétation de la norme juridique applicable et l'application de cette norme aux faits en l'espèce. L'organe d'appel devrait publier son rapport au plus tard le 20 mai 2014.
    Nous nous ferons un plaisir de répondre à toutes vos questions sur la contestation du Canada à l'OMC.

  (1545)  

    Merci, monsieur Hildebrand.
    Au premier tour, chacun aura 10 minutes, et ce sera d'abord M. Chisholm.
    Merci beaucoup, messieurs.
    Je dois avouer ma perplexité. Je suis heureux que vous soyez parmi nous pour m'aider à mieux comprendre ce qui se passe. On pratique la chasse au phoque dans l'Union européenne, n'est-ce pas?
    Il y a effectivement de la chasse, et on tue des phoques dans l'Union européenne.
    Bien. Et il est acceptable, aux termes des règles actuelles de l'UE, d'importer des produits du phoque du Groenland?
    Dans ce contexte, et aux fins du commerce international et des engagements en matière de commerce international, le Groenland ne fait pas partie de l’UE. Il s’agit d’une tierce partie, si on veut, et l’effet de la décision du groupe spécial a été de permettre la poursuite de l’importation des produits du phoque du Groenland en vertu de l’exemption consentie pour les Inuits, la première des trois exemptions dont j’ai parlé. Je réponds donc par l’affirmative.
    Sauf erreur, dans les faits, parce qu’il y a toujours une interdiction et parce que le Groenland fait traiter son phoque au Canada, ce commerce est toujours touché par l’interdiction. Est-ce exact?
    Voulez-vous parler de phoques du Groenland qui seraient expédiés au Canada pour transformation, renvoyés au Groenland et ensuite expédiés vers l’UE?
    Je vous demande comment cela fonctionne.
    Je ne suis au courant d’aucune transformation de phoques du Groenland au Canada, mais…
    Le plus important, c’est que les phoques abattus au Groenland doivent être admissibles aux termes du système de certification qui a été mis en place. Pour que l’accès au marché de l’UE soit accordé, il faut que l’une des exemptions s’applique. Par conséquent, ces produits du Groenland dérivés des phoques abattus par les Autochtones sont maintenant admissibles aux termes de ce système de certification. Ils peuvent être écoulés sur le marché européen.
    Que je sache, peu importe où se font la transformation additionnelle ou la transformation en aval. Ce qui importe, aux fins de l’exemption prévue pour les Inuits, ce sont les critères relatifs au chasseur, c’est de voir si le chasseur satisfait aux critères de cette exemption.

  (1550)  

    Pourriez-vous m’expliquer un peu plus cette question de moralité publique. Qu’est-ce que cela signifie pour ce genre d’activité?
    L’article XX du GATT de 1994 énonce un certain nombre de raisons pour lesquelles un membre de l’OMC peut imposer une interdiction ou une mesure similaire, peut interdire d’importer certains produits. Il y a une liste de six ou huit circonstances ou situations. Il peut y avoir des choses comme les produits de la main-d’oeuvre carcérale qui sont… En tête de liste, à l'alinéa XXa), se trouvent les produits qui font injure à la moralité publique ou sont incompatibles avec elle.
    L’UE a donc invoqué cette disposition, l'alinéa XXa), comme fondement légitime de son interdiction de l’importation des produits du phoque. Elle dit que, d’une part, elle a interdit carrément ces produits et, d’autre part, comme je l’ai dit, elle a prévu trois exemptions: les produits prélevés par les Inuits, les produits prélevés pour des fins de conservation des mammifères marins ou les produits transportés par des voyageurs dans les aéroports ou ailleurs.
    Je le répète donc, les produits du Groenland peuvent être acheminés vers l’UE aux termes de la première exemption prévue pour la chasse pratiquée par les Inuits. Or, tous les phoques abattus au Groenland le sont par des Inuits, ce qui n’est guère étonnant.
    L’exemption a été définie en fonction des chasseurs ou du mode d’abattage.
    C'est donc en fonction des personnes en cause, du fait qu’il s’agit d’Inuits, de leur ascendance et de l’histoire de leurs chasses. Cela n’a rien à voir avec la façon dont les phoques sont abattus, mais tout à voir avec l’ascendance du chasseur.
    En ce moment, quelle est la valeur de ce secteur d’activité au Canada, en dollars? Vous devez le savoir.
    Il y a deux choses que nous savons avec certitude. D’abord, l’industrie a été décimée à cause de cette mesure qui est entrée en vigueur en 2009. Quant à la capacité d’exportation et aux exportations réelles de produits du phoque, il est difficile d’être très précis parce que certains produits, comme les huiles, par exemple, sont mélangés à des produits provenant d’autres mammifères marins. Je peux néanmoins vous dire que les exportations de produits du phoque, comme la viande, les huiles et les peaux brutes, ont atteint un sommet de quelque 18 millions de dollars en 2006, pour diminuer à moins d’un demi-million de dollars l’an dernier. Le total, pour la période allant de 2004 à 2013, a été d’un peu plus de 79 millions de dollars. Ces dernières années, la chute a donc été brutale.

  (1555)  

    Ce dossier a-t-il été abordé dans les négociations sur l'AECG? J’essaie de me faire une idée du sérieux que le gouvernement du Canada doit attacher à cette question. Nous avons entendu beaucoup de protestations en public, mais je me demande, lorsqu’une occasion se présente, avec quel sérieux le gouvernement du Canada aborde la question lorsqu’il s’agit de négocier pour parvenir à un résultat positif.
    Le gouvernement prend la chose très au sérieux. Pour vous donner une réponse plus détaillée, je dois faire une distinction entre, d’une part, la contestation juridique d’une certaine mesure d’un membre de l’OMC, en l’espèce, et, d’autre part, la négociation d’un traité. Ce sont deux choses tout à fait différentes.
    Nous avons consacré des efforts considérables à cette contestation à toutes les étapes depuis qu’elle a été entreprise, à commencer par le processus initial du groupe spécial et maintenant à l’étape de l’appel. Le meilleur cadre, et de loin, que le Canada puisse trouver pour contester cette mesure de l’UE est l’OMC, car les règles qui semblent avoir été violées sont des règles de l’OMC.
    Dans nos relations commerciales avec l’Union européenne, ce sont les règles qui s’appliquent. Comme nous le savons tous, un accord commercial bilatéral a été négocié et il en est aux derniers stades des travaux techniques avec l’Union européenne. Ce traité fera apparaître un autre ensemble de règles et on pourrait recourir à un autre mécanisme de règlement des différends, mais cela n’est pas terminé pour l’instant. Plus important encore, cet accord n’a pas été mis en place et il n’a pas été ratifié. Il n’est donc pas en vigueur.
    Le gouvernement attache une très grande importance à ce dossier et il a utilisé pour combattre l’interdiction les leviers et les mécanismes à sa disposition, les meilleurs, et de loin, étant ceux de l’OMC.
    De plus, sur le plan pratique, cette avenue nous a permis de collaborer avec la Norvège, dans ce cas-ci, de travailler avec elle comme coplaignants, car nous avons des intérêts très semblables à défendre. Nous avons pu également tirer parti de ce qu’on appelle la participation à titre de tierce partie. Une poignée de pays, soit au moins six, sont tierces parties dans cette affaire.
    Plus expressément, à propos de cette question de moralité publique, le Canada a soutenu très clairement que le groupe spécial a erré en disant que cette chasse s’écartait de la moralité publique. C’est le point de vue que le Canada et la Norvège ont fait valoir, certes, mais nous avons aussi profité de ce que des tiers ont soutenu le même point de vue et dit que notre thèse était logique et que l’interdiction ne satisfaisait pas à ce critère. Aux termes de l’article XX, il faut satisfaire à un critère de nécessité pour invoquer une exception, dans ce cas-ci la moralité publique. Nous avons soutenu qu’on ne satisfaisait pas au critère de la nécessité.

  (1600)  

    Merci beaucoup, monsieur Chisholm.
    Monsieur Sopuck.
    Au cours du processus, l’UE n'a-t-elle jamais exprimé quelque opinion ou inquiétude au sujet de la pérennité des populations de phoques au Canada et de l’effet de la chasse actuelle sur cette pérennité?
    Non, elle ne l’a pas fait.
    Elle a donc reconnu implicitement ou explicitement que les populations de phoques au Canada sont en bon état et qu’elles sont même abondantes. Très bien.
    En ce qui concerne la deuxième exemption, celle qui vise les produits du phoque découlant de chasses menées à seule fin de gérer durablement les ressources maritimes, le mot clé dans cet énoncé, me semble-t-il, est « ressources ».
    Le comité a entendu bien des fois divers spécialistes et des pêcheurs côtiers soutenir que les fortes populations de phoques nuisaient à des stocks de poisson précieux sur le plan commercial. Par conséquent, si le Canada avait une chasse au phoque ou un programme de réduction des populations de phoques pour protéger les stocks de poisson qui sont menacés par la surabondance des phoques, on peut présumer que les produits du phoque issus de cette chasse seraient autorisés dans l’Union européenne.
    Est-ce vrai?
    Il faut respecter un certain nombre de critères pour se prévaloir de cette exemption au titre de la gestion des ressources maritimes. L’un des plus importants, dans le cas de la chasse au phoque sur la côte Est, est le fait que la chasse ne doit pas revêtir un caractère commercial. Les chasseurs ne peuvent pas tirer profit du prélèvement de phoques.
    Actuellement, il n’y a qu’un nombre très limité de phoques qui sont prélevés dans l’UE aux termes de cette exemption. Ce doit être environ 106. Il y a donc une certaine chasse. Pour le moment, il faut respecter des critères très rigoureux pour se prévaloir de cette exemption. Si, au Canada, nous avions une chasse au phoque durable, mais à des fins commerciales, elle ne répondrait pas aux critères de cette exemption de l’UE.
    Cela m’étonne. C’est clairement un comportement stupide et malveillant de la part de l’UE que de s’ingérer dans la gestion de nos ressources naturelles. Il est consternant qu’elle s’engage dans cette voie.
    Quant au recours à cette disposition ridicule sur la moralité publique, y a-t-il des précédents concernant d’autres produits?
    Voilà un point important. En fait, nous nous inquiétons vivement du précédent que pourraient créer les conclusions du groupe spécial à cet égard. C’est du reste l’une des raisons pour lesquelles nous avons fait appel de la conclusion du groupe spécial au sujet de l’interprétation. L’application de l'alinéa XXa) du GATT est particulièrement préoccupante. Plus précisément, nous avons soutenu que le groupe spécial n’avait pas étayé sa conclusion que la réglementation des produits du phoque pouvait se justifier. Notre point de vue a été appuyé par la Norvège et, comme je l’ai dit, par un certain nombre de tierces parties dans le pourvoi en appel.
    La grande crainte, au fond, c’est que, par cette décision de son rapport de novembre dernier, le groupe spécial ne place la barre très basse pour l’utilisation de la défense fondée sur la moralité publique, créant ainsi la possibilité qu’un large éventail de questions soient abordées sous l’angle de la moralité publique et que des mesures soient justifiées par cette exemption.
    Cela dit, je ne peux pas indiquer des produits particuliers qui nous sembleraient vulnérables. Ce qui est plus préoccupant, c’est ce précédent créé en plaçant la barre très bas et le risque que d’autres parties n’invoquent ce précédent pour faire la même chose à l’égard d’autres pays.

  (1605)  

    Il est évident que cela risque de déstabiliser tout le système du commerce mondial si, pour des motifs de politique intérieure, comme cela se passe dans l'UE, certains pays s'appuient sur ce critère peu exigeant pour interdire toutes sortes de produits. Ai-je raison?
    Nous sommes très inquiets du précédent établi dans l'application de l'alinéa XXa) du GATT. Dans la préparation de notre argumentaire dans cette affaire et devant l'organe d'appel, nous avons cité diverses contestations dans d'autres domaines au cours des 10 ou 20 dernières années. La jurisprudence est très importante pour le fonctionnement du système commercial international et le règlement des différends. Oui, nous sommes très inquiets du seuil peu exigeant que le groupe spécial a jugé acceptable à l'égard des mesures de l'UE.
    Qui sont les tiers qui appuient le Canada? Notre cause est-elle bonne?
    La liste des tiers est un peu plus longue, mais les pays qui ont appuyé les intérêts du Canada et son argumentaire de façon particulièrement marquée sont la Colombie, le Mexique, l'Islande, l'Équateur et le Japon.
    Notre cause est-elle solide? Nous sommes évidemment très préoccupés par la décision du groupe spécial. Nous avons invoqué divers arguments et nous avons signalé dans des dizaines de pages les erreurs d'analyse, les erreurs dans l'utilisation de précédents qui ne sont pas pertinents ou ne sont pas applicables.
    Au moyen de longs arguments et analyses, nous avons fait valoir notre cause, qui nous semble fondée. Nous croyons que le groupe spécial a nettement fait fausse route, qu'il existe de bonnes raisons, convaincantes, d'arriver à une décision différente, que nous attendons de l'organe d'appel.
    L'UE a-t-elle invoqué la disposition de la moralité publique dans d'autres causes?
    Que je sache, la disposition a été invoquée au moins une autre fois, à propos des lois américaines sur le jeu. Antigua a contesté des restrictions sur l'offre transfrontalière de jeu. Les États-Unis ont cherché à justifier ces restrictions par une défense fondée sur la moralité publique. Il y a à l'OMC un bon corpus de jurisprudence au sujet de l'article XX du GATT, des exceptions générales, de façon générale et particulière, autour de cette notion de nécessité.
    Si on examine les exceptions générales, on constate que le critère comporte divers éléments. Il faut d'abord établir que la mesure est là pour protéger quelque chose. Est-ce la sécurité publique, la moralité publique, l'environnement? Il y a donc l'idée de protection.
    Le deuxième élément est l'idée de nécessité. La mesure est-elle nécessaire pour atteindre cet objectif de protection, cette fois-ci en matière de moralité publique?
    Puis, il y a ce troisième élément d'application générale voulant que, peu importe le reste, il faut voir si la mesure a été appliquée arbitrairement ou de façon injustifiée.
    Il y a une importante jurisprudence autour de ce critère même de l'exception générale.

  (1610)  

    Monsieur MacAulay.
    Merci beaucoup, et merci de votre détermination
    Vous avez parlé de moralité publique. Comment établit-on qu'il y a un problème? Si j'ai bien compris, il s'agit ici de conservation et de cruauté. Il est vrai que nos troupeaux de phoques sont beaucoup plus importants, et probablement plus importants qu'il n'est nécessaire. En fait, ils sont probablement le plus gros consommateur de poissons au monde, aujourd'hui. Les phoques consomment toutes sortes de poissons.
    J'examinais la question de la gestion durable des ressources marines. Comment l'UE peut-elle invoquer la moralité publique alors que nous avons la chasse au phoque la moins cruelle qui soit? Pourriez-vous expliquer comment cette chasse se pratique dans l'UE et aux autres endroits dont les produits sont importés dans l'UE?
    Que se passera-t-il si elle décide, au nom de la moralité publique, d'installer une caméra chez le boucher ou là où on fait cuire des fruits de mer? Où s'en va le commerce dans le monde? Ne s'agit-il pas d'un obstacle au commerce?
    Nous soutenons assurément que c'est un obstacle au commerce et qu'il n'a aucune légitimité.
    Je voulais dire un obstacle illégitime.
    Nous avons présenté des arguments au sujet de la moralité publique et du bien-être des animaux. Nous avons souligné qu'il était pertinent de comparer la norme applicable à la chasse commerciale au phoque à d'autres normes de bien-être animal, comme celles de la chasse à la faune dans l'UE, par exemple.
    Nous reconnaissons que les membres de l'OMC ont le droit d'établir leurs propres normes de bien-être animal, mais elles doivent reposer sur des faits. Leur application ne doit pas être arbitraire. Il est important de considérer d'autres normes appliquées en des situations semblables, si un pays veut s'engager dans cette voie et justifier une interdiction par le souci du bien-être des animaux.
    Nous avons souligné qu'il y avait un moyen d'agir qui restreignait beaucoup moins le commerce, qu'il se pratique dans l'UE d'autres types de chasses qui, pour peu qu'elles en soient différentes, sont plus répréhensibles que la chasse au phoque. Nous avons fait valoir, plus particulièrement, un mécanisme et un régime de rechange qui restreindrait moins le commerce. L'UE aurait pu accepter un régime de certification et d'étiquetage fondé sur une norme acceptable de bien-être animal.
    Nous croyons et nous avons soutenu devant le groupe spécial et l'organe d'appel que les exigences actuelles qui garantissent une chasse au phoque sans cruauté au Canada sont suffisantes et même plus rigoureuses, comme je l'ai dit, que les normes applicables à d'autres chasses dans l'UE, comme la chasse au cerf. Nous avons fait observer également que l'UE applique une norme différente au phoque, une bête largement chassée en dehors de son territoire, une norme plus exigeante que celle qui s'applique aux chasses pratiquées sur son territoire.

  (1615)  

    Merci.
    Mais vous avez perdu votre premier appel et vous interjetez de nouveau appel. Quelles modifications proposez-vous?
    D'après moi, notre chasse au phoque est la moins cruelle au monde. Nous avons les pratiques les plus dépourvues de cruauté. Tout le monde peut observer librement, peut-être trop.
    Est-ce à cause des bien-pensants qui disent que cette chasse est cruelle et qui dépensent des millions de dollars pour lui nuire? Est-ce cela, le problème que nous avons en Europe? Est-ce qu'on parle de moralité publique parce que des gens sont scandalisés de notre façon de pratiquer cette chasse alors qu'ils font la même chose?
    Comment pouvons-nous faire du commerce dans le monde si l'UE peut nous infliger ce traitement, à nous qui chassons le phoque de la façon la moins cruelle au monde? Difficile de comprendre.
    Exact. Il y a eu une vaste campagne dans l'Union européenne pendant une longue période. L'interdiction décrétée par l'UE a été précédée d'interdictions dans deux ou trois pays, dont les Pays-Bas et un ou deux autres pays. L'interdiction s'est ensuite généralisée à toute l'UE. Il y a eu une grande controverse dans l'UE et beaucoup de publicité de la part de ceux qui dénoncent la chasse au phoque.
    En ce qui concerne le rapport du groupe spécial et l'appel, je dirai que le premier rapport, publié en novembre dernier, est le seul. Il n'y a eu qu'un seul rapport à ce jour. Le groupe a pris en considération les renseignements existants, la thèse des parties, l'information provenant de tiers et il a rédigé un long rapport sur ses conclusions et constatations. Ce rapport a été adopté. Nous sommes d'accord sur certains éléments du rapport, mais nous en rejetons d'autres.
    Le processus d'appel qui se déroule en ce moment — et il n'y en a aucun autre — nous donne l'occasion d'examiner l'analyse, la réflexion et la jurisprudence des membres du groupe spécial, pris collectivement. Il nous permet aussi d'expliquer où, selon nous, le groupe s'est trompé dans sa réflexion et quelles sont les conclusions fautives qu'il a tirées.
    Quelles sont ces conclusions fausses, selon vous?
    L'une des grandes préoccupations tient à l'interprétation de l'alinéa XXa) au sujet de la moralité publique, au niveau où le groupe place la barre pour qu'on puisse imposer une interdiction au nom de la moralité publique.
    Plus précisément, comme Kevin l'a dit, on emploie le terme « nécessaire » dans ce très court alinéa XXa). Il dit qu'il est nécessaire de protéger la moralité publique, quel que soit le libellé exact. Il y a donc un critère de nécessité. Nous avons soutenu, et c'est du reste ce qui nous inquiète beaucoup, que l'UE n'a pas respecté ce critère et que le groupe s'est trompé en concluant qu'elle l'avait respecté.
    Ces exceptions ne peuvent se faire que lorsqu'elles sont nécessaires et que les membres peuvent en montrer la nécessité pour parvenir à une fin légitime.
    Selon vous, ils ne peuvent pas le faire.
    Ils ne l'ont pas fait et ne peuvent pas le faire.
    Une autre préoccupation, c'est que, alors que le Canada a proposé l'idée... Nous avons fait cette proposition à l'Union européenne avant même le début des travaux du groupe spécial, lorsque, avant 2009, nous nous efforcions de défendre nos intérêts et de régler le problème. Avant l'entrée en vigueur de l'interdiction et même après 2009, nous avons préconisé auprès de l'Union européenne l'idée d'un régime de certification et d'étiquetage dans lequel...

  (1620)  

    L'Union européenne va-t-elle étudier cette proposition?
    Elle ne l'a pas vraiment retenue. À l'époque, nous avons aussi fait cette proposition dans nos observations au groupe spécial, disant que c'était un moyen moins restrictif pour le commerce qu'il fallait vraiment examiner.
    L'UE s'attaque à ce qu'elle perçoit comme un problème et le fait en imposant une interdiction. Nous disons que nous devrions travailler ensemble et élaborer un régime de certification et d'étiquetage qui peut être appliqué correctement et qui permet des échanges commerciaux légitimes. S'il est bien conçu et appliqué, ce régime fonctionnerait bien pour notre industrie, car il permettrait à tous ses éléments, c'est-à-dire la chasse par les Inuits et d'autres, dans d'autres régions de l'est du Canada, d'avoir accès au marché de l'Union européenne.
    Monsieur MacAulay, votre temps de parole est terminé.
    Je veux seulement...
    Vous avez eu 10 minutes, monsieur.
    Monsieur Leef.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    Je reviens brièvement sur une question que M. Chisholm a posée à propos de l'approche retenue par le gouvernement, du sérieux de cette approche. Arrive-t-il couramment qu'un ministre comparaisse à une audition de l'OMC comme celle-ci?
    Que je sache, ce n'est pas courant. Comme je l'ai dit, la ministre a dirigé la délégation. Elle a fait une brève allocution d'ouverture, après quoi l'avocat principal dans cette affaire, qui prend place à la table avec moi aujourd'hui, a présenté un exposé oral détaillé à l'organe d'appel. Cet exposé s'est accompagné, le mois dernier, d'un mémoire encore plus long.
    Notre appel repose sur la logique et des faits, je dirais. Le comité n'était pas sur les lieux et voudrait donc savoir dans quelle mesure a été utile la participation d'une ministre qui a des racines traditionnelles et culturelles, qui a une compréhension claire, une expérience pratique...? En effet, la ministre a une expérience directe et concrète. Elle peut participer aux échanges avec l'OMC. Est-ce utile?
    Comme vous le dites, l'organe d'appel va étudier les faits. Nous avons bon espoir qu'il rendra un jugement sage. Nous étions très bien représentés par tous les membres de notre délégation, le mois dernier, y compris par celle qui la dirigeait. Il est certain que la ministre connaît le dossier à fond, ce qui a probablement été mis à profit. Pour ma part, je n'étais pas membre de la délégation, mais je crois que l'expérience de la ministre a été mise à profit pendant les délibérations.
    L'UE a soutenu que le Groenland s'était prévalu des exemptions et que, au fond, c'est la faute du Canada s'il n'a pas profité lui aussi de l'avantage des exemptions proposées.
    Si je comprends bien, elle ne tient pas compte... Comme vous l'avez dit, elle tient compte du groupe qui participe à la chasse, mais non des méthodes employées. La chasse qui se pratique au Canada est durable, légale et éthique, et nous avons déployé des stratégies pour faire de la chasse au phoque une chasse sans cruauté.
    Comment le Groenland se compare-t-il au Canada en ce qui concerne cette chasse, l'absence de cruauté dans cette chasse? L'UE est-elle consciente de ce fait? Demande-t-elle au Groenland des documents sur la chasse sans cruauté chez elle, par opposition à ce qui se fait au Canada?
    Je vais laisser à mon collègue le soin de donner une partie de la réponse, mais je crois comprendre que l'UE ne vérifie aucunement si la chasse se pratique sans cruauté, car toute la chasse ou la récolte du Groenland est visée par l'exemption fondée uniquement sur l'origine ethnique ou l'ascendance des chasseurs. Ils n'ont donc rien d'autre à prouver pour se prévaloir de l'exemption.
    Le problème ou l'un des problèmes, pour le Canada, c'est que cette exemption n'a jamais été rendue applicable. Dans les faits et à d'autres égards, elle ne nous est pas offerte, et cela dépend aussi de la nature de notre industrie, de la chaîne d'approvisionnement, de la chaîne de distribution et de transformation. Et il y a aussi le fait que la chasse inuite au Canada a toujours représenté une infime portion de l'ensemble de cette activité.

  (1625)  

    Il y a de quoi être perplexe, cependant. L'UE s'appuie sur un principe moral pour restreindre cette chasse, mais elle ne se soucie pas particulièrement de la façon dont la chasse se pratique, avec ou sans cruauté. Peu lui importe comment les phoques sont tués pourvu que les chasseurs appartiennent à une certaine catégorie. En ce sens, l'UE s'engage dans une forme de discrimination, en disant comprendre la culture et la valeur en cause, mais il est très intrigant qu'elle déclare: « Nous agissons pour des raisons morales, mais peu nous importe comment les phoques sont abattus. »
    Il y a certainement là un problème, et il y a aussi un problème parce que... La réalité, c'est que, le Groenland se prévalant de cette exemption, il n'y a aucune limite de volume non plus. Donc l'effet de l'interdiction a été de détourner le commerce. Nous avons fait valoir ce point devant le groupe spécial et l'organe d'appel. Le commerce a été détourné au détriment du Canada et au profit d'endroits comme le Groenland, qui a pu se prévaloir de l'exemption, alors que, dans les faits et à d'autres égards également peut-être, cette exemption n'est pas à la disposition du Canada.
    Je suis sûr que l'UE protège bien son jeu et se refuse probablement à se lancer dans des hypothèses, mais a-t-on des indications, des signes de ce qu'elle ferait si l'OMC changeait d'avis et se prononçait en faveur du Canada dans ce dossier.
    Non, vous avez raison. Les parties protègent toujours leur jeu tant que les procédures se déroulent. Nous ferions la même chose.
    Je dirai franchement que nous nous intéresserons à toute la question de la mise en oeuvre du rapport ou de la décision de l'organe d'appel dès que nous connaîtrons la teneur du rapport. Pour l'instant, rien ne nous permet de deviner la stratégie ou les intentions de l'UE.
    La position de l'ITK sur la question est bien connue, mais j'ai entendu de la part de certains, du côté européen, dans le monde politique, que même si l'ITK dit que l'interdiction nuit au marché, ce n'est pas le sentiment général des chasseurs sur le terrain. Je ne suis pas d'accord. Je viens de l'Arctique, j'y passe du temps et je discute directement avec les chasseurs.
    Il est excellent qu'ils soient solidaires avec les chasseurs de l'Est. C'est important. L'OMC a-t-elle entendu le point de vue d'autres groupes, en dehors de l'ITK? A-t-elle reçu l'opinion de chasseurs individuels qui représentent des chasseurs de petites localités?
    Il existe certainement un mécanisme qui permet aux tiers intéressés, et pas uniquement aux membres de l'OMC, de présenter leurs observations. Dans cette affaire, l'industrie canadienne a présenté un mémoire, mais aucun groupe inuit ne l'a fait.
    Nous avons passé beaucoup de temps aujourd'hui à parler de la chasse inuite au Canada, mais il existe un énorme marché dans l'Est, et il y a beaucoup de Canadiens qui ne pratiquent pas la chasse traditionnelle selon la culture inuite.
    Cette interdiction des produits du phoque a des répercussions sur la transformation en aval. Il n'y a donc pas que la chasse, mais aussi toutes les activités en aval. Les chiffres que vous avez donnés tout à l'heure, c'est-à-dire 18 millions de dollars en 2006 et moins d'un demi-million de dollars en 2013, correspondent-ils à l'ensemble du marché ou simplement à la chasse même?

  (1630)  

    Ce sont les chiffres des exportations canadiennes. Je n'ai aucune information sur le marché intérieur de ces produits au Canada. Les chiffres rendent compte des exportations uniquement.
    Vous avez certainement raison. Nous croyons savoir que la chaîne d'approvisionnement, les secteurs de la transformation et de la distribution et d'autres éléments du circuit commercial ont été démolis par cette interdiction et que, pour tout rétablir au niveau atteint par le passé, il faudrait des investissements, un effort de remise en route et un regain d'intérêt. La grande question est de savoir ce qui pourrait inspirer cela au juste.
    Nous passons au tour où chacun a cinq minutes. M. Cleary d'abord.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins. Comme le président vient de le dire, avec des questions de cinq minutes, ce sera un tour rapide.
    Ryan vient de poser des questions intéressantes sur les chiffres qui ont été avancés. Je voudrais aussi revenir sur des questions que M. Chisholm a posées.
    Vous avez dit que les exportations canadiennes se sont élevées à 18 millions de dollars en 2006. Quel est le chiffre global des ventes au Canada et à l'exportation? Voilà une question.
    Ensuite, les 18 millions de dollars correspondent-ils aux exportations vers l'UE ou vers tous les marchés mondiaux?
    Aux exportations dans le monde entier.
    Des exportations de 18 millions de dollars sur les marchés mondiaux. À ce chiffre, combien peut-on ajouter de ventes au Canada?
    Il y a un instant, j'ai dit ne pas avoir cette information. On vient de me la communiquer. La voici donc.
    Les ventes combinées sont mesurées d'après ce qu'on appelle « la valeur au débarquement ». Ce sont les débarquements, en somme. La meilleure année a été 2006, avec 34,1 millions de dollars.
    Sur le marché intérieur?
    Ce sont les débarquements. Les produits ont été vendus sur les marchés canadien et d'exportation.
    J'essaie d'avoir des faits clairs. Ma question fait suite à celle de M. Chisholm.
    Vous avez dit qu'il était permis de vendre dans l'UE des produits du phoque du Groenland et de pays de l'Union européenne. Vous avez précisé que, au Groenland, la chasse est pratiquée par les Inuits, mais quels sont les chiffres du Groenland et de la chasse à l'intérieur de l'UE. La chasse dans l'UE est-elle pratiquée par des Autochtones, par les Inuits, où est-ce...?
    Je voudrais connaître les chiffres du Groenland et de l'UE, sur la valeur de cette chasse pendant la période visée par vos chiffres sur les exportations du Canada et ses ventes sur les marchés intérieurs.
    En Union européenne, la chasse est avant tout liée à la gestion des ressources marines.
    Cela veut dire les abattages?
    Oui.
    Pour ce qui est du nombre de phoques abattus en un an, nous avons des chiffres assez précis pour la Suède, mais je ne me souviens pas de chiffres en ce qui concerne expressément le nord de l'Écosse. En Suède, ce doit être autour d'une centaine de têtes. C'est très modeste. En Finlande, c'est environ 600.
    Le nombre de phoques abattus dans l'UE est plutôt limité.
    Si vous n'avez pas ici les totaux pour la Suède et les autres pays... Monsieur le président, pouvons-nous demander aux témoins de nous communiquer les chiffres totaux, tant pour les animaux abattus que pour la valeur des produits?
    Je ne suis pas sûr que nous ayons, par suite de l'affaire plaidée auprès de l'OMC, la valeur des produits, mais il est certain que c'était environ une centaine de phoques abattus, et pour la Finlande, c'était environ...

  (1635)  

    C'était 100 bêtes abattues ou 100 phoques?
    C'est le nombre de phoques abattus. Puis, c'était environ 600 en Finlande.
    Quant à la période en cause, il existe des chiffres annuels récents.
    Pour simplifier, alors, si, comme homme politique de Terre-Neuve-et-Labrador, comme homme politique canadien, je parle de l'hypocrisie de l'Union européenne, qui a interdit les produits du phoque du Canada, tout en tolérant les abattages au Groenland et en Union européenne même...
    Quel est le nombre total d'animaux abattus et la valeur totale, en dollars, des produits dérivés de ces phoques abattus?
    Pour l'UE même, c'est de l'ordre que je viens d'indiquer.
    Le Groenland publie des chiffres de façon plus systématique et nous pouvons communiquer cette information au comité. Mais au Groenland, on ne pratique pas que l'abattage pour la gestion des ressources marines. Il y a en fait une chasse commerciale au phoque.
    Une dernière question rapide.
    À écouter la propagande qui a cours là-bas, on sait ce que la population de l'Union européenne pense de la chasse au phoque au Canada. Quel a été l'impact sur les produits canadiens du poisson vendus dans l'UE, les Européens n'étant pas précisément comblés d'aise par cette chasse?
    Vous avez compris ma question?
    Je n'ai aucune information qui montre que nos exportations de poisson et de fruits de mer ont eu à souffrir de la chasse au phoque.
    Craint-on que cela ne se produise à cause de l'accord de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne? A-t-on des craintes à ce sujet?
    Ce que je peux vous dire de l'Accord économique et commercial global, c'est que, sans ambiguïté, il nous procurera un meilleur accès au marché de l'UE grâce à l'élimination des droits tarifaires sur une large gamme de produits dans des délais assez brefs, voire dans l'immédiat, puis au long de la période de mise en oeuvre, qui s'étalera sur un certain nombre d'années.
    Je le répète, aucune information ne me permet de dire que nos exportations de poisson et de fruits de mer ni de quelque autre produit, aient été compromises par l'affaire de la chasse au phoque.
    Merci beaucoup, monsieur Cleary.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Kamp.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs. Je n'ai que quelques questions. Elles sont plus faciles que les dernières, et ce sera bien.
    Pour commencer, pouvez-vous me dire quelle était la composition du groupe spécial qui a rendu la première décision? Qui en faisait partie? Comment a-t-on choisi les membres? J'ai ensuite une question semblable pour l'organe d'appel. Est-ce le même groupe de pays, par exemple, qui y ont des représentants?
    Les audiences les plus récentes ont-elles eu lieu en public? Y a-t-il des transcriptions publiques, pour quiconque voudrait les consulter?
    Commençons par là.
    Désolé de gâcher un peu de votre temps de parole pour chercher la réponse. Dans les deux cas, il s'agit de groupes de trois membres, tant le groupe spécial que l'organe d'appel. Ils proviennent de pays membres de l'OMC. Les membres du groupe spécial venaient de la Suisse, de Singapour et de l'Australie. Les membres de l'organe d'appel représentent la Chine, la Corée et les États-Unis. Ils sont nommés par le directeur général de l'Organisation mondiale du commerce.
    La marche suivie par le groupe spécial peut varier légèrement en fonction des plaignants et des intimés en présence, mais, dans le cas de l'UE et du Canada, les deux parties sont d'accord pour assurer une solide transparence dans les délibérations du groupe spécial. Concrètement, cela veut dire que tous les mémoires sont à la disposition de ceux qui veulent en prendre connaissance et que le public peut assister aux délibérations. Il existe un mécanisme, une sorte de télévision en circuit fermé, pour les parties intéressées qui veulent participer.
    Cela répond à votre question?

  (1640)  

    Et les transcriptions sont-elles...?
    Les délibérations ne sont pas consignées. Il n'y a pas de transcription, mais, je le répète, les observations écrites peuvent être consultées.
    Vous avez dit que nous devrions obtenir une réponse en mai, je crois. Si nous avions gain de cause, quelle serait la situation? Selon vous, est-il possible que, en ayant gain de cause, nous retrouvions d'une façon ou d'une autre les chiffres de 2006, ou est-ce irrémédiable?
    Pour répondre à la première question, je dirai que, si l'organe d'appel se prononce en faveur du Canada et de la Norvège, l'UE devra rendre son régime conforme. Elle disposera d'un certain temps pour le faire, comme cela arrive normalement dans tout dossier soumis à l'OMC. Il y a alors souvent des lois et des règlements en cause, et nous savons qu'il faut un certain temps pour les modifier, peu importe pourquoi il faut le faire. L'UE devrait donc se conformer dans des délais raisonnables si les choses prenaient cette tournure.
    Quant à votre deuxième question sur ce que l'avenir peut nous réserver, je crains qu'elle ne soit très difficile. Il faudrait pouvoir faire des prédictions et il y a un certain nombre de variables liées à des décisions humaines, à des objectifs, à des facteurs fondamentaux du marché, ce qui constitue un ensemble plutôt important d'incertitudes.
    Oui, c'est la réponse que j'attendais. Merci beaucoup.
    Monsieur MacAulay.
    Merci beaucoup.
    Pour donner suite à la même question, si l'appel échoue, que se passe-t-il? Si nous obtenons gain de cause, l'UE peut-elle interjeter appel?
    Il n'y a pas d'autre appel possible.
    Pas d'autre appel, et elle doit se conformer.
    Elle doit se conformer.
    Si nous perdons, avons-nous d'autres possibilités?
    À ce moment-là, nous évaluerons certainement les possibilités qui s'offrent à nous, mais je ne suis pas en mesure de dire ce que nous ferions ni ce que pourraient être les prochaines étapes.
    Merci beaucoup.
    Vous avez dit aussi que l'AECG nous donnerait un meilleur accès au marché. Le dossier du phoque a-t-il surgi pendant les négociations? Dans l'affirmative, comment l'a-t-on abordé? S'il n'a pas été abordé, pourquoi?
    Pour répondre, je reviens à des réponses antérieures: il y a une différence fondamentale entre la négociation de dispositions et d'obligations qui constituent un traité et l'exécution d'une mesure qui semble violer une obligation commerciale internationale.
    Il n'est pas étonnant que la démarche entreprise auprès de l'OMC se situe sur un tout autre plan. Le fait que le Canada fasse valoir ses allégations voulant que l'UE manque à ses obligations commerciales internationales est un dossier tout à fait distinct de la négociation de ces engagements et d'un nouveau traité complet en soi.

  (1645)  

    Si je vous comprends bien, vous dites que l'accord porte sur l'ensemble du commerce. Est-ce exact?
    Il y a une question de négociation et une question d'exécution.
    Après l'annonce que l'AECG allait être signé, les attentes étaient grandes. Nous allions pouvoir exporter davantage de poisson.
    Ma seule question est la suivante: au cours des négociations, a-t-il jamais été question de la chasse au phoque au Canada? Sinon, je me demande pourquoi? Cela ne ferait-il que nuire aux négociations? Ce dossier ne représente pas une valeur suffisante pour être discuté dans le cadre de l'AECG ou était-il déplacé d'en discuter?
    Je n'ai pas participé aux négociations sur l'AECG. Pour ma part, je dirais que, comme il s'agissait de négociations, ce dossier aurait été hors sujet, car il porte en réalité sur l'application des obligations existantes de l'UE dans le cadre de l'OMC, qui existent depuis des années. Je ne suis pas étonné que la question n'ait pas été abordée. Cela aurait été hors sujet, d'après moi, dans une négociation, puisqu'il porte plutôt sur l'application d'engagements commerciaux.
    Vous me dites au fond que la négociation ne traite pas de produits particuliers comme le blé, le grain ou le porc. Ces questions n'ont pas été soulevées.
    Elles l'ont été, bien sûr, puisque les négociations doivent, par définition, porter sur des produits particuliers. Je le répète, il s'agit d'établir des engagements dans un nouveau traité à l'égard du blé, du porc ou de n'importe quel produit, par opposition à une mesure, c'est-à-dire une loi, un règlement ou une décision, qui viole un engagement existant. C'est de cela qu'il s'agit dans ce cas-ci.
    Les règles du commerce entre le Canada et l'UE sont celles de l'OMC, l'assise très large sur laquelle elles reposent. C'est le mécanisme de loin le plus approprié et efficace à employer pour amener l'UE à se raviser, parce qu'elle déroge aux règles.
    Quels marchés reste-t-il pour nos produits du phoque?
    Il y a des marchés dans l'est de l'Europe, à l'extérieur de l'UE. Le marché turc absorbe un faible volume. En ce moment, les volumes sont toujours relativement peu importants par rapport à ce qu'ils ont été. Il y a la Chine et, dans une certaine mesure, la Turquie. Il n'y en a pas tellement.
    Mais ce sont de faibles volumes.
    Effectivement, parce que toute l'industrie s'est tellement contractée.
    À propos des droits tarifaires...
    Merci, monsieur MacAulay. Votre temps de parole est terminé.
    Messieurs, au nom du comité, je vous remercie d'avoir accepté de comparaître aujourd'hui. Pour reprendre les termes de M. MacAulay, merci de votre détermination, et merci également d'avoir comparu et d'avoir répondu aux questions des membres du comité.
    Messieurs Thompson et Hildebrand, je crois que vous vous êtes engagés à communiquer des chiffres sur le Groenland. Si vous vouliez bien les transmettre au greffier, nous vous en serions reconnaissants. Nous les communiquerons aux membres du comité.
    Merci beaucoup encore une fois, au nom des membres du comité.
    Comme il n'y a pas d'autres travaux, la séance est levée.
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